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Le moniteur HOSPITALIER n°237 juin-juillet 2011 1 La préparation CENTRALISÉE de médicaments injectables Une opération à haut risque La préparation centralisée de médicaments injectables prêts à l’emploi, encore appelée CIVAS, est aujourd’hui largement préconisée, mais nécessite une structure d’assurance qualité de haut niveau. Explications. Mise en route d’une unité CIVAS De l’étude des besoins à la fabrication des seringues en routine, le point sur la méthode à suivre pour créer son unité CIVAS. Exemple à l’appui avec celle de la pharmacie des Hôpitaux Universitaires de Genève. page XX page XX DOSSIER Par Pascal Bonnabry, pharmacien-chef, pharmacie des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), professeur associé, université de Genève, université de Lausanne, Suisse, Cyril Stucki, pharmacien responsable, pharmacie, clinique générale Beaulieu, Genève, Farshid Sadeghipour, pharmacien-adjoint, responsable du secteur production, pharmacie HUG, Sandrine Fleury-Souverain, pharmacienne- adjointe, responsable du laboratoire de contrôle-qualité, pharmacie, HUG. DR - HUG Retrouvez notre test de lecture du DOSSIER sur le site wk-pharma.fr MOTS CLÉS CIVAS, préparation centralisée de médicaments injectables, erreurs, seringues, asepsie, contamination.

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z Le moniteur HOSPITALIER n°237 z juin- jui l let 2011 z 1

La préparationCENTRALISÉE demédicaments injectables

Une opérationà haut risqueLa préparation centralisée de médicaments

injectables prêts à l’emploi, encore appelée

CIVAS, est aujourd’hui largement préconisée,

mais nécessite une structure d’assurance

qualité de haut niveau. Explications.

Mise en routed’une unité CIVASDe l’étude des besoins à la fabrication des

seringues en routine, le point sur la méthode

à suivre pour créer son unité CIVAS. Exemple

à l’appui avec celle de la pharmacie des

Hôpitaux Universitaires de Genève.

page XX

page XX

DOSSIERPar

Pascal Bonnabry, pharmacien-chef, pharmacie des Hôpitaux Universitaires

de Genève (HUG), professeur associé, université de Genève,

université de Lausanne, Suisse, Cyril Stucki, pharmacien responsable,

pharmacie, clinique générale Beaulieu, Genève,

Farshid Sadeghipour, pharmacien-adjoint, responsable du secteur

production, pharmacie HUG, Sandrine Fleury-Souverain, pharmacienne-

adjointe, responsable du laboratoire de contrôle-qualité, pharmacie, HUG.

DR-H

UG

ò Retrouvez notre testde lecture du DOSSIERsur le site wk-pharma.fr

MOTSCLÉS

CIVAS, préparation centralisée de médicaments injectables, erreurs,seringues, asepsie, contamination.

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DR-H

UG

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Une opérationà haut risque

La préparation centralisée de médicaments injectables prêts à l’emploi,

encore appelée CIVAS, a été mise au point afin de prévenir les erreurs

de médication. Elle est aujourd’hui largement préconisée, mais nécessite

une structure d’assurance qualité de haut niveau. Explications.

D’importants efforts sont actuellemententrepris par les hôpitaux pour amé-liorer la sécurité des processus desoins et, entre autres, l’utilisation des

médicaments. Des études d’observation ontcherché à évaluer la répartition des taux d’erreursmédicamenteuses dans les différentes étapes

du processus et la capa-cité de récupération deces erreurs avant qu’ellesn’atteignent les patients.Ces travaux montrentque chaque étape com-prend un certain risque,mais que les erreurs auniveau de l’administra-tion sont les plus nom-breuses à atteindre les

patients, compte tenu de la faible possibilité deles récupérer (2 % d’interception versus 50 %pour les erreurs de prescription).

Les risques associés àl’administration d’injectables

Les médicaments injectables sont généralementdestinés à traiter des pathologies aigües et ilsconstituent la principale arme thérapeutiquedes lieux d’hospitalisation hyper-aigus commeen anesthésiologie et en réanimation. La dissolution et la dilution des principes actifsainsi que la détermination des vitesses de per-fusion nécessitent des étapes de calcul mental,sources fréquentes d’erreurs. Compte tenu éga-

lement des nombreuses manipulations à effec-tuer, la préparation des solutions au sein d’uneunité de soins peut difficilement conduire à unegarantie absolue d’asepsie, ce qui est particuliè-rement problématique lorsque la durée d’admi-nistration est supérieure à quelques heures. Cer-taines voies d’administration – intrathécale parexemple – exposent le patient à un risque parti-culièrement élevé, en cas d’erreur de dilution oude contamination microbiologique.Dans les unités de soins ou les blocs opératoires,la préparation doit souvent être réalisée dans desconditions de travail favorisant la survenue d’er-reurs : zones de travail peu ergonomiques, situa-tion de stress, interruptions fréquentes. Et aprèsla préparation, les seringues et poches de per-fusion doivent être re-étiquetées, ce qui induitune nouvelle source d’erreurs, d’oubli et deconfusion.

Types et taux d’erreurs dans la préparation des seringues

La préparation extemporanée des seringuesdans les lieux de soins expose à de nombreuxfacteurs de risques liés aux limites de capacitésdes êtres humains. De plus, il est constaté que,dans la majorité des cas, peu d’aides à la pré-paration (ex. protocoles standardisés, abaquespour les dilutions, check-listes) existent dansl’organisation traditionnelle des activités. Lesconséquences qui peuvent en découler ont étéassez bien étudiées dans plusieurs études réa-lisées soit dans un contexte expérimental, soit

La préparation extemporanée

des seringues dans les lieux de

soins expose à de nombreux

facteurs de risques liés aux limites

de capacités des êtres humains.

DOSSIER

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dans la pratique couranteavec les résultats suivants.

Erreurs de préparationUne étude expérimentale conduite auprèsd’anesthésistes a montré des taux d’erreurs de6,5 % lors de la préparation de seringues, la moi-tié des problèmes étant liés à des dilutions er-ronées. (fig. page suivante)Ces résultats ont été complétés par une étudedans la pratique courante, qui a consisté à ana-lyser le contenu de seringues non utilisées, ré-coltées au bloc opératoire à la fin de la journéede travail. Les résultats ont montré que 29 % desseringues avaient un contenu plus ou moins au-delà de 10 % de la concentration cible, 8 % plusou moins au-delà de 50 % et 4 % au-delà plus ou-moins de 100 %. Ces données démontrent l’am-pleur des problèmes d’imprécision et d’erreurlors de la préparation.

Erreurs de calculParmi d’autres causes, les erreurs de calculsjouent clairement un rôle important dans les er-reurs de préparation, l’être humain étant globa-lement assez peu performant dans ce type d’opé-rations cognitives. Dans une étude expérimen-tale réalisée auprès d’infirmiers généralistes etde médecins anesthésistes, des taux moyensd’erreurs de 10 % et 26 % ont été respectivement

observés dans la réalisation des calculs de leurpratique courante. Une très grande variabilitéinterindividuelle a également été mesurée, avecpar exemple des taux d’erreurs qui variaient de0 à 72 % dans la population d’infirmières.

Erreurs d’asepsieLe risque de rupture de l’asepsie a été évalué enmesurant le taux de contamination de seringuespréparées au bloc opératoire. Le taux mesuré de0,5 % peut paraître relativement modéré, mais ilcorrespond néanmoins à deux seringues conta-minées potentiellement administrées chaquejour aux patients pris en charge par les anesthé-sistes de notre institution. Une autre étude plusancienne, réalisée dans des services de soins in-tensifs, montrait des taux de contamination net-tement plus élevés, allant de 5 à 40 %.L’impact d’actes à risques sur la contaminationa été étudié de manière expérimentale dansune étude faisant intervenir la méthode de testde remplissage aseptique avec des milieux deculture. Les résultats de la partie de l’étude réa-lisée dans l’environnement du bloc opératoiremontraient que le fait de toucher une surfacenon stérile avec le bout de la seringue était àl’origine d’un taux de contamination significa-tif, voire élevé (3 % et 24 % en cas de contactavec un plan de travail ou les doigts, respecti-

L’environnement du remplissage aseptique

doit impérativement être classé A selon les BPF

(ci-dessus remplissage manuel de seringues).

La préparation CENTRALISÉE de médicaments injectables

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vement), tandis que la simple mise en contactavec l’air ambiant ne semblait pas suffire pouraboutir à une contamination. A noter que lesmêmes actions à risques reproduites dans unenvironnement de salles blanches en pharma-cie hospitalière ne conduisaient à aucunecontamination.

Impact du stressUne étude expérimentale ayant mis en situa-tion d’urgence les volontaires a fait les constatssuivants, qui illustrent bien la difficulté de réa-lisation d’un acte complexe en cas de stress :14 % d’erreurs de conversion de mg à mL (dé-viation moyenne dela dose 12 %, maxi-mum 400 %), 7 %de sélection dumauvais médica-ment, 33 % d’im-précision/ erreur deprélèvement (dé-viation moyenne dela dose 8 %, maxi-mum 146 %), la conversion et la préparationpeuvent prendre plusieurs minutes (de 1 à 5).Ces différentes études mettent en lumière laréalité, parfois peu connue, des problèmes defiabilité associés à une activité réalisée de ma-nière « artisanale ». Elles apportent une jus-tification forte à la nécessité de changer de pa-radigme et de revoir, du moins pour les produitsà haut risque, les modalités de préparation etd’administration. Pour cela, les grands prin-cipes de l’amélioration de la sécurité peuventêtre appliqués : simplifier, réduire le recours àla mémoire, standardiser, diminuer la ressem-

blance, éliminer les étapes manuelles, et en-fin, utiliser des contrôles réalisables.

Concept et bénéfices atttendu des CIVAS

Au début des années 1970, une série d’incidentssurvenus en Grande-Bretagne conduisirent à lacréation d’un groupe de travail dirigé par le Prof.Breckenridge, qui évalua en détail la probléma-tique de l’addition de médicaments aux fluidesinjectables et conclut qu’il s’agissait d’une pro-cédure aseptique nécessitant un environnementapproprié, que l’on trouve en particulier au seindes pharmacies d’hôpitaux. Le concept de CIVAS (Centralized IntraVenous Addi-tive Service) décrit un service de la pharmacie vi-sant à mettre à disposition des utilisateurs dessolutions injectables prêtes à l’emploi. Surtoutprofilés à l’origine pour éviter les complicationsinfectieuses, la mise sur pied de tels services estaujourd’hui largement préconisée pour prévenirplus largement les erreurs de médication. Leprincipal avantage d’une fabrication à la pharma-cie réside dans l’industrialisation qu’elle appor-te, compte tenu de l’importante structure d’as-surance-qualité que l’on y trouve.Au sens large du terme, tout produit injectablefourni aux unités de soins sous une forme prêteà l’emploi peut être considéré comme un CIVAS.Historiquement, les pharmaciens se sont d’abordpréoccupé de fournir des solutions de nutritionsparentérales prêtes à l’emploi, puis ils se sontattachés à centraliser la reconstitution des pro-duits cytotoxiques. Une fois ces deux étapes réa-lisées, il est possible de proposer aux servicesde soins la production d’autres produits injec-tables sous une forme prête à l’emploi. C’est cet-te dernière catégorie que l’on dénomme CIVAS,au sens restreint du terme.Les CIVAS peuvent être préparés sous forme depréparations individualisées (ex. dosage pédia-trique individualisé) ou de production de sériepar constitution de lots pour le stock (ex. dosa-ge standardisé d’un produit à haut risque). Laproduction est généralement réalisée par la phar-macie hospitalière, mais lorsque les quantitésdeviennent trop importantes ou que de nom-breux hôpitaux souhaitent pouvoir disposer duproduit, une sous-traitance auprès de l’industrieest possible. Dans le futur, il est souhaitable quecertains produits puissent bénéficier d’une au-torisation de mise sur le marché. En résumé, les bénéfices attendus des CIVASsont les suivants : – favoriser une standardisation des concentra-tions des médicaments et des modes d'adminis-tration,

DOSSIER

Les CIVAS peuvent

être préparés sous forme

de préparations individualisées

ou de production de série par

constitution de lots pour le stock.

Erreur de sélection Erreur de dilution Erreur de quantité

52 %

20 % 28 %

ERREURS DE PRÉPARATION DE SERINGUES EN SITUATION EXPÉRIMENTALE

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– produire un médicament de qualité, selon lesbonnes pratiques de fabrication hospitalières(BPP) ou industrielles (BPF ou GMP) et appor-ter une assurance sur le dosage, la stabilité et lastérilité du médicament,– conditionner le médicament sous une formeprête à l’emploi, impliquant pour les soignants,d’éviter des erreurs lors de la préparation (dilu-tion, asepsie)et de pouvoir faire face aux situa-tions d’urgence en évitant de perdre du tempspour la préparation– favoriser une bonne administration des médi-caments, par un étiquetage adéquat quant à soncontenu (ex. présence des informations néces-saires selon les recommandations en vigueur8,9) et sa forme (ex. utilisation des codes cou-leurs selon la norme ISO 26825 10),– dans certains cas, une économie en coûts demédicaments peut être réalisée, lorsque des se-ringues préparées à l’avance doivent être jetées(ex. éphédrine en cas d’anesthésie péridurale) ouque seule une fraction d’un médicament coûteuxpeut être utilisée (ex. dosages pédiatriques).

Conditions de réussite d’un projet de CIVAS

Le concept de CIVAS ne peut atteindre ses ob-jectifs d’amélioration de la sécurité que si lastructure de production mise en place au sein dela pharmacie apporte les garanties d’un haut ni-veau de qualité. Cela implique une maîtrise ap-profondie des normes de bonnes pratiques defabrication, qui concerne les locaux (ex. sallesblanches avec flux laminaires/isolateurs), la for-mation spécifique du personnel, les méthodesde travail, la documentation (ex. protocoles defabrication standardisés), la traçabilité (ex. éti-quette finale avec numéro de lot) et le contrôlede qualité.Les moyens matériels et humains doivent êtreen adéquation avec la charge de travail induitepar ces nouvelles activités. Cela nécessite deprioriser le développement et la mise à disposi-tion des produits, afin de monter en charge pro-gressivement, en débutant par les produits lesplus prometteurs en terme d’amélioration de lasécurité.La logistique de production et de distributiondoit être organisée minutieusement, afin d’évi-ter des ruptures de stock, souvent significativesde retour temporaire vers les produits non prêtsà l’emploi. Ces situations engendrent non seu-lement un risque accru, mais également uneimage négative du projet.La communication avec les services de soinsdoit être mise en place dès l’initiation du projet.Dans un premier temps, il s’agit de convaincre

de l’utilité d’une telle démarche, qui est souventconfrontée à la question de la responsabilité del’administration d’un produit fabriqué par untiers et aux doutes quant à l’amélioration réelle

de la sécurité. Des réponses àces questionnements doiventêtre apportées :– la pharmacie hospitalièredevient le fabricant et portedonc la responsabilité de laqualité du produit, au mêmetitre qu’un laboratoire phar-maceutique pour les produitsqu’il fournit, qui sont admi-

nistrés chaque jour sans que cette question sepose (ex. HBPM),– la sécurité n’est pas liée au fait que les phar-maciens sont plus fiables que les soignants, maisau changement conceptuel qui est apporté. Lastructure d’assurance-qualité de la production

La préparation CENTRALISÉE de médicaments injectables

Le projet de CIVAS ne peut

atteindre ses objectifs

d’amélioration de la sécurité

qu’avec un haut niveau de

qualité et des moyens.

• Bates DW, Cullen DJ,Laird N, et al. Incidence ofadverse drug events andpotential adverse drugevents. Implication forprevention. ADE preventionstudy group. JAMA1995;274:29-34.

• Garnerin P, Pellet-Meier B,Chopard P, Pernegger T,Bonnabry P. Measuringhuman-error probabilities indrug preparation: a pilotsimulation study. Eur J ClinPharmacol 2007;63:769-76.

• Stucki C, Sautter AM,Fleury-Souverain S, WolffA, Bonnabry P. Accuracy ofsyringes prepared inanaesthesiology. Posterprésenté au 15e congrèsde l’Associationeuropéenne despharmaciens d’hôpitaux(EAHP), Nice, 2010.[http://bit.ly/kQlx3c]

• Stucki C, Sautter AM,Kooger N, Bonnabry P.Observation des pratiqueset analyse de la qualitédes préparations

médicamenteuses enanesthésiologie. Posterprésenté aux 13es JournéesFranco-Suisses depharmacie hospitalière,Chalon, 2006[http://bit.ly/jzD1mP].

• Van Grafhorst JP,Foudraine NA, NooteboomF, Crombach WH, OldenhofNJ, Van Doorne H.Unexpected high-risk ofcontamination withstaphylococci speciesattributable to standardpreparation of syringes forcontinuous intravenousdrug administration in asimulation model inintensive care units. CritCare Med 2002;30:833-6.

• Stucki C, Sautter AM,Favet J, Bonnabry P.Microbial contamination ofsyringes duringpreparation: the directinfluence of environmentalcleanliness and riskmanipulations on end-product quality. Am JHealth-Syst Pharm2009;66:2032-6.

• Morgan N, Luo X,Fortner C, Frush K.Opportunities forperformance improvementin relation to medicationadministration duringpediatric stabilization.Qual Saf Health Care2006;15:179-83.

• Recommandationscommunes concernantl’étiquetage depréparations parentérales,2009 [http://bit.ly/ln7P9Z]

• Afssaps. Harmonisationde l’étiquetage desampoules et autres petitsconditionnements desolutions injectables demédicaments, 2006.

• Norme internationaleISO. Matériel d’anesthésieet de réanimationrespiratoire

• Etiquettes apposées parl’utilisateur sur les seringuescontenant des médicamentsutilisés pendant l’anesthésie– couleurs, aspects etpropriétés, 2008.

POUR EN SAVOIR PLUS

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doit être présentée (une visite à la pharmaciepeut être utile), en insistant sur les principalesbarrières qui n’existent pas dans les unités desoins, en particulier le contrôle-qualité final deslots fabriqués.Une fois le projet lancé, un dialogue constant doitêtre instauré avec les services de soins, pour dé-terminer les priorités de développement et dis-cuter des incidents qui surviendront immanqua-blement (ex. ruptures de stock) et qui devrontêtre analysés dans une perspective d’améliora-tion continue de la qualité.

Une évolution à privilégierEn conclusion, la fabrication par la pharmacie de

médicaments injectables prêts à l’emploi doitêtre considérée comme une priorité de dévelop-pement, en raison du gain de sécurité qui en ré-sulte. Elle apporte une intéressante perspectivepour la pharmacie hospitalière, une fois la cen-tralisation de la préparation des anticancéreuxréalisée. Le gain de sécurité est apporté par lechangement complet de concept de préparation,qui passe d’un mode « artisanal » à un modeindustriel. Cette évolution (« re-engineering »)s’accompagne d’une amélioration très significa-tive de la robustesse du nouveau processus, quin’est atteignable que si une structure d’assuran-ce-qualité de haut niveau existe au sein de lapharmacie. n

DOSSIER

De l’étude des besoins à

la fabrication des seringues

en routine, le point sur

la méthode à suivre pour

créer son unité CIVAS.

Exemple à l’appui avec celle

de la pharmacie des

Hôpitaux Universitaires

de Genève.

Mise en route d’uneunité CIVAS

L e développement d’un servicede préparation de seringuesprêtes à l’emploi passe par unepremière étape d’étude des be-

soins. Dans le cas des HUG, nous avonstout d’abord décidé de procéder à uneenquête auprès de tous les services del’hôpital sur leurs intérêts, besoins etpriorités d’obtention de seringues prêtesà l’emploi. Une analyse de cette enquê-te a été réalisée, en prenant en compteà la fois la criticité du besoin et la faisa-bilité de la production du médicament,incluant une évaluation préliminaire dela stabilité du médicament prêt à l’em-ploi.

Cette première approche a ensuite été af-finée par le développement d’un algorith-me basé sur un score calculé par la pon-dération de différents critères selon leurimportance. Ces différents critères sontla criticité clinique, les risques microbio-logiques et les risques liés à la voie d’ad-ministration (la grille complète d’évalua-

tion peut être obtenue en consultant lapremière référence bibliographique). Pour la criticité clinique, la pondération

DR-H

UG

Instrumentationd’électrophorèse capillaire

utilisée au laboratoire de contrôle qualité

de la pharmacie des HUG.

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la plus importante a été attribuée auxmédicaments d’urgence (les médica-ments devant être préparés en un lapsde temps très court répondant à une né-cessité vitale), car selon nos observa-tions et les témoignages des soignants,c’est le critère principal pour la sécuri-té. D’autres critères pris en compte sontpar exemple la marge thérapeutiqueétroite ou la préparation à l’avance (dupoint de vue du risque microbiolo-gique). La notion de fréquence d’utili-sation a été considérée aussi bien pourles médicaments administrés fréquem-ment (probabilité d’erreur plus fréquen-te) que pour ceux utilisés rarement (per-sonnel peu habitué = source d’erreur). La préparation à l’avance mais cette fois-ci du point de vue de l’ergonomie(confusion, gaspillage), le conditionne-ment mal adapté, le risque de confu-sion entre médicaments, la voie d’admi-nistration et le dosage inhabituel pourune indication particulière ont égale-ment été intégré dans notre outil d’ana-lyse. La notion de condition défavorabledu patient (nouveau-né, IR, transplan-té, SI) s’est également vu attribuer unepondération plus élevée, tous ces pa-tients étant plus vulnérables face à desproblèmes d’erreur de préparation desmédicaments. Après addition de tousles critères, les médicaments sont clas-sés selon leur score. Un score élevé (su-périeur à 10 dans notre cas) est une pre-mière condition sine qua non pour entreren matière pour la production de se-ringues prêtes à l’emploi à la pharma-cie. Une fois le score de criticité obtenu,l’analyse est complétée par d’autres cri-tères relatifs à la quantité à produire(consommation), aux ressources et auxcoûts, ainsi qu’aux données de stabili-té de la forme à produire.Ainsi, l’utilisation de cet algorithme per-met de mieux évaluer les besoins et lesprioriser. Il est évident que lors de lacollecte des informations sur les be-soins, le contenant, la forme galéniqueet le dosage du médicament sont dis-cutés et la formulation finale est validéepar les soignants concernés. Dans le casoù plusieurs services sont intéressés, uncompromis doit être trouvé, ce quicontribue à une standardisation des di-lutions des médicaments à haut risquedans l’institution.

Développement analytiqueet étude de stabilité

Lorsque la composition de la formula-tion est définie, une étude de stabilitédoit être mise en place, à moins que desdonnées appropriées existent dans lalittérature. Le laboratoire de contrôlequalité définit alors les différents testsà mettre en place afin de contrôler laqualité du médicament tout au long del’étude de stabilité en se basant sur lesnormes internationales ICH. Ces tests sont, en règle générale, les sui-vants : examen visuel (changement decoloration, apparition d’un trouble, etc.),mesure du volume, dosage du ou des

principes actifs, détermination des par-ticules non-visibles, mesure du pH et del’osmolarité, test de stérilité en début etfin d’étude de stabilité.La mise au point de ces différents testspeut prendre de quelques jours à plu-sieurs semaines en fonction de la formu-lation. A ce stade, le développement etla validation de la méthode analytique,permettant de doser le ou les principesactifs, est sans aucun doute l’étape laplus limitante en terme de temps. Lechoix de la technique à utiliser se por-te sur les techniques séparatives, ca-pables de séparer et quantifier sans am-biguïté le ou les principes actifs ainsi

z Le moniteur HOSPITALIER n°237 z juin- jui l let 2011 z 7

La préparation CENTRALISÉE de médicaments injectables

Non

Oui

Oui

Oui

NonOui

NonOui

Non

Non

Oui

Oui

Non

Non

onSTOP

onNoSTOP

n STOP

Oui

Oui

Données de stabilité fiablesDonnées de stabilité fiables

MédicamentcandidatMédicamentcandidat

Stabilité de la moléculeStabilité de la moléculeStabilité du contenantStabilité du contenant

MédicamentcandidatMédicamentcandidat

Stabilité de la moléculeStabilité de la moléculeStabilité du contenantStabilité du contenant

ConsommationConsommation

Score > 10Score > 10

CoûtsCoûtsRessourcesRessources

Étude de stabilitéenvisageableÉtude de stabilitéenvisageable

ALGORITHME DE PRIORISATION DES DÉVELOPPESMENTS DE CIVAS

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que leurs produits de dégradation. Dansnotre cas, le laboratoire de contrôle qua-lité dispose de la chromatographie enphase liquide couplée à un détecteurUV/DAD (LC-UV/DAD) et de l’électropho-rèse capillaire (CE) pouvant être coupléeà un détecteur UV/DAD (CE-UV/DAD) ouà un conductimètre (CE-C4D). La mé-thode indicatrice destabilité développée,qui permet notam-ment de discriminerla molécule active desproduits de dégrada-tion, est ensuite vali-dée selon le guide dela commission de laSociété Française desSciences et Techniques Pharmaceu-tiques [3] avant d’être appliquée dans lecadre de l’étude de stabilité. A titred’exemple, une méthode indicatrice destabilité LC-UV/DAD a été validée et uti-lisée pour l’étude de stabilité de se-ringues prêtes à l’emploi de 50 mL à ba-se d’insuline humaine à 1 UI/mL desti-nées aux patients de réanimation. La

stabilité de seringues prêtes à l’emploide 10 mL contenant de la kétamine àune dose analgésique de 1 mg/mL pourle service d’anesthésiologie a été étu-diée à l’aide d’une méthode CE-UV/DAD. Après cette phase de développement etde validation, l’étude de stabilité en soipeut alors débuter. Après concertation

entre le laboratoire et la production, cet-te dernière fabrique un lot de seringuesdans les emballages finaux à étudier.Pour des raisons de coût et de temps,un seul lot est produit dans le cadred’une étude de stabilité au sein de lapharmacie des HUG (par opposition auxtrois lots recommandés par les normesICH). Ce lot est alors mis à disposition

du laboratoire qui gère entièrementl’étude de stabilité. Dans un premiertemps, quelques unités sont utiliséespour effectuer les analyses du temps t0qui comprennent également une re-cherche des endotoxines afin de s’assu-rer que le produit peut être utilisé pourinjection. Puis, ce lot est généralementdivisé en trois parties constituées deplusieurs dizaines d’unités. Chaque par-tie est conservée dans des conditionsprédéterminées de température et delumière. En se basant sur les recom-mandations ICH, une partie est stockéeà 25 °C à la lumière, une autre à 4 °C auréfrigérateur et une dernière à 40 °C àl’étuve. Pour certains produits photo-sensibles (ex. atropine sulfate), l’étudedoit être menée en l’absence de lumiè-re. Ne disposant pas d’enceinte clima-tique, l’humidité ne peut être contrô-lée, donc, un relevé du taux d’humiditédes locaux est effectué tout au long del’étude de stabilité. Les intervalles detemps entre les analyses se basent éga-lement sur les recommandations ICHet sont généralement 0, 1, 3, 6, 9, 12mois. Aucune étude de stabilité supé-rieure à 12 mois n’a été menée au seinde la pharmacie pour les seringuesprêtes à l’emploi. A chaque intervallede temps, plusieurs unités, provenantdes différentes conditions de conserva-tion, sont prélevées en quantité suffisan-te pour effectuer les différentes analyses(trois unités/analyse/conditions deconservation). La durée de stabilité, quidétermine la date de péremption, corres-pond à l’intervalle de temps pendant le-quel toutes les analyses étaient encoreconformes, à savoir :– aucune modification de l’aspect– volume constant ;– teneur en principe(s) actif(s) compriseentre 90-110 % par rapport au résultatobtenu à t0 ;– aucune augmentation significative desparticules non visibles (les particulesdoivent satisfaire aux normes de la Ph.Eur.),– aucune modification du pH et de l’os-molarité,– test de stérilité négatif au début et à lafin de l’étude. Les conditions de conservation serontcelles où les analyses sont conformesjusqu’à la date de péremption. Pour

DOSSIER

Atropine

Céfuroxime

Citrate deCaféine

Injectionsophtalmiques

faibles

Insuline

Isoprénaline

Kétamine

Phényléphrine

Suxaméthonium

Vancomycine

Ampoule 1 mL 1 mg/mL

Céfuroxime 1.5 gFiol.

NA

Actrapid 100 UI/mL

Isuprel ampoule 0,2 mg/mL

Ampoule 20 mL 10 mg/mL

Ampoule 1 mL 10 mg/ml

Ampoule 2 mL 50mg/mL

Vancocin 500 mgfiol.

Seringue 10mL 0.1 mg/ mL

Seringue 0.5mL 10 mg/mL

Seringue 1 mL10 mg/mL

Seringue 2 mL

Seringue 50 mL10 UI/mL

Seringue 50 mL0,1 mg/mL

Seringue 10 mL1 mg/mL

Seringue 10 mL0,1 mg/mL

Seringue 10mL10 mg/mL

Seringue 10 mL10 mg/mL

1 an

4 mois

1 an

1 an

6 mois

6 mois

7 mois

1 an

6 mois

6 mois

TAA l’abri de la

lumière

Congélation*

TA

Froid

Froid

Froid *

TA

TA

TA

TA *

2’000

2’000

1’800

1’410

7’000

200

1’000

12’000

6’000

1’000

Médicament Forme initiale Forme CIVAS Stabilité Conditions de stockage Quantité/an

TYPE DE SERINGUES CIVAS ACTUELLEMENTPRODUITES À LA PHARMACIE DES HUG

* Congélation : <-18 °C. Froid : 2 – 8 °C. TA : température ambiante 15 – 25 °C

Une fois la forme pharmaceutique,

le contenant, le dosage, sa stabilité et

les conditions de conservation et

d’utilisation définies, l’organisation de la

fabrication des seringues peut débuter.

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faciliter la gestion des médicaments ausein de la pharmacie (production et stoc-kage), mais aussi dans les unités desoins, la conservation à 25 °C est privi-légiée. Une conservation au réfrigérateurou au congélateur peut toutefois êtrepratiquée pour les produits présentantune stabilité limitée à température am-biante. Par exemple, des seringues de 2mL pour injection ophtalmique conte-nant de la phényléphrine à 0,5 mg/mL etde l’homatropine à 4 mg/mL peuventêtre conservées une année à 4 °C contreun mois à 25 °C. Chaque année, entre unet deux produits prêts à l’emploi sont encours de développement au sein denotre laboratoire, que ce soit en phasede développement de méthodes analy-tiques ou en cours d’étude de stabilitéproprement dite.

Fabrication des seringuesUne fois la forme pharmaceutique, lecontenant, le dosage, sa stabilité et lesconditions de conservation et d’utilisa-tion définies, l’organisation de la fabri-cation des seringues peut débuter etalors devenir une production de routine.La première étape consiste à qualifier leprocédé de production. Cette qualifica-tion prend en compte différents as-pects : la validation microbiologique duprocédé, la qualification des opérateurset la logistique de la production propre-ment dite. La validation microbiologique du procé-dé peut être abordée de manière géné-rale, c'est-à-dire qu’une fois la méthodede production (manuelle ou semi-auto-matique) choisie, un test de remplissa-ge aseptique (TRA) est réalisé. Ce test sefait dans les conditions réelles de pro-duction à l’aide d’un milieu de culturese-lon les recommandations internatio-nales. Les seringues prêtes à l’emploine pouvant pas subir une stérilisationthermique, elles sont fabriquées dansun environnement pour productionaseptique (Classe BPF A, ISO 4.8) avecune filtration stérilisante avant le rem-plissage. Ces conditions doivent être vé-rifiées quant leur stérilité, par l’intermé-diaire du TRA. Cette validation est assu-rée si trois lots successifs de simulationde remplissage sont exempts de toutecontamination, autant dans les se-ringues que pour les différents contrôles

d’environnement en cours de fabrication(cf. infra). Durant ces TRA, tous les opé-rateurs pouvant être impliqués dans cetype de production participent à tour derôle. Il est recommandé que chaque opé-rateur soit présent au cours de minimumtrois lots. Par conséquent, cela peut né-cessiter plus de trois TRA afin que cettecondition soit remplie. Cela permet à lafois de les qualifier pour le procédé defabrication des seringues CIVAS que pourleur aptitude à travail de manière asep-tique dans les conditions définies pource procédé. Il est clair que cette valida-tion particulière ne remplace pas la qua-lification initiale des opérateurs au ni-veau des bonnes pratiques de fabricationen général et de la technique aseptiqueen particulier.La logistique de la production, et en par-ticulier le nombre de seringues pouvantêtre préparées par lot, dépend principa-lement de la technique de remplissagechoisie. Ce remplissage peut se faire ma-nuellement à l’aide d’un support simplede remplissage de seringue et d’unepompe de précision péristaltique ou àl’aide d’une machine semi-automatiquede remplissage de seringues avec un sys-tème de chargement circulaire dotéd’une pompe de remplissage de préci-sion.L’environnement du remplissageaseptique doit impérativement être clas-sé A selon les BPF. Cet environnementpeut être assuré par plusieurs typesd’installation.Une hotte à flux unidirectionnel d’air ho-rizontal (HFUA-H) placée dans une sal-le classe BPF B (ISO 5). Cet environne-ment peut convenir à un remplissage

manuel, mais avec une remplisseuse se-mi-automatique, l’encombrement de lamachine rend le maintien d’un flux la-minaire difficile. Une hotte avec un fluxd’air vertical serait préférable.Un isolateur avec système de stérilisa-tion (vapeur de peroxyde d’hydrogène)(photo de couv.)et un flux unidirectionneld’air vertical, classé BPF A et placé dansune salle classes BPF D ou C. Ce typed’installation offre un environnementcomplètement confiné, permettant à lafois de réduire au maximum les conta-minations microbiologiques et particu-laires. La stérilisation de l’enceinte detravail de l’isolateur et du sas avec lescharges usuelles de matériel doit éga-lement être validée indépendammentdes TRA. A l’aide de la remplisseuse de seringuesemi-automatique placée dans l’isola-teur, nous pouvons assurer la produc-tion de lots quotidiens de 500 à 3000 se-ringues, en fonction du volume à rem-plir. L’utilisation de la remplisseusenous permet un gain de temps d’un fac-teur de 3 à 4 par rapport au remplissa-ge manuel dans une HFUA-H. Ce gains’explique principalement par l’allège-ment de la logistique (habillage, prépa-ration du matériel triple emballé, etc.)de la Classe D par rapport à la Classe Bpour la hotte, mais surtout un nombred’opérateurs et un temps de travailmoins important, grâce à la remplis-seuse. Plusieurs formulations ont étédéveloppées dans les dix dernières an-nées à la pharmacie des HUG (cf tableauci-contre). Actuellement, environ 30'000seringues sont produites chaque année.

Contrôle des produits finisUne production de série doit être sou-mise à un contrôle qualité avant admi-nistration au patient selon les lois envigueur. Dans ce cadre, un certainnombre de tests doivent être effectuésaussi bien sur le produit fini que surl’environnement où le produit a étépréparé et que sur le processus de fa-brication employé. Pour la première catégorie de tests, ilest évident que ceux-ci sont repris del’étude de stabilité auxquels sont ajou-tés d’autres types d’analyse (cf tableau).En parallèle à ces tests, l’environne-ment et le processus de fabrication sont

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La préparation CENTRALISÉE de médicaments injectables

Tests effectués sur un lot deseringues prêtes à l’emploiproduites par la pharmaciedes HUG– examen visuel (aspect et volume),– mesure du pH,– mesure de l’osmolarité,– dosage et identification du ou desprincipes actifs,– identification du ou des excipients– détermination des particules nonvisibles,– détermination des endotoxines,– test de stérilité.

CONTRÔLE

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également soumis aux contrôles sui-vants :– l’analyse de seringues remplies par unmilieu de culture pour valider la pro-duction (TRA),– l’analyse microbiologique des plaquesde gants des opérateurs ainsi que desplaques de sédimentation disposéessous le flux laminaire ou dans l’isolateuroù le remplissage des seringues s’esteffectué.

L’ensemble de ces tests appliqués auxproduits finis, à l’environnement ainsiqu’au processus de production consti-tuent des critères dits libératoires pourle lot concerné. Lorsqu’un ou plusieursde ces tests se révèlent non conformes,le lot est voué à la destruction. Uneconcertation tripartite entre les respon-sables de l’assurance qualité, de la pro-duction et du laboratoire de contrôlequalité est engagée afin de déterminer

l’origine de la non-conformité et deconfirmer la destruction du lot. D’autres tests « non-libératoires » sontégalement effectués, à savoir :– l’analyse des eaux de lavage de la cuve utilisée pour la production du lotconcerné,– le contrôle périodique des locaux com-prenant le comptage des particules viableset non-viables ainsi que la déterminationmicrobiologique des surfaces.

DOSSIER

Quelles sont les grandesactions de sécurisation del’activité d’anesthésiologie encours dans votre service ?Pour sécuriser l’anesthésie, lapremière étape a été de garantirque les professionnels, médecins etinfirmiers anesthésistes, soientbien formés, disposent deséquipements de surveillanceadéquats et travaillent dans desstructures satisfaisantes (blocsopératoires et salles de réveil). Lesétapes suivantes cherchent àréduire les erreurs humaines pardifférentes actions. D’abord, enaméliorant les interfaces homme-machine, par exemple endisposant de seringues pré-remplies pour éviter les erreurs dedilution, ou encore par desétiquetages colorés des seringues,pour éviter les erreurs deseringues. Une autre actionconsiste à standardiser certainespratiques, comme par exemplel’utilisation de check-lists, mises enplace avec les chirurgiens avant dedémarrer une intervention. Uneautre voie de sécurisation consisteà améliorer le travail en équipe,par des programmes de formationau travail en équipe mis en placepour faciliter la bonnecommunication, le leadership, lacoordination et les transmissionsentre les professionnels

Et en ce qui concerne plusspécifiquement la sécuritéd’utilisation des médicaments ?Les erreurs d’administration des

médicaments font partie deserreurs fréquemment commises.Nous avons observé que les erreurspeuvent survenir lors de lasélection des ampoules et lors deséventuelles dilutions faites lors dela préparation des seringues. Notreobjectif a donc été d’optimiser à lafois la sélection des seringues parune amélioration de l’étiquetageet par la suppression de la dilutiondes seringues, par l’utilisation deseringues prêtes à l’emploipréparées au niveau de lapharmacie.

Quels sont les principauxavantages de ces seringuespour un anesthésiste ?Le principal avantage estsécuritaire, en réduisant lapossibilité d’erreurs de dilution.Mais, pour certaines seringues,ceci devrait aussi réduire leurconsommation, certains produitsdevant systématiquement êtrepréparés avant toute anesthésie,au cas où, mais pas toujoursutilisées, comme par exemplel’atropine ou la phényléphrine. Lesseringues prêtes à l’emploi offrentl’avantage d’être présentes etdisponibles immédiatement dansle plateau de l’anesthésiste, maispouvant rester dans leuremballage.

Existe-t-il des inconvénients oudes résistances à l’utilisationde ces seringues ?Le principal inconvénient, qui peutaussi être un avantage, est que

ces préparations nécessitent quel’ensemble des utilisateurss’entendent sur un standardunique, accepté par tous.L’avantage sécuritaire estincontestable, mais il vient seheurter aux habitudes de chacun,qu’il faut aussi comprendre. Vieuxdébat de la frontière entre lesdeux facettes de la médecine,science et art à la fois…

La qualité a forcément un coût.Comment le justifier au seindes institutions hospitalières ?Il est difficile de disposer de preuvesmontrant que l’utilisation desseringues prêtes à l’emploi réduitles accidents liés aux erreurs dedilution. En revanche, standardiserles pratiques en matière demédicaments génère des réductionsde coûts non négligeables, qui

peuvent en bonne partie financer lesurcoût de ces seringues. En outre,les directions hospitalières sont deplus en plus sensibles auxarguments sécuritaires.

Quelle importance accordez-vous à la collaboration entre leservice d’anesthésiologie et lapharmacie ?Cette collaboration est essentielleet s’est faite chez nous «naturellement ». Les pharmacienset les anesthésistes ont par leurmétier tous deux une forte culturede sécurité. La culture de sécuritédes pharmaciens est, me semble-t-il, plus centrée sur la sécurisationdes processus complexes où laformalisation est très forte. Celledes anesthésistes est plus orientéevers les facteurs humains, lavigilance et le respect de bonnespratiques d’un système complexe,mais où la formalisation estencore minimale. Il était, sommetoute, assez normal que cescultures sécuritaires soientcomplémentaires.

Comment faire en sorte quel’approvisionnement enseringues prêtes à l’emploi segénéralise dans les hôpitaux ? En le présentant, en en parlant.Mais je crains que ce ne soit qu’àl’occasion d’un prochain accident,évitable par l’utilisation de cesseringues prêtes à l’emploi, quecette diffusion se fera. L’histoire dela sécurité nous l’a souventenseigné.

FRANÇOIS CLERGUE,Médecin-chef, service d’anes-thésiologie, départementd’anesthésiologie, de pharma-cologie et de soins intensifs,HUG, faculté de médecine, université de Genève, Suisse.

INTERVIEW

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DOSSIER

• Martignoni S., Utilisationdes médicamentsinjectables dans lesservices de soins suraigus,travail de maîtrise,université de Genève,2009 [http://bit.ly/iP0D50].

• ICH Quality GuidelinesQ1A (R2) stability testingof new drug substancesand products[http://bit.ly/mdGFn1].

• Validation desprocédures analytiquesquantitative – Harmonisationdes démarches. STP

Pharma Pract. 2003;13:101-38.

• Fleury-Souverain S,Sigrist T, Griffiths W, Ing H,Matthey B, Sadeghipour F,Bonnabry P. The stability ofsoluble insulin in plasticsyringes. EJHP Science2011;17:1-4.

• Stucki C, Fleury-Souverain S, Sautter AM,Sadeghipour F, Bonnabry P.Development of ready-to-use of ketaminehydrochloride syringes forsafe use in post-operative

pain. EJHP Science2008;14:14-18.

• PIC/S guide to goodpractices for the preparationof medicinal products inhealthcare establishments[http://bit.ly/hjI4SL].

• 2.9.19 Contaminationparticulaire : particules nonvisible. PharmacopéeEuropéenne. Edition 7.

• Partie Générale.Pharmacopée Helvétique.Edition 10.[http://bit.ly/jhfmML].

POUR EN SAVOIR PLUSPendant toute la période où s’effectuentles tests, le lot produit est gardé sous qua-rantaine et ne pourra être dispensé dansles unités de soins. La quarantaine – oudurée du test de stérilité – dure au mini-mum 14 jours .

Une réflexion collective La mise en œuvre d’une stratégie deproduction de seringues prêtes à l’em-ploi nécessite un important investisse-ment, tant en ce qui concerne la struc-ture de production que celle du labora-toire de contrôle-qualité. Afin d’inves-tir judicieusement ces ressources, unesélection attentive des produits les pluspertinents à produire doit se faire, dansle cadre d’une étroite collaborationentre la pharmacie et les services cli-niques. Le développement et la mise àdisposition doit se faire progressive-ment et les infrastructures doivent êtremises en adéquation en fonction del’augmentation de la charge de travail.

Finalement, la sous-traitance peut êtreenvisagée lorsque le volume de produc-tion d’un médicament particulier prend

des proportions trop importantes et/ouque d’autres hôpitaux sont égalementintéressés à pouvoir en bénéficier. n

demi LFB