D’un possible dépassement de la plainte

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Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2008) 7, 154—160 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com SOINS PALLIATIFS ET PSYCHOLOGIE D’un possible dépassement de la plainte Getting beyond the patient’s complaint Jérôme Alric Équipe de recherche EA 3278, université Aix-Marseille-I, unité mobile de soutien et de soins palliatifs, CHRU de Montpellier, 80, rue Augustin Fliche, 34295 Montpellier cedex 5, France Rec ¸u le 11 octobre 2007 ; accepté le 14 novembre 2007 Disponible sur Internet le 10 avril 2008 MOTS CLÉS Plainte ; Soins palliatifs ; Mort annoncée ; Coconstruction ; Efficacité symbolique de la parole ; Sentiment d’éternité Résumé L’objectif de cette étude est de repérer les spécificités de la plainte dans le champ palliatif et de proposer un dispositif d’écoute qui permette son possible dépassement. Ici, les paroles médicales adressées au patient viennent excéder ses possibilités de représentation. Ce savoir anticipé sur sa propre mort attaque ses assises narcissiques et notamment la part de sa vie psychique qui se refuse à mourir, son point d’infinitude. Ainsi, la communication médecin—malade produit-elle des traces qui s’inscrivent dans la psyché sans être refoulées. C’est ce point de traumatisme que la plainte ne cesse pas de faire entendre. Mais le mou- vement plaintif constitue aussi, selon moi, une véritable réaction subjective ; la plainte sera envisagée alors comme expérience subjective en devenir. En effet, par sa plainte, le patient résiste à l’assujettissement et tente de se dégager du statut de mourant. Pour dépasser la plainte, je propose un dispositif d’écoute avec la psychanalyse qui a pour ambition de trans- former les traces non refoulées en conflits psychiques. Ce dispositif, centré sur l’efficacité symbolique de la parole et qui prend en compte le transfert, vise à névrotiser la plainte. Le patient est accompagné dans sa tentative de rassemblement de sens au travers duquel il effec- tue un ultime ressaisissement subjectif. La méthode de la coconstruction fait émerger des conflits psychiques en lien avec son histoire. Au fil des rencontres, progressivement, la parole dégage le sujet du traumatisme de sa mort annoncée, une nouvelle temporalité, chevillée à la relation d’incertitude, se crée : le ressort de la plainte chute. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Texte élaboré à partir d’une communication au xiii e congrès de la SFAP le jeudi 14 juin 2007 au cours supérieur « Souffrance psychique en soins palliatifs » au Palais des Congrès de Grenoble. Résidence le Parc de Costebelle, 111, impasse Maurice-Justin, 34000 Montpellier, France. Adresses e-mail : [email protected], [email protected]. 1636-6522/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.medpal.2007.11.028

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Jérôme Alric ∗

Équipe de recherche EA 3278, université Aix-Marseille-I, unité mobilede soutien et de soins palliatifs, CHRU de Montpellier, 80,rue Augustin Fliche, 34295 Montpellier cedex 5, France

Recu le 11 octobre 2007 ; accepté le 14 novembre 2007Disponible sur Internet le 10 avril 2008

MOTS CLÉSPlainte ;Soins palliatifs ;Mort annoncée ;Coconstruction ;Efficacité symboliquede la parole ;Sentiment d’éternité

Résumé L’objectif de cette étude est de repérer les spécificités de la plainte dans le champpalliatif et de proposer un dispositif d’écoute qui permette son possible dépassement. Ici, lesparoles médicales adressées au patient viennent excéder ses possibilités de représentation.Ce savoir anticipé sur sa propre mort attaque ses assises narcissiques et notamment la partde sa vie psychique qui se refuse à mourir, son point d’infinitude. Ainsi, la communicationmédecin—malade produit-elle des traces qui s’inscrivent dans la psyché sans être refoulées.C’est ce point de traumatisme que la plainte ne cesse pas de faire entendre. Mais le mou-vement plaintif constitue aussi, selon moi, une véritable réaction subjective ; la plainte seraenvisagée alors comme expérience subjective en devenir. En effet, par sa plainte, le patientrésiste à l’assujettissement et tente de se dégager du statut de mourant. Pour dépasser laplainte, je propose un dispositif d’écoute avec la psychanalyse qui a pour ambition de trans-former les traces non refoulées en conflits psychiques. Ce dispositif, centré sur l’efficacitésymbolique de la parole et qui prend en compte le transfert, vise à névrotiser la plainte. Lepatient est accompagné dans sa tentative de rassemblement de sens au travers duquel il effec-tue un ultime ressaisissement subjectif. La méthode de la coconstruction fait émerger des

conflits psychiques en lien avec son histoire. Au fil des rencontres, progressivement, la paroledégage le sujet du traumatisme de sa mort annoncée, une nouvelle temporalité, chevillée à larelation d’incertitude, se crée : le ressort de la plainte chute.© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

� Texte élaboré à partir d’une communication au xiiie congrès de la SFAP le jeudi 14 juin 2007 au cours supérieurSouffrance psychique en soins palliatifs » au Palais des Congrès de Grenoble.∗ Résidence le Parc de Costebelle, 111, impasse Maurice-Justin, 34000 Montpellier, France.

Adresses e-mail : [email protected], [email protected].

636-6522/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.medpal.2007.11.028

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KEYWORDSComplaint;Palliative care;Announced death;Coconstruction;Symbolic efficacy ofspeech;Feeling of eternity

Summary The purpose of this study is to identify specific characteristics of complaints obser-ved in the palliative care setting and to propose a patient—physician relationship that wouldhelp the patient go beyond the complaint. In the context of terminal illness, a physcian’s wordsare cast beyond the patient’s power of representation. The patient’s anticipated knowledge ofhis—her own death undermines his—her narcissistic foundation, particularly the part of his—herpsychic life which refuses to die, the psyche’s point of infinitude. Thus, the words exchangedbetween the patient and the physician are inscribed in the patient’s psyche without repression.This is the point of trauma expressed in the patient’s complaint. However, in my opinion, thepatient’s complaint is also a subjective reaction. In this light, the complaint can be seen as adeveloping subjective experience. Indeed, by expressing a grievance, the patient resists subju-gation and attempts to unfetter the throngs of death. To get beyond the complaint, I propose arelationship with psychoanalysis where the goal is to transform the non repressed inscriptionsinto psychic conflicts. This method, centered on the symbolic efficacy of speech, and whichtakes into account the transfer, aims at nevrotizing the complaint. The patient is accompanied inhis—her search for meaning to gain an ultimate moment of subjective self-control. The cocons-truction method allows psychic conflicts related to the patient’s history to emerge. Progressi-vely, the patients’ words release him—her from the trauma of the announced death, creating

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a new temporality anchored© 2008 Elsevier Masson SAS.

Introduction

Dans le champ des maladies graves et des soins palliatifs,rares sont les patients à demander spontanément une aiderelationnelle. Ils sont aussi généralement réticents, voiremême refusent, de rencontrer spécifiquement le psycho-logue. Certes, cette résistance en partie liée à la facondont les soignants proposent cette aide, elle peut être aussipassagère (elle peut chuter une fois qu’un visage est missur la fonction), mais j’avancerais ici avec l’idée que cetterésistance est avant tout inhérente à la situation. En effet,les patients gravement malades ont souvent le sentimentqu’une expérience de parole risque d’être dangereuse pourleurs défenses psychiques. Il y a comme une peur de parler,une peur de se dévoiler et d’avoir à faire face à un soi-gnant avide d’inconscient, avide de forcer des liens entrela maladie actuelle et l’histoire ancienne. À l’hôpital, la viepsychique est peut-être le seul espace pour lequel le patientpeut encore dire « non ! » : c’est, au fond, le seul véritableespace intime qu’il lui reste.

Autrement dit, ces patients ne sont pas dans le registretraditionnel de la demande, et que celle-ci se déclineen termes « d’aide relationnelle », de « soutien psycho-logique », voire de « psychothérapie » ne change rien àl’affaire. Les patients ne demandent rien, mais se plaignent.

La clinique palliative convoque et confrontequotidiennement à la dimension de la plainte.

Ma thèse est de dire que c’est bel et bien à partir de ladimension de la plainte qu’une occasion de rencontre estpossible : en soins palliatifs, la plainte ne tient-elle pas lieude demande ?

Spécificités de la plainte dans le contextepalliatif

Même si « la plainte se déploie dans tout lien thérapeu-tique » [1], la clinique palliative offre des spécificités non

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he relation of uncertainty: the complaint loses its power.s droits réservés.

égligeables. Commencons par dire qu’un patient sub-ergé de douleur n’est pas en mesure de se plaindre :

e cri, le râle ou le gémissement sont des formes trèsudimentaires du langage mais elles n’ont pas spontané-ent vocation à établir d’échange avec l’entourage. Au

ontraire, « l’accomplissement de la plainte implique la pré-ence d’une première — même infime — prise de distancentre l’être et l’expérience » [2]. La plainte naît lorsquee patient se dégage de la sensation pure, lorsqu’il tente deapatrier l’expérience douloureuse dans des représentationsentales et dans un discours de souffrance. Selon Jacobi, lalainte est précisément « une parole sur ce qui est ou plutôtur ce qui se vit subjectivement » [2].

Pour tenter de définir le contexte dans lequel se trouvee patient pris en charge par un dispositif palliatif, pourssayer d’approcher ce qui se vit subjectivement, je partiraie la double idée suivante qui est de dire que, d’une part,a parole médicale constitue une effraction qui produit unelessure psychique et, d’autre part, que c’est précisémente cette blessure que s’origine la plainte.

La plainte naît donc d’une blessure créée en grandeartie par la parole médicale. Dans son texte Médecinet psychanalyse, Freud avance que « les paroles peuventaire une bien indicible ou créer de terribles blessures »3]. À partir de cette proposition, j’avancerai plusieursoints.

remier point

a parole médicale vient figer la certitude de la mort et aveclle, la vie psychique dans son rapport à la temporalité.n effet, cette donnée me paraît tout à fait fondamen-ale pour spécifier le contexte dans lequel se trouvent cesalades. Dans son ouvrage La médecine sans le corps [4],

icard montre le changement fondamental qui a lieu de nosours en médecine et qui tient au fait que le discours médicalst aujourd’hui entièrement attelé aux résultats d’exament aux imageries en lien direct avec la probabilité statis-ique. La médecine raisonne quasi exclusivement à partir

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es anticipations probabilistes, ainsi, c’est bel et bien leavoir médicobiologique qui organise le sens de la vie duujet gravement malade. La médecine actuelle, prédictive,icte par avance le destin du sujet.

euxième point

e nos jours, les médecins répondent bien souvent au piede la lettre à la demande des patients et des familles, danse réalisme et avec le souci de transparence.

La parole médicale fait naître une souffrance quiprovient d’un excès de savoir anticipé sur sa

propre mort.

Ainsi, la parole anticipatrice de mort vient-elle ébranlert faire vaciller l’être dans son ensemble. Il semble que laarole médicale vienne blesser le narcissisme et attaquer ceui reste, dans la vie psychique, des résidus encore agissante la toute-puissance infantile : vœux mégalomaniaques de’enfance qui renvoient, de près ou de loin, au sentiment’immortalité.

Le sujet s’est construit dans un rapport à une tempo-alité ouverte et incertaine (ce qui est la base même durojet de vie, du possible, de l’à-venir). Lorsqu’il entendvoquer par un médecin sa mort prochaine, l’édifice psy-hique sur lequel il s’est construit est déstabilisé. Il estossible de rapprocher ici les travaux de Benasayag lorsqu’ilcrit : « la vie désire la vie » [5], « elle est ce toujours danse devenir » [6]. Ce que Pascal avait dit à sa facon : « Nouse vivons jamais mais nous espérons de vivre » [7]. Tout celaenvoie à la dimension de l’espoir — sinon de l’espérance, à la force de vie qui se situe, selon moi, précisément,ans la propension du sujet à ne pas se résigner, dans saotentialité à ne pas s’assujettir au discours qui l’entoure,’est-à-dire ici le discours réaliste et prédictif sur la mortvenir.

roisième point

ette souffrance — peut être la plus radicale qui soitour l’humain —, issue des répercussions de la parole,’apparente à un traumatisme psychique. Pour Laplanchet Pontalis, le traumatisme est un « événement de la vieu sujet qui se définit par son intensité, l’incapacité oùe trouve le sujet d’y répondre adéquatement, le boule-ersement et les effets pathogènes durables qu’il provoqueans l’organisation psychique » [8]. À la suite de ces tra-aux, je pose que le traumatisme du soin palliatif naît deet en-trop de savoir sur sa propre mort qui vient faire intru-ion et excéder les possibilités de représentations. Dans cehamp, les événements de parole sont d’une intensité telleu’ils viennent déborder les capacités de représentations de’appareil psychique ; la vie psychique ne peut plus lier, neeut plus se représenter ce qui se dit dans la mesure où,

omme l’écrit Nancy, « la mort ne peut pas être acceptéesi accepter c’est reconnaître, incorporer et s’approprier »

9]. Des traces viennent alors s’inscrire dans la psyché sanstre refoulées et le plus souvent, la vie psychique s’arrête,e fige, se paralyse.

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J. Alric

lainte et rapport ambivalent de la viesychique à la mort

à où de nos jours les conceptions psychologisantes tendentrabattre entièrement la vie psychique sur la Conscience

t la Raison — et vont même le plus souvent jusqu’à nier’existence de l’Inconscient — la pensée freudienne tientompte de la vie psychique dans toute sa complexité. Danson œuvre, Freud n’a eu de cesse de donner une place cen-rale à la mort, dans une sorte de position fondatrice de laonstitution subjective.

Il nous invite tout d’abord à prendre en compte que laort est inscrite dans l’inconscient sur le mode de la répéti-

ion d’un événement psychique qui a déjà eu lieu. La mort seoge au cœur du fonctionnement psychique de chaque sujet,lle est située comme « toujours présente dans la vie de cha-un sur un mode du fonctionnement propre au psychisme »10]. En ce sens, la mort est un déjà-là. Autrement dit, ilxiste un mouvement de pensée qui s’appuie sur l’idée quea mort fait partie de la vie, qu’elle est naturelle, qu’ellee loge au cœur du fonctionnement subjectif, qu’elle estncontournable. Ainsi, le raisonnement rationnel qui s’y rat-ache invite-t-il tout un chacun à penser qu’il faudra, tôt ouard, s’y résigner. Et effectivement, pour une large part, leoi est en mesure de s’admettre périssable et de se recon-aître engagé dans une expérience limitée. C’est cette voieui pousse le sujet, en clinique de fin de vie, à prendren compte les limites de la réalité, les limites du pouvoirédical, bref à reconnaître la castration.C’est en 1915, dans Considérations actuelles sur la

uerre et la mort [11], que Freud découvre l’impossibleeprésentation de sa propre mort au regard de l’inconscient.ans cette seconde ligne de pensée, la mort est directe-ent reliée au déni/dénégation, processus inhérent à la

onstitution même de la vie psychique. Freud nous indiqueue l’inconscient est une instance psychique qui connaîtt se représente la mort de l’autre, mais qu’il en va toututrement lorsque cela nous concerne personnellement. Il’y a pas de représentation possible de sa propre mortans l’inconscient, c’est un impossible, un impensable, unrreprésentable. « Le fait est qu’il nous est absolumentmpossible de nous représenter notre propre mort, et touteses fois que nous l’essayons, nous nous apercevons que nous

assistons en spectateurs » [2] écrit-il. Autrement dit, leujet « ne croit pas à sa propre mort ou, ce qui revientu même, dans son inconscient, chacun est persuadé de saropre immortalité » [2].

Au regard de ces données, nous pouvons entendreombien l’annonce de maladie grave à pronostic létal peutaire intrusion et venir toucher ce point d’irreprésentablee la vie psychique.

Ce qui peut passer pour un humanisme (dire lavérité, être honnête et transparent. . .)

s’apparente, à un autre niveau, un forcagepsychique.

La parole fait forcage sur ce que le psychisme s’emploieaturellement à mettre de côté. Telle est la blessure la plusadicale qui soit pour l’humain dont je parlais plus haut.

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D’un possible dépassement de la plainte

Ce conflit d’ambivalence entre la connaissance ration-nelle de l’existence d’un terme à la vie et l’incapacité àse représenter sa propre mort est constitutif de la psyché,donc de l’humain. Le Moi du patient qui va bientôt mou-rir, à la fois, sait et ne sait pas. La proximité de l’échéancefatale « provoque une sorte de clivage du Moi, ayant pourconséquence le cheminement de deux lignes de penséescontradictoires, dont chacune s’exprime indépendammentde l’autre » [12]. C’est le : Je me sais mortel mais je meveux immortel.

Cette ambiguïté structurelle dans le rapport de la vie psy-chique à la mort est le point crucial pour ce qui nous occupeici. Ma Raison me pousse à reconnaître que je suis mortel,mais ma vie psychique dans son ensemble, dans toute sacomplexité et avec sa part d’irrationnel, s’accroche réso-lument à l’illusion que quelque chose du Moi est immortel.Malgré le principe de réalité maintes fois asséné par le dis-cours soignant, une part d’illusion demeure.

La psychanalyse démontre ici qu’il existe un lieu atem-porel dans la psyché. Par prolongement, l’inconscientrenverrait-il à la dimension de l’éternité ?

Nous pouvons faire le parallèle avec les travaux deLeclaire sur le processus de construction subjective qu’ildéveloppe dans son ouvrage « On tue un enfant » [13]. Ilindique que le meurtre symbolique (par et dans la parole)du narcissisme primaire est à la fois un geste nécessairemais aussi impossible dans sa totalité. Malgré toutes lesopérations successives de castration, l’enfant immortel,imaginaire, merveilleux et tout-puissant, avec toutes sesimpulsions, subsiste et reste logé en nous à jamais au cœurdu psychisme. Leclaire conclut : « la représentation narcis-sique primaire est ineffacable » [13]. Autrement dit, la partde la vie psychique qui renvoie au narcissisme primaire n’estjamais totalement révolue, elle ne cesse pas de pouvoirrenaître sous de nouvelles formes.

Les résurgences du sentiment d’éternité peuventse manifester au-delà de la castration, au-delà

de la menace de disparition.

La clinique palliative montre quotidiennement qu’unepart du psychisme se refuse à mourir, une part du psychismene cesse pas de refuser le destin qui l’attend et prouvepar là même que quelque chose en nous ne peut accepterd’être totalement destructible. Ce quelque chose est biendifficile à définir. Quelle terminologie pourrait être enten-dable pour le discours médical actuel : vœu d’éternité, soifde survivance, espérance, âme ?

Quoi qu’il en soit, ma thèse sera de dire que la ren-contre clinique palliative, par le médium de la parole et avecl’opérateur du transfert, est en mesure de remobiliser ceque le discours pragmatique médical a tenté d’atteindre etde faire disparaître, ce quelque chose de la toute-puissanceimaginaire (et le sentiment d’immortalité qui lui est attelé).

Comment remobiliser cette part d’illusion si essentielleà l’humain ?

Prise en charge de la plainte

Nous venons de voir que la parole qui reste centrée sur laréalité médicobiologique attaque de plein fouet la part de

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a vie psychique qui se refuse à mourir, la part non finie dea temporalité psychique, son point d’infinitude. . . C’est enela qu’elle fait trauma car elle incite le sujet à s’envisagerans une temporalité limitée alors même — et ce point estnhérent à la constitution subjective — qu’il n’est pas enesure de s’admettre totalement périssable.Il est important de repérer cela car c’est sur ce terrain

ue naît la plainte du sujet gravement malade ; c’est ceoint psychique de vacillement — voire d’effroi — que lalainte ne cesse pas de faire entendre.

Mais par ce mouvement même, le sujet blessé par la cer-itude de sa mort annoncée réagit ; au travers de sa plainte,l tente de mettre des mots sur la rencontre avec le réel dea mort, irreprésentable. La plainte ne serait-elle pas alors,our le patient, le seul et l’unique moyen de se dégager dee statut de mourant [14] qui se retrouve à attendre, résignét anxieux, l’heure fatidique ?

Le mouvement plaintif véhicule, dans sonessence même, une dynamique subjective qui

refuse de s’assujettir au discours réalisteambiant.

Autrement dit, la plainte et sa répétition donnent auujet la possibilité de reprendre en main ce qui le dépasse ete l’intégrer à son organisation symbolique, bref, de guériru trauma qui origine la plainte.

Ainsi, avec Jacobi, je pose que la plainte est expérienceubjective en devenir, étant entendu que toute parole adres-ée peut ouvrir un processus de symbolisation. Tant qu’il y ae la plainte, il y a de l’espoir, pourrait-on dire aussi. C’estlutôt l’absence de plainte qui signe une résignation à être,n renoncement du sujet à se faire entendre : même mor-ifère dans sa signification première, la plainte véhicule enutre une part d’élan vital. C’est un point que nous expé-imentons constamment dans cette clinique : même quandn sujet vient pour dire son désir de mourir, il affirme, danse même temps, qu’il garde confiance. . . Confiance dans laie de la parole et du langage. . . Confiance dans la mesureù il s’adresse encore à nous. Ainsi la plainte est « figure’interpellation, d’interlocution, elle est reconnaissance etnvocation de l’autre » [15]. Il s’agira donc de travailler,our tout thérapeute palliatif, à partir de ce besoin d’enasser par l’autre et de s’en remettre au psychisme d’unutre pour être reconnu en tant que sujet traumatisé et,lus fondamentalement, pour continuer d’exister.

La plainte est activée toutes les fois où des événementsécus dans la réalité attaquent le lien à l’Autre, Autre enant qu’instance psychique qui renvoie à la figure mater-elle qui, dans la construction subjective, protège de touses dangers. Ici, c’est la menace de mort qui, clairement,ient reconvoquer la perte primordiale. Nous pourrions direue l’événement de parole active le sentiment de pertet de séparation d’avec la mère mais aussi d’avec le lienaternel sur lequel se sont construites la reconnaissance et

’existence même du sujet. Ainsi la plainte tente de mettre

es mots sur cette rupture du lien mère—enfant et dans leême temps, espère restauration.Si l’on considère que le sujet qui se plaint se plaint de

a séparation de l’objet maternel, on peut dire qu’il ques-ionne l’expérience de la limite et du manque. Où l’on voit

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ombien la dimension de la castration est fondamentale-ent en jeu dans le mouvement plaintif. C’est une incom-létude qui nourrit la plainte et qui rappelle que l’hommest assujetti à la castration. C’est ce manque qui fait parlere sujet, ce manque qui le fait se plaindre. Celui qui se plaint’avance face à un autre comme manquant, et espère, sanse formuler, que cet autre aura ce qui lui manque.

uel positionnement clinique ?

e le disais plus haut, par le mécanisme de répétition, lalainte véhicule la trace d’un trauma que l’appareil psy-hique n’a pas pu mentaliser. Quelque chose s’est inscritans le psychisme sans se refouler et le sujet se retrouveomme suspendu à ces traces psychiques.

Y-a-t-il un positionnement clinique qui permette deransformer les choses ?

Existe-il une écoute spécifique pour dégager le sujet de’effroi et, par conséquent, de la plainte ?

Le silence bienveillant, l’écoute empathique etompréhensive, ont généralement peu d’effet sur laépétition de la plainte. Le simple partage émotionnel’assèche généralement pas la plainte. Pour dépasser lalainte, je propose un dispositif de rencontre au plus prèse la psychanalyse. Ce dispositif d’écoute et de parole visesymboliser le trauma, c’est-à-dire favorise la transforma-

ion des traces non refoulées en conflits psychiques. Cetteéthode d’écoute, qui a l’ambition en quelque sorte de

évrotiser la plainte, nécessite de nombreux ajustements.e premier d’entre eux consiste à soutenir radicalement leouvement spontané de la plainte.

justements de la méthodesychanalytique du côté du transfert

e partirai de la définition de la psychanalyse que donnentori et Hoffmann en tant que « méthode mise en œuvreans une pratique au sein d’un dispositif particulier’interlocution qui éprouve l’efficacité symbolique de laarole » [16]. Le transfert est l’opérateur de la méthode,a parole en est son médium.

En effet, l’opérateur principal de cette méthode est —ans le champ qui nous occupe encore plus qu’ailleurs — leransfert. Dans les textes La dynamique du transfert [17]t Observations sur l’amour de transfert [18], Freud parlee l’amour de transfert comme du véritable moteur du tra-ail psychique. Sans évidemment y répondre dans la réalitéoncrète, il convient de laisser se déployer les mouvementsffectifs (tendres, sexuels, haineux. . .) réellement ressen-is par le patient, étant entendu que, dans ce dispositif dearole, cette mise en acte de l’inconscient favorise le trans-ert de l’infantile sur la personne du thérapeute. Le travailonsiste alors à traiter ce transfert, c’est-à-dire, à extrairee la situation son contenu analytique.

insi concu, l’amour de transfert n’est-il pase véritable soin palliatif à la mort ?

n effet, d’une part, l’amour de transfert permet de parerl’angoisse de disparition par cet élan d’amour adressé et

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J. Alric

’autre part, rapatrié dans le champ de la parole et du lan-age, il possède une efficacité symbolique et a la propensione rouvrir la temporalité. Dans ce lien thérapeutique, leujet n’essaie-t-il pas de se reconstituer, voire de renaître,ans cet appel adressé à l’Autre. Ne cherche-t-il pas, danse dispositif de rencontre, une garantie qui lui permette deontinuer d’exister, c’est-à-dire de reconnecter avec ce quea parole médicale a fait vaciller : son sentiment d’éternité.

Dégager le sujet de sa plainte passe par la reconnais-ance que ces rencontres sont particulières dans la mesureù les mots et les paroles échangés modifient la nature deseux êtres en présence : « Chaque fois qu’un homme parleun autre d’une facon authentique et pleine, il y a au sensropre, transfert, transfert symbolique — il se passe quelquehose qui change la nature des deux êtres en présence » [19].e qu’avance ici Lacan renvoie à la dimension de la doubleencontre telle que l’a retravaillé et conceptualisé Stein20]. Cela consiste à laisser résonner les mots de l’autren nous, à se laisser travailler par eux.

Ce positionnement parie sur le fait que le repérage et’analyse des effets du discours du patient sur le théra-eute produit, en retour, des effets spécifiques sur le patientt sur sa vie psychique. En effet, au travers des dires duatient, celui qui écoute est personnellement interpellé : laouble rencontre oblige à se mettre au travail vis-à-vis dea question de la mort, de la finitude et de l’immortalité.

proximité de la mort, la parole de l’autre me concerneans la mesure où elle entre en résonance avec mes propresuestionnements d’humain se sachant mortel, mais aussi’humain refusant l’idée de sa disparition absolue et défini-ive. C’est en ce sens que le patient et celui qui l’écoute seetrouvent « porteurs mutuels des mêmes signifiants » [21].

justements de la méthodesychanalytique du côté de la dimensionarrative

a méthode psychanalytique se doit, selon moi, de s’ajusteru côté de la coconstruction de sens et de la dimensionarrative.

À proximité de la mort, la méthodepsychanalytique ne vise pas une déconstructiondu discours ; au contraire, elle favorise — voiremême participe — à la construction d’un sens.

En effet, il ne s’agit pas de priver le patient du sensu’il se donne pour se ressaisir. Il n’est pas impossible —t il est même bien souvent nécessaire — de, comme le ditegrand, « prêter ses mots et ses pensées » [22] au patient.’assomption du trauma ne se fait souvent qu’au prix de cerêt de signifiant, prêt qui sous-tend un engagement spéci-que pour celui qui écoute.

Selon moi, la plus grande des souffrances, c’est bel etien l’absence de sens sur cette souffrance de la fin de vie

rogrammée. Dans ce cadre, la greffe de sens impulse uneemise en route de la pensée : la coconstruction favorise unossible dépassement de la plainte.

Cette méthode de coconstruction tente, en effet,’éponger les effets de non-sens. C’est dans son texte

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D’un possible dépassement de la plainte

« Construction dans l’analyse » [23] que Freud évoque cetappel au narratif. Il indique que la construction a le mêmeeffet de vérité qu’un souvenir retrouvé. La participation duthérapeute dans la construction du récit se justifie lorsquela parole est absente, lorsque la remémoration vient à man-quer, lorsque seul l’affect se manifeste. . . Nous avons vu quele sujet qui se plaint reste fixé au trauma et répète inlassa-blement le trauma de sa mort annoncée. Ainsi, le narratifa-t-il comme effet bénéfique direct de réinscrire le sujetdans le temps, de rouvrir une nouvelle temporalité. Il s’agitde revisiter le passé pour mieux sauvegarder l’avenir.

Le patient est donc littéralement, accompagné dans satentative de reliaison et de rassemblement de sens au tra-vers duquel il tente un ultime ressaisissement subjectif.Dans ce temps de rencontre clinique, la méthode s’astreintdonc, à un travail de soutien du sens qui se crée au momentmême où il se dit. Pour dépasser la plainte, la méthoded’écoute se doit de répondre à ce besoin consubstantiel àl’être parlant de remettre du sens sur ce qui le dépasse.Ainsi le patient peut-il reprendre en main son destin. Sansinterprétation et sans déconstruction du discours, mais uni-quement par les effets de sens qu’elle entraîne, la méthodepermet au sujet de sortir de l’effroi et de remettre enroute la pensée, de sortir de la répétition mortifère de laplainte.

D’une certaine facon, cette cocréation de sens aide lesujet à comprendre. Cette compréhension atténue la souf-france : « Sommes-nous simplement, nous analystes, à cetteoccasion, ce quelque chose qui accueille ici le suppliant,qui lui donne un lieu d’asile ? Sommes-nous simplement, etc’est déjà beaucoup, ce quelque chose qui doit répondreà une demande, à la demande de ne pas souffrir, au moinssans comprendre ? — dans l’espoir que, de comprendre, il nelibérera pas seulement le sujet de son ignorance, mais de sasouffrance elle-même » [24], écrit Lacan.

Dans ce premier temps de rencontre clinique palliative,il s’agit de mettre entre parenthèse la réalité médicobiolo-gique pour mieux réinvestir la subjectivité qui se livre surle mode de l’imaginaire et relève de la vérité psychique.Ainsi, tout naturellement, le travail de la parole poursuitson œuvre, elle coconstruit un roman de la maladie. Ceroman fait émerger des souvenirs, des moments où la psy-ché a rencontré la mort. . . et l’a traversée. Le travail de laparole permet d’accéder à un mode de jouissance avec lamort comme quelque chose qui a déjà eu lieu, pourrait-ondire. Ainsi, l’effroi se transforme-t-il en souffrance psy-chique. L’événement traumatique passe alors du statut detrace au statut d’élément psychique refoulé. Des conflitspsychiques émergent et, dans le même temps, le méca-nisme de répétition — ressort de la plainte — chute. C’estcette dynamique intersubjective que j’ai nommé plus hautnévrotiser la plainte.

Conclusion

En soins palliatifs, la plainte ne cesse pas de répéter

l’effroi de la mort annoncée, elle tient lieu de demande etoccasionne la rencontre. Ainsi, c’est à chaque dyade théra-peute/patient d’inventer des modalités de sens qui lui sontpropres, de créer du sens pour tenter de sortir du traumaproduit par la parole médicale.

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Le possible dégagement de la plainte passe par ce pre-ier temps d’écoute que j’ai essayé de spécifier, tempsans lequel le psychisme du thérapeute assure la fonction’étayage pour le patient, temps dans lequel son propreésir est véritablement engagé et dans lequel le recours àa construction de sens est nécessaire. Dans la bulle transfé-entielle, les récits fictionnels créés tiennent lieu de vérité :ci le vrai c’est le mot juste, le mot qui convient. C’est « avece leurre, le semblant, l’à-peu-près, l’imaginaire (que la ren-ontre) permet des illusions d’être » [25]. Cette dimensionarrative permet à la plainte de se transformer en un récithargé de conflits psychiques. Le patient change alors deosition subjective, reprend en main ce par quoi il étaitépassé. L’efficacité symbolique de la parole ouvre un futurndéterminé, crée une nouvelle temporalité, chevillée à laelation d’incertitude.

Ce premier temps du travail d’écoute peut êtretenu par n’importe quel intervenant en soins

palliatifs.

Avec sa part d’humanité, celui qui s’engage là peut occu-er cette place symbolique pour un autre à un momentrucial de son existence. En aidant le patient à se reconnec-er avec ses rêves et ses croyances, il participe à dégager leujet de son noyau traumatique. Ensuite, lorsque le discours’est chargé de conflits psychiques, lorsque le patient aépassé la plainte, nous entrons dans un autre temps, tempsans lequel le patient est plus enclin, éventuellement, à for-uler une véritable demande d’aide psychothérapeutique.

éférences

[1] Jacobi B. Les mots et la plainte. Ramonville St-Agne: Erès;1998.

[2] Jacobi B. À corps et à cris : le sujet de la plainte. CliniquesMéditerranéennes 37/38, Cliniques du corps en souffrance.Toulouse: Erès; 1993. p. 139—49.

[3] Freud S. (1926). Psychanalyse et Médecine, in Ma vie et lapsychanalyse. Paris: Gallimard, 1972, 95—184.

[4] Sicard D. La médecine sans le corps. Paris: Plon; 2002.[5] Benasayag M. Le mythe de l’individu. Paris: La Décou-

verte/Poche; 1998, 2004.[6] Damascius, cité dans Benasayag M., Ibid.,.[7] Pascal. Pensées, 1897, Trad. L. Brunschvicg. Paris: Flammarion;

1976.[8] Laplanche J, Pontalis JB. Vocabulaire de la psychanalyse. Paris:

PUF; 1967.[9] Nancy J.L. Heidegger et la vie sans mort, in Le nouvel obser-

vateur du 17 au 23 juillet 2003, 2003, 16—7.10] Juranville A. Réflexion psychanalytique sur les soins pallia-

tifs, dans la revue Psychanalyse à l’Université, Tome 19, no 75,juillet 1994. Paris: PUF, 1994, 43—64.

11] Freud S. (1915). Considérations actuelles sur la guerre et lamort, dans Essais de psychanalyse. Paris: PBP, 1971, 235—67.

12] De M’Uzan M. Le travail du trépas, in De l’art à la mort. Paris:Gallimard; 1976. p. 182—99.

13] Leclaire S. On tue un enfant. Paris: Seuil; 1975.14] Higgins R.W. « L’invention du mourant. Violence de la mort

pacifiée », in Revue Esprit, janvier 2003, 1, 139—68.15] Jacobi B., 1993, Op. cit.16] Gori R. & Hoffmann C. Pour une épistémologie des recherches

en psychopathologie, in Le Journal des psychologues, No 185,2001, Revigny: Martin Média, 29—35. 2006.

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[24] Lacan J. 1959—1960. Le séminaire, Livre VII : l’éthique de la

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17] Freud S. 1912. « La dynamique du transfert », in La techniquepsychanalytique. Paris: PUF, 13e éd. 1999, 50—60.

18] Freud S. 1915. « Observations sur l’amour de transfert », in Latechnique psychanalytique. Paris: PUF, 13e éd. 1999, 116—30.

19] Lacan J. Le Séminaire, Livre I., Les écrits techniques de Freud.

Paris: Seuil; 1953—1954, 1975.

20] Stein C. L’enfant imaginaire. Paris: L’espace analytique,Denoël; 1971, 1987.

21] Pujol R. Le primat du signifiant, in Études freudiennes, 27,1986, 179—82.

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J. Alric

22] Legrand M. L’aide psychologique en fin de vie, in Le journal despsychologues, no 204, 2003, 36.

23] Freud S. 1937. Construction dans l’analyse, in Résultats, idées,

psychanalyse. Paris: Seuil, 1986.25] Kristeva J. Au commencement était l’amour : Psychanalyse et

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