Décoaptation de l'articulation de hanche

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Ann. Kinésithér., 2000, t. 27, n° 1, pp. 28-34 © Masson, Paris, 2000 ÉVALUATION BASÉE SUR LE NIVEAU DE PREUVE Vérification d’une technique de décoaptation de hanche N. BUCCIALI (1) , B. PETITDANT (2) , J.P. BOURINEAU (3) (1) Masseur-Kinésithérapeute, (2) Cadre de Santé Masseur-Kinésithérapeute, certifié en biomécanique, Unité de Réadaptation cardio-vasculaire, CHU de Dijon, 23, rue Gaffarel, 21034 Dijon. (3) Cadre de Santé Manipulateur de Radiologie, Clinique de Traumatologie et d’Orthopédie (P r D. Schmitt, 49, rue Hermite, F-54052 Nancy Cedex. Tirés à part : B. PETITDANT, à l’adresse ci-dessus. Introduction La décoaptation de l’articulation coxo-fémo- rale est définie comme une traction qui se tra- duit par une séparation physique réelle des pièces cartilagineuses. Deux études menées par Hignet [1] d’une part, et par Le Roux [2] d’autre part, conduisent à des résultats opposés. Le premier observe « un déplacement de la tête fémorale et la sépa- ration des deux surfaces articulaires », et le second conclut : « nous n’observons aucun mou- vement dans l’articulation coxo-fémorale, lors- que celle-ci est soumise à une traction ». Il ajoute : « il serait souhaitable qu’une troisième recherche soit menée (...) afin de préciser l’effet mécanique d’une telle manœuvre sur une arti- culation dite emboîtée. » Le but de ce travail est donc de tenter de trancher entre ces deux auteurs. Matériel et méthode POPULATION Nous appliquons la technique sur dix étudiants issus de l’Institut de Formation en Masso-Kinésithérapie ou de l’école de manipulateur-radio. Ce groupe de sujets est composé de cinq filles et de cinq garçons. La moyenne d’âge du groupe est de 22,6 ans pour les filles (de 19 à 28 ans) et de 20,8 ans pour les garçons (de 19 à 22 ans). Ces sujets ne présentent dans leurs antécédents, ni de pathologie de hanche ni de pathologie de genou. Nous sommes attentifs à l’intégrité du ligament croisé antéro- externe, car la technique nous impose de le mettre en contrainte. En plus de l’âge, nous consignons également la taille, le poids, le sexe, l’avis du sujet sur sa laxité, le sports prati- qués et le côté dominant de chaque sujet au cas où ces informations auraient une influence sur les résultats de la technique. Nous pratiquons aussi un test d’hypoextensibi- lité des muscles pelvitrochantériens et du droit fémoral dans la position décubitus bout de table. MATÉRIEL — Table de radiologie horizontale Futuralix ® 1500 avec son marchepied utilisé en contre appui par l’opérateur et sa sangle de maintien de bassin pour stabiliser le sujet ; scopie télévisée de contrôle ; — localisateur rond pour focalisation du faisceau de rayons X ; tablier de plomb pour la radioprotection du sujet et de l’opérateur ; tapis antidérapant de rehaussement à un seul sens de friction de type Immedia ® 48 × 48 cm placé entre la table et le bassin du sujet ; — Kinédyne ® : dynamomètre électronique n° 113 série 1, fabriqué par Smith et Nephew, Kinetec, pour évaluer la force de l’opérateur. La décoaptation de l’articulation coxo-fémo- rale est enseignée dès la première année d’étu- des en masso-kinésithérapie. Les travaux menés sur l’efficacité de cette technique sont contradictoires. Ce travail se propose de véri- fier sous contrôle radiographique l’action d’une traction dans l’axe du segment fémoral, hanche à 45° de flexion associée à une légère abduction et une légère rotation externe. Une mesure comparative de l’interligne articulaire est faite sur les clichés radiographiques réali- sés avant et pendant la manœuvre. Dans neuf cas sur dix la décoaptation est ob- jectivée chez le sujet jeune. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. - Document téléchargé le 18/02/2013 par PETITDANT Bernard Bernard (498360)

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Etude sur 10 sujets de la décapitation de hanche sous radiographie

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  • Ann. Kinsithr., 2000, t. 27, n 1, pp. 28-34 Masson, Paris, 2000

    VALUATION BASE SUR LE NIVEAU DE PREUVE

    Vrification dune technique de dcoaptation de hanche

    N. BUCCIALI (1), B. PETITDANT (2), J.P. BOURINEAU (3)

    (1) Masseur-Kinsithrapeute,

    (2) Cadre de Sant Masseur-Kinsithrapeute, certifi en biomcanique, Unit de Radaptation cardio-vasculaire,CHU de Dijon, 23, rue Gaffarel, 21034 Dijon.

    (3) Cadre de Sant Manipulateur de Radiologie, Clinique de Traumatologie et dOrthopdie (Pr D. Schmitt, 49, rue Hermite, F-54052 Nancy Cedex.

    Tirs part : B. PETITDANT, ladresse ci-dessus.

    Introduction

    La dcoaptation de larticulation coxo-fmo-rale est dfinie comme une traction qui se tra-duit par une sparation physique relle despices cartilagineuses.

    Deux tudes menes par Hignet [1] dunepart, et par Le Roux [2] dautre part, conduisent des rsultats opposs. Le premier observe un dplacement de la tte fmorale et la spa-ration des deux surfaces articulaires , et lesecond conclut : nous nobservons aucun mou-vement dans larticulation coxo-fmorale, lors-que celle-ci est soumise une traction . Ilajoute : il serait souhaitable quune troisimerecherche soit mene (...) afin de prciser leffetmcanique dune telle manuvre sur une arti-culation dite embote.

    Le but de ce travail est donc de tenter detrancher entre ces deux auteurs.

    Matriel et mthode

    POPULATION

    Nous appliquons la technique sur dix tudiants issus delInstitut de Formation en Masso-Kinsithrapie ou delcole de manipulateur-radio. Ce groupe de sujets estcompos de cinq filles et de cinq garons. La moyennedge du groupe est de 22,6 ans pour les filles (de 19 28 ans) et de 20,8 ans pour les garons (de 19 22 ans).

    Ces sujets ne prsentent dans leurs antcdents, ni depathologie de hanche ni de pathologie de genou. Noussommes attentifs lintgrit du ligament crois antro-externe, car la technique nous impose de le mettre encontrainte.

    En plus de lge, nous consignons galement la taille, lepoids, le sexe, lavis du sujet sur sa laxit, le sports prati-qus et le ct dominant de chaque sujet au cas o cesinformations auraient une influence sur les rsultats de latechnique. Nous pratiquons aussi un test dhypoextensibi-lit des muscles pelvitrochantriens et du droit fmoraldans la position dcubitus bout de table.

    MATRIEL

    Table de radiologie horizontale Futuralix 1500 avecson marchepied utilis en contre appui par loprateur etsa sangle de maintien de bassin pour stabiliser le sujet ; scopie tlvise de contrle ; localisateur rond pour focalisation du faisceau derayons X ; tablier de plomb pour la radioprotection du sujet et deloprateur ; tapis antidrapant de rehaussement un seul sens defriction de type Immedia 48 48 cm plac entre la tableet le bassin du sujet ; Kindyne : dynamomtre lectronique n 113 srie 1,fabriqu par Smith et Nephew, Kinetec, pour valuer laforce de loprateur.

    La dcoaptation de larticulation coxo-fmo-rale est enseigne ds la premire anne dtu-des en masso-kinsithrapie. Les travauxmens sur lefficacit de cette technique sontcontradictoires. Ce travail se propose de vri-fier sous contrle radiographique lactiondune traction dans laxe du segment fmoral,hanche 45 de flexion associe une lgreabduction et une lgre rotation externe. Unemesure comparative de linterligne articulaireest faite sur les clichs radiographiques rali-ss avant et pendant la manuvre.Dans neuf cas sur dix la dcoaptation est ob-jective chez le sujet jeune.

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    MTHODE

    Pralable

    Avant tout, nous valuons lintensit de notre tractiondans les conditions de la technique laide du Kyndyne.La traction maximale que nous pouvons exercer est de30 kg, la traction moyenne que nous pouvons maintenirpendant une assez longue dure est environ 20 kg. Nousnous efforons de mmoriser nos sensations sensori-motrices lors de la traction et nous nous entranons larpter en la vrifiant sur le dynamomtre lectronique.

    Radiologie

    Incidences radiologiques fondamentales : face antro-postrieure.

    Format des clichs radiologiques : 30 40 cm en 2.Constantes de rglage de lappareil de radiologie : travail

    en cellule photolectrique avec 65 KV, noircissement 2.Distance foyer-film : 1 mtre.Localisateur rond pour focalisation du faisceau de

    rayons X.

    Exprimentation

    Le sujet est install en dcubitus sur la table de radio-logie avec un tapis antidrapant plac sous les fesses. Il estsangl au niveau abdominal. La hanche tracter est pla-ce en lgre abduction, lgre rotation externe, avec uneflexion de 45, le genou est flchi 90 et le pied est pos plat sur la table. La hanche controlatrale est tendue, lesmembres suprieurs sont placs sur le ventre du sujet afindobtenir un relchement correct.

    Le thrapeute se place au pied du patient, assis-debouten bord de table de radiologie, il se sert du marchepied dela table pour obtenir un contre-appui (figure 1).

    Une premire radiographie dite de rfrence est prisesans traction dans cette position (figure 2).

    Technique

    Nous demandons au sujet de se relcher avant de dbu-ter la technique.

    La prise se fait avec le tiers proximal de lavant-brascoude flchi sur lextrmit suprieure de la face post-rieure de la jambe. La contre-prise est obtenue par lapaume de lautre main la face antrieure du cou de pied.La traction, dans laxe du ft fmoral, est excute par uncouple de force entre la prise et la contre-prise (figure 1).Nous lappliquons progressivement jusqu la sensation detracter 20 kg environ tout en contrlant le relchementdu sujet. Nous donnons alors le signal pour prendre unedeuxime radio, au maximum de notre traction (figure 3).

    Lapplication de la manuvre dure une vingtaine desecondes environ. La manuvre est applique toujourspar le mme oprateur et toujours sur le membre infrieurgauche pour les 10 sujets.

    FIG. 1. Installation du sujet, du thrapeute et mise en uvre de la technique.

    FIG. 2. Radiographie avant traction en position hanche 45 de flexion, lgre abduction et lgre rotation externe.

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    Paramtres surveiller

    Le relchement du sujetLe relchement est indispensable. Le patient doit tre

    laise, avoir confiance en la technique, la traction doittre progressive et ne pas tre trop importante, sinon, in-vitablement, des contractions musculaires de dfenseapparaissent et interdisent toute dcoaptation.

    La stabilisation du bassinLa traction entrane une bascule du bassin, il est donc

    primordial pour bien transmettre les forces larticulationcoxo-fmorale de bloquer le bassin. Pour cela nous utili-sons une sangle de maintien de bassin adapte sur la tablede radiologie et le tapis antidrapant un seul sens deglissement oppos au mouvement.

    La direction de la tractionLe thrapeute se place au pied du sujet et tracte dans

    laxe du fmur.

    La position du fmur et du bassinPour quune mesure comparative soit possible entre les

    deux radios, il nous faut des positions identiques des seg-ments corporels. Nous reprons donc, lors de la manu-

    vre, la scopie, la rotation et labduction du fmur par laposition du petit trochanter, et le mouvement du bassinpar la forme du cadre obturateur.

    Lcart de linterligne articulaire la scopieLorsque lcartement de linterligne articulaire la sco-

    pie est visualis, la traction est maintenue et lordre estdonn au manipulateur-radio de faire le clich en traction.

    La douleurCette technique reste infra-douloureuse.

    MTHODOLOGIE DE MESURE

    La littrature reste muette sur les mesures de dcoap-tation de hanche.

    Le Roux [2] ne trouve pas daugmentation de linterli-gne. Il nindique donc pas le choix de ses repres ni lamanire de prendre les mesures.

    Hignet [1], constate la prsence sur ses radiographiesdun liser noir qui selon lui signe une vacuit. Il mesurelpaisseur de ce liser noir. Cette technique est critiquepar certains radiologues, car il peut exister un effetMach sur la radio [3]. Un effet Mach apparat au bord destructures cylindriques ou sphriques. Une importante dif-frence de densit entre deux structures induit la radio-graphie un liser sombre appel : bande Mach .

    Nous avons choisi pour valuer lcartement de linter-ligne articulaire, de prendre deux mesures en des pointsprcis et classiquement reconnu pour apprcier les dyspla-sies de hanche. Tout dabord, nous reprons le centre dela tte fmorale en prenant le milieu du plus grand diam-tre, cest le point C . Ensuite nous reprons deux autrespoints sur le cotyle : le point E qui correspond au point le plus externedu cotyle sur une radiographie de face. Ce point est faci-lement reprable par la forte condensation osseuse ; le point T qui correspond larrire-fond du cotyleo se situe linsertion du ligament de la tte fmorale.

    Nos deux mesures sont les distances CE et CT ,chacune doit tre compare entre la radiographie au repos(CE et CT) (figure 4) et celle sous traction (CEt et CTt)(figure 5). Une augmentation dune ou des deux distancesnous permet de dduire quil y a effectivement unedcoaptation articulaire.

    Nous mesurons galement sur la droite CE et sur ladroite CT la largeur de linterligne articulaire sur chaqueradiogarphie. Entre le point E et le bord de la tte fmo-rale, nous appelons cette distance dE . Entre le point Tet le bord de la tte fmorale, nous appelons cette dis-tance dT .

    Tout comme Hignet [1], nous relevons sur certainesradiographies lapparition dun croissant gazeux noir.

    Rsultats

    Le tableau I indique les mesures ralises aupoint E au repos (CE) et pendant la traction(CEt). Il est complt par le calcul de llargis-

    FIG. 3. Radiographie sous traction dans laxe du fmur.

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    sement de linterligne au niveau du point E(CEt CE). Le tableau II indique les mesuresralises au point T au repos (CT) et pendant latraction (CTt). Il est complt par le calcul dellargissement de linterligne au niveau dupoint T (CTt CT). Ces valeurs sont toutesexprimes en millimtres (mm). Nous calculonsaussi en pourcentage laugmentation de cetinterligne au niveau du point E et nous appe-lons cette valeur % E :

    % E = (CEt CE) 100/dEet au point T nous appelons cette valeur

    % T :% T = (CTt CT) 100/dTLa force dune vingtaine de kilos mise en

    uvre a permis une dcoaptation de larticula-tion coxo-fmorale dans neuf cas sur dix avecun largissement moyen de 2,3 mm au point E,soit 49,9 % daugmentation de linterligne et de2,55 mm au point T soit 59,9 % daugmentationde linterligne.

    Discussion

    COAPTATION DE LA TTE DU FMUR DANS LACTABULUM

    Larticulation coxo-fmorale est une narth-rose qui comporte trois degrs de libert.Comme toute articulation, elle comporte diff-rents lments passifs et actifs qui maintiennentles deux surfaces articulaires en contact.

    FIG. 4. Calque dune radiographie avant traction.C : centre de la tte fmorale, E : point le plus externe du cotyle,T : arrire-fond du cotyle, dE : largeur de linterligne articulaire

    sur la droite CE, dT : largeur de linterligne articulaire sur la droite CT.

    FIG. 5. Calque dune radiographie sous traction.Ct : centre de la tte fmorale, Et : point le plus externe du cotyle,T : arrire -fond du cotyle, dEt : largeur de linterligne articulaire

    sur la droite CE, dTt : largeur de linterligne articulaire sur la droite CT.

    TABLEAU I. Rsultats au niveau du point E.

    Sujets CE(mm)CEt

    (mm)CEtCE

    (mm)dE

    (mm) % E

    1 32 37 5 4 125 %

    2 32,5 32,5 0 7 0 %

    3 36 37 1 5 20 %

    4 30 31 1 3 33 %

    5 33 34,5 1,5 6 25 %

    6 37 42 5 7 71 %

    7 40 41 1 6 16 %

    8 28,5 31 3,5 4,5 77 %

    9 30 33 3 4 75 %

    10 32 34 2 3,5 57 %

    Moyenne 2,3 49,9 %

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    Dans la position de flexion 45, lgreabduction et lgre rotation externe que nousavons retenue quelle est linfluence de ceslments ?

    Le systme capsulo-ligamentaire

    La capsule comporte plusieurs replis (frenula-capsulae) qui permettent la libert des mouve-ments.

    Le bourrelet cotylodien est un anneau fibro-cartilagineux triangulaire. Daprs Poirier [4], lebourrelet tant lastique et extensible, non seu-lement il agrandit les surfaces de contact et pro-tge les bords de la cavit articulaire maissurtout il est une soupape circulaire qui emp-che lair de pntrer dans larticulation.

    Le ligament de la tte fmorale (ligamentrond) na pas un grand rle mcanique, il con-tribue la vascularisation de la tte du fmur.

    Le systme ligamentaire proprement parlerest compos de trois ligaments : lilio-fmoral ou ligament de Bertin avec sesdeux faisceaux, lilio-prtrochantrien et lilio-prtrochantinien ; le pubo-fmoral ; lischio-fmoral.

    Dans la position de traction : en rotation externe le faisceau ilio-prtro-chantrien et le ligament pubo-fmoral sont misen tension ; en abduction, seul le ligament pubo-fmoralse tend ; en flexion, tous les ligaments sont dtendus.

    La flexion tant de 45 et les mouvements derotation externe et dabduction tant modrs,les ligaments dans la position tudie sontdtendus et ne limitent pas la traction.

    Le systme musculaire coapteur

    Larticulation de hanche est active par denombreux muscles. Pour la coaptation de larti-culation, seuls les muscles direction horizontalenous paraissent intressants. Ce sont les musclespelvi-trochantriens. En effet, ces muscles ditstoniques interviennent dans le maintien de laposture, ils sont riches en fuseaux neuro-muscu-laires et en fibres , ils ragissent donc facilementau rflexe myotatique et la moindre raction dedfense peut augmenter la coaptation.

    La pression atmosphrique

    Tous les auteurs font rfrence aux exprien-ces des frres Weber. Nos recherches bibliogra-phiques ne nous ont pas permis de retrouver ladescription princeps de leur travail. CependantSappey [5], le plus ancien auteur consult, sem-ble reprendre fidlement ces expriences.

    Exprience n 1 : un cadavre est allong enbout dune table leve, pour que les jambespendent librement, tous les muscles pri-articu-laires sont coups. La tte du fmur ne sabaissepas et reste applique la cavit cotylode. Lecontact nest donc pas d laction des muscles.

    Exprience n 2 : aprs avoir sectionn lesmuscles, la capsule et ses ligaments sont section-

    TABLEAU II. Rsultats au niveau du point T.

    Sujets CT(mm)CTt

    (mm)CTtCT

    (mm)dT

    (mm) % T

    1 31,5 40 8,5 4 212 %

    2 30 30 0 5 0 %

    3 32 34 2 4,5 44 %

    4 30,5 32 1,5 3 50 %

    5 31,5 33 1,5 5 30 %

    6 35 39 4 6 66 %

    7 35 36 1 4,5 22 %

    8 28,5 31,5 3 4 75 %

    9 30 31,5 1,5 4 37,5 %

    10 28,5 31 2,5 4 62,5

    Moyenne 2,55 59,9 %

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  • Ann. Kinsithr., 2000, t. 27, n 1 33

    ns circulairement. Le poids du membre devraitsparer les deux surfaces articulaires or ce nestpas le cas. Donc le contact nest pas d aux l-ments capsulo-ligamentaires.

    Exprience n 3 : le contact nest pas d larsitance du bourrelet cotylodien, pour ledmontrer, les frres Weber pratiquent un ori-fice sur larrire-fond du cotyle. Ds que lairpntre dans la cavit par cet orifice, la ttefmorale tombe.

    Exprience n 4 : un trou tant pratiqu danslarrire fond du cotyle, et donnant accs lair,le membre infrieur tombe automatiquement.Si lon rintroduit la tte de manire expulserlair qui avait pntr, et si on applique la pulpedu doigt sur lorifice les deux surfaces restentcontigus ; chaque fois que lon te la pulpedu doigt, le membre tombe. Cette dernireexprience atteste que la pression atmosphri-que prside aux rapports de coaptation des sur-faces articulaires.

    Ses successeurs Poirier [4], Testut [6], Rou-vire [7] ont repris avec plus ou moins de dtailsla description de ces expriences jusqu la cari-cature de Kapandji [8] qui compare la hancheaux hmisphres de Magdebourg. Cette exp-rience du physicien Otto de Guericke en 1654est bien dcrite par Giraudet [9]. Seize chevaux,huit agissant en action et les huit autres en rac-tion, nont pu vaincre les 5 190 kg de la pressionatmosphrique sexerant sur les deux hmi-sphres entre lesquels le vide avait t fait.Cette caricature est certes didactique mais sanscommune mesure avec la suite des travaux desWeber dcrite par Sappey [5] et oublie par lesauteurs suivants. En effet les frres Weber onttir de leurs expriences une conclusion quivalue la force de coaptation due la pesan-teur. Cette force pour eux quivaut unecolonne de mercure de 0,76 mtre de hauteurdont la base est gale la surface de contact dufmur et de los iliaque. Ils lvaluent 12 kgenviron. Cela semble accessible aux efforts detout kinsithrapeute et trs loin des inspara-bles hmisphres de Magdebourg.

    La lecture de Sappey [5] nous fait penser quecette force de 12 kg environ correspond laseule force de coaptation de la pression atmo-sphrique. Castaing [10] affirme lui, sans largu-

    menter, quil faut exercer une traction de22 kg pour pouvoir dcoller la tte fmorale delactabulum sur une hanche rduite ses seu-les surfaces articulaires.

    Toutes ces expriences sont ralises sur lecadavre. Par contre, les techniques de dcoapta-tion sont mises en uvre sur le vivant. In vivo cette force coaptatrice atmosphrique sajou-tent celles des structures capsulo-ligamentaireset musculaires. Les deux surfaces articulairesbaignent galement dans un milieu liquidien.

    Le Roux [2] qui a parfaitement talonn sesforces de traction sans dpasser 15 kg na puvaincre, pensons-nous, la pression atmosphri-que et le tonus musculaire. Hignet [1] exeraitune force non prcise et variable en fonctionde la corpulence du sujet. Elle devait tre aumoins gale la ntre, soit 20 kg environ.

    Une telle force sur un sujet suffisammentrelch est, nous lavons vu, dcoaptante. Eneffet, cette dcoaptation est objective laradio et la scopie dans neuf cas sur dix et defaon majeure dans trois cas. La technique sestavre sans rsultat dans un cas. Nous pensonsque cet chec vient dun manque de relche-ment musculaire.

    Par contre il nous semble que la dcoaptationmesure pourrait tre plus importante sil taitpossible de rduire le temps de latence entrelobservation de lcartement articulaire lascopie et la prise de clich radiographique.

    Limage radio nous a souvent du par rap-port la scopie, nous pensons quentre lemoment o la dcoaptation est vue, lordredonn, la radio prise, dinvitables phnomnesde bascules du bassin, de contractions musculai-res rflexes, de fatigue du thrapeute apparais-sent et minimisent lcart articulaire.

    Notre tude limite 10 sujets ne nous per-met pas dvaluer linfluence du poids, du sexe,de la taille, des sports pratiqus, de la laxit oude la rtraction des muscles pelvi-trochant-riens et droit fmoral. noter cependant quenous navons rencontr aucune rtraction cheznos dix sujets.

    Par contre, subjectivement, le relchementmusculaire nous semble primordial pour obte-nir un bon rsultat.

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    Dans ce travail seule la technique de tractiondans laxe du fmur avec une hanche 45 deflexion, une lgre abduction, une lgre rota-tion externe a t tudie, nous ne pouvons doncpas gnraliser dautres positions de dpart.

    Conclusion

    partir de la position de dpart choisie pource travail, la dcoaptation de larticulationcoxo-fmorale est possible chez le sujet jeunepour une traction de 20 kg environ dans laxedu fmur.

    Nous pensons avoir propos ici une procdureprcise de test et de mesures reproductibles pardautres qui pourraient sattacher tudier sys-tmatiquement les diffrentes positions utilisespour les dcoaptations de hanche chez le sujetjeune et sain ou reproduire notre techniquechez des sujets plus gs et/ou coxarthrosiques.

    Les auteurs remercient par avance le lecteur qui pourrait leur fournirla communication princeps des travaux des frres Weber ou au moinsles rfrences bibliographiques de cette communication.

    Rfrences

    [1] HIGNET R. La dcoaptation de larticulation coxo-fmorale.Ann Kinsithr 1993 ; 20 : 77-80.

    [2] LE ROUX P, DUPAS B. Dcompression ou dcoaptation delarticulation coxo-fmorale. Ann Kinsithr 1995 ; 22 : 233-4.

    [3] COUSSEMENT A. Le poumon normal, ses variantes et ses pi-ges. Paris : Arnette, 1984.

    [4] POIRIER A, CHARPY D, NICOLAS A, PRENANT A, JACQUESP. Trait danatomie humaine 2e d. tome 1 Paris :Masson, 1896 ; p. 771-729.

    [5] SAPPEY Ph. C. Trait danatomie descriptive 4e d. tome1 Paris : A. Delaye, E. Lecrosnier, 1888 ; p. 686-688.

    [6] TESTUT L. Trait danatomie humaine 3e d. tome 1 Paris : Doin, 1896 ; p. 554-556.

    [7] ROUVIERE H, CORDIER G, DELMAS A. Anatomie humainedescriptive et topographique 9e d. tome 2 Paris : Mas-son, 1962.

    [8] KAPANDJI I A. Physiologie articulaire 4e d. fascicule 2 Paris : Maloine, 1971.

    [9] GIRAUDET G. Biomcanique humaine applique la rdu-cation 1re d. Paris : Masson, 1976.

    [10] CASTAING J. Anatomie fonctionnelle de lappareil locomo-teur n 4 : La hanche. Paris : Vigot, 1979.

    ANALYSE DE LIVRE

    Douleurs et psychopathologies lies aux trau-matismes. E. FERRAGUT, P. COLSON, Masson1999, ISBN 2-225-83766-X.

    Cet ouvrage est un recueil darticles particulirement enri-chissants pour les quipes mdicales et paramdicales opsychologues, psychiatres et somaticiens illustrent par denombreux cas cliniques et une tude multicentrique linter-dpendance entre psych et soma. Ltude mesure limpactdun accompagnement psychologique dadultes hospitali-ss pour chirurgie cardiaque cancrologie, brlure : unerduction trs significative des complications est note(complications psychologiques : groupe contrle : 71 %,groupe suivi : 27 % ; complications somatiques : contrle :58 %, suivi : 27 %). Lefficacit de laccompagnement psy-chologique ralis chez ces patients est commente dans lesarticles suivants pour tudier les mesures de prventionque les quipes hospitalires peuvent instaurer pourrduire ces complications. Les auteurs soulignent, partirdexemples concrets, combien les soignants non formspeuvent ne pas dceler les troubles psychiques graves si lepatient ne se plaint pas (angoisses, comportement autodes-tructeur, dpression masque...) et dcrivent comment le

    patient sollicite de laide ou met en place des systmes dedfense psychique (dni, hyperactivit, refoulement...).

    Viennent ensuite trois articles o les auteurs somaticiensabordent successivement : la dimension relationnelle de tout acte thrapeutique :effet placebo major si le mdecin croit lefficacit dutraitement prescrit ; lvolution de la dtresse psychologique du grandbrl des urgences au centre de rducation ; lincidence de lorganisation des services de secours enFrance sur la qualit de la prise en compte de la dimen-sion psychologique lors des interventions en urgence.

    Enfin, deux articles abordent laspect psychosocial desphnomnes douloureux chroniques : qualit de vie etimpact de notre socit sur ces patients. En conclusion,vous dcouvrirez en lisant cet ouvrage des articles trsdivers qui ont tous pour objectif de nous rappeler quil esturgent en mdecine de sortir de la dichotomie psych-soma tant leur interdpendance est troite chez le patient.

    J. ANDR-VERT

    2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits rservs. - Document tlcharg le 18/02/2013 par PETITDANT Bernard Bernard (498360)