Douleurs articulaires et réseau cytokinique

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Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2013) 14, 221—225 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com FAITES LE POINT Douleurs articulaires et réseau cytokinique Articular pain and cytokine network Pascale Vergne-Salle Service de rhumatologie et consultation de la douleur, CHU Dupuytren, 2, avenue Martin-Luther-King, 87042 Limoges, France Rec ¸u le 7 evrier 2013 ; accepté le 19 mars 2013 Disponible sur Internet le 9 mai 2013 MOTS CLÉS Douleurs articulaires ; Cytokines ; Chémokines ; Arthrose ; Rhumatismes inflammatoires Résumé Les douleurs articulaires sont des douleurs considérées comme nociceptives avec une intervention importante des médiateurs de l’inflammation dans les mécanismes physiopatholo- giques. Les médiateurs inflammatoires sont à l’origine d’une stimulation des fibres afférentes nociceptives, de la diminution de leur seuil de réponse et du recrutement des fibres silencieuses. Le réseau cytokinique prend une part importante dans ces phénomènes, il est en partie res- ponsable de la sensibilisation périphérique. Il intervient également au niveau central dans les voies de la douleur, notamment par l’intermédiaire de la microglie, cellules environnantes du système nerveux impliquées dans l’immunosurveillance. Les cytokines participent à la sensibili- sation centrale observée dans la corne postérieure de la moelle mais probablement également à un niveau supraspinal. L’objectif de l’article est de synthétiser les données récentes sur l’intervention des cytokines dans les voies centrales de la douleur. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Articular pain; Cytokines; Chemokines; Osteoarthritis; Arthritis Summary Joint pains are considered as nociceptive pain with significant involvement of inflammatory mediators in the pathophysiological mechanisms. Inflammatory mediators are responsible for stimulation of nociceptive afferent fibers, the decrease in their response thre- shold and silent fibers recruitment. The cytokine network plays an important role in these phenomena, it is partly responsible for peripheral sensitization. It is also involved in the central pain pathways through the microglia, immunocompetent cells responsible for the Cet article a fait l’objet d’une communication lors du 12 e congrès de la SFETD en novembre 2012, à Paris. Adresses e-mail : [email protected], [email protected] 1624-5687/$ see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.douler.2013.03.007

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Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2013) 14, 221—225

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

FAITES LE POINT

Douleurs articulaires et réseau cytokinique�

Articular pain and cytokine network

Pascale Vergne-Salle

Service de rhumatologie et consultation de la douleur, CHU Dupuytren, 2, avenueMartin-Luther-King, 87042 Limoges, France

Recu le 7 fevrier 2013 ; accepté le 19 mars 2013Disponible sur Internet le 9 mai 2013

MOTS CLÉSDouleurs articulaires ;Cytokines ;Chémokines ;Arthrose ;Rhumatismesinflammatoires

Résumé Les douleurs articulaires sont des douleurs considérées comme nociceptives avec uneintervention importante des médiateurs de l’inflammation dans les mécanismes physiopatholo-giques. Les médiateurs inflammatoires sont à l’origine d’une stimulation des fibres afférentesnociceptives, de la diminution de leur seuil de réponse et du recrutement des fibres silencieuses.Le réseau cytokinique prend une part importante dans ces phénomènes, il est en partie res-ponsable de la sensibilisation périphérique. Il intervient également au niveau central dans lesvoies de la douleur, notamment par l’intermédiaire de la microglie, cellules environnantes dusystème nerveux impliquées dans l’immunosurveillance. Les cytokines participent à la sensibili-sation centrale observée dans la corne postérieure de la moelle mais probablement égalementà un niveau supraspinal. L’objectif de l’article est de synthétiser les données récentes surl’intervention des cytokines dans les voies centrales de la douleur.© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Summary Joint pains are considered as nociceptive pain with significant involvement of

KEYWORDSArticular pain;Cytokines;

inflammatory mediators in the pathophysiological mechanisms. Inflammatory mediators areresponsible for stimulation of nociceptive afferent fibers, the decrease in their response thre-

Chemokines; shold and silent fibers recruitment. The cytokine network plays an important role in these

Osteoarthritis;Arthritis

phenomena, it is partly responsible for peripheral sensitization. It is also involved in thecentral pain pathways through the microglia, immunocompetent cells responsible for the

� Cet article a fait l’objet d’une communication lors du 12e congrès de la SFETD en novembre 2012, à Paris.Adresses e-mail : [email protected], [email protected]

1624-5687/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.http://dx.doi.org/10.1016/j.douler.2013.03.007

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immunosurveillance of the nervous system. Cytokines are involved in central sensitization obser-ved in the dorsal horn of the spinal cord but also probably at a supraspinal level. The purpose ofthis article is to summarize recent data on the involvement of cytokines in the central pathwaysof articular pain.© 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ntroduction

es cytokines pro-inflammatoires jouent un rôle impor-ant dans la physiopathologie des pathologies articulaireshroniques, polyarthrite rhumatoïde (PR) et arthrose [1,2].es cytokines sont également impliquées dans la percep-ion douloureuse. Les douleurs articulaires sont considéréesomme des douleurs nociceptives, où les médiateurs de’inflammation jouent un rôle majeur dans la stimulationes nocicepteurs des fibres afférentes A� et C, mais aussians le phénomène d’hyperalgésie inflammatoire décrit plusécemment [3]. L’hyperalgésie, définie comme une diminu-ion des seuils douloureux, a été mise en évidence à la foisans les rhumatismes dégénératifs et inflammatoires [4,5].lle est probablement liée à des effets directs et indirectses médiateurs inflammatoires avec une sensibilisation desbres afférentes (nocicepteurs) qui innervent les articula-ions [6]. Ces cytokines, interviendraient également danses processus centraux d’intégration de la douleur et dansa sensibilisation centrale.

L’objectif de cet article est de fournir lesdonnées récentes concernant l’intervention des

cytokines et chémokines dans laphysiopathologie des douleurs articulaires.

es cytokines

e rôle du tumor necrosis factor-� (TNF-�)

es traitements anti-TNF-� ont largement démontré leurfficacité dans la prise en charge de la PR [7]. Ils amé-iorent très rapidement les douleurs articulaires des patientst cela ne s’explique probablement pas par la guérison aussiapide de l’inflammation articulaire et des lésions ostéo-rticulaires locales. Ainsi, Hess et al. ont émis l’hypothèseue le blocage du TNF-� pourrait avoir des effets au-delàe l’inhibition de l’inflammation articulaire [8]. En effet,es anti-TNF-� pourrait intervenir sur les processus dans leystème nerveux central (SNC) contrôlant la perception dea douleur et de la maladie. Alors que le rôle du TNF-� estrès bien documenté dans l’inflammation, son rôle commeédiateur de la douleur est moins bien caractérisé. Il a étéémontré que les deux récepteurs du TNF-� sont exprimésans les ganglions de la racine dorsale (GRD) [9].

Hess et al. ont donc étudié la nociception dans la PR auiveau cérébral et sa réversibilité sous anti-TNF en utilisantne technique validée d’IRM fonctionnelle (IRMf) dépen-ante du niveau d’oxygène dans le sang (BOLD) [8]. En effet,

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e signal BOLD reflète les modifications hémodynamiquesiées à l’augmentation ou à la diminution de l’activité méta-olique neuronale.

L’IRMf a donc été réalisée avant et 24 heures après per-usion d’infliximab à 3 mg/kg (dose habituelle utilisée dansa PR). Le signal BOLD a été induit par la pression des arti-ulations métacarpophalangiennes de la main dominante.es résultats montrent que la taille de l’aire cérébralevec augmentation du signal BOLD est significativementéduite après infliximab et reste faible jusqu’à six semainesprès la perfusion. À l’inverse, le signal BOLD provoquéar une stimulation contrôle n’est pas affecté par le trai-ement anti-TNF. L’intensité de la douleur évaluée par unVA diminue dès 24 heures. En revanche, l’évaluation cli-ique de l’activité de la PR (index composite d’activité,isease Activity Score [DAS] 28) et paraclinique (VS, CRP,aux sérique d’interleukine-6 [IL-6]) ne se modifient pas danses 24 heures après anti-TNF, mais s’améliorent plus tard.insi, la réduction après anti-TNF des réponses nociceptivesans le SNC des patients atteints de PR précède les effetsnti-inflammatoires.

Une analyse plus détaillée du signal BOLD montreue l’anti-TNF diminue plus particulièrement l’activitées structures cérébrales impliquées dans la perceptione la douleur : le thalamus, le cortex somatosensorielecondaire, ainsi que le cortex cingulaire et insulaire. Laéduction d’activité après anti-TNF concerne des régionsérébrales impliquées dans la douleur et le systèmeimbique.

Les auteurs ont ensuite choisi d’explorer ces donnéesur un modèle animal : les souris transgéniques pour leNF-� (TNFtg). Ces souris transgéniques développent spon-anément une arthrite inflammatoire. Chez les souris TNFtgomparées à des souris sauvages, il existe un seuil plus faiblee réponse à une stimulation douloureuse avec notammentne hyperalgésie mécanique et thermique apparaissantu stade précoce et tardif d’arthrite. Il est égalementbservé une diminution de l’activité motrice au stade tardif.our tester la réversibilité de cette sensibilisation noci-eptive, les souris ont été traitées par infliximab. Aprèsraitement, l’hyperalgésie mécanique et thermique régresseomplètement entre 24 et 72 heures pour atteindre le mêmeiveau que les souris sauvages avec également une restau-ation complète de l’activité motrice.

Les auteurs ont ensuite réalisé une cartographie deséponses nociceptives cérébrales après une stimulationhermique de la patte. On constate une augmentation de’activité BOLD chez les souris transgéniques, significativear rapport aux souris sauvages. Le traitement par inflixi-

ab réduit l’activité BOLD des souris transgéniques au boute 24 heures à un niveau identique aux souris sauvages. Laiminution de taille et du pic de l’activité BOLD s’observe
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plus particulièrement dans le cortex sensoriel, le thalamuset le cortex associatif.

Ainsi, les anti-TNF-� réduisent très nettement l’activitécérébrale liée aux stimulations nociceptives chez lespatients atteints de PR et chez les souris arthritiques etcela très rapidement après le début du traitement, avant leseffets anti-inflammatoires. Le TNF-� pourrait ainsi déclen-cher une hyper-nociception en modifiant l’intégration dela douleur dans le SNC avec un lien important avec le sys-tème limbique impliqué dans l’expérience douloureuse, lesémotions et les sensations corporelles.

Le rôle de l’interleukine-6 (IL-6)

Les taux d’IL-6 sont élevés dans le sérum des patientssouffrant de PR [10,11]. Cette cytokine (CK) intervient pro-bablement aussi dans la douleur. En effet, chez des adultessains, un ressenti plus désagréable de la douleur provo-quée expérimentalement est associé à des taux sériquesd’IL-6 plus élevés [12]. Dans la PR, la douleur, provoquéelà aussi de facon expérimentale (à la pression, au chaud etau froid), est suivie d’une augmentation des taux sériquesd’IL-6, comparés à un groupe de témoins sains [4]. Ainsi, l’IL-6 pourrait avoir un rôle à la fois dans l’inflammation et dansla douleur. En effet, l’IL-6 augmente la sensibilisation desfibres nerveuse afférentes C à une stimulation mécaniquearticulaire chez le rat [13]. Au niveau spinal, l’IL-6 entraîneune augmentation de l’excitabilité neuronale [14].

Vasquez et al. ont mené une étude électrophysiologiquedes neurones spinaux chez les rats avec ou sans injectiond’IL-6 dans l’articulation du genou ou dans la moelle [15].L’injection d’IL-6 associée à son récepteur soluble (sIL-6R)en intra-articulaire augmente les réponses spinales aprèsstimulation mécanique du genou, avec extension des phé-nomènes à la cheville, alors que l’injection de placebon’a aucun effet. L’IL-6 intra-articulaire est donc capablede déclencher une sensibilisation centrale. Les résultatssont identiques avec l’injection spinale de différentes dosesd’IL-6/sIL-6R. L’IL-6 se lie à son récepteur membranaire ousoluble (IL-6R ou sIL-6-R), le complexe se lie alors à la gly-coprotéine 130 (gp130) pour déclencher la transduction dusignal. Dans cette expérience, l’injection concomitante degp130 soluble neutralise les réponses spinales confirmant lerôle de l’IL-6. Les auteurs ont ensuite réalisé une injectionintra-articulaire de carragénine/kaolin dans l’articulationdes rats avec développement d’une inflammation articulaireentre une et six heures après l’injection. Les réponses desneurones spinaux après stimulation mécanique augmententau cours du développement de l’inflammation, ainsi que lestaux d’IL-6 spinaux. L’application de gp130 soluble spinalediminue en partie les réponses des neurones spinaux. Ainsi,l’hyperexcitabilité centrale déclenchée par l’inflammationarticulaire est au moins en partie liée à l’IL-6. Enfin, lesauteurs ont montré par immunomarquage la présence d’IL-6 dans les GRD notamment au niveau des fibres afférenteset dans la corne postérieure de la moelle dans des struc-tures non neuronales qui sont probablement des cellulesgliales. Il avait déjà été mis en évidence une production

d’IL-6 par les cellules microgliales et astrocytaires [16]. L’IL-6 pourrait donc jouer un rôle important dans l’hyperalgésieet la sensibilisation centrale déclenchées par l’inflammationarticulaire chez le rat.

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es chémokines

es chémokines sont des cytokines capables de se fixer sures récepteurs dont l’expression est soit constitutionnelle,oit induite par des cytokines pro-inflammatoires.

Ces chémokines jouent un rôle importantdans la PR en permettant le recrutement desleucocytes, des monocytes et des lymphocytes

dans le site inflammatoire et ont également uneaction primordiale dans l’angiogenèse [17].

ntervention des chémokines dans la douleureuropathique

ne des chémokines bien connue est le monocyte che-oattractant protein-1 (MCP-1) et son récepteur CCR-2.

n utilisant un modèle expérimental de douleur neuropa-hique par compression du GRD, White et al. ont montré,ar des techniques d’hybridation in situ, une augmentatione l’ARNm de MCP-1 et du récepteur CCR-2 dans les neuronest les cellules non neuronales dans les racines compriméesais également dans les racines non comprimées adjacentes

psilatérales [18].Par ailleurs, la synthèse de MCP-1 qui est inexistante chez

es animaux contrôles, est détectée dans les cellules desanglions des racines comprimées mais aussi des racineson comprimées adjacentes. De plus, l’ajout de MCP-1 auxultures des neurones des ganglions comprimés augmente deacon très importante l’activité de ces neurones. Cela n’estas observé avec les neurones des ganglions contrôles. En008, Jung et al. ont montré que la protéine MCP-1 se situaitans les neurones du DRG dans de grosses vésicules libéréesans la synapse après dépolarisation du neurone [19].

Par ailleurs, chez les souris knock-out en CCR-2, il n’y pas de développement de douleur neuropathique [20].insi, MCP-1 et son récepteur CCR-2 sont associés à uneyperexcitabilité neuronale observée dans les douleurs neu-opathiques [21]. MCP-1 peut donc être considérée commen neuromédiateur augmentant l’excitabilité des neuronesociceptifs périphériques.

hémokines et douleur de l’arthrose

iller et al. ont exploré le rôle de MCP-1 dans les douleurse l’arthrose [22]. Les auteurs ont travaillé sur des sourishez lesquelles ils ont effectué une déstabilisation duénisque médial par voie chirurgicale réalisant ainsi unodèle de douleur chronique arthrosique puis ils ont

tudié à distance l’articulation arthrosique comparée à’articulation controlatérale ainsi que les neurones desRD de L3 à L5. Les souris ont développé une allodynieécanique précoce et un comportement douloureux auxouvements, maintenus pendant 16 semaines. À quatre

emaines, il existait une augmentation des taux de protéine

CP-1 dans les extraits protéiques de l’articulation arthro-

ique comparé à l’articulation contrôle. À huit semaines dea chirurgie, dans les GRD, il existait une augmentation de’expression de l’ARNm de MCP-1 et de son récepteur

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CR-2. Les souris dépourvues du récepteur CCR- développaient aussi une allodynie mécanique précoce quiégressait dès la semaine 8 et n’avaient pas de compor-ement douloureux aux mouvements. Par ailleurs, il n’yvait pas d’infiltration macrophagique des GRD, à l’inversees souris sauvages. Les auteurs concluent qu’il existe auiveau articulaire et au niveau des ganglions provenante souris arthrosiques une modulation de la chémokineCP-1 qui intervient dans les circuits de la douleur. Ainsi,

es chémokines pourraient constituer un lien étroit entre leshénomènes inflammatoires et la transmission neuronalee la douleur.

hémokines et douleur dans les arthrites

lark et al. ont voulu démontrer les interactions neuronest cellules gliales dans la douleur de l’arthrite et plusarticulièrement le rôle des chémokines dans cette inter-ction [23]. La microglie est une population de cellulesésidantes du SNC [24]. Ces cellules, d’origine myéloïde,ont partie de la famille des phagocytes mononucléés. Ellesssurent l’immunosurveillance du SNC. Elles sont quies-entes dans le SNC sain et après activation, peuvent devenirellules présentatrices de l’antigène, peuvent synthétiseres cytokines et possèdent des récepteurs aux cytokines ethémokines. À la suite d’une stimulation neuronale périphé-ique, la microglie est en état d’activation et contribue à’augmentation du signal nociceptif [25]. La cathepsine SCatS) est un médiateur microgliale permettant le clivagee la chémokine nommée fractalkine (FKN). Dans la PR, laKN endothéliale joue un rôle de molécule d’adhésion et deacteur chimiotactique et permet l’infiltration cellulaire dea membrane synoviale [26]. L’activité de la CatS est aug-entée dans les articulations des patients atteints de PR

27]. Clark et al. ont donc étudié l’hypersensibilité méca-ique chez les rats Lewis avant et 18 jours après induction’une arthrite au collagène (CIA) [23]. Les rats développentne hypersensibilité mécanique avec diminution des seuilse réponse dès j9 après l’injection de collagène. Les signesliniques inflammatoires apparaissent un peu plus tard entre11 et j14. Comparés aux animaux contrôles, il existe chezes rats avec CIA une infiltration de lymphocytes T, uneugmentation du nombre des cellules gliales (immunohisto-himie avec le marqueur IBA-1) dans la corne postérieuree la moelle à j18. Par ailleurs, la CIA induit une aug-entation de la réponse des cellules microgliales, évaluée

râce à deux marqueurs classiques d’activité de ces cel-ules : phospho-p38 et OX42. Ensuite les traitements des ratsar un inhibiteur de CatS ou un anticorps anti-FKN de j11 à18 avec délivrance par pompe intrathécale, comparés à unlacebo, diminuent l’hypersensibilité mécanique dès j12,ans modification de l’évolution clinique. L’inhibition de laatS et de la FKN diminue de la même facon le nombree cellules microgliales IBA-1+ et leur activité (phopho-38 et OX42). L’inhibition de la CatS et de la FKN pourraitermettre une interruption de la communication neu-ones/microglie et pourrait ainsi atténuer l’hypersensibilité

nduite par l’arthrite au collagène. L’absence de modifica-ion des paramètres cliniques d’inflammation pourrait êtreiée dans cette expérience à la voie d’administration intra-hécale.

P. Vergne-Salle

onclusion

es cytokines sont des acteurs importants dans les patholo-ies articulaires inflammatoires et dégénératives. Leur rôleans la douleur a longtemps été cantonné localement dans’articulation, comme médiateurs inflammatoires capablese déclencher de facon directe ou indirecte une stimulationes nocicepteurs. Ces cytokines sont capables d’intervenirans la sensibilisation périphérique des fibres afférentesvec diminution des seuils de réponse. Elles ont probable-ent également un impact dans la sensibilisation centrale

t dans les processus cérébraux d’intégration de la douleur.e TNF-� pourrait intervenir dans l’intégration de la douleuru niveau du thalamus, du cortex sensoriel secondaire et auiveau du système limbique. Dans les modèles animaux, l’IL-

est produite au niveau spinal par les cellules gliales aprèséclenchement d’une inflammation articulaire et participe-ait à la sensibilisation centrale. La synthèse des chémokinest plus particulièrement MCP-1 est augmentée dans les arti-ulations dégénératives et dans les GRD. L’inhibition de laKN diminue l’hypersensibilité et l’activation des cellulesicrogliales dans l’arthrite au collagène chez le rat. Les

ytokines réalisent certainement un lien étroit entre inflam-ation et douleur, elles sont probablement des médiateursermettant la communication entre neurone et microglieans le SNC. Des recherches fondamentales et translation-elles sont encore nécessaires pour préciser leur rôle et lesmplications thérapeutiques éventuelles.

éclaration d’intérêts

’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-ion avec cet article.

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