Diabétologie Manuel d’éducation thérapeutique · Le rôle des Infirmières IDE à ... Il est...

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Manuel Pr Gérard Reach et l’équipe du Service d’Endocrinologie - Diabétologie - Maladies Métaboliques de l’Hôpital Avicenne, Bobigny d’Éducation Thérapeutique DIABÉTOLOGIE RÉFÉRENCE

Transcript of Diabétologie Manuel d’éducation thérapeutique · Le rôle des Infirmières IDE à ... Il est...

Manuel

Pr Gérard Reach et l’équipe du Service d’Endocrinologie - Diabétologie - Maladies Métaboliques

de l’Hôpital Avicenne, Bobigny

d’éducation thérapeutique

Diabétologie

RéféRence

© elsevier Masson SaS, 2012elsevier Masson, 62 rue camille Desmoulins, 92130 issy-les-Moulineaux

impression : technic imprimconception graphique : Servane olryDépôt légal : décembre 2012

illustrations de couverture : bâtiment Madeleine brès, Hôpital avicenne aPHP, bobigny, et plaque située à l’accueil de l’Hôpital traduisant le mot bienvenue en plusieurs langues.

Manuel d’éducation thérapeutique

Avant-propos

Ce Manuel d’Éducation Thérapeutique est le fruit de déjeuners mensuels réunissant durant l’année 2011 les membres de l’équipe soignante du Service d’Endocrinologie-Diabétologie-Maladies Métaboliques de l’Hôpital Avicenne à Bobigny, au cours desquels nous avons réfléchi ensemble sur le sens de ce que représente « cette partie intégrante du soin », comme dit l’OMS, tellement ancrée dans notre pratique.

Chaque discussion avait pour but de répondre à des questions, posées au début du déjeuner, à propos de différents aspects de l’Éducation Thérapeutique, puis a fait l’objet d’une rédaction essayant de conserver l’aspect vivant et pédagogique de la formule question-réponse.

Nous avons beaucoup appris de cette clarification, que nous avons tentée, des concepts qui forment le fondement de cette partie importante de la prise en charge des maladies chroniques, et nous espérons que sa publication pourra être utile.

Pr Gérard Reach et l’équipe du Service d’Endocrinologie-Diabétologie-Maladies Métaboliques de l’Hôpital Avicenne

Dr Régis Cohen, Dr Hélène Bihan, Dr Mahmoud Aich, Dr Viorica Harbuz, Dr Mariana Geamanu, Mesdames Françoise Robert, Nathalie Garnier, Hlima Kissi,

Laetitia Héricourt, Sabrina Amaouche, Catherine Ladouceur, Mariame Baradji, Sadia Yesguer, Messieurs Jean-Christian Ladrière, Jean-Claude Bellin

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Table

des matières

1 Qu’est-ce que l’Éducation Thérapeutique ? Comment faire en sorte qu’elle fasse vraiment partie intégrante des soins ?

2 Qu’est-ce qu’apprendre quand on est un patient ? Qu’est-ce que l’expertise ? Le rôle des connaissances et de l’expérience personnelle. Qu’est-ce qu’enseigner quand on « fait de l’éducation thérapeutique » ? En quoi l’Éducation Thérapeutique est-elle un lieu d’échange ?

3 Quelles sont les barrières à « l’auto-soin » ? Qu’est-ce que « motiver » un patient ? Comment cet objectif peut-il devenir un des objectifs de l’Éducation Thérapeutique ?

4 Éducation Thérapeutique et autonomie du patient

5 Qu’est-ce que le « diagnostic éducatif » ? Qu’est-ce qu’un « objectif pédagogique » ? Comment évalue-t-on les « progrès » d’un patient ?

6 Qu’est-ce que « se soigner » : les différents « gestes du soin ». Pourquoi se soigne-t-on (ou non) ? Le rôle de différents « états mentaux » : connaissances, compétences, croyances, désirs, émotions, douleur, faim etc.

Table

des matières

7 Comment définir les « émotions » ? La peur et l’angoisse ? Faut-il faire peur aux malades ? Qu’est-ce que « l’empathie » ? L’annonce du diagnostic

8 Quelle Éducation pour les patients qui ne sont pas autonomes, par exemple qui ne font pas eux-mêmes les injections ? Le rôle des Infirmières IDE à domicile

9 Comment aborder la précarité et ses conséquences ?

10 Comment aborder un patient qui ne parle pas notre langue ?

11 Comment aborder un patient « difficile » ?

12 Conclusion : pour une définition de la posture éducationnelle. Fondation d’une médecine de la personne

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Qu’est-ce que l’éducation thérapeutique ?

Comment faire en sorte qu’elle fasse vraiment partie intégrante des soins ?

Définition « officielle » de l’éducation thérapeutique (OMS, 1998)

« Former le malade pour qu’il puisse acquérir un savoir-faire adéquat, afin d’arriver à un équilibre entre sa vie et le contrôle optimal de la maladie. L’éducation thérapeutique du patient est un processus continu qui fait partie intégrante des soins médicaux. Elle comprend la sensibilisation, l’information, l’apprentissage, le support psychosocial, tous liés à la maladie et au traitement. La formation doit aussi permettre au malade et à sa famille de mieux collaborer avec les soignants. »

1. Quel est le but de ce que l’on appelle l’éducation thérapeutique : quels sont les mots importants de la définition de l’OMS ?Tous les mots sont importants. L’Éducation Thérapeutique est un processus continu faisant partie intégrante des soins. Il s’agit d’abord, par la « formation » du patient, de lui permettre de mettre en œuvre de manière efficace son traitement tout

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en assurant sa sécurité : l’Éducation Thérapeutique lui permet d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires, de manière adaptée à chacun, de façon à l’aider à éviter les complications de la maladie et à rester en bonne santé.

Au-delà d’un savoir-faire, il s’agit d’acquérir un savoir-être avec la maladie. L’Éducation Thérapeutique est donc également nécessaire, parce que le patient se soignera d’autant mieux qu’il sera autonome, participant de manière active à la gestion de sa maladie. « L’éducation n’est pas là pour remplir des vases mais pour allumer des feux », disait Montaigne : développer l’autonomie du patient est donc aussi un de ses objectifs.

2. Pourquoi l’éducation thérapeutique est-elle toujours nécessaire dans le traitement d’une maladie chronique ?

La prise en charge d’une maladie chronique doit se concevoir à long terme, puisqu’un des buts du traitement est d’éviter les complications lointaines de la maladie. L’Éducation Thérapeutique est là pour lui donner du sens. C’est en comprenant ce sens que le patient accède réellement à l’autonomie. C’est aussi en comprenant ce sens qu’il pourra être observant aux recommandations qui lui sont données, dans un climat de confiance créé au moment des nombreux échanges mis en œuvre lors de l’Éducation Thérapeutique.

Ainsi, le simple fait de permettre le retour du patient à domicile nécessite l’autonomie du patient (ou bien le manque d’autonomie doit être pallié). Le droit à l’autonomie est inscrit dans la loi (mars 2002) : elle passe par une information, donc par une « Éducation Thérapeutique ». Le droit à l’éducation est aussi reconnu dans la loi « Hôpital, Patients, Santé et Territoires » (HPST) du 21 juillet 2009 qui affirme : l’Éducation Thérapeutique du patient vise à « rendre le patient plus autonome en facilitant son adhésion aux traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie ».

L’accès à l’autonomie peut aussi être vu comme une manière d’améliorer le sentiment de maîtrise de sa vie, donc la Qualité de vie.

Accessoirement, favoriser l’autonomie du patient, c’est aussi, pour l’équipe soignante, une mesure « rentable », qui permet d’économiser du temps.

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3. Comment parler de « l’éducation thérapeutique » au patient ?Ceci ne va pas de soi, le mot « éducation » pouvant rebuter et il faut savoir trouver les moments propices. Le mieux est d’en parler ouvertement au patient, en expliquant sa finalité, en particulier la nécessité d’un « diagnostic éducatif » initial et d’une vérification que les messages ont été compris. Il faut insister sur l’aspect progressif, par degrés, et continu de l’Éducation Thérapeutique.

4. Sur quoi doit porter l’éducation thérapeutique ? Prenons comme exemple un patient diabétique traité par des comprimés

X Il y a des bases de compréhension de la maladie et de son traitement, en termes compréhensibles ; exemples : l’hémoglobine glyquée, l’activité physique. À nouveau, il s’agit de donner du sens, ce qui favorisera l’observance.

X Expliquer l’importance des mesures hygiéno-diététiques, par exemple l’activité physique.

X Quels médicaments pour quelle maladie, les effets secondaires possibles. X Il faut des explications progressives orientées par le diagnostic éducatif. X Il faut montrer comment le traitement s’intègre dans la vie quotidienne :

tenir compte des aspects psychosociaux propres, de manière individuelle à chaque patient.

5. Pourquoi l’éducation thérapeutique peut-elle être un processus difficile qui prend du temps ?Il est difficile parce qu’il implique de concilier la nécessité du soin et ses implications sur la qualité de vie, parce que les notions médicales ne vont pas de soi, parce qu’il peut y avoir la barrière de la langue ou du jargon médical. Le fait d’être autonome ne va pas non plus de soi, il est souvent plus naturel d’être passif.

L’Éducation Thérapeutique doit donc être comprise comme un acte de soin à part entière. Au mieux, elle devrait être prescrite, et des moments devraient être aménagés, de façon à l’intégrer dans les activités du personnel soignant. C’est ainsi qu’elle deviendra, vraiment, une « partie intégrante des soins ».

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Qu’est-ce qu’apprendre quand on est un patient ? Qu’est-ce que l’expertise ?

Le rôle des connaissances et de l’expérience personnelle

Qu’est-ce qu’enseigner quand on « fait de l’éducation thérapeutique » ?

En quoi l’éducation thérapeutique est-elle un lieu d’échange ?

1. Qu’est-ce qu’apprendre quand on est un patient ?L’Éducation Thérapeutique ne doit pas être pensée sur un modèle de type scolaire : on a même proposé de préférer le mot « andragogie » à celui de pédagogie pour montrer qu’il fallait recourir à une démarche d’enseignement qui par définition tienne compte des caractéristiques propres de l’adulte apprenant. La démarche de l’Éducation Thérapeutique se définit, au-delà d’un simple « apprentissage », comme l’acquisition de connaissances, de compétences et d’une motivation, en vue d’un but précis : lutter contre les conséquences de la maladie afin de permettre un retour à un état de santé. Cette acquisition doit donc être accompagnée par le développement du sentiment d’efficacité personnelle qui permettra à l’acquis d’être réellement utilisé. Elle doit être durable, de façon à s’intégrer à long terme dans le soin quotidien.

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2. Comment définir cette « expertise » que l’on souhaite que le patient acquière grâce à l’éducation thérapeutique ?Il s’agit de la somme de ce qui a été dit et de ce qui a été testé, de ce qui a été appris et de ce qui a été découvert, conduisant à la formation d’une expérience pratique personnelle qui peut être éventuellement explicitée, voire opposée à des données qui ne seraient que théoriques : « il n’y a pas d’erreurs, il n’y a que des expériences ». L’expertise, c’est d’une part l’expérience qui a été forgée, d’autre part la capacité de l’utiliser quand il s’agit de mettre en œuvre son traitement.

3. Vers l’expertise : connaissances, compétences, croyances, émotions et expérience personnelleChacun de nous a des connaissances que l’on peut qualifier d’explicites (c’est ce que je sais, et que je sais que je sais) et des connaissances implicites (ce que je sais, sans que je sache obligatoirement que je le sais) sur la base desquelles en fait on agit. Ces dernières ont pu être à un moment explicites, et le but de l’Éducation Thérapeutique pourrait être non seulement d’apporter au patient des connaissances explicites, mais aussi à l’aider à les transformer en connaissances implicites qui sont celles qu’il utilisera tout en l’aidant à découvrir ce qu’il sait déjà. En utilisant ces connaissances et en les testant, il acquerra ce que l’on peut appeler son expérience : celle-ci implique non seulement les connaissances, mais aussi les croyances, les émotions et les désirs du patient ; on peut prendre l’exemple de l’hypoglycémie pour montrer comment ces différents « états mentaux » se combinent pour former ce qu’on appelle « l’expérience ». L’expertise consiste à avoir cette expérience et à être capable de l’utiliser.

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4. Qu’est-ce qu’apprendre à quelqu’un (« enseigner ») quand on « fait de l’éducation thérapeutique » ?

Figure – L’Éducation Thérapeutique, un processus d’échange ET = éducation Thérapeutique

On voit sur cette figure que l’expérience en retour modifie les connaissances implicites, que celles-ci peuvent être explicitées et discutées avec le soignant, faisant de l’Éducation Thérapeutique (ET) un processus d’échange.

Apprendre à quelqu’un, c’est savoir reconnaître un moment propice, une attente, et lui apporter les éléments qui lui permettent de forger cette expérience. Il y a autant les éléments apportés qu’un encoura-gement à les tester pour favoriser le développement de l’expérience. C’est aussi le fait d’encourager l’utilisation de l’expertise dans la pratique du soin : en un mot, aider le patient à devenir le véritable acteur de son traitement.

Expérience

Autressources

Soignant

Ses connaissancesSon expérienceFormation à l’ET

Expertise

Le patient-expertse soigne

Patient

ConnaissanceImplicite

ConnaissanceexpliciteET

ET

!

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5. Conclusion : comment l’éducation thérapeutique est-elle un lieu d’échange où se développe la confiance ?Enseigner, ce n’est pas seulement parler, c’est aussi écouter. C’est connaître les raisons des gens, leurs motifs, c’est s’intéresser, plus qu’au « malade », à la personne dans son quotidien, dans sa vraie vie ; c’est connaître son vrai visage. C’est admettre que les connaissances que le soignant peut avoir seront, après leur transmission, remodelées par le patient dans le cadre de ce qu’il pense par ailleurs – ses connaissances implicites – et son expérience. C’est écouter le patient quand il fera part des connaissances qu’il aura découvertes : la flèche de l’Éducation Thérapeutique est une flèche à double sens ; elle est ainsi un lieu d’échange et elle participe à l’élaboration d’une relation de respect mutuel et donc de confiance.

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Quelles sont les barrières à « l’auto-soin » ?

Qu’est-ce que « motiver » un patient ?

Comment cet objectif peut-il devenir un des objectifs de l’éducation thérapeutique ?

1. La définition de « l’auto-soin » : est-ce quelque chose de naturel ?Il est naturel de prendre soin de soi, ou, pour une mère, de prendre soin de son enfant : le soin, au sens du mot anglais care, est sans doute quelque chose d’inné, et l’absence de soin de soi – l’incurie - nous paraît être quelque chose d’anormal.

Mais il n’en est pas de même pour l’auto-soin quand il s’agit de soin médical : au contraire, il n’est pas naturel de prendre des comprimés, encore moins de se faire des piqûres d’insuline, des piqûres au bout du doigt pour connaître sa glycémie - gestes qui font mal alors que le diabète est une maladie silencieuse - de réfléchir à chaque injection pour décider de la dose d’insuline - alors que le pancréas, lui, naturellement, régule sa sécrétion d’insuline minute par minute en fonction de la glycémie. Certains patients nous disent aussi : « mais ce que vous me demandez, est-ce à moi de le faire ? C’est une tâche médicale ! » Il ne faut pas se le cacher : si l’auto-soin est quelque chose de non naturel, il y aura des barrières difficiles à surmonter pour faire en sorte qu’il soit mis en œuvre.

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Quelles sont les barrières à « l’auto-soin » ?

Qu’est-ce que « motiver » un patient ?

Comment cet objectif peut-il devenir un des objectifs de l’éducation thérapeutique ?

2. Qui se soigne, qui soigne-t-on ? Un malade et/ou une personne ?Une personne devient « malade ». Mais elle reste une personne, et on peut dire que la maladie ne représente qu’un des aspects de sa vie « avec la maladie ». Peut-être les soignants ont-ils souvent tendance à ne voir que le malade, ou, pire, seulement la maladie. Il faut dire qu’ils ont été davantage formés à soigner les maladies et à soulager des symptômes qu’à prendre soin d’une personne. Si c’est le cas, cette erreur peut conduire à ce que l’ordonnance ou le conseil soient remis au « malade », alors que c’est la personne dans sa globalité, dans sa complexité, qui prendra la décision du soin ou de l’absence de soin, de l’observance ou de la non-observance. Prendre soin de la personne, et non du malade ou de la maladie : comme l’a dit l’un de nous, c’est ainsi que le métier de soignant prend son sens ; au fond, c’est ainsi que la personne malade peut rester un sujet de la relation de soin, même si elle en est l’objet : c’est la différence avec la prise en charge d’une voiture par un garagiste.

3. Description des barrières : difficulté de compréhension – langage - sentiment de manque d’efficacité personnelle – peur – déni – refus – priorités – ressourcesÀ côté de cette difficulté que représente l’aspect non naturel de l’auto-soin, il faut mentionner d’abord la difficulté de compréhension par le patient des messages éducationnels. Bien sûr, il y a d’abord le problème, quand elle existe, de la barrière linguistique pour un patient qui ne parle pas notre langue. Le problème est tellement difficile que nous lui consacrerons une réflexion spéciale : sans communication, pas « d’éducation ». Mais même lorsque le langage est commun, cela ne signifie pas que le message soit compris, pour deux raisons : la fâcheuse tendance des médecins à utiliser un « jargon » qu’ils sont seuls à comprendre et la simple raison que les concepts médicaux sont surtout compréhensibles dans le cadre de leur contexte auquel le patient n’a souvent pas accès ; nous devrions vérifier plus souvent que ce qui a été dit a été compris.

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Ensuite, il y a l’idée que « tout cela est compliqué, je n’y arriverai pas » (manque de « sentiment d’efficacité personnelle »). Dans ce cadre, le soutien de l’entourage peut être essentiel. Ensuite, il y a la peur : peur des effets indésirables des traitements, peur de l’hypoglycémie ou de la prise de poids, peur que « tout cela arrive parce que je l’aurai décidé ». Ensuite, il y a le déni de la maladie, entraînant un refus du soin, déni qui peut être caché : c’est au début qu’il est le plus présent, étant un mécanisme de défense presque nécessaire face au bouleversement que représente l’annonce de la maladie, au moment clé de « l’entrée dans la maladie ». Ensuite il y a ce qui est propre à la chronicité de la maladie : l’auto-soin promet une récompense lointaine et bien abstraite - conserver sa santé, éviter les complications ; cette promesse, au quotidien, a bien peu de poids face aux contraintes et aux effets indésirables, immédiats et concrets du traitement. Enfin, il y a la précarité, qui représente une barrière importante à l’auto-soin : une réflexion spéciale lui sera consacrée.

4. Quelles sont les motivations du soignant ?Elles sont guidées par sa vision de l’avenir médical du patient et sont obligatoirement, et c’est normal, d’abord centrées sur la maladie. Elles sont orientées par le désir d’en éviter les complications, donc vers l’avenir, alors que les motivations du patient prennent bien davantage en compte le présent, ce qui, à nouveau, est naturel. Reconnaître cette différence pourrait représenter une étape majeure dans le développement de la relation de soin.

5. Conclusion Accorder les motivations du patient et celles du soignant : un rôle pour l’éducation thérapeutique ? L’éducation thérapeutique comme fondement d’une médecine de la personneAu terme de cette réflexion, on voit se dégager un nouveau rôle pour « l’Éducation Thérapeutique » : certes, aider le patient à se forger son expertise ; mais aussi, par une démarche qui considère la personne avant le malade ou la maladie, révéler les différences qui peuvent exister dans les motivations des deux acteurs intervenant dans la relation de soin, afin d’arriver à un accord sur les objectifs et sur les moyens à mettre en œuvre.

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éducation thérapeutique et autonomie du patient

1. Qu’est-ce que l’autonomie ?Il faut distinguer d’une part le fait d’être autonome au sens où l’on ne dépend pas des autres pour accomplir les gestes de son traitement et d’autre part le fait d’être capable de décider pour soi en ce qui concerne sa vie, le choix de son travail, sa santé, etc. C’est ce deuxième aspect de l’autonomie dont il est question ici.

Une personne autonome est quelqu’un qui est capable de prendre ses décisions en fonction de ses préférences. On peut dire qu’on préfère quelque chose non seulement quand on pense que cette chose est désirable, mais aussi quand on est d’accord avec ce désir. Les philosophes ont défini le concept de personne en proposant qu’est une personne l’être capable d’évaluer ses désirs, ses croyances etc. : c’est ce qu’on appelle l’activité « réflexive » de l’esprit. Gerald Dworkin (1988) a défini dans ce cadre l’autonomie : être capable d’avoir des préférences, c’est-à-dire d’évaluer ce que l’on préfère, mais également d’être capable d’en changer.

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2. Pourquoi le respect de l’autonomie du patient risque-t-il d’être en contradiction avec la pratique de l’éducation thérapeutique ?Il s’agit d’une idée relativement nouvelle en médecine : c’est en 1979 que Tom Beauchamp et James Childress ont proposé de rajouter aux deux principes qui gouvernaient l’éthique médicale depuis Hippocrate, le principe de bienfaisance (faire le bien du patient) et de non-malfaisance (d’abord ne pas lui nuire, primum non nocere), un principe de justice (faire en sorte que les ressources médicales soient disponibles pour tous), et le principe du respect de l’autonomie des patients. En France, ce principe est inscrit dans la loi du 4 mars 2002, dans son article L1111-4 : le médecin est « tenu de respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix (…) aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne ».

Or dans les années 1970 on a aussi vu l’apparition, en médecine, d’une part de la médecine fondée sur les preuves (Evidence Based Medicine) – la médecine devenue efficace se donne les moyens de le prouver – , et d’autre part de l’Éducation Thérapeutique – la médecine se donne les moyens d’enseigner aux patients comment bénéficier de cette efficacité. Il y a donc risque d’une contradiction entre d’un côté, Evidence-Based Medicine et Éducation Thérapeutique, et, de l’autre, le principe du respect de l’autonomie du patient.

3. Qu’est-ce que la « manipulation » et en quoi l’éducation thérapeutique n’est-elle pas de la manipulation ?Manipuler quelqu’un, c’est réussir à lui faire faire quelque chose qu’il ne serait pas enclin à faire, et qu’il fera en pensant qu’il en a pris lui-même la décision (Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois, 1987). Il y a une différence de taille avec l’Éducation Thérapeutique : la manipulation n’est efficace que si elle est masquée, de même qu’un placebo ne serait plus efficace si le patient sait qu’on lui prescrit un placebo. Au contraire, l’Éducation Thérapeutique s’adresse essentiellement à l’intelligence des personnes autonomes, définies comme des êtres capable, après une délibération, de changer de préférence, selon la

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définition de Dworkin donnée plus haut. En résumé, l’Éducation Thérapeutique est le contraire d’une manipulation : l’Éducation procède en formulant le projet, la manipulation en le dissimulant.

4. Qu’est-ce que le « respect » ?Or ceci n’implique pas que l’on force la personne à changer d’avis. Ainsi, respecter la personne, c’est certes accepter son choix si, à la fin, elle refuse un traitement qui est proposé, mais c’est aussi lui donner la possibilité de changer d’avis. Ceci implique que l’on quitte une approche paternaliste (je décide pour vous), qu’on informe la patient (étape d’information), qu’on s’enquiert de ses préférences (étape d’interprétation), enfin que le soignant lui donne ses propres préférences afin que le patient puisse procéder à une délibération. L’Éducation Thérapeutique peut être définie comme la construction de ce cheminement éthique (figure).

Au contraire, ne pas faire d’Éducation Thérapeutique reviendrait à un manque de respect. L’Éducation Thérapeutique est le respect. C’est la même chose.

Figure – Le cheminement éthique de l’Éducation Thérapeutique : les quatre modèles de la relation thérapeutique ont été décrits en 1992 par les éthiciens américains Ezekiel et Linda Emanuel.

Le cheminement éthique de l’Éducation Thérapeutique

1. Modèle paternaliste

4. Modèle délibératif

2. Modèle informatif

3. Modèle interprétatif

Je décide pour vous

En plus, je vousdis mes préférences et vous décidez

Je vous informe, je vous aide à clarifier vos préférences et vous décidezNous sommes d’égal à égal

Je vous informe et vous décidez

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5. Qu’est-ce que la « confiance » et comment peut-elle être méritée ?Faire confiance à quelqu’un, c’est lui remettre quelque chose de précieux en se fiant à lui et en s’abandonnant à sa bienveillance (Gloria Origgi, Qu’est-ce que la confiance, Vrin 2008). Dans la mesure où l’Éducation Thérapeutique est un partage non seulement des connaissances mais aussi des préférences, c’est-à-dire des valeurs, la confiance est nécessaire dans la relation soignant-patient. Mais elle l’est aussi parce qu’il y a dans cette relation, où l’un des sujets, le patient, est aussi objet de la relation, place pour le pouvoir. L’Éducation Thérapeutique représente un moyen pour le soignant de mériter cette confiance indispensable dans la relation de soin : je lui fais confiance parce que je vois qu’il me respecte, et je le vois parce que l’Éducation Thérapeutique à la quelle je suis convié s’adresse à moi en tant que personne.

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Qu’est-ce que le « diagnostic éducatif » ?

Qu’est-ce qu’un « objectif pédagogique » ?

Comment évalue-t-on les « progrès » d’un patient ?

1. Qu’est-ce que le « diagnostic éducatif » ?Schématiquement, l’Éducation Thérapeutique procède en quatre étapes. La première est celle du « diagnostic éducatif », exactement de la même façon que le diagnostic est la première étape de la prise en charge d’une maladie. Ensuite viendra la définition d’objectifs, puis la mise en œuvre de l’acte d’intervention éducationnelle proprement dite, enfin l’évaluation.

Qui est cette personne à qui on propose un traitement ? C’est la question générale à laquelle tente de répondre le diagnostic éducatif. Que veut dire pour le patient le fait d’avoir une maladie, un traitement ? Que représente pour lui la santé, une maladie ? Quelles sont ses connaissances a priori, ses croyances, ses représentations sur la maladie ? Quelles sont ses compétences - que sait-il déjà faire ? Comment accepte-t-il le fait d’être malade ? Quels sont ses projets ? A-t-il des comportements de non-santé (sédentarité, tabac) ? Quel est son contexte de vie en termes de famille, d’entourage, de travail, de soutien social ?

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Jean-François d’Ivernois et Rémi Gagnayre (1995) ont résumé ainsi la structure du diagnostic éducatif :

X Qui est-il ? X Qu’est-ce qu’il a ? Comment le vit-il ? X Qu’est-ce qu’il sait ? Que croit-il ? X Dans quel environnement est-il ? Que peut-il faire ? X Quels sont ses projets ?

Au fond, il s’agit de définir autant les barrières qu’il pourrait rencontrer dans la mise en œuvre de son traitement que ce qui pourrait constituer des leviers. Il s’agit d’une étape complexe, qui prend du temps, et qui peut ne pas être faite en une fois. D’ailleurs, au fil des consultations, le diagnostic éducatif peut s’enrichir, découvrant par exemple une barrière où un levier qui n’était pas évident d’emblée.

2.Qu’est-ce qu’un « objectif pédagogique » ?Il ne faut pas confondre objectif thérapeutique (par exemple un taux d’HbA1c inférieur à 7 %) et un objectif pédagogique. Définir un objectif pédagogique, c’est définir une étape considérée comme importante dans ce qui fera le succès du traitement. Il peut s’agir d’un objectif prioritaire concernant la sécurité du patient. Par exemple : le patient doit connaître le risque d’hypoglycémie, comment la reconnaître, comment la traiter, comment la prévenir. Il peut s’agir d’un objectif comportemental : par exemple, le patient doit avoir pris l’habitude d’avoir du sucre sur lui pour traiter une hypoglycémie. Il peut s’agir d’un objectif psychosocial : par exemple, le patient doit avoir trouvé le moyen de mesurer sa glycémie de temps en temps en fin d’après-midi, ce qui est difficile compte tenu de sa vie professionnelle, etc.

On peut dire qu’alors que l’objectif thérapeutique (par exemple l’HbA1c < 7 %) ne dépend pas entièrement de lui, l’objectif pédagogique est en principe sous le contrôle du patient, à plusieurs conditions : il faut qu’il ait été formulé de manière spécifique et précise (par exemple avoir du sucre sur soi), éventuellement sous forme écrite, conduisant à la notion de « contrat d’éducation », qu’il s’agisse d’une action ou d’un comportement observable, et qu’au fond, il porte en germe la possibilité ultérieur d’une évaluation.

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L’objectif pédagogique doit avoir enfin deux caractéristiques essentielles : 1) il doit être réaliste ; 2) il doit avoir fait l’objet d’une concertation avec le patient ; les objectifs décidés en commun ont plus de chance d’être atteints que des objectifs qui seraient imposés.

3. Comment évalue-t-on les « progrès » d’un patient ?Et d’abord, qu’est-ce qu’un « progrès » ? Nous l’avons défini comme un premier pas, puis un pas de plus. Certes, vers la connaissance ou les compétences permettant d’accomplir les différents gestes du traitement, mais aussi vers l’autonomie, vers la sécurité, vers le soulagement de l’angoisse, vers la qualité de vie.

Cette évaluation est, on l’a vue, préparée par la définition même des objectifs pédagogiques. Elle peut être faite d’emblée en commençant par s’assurer que le patient a compris ce qu’on lui a dit. Plus tard, on évaluera ce qu’il a retenu, ce qu’il en a fait, s’il a effectivement changé un comportement. Elle peut être préparée d’une consultation à l’autre en précisant d’une manière plus ou moins standardisée ce que le patient a acquis, ce qui reste à acquérir, avec les étapes permettant cette acquisition. Les objectifs peuvent être rangés dans un ordre de priorité.

Évaluer n’est pas juger, c’est essayer de comprendre. L’évaluation peut conduire à une révision d’objectifs dont on se rendra compte, a posteriori, qu’ils n’étaient pas réalistes. C’est par cette évaluation que l’Éducation Thérapeutique prend sa dimension de processus continu du soin, selon la définition de l’OMS.

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Qu’est-ce que « se soigner » : les différents « gestes du soin » ?

Pourquoi se soigne-t-on (ou non) ?

Le rôle de différents « états mentaux » : connaissances, compétences, croyances, désirs, émotions, douleur, faim, etc.

1. Les différents « gestes du soin »Le soin est fait d’un ensemble de gestes. Prenons l’exemple du diabète de type 1, et essayons d’imaginer tout ce que l’on demande au patient de « faire » : bien sûr, faire les injections d’insuline, à la fois le geste et la décision de la dose ; ensuite, mesurer la glycémie, parfois mesurer sa tension artérielle ; avoir une activité physique régulière, une alimentation saine, s’abstenir de fumer ou d’avoir une consommation excessive d’alcool ; mais aussi, surveiller son poids, avoir une bonne hygiène des pieds et des dents ; faire les examens complémentaires demandés (l’HbA1c tous les 3 mois, le bilan biologique et le fond d’œil annuels, de temps en temps aller voir un cardiologue) ; savoir réagir à une situation anormale, enfin (?) venir aux rendez-vous de consultations. Au cours de notre discussion, l’un de nous s’est exclamé : mais n’est-ce pas trop ? Comment peut-il faire tout cela ? Car il ne faut pas se le cacher, tout cela prend du temps.

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Manuel d’éducation thérapeutique

Qu’est-ce que « se soigner » : les différents « gestes du soin » ?

Pourquoi se soigne-t-on (ou non) ?

Le rôle de différents « états mentaux » : connaissances, compétences, croyances, désirs, émotions, douleur, faim, etc.

2. Pourquoi se soigne-t-on ? Quelle est la place des différents « états mentaux » ?

Figure – Différents « états mentaux ».

Cette figure représente les différents « états mentaux » qui conduisent le patient à se soigner (ou à ne pas se soigner). À côté des connaissances et des compétences qui sont sans doute nécessaires pour accomplir des gestes complexes comme le traitement par l’insuline, on comprend bien que les autres états mentaux sont importants.

Les émotionsPeur des complications de la maladie, mais aussi, peur des effets secondaires immédiats du traitement, honte à l’idée de faire sa mesure de la glycémie. Parfois, un événement (l’annonce d’une complication) peut agir comme un signal qui déclenche l’observance ; ailleurs, elle déclenche un phénomène d’évitement. Et si la honte peut conduire à la non-observance, pensons-nous suffisamment à féliciter nos patients pour les efforts accomplis, de façon à ce qu’ils éprouvent l’émotion positive qui lui correspond, la fierté ? Pensons au rôle positif de l’émotion dans la grossesse, qui explique la très bonne observance.

Pour accomplir un geste de son traitement, comme le montre cette figure, le patient :- doit savoir qu’il devrait le faire (connaissances) ;- doit savoir le faire (compétences) ;- doit croire que c’est important de le faire, qu’il peut le faire (croyances) ;- il ne doit pas avoir peur de le faire ou en avoir honte (émotions) ;- le geste doit être indolore, ne doit pas être désagréable ;- il doit avoir envie de le faire (désir) ;- il doit avoir les moyens de le faire (ressources).

Émotions(par exemple : peur)

Sensations(douleur, plaisir)

Connaissances

Compétences

Croyances

Désir

Ressources

Événements

Gestede soin

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Les croyancesC’est ce que le patient croit qui peut le conduire à accomplir ou non le geste du traitement.

DésirMais on voit surtout que ce qui va l’emporter c’est la force de son désir d’accomplir le geste du soin. Sera-t-elle suffisante, alors que l’objet du désir est bien abstrait et lointain, face à l’aspect concret et immédiat de la récompense de la non-observance ?

HabitudeParfois, le patient fait tout cela par habitude : il n’a plus à faire appel à des pensées parfois désagréables. Mais lorsque la boîte de comprimés sera terminée, fera-t-il l’effort de la renouveler ?

3. Qu’est-ce que l’observance ?Le patient peut accomplir ou ne pas accomplir ce qui lui a été prescrit : c’est la problématique de l’observance et de la non-observance des prescriptions médicales. Il est important de comprendre, au vu de ce qui précède, qu’il est presque naturel de ne pas être observant, et que l’observance demande un effort, nécessite à la fois un savoir et un savoir-faire, mais surtout un vouloir. On voit se dégager une nouvelle définition du rôle de l’Éducation Thérapeutique : si le soin est un changement, il s’agit de donner au patient la possibilité de changer, et cela, autant que possible, de manière durable, dans le cadre de la nature fluctuante de ses désirs. C’est aussi en cela que l’Éducation Thérapeutique est « un processus continu » du soin.

4. Avons-nous accès aux « états mentaux » du patient ?Non (heureusement !), mais nous pouvons le laisser parler, dans une conversation où les questions seront aussi souvent que possible « ouvertes » (la réponse est libre), n’oubliant pas de demander au patient si il n’y a pas quelque chose qu’on a oublié (What else !), en étant attentif aux mots prononcés et à la communication non verbale. Il s’agit de partager les préférences : ceci ne peut se faire que dans un climat de confiance. Mais, à nouveau, ne nous le cachons pas : une telle conversation prend du temps.

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Comment définir les « émotions » ?

La peur et l’angoisse ?

Faut-il faire peur aux malades ?

Qu’est-ce que « l’empathie » ?

L’annonce du diagnostic

1. Comment définir les émotions ?Les émotions sont des sentiments que nous éprouvons, qui ont deux aspects. D’abord, un aspect « cognitif » : elles portent sur un objet que l’on peut décrire, qui est leur « contenu » (par exemple : j’ai peur des araignées). Ensuite, elles ont un aspect viscéral (par exemple la vue de l’araignée me fait transpirer). Il y a des émotions positives et des émotions négatives, et on peut ainsi opposer, avec le philosophe Spinoza, la Joie et la Tristesse, l’espoir et la peur, la fierté et la honte, le soulagement et la déception. Par exemple, Spinoza a défini respectivement l’espoir et la peur comme une Joie et une Tristesse « mal assurées qui proviennent de l’idée d’une chose future ou passée dont l’événement nous laisse quelque doute ». Il disait « qu’il suit de ces définitions qu’il n’y a pas d’espoir sans peur ni de peur sans espoir. » Nous comprenons immédiatement la pertinence de ces notions lorsque nous voulons comprendre la réaction de nos patients, par exemple lorsqu’on leur annonce leur maladie, mais d’une manière plus générale, lorsque nous leur disons quelque chose : nous sommes des êtres ambivalents.

2. Comment naissent les émotions ?Comme l’a décrit le philosophe Pierre Livet, la survenue d’une émotion est une réaction à un événement dont la survenue me démontre qu’il y a une

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différence entre ce que je pensais de ma situation et ce qu’elle est réellement. Pour le patient, on peut dire que l’annonce de la maladie représente un tel événement : il croyait être en bonne santé et il apprend qu’il est malade. La survenue de l’émotion déclenche une révision des croyances et des désirs : la peur liée à la vue d’un serpent dans la forêt me conduit à réviser la croyance en ma tranquillité, et mon désir de poursuivre tranquillement ma promenade. Mais attention, elle peut conduire à plusieurs types de comportement : la fuite ou l’attaque (je tente de tuer le serpent). De même, la peur ressentie à l’annonce de la maladie peut conduire à deux types de comportement : la décision de me soigner (l’attaque), ou le déni (la fuite). On a récemment insisté sur le rôle des émotions anticipées : nous agissons pour éviter des émotions négatives (par exemple le regret) et pour favoriser la survenue d’émotions positives. Peut-être devrions-nous tenir compte de ce rôle des émotions dans nos tentatives de motiver nos patients à se soigner : pensez à la fierté (émotion positive) que vous pourrez éprouver si vous réussissez à ne pas craquer devant la plaque de chocolat, évitant le regret (émotion négative) que, vous le savez, vous éprouverez une fois celle-ci avalée.

3. La peur et l’angoisseContrairement aux émotions qui ont un contenu, il y a des sentiments qui n’en ont pas : par exemple, la douleur, l’ennui, l’indifférence. Nous pouvons remarquer que nos patients qui ont un « pied diabétique » semblent souvent manifester une indifférence par rapport à leur état. Ils semblent ne manifester aucune émotion (ceci est peut-être du à son caractère indolore secondaire à la neuropathie.)

Il y a aussi l’angoisse. Comme le dit aussi Pierre Livet, l’angoisse est une émotion que l’on ressent lorsqu’on a une émotion et qu’on se sent incapable de réviser ses croyances et ses désirs. À partir de là nous pouvons comprendre que les gens qui « n’arrivent pas à se soigner » se sentent angoissés. Un de nos rôles de soignants, en les aidant à se décider à se soigner, et de leur permettre de lutter contre cette angoisse.

4. Faut-il faire peur aux malades ?On peut d’abord remarquer que les patients, de toute façon, éprouvent de la peur. Chez certains, cette peur peut d’ailleurs conduire au déni, chez d’autres,

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les conduire à se soigner. Mais doit-on utiliser la peur pour améliorer, lorsque c’est nécessaire, l’observance (si vous ne faites pas ci ou ça, vous aurez des complications) ? L’expérience prouve que c’est inefficace et peut même être contre-productif, aggravant les réactions de déni. Mais nous devons surtout remarquer qu’à chaque fois que nous disons quelque chose, nous risquons d’entraîner de la peur. Or, nous ne pouvons pas, à un moment donné, ne pas parler des complications du diabète, ne serait-ce que lorsqu’on demande au patient d’avoir un examen du fond d’œil.

5. Qu’est-ce que l’empathie ?On peut reprendre la définition de Carl Rogers : « la capacité empathique implique que, par exemple, on éprouve la peine ou le plaisir d’autrui comme il l’éprouve, et qu’on en perçoive la cause comme il la perçoit (c’est-à-dire qu’on explique ses sentiments ou ses perceptions comme il se les explique), sans jamais oublier qu’il s’agit des expériences et des perceptions de l’autre. Si cette dernière condition est absente, ou cesse de jouer, il ne s’agit plus d’empathie mais d’identification. » Ainsi, l’empathie, c’est justement essayer d’appréhender les émotions d’autrui, même si « lui, c’est lui, et moi, c’est moi » : tenter de ressentir ce qu’il ressent, tout en sachant qu’on n’est pas lui. C’est aussi montrer qu’on s’intéresse à lui, en tant que personne, qui a ses propres connaissances, ses propres croyances, ses propres désirs, et ses émotions. C’est ainsi qu’on commencera à forger une relation de confiance, celle qui existe entre deux personnes.

6. Comment annoncer le diagnostic dans une maladie chronique ?La démarche empathique est donc essentielle. D’abord lui demander ce qu’il sait, et essayer de comprendre ce qu’il a envie de savoir. Ensuite, avoir à l’esprit qu’il ne peut pas ne pas éprouver de la peur et de l’angoisse. Le seul moyen d’éviter une réaction de déni est de toujours accompagner un message qui peut faire peur d’un message indiquant qu’il y a une solution et qu’on aidera le patient à l’appliquer : il s’agit de renforcer son efficacité personnelle. Savoir reconnaître l’émotion, en tant que réaction normale. Ne pas banaliser. Rassurer, par la seule présence, qui commence par les mots, mais surtout par l’écoute. C’est cela aussi, l’Éducation Thérapeutique.

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Quelle éducation pour les patients qui ne sont pas autonomes, par exemple qui ne font pas eux-mêmes les injections ?

Le rôle des Infirmières IDE à domicile

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Qu’est-ce que l’autonomie ? On a vu qu’il faut distinguer d’une part le fait d’être autonome au sens où l’on ne dépend pas des autres pour accomplir les gestes de son traitement, et d’autre part le fait d’être capable de décider pour soi en ce qui concerne sa vie, le choix de son travail, sa santé, etc. C’est ce deuxième aspect de l’autonomie que nous avions abordé lors de notre 4e discussion. Aujourd’hui, nous abordons le premier.

1. Pourquoi y a-t-il chez certains patients des limites aux compétences ?Certains patients peuvent présenter des difficultés liées à un handicap physique, psychologique, voire mental. Plus simplement, un patient âgé peut avoir des troubles de la mémoire qui le gênent d’abord dans l’apprentissage des messages éducationnels, ensuite dans la réalisation des gestes de son traitement.

Par ailleurs, il ne faut pas se cacher le fait que les compétences que l’on souhaiterait voir acquérir aux patients sont souvent complexes, qu’il s’agisse de gestes techniques, comme l’injection d’insuline, ou de notions abstraites, comme l’adaptation des doses d’insuline. Ces données semblent, pour nous soignants, aller de soi. Pensons-nous suffisamment à ce qu’elles représentent de profondément

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Quelle éducation pour les patients qui ne sont pas autonomes, par exemple qui ne font pas eux-mêmes les injections ?

Le rôle des Infirmières IDE à domicile

nouveau pour le patient ? Certains ont proposé les concepts de health literacy, ou health numeracy, pour décrire les capacités qu’ont les individus à appréhender les concepts médicaux, notamment, ceux qui utilisent des chiffres. Prochainement nous aborderons la difficulté de l’Éducation Thérapeutique dans le cas du patient qui ne parle pas notre langue, et nous montrerons que même dans le cas d’une langue commune, le patient peut ne pas comprendre le discours médical : ce n’est pas qu’ils ne parlent pas notre langue, c’est que souvent, nous, soignants, nous ne parlons pas la leur. Nous verrons que ceci porte autant sur les mots utilisés que sur le sens des messages éducationnels.

Peut-être surtout, certains patients pensent a priori qu’ils seront incapables de gérer les différentes tâches de leur traitement. Ce sentiment d’inefficacité personnelle peut être en rapport avec des émotions : pensons par exemple à la peur de l’injection, et plus encore, à la peur de se tromper dans la décision de la dose d’insuline.

2. Comment définir l’autonomie au niveau des compétences ?Ainsi, il y a un continuum entre les patients complètement autonomes et ceux qui ne le sont pas du tout. Comment, alors, définir la personne autonome ? Sans doute est-ce celle qui a compris le sens de son traitement, qui en maîtrise les gestes, les concepts sous-jacents, c’est-à-dire les objectifs. C’est celle qui sait, lorsqu’elle n’est pas « compétente », où, ou à qui, s’adresser, qui connaît les différentes ressources du soin : c’est donc celle qui a aussi compris que l’autonomie complète peut avoir de temps en temps des limites, et qui l’accepte. C’est celle qui, enfin, a un sentiment d’efficacité personnelle qui fait qu’elle se sent en sécurité. On voit se dégager un objectif majeur de l’Éducation Thérapeutique, à côté de la transmission des connaissances et des compétences : le développement du sentiment d’efficacité personnelle.

3. Est-il vraiment « incompétent » ?Il y a en fait deux écueils : d’une part, pour le soignant, il est difficile de savoir reconnaître les lacunes dans les compétences (surestimation des compétences). Mais, d’autre part, il risque aussi de penser, à tort, que le patient n’y arrivera pas, que c’est trop difficile pour lui, et que l’Éducation Thérapeutique sur tel ou tel aspect sera impossible (sous-estimation des compétences). Peut-être ce

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deuxième biais est-il fréquent, notamment dans la prise en charge des patients précaires, ou ayant des difficultés linguistiques. À nouveau, nous plaidons pour la nécessité de faire le pari de l’intelligence, pari qui est souvent gagné : commençons par essayer. À nouveau, c’est insister sur le développement de l’efficacité personnelle comme objectif majeur de l’Éducation Thérapeutique.

4. Le cas du traitement par l’insuline : comment choisir le meilleur schéma ?Mais il arrive que le patient ne puisse, au moins dans l’immédiat, accomplir de manière autonome les gestes de son traitement. Dans ce cas, on devra avoir recours à un aidant. Prenons le cas de l’insulinothérapie. Les questions à poser nous paraissent être les suivantes : d’abord, y a-t-il quelqu’un, dans l’entourage du patient, qui pourra réaliser les gestes nécessaires (mesure de la glycémie, décision de la dose, injection de l’insuline) ? Sinon, on pourra avoir recours à une infirmière IDE qui viendra au domicile du patient. Ceci est-il acceptable par le patient ? Combien de fois viendra-t-elle (en général deux fois par jour). Peut-elle préparer l’injection de midi, qui serait faite par un membre de l’entourage ? Ce n’est qu’en cas d’impossibilité qu’on devrait être amené à prescrire un schéma à deux injections plutôt qu’un schéma assurant de l’insuline rapide avant chaque repas. On note au passage combien il sera important que l’Éducation Thérapeutique fasse participer l’entourage.

5. Comment préparer la sortie ? Le rôle de l’infirmière IDE à domicileIl est nécessaire d’éviter le piège qui consisterait à oublier que le manque d’autonomie du patient ne peut être résolu qu’à la condition de vérifier que la personne qui assurera les gestes du traitement (l’entourage, l’IDE à domicile) est…elle-même autonome, c’est-à-dire maîtrise les gestes du traitement. C’est dire qu’une lettre d’information sur les objectifs et les principes du traitement devrait être donnée systématiquement à la sortie du patient. Il faudra aussi vérifier les aspects pratiques (horaires des visites par exemple). Et peut-être devra-t-on tout tenter pour faire en sorte qu’il s’agisse d’une solution transitoire, le patient retrouvant sa liberté (par exemple pour voyager) s’il peut acquérir, à la longue, les compétences qui le rendent autonome.

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Comment aborder la précarité et ses conséquences ?

1. Comment définir la précarité ?À première vue, on a tendance à associer précarité et pauvreté. En fait, la précarité a de nombreuses dimensions. Ainsi, il est significatif que le questionnaire EPICES, constitué de 11 questions qui permettent de définir un score de précarité (on parle de précarité lorsque le score est supérieur à 40,20), certes aborde l’aspect financier par une question : « y a-t-il des périodes dans le mois où vous rencontrez de réelles difficultés financières à faire face à vos besoins », mais demande aussi : « au cours des 12 derniers mois, vous est-il arrivé de faire du sport, de partir en vacances, d’aller au spectacle », ou bien l’isolement : « en cas de difficultés, y a-t-il dans votre entourage des personnes sur qui vous puissiez compter pour vous héberger quelques jours en cas de besoin ».

On voit se dégager une définition de la précarité comme un état où dominent l’isolement, l’insécurité, le fait de vivre dans l’instant, de ne pouvoir se projeter dans l’avenir, « ne pas savoir de quoi demain sera fait », « l’horizon temporel » semblant bouché ; mais aussi, l’impossibilité pour l’individu d’avoir le luxe de faire des choses qui ne sont pas vitales – faire du sport, aller au spectacle, partir

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en vacances, alors que le vital – se loger, se vêtir, manger - n’est pas assuré. Enfin, si des scores – arbitraires – permettent, comme par exemple dans le questionnaire EPICES, de définir un état de précarité, nous ne devons pas oublier qu’il s’agit d’un continuum, allant de la grande précarité avec exclusion aux individus non précaires. Peut-être la précarité moyenne est-elle tout aussi dangereuse, du fait de son caractère insidieux.

Enfin, la notion de précarité doit être considérée d’un point de vue dynamique, tenant compte de la survenue d’événements : une rupture sentimentale, la perte d’un emploi peuvent représenter des événements déclenchants. Certains parlent de trajectoire de la précarité.

2. La précarité est-elle associée à d’autres éléments qui peuvent représenter des barrières au soin ?Notre expérience de la précarité, que nous rencontrons si souvent en Seine-Saint-Denis, est qu’il s’agit parfois d’un ensemble. Nous trouvons de manière associée aux difficultés financières un contexte psychologique de stress et de dépression, un contexte social de faible niveau d’éducation, de barrières linguistiques, de patients souvent issus de l’immigration – parfois clandestine – d’isolement, mais aussi de tabagisme, d’alcoolisme, voire d’assujettissement à d’autres addictions. Tout ceci concourt à diminuer l’autonomie et le sentiment d’efficacité personnelle de la personne précaire. Ceci nous montre bien combien il est important d’abandonner un modèle purement biomédical de la médecine au profit d’un modèle bio-psycho-social, « où le social est aussi important que le psycho », les deux aspects étant en fait liés.

3. Quelles sont les conséquences de la précarité sur la mise en œuvre du soin ?Nous avons la chance de vivre dans un pays où les soins dans de nombreuses maladies chroniques sont bien pris en charge, notamment en cas de précarité sociale. Or cette prise en charge, qui est possible, n’a parfois pas lieu, ou est loin d’être optimale. Ce n’est pas l’accès aux médicaments qui est problématique, c’est de manière bien plus grave l’accès aux soins en général, du fait de l’absence d’autonomie, de la dégradation du sentiment d’efficacité personnelle. Comme le dit Pierre Bourdieu, « la précarité affecte profondément celui ou celle qui

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la subit ; en rendant tout l’avenir incertain, elle interdit toute anticipation rationnelle et, en particulier, ce minimum de croyance et d’espérance en l’avenir qu’il faut avoir pour se révolter, surtout collectivement, contre le présent, même le plus intolérable. » (Bourdieu P, La Précarité est aujourd’hui partout, Contre-feux, Liber-Raisons d’agir, 1998, p. 96). L’impossibilité de se projeter dans l’avenir conduit à penser que la santé – un objectif lointain- n’est pas une priorité. Plus concrètement, la grande précarité, avec son contexte d’insalubrité, rend difficile la création d’un espace de santé. À nouveau, ce qui peut paraître être du superflu ne peut pas être considéré comme une priorité.

4. Comment soigner un patient précaire ?On pourrait presque conclure que précarité et soin dans les maladies chroniques sont antinomiques : moi qui ne sais pas de quoi demain sera fait, pourquoi devrais-je prendre ce traitement censé m’éviter des complications dans 30 ans ? Or le soin est nécessaire, même en état de précarité : les patients précaires ne sont pas protégés contre les complications des maladies. Alors comment faire ? Si nous retenons comme élément important de la définition de la précarité la difficulté pour les patients de se projeter dans l’avenir, on peut comprendre l’importance de la disponibilité des soignants, des consultations rapprochées. Une autre piste est la suivante : souvent, ce qui est lointain est abstrait, alors que ce qui est proche est concret. Il faut donc insister sur les bénéfices concrets et immédiats du soin. Par exemple, le fait que ce patient fatigué se sentira rapidement mieux sous insuline ; l’intérêt concret d’un schéma basal-bolus, lorsque le repas de midi n’est pas assuré, etc. Il nous paraît enfin important de ne pas tomber dans l’erreur qui consiste à penser que, du fait de la précarité, tel traitement complexe est impossible, ce qui conduit à la prescription d’un traitement au rabais. Ce serait alors une double peine : non seulement le patient est précaire, mais en plus il est mal soigné.

Plus que jamais, le rôle de l’Éducation Thérapeutique est d’abord d’aider le patient à avoir accès aux ressources dispensant les soins, ensuite à trouver avec lui les avantages, concrets et immédiats, de ces soins qui puissent le motiver à se soigner, enfin, mais enfin seulement, à apprendre à les mettre en œuvre. Plus que jamais il s’agit de considérer le patient comme une personne.

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Comment aborder un patient qui ne parle pas notre langue ?

1. Pourquoi devons-nous nous parler ?L’Éducation Thérapeutique est une transmission de messages, au sens le plus large qui soit, entre deux personnes, cette transmission étant bidirectionnelle entre le soignant et la personne soignée : les deux recueillent et donnent des informations. Cette transmission est à la fois verbale, utilisant un langage, et non verbale, utilisant des expressions corporelles. Nous devons nous parler, car il s’agit de conduire à la fin de ce qu’on pourrait appeler, plutôt qu’une consultation, une conversation, un véritable changement de l’état du monde : le soignant soigne le patient, le patient se soigne.

Par exemple, le soignant, ayant décidé quelles informations il souhaite recueillir, recueille ces informations lors d’une conversation avec le patient et sa famille, mais aussi lors de l’examen du patient, des examens de laboratoire, des radios, etc. ; ensuite il produit un diagnostic, un pronostic et un programme thérapeutique ; enfin, il donne ces informations au patient et en explique le sens, lors de la conversation, et par écrit lorsqu’il lui remet ce que l’on appelle ses « ordonnances ».

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Comment aborder un patient qui ne parle pas notre langue ?

De son côté, la personne soignée répond aux questions du soignant, mais aussi, doit pouvoir dire ses plaintes, exprimer sa souffrance et son angoisse, poser des questions. Le soignant doit vérifier que le patient comprend ce qu’il dit, mais aussi qu’il comprend le sens de ce qu’exprime le patient. En l’absence de cette compréhension, la communication peut être une illusion, et la qualité du soin s’en ressent. En fait, le soin est impossible sans communication. Ainsi, l’éducation Thérapeutique est la communication : c’est la même chose. D’ailleurs, nous avions dit que l’Éducation Thérapeutique était le respect. La communication est une expression de ce respect mutuel entre deux personnes.

2. Qu’est-ce que la communication ?Le linguiste suisse Ferdinand de Saussure a développé l’idée que le langage était fait de deux éléments, la « Langue » et la « Parole » : La Langue est le système qui précède et rend le discours possible. Lorsque nous apprenons un langage, nous apprenons à maîtriser l’usage des mots, la syntaxe, l’orthographe, la ponctuation. La Parole est l’utilisation concrète de la langue : c’est ce que nous disons réellement ; c’est l’utilisation du système. Ainsi, il y a les mots et il y a le sens des mots. Il ne suffit pas de comprendre les mots : disons que c’est l’étape de traduction. Il faut aussi en comprendre le sens : c’est l’étape d’interprétation.

Figure 1 – Le mur des mots et le mur du sens.

Traductionla Langue

Le Soignantexplique le soin Le Patient

quelle que soit sa langue !

Se soigne

Interprétationla Parole

Comprend la Langue (jargon)Comprend la Parole (le sens du soin)

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Une communication efficace doit donc franchir deux murs, qui sont représentés sur cette figure : le mur de la Langue et le mur du sens. Lorsque nous soignons quelqu’un qui ne parle pas notre langue, le mur des mots est évident. Mais nous devons être conscients que cette barrière existe aussi lorsque nous parlons la même langue si nous ne faisons pas attention à éliminer systématiquement tout « jargon », ces mots professionnels dont nous seuls comprenons le sens. Ensuite, il y a le mur de la Parole, c’est-à-dire la signification de ce que nous disons : la personne à qui nous parlons peut avoir parfaitement compris « les mots », mais non le sens de ce que nous disons, car nous utilisons des concepts qui nous sont familiers, à nous « professionnels », mais qui ne le sont pas pour les « profanes ». Par ailleurs, certaines personnes peuvent, nous l’avons déjà dit, avoir des difficultés à comprendre les concepts médicaux, notamment ceux qui reposent sur des chiffres.

La communication est aussi non-verbale : par nos attitudes, nos mimiques, le ton de notre voix, nous pouvons suggérer par exemple que quelque chose est important, ou que nous désapprouvons ce qui est dit, etc.

3. Comment parler avec quelqu’un qui ne parle pas notre langue ? Le problème de l’interprétariatL’interprète peut être un interprète professionnel, un membre de l’équipe soignante, un autre patient, un membre de la famille. Dans tous les cas, il faut s’assurer que la confidentialité est respectée, et que ce qui est fait l’est avec l’accord du patient. Il faut faire attention à ne pas se limiter à la première étape, qui est la traduction des mots. C’est ce qui est fait le plus souvent : on dit une phrase et on demande à l’interprète de traduire. Or la communication n’est pas faite d’un ensemble de phrases que l’on va transmettre l’une après l’autre. Il s’agit de transmettre un message qui ait un sens. Il faut donc s’assurer que l’interprète comprend lui-même le sens de ce qui doit être transmis. Une clé d’une bonne traduction est peut-être d’éviter la « traduction phrase par phrase ».

4. Que nous apprend notre expérience des patients qui ne parlent pas notre langue ?Ce n’est en fait que le cas où la difficulté est la plus apparente : cette expérience nous apprend que la communication entre deux personnes ne va pas de soi, ni

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au niveau de la compréhension des mots, ni de celle du sens. Cette dernière est encore plus difficile lorsque nos « cultures » sont différentes. Mais ici aussi, nous devons réfléchir au fait que de toute façon, notre culture, c’est-à-dire nos modes de pensée, est faite de l’ensemble de ce que nous savons, croyons, espérons, craignons etc., bref tout ce qui forme comme un immense « puzzle mental ». Un message, même parfaitement « traduit », peut ne pas s’intégrer dans le puzzle mental de notre interlocuteur, même si nous appartenons à la même « culture ». Ainsi, une communication bien conduite doit toujours vérifier la réussite de la transmission du message : mais il est clair que tout ceci prend du temps.

Figure 2. Les puzzles mentaux.

Le puzzle mental du soignant

Le puzzle mental du soigné

Traduction

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Comment soigner un patient « difficile » ?

1. Qu’est-ce qu’un patient « difficile » ?Le soignant a parfois l’impression que la consultation se passe mal : le contact n’est pas bon ; la conversation semble manquer de franchise ou bien est désagréable. En discutant, nous avons approché d’une définition du patient « difficile » : c’est celui qui nous met nous, soignants, en difficulté. Bien sûr, il peut s’agir d’un patient agressif dans son comportement ou son discours, ou de celui qui nous pose des questions auxquelles nous ne savons pas répondre, des problèmes que nous ne pouvons résoudre, souvent multiples, parfois présentés comme une liste de courses, celui, anxieux, à qui tout pose problème, qui refuse tout ce qu’on propose, qui n’est jamais content, parfois furieux contre le soignant ; celui que, vraiment, nous ne trouvons pas coopérant… Certaines de ces définitions du patient « difficile » ont été données par des Médecins Généralistes (Steinmetz et al. Family Practice 2001 ; 18 : 495-500).

2. Y a-t-il des patients « odieux » ?En effet, nous avions même prévu au départ de parler de patient « odieux », pensant à un article provocant paru il y a plus de 30 ans dans le New England

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Comment soigner un patient « difficile » ?

Journal of Medicine : soigner le patient odieux, dans lequel l’auteur écrivait : « qu’on le veuille ou non, il y a quelques patients qui déclenchent l’aversion, la peur, le désespoir ou une franche méchanceté chez leurs médecins. Les réactions émotionnelles vis-à-vis des patients ne peuvent être balayées d’un revers de la main et ce n’est pas de la bonne médecine que de dire qu’elles n’existent pas. » (Groves JE. Taking care of the hateful patient, N Engl J Med 1978 ; 298 : 883-7). Le patient « odieux », ce pourrait être celui qui a un comportement (par exemple un manque de respect) tel que nous en venions à nous dire : si je n’étais pas soignant, je me mettrais en colère… Ceci pourrait suggérer que plutôt que de parler de patient odieux, il vaudrait mieux parler de patient que nous trouvons odieux, qui déclenche en nous des émotions négatives.

3. Comment soigner le patient « difficile » ?La clé qui ouvre la porte fermée de la consultation difficile pourrait être l’empathie. Une manière de résumer cette approche peut être trouvée dans l’article de Haas et al. (Am Fam Physician 2005 ; 72 : 2063-8).

Solution En pratique Comment le dire

Améliorer l’écoute Résumer J’ai bien compris que ?

Améliorer le partenariat

Reconnaître que la situation n’est pas idéale

Ca n’a pas l’air d’aller entre nous

Reconnaître les émotions

Augmenter l’utilisation du « je »

Plutôt que : vous me faites penser que, j’ai l’impression que

Empathie Ne pas blâmer, reconnaître l’émotion

Je sens que vous êtes énervé : pouvez-vous m’aider à comprendre pourquoi ?

Négocier le soin

Clarifier la demande de soin

Comment comprenez-vous ce que je propose ?

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Par une relation empathique, il s’agit de faire comprendre qu’on reconnaît la souffrance de l’autre ; en augmentant ici l’utilisation du je, sans doute rentre-t-on dans la relation thérapeutique qui semblait fermée.

4. Empathie et sympathie dans la relation de soinCeci nous amène alors à essayer de définir la place de la sympathie dans la relation de soin. Lorsque nous avions donné la définition de l’empathie (voir notre septième discussion), nous avions insisté sur le fait qu’on essayait d’imaginer les émotions de l’autre, tout en se souvenant que « lui c’est lui, et moi, c’est moi ». Si on oublie cela, il ne s’agit plus d’empathie, mais d’identification émotionnelle. Mais la sympathie est-elle pour autant absente de la relation de soin ? Or l’empathie seule ne suffit pas pour impliquer le soin.

Le philosophe Stephen Darwall (Welfare and Rational Care, 2002) a défini la sympathie comme une émotion que l’on ressent lorsqu’on sent qu’une personne est dans la souffrance et que cette souffrance demande à être soulagée ; c’est ce que l’on veut dire par l’expression : je vous exprime toute ma sympathie. Mais il n’y a peut-être pas très loin de la notion de souci, et dans le cadre de la prise en charge des patients, de la notion de soin. Dans notre troisième discussion, nous avions parlé du soin de soi. Ici, il s’agit du soin de l’autre. Le soin de l’autre, pour le soignant, c’est finalement le souci de ce qui peut lui arriver. On peut d’ailleurs remarquer que le mot anglais care est utilisé indifféremment pour le soin (au sens médical) et le souci ; mais il signifie aussi que ce qui peut lui arriver est important pour nous : cela ne nous est pas égal. Ainsi, en anglais, I don’t care signifie : cela m’est égal.

La vraie question que pose la relation « difficile », qui a fait l’objet de cette discussion, est donc la suivante : comment, malgré cette difficulté, malgré les émotions négatives qui sont ressenties de part et d’autre, peut-on faire en sorte que le souci puisse s’exprimer ? Seulement, alors, ce qu’on appelle l’éducation Thérapeutique - c’est-à-dire toute la démarche relationnelle qui a simplement pour but de rendre le soin possible - pourra être mise en place.

Mais on peut aussi remarquer que, peut-être, toute relation de soin, à un degré plus ou moins exprimé, est une relation difficile, nécessitant le même travail d’ouverture à l’autre.

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Conclusion : la définition d’une posture éducationnelle Fondation d’une médecine de la personne

1. Qu’est-ce qu’une posture éducationnelle ?L’OMS définit ainsi la notion de posture éducationnelle, que doit acquérir et développer le soignant dans la prise en charge d’une maladie chronique, lui permettant de mettre en œuvre ce que l’on appelle Éducation Thérapeutique, « notamment pour négocier des objectifs éducatifs partagés avec le patient ».

Plus précisément, il s’agit de la compétence qui permet au soignant de se mettre en mesure :

X 1. d’aider les patients à apprendre et d’apprendre aux patients à gérer leur traitement ;

X 2. d’apprendre aux patients à gérer les ressources sanitaires, sociales et économiques disponibles ;

X 3. d’aider les patients à gérer leur mode de vie ; X 4. de tenir compte dans l’éducation thérapeutique du patient des

dimensions pédagogiques, psychologiques et sociales de la prise en charge à long terme. »

(Texte repris dans l’arrêté du 10 août 2010 relatif aux compétences requises pour dispenser l’éducation thérapeutique, Loi HPST).

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Manuel d’éducation thérapeutique

1. En quoi l’éducation thérapeutique est-elle indissociable du principe de respect de l’autonomie du patient et en quoi s’agit-il « d’inventions » en médecine ?Lorsqu’on dit qu’on est prêt à « négocier des objectifs pédagogiques partagés avec le patient », c’est qu’on se met en mesure de reconnaître en lui une personne autonome, c’est-à-dire ayant la compétence pour décider son traitement. Clairement, c’est à une réflexion sur l’autonomie du patient qu’invite toute réflexion sur le sens de l’Éducation Thérapeutique. L’Éducation Thérapeutique, dans son principe même, a pour but de donner au patient les moyens d’être à même de procéder à une véritable délibération concernant ses choix de vie. Il s’agit d’abord « de lui apprendre à apprendre » : on lui révèle qu’il est capable d’apprendre. Ensuite, on lui apprend ce qui a été convenu, dans l’élaboration « d’objectifs pédagogiques partagés », comme important, pour gérer son traitement. Cela, l’Éducation Thérapeutique le fait en obligeant le soignant à ne pas se contenter de prescrire un traitement, mais de s’attacher à en révéler le sens. L’Éducation Thérapeutique fait en sorte que la prescription soit accompagnée d’une explication.

Or ce premier aspect de la posture éducationnelle ne va pas de soi pour le médecin. Il ne lui a pas été enseigné dans le cursus de ses études médicales. On peut rappeler ici la signification du mot « posture » : selon le Robert, c’est une position du corps qui n’est pas naturelle. Ici, il s’agit bien d’une position de l’esprit du soignant, et c’est en ce sens que « l’invention » du concept d’Éducation Thérapeutique, à la fin des années 1970, a été innovante en médecine ; elle a été contemporaine d’une autre « invention » : l’introduction du principe d’autonomie (Beauchamp et Childress, 1979).

2. En quoi une « posture éducationnelle » conduit-elle le soignant à développer la notion « d’équipe soignante » ?« Apprendre aux patients à gérer les ressources sanitaires, sociales et économiques disponibles ». D’abord, l’Éducation Thérapeutique est le fait d’une équipe, puisque tous les membres de l’équipe soignante y participent : médecins, infirmiers et infirmières, aides-soignants et aides-soignantes, diététiciennes, psychologues. Les pharmaciens ont aussi un rôle à jouer. Ici également, ce deuxième aspect de la « posture éducationnelle » ne va pas de soi. Ensuite, il s’agit d’apprendre au patient que de nombreuses ressources lui sont offertes : mettre en jeu le rôle du

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Manuel d’éducation thérapeutique

médecin traitant, des infirmières libérales à domicile, de l’assistante sociale. À ce titre, l’Éducation Thérapeutique, tout en renforçant le sens de ce qui se dit dans le « colloque singulier » entre le patient et son médecin, élargit le cadre du soin, et, dans ce cadre, il faut veiller à ce que l’ensemble de l’équipe tienne un discours commun.

3. En quoi une « posture éducationnelle » conduit-elle à donner à la médecine une dimension « biopsychosociale » ?« Aider les patients à gérer leur mode de vie. » Cette phrase suggère que la prescription doit tenir compte du mode de vie du patient, dans sa globalité. Il y a, certes, la vie avec la maladie, mais il y a aussi la vie en général, celle de la personne à qui on s’adresse. Cette personne a ses croyances, ses désirs, ses émotions, ses préférences ; elle a son langage et sa culture, parfois différents du nôtre ; elle a ses priorités personnelles, professionnelles, familiales ; elle a sa volonté. C’est dans cet ensemble que doivent tenter de s’introduire les impératifs du soin. L’Éducation Thérapeutique, en donnant au soin un sens qui intègre toutes ces dimensions, participe à l’avènement de ce nouveau modèle de médecine, « biopsychosocial », dont George Engel, en 1977, avait réclamé l’avènement.

*Une maladie chronique, c’est un avant – ce passé dont le patient garde la nostalgie, comme disait Canguilhem – c’est un présent, mais c’est aussi un futur. En expliquant au patient la signification de ce qui lui est arrivé et de ce qui va arriver, l’Éducation Thérapeutique permet au temps, dont le cours a été interrompu par la maladie, de se reconstruire. Bientôt le vécu remplacera ce qui initialement a été compris et appris. L’éducation Thérapeutique est bien ainsi un processus continu qui fait partie intégrante du soin.

Le soin est le souci : en anglais, le même mot est utilisé, care. Le philosophe Harry Frankfurt a remarqué que lorsque nous avons du souci pour quelque chose, ou pour quelqu’un, ou pour nous-mêmes, c’est que nous considérons que cette chose est importante pour nous : obligatoirement, cela signifie que nous nous plaçons dans le cadre du futur.

En donnant du sens aux choses, l’Éducation Thérapeutique permet le rétablissement de la continuité qui fait qu’un être est vraiment une personne, parce qu’il a non seulement des souvenirs et des antécédents, mais aussi des projets et des espérances.

L’Éducation Thérapeutique est ainsi d’abord une démarche éthique : celle qui permet de fonder une véritable médecine de la personne. En s’adressant à la personne davantage qu’au malade, elle devient alors synonyme de respect.

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Pour en savoir plus…

Beauchamp T.F., Childress J.L. Principles of Biomedical Ethics, Oxford University Press, 2001, Les Principes de l’éthique biomédicale, traduction de Martine Fisbach, « Médecine et Sciences Humaines », Les Belles Lettres, Paris, 2008.Bourdieu P. La Précarité est aujourd’hui partout, « Contre-feux », Liber-Raisons d’agir, 1998.Canguilhem G. Le Normal et le pathologique. « Quadrige » Presses Universitaires de France, Paris, 1991.Darwall S. Welfare and Rational Care, “Princeton Monographs in Philosophy”, Princeton University Press, Princeton, 2002.De Saussure F. Cours de linguistique générale, Payot, Paris, 1916.d’Ivernois J.-F., Gagnayre R. Apprendre à éduquer le patient. Approche pédagogique, Vigot, Paris, 1995, 3e édition 2008.Dworkin G. The Theory and Practice of Autonomy, “Cambridge Studies in Philosophy”, Cambridge University Press, Cambridge, 1988.Frankfurt H.G. The Importance of What we Care About, Cambridge University Press, 1988.Golay A., Lagger G., Giordan A. Comment motiver le patient à changer ? Paris : Maloine, 2009.Joule R.-V., Beauvois J.-L., Petit Traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens, Presses Universitaires de Grenoble, Grenoble, 1987.Lacroix A., Assal J.-P. L’éducation thérapeutique des patients : nouvelles approches de la maladie chronique. Paris : Maloine, 2003.Livet P. Émotions et rationalité morale, « Sociologies », Presses Universitaires de France, Paris, 2002.OMS (Bureau Régional pour l’Europe), Éducation thérapeutique du patient, programme de formation continue par des professionnels de soins dans le domaine de la prévention des maladies chroniques. Recommandations d’un groupe de travail de l’OMS, Copenhague, Version française, Bruxelles, 1998.ORIGGI G. Qu’est-ce que la confiance ? « Chemins philosophiques », Vrin, Paris, 2008.Spinoza, Éthique

Crédits : de nombreux concepts présentés dans ce texte sont analysés en détail dans les deux ouvrages de Gérard Reach : Pourquoi se Soigne-t-on ? Le Bord de l’Eau, 2007, et Une théorie du soin, souci et amour face à la maladie « Médecine et Sciences Humaines », Les Belles Lettres, 2010. La figure du chapitre 2 a été publiée dans l’article « Une critique du concept de patient-éducateur », Médecine des Maladies Métaboliques 2009 ; 3 : 89-94 ; celle du chapitre 6 a été publiée dans Une théorie du soin, souci et amour face à la maladie ; celles du chapitre 10 ont été publiées dans l’article « L’Éducation Thérapeutique du Patient, à la recherche des portes d’entrée », Le Journal des Psychologues, 2012.

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Voici un Manuel d’Éducation Thérapeutique qui tente de décrire la signification de cette nouvelle démarche médicale faisant partie intégrante des soins, comme dit l’Organisation Mondiale de la Santé, et qui est maintenant inscrite dans la loi. Il apparaît au fil des douze chapitres qui forment ce bref manuel qu’il s’agit de permettre au patient de comprendre le sens de ce qui lui arrive – sa maladie et son traitement - pour l’aider à accéder à une véritable autonomie.

Pour le soignant, adopter une posture éducationnelle ne va pas de soi : or l’enjeu de toute Éducation Thérapeutique est de poser les fondements d’une médecine de la personne dans laquelle la communication entre le soignant et le soigné devient la marque d’un respect mutuel et d’une véritable relation de confiance.

L’Éducation Thérapeutique est enfin une marque d’hospitalité : soyez le bienvenu, et asseyons-nous, le temps d’une conversation.