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I. Réflexions sur la notion de FLS : français langue seconde/français langue de scolarisation

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I. Réflexions sur la notion de FLS : français langue seconde/français

langue de scolarisation

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I. 1. Le français langue seconde

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L’expression de « français langue seconde » aurait été employée pour la première fois à la fin des années 1960 par des ministres africains lors d’une conférence internationale. On se situe alors dans les années qui suivent la décolonisation avec tous les problèmes didactiques qui émergent quant à la scolarisation dans langue de l’ancien colonisateur de populations alloglottes.

Cette expression sera employée de plus en plus fréquemment dans les années 1980 avant d’être popularisée en 1991 par Jean-Pierre Cuq qui l’utilise pour intituler l’ouvrage qu’il consacre à ce concept : Le français langue seconde. Origines d’une notion et implications didactiques (Hachette FLE).

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Voici la définition qu’il y en donne :

« Le français langue seconde est un concept ressortissant aux concepts de langue et de français. Sur chacune des aires où il trouve son application, c’est une langue de nature étrangère. Il se distingue des autres langues étrangères éventuellement présentes sur ces aires par ses valeurs statutaires, soit juridiquement, soit socialement, soit les deux et par le degré d’appropriation que la communauté qui l’utilise s’est octroyé ou revendique. Cette communauté est bi- ou plurilingue. La plupart de ses membres le sont aussi et le français joue dans leur développement psychologique, cognitif et informatif, conjointement avec une ou plusieurs autres langues, un rôle privilégié. » (p. 139)

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Comme on peut le voir, dans cette définition, l’accent est mis sur 3 aspects :

- la nature étrangère de la langue ;- le caractère variable du statut de cette langue ;- le rôle particulier de la langue seconde dans le développement mental de l’individu, à travers son comportement langagier.

Ce dernier point est important. En effet, si toute langue étrangère joue ce rôle, la langue seconde se trouve investie d’une responsabilité plus forte, surtout si elle se trouve être la langue des apprentissages scolaires.

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Pour illustrer la place occupée par le FLS comparativement au FLM et au FLE, Jean-Pierre Cuq s’appuie sur le schéma ci-dessous inspiré de la théorie des 3 cercles :

Cercle central = FLM

Cercle intermédiaire

= FLS

Cercle extérieur = FLE

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Si ce schéma a l’avantage d’être clair, il a l’inconvénient, comme l’a d’ailleurs bien souligné J.-P. Cuq, de laisser croire à une homogénéité des situations au sein de chacun des cercles considérés, ce qui ne reflète pas la réalité.

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En 1992, Ngalasso 1992 opte pour une définition basée sur des critères psycholinguistiques.

Il pose qu'une langue seconde est une langue étrangère « […] considérée, dans l'ordre d'acquisition et de maîtrise, comme se positionnant immédiatement après la langue maternelle, appelée pour cette raison langue première (L1), mais avant toute autre langue acquise ou apprise ultérieurement (L3, L4, etc.) »

Il ajoute que sur le plan social, « […] une langue seconde est une langue véhiculaire dans la communication ordinaire entre des locuteurs pratiquant par ailleurs des langues non compréhensibles ».

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En 1997, Bruno Maurer définit à propos de cette notion 3 axes de définitions :

- un axe politique : les pays de FLS seraient les pays de l’ex-« champ colonial » de la France, auxquels s’ajouteraient les pays adhérents à l’une des institutions de la francophonie. On trouverait ainsi dans cet ensemble des pays comme le Mali, le Liban ou encore la Roumanie ;

- Un axe sociolinguistique : il s’agit ici du rapport entretenu par le français avec les autres langues du pays. Le français peut y être seule langue officielle (Sénégal, Togo, etc.) ou partager un statut de co-officialité (Suisse, Belgique, etc.) Ailleurs (Liban, Maghreb, etc.), il n’a pas de statut d’officialité mais est considéré comme langue privilégiée ;

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- Un axe didactique : on s’intéresse alors au statut du français dans l’enseignement. Il peut être l’unique médium d’instruction (pour toute la population ou pour une partie d’entre elle, partager cette fonction avec une autre langue ou n’être qu’une matière.

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Michèle Verdelhan synthétisant les définitions de Cuq et de Maurer, propose la définition ci-dessous :

« Le français langue seconde est une langue non maternelle, c’est-à-dire apprise après la langue maternelle, mais qui, dans le pays considéré, a un statut particulier, lié à différentes causes : il est pratiqué par une partie de la population et il a une influence plus forte que d’autres langues sur le développement global de l’individu. Le trait « statut politique » est aussi à prendre en compte : langue officielle ou pas, langue privilégiée. […] Enfin, un trait fréquent quasi permanent, le lien peut-être le plus fort entre ces situations [de FLS], c’est que le français langue seconde est langue d’enseignement. »

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Plutôt que d’opposer le FLS ou FLE et au FLM, Michèle Verdelhan préfère considérer que ces 3 notions partagent des points communs et qu’ils forment, de ce fait, un continuum du FLE au FLM avec toutes les nuances possibles :

depuis le pur FLE (le français au Japon)

au FLS presque FLE, lorsque l’environnement immédiat n’est pas francophone et que la langue officielle est lointaine (villages de brousse en Afrique)

à du FLS presque FLM (enfants issus de l’immigra-tion)

au FLM classique

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Pour Daniel Véronique, les situations de FLE diffèrent des situations de FLS par :

- des différences d’exposition des apprenants à la langue cible (usages hors de la classe, accès à des médias francophones etc.) ;- des différences de situation d’emploi de la langue enseignée hors des situations d’enseignement ;- des différences de finalités des enseignements dispensés et par les attentes différentes des apprenants ;- la définition des formes linguistiques recevables (les normes).

Source : Daniel Véronique, Diffusion du français : enjeux sociolinguistiques et didactiques (Cours de Master à l’université d’Aix-en-Provence)

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Quelques traits propres au FLS, selon Daniel Véronique :

1. L’importance attribuée à la langue écrite et à la littérature d’expression française ;2. La question des formes recevables, des normes dans le domaine lexical tout autant que dans le domaine grammatical ;3. Une prégnance du modèle de la grammatisation (socle grammatical scolaire et terminologie grammaticale) telle qu’elle a été mise en place dans l’école élémentaire française et telle qu’elle a été exportée dans l’école coloniale, l’ancêtre de beaucoup de systèmes d’enseignement de français, langue seconde ;

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4. Il convient d’ajouter que nombre de programmes des systèmes scolaires africains francophones ne semblent être que la copie d’instructions officielles qui n’ont plus cours en France ;5. Une pédagogie de grands groupes ;

Source : Daniel Véronique, Diffusion du français : enjeux sociolinguistiques et didactiques (Cours de Master à l’université d’Aix-en-Provence)

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I. 2. Du français langue seconde au français langue de scolarisation

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Deux chercheurs ont contribué à populariser la notion de « français langue de scolarisation » : Gérard Vigner et Michèle Verdelhan, les deux auteurs insistant sur le fait que l’une des caractéristiques essentielles du FLS tient au fait que le français, dans les contextes étiquetés FLS comme l’Afrique francophone, est « d’abord la langue de l’écolier, langue apprise et enseignée en situation scolaire ». (Vigner, 1989) Le français, écrit encore G. Vigner, y est non seulement une langue d’information mais également une langue de « communication spécifique au milieu scolaire ».

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- Elle est d’abord matière d’enseignement ; - Elle est médium d’instruction : elle joue un rôle de

médiation par rapport à d’autres champs de savoir. Ce rôle de vecteur étend l’usage de la langue à tous les secteurs de l’enseignement ;

- Langue à travers laquelle se réalisent les apprentissages scolaires, la langue de scolarisation conditionne l’insertion dans le système et la réussite scolaire.

Michèle Verdelhan, dans son ouvrage Le français de scolarisation. Pour une didactique réaliste, paru en 2002, popularise la notion de « français langue de scolarisation ».

La langue de scolarisation, souligne-t-elle, occupe un triple rôle :

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• Visée d’apprentissage d’un code différent ;

• Visée de la structuration de la pensée et des connaissances ;

• Visée des apprentissages fondamentaux oraux et écrits (lire, écrire) ;

• Visée de réussite sociale ;

• Visée de formation et d’intégration citoyenne.

Les principaux paramètres de la fonction de scolarisation, selon Michèle Verdelhan :

Dans le cas de pays comme Madagascar, appliquant une politiques linguistique éducative de type bilingue, la langue seconde partage avec l’autre langue les fonctions liées à la langue de scolarisation.

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- Les élèves en situation d’immigration scolarisés en sein de structures pour enfants non-francophones : les CLIN et les CLA ;

- Les élèves vivant dans un contexte multilingue qui sont scolarisés au sein du système scolaire français (situation de la plupart des DOM-TOM) ;

- Les élèves vivant dans des pays où la langue d’origine est enseignée mais où le français est introduit à un moment donné de la scolarisation (c’est le cas de Madagascar) ;

- Les élèves vivant en contexte exolingue, non francophone d’origine, mais qui, pour tout (établissements français à l’étranger) ou partie (lycées bilingues), accomplissent leur scolarité en français (Pays d’Europe centrale, Vietnam) ;

- Les élèves qui vivent dans des pays multilingues mais qui effectuent la totalité de leur scolarité en français (Afrique noire).

En 2001, dans son ouvrage Enseigner le français comme langue seconde, Gérard Vigner établit une typologie des populations d’élèves pour lesquels le français peut être considéré comme une langue de scolarisation. Il distingue ainsi 5 situations :

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Par rapport à l’exposition en français à laquelle ces élèves sont soumis, G. Vigner établit une distinction entre :

- ceux qui vivent dans un contexte où le français, étant utilisé à des degrés divers, étant présent dans leur environnement, assure à l’élève une expérience non scolaire intense de la langue (cas des élèves en CLIN/CLA, cas des DOM-TOM) ;- ceux qui vivent dans des pays dits francophones, mais où les pratiques du français sont limitées à des milieux ou à des usages précis (Maghreb, Afrique noire, océan indien) ;- ceux qui vivent dans un milieu totalement exolingue et qui ont une pratique essentiellement scolaire (établissements français à l’étranger, régions reculées de l’Afrique : situation dans laquelle se retrouvent la majorité des petits Malgaches).

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Quels que soient les cas de figures envisagés, les élèves pour lesquels le français est une langue de scolarisation partagent les mêmes caractéristiques. Il s’agit, explique G. Vigner :

- de publics d’élèves qui disposent à l’origine d’une compétence, native ou acquise, dans une ou plusieurs langues, autre(s) que la langue française ; - d’élèves pour lesquels ces langues, et les cultures qui y sont associées, restent constamment présentes et pratiquées dans leur vie sociale, familiale et souvent scolaire.

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On a par ailleurs affaire à des situations dans lesquelles :

- les usages du français dépassent une visée exolingue classique et sont intégrés au cursus général de l’élève ;

- une introduction généralement précoce de la L2 est entreprise à l’école élémentaire, voire maternelle.

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I. 3. Spécificités de l’approche pédagogique en FLS

par rapport au FLE et au FLM

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Si le FLM et le FLE qui sont deux domaines constitués, caractérisés par des approches pédagogiques distinctes et reconnaissables, tel n’est pas le cas du FLS qui a un statut composite. Bruno Maurer souligne ainsi que,

« méthodologiquement, il apparaît que la didactique du FLS n’a pas de spécificité bien marquée, empruntant au FLE pour les premières années de l’apprentissage puis au FLM pour les années suivantes. »

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Une démarche calquée sur l’approche en FLE, ou plus généralement sur celle préconisée aujourd’hui pour l’enseignement/apprentissage précoces des LVE, semble effectivement intéressante pour les élèves les plus jeunes. Rappelons que l’objectif essentiel dans ce type d’approche est le développement d’une compétence de communication à travers des activités ludiques axées essentiellement sur une pratique orale de la langue. C’est également ce qui constitue les limites de cette didactique dès lors, comme c’est le cas en FLS, qu’il s’agit d’entrer dans l’écrit et de se servir de la langue cible pour la construction de savoirs transversaux. En FLE, écrit Michèle Verdelhan, « […] la formation méthodologique et scientifique, l’accès à l’écrit, l’éducation aux comportements scolaires ne sont pas prioritaires parce qu’ils ont été appris avant, dans une autre langue. » (p. 39)

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NON, si :OUI, si :

Faut-il commencer par les salutations et apprendre à dire « je m’appelle » puis à interroger l’autre sur son identité, ou à présenter un tiers ?

(Source : MAURER Bruno (2007) : De la pédagogie convergente à la didactique intégrée. Langues africaines-langue française, Paris, L’Harmattan.)

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l’on part d’une optique communicative classique

NON, si :OUI, si :

Faut-il commencer par les salutations et apprendre à dire « je m’appelle » puis à interroger l’autre sur son identité, ou à présenter un tiers ?

(Source : MAURER Bruno (2007) : De la pédagogie convergente à la didactique intégrée. Langues africaines-langue française, Paris, L’Harmattan.)

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l’on considère que l’enfant n’a pratiquement jamais l’occasion de se présenter en français

l’on part d’une optique communicative classique

NON, si :OUI, si :

Faut-il commencer par les salutations et apprendre à dire « je m’appelle » puis à interroger l’autre sur son identité, ou à présenter un tiers ?

(Source : MAURER Bruno (2007) : De la pédagogie convergente à la didactique intégrée. Langues africaines-langue française, Paris, L’Harmattan.)

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l’on considère que le sujet parlant a besoin de dire « je », et ce dans n’importe quelle langue

l’on considère que l’enfant n’a pratiquement jamais l’occasion de se présenter en français

l’on part d’une optique communicative classique

NON, si :OUI, si :

Faut-il commencer par les salutations et apprendre à dire « je m’appelle » puis à interroger l’autre sur son identité, ou à présenter un tiers ?

(Source : MAURER Bruno (2007) : De la pédagogie convergente à la didactique intégrée. Langues africaines-langue française, Paris, L’Harmattan.)

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l’on sait que dans sa famille le petit enfant n’est pas souvent autorisé à dire « je » et qu’il doit d’abord conquérir pleinement ce droit dans sa langue

l’on considère que le sujet parlant a besoin de dire « je », et ce dans n’importe quelle langue

l’on considère que l’enfant n’a pratiquement jamais l’occasion de se présenter en français

l’on part d’une optique communicative classique

NON, si :OUI, si :

Faut-il commencer par les salutations et apprendre à dire « je m’appelle » puis à interroger l’autre sur son identité, ou à présenter un tiers ?

(Source : MAURER Bruno (2007) : De la pédagogie convergente à la didactique intégrée. Langues africaines-langue française, Paris, L’Harmattan.)

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l’apprentissage du français l’autorise à adopter une position communicative entrant en conflit avec celle que sa famille lui assigne d’ordinaire

l’on sait que dans sa famille le petit enfant n’est pas souvent autorisé à dire « je » et qu’il doit d’abord conquérir pleinement ce droit dans sa langue

l’on considère que le sujet parlant a besoin de dire « je », et ce dans n’importe quelle langue

l’on considère que l’enfant n’a pratiquement jamais l’occasion de se présenter en français

l’on part d’une optique communicative classique

NON, si :OUI, si :

Faut-il commencer par les salutations et apprendre à dire « je m’appelle » puis à interroger l’autre sur son identité, ou à présenter un tiers ?

(Source : MAURER Bruno (2007) : De la pédagogie convergente à la didactique intégrée. Langues africaines-langue française, Paris, L’Harmattan.)

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« Le français doit […] d’abord être saisi dans sa fonction immédiate, celle de langue d’enseignement, associée à des usages référentiels du langage : il importe de préparer l’élève en compréhension puis en production à des usages du langage qui expliquent, qui informent, qui transmettent de l’information. »

« Ne pas enseigner le français mais du français, en somme. Partir des usages les plus attendus de cette langue pour l’enseignement de certaines matières et élargir progressivement à l’ensemble des situations où un citoyen africain aura à l’utiliser, en tant que langue officielle, langue de l’administration et souvent langue de travail dans le secteur formel. »

Source : MAURER Bruno (2007) : De la pédagogie convergente à la didactique intégrée. Langues africaines-langue française, Paris, L’Harmattan.

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Les méthodes communicatives : non transposables dans certaines sociétés ?

Le point de vue de Serge Léna relatif au contexte amérindien en Guyane

française

Source : LENA Serge (2002) : « Des enfants amérindiens à l’école française… », in Guaïana, n° 4, CRDP Cayenne.

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Des modes de communication différents d’une culture à l’autre

« On ne saurait trop souligner les dangers de l’illusion universaliste. Dans la conversation, les cultures amérindienne et française sont en complète opposition : en français, le chevauchement entre interlocuteurs, autorisé, traduit une hantise du silence, du vide de la conversation ; dans les sociétés amérindiennes, il y a des pauses entre les répliques, le silence est intégré à la conversation. »

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Des méthodes communicatives inadaptées

« Les fameux « speech acts » (actes de langage) ont servi de base à des méthodes d’enseignement des langues organisées autour de séquences dont les situations de communication sont supposées universelles, donc présentes sous la même forme et dotées du même sens dans toutes les cultures. […] Si l’on prend les premières séquences traditionnelles de ces méthodes [communicatives], on constate qu’en milieu amérindien, elles n’ont aucune pertinence ou heurtent violemment les normes de sociabilité :

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- Les modes de présentation de soi sont autres (les circonstances aussi) ;

- Donner des informations sur quelqu’un est rigoureusement interdit ;

- Donner ou demander certains renseignements relève souvent d’une curiosité déplacée ;

- Exprimer ses goûts et préférences face à autrui est également impoli ;

- Accepter/refuser : on ne refuse jamais directement, pour ne pas faire perdre la face à son interlocuteur et le mettre mal à l’aise ;

- Il en va de même pour dire à quelqu’un de faire quelque chose : donner un ordre n’est pas crédible, simplement ridicule. »

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Ce qu’en dit Michèle Verdehlan (2002) :

« On ne peut poser la diversité [des modes de pensée, des manières d’apprendre] comme un obstacle a priori, pour plusieurs raisons. Nul ne songe à nier qu’un individu ait la possibilité d’apprendre des champs de connaissances nouveaux, structurés de façons différente, avec des modes d’apprentissage différents. La formation permanente, étalée tout au long de la vie est justement fondée sur ce principe-là. […] Nul ne songera sans doute non plus à estimer comme nocif, en dehors des régimes totalitaires, le fait d’apprendre à penser autrement, à diversifier modes de raisonnement ou de comportement : comprendre qu’il existe d’autres manières d’appréhender le monde, d’organiser le temps et l’espace par exemple. Tout enfant est confronté à ce décalage avec ses pratiques personnelles liées à l’éducation familiale.

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On ne peut, au nom de la diversité des modes d’apprentissage, laisser un enfant, quel qu’il soit, dans son modèle d’origine : c’est la négation même de l’éducation. L’aboutissement nocif de cette théorie se voit dans l’attitude d’enseignants désemparés devant des enfants d’origine étrangère arrivant dans leur classe : « On ne peut rien leur apprendre, ils ne sont pas comme nous. […] Il apparaît en tout cas dangereux de poser comme un préalable méthodologique le constat de la divergence entre modalités culturelles d’apprentissage : cela conduit à l’immobilisme, à l’impuissance, au repli sur soi. »

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En FLS, à la différence du FLE, la compréhension orale doit permettre rapidement de répondre rapidement aux exigences du système scolaire.

L’accent sera mis sur la langue des consignes (par exemple « souligner », « encadrer », « entourer », etc.), la langue des disciplines, sur le lexique servant à décrire l’univers de la classe (ce que contient la trousse, etc), les objets que les élèves auront à manipuler quotidiennement

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En termes de fonctions communicatives, la priorité sera accordée aux actes de parole qui permettront à l’élève de se débrouiller au sein de la classe et d’entrer dans les apprentissages en étant capable d’interroger la maître s’il n’a pas compris, de répondre à ses questions, de comprendre une consigne écrite pour réaliser la tâche qu’on attend de lui, etc.

Dans une approche FLS, l’accent est moins mis sur la communication en elle-même que sur l’accès aux savoirs auquel est conditionnée la maîtrise de celle-ci.

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Travail de groupe : répertoriez les actes de parole nécessaires à des

élèves en contexte de FLS

Page 43: Cours L3 FLE - FLS / L.Puren

Saluer (les adultes, le groupe), remercier, accepter, refuser, s’excuser, etc.

Actes sociaux

Actes de langage de scolarisation (Maurer, 2007)

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Exprimer un besoin, demander : une autorisation, un objet, de l’aide, le nom d’une personne ou d’un objet, une information sur une personne ou d’un objet, ce qu’il faut faire, une précision sur ce qu’il faut faire, à quelqu’un de faire, une explication, etc.

Actes de demande

Saluer (les adultes, le groupe), remercier, accepter, refuser, s’excuser, etc.

Actes sociaux

Actes de langage de scolarisation (Maurer, 2007)

Page 45: Cours L3 FLE - FLS / L.Puren

Dire : qu’on sait/ne sait pas, qu’on n’est pas sûr de, qu’on ne comprend pas, etc.

Actes d’expression du degré de savoir

Exprimer un besoin, demander : une autorisation, un objet, de l’aide, le nom d’une personne ou d’un objet, une information sur une personne ou d’un objet, ce qu’il faut faire, une précision sur ce qu’il faut faire, à quelqu’un de faire, une explication, etc.

Actes de demande

Saluer (les adultes, le groupe), remercier, accepter, refuser, s’excuser, etc.

Actes sociaux

Actes de langage de scolarisation (Maurer, 2007)

Page 46: Cours L3 FLE - FLS / L.Puren

Se plaindre (du voisin, du bruit, de la chaleur…), dire sa joie, sa satisfaction, son plaisir, dire sa contrariété, son chagrin, exprimer un souhait, un désir, exprimer la douleur, etc.

Actes d’expression de l’affectivité

Dire : qu’on sait/ne sait pas , qu’on n’est pas sûr de, qu’on ne comprend pas, etc.

Actes d’expression du degré de savoir

Exprimer un besoin, demander : une autorisation, un objet, de l’aide, le nom d’une personne ou d’un objet, une information sur une personne ou d’un objet, ce qu’il faut faire, une précision sur ce qu’il faut faire, à quelqu’un de faire, une explication, etc.

Actes de demande

Saluer (les adultes, le groupe), remercier, accepter, refuser, s’excuser, etc.

Actes sociaux

Actes de langage de scolarisation (Maurer, 2007)

Page 47: Cours L3 FLE - FLS / L.Puren

Donner une information (sur soi, sa famille, le savoir scolaire, le monde, etc.), donner une explication, justifier, dire ce qu’on est en train de faire, ce qu’on a fait, ce qu’on va faire, etc.

Actes de réponse

Actes de langage de scolarisation (Maurer, 2007)

Page 48: Cours L3 FLE - FLS / L.Puren

Présenter un fait comme vrai/comme incertain, formuler une hypothèse, réfuter l’affirmation qu’un fait est vrai, annoncer un fait passé ou futur, etc.

Actes de présentation des faits

Donner une information (sur soi, sa famille, le savoir scolaire, le monde, etc.), donner une explication, justifier, dire ce qu’on est en train de faire, ce qu’on a fait, ce qu’on va faire, etc.

Actes de réponse

Actes de langage de scolarisation (Maurer, 2007)

Page 49: Cours L3 FLE - FLS / L.Puren

« Ces actes de langage pourraient constituer la base des premiers apprentissages oraux (et écrits) du français. Ils présentent un double avantage :

- Celui de permettre à l’enfant d’entrer dans le français en disant « je » ;

- Celui de ne pas « faire comme si » le français devait remplir toutes les fonctions sociales normalement dévolues à la L1, celles dans laquelle on fera le marché, on se présentera, on parlera de sa parenté, etc. »

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« Cette liste atteste du fait que l’on peut tout à fait garder une optique communicative, avec les activités et exercices qui s’y rapportent (jeux de rôle par exemple), tout en ciblant sur les seuls usages « authentiques » que l’élève va rencontrer, liés à l’univers de la classe et de la construction des savoirs.

Pour autant, nombre d’actes de langage peuvent ensuite être réinvestis dans des situations de communication non scolaires : il suffit de reprendre la liste ci-dessus pour le vérifier. »

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« Cette démarche est authentiquement communicative en ce sens qu’elle part des fonctions que l’apprenant doit utiliser en français.

Mais elle se démarque des propositions classiques du FLE, qui programment l’étude d’actes de langage très généraux (saluer, se présenter, demander le prix, etc.) qui ne sont pas ceux par lesquels on fera entrer les élèves dans la L2. L’élève partira d’un français pour l’école, orienté vers l’enseignement/ apprentissage mais il ne s’y trouvera pas confiné. Rapidement, il pourra aller vers des usages sociaux mais il n’est pas supposé présenter sa famille à la troisième semaine… en utilisant le possessif. »

Source : Maurer, 2007

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Dans les contextes de FLS, la priorité lors des premières années de scolarisation, doit être donnée à l’apprentissage de l’oral. Or l’oral, comme nous l’avons vu, est souvent le parent pauvre de l’école dans le Sud, axée essentiellement vers l’écrit (l’oral pratiqué étant en réalité de l’écrit oralisé).

En termes de compétences, il conviendrait, avant même de travailler la production orale, d’insister sur la compréhension orale. Comme le souligne M. Verdehlan (2002), « le premier besoin à l’école pour l’élève est bien de comprendre ce qu’on lui dit : explications, leçons, mais surtout ordres et consignes et aussi le fonctionnement général de la communication entre maîtres et élèves dans le groupe classe ».

L’importance de la compréhension orale

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De la même manière qu’il existe, en production orale, des actes de langage, M. Verdehlan propose, en compréhension orale, des « actes de compréhension » qu’elle propose de classifier dans la typologie suivante :

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L’acquisition de ces « actes de compréhension » implique la maîtrise d’un certain nombre de compétences dont M. Verdehlan la liste suivante :

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Pour une didactique intégrée des langues africaines et du français

Bruno Maurer (2007) se montre pour sa part favorable à ce qu’il appelle « une didactique intégrée des langues africaines et du français », exprimant ainsi le souhait que l’enseignement/apprentissage des deux langues (dans les systèmes bilingues) soit pensé de manière conjointe, chacun préparant et renforçant l’autre à son tour.

B. Maurer propose de s’appuyer sur le « déjà là », c’est-à-dire sur le vécu langagier de l’enfant dans sa ou ses langues premières. En développant chez lui des aptitudes métalinguistiques à travers l’analyse du fonctionnement de sa/ses langue(s) première(s), on pourrait appréhender de manière plus efficace la L2.

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Exemple d’une activité conçue dans le contexte malien

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