Enjeux et pistes de solutions

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Enjeux et pistes de solutions Sous la direction scientifique de Michel Trommetter Directeur de recherche à l’INRA Document réalisé avec le soutien de : Climat et Biodiversité Acteurs d’aujourd’hui et de demain à la croisée des enjeux du climat et de la biodiversité G A Z À E F F E T D E S E R R E

Transcript of Enjeux et pistes de solutions

  • Enjeux et pistes de solutions

    Sous la direction scientifique de Michel TrommetterDirecteur de recherche lINRA

    Document ralis avec le soutien de :

    Climat et Biodiversit

    Acteurs daujourdhui et de demain la croise des enjeux du climat et de la biodiversit

    GAZ EFFET DE SERRE

    Couverture_VF.indd 1 24/06/2015 11:27:20

  • RemerciementsCet ouvrage, issu des travaux du groupe de travail Biodiversit-Economie

    dORE, est le fruit du travail de nombreux adhrents dORE, qui lont enrichi par leur partage dexpriences.

    ORE tient remercier tout particulirement Claude Fromageot et Michel Trommetter, co-Prsidents du groupe de travail Biodiversit-conomie pour leur engagement et leur vision stratgique dans llaboration de cet ouvrage, ainsi que Hlne Leriche, Responsable Biodiversit-conomie au sein dORE pour son implication essentielle et la coordination de ce document.

    Doivent tre galement remercis :

    les experts extrieurs et scientifiques pour leur contribution : Luc Abbadie, James Aronson, Monique Barbut, Gilles Buf, Bruno David, Nicolas Buclet, Nathalie Frascaria-Lacoste, Jean Jouzel, Gilles Martin, Jean-Franois Silvain, Michel Trommetter ;

    les entreprises et collectivits territoriales qui ont accept de tmoigner dans cet ouvrage : Crdit Coopratif, Eco-origin, EDF, FSC, GrDF, Pierre Fabre, Rgion Nord-Pas de Calais, Rgion Rhne-Alpes, Saf agriDes, Sch environnement, Veolia, Vertdco, Yves Rocher ;

    les entreprises qui ont contribu au financement de cet ouvrage : EDF, GrDF, Sch environnement, Veolia.

    Merci enfin, pour leur collaboration active la ralisation de cet ouvrage : Cdric Palacio-Vidal, Ccile Couteau et toute lquipe ORE.

    CONSEIL & COMMUNICATION

    DVELOPPEMENT DURABLE - RSE

    Entreprise graphique

    Sommaire

    Linterdpendance du climat et de la biodiversit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 4Le climat : un quilibre dynamique favorisant la vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 4La biodiversit : volutions du vivant et du climat couples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 5

    Des enjeux majeurs, des dfis indissociables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 6Les enjeux climatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 6

    Tmoignage de Jean Jouzel

    Les enjeux biodiversit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .P 7Tmoignage de Gilles Boeuf

    Les rtroactions du systme climat-biodiversit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 8Tmoignage de Bruno David

    Les enjeux humains face aux changements globaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 10Tmoignage de Luc Abbadie

    Les pistes de solutions face au changement climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 12Un lan mondial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 12

    Tmoignage de Jean-Franois Silvain

    Les cadres et incitations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 13Tmoignage de Monique Barbut

    Tmoignage de Gilles Martin

    Tmoignage de Michel Trommetter

    Les initiatives prises par les acteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 15Tmoignage de Nicolas Buclet

    Les pistes dattnuation : rponses concrtes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 15Retours dexpriences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p 16

    Sch environnement, Pierre Fabre, Yves Rocher, Saf agriDes & GrDF, FSC, Crdit coopratif

    Les pistes dadaptation : rponses concrtes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 22Tmoignage de James Aronson

    Tmoignage de Nathalie Frascaria-Lacoste

    Retours dexpriences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 24Rgion Rhne-Alpes, EDF, Rgion Nord-Pas de Calais, Vertdco, Eco-Origin, Veolia

    Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p 30Traduction : Arabel Borel

    Mise en page et impression Ralisation des schmas

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    Le risque biodiversit pse trs lourd dans le dossier climatique. Est-il besoin de rappeler que le rchauffement climatique, et plus gnralement les drglements plantaires, posent srieusement la question dune sixime extinction de masse des espces. La liste rouge des espces menaces dextinction compte dj le quart des mammifres, un oiseau sur huit, le tiers des amphibiens, de nombreuses espces vgtales et des cosystmes entiers.

    Changement climatique, rosion de la biodiversit, ces enjeux environnementaux sont des enjeux humains. Notre mode de vie est largement responsable de ces changements globaux. Nos choix de dveloppement perturbent de faon importante et profonde lcologie de la plante. Nous en sommes responsables, que nous en soyons conscients ou non. Mais les populations humaines sont galement victimes de ces changements environnementaux. Les dplacs climatiques en sont les douloureux tmoignages. Un statut juridique doit leur tre trouv.

    Association multi-acteurs entreprises collectivits territoriales, les rflexions menes depuis plus de 20 ans par ORE, ses adhrents et experts se poursuivent ici et constituent lapport dORE aux ngociations climatiques de la COP 21. Outil de sensibilisation et de mise en perspectives des enjeux et pistes de solutions, le prsent document sinscrit dans les travaux de la confrence scientifique internationale Our common future , dans le cadre dun vnement organis conjointement entre la FRB et ORE sur la thmatique des interactions entre Climat et Biodiversit. En complment, il importe de rappeler que la plateforme franaise du Global Partnership for Business & Biodiversity dveloppe par ORE permet chaque acteur de tmoigner de ses bonnes pratiques et actions : cette plateforme est user sans modration afin de constituer lindispensable rseau des solutions biodiversit.

    Par leur interdpendance, le Climat et la Biodiversit sont le socle de toute Vie sur Terre. Il est indispensable que la Biodiversit sinvite la Table des ngociations de la COP 21. Climat et Biodiversit se conjuguent ensemble. Puisse le prsent document y contribuer. Merci tous ses contributeurs pour la pertinence de leurs analyses et regards.

    Nous sommes aujourdhui une croise des Chemins. Il nous appartient tous, indivi-duellement et collectivement, de rendre notre Avenir commun possible : nouveaux modes de production et de consommation, renforcement de la RSE, respect de la biodiversit. Il ny a plus de temps perdre, le Temps est lAction rendue ncessaire et vitale.

    Pour ce qui est de lavenir, il ne sagit pas de le prvoir, mais de le rendre possible Antoine de Saint Exupry

    Trs amicalement chacun et chacune. Patricia Savin

    Prsidente dORE

    La biodiversit est une thmatique majeure dans nos travaux depuis plus dune dizaine dannes. Pionnire en 2006, lassociation a cr le groupe de travail biodiversit et conomie avec deux objectifs : montrer linterdpendance des organisations vis--vis de la biodiversit et intgrer la biodiversit dans les stratgies conomiques. Les contri-butions du rseau ont notamment t publies plusieurs reprises, en particulier lors de deux ouvrages consquents

    Intgrer la biodiversit dans la stratgie des entreprises paru en 2008, et La gestion de la biodiversit par les acteurs : de la prise de conscience laction paru en 2013. Aujourdhui, une thse ORE intitule Biodiversit et stratgie des organisations : construire des outils pour grer des relations multiples et inter-temporelles pose notamment les jalons de lintgration des cosystmes dans la comptabilit financire, quand le groupe de rflexion prospective se consacre dsormais linterface des dynamiques dacteurs avec celles des territoires. Dans ce cadre, lvolution de la biosphre sous leffet des drglements climatiques et ses consquences pour lhumanit, sinvitent naturellement dans nos rflexions.

    Que ce soit pour rappeler combien le climat et la biodiversit sont lis ou pour souligner les importants bouleversements environnementaux et humains actuelle-ment en jeu, le propos de ce nouvel ouvrage est clair par les tmoignages de plusieurs experts qui ont choisi daccompagner notre pense. En sappuyant sur les retours dexpriences concrets de nos adhrents, louvrage propose certaines pistes dactions. Les acteurs que nous rassemblons au sein dORE, mettent dores et dj en uvre une meilleure gestion de la biodiversit et du changement climatique, de faon directe ou indirecte, pouvant relever de lattnuation ou de ladaptation. Ainsi, il nous a sembl essentiel de valoriser ces initiatives qui sont aussi bnfiques sur le plan conomique : nous avons constat travers nos diffrents travaux combien les organisations, prenant en compte une vision stratgique cosystmique, sinscrivent dans une trajectoire de durabilit forte.

    A travers ces crits dmontrant la capacit des acteurs innover et formuler des recommandations auprs des dcideurs comme des autres agents conomiques, nous esprons donner envie dautres de sengager en faveur du climat et de la biodiversit.

    Au plaisir de vous retrouver bientt.

    Trs cordialement toutes et tous et trs bonne lecture.

    Nathalie Boyer Dlgue gnrale dORE

    ditoLe Mot de la Prsidente

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    RAYONSSOLAIRES

    renvoys

    vers le sol

    GAZ EFFET DE SERRE

    absorbs

    RAYONSINFRAROUGES

    retenus

    renvoysVAPORATION

    VAPO-TRANSPIRATION

    Linterdpendance du climat et de la biodiversitPlante bleue du systme solaire, la Terre abrite la vie sous la protection de son atmosphre . Les rapports entre atmosphre et biosphre se sont tisss au cours dune histoire millnaire dont les glaces et fossiles tmoignent . Il nous est possible aujourdhui de lire ce systme complexe en parlant de climat dune part, de biodiversit dautre part sans omettre que lun et lautre ne peuvent se penser sparment tant les interactions et interdpendances entre eux sont multiples . Il est dailleurs impossible de concevoir un tre humain sans son environnement ; il en dpend et dabord par lair quil respire et dont il modifie la composition.

    Depuis la nuit des temps , la Terre a connu diffrents climats globaux, rythms par plusieurs priodes glaciaires comme en atteste la paloclimatologie . Inclinaison de la plante par rapport au soleil, effet de serre de plusieurs gaz atmosphriques, masses et courants ocaniques, capaci-t de la surface dabsorber ou rflchir les rayonnements solaires (albdo) sont quelques-uns des lments majeurs du climat global.

    De la formation de latmosphre primitive lapparition de la vie, lactivit du soleil aurait t plus faible apportant moins dnergie et de chaleur, alors que leffet de serre tait plus important : les gaz atmosphriques issus de lactivit tellurique et lvaporation des ocans absorbaient et renvoyaient la majeure partie de la chaleur mise par la Terre (rayonnement infrarouge). Ainsi, depuis ce temps, les changes de chaleur entre la surface terrestre et le systme solaire sont confins par la couche de gaz effet de serre de latmosphre.

    Parmi les grands cycles de la matire (les cycles bio-gochimiques), le cycle de leau et celui du carbone sont majeurs pour comprendre lvolution passe et future du climat. La vapeur deau et le CO2 entrent dans la constitution de latmosphre et participent son effet de serre.

    Cet effet de serre, responsable dune relative stabilit des tempratures sur Terre, a permis lapparition de la vie. Or le monde vivant participe et modifie les relations entre la surface

    terrestre et latmosphre ; les changes de chaleur et de gaz conditionnant en retour la vie. Ainsi la prsence du vivant redessine les surfaces et leur albdo. Le cycle de leau comprend dsormais lvapotranspiration des vgtaux et animaux. Celui du carbone est profondment modifi par la photosynthse des vgtaux chlorophylliens. Elle leur permet en effet de capter du carbone atmosphrique pour construire de la matire vivante (organique) et rejeter de loxygne. Le monde vivant participe la production de chaleur et de CO2 par la respiration. Les flux, les quantits et les ratios de gaz effet de serre voluent alors. Une partie du CO2 est ainsi capte par la surface terrestre, stocke dans la matire vivante (vg-taux et tout le rseau alimentaire qui en dcoule). Cette matire organique se trouvera au cours des sicles pour partie intgre la crote terrestre sous forme de matire fossile. A la surface de la Terre les changes continuent. La quantit de gaz effet de serre squilibre permettant un maintien de la temprature moyenne du globe autour de 15C et de leau sous forme liquide.

    Cet quilibre global entre surface terrestre et atmosphre, connat quelques variations (petit ge glaciaire par exemple), mais reste suffisamment stable pour permettre le dveloppe-ment dune riche biodiversit plantaire.

    Alors que chacun vit sur Terre sous un climat bien dfini (continental, ocanique, tropical) qui conditionne au quotidien la mto, il est aujourdhui question de changement climatique . Un chan-gement climatique lchelle du globe, une modification rapide et forte de lensemble des lments qui rgissent les masses dair et deau sur cette plante .

    Reprsentation de la plante au JurassiqueLe climat : un quilibre dynamique favorisant la vie

    Dveloppement de la biodiversit terrestre et aquatique Accumulation et fossilisation de la matire organique terrestre et marine dans le sous-sol

    Gaz effet de serre et leurs consquences vis--vis du rayonnement solaire reu, des rayons infrarouges mis par la biosphre, de la vapeur deau issue de lvaporation des surfaces

    aquatiques et de lvapotranspiration du vivant.

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    RAYONSSOLAIRES

    renvoys

    vers le sol

    GAZ EFFET DE SERRE

    absorbs

    RAYONSINFRAROUGES

    retenus

    renvoysVAPORATION

    VAPO-TRANSPIRATION

    La biodiversit : volutions du vivant et du climat couples

    Il y a prs de 4 milliards dannes, apparais-saient les premires formes de vie. Sa masse et sa distance au soleil permettent notre plante dabriter leau sous ses trois tats (glace, liquide, vapeur deau). Or toutes les formes de vie sont constitues deau et participent au cycle de leau. Cest galement la temprature moyenne de la Terre, tempre dans ses carts grce latmos-phre, qui permet la vie dexister. Quelles aient la temprature du milieu extrieur ou que leur physiologie les rende capables de la contrler (homothermes), les es-pces sont intimement dpendantes de la temprature extrieure et ses variations. Ainsi toute hausse de temprature acclrera les rac-tions chimiques, y compris au sein des cellules de lorganisme, quand une baisse trop importante pourra tre ltale par transformation de leau en glace avec perturbation des plus petits lments constitutifs de la matire vivante. De mme le pH, qui rend compte du caractre acide et basique dun milieu aqueux, joue un rle majeur dans le dveloppement de la vie. Si le pH des milieux aquatiques est fondamental pour les organismes qui les habitent, il intervient galement dans de nombreux fonctionnements cellulaires de tout tre vivant. Or le pH des cellules comme celui du milieu ambiant est influenc par les phnomnes de photosynthse et de respiration.

    Ainsi, au cours de sa vie et sa mort, chaque individu participe aux cycles de lnergie et de

    la matire du monde vivant. Photosynthse et respiration sont des processus importants pour le cycle du carbone, de leau et donc pour les changes gazeux et de chaleur entre surface ter-restre et atmosphre. Au gr des contraintes et de ses capacits de reproduction, lADN est la brique lmentaire dune formidable diversit de formes et modes de fonctionnement du vivant. Le simple examen de la diversit du vivant, connu, montre ce

    grand potentiel adaptatif et les prouesses physiologiques et dorganisation. Sans

    cesse en interaction avec son milieu inerte et les autres formes de vie, chaque individu, microscopique ou aussi imposant que les grands dinosaures, interagit avec cette plante. Il participe la construction

    dun monde vivant, lmergence de la diversit dans des milieux en

    changement.

    Lune des mailles de ce tissu vivant pla-ntaire est lespce humaine qui va peu peu coloniser nombre de territoires tout autant quelle se diversifiera dans ses cultures et modes de vie selon les territoires et avec la biodiversit qui loccupe. Le nomade chasseur-cueilleur, deviendra sdentaire et agriculteur-leveur, faonnant les paysages, slectionnant une part de cette biodiversit quon appelle alors domestique. Il participera par ses implantations et ses pratiques lvolution de la biosphre lchelle des territoires (e.g. barrages modifiant les rythmes de crue des fleuves, gestion forestire, cultures).

    Des fonds sombres et chauds des failles ocaniques aux dserts, en passant par les sols ou les villosits des intestins, le monde vivant habite la Terre et la faonne au gr de ses capacits dvolution . Cette formidable diversit et les multiples interactions qui la sous-tendent et la relient latmosphre et la lithosphre, constituent le tissu vivant de la plante .

    Mto n'est pas climat

    Le temps quil fait, la mto, se rapportent ltat de latmos-phre (pression atmosphrique, temprature, humidit) un moment donn sur un territoire particulier. Les chelles temporelle et spatiale sont limites. Cest ce que nous voyons lorsque nous levons la tte et regardons le ciel, cest ce que nous prsente le bulletin mto quotidien.

    Le climat est une moyenne des donnes mtorologiques. Lchelle temporelle est plus longue (des dizaines dannes au moins) ainsi que lchelle spatiale (pays, continent, grande r-gion). Ltude du climat est reprise et synthtise par les rapports du GIEC (Groupe dexperts Intergouvernemental sur lvolution du Climat) pour qualifier et quantifier le changement climatique.

    Gaz effet de serre : positifs ou ngatifs ?

    La composition gazeuse de latmosphre lui confre la capaci-t de conserver une partie de la chaleur que le soleil procure la plante et celle produite par la biosphre. Ce phnomne naturel, cet effet de serre , limite les variations de tempratures la surface de la Terre et permet le dveloppement de la vie. Les principaux gaz responsables de cet effet de serre sont la vapeur deau, le gaz carbonique, le mthane, le protoxyde dazote, lozone stratosphrique et les gaz fluors. La biodiver-sit participant aux cycles de leau, du carbone et de lazote, influence cette couverture plantaire par les flux changs tout autant que les stocks (matire organique) quelle constitue par les lments chimiques impliqus. Mais les activits humaines ac-tuelles, industrielles, agricoles (e.g. lutilisation de la matire organique fossile) produisent rapidement une grande quantit de gaz effet de serre (e.g. CO2, CH4) qui accentuent leffet de serre naturel (effet de serre additionnel) et participent lacc-lration du changement climatique.

    Un formidable tissu dinteractions entre climat et biodiversit mais fragiles

    Aquarium de la Porte Dore

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    Perturbation du climat enclenche, crise dextinction de la biodiversit, engrenage des rtroactions, effritement des capacits adaptatives du tissu vivant plantaire, lespce humaine voit son socle de vie seffacer sous ses pieds. Nous sommes entrs dans lanthropocne depuis la fin du XVIIIme . Les humains sont dsormais une force plantaire mais ils ne restent pas moins dpendants de faon vitale de cette plante et son devenir. Les dfis sont nombreux et divers, prendre de front et de concert du fait des interac-tions qui les sous-tendent. Lenjeu est simple et pos lhumanit entire : le devenir du vivre ensemble sur cette plante.

    Les enjeux climatiques

    A partir de la fin du XVIIIme sicle, la rvolution industrielle, la capacit utiliser les matires fossiles pour produire de lnergie a accompagn le dve-loppement des technologies et donn lillusion de possibles sans contraintes ni limites. Considres comme des puits sans fond, les matires fossiles extraites comme la biosphre ont alors t consom-mes dans une telle mesure que les grands qui-libres climatiques sen trouvent aujourdhui fortement perturbs.

    Consommation de ptrole, gaz ou charbon, des-truction de forts, toutes activits qui rejettent dans latmosphre des quantits de carbone et notamment de CO2 renforcent leffet de serre.

    Les activits et modes de consommation humains participent la production excessive de gaz effet de serre. Parmi les plus metteurs, lagriculture dite moderne, par ses pratiques culturales et dlevages, la destruction de milieux notamment forestiers et lutilisation de produits phytosanitaires est lorigine de grandes quantits de CO2, CH4, N2O. Lindustrie et la production de biens de consommation sont gourmandes galement en matires fossiles. Elles ac-compagnent lurbanisation, les transports et changes grande chelle et de ce fait les modifications des territoires impliqus dans les cycles biogochimiques.

    Ainsi les gaz effet de serre saccumulent dans latmosphre, augmentant cette couverture qui entoure la Terre alors que les activits humaines produisent dans le mme temps plus de chaleur. La temprature moyenne de la plante slve. Ce phnomne rvle un changement global des cycles de la matire, et entrane une modification des grands quilibres entre ocans, atmosphre et terres merges. Cest le climat global et ses dcli-naisons locales qui sont en train de changer. Les courants atmosphriques comme ceux de locan en sont perturbs. Les connaissances du climat, les observations actuelles ainsi que les modles thoriques permettent dannoncer un changement climatique, un changement de la variabilit naturelle des climats actuels.

    Peu prvisibles lchelle locale, les cons-quences sont, de lavis de tous, une forte augmen-tation des risques pour le monde vivant. Acidification des ocans, monte des eaux, fonte des glaces, vnements extrmes plus forts, plus nombreux, d-sertification accentue ces changements globaux sont aujourdhui plus rapides quils ne lont jamais t sur Terre et samplifient au fur et mesure que les gaz effet de serre saccumulent, avec des effets rebonds et retards qui justifient dautant plus lalarme du GIEC.

    Bien loin des strates atmosphriques, cest au niveau des humains quil faut chercher aujourdhui les causes du changement climatique dont le GIEC (Groupe dexperts intergouvernemental sur lvolution du climat) se fait lcho. Partageant une histoire millnaire avec cette plante, nos socits ont rcemment perturb grande chelle une dynamique structure par une certaine inertie, des ractions en chane, en cascade celle du climat.

    Jean Jouzel, Directeur de Recherches au CEA, Vice-Prsident du Groupe Scientifique du GIEC

    Le climat ? De quoi parle-ton ?

    Climatologue, impliqu dans la reconstruction des cli-mats passs partir de lanalyse des glaces polaires, je me suis intress lavenir de notre climat en rponse laugmenta-tion de leffet de serre lie aux activits humaines. La raison en est simple : le pass est source dinformation pour qui sin-tresse au rchauffement climatique en cours et venir. Mais je me suis longtemps limit aux aspects sciences physiques

    de ce rchauffement et ses consquences en terme de tempratures, de prcipitations, de circulation atmosphrique, de niveau de la mer, Il ma t reproch proba-blement juste titre - de ne pas parler assez du vivant et en particulier du lien entre rchauffement climatique et perte de biodiversit.

    Je le fais dsormais chacune de mes confrences en mappuyant sur le rsum pour les dcideurs du 5me rapport du GIEC. Il compare notamment la vitesse maximale de migration des espces - faune ou flore celle du dplacement du climat. Pour certaines dentre elles arbres, plantes herbaces, rongeurs, primates la capacit de dplacement devient, dans la seconde partie de notre sicle, infrieure la vitesse de dplacement des isothermes dans le cas du scnario le plus metteur. Sauf intervention humaine, si rien ntait fait pour lutter contre le rchauffement climatique, ces espces ne devraient pas tre mme de survivre. La perte de biodiversit, dj trs marque, sera exacerbe par le rchauffement venir.

    Selon les tudes, cest entre un cinquime et un tiers des espces qui seraient menaces dextinction dici 2050. Le phnomne samplifiera jusqu la fin du sicle. Premiers cosystmes en danger : les espces montagnardes (notamment les amphibiens des fo-rts tropicales), les espces polaires (ours, oiseaux marins, mammifres marins), locan du sud et les coraux. Le constat est dautant plus douloureux que lon sait quau-del dun certain seuil despces disparues cest tout lcosystme qui seffondre.

    Des enjeux majeurs, des dfis indissociables

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    Les enjeux biodiversit

    La capacit des humains simplanter et se dvelopper sur la plante a connu une trs forte acclration grce aux technologies ds la fin du XVIIIme qui na fait que croitre sans prise de conscience des risques et limites inhrents une telle extension. Pourtant tout organisme est limit dans son dveloppement par les ressources dont il dispose (en termes despace, de nourriture) et par ses interactions avec la biosphre.

    Les grandes distances se sont raccourcies permettant des changes et transports entre milieux jusque-l loigns et qui possdaient des tissus vivants forts diffrents. La mosaque de la biosphre a commenc suniformiser. La force des machines a dcupl notre capacit de modi-fication de lcosystme (e.g. transports, grandes cultures, urbanisation). Celle de lindustrie nous a apport des produits en quantit si importante que les cycles biogochimiques ne peuvent les absorber (e.g. CO2, engrais azots) quand ils ne sont pas artificiels et ne font que saccumuler dans les cosystmes, responsables alors de pollutions et perturbations des cycles biogochimiques (e.g. plastiques, perturbateurs endocriniens, trou dans la couche dozone).

    Laccs aux nergies fossiles et aux mtaux de la crote terrestre, indispensables pour produire toujours plus dnergie et des matriaux, a justifi la destruction de nombre dcosystmes (e.g. les forts pour leur sous-sol) impliqus non seulement dans la survie de la biodiversit, celle des popula-tions locales mais jouant galement un rle dans le climat et la capacit des territoires rpondre aux changements venir.

    Or notre vie et survie sont totalement lies au devenir des autres organismes vivants et la robustesse de ce tissu plantaire. Loxygne que nous respirons, notre nourriture et sa digestion, notre cadre de vie et nos cultures, tous nous rattachent la biodiversit et son devenir. On parle aujourdhui de 6me crise dextinction mais le phnomne est bien diffrent des prcdentes crises. Cette fois nous y prenons part et en sommes les premiers responsables. Force plantaire, lhumain menace la biodiversit en la dtruisant directement (prlvements excessifs, pollutions) et/ou modifiant tant les milieux quil nest plus possible aux autres organismes de sy implanter, y crotre et sy reproduire (e.g. destruction dhabitats, des continuits cologiques). Localement ou au niveau global cest lensemble du systme qui seffrite et menace de seffondrer alors quil nous est vital. Ainsi les changements globaux tels que le drglement climatique ou la destruction de la rsilience des milieux participent de forts dsquilibres pouvant mener des basculements de fonctionnement des cosystmes, leur destruction et/ou leur invasion par des espces incontrlables.

    Au sein de la biosphre, lhumain est devenu une force de perturbation sans gal, modifiant lensemble du tissu vivant dans ses moindres recoins . Directement et indirectement la biodiversit est touche par nos activits une chelle et une rapidit jamais atteintes par le pass . Les prlvements excessifs comme la perturbation des milieux entament les capacits de vie et de reproduction des organismes ; les rseaux dinteractions se dstructurent, tous les cosystmes sont touchs . Cest le potentiel dvolution du vivant qui est en jeu alors que nous en faisons partie, quil est notre socle .

    Gilles Boeuf, Prsident du Musum National dHistoire Naturelle

    La biodiversit, de quoi parle-t-on ?

    La biodiversit ? Une liste despce ? Non, cest beaucoup plus fort et subtil que cela. On lavait dfi-nie comme tant toute linformation gntique conte-nue dans un individu, une espce, une population et un cosystme. Cest en fait lensemble des interactions que tous les tres vivants (bactries, protistes, champignons, plantes et animaux) ont tabli, entre eux, et avec leur

    environnement. Cest la fraction vivante de la nature !

    Elle nat dans locan, il y a prs de 4 milliards dannes quand la premire cellule vivante se spare (se clone) en deux cellules filles , copies exactes de la mre . Tout le vivant part alors la conqute de locan, et beaucoup plus tard, vers 450 millions dannes pour les animaux, des continents. Les micro-algues marines produisent de loxygne grce la photosynthse qui va saturer locan et plus tard en sortir, permettant la vie terrestre. On connat aujourdhui plus de deux millions despces, dont environ 250 000 sont marines (13 % du total), 23 % sont dans les sols. Plusieurs milliers despces de bactries vivent sur la peau humaine et lintrieur du tube digestif.

    Il y a la richesse fabuleuse des grands cosystmes, les forts tropicales du Congo, de lAmazonie et des grandes les de lAsie du sud-est, et dans locan des rcifs coralliens. Mais en ville ? En 2007, pour la premire fois, il y a plus dhumains dans les villes que dans les campagnes. De rurale, lhumanit devient citadine et cela va changer modes de vie et relations la nature. Lcosystme urbain est considrer, avec ces nombreux humains (qui se contaminent entre eux !), ces animaux domestiques et ces animaux sauvages qui y pntrent aussi, parfois avec un cortge de plantes, de champignons, de bactries

    La nature en ville est fondamentale pour le bien-tre de lhumain et sa sant : il se sent mieux, est protg des effets thermiques des canicules ou des grands froids. Laccs un grand parc en ville gomme en partie les ingalits sociales !

    Nous sommes la biodiversit, nous en vivons et devons intelligemment, sans cu-pidit ni arrogance, profiter du fabuleux cadeau de la renouvelabilit du vivant, sans la dtruite ni la surexploiter.

    Hug

    o A

    nest

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    Les rtroactions du systme climat-biodiversit

    Lutilisation humaine des nergies fossiles et les modes de production et de consommation qui y sont associes, provoquent une forte augmentation des gaz effet de serre. Les cycles biogochimiques sont dsquilibrs. Temprature, rpartition de leau douce, pH des milieux aquatiques voluent des vitesses bien suprieures celles connues prcdemment dans lhistoire de la biosphre, mme en pleines crises dextinction : quelques dizaines dannes en ce qui concerne le changement actuel, des centaines voire des milliers dannes lors de la disparition des dinosaures. Pression extrme impose la biodiversit dont les capacits de dveloppement et dadaptation sont dj mises mal par les activits humaines. Le tissu vivant est mit, des cosystmes basculent dans la dsertification ou subissent lenvahis-sement dorganismes souvent indsirs et incontrlables (e.g. la jacinthe deau importe dAmrique Latine as-phyxie tous les grands lacs africains), les sols srodent et cest lensemble du vivant et ses formidables ressources et capacits qui se drobe sous nos pieds. Dans les ocans, une plus grande dissolution du CO2 du fait de laugmentation de la temprature saccompagne dune modification du pH, dune acidification dltre notamment pour les milieux coralliens ou le mtabolisme du plancton.

    Mais lrosion de la biodiversit participe ce change-ment climatique tout autant quelle a particip llabora-tion dun climat favorable son propre dveloppement. Ainsi, les dtournements de leau destination dco-

    systmes artificialiss, les modifications du territoire, les pollutions impactent les cycles biogochimiques, terrestres et aquatiques. La disparition de la fort, lavance des d-serts rduisent les quantits de vapeur deau issues de lvapotranspiration et les capa-cits de stockage de carbone de la matire organique. Lurbanisation, le changement daffectation des terres, les modifications du couvert modifient lalbdo et les flux de chaleur entre sols et atmosphre. Locan, qui couvre plus des 2/3 du globe, lieu dapparition de la vie, et hbergeant une formidable biodiversit est un des composants majeur de la machinerie climatique. Il reoit lessentiel du rayonnement solaire, participe la production de vapeur dans le cycle de leau et au stockage et transport dnergie autour du globe par les courants marins. Il sinscrit galement dans le cycle du carbone, par le CO2 qui se dissout dans ses eaux et celui qui est capt par plancton grce la photosynthse. Laugmentation de la temprature va provoquer la dila-tation de locan, la monte des eaux mais galement une modification des capacits de dilution du CO2 dont la perturbation du plancton ou blanchiment des coraux sont les consquences du fait de lacidification des eaux.

    La fragilit des cosystmes renforce encore les perturbations du systme climatique et participe aux changements amorcs.

    Un cercle infernal est ainsi lanc . Si lours polaire voit son milieu se rduire comme peau de chagrin, la modification des cosystmes polaires participe en retour lamplification des changements climatiques. Cest au niveau mondial le mme drame . Lvolution rapide et brutale du climat impacte le monde vivant, or celui-ci, dj en crise, ne peut jouer son rle dans les changes dnergie et de matire entre biosphre et atmosphre, amplifiant encore les effets du changement climatique. Les rtroactions entre cosystmes terrestres, aquatiques et le climat laissent prsager une amplification des risques encourus pour lensemble de la biosphre .

    Des enjeux majeurs, des dfis indissociablesReprsentation des principales interactions

    du climat et de la biosphre

    Flux de carbone entre les cosystmes et latmosphre

    Flux de chaleur entre les courants atmosphriques et les surfaces aqua-tiques ainsi que terrestres

    vaporation des eaux de surface et vapotranspiration du vivant

    Prcipitations

    Circulations atmosphriques et ocaniques (courant chaud en rouge, courant froid en bleu)

    Surfaces terrestres et leur varit de couvert (prairies, forts, eau, roches, dserts, surfaces artificialises, surfaces glaces ou enneiges) leur confrant diffrents albdos

    Rayonnement rflchi par la surface (ocanique ou terrestre) et dimpor-tance proportionnelle son albdo

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    Bruno David, Directeur de recherche au CNRS

    Rtroactions biodiversit-climat : lexemple du phytoplancton

    Atmosphre et ocans sont des lments d-terminants du climat terrestre et lon voque rgu-lirement le rle des courants marins dans la rpar-tition des masses de chaleur, mais rarement celui du phytoplancton qui est pourtant un acteur majeur de la rgulation climatique.

    Le phytoplancton a tout dabord un impact certain sur le cycle du carbone, activant, grce la photosynthse, la pompe biologique ocanique. En ef-fet, chacune des cellules captent le CO2, alors que chez les plantes terrestres, seules les feuilles en sont capables. En termes de flux, il reprsente ainsi un puit de carbone presque quivalent celui de la vgtation terrestre, pourtant beaucoup plus imposante. De surcrot, la productivit du phytoplancton est trs importante. Les microalgues meurent et se renouvellent rapidement et chaque gnration ce sont environ 20% de leur masse qui descendent vers les fonds marins, soit 10 Gt/an.

    Par ailleurs, le phytoplancton est lorigine de la formation des nuages. Pour quun nuage prenne forme il faut une condensation de la vapeur deau en gouttelettes. Ce phnomne se produit grce un lment activateur : le sul-fure de dimthyl qui est un compos soufr mis naturellement en grandes quantits par le phytoplancton. Ainsi, nat la nbulosit au-dessus de locan. Une fine rgulation stablit. Le soleil favorise la photosynthse et la pro-duction de microalgues qui produisent plus de sulfure de dimthyl ; le gaz favorise alors la formation de nuages qui limitent en retour lensoleillement et donc la photosynthse. Celle-ci dcrot, la production de sulfure de dim-thyl galement et le ciel sclaircit, etc. Ce processus autorgul risque dtre perturb si la physiologie et la survie du phytoplancton taient mises mal. Or dans le cadre du changement climatique, lacidification des ocans met en pril le phytoplancton et les mcanismes auxquels il participe.

    Le phytoplancton est un prcieux rgulateur du climat, moyen et long terme par sa capacit piger le carbone, plus court terme en contrlant la forma-tion de nuages, les possibilits de pluies et leur rle de rgulation des tempra-tures des basses couches de latmosphre, celles de notre cadre de vie.

    .

    Focus reprsentant les interactions entre le climat et les cosystmes terrestres et marins

    Rayonnement solaire

    Rayonnement rflchi par la surface (ocanique ou terrestre) et dimportance proportionnelle son albdo

    Flux de carbone

    Flux hydrique (vapotranspiration, vaporation, prcipitations)

    Ozone et Ozone

    Derrire le vocable ozone (O3) se cache le gaz form naturellement en haute altitude (stratos-

    phre) mais aussi celui issu des activits humaines et proche du sol (troposphre).

    Lozone stratosphrique, celui de la couche dozone (entre 15 et 20 km daltitude), absorbe les rayons ultraviolets protgeant la biosphre. Cette couche est mise mal par certaines activits humaines qui rejettent des particules arosols (e.g. chlorofluorocarbonates-CFC), qui slvent et provoquent un trou dans la couche dozone et une baisse dabsorption des rayons ultraviolets.

    Dans les premires couches de latmosphre, se trouve lozone troposphrique, considr comme le mauvais ozone . Le monoxyde dazote (NO) rejet par les automobiles et les composs organiques volatils (COV) issus des industries sont lorigine de sa formation. Cet ozone peut provoquer des irritations des yeux et des voies respiratoires chez les sujets sensibles.

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    Les enjeux humains face aux changements globaux

    Comme tout autre organisme terrien nous dpendons des conditions climatiques. Le manque deau douce et saine, les trop fortes tempratures mettent en pril des vies. La destruction de terre nourricire par la perte de sol progressive (dsertification) ou brutale lors dvnements climatiques extrmes, la difficult daccs aux ressources, tous les visages du changement climatique et de lro-sion de la biodiversit concernent notre quotidien et notre avenir sur Terre. Ces perturbations majeures, la fragilit et la raret des terres et ressources qui sen suivent dessinent dores et dj lenjeu fondamental, celui du partage de la plante alors que flux migratoires et conflits pour les ressources se multiplient chaque jour.

    AttnuationLe changement climatique actuel est dabord li

    laugmentation de la production de gaz effet de serre. Il est donc dabord question de rduire nos missions de faon drastique afin dattnuer un phnomne dj lanc : la hausse de la temprature du globe. Cette attnuation passe par des conomies dnergie en repensant notre rapport aux nergies fossiles tout autant que nos modes de production, de consommation, nos choix de dveloppement.

    AdaptationMais le phnomne est enclench et la

    biosphre connat des perturbations dam-pleur visibles (rosions) ou plus sourdes (rchauffement de locan) qui entament sa capacit limiter le changement climatique et rsister la destruction de la biodiversit.

    A titre dexemple, les capacits dabsorp-tion du CO2 par locan par dissolution et grce la photosynthse pourraient atteindre leurs limites, si locan ne devient pas lui-mme alors producteur de CO2 avec laugmentation des tempratures. Leffet de serre nen serait que plus important.

    Les modifications climatiques laissent prsager une multiplication des vnements climatiques extrmes, une monte des eaux, qui toucheront alors des milieux

    A la barre comme sur la branche , les humains prennent part ces changements globaux . Et sur cette petite plante, cest la question dun avenir commun qui se pose tous . Nos socits sont confrontes leurs limites et si le monde vivant, changeant de visage, pourrait se remettre de ce changement climatique, cest bien la survie de lespce humaine qui est en question .

    Des enjeux majeurs, des dfis indissociables

    GAZ EFFET DE SERRE

    RAYONSSOLAIRES

    renvoys

    vers le sol

    absorbs

    RAYONSINFRAROUGES

    retenus

    renvoys

    VAPORATION

    VAPO-TRANSPIRATION

    Reprsentation de la plante avant la rvolution industrielle

    Accumulation et fossilisation de la matire organique (sans prlvement)

    Dveloppement des socits humaines sans impact majeur sur lqui-libre tabli entre latmosphre et la biodiversit depuis le Jurassique

    A

    . Del

    estra

    de

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    Luc Abbadie, Professeur lUMPC (Paris), Directeur de lInstitut dcologie et des Sciences de lEnvironnement

    Le climat et la biodiversit : deux systmes interdpendants

    Les relations entre le monde vivant et le monde minral sont organises selon deux logiques. La premire est le bornage du champ des possibles pour le vivant par les caractristiques physico-chimiques du milieu. La seconde est la ralisation des possibles sous la forme dune infinit de formes vivantes engen-dres par le rseau dinteractions auquel chacune dentre elles participe.

    Ainsi, un organisme peut tre considr comme une rponse du vivant au jeu des contraintes et des ressources de ce quil est convenu dappeler son environnement (temprature, eau, nu-triments, lumire, espace). Mais, chaque organisme est lui-mme un lment de lenviron-nement des autres, modifiant du mme coup les ressources et les contraintes de lensemble. Les organismes faonnent leur environnement autant quils le subissent. Il ny a pas un contenant et un contenu, mais plutt un systme environnement-biodiversit.

    En raison de la mcanique de la slection naturelle, les organismes dont les caractristiques sont optimales vis vis dun environnement ont plus de descendants que les autres. Toute modification des caractristiques physico-chimiques du milieu comme tout changement dun organisme engendrent donc une pression de slection diffrente et une volution de tous les autres tres vivants, cest--dire de lenvironnement, qui joue sur les organismes, et ainsi de suite Ce systme environnement-biodiversit est, son rythme, en perptuel changement.

    Le changement climatique par sa rapidit et son ampleur, provoquera, provoque dj, des modifications de la distribution des espces et de certaines de leurs caractristiques (mor-phologiques, physiologiques, comportementales, gnotypiques) et, par consquent, de lalb-do des continents, de lvapotranspiration, de la squestration du CO2 et lmission de gaz effet de serre, toutes ces expressions du vivant qui contribuent au bilan nergtique de la Terre et son climat.

    La biodiversit et le climat agissent et rtro-agissent lun sur lautre, formant un systme complexe. Lavenir de la biodiversit et celui du climat sont indfectiblement lis.

    GAZ EFFET DE SERRE

    RAYONSSOLAIRES

    renvoys

    vers le sol

    absorbs

    RAYONSINFRAROUGES

    retenus

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    VAPORATION

    VAPO-TRANSPIRATION

    GAZ EFFET DE SERRE

    RAYONSSOLAIRES

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    vers le sol

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    RAYONSINFRAROUGES

    retenus

    renvoys

    VAPORATION

    VAPO-TRANSPIRATION

    Reprsentation de la plante aprs la rvolution industrielle

    Des enjeux vitaux dont les solutions nous appartiennent

    fragiliss car grs sur le court terme, sans prise en compte des risques et des capacits de lco-systme survivre et continuer dvoluer aprs une perturbation (rsilience). Ainsi les mangroves bien souvent dcimes pour dvelopper laquaculture ou lurbanisme restent la meilleure protection des ctes ; la vgtation, la meilleure protection des sols face au lessivage et lrosion ; la biodiversit des cosystmes le meilleur moyen dviter ou limiter linvasion despces indsires

    Il sagit donc dadapter notre gestion des ter-ritoires ces enjeux majeurs que sont le climat et la biodiversit en considrant leur rle dans le changement climatique et la question de leur robustesse face aux risques climatiques et drosion de la biodiversit.

    Prise de conscienceNombre de voix staient leves auparavant

    mais cest en 1992, Rio, quun sommet mondial prsentait ltat de la plante lensemble du monde et dsignait comme majeurs trois enjeux travers des conventions internationales : le climat, la biodiversit, la dsertification. Interdpendants, ces dfis globaux sont plus que jamais dactualit et justifient lengagement de toute structure humaine. Car il sagit de lavenir humain de cette plante et ces conventions rappellent le rle majeur que nous avons dans lmergence de ces enjeux comme dans leurs rsolutions au jour le jour. Bien commun de lhumanit, cette plante, ou du moins notre devenir sa surface, est entre les mains des humains.

    Prlvement de la matire organique fossile

    Dveloppement des activits humaines fortement mettrices de gaz effet de serre, renforant leffet de serre naturel

    Forte modification des territoires, saturation des cycles biogochimiques, production de polluants

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    Concerns et responsables, il nous est possible dtre acteurs et, en toute humilit, dinfluencer au mieux les phnomnes complexes en jeu afin de garantir un avenir souhai-table. Dans leur diversit, tous les humains peuvent participer au r-quilibrage des grands cycles, au contrle de la production de gaz effet de serre, au renforcement de la capacit de la biosphre supporter et limiter ces changements luvre. Ds aujourdhui, plusieurs voix se font entendre, nombre dinitiatives font merger dautres possibles. La connaissance, les cadres que se construisent les activits humaines (politique, lgal, conomique), les expriences de terrain, tous participent alors ce formidable dfi.

    Un lan mondial

    La prise de conscience est le premier pas et lin-terface science-socit mis en place depuis 1988 avec le GIEC pour la problmatique du climat se voit depuis 2010 rejointe par lIPBES (Plateforme Intergouvernementale scientifique et politique sur la Biodiversit et les Services cosystmiques) pour les enjeux biodiversit. Ces deux structures internatio-nales relvent et synthtisent les connaissances afin dclairer les politiques. Au sein de lIPBES, les acteurs participent aux questionnements scientifiques tout autant qu llaboration des savoirs tant la biodiversit est complexe et indissociable de nos activits. Savoirs locaux et scientifiques se mlent pour tablir ltat de la biodiversit mais galement construire des pistes de recherche pour sa prservation et donc celle des activits humaines (qui en dpendent).

    Si le pralable toute action est la prise de conscience de la situation, des enjeux et difficults, la ralisation est conditionne par les diffrents cadres et incitations labors par les socits. Ce champ de possibles struc-tur, les diffrentes parties prenantes impliques dans les projets dun acteur permettent de dessiner bien des trajectoires de territoires. Que le point de dpart soit une volont de participer la lutte contre le changement climatique, denrayer lrosion de la biodiversit et/ou de dvelopper son activit conomique dans ce contexte de changements globaux, nombre dacteurs mettent dores et dj en uvre des projets inspirants, illustrant une part des possibles. Ils participent ainsi la rduction de la production de gaz effet de serre (attnuation) et au renforcement du rle des cosystmes dans les grands cycles biogochimiques. Suivant, prservant, restaurant les dynamiques de fonctionnement des territoires, ils participent galement la rduction des risques lis au changement climatique et lrosion de la biodiversit (adaptation).

    Face lenjeu global que pose le changement climatique nos socits, une rponse plantaire est indispen-sable . Mais elle est dcliner aux diffrentes dimensions de la socit : politiques, conomiques, sociales et ce, aux diffrentes chelles de la biosphre . Gouvernances et actions doivent se complter, se rpondre aux diffrents niveaux international, rgional, national, mais aussi avec le primtre dinfluence dun acteur.

    Jean-Franois Silvain, Prsident de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversit (FRB)

    Les connaissances, bases de toute action

    Etablissement unique en son genre en France, la FRB a t cre pour permettre le dveloppement des recherches sur la biodiversit en lien avec les acteurs de la socit en favorisant notamment la co-construction de projets. A la suite de lIFB (Institut Franais pour la Biodiversit), elle a jou un rle important dans la mise en place de la Plateforme intergouvernementale pour la bio-

    diversit et les services cosystmiques (IPBES) dans laquelle la recherche franaise est trs implique. La vocation de lIPBES : la synthse des connaissances pour clairer les dcideurs et les acteurs conomiques au niveau mondial.

    Aujourdhui, face aux deux grands dfis que sont le changement climatique et lrosion de la biodiversit et des services que lHomme en retire, les scientifiques doivent aider comprendre et rpondre ces enjeux qui sont fortement lis. Les acteurs de la socit ont rpondre ces dfis interdpendants : les atteintes la biodiversit peuvent tre accentues par le changement climatique et les change-ments que connat la biodiversit peuvent influer au niveau local et rgional sur le climat.

    La FRB et ORE cherchent informer les acteurs, faciliter la comprhension des processus en jeu pour faire merger des pistes daction tant sur le climat que pour la biodiversit. Regroups dans le Conseil dOrientation Stratgique de la FRB, les acteurs de la socit changent avec la communaut scientifique et participent llaboration des choix stratgiques.

    Au plan international, la FRB accueille le secrtariat scientifique du comit fran-ais pour lIPBES qui est charg notamment de la mobilisation de lexpertise fran-aise. Il favorise le dialogue entre communauts scientifiques du climat (GIEC) et de la biodiversit sous le regard des acteurs de la socit afin damliorer le transfert de connaissance et la prise en compte de lensemble des enjeux.

    Les pistes de solutions face au changement climatique

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    Les cadres et incitations

    Depuis Rio et son sommet de la terre en 1992, les conventions internationales se runissent rgulire-ment . tats, grandes entreprises, reprsentants des socits civiles font ltat des lieux et travaillent aux solutions . Mais toute collectivit, entreprise ou simple citoyen dans son quotidien peut participer ces enjeux climatiques et biodiversit . Quel que soit le niveau de gouvernance, les cadrages politiques, rglementaires, conomiques peuvent et doivent inciter repenser nos socits et leur fonctionnement pour participer lattnuation du changement climatique et ladaptation aux risques associs .

    Monique Barbut, Secrtaire excutive de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la dsertification

    Les conventions internationales : une synergie ncessaire des actions

    Le processus de Rio a permis la prise de conscience de limportance des ques-tions environnementales et des risques de crises quel que soit lendroit sur cette pla-nte.

    Cependant les trois conventions qui manent de Rio ont malheureusement volu ind-pendamment les unes des autres et de faon verticale . La Convention sur le climat sest surtout centre sur lnergie de par limportance de la transition nergtique ; la

    Convention sur la biodiversit sest construite sur une approche trs environnementale quand la Convention sur la dgradation des terres tait centre avant tout sur les enjeux agricoles. Pourtant il est bien question par ces conventions de dfinir lavenir de la plante, celui dun cosystme global. Des synergies sont trouver entre ces trois approches. Un exemple : lenjeu de scurit alimentaire internationale. Alors que lextension des terres pour la production de vivres se fait aujourdhui principalement au dtriment des forts et zones humides, se dgradent dans le mme temps des terres dont la restauration permettrait non seulement la production agricole mais aussi la prservation de la biodiversit et la squestration du carbone. Voil une action parmi dautres qui permettrait de conjuguer la rsolution des diffrentes priorits en mme temps. Lenjeu aujourdhui nest pas que celui des nergies fossiles mais lutilisation des ressources naturelles de cette plante.

    Lintrt de ces conventions internationales est avant tout de poser des cadres, dimposer des normes acceptes de tous, qui permettent notamment des mesures et des suivis plus aiss. A titre dexemple les normes et taxes eu-ropennes devraient sappuyer sur ces conventions pour rquilibrer une situation dltre regrettable : si depuis le protocole de Kyoto une rduction de 20% des missions carbone des productions a t ralise, dans le mme temps la part carbone des produits consomms augmentait elle de 30%. Aux pays donc de sappuyer sur ces cadres normatifs pour dvelopper des rgles et stratgies conomiques qui puissent modifier substantiellement les choix de socit afin de modifier nos impacts.

    Climat, biodiversit : global, local ?

    Parce quimpliquant latmosphre et ses gaz effet de serre, le climat a une dimension globale vidente. Cela pose lenjeu du climat au niveau mondial mais ne doit pas faire oublier ses liens troits avec des lments locaux de la biosphre. Ainsi le rle des forts dans lvapotranspiration, des masses dair humides dans les courants atmosphriques ou celui du plancton dans la formation des nuages questionnent ainsi le rle des acteurs locaux dans le devenir du climat.

    En miroir, et parce quelle est souvent voque par le biais dune plante, un animal, un territoire en danger, la biodiversit revt une dimension locale vidente. Pourtant lenjeu biodiversit est bien un enjeu mondial. Car la gestion des cosystmes (e.g. dforestation, urbanisation) et la biodiversit qui se cachent derrire nos choix de consommation (e.g. importation dhuile de palme ou soja, produits sur des sites denvergure au dtriment de la biodiversit locale) ont des consquences lchelle de la plante.

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    3Les pistes de solutions face au changement climatique

    Gilles Martin, Professeur mrite lUniversit Nice-Sophia Antipolis, Professeur associ Sciences politiques Paris

    Les enjeux globaux : les pistes de solutions par le droit

    A partir du triple constat que les ques-tions relatives au climat et la prservation de la biodiversit se croisent souvent, que les besoins des acteurs sur le terrain sont extraor-dinairement divers et que la capacit cratrice de ces acteurs est grande, quelles peuvent-tre les pistes de solutions proposes par le droit ?

    Il faut sans doute veiller, en premier lieu, identifier les dispositifs juridiques qui empchent de trouver des solutions ! A titre dexemple, lexclusivisme du droit de proprit peut tre un frein des solutions innovantes consistant, par exemple, reconnatre des droits concurrents sur un mme bien. Les rflexions actuelles sur les communs , notam-ment en ce quelles dpassent la distinction priv/public, sont le signe encourageant que les lignes bougent. Il convient ensuite de faire en sorte que la crativit des oprateurs puisse sexprimer, notamment travers loutil contractuel. La varit des contrats ayant pour objet la gestion du risque environnemental ou plus directement encore la protection de lenvironnement fait, aujourdhui, lobjet danalyses et dinventaires qui rvlent limagination cratrice des acteurs de terrain et des juristes qui les accompagnent. Lordre public, sil reste incontournable, nest lvi-dence plus la seule porte dentre vers une socit plus durable. Dans cet esprit, en consacrant la possibilit de crer par contrat des obligations relles environnementales, le projet de loi biodiversit met la disposition des oprateurs un instrument intressant, si la reprsentation nationale a la sagesse de ne pas lenfermer dans un carcan rglementaire dissuasif. De manire plus globale, enfin, on peut souhaiter que les proccupations environnementales pntrent, plus quelles ne le font aujourdhui, les dispositifs de rgulation, quils soient transversaux comme le droit de la concurrence ou sectoriels comme le droit des transports, le droit des activits agricoles ou de lnergie.

    Michel Trommetter, Directeur de Recherche lINRA

    Les enjeux globaux : un dfi pour les conomistes

    Il est aujourdhui reconnu que Climat et Biodi-versit sont en interaction. Mais quest ce que cela si-gnifie pour les conomistes : quelles sont les questions et les pistes de solution ? Comment ralentir les vitesses de changement climatique et drosion de la biodiver-sit sachant que chacune peut faire varier la vitesse de lautre ? Comment acclrer les offres dadaptation

    sachant que lon peut par exemple, plus facilement, sadapter localement au changement climatique grce une bonne gestion de la biodiversit ?

    Des pistes de rponses ces deux questions reposent la fois sur des approches macroconomiques (rvision du calcul du PIB) et microconomiques (nouvelles manire de calculer le profit). Il ne sagit pas de remettre en cause le modle ca-pitaliste, mais la manire de calculer le PIB et le profit. Ainsi, il faut redfinir ces concepts pour inciter les Etats, les entreprises et lensemble des organisa-tions investir dans la biodiversit et la rduction des missions de gaz effet de serre. Le principe pollueur payeur seul ne peut pas tout rgler. Il faut quin-vestir pour limiter les changements globaux et leurs effets soit facteur de profit pour les organisations. Cela ncessite par exemple au niveau des entreprises de mettre en place de nouvelles formes damortissement sur les consommations de capital naturel et davoir la possibilit de procder des augmentations du capital naturel lorsque les investissements auront port leur fruit, par exemple avec la restauration de sites, grce la mise en uvre dactivits dingnierie cologique.

    La question de la rforme des outils conomiques, comme la comptabilit, ne peut sapprhender qu un niveau international si on veut que les rponses ap-portes aient une certaine efficacit tant sur la rduction de lrosion de la bio-diversit que des missions de gaz effet de serre. On sait le faire rapidement, et plus ou moins bien, lors des crises financires. Nous sommes dans une crise environnementale, il est temps dagir avant que ses consquences cologiques, conomiques et sociales ne soient irrversibles.

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    Nicolas Buclet, Professeur lInstitut dUrbanisme de Grenoble, Universit Grenoble Alpes, Directeur du laboratoire Pacte

    Les enjeux environnementaux : une conomie circulaire adapte au territoire simpose

    Lcologie industrielle, ou conomie circulaire selon les institutions franaises, sinspire du fonctionnement des cosystmes naturels, au sein duquel il nexiste pas de dchets, mais des rsidus organiques reprsentant autant de ressources pour dautres espces vivantes. Le bouclage des flux, la cration de synergies entre acteurs permettant que les dchets des uns deviennent les ressources des autres, est devenu le leitmotiv de ce champ disciplinaire. Bien que sinspirant du fonctionnement des cosystmes, lcologie industrielle ne sintresse pourtant que peu aux questions co-

    logiques, et notamment la prservation de la biodiversit. Dans la pratique, dintressantes synergies sont mises au point entre activits industrielles (parfois en lien avec des rseaux de chaleur urbains), qui permettent dconomiser de la matire, de lnergie et donc, indirectement, de rduire limpact de la socit industrielle sur son environnement et le climat. Cela ne va pas assez loin. Les vrais enjeux consistent prendre au srieux, tous les niveaux, le concept de biodiversit. Or la biodiversit nest pas favorise par ladoption de solutions standardises ni par la promotion de systmes industrialiss de grande chelle. Avec une territorialisation des activits humaines, entendue en tant quancrage gographique des synergies entre activits humaines dans un contexte particulier, tenant compte des spcificits de chaque situation, des rseaux dacteurs, des savoir-faire et de lenvironnement naturel, les interactions entre lhomme et son environnement engendrent une multitude dquilibres possibles. En visant ce que les technologies ne se focalisent plus sur lemploi de ressources stan-dardises, mobilises grande chelle, mais sur des solutions chaque fois adaptes un contexte local, on peut la fois mieux tenir compte de lquilibre des cycles biogochimiques locaux, favoriser la prservation de la biodiversit locale et crer une biodiversit des activits conomiques et sociales, loppos de solutions massives et gnralises comme tant les quelques solutions face aux enjeux du dveloppement durable.

    Les initiatives prises par les acteurs

    Cest au quotidien et dabord au niveau local que se dessinent les enjeux climatiques et bio-diversit . Par ses choix de vie et ses activits tout un chacun participe ces dynamiques et peut donc, ds aujourdhui, limiter la production de gaz effet de serre, la consommation de ressources, prendre part une prservation voire un renforcement de la biodiversit, permettre aux milieux dvoluer .

    Certains acteurs ont dores et dj initi des chemins, en fonction de leur secteur, de leurs territoires pour concilier activits conomiques et dfis climatiques et biodiversit. Vritables choix conomiques, ces expriences donnent voir quelques-uns des possibles pour dautres .

    Les pistes dattnuation : rponses concrtes

    Une meilleure gestion de lnergie, et plus glo-balement une meilleure gestion des ressources, peuvent tre loccasion dmergence de synergies entre acteurs qui leur permettent de cooprer afin damliorer leurs activits conomiques autour dun territoire. La diversit des possibles est grande et chaque situation a sa propre dclinaison, que ce soit par un ancrage local, la rduction des distances, une gestion optimise des effluents, des couplages dactivits. Six tmoignages illustrent quelques-unes des diffrentes voies possibles.

    Ainsi, faire voluer un modle conomique local permet la prservation de la biodiversit locale tout autant que lointaine. Cest galement pour concilier dveloppement conomique et moindre impact sur les changements globaux que des acteurs re-pensent leurs projets voire diversifient leurs activits en lien avec les autres acteurs du territoire. Et pour accompagner les choix des particuliers comme des entreprises, se dveloppent des outils qui cherchent concilier au mieux dveloppement conomique et lutte contre les changements globaux en per-mettant didentifier les projets moindre impact environnemental.

    Connaissant les causes anthropiques du changement climatique il sagit dabord dagir la source par une rduction drastique des consommations dnergies fossiles . Il est donc question de sobrit et defficacit nergtique limage du monde vivant. Or une telle contrainte peut constituer une opportunit en termes dactivits humaines et permettre de revoir son rapport au territoire .

    Ainsi, cherchant limiter les pertes et dpenses nergtiques, une entreprise peut-elle mettre en place des activits, des partenariats et participer lmergence dun nouveau modle conomique territorial bnfique galement pour la biodiversit lchelle locale et mondiale .

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    Parce que lutter contre le changement climatique passe par la gestion de lnergie et une prise en compte de la biodiversit localement, des synergies dacteurs mergent et font natre de nouvelles activits lchelle dun territoire. Elles participent ainsi des conomies dnergie et prserver la biodiversit.

    Comment nergie et territoire sallient face lrosion de la biodiversit et au changement climatique

    Dans le cadre de sa valorisation nerg-tique des dchets non dangereux prs de La-val, Sch environnement et les agriculteurs locaux regroups en cooprative (CODEMA), ont dvelopp un partenariat gagnant pour tous, y compris le paysage de la Mayenne, la biodiversit et la lutte contre le changement climatique.

    La mthanisation des dchets mnagers est une approche de valorisation nergtique bien adapte aux zones rurales. Lnergie produite est renouvelable et facilement distibue sous forme dlectricit. Or cette opration de co-gnration produit galement de la chaleur qui ne peut qutre utilise proximit.

    Traditionnellement, la Mayenne est un dpartement dlevage aux exploitations de

    taille moyenne implantes dans un paysage de bocage dont les talus, haies et chemins creux entourent des parcelles de luzerne cultive. Ce fourrage riche en protines est la base de lalimentation animale la belle saison. Pour nourrir les bovins ltable une fois lhiver venu, il faut savoir la conserver sans dgrader ses qualit nutritionnelles. La solution a consist dshydrater cette luzerne laide de la chaleur produite par le site voisin de Sch environnement.

    Limpact social pour les territoires est patent. Sept cents agriculteurs bnficient aujourdhui de ce service qui leur permet une parfaite traabilit de leurs fourrages la base de leur reconnaissance comme producteurs de pro-duits labelliss bio. Ainsi leurs dbouchs sont mieux valoriss, leurs revenus amliors. Face aux remmembrements et pratiques de lagri-culture intensive, ils ont ainsi pu dvelopper leur activit tout en vitant les destructions de biodiversit (comblements de mares, arbres et haies abattus) et le recours au tourteaux de soja pour nourrir le btail lhiver. Ce dernier,

    import principalement dAmrique du Sud avec une forte logistique, est cultiv ren-fort de pesticides et dengrais sur des terres souvent dforestes cet effet. Des impacts dltres sur la biodiversit comme sur le climat donc vits.

    Dautant plus que la luzerne, comme toute l-gumineuse, possde un mtabolisme qui permet de fixer lazote du sol, vitant lutilisation den-grais et bnfique pour les rotations de culture. Par sa structure racinaire profonde elle stabilise galement les sols, vitant leur rosion

    Lusage du soja participe la destruction de la biodiversit et au drglement climatique (dforestation, engrais et transports), alors que la culture locale de luzerne est favorable la biodiversit (e.g. pollinisateurs, biodiver-sit des sols), peu missive en CO2 et peu gourmande en eau. Le maintien des parcelles du bocage joue galement un rle important de corridors cologiques pour la circulation des espces.

    Une ralisation gagnante 360 :

    Production dnergie renouvelable, dve-loppement local, lutte contre lrosion de la biodiversit et contre le changement clima-tique, ce projet est gagnant-gagnant quelque soit langle de vue adopt !

    La dshydratation de la luzerne se limitant la saison estivale, une autre utilisation de la chaleur contre saison a t recherche : linstallation dun rseau de chauffage urbain qui permettrait dalimenter 15 000 foyers. Cet accroissement des besoins en calories sera ralis par la valorisation de Combustibles Solides de Rcupration (CSR). Ces derniers se composent de dchets jugs non recy-clables et provenant de la collecte slective mis en place au centre de tri pour rcuprer les dchets pouvant constituer des matires premires secondaires.

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    Parce que lutter contre le changement climatique passe par la gestion de lnergie et une prise en compte de la biodiversit localement, des synergies dacteurs mergent et font natre de nouvelles activits lchelle dun territoire . Elles participent ainsi des conomies dnergie et prserver la biodiversit .

    Une production locale responsable pour prserver la biodiversit et diminuer limpact sur le climat

    Lhistoire de lAvoine Rhealba prend ses origines dans les valeurs du groupe Pierre Fa-bre. Ds son installation en pays de cocagne dans le Sud de la France, la marque A-DERMA des Laboratoires Pierre Fabre a la volont de produire une gamme de soin de qualit partir dune culture davoine respectueuse de son environnement. Pour matriser lensemble de la production, ils dcident de faire cultiver lAvoine Rhealba en agriculture biologique (AB) sur une trentaine dhectares par des agri-culteurs locaux, sous la responsabilit dune structure spcialise des Laboratoires Pierre Fabre, Pierre Fabre Agronomie. Les cultures sont implantes proximit des deux units de fabrication de lentreprise Soual et Gaillac dans le Tarn. La marque AB est signe dune agriculture plus respectueuse de lenvironne-ment et de la biodiversit puisquelle exclut notamment lusage des produits chimiques de synthse comme intrants agricoles (engrais et pesticides) et des organismes gntiquement modifis (OGM).

    La volont du groupe Pierre Fabre, privil-giant un ancrage local de sa production du champ au produit, permet une baisse des missions de gaz effet de serre rejets par les transports grce aux courtes distances parcourues. A lchelle locale, le groupe Pierre

    Fabre et la marque A-DERMA luttent contre le changement climatique global.

    La dmarche RSE (Responsabilit Soci-tale des Entreprises) du groupe pousse plus loin encore la dmarche par une approche volontaire de labellisation de Haute Valeur Environnementale (HVE) de la structure Pierre Fabre Agronomie. Ce label, fond sur des indicateurs de rsultats relatifs la prservation de la biodiversit, la stratgie phytosanitaire, la gestion de la fertilisation et de lirrigation, complte la marque AB pour une gestion plus durable des terres. La culture de lAvoine Rhealba tant ralise de fvrier juillet, les agriculteurs enfouissent les pailles aprs rcolte et sment des lgumineuses en hiver pour enrichir le sol en matire organique et en azote. Cette pratique vite lapport de fertilisants chimiques.

    Dans le cadre de cette certification HVE , plusieurs initiatives sont mises en place en faveur de la biodiversit, notamment lins-tallation de nichoirs abeilles solitaires. Les

    abeilles, en tant que pollinisateurs ont un rle important dans la prservation des espces vgtales, do leur fonction dindicateur de biodiversit. Un inven-taire biodiversit ralis sur le site Terre davoine o est cultive la semence dAvoine Rhealba a dcel la prsence de la Nigelle de France, espce vgtale protge lchelle nationale. Du fait de son dveloppement singulier (uniquement sur les bords des champs de c-rales), sa prsence rvle un faible impact du mode cultural de lavoine et un bon tat des terres agricoles.

    Conjointement, des actions de lutte contre le changement clima-tique sont menes : la rcupration des marcs de plantes cultives (rsidus de plantes aprs transformation) sinscrit dans une dmarche dconomie circulaire. Ces marcs de plantes sont rcuprs pour alimenter une chaudire biomasse de lusine de Soual. Coupl des plaquettes de bois tarnaises issues de forts gres durablement (certification), cet apport local diminue de 60% la consommation de gaz du site, abais-sant limpact carbone de la fabrication des produits.

    Pour compenser une partie des rejets de gaz effet de serre invitables lis la fabrication de certains produits de la marque A-DERMA,

    Pierre Fabre, avec la marque Carbone local , plante des haies comprenant 10 es-sences darbustes locaux sur son territoire. Ces haies enrichissent la biodiversit et lutte contre lrosion des sols, pentus sur ce terri-toire, au-del de la compensation carbone.

    Une dmarche complte alliant dveloppe-ment du territoire et enjeux biodiversit-climat globaux, initie par la volont dun groupe !

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    Parce que lutter contre le changement climatique impose de repenser sa dpendance aux ressources fossiles, des opportunits de nouvelles activits apparaissent .

    Une dmarche globale faible impact sur la biodiversit et le climat

    Pour prouver ladquation possible des enjeux de la protection de lenvironnement, de la lutte contre le changement climatique et le bien-tre humain, la marque Yves Rocher fonde La Gre des Landes, co-Htel Spa en Bretagne, malgr des tudes pralables annonant une viabilit conomique incertaine du projet. La dmarche de ce projet consiste rduire lempreinte cologique et climatique chacune de ses tapes, de linfrastructure aux services fournis par ltablissement.

    La diminution de limpact sur le climat se traduit ici par la rduction dutilisation des ressources (eau, nergie) et par le dvelop-pement dnergies moins missives en gaz effet de serre : la consommation nergtique de lEco-Htel Spa est particulirement faible pour une telle infrastructure (29 chambres, piscine, spa), grce son architecture bioclimatique et son mode de fonctionnement apportant de la chaleur naturelle et diminuant les pertes. En effet, lhtel est orient de faon recevoir le plus dnergie solaire possible et les murs des btiments en thermopierre aux proprits iso-lantes, associs au chanvre pour une meilleure hygromtrie et au double vitrage isolation ren-force, limitent les pertes thermiques. Le besoin en nergie est diminu (pour le chauffage ou la climatisation) donc limpact environnemental galement.

    Fonctionnant principalement aux nergies renouvelables grce aux deux chaudires bois et aux 35m de panneaux solaires ther-miques, linfrastructure rduit son impact sur le climat en vitant le recours aux nergies fossiles. Le faible taux dmissions de gaz effet de serre (diagnostic ralis en 2014) en tmoigne (< 10 t/an). De plus, le bois utilis pour les chaudires provient de la gestion et de lentretien de forts situes proximit (lagage, coupe, entretien), des rsidus de pins principalement, conformment au cahier des charges impos par Yves Rocher.

    Leau de linfrastructure, au cur des proces-sus climatiques et naturels, est conomise : leau du spa est rutilise pour les chasses deau des chambres, sauvegardant environ 1000 litres deau par jour ; leau de la piscine, recycle, alimente le bassin de rcupration des eaux de pluie servant pour larrosage des jardins et le nettoyage des terrasses extrieures.

    De surcrot, lensemble des eaux rejetes par lEco-htel Spa est pur grce un jardin filtrant, compos de roseaux et couches de sable, vitant le traitement artificiel des effluents, plus coteux. Ces capacits puratoires sont vrifies par contrles trimestriels. La cration du bassin favorise de plus la biodiversit, no-tamment les odonates (libellules et demoiselles) et les amphibiens.

    Afin de prserver et daccrotre la biodiversit des lieux (nombres despces et interactions), Yves Rocher sengage avec la LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) en installant des arbres fruitiers, des essences florales et des

    nichoirs. Des pratiques de gestion augmentent galement le potentiel daccueil de la biodi-versit : tonte haute, entretiens des haies, non utilisation dherbicides, cration dune mare. En 5 ans la diversit des espces de papillons observes a doubl (de 19 36) grce cela.

    Linitiative dYves Rocher prend galement en compte les activits de lEco-htel Spa puisque la restauration se compose uniquement de produits issus de lagriculture biologique (certifi bio catgorie 3 100% - par Ecocert), quils proviennent du jardin du site ou des 45 fournisseurs tous certifis bio (alimentation, vin). La volont de la marque dutiliser des produits bio a encourag les producteurs locaux modifier leurs pratiques culturales. De surcrot, lEco-htel Spa Yves Rocher favorise lancrage

    local en collaborant avec 25 30 producteurs locaux bio dans un rayon de 30 40 km limitant les dpenses nergtiques lies au transport et de ce fait les gaz effet de serre.

    LEco-Htel Spa Yves Rocher, par sa prise en compte des enjeux environnementaux et son faible impact sur le climat et la biodiversit, est certifi Haute Qualit Environnementale (niveau franais), labellis colabel Europen et certifi Green Globe lchelle internationale. Parce quil rpond au besoin de renouer avec la Nature, lEco-htel Spa connat une franche russite contredisant les tudes pralables.

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    Parce que lutter contre le changement climatique impose de repenser sa dpendance aux ressources fossiles, des opportunits de nouvelles activits apparaissent .

    Diversification des activits pour des bnfices conomiques et en faveur de la biodiversit et du climat

    Afin de diversifier leurs activits et danticiper lvolution des politiques environnementale et agricole, les frres Quaak, propritaires de la ferme dArcy en Seine-et-Marne et administra-teurs de la Saf agriDes, dveloppent deux projets ambitieux permettant des conomies dnergies et la valorisation des dchets de lexploitation.

    La premire initiative est linstallation en 2009, de 1800 m de panneaux photovoltaques. Llectricit provenant de lnergie solaire est ensuite revendue EDF. Une telle opration vite la charge dentretien des toits et apporte plus dnergie que nen consomme lexploitation.

    La seconde initiative, dbute en 2008, modi-fie plus profondment les activits de la ferme.

    Lide est de valoriser ses dchets agricoles et dlevage. Stendant sur prs de 400 hectares dont 280 ddis lagriculture, lexploitation compte 500 bovins rejetant 3500 tonnes def-fluents par an. Or, les excs deffluents comme les intrants industriels utiliss dans lagriculture sont responsables de pollution des sols et de leau souterraine, et nuisent la biodiversit.

    Les agriculteurs se penchent alors sur la m-thanisation, qui permet de valoriser les dchets de leurs activits agricoles et dlevage. Ce pro-cd a lavantage de transformer ces dchets en biogaz et permet de rcuprer le digestat (produit rsidu de la mthanisation, compos de matire organique non biodgrade, des matires minrales et deau) pour fertiliser les terres. Il est inspir du fonctionnement du vivant, reproduisant la fermentation naturelle qui a lieu dans le pr-estomac (rumen) des ruminants.

    Les agriculteurs ont choisi la valorisation ner-gtique par le biomthane pour plusieurs raisons :

    Lintgration de ce biogaz pur dans le r-seau de distribution de gaz exploit par GrDF,

    a un rendement nergtique lev de 90% ; le choix de linjection dans le rseau permet de diversifier les activits de la ferme grce des recettes supplmentaires ; le biogaz peut tre stock et dlivr en sadaptant aux besoins nergtiques des cinq communes quil alimente ; cette production est une alternative au prlvement de certains combustibles fossiles donc diminue limpact carbone de lexploitation ; la rcupration du digestat fournit un engrais naturel qui se substitue en grande partie aux intrants industriels achets. Or, ces intrants sont responsables dune grande partie des missions de gaz effet de serre dans le secteur agricole. La mthanisation rduit lapport dintrant jusqu 90% grce lutilisation du digestat sur les terres au printemps et la sortie de lt. Les sols,

    moins pollus, redeviennent un milieu propice la vie. Pour viter lrosion des sols et les enrichir, des CIVE (Cultures Intermdiaires Vocation Energtique), dont des lgumineuses fixant lazote dans le sol, sont plantes aprs la culture principale, rduisant encore le besoin dintrants.

    Cette initiative prsente nombre de bnfices : valorisation nergtique des effluents, gestion plus durable des terres favorisant la biodiver-sit, diversification des activits et autonomie nergtique de la ferme, moindre participation la production de gaz effet de serre.

    La ferme dArcy est la premire en France avoir produit du biomthane et linjecter dans le rseau de distribution de gaz. Quatre ans ont t ncessaires pour valider le projet et obtenir des financements, trois pour sa mise en application.

    Cette initiative a largement contribu lla-boration du nouveau cadre lgislatif et a facilit la ralisation de projets similaires postrieurs, tout en favorisant le dveloppement de la biodiversit et la lutte contre le changement climatique. Depuis cette exprience, GrDF a dvelopp et mis en place, en collaboration avec le Musum National dHistoire Naturelle, un outil de diagnostic pour valuer la sensibilit cologique de ses zones de chantier, dont les raccordements dinstallations de mthanisation. Lobjectif est dviter ou rduire limpact des travaux sur la biodiversit des territoires.

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    Parce que lutter contre le changement climatique cest accompagner les acteurs dans leurs choix de financements ou dachats afin de limiter leurs impacts sur le climat et la biodiversit, des acteurs mettent en place des outils daide la dcision.

    Une dynamique collective pour une gestion responsable des forts

    Cest pour lutter contre la dforestation et redonner une valeur environnementale, sociale et conomique aux forts que lONG (Organi-sation Non Gouvernementale) FSC a t cre, la suite de la Confrence de Rio de Janeiro en 1992. FSC regroupe la fois des ONG envi-ronnementales comme le WWF ou Greenpeace ainsi que des reprsentants des droits sociaux, des peuples autochtones et des entreprises souhaitant promouvoir une gestion durable des forts. Cela grce un systme de certification exigeant bas sur trois piliers : la gestion doit tre environnementalement approprie, sociale-ment bnfique et conomiquement viable. Un forestier obtient la certification FSC lorsquil a rempli lintgralit des exigences du cahier des charges. Un organisme indpendant contrle chaque anne ladquation des mthodes de gestion et des critres de la certification.

    Grce aux principes de bonne gestion de FSC et notamment la promotion dun dialogue territorial soutenu, les certifications FSC abou-tissent une gestion forestire rpondant aux enjeux socio-conomiques du territoire en prservant la biodiversit locale dans de nom-breuses forts du monde. A titre dexemples :

    Au Gabon, la chasse commerciale de la viande de brousse et le braconnage divoire sont les plus grandes menaces pour le patri-moine de biodiversit. Les forestiers certifis FSC sengagent surveiller laccs aux routes des forts, enregistrer les armes feu du personnel pouvant tre impliqu dans des trafics et contrler les vhicules pour y dtecter de la viande de brousse. Pour rduire la pression exerce par la chasse, les forestiers doivent galement fournir de la viande domestique un prix comptitif. Ces actions sinscrivent dans une dmarche complte et aident lutter contre lrosion de la biodiversit des forts gabo-naises tout en aidant les populations locales.

    Dans les forts de lExtrme Orient Russe, les principales problmatiques sont les exploi-tations forestires illgales gnralises, celles lgalises mais destructrices et laccs ais des braconniers aux forts. La dlimitation des Fo-rts Haute Valeur pour la Conservation (FHCV), intgres dans la certification FSC, protge ces

    habitats : plus de 125 000 hectares sont interdits aux exploitations forestires et aux constructions routires ! Cest un vritable atout apport par la certification puisque la protection des habitats est pratiquement inexistante dans cette rgion. En dehors des FHCV, 3 770 000 hectares sont grs par les forestiers certifis, qui doivent sassurer que la protection de la faune sauvage est mise en place et que les normes et/ou rglementations nationales et internationales

    sont connues et res-pectes.

    Dans les les Sa-lomon, FSC apporte une contribution conomique long terme, le maintien dune riche biodiver-sit et le soutien au peuple autochtone. La certification FSC de lentreprise Kolomban-gara Forest Products

    Limited (KFPL) valorise leurs bois, leur permet-tant datteindre des marchs de niches et ainsi de rester comptitif malgr sa petite taille et son loignement des marchs. Les exigences de la certification protgent les rgions monta-gneuses vierges de lle et leur riche biodiversi-t : le forestier doit protger les espces rares et menaces ainsi que leurs habitats, grce des zones de conservation, des aires de protection, des connexions entre les espaces forestiers. Cette protection a attir lattention du peuple autochtone de Kolombangara et a engendr la formation de lONG KIBCA, qui en collaborant activement avec lentreprise KFPL leur offre un

    moyen raliste dtre impliqus dans la gestion dune grande partie de leur le.

    Grce la protection des habitats forestiers (aires protges, connectivit entre les es-paces, diversit des essences, lutte contre le braconnage), la certification FSC lutte contre la dforestation et les missions de gaz effet de serre (GES) associs, et aide la prserva-tion de la biodiversit. Le maintien des forts naturelles et la certification des plantations sont cruciaux dans la lutte contre le change-ment climatique puisque la prservation de ces cosystmes maintient le fonctionnement des cycles biogochimiques (carbone, azote, eau), en lien troit avec le rejet des missions de GES.

    Le nombre de certification FSC en constante augmentation prouve la concordance des enjeux environnementaux, sociaux et cono-miques de cette gestion.

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    Parce que lutter contre le changement climatique cest accompagner les acteurs dans leurs choix de financements ou dachats afin de limiter leurs impacts sur le climat et la biodiversit, des acteurs mettent en place des outils daide la dcision.

    Lincitation dune banque au dploiement de projets pour la transition cologique

    Quelques soient les projets, leur finance-ment est ncessaire toute concrtisation do le rle primordial des banques. Celles-ci peuvent choisir de soutenir certains projets plutt que dautres et de ce fait, elles ont la capacit dinsuffler le dveloppement dinitiatives en faveur de la biodiversit et de la lutte contre le changement climatique. Le Crdit Coopratif choisit de financer lconomie sociale et solidaire et les projets qui contribuent un monde plus durable.

    Dans le domaine de lnergie, le Crdit Coopratif accompagne principalement les projets de dveloppement dnergie renou-velable : 98,3% des projets financs sont des projets dinstallation dnergie renouvelable, sur le total de leur financement dans le do-maine nergtique. En 2014, 45 projets ont t financs, reprsentant une puissance installe de 139 mgawatts pouvant alimen-ter plusieurs milliers de foyers par an. Cette

    production dnergie renouvelable vite une partie des missions de gaz effet de serre issus de lutilisation dnergies fossiles.

    De surcrot, les orientations en matire de financement de la banque dans le domaine nergtique limitent linvestissement en faveur des nergies fossiles : la banque ne finance ni les activits dextraction de ptrole, charbon ou gaz naturel, ni la production dagrocarburant provenant de cultures uti-lisables pour lalimentation et occupant des terres agricoles.

    Le Crdit Coopratif encourage les entre-prises et particuliers baisser leur impact environnemental en proposant