Droite française, fascisme italien influences croisées sur la Garde de Fer_Rome-STUDIA_POLITICA

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    Droite franaise, fascisme italien : influences croises sur la Garde de Fer

    Paradoxalement, dans les crits thoriques des principaux chefs et idologueslgionnaires, les allusions Mussolini et Hitler non seulement ne sont pas trs nombreuses,mais se rapportent rarement aux questions de doctrine : les lgionnaires, seuls vritables

    fascistes roumains dignes de ce nom 1

    , se contentent la plupart du temps de citer leursnoms et quelques notions idologiques de manire aussi logieuse quallusive. Ils singnientmme souvent se distinguer de leurs illustres modles, en insistant sur la spcificitreligieuse du lgionarisme, alors que le fascisme tait ax sur une religion de ltat et lenazisme sur une hirarchie des races.

    La rponse pourrait sembler simple premire vue : en vritables fascistes, leslgionnaires, pour mobiliser les masses, adaptent leur discours aux ralits monarchiques,agraires et religieuses dune socit roumaine en retard par rapport aux socits urbaines etindustrielles qui avaient permis des rgimes fascistes de simposer. Ce qui frappe alorsdavantage sont le nombre et le caractre logieux des rfrences aux doctrinaires de la droitefranaise, et notamment ceux de la non-fasciste, anti-allemande -et parfois anti-lgionnaire !-

    Action Franaise. Outre leur orientation pro-hitlrienne en politique internationale2, les deuxpartis s'cartent sur le plan doctrinaire par l'opposition classique entre adeptes de l'tattotalitaire soumis au parti, et monarchistes partisans de la rgle de subsidiarit et de ladcentralisation.

    Nanmoins, la Lgion de l'Archange Michel prsente un certain nombre de traitsatypiques qui peuvent la rapprocher du courant de l'Action Franaise, et encore davantage deses dissidents de Je suis partout. Prenant racine dans un pays agraire, elle tait oblige demlanger son radicalisme totalitaire d'lments plus traditionnels -comme la fidlit lamonarchie et la foi chrtienne-, si elle voulait toucher des masses rurales difficiles politiser.3De leur ct, les monarchistes franais avaient got l'autoritarisme centralisateur de l'Unionsacre pendant la guerre et apprci la mobilisation de Mussolini contre les socialistes. Lepremier visage du fascisme tait donc alli, latin, fonctionnant thoriquement au sein de lamonarchie et se rconciliant avec la religion en 1929. La Lgion, avec ses rfrencesromaines, pouvait donc juste titre apparatre comme une mule de sa sur latine,l'antismitisme radical en plus.

    La problmatique rside donc dans l'ventuelle convergence des influences de la droitefranaise et du fascisme italien envers la Lgion pro-allemande. Celle-ci a-t-elle instrumentl'hritage des penseurs ractionnaires franais pour crer une impression de convergence etneutraliser les critiques de la droite nationaliste franaise ? Ou bien est-elle caractristique desmouvements fascistes centre-europens, sortes dponges syncrtiques des traditions localeset des grandes influences des droites europennes, lessentiel rsidant dailleurs dans le style

    1 Voir Traian SANDU, Le renouvellement de l'histoire politique roumaine de l'entre-deux-guerres , dans SANDU, Traian(sous la direction de), Illusions de puissance, puissance de lillusion, historiographies et histoire de lEurope centrale dansles relations internationales de lentre-deux-guerres, L'Harmattan, coll. Cahiers de la Nouvelle Europe, 2005, et lesrfrences qui y sont cites, notamment HEINEN, Armin, Die Legion Erzengel Michael in Rumnien : soziale Bewegungund politische Organsation, ein Beitrag zum Problem des internationalen Faschismus, Munich, 1986, traduite en roumain en1999 Bucarest, chez Humanitas, 546pp.. Voir son chapitre XI ( La dfinition conceptuelle du mouvement lgionnaire ) etparticulirement la p.467 de ldition roumaine : De tous les partis roumains de lentre-deux-guerres, seule la Lgion peuttre appele fasciste . Des synthses densemble aboutissaient aux mmes conclusions : Pierre MILZA, op. cit., p.382 etpp.467-468.2 Voir, entre autres, Constantin PETCULESCU,Micarea legionar, mit i realitate (le mouvement lgionnaire,mythe et ralit), Bucarest, Ed. Noua Alternativ, 1997, 319p., chapitre 5 : "Sub semnul simpatiei i proteciei

    naziste" (sous le signe de la sympathie et de la protection nazies), pp.155-182.3 Voir, entre autres, Traian SANDU, "La gnration fasciste en Roumanie : recrutement, doctrine, action", dansHistoire, conomie et socit, n3-2003, pp.437-449.

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    Manuscrit auteur, publi dans "Analele Universitii Bucureti Anne VI (2004) 61-77"

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    de la jeune gnration structure par les chocs de la Grande Guerre et des remaniementsterritoriaux plus que dans le fond doctrinaire ?

    Le corpus idologique lgionnaire est donc redevable dune interrogation sur la placedes penseurs monarchistes, rvolutionnaires de droite ou racistes franais, au vu de leur

    prestige et de leur droit danesse. A linverse, quelle fut la perception de la droite franaise

    lgard des sympathies internationales des lgionnaires, et plus prcisment de leur chefCodreanu ? De son ct, lItalie fasciste mit-elle autant de temps que lAllemagne nazie avantde donner de limportance, sinon une prfrence, la Lgion sur les autres droites roumainesplus traditionnelles ?

    Deux idologies souvent antithtiques

    Les grands doctrinaires lgionnaires ont utilis de prfrence le seul penseur fascistefranais, Georges Valois, de prfrence Mussolini, qui avait russi politiquement et quon

    pouvait leur reprocher dimiter sans oublier que sa politique rvisionniste favorisant laHongrie pouvait aussi apparatre dangereuse pour la dfense des frontires roumaines.

    Les lgionnaires ont emprunt Maurras sa critique de la dmocratie, mais ne l'ont passuivi dans sa vision du monde et de l'tat. Ils ne lui ont pris que les aspects ngatifs, critiques,mais pas la dimension positive de sa thorie, l'exception d'une fidlit monarchique de plusen plus thorique, aussi bien chez les maurrassiens -en dlicatesse avec le prtendantorlaniste- comme chez les lgionnaires -en conflit ouvert avec le roi Carol II-, sans parler desfascistes -pour lesquels le roi tait au mieux un pantin, au pire un frein traditionaliste lordrenouveau. videmment, les influences thoriques de Georges Valois -le seul fasciste franaisvritable- contribuent davantage la construction du modle d'tat lgionnaire ; quant uneventuelle contribution thorique du fascisme italien, sa cristallisation tardive en 1930 etmme sa pratique avec les lois fascistissimes de 1926 taient tardives pour prtendre prsider la naissance de la Lgion en juin 1927. Surtout, les lgionnaires devaient viter lesaccusations dimitation et Mussolini celles dexportation du feu sacr national.

    Le monarchisme et le nationalisme pouvaient tre des influences maurrassiennesmajeures sur le lgionarisme. Certaines pages de Codreanu sur "la dmocratie contre lanation" de son principal ouvrage, Pentru legionari4(pour les lgionnaires, traduit en franaispar La Garde de Fer) sont inspires de Maurras : l'attentat perptuel contre l'unit de lanation, contre la continuit en politique, contre l'indpendance de l'homme politique esclavede son parti, de ses financiers et d'un lectorat inculte, voil autant d'arguments qui constituentles titres du chapitre "le parlementarisme" des Ides politiques du monarchiste franais :

    "l'instabilit obligatoire, absence d'esprit national, le parlementarisme pur ou le rgne del'argent".5 Si Codreanu ne cite jamais les noms des thoriciens et des hommes politiquesfranais, il voque avec motion la France ternelle l'occasion de son sjour doctoral Grenoble en 1926.6 Il dmarque alors clairement la thorie de Maurras sur la diffrence entre"pays rel" et "pays lgal" :

    "Aussi, en quittant la France, je faisais une grande diffrence entre le peuple franaiset l'tat maonnique franais."

    4 CODREANU, Corneliu Zelea, La Garde de Fer, Grenoble, Coll. "Omul nou, 1972, 470 pp. (premire dition1936) p.383-401.5 MAURRAS, Charles,Mes Ides politiques, Paris, Albatros, 1986, 319 pp. (premire dition 1937), p.217-226.6

    Op.cit., pp.245-261. Voir notamment p.248 : "je m'imaginais vivre au milieu de la France historique, de laFrance chrtienne, de la France nationaliste et non au milieu de la France maonnique, athe et cosmopolite;dans la France de Bayard, non dans la France de Lon Blum."

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    "Je garde non seulement de l'amour pour le peuple franais mais aussi la convictioninbranlable que ce peuple ressuscitera et triomphera de l'hydre qui pse sur lui, qui l'aveugle,qui puise ses forces, qui compromet son honneur et son avenir."7

    D'autres membres ou compagnons de route de la Garde citent explicitement le nom deMaurras et de dissidents de l'Action Franaise, sans faire de distinction entre les deux

    courants et sans s'immiscer dans les dbats internes de la droite nationaliste franaise. Ainsi,l'conomiste Mihail Manoilescu, ancien ministre et gouverneur de la Banque Nationale,thoricien de l'tat totalitaire et corporatiste, qui se prsenta sur les listes de la Garde endcembre 1937, publiait-il ses ouvrages directement en franais et se rjouissait de toutes lesoccasions de rapprochement franco-italien.8 Le thologien et publiciste Nichifor Crainic,thoricien de l'tat ethnocratique, sorte de fondamentalisme orthodoxe, avait t entre 1931 et1933 le mentor de la Garde, dont il n'approuvait pas l'antismitisme systmatique et le recours la violence; il gardait en mmoire avec motion sa participation aux festivits du centenairede la naissance de Mistral en 1930 et un discours que Maurras avait particulirement got. 9

    C'est surtout le cas de Vasile Marin, brillant docteur en droit, un des deux lgionnairesmorts pour Franco prs de Madrid le 13 janvier 1937, et qui crivait mme ses proches en

    franais. Dans son recueil d'articles Crez de generaie (Credo d'une gnration), qui rassembledes crits de 1933 parus dans la revue Axa, il cite naturellement Barrs10 ou loue Maurras,qu'il nomme "le thoricien de l'tat moderne, le gant Charles Maurras" 11, il dplore lesattaques contre "les patriotes des ligues".12 Ailleurs, il se contente d'une priphrase lorsqu'ilreprend la thorie de Maurras selon laquelle "le nationalisme est monarchique par essence" et"toute dmocratie est toujours de fait, et surtout de jure, comme l'crivait un grandnationaliste, un effort continu vers le rpublicanisme."13 Nous trouvons aisment unerfrence dans le chapitre des Ides politiques : "l'tat dmocratique : la Rpubliquefranaise".14

    Mais les lgionnaires roumains passent sous silence la grande diffrence qui les sparedu nationalisme conservateur d'un Spengler ou mme d'un Maurras. Maurras est clairementhostile l'tat totalitaire, car il le juge, comme Spengler, d'essence dmocratique : il s'appuiesur la mobilisation des masses par des dmagogues issus du peuple, au dtriment del'organisation traditionnelle de la socit et des lites historiques "naturelles", l'aristocratie.15Tel n'est videmment pas l'opinion des lgionnaires, qui en appellent non seulement unervolution politique, mais aussi une guerre des gnrations pour imposer un hommenouveau et la mobilisation des masses.

    Le moyen ne rside pas dans la rflexion thorique fonde sur la raison, si importantechez Maurras. Il consiste dans l'espoir d'avoir cr l'instrument -la Lgion de l'Archange

    7Op.cit., p.261.8 MANOILESCU, Mihail,Memorii, vol.II, Bucarest, Ed. Enciclopedica, p.339.9 CRAINIC, Nichifor, Zile albe, zile negre, Memorii (jours blancs, jours noirs, mmoires), Bucarest, Casaeditorial Gndirea, 1991, pp.216-219.10 MARIN, Vasile, Crez de generaie (Credo d'une gnration), Bucarest, Ed. Majadajonda, 1997, p. 169 :"Notre salut ne peut venir que de l'intgration de notre lutte politique dans la sphre du nationalisme crateur,dont nous gardons intacte la dfinition telle que l'a formule en son temps Maurice Barrs : "Le nationalismeordonne juger tout par rapport son pays natal."" (cit en franais dans le texte)11 MARIN, op.cit., p.121.12Ibid., p.150.13Ibid., p.170.14

    MAURRAS, op.cit., p.213-216.15 Voir, par exemple, MAURRAS, op.cit., p. 176-177 : "L'tat n'est qu'un organe, indispensable et primordial, dela socit. L'tat, quand il est bien institu, n'a presque pas affaire aux individus."

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    Michel- permettant de doter la Roumanie d'un homme nouveau.16 L'idologie fasciste croit la possibilit de la rvolution individuelle et sociale. Car avant de s'en prendre l'ennemi etd'en purger la socit, encore faut-il avoir pralablement pur son me et vrifi son proprepatriotisme. Rien de commun chez Maurras avec cette introspection exigeante et cette volontde changer lhomme, caractristique du nationalisme centre-europen, inquiet de son identit

    rcente, mal assur de sa lgitimit dans un contexte multi-ethnique et appuy sur les faiblesforces de petites puissances.17De mme, le fascisme fait donc appel au peuple et s'en prend aux lites traditionnelles,

    dnommes oligarchie. Et lorsque Vasile Marin veut escamoter cette diffrence entre Maurraset Valois, il les cite successivement sur les points de dsaccord et ne les rapproche que sur lespoints de convergence. Ainsi, c'est Valois qui est invoqu sur les modalits de gouvernement,mais en mlant habilement son nom celui de Maurras :

    "Depuis toujours le gouvernement d'une nation s'est fait selon deux modalits (G.Valois) :"

    "1. Ou bien l'tat fait alliance avec le peuple pour rduire et soumettre les puissants la discipline nationale et sociale;"

    "2. Ou bien l'tat s'allie l'oligarchie - l'poque moderne, la ploutocratie- pourmaintenir la nation dans la dpendance. La premire politique pourrait tre considre commeune politique de "gauche" -donc propre aux dmocraties; la seconde serait une politique "dedroite", propre aux rgimes absolutistes et arbitraires."

    "[]""Que se passe dans la France "de gauche" ? C'est encore Georges Valois qui nous le

    dit, en accord avec tous les penseurs politiques de l-bas, confirm par Charles Maurras quispare depuis longtemps la "France relle" de la "France lgale" : "Sous le nom dedmocratie parlementaire, nous avons le rgne des puissances de l'argent, dirige par une

    sorte de gouvernement des banquiers.""18videmment que Maurras souscrivait pleinement cette analyse, mais tout aussi

    videmment il ne pouvait que rejeter la lgitimation par le charisme populaire propre auxrgimes fascistes. Une autre diffrence importante avec le fascisme rsidait dans la mthodede la violence : mme si Maurras avait plusieurs reprises menac d'y recourir pour abattre laRpublique, il en tait rest la parole et refusait le conflit civil qui aurait dstabilis le payspour appliquer sa doctrine.19 Enfin, un personnage comme le chef de la Ligue de la DfenseNationale-Chrtienne, Alexandru Constantin Cuza, le vieux thoricien du nationalismeantismite roumain, distinguait nettement son antismitisme fondamental et liminateur del'antismitisme assimilateur de Maurras.20

    16 CODREANU, op.cit., p.282-283 : "De l'cole lgionnaire un nouvel homme devra natre, avec les qualits du

    hros : un gant de notre histoire, qui combattra et vaincra tous les ennemis de la Patrie."17 MICHEL, Bernard,Nations et nationalismes en Europe centrale, XIXeXXe sicle, Paris, Aubier, 1995, p.8-9: "La violence du nationalisme n'est pas tourne vers les autres : elle est d'abord interne, elle cherche rassembler les membres de sa nation, faire d'eux des acteurs plus conscients, plus solidaires. Depuis le dbutdu XIXe sicle, c'est en soi que rside l'ennemi qu'il faut combattre pour devenir un meilleur citoyen de sanation."18 MARIN, op.cit., p.181-182.19 Voir les sections aux titres suggestifs de SERANT, op.cit., pp.271-278 : "le mythe du "coup de force" et"l'volution "droitire" de l'AF".20 Voir, entre de nombreux crits, son article du 8 avril 1928 "La doctrine nationale chrtienne -le cuzisme-",dans Aprarea naional, cit dans Idea care ucide, dimensiunile ideologiei legionare (l'ide qui tue, lesdimensions de l'idologie lgionnaire), sous la direction de PETCULESCU, Constantin et de FLORIAN,Alexandru, Bucarest, Ed. Noua Alternativ, pp.191 : "Ainsi l'"antismitisme", en dernire instance, pourrait aussi

    revtir cette forme de lutte contre la collectivit, mais en excluant les individus, comme elle a revtu en Francepar exemple, depuis peu, travers l'Action Franaise, la forme non moins paradoxale de lutte "contre les juifs,avec les juifs" et d'autres formes ailleurs." Sur l'idologie national-chrtienne, voir SANDACHE, Cristian,

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    Ainsi, lorsque Vasile Marin crivit Maurras au dbut de 1934, au moment du procsconscutif l'assassinat de Duca pour l'amadouer et changer l'image de la Garde en France,nous n'avons pas de trace d'une rponse de Maurras ou d'un changement de la ligne ditorialede l'Action Franaise; pourtant, la flatterie pouvait toucher le vaniteux intellectuel :

    "Je parle en mon nom et au nom de tous ceux d'entre nous qui aimons la France, la

    vraie France, celle que vous nous avez rvle par cette magnifique Action Franaise, parvotre monumentale Enqute sur la Monarchie, par toute votre uvre et par vos admirablesarticles quotidiens de l'Action Franaise."

    "Vos ides, vos doctrines, nous ont puissamment aids trouver notre propre voie."21L'opportunisme ne doit pas d'ailleurs occulter la sincrit de ces propos, mais

    l'Action Franaise on avait, comme nous le verrons de suite, une trop haute ide des intrtsde la France pour les corner au nom d'une convergence idologique.

    Sur les relations entre doctrine lgionnaire et fascisme -y compris dans sa variantenazie-, Codreanu a eu des propos contradictoires. Dune part, il a accus la distinction entrelgionarisme religieux et fascisme laque tatiste, dautre part il a rapproch la Lgion des

    grandes doctrines europennes de la rvolution nationale.La divergence entre Lgion et fascisme relevait la fois de lantriorit suppose du

    combat lgionnaire -que Codreanu faisait remonter 1919- et, plus srieusement, dunelgitimation doctrinaire diffrente. Codreanu lexplique loreille complaisante du philosopheJulius Evola, lui-mme thoricien dun racisme sui generis, moins fond sur les prtentionsbiologiques comme en Allemagne que sur des critres spirituels22 ; en visite en Roumanie auprintemps 1938, Evola pense trouver en Codreanu la fois un disciple ignor, un reprsentantde la race suprieure aryo-romaine thorise par Evola et surtout un argumentsupplmentaire pour influencer la radicalisation en cours depuis 1936 Rome dans le sens duracisme.23

    Lhomme est constitu dabord dun organisme, donc dune forme organise ;ensuite, de certaines forces vitales ; et enfin, dune me. On peut en dire autant dun peuple.Toutefois, bien que reprenant naturellement tous les trois lments, il est possible queldification nationale dun tat, en raison de certaines diffrences hrditaires et de dotation,soit plus particulirement influence par certaines dentre elles.

    Daprs moi, dans le cadre du mouvement fasciste prdomine llment tatique,lquivalent de la forme organise. On ressent alors les valences formatrices de la Romeantique, indpassable en matire de droit et dorganisation politique, et dont le vritablehritier est le peuple italien. Le national-socialisme, linverse, met en vidence ce qui est liaux forces vitales : la race, linstinct de la race, llment national-ethnique. Dans lemouvement lgionnaire roumain, laccent se porte sur ce qui, dans un organisme, correspond

    llment me, donc laspect spirituel et religieux.

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    Durant sa dernire dtention avant lassassinat, Codreanu, dprim et imprgn dumartyre christique, renouvela sous une autre forme cette dimension de mon royaume nestpas de ce monde :

    Nous nous proccupons des victoires sur les hommes et nous les aimons, et non lesvictoires sur le Diable et le pch.

    Doctrina naional-cretin n Romnia (la doctrine national-chrtienne en Roumanie), Bucarest, Paideia tiine,1997.21 MARIN, op.cit., pp.91-92.22

    Voir une rapide allusion chez MILZA, op. cit., p.442.23 EVOLA, Julius,Naionalism i asceza (nationalisme et ascse), Bucarest, Fronde, 1998.24Idem., pp.42-43.

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    Tous les grands hommes dhier et daujourdhui :Napolon, Mussolini, Hitler, etc.,sont davantage proccups de ces victoires.

    Le mouvement lgionnaire fait exception, soccupant aussi, insuffisamment il estvrai, de la victoire chrtienne lintrieur de lhomme, en vue de son salut. 25

    Ces distinctions avaient les avantages de donner au cas roumain une spcificit

    atemporelle par rapport aux modles dominants, de le ddouaner des accusations de cinquime colonne des fascismes, plus fondamentalement de justifier la ractionautochtoniste et orthodoxiste du nationalisme roumain. Codreanu veut largement ignorer leprojet de rvolution spirituelle en vue de crer un homme nouveau qui fonde le fascisme etdont Emiliano Gentile sest fait lhistorien.26

    A linverse, dans Pentru Legionari, Codreanu inscrit son mouvement dans lestotalitarismes de droite europens. Certes, il rappelle abondamment que le rgime politiqueenvisag est cautionn par la bndiction des anctres et de Dieu. Mais il rappelle aussi lesconvergences essentielles entre lgionarisme et fascismes dans une section consacre aux"mouvements nationaux et la dictature" :

    "Je ne veux pas faire dans ce chapitre, la critique de la dictature, mais je dsire

    dmontrer que les mouvements et les rgimes nationalistes dans l'Europe actuelle, comme lemouvement lgionnaire, le Fascisme, le National-Socialisme, etc., ne sont ni dictatoriaux, nidmocratiques."

    "[]""Par la contrainte et la violence, on pourrait la rigueur gagner des voix et des

    majorits, arracher des larmes et des soupirs. Mais a-t-on jamais vu et verra-t-on jamais,mme chez les peuples les plus inconscients, la ferveur et l'enthousiasme natre de laterreur ?"

    "Puisqu'il n'est pas dictatorial dans son essence, qu'est-ce alors qu'un rgimenational ?"

    "Est-ce un produit de la dmocratie ? Pas davantage. Car le chef n'est pas lu par lepeuple, et la dmocratie est fonde sur le principe de l'ligibilit. Or dans les rgimesnationaux, le chef n'est pas lu, il est consenti."

    "[]""Sans le dfinir, il faut reconnatre simplement qu'il ralise une nouvelle formule de

    gouvernement sui generis, dans les tats modernes. Cette formule, on ne l'a pas rencontrejusqu' prsent et on ne sait pas encore quel nom elle va prendre."27

    On le savait pourtant fort bien, puisquil sagissait dune dfinition gnrique dufascisme. Mais dans son lan, Codreanu oublie trangement pendant un instant ses rfrencesreligieuses et lacise son discours, jetant une perspective de synchronisme europen de droitesur la Lgion :

    "Quant la conscience nationale, elle est l'effet d'une rvlation intrieure. Lesinstincts de conservation qui gisent confus dans le subconscient du peuple, jaillissent unmoment donn avec force et se projettent dans la conscience de chacun. Il se cre alors cettat d'illumination, cette exaltation unanime, que l'on rencontre seulement dans les grandscourants religieux. On pourrait juste titre appeler ce phnomne : un lan d'cumnismenational."

    "[]""[Le chef] est l'incarnation de cet tat de conscience invisible. Il ne fait pas ce "qu'il lui

    plat", mais ce qu'il doit faire. C'est uniquement dans le cadre de ces intrts largementconus que les besoins individuels et collectifs trouveront leur maximum de satisfaction."28

    25

    CODREANU, C.Z.,nsemnri de la Jilava (Notes de Jilava), Bucarest, Ed. Majadajonda, 1995, pp.49-50.26 GENTILE, Emilio,La Religion fasciste, Paris, Perrin, 2002.27Ibid., p.310-311.

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    Codreanu s'inscrit donc dans un autre ordre de lgitimation de son mouvement, quirelve de la religion laque de type fasciste, o le chef est une sorte de pythie inspire parl'ethos national. Certes, si l'essence de la roumanit est l'orthodoxie, il peut retrouver sondiscours traditionnel, mais il ne rejette pas non plus cette justification "dmocratique"unanimiste d'un ventuel exercice du pouvoir.

    Son discours fondement religieux apparat, un instant du moins, comme unefabrication l'attention de la paysannerie, sans que l'on puisse mettre en doute pour cela la foiprofonde de Codreanu et, de toute manire, le besoin de traditionalisme dans tout fascismeagraire.

    Le monarchisme de Codreanu, tant de fois affirm, ne peut certes pas tre rduit unsentiment traditionnel envers une institution patriarcale, mme dynamise par un monarque

    jeune et autoritaire. Sans mme voquer le conflit avec Carol, il faut citer ici les mmoiresdun proche, le prtre orthodoxe Ion Dumitrescu-Bora, secrtaire gnral de la Lgion, quirapporte les propos suivants de Codreanu sur la royaut :

    On sest demand si nous tions royalistes. Nous avons eu, ainsi que nous lenseigne notre histoire, de

    bons seigneurs et des mauvais. Nous sommes pour les bons seigneurs, lus de lme-lite de la nation roumaine.Jai prconis pour cela: nous resterons royalistes, mais au sein de ltat lgionnaire ; nous choisirons au sein dela nation 10 20 lments jeunes, parmi les meilleures familles, qui ont fait preuve de capacits intellectuellesexceptionnelles et qui sont dots des qualits et des caractres les plus nobles. Ces jeunes seront levs, duquset instruits par les meilleurs professeurs, aux frais de ltat, et parmi eux seront recruts le roi et ses conseillers.Nous resterons dans le respect des lois et des traditions de la nation, lis lglise et la foi chrtienne. 29

    Au-del de la charge contre Carol, dorigine trangre et la vie prive tumultueuse,Codreanu dresse le portrait dun monarque endoctrin parltat lgionnaire, soumis au chefdu Parti. En somme, il sagissait de faire en plus absolu ce que Mussolini avait fait de Victor-Emmanuel III, car contrairement ce que le Duce affirmait la fin de son rgne, la dyarchieroi-chef fasciste stait bienpasse et navait pas entrav le rgime.30

    Bref, le lgionarisme se prsente comme un fascisme mineur sur le plan idologique.Non seulement il est oblig de concder la tradition la soumission formelle la religion et la monarchie, mais il ne peut se permettre de rompre avec les penseurs traditionalistes desgrandes puissances de rfrence, que ce soit Spengler ou Maurras. La diffrence d'attitudeavec un Hitler au pouvoir, qui se permet d'ignorer avec malveillance Spengler, est frappante. 31Nanmoins, cest cette capacit mme sadapter aux spcificits nationales pour mobiliserles masses dans des conditions socio-culturelles difficiles, qui fait du lgionarisme unfascisme, le seul en Roumanie qui puisse prtendre ce qualificatif.32

    28Ibid., p.311-312.29 Ion Dumitrescu-Bora, Cal troian intra muros, memorii legionare (cheval troyen intra muros, mmoireslgionnaires), Bucarest, Lucman, 2002, 461pp., p.184. (notre traduction)30 Voir Salvatore Lupo,Le Fascisme italien, Paris, Flammarion, 2003 (2000 pour la version italienne), 498 pp.,p.475.31 BENOIST, Alain de, prface auxAnnes dcisives de SPENGLER, Oswald, Paris, Copernic, 246pp., p.14.32 HEINEN, Armin, Die Legion Erzengel Michael in Rumnien : soziale Bewegung und politischeOrgansation, ein Beitrag zum Problem des internationalen Faschismus, Munich, 1986, traduite en roumain en1999 Bucarest, chez Humanitas, 546pp.. Voir son chapitre XI ( La dfinition conceptuelle du mouvement

    lgionnaire ) et particulirement la p.467 de ldition roumaine : De tous les partis roumains de lentre-deux-guerres, seule la Lgion peut tre appele fasciste . Des synthses densemble aboutissaient aux mmesconclusions : Pierre MILZA, op. cit., p.382 et pp.467-468.

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    La msentente en politique trangre : aggravation avec lAction Franaise,convergence croissante avec lItalie aprs laxe Rome-Berlin

    Si les lgionnaires clamaient leur amour pour la France ternelle, il n'en restait pasmoins que la France du moment reprsentait la dmocratie dteste, rpublicaine et de

    gauche, et qui essayait d'intgrer la Roumanie une alliance franco-tchco-sovitique contrel'Allemagne.33 Or l'Action Franaise restait nettement hostile l'Allemagne, et mme sesdissidents de Je Suis partoutn'avaient pas la complaisance de mise sous l'Occupation. Nouspouvons le vrifier au travers de deux sries d'articles : ceux de Jacques Bainville dans

    L'Action Franaise, rdigs entre 1927 et 1934 et rassembls dans son recueil de 1937 LaRussie et la barrire de l'est

    34, et ceux de Lucien Rebatet rdigs durant l'anne 1938, avant etaprs l'assassinat de Codreanu en novembre sur ordre de Carol II et publis dans Je suis

    partout.35Quant au fascisme italien, son hostilit envers lAllemagne nazie jusqu l a fin de

    1936 tait ressorts multiples -go-stratgiques et ethniques sur le Brenner, de comptitionconomique dans le bassin danubien et de concurrence idologique envers les mouvements

    nationalistes europens, lItalie prtendant la prminence et lantriorit.

    Le ton de Bainville reste proche de la ligne ditoriale de Maurras. L'hostilit l'Allemagne et la tentative d'un rapprochement des pays latins sur une base conservatrice etmonarchiste36 ne l'incite nullement la moindre sympathie envers la Garde de Fer, quin'apparat d'ailleurs dans ses lignes qu' l'occasion de l'assassinat du Premier ministre IonGheorghe Duca, en dcembre 1933, par trois de ses membres.

    Il faut reconnatre que l'tat traditionnel des pratiques politiques en Roumanieconvenait parfaitement l'idologie monarchiste et anti-dmocratique de l'Action Franaise,qui ne demandait pas sa modification dans un sens fasciste. Cette monarchie constitutionnellene fonctionnait qu'au prix d'"assouplissements" de la rgle dmocratique dont Bainville seflicite.37 Ainsi, la fraude lectorale et surtout la "dot lectorale", principe d'inertie quidirigeait le vote des masses paysannes vers le parti appel par le roi "organiser" leslections, corrigeaient une dmocratie balbutiante au bnfice du Parti National Libral duclan Brtianu. Cette famille, qui reprsentait la bourgeoisie d'affaires, avait russi fairecarter l'autoritaire prince hritier Carol en 1926.38

    Peu importait d'ailleurs l'Action Franaise que les monarchies italienne et roumainefussent tombes sous la tutelle de l'ancien bourgeois de gauche Brtianu ou de l'ancien

    33Voir SANDU, Traian, "La Roumanie sur l'axe Paris - Moscou, 1933-1937 : scurit europenne et coopration militaire",dans les Actes du colloque :Les Problmes de scurit et la coopration militaire en Europe de 1919 1955, organis par leCentre de recherche des Ecoles de Cotquidan les 26 et 27 mars 2003, Cahiers dHistoire de Saint Cyr-Cotquidan n1,

    Paris, LHarmattan, 2005.34 Edits Paris, chez Plon, Ed. d'histoire et d'art.35Codreanu et la Garde de Fer, choses vues et entendues en Roumanie , Editions de l'Extrme, recueil d'articlesdu 23 septembre au 28 octobre, puis du 9 dcembre 1938.36 SERANT, op.cit., pp. 278-280 : "un nationalisme anachronique". Pourtant, certains lgionnaires appelaientgalement de leurs vux une union des dictatures latines : ainsi Marin en partance pour l'Espagne : "Les petitesquerelles passeront, car les temps ne sont pas lointains lorsque deviendront frres jamais, dans la mmespiritualit chrtienne et nationaliste, la France, l'Italie, l'Espagne et la Roumanie. Et alors apparatront commeun mauvais rve le rgime "gaulois" des MessieursBlum, Zay et Co." (MARIN, op.cit., p.19)37 BAINVILLE, Jacques, "Elections en Roumanie", article du 4 juin 1931, dans La Russie, pp. 226-227 : "Lesystme rotatif [entre partis de gouvernement] fonctionne toujours. Il n'y en a pas de meilleur pour corriger lergime lectif comme, au jeu, se corrige le hasard. Aussi il va sans dire que ces magnifiques rsultats nes'obtiennent pas sans un certain contrle des urnes."38

    "Alors on ne s'tonne pas des sympathies que trouvent chez les intellectuels roumains les doctrines de l'ActionFranaise. On ne s'tonne pas de l'emploi, je dirai mme de l'adoption, qu'ils en on faite. BAINVILLE, Jacques,"En Roumanie", article du 10 octobre 1927, dansLa Russie, pp.220-221.

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    socialiste Mussolini. Aprs tout, Maurras s'tait aussi cart du prtendant franais. 39 Noussaisissons aussi dans cette page un des traits du nationalisme maurrassien l'gard del'tranger : outre la satisfaction d'amour-propre de leur influence internationale40, noustrouvons la dimension "modlatrice" du "vieux" nationalisme franais, qui demande treimit, alors que le "jeune" nationalisme allemand serait "catalytique", rminiscence

    herdrienne appelant chaque peuple raliser son ethos particulier.41

    Ce qui le laissa plus que dubitatif, ce fut l'irruption de la Garde de Fer sur la scneinternationale avec le meurtre du Premier Duca, qui appartenait au francophile Parti NationalLibral et qui avait promis Paris, lors d'une tourne en Occident en 1933, que s'il retrouvaitle chemin du gouvernement il supprimerait la Garde de Fer.42Une semaine aprs lattentat du29 dcembre, Bainville ne cacha pas son inquitude devant lactivisme hitlrien en Europecentrale.43Si Bainville ne faisait preuve daucune complaisance lgard de la Garde et deses penchants hitlriens, il tait suffisamment lucide et anti-sovitique pour comprendre quemme des esprits plus modrs en Roumanie pouvaient reculer devant les risques delintgration de la Roumanie lalliance franco-sovitique et le passage de larme rouge surle territoire roumain.44

    Malgr cette comprhension lgard des peurs de bolchevisation de la Roumanie, aucun moment aprs 1933 la ligne de lAction Franaisene sembla sinflchir concernant laGarde de Fer, malgr les efforts de celle-ci lgard du vieux matre franais.

    Ainsi, dans sa lettre Maurras, Vasile Marin tente de ddouaner la Garde de Fer desaccusations de collusion avec l'Allemagne d'Hitler : " [N]ous n'avions jamais envoy aucunreprsentant en Allemagne et nous n'avions jamais reu chez nous aucun missairehitlrien."45 Il est vrai qu'en 1933-1934, Hitler hsitait encore entre la Garde et la Ligue de laDfense Nationale-Chrtienne d'Alexandru Constantin Cuza, le vieux thoricien du

    39 SERANT, Paul,Les Dissidents de l'Action Franaise, Paris, Copernic, 1978, pp.296-299.40 Voir, dans les Archives du Quai d'Orsay, srie Z Europe, sous-srie Roumanie, volume 172, folios 194-198(plus loin Z Roumanie 172, f.194-198), la note du Comit alsacien d tudes et dinformations du 21 octobre1935 : "Cette sympathie quon garde lAllemagne dHitler nexclut pas du reste que la haute bourgeoisieroumaine fasse gnralement siennes les thses de lAction franaise, de Gringoire, de Candide, qui sont les

    journaux franais de beaucoup les plus lus Bucarest."41 Voir, par exemple, LAIGNEL-LAVASTINE, Alexandra, "Le XXe sicle roumain, ou la modernitproblmatique", dans DELSOL, Chantal et MASLOWSKI, Michel, Histoire des ides politiques de l'Europecentrale, Paris, P.U.F., coll. Politique d'aujourd'hui, 1998, p.570.42 Voir les tlgrammes n389-390 d'Andr Lefvre d'Ormesson, ministre de France Bucarest, du 17 novembre1933 : "Je viens d'tre reu par M. Duca qui m'a affirm nouveau son profond attachement pour la France. Il

    m'a dclar que ses efforts tendraient rprimer les mouvements extrmistes en Roumanie, dont il mesuretout le danger." (Z Roumanie 171, f.72-73)43"Jean Duca na pas t frapp seulement parce quil avait dissous la ligue des Gardes de Fer, mais parce quiltait fermement attach la Petite Entente et la France. Ou, ce qui revient au mme, il frappait cette associationhitlrienne en raison de la ligne quil suivait, pour la politique extrieure de la Roumanie, avec M. Titulesc o.(BAINVILLE, "Aprs le meurtre de Sinaia", dansLa Russie, pp.228-229)44 "La grande et la petite pointure", 5 octobre 1934, loc.cit., pp.230-231 : "Ce nest pas de la France quon peutavoir peur Belgrade ou Bucarest. Cest de lItalie ou de la Russie. ... Se rapprocher de lAllemagne dans cettecrainte, cela sappelle se mettre dans la gueule du loup. Cest possible. On le dira utilement tous les intresss.Mais vous nobtiendrez jamais que toutes les socits plaisent tout le monde." 45 MARIN, op.cit., p.92-94 : "En effet, pour justifier les mesures arbitraires, et les abus sans prcdent qu'il acommis, le gouvernement de I. G. Duca a fait rpandre l'tranger, et tout particulirement en France, descalomnies selon lesquelles la Garde de Fer serait une organisation terroriste, soutenue par l'argent et les ides du

    national-socialisme hitlrien et qui travaillerait instaurer une dictature la solde et la dvotion del'Allemagne; laquelle dictature une fois installe romprait nos relations amicales avec la France et asservirait lepays aux intrts germaniques.

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    nationalisme antismite roumain46; mais l'assassinat, mme s'il n'avait pas t commandit parBerlin, constituait nanmoins une mise en garde l'encontre du personnel politique roumaintent de donner des gages anti-lgionnaires aux dmocraties occidentales. D'ailleurs, ds lemilieu de 1934, Hitler intgre la Garde ses calculs dinfluence, ce qui nempche pas lesgardistes de garder lquilibre entre influences dans le systme diplomatique roumain.47

    Les dissidents deJe Suis partoutne franchirent pas, selon notre documentation centresur les articles de Rebatet de 1938, la ligne de la dfense des intrts extrieurs franais.Lauteur utilise sans tats dme la thse traditionnelle de la latinit des Roumains.48 Avec peine plus de cynisme satisfait, il reprend le constat de Bainville sur le dtournement de ladmocratie."49 Avec ces prmisses traditionnelles et autoritaires, Rebatet fait toutefois unloge appuy de lultra nationalisme et de lantismitisme de Codreanu, en retraant lesgrandes tapes de son ascension depuis 1919 partir de son ouvrage Pentru Legionari.50 Maiscette sympathie idologique nallait pas sans un srieux recul lgard de lesprit devhmence partisane, mais aussi de dmagogie et, paradoxalement, dindcision politiquedevant les vnements de dcembre 1937 fvrier 1938, lorsque le pouvoir paraissait porte

    de main.51Surtout, Rebatet offre aux lecteurs de Je Suis partoutune critique du pro-germanisme

    de Codreanu mise par un Roumain traditionaliste et francophile. En effet, l'incompatibilitreleve par Bainville sur un ton pondr entre l'alliance franco-sovitique et l'alliance franco-roumaine, se retrouve dans la phrasologie radicale de Codreanu sous la forme de l'assertiondfinitive de la dclaration de presse du 30 novembre 1937.52 Mais cela sert aussi minimisercette faute et rassurer la droite franaise.

    "Il nen reste pas moins que Codreanu a violemment choqu ce jour-l les sentimentsde la majorit des Roumains. Vous connaissez assez notre pays pour savoir le prestigespirituel que vous y conservez malgr tout. Le petit clan des lgionnaires admirateurs delAllemagne na jamais eu grande importance. Croyez bien que Codreanu a t, aprs cettegaffe, svrement et vigoureusement chapitr ! Mais il avait donn une arme sesadversaires. Les Juifs sen sont servi chez vous surtout impitoyablement pour lcraser. Ici, ilslosent moins, car nous savons trs bien quoi nous en tenir. Les plus froces adversaires deCodreanu, et Dieu sait quil en a, et de puissants, nont jamais pu apporter le commencementdune preuve ses relations avec le Troisime Reich. Codreanu savait parfaitement quenacceptant le moindre appui de lhitlrisme, il condamnait la Garde".53

    46 HILLGRUBER, Andreas,Hitler, regele Carol si Marealul Antonescu, Bucarest, Humanitas, 1994, p.45; voiraussi PETCULESCU, op.cit., pp.162-163 (le fils de Cuza, Gheorghe, avait rencontr Hitler et Rosenberg Munich au printemps de 1933).47 BERNEA, Ernest, ""Hitlerismul" nostru", article de 1935 dans Rnduiala, cit dans FLORIAN et

    PETCULESCU, Idea care ucide, op.cit., p.224 : "Une guerre contre la France est non seulement difficile imaginer, mais l'effectuer ? Ce serait vraiment une lutte fratricide. Mais mme si cette France nationalisteexistait politiquement pour nous, cette fois nous n'accepterions plus son commandement, mais sa collaboration."48 REBATET, op.cit., p10.49Ibid., p.15.50Ibid., pp.16-18.51Ibid., pp.23, 26-27 et 29-30.52Cite, entre autres, chez MLLER, Florin, "Politica extern a micrii legionare : ideologie i strategii" (lapolitique extrieure du mouvement lgionnaire : idologie et stratgie), dans Arhivele totalitarismului, 1re anne,n1/1993, p.36 : "Je suis contre les grandes dmocraties de l'Occident, je suis contre la Petite Entente, je suiscontre l'Entente Balkanique et je n'ai aucun attachement pour la Socit des Nations, laquelle je ne crois pas. Jesuis pour une politique extrieure de la Roumanie du ct de Rome et de Berlin, du ct des Etats de larvolution nationale. Je suis contre le bolchevisme. Dans les 48 heures suivant la victoire du Mouvement

    Lgionnaire, la Roumanie aura une alliance avec Rome et Berlin, entrant ainsi dans la ligne de sa missionhistorique dans le monde : la dfense de la Croix, de la culture et de la civilisation chrtienne."53 REBATET, op.cit., pp.27-28.

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    Lhistoriographie rcente a dmontr de faon assez convaincante que laidefinancire et matrielle de lAllemagne nazie seffectuait travers des subsides verss par lesgrands groupes allemands, notamment IG Farben, et que lors du procs de Codreanu, legouvernement navait pas pu produire des documents explicites en raison de pressionsgnes, mais fermes, du ministre dAllemagne.54 Rebatet ne pouvait pas tre au courant de

    ces faits, mme si la presse de gauche les souponnait55

    et si le numro deux de la Garde, lepropre beau-frre de Codreanu, Ion Moa, ne les approuvait pas.56 Mais il nabsout pasCodreanu de ses sympathies pro-allemandes. Il est vrai que ces subsides ont surtout arroscertains personnages vnaux qui voluaient la marge du mouvement, tel le philosophe NaeIonescu, qui en avait besoin, outre ses dpenses personnelles, pour son journal.57 Il nepouvait en tre autrement : les mouvements fascistes taient structurellement contraints unecertaine indpendance financire et de jugement go-stratgique, sils souhaitaient influencerles masses. Si le mouvement de Codreanu avait reu de largent de la camarilla royale et duroi lui mme entre 1933 et 1936 notamment lors du congrs estudiantin controvers deTrgu-Mures58cela contrevenait lindpendance du mouvement, dautant que Codreanuavait juste titre limpression que le roi soufflait le chaud avec lappui financier et la

    libert de propagande59 et le froid avec la scission de Stelescu et le maintien lapriphrie du systme politiquepour lui signifier le maintien sous surveillance du parti. Lamaturit politique du mouvement exigeait, sinon la rupture, du moins une redfinitionradicale de la relation lapproche des lections cruciales de dcembre 1937, o la questiondu pouvoir allait se poser entre les principaux protagonistes.

    En somme, la ligne de Rebatet reste proche du fascisme italien d'avant l'Axe, maissans basculer apparemment dans un pro-germanisme que seule la dfaite, puis la guerregermano-sovitique provoqueront. Et il sait faire preuve dun certain cumnisme de droiteen rendant hommage une Action Franaise qui avait aussi fait un pas vers le populismenationaliste de Mussolini au nom de lunit des droites latines chre linspiration pr -chrtienne de Maurras et la religion no-impriale du Duce. 60Les rapports directs ntaientdonc ni suivis, ni serrs entre les droites franaises et la Garde de Fer.

    Les relations directes entre la Lgion et ltat italien -ou allemand- taient aussifaibles et ne relevaient certainement pas du mythe de la cinquime colonne dvelopp lencontre de la Garde par les historiens communistes. Plusieurs tudes srieuses ont faitlitire de ces affirmations.61 Bien videmment, la sympathie idologique et lennemicommuniste commun ne pouvaient que rapprocher les fascismes de tous les pays. Mais en tantque vritable mouvement fasciste, la Lgion tait structurellement contrainte une certaine

    54

    PETCULESCU, loc.cit..55 PATRASCANU, Lucretiu, Sous trois dictatures, Paris, Ed. International, 1946, pp.87-88.56 PETCULESCU, op.cit., p.115 : dans un mmoire adress aux chefs des partis au dbut de 1934, Moasouscrivait la politique internationale traditionnelle de la Roumanie : "il est indiscutable quaujourdhui lesintrts extrieurs roumains sont le mieux garantis par la politique traditionnelle aux cts de la France et de laPetite Entente".57 PETCULESCU, ibid..58 Voir, entre autres, ltude introductive de Ioan Scurtu Ideologie si formaiuni de dreapta n Romnia(Idologie et formations de droite en Roumanie), vol.IV, 1934-1938, sous la direction de Ioan Scurtu, 2003,448p, p.25-41, ici p.30.59 Voir Ion Dumitrescu-Bora, Cal troian intra muros, memorii legionare (cheval troyen intra muros, mmoireslgionnaires), Bucarest, Lucman, 2002, 461pp, p.131.60 Voir GENTILE, op. cit..61

    MLLER, op. cit., HEINEN, op. cit., pp.306-326, Francisco VEIGA, La mistica del ultranacionalismo.Historia de la Guardia de Hierro. Rumania, 1919-1941, Barcelone, 1989, traduite en roumain ds 1993 :IstoriaGrzii de Fier. 1919-1941. Mistica ultranaionalismului, Bucarest, Humanitas, 383pp., pp.251-255.

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    indpendance financire et de jugement go-stratgique, si elle souhaitait influencer lesmasses et ne pas rester une succursale italienne ou allemande en terre roumaine. Dailleurs, nilItalie, ni mme lAllemagne -malgr ses minorits- navaient dintrts nationaux etethniques suffisants pour se doter, comme en Autriche ou en Tchcoslovaquie, dune

    politique spcifique trs active lgard de la Roumanie. En outre, ces deux pays se

    trouvaient en concurrence en Roumanie, ce qui contribua la libert de jugement en matirede politique internationale des lgionnaires.Le premier contact quun officiel italien semble avoir tabli avec la Lgion est la visite

    de Nichifor Crainic en Italie lautomne 1933 et sa rencontre avec le prsident des ComitsdAction pour lUniversalit de Rome (CAUR), Eugenio Coselchi ; peu aprs, ce dernier serendit en Roumanie pour une srie de confrences et fit une visite au chantier de la Maisonverte, futur sige de la Lgion, en novembre.62 Ces comits avaient t crs en juillet 1933prcisment pour faire pice la dynamique concurrence du nazisme auprs des mouvementsnationalistes europens. Quant la diplomatie officielle, elle avanait avec prcaution auprsdun mouvement mfiant lgard du rvisionnisme italien et de labsence dantismitismedu fascisme. De ce point de vue, le nazisme, avec son antismitisme et son refus de soutenir le

    rvisionnisme hongrois, tait beaucoup plus attractif pour les lgionnaires. Mais cest unreprsentant des CAUR, Guido Ferrucio Cabalzar, qui se rendit en Roumanie en janvier 1934,

    bien que les lgionnaires venaient dassassiner le Premier Duca. Dailleurs, les Allemands semfiaient du nationalisme pointilleux des lgionnaires, quils souponnaient davantage attirspar lItalie ; quant eux, ils prfraient Cuza et la droite plus traditionnelle et plusmallable.63

    Les relations entre la Garde et les CAUR furent longtemps orageuses. Cabalzar avaitinsist pour quon invite une dlgation lgionnaire au congrs des mouvements europens deMontreux ; le gnral Sani, vice-prsident des CAUR, avait rencontr cet effet Codreanu Bucarest, mais le Capitaine ntait pas prt se subordonner aux intrts italiens, dautantquil penchait lui-mme plutt vers lAllemagne.64 Les oppositions clatrent Montreux, les16 et 17 dcembre : Moa y souleva la question juive, qui donna lieu une dclarationcontradictoire : un premier paragraphe estimait que la question juive ne pourrait pas setraduire par une campagne universelle de haine contre les juifs ; mais la fin insistait surlide des juifs parasites, formant un tat dans ltat et gagns la rvolution communiste,dnonant laction nfaste de ces lments et [dcidant] de les combattre. 65 En fait, ledbat sur lantismitisme masquait aussi la proposition de Moa dinviter les nazis allemands la runion suivante, ce qui avait t jug si provocant que cela navait mme pas tenregistr dans le rapport de la confrence.66 Moa rendit compte de ces deux sujetsdaccrochage Poterre, membre de lagence dinformation nazie du Weltdienst, en lui

    promettant dinsister sur les deux pour les prochaines runions des CAUR.67

    Mais lactivit en leur sein stiola en mme temps que ces comits eux -mmes.Latmosphre tait trs mdiocre pour lItalie, car Titulescu comptait sur les sanctions prisescontre lagression en Abyssinie pour renforcer la SDN par le retour de lAngleterre dans le jeude la scurit collective ; il aurait ainsi toff laxe continental Paris-Prague-Bucarest-Moscou, qui fondait sa lgitimit aux yeux de lopinion internationale sur linstance

    62 HEINEN, op. cit., p.227.63Ibid., p.234-236.64Ibid., p.308.65 SCURTU, Ioan (coordinateur), Ideologie i formaiuni de dreapta n Romnia (idologie et formations dedroite en Roumanie), vol. IV, 1934-1938, Ed. de lAcadmie Roumaine, Institut national pour ltude dutotalitarisme, Bucarest, 2003, 448pp., doc. n 24, p.81 (note de la Direction gnrale de la Police du 21 janvier

    1935).66 HEINEN, op. cit., p.30.67 SCURTU,Ideologie, op. cit., doc. n 28 du 5 fvrier 1935, pp.84-86.

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    genevoise, et non sur son statut dalliance de revers, ce quelle tait en ralit.68 Ainsi, lorsqueMoa proposa denvoyer des paquets aux soldats italiens sur le front, Ciano refusa pour ne pasaggraver le contentieux ; et ce nest quen mai 1936 que le ministre dItalie, Ugo Sola,accepta louverture dun comit roumain CAUR: encore ny trouvait-on aucun dignitairelgionnaire officiel, mme si son prsident tait le sympathisant lgionnaire notoire Mihail

    Manoilescu.69

    Il est certain que le rapprochement entre Hitler et Mussolini donna une impulsion ladfinition dune politique trangre de la Garde, et notamment du germanophile Codreanu.Les tensions en Europe centrale entre les deux puissances libraient le discours lgionnaire,car les menaces rvisionnistes en faveur de la Hongrie perdaient de leur acuit avec ladomination allemande dans la zone et un bloc anti-sovitique cohrent en sortait renforc.Ainsi, malgr un discours rvisionniste de Mussolini, Codreanu rejeta la faute sur la politiquepro-sovitique et genevoise de Titulescu dans son mmoire adress au roi et au pays le 5novembre 1936 sur la politique trangre.70 De mme, Codreanu adressa un tlgramme deflicitations aux deux dictateurs lors de leur rencontre de Munich de septembre 1937.71 Sadclaration la plus conteste sur lalliance avec Rome et Berlin dans les 48 heures suivant

    la victoire de la Lgion en Roumanie est replacer dans le mme contexte.Enfin, le dernier pisode marquant des relations entre Italie et Garde se situe lors de

    lenterrement dIon Moa et de Vasile Marin, tombs du ct franquiste en Espagne. Aprs unvoyage triomphal dans toute la Roumanie, la crmonie sacheva en apothose Bucarest en

    prsence des ministres dItalie, dAllemagne, du Japon, du Portugal et de lEspagnefranquiste. Cette manifestation fut considre par le Premier roumain Ttrescu comme une immixtion trangre dans la politique intrieure 72, mme si les intresss se ddouanrenten prtextant avoir assist la crmonie titre priv.

    Conclusion

    Que penser de ces changes de correspondance de la premire moiti des annes vingtet de 1934, ainsi que de ce battage mdiatique de 1938 ? A chaque fois, le contact est nou ourenou lors de procs o les lgionnaires (ou futurs lgionnaires) risquent d'apparatre commeayant totalement rompu les ponts avec les dmocraties occidentales. L'appel la droitenationaliste franaise ressemble un dernier recours idologique pour infirmer cet isolement.Or, si dans le cas de Ion Moa il y eut vritablement un change de lettres, la lettre de Marinresta sans doute sans rponse. En effet, si les premires violences des jeunes tudiants

    pouvaient sapparenter une pousse de fivre nationaliste, en 1934 le contexte de larriveau pouvoir dHitler faisait de leur action un lment de la politique de dstabilisation du

    systme diplomatico-militaire franais. Bainville ne sy trompait pas. Mme le sympathisantRebatet rcusait la tendance germanophile de Codreanu. Bref, les tentatives de 1925, maissurtout de 1934 et de 1938, correspondent un dsir de rquilibrage au moins formel enfaveur de la France. Toutefois, linfluence idologique et le prestige intellectuel franaisrestaient rels en Roumanie la veille de la guerre.

    Quant linfluence italienne, elle napparat pas en matire de thorie du nationalisme,en raison de son caractre tardif et de sa faible spcificit dans ce domaine. Mais elle

    68 SANDU, loc. cit..69 HEINEN, op. cit., p.309.70 SCURTU,Ideologie, op. cit., doc. n122, p.221-222.71

    Cit dans MLLER, op. cit., p.36.72CLINESCU, Armand,nsemnri politice, 1916-1939 (notes politiques, 1916-1939), Bucarest, Humanitas,1990, 432pp., pp.334-336.

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  • 7/31/2019 Droite franaise, fascisme italien influences croises sur la Garde de Fer_Rome-STUDIA_POLITICA

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    simpose dans le domaine essentiel de la praxispolitique, avec cette religion de laction, dufait accompli au sens premier de lexpression, significative de lessence mme du fascisme etque la Lgion de lArchange Michel a fait totalement sienne.

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