Dossier pédagogique Pêche - Musée national de la … · Dans les régions éloignées de la mer,...

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� Repères Dans les mailles du filet De la grande pêche à la pêche durable

À peine avaient-ils jeté leurs lignes dans cette eau tranquille et froide, ils les relevèrent avec des poissons lourds, d’un gris luisant d’acier. Et toujours, et toujours, les morues vives se faisaient prendre ; c’était rapide et incessant, cette pêche silencieuse.

Pierre Loti, Pêcheur d’Islande, 1905

Dès les temps les plus reculés, la pêche a été une source majeure de nourriture pour l'humanité, assurant un emploi et des avantages économiques à ceux qui la pratiquaient. II était admis que les ressources aquatiques étaient un don de la nature d'une abondance illimitée. Mais, avec l'enrichissement des connaissances et le développement dynamique du secteur des pêches qui ont suivi la deuxième guerre mondiale, ce mythe s'est évanoui lorsque l'on a pris conscience que les ressources halieutiques, quoique renouvelables, ne sont pas infinies et doivent être convenablement gérées si l'on veut maintenir leur contribution au bien-être nutritionnel, économique et social d'une population mondiale croissante.

FAO, Code de conduite pour une pêche responsable, 1995

1. Deux noms pour un même poisson

De son nom scientifique gadus morhua callarias, la morue est un poisson marin appartenant à la famille des gadidés. Quand il est consommé frais ou décongelé, il apparaît sous le nom de cabillaud. Le nom « morue » est, en théorie, réservé au même poisson quand il est séché et/ou salé. La morue possède un squelette osseux (les arrêtes). Elle est reconnaissable à son barbillon tactile mentonnier, ses nageoires (3 dorsales et 2 ventrales), sa tête volumineuse et son énorme bouche à la mâchoire supérieure prognathe. Ses écailles sont petites, lisses et peu adhérentes. Sa couleur est grise ou verte. Elle mesure entre 50 et 150 cm et pèse entre 2 et 25 kg. On la pêche en général quand elle atteint 7 à 12 kg. Les mâles sont plus petits et vivent moins longtemps. C’est un poisson à chair maigre (2 % de lipides). Habituellement, la morue vit dans les eaux froides et salées de l’Atlantique nord, à une température comprise entre -2° et +6°, et à une assez grande profondeur allant de 100 m à 500 m. On la range parmi les espèces démersales vivant en symbiose avec les fonds marins d’où elles tirent leur nourriture. Carnivore et vorace, la morue se nourrit de petits poissons et même de crustacés qu’elle avale avec leurs carapaces. Les grosses morues avalent ainsi des crabes voire des cailloux. C’est un poisson dit saisonnier car il migre vers le Sud pour se reproduire dans des eaux moins froides, moins profondes et moins salées - ce qui l’aide à nager quand son corps est alourdi par les laitances ou les œufs. La morue migre en bancs très denses jusqu’à atteindre la latitude d’Ouessant qu’elle ne dépasse pas. Elle s’attarde souvent dans ces eaux moins froides, y trouvant de la nourriture en abondance. Une femelle, apte à la reproduction dès l’âge de 6 ans, pond de 5 à 10 millions d’œufs par an. Les œufs remontent à la surface au moment de l’éclosion et flottent au-dessus des bancs, comme une masse gélatineuse orangée, indiquant aux pêcheurs la présence du poisson. La ponte a lieu entre la fin de l’hiver et le printemps. C’est à cette période qu’a lieu la pêche, de février à mai en Islande et dans la mer du Nord.

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2. Une pêche ancestrale

Pratiquée pendant longtemps par les seuls Norvégiens, la pêche à la morue devient, à partir du XIIe siècle, une spécialité des marins danois, allemands, anglais et flamands, le long des côtes de la Manche et de la mer du Nord. Au XIIIe siècle, les marins français se lancent à leur tour, à partir de Dunkerque et des ports de Haute Normandie comme Granville. À la fin du XVe siècle, les marins s’enhardissent vers l’Amérique où certains racontent avoir découvert « loin dans l’ouest, des côtes où le poisson était [si] abondant qu’en plongeant un seau dans l’eau, on en retirait plein ». C’est le début d’une grande aventure qui va jouer un rôle important dans l’économie et la société des régions côtières de Bretagne, de Normandie, des Flandres...

L’aptitude à la conservation de la morue par salage est un atout indéniable dans une société marquée par des impératifs religieux réaffirmés par le Concile de Trente au XVIe siècle. Dans les régions éloignées de la mer, la morue permet, en complément de la pêche en eau douce, de manger maigre pendant le Carême, l’Avent et chaque vendredi de l’année.

Durant plus de quatre siècles, les voiliers partent vers Terre-Neuve ou plus au nord vers l’Islande. Ils sont à l’aller chargés de sel pour la conservation de la pêche et rapportent au retour la morue prête à être vendue. Les ports de Bordeaux et La Rochelle, ceux de Bretagne nord et de Normandie se contestent mutuellement l’antériorité de leur présence en Atlantique nord. Le rôle de cette pêche hauturière est si important que les pêcheurs de l’île de Bréhat ont bénéficié d’une exonération de la dîme accordée par l’abbaye de Beauport en 1514, pour le poisson pêché « plus de soixante ans, tant en la côte de Bretagne, de Terre-Neuve, Islande que d’ailleurs ».

Là-bas, les pêcheurs bretons côtoient des marins venus d’autres contrées : les Basques d’Espagne, de Bayonne et de Saint-Jean-de-Luz. Vers 1800, ce sont près de 500 navires français qui traversent l'Atlantique, en provenance des ports de la Manche et de toute la façade Atlantique, pour pêcher aux abords de Terre-Neuve. Environ 12 000 navires et 450 000 hommes auraient ainsi participé à cette aventure française, jusqu’à ce qu’elle cesse avant la Seconde Guerre mondiale.

3. Une pêche multiforme : Terre-Neuve et Islande

La pêche à la morue pratiquée dans ces deux lieux est assez différente, du moins jusqu’à la généralisation du chalut qui uniformise alors les méthodes de pêche à la fin des années 1930.

� Le destin de l’île de Terre-Neuve, au large du Canada, se confond avec celui du poisson au point que l’on a pu dire que la morue était la « monnaie de Terre-Neuve ». Deux formes spécifiques de pêche y coexistent : la pêche à « la morue sèche » et la pêche à « la morue verte ». Les environs de Terre-Neuve, sont particulièrement propices à la pêche du fait de la rencontre de deux courants marins, le Gulf-Stream venu du Sud et le Labrador venu du Nord. Cela favorise le développement de micro-organismes qui forment le début de la chaîne alimentaire. Sur les côtes de Terre-Neuve, la grande pêche se développe en même temps que l’exploration puis la colonisation française du Golfe du Saint-Laurent par Jacques Cartier (1536). C’est à cette date que l’île, appelée jusqu’ici par les Portugais, île de Bacalhau (l'île des morues) devient possession française.

La pêche à la « morue sèche », spécialité au départ des marins basques, devient celle des marins bretons de Paimpol, Saint-Malo et Saint-Brieuc, rejoints au XVIIIe siècle par les marins normands en particulier ceux de Granville. Arrivés sur les côtes de Terre-Neuve, les pêcheurs font halte dans un havre, un port où ils vont séjourner durant toute la saison. Chaque jour, ils rayonnent en chaloupes à partir de cette base, pour pêcher à la senne, un grand filet permettant d’encercler la morue lorsque les bancs sont très importants. Chaque soir, la pêche est ramenée à terre et les poissons vidés et préparés. La morue sèche sur des échafauds ou à même le sol. Cette présence française saisonnière, à terre sur la côte nord-est de l’île, subsiste même après la perte de Terre-Neuve par la France lors du traité d’Utrecht (1713). Sous le nom de « french store », ce privilège est accordé par l’Angleterre et prolongé jusqu’en 1904. À la fin du XVIIIe siècle, d’autres systèmes de pêche sont utilisés en complément, comme les lignes dormantes posées à partir de chaloupes, lestées de plombs et équipées de très gros hameçons avec appâts. Elles sont relevées deux fois par 24 heures. � La pêche à la « morue verte » apparaît plus tard. C’est une pêche errante pratiquée plutôt par les Normands et les Rochelais. La pêche se fait directement à partir du navire dont toutes les voiles sauf une (pour maintenir le cap) sont amenées, c’est-à-dire abaissées. Le navire dérive tandis que les pêcheurs sont massés sur le côté au vent. Ils pêchent avec des lignes qu’ils remontent et agitent en permanence pour attirer le poisson. Chaque ligne doit être très solide afin de pêcher des poissons de 12 kg. À l’extrémité des lignes se trouvent deux hameçons lestés par des plombs et recouverts de d’entrailles de poisson dont la forte odeur attire les morues. Une fois pêchée, le poisson est vidé et salé directement dans la cale du navire.

Cette pêche errante est la seule qui est pratiquée en Islande dès le Moyen-âge. Entre 1602 et 1766, les Danois établissent à leur profit un monopole strict de cette pêche qui éloigne les pêcheurs français de la zone. Les Français reprennent la route du grand Nord après 1854 et la suppression complète du monopole danois. Les pêcheurs de Paimpol et ceux de Dunkerque délaissent alors Terre-Neuve pour l’Islande. Pendant un siècle, la « grande pêche » fait la réputation du port de Paimpol, « cité des Islandais » immortalisée par Pierre Loti (1850-1923) et chantée par Théodore Botrel (1868-1925). Les pêcheurs d’Islande ont vite perçu l’avantage qu’ils pouvaient tirer de leur activité par rapport aux pêcheurs de Terre-Neuve. Le poisson venu d’Islande est réputé : plus gros et plus blanc que celui de Terre-Neuve, il arrive plus tôt sur les étals français car le retour de campagne de pêche se fait plus en avant dans la saison.

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4. Deux types de ports

� Il faut distinguer les ports d’embarquement d’où partent en campagne les marins-pêcheurs des ports de commerce où est écoulée la morue sèche, en général situés à proximité d’un grand marché de consommation. Les ports bretons de la région de Saint-Brieuc et les ports normands comme Rouen sont les premiers ports d’embarquement pour la pêche à la morue (XVIe siècle). Au XVIIe siècle, ils sont dépassés par Saint-Malo qui devient le premier port pour la morue sèche. Davantage tournés vers l’Islande, les ports normands de Granville et Dunkerque prennent la première place au XVIIIe siècle, suivi de Fécamp au XIXe siècle. � Les ports de décharge de la morue sèche sont Bordeaux dès la fin du XVIIe siècle puis Marseille un siècle plus tard. Ils deviennent, chacun à leur tour, les grands ports de débarquement et de négoce de la morue. Après 1904 et la perte définitive du « french store » à Terre-Neuve, les deux ports jouent un grand rôle dans l’essor de sécheries locales (Martigues…). À partir de cette date, la morue est d’abord salée sur le navire. Une fois ramenée sur le sol français, elle est séchée. Les sécheries du Midi exportent sur les marchés des pays méditerranéens et de l’Afrique du Nord qui ne cessent de se développer avec l’essor de la colonisation. Les Antilles sont elles en lien direct avec les sécheries d’Aquitaine.

5. Les navires : trois révolutions successives

� À Terre-Neuve, une première révolution des techniques de pêche apparaît en 1876, avec l’utilisation des doris, petites embarcations à fond plat. Mesurant environ 6 mètres de long, les doris remplacent les chaloupes et s’imposent rapidement. Chaque trois-mâts est équipé d’une douzaine de doris numérotés, empilés sur le pont. Ils sont mis à l’eau à la tombée de la nuit, avec chacun un équipage constitué de 2 marins habitués à travailler ensemble. Les doris rayonnent en étoile à partir du navire principal. Ils commencent par mouiller des milliers d’hameçons munis d’appâts, accrochés à des lignes enroulées dans des paniers d’osier. À l’aube, les pêcheurs relèvent les lignes dont les emplacements sont repérables à leur bouée en liège munie d’un drapeau numéroté (numéro du doris). À bord du navire principal, le poisson est aussitôt traité, à la chaîne, par plusieurs marins qui pratiquent la division du travail et la spécialisation des tâches. D’abord vidé par les piqueurs, la morue est ensuite étêtée par les décolleurs puis fendue par les trancheurs qui arrachent l'arête dorsale. Le poisson est ensuite lavé par les mousses qui en retirent les traces de sang avec une cuillère à énocter. Le poisson est ensuite jeté en cale pour être salé. L’usage des doris permet d’augmenter considérablement les volumes de poisson pêché, d’autant que le nombre de navires s’accroît lui aussi. Au cours du XIXe siècle, le volume annuel des prises triple et atteint 400 000 tonnes au large de Terre Neuve. Au début du XXe siècle, les saisons de pêche deviennent plus irrégulières. La Première guerre mondiale conduit à la réquisition ou la destruction des navires, donc à un déclin temporaire de la pêche hauturière. Les bancs de poisson au large de Terre-Neuve s’amenuisent et on note un déplacement de nombreux pêcheurs vers l’Islande. Cela correspond aussi à la fin du « french store » qui met fin à la pêche à la morue sèche et modifie les pratiques. � Au début du XXe siècle, la propulsion à vapeur se répand lentement. L’Islande comme Terre-Neuve sont longtemps dépourvues d’escales charbonnières : la place du combustible à bord est vue comme concurrente à celle du poisson. En 1922, l’armement français pour la pêche à la morue en Islande et à Terre-Neuve comprend 115 voiliers pour seulement 28 chalutiers à vapeur. Néanmoins, la vapeur finit par s’imposer car elle permet de faire 3 campagnes de pêche par an. � L’embarquement sur un navire à vapeur facilite l’utilisation du chalut (1935). Ce nouveau filet révolutionne à son tour la pêche à la morue. Depuis longtemps, l’usage du chalut à perche pour des poissons de fond est connu sur les côtes vendéennes et bretonnes ; il est toutefois inadapté à la pêche morutière (le poids des poissons serait si élevé qu’il ne serait pas possible de remonter le filet à bord). Le nouveau chalut est un large filet de 50 m de long qui est traîné par le navire sur le fond marin en rapportant d’énormes quantités de poissons. Cette pêche au chalut est d’un tel rendement qu’elle s’impose très vite.

À la fin des années 1930, la France devient le premier pays pour les prises de morues. Le port de Fécamp immatricule à lui seul la moitié des chalutiers du pays, dont beaucoup de navires sont de très grande taille. Ces chalutiers de la première génération ont des chaluts de côté, remontés par des treuils et des potences latérales. La concurrence est telle que l’on note une concentration au profit de quelques ports seulement. C’est ainsi la fin de la pêche morutière à Paimpol en Bretagne. Le dernier voilier terre-neuvas de Saint-Malo, le René-Guillon, arrête ses activités en 1951.

Dans les années 1960, la consommation de la morue surgelée (sous le nom de cabillaud) remplace la consommation de la morue salée. De nouveaux perfectionnements techniques conduisent à accroître encore la productivité. Les nouveaux chalutiers sont des navires-usines aux moteurs puissants, équipés de systèmes de navigation électronique et de sonars. Ils repèrent les bancs de poissons en grande profondeur et sont équipés de cales frigorifiques et de machines aptes à débiter le poisson en filets ou en plaques. Les campagnes de pêche sont maintenant plus courtes mais beaucoup plus rentables. Le volume des prises s’envole et atteint 1 800 000 tonnes de poissons par an, soit 6 fois plus que la moyenne annuelle des années 1850 à 1950.

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6. Faire la guerre pour la morue ?

Du début de la pêche intensive jusqu’au XXe siècle, de nombreux conflits infra-étatiques ou inter-étatiques se déroulent dans différentes zones de pêche. Le terme générique de « guerres de la morue » peut être attribué à ces conflits, même si l’expression au sens propre désigne le long conflit qui oppose les Danois puis les Islandais aux Anglais (1950-1970).

� À Terre-Neuve, les tensions concernent d’abord des Français entre eux cherchant à se réserver les zones de pêche au large de l’île. En 1640, le parlement de Bretagne légifère et édicte un règlement de police pour « mettre fin aux contestations entre pêcheurs pour le choix des havres et galets ». Ce texte consacre la mainmise des Bretons, en particulier des Malouins, sur la pointe nord-ouest de l’île. Par un arrêt de 1660, Louis XIV rend « commun à tous ses sujets le règlement fait par les négociants de Bretagne au sujet de la pêche des morues ». En 1681, Colbert entérine le Règlement de 1640, confirmant les prérogatives. Il précise les droits « du capitaine arrivé le premier au havre de pêche ».

Durant deux siècles, la France et l'Angleterre s’opposent à propos du contrôle des zones de pêche près de leurs colonies respectives en Amérique et autour de Terre-Neuve. La France cherche à rendre durable sa présence dans l’île et à empêcher que ne s’y installent Anglais, Portugais ou Basques. Après la fondation de Québec en 1608, elle établit sur la côte sud-est des hivernages où vivent plusieurs centaines de marins et soldats français. Parfois les pêcheurs appellent à l’aide les vaisseaux de guerre français pour assurer leur protection face aux Anglais (ex. morutiers de Saint-Malo en 1610).

Lors du Traité d’Utrecht (1713), la France perd Terre-Neuve et le droit aux hivernages, mais « Les Français y conservent dans sa plénitude, et tel qu’il est défini par les traités, le droit de pêcher, sécher et préparer le poisson, ainsi que celui de couper, partout ailleurs que dans les propriétés closes, le bois nécessaire pour leurs échafaudages, cabanes et bâtiments de pêche.» C’est le fameux « french store » situé sur la côte ouest de l’île. En 1763, à la fin de la guerre de Sept ans, ce droit est confirmé par le Traité de Paris. La France récupère alors l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon « pour servir d'abri aux pêcheurs français ». Perdu puis retrouvé plusieurs fois par la France, l’archipel lui est rétrocédé en 1816 pour servir de point d’appui pour la pêche lointaine à la morue.

Les tensions reprennent au XIXe siècle, entre les marins canadiens et français. Terre-Neuve, devenue autonome en 1855, se dote d'un gouvernement et conteste à la France l’usage du « french store ». Officiellement, une commission d’arbitrage franco-anglaise autorise les marins français à pêcher près de Terre-Neuve. Mais le gouvernement de l’île, furieux de ne pas avoir été associé aux négociations, cherche par tous les moyens à chasser les marins français. Il adopte le « Bait Bilt » en 1886 qui interdit aux îliens de vendre la boëte (les appâts) aux pêcheurs français. Ces derniers trouvent une parade en appâtant les morues avec des coquillages, les bulots. Il faudra attendre 1904 pour qu’une nouvelle convention anglo-française oblige la France à renoncer à pêcher près de Terre-Neuve. � Dans les eaux d’Islande, un conflit existe dès le XVe siècle entre les Anglais, principalement de Bristol, pêchant depuis deux siècles dans les parages, et les marins de la Ligue Hanséatique qui profitent de leur position hégémonique pour les en chasser. Vaincus militairement, les Anglais abandonnent la pêche en Islande jusqu’en 1854, les Danois ayant imposé un monopole strict. Inquiets de voir les prises diminuer dans l’Atlantique Nord, les Anglais reviennent pêcher dans les eaux environnant l’Islande. En 1901, une convention signée entre les Danois et les Anglais précise la limite géographique à ne pas dépasser (à trois milles marins de la côte islandaise).

Les richesses halieutiques de l’Islande sont très convoitées par les Allemands qui se ruent aussi vers le grand Nord. Bien équipés, naviguant sur des navires modernes, ils inquiètent les Islandais d’autant plus qu’ils ne respectent guère la limite des trois milles. Lors des deux guerres mondiales, la flotte britannique étant réquisitionnée pour le combat, ce qui laisse les pêcheurs islandais en situation de monopole sur leurs côtes. Entre 1940 et 1944, l’île connaît de ce fait un net enrichissement et les Islandais comprennent l’importance de leurs ressources halieutiques. En 1944, Terre-Neuve devient une république indépendante. Dès 1950, l’Islande met en place une nouvelle limite à quatre mille nautiques de ses côtes, repoussée en 1958 à douze milles marins (l’équivalent de 22,22 km) en se basant sur les conclusions de la conférence de l’ONU de Genève (1958). Dès lors, les chalutiers étrangers renoncent à s’approcher des côtes islandaises. Mais n’est pas le cas des pêcheurs anglais, soutenus par la marine britannique qui mobilise de nombreux navires de guerre et 7 000 hommes pour protéger les morutiers. Le rapport de force entre les quelques gardes-côtes islandais et les forces navales anglaises est évidemment à l’avantage de ces dernières. Les fréquentes escarmouches entre pêcheurs danois et anglais sont si fréquentes que les journalistes parlent à leur propos de « guerre de la morue ». Celle-ci dure jusqu’en1961. Le Royaume-Uni cède, conscient du coût énorme que représente la mobilisation de navires de guerre. En 1964, le gouvernement anglais Mac Millan reconnaît la limite des douze milles.

En 1972, une deuxième guerre de la morue éclate lorsque l'Islande décide de repousser sa zone de pêche encore plus loin, jusqu’à cinquante milles marins. Les Islandais n’hésitent pas alors à couper les filets des chalutiers anglais. Ces derniers exigent alors une protection militaire britannique. Au terme d’âpres négociations, le Royaume-Uni reconnaît la juridiction de l’Islande dans la zone des cinquante milles, en échange de la permission de pêcher 130 000 tonnes dans cette zone pendant deux ans. En 1975, cet accord prend fin et l’Islande décide de reculer la limite de pêche à deux cent milles marins de ses côtes. Éclate alors une troisième guerre de la morue avec arraisonnements de navires, tentatives d’abordages, collisions et destruction de chaluts. Ce n’est qu’en 1976 que les Anglais acceptent de se plier aux exigences islandaises. Cette nouvelle guerre de la morue, ainsi que des tensions analogues entre le Pérou et le Chili, précipitent la signature de la Convention de Montego Bay en 1982, qui précise la notion de ZEE, zone économique exclusive, qui s’étend à 370 km (200 milles marins) à partir du trait de côte. Le Royaume-Uni et l’Islande ratifient cette convention internationale. La guerre de la morue est donc officiellement terminée. Les conséquences en sont un déclin accéléré de la pêche dans les ports anglais avec de nombreuses pertes d’emplois.

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7. La morue se fait rare

La modernisation de la pêche permet d’augmenter considérablement les volumes pêchés mais met en péril les ressources et accroît encore les tensions interétatiques. Alors que la pêche est très productive dans les années 1960 (2 à 3 millions de tonnes en Atlantique nord), les captures s’effondrent au cours des années 1970 (jusqu’à 0, 5 million de tonnes en 1977). Au début des années 1980, le volume des prises remonte à 1 million de tonnes. Le Canada régule alors la pêche au large de ses côtes car il comprend que c’est pour lui une ressource essentielle. Il espère, par la même occasion, se réserver l’usage de ressources pétrolières off-shore. Le Canada est très engagé dans la revendication de délimitation d’une ZEE. Dès 1977, il fixe une limite de 200 milles marins. Or, cette limite englobe les îles de Saint-Pierre-et-Miquelon, seuls vestiges des anciennes possessions françaises et dont l’activité principale reste tournée autour de la pêche et de sa valorisation. Durant plusieurs années, les tensions se multiplient entre les deux pays. Divers épisodes font la une des journaux : grève de la faim d’élus locaux, arrestations de pêcheurs français, rupture de dialogue entre les deux pays... Le Canada souhaite même aller plus loin pour éviter un nouvel effondrement des stocks. En 1992, il adopte un moratoire sur la pêche à la morue sur l’ensemble de sa ZEE. Un arbitrage international du tribunal de New-York tranche le différend entre le Canada et la France. Celle-ci se voit octroyer 12 400 km2 de ZEE au large de Saint-Pierre-et-Miquelon, soit trois fois moins qu’elle n’espérait. Cette zone en forme de « tuyau étroit vers le Sud », est à l’écart de la zone de rencontre des courants, propice au frai (reproduction des poissons). Cette double décision conduit à déstabiliser l’économie de Saint-Pierre-et-Miquelon. L'arrêt brutal de la pêche y est très mal ressenti. Les tensions entre le Canada et la France sont telles qu’elles se traduisent même par des emprisonnements de parlementaires venus défendre les pêcheurs. Les pêcheurs canadiens contestent eux aussi ce moratoire qui conduit des milliers de personnes au chômage.

Le moratoire ne permet pourtant pas de rétablir les stocks. La morue semble bien être devenue une espèce en voie de disparition, du moins dans cette zone. Les spécialistes canadiens évaluent la perte du stock de morues adultes à 99 % en trente ans. Le Canada l’a d’ailleurs inscrit en 2010 sur sa liste officielle des espèces en péril (COSEPAC). Il est désormais interdit « de tuer, nuire, harceler, prendre, posséder, capturer, acheter, vendre ou échanger des morues franches ». Pour expliquer cet effondrement des stocks, plusieurs explications sont avancées par les scientifiques. La surpêche des années antérieures est l’explication la plus courante. Pour compenser la baisse des volumes pêchés, les marins se sont déplacés sur les zones de frai du Labrador, où ils ont pêché des poissons plus petits, n’ayant pas atteint l’âge de la reproduction. Les spécialistes évoquent aussi d’autres explications comme une possible modification de l’écosystème. Cette mutation s’expliquerait pour les uns par le refroidissement des eaux à certains endroits, consécutif à une moindre vigueur du Gulf-Stream et au réchauffement climatique. D’autres accusent directement la température trop élevée de l’environnement qui perturbe le frai. Les pêcheurs font aussi souvent allusion à l’augmentation des phoques, principaux prédateurs en dehors des hommes, actuellement protégés et dont ils souhaiteraient qu’on puisse en reprendre la chasse.

De son côté, l’Islande adopte en 1984 une politique de quotas afin de préserver ses ressources halieutiques. Chaque navire de pêche islandais reçoit un quota de cabillaud fixé en fonction de la moyenne des trois années précédentes. Ce quota est un bien comme un autre, qui peut donc être cédé, vendu, loué ou transmis en héritage. Il est ré-ajustable en fonction de l’estimation des stocks. Dans un premier temps, cette mesure rend très difficile la condition des pêcheurs, car la pêche abusive des années précédentes entraîne une baisse des quotas ne leur permettant plus de vivre de leur activité. Plusieurs patrons de pêche doivent ainsi vendre leur quota pour éviter la faillite.

À long terme, cette mesure est salutaire pour l’espèce. Les pêcheurs détenteurs de ces quotas y sont très attachés car la mesure les a doublement enrichis : la valeur de ces « droits à pêcher » ne cesse d’augmenter tandis que la ressource est préservée. Ainsi encadrée par cette politique de quotas, la pêche à la morue en Islande demeure une activité importante. Cela explique, entre autres raisons, l’annonce en mars 2015 de l’abandon du processus d’intégration de l’Islande à l’Union Européenne, car le pays redoute que l’UE lui impose des restrictions accrues, au nom de sa politique de la pêche.

8. Vers une gouvernance mondiale de la pêche

La réglementation internationale de la pêche a longtemps été absente car la ressource halieutique semblait inépuisable. Les eaux internationales sont perçues comme un espace libre et naturel, où les pêcheurs peuvent déployer leur activité sans contrôle. Les conflits entre pêcheurs puis la prise de conscience d’une diminution des stocks ont modifié cette perception et conduit à l’émergence d’une gouvernance onusienne, pour mettre en place des codes de bonne conduite. Dès avril 1958, à Genève, la première conférence des Nations Unies sur le droit de la mer adopte quatre conventions dont une convention sur la pêche et la conservation des ressources biologiques de la haute mer qui entre en vigueur en mars 1966. Elle évoque dans son premier attendu « que le développement de la technique moderne en matière d’exploitation des ressources biologiques de la mer, en augmentant les possibilités humaines de satisfaire aux besoins d’une population mondiale croissante, expose certaines de ces ressources au risque d’exploitation excessive ».

Par la suite, la convention de Montego Bay (1982) s’inscrit aussi dans l’objectif de préservation de la ressource halieutique en qualifiant « les hauts fonds de patrimoine commun de l’humanité ». Cependant, à part la délimitation de la ZEE, cette conférence en reste à une posture déclamatoire, non accompagnée de mesures effectives. En 1995, dans le cadre de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture), un Code de Conduite pour une Pêche Responsable est adopté à l’unanimité des 170 états de l’ONU. Ce code n’est qu’indicatif mais il a le mérite de fixer un cadre, ainsi défini « le droit de pêcher implique l’obligation de la faire de manière responsable, afin d’assurer la conservation et la gestion rationnelle des ressources halieutiques ».

Divers plans d’action gouvernementale s’en inspirent : le Plan d'action international (PAI) en 1969 contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée... Les conférences bisannuelles de la COFI (Comité des pêches de la FAO) permettent de faire évoluer la réflexion et d’aboutir à des mesures de plus en plus contraignantes.

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En 2009, la conférence de la FAO adopte une résolution sur les MREP (Mesures du Ressort de l’État du Port) avec pour but « d’empêcher, de contrecarrer et d’éliminer la pêche illicite », en faisant appel à la coopération des états en les poussant à interdire l’accueil des navires pratiquant cette pêche illicite. Une véritable gouvernance internationale de la pêche est mise en place. Elle comprend des principes, règles et diverses recommandations, fixés par des accords internationaux ou bilatéraux qui définissent le cadre dans lequel pêche et aquaculture peuvent se dérouler, en respectant l’intérêt général et les principes du développement durable. Elle mobilise des acteurs divers dont des instances officielles : la FAO, le COFI Comité des pêches, le Tribunal International de la mer de Hambourg (ses décisions font jurisprudence), les organisations régionales des pêches mais aussi les ONG environnementalistes particulièrement actives. Néanmoins, la gouvernance mondiale de la pêche semble aujourd’hui dans l’incapacité d’empêcher les prises illégales de cabillaud dans la mer de Barents, au large de la Russie et de la Norvège. 100 000 tonnes de morue seraient pêchées dans cette zone par des navires-usines russes et alimenteraient les marchés mondiaux, notamment européens, alors même que l’UE a développé un appareil réglementaire strict.

9. La politique européenne de la pêche

Après la naissance de la CEE (1957), la pêche est intégrée en 1962 dans la PAC (Politique Agricole Commune). Son but est de parvenir à concilier la sécurité des approvisionnements, la modération des prix pour les consommateurs et la suffisance des revenus pour les pêcheurs, grands oubliés de la croissance des Trente Glorieuses (1945-1973). Comme les agriculteurs, les pécheurs bénéficient d’aides financières accordées par la CEE, versées par le FEOGA (Fonds Européen d’Orientation et de Garantie Agricole). Lors de la première réforme de la PAC en 1983, la pêche devient une politique à part entière sous le nom de PCP (Politique Commune de la Pêche). Elle poursuit deux objectifs : la durabilité de l’activité en préservant la ressource et l’égal accès des pêcheurs des pays membres aux fonds marins européens. Des quotas annuels sont mis en place, appelés TAC (Totaux Admissibles de Capture), répartis par espèce et par pays. Plusieurs fois réformée (1993, 2003, 2013), la PCP est l’une des politiques les plus intégrées. Elle modifie plusieurs fois ses instruments d’intervention afin d’accroître son efficacité et de tenir compte des injonctions internationales de l’ONU. L’UE met en place des mesures concernant les techniques de pêche : interdiction des filets dérivants (2002) pour permettre la reconstitution des stocks de cabillaud, tailles minimales de mailles pour les filets... La dernière réforme de 2013, entrée en application en 2014, veut à la fois préserver les ressources halieutiques et dynamiser l’activité économique pour maintenir l’emploi dans les régions côtières. Le FEAMP (Fonds de l'union Européenne pour les Affaires Maritimes et la Pêche) est le nouveau fonds structurel dédié à l’activité halieutique. Il est mis en place pour la période 2014-2020 et remplace le FEP (2007-2013) et l’IFOP (1994-2006). Il aide financièrement les pêcheurs. Les aides sont conditionnées par le respect des bonnes pratiques. Les pêcheurs doivent veiller à ce que seules les quantités autorisées soient capturées (pour limiter les rejets de captures non désirées) et garantir la traçabilité et le contrôle des produits de la pêche, d'un bout à l'autre de la chaîne d'approvisionnement. Depuis le 1er janvier 2015, une nouvelle obligation impose, dans certaines parties de l’Europe, le débarquement des poissons (dont le cabillaud) n’ayant pas la taille requise ou non couverts par les quotas. En Baltique, la TMRC (Taille Minimale de Référence de Conservation) du cabillaud est de 35 cm. Une période de transition est prévue jusqu’en 2019, avant que des mesures répressives soient appliquées. Dans le cadre de la politique environnementale, la France a intégré les mesures de la nouvelle PCP en mettant à la disposition des consommateurs un nouvel étiquetage pour orienter les achats vers des produits respectant cette politique. Il s’agit d’un affichage des zones de pêche ou d’élevage. Les étiquettes devront mentionner les engins de pêche, le nom de l’espèce et la congélation ou non du produit.

10. Le maquis des labels écologiques

Depuis longtemps, des organisations privées, essentiellement des ONG ou des entreprises de pêche, tentent de mettre en place des éco-labels pour indiquer au consommateur si le produit en vente respecte les critères d’une filière de production ou de pêche durable.

� En 1997, la FMN Unilever et l’ONG WWF (World Wide Found) créent le MSC (Marine Stewardship Council). Il est chargé d’élaborer un référentiel strict de critères pour la pêche en milieu sauvage. Des entreprises de certifications indépendantes vérifient, à la demande des entreprises de pêche, si leurs pratiques respectent bien ce référentiel. Depuis 2000, contre une contribution financière, les produits conformes sont vendus avec un logo bleu identifiable. Fin 2013, env. 10 % des captures mondiales sont issues de pêcheries certifiées MSC. 6 pêcheries françaises ont droit au label MSC. � En 2011, Saupiquet met au point un programme « Qualité Responsable », pour la sauvegarde de l’écosystème marin. � En janvier 2012, pour appliquer les orientations du Grenelle de l’environnement, les autorités françaises mettent en place une éco-labellisation des produits de la pêche. Un label circulaire à fond bleu est créé, accordé selon des critères de la FAO sur la pêche responsable (1995) mais aussi en vertu du respect de critères sociaux et économiques. � De nombreuses marques commercialisant des produits transformés de la pêche, adoptent pour elles-mêmes des mentions précisant certains critères : « thon pêché à la ligne » ou « pêche responsable » homologué par des organismes indépendants et d’après un cahier des charges élaboré par l’entreprise elle-même.

Le risque pour les consommateurs est double. Outre le danger de se perdre dans le maquis des étiquettes et des éco-certifications, ce foisonnement de labels conduit à semer le doute sur la réalité de la durabilité des pratiques de pêche. MSC est, par exemple, accusé en 2011 d’avoir délivré son label à la filière de pêche du colin d’Alaska en mer de Béring alors que le stock avait diminué de 64 % entre 2004 et 2009. En 2015, à cause de la volonté du groupe Intermarché de poursuivre la pêche en eaux profondes pour la lingue bleue, le grenadier de roche et le sabre noir, poissons pélagiques menacés, l’ONG WWF envisage de retirer son soutien au label MSC « s’il était attribué à un opérateur pratiquant le chalutage profond dans les eaux européennes ». Il est donc jugé indispensable pour la Commission européenne de parvenir à créer un éco-label unique et indiscutable, comme cela avait été envisagé en décembre 2013, lors de la réforme de l’OCM. Une consultation des différents acteurs de la filière pêche en Europe a eu lieu de mai à juillet 2015. Le label européen devrait voir le jour en 2016.

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Repères chronologiques

Année

à Terre-Neuve

à Islande XIIe siècle

Pêche à la morue le long des côtes de la Manche et de la mer du Nord par les Danois, Allemands, Anglais et Flamands

XIIIe siècle

Les Français se lancent dans la pêche à la morue depuis Dunkerque et les ports de Haute Normandie comme Granville

1497

Début de l’exploration des côtes de Terre-Neuve

1506

Début de la pêche à Terre Neuve par les Basques

1514

Charte accordée par l’abbaye de Beauport aux pêcheurs de Bréhat (Bretagne) 1524

Début de l’appropriation de Terre-Neuve par la France

1536

Exploration du golfe du Saint-Laurent par Jacques Cartier

1545-1563

Concile de Trente : Réforme catholique renforçant les prescriptions alimentaires comme le jeûne (vendredis, carême…)

1554

Le premier navire breton à partir pour T-N (de Saint-Brieuc)

1583

Prise de Terre-Neuve par les Anglais

XVIe siècle

Début de la grande pêche française en Islande

1602-1766

Monopole du Danemark sur les côtes islandaises

1608

Fondation de Québec par la France Développement des hivernages sur la côte sud-est de T-N

1610

Les morutiers de Saint-Malo réclament l'assistance de deux navires de guerre pour assurer leur protection

1640

Règlement du Parlement de Bretagne qui consacre la mainmise des Bretons sur la pointe nord-ouest de l’île

1660

Un arrêt de Louis XIV confirme la mesure

1681

Colbert entérine le Règlement de 1640 et précise les droits « du capitaine arrivé le premier au havre de pêche »

1713

Traité d’Utrecht : la France perd Terre-Neuve et le droit aux hivernages (french store)

1763

Fin de la guerre de Sept ans. Par le Traité de Paris, la France récupère les îles de Saint-Pierre-et-Miquelon

1766

Assouplissement du monopole danois en Islande Reprise de la pêche par les marins de Dunkerque

1816

Saint-Pierre-et-Miquelon est rétrocédé définitivement à la France

1854

Fin du monopole danois

1855

Autonomie de Terre-Neuve qui conteste le « french store »

1876

Apparition puis généralisation de l’usage des doris qui bouleversent le mode de pêche

1886

La loi anglaise « Balt Bilt » interdit aux habitants de Terre-Neuve de vendre des appâts aux pêcheurs français

1895-1900

Apogée de la pêche hauturière française en Islande

1901

Convention entre les Danois et les Anglais : limite des 3 milles marins fixée

1904

Fin du « french store » : une convention anglo-française oblige la France à renoncer à pêcher près de Terre-Neuve

1914-1918

La flotte britannique, réquisitionnée pour le combat, laisse les pêcheurs islandais en situation de monopole

Années 1930

Généralisation de l’usage du chalut et développement de la vapeur en France

1935

Arrêt des départs pour l’Islande depuis Paimpol (31 en 1910)

1939-1945

La pêche étant aux mains des seuls Islandais, l’île s’enrichit L’Islande comprend l’importance de ses ressources halieutiques

1944

L’île devient une République indépendante

1950

L’Islande impose la limite des 4 milles marins

1951

Le dernier voilier terre-neuvier de Saint-Malo cesse toute activité

1958

La limite est repoussée à 12 milles marins (22,22 km)

Années 1960

Premiers navires-usines et généralisation des sonars

1961

Première guerre de la morue entre l’Islande et le Royaume-Uni

1964

Le gouvernement anglais Mac Millan accepte de reconnaître la limite des 12 milles marins

1968

Les volumes de pêche atteignent 1 800 000 tonnes

1972-1973

Deuxième guerre de la morue car l'Islande décide de repousser sa zone de pêche à 50 milles marins

1975

Troisième guerre de la morue

1977

Étiage des pêches de 0,5 M de tonnes

1982

Convention de Montego Bay qui fixe la limite de la ZEE à 200 milles marins

1992-1993

Le Canada adopte un moratoire sur la pêche à la morue pour l’ensemble de sa ZEE

2010

Le Canada inscrit la morue sur la liste des espèces en péril

2016

Adoption programmée d’un éco-label européen pour une pêche durable

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Lexique

Balt Bilt : Loi anglaise interdisant aux habitants de Terre-Neuve de vendre des appâts aux pêcheurs français (1886)

Boëtte : Appâts pour la pêche à la ligne composés de petits poissons ou d’encornets

Chalut : Grand filet traîné par un navire appelé chalutier. Lesté, il permet de prendre de grandes quantités de poissons de fonds

Code de Conduite pour une Pêche Responsable : Premier texte international, élaboré dans le cadre de la FAO en 1995, qui pose les grands principes d’une approche durable de la pêche

COFI (Comité des Pêches) : Forum intergouvernemental, créé au sein de la FAO en 1965, qui examine les questions liées à la pêche et adresse des recommandations aux différents acteurs de la pêche. Il tient des sessions tous les deux ans

Comité national des pêches maritimes et des élevages marins : Organisme professionnel de droit privé (Lobby). Il regroupe les professions de la pêche et de l’aquaculture marine qu’il défend face aux pouvoirs publics nationaux et européens

COSEPAC : Comité sur la Situation des Espèces en Péril au Canada. Créé en 1977, il doit évaluer les espèces en voie de disparition

Cuillère à énocter : Outil en fer, muni d'une sorte de cuillère, qui sert à retirer les traces de sang dans les viscères d’un poisson

Démersal : Adjectif désignant un type de poissons vivants en eaux profondes et près du fond, d’où ils tirent leur nourriture

Doris : Embarcations de 6 m de long pour la pêche à la morue. À fond plat, elles sont propulsées à l’aviron, à la voile ou au moteur

Écosystème : Association d’une communauté d’espèces vivantes et d’un environnement physique en constante interaction

Escales charbonnières : Ports dans lesquels les vapeurs peuvent renouveler leur stock de charbon destiné à la propulsion

FAO : Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture. Créée en 1945, elle compte 194 états membres. Elle siège à Rome (Italie). Elle lutte contre l'insécurité alimentaire et la malnutrition, et contribue à rendre l’agriculture et la pêche plus durables.

FEAMP : Fonds de l'union Européenne pour les Affaires Maritimes et la Pêche, dédié à l’activité halieutique pour la période 2014-2020

FEOGA : Fonds Européen d’Orientation et de Garantie Agricole. Instrument d’intervention de la CEE dans le cadre de la PAC permettant le versement de subventions aux agriculteurs et aux pêcheurs, de 1962 jusqu’à la première réforme de la PAC (1983)

FEP : Fonds Européen pour la Pêche, instrument d’intervention de la politique commune de la pêche pour la période 2007-2013

Filets dérivants/Filets maillants : Filets suspendus à la surface grâce à une ligne de flotteurs. Les poissons se prennent dans les mailles par leurs ouies. ils permettent une pêche à fort rendement, néfaste pour les espèces protégées

French store : Privilège accordé par l’Angleterre lors du Traité d’Utrecht (1713), prolongé jusqu’en 1904 et qui permet aux pêcheurs Français, en dépit de la perte de Terre-Neuve, de séjourner de manière saisonnière sur l’île.

Gadidé : Famille de poissons osseux, principalement marins, qui ont souvent un barbillon tactile sous la mandibule. Ils n'ont pas de rayons épineux aux nageoires, ont 1, 2 ou 3 nageoires dorsales. Leurs écailles sont petites et peu adhérentes.

Gouvernance internationale de la Pêche : Principes et des règles fixés par des accords internationaux qui définissent le cadre dans lequel la pêche et l’aquaculture peuvent se dérouler en respectant l’intérêt général et les principes du développement durable

Hivernage : Semaines passés à terre, en particulier à Terre-Neuve. Le temps est consacré à la fumure et au salage de la morue

IFOP : Instrument Financier d’Orientation de la Pêche, principal moyen d’intervention pour la politique européenne de 1994 à 2006

INDNR : Sigle désignant la pêche Illicite et signifiant » Non Déclarée et Non Réglementée »

Label écologique : Mention attribuée par un organisme indépendant, garantissant que le produit n’a pas d’impact négatif sur l’environnement

Ligne de base : Limite théorique qui définit les eaux intérieures d’un état. Elle est définie par la Laisse de basse mer

Moratoire : Terme juridique. Désigne une mesure autorisant un délai ou une suspension [temporaire] de la capture d’une espèce

MREP : Mesures du Ressort de l’Etat du Port. Règles prises par un état côtier à l’égard des navires de pêche étrangers qui voudraient en utiliser les ports. Elles concernent en particulier les débarquements de poissons pour lutter contre la pêche illicite

MSC : Marine Stewardship Council. Organisation non gouvernementale à but non lucratif, créée en 1997 pour inciter les consommateurs à choisir des poissons pêchés selon une gestion durable des stocks (apposition d’un label)

Palangre : Outil constitué d’une longue ligne sur laquelle sont fixées des lignes secondaires lestées et équipées d'hameçons appâtés

PAI-INDNR : Plan d’Action International pour prévenir, contrecarrer, éliminer la pêche illicite non déclarée et non réglementée (2001)

PCP : Politique Commune de la Pêche, destinée à gérer la flotte de pêche de la CEE puis de l’UE et à préserver les stocks de poissons

Pêche errante : Pêche pratiquée à partir d’un navire qu’on laisse dériver. Les pêcheurs, postés au vent, pêchent avec des lignes

Pêche hauturière : Pêche en haute mer, effectuée lors de campagnes de pêche de plusieurs semaines voire de plusieurs mois

Pêcherie : Combinaison d’une zone géographique de pêche associée à une espèce de poisson pêchée et à des techniques adaptées

Pélagique : [poisson] Vivant entre les eaux de surface et les fonds marins

Quotas : Quantités maximales de prises par espèce dans le cadre de la Politique Européenne de la Pêche

Rejet : Renvoi à la mer d’un poisson pêché parce que sa taille est inférieure aux normes ou en raison d’un dépassement de quotas

Richesses halieutiques : Ensemble des ressources animales et végétales d’un milieu aquatique marin, exploitables par l'homme

Senne : Grand filet permettant d’encercler la morue lorsque les bancs de poissons sont très importants [Nom féminin]

Sècherie : Lieu où sont séchées les morues. Terrain ou usine, mais aussi par extension, ville où sont situés des sècheries

Sonar : Appareil acoustique pour repérer les bancs de poissons sous l’eau, à plusieurs kilomètres de distance. Inventé en 1915

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Surpêche : Pêche excessive pour une espèce donnée, menaçant le renouvellement des stocks de poissons

Sondeur : Appareil électronique pour visionner les bancs de poissons à la verticale d’un navire (techniques acoustiques)

TAC : Totaux Admissibles de Capture. Quantité maximale de prises autorisées, réparties par espèce et par pays

TMRC : Taille Minimale de Référence de Conservation, fixée par une directive européenne et transposée en droit national

Traçabilité : Informations sur l’origine et la composition d'un produit, tout au long de sa chaîne de production et de distribution

Trait de côte : Limite des plus hautes eaux d’un pays. C’est une ligne qui se modifie avec le temps

Tribunal International de la Mer : Organe juridique international arbitrant les litiges concernant les espaces maritimes, en particulier les conflits au sujet des zones de pêche. Créé en 1982 et mis en place en 1996, il siège à Hambourg (Allemagne)

ZEE : Zone Économique Exclusive. Périmètre marin au-delà des eaux territoriales, dont l’usage économique est réservé au pays limitrophe Officielle depuis 1994, elle s’étend à 200 milles marins de la ligne de base soit 370 km

Bibliographie

���� Livres et albums pour enfants Pascal BRESSON, Terre-Neuvas, l’impitoyable métier (récit d’un jeune mousse), Éditions Ouest-France, 2005 Sophie HUMANN, Perdu en mer. La pêche à Terre-Neuve, Éditions L’École des loisirs - collection Archimède, 2009

� Romans et documentaires pour adultes et adolescents Jean-Michel BARRAULT, Mer Misère, Éditions L’Ancre de Marine, 2003 Pierre BÉHIER, L’Amiral des Terre Neuvas, Éditions L’Ancre de Marine, 1999 Gilbert BORDES, Un violon sur la mer, XO Éditions, 2013 Christophe CHABOUTE, Terre Neuvas (bande-dessinée), Éditions Vents d’Ouest - collection Intégra, 2009 Alain DU MANOIR, Ceux des tempêtes (carnet de bord d’un Terre-Neuvas en 1936), Éditions L’Ancre de Marine, 2006 Russ HOFVENDHAL, Au plus près du vent (récit à l’époque de la récession des années 1930), Éditions L’Ancre de Marine, date ? Pierre LOTI, Pécheur d’Islande, Hachette Jeunesse, 2004 Jean TESSON, Le Chalutier Téméraire (récit d’un capitaine en second après 1945), Éditions L’Ancre de Marine, 2003

� Livres et articles historiques Étienne BERNET, Extrait de la Bibliographie francophone de la grande pêche, Éditions Association Fécamp Terre-Neuve, 1998 M. BRONKHORS, Rapport de l’Office scientifique et tecnique des pêches maritimes, La pêche à la morue, n°53, août 1927 Jacques DAUSSY, Les Chalutiers morutiers fécampois, Éditions Librairie Jaffry-Xavier, 1991 Robert DE LOTURE, Histoire de la grande Pêche de Terre-Neuve, Éditions L’Ancre de Marine, 1994 René MUSSET, La grande pêche française à Terre-Neuve et en Islande, Volume 31 n°169 (pp. 84-86), 1922 Christian FLEURY, « Saint-Pierre-et-Miquelon, îles frontière », Norois (revue en ligne), n°190, 2004 Site sur l’histoire de l’archipel : http://grandcolombier.com/2010/11/02/1987-a-1989-la-guerre-de-la-morue-conflit-franco-canadien/ Site sur la filière halieutique : http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/oceans-et-mondialisation/corpus-documentaire/de-la-mer-a-l2019assiette-presentation-de-la-filiere-halieutique-dans-le-monde

� Généralités sur la morue Odile GODARD, Petit traité savant sur la morue, Éditions Équinoxe, 2007 Marie-Pierre LESSARD, Suzie CHAMBERLAND, Stéphane MASSON et Laurent FEY, Doris : Gadus morhua, 2014

� Règlements internationaux ou européens Étude canadienne sur la disparition de la morue du Nord : http://www.lsf-lst.ca/media/cod.fr.pdf Site de la FAO, Département des pêches et de l'aquaculture : http://www.fao.org/fishery/fr Site officiel de la Commission européenne sur la politique européenne de la pêche : http://ec.europa.eu/fisheries/cfp/index_fr.htm Site sur la labellisation : http://www.franceagrimer.fr/index.php/filiere-peche-et-aquaculture/Appui-a-la-filiere/Innovation-et-qualite/Ecolabel

� Articles de presse Martine VALO, La France continue de soutenir la pêche profonde, Le Monde.fr, 26 mars 2014 Martine VALO, Modeste diminution des quotas de pêche européens, Le Monde.fr, 17 décembre 2014 Martine VALO, L'Europe ne veut pas subventionner de nouveaux bateaux de pêche, Le Monde.fr, 23 octobre 2013 Célia CHAUFFOUR, Les Polonais ne veulent pas « se plier » à la demande de Bruxelles d'arrêter la pêche à la morue, Le Monde.fr, 17 Juill. 2007

� Films et vidéos Le pardon des Terre-Neuvas à Saint-Malo [Muet] 1 mn et 14 s, L’Ouest en mémoire, 31 janvier 1966 http://fresques.ina.fr/ouest-en-memoire/fiche-media/Region00031/le-pardon-des-terre-neuvas-a-saint-malo-muet.html

Les Terre-Neuvas, film documentaire de l’INA, 4 mn 27 s, Réf. 00413, L’Ouest en mémoire, 8 janvier 1970 http://fresques.ina.fr/ouest-en-memoire/fiche-media/Region00413/les-terres-neuvas.html

Musée national de la Marine

Auteurs : Service culturel, Catherine Maillé-Virole, Paris 2015

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� Documents Dans les mailles du filet De la grande pêche à la pêche durable

1. Les côtes d’Islande et la pêche à la morue au XIXe siècle � Extraits de la Revue des Deux Mondes, Georges Aragon, 1875 (tome 11)

« La pêche à la morue est pratiquée en Europe depuis le IXe siècle. Les premiers armements pour la pêche d’Islande furent faits par Dunkerque, qui en conserva pendant de longues années le monopole à peu près exclusif ; mais, la consommation de la morue s’étant notablement accrue, la plupart des ports secondaires du nord de la France ne tardèrent pas à rivaliser avec Dunkerque. Gravelines, Boulogne, Fécamp, Saint-Brieuc, Paimpol, Granville, Saint-Malo, Dieppe, expédient aujourd’hui sur l’Islande un nombre de plus en plus considérable de navires. Si la campagne de pêche est pénible et périlleuse, il en est peu d’aussi rémunératrices pour les armateurs et les équipages : le champ d’exploitation est inépuisable ; la demande, toujours supérieure à l’offre, garantit l’écoulement du produit. Les risques de mer constituent seuls les chances aléatoires de cette industrie doublement digne d’intérêt, car, sans compter l’appoint qu’elle apporte au développement de notre prospérité commerciale, elle contribue puissamment à former pour notre marine militaire une pépinière d’excellents matelots, rompus par la pratique de la plus rude des navigations aux fatigues et aux périls ordinaires de leur profession. […] Les départs pour l’Islande ont généralement lieu en février. Une grande partie des navires qui ont consacré les longs mois de l’automne au cabotage ou à la pêche sur les côtes rentrent en France vers le commencement de l’année pour s’y préparer à leur campagne d’été. Ils ont généralement profité de leur, dernier voyage pour prendre, soit sur les côtes d’Espagne ou de Portugal, soit à Saint-Martin-de-Ré, le sel nécessaire à la préparation ultérieure de la morue. Il leur reste à s’approvisionner au port d’armement de tout ce qui pourra leur être nécessaire par la suite, en matériel et en vivres, l’Islande ne devant leur offrir que des ressources insuffisantes, pour ne pas dire nulles. Le nécessaire pour eux se réduit du reste à l’indispensable dans le sens le plus absolu du mot, et, sans la surveillance de l’administration de la marine, l’indispensable lui-même se trouverait réduit à une expression si simple que la sûreté du navire pourrait en être compromise. Le recrutement du personnel constitue la partie la plus délicate des préparatifs d’armement. Nos navires de commerce naviguent en général avec des équipages d’une faiblesse numérique véritablement surprenante, même pour les gens du métier. Depuis longtemps, les constructeurs s’appliquent à rechercher des dispositions de mâture et de gréement qui permettent de réduire d’une façon notable la somme de force mécanique à développer pour les manœuvres ordinaires à la mer, et il en résulte qu’aujourd’hui des navires de 200 à 300 tonneaux peuvent prendre la mer sans danger avec des équipages de 5 ou 6 hommes seulement ; mais la raison d’économie, qui pousse habituellement les armateurs à réduire les frais du personnel, ne doit plus entrer en ligne de compte lorsqu’il s’agit des armements pour l’Islande. Il faut au contraire dans ce cas particulier disposer du plus grand nombre de bras possible, car les bénéfices de la saison seront d’autant plus gros qu’on aura pu mettre à la mer un nombre plus considérable de lignes de pêche. Aussi tel bâtiment qui navigue en temps ordinaire avec 4 ou 5 hommes, tout compris, en comptera 18 ou 20 au moins pour la campagne d’Islande. Le nombre des marins de profession disponibles dans les ports ne pouvant suffire aux exigences de cette augmentation temporaire de personnel, il a fallu s’ingénier pour résoudre cette difficulté. […] Aussi rencontre-t-on sur les bâtiments de la flottille d’Islande beaucoup de paysans et de laboureurs des côtes de Bretagne et de Normandie qui, après avoir consacré l’hiver à la récolte du goémon et du varech, aux semailles et à la culture des champs, laissent les femmes au logis et s’embarquent, quand vient février, pour toute la saison d’été. Cette coopération d’une partie de la population agricole de notre littoral à une industrie essentiellement maritime ne s’obtient pas toujours sans difficulté. […]

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En Bretagne surtout, où, par suite des conditions misérables de son existence ordinaire, la population semble devoir être plus accessible qu’ailleurs à l’appât d’un salaire relativement élevé, les capitaines recruteurs (l’expression est vraiment de mise) ne reculent pas devant un mode d’embauchage qui frise quelque peu l’illégalité. Un navire dont l’armement est terminé et auquel il ne manque que le complément de son équipage de pêche vient mouiller un beau jour devant un village ignoré, au fond de quelque crique perdue. Le dimanche, à la sortie de la messe, le capitaine fait publier qu’il a besoin d’hommes pour la campagne d’Islande. Le crieur énumère les avantages de la position : salaires proportionnés au résultat de la pêche, bonne nourriture, vin, eau-de-vie, viande trois fois par semaine, enfin et surtout avance immédiate d’une somme d’argent de 100 à 200 francs ! Il faut avoir vu de ses yeux la pauvreté et le dénuement des riverains de la côte bretonne pour comprendre l’effet produit sur leur imagination par l’offre d’une telle somme en espèces monnayées et ayant cours ! Un pareil chiffre d’écus leur paraît fabuleux, et cependant ces écus sont là tout à leur portée et à leur disposition immédiate. Pour devenir légitimes propriétaires de ce trésor, ils n’ont qu’un mot à dire. Ce mot, ils ne se hâtent pas de le prononcer. Est-ce la crainte de cet élément sur lequel ils ne se sont point encore aventurés, mais dont ils ont pu si souvent contempler les fureurs ? Est-ce l’attachement au sol natal, si ingrat cependant, qui les fait hésiter ainsi ? Le capitaine pourtant sait venir facilement à bout de leur irrésolution. Installé dans le cabaret le plus voisin de l’église, il attend que la curiosité ou le désir de se bien renseigner à bonne source lui amène quelques individus. Si ceux qui se présentent sont jeunes et vigoureux, il déploie aussitôt toute son éloquence, énumère les avantages de la campagne, glisse sur les dangers et les fatigues, fait sonner l’or, appuie ses discours de nombreuses rasades de cidre et d’eau-de-vie, dont les vapeurs capiteuses finissent toujours par entraîner le paysan, déjà fort ébranlé par la faconde de son interlocuteur. L’engagement est signé, le laboureur est devenu marin, et, comme en définitive toutes les promesses qui lui ont été faites seront scrupuleusement tenues, comme, à moins de circonstances exceptionnellement défavorables, il reviendra au logis en septembre avec un bénéfice net de 400 à 500 francs, on n’aura pas l’année suivante la peine de l’embaucher de nouveau. Lui-même viendra spontanément se proposer, amenant avec lui ceux de ses compatriotes que son exemple aura décidés. […] On emploie pour la pêche d’Islande des bâtiments de plusieurs sortes : lougres, côtres, goélettes, bricks-goélettes, dont le tonnage moyen varié de 60 à 150 tonneaux. Ces navires, auxquels un équipage de 4 ou 5 matelots suffît pour le cabotage ordinaire, sont installés de façon à pouvoir loger à peu près ce nombre restreint d’hommes ; mais, lorsque l’effectif est triplé par l’augmentation du personnel nécessaire à la campagne de pêche, les aménagements deviennent naturellement insuffisants. On ne les modifie cependant pas. Dans le réduit étroit et malpropre, situé à l’arrière du navire, que l’on appelle la chambre, se trouvent trois ou quatre couchettes superposées, sorte de tiroirs dans la muraille intérieure du navire, dont l’un est la propriété exclusive du capitaine. C’est le privilège de celui-ci de posséder à lui seul son propre lit. Les hommes étant répartis en trois séries ou bordées dont l’une repose, tandis que les deux autres sont à la pêche, les couchettes disponibles de la chambre et celles que contient à l’avant du navire le poste de l’équipage sont alternativement occupées par trois propriétaires successifs, dormant sur le même matelas, qui constitue avec quelques couvertures de laine tout le matériel de couchage. Lorsque, après six heures passées sur le pont, sans abri contre le vent, la pluie ou la neige, inondé par les coups de mer, manœuvrant continuellement sa ligne alourdie par le poisson et par un plomb de 4 kilogrammes, l’homme redescend transi de froid, exténué de fatigue, il se jette tout habillé et tout botté sur ce matelas mince et humide, et, si dure que soit la couche, le sommeil ne s’y fait pas longtemps attendre. Lorsque le mauvais temps interrompt momentanément la pêche, il ne reste sur le pont que les deux ou trois hommes strictement nécessaires à la manœuvre. Si restreint que soit l’espace, les autres trouvent toujours la place de s’allonger tant bien que mal, et le jour de tempête devient ainsi pour le navire un jour de- repos général. Grâce à la sollicitude de l’administration de la marine, qui a eu beaucoup à faire pour sauvegarder la santé des équipages, souvent mise en péril autrefois par les tendances économiques de certains armateurs, la ration réglementaire se compose de biscuit, de viande salée, de légumes secs, de têtes de morues, d’eau-de-vie et de vin. Sur quelques navires, le vin est remplacé, si l’équipage y consent, par la bière ou le cidre. Chaque homme était autorisé autrefois à embarquer à ses frais, et pour son propre usage, une certaine quantité d’eau-de-vie. Cette tolérance, également pernicieuse au point de vue hygiénique et au point de vue moral, n’est plus admise aujourd’hui. Néanmoins, il faut bien le dire, la sobriété n’est pas devenue plus qu’avant la vertu dominante de nos équipages de pêche ; mais qui se sentirait le courage de juger avec trop de sévérité les excès passagers de ces hommes, dont la vie ordinaire se compose de fatigues et de périls ? […] Quelques armateurs ont adopté le paiement à la pièce, le salaire est alors calculé sur le nombre de poissons pris par chaque homme : 10 centimes par pièce en moyenne. Le pêcheur doit avoir soin, chaque fois que sa ligne ramène une morue, d’en couper la langue, qu’il renferme dans un sac suspendu à sa ceinture. Quand vient l’heure du repos, il porte ces langues au capitaine, qui les compte et en inscrit le nombre sur un registre ad hoc. Il faut que le capitaine conserve ces langues dans l’endroit le plus inaccessible à l’équipage ; sans cela, les mêmes lui seraient représentées un nombre indéterminé de fois, et la quantité de poisson à payer finirait par dépasser considérablement le butin réellement pris. Lorsque les salaires sont calculés sur la totalité de la pêche et non sur les quantités prises individuellement, la somme allouée par last n’est pas uniforme : elle est débattue par chaque homme avant son engagement ; c’est en moyenne de 15 à 20 francs pour les matelots. La part du capitaine s’élève à 30 et 35 francs. Quelques armateurs abandonnent pour tout salaire aux équipages le cinquième du produit de la vente de la pêche. Ce système paraît assez rémunérateur pour les intéressés. Afin d’entretenir l’émulation à bord, on accorde assez souvent en outre trois primes de 30 à 50 francs aux pêcheurs qui ont pris le plus de poisson. En somme, toutes ces combinaisons donnent à peu près les mêmes résultats, et l’on peut évaluer à 400 ou 500 francs pour un matelot les bénéfices moyens d’une campagne en Islande. »

NB : Outre les passages ci-dessus, le reste de l’article est intéressant sur les conditions de vie des pêcheurs.

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2. Terre-Neuve/Saint-Pierre-et-Miquelon, une zone conflictuelle pour la pêche à la morue � Frise chronologique

� Carte actuelle de repérage

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3. Une forme de gouvernance économique mondiale : La gestion mondiale de la pêche � Extraits de la Convention sur la pêche et la conservation des ressources biologiques de la haute mer, faite à Genève le 29 avril 1958 Entrée en vigueur le 20 mars 1966. Source : Nations-Unies, Recueil des Traités, vol. 559, p. 285

« Les États parties à la présente Convention, Considérant que le développement de la technique moderne en matière d’exploitation des ressources biologiques de la mer, en augmentant les possibilités humaines de satisfaire aux besoins d’une population mondiale croissante, expose certaines de ces ressources au risque d’exploitation excessive, Considérant aussi que de la nature des problèmes que pose à l’heure actuelle la conservation des ressources biologiques de la haute mer découle la nécessité évidente de résoudre, chaque fois que c’est possible, ces problèmes par voie de coopération internationale, grâce à l’action concertée de tous les États intéressés, Sont convenus des dispositions suivantes : Article premier 1. Tous les États ont droit à ce que leurs nationaux exercent la pêche en haute mer, sous réserve: a) de leurs obligations conventionnelles; b) des intérêts et des droits des États riverains tels qu’ils sont prévus par la présente Convention; et c) des dispositions concernant la conservation des ressources biologiques de la haute mer, contenues dans les articles suivants. […] Article 2 Aux fins de la présente Convention, l’expression « conservation des ressources biologiques de la haute mer » s’entend de l’ensemble des mesures rendant possible le rendement optimal constant de ces ressources, de façon à porter au maximum les disponibilités en produits marins, alimentaires et autres. Les programmes de conservation doivent être établis en vue d’assurer, en premier lieu, l’approvisionnement en denrées alimentaires pour la consommation humaine. […] Article 4 Un État dont les nationaux se livrent à la pêche d’un ou plusieurs stocks de poisson ou autres ressources biologiques de la mer dans une région de la haute mer où les nationaux d’autres États ne s’y livrent pas doit, en cas de besoin, adopter à l’égard de ses propres nationaux des mesures en vue de la conservation des ressources biologiques affectées. […] Article 6 1. Tout État riverain a un intérêt spécial au maintien de la productivité des ressources biologiques dans toute partie de la haute mer adjacente à sa mer territoriale. […]

3. Tout État dont les nationaux se livrent à la pêche dans une région de la haute mer adjacente à la mer territoriale d’un État riverain engagera, à la demande de cet État riverain, des négociations en vue de prendre, d’un commun accord, les mesures nécessaires pour la conservation des ressources biologiques de la haute mer dans cette région. […] »

4. Un exemple de crise planétaire � Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, février 1993 Source : Michael Keating, Document de travail 22, Media, Fish and Sustainability, http://www.lsf-lst.ca/media/cod.fr.pdf

« Aucune raison ne suffit à elle seule à expliquer pourquoi on a laissé une des plus importantes ressources naturelles du monde disparaître à notre nez et à notre barbe. On pouvait lire dans la prestigieuse revue Science en avril 1993 que, dans de nombreuses régions du monde, les gouvernements avaient négligé de protéger les stocks de poisson et que la perspective de gagner des profits élevés grâce à la pêche avait fait naître une mentalité proche de celle de la ruée vers l'or, les gouvernements s'étant alors alliés avec des groupes de pression pour faciliter cette exploitation. Le niveau auquel sont établis les quotas de pêche, fondés sur les prises des bonnes années, est souvent trop élevé. En cas de surpêche, de fluctuations naturelles de la productivité ou d'une combinaison de ces deux facteurs, les prises diminuent et les gouvernements viennent alors financièrement en aide à ce secteur, assurant ainsi la persistance de la surexploitation de ces ressources. La situation est identique dans le monde entier. Que ce soit sur les Grands Bancs, en Méditerranée ou dans la mer d'Andaman, que les pêcheurs soient canadiens, européens ou thaïlandais, ils sont incités à pêcher des quantités de plus en plus grandes. Le montant total des prises de poissons, de mollusques et de crustacés dans le monde atteint près de 100 millions de tonnes par an, soit cinq fois plus qu'il y a quarante ans. Et d'après l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, il s'agit là du montant maximal pouvant être produit de façon renouvelable au niveau mondial, mais la demande ne cesse d'augmenter. La population mondiale est à l'heure actuelle de 5,5 milliards de personnes et elle va atteindre le chiffre de 6,25 milliards en l'an 2000 et de 8 milliards en l'an 2020. »

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5. L’effondrement de la morue en Atlantique � Débarquements canadiens (en tonnes) de poissons de mer provenant des eaux entourant l’est du Canada, 1972-2009 Données de Pêches et Océans, Service des statistiques d’Ottawa, 2010 Source : http://aquaculture-aquablog.blogspot.fr/2008/11/canada-histoire-dun-moratoire-sur-la-pêche

6. Le rapport de la FAO 2014 � José Graziano da Silva, directeur général de la FAO, Rapport sur la Situation mondiale des pêches et de l’aquaculture, 2014

« Dans un monde où plus de 800 millions d’êtres humains continuent de souffrir de malnutrition chronique et où la population mondiale devrait encore croître de 2 milliards, pour atteindre 9,6 milliards de personnes en 2050, et se concentrer davantage encore dans les zones urbaines côtières, nous sommes face à un immense défi: nourrir notre planète tout en préservant ses ressources naturelles pour les générations futures. […]

Jamais auparavant les populations n’avaient consommé autant de poisson, ni dépendu si fortement de ce secteur pour leur bien-être. Le poisson est un aliment extrêmement nutritif – une source vitale de protéines et de nutriments essentiels, notamment pour de nombreuses populations pauvres à travers le monde. La pêche et l’aquaculture ne produisent pas uniquement des bienfaits pour la santé, elles créent aussi de la richesse. L’emploi dans ce secteur a connu une croissance plus rapide que celle de la population mondiale. Le secteur occupe des dizaines de millions de travailleurs et assure des moyens d’existence à des centaines de millions de personnes. Le poisson reste l’un des produits alimentaires les plus échangés à l’échelle mondiale. Il revêt une importance particulière pour les pays en développement, où il représente parfois la moitié de la valeur totale des produits négociés. Il convient toutefois de ne pas s’arrêter aux aspects économiques et de veiller à la convergence du bien-être environnemental et du bien-être humain si l’on veut offrir à chacun une prospérité durable à long terme. Dans cette optique, l’action en faveur d’une pêche et d’une aquaculture responsables occupe une place centrale dans notre travail et notre mission. Nous sommes conscients que la santé de notre planète tout comme notre propre santé et notre sécurité alimentaire future dépendent de la manière dont nous traitons le monde aquatique. […]

La production mondiale de poisson continue d’augmenter plus rapidement que la population mondiale et l’aquaculture demeure l’un des secteurs de la production alimentaire dont la croissance est la plus rapide. En 2012, l’aquaculture a atteint un nouveau record historique de production : le secteur fournit désormais près de la moitié du poisson destiné à la consommation humaine. Cette part devrait passer à 62 pour cent d’ici à 2030, étant donné que la production de la pêche de capture marque un palier et que la demande de la classe moyenne mondiale en cours de formation augmente de manière substantielle. Développée et pratiquée de manière responsable, l’aquaculture peut offrir des avantages durables en matière de sécurité alimentaire et de croissance économique à l’échelle mondiale. Le secteur de la pêche et de l’aquaculture fait face à des défis majeurs, qui vont du fléau de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INDNR) au manque de gouvernance, en passant par les pratiques de pêche préjudiciables et la question des déperditions. […] Nous avons tous un rôle à jouer pour permettre à la pêche et à l’aquaculture de prospérer de manière responsable et durable, pour le bien des générations présentes et futures. »

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7. Pourquoi l’Islande a tourné le dos à l’Union Européenne � Jean-Pierre Stroobants et Cécile Ducourtieux, journalistes du Bureau européen, Bruxelles, article dans Le Monde, 2015

« L’Islande n’entrera pas dans l’Union européenne (UE) et n’adoptera pas l’euro : Reykjavik a fait savoir officiellement à la Lettonie, qui préside actuellement le Conseil européen, et à la Commission de Bruxelles, qu’elle retirait sa candidature à l’adhésion. […] La perspective d’un abandon de l’euro par Athènes, qui n’est officiellement pas souhaitée par les dirigeants européens mais n’est pas exclue, ainsi que la promesse d’un référendum au Royaume-Uni, sur le maintien ou non dans l’Union, ont renforcé le camp eurosceptique. Une vague nationaliste a même déferlé sur le pays. La population est […] focalisée sur la question des quotas de pêche et la guerre du maquereau, qui oppose Bruxelles et Reykjavik. La présence de l’Islande au sein de l’Association européenne de libre-échange et de l’Espace économique européen lui permet d’exporter le produit de sa pêche sans barrières tarifaires. Mais un conflit est apparu en 2010 quand l’Islande a décidé, contre l’avis de la Commission, de relever ses quotas de pêche. Les pressions de Bruxelles sur le pays pour le forcer à revoir sa politique ont favorisé le rejet du projet d’intégration. Avec un taux de chômage redescendu à 3 %, un tourisme en plein boom et des dettes sur les biens immobiliers des particuliers en partie effacées, le pays estime ne plus avoir besoin de l’Europe. Il se contentera de rester membre de l’espace sans passeport de Schengen et de l’OTAN. »

8. Les quotas de pêche en Islande � Gérard Lemarquis, L’Islande a sauvé ses pêcheurs, article sur LeMonde.fr, 28 janvier 2014

« Les quotas de pêche de l'Union européenne mettent régulièrement en rage les pêcheurs bretons, mais aussi espagnols, irlandais ou écossais, sans pour autant résoudre la crise économique qui étrangle depuis des lustres la filière sur le Vieux Continent. Il est pourtant un pays dont la politique de quotas préserve les ressources halieutiques et est très populaire chez les pêcheurs : l'Islande. En 1984, chaque bateau de pêche du pays a reçu un quota de cabillaud correspondant à la moyenne de ses prises des trois années précédentes. Ce dernier pouvait augmenter ou diminuer chaque année en fonction de l'estimation des réserves. Le pêcheur en était propriétaire et il pouvait le transférer, le louer, le vendre ou le transmettre à ses héritiers. Les années qui suivirent furent dramatiques pour le secteur. Les quotas diminuaient en raison de la surpêche antérieure. L'industrie de transformation du poisson était à la peine. Les armateurs en étaient réduits à vendre leur quota pour éviter la faillite. Des villages entiers furent ruinés, et les autorités durent assouplir le système en attribuant des quotas spéciaux à des collectivités locales en difficulté et en autorisant une pêche côtière artisanale hors quotas. Mais les stocks de cabillaud, qui étaient jusqu'alors en constante diminution, se sont reconstitués. Du fait du réchauffement des océans et de l'acidification croissante, le poisson est en effet ‘remonté’ vers les eaux froides. Quand les réserves ont augmenté à nouveau, la détention d'un quota est devenue une mine d'or, dont la valeur dépassait souvent celle du chalutier auquel il était affecté. Les Islandais, effarés, ont souvent été choqués par la richesse insolente des propriétaires de ces quotas, surtout quand, par le jeu des successions ou des divorces, ils finissaient par tomber entre les mains de personnes étrangères à la pêche. Le système est donc critiqué. Mais il s'est révélé très efficace, en ce qui concerne la reconstitution des ressources halieutiques. Il a également permis d'éviter les deux plus grands maux de la profession : la surpêche et le rejet en mer des espèces les moins recherchées. Un patron pêcheur, dans le système islandais, a en effet un an pour organiser l'utilisation de ses quotas (un par espèce). Il évite généralement de finir trop vite son quota de cabillaud, pourtant plus rémunérateur, car il sait qu'il en retrouvera plus tard dans ses filets. Il cherche donc à diversifier les prises d'espèces soumises à d'autres systèmes de quotas (hareng, capelan, maquereau), car les rejets en mer sont punis. La profession, toutes sensibilités confondues, est favorable à l'actuelle politique de quotas. Les habitants des villes, eux, sont plutôt contre. Ils estiment que seuls les pêcheurs profitent de la bonne santé du secteur, quand la société dans son ensemble continue à souffrir de la crise économique qui a touché le pays en octobre 2008. »

9. La gouvernance européenne de la pêche � Extrait du règlement n°1379/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture « Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne, vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne […] vu la proposition de la Commission européenne, après transmission du projet d'acte législatif aux Parlements nationaux, vu l'avis du Comité économique et social européen, vu l'avis du Comité des régions, statuant conformément à la procédure législative ordinaire, considérant ce qui suit : 1. Le champ d'application de la politique commune de la pêche (PCP) s'étend aux mesures concernant les marchés des produits de la pêche et de l'aquaculture dans l'Union. L'organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture (OCM) fait partie intégrante de la PCP et devrait contribuer à la réalisation de ses objectifs. […] 3. La pêche a une importance particulière dans l'économie des régions côtières de l'Union, y compris les régions ultrapériphériques. Étant donné que les pêcheurs de ces régions tirent leurs moyens de subsistance de cette activité, il convient de favoriser la stabilité du marché et une corrélation plus étroite entre l'offre et la demande.

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4. Il importe que les dispositions de l'OCM soient mises en œuvre conformément aux engagements internationaux pris par l'Union, notamment ceux au titre des dispositions de l'Organisation mondiale du commerce. Il convient d'assurer les conditions d'une concurrence loyale en ce qui concerne les échanges commerciaux de produits de la pêche et de l'aquaculture avec les pays tiers, en particulier en veillant au respect des exigences en matière de durabilité et à la mise en œuvre de normes sociales équivalentes à celles qui s'appliquent aux produits de l'Union. […] 6. Il est essentiel, pour que l'OCM soit un succès, que les consommateurs soient informés, par des campagnes de commercialisation et d'information, de la valeur que revêt la consommation de poisson et de la grande variété des espèces disponibles, ainsi que de l'importance de comprendre l'information fournie sur les étiquettes… 7. […] Il est également nécessaire de faire en sorte que les membres (des organisations de producteurs) exercent leurs activités de pêche et d'aquaculture de manière durable, améliorent la mise sur le marché des produits, rassemblent des données sur l'aquaculture et cherchent à augmenter leurs revenus. […] 15. Pour atteindre les objectifs de la PCP en ce qui concerne les rejets, il est essentiel de généraliser l'utilisation d'engins de pêche sélectifs afin d'éviter les captures de spécimens ne répondant pas aux critères minimums de taille. 22. […] Il faut dès lors que la Commission examine la possibilité de définir et d'établir des critères minimaux pour la création d'un label écologique pour les produits de la pêche et de l'aquaculture à l'échelle de l'Union. Ont adopté le présent règlement : Article 8 Mesures pouvant être mises en œuvre par les organisations de producteurs 1. Afin d'atteindre les objectifs énoncés à l'article 7, les organisations de producteurs peuvent avoir recours, notamment, aux mesures suivantes : a) adapter la production aux exigences du marché ; b) canaliser les approvisionnements des produits de leurs membres et leur commercialisation ; c) promouvoir les produits de la pêche et de l'aquaculture de leurs membres au sein de l'Union de manière non discriminatoire, en utilisant par exemple la certification des produits, et notamment les appellations d'origine, les labels de qualité, les indications géographiques, les spécialités traditionnelles garanties ainsi que la valeur conférée aux produits par leur mode de production durable; 2. Les organisations de producteurs de produits de la pêche peuvent également avoir recours aux mesures suivantes : a) planifier et gérer collectivement les activités de pêche de leurs membres, […] b) éviter et réduire le plus possible les captures indésirées. […] Article 38 Indication de la zone de capture ou de production 1. L'indication de la zone de capture ou de production […] consiste en les éléments suivants : a) dans le cas des produits de la pêche pêchés en mer, le nom écrit de la sous-zone ou de la division figurant sur la liste des zones de pêche de la FAO, ainsi que le nom de cette zone dans des termes intelligibles pour le consommateur, ou une carte ou un pictogramme indiquant cette zone, ou, par dérogation à cette exigence, pour les produits de la pêche capturés dans des eaux autres que l'Atlantique du Nord-Est (zone de pêche 27 de la FAO) et la Méditerranée et la mer Noire (zone de pêche 37 de la FAO), le nom de la zone de pêche de la FAO ; b) dans le cas des produits de la pêche capturés en eaux douces, la mention des eaux d'origine dans l'État membre ou le pays tiers de provenance du produit ; c) dans le cas des produits de l'aquaculture, la mention de l'État membre ou du pays tiers dans lequel le produit a atteint plus de la moitié de son poids final ou est resté plus de la moitié de la période d'élevage ou, dans le cas des crustacés et mollusques, dans lequel il a passé la dernière phase du processus d'élevage ou de culture, d'une durée minimale de six mois. […] »

10. L’application d’un règlement communautaire � Extrait du site de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), Ministère de l’Économie, de l'Industrie et du Numérique, 2015 « La réglementation communautaire portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l’aquaculture vient d’évoluer. Outre les mentions déjà obligatoires depuis 2001, comme la dénomination commerciale et le mode de production, le dernier règlement communautaire fixe de nouvelles dispositions qui portent notamment sur la catégorie d’engin de pêche et les zones de pêche. Ces obligations s’appliquent à partir du 13 décembre 2014. […] Des précisions obligatoires Le consommateur final de produits non transformés de la pêche et de l’aquaculture doit être informé de la dénomination commerciale, du nom scientifique, de la méthode de production : pêché, pêché en eaux douces ou élevé, de la zone de pêche ou du pays d’élevage, […] Les autres mentions obligatoires sont : la catégorie de l’engin de pêche (senne, chalut, filet maillant…), la mention décongelé. […] Des modes de présentation et d’affichage divers Les producteurs doivent étiqueter tous les produits s’ils sont préemballés. Pour les produits non préemballés, l’information peut être fournie sous différentes formes. Il peut s’agir de tableaux (comme pour les catégories d’engins de pêche), de cartes (pour les zones de pêche) par exemple. […] Des informations complémentaires facultatives sont autorisées (date de capture, date de débarquement…) sous réserve qu’elles soient vérifiables, qu’elles ne soient pas trompeuses ou de nature à induire le consommateur en erreur. »

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11. Étiquetage mis en place par la France en 2015 d’après les directives de l’Union européenne

12. La difficile mise en place de la labellisation � Le label MSC

« En 2012, le Marine Stewardship Council publie la première étude analysant la performance des pêcheries tout au long du processus d’évaluation. La recherche est basée sur 8 indicateurs de performances clés mesurés régulièrement au cours du processus d’évaluation du MSC : 1. l’état du stock 2. les points de référence de la population 3. la reconstitution du stock 4. les espèces conservées 5. les espèces des captures accessoires 6. les espèces en danger, menacées et protégées (ETP) 7. les habitats 8. les écosystèmes

L’étude montre que cinq ans après la certification, plus de 90 % des indicateurs de performance mesurés atteignent de meilleurs scores. Cela inclut : l'amélioration de la gestion des stocks, la réduction des captures accessoires la réduction des captures d’oiseaux l'expansion des zones protégées, l'amélioration des connaissances autour des impacts sur les écosystèmes. »

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13. Carte des zones de pêche � Carte des zones de pêche identifiées par l’Union européenne dans l’Atlantique nord.

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14. Les TAC : l’exemple de la morue � Extrait du site http://ec.europa.eu/fisheries/cfp/fishing_rules/tacs/index_fr.htm Pour davantage de visibilité, consulter le poster sur http://ec.europa.eu/fisheries/documentation/publications/poster_tac2015_fr.pdf « Les totaux admissibles de captures TAC (possibilités de pêche) sont des limites de captures (exprimées en tonnes ou en chiffres) fixées pour la plupart des stocks commerciaux de poissons. La Commission prépare des propositions en s'appuyant sur les avis scientifiques concernant l'état des stocks délivrés par des organes consultatifs Les TAC sont définis tous les ans pour la plupart des stocks (tous les deux ans pour les stocks d'eau profonde) par le Conseil des ministres de la pêche. Lorsque les stocks sont partagés et gérés conjointement avec des pays non membres de l'UE, les TAC sont convenus avec ces pays ou groupes de pays. Ils sont répartis entre les pays de l’UE sous la forme de quotas nationaux. Les quotas sont distribués en appliquant un pourcentage différent par stock et par pays, afin de garantir une stabilité relative. Les pays de l'UE peuvent s'échanger leurs quotas. Ils doivent utiliser des critères objectifs et transparents pour répartir les quotas nationaux entre les pêcheurs et veiller à ce que les quotas fixés ne soient pas surexploités. Lorsqu'un quota applicable à une espèce est épuisé, le pays doit fermer la pêcherie concernée. »

Le stock est exploité à un niveau permettant d’assurer son rendement maximal à long terme

Le stock est surexploité par rapport au niveau permettant d’assurer son rendement maximal à long terme, mais il reste dans les limites biologiques de sécurité ou est géré dans le cadre d’un plan à long terme approuvé par les scientifiques

Le stock ne se trouve plus dans les limites biologiques de sécurité et il ne fait pas l'objet d'un plan à long terme, ou les avis scientifiques indiquent qu'il ne devrait plus être exploité

L’état du stock n’est pas connu quant aux limites biologiques de sécurité et/ou à sa capacité de produire le rendement maximal à long terme

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15. Le maquis des labels

1. Label Rouge 2. Saupiquet

3. Findus 4. Carrefour

5. Intermarché 6. MSC

7. France Agrimer 8. Naturland

9. Global Aquaculture Alliance 10. ASC

11. Réseau Océan Mondial 12. Pavillon France

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16. L’ambiguïté des labels : le logo Pêche d’Intermarché � Publicité du groupe Intermarché

� Article de presse à propos du logo Pêche Intermarché Source : http://www.lefigaro.fr/environnement/2012/06/22/01029-20120622ARTFIG00393-peche-le-label-du-groupe-intermarche-epingle.php

« Le groupement des Mousquetaires qui alimente notamment les Intermarché a été épinglé […] par le jury de déontologie publicitaire pour une grande campagne menée en 2011 dans la presse et faisant état d'une pêche vertueuse menée par sa flotte. Des bateaux qui pêchent au chalut dans les eaux profondes pour alimenter les supermarchés avec des poissons des grands fonds. Cette campagne, affirmait que le groupement des Mousquetaires « joue un rôle déterminant dans le maintien durable de la pêche en France, la préservation et le renouvellement des ressources marines ». Le jury critique cette formulation et il exige qu'une telle campagne ne soit « pas renouvelée ». Il dénonce par ailleurs l'usage sur les étals de poissons notamment des Intermarchés d'un logo que l'on peut qualifier de Canada Dry. Baptisé Pêche responsable, le graphisme de ce label maison joue en effet sur la ressemblance avec le label indépendant MSC qui certifie une pêche durable. Les deux logos présentent le même poisson stylisé en blanc sur un fond bleu, l'un étant ovale (MSC) et l'autre rond avec une partie verte en plus. […].Il s'agit « d'une décision rassurante », estime […], la fondatrice de l'association Bloom à l'origine de la plainte. L'association rappelle que la pêche de poissons en eau profonde est depuis des années condamnée par les scientifiques du monde entier en raison des risques majeurs qu'elle représente pour la ressource halieutique. Non seulement ces poissons se reproduisent plus difficilement que les autres mais, selon une étude anglaise, les chaluts gigantesques qui drainent les fonds marins, détruisent les écosystèmes et sacrifient des dizaines d'espèces pour n'en exploiter que deux ou trois. Selon l'association, 100 % des captures européennes profondes sont, selon les chercheurs du Conseil international pour l'Exploration de la mer (CIEM), «en-dehors des limites de sûreté biologique. Cette décision envoie à l'industrie de la pêche le signal clair que le chalutage de fond en eau profonde ne peut-être commercialisée comme durable », estime Bruno Gianni de la Deep Sea Conservation Coalition. « Plus Intermarché s'enferrera dans les pêches profondes contre le bon sens et les avis scientifiques, plus l'enseigne s'exposera aux critiques des ONG et des chercheurs avec les conséquences que cela comporte pour sa réputation », insiste de son côté l'association Bloom. »

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17. BLOOM, une ONG de défense environnementale au service de la pêche durable � Extraits du site http://www.bloomassociation.org/ « Fondée à la fin de 2004 par Claire Nouvian, BLOOM est une association de loi 1901, à but non lucratif, qui œuvre pour la conservation marine à travers une démarche de sensibilisation et de médiation scientifique des problématiques environnementales, la production d’études scientifiques et d’analyses pertinentes et indépendantes, ainsi que par la participation à des consultations publiques et des processus institutionnels. Nos actions s’adressent au grand public ainsi qu’aux décideurs politiques et aux acteurs économiques. Les océans sont exsangues : surexploités, pollués et dévastés par des méthodes de pêche destructrices, ils sont méthodiquement vidés de leurs extraordinaires ressources, longtemps pensées inépuisables et de ce fait dramatiquement délaissées par l’opinion comme les pouvoirs publics. Le réveil est amer : méduses, algues et bactéries remplacent progressivement les poissons dans les écosystèmes. Les Nations-Unies estiment que les poissons marins pourraient avoir disparu d’ici 2050. […] La vision de BLOOM est de refuser cette fatalité en prouvant que la mobilisation peut retourner la tragédie environnementale et humaine en cours. BLOOM vise à donner une voix à ceux qui n’en ont pas, à assurer un avenir à l’humanité, de la nourriture aux enfants et des emplois aux pêcheurs en restaurant les écosystèmes océaniques à leur pleine capacité de production biologique.

BLOOM a fait le choix stratégique de conserver une petite taille et de focaliser son énergie et expertise sur quelques actions urgentes : - La préservation du dernier milieu marin vierge : les océans profonds, - La sauvegarde des espèces menacées, en luttant contre l’extinction des requins, - La survie des pêcheurs, en travaillant notamment sur la question des finances publiques allouées à la pêche.

Les quatre grands axes stratégiques de BLOOM : - Créer et/ou adapter les lois et les pratiques privées et industrielles face à l’urgence écologique et socio-économique - Changer les pratiques de consommation des citoyens - Éduquer le public, les enfants, les futurs décideurs - Mener une recherche indépendante pour générer une expertise reconnue et impactante »

18. Une action de Pêcherie

� Photographie de l’action d’une société anonyme de Pêcheries Industrielles, Saint-Malo, 1930 (Collection privée)

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19. Les ressources halieutiques aujourd’hui Sources : Données chiffrées de la FAO http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/oceans...

� Document 19 a : Rapport de la F.A.O. 2014 En 2011: 150 000 tonnes de cabillaud ont été pêchées en Europe suivant les quotas des pays de la zone UE dont près de 9 000 tonnes de cabillaud ont été pêchées par les professionnels de l’Ouest de l’Hexagone, dans les eaux françaises et européennes. Devant la faiblesse des stocks, la France a dû importer de l’étranger 151 000 tonnes afin de satisfaire la demande des consommateurs. Consommation en France de morue cabillaud : 18 000 tonnes en 2010.

� Document 19 b : La production de la pêche maritime par zone océanique en 2011

La production dans l’Atlantique nord subit une chute effective depuis le début du XXIe siècle en Atlantique nord-est, mer où pêchent principalement les flottilles européennes, ainsi qu'en Atlantique nord-ouest (moindre ressource et restriction d’accès sur les pêcheries de morue, dès les années 1970). À l'opposé, la production de l’océan Indien progresse, surtout grâce à la pêche des thonidés.

� Document 19 c : Les principaux pays producteurs halieutiques en 2011

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� Document 19 d : Évolution de l’état des stocks de l’océan mondial (1974-2009)

� Document 19 e : Comparaison de l’évolution de la production dans trois zones océaniques

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20. Les DCP : les dispositifs de concentration de poissons

� Visionner la vidéo de Grrenpeace sur la pêche au thon français Source : https://www.youtube.com/watch?v=5aqpr2bR-UM ou http://www.huffingtonpost.fr/2014/10/21/video-greenpeace-peche-thons-francais_n_6015120.html

� Extrait de l’article de J.P Gené, Petit-Navire, gros dégâts, M le magazine du Monde, 7 novembre 2014 « Le dispositif de concentration du poisson porte bien son nom. Placé au large de la bande côtière, il est constitué d'un ancrage en béton sur le fond, relié par un filin ou un mât métallique à une bouée marquant l'endroit en surface. Le long de cette colonne sont attachés divers matériaux rapidement colonisés par les algues. Cet abri accueille bientôt tout un écosystème, qui va du petit poisson fourrage au grand prédateur pélagique. Il existe des dispositifs ancrés légers, qui peuvent être transportés à bord d'embarcations rudimentaires, et d'autres plus lourds, nécessitant un équipement adapté pour leur mise en place. Le DCP dérivant, simplement lesté et flottant au gré des courants, est également pratiqué et représenterait la moitié des prises de thons tropicaux. À l'origine, ce système, utilisé surtout aux Antilles, à La Réunion, dans le Pacifique sud et en Asie, améliorait les conditions de vie des pêcheurs traditionnels et leur garantissait un meilleur revenu. Jusqu'à l'arrivée de la pêche industrielle […] Une fois les poissons rassemblés autour, ils [les pêcheurs industriels] les encerclent et les ramassent tous dans un immense filet. Raies, tortues, requins, petits thons, espèces menacées... Tout est ratissé, et le taux de prises accessoires est deux à quatre fois supérieur à celui de la pêche sans DCP, selon Greenpeace. […] Dans deux boîtes de Petit-Navire sur vingt, le laboratoire [indépendant] a retrouvé du thon albacore, alors que la boîte est étiquetée « thon obèse ». Selon […] Greenpeace : « Au-delà même du fait que cela soit interdit, cela prouve que Petit-Navire ne peut garantir la traçabilité de ce que contiennent ses boîtes, parce que la technique de pêche utilisée, le dispositif de concentration du poisson, prend tout ce qui passe autour, sans égard pour les différences d'espèces. La marque doit arrêter de vendre du thon pêché avec cette pratique. » […] En septembre dernier, Greenpeace avait alerté sur les conserves de thon issues d'une pêche non durable. Sur dix marques testées, « seules Phare d'Eckmühl et Système U s'approvisionnent en majorité ou en totalité avec du thon pêché grâce à une méthode sélective - la canne ou la ligne de traîne - et utilisent des thons provenant de stocks en bon état » […] Petit-Navire, qui se targue de vouloir être leader de la durabilité dans son secteur, doit montrer l'exemple selon Greenpeace et s'aligner sur les deux marques sœurs qui appartiennent au même groupe MW Brands : Mareblu, vendue en Italie, et John-West, vendue au Royaume-Uni. Elles se sont engagées à ne plus vendre de thons pêchés avec des DCP d'ici à fin 2016. […] »

21. La consommation de quelques poissons en France

� Comparaison des dépenses en milliers d’euros pour quelques poissons en France depuis 2007 Source : France-Agrimer, août 2013

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Cabillaud

206 000

190 000

250 000

261 000

265 000

283 000

Saumon

305 600

322 000

349 000

372 000

351 300

410 500

Sole

71 000

75 000

72 000

67 000

67 500

64 000

Bar/Loup

71 000

64 500

64 000

73 600

63 400

56 500

Baudroie/Lotte

81 000

78 000

76 000

77 000

74 550

85 500

Églefin

24 000

24 400

26 200

31 300

36 400

44 000

Grenadier

14 250

10 800

9 230

10 500

7 000

5 000

Chinchard

1 112

1 166

3 536

3 978

3 722

2 062

Thon

55 223

32 480

30 400

23 703

23 893

23 545

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22. Extrait de Pêcheur d’Islande

� Pierre Loti, Pêcheur d’Islande, 1886, Édition Gallimard - Collection Folio Classique (chapitre I, pages 59 à 61), 1998

« Dehors il faisait jour, éternellement jour… Mais c'était une lumière pâle, pâle, qui ne ressemblait à rien ; elle traînait sur les choses comme des reflets de soleil mort. Autour d'eux, tout de suite commençait un vide immense qui n'était d'aucune couleur, et en dehors des planches de leur navire, tout semblait diaphane, impalpable, chimérique. L'oeil saisissait à peine ce qui devait être la mer : d'abord cela prenait l'aspect d'une sorte de miroir tremblant qui n'aurait aucune image à refléter ; en se prolongeant, cela paraissait devenir une plaine de vapeurs, -- et puis, plus rien ; cela n'avait ni horizon ni contours. La fraîcheur humide de l’air était plus intense, plus pénétrante que du vrai froid La fraîcheur humide de l'air était plus intense, plus pénétrante que du vrai froid, et, en respirant, on sentait très fort le goût de sel. Tout était calme et il ne pleuvait plus; en haut, des nuages informes et incolores semblaient contenir cette lumière latente qui ne s'expliquait pas; on voyait clair, en ayant cependant conscience de la nuit, et toutes ces pâleurs des choses n'étaient d'aucune nuance pouvant être nommée.

Ces trois hommes qui se tenaient là vivaient depuis leur enfance sur ces mers froides, au milieu de leurs fantasmagories qui sont vagues et troubles comme des visions. Tout cet infini changeant, ils avaient coutume de le voir jouer autour de leur étroite maison de planches, et leurs yeux y étaient habitués autant que ceux des grands oiseaux du large. Le navire ce balançait lentement sur place; en rendant toujours sa même plainte, monotone comme une chanson de Bretagne répétée en rêve par un homme endormi. Yann et Sylvestre avaient préparé très vite leurs hameçons et leurs lignes, tandis que l'autre ouvrait un baril de sel et, aiguisant son grand couteau, s'asseyait derrière eux pour attendre. Ce ne fut pas long. A peine avaient-ils jeté leurs lignes dans cette eau tranquille et froide, ils le relevèrent avec des poissons lourds, d'un gris luisant d'acier. Et toujours, et toujours, les morues vives se faisaient prendre; c'était rapide et incessant, cette pêche silencieuse. L'autre éventrait, avec son grand couteau, aplatissait, salait, comptait; et la saumure qui devait faire leur fortune au retour s'empilait derrière eux, toute ruisselante et fraîche. Les heures passaient monotones, et, dans les grandes régions vides du dehors, lentement la lumière changeait; elle semblait maintenant plus réelle. Ce qui avait été un crépuscule blême, une espèce de soir d'été hyperborée, devenait à présent, sans intermède de nuit, quelque chose comme une aurore, que tous les miroirs de la mer reflétaient en vagues traînées roses...

- C'est sûr que tu devrais te marier, Yann, dit tout à coup Sylvestre, avec beaucoup de sérieux cette fois, en regardant dans l'eau. (Il avait l'air de bien en connaître quelqu'une en Bretagne qui s'était laissé prendre aux yeux bruns de son grand frère, mais il se sentait timide en touchant à ce sujet grave.) - Moi !... Un de ces jours, oui, je ferai mes noces - et il souriait, ce Yann, toujours dédaigneux, roulant ses yeux vifs - mais avec aucune des filles du pays; non, moi, ce sera avec la mer, et je vous invite tous, ici tant que vous êtes, au bal que je donnerai...

Ils continuèrent de pêcher, car il ne fallait pas perdre son temps en causeries: on était au milieu d'une immense peuplade de poissons, d'un banc voyageur, qui, depuis deux jours, ne finissait pas de passer. Ils avaient tous veillé la nuit d'avant et attrapé, en trente heures, plus de mille morues très grosses; aussi leurs bras forts étaient las, et ils s'endormaient. Leur corps veillait seul, et continuait de lui-même sa manoeuvre de pêche, tandis que, par instants, leur esprit flottait en plein sommeil. Mais cet air du large qu'ils respiraient était vierge comme aux premiers jours du monde, et si vivifiant que, malgré leur fatigue, ils se sentaient la poitrine dilatée et les joues fraîches. La lumière matinale, la lumière vraie, avait fini par venir; comme au temps de la Genèse elle s'était séparée d'avec les ténèbres qui semblaient s'être tassées sur l'horizon, et restaient là en masses très lourdes; en y voyant si clair, on s'apercevait bien à présent qu'on sortait de la nuit, - que cette lueur d'avant avait été vague et étrange comme celle des rêves. Dans ce ciel très couvert, très épais, il y avait çà et là des déchirures, comme des percées dans un dôme, par où arrivaient de grands rayons couleur d'argent rose. Les nuages inférieurs étaient disposés en une bande d'ombre intense, faisant tout le tour des eaux, emplissant les lointains d'indécision et d'obscurité. Ils donnaient l'illusion d'un espace fermé, d'une limite; ils étaient comme des rideaux tirés sur l'infini, comme des voiles tendus pour cacher de trop gigantesques mystères qui eussent troublé l'imagination des hommes. Ce matin-là, autour du petit assemblage de planches qui portait Yann et Sylvestre, le monde changeant du dehors avait pris un aspect de recueillement immense; il s'était arrangé en sanctuaire, et les gerbes de rayons, qui entraient par les traînées de cette voûte de temple, s'allongeaient en reflets sur l'eau immobile comme sur un parvis de marbre. Et puis, peu à peu, on vit s'éclairer très loin une autre chimère: une sorte de découpure rosée très haute, qui était un promontoire de la sombre Islande... »

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� Parcours 1er et 2nd degré Dans les mailles du filet De la grande pêche à la pêche durable

La visite de l’exposition permet d’aborder de manière transdisciplinaire l’aventure de la grande pêche, en particulier celle de la morue. Parmi les thématiques à découvrir pendant la visite : l’étude du poisson, du milieu dans lequel il se développe, de ses qualités nutritives et gustatives, des manières de le préparer et de le conserver. Le quotidien des marins est aussi évoqué ainsi que l’évolution des techniques et des lieux de pêche. On s’intéresse à la vie des femmes restées à terre. Ces deux sociabilités, masculine et féminine, ont donné lieu à une littérature abondante, souvent empreinte de clichés comme le célèbre roman de Pierre Loti « Pêcheur d’Islande ». L’économie du secteur de la pêche est décrite, notamment le passage d’une activité artisanale à une activité industrielle. La thématique du développement durable apparaît dans la troisième partie de l’exposition. On évoque la mise en place d’une gouvernance mondiale pour adopter des règles préservant la ressource et évitant les conflits autour des zones de pêche.

Liens avec les programmes scolaires du 1er degré

� École élémentaire

Français CE2/CM1/CM2 : La culture humaniste L’élève est capable de : dire de mémoire quelques textes en prose ou poèmes courts, de découvrir quelques éléments culturels d’un autre pays, de distinguer le passé récent du passé plus éloigné.

Histoire CP/CE1 : Se repérer dans l’espace et le temps Naissance, croissance et reproduction du vivant. Nutrition et régimes alimentaires des animaux. Interactions entre les êtres vivants et leur environnement. Sensibilisation au développement durable (formation conduite de manière transversale et interdisciplinaire).

Géographie CE2/CM1/CM2 : Éducation au développement durable Produire en France. Une zone industrialo-portuaire. Mise en valeur des notions de ressources, pollution, risques et prévention. On peut développer, dans ce cadre, une « activité pêche ».

Mathématiques CE2/CM1/CM2 : Les nombres et les proportions Connaître, savoir écrire et nommer les nombres entiers jusqu’au million et savoir les comparer. Utiliser ces fractions dans des cas simples de partage ou de codage de mesures de grandeurs. Notion de proportionnalité (problèmes relatifs aux pourcentages, aux échelles, aux vitesses moyennes)

Sciences expérimentales CE2/CM1/CM2 : Éducation au développement durable Familiarisés avec une approche sensible de la nature, les élèves comprennent que le développement durable correspond aux besoins des générations actuelles et futures. Ils étudient le fonctionnement du vivant, les modes de reproduction d’un végétal ou d’un animal.

Histoire des arts Toutes classes : Des récits, nouvelles, récits illustrés, poésies…

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Liens avec les programmes scolaires du 2nd degré

� Collège

Géographie Classe de Sixième : Habiter le monde / Habiter un littoral Après un approfondissement de la connaissance de l’espace proche, explorer le monde, situer les sociétés humaines dans leur diversité, découvrir et caractériser les différentes manières de l’habiter. Développer la curiosité des élèves et leur donner le goût de l’ailleurs. Le type d’activité dominant, les choix et les capacités d’aménagement, les conditions naturelles sont autant d’éléments à prendre en compte pour caractériser et différencier les littoraux où se concentre une part accrue de la population mondiale. La question au choix (5 % du temps consacré à la géographie) pourrait être la pêche (traditionnelle au Sénégal, industrielle au Japon).

Classe de Cinquième : Étude du développement durable Les enjeux économiques, sociaux et environnementaux du développement durable dans un territoire. Étude de cas : un enjeu d’aménagement dans un territoire (déchets, transports, équipement touristique et de loisirs…) La sécurité alimentaire mondiale dépend de plusieurs paramètres : l’augmentation des productions et leur qualité pour répondre à une demande croissante, les échanges des ressources agricoles à travers le monde et la préservation de l’environnement. Gérer les océans et leurs ressources : La gestion et le partage des ressources océaniques constituent un enjeu et une source de rivalités. Étude de cas : Une zone de pêche dans l’Atlantique nord, en zone tropicale. Gestion durable de la ressource océanique et des rivalités que suscite son exploitation. Localiser la zone de pêche choisie. Décrire les enjeux et acteurs d’un conflit lié à la pêche.

Sciences de la Vie et de la Terre Classe de Sixième : La production alimentaire par l’élevage ou la culture L’homme élève des animaux et cultive des végétaux pour se procurer des aliments qui répondent à ses besoins (matières grasses, sucres rapides, sucres lents, protéines). On peut étudier l’aquaculture.

Classe de Cinquième : Étude de la biodiversité

Français Classe de Quatrième et de Troisième : Initiation à l’étude des genres et des formes littéraires ; - le regard sur le monde, sur les autres et sur soi à différentes époques, en relation avec l’histoire des arts ; - la pratique constante, variée et progressive de l’écriture.

Mathématiques Classe de Sixième, Cinquième et Quatrième : Proportionnalité (organisation et représentation de données, analyse de graphiques) / Statistiques (exprimer et exploiter des données) / Grandeur et mesures (cf. taille minimale autorisée à la pêche…)

� Lycée

Histoire Classe de Terminale : La gouvernance économique mondiale. Son étude conduit à envisager les règlements internationaux élaborés dans le cadre de la FAO afin de préserver la ressource.

Géographie Classe de Première : Deux chapitres ont un lien avec la pêche, Les milieux et L’Europe dans la mondialisation peut permettre d’aborder la thématique de la réglementation de la pêche afin de préserver la ressource.

Classe de Terminale : Les espaces maritimes (approche géostratégique) Les zones d’exploitation exclusive : exploiter économiquement les ressources (halieutiques, biologiques, minérales et énergétiques). Tensions entre les convoitises nationales et les intérêts de la communauté internationale, entre recherche de profit et durabilité.

Français Classe de Seconde : Littérature et Société (Histoire et Français) Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : Réalisme et Naturalisme. Le thème 6 « Regards sur l’autre et sur l’ailleurs » est en lien direct avec l’exposition. Éveiller la curiosité des élèves sur les cultures, traditions, civilisations étrangères ; les faire s’interroger sur les différents regards dont elles sont l’objet : l’ethnologue, le sociologue, l’écrivain, l’explorateur, le reporter, l’historien, le géographe…

Classe de Première : Le personnage de roman, du XVIIe siècle à nos jours

Sciences de la Vie et de la Terre Classe de Première ES/L/S : Nourrir l'humanité L'impact sur l'environnement : interactions entre les êtres vivants et leurs milieux, gestion durable des ressources (sol, eau…), conséquences sur la santé. Approche historique et culturelle : l’élève aborde les processus physiques, chimiques, biologiques de la transformation et conservation des aliments. Il acquiert des connaissances pour adopter des comportements responsables. Conservation des aliments, santé et appétence alimentaire. La conservation des aliments permet de reculer la date de péremption tout en préservant leur comestibilité et leurs qualités nutritives et gustatives. Les techniques de conservation peuvent modifier les qualités gustatives et nutritionnelles des aliments et provoquer parfois des troubles physiologiques chez le consommateur. Pratiques alimentaires collectives et perspectives globales. Elles sont déterminées par les ressources disponibles, les habitudes individuelles et collectives selon les modes de consommation, de production et de distribution. Le but de cette partie est de montrer en quoi les pratiques alimentaires individuelles répétées collectivement peuvent avoir des conséquences environnementales globales.

Enseignement moral et civique Classe de Terminale : Biologie, éthique, société et environnement La responsabilité environnementale. L'interdépendance Humanité/Nature. Le principe de précaution.

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Le parcours ci-dessous propose 12 thèmes d’observation.

Il s’appuie sur une sélection d’œuvres présentées dans l’exposition Dans les mailles du filet.

Observation 1

Des lieux de pêche lointains - Situer les espaces concernés par la Grande pêche. Quelles différences entre les deux cartes ? (date, projection, échelles, centrage…) - Faire repérer aux élèves les lieux de pêche : Terre-Neuve et l’Islande. (îles de tailles différentes, situées dans les eaux froides…) - Pourquoi partir pêcher si loin ? Pourquoi la morue ? (ressource abondante, conservation facile, consommable les jours maigres…) - Quel territoire la France possède-t-elle encore à proximité du Canada ? (l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon) - A-t-on le droit de pêcher n’importe où ? (rappeler la notion de zone économique exclusive, à 200 milles marins des côtes aujourd’hui) - Quels sont les ports concernés ? Distinguer les ports d’embarquement et de décharge. Noter que les ports d’embarquement concernent surtout la Normandie, la Bretagne nord, le Pays basque. Rappelez que selon les périodes tous n’ont pas eu la même importance. - Observer les routes maritimes : quelles sont les parties du monde concernées ? Conclure en montrant que la morue a contribué à établir des flux de part et d’autre des deux rives de l’Atlantique. (base de l’alimentation aux Antilles, au Brésil, en Afrique Occidentale française)

Sur place Carte de la Mer du Nord et des côtes d'Amérique…,1698 Carte des voies maritimes [illustration au sol]

À l'appui Fiche Repères : 3. Une pêche multiforme : Terre-Neuve et Islande Fiche Documents : 1. Les côtes d’Islande et la pêche à la morue au XIXe siècle / 2. Une zone conflictuelle pour la pêche à la morue

Observation 2

La conservation de la morue pêchée - Qu’appelle-t-on la « morue verte », la « morue sèche » ? (différentes techniques de conservation du poisson) - Observer les cartes postales. Que voit-on ? (séchage sur les galets de Saint-Pierre-Miquelon, sur des espaliers en bois à Bègles…) - Observer l’affiche du port de Fécamp. Comment la morue est-elle transportée à bord ? (salée à fond de cale) - D’où vient le sel ? (des marais salants de Bretagne sud, de Saintonge, de l’île de Ré, du Midi méditerranéen) - Qu’est-ce que cela suppose comme trajet supplémentaire ? (Bretons et Normands chargent du sel à Marseille ou Bordeaux pour la campagne suivante)

Sur place Affiche, Le déchargement des chalutiers à Fécamp, 1931 Aquarelle, Goélette islandaise débarquant sa morue, Mathurin Méheut, 1939 Cartes postales Séchage de la morue à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Bègles, vers 1920-1930

À l'appui Fiche Repères : 4. Deux types de port

Observation 3

Les différentes techniques de pêche - Regarder les films qui expliquent les deux techniques de pêche à la morue. (pêche sédentaire / pêche errante) - Décrire chacune des deux techniques puis identifier les navires correspondants à la pêche en Islande et à la pêche à Terre-Neuve. - Qu’est-ce qu’un doris ? (une petite embarcation à fond plat) Pourquoi la pêche devient-elle plus rentable grâce à lui ? - En quoi le chalutier est-il une révolution ? (multiplication des campagnes grâce au moteur, productivité augmentée grâce au filet…)

Sur place Maquette de la goélette islandaise Violette, vers 1920-1930 Maquette d’un doris, 1886 Maquette du chalutier Grande-Hermine, 1980-1990

À l'appui Fiche Repères : 5. Les navires, trois révolutions successives / Lexique

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Observation 4

La grande pêche : un monde d’hommes ? - Observer les œuvres sélectionnées. Que traduisent elles ? (différents échelons de l’entreprise de pêche : l’armateur financier des campagnes, le capitaine recruté par l’armateur et chargé des stratégies de pêche, les actionnaires… ) - Qui reste à terre ? Qui embarque ? (les femmes, les enfants, les hommes âgés / les hommes, les jeunes garçons) - Observer l’action et rappeler la définition du mot. Quel est le nom de l’entreprise ? Quand a-t-elle été créée ? Où a-t-elle son siège ? Pourquoi est-elle appelée anonyme ? À combien se monte le capital de l’entreprise ? Quelle est la valeur de l’action lors de son émission ? Combien d’actions ont été émises ? À quoi a droit le possesseur d’actions de cette société ? - Comment expliquer le recours au capitalisme financier pour la pêche à cette époque ? (utilisation de navires plus chers, les chalutiers…)

Sur place Huile sur toile, Jeanne-Julienne Broize armateur, vers 1890 Photographie Le capitaine Jean Recher au sextant, 1955 Action d’une société anonyme de Saint-Malo, 1930

À l'appui Fiche Repères : 6. Faire la guerre pour la morue ?

Observation 5

Les marins de l’équipage - Observer les vêtements du pêcheur. En quoi sont-ils fabriqués ? (contre le froid : vareuse en laine ; contre l’humidité : tissu bouilli pour le ciré, le pantalon, le suroît ; contre les blessures : gants en cuir ; pour ne pas glisser : bottes en cuir montées sur des sabots en bois) - À quoi sert le coffre du marin, remplacé au XXe siècle par un sac de toile ? (sert à ranger vêtements, papiers d’identité, livret d’inscrit maritime, portrait de l’épouse ou de la mère, médailles religieuses, statuette de la Vierge / sert aussi de siège dans le poste d’équipage) - Que manque-t-il ? (sous-vêtements et vêtements de nuit : les marins ne se lavent pas et gardent les mêmes habits pendant la campagne) - Qui sont les pêcheurs ? (des professionnels mais aussi des paysans et des ouvriers recrutés au titre des inscrits maritimes) - Combien un équipage compte-t-il d’hommes ? (de 20 à 30 hommes, selon les époques et la taille des navires) - Quels sont les horaires de travail ? (18 heures par jour puis 12 heures puis 8 heures après la loi du 2 août 1919) - Que mangent-ils ? (de la soupe de têtes de morue et parfois de légumes, des biscuits de mer) - Comment qualifier ces conditions de vie ? (difficiles : manque d’hygiène, froid, contact avec le sel, mauvaise alimentation, accidents...).

Sur place Coffre de marin et son contenu Ciré et suroît, vers 1950

Observation 6

Des hommes soudés par le travail - Comparer les deux films qui montrent les tâches à bord, à deux époques différentes : entre-deux guerres et années 1960) - Quel geste effectue le marin ? (morue piquée sur un pieu, tête coupée… ; rapidité du travail : souci de productivité) - Que comprenons nous du travail des pêcheurs ? (travail décomposé, tâches effectuées à la chaîne, parcellisation du travail : les piqueurs vident le poisson, les décolleurs lui coupent la tête, les trancheurs fendent la morue et lui enlèvent l'arête dorsale, les saleurs la salent…) - Observer la photographie de l’équipage Grand-Hermine : comptez les marins. (30, nombre plus élevé que sur un navire du XIXe siècle) - Observer la photographie des deux enfants. Quel âge ont-ils ? Quel est leur rôle ? En 1931, la scolarité est obligatoire jusqu’à 13 ans. (à bord, les mousses s’occupent de la cuisine, du lavage de la morue ; sur les plages de galets, les « graviers » font sécher la morue au soleil) - Comment les uns et les autres sont-ils payés ? La charte-partie est le document écrit qui précise la part revenant à chacun. Que ce soit pour l’armateur, le capitaine ou le pêcheur, la pêche à la morue est rémunératrice. Les règles varient selon les ports et les périodes. Le salaire intègre une part fixe (l’avance) payée avant le départ, une part mobile liée au volume de la pêche (langues des morues conservées par le pêcheur) et une part liée au revenu de la vente des morues à terre. À l’embarquement, le pêcheur perçoit une prime de risque : le « Denier de Dieu » ou « Dernier Adieu ».

Sur place Photographie Équipage du chalutier Grande-Hermine, 2011 Photographie Les deux mousses, 1930

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Observation 7

L’or blanc de l’Atlantique nord - Observer le poisson naturalisé. Évaluer ses dimensions et son poids (1 m 20 ; 50 kg) - Repérer ses caractéristiques : barbillon mentonnier, grande bouche, grosse tête (un quart de la longueur totale) - Lire le panneau des recettes. Considérée comme le plat du pauvre autrefois, la morue est devenue coûteuse aujourd’hui en raison de sa rareté. Quel est le point commun à ces deux recettes ? (nées dans des régions pauvres : Massif central et Antilles) - Repérer les différents usages de la morue d’après les produits exposés : peau, foie, rogue (= œufs pour servir d’appât pour la sardine) - À quoi sert l’huile de foie de morue ? Quelles qualités lui sont prêtées ? (foie très développé, correspond à 40 % du poids de la morue) Le foie de morue est riche en vitamines A et D, en acides gras non saturés. Huile employée aussi dans l'industrie principalement pour le tannage du cuir. Sur les chalutiers, on extrait l’huile grâce à un système de cuisson à vapeur. Il faut en moyenne de 10 000 foies pour une barrique de 220 litres. C'est au printemps ou au début de l’été que l'huile est la plus riche en vitamines.

Sur place Poisson naturalisé, Gadus morhua, 1935 Brochure du Comité de propagande pour la pêche à la morue, vers 1950

À l'appui Fiche Repères : 1. Deux noms pour un même poisson

Observation 8

Le grand départ - Observer le triptyque après définition du terme. Identifier chacune des scènes. Que traduisent-elles ? (résumé de la vie dangereuse du terre-neuvas : le départ, la prière avant l’immersion du corps, le deuil) - Qu’est ce qu’un Pardon ? (procession d’origine religieuse, rituel organisé avant le départ, existe depuis la seconde moitié du XIXe siècle) - Chronologie à l’appui, combien de temps les hommes sont-ils absents ? (recrutement fin novembre ; revue de l’armement en février ; départ au printemps ; retour en septembre) - Observer le tableau de Signac. Quelle technique utilise-t-il ? À quel courant artistique se rattache-t-il ? (néo-impressionniste, style pointilliste)

Sur place Maquette du Terre-neuvas de Saint-Malo, le Côte-d'Émeraude, 1925 Huile sur toile, À la mer, Guillaume-Albert Démarest 1902 Caséine sur carton, Au pardon des Terre-neuvas, Yvonne Jean-Haffen 1930-1935 Huile sur toile, Saint-Malo le Pardon des Terre-neuvas, Paul Signac 1928

À l'appui Fiche Repères : Repères chronologiques

Observation 9

Au péril de la mer - Décrire les deux tableaux sélectionnés. - En quoi sont-ils révélateurs des dangers de la grande pêche ? (éloignement des côtes, fréquentes tempêtes, icebergs errants, brume épaisse, températures glaciales…) - Quels sont les nouveaux dangers liés au développement des navires à vapeur et des paquebots dans la seconde moitié du XIXe s ? (naufrage suite à une collision, mauvaise visibilité en raison de la différence de taille…)

Sur place Huile sur toile, Le Colonel-Pleven de Saint-Malo, Marin-Marie, vers 1950 Huile sur toile, Pêche à la morue, Louis Garneray, 1832

À l'appui Fiche Repères : 2. Une pêche ancestrale

Observation 10

L’interminable attente et les retrouvailles - Observer puis comparer les trois tableaux sélectionnés. Les décrire à haute voix. - De quels sentiments témoignent-ils ? (1. l’attente et l’inquiétude ; 2. la joie ; 3. la piété et la reconnaissance)

Sur place Huile sur toile, L’attente, Jean Georges Cornelius vers 1930 Huile sur toile, Retour d’Islande, Guillaume-Albert Démarest, vers 1900 Huile sur toile, Le vœu, Guillaume-Albert Démarest, 1894

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Observation 11

Pêcheur d’Islande, une œuvre mythique - Introduire le roman Pêcheur d’Islande de Pierre Loti, 1886. - Faire résumer par les élèves ou résumer l’histoire : Yann Gaos, pécheur de Saint-Malo, part chaque année en campagne vers l’Islande. Gaud, fille d’un riche marchand, s’éprend du marin. Celui-ci la dédaigne en dépit de ses propres sentiments car il se juge trop pauvre pour elle. Après la mort du père de la jeune-fille, celle-ci se trouve ruinée. Les deux jeunes gens se rapprochent. Leur mariage est à peine célébré que Yann part à nouveau vers l’Islande sur la Léopoldine. Gaud rejoint le camp des femmes qui attendent mais son Yann ne revint jamais. Il a célébré ses noces avec la mer. (cf. fin du roman dans l’extrait filmé)

- Pourquoi le roman devient-il un best-seller ? (mêle réalisme et scènes naturalistes, poésie et aventure, histoire d’amour et tragédie, s’adresse à un lectorat masculin comme féminin, décrit un monde qui est en train de disparaître…)

- Compter le nombre d’éditions du livre de Pierre Loti dans la bibliothèque (sélection non exhaustive) Le roman est un best-seller à l’époque : 261 éditions en 1905, 445 en 1931, traduit en 14 langues. Il inspire même les chansonniers comme Théodore Botrel qui compose « La Paimpolaise » en 1895. Pierre Loti réalise une version théâtrale de son œuvre en 1893.

- Regarder les extraits de films. Quelles sont les conséquences de rééditions multiples et d’adaptations cinématographiques répétées ? (diffusion de stéréotypes…) Le livre a été souvent adapté au cinéma : 1915 Henri Pouctal ; 1924 Jacques de Baroncelli avec Charles Vanel (Yann) ; 1933 Pierre Guerlais ; 1959 Pierre Schoendorfer avec Charles Vanel (l’armateur).

Sur place Ouvrages sélectionnés [dans la bibliothèque] Affiche du film Pêcheur d'Islande de Pierre Guerlais, 1933 Affiche du film Pêcheur d'Islande de Pierre Schoendorfer,1958

Observation 12

Vers une pêche durable - Observer le film d’introduction. Noter les chiffres clés pour en débattre ensuite en classe. - Histoire de la morue de Terre-Neuve à l’appui, lister les conséquences d’une mauvaise gestion des mers (non renouvellement des stocks, disparition des espèces, conséquences sur la biodiversité et la chaîne alimentaire …) - Quelles en sont les raisons ? (modernisation des navires, multiplication des campagnes, augmentation des quantités pêchées…) - Qu’est-ce que le développement durable ? Rappeler la définition. - Qu’est-ce qu’une pêche durable ? Lister les solutions expérimentées. (taille minimale autorisée à la pêche, espèces interdites selon les saisons et les lieux, mailles des filets élargies pour éviter de prendre les juvéniles, interdiction des rejets à la mer…) - Pourquoi faut-il gérer les ressources halieutiques de manière durable ? (la mer : 71 % de la surface de la terre, avenir de la planète) - Partager la classe en groupes, chacun d’entre-eux se spécialisant sur un des points de vue représentés (scientifiques, décideurs, pêcheurs, armateurs, associations écologistes). Noter les arguments utilisés. En classe, organiser un débat en confrontant les arguments des uns et des autres. Envisager les limites de chaque position. Jusqu’à quel point ces différents arguments sont-ils compatibles ?

Sur place Interviews d’Isabelle Autissier présidente du WWF France, Erik Orsenna écrivain et membre de l’Académie française, Gilles Boeuf président du Museum national d’Histoire Naturelle…

À l'appui Fiche Repères : 7. La morue se fait rare / 8. Vers une gouvernance mondiale de la pêche / 9. La politique européenne de la pêche Fiche Documents : 5. L’effondrement de la morue en Atlantique nord / 8. Les quotas de pêche en Islande / 17. Bloom, une ONG de défense environnementale au service de la pêche durable / 19. Les ressources halieutiques aujourd’hui / 20. Les DCP

Musée national de la Marine

Auteurs : Service culturel, Catherine Maillé-Virole, Paris 2015

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� Activités 1er et 2nd degré

Dans les mailles du filet De la grande pêche à la pêche durable

Exercices à faire en classe par les élèves, à partir de la fiche Documents, en complément de la visite de l’exposition. Les élèves peuvent travailler seuls ou en groupes.

Activité 1 : Exercice de Français et d’Histoire des arts S’appuyer sur l’étude du roman Pêcheur d’Islande de Pierre Loti, 1885 (collection Folio classique) Lien avec les programmes : Le roman et la nouvelle au XIXe siècle / réalisme et naturalisme � 1. Écriture d’invention Yann a eu le temps d’écrire une courte une lettre à Gaud avant sa mort et l’a enfermée dans une bouteille qu’il confie à la mer. Elle ne parviendra jamais à sa destinataire et c’est vous qui la retrouvez par hasard sur une plage en Bretagne. Vous rédigerez la lettre de Gaud en tenant compte des indications données par l’auteur au chapitre 3 de la cinquième partie (cf. Folio page 272) puis développerez vos propres réactions face à ce texte surgi du passé. � 2. Écriture d’invention (Seconde : Littérature et Société, Regards sur l’autre et sur l’ailleurs) Après avoir lu le chapitre X de la deuxième partie - Sylvestre en Orient, rédigez une page du Journal de bord de ce marin breton qui découvre Singapour et ses habitants. � 3. Écriture d’invention Imaginez une autre fin pour le roman (Chapitre XI de la cinquième partie). La Léopoldine a fait naufrage mais Yann a été sauvé par les marins d’un navire norvégien. Il revient deux ans après et retrouve Gaud au pied de la Croix des Veuves. Décrivez la scène et imaginez le dialogue entre les deux personnages. � 4. Commentaire de texte (Seconde/Première) À l’appui : Fiche Documents 22. / Première partie Folio page 59 à 61 « Dehors il faisait jour, éternellement jour. »

- Analysez dans le premier paragraphe comment l’auteur fait appel à tous les sens pour décrire le milieu marin à proximité des côtes d’Islande. - En vous appuyant sur les deux tableaux Impressions Soleil Levant de Claude Monet, 1872 (Musée Marmottan, Paris) http://www.marmottan.fr/fr/impression__soleil_levant-expositions-9130-2576 et Lever de Soleil avec monstres marins de William Turner, 1845 (Tate Gallery, Londres) http://www.tate.org.uk/art/artworks/turner-sunrise-with-sea-monsters-n01990), expliquez pourquoi on a pu comparer à des procédés picturaux le jeu de la lumière décrit dans cet extrait. Dans quelle mesure ce texte peut-il être traité de paysage impressionniste ? - Repérez dans l’extrait les différentes tâches effectuées par les pêcheurs. Quels passages montrent la pénibilité de leur travail ? Comment l’auteur traduit-il la communion des hommes avec le milieu maritime ? - Montrez dans le dernier paragraphe du passage que l’environnement décrit est assimilé à un espace religieux. En vous basant sur une phrase de cet extrait, expliquez ce que cette scène a de prémonitoire par rapport à la suite du roman. - Quels qualitatifs peuvent être utilisés pour caractériser cet extrait : pathétique, tragique, lyrique, épique, fantastique, réaliste ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur des phrases significatives. � 5. Dissertation : Le personnage de roman (Première) Pourquoi peut-on dire que les personnages du roman Pêcheur d’Islande sont mués par des forces qui les dépassent ?

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Activité 2 : Se repérer dans le temps et l’espace Ces exercices peuvent être réalisés à partir de la Fiche Documents (1) ou d’une lecture suivie de Pêcheur d’Islande de Loti

� Carte A Après une recherche dans un Atlas, situer sur la carte ci-dessous les ports de Dunkerque, Gravelines, Boulogne, Fécamp, Saint-Brieuc, Paimpol, Granville, Saint-Malo, Dieppe.

� Carte B Tracer avec des flèches rouges les itinéraires des pêcheurs d’Islande, avec des flèches vertes les itinéraires des Terre-Neuvas. Indiquer le long des flèches les mois concernés, en vous appuyant sur le calendrier des pêcheurs ci-dessous.

Calendrier des campagnes de pêche

Janvier

Février

Mars

Mai-Juin

Juillet-Août

Septembre

Octobre

Novembre

Décembre

Préparation de la campagne Recrutement des hommes

Grand départ avec la dernière grande marée

Première pêche près des côtes pour éviter les tempêtes

Première période de déchargement de la morue

Grande période de pêche jusqu’à épuisement des vivres

Retour

Pêche côtière en France ou en Espagne et au Portugal (cabotage) Achat de sel

Grand départ après la fonte des glaces

Grande période de pêche jusqu’à épuisement des vivres

Voyage aller 10 à 12 jours joursj.oursjoursjo

Voyage aller 3 semaines Te

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Activité 3 : Exercices en Sciences et Vie de la Terre � Exercice 1 : Sur la silhouette de la morue, repérer les différents éléments caractéristiques du poisson. Indiquer par une flèche sa taille moyenne acquise à l’âge adulte.

� Exercice 2 : Compléter l’organigramme fléché qui montre la chaîne alimentaire de la morue (cabillaud). Attention, toutes les espèces figurées ne sont pas forcément impliquées.

Phoque gris

Mouette Hareng

Moules

Saumon

Flétan

Algues

Ours polaire Plie

mange

Morue (Cabillaud) Homme

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Activité 4 : Exercices d’Histoire et Géographie ���� Exercice 1 : Une société de pêche Document à l’appui : 18

- Rappeler la définition du mot action.

- Observer : Quel est le nom de l’entreprise ? Quand est elle créée ? Où a-t-elle son siège ? Pourquoi est elle appelée « anonyme » ? À combien se monte le capital de l’entreprise ? Quelle est la valeur de l’action lors de son émission ? Combien d’actions ont été émises ? À quoi a droit le possesseur d’actions de cette société ?

- Réfléchir : Comment expliquer le recours au capitalisme financier pour l’activité de pêche à cette époque ? ���� Exercice 2 : La difficile labellisation Documents à l’appui : 15 et 16 - Présentez le document 15 : Qu’est ce qu’un label ? - Identifiez la provenance des labels et classez-les en 4 catégories : ONG / Distributeurs / Organismes de certification / État - Quels sont les logos qui concernent l’aquaculture ? - Quels logos mettent l’accent sur l’origine géographique ? Sur la qualité ? - Lequel de ces logos est le plus fiable en ce qui concerne le respect des normes environnementales ? Quelles en sont néanmoins les limites ? Document à l’appui : 16 - Quels sont les arguments utilisés par le groupe Intermarché pour justifier son image de distributeur respectueux de pratiques de pêche responsable ? - Cherchez les caractéristiques des poissons cités par le groupe : le sabre noir, la lingue bleue, la baudroie. En vous appuyant sur le document 16 b, expliquez pourquoi la pêche de ces poissons est peu compatible avec l’image de pêche responsable recherchée par le groupe. ���� Exercice 3 : La politique européenne de la pêche Documents à l’appui : 9 à 13

- Rappelez ce qu’est un règlement européen http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/union-europeenne/action/textes-juridiques/qu-est-ce-qu-reglement.html

- À partir du document 9, retracez les différentes étapes d’élaboration de la législation européenne, en précisant à chaque fois quels en sont les rouages : Une initiative (proposition de la Commission européenne) Un avis du Comité économique et social européen et du Comité des régions Une adoption du projet par le Parlement européen et le Conseil de l’UE

- Quels sont les trois grands objectifs de ce règlement ? (stabilité du marché pour que les pêcheurs vivent correctement de leur métier ; respect des règles de l'OMC - commerce loyal ; respect de la durabilité)

- Quels moyens doivent être mis en place pour y parvenir ? (information des consommateurs, étiquetage précis, engins de pêche sélectifs, projet d’un label écologique européen pour les produits de la pêche et de l’aquaculture)

- À partir des documents 9 et 10, cherchez ce qu’est la DGCCRF. Montrez ensuite comment l’Administration française met en œuvre de manière concrète le règlement européen. En équipe, réalisez une enquête (pour les classes de collège) : endossez le rôle d’un enquêteur de la DGCCRF allant sur un étal de marché ou de super marché ; observez le rayon poissonnerie et recopiez la totalité des mentions d’une étiquette d’un poisson donné. Comparez ensuite les mentions de l’étiquette avec le modèle représenté au numéro 10. Qu’en concluez-vous ? Situez sur le planisphère ci-dessous la zone de pêche concernée.

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Source : http://www.cyberhistoiregeo.fr/spip.php?article736

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���� Exercice 4 : Le Canada et la pêche Documents à l’appui : 4 et 5

- Pourquoi ce pays a t-il fait le choix de ne pas entrer dans l’UE ? - À partir du document, expliquer ce qu’est un quota de pêche ? - Est-ce que cela a été utile ? Pourquoi ? Quels en ont été les effets pervers ? ���� Exercice 5 : L’Islande et la pêche Documents à l’appui : 7 et 8

- Quelles raisons le Canada met-il en avant pour expliquer la baisse des stocks de morue ? - Quelles mesures a-t-il mises en place pour y remédier ? Ont-elles été efficaces ? ���� Exercice 6 : La gouvernance mondiale de la pêche Documents à l’appui : 3 et 6, 17

- Qu’est ce qui distingue les documents 3 et 6 ? (source, date, objectifs) En quoi en dépit de leurs différences, contribuent-ils à faire naître une gouvernance mondiale de la pêche ? Le document 3 (1993) a-t-il été suivi d’effets ? Basez vous sur les autres documents à votre disposition. - À partir d’une étude contextualisée du document 6, montrez que la pêche est une activité essentielle à la vie de l’Humanité, mais qu’elle peut aussi présenter des risques en cas de failles de la gouvernance. - À partir du document 17, expliquez ce qu’est une ONG et en quoi, elle aussi, joue un rôle dans l’émergence de gouvernance e mondiale de la pêche. ���� Exercice 7 : Les plus gros producteurs de poissons pêchés Document à l’appui : 19

- Identifier les principales zones de pêche dans le monde en les classant. Quelle évolution chacune d’entre elles connaît-elle ? Quelles raisons peuvent l’expliquer ? - Quels sont les plus grands producteurs de la filière halieutique ? - Quelle évolution constatons-nous dans le cas de l’Atlantique nord ? Quelle est la place des pays européens par rapport aux autres régions du monde dans la production halieutique ? - Sachant que la consommation de poisson et produits de la mer est passée en France de 28 kg par an et par personne à 33 kg entre 1998 et 2012, comment la France parvient-elle à satisfaire la demande ? - Que révèlent les courbes (doc 19 d) ? À partir des autres données vues de l’exposition ou dans les autres documents (12, 14, 20), trouvez des explications aux phénomènes constatés. ���� Exercice 8 : L’aquaculture Document à l’appui : 6 et 19 a - Évaluer la part actuelle de l’aquaculture par rapport à la pêche dans la production halieutique finale. Que constatons-nous dans l’évolution de l’une et de l’autre ? - En fonction des informations données lors de la visite de l’exposition (dernière partie : témoignages), rappeler quels problèmes pose cette activité. ���� Exercice 9 : Document à l’appui : 21

- À partir du document 21 a, classer dans l’ordre décroissant les poissons qui occasionnent les plus grandes dépenses d’achat en France. Quelles explications peut-on donner notamment pour les poissons en tête de classement. Attention, ce n’est pas forcément la même explication pour tous… - Répartir les élèves en 8 ou 9 groupes, leur attribuer à chacun la responsabilité d’un poisson et leur demander de calculer le pourcentage de variation entre 2007 et 2012. - Peut-on trouver une explication à cette hausse ou à cette baisse en fonction des informations acquises lors de la visite de l’exposition ? - Calculer le rapport entre les dépenses occasionnées pour le poisson sélectionné et le saumon (rapporte le plus en 2012). - Observer les deux diagrammes en radar (doc 21 b). Que révèlent-ils sur les lieux de consommation de la morue sèche et du cabillaud ? Comment peut-on l’expliquer ? (résistance de pratiques culturelles anciennes liées à des recettes locales comme ailloli en Provence, brandade nîmoise, estofinado en Aveyron). - La saisonnalité de la consommation de la morue sèche (doc 21 c). Décrire les variations de la consommation au cours de l’année. Chercher à les expliquer (résilience de pratiques culturelles liées à un pic observable au moment du Carême en février mars).

Musée national de la Marine

Auteurs : Service culturel, Catherine Maillé-Virole, Paris 2015