Cohésion des territoires · Nous connaissons parfaitement les efforts à fournir sur les dépenses...

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DANS L’ACTU P.3 • INTERVIEW DE CHARLES-ÉRIC LEMAIGNEN, PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE DES COMMUNAUTÉS DE FRANCE FOCUS P.6 • NANTES MÉTROPOLE ACCUEILLE LA 28 E CONVENTION DE L’ADCF DOSSIER P.12 • INTERVIEW DU PREMIER MINISTRE ÉDOUARD PHILIPPE DROIT P.24 • RÉORGANISATION DES SERVICES : LA SOLUTION TRANSITOIRE DES CONVENTIONS DE GESTION FINANCES P.25 • LES CHANTIERS FINANCIERS DE L’AUTOMNE TERRITOIRES P.26 • L’INNOVATION POUR FAIRE RAYONNER LE TERRITOIRE © Philippe TURPIN / Getty images DOSSIER P.12 C O N V E N T I O N D E L I N T E R C O M M U N A L I T É N U M É R O S P É C I A L Cohésion des territoires : pour une nouvelle feuille de route Spécial convention • N° 222 Mensuel édité par l’AdCF - www.adcf.org 5,50 E

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DANS L’ACTU P.3• INTERVIEW DE CHARLES-ÉRIC LEMAIGNEN,

PRÉSIDENT DE L’ASSEMBLÉE DES COMMUNAUTÉS DE FRANCE

FOCUS P.6• NANTES MÉTROPOLE ACCUEILLE

LA 28E CONVENTION DE L’ADCF

DOSSIER P.12• INTERVIEW DU PREMIER MINISTRE

ÉDOUARD PHILIPPE

DROIT P.24• RÉORGANISATION DES SERVICES : LA SOLUTION

TRANSITOIRE DES CONVENTIONS DE GESTION

FINANCES P.25• LES CHANTIERS FINANCIERS DE L’AUTOMNE

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Cohésion des territoires : pour une nouvelle feuille de route

Spécial convention • N° 222 • Mensuel édité par l’AdCF - www.adcf.org • 5,50 E

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« La volonté politique, l’innovation et l’expérimentation sont essentielles pour nos territoires »Charles-Éric Lemaignen revient dans cet entretien sur les trois années passées à la présidence de l’AdCF, sur les priorités de l’association au cours des prochains mois et sur les orientations du gouvernement annoncées lors de la Conférence nationale des territoires.

Lors de la prochaine assemblée générale de l’AdCF, qui se tiendra à Nantes le 4 octobre, le conseil d’administration de l’association sera renouvelé. Vous avez fait le choix de transmettre la présidence de l’AdCF à cette occasion. Pour quelles raisons ?L’explication est toute simple. À l’occasion de la récente transformation de la commu-nauté urbaine d’Orléans en métropole, j’en ai transmis la présidence au maire d’Or-léans, mon ami Olivier Carré. J’en avais pris l’engagement devant les élus de l’agglomé-ration et les Orléanais ; et j’ai pour principe

de respecter mes engagements. Je préserve néanmoins un mandat intercommunal et siègerai encore au bureau de la métropole. Je pourrai par conséquent préserver une implication active au sein de l’AdCF, à laquelle je suis profondément attaché. Mais il m’a semblé qu’il était impératif que notre association demeure conduite et incarnée par un président d’intercommunalité en exercice. J’en ai discuté avec mes collègues du conseil d’administration pour propo-ser une liste de renouvellement dont nous avons souhaité qu’elle soit conduite par Jean-Luc Rigaut, maire et président de la communauté d’agglomération d’Annecy. Avec Loïc Cauret, notre président délégué, nous nous sommes engagés pour accompa-gner notre futur président dans les années qui viennent. La liste qui sera présentée à notre assemblée générale le 4 octobre comprend à la fois des administrateurs sortants mais aussi des nouvelles person-nalités. Nous avons veillé à préserver nos grands équilibres associatifs (sensibilités politiques, diversité des territoires…) et à poursuivre nos efforts de féminisation. Les nouvelles règles de cumul des mandats, les effets des fusions de communautés… imposent des recompositions partielles. Si l’assemblée générale à venir confirme la nouvelle liste que nous proposons, nous aurons une très belle équipe pour les trois prochaines années. L’avenir et le dynamisme de l’AdCF me semblent plei-nement assurés.

Quel bilan dressez-vous des trois années passées à la présidence de l’AdCF ?Je n’oserais pas me lancer dans un bilan personnel. Il reviendra à d’autres de le faire. Mais je peux évoquer celui de l’association

dont j’aime à rappeler le caractère collé-gial. Avant de présider l’AdCF, j’ai été son vice-président en charge des questions fis-cales et financières durant près de 15 ans. Je sais combien j’ai pu travailler en toute confiance aux côtés de mes prédéces-seurs, Marc Censi puis Daniel Delaveau. J’espère avoir contribué à préserver cet esprit d’équipe qui marque nos travaux. La période 2014-2017 a été particulièrement soutenue avec l’intensité des chantiers de réforme qui nous ont mobilisés, tant lors des débats parlementaires que dans la phase de mise en œuvre. On retiendra les

lois Maptam et NOTRe mais aussi Alur, la loi de transition énergétique, les réformes financières et fiscales (révision des valeurs locatives, péré-quation…). L’AdCF a joué un rôle actif pour accompagner ses adhé-rents lors de l’élaboration des SDCI et des fusions, mais aussi préparer

les transferts de compétences. Les délais étaient très courts et je crois que nous avons pleinement joué notre rôle. Nous avons d’ailleurs reçu un prix des Acteurs publics pour ce travail.Un autre chantier m’a particulièrement tenu à cœur ces trois dernières années : c’est la suite donnée à nos engagements de Lille pour tendre vers un nouveau pacte ter-ritoires-entreprises. Nous avons consacré beaucoup de nos travaux aux questions éco-nomiques et considérablement renforcé nos

liens avec les fédérations professionnelles (Medef, Centre des jeunes dirigeants, Union

des industries et métiers de la métallurgie, Fédération nationale des travaux publics, Fédération française du bâtiment…), les réseaux consulaires, les acteurs de la créa-tion d’entreprise… C’était la priorité définie en 2014 pour le mandat et je pense que nous avançons bien sur ces sujets. Il faut continuer dans ce sens.J’aimerais mentionner tout particulière-ment notre nouvelle dimension régionale. Il y a deux ans, l’AdCF s’est dotée d’une stratégie ambitieuse de régionalisation. Des délégations ont été installées dans toutes les régions et commencent à monter en puissance. C’est clairement pour moi l’axe majeur de notre projet associatif à conforter d’ici 2020. Près d’une centaine de ren-contres régionales ont été organisées depuis  2014 et nos réseaux deviennent peu à peu des interlocuteurs privilégiés pour les exécutifs régionaux, mais aussi pour d’autres acteurs.Enfin, il faudrait aussi évoquer nos actions

de promotion du PLU intercommunal, notre montée en puissance dans les compé-

tences environnementales, le rapport remis au gou-vernement sur le dévelop-pement social, nos travaux sur l’investissement public, sur la mutualisation… Mais je ne peux dresser un bilan

exhaustif de nos activités tant les chantiers ont été nombreux. Et passionnants.

Comment voyez-vous l’avenir, notamment pour les trois prochaines années ?Lors de nos universités d’été de juin 2016, nos instances nationales ont considéré qu’il fallait désormais consolider notre organisation territoriale. Nous avions appelé à une « pause législative » : c’est notre mot d’ordre collectif de la conven-tion nationale de Strasbourg ; c’est le sens de l’adresse que nous avions transmise aux

candidats aux élections présidentielles au printemps dernier ; c’est aussi le fil conducteur de notre plate-forme de pro-positions remise au gouvernement durant

Charles-Éric LemaignenPrésident de l’Assemblée des communautés de France

L’AdCF a joué un rôle actif pour accompagner ses adhérents lors de l’élaboration des SDCI et des fusions

Les réseaux AdCF deviennent des interlocuteurs privilégiés pour les exécutifs régionaux

Le conseil d’administration de l’AdCF a appelé à une pause législative pour permettre de consolider l’organisation territoriale existante. / © AdCF

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La qualité du dialogue régions-communautés sera décisive pour juger de l’utilité des Sraddet

www.adcf.org • N° 222 • SPÉCIAL CONVENTION

DANS L’ACTU 3

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l’été, à l’occasion de la Conférence nationale des territoires. L’objectif de consolidation doit être décliné sous de multiples formes : périmètres, compétences, gouvernance, ressources humaines, finances, partena-riats avec les régions et les départements… Nos adhérents souhaitent aussi se consacrer à leurs politiques publiques, à leur projet de territoire, à leurs programmes d’inves-tissement. Beaucoup ont été très accaparés pendant deux ans par les fusions et leurs conséquences. Ils aspirent maintenant à autre chose, et notamment à se consacrer au développement territorial. De ce point de vue, la dynamique du rapprochement en cours avec les régions sur les questions économiques et leurs stratégies d’aména-gement est une opportunité à saisir.

Dans toutes les régions les SRDEII ont été réalisés, et à l’automne s’engage l’élaboration des Sraddet. Quel jugement portez-vous sur ces exercices ?Nous manquons encore de recul sur ces points. Les régions n’ont pas eu beaucoup de temps pour réaliser leurs schémas de développement économique, et le bilan est variable en termes de concertation et de résultat rédactionnel. Mais si l ’on préfère voir le verre à moitié plein, ce qui est plutôt ma nature, je crois qu’une dynamique nouvelle s’est engagée. La loi NOTRe a réellement clarifié les compé-tences dans le champ économique. Les schémas restent des documents d’inten-tion, assez généralistes à ce stade ; il faudra surtout regarder leurs modalités de mise en œuvre, notamment en termes de terri-torialisation. Il faut inventer une nouvelle contractualisation régions-communau-tés. C’est en cours dans de nombreuses régions. Je reste positif.Pour ce qui est des schémas régionaux d’aménagement du territoire (Sraddet), tout commence à l’automne. L’ambition est considérable et l’exercice difficile. Nous n’avions plus de réelle stratégie d’amé-nagement du territoire depuis 20 ans. La multiplication des schémas sectoriels aboutissait à des objectifs illisibles, peu portés politiquement. L’unification des multiples schémas est à cet égard une bonne chose ; l ’AdCF l ’avait d’ailleurs demandé en 2012. Il faudra maintenant voir ce que les régions feront de ces Sraddet et comment elles s’approprieront l’exer-cice. Utiliseront-elles leur capacité à fixer

des prescriptions ? Dans quels domaines ? Nous le verrons bien. Il ne faudrait pas que ces schémas rajoutent une couche supplé-mentaire de normes. Mais ils devraient pouvoir contribuer à l’adaptation de cer-taines orientations nationales, aujourd’hui trop uniformes. Ils peuvent fixer des règles collectives utiles pour limiter les concurrences ou les incohérences. Mais il faut les co-construire. C’est à travers la contractualisation et nos documents stra-tégiques locaux que les Sraddet prendront leur dimension opérationnelle. La qualité du dialogue régions-communautés sera décisive pour juger de l’utilité de ces nou-veaux outils.

Que pensez-vous des nouvelles orientations gouvernementales, annoncées lors de la Conférence nationale des territoires du 17 juillet ?Cette conférence a esquissé une nouvelle méthode de travail entre État et collectivi-tés. On ne peut qu’y souscrire et je l’ai dit au Premier ministre. L’AdCF va s’inscrire de manière constructive dans cet exercice. Il y a eu des annonces intéressantes sur les « pactes girondins », le déploiement du numérique, l’attention accordée aux villes moyennes et aux ruralités… Dans le même

temps, le dialogue État-collectivités est marqué par des engagements présidentiels très contraignants. La suppression annon-cée de la taxe d’habitation et les nouveaux efforts budgétaires demandés aux collec-tivités rendent de nombreuses équations ardues. Indirectement, nous allons subir les mesures budgétaires décidées sur de nom-breuses politiques publiques sectorielles. Les annonces relatives aux contrats aidés comme les gels de crédits sur la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) ou les ponctions budgétaires opérées sur les agences de l’eau ont des effets rétroactifs sur nos politiques locales. Attention à la méthode, la transparence et la concertation en amont sont indispensables pour rétablir un climat de confiance !Nous connaissons parfaitement les efforts à fournir sur les dépenses publiques, mais

les collectivités ont assumé près de la moitié des baisses de dépenses ces dernières années, alors qu’elles repré-sentent moins de 20 % de la dépense publique. Beaucoup sont au régime minceur, et les

mesures d’économie déjà prises ne sont pas reproductibles à l’infini. Dans ce contexte, nous apprécions le fait que le gouvernement n’ait pas décidé de manière unilatérale de nou-velles baisses de dotation. Il nous demande de nouvelles économies sur le quinquennat ; pourquoi pas, à la condition de se mettre d’accord sur la méthode, les scénarios et un montant réaliste qui nous permette de poursuivre nos efforts d’investissement. Pour une large part, nos capacités à réaliser des économies dépendront des décisions de l’État lui-même (normes, fiscalité natio-nale, dépenses contraintes…). La qualité du débat sera essentielle pour la réussite de la démarche.

Sur la taxe d’habitation, l ’AdCF conti-nuera d’exprimer son désaccord avec cette orientation. Car il n’est plus question de dégrèvements étendus mais de la suppres-sion pure et simple de l’impôt. Il va falloir retrouver environ 17 à 18 milliards d’euros de recettes fiscales pour compenser à terme cette suppression. La taxe d’habitation est certes injuste aujourd’hui, mais c’est essentiellement en raison de l’obsoles-cence des valeurs locatives. Or, ce chantier ne doit surtout pas être abandonné, car bien d’autres impôts reposent sur cette

assiette. Nous continuons de penser qu’il est parfaitement justifié de disposer d’un impôt résidentiel pour financer les ser-vices publics locaux. Ce type d’impôt existe dans la plupart des pays européens. Un barème, tenant compte des revenus et des capacités contributives, doit l’accompa-gner, mais il est souhaitable que chacun contribue, même sous forme symbolique. Plutôt que d’annoncer la suppression de la taxe d’habitation, je préférerais que l’on parle de sa refondation sur une base juste. S’agissant de la solution consistant à la remplacer dans les budgets communaux et intercom-munaux par la CSG, je vois mal la cohérence du dispositif. Il y aurait en revanche une logique à attribuer une part de CSG aux départements pour couvrir le financement des allocations de solidarité, et allouer l’intégralité des taxes foncières au bloc local.

Le gouvernement souhaite également engager une nouvelle politique de cohésion des territoires. Quel est votre regard sur ce sujet ?La terminologie change d’une législature à l’autre – compétitivité, égalité, cohésion – mais la préoccupation est la même. Et elle est légitime. Depuis plusieurs années, les inégalités territoriales s’accroissent. Laurent Davezies montre bien dans ses travaux que certains leviers qui ont contribué à réduire ces inégalités depuis les années 1970-1980 jouent moins aujourd’hui. Les différences de dynamisme et de richesses entre les régions demeurent, même si les fusions récentes les atténuent en apparence. Mais là où les inégalités se creusent le plus, c’est aux échelles infrarégionales, entre bassins de vie et d’emploi, souvent à l’intérieur d’une même aire urbaine.

Je ne suis pas du tout d’accord en revanche avec la lecture binaire, très en vogue, qui consiste à opposer les métropoles et la « France périphérique ». C’est beaucoup trop schématique. Il est vrai que certains types d’activités et d’emplois se polarisent dans les métropoles mais ces dernières ne sont pas que des concentrés de richesses. Plusieurs de nos métropoles ont même d’importantes difficultés sociales et éco-nomiques. Dans les métropoles, le « high tech » cohabite avec de véritables poches de pauvreté.

Il existe par ailleurs des espaces ruraux et des agglomérations moyennes en parfaite santé. La réalité, et toutes les études de l’AdCF le mettent en évidence, c’est que les disparités les plus fortes se situent à l ’ intérieur des différentes strates de collectivités ou de territoires. Cela est vrai aussi bien lorsque l’on raisonne en termes de développement économique, de revenus des ménages que de ressources

fiscales des collectivités. Nous constatons par ailleurs que certains territoires ont été beaucoup plus exposés que d’autres à la compétition internationale comme aux effets de la crise de 2007-2008. C’est particulièrement vrai dans le grand quart nord-est de la France.C’est pourquoi l’AdCF porte une attention particulière aux territoires productifs, et notamment à ceux qui n’ont pas une forte base d’emplois publics ou d’activités « résidentielles » pour amortir les chocs. En tout état de cause, nous plaidons pour la solidarité des territoires et la coopéra-tion. Nous sommes également favorables à la péréquation. Mais une politique de cohésion doit agir à la racine des problèmes en aidant l’ensemble des territoires à se développer ou faire face aux mutations. La volonté politique, l ’expérimentation et l’innovation sont essentielles pour nos territoires. Nous avons en France de belles réussites de reconversion. Aucun territoire n’est condamné.

Propos recueillis par la rédaction

Le dialogue État-collectivités est marqué par des engagements présidentiels très contraignants

L’AdCF continuera d’exprimer son désaccord avec la suppression de la taxe d’habitation

La suppression de la taxe d’habitation et les efforts budgétaires demandés aux intercommunalités marquent les nouvelles orientations gouvernementales. / © Altitude Drone / Shutterstock

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DANS L’ACTU4

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Nantes Métropole accueille la 28e convention de l’intercommunalitéCe sont près de 1 700 élus et cadres communautaires qui sont attendus à Nantes les 4, 5 et 6 octobre 2017 pour la 28e convention nationale de l’intercommunalité. Une édition placée cette année sous le signe des défis des solidarités villes-campagnes. Plénières, forums, ateliers, mais aussi points infos juridiques et rendez-vous régionaux se succéderont pour informer les participants, débattre et échanger autour de l’enjeu de la cohésion territoriale et de la façon dont celui-ci irrigue les compétences communautaires.

À cette occasion et comme chaque année, Intercommunalités propose à ses lecteurs de partir à la découverte du territoire d’accueil de la convention de l’AdCF. Johanna Rolland, présidente de Nantes Métropole, présente le projet de territoire nantais, la place de sa métropole dans son système régional ainsi que sa vision des défis de la cohésion territoriale. Philippe Grosvalet, président du conseil départemental de Loire-Atlantique et Bruno Retailleau, président du conseil régional des Pays de la Loire, reviennent chacun sur les dynamiques à l’œuvre sur leur territoire et les coopérations à développer entre échelons de collectivités. Enfin, ce Focus met l’accent sur trois politiques emblématiques conduites par Nantes Métropole.

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FOCUS NANTES MÉTROPOLE66

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« Je crois profondément à l’alliance des territoires »

Johanna Rolland préside la métropole de Nantes, territoire réunissant 24 communes et 630 000 habitants, qui accueille cette année la 28e convention de l’AdCF. Elle livre dans cette interview sa vision pour son territoire, le projet porté par les élus nantais ainsi que le rôle qu’occupe la métropole dans sa région.

Quel projet de territoire portez-vous pour la métropole de Nantes ?Nantes est une métropole dynamique, en mouvement, qui se réinvente sans cesse pour répondre aux nouveaux défis, qui invente un avenir singulier, ouvert sur le monde et qui puise dans ses racines. C’est ce cap qui guide notre projet de territoire.Cela passe en premier lieu par une capa-cité à se projeter dans le monde de demain, ce monde en mouvement, mais avec nos valeurs. Nous nous emparons ainsi des tran-sitions écologiques, numériques, pour en faire des atouts. Un exemple : nous dévelop-pons nos réseaux de chaleur, avec l’objec-tif que d’ici 2020, la moitié des logements sociaux à Nantes soient chauffés aux éner-gies renouvelables. C’est bon pour le climat et cela profite aux ménages, en particulier les plus modestes, en réduisant leur facture. C’est cela, s’emparer des transitions.Construire l’avenir, c’est aussi porter de grands projets. Nous développons de grands projets urbains dans tous les quartiers de la ville, avec par exemple le réaménage-ment du cœur métropolitain. Nous venons d’ouvrir notre nouveau musée d’arts, le plus grand musée ouvert en France en 2017,

et nous réalisons de grands équipements comme une nouvelle gare ou un nouveau CHU, véritable hôpital du XXIe siècle. Tout ceci se fait au bénéfice du développement économique et donc de l’emploi, objectif essentiel auquel nous travaillons en lien avec nos partenaires, publics et privés. Nous avons par exemple créé, avec la CCI, une agence économique et internationale à l’échelle de Nantes Saint-Nazaire.Une métropole qui se réinvente, c’est aussi une métropole qui sait sans cesse améliorer la qualité de vie. Oui, j’attache une très grande importance à la qualité de vie au quotidien. Parce que c’est une attente de nos concitoyens. Parce que c’est une des forces de Nantes, un des ressorts de son attractivité. Cela passe par le développe-ment de la nature en ville, et cela se traduit par une politique du logement ambitieuse (6 000 logements par an, 2 000 logements sociaux et 30 % de logements abordables) ou encore par des transports publics performants.Cette qualité de vie, elle se décline aussi dans les services apportés aux habitants, l ’attention au quotidien, la capacité à s’adapter aux temps de la vie dans une grande agglomération, avec, par exemple, des tramways supplémentaires chaque fin de soirée.

Et cette dynamique de territoire, j’en suis convaincue, n’est possible que grâce à une stratégie ambitieuse et concer-tée avec l ’ensemble des acteurs : nos 24 communes, bien sûr, avec lesquelles j’ai encore renforcé le dialogue inter-

communal dans le respect du rôle de chaque maire ; mais la réussite se construit aussi avec les acteurs économiques, asso-ciatifs et bien sûr les habitants. Je veux en particulier profondé-ment renouveler les pratiques démocratiques en associant ces

derniers à la réf lexion et à la décision, depuis les projets du quotidien jusqu’à la réf lexion globale sur l ’avenir de la métropole.

Comment pensez-vous la fonction de Nantes dans son territoire régional ?Naturellement, une métropole comme celle de Nantes, la sixième de France, a un rôle particulier à jouer, une responsabilité. Elle doit avoir une puissance d’entraînement, être en capacité de porter des équipements et des infrastructures qui irriguent le territoire.Pour autant, bien sûr, cette relation n’est pas à sens unique. J’ai coutume de dire qu’il n’y

a pas de région forte sans métropole forte, mais qu’il n’y a pas non plus de métropole forte sans région forte.Alors oui, Nantes doit s’inscrire dans son territoire en dialoguant et en travaillant avec l’ensemble de ses partenaires natu-rels. Le département et la région bien sûr,

mais aussi Saint-Nazaire et les quatre autres intercommunalités du pôle métro-politain Nantes Saint-Nazaire qui réunit 61 communes. Et, au-delà, avec les autres grandes villes de l’Ouest, Rennes, Angers et Brest, dans le cadre du pôle Loire-Bretagne, avec qui nous travaillons notamment sur les questions d’enseignement supérieur, de recherche et de mobilité.Car c’est cela, au fond, la fonc-tion de Nantes dans son ter-ritoire : être en situation d’impulser ou de participer à des coopérations qui nous rendent plus forts, qui confortent notre développement commun, qui nous per-mettent de mieux répondre, collectivement, aux besoins des acteurs de nos territoires et des habitants.

La 28e convention de l’intercommunalité est placée sous le signe de la solidarité ville-campagne. Comment percevez-vous cet enjeu sur la métropole ?Pour moi, il ne s’agit pas seulement de soli-darité, mais bel et bien de complémenta-rité. Je crois profondément à l’alliance des territoires. Je suis convaincue qu’il y a bien

une complémentarité dans la diversité entre les territoires urbains, périurbains et ruraux et qu’il faut les faire travailler de concert plutôt que d’exacer-ber leurs oppositions, souvent avec des arrière-pensées qui sont bien loin des intérêts de

ces territoires et de leurs habitants.Ce qui m’intéresse, c’est de déterminer comment territoires urbains, périurbains et ruraux peuvent progresser collectivement. Il y a de nombreux sujets sur lesquels des liens peuvent se tisser : les mobilités ; la culture, car les compagnies et les artistes

installés en ville peuvent irriguer les terri-toires environnants, non seulement en s’y produisant mais aussi en contribuant à y faire émerger d’autres expressions cultu-relles ; les questions alimentaires, bien sûr, sur lesquelles il existe une véritable communauté d’intérêt entre les villes et les territoires qui les entourent à construire des filières promouvant une alimentation saine et justement rémunérées au bénéfice de tous. Je le mesure d’ailleurs à Nantes où, lorsque la métropole investit pour son marché d’intérêt national, c’est au service de toute la filière agricole et agroalimentaire majeure à l’échelle des Pays de la Loire.

Une France à deux vitesses est régulièrement dénoncée. Comment voyez-vous la polémique entre métropoles qui gagnent et un monde rural à la traîne ?Je crois surtout que cette opposition a voca-tion à être dépassée. Toutes les métropoles ne sont pas uniformément dynamiques. Les métropoles connaissent également des enjeux forts en termes de cohésion sociale et de réduction des inégalités. Et nombre

de territoires ruraux font pour leur part preuve d’une grande vitalité.Si l’on s’en tient à cette opposition urbain/rural, on passe à côté d’une réalité essen-tielle, le fait qu’une part majeure de l’avenir de la France s’invente dans les territoires. Partout dans les territoires, il y a des talents, de l’énergie. Nos collectivités sont, par la diversité des talents, par les rencontres, les échanges et les synergies qui y naissent, l’endroit propice pour trouver des pistes innovantes, pour construire l’avenir. Elles sont le creuset des solutions justes, qui ne produisent pas de nouvelles fractures, qui n’accentuent pas les inégalités déjà si fortes à travers le monde ; des solutions porteuses d’espoir, qui constituent un levier pour le développement et l’emploi, un levier pour la qualité et le cadre de vie.C’est un message que nous devons porter auprès du gouvernement : ce dernier doit nous laisser plus de souplesse, ne pas nous enlever des moyens essentiels pour inven-ter et avancer. Je suis convaincue qu’une part de l’avenir de la France s’invente dans les territoires. Or, je dois admettre avoir quelques inquiétudes quand je mesure combien perdure une vision bien trop jacobine et centralisatrice. Il est plus que temps de faire enfin confiance aux terri-toires et à leurs habitants.

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Sixième métropole de France, Nantes parie sur la qualité de vie pour accroître son attractivité. / © thomathzac23 / Fotolia

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7FOCUS

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« Nous cultivons les coopérations »Quelle place occupe le département de Loire-Atlantique dans les solidarités à mettre en œuvre entre territoires ? Le point de vue de son président, Philippe Grosvalet.

La 28e convention de l’AdCF a pour thème « Les défis des solidarités villes-campagnes ». Diriez-vous que c’est un enjeu en Loire-Atlantique ?Il ne faut surtout pas opposer la ville à la campagne ; au contraire, l’enjeu est de faire valoir la diversité, de jouer sur les com-plémentarités et de mettre en œuvre les coopérations utiles et intelligentes. Notre responsabilité est de garantir à tous les citoyens un égal accès à un ensemble de

droits et de services, à l’emploi, au logement, aux transports, à la santé, l’éducation, la culture, les loisirs.La Loire-Atlantique est composite : métro-pole, territoires ruraux, littoral… c’est ce qui fait la force de notre département.

Cependant, au delà, les dernières élec-tions ont montré combien les fractures territoriales sont ancrées dans notre pays, et pas seulement sur le seul critère ville/campagne. Il ne faut pas se résigner à ce que se dessine une France à plusieurs vitesses.

Comment, selon vous, doit s’exprimer cette solidarité ?Être solidaire, c’est s’inspirer du souffle du Conseil national de la résistance :

« De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». En France, certains territoires par-ticipent pleinement à la crois-sance mondiale et en tirent les bénéfices, quand d’autres en sont partiellement exclus.Le partage des richesses doit

se faire à tous les niveaux. C’est l ’État qui, en premier lieu, doit être le garant des solidarités territoriales en ampli-fiant davantage les modes de péréqua-tion. À l ’ intérieur de ses frontières, le département joue pleinement son rôle de

redistribution des richesses entre ville et campagne et, a fortiori, entre métropoles et communes rurales.En ce sens, parier sur la fusion des com-pétences des départements sur le modèle « lyonnais » là où une métropole existe me paraît aller à rebours du principe même de solidarité. Les départements sont utiles parce qu’ils déploient, au sein de territoires parfois très contrastés, des politiques qui assurent une égalité de traitement entre les personnes. En Loire-Atlantique, qu’on vive à Nantes, dans le vignoble, au bord de la mer ou en Brière, les habitant∙e∙s peuvent revendiquer les mêmes droits et un accès comparable aux services de proximité.

Diriez-vous que les missions de votre conseil départemental changent du fait de la nouvelle carte et de l’évolution des compétences intercommunales ?La décentralisation est un mouvement per-manent, même s’il connaît régulièrement des à-coups plus ou moins heureux. Si le

périmètre des compétences évolue, les mis-sions du département demeurent, au fond, ce qu’elles étaient à leur création : assurer les solidarités sociales et territoriales.Nous avons toujours su nous adapter aux évolutions des autres collectivités. La fusion des communes, la montée en puissance des intercommunalités, la création des métro-poles sont de bonnes choses. Mais dans une démocratie, c’est l’élection qui confère la véritable légitimité. Tôt ou tard, il convien-dra que les représentant∙e∙s des métropoles soient élus au suffrage direct autour d’un projet, d’une orientation politique. C’est ce qui leur confèrera toute leur force.En Loire-Atlantique, nous cultivons les coopérations et le travail collectif, c’est ici une marque de territoire. C’est ce que j’appelle la triple alliance, entre les collec-tivités publiques, le monde économique et les citoyen∙ne∙s. C’est peut-être le principal atout de la Loire-Atlantique pour relever les défis économiques, sociaux et environ-nementaux de ce siècle.

Propos recueillis par la rédaction

« Je ne veux pas d’une région à deux vitesses »Par ses compétences en matière de développement économique mais également de lycées ou de transport, la région des Pays de la Loire constitue un maillon essentiel de cohésion territoriale. Explications par son président Bruno Retailleau.

Les régions ont élaboré leur schéma de développement économique (SRDEII). Quelles sont les priorités des Pays de la Loire ?Avant d’être un ensemble d’actions, ce schéma est d’abord une vision du rôle éco-nomique de la région : être non pas un pres-cripteur car les entreprises n’ont pas besoin qu’on leur dise comment agir, mais un facili-tateur et un simplificateur. C’est la première exigence que nous nous sommes fixée en rendant plus lisibles les dispositifs écono-miques régionaux, en créant un « contrat de croissance » permettant d’accompa-gner les entreprises à chaque étape de leur développement. Simplification donc, mais innovation également afin de permettre aux PME de bénéficier pleinement des grandes mutations technologiques. Nous avons ainsi lancé un plan pour favoriser la robotisation des PMI. L’internationalisation des entre-prises est également un des piliers de notre nouvelle stratégie économique : plutôt que de maintenir des bureaux coûteux à l’étran-ger, nous avons mis en place avec Business France un système inédit d’envoyés spéciaux dans des zones de fortes opportunités pour l’économie ligérienne.

Qu’attendez-vous des communautés dans la mise en œuvre des stratégies régionales en matière économique ?Cette nouvelle stratégie économique, nous l’avons pensée avec les communautés.

C’était pour nous une nécessité. D’abord parce qu’avec la réforme territoriale, le couple région-intercommunalité est désormais en première ligne en matière d’emploi et de développement économique ; mais aussi parce que pour créer de l’emploi

local, il faut aider les entreprises là où elles se trouvent. Nous avons donc construit une relation d’étroite coopération entre le niveau intercommunal et le niveau régional, en coordonnant par exemple le travail des développeurs territoriaux et des développeurs régionaux. Concernant ces derniers, nous avons souhaité que les anciens salariés des comités d’expansion ou des agences départementales qui, depuis la loi NOTRe, ont été rattachés à la région ne soient pas détachés de leurs territoires mais restent présents sur les bassins d’emploi, au contact des entreprises comme des intercommunalités.

Diriez-vous que la région a un rôle à jouer sur le thème de la solidarité entre les territoires ?Oui, naturellement. Nos compétences sont étroitement liées au territoire : le

développement économique, la construc-tion et l ’entretien des lycées ou les infrastructures ferroviaires contribuent directement à l’équilibre territorial. Par ailleurs, l’enjeu majeur aujourd’hui, c’est de réduire la fracture géographique, celle qui

sépare la France des métropoles et des grandes agglomérations de la France « périphérique », celle des espaces ruraux, des communes périurbaines et des villes moyennes. Je ne veux pas d’une région à deux vitesses,

d’une action régionale qui ne profiterait qu’aux grands centres urbains. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en

place un pacte régional pour la ruralité qui permet de soutenir les projets des petites communes, de favoriser leur désenclave-ment et leur vitalité. La ruralité, c’est ce que la France a en plus. C’est une part de notre identité autant que de notre attrac-tivité. Mais une chose est sûre : nous ne parviendrons à réduire la fracture terri-toriale qu’en nous appuyant sur les élus dans les territoires, pas en complexifiant leurs missions et en leur demandant de faire toujours plus avec toujours moins. Leur rôle est essentiel. Les élus locaux sont le cœur battant de notre démocratie nationale.

Propos recueillis par la rédaction

Philippe GrosvaletPrésident du conseil départemental de Loire-Atlantique view

Bruno RetailleauPrésident du conseil régional des Pays de la Loire view

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Dans une démocratie, c’est l’élection qui confère la véritable légitimité

Notre nouvelle stratégie économique, nous l’avons pensée avec les communautés

La région a mis en place un pacte pour la ruralité. / © Altitude Drone / Shutterstock

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La culture comme atoutVecteur de cohésion sociale sur un territoire qui en a fait une priorité, la culture est également (et résolument), pour Nantes Métropole, un argument clé pour tirer son épingle du jeu dans la concurrence exacerbée que se livrent aujourd’hui les territoires…

D epuis sa réouverture le 23  juin, plus de 100  000  personnes ont déjà découvert le « nouveau »

musée d’arts de Nantes, géré par Nantes Métropole. Après six ans de travaux, le site bénéficie d’un cadre rénové, agrandi et modernisé, qui permet de mieux valoriser les riches collections de cette institution nantaise, de la peinture à la vidéo, de la photographie à l’art contemporain…Conçu comme un lieu vivant et acces-sible, ce musée du XXIe siècle s’adapte aux rythmes de la métropole, avec notamment une nocturne hebdomadaire, propose des outils numériques qui facilitent la visite et permettent d’approfondir la découverte des œuvres, et développe une program-mation culturelle variée, susceptible

d’attirer un large public, les habitants du territoire comme les visiteurs de passage. Pour Johanna Rolland, maire de Nantes et

présidente de Nantes Métropole, « le musée d’arts combine l’excellence en proximité à une ambition de rayonnement national et international de notre métropole ».Depuis cet été, il contribue ainsi à l’attrac-tivité du territoire, à l’instar d’événements qui, en quelques éditions, se sont imposés comme des rendez-vous incontournables.

On pense évidemment au Voyage à Nantes, qui accueille chaque année depuis 2012, lors de sa manifestation estivale, plus de

600 000 visiteurs extérieurs. Tous viennent découvrir ce parcours transdisciplinaire d’une douzaine de kilomètres, jalonné d’œuvres artistiques, d’éléments patrimo-niaux remarquables, de trésors méconnus et de pépites insolites,

et enrichi en juillet-août d’une cinquan-taine de propositions culturelles au sens large, artistiques, culinaires, patrimoniales, environnementales ou encore industrielles.

« Une forme d’essaimage »Élément phare de la politique touristique, le Voyage à Nantes fédère aujourd’hui,

autour de son opérateur éponyme (délé-gation de service public), de nombreux partenaires qui l ’amènent à sortir des limites de la ville, explorer des communes voisines, parcourir le vignoble nantais et même descendre la Loire jusqu’à l’es-tuaire… « L’extension du Voyage à Nantes résulte d’une forme d’essaimage : sa réus-site donne envie à d’autres structures de s’y associer, ce qui lui confère plus d’envergure et de diversité », analyse Helga Sobota, directrice générale de la culture à Nantes Métropole et à la ville de Nantes.Un même élan profite à la Folle Journée de Nantes, portée à cinquante-cinquante par la ville et la métropole. Ce concept inédit autour de la musique classique connaît un succès tel que depuis 2015,

Un Wikipatrimoine sur la ville et la métropole verra le jour début 2018

Le dialogue citoyen au cœur de l’ADN nantaisRien qu’au cours de ces deux dernières années, quelque 60 démarches de participation ont été lancées sur la métropole nantaise en lien avec des projets du quotidien mais aussi des sujets stratégiques pour l’avenir du territoire, comme la transition énergétique, ainsi que de nombreuses politiques publiques, dont certaines émergentes comme les pratiques sportives libres dans l’espace public. Le dialogue citoyen est aujourd’hui partie prenante de la prise de décision.

Le dialogue citoyen est, depuis 25 ans, une « façon de faire » solidement ancrée dans les habitudes nantaises.

Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de Nantes Métropole, y a réaffirmé son attachement en manifes-tant sa volonté d’instaurer « une gou-vernance renouvelée et participative, fondée sur un dialogue constant entre élus et habitants ». Ce dialogue citoyen est aujourd’hui « référencé » et un proces-sus a été formalisé, qui s’applique à tous les projets de la ville et de la métropole, avec l’appui d’un service dédié.

La mission de cette équipe de six agents débute dans chaque cas par une évalua-tion, avec les élus et les techniciens, de la pertinence et de la faisabilité d’une démarche de participation. Si le feu vert est donné, le processus est initié. Première étape : le lancement d’un « mandat de participation », qui en fixe le cadre et le

contenu, et le recrutement des citoyens suivant des modalités variables selon le sujet (tirage au sort, appel à volontariat, médiation directe…). « Nous recherchons non pas la représentativité de la popu-lation mais une diversité de points de vue, d’usages et de non-usages en lien avec le projet », précise Sandra Rataud, codirectrice du pôle Dialogue citoyen, évaluation et prospective.

En toute transparenceL’élu concerné propose ensuite officielle-ment le mandat de participation au groupe

de citoyens constitué. « À travers ce document, qui stipule que leur production sera analysée, traitée et répondue, l’élu garantit aux participants la crédibilité et la sincérité de la démarche, souligne Sandra Rataud. Et sa transparence

puisque tous les avis, quels qu’ils soient, sont publiés sur Internet. »Un travail s’engage alors avec les techniciens et/ou des prestataires extérieurs selon les besoins, à l’issue duquel les participants doivent produire un « avis citoyen », des pré-conisations qui sont présentées et remises à l’élu en personne. « Nombre de démarches

participatives s’arrêtent là, note Sandra Rataud. La nôtre permet de réengager en interne un débat politique et technique. »Chacune des préconisations est en effet analysée par les agents concernés. Puis il revient à l’élu de statuer. « Le dialogue citoyen est conçu comme une aide à la déci-sion politique, rappelle Sandra Rataud. Il permet aux élus de disposer, en plus d’une expertise technique, d’une expertise d’usage, une expertise vécue et sensible du territoire. C’est un matériau précieux qui favorise des prises décisions plus justes et plus efficaces. »

Un droit de suiteL’élu rend enfin aux citoyens une réponse argumentée, dans laquelle ses choix sont

explicités et les actions retenues planifiées et budgétisées. Une réponse qui a valeur d’engagement et qui fait désormais l’objet d’un « droit de suite » : quelques mois plus tard, retour devant les citoyens pour exposer l’avancement de la feuille de route.Alors oui, générer un dialogue citoyen est long et coûteux. « Mais nous raison-nons plutôt à l’inverse : en termes de coût à ne pas faire de participation ! rectifie Sandra Rataud. Aujourd’hui, les citoyens sont demandeurs de dialogue, attentifs à la dépense de l’argent public, et leur contestation peut être très puissante et onéreuse pour une collectivité… C’est donc le rapport à la décision publique qui est en jeu. »

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Le dialogue citoyen favorise des prises de décision plus justes et plus efficaces

L’application Nantes&Co, dédiée au dialogue citoyen, permet à chaque habitant et/ou usager de s’exprimer. / © KiryuSan / Shutterstock / Epiceum

À Nantes, chaque « avis citoyen » est présenté à l’élu concerné, puis analysé par les agents. / © Robert Kneschke / Shutterstock

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La culture comme atoutdes concerts d’ouverture sont également organisés dans plusieurs communes de Nantes Métropole – 11 en 2016 – et que la formule a été reprise par plusieurs grandes villes du monde entier, de Tokyo au Japon à Ekaterinbourg en Russie.Les ingrédients de ces réussites ? « La volonté affirmée et partagée par les opérateurs de proposer aux spectateurs un décalage par rapport aux modalités traditionnelles de fréquentation de la chose artistique, avance Helga Sobota. Cette recherche de singularité et de créa-tivité fait naître des formes artistiques et culturelles très variées, qui permettent d’intéresser largement, voire d’interpeller les publics. »

Au cœur des projets urbainsL’innovation est une autre des caracté-ristiques de la culture nantaise, dans le

but de répondre aux nouvelles attentes du public. Cultures numériques, danse, patrimoine…, dans tous ces domaines,

une nouvelle offre est travaillée avec les acteurs concernés. Un Wikipatrimoine sur la ville et la métropole verra ainsi le jour début 2018, outil interactif entre les cher-cheurs et les habitants pour transmettre et partager les connaissances.L’innovation, ce sont aussi les croisements. Comme celui qui s’opère au sein du Pôle métropolitain de la culture scientifique, technique et industrielle en cours de

construction avec l’ensemble des acteurs culturels, associatifs, universitaires et les pôles de compétitivité concernés. L’objectif

est ici aussi de diffuser largement toutes sortes de connaissances scientifiques.Toutes ces démarches tendent à renforcer la présence de l’art et de la culture dans la vie des habitants, pour permettre au plus grand nombre d’y accéder. Une politique tarifaire

harmonisée et incitative a d’ailleurs été ins-taurée dans tous les équipements culturels métropolitains1 pour l’ensemble des habi-tants du territoire. Elle garantit notamment leur gratuité pour les écoles des communes membres de Nantes Métropole.L’art diffuse ainsi dans les villes, les quar-tiers et jusque dans les projets urbains. Nombreux sont en effet les sites en voie d’aménagement qui accueillent des

interventions artistiques ou culturelles. Ce fut le cas au début de l’été sur la car-rière de Chantenay, qui se transformera à l’horizon 2022 en un jardin extraordinaire (lire encadré). Ce le sera bientôt sur une ZAC en devenir à Rezé. « Ces interventions permettent souvent d’expérimenter de nou-velles formes d’expression culturelle mais aussi, grâce à des dispositifs de participa-tion, d’alimenter la réflexion autour du projet et de favoriser son appropriation par les habitants », souligne Helga Sobota. De la culture en toutes choses…

Marilyn Deret

1- Le musée d’arts, le musée du château des ducs de Bretagne, le musée Jules Verne, le muséum d’histoire naturelle, le planétarium et le Chronographe, nouveau centre d’interprétation du patrimoine archéologique.

Une politique tarifaire incitative a été instaurée dans tous les équipements culturels métropolitains

Vers une « métropole nature »Convaincues que la nature en ville est une très forte aspiration des habitants et une nécessité dans ce monde en transition, Nantes Métropole et ses 24 communes membres œuvrent conjointement pour dessiner la « métropole nature ». Une volonté en réponse à de multiples enjeux, qui engage différentes échelles et compétences sur le territoire tout en associant étroitement les habitants.

L’ ambition est partagée par les communes membres de Nantes Métropole, formalisée à travers le

plan local d’urbanisme métropolitain et soutenue par les habitants du territoire, qui aspirent à « plus de nature en ville, une meilleure qualité de vie et une réduction des nuisances et des pollutions », relèvent les élus métropolitains dans le projet d’aménage-ment et de développement durables (PADD).

L’objectif de « métropole nature » dépasse les seuls espaces verts de type parcs et jardins, le projet de territoire visant tout à la fois « à valoriser les espaces naturels, agricoles et boisés qui entourent l’espace urbanisé et à redévelopper sous toutes ses formes la nature en ville ». Sont ainsi inscrits des objectifs de création de parcs, jardins, squares, potagers urbains et de développement de la diversité des milieux, avec notamment la réalisation de forêts urbaines.

Reconquête au profit du végétalÀ Nantes, la ville aux 100 parcs et jardins – et bientôt 101 ! (lire encadré) – élue Capitale verte de l’Europe en 2013, le renforcement de la trame verte et bleue urbaine donne naissance au concept d’ « étoile verte », un grand parcours en forme d’étoile qui reliera à terme tous les espaces verts et les coulées vertes existants. Il contribuera également à conforter la mise en relation avec les grands espaces naturels de la métropole.Les aménagements de l’espace public se font par ailleurs dans un esprit de reconquête au profit du végétal, pour une ville moins minérale, à l’instar du projet Mercœur en centre-ville, face au château des ducs de

Bretagne : le réaménagement complet des douves vertes de Feydeau a permis de rega-gner sur les espaces minéraux 10 000 m² d’espaces verts complétés par un miroir d’eau, une aire de jeux et un plateau sportif. De quoi rendre ce lieu à nouveau attrac-tif pour un large public. La poursuite de l’aménagement de la promenade nantaise sur l’espace Feydeau Nord-Commerce intensifiera encore davantage l’ambition

végétale de la ville.Le grand projet de végétali-sation se décline également au niveau des quartiers – avec par exemple le déve-loppement des jardins collectifs – voire même des

rues, grâce notamment, au printemps, à la distribution de graines aux habitants qui souhaitent embellir leur cadre de vie. Un appel à projets citoyens a en outre été lancé sur la valorisation des friches vertes et la végétalisation des rues. Une façon d’associer les Nantais mais aussi de les responsabiliser dans l’essor et l’entretien de la nature en ville.

Des services municipaux en réseauDes pieds d’immeuble aux espaces de grande envergure, cette idée de « métropole nature » recouvre ainsi toutes les échelles, impliquant autant Nantes Métropole que ses communes membres. Chacune conserve ses compétences en la matière1, ce qui, afin de soutenir et d’amplifier la dynamique « verte », a conduit à la mise en réseau, avec l’appui de la métropole, des services municipaux des espaces verts. Lesquels se réunissent régulièrement pour partager leurs réflexions et leurs pratiques sur des sujets communs comme la gestion optimisée des espaces naturels, la réduc-tion des produits phytosanitaires – qui permet la réapparition progressive d’une

certaine flore urbaine – ou encore la plan-tation d’arbres (objectif : 1 000 de plus sur le mandat).« La notion de “métropole nature” associe différents périmètres d’action sur les échelles métropolitaine et municipales, souligne Nicolas Guillaume, directeur du département Territoires et proximité2 de Nantes Métropole. Mais elle croise aussi plusieurs enjeux en termes d’espaces publics, d’environnement, de biodiversité, d’adaptation au réchauffement climatique,

de qualité paysagère, d’attractivité terri-toriale, de santé publique, de mobilité ou encore de lien social. Au sein de chaque collectivité, de nombreuses politiques publiques et de nombreux services sont donc concernés. » MD

1- Espaces verts pour les communes ; espaces publics et environnement pour la métropole. 2- Qui regroupe les pôles de proximité et la direction de l’espace public de Nantes Métropole ainsi que le service des espaces verts de la ville de Nantes.

Le grand projet de végétalisation se décline également au niveau des quartiers

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Le jardin extraordinaire et son Arbre aux héronsPorté par la ville de Nantes et Nantes Métropole, c’est un projet majeur pour le territoire en termes d’attractivité et de visibilité à l’international : à l’horizon 2022, un jardin extraordinaire s’épanouira en bord de Loire, à l’entrée ouest de Nantes, dans la carrière Chantenay. Cette friche de 3,5 hectares accueillera une végétation inattendue dans la région, notamment des plantes méditerranéennes, et offrira aux visiteurs, les habitants comme les touristes, un magnifique espace de respiration et un remarquable point de vue sur le fleuve royal.Surtout, ce 101e jardin public nantais servira d’écrin à l’Arbre aux hérons, une nouvelle création monumentale des Machines de l’île. Cet arbre en acier de 50 mètres de diamètre et 35 mètres de hauteur sera surmonté de deux hérons géants et agrémenté de jardins suspendus. L’on pourra parcourir ses 22 branches et embarquer sous les ailes des oiseaux…Mêlant des ambitions urbaine, autour de la nature en ville, et artistique, à travers une offre audacieuse, le jardin extraordinaire et l’Arbre aux hérons pèseront par ailleurs dans la construction d’une nouvelle centralité métropolitaine au niveau de l’île de Nantes, du Bas-Chantenay et de Rezé.

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Repenser la cohésion territorialeNotre pays a beaucoup souffert des dix années de quasi-stagnation économique qui se sont écoulées. Des vulnérabilités sociales et territoriales multiformes sont apparues, qui mettent en tension notre modèle de cohésion. Pourtant, les capacités de rebond de nos territoires sont exceptionnelles.

E n consacrant le dossier spécial de ce numéro à la question de la cohésion territoriale, placée au cœur des nou-

velles priorités gouvernementales à travers la création d’un grand ministère dédié, Intercommunalités revient sur un sujet qui lui est cher. Depuis plusieurs années, certains conflits qui semblaient apaisés reviennent à la surface. D’élection en élec-tion, les signaux du malaise amplifient leur clignotement. Les inégalités territo-riales de développement semblent revenir en force depuis la crise de 2008-2009, et même depuis l’entrée dans l’euro. Au croissant dynamique du littoral atlantique, des axes de la Garonne et de la vallée du Rhône, s’opposent les régions du grand quart nord-est, mar-quées par l’héritage des anciennes industries, aux soldes migratoires moins favorables. À l’intérieur des régions, la nouvelle économie et les emplois associés profitent pour l ’ instant davantage aux grandes aires urbaines « métropolisées ». Mais celles-ci ne sont pas pour autant épargnées par les difficultés sociales et les ségrégations spatiales : le pouvoir d’achat est malmené

par les pressions foncières et les dépenses contraintes ; des quartiers entiers se pau-périsent, ici dans les banlieues, là dans les villes centres (notamment dans le Midi). Dans leur diversité, nos ruralités s’inquiètent du devenir de notre modèle agricole et des « usines à la campagne » qui ont longtemps approvisionné les grands donneurs d’ordre et nos cham-pions nationaux.

Repartir de nos atoutsDans sa forme récente, la mondialisation ne s’est pas montrée amicale avec tous les terri-toires. Gains et pertes ne se distribuent pas de manière homogène, comme le montrent les travaux consacrés aux bassins les plus

exposés à la concurrence internationale. Par ailleurs, ce sont les fermetures de services publics, la disparition des commerces de proximité, les pénuries de médecins, la disparition d’anciennes formes de socia-bilité rurale et urbaine (illustrée dans

La fin du village. Une histoire française de Jean-Pierre Le Goff)… qui avivent angoisses et ressentiments. Malgré la réalité de ces « fractures spa-tiales », creusées par dix années de sta-gnation économique, la France demeure pourtant un pays doté d’atouts incompa-rables pour rebondir. Des reconversions étonnantes ont été accomplies dans de nombreux bassins industriels. Combien d’espaces ruraux ont su inverser les soldes migratoires par leurs efforts opiniâtres de développement local ? Combien de villes ont su métamorphoser leur image de « belles endormies » d’autrefois ? De fait, nos politiques de cohésion territoriale doivent s’ancrer dans un diagnostic lucide mais s’interdire le défaitisme. Elles doivent mettre les territoires en capacité plutôt que sous perfusion. Enfin, ces politiques de cohésion doivent en finir avec la mise en concurrence permanente des territoires et des collectivités, au jeu à somme nulle (voire négative) dans lequel nous a entraînés une certaine forme de jacobinisme managérial.

La culture du contrat contre l’appel à projetsAvec la décentralisation de 1982-1983 est née la contractualisation qui a beaucoup

apporté. Celle-ci a hélas été grandement malmenée par les arbitrages budgétaires, sacrifiée au profit de grands programmes descendants (cf. le programme d’inves-tissements d’avenir) et des gels de crédits. C’est pourtant à partir d’une contractua-lisation refondée, et peut-être des « pactes girondins » annoncés par le chef de l’État,

que la politique de cohésion des territoires retrouvera son efficacité et sa lisibilité. Les pages qui suivent permettent d’iden-tifier quelques défis prioritaires à relever. Elles s’efforcent de dépasser les schémas simplificateurs et binaires opposant aux métropoles supposées « radieuses » les « périphéries » abandonnées. Plutôt qu’exa-cerber les conflits, elles préfèrent souligner les complémentarités de nos territoires, les solidarités et les entraides à organiser. Ce dossier ne vise néanmoins qu’à ouvrir des débats ; il se prolongera dans les pro-chaines éditions d’Intercommunalités.

Nicolas Portier

La mondialisation ne s’est pas montrée amicale avec tous les territoires

Nos politiques de cohésion doivent mettre les territoires en capacité plutôt que sous perfusion

Cohésion des territoires : pour une nouvelle feuille de route

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DOSSIER COHÉSION DES TERRITOIRES12

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« Nous devons tous travailler à redynamiser notre croissance nationale »

Au lendemain d’une Conférence nationale des territoires annonciatrice d’une nouvelle méthode de travail entre l’État et les collectivités, mais également d’annonces fortes en particulier concernant les finances publiques locales, Édouard Philippe revient sur les grandes orientations nationales en matière de cohésion des territoires.

Monsieur le Premier ministre, la cohésion des territoires est inscrite parmi les objectifs majeurs de votre gouvernement. Quels sont à vos yeux les principaux défis à relever ?À plusieurs reprises, le président de la République a souligné les risques de fracture qui menacent notre cohésion nationale et nos solidarités. La création du ministère de la Cohésion des territoires est une nouveauté au service d’une grande ambition. Avec les administrations et opérateurs placés sous sa tutelle, ce ministère confié à Jacques Mézard dispose d’importants leviers pour agir. Il est un interlocuteur privilégié pour les collectivités. Nos fragilités territoriales sont multiformes, aussi bien dans les quartiers urbains sensibles, dans la ruralité isolée que dans certains bassins d’emploi frappés par la désindustrialisation. Des signes de fragilité apparaissent dans de nombreuses

villes moyennes ou petites, sous l’effet de la dévitalisation commerciale de leurs centres, de fermetures de services publics ou d’entreprises.Nous voulons établir un diagnostic précis de la situation et repenser les modes d’in-tervention de l’État dans les territoires, à travers une contractualisation renouvelée. Cela fait partie de la feuille de route de la Conférence nationale des territoires. Le chef de l’État a parlé de « pactes girondins » avec les collectivités. Ce sont ces pactes que je souhaite mettre en musique.Il faudra aider en particulier les territoires les plus vulnérables, notamment ceux qui cumulent des difficultés sociales et une faible capacité financière des collectivités. Mais nous devons également conforter les pôles d’attractivité de nos économies régionales. Le gouvernement souhaite notamment s’appuyer sur les métropoles pour qu’elles jouent pleinement leur rôle d’entraînement, en matière de logement, de transports, de qualité de l’air, de cohésion sociale.

À travers la fusion des intercommunalités, de très nombreuses communautés sont désormais à la fois urbaines et rurales. Est-ce une opportunité pour repenser les solidarités villes-campagnes et l’organisation de nos services publics ?L’intercommunalité a en effet été profon-dément transformée par les fusions de l’an passé. Les situations sont encore différentes d’un territoire à l’autre, mais nous disposons de communautés plus fortes pour porter des projets de territoire ambitieux. Et l’une des

nouveautés a été ce rapprochement entre espaces ruraux ou périurbains et pôles urbains. Le mouvement est massif. Nous allons sans doute dépasser des clivages qui ont très longtemps marqué notre vie publique, et que ne connaissent pas avec la même vigueur nos voisins espagnols, anglais ou italiens. Nous allons raisonner

de plus en plus à l’échelle des bassins de vie. C’est ce qui comptera pour nos concitoyens, notamment en termes d’accès aux services et équipements publics, mais aussi en termes d’emploi, de loisirs, de commerce, etc. Les nouvelles intercommunalités seront une

bonne échelle pour organi-ser l’offre de services publics de proximité, celle du quoti-dien. Si l’élargissement des périmètres des intercommu-nalités a réduit sensiblement les écarts de richesses entre

elles, les disparités territoriales en leur sein n’ont pas pour autant disparu. Leur rôle de péréquation et de solidarité est très attendu.

Une légère reprise de la commande publique est constatée en 2017, après quatre années de baisses importantes. Comment conforter ce mouvement ? Quels appuis le gouvernement entend-il donner aux collectivités ?Dans le cadre du pacte de confiance que le gouvernement veut proposer aux col-lectivités et à leurs associations représen-tatives, nous voulons parvenir à infléchir l’évolution des dépenses publiques locales tout en préservant les capacités d’inves-tissement des collectivités. Nous sommes

parfaitement conscients du rôle qu’elles jouent dans l’équipement de notre pays et l’entretien de notre patrimoine public. Le grand plan d’investissement prévu par le président de la République au cours de ce quinquennat s’appuiera en partie sur elles, notamment en matière de transition numérique, de mobilités et de transition

écologique. Nos efforts de maîtrise doivent princi-palement se porter sur les dépenses de fonctionne-ment et d’intervention, ce qui n’interdit pas de réin-terroger nos priorités col-

lectives en matière d’investissement. Pour relancer l’investissement, les collectivités doivent disposer de capacités d’autofinan-cement, c’est-à-dire d’une épargne. Cela nécessite de ne pas relâcher les efforts sur les dépenses courantes.Il est vrai que l’évolution des dépenses locales a été en partie imputable, au cours des dix dernières années, à des décisions nationales ou à des évolutions mécaniques, comme les effets du glissement-vieillesse-tech-nicité (GVT). La Cour des comptes évalue cette part à 40 %. Nous souhaitons, au cours du quinquennat, réduire ces dépenses contraintes en agissant for-tement sur les normes et en étant très attentifs aux incidences budgétaires des décisions relatives à la fonction publique territoriale.Il reste que la trajectoire des dépenses locales dépend aussi des choix des élus et de leur gestion. Je constate d’ailleurs l’importance des efforts engagés depuis plusieurs années par les exécutifs en matière de mutualisation, de révision des organisations, de fusions de structures… L’inflexion très nette du rythme d’évolution des dépenses de fonctionnement atteste de leur engagement volontariste. Nous

souhaitons que ces efforts soient mainte-nus, car ils vont continuer à porter leurs fruits dans les prochaines années. Au lieu d’agir par la contrainte en baissant mas-sivement les dotations, nous proposons la stabilité. Mais en contrepartie, nous appelons à leur sens des responsabilités.

Les économies à nouveau demandées au secteur public local au cours du quinquennat ne risquent-elles pas de susciter un nouveau gel des projets dans les territoires ? Comment rassurer les élus ?Les efforts demandés aux collectivités sont étalés sur le quinquennat, et calculés par rapport aux évolutions tendancielles que connaîtraient nos dépenses publiques sans action volontariste.L’objectif de 13 milliards d’euros est certes ambitieux, mais il s’inscrit dans un pro-gramme d’économies de 80 milliards portant sur l’ensemble des administrations publiques. La répartition tient compte des

efforts déjà accomplis par les collectivités. Nous souhaitons qu’en 2022, les dépenses locales soient inférieures de 13 milliards à ce qu’elles auraient été en poursuivant les rythmes d’évolution antérieurs. Ce ne sont pas des coupes budgétaires brutales par rapport à leurs budgets actuels. En revanche, il faudra fortement freiner les rythmes des dernières années pour que le poids de nos dépenses publiques baisse dans notre création de richesse, à savoir le PIB.Nous devons tous travailler à redynamiser notre croissance nationale, ce qui passera par son ancrage dans nos territoires. Si cette croissance s’affermit, le poids de nos dépenses publiques baissera d’autant plus vite. Nous pourrons également profiter de la baisse de certaines dépenses d’intervention avec le retour à l’emploi. On le voit déjà en matière de RSA.Je souhaite convaincre les élus que notre objectif est soutenable et tient compte des efforts indiscutables déjà mis en œuvre. Nous connaissons en revanche des situations encore très disparates. Le groupe de travail mis en place, en lien avec les associations d’élus locaux, pour définir avec précision les objectifs et répartir les efforts entre col-lectivités nous remettra ses conclusions à l’automne. Nous considérons les collectivités comme des acteurs publics responsables, qui connaissent nos engagements européens et nos difficultés budgétaires. Un pacte est possible. Et surtout, nécessaire.

Propos recueillis par la rédaction

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Nous voulons repenser les modes d’intervention de l’État dans les territoires

Le rôle de péréquation et de solidarité des intercommunalités est très attendu

La trajectoire des dépenses locales dépend en partie des choix des élus et de leur gestion

Un diagnostic précis des fragilités territoriales permettra de guider l’action de l’État. / © Janis Smits / Fotolia

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13DOSSIER

Page 14: Cohésion des territoires · Nous connaissons parfaitement les efforts à fournir sur les dépenses publiques, mais les collectivités ont assumé près de la moitié des baisses

L’aménagement du territoire : une passion françaiseDepuis de nombreuses décennies, la France pense son aménagement territorial, confronte les modèles, les traduit dans des stratégies incarnées par des outils variés… avec une spécificité par rapport à ses voisins européens : un impératif de cohésion assumé.

L a France a la passion de l’aménage-ment de son territoire. Un simple survol aérien ou quelques moments

passés sur Google Earth mettent en évi-dence les efforts multiséculaires de « mise en valeur » qui ont présidé à son histoire : de la politique forestière et des premières villes nouvelles de la Renaissance au réseau de routes royales, de places fortes et de canaux construits durant le Grand Siècle, du maillage de chemins de fer des ingénieurs saint-simoniens de 1850 et de la politique d’équipement de la IIIe République (écoles, canalisations d’eau et d’assainissement, électrification…) jusqu’aux Trente Glorieuses modernisa-trices, nul autre pays n’a sans doute vécu son « aménagement », autant que la France, comme une épopée. Beaucoup voient dans la période des années 1960-1970 un supposé « âge d’or » de l ’aménage-ment, à travers l’expansion économique, les grands gestes de célèbres commis de l’État (Paul Delouvrier, Olivier Guichard, Philippe Lamour…), l ’industrialisation accélérée du pays, la modernisation des techniques agricoles, la construction de villes nouvelles… En réalité, avec la décen-tralisation et la libéralisation économique,

l’aménagement du territoire est simple-ment devenu plus polyphonique, moins centralisé et planifié d’en haut. Il a éga-lement intégré des contraintes nouvelles,

sociétales et environnementales, que ne connaissaient pas les préfets ou ingénieurs des Ponts d’autrefois.

Accompagner le développementL’aménagement du territoire doit aujour d’hui concilier beaucoup plus d’intérêts divergents, « ménager » les espaces aussi bien que les mettre en valeur, composer avec les habitants et les groupes sociaux

pour éviter le syndrome de Sivens ou Notre-Dame-des-Landes. Mais là où cer-tains déplorent la fin des « grands projets », d’autres rappellent que c’est aussi au titre de

l’aménagement du territoire que la France a progressivement pris en compte le souci écologique, en créant les agences de l’eau et le Conservatoire du littoral, les parcs naturels nationaux puis régionaux, les règles de protection de la montagne ou des sites classés… La préoccupation constante des « aménageurs » a éga-lement été d’accompagner le mouve-ment d’urbanisation, engagé avec retard dans notre pays, en l’orientant après-guerre vers un modèle polycentrique adossé à des « métropoles d’équilibre ».

Cohésion et solidaritésEnfin, la politique d’aménagement du territoire s’est chargée d’objectifs qui ne s’épuisent pas dans la seule planification spatiale des infrastructures ou du déve-loppement urbain. Le souci de cohésion nationale et de solidarité interrégionale s’est en effet manifesté dès les années 1950 dans l’effort de rééquilibrage des activités économiques, au profit du Grand Ouest dans un premier temps puis des régions ou bassins d’emploi les plus affectés par la

désindustrialisation (Lorraine, Nord-Pas-de-Calais) à partir des chocs pétroliers. La réduction des écarts régionaux de PIB (ou de revenus des ménages) et l’accompagnement des mutations économiques ont longtemps marqué les contrats de plan État-région.

De nouvelles dynamiquesDepuis 30 ans, ce souci de cohésion s’est en partie déplacé à des échelles plus

locales, à la suite des émeutes urbaines qui ont mis en évidence les problèmes

sociaux des quartiers dits « sensibles », ou dans des espaces ruraux en déprise sous l’effet de la transformation accélé-rée du modèle agricole. L’aménagement du territoire des années 1990-2000 est en quelque sorte venu réparer certaines erreurs des années 1950-1960. Polarisées par la politique de la ville (focalisée sur les quartiers sensibles) et les mesures centrées sur les espaces de plus faible densité, les politiques territoriales ont eu du mal à s’adapter aux nouvelles dynamiques spa-tiales, à la montée des interdépendances villes-campagnes, aux mouvements de métropolisation, à la croissance de la France périurbaine… Au demeurant, notre

pays a su dans l’ensemble préserver ses grands équi-libres régionaux, maîtriser et ordonner la croissance de la région parisienne, reconvertir ses bassins miniers ou sidérurgiques, valoriser ses littoraux et

ses montagnes, préserver des ruralités attractives, rénover ses quartiers urbains dégradés…Beaucoup reste à faire sans doute, mais la France a la chance de disposer d’une très forte cohésion territoriale au regard de ses voisins espagnols, britanniques, italiens ou belges. Il est toujours utile de l’avoir à l’esprit et d’en faire un atout majeur.

Nicolas Portier

Le souci de solidarité interrégionale s’est manifesté dès les années 1950

L’aménagement des années 1990-2000 est venu réparer certaines erreurs des années 1950-1960

La France a la chance de disposer d’une très forte cohésion territoriale au regard de ses voisins

Permettre le développement d’un territoire tout en protégeant la nature sont les deux enjeux à concilier en matière d’aménagement. / © Altitude Drone / Shutterstock

Des pactes État-métropoles comme outils de décentralisation et de cohésion territorialeAccompagner le développement des métropoles et leur rayonnement tout en renforçant leur rôle de moteurs de croissance et de vecteurs de cohésion

territoriale : telle est l’ambition que s’est donnée le gouvernement en signant, le 6 juillet 2016, un pacte État-métropoles. Envisagé comme étape à part entière de la réforme territoriale, ce dernier a été décliné sous la forme de pactes métropolitains d’innovation, signés par l’État et chacune des métropoles existantes. Ces pactes ont été dotés d’une enveloppe totale de 150 millions d’euros issue du Fonds de soutien à l’investissement local (FSIL). Ils comportent tous un volet centré sur les projets innovants des métropoles et un volet centré sur les projets de coopération avec les territoires voisins.

Ainsi Grenoble-Alpes Métropole a-t-elle inscrit au sein de son document des actions d’amélioration des liaisons avec les territoires voisins et un renforcement de la coopération avec les massifs et parcs naturels régionaux. Le pacte métropolitain lillois s’est de son côté engagé à soutenir l’élaboration du schéma de coopération transfrontalière. La métropole du Grand Nancy travaille quant à elle, dans le cadre du document, au renforcement des coopérations sur le périmètre du Scot Sud 54 en matière de tourisme, production agricole, métiers de l’artisanat et conditions de mobilité. Autre exemple : le contrat de réciprocité engagé entre Toulouse Métropole et le PETR Pays Portes de Gascogne sur le développement économique, l’offre touristique et culturelle et la mobilité.

Reste à mesurer le caractère réellement stratégique des actions listées, et surtout l’impact réel de ces pactes sur celles-ci, ainsi que la pérennité des montants alloués aux actions ciblées. Les contrats de ruralité ont montré leur hétérogénéité (voir Intercommunalités n° 218, p. 3), certains participant pleinement à la relance ou au soutien d’un projet de territoire avec des investissements stratégiques à la clé, d’autres se résumant à un catalogue d’actions microlocales. AP

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14 DOSSIER COHÉSION DES TERRITOIRES

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« Le schéma des deux France ne tient pas »Dans plusieurs de ses ouvrages, Pierre Veltz revient sur la tentation commune d’opposer métropoles riches et dynamiques et périphérie en déshérence. De son analyse des systèmes économiques ressort une vision plus nuancée

du territoire français, ainsi qu’une démonstration des atouts des territoires non métropolitains.

L’ affirmation des métropoles et la montée des intercommunalités sont les deux changements essentiels des

dernières décennies. Il est temps de les conso-lider, mais aussi de comprendre que ce sont deux mouvements complémentaires.L’espace dans lequel vivent les gens s’est dilaté. Les mobilités ont ouvert des espaces d’opportunité pour les services, le travail, la culture… Depuis la crise, les métropoles ont quant à elles renforcé leur rôle de locomotives du développement, en attirant une très forte part des créations nouvelles d’emplois privés.Les lois récentes ont reconnu ce fait métro-politain. Mais du même coup a surgi l’idée, déclinée sous des formes diverses, des deux France : celle des métropoles, bastion des élites qui iraient bien, et celle des périphéries, déclassées, délaissées. C’est une idée fausse et dangereuse.

Des inégalités territorialesQuatre remarques à ce sujet. Il est vrai que certains territoires peu denses vont mal, voire très mal. Même si ces territoires ont, comme partout, des atouts pour rebondir, ils doivent bénéficier de la solidarité nationale.Les territoires peu denses, « ruraux » ou non, connaissent des trajectoires extraordinai-rement variées, avec des contrastes parfois

marqués entre bassins de vie voisins. Il est simplement faux de dire qu’en moyenne ils vont plus mal que les grandes villes.La majorité des habitants des zones peu denses vivent aujourd’hui dans des inter-communalités sous influence métropoli-taine. Ils ont accès à des services publics et privés à peu près équivalents, moyennant bien sûr quelques déplacements.Enfin, si les métropoles régionales sont la « success-story » du territoire français depuis quelques décennies, certaines s’en tirent nettement mieux que d’autres.En résumé, le schéma des deux France ne tient pas. Même le lien entre les votes extrêmes et la faible densité dont les com-mentateurs nous ont abreuvés après les dernières élections ne résiste pas à l’ana-lyse. Cela ne veut pas dire qu’il n’y pas de zones et de populations en grande difficulté. Mais les inégalités traversent largement les territoires, et lorsqu’on fait les comptes, la grande majorité des pauvres en France vit dans les métropoles.

ComplémentaritésPour l’avenir, les relations interterritoriales sont un enjeu stratégique. De nombreux travaux ont insisté sur les retombées posi-tives de la vitalité des métropoles sur les

territoires qui les entourent. Mais cette vision a l’inconvénient de continuer à cliver les espaces. On pourrait dire les choses autre-ment : les territoires dits « sous influence » font partie de la métropole, tout simplement. La métropole du nord de l’Alsace n’est pas Strasbourg, c’est le Bas-Rhin. La plaine de l’Ain fait partie de la métropole lyonnaise. Notre vision est en retard sur l’intensité des échanges réels, et accorde un poids déme-suré à la variable « densité ».J’ajoute enfin que les modalités du déve-loppement économique ont profondément

changé. Les économies du cœur des métro-poles ont tendance à fonctionner dans des archipels intermétropolitains, nationaux et internationaux. Les territoires non métropo-litains peuvent quant à eux créer leur propre croissance, dès lors qu’ils sont capables de se mobiliser et qu’ils ouvrent aux entrepreneurs et aux salariés des champs d’opportunités suffisamment larges. Ce ne sont donc pas des relations de dépendance, de sous-trai-tance, de vassalité qu’il faut construire entre centres et périphéries, mais bien des relations de complémentarité et de codéveloppement.

Pierre VeltzSociologue et économiste, auteur de La société hyper-industrielle. Le nouveau capitaliste productif (éditions du Seuil)

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Les développements des métropoles et des territoires qui les entourent sont complémentaires. / © Natalia Lebedinskaia / Shutterstock

L E C N A S

D E V O S V I E S

D E P U I S

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A U C ΠU R50 ANS

D’ACTIO N SO CIALE ET CE N’EST

QUE LE DÉBUT…En 2017, le Cnas reste plus que jamais à vos côtés.

à tous, nous souhaitons une belle année !

1er organisme national d’action sociale, le CNAS propose, à vous comme à vos ayants droit, un choix toujours plus large de prestations pour votre logement, vos loisirs, votre famille, vos grands projets comme vos coups durs. 50 ans déjà et encore de belles histoires à raconter.

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15DOSSIER

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Politiques de cohésion territoriale : 6 défis à releverLe « malaise territorial » est aujourd’hui multiforme et n’épargne dans les faits aucun type d’espace. Nous l’illustrons ici à travers six défis identifiés par l’AdCF dans ses propositions remises au gouvernement à la suite de la Conférence nationale des territoires.

Faire face à la reprise des inégalités régionales

La récente fusion des régions a eu pour conséquence de réduire (en apparence statistique) les disparités interrégionales de PIB ou de revenus. Si l’on met de côté l’Île-de-France, la Corse et l’Outre-mer, les nouvelles régions ont des profils moins contrastés qu’auparavant. Cet effet de « moyennisation » masque au demeurant des dynamiques internes très inégales depuis la crise. Les effets de la récession de 2008-2009 ont eu des incidences hété-rogènes sur les territoires, frappant beau-coup plus fortement les régions et bassins manufacturiers. On peut parler de « chocs asymétriques » sur les économies régionales. Le cycle de convergence des revenus régio-naux (par habitant) auquel nous assistions depuis les années 1970-1980 est peut-être en voie de s’interrompre. Les contractions des services publics et la nature des nouvelles activités économiques enrayent le mouve-ment de diffusion des richesses. Le nouveau cycle économique dans lequel nous sommes entrés profite davantage aux grandes régions littorales qui combinent attractivité à la fois productive et résidentielle. Les régions d’ancienne tradition industrielle, comme les Hauts-de-France, le Grand Est et la Bourgogne-Franche-Comté, sont à la peine.

La crise urbaine n’est pas finie

Depuis le début des années 1980, la France vit avec la crise de ses quartiers urbains dits « sensibles ». La politique de la ville est née à la suite des émeutes des grands quartiers d’habitat social de l’après-guerre, conçus à l’origine comme des lieux de passage temporaire dans un parcours d’ascension

sociale, et qui sont devenus des quartiers à très forte concentration de ménages défavo-risés, le plus souvent issus de l’immigration. En 2005, l’embrasement des cités déclen-ché par le drame de Clichy a rappelé qu’un quart de siècle d’efforts n’avait pas résorbé les difficultés. Zones franches, contrats de ville, dispositifs d’éducation prioritaire,

programmes de rénovation urbaine… ont mobilisé des moyens considérables sans pourtant réduire la carte de la « géogra-phie prioritaire ». Les difficultés urbaines se sont en fait généralisées à de nombreux territoires. Loin d’être concentrées dans les « banlieues », elles marquent aujourd’hui les quartiers populaires de très nombreuses villes centres. En dehors des aggloméra-tions parisienne et lyonnaise, la majorité des contrats de ville de nouvelle génération concernent des quartiers situés dans les cœurs urbains. Le mal-logement, l’essor de nouvelles formes de précarité sociale, l’échec scolaire, le chômage de longue durée, les phénomènes de délinquance et d’insé-curité caractérisent de nombreux espaces urbains, au sein desquels s’accroissent les phénomènes de spécialisation sociale. La volonté d’agir désormais à l’échelle de l’agglomération pour repenser les diffé-rentes formes de mixité (scolaire, sociale, économique…) et les solidarités financières intercommunales est sans doute une vraie voie de progrès. La préoccupation première est d’enrayer les phénomènes d’enferme-ment de certains quartiers sur eux-mêmes, de veiller à leur désenclavement en matière de transports.

Ruralités : répondre aux nouvelles fragilités

À chaque quinquennat se pose avec acuité la question de l’avenir des espaces ruraux. De la loi relative au développement des territoires ruraux votée lors du second mandat de Jacques Chirac aux contrats de ruralité de ces derniers mois, en passant par les pôles d’excellence rurale, il serait excessif de parler d’oubli de la ruralité. Celle-ci demeure à l’agenda des politiques

d’aménagement du territoire et des discours publics. La question est celle de l’effica-cité des réponses proposées. Les recense-ments de 1999 et 2006 avaient apporté de bonnes surprises en mettant en exergue la nouvelle attractivité de nombreux ter-ritoires ruraux. La plupart d’entre eux ont connu des soldes migratoires positifs

avec l’installation de nouveaux ménages et l’implantation d’activités économiques liées au tourisme, à l’économie « présentielle » (commerces, services…) mais aussi aux secteurs productifs. De « nouvelles cam-pagnes » se dessinaient alors, même si la Datar soulignait les fortes différences de dynamisme entre les campagnes proches des villes et la ruralité isolée. Les vagues de fermetures des services publics au cours des années 2000 (justice, gendarmeries, bureaux de poste, hôpitaux…) et les chocs

subis par les secteurs productifs (agroa-limentaire, sous-traitance industrielle…) ont fragilisé nombre de territoires ruraux. Les commerces et services de proximité qui irriguaient l’économie résidentielle ont également beaucoup souffert de l’expansion des « drive » ou des grands centres commer-ciaux. Parmi les sujets les plus sensibles : la désertification médicale. Celle-ci ne frappe pas les seuls territoires ruraux mais elle y prend une dimension emblématique avec la disparition progressive de la figure du « médecin de campagne ». Si les maisons de santé apportent des réponses collectives au risque d’isolement des praticiens, elles ne peuvent compenser la très mauvaise gestion passée de la démographie médicale.

Numérique : des technologies aux usages

Même si le déploiement des technologies les plus performantes sur l’ensemble du terri-toire reste un défi majeur (THD, 4G…), la révolution des usages a déjà commencé, avec de profondes transformations des modes de vie. Pour les collectivités, les premiers enjeux seront ceux de l’e-administration et de l’ouverture des données publiques. Ils seront également ceux de l’intégration

des innovations numériques dans la gestion des services publics (télérelève, factura-tion en ligne, modèles prédictifs, objets connectés…). La dématérialisation devrait permettre l’optimisation de certains coûts et des réponses apportées (temps de réac-tion, horaires d’ouverture…) ; elle devrait également permettre de reformuler en profondeur la question de l’accessibilité aux services publics en affranchissant des contraintes de distance ou d’isolement (télémédecine…). Des opportunités nou-

velles seront à saisir avec le développement des plateformes collaboratives pour élargir les solutions de mobilité, l’offre culturelle, l’accès à l’enseigne-ment (MOOCs). L’essor du télé-travail et de l’imprimante 3D va interroger les logiques de locali-

sation des lieux d’emploi. Le numérique peut devenir un puissant outil de réduction des fractures spatiales. Dans le même temps, la transition numérique multiplie les trans-formations sociales et économiques, à un rythme et sous une forme qui peuvent être ressentis agressivement. La révolution de l’e-commerce déstabilise des trames com-merciales déjà fragilisées par la grande dis-tribution, impose de réorganiser les chaînes logistiques et les livraisons du « dernier kilomètre ». Les plateformes de réservation (Booking, Airbnb…) captent une part crois-sante des flux touristiques. Une véritable ingénierie du développement numérique, centrée tout autant sur les usages que sur les infrastructures, devra se mettre en place dans les territoires pour anticiper les mutations et les maîtriser. Les collec-tivités publiques joueront un rôle de tiers de confiance important pour prévenir les excès et les rejets.

Aider les bassins d’emploi les plus exposés aux mutations industrielles

Depuis dix ans, la France a connu une véri-table stagnation économique puisqu’elle a tardé à retrouver son PIB d’avant la crise.

Le développement de nouvelles technologies remet en question les logiques de localisation de l’emploi. / © frenky362 / Shutterstock

Si les territoires ruraux ont fait l’objet de politiques publiques spécifiques, certaines fragilités subsistent. / © FreeProd33 / Shutterstock

Les difficultés urbaines marquent les quartiers populaires de nombreuses villes centres

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16 DOSSIER COHÉSION DES TERRITOIRES

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Appels à projets : l’aménagement du territoire sur concours

Depuis le tournant des années 2000, les appels à projets sont devenus le mode opératoire privilégié de l’État et de ses agences dans leurs relations avec les collectivités locales. Sébastien Martin, président de la communauté d’agglomération du Grand Chalon et vice-président de l’AdCF en charge de l’aménagement du territoire, explique pourquoi cette évolution exacerbe les concurrences entre territoires au lieu de les apaiser.

E n ce début de législature marqué par la volonté de relancer une politique de cohésion territoriale et de répondre

aux fractures qui menacent, il convient de réinterroger les politiques nationales d’appels à projets qui ont fait florès depuis 20 ans. Du développement rural à la réno-vation urbaine, de la transition écologique aux pôles de compétitivité ou Idex/Labex, des maisons de santé aux maisons de ser-vices au public, des soutiens aux transports urbains aux politiques de « clusters »… le mode d’intervention privilégié de l’État est désormais le même : l’appel à projets.Utilisés avec parcimonie, notamment à

l’échelle locale entre des partenaires qui connaissent bien les réalités de terrain, les appels à projets peuvent jouer un rôle utile et dynamique. Mais alors qu’ils ne visaient à l’origine qu’à soutenir des expé-rimentations dans quelques domaines, les appels à projets nationaux sont devenus la norme systématique, sous l’influence des modes managériales anglo-saxonnes et des injonctions à l’excellence ou à l’innovation. Toute une ingénierie de l’appel à projets s’est de fait développée aussi bien du côté de l’État et de ses opérateurs que de celui des collectivités locales et des assistances à maîtrise d’ouvrage (bureaux conseils,

cabinets d’architectes…). Entre cahiers des charges, dossiers de candidature, réunions de jurys, phases de sélection et de notifi-cation aux territoires, la consommation de ressources administratives est consi-dérable. Le temps de l ’action publique se rallonge. Les politiques publiques se cloisonnent en silos.

Les territoires en compétitionEn toute logique, les collectivités déjà les mieux dotées en ressources (financières, moyens d’ingénierie, réputation…) tendent à occuper tous les podiums. Les appels à projets nationaux produisent en outre

une recentralisation parisienne des décisions, qui favorise les territoires disposant des meilleurs relais auprès des décideurs nationaux. Ils parti-cipent de cette nouvelle logique de « pilotage à distance » des territoires qui rompt avec les efforts de décon-centration des administrations de l’État poursuivis depuis des décen-

nies. Nos interlocuteurs préfectoraux ne font souvent que transmettre nos dossiers au niveau national, au mieux revêtus d’un avis technique.Disons-le donc avec force : une véritable politique nationale de cohésion des terri-toires ne saurait reposer sur la prolifération de ces mises en concurrence systématiques. Le temps est venu de concevoir des poli-tiques publiques inscrites dans les besoins concrets de nos territoires et de nos popu-lations. Il faut en finir avec ces courses sans fin auxquelles nous sommes tous tenus de nous soumettre pour bénéficier des sou-tiens financiers de l’État.

Des besoins aux priorités collectivesDans la logique des « pactes giron-dins » proposés par le chef de l’État et le Premier ministre en juillet dernier, il faut aujourd’hui plaider pour un renouveau profond de la contractualisation. Avec la réduction du nombre d’intercommunalités, et leur organisation à l’échelle des bassins de vie, celles-ci devraient être la bonne échelle d’analyse des besoins économiques,

sociaux et environnementaux de nos concitoyens et de nos territoires. À partir d’un diagnostic partagé avec l’ensemble des parties prenantes (services de l’État, agences, régions, départements…), nos priorités collectives apparaîtront suffi-samment vite pour adapter nos finance-ments publics et rendre nos politiques plus efficaces. Cela permettra aussi de ne plus oublier ceux qui peinent à s’inscrire dans les palmarès et les concours de beauté.

Pour les collectivités concernées, les compétitions et appels à projets entraînent une consommation de ressources administratives considérable. / © zenzen / Shutterstock

Une véritable politique de cohésion ne saurait reposer sur des mises en concurrence systématiques

Cette dernière a accéléré les mutations économiques perceptibles depuis les débuts des années 2000 et du passage à l’euro. En limitant les risques de change, certains secteurs économiques plutôt protégés jusque-là ont subi une concur-rence plus agressive. Les grands donneurs d’ordre ont revu leurs politiques d’achat. La consommation des ménages est restée assez dynamique, mais le tissu productif français a beaucoup souffert. Les travaux de Laurent Davezies sur les impacts terri-toriaux de la crise ont montré que ce sont les bassins de sous-traitance qui ont été les plus fragilisés. Depuis dix ans, les secteurs économiques créateurs nets d’emplois sont ceux liés au numérique et aux nouvelles technologies, plutôt concentrés dans les cœurs des grandes agglomérations, quand les secteurs plus traditionnels restent à la peine. Les territoires les plus fragiles sont aujourd’hui les bassins d’emploi les plus exposés à la concurrence internationale et en proportion les plus insérés dans

l’économie-monde. Contrairement aux idées reçues, il ne s’agit pas des métro-poles (qui disposent d’autres moteurs économiques importants avec les emplois publics et les services) mais des bassins de petites villes ou villes moyennes dont la part essentielle des revenus de leurs habi-tants provient des activités productives. Si certains de ces territoires ont très bien su résister à la crise et rebondir, d’autres sont en difficulté et méritent une très forte action de soutien des pouvoirs publics.

Sonner la reconquête des centres‑villes

Doit-on dire adieu à nos centres-villes ? Selon les enquêtes d’opinion, nos conci-toyens plébiscitent leurs centres-villes et s’inquiètent pour leur avenir. Le malaise et le sentiment d’abandon qui s’expriment dans une partie de la France dite « péri-phérique » sont liés à cette dévitalisation accélérée de nombre de cœurs urbains. Départ des enseignes commerciales, essor

des vacances et des friches, paupérisation de quartiers entiers, dégradation des espaces et services publics… se combinent pour

faire de ce sujet l ’un des défis territo-riaux majeurs des dix prochaines années. L’opinion publique et les médias accuseront sans doute les décideurs publics locaux d’impéritie. Mais la responsabilité est beau-coup plus collective tant les fragilisations des centres-villes résultent des nouveaux comportements de consommation et résidentiels. Certains choix ont certes été conscients et assumés par les collectivités, mais beaucoup d’autres ont été subis : le législateur s’est refusé à donner davantage de moyens réglementaires aux élus pour

réguler l’urbanisme commercial ; les inci-tations fiscales et budgétaires en matière de logement ont privilégié l’accession dans

le neuf ; les aides à l’immobilier d’entreprise ont ciblé de grandes zones périphériques (zonage PAT). Les marchés fonciers des centres-villes sont en outre des « marchés imparfaits » qui voient les prix monter en cas de tension et de forte demande,

mais résister à la baisse dans l’autre cas. Les opérations de rénovation et de réha-bilitation sont ainsi freinées par les com-portements d’attente des propriétaires ou les calculs spéculatifs des marchands de sommeil. Dans nombre de territoires, la reconquête des centres-villes devra être placée en tête de l’agenda politique. Mais il faudra bien plus qu’un programme d’action pour inverser les dynamiques des dernières années. C’est d’un sursaut collectif qu’il est question.

NP

Sébastien MartinPrésident du Grand Chalon, vice-président de l’AdCF à l’aménagement du territoire

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Les vagues de fermetures des services publics ont fragilité nombre de territoires ruraux

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Europe : l’avenir incertain des fonds structurelsLe Brexit, la crise migratoire, la montée des nationalismes et le projet de nouveau traité sont autant de sujets qui brouillent l’avenir du budget européen. Un volet des financements européens est particulièrement remis en question : la politique européenne de cohésion et les fonds structurels au profit des territoires français. Les prochains mois de négociations s’avèrent décisifs.

À Bruxelles, l’actualité numéro 1 reste la gestion de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne : l’enjeu

financier est immense, la contribution de ce pays représentant près de 15 % du budget communautaire. Les négociations en cours entre Michel Barnier (pour l’UE) et David Davis (pour la Grande-Bretagne)

auront donc un impact non seulement pour l’après-2020 mais également pour la préser-vation des crédits engagés pour la période de programmation actuelle.En prévision d’une négociation qui s’annonce délicate, la Commission européenne a décidé de décaler au printemps prochain la propo-sition du budget européen pour 2018-2023 et pour la future période post-2020.

La politique de cohésion dans le viseurOr la proposition du budget marque la première étape de préparation de la pro-grammation à venir. Cette situation, inédite, oblige donc l’ensemble des acteurs, commu-nautaires, nationaux, régionaux et locaux, à patienter avant de pouvoir aborder les sujets

de fond (les priorités pour le projet européen, la simplification des procédures de gestion des crédits…). Mais, plus grave encore, cela laisse les territoires français dans l’attente de savoir quel sera le devenir exact de la politique de cohésion.Car parmi les différentes politiques euro-péennes, une seule semble particulière-

ment en sursis : la politique de cohésion (et ses deux fonds : Feder et FSE), considérée par certaines directions générales de la Commission ou cer-tains États membres comme « inutile », « inefficace » ou

« illisible »… À cet égard, deux blocs se dégagent et s’affrontent : d’un côté, ceux qui prônent une suppression pure et simple de la politique de cohésion, a minima pour les régions riches (les régions métropoli-taines françaises par exemple) ; de l’autre, ceux qui défendent cette politique mais sont conscients de ses limites et plaident en faveur d’une évolution de celle-ci.

De la subvention au prêtLes scénarios sont nombreux. Une seule certitude, la politique de cohésion telle que nous la connaissons depuis les années 1980 sera réformée. L’alternative la plus en vogue actuellement est celle du remplacement de la politique de cohésion, pour les régions métropolitaines, par un élargissement du

plan Juncker ; soit le passage du principe de la subvention à celui du prêt et des outils d’ingénierie financière. Un scénario que promeuvent la Banque européenne d’investissement et certaines directions générales de la Commission, avec plusieurs conséquences notables : d’abord, tous les projets aujourd’hui soutenus par les fonds européens ne sont pas compatibles avec le plan Juncker (plutôt tourné vers les grands projets d’investissement et à rentabilité). Ensuite, cela représenterait, pour la France,

une perte sèche de plus de 7 milliards d’euros (de crédits Feder), soit plus d’un milliard d’euros par an de moins pour les régions et territoires français métropolitains.En attendant le budget européen, la Commission publie, courant octobre 2017, son « rapport sur la cohésion », l’occasion pour tous les acteurs d’en savoir plus sur l’état d’avancement des réflexions autour de la pérennité de la politique de cohésion et les formes qu’elle pourrait prendre.

Romain Briot

Avec le Brexit, la Commission européenne a décalé la proposition de budget 2018-2023, laissant ainsi dans l’attente les différents acteurs qui en dépendent. / © Mike Dotta / Shutterstock

La politique de cohésion telle que nous la connaissons depuis les années 1980 sera réformée

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18 DOSSIER COHÉSION DES TERRITOIRES

Page 19: Cohésion des territoires · Nous connaissons parfaitement les efforts à fournir sur les dépenses publiques, mais les collectivités ont assumé près de la moitié des baisses

« Les règles du Sraddet ne doivent pas  être hors sol »

En pleine élaboration de son schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), la région Hauts-de-France porte haut des ambitions de stratégie concertée de territoire et entend bien exploiter la dimension prescriptive du schéma, en co-construction avec les autres collectivités. Témoignage.

La région Hauts-de-France travaille actuellement à la rédaction de son Sraddet. Quels avantages et difficultés offre ce nouveau schéma intégrateur ?La loi NOTRe et son décret d’application ont considérablement modifié l’exercice par rapport aux Sraddt précédents. Le Sraddet est intégrateur. Il rassemble désormais l’intermo-dalité, la biodiversité, le climat, l’air et l’éner-gie, le plan déchets, le numérique. De plus et surtout, il devient prescriptif en s’imposant

aux documents stratégiques locaux. Il ne s’agit pas de compiler les précédents schémas, ou faire la somme des thématiques et des politiques régionales, mais bien de dégager une stratégie régionale cohérente et lisible pour les territoires régionaux.La démarche du Sraddet intervient à un moment clé de la fusion des deux régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie et d’une pro-fonde refonte du paysage intercommunal.En conséquence, nous sommes devant trois défis : donner du sens à un docu-ment qui balaye large au plan thématique, co-construire avec des acteurs très variés aux intérêts pas nécessairement convergents, et ce, dans des délais extrêmement contraints.Une nouvelle vision régionale doit se bâtir où chaque territoire doit trouver sa place. Notre ambition est de dépasser le formalisme d’un document, pour mener un véritable processus instaurant une nouvelle forme de relation entre la région et les territoires.

La première phase de concertation que nous avons menée illustre cette perspec-tive : neuf conférences territoriales se sont déroulées sur neuf grands espaces de réfé-rence pour identifier les enjeux territoriaux et les combinaisons interterritoriales ; des ateliers régionaux ont traité des compo-santes thématiques du Sraddet ; prochai-nement, un club des personnes publiques associées (PPA) se réunira pour assurer des articulations entre les différentes échelles

de planification et réguler la prescriptivité à instaurer ; des démarches de concertations publiques ciblées vont per-mettre aussi de partager de la réflexion avec les citoyens sur des sujets du quotidien.

Votre région affiche des ambitions importantes pour son schéma et entend le doter d’une vraie capacité prescriptive. Comment celle-ci va-t-elle s’exprimer ?Les travaux engagés depuis le lancement du Sraddet le 10 novembre 2016 ont permis d’identifier des partis pris stratégiques et de consolider une première vision régionale. Ces partis pris relèvent principalement de deux registres : un registre spatial (ouverture, multipolarité, armature…) et un registre de développement (leviers pour l’attractivité, l’emploi, les services, etc.).Ils seront déclinés par des objectifs (11 iden-tifiés par la loi) et aboutiront à la détermi-nation de règles. Ils seront les fils rouges d’une nouvelle vision régionale qui viendra nourrir la réflexion partenariale sur les aspects réglementaires qui s’ouvrira à l’automne 2017. Les objectifs et les règles du Sraddet ne doivent

pas être « hors sol », mais bien arrimés à une vision stratégique, considérant la nouvelle échelle territoriale des Hauts-de-France et s’appuyant sur les dynamiques locales.Concernant le volet prescriptif, la région ne souhaite pas imposer de façon unilaté-rale de nouvelles règles aux Scot, aux PLUi, aux PLU… Elle opte résolument pour une co-élaboration de ces règles dans le cadre du club des PPA.

À quels outils de mise en œuvre la région fera-t-elle appel ?Pour se mettre en place, la prescriptivité devra être accompagnée. La mise en œuvre d’une ingénierie adaptée pour que les territoires s’approprient les règles régionales est de ce point de vue déterminante. Il faut éviter les incompréhensions, les surinterprétations

qui braquent les collectivités en charge de l’urbanisme mais aussi les acteurs qui doivent composer avec des règles complexes pas tou-jours comprises.La région Hauts-de-France bâtit son Sraddet avec deux objectifs : il s’agit tout d’abord de proposer des « produits de sortie opération-nels » garantissant à la fois une lisibilité sur des enjeux forts (le foncier par exemple) ou sur des grands projets et une gouvernance partagée ; il s’agit également de manier la prescriptivité du Sraddet comme un outil au service des politiques régionales et d’une cohérence renforcée entre le régional et le local, plutôt que d’en faire un socle de contraintes pour les territoires. Le Sraddet ne doit pas copier des règles édictées par l’État, ni surajouter de la complexité.

Propos recueillis par Apolline Prêtre

Valérie Létard1re vice-présidente de la région Hauts-de-France en charge des solidarités avec les territoires, du contrat de plan État-région, des fonds structurels européens et de l’aménagement du territoire

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Le Sraddet ne doit pas copier des règles édictées par l’État, ni surajouter de la complexité

Sraddet : où en sont les régions ?Succédant au schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII), dont l’élaboration a marqué l’année 2016 et les premiers mois de 2017, le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) est considéré comme le second « grand exercice régional » de construction d’une stratégie régionale concertée.

C réé par la loi NOTRe, le Sraddet est appelé à intégrer tout un ensemble de documents, stratégies ou schémas

sectoriels, qui chacun traite d’un domaine particulier : écologie, énergie, transports, déchets ou numérique. Cette ambition

participe d’une dynamique de simplifica-tion et, pour la région, de l’affirmation de son rôle dans l’aménagement équilibré de son espace.Il est ainsi logique qu’une attention toute particulière ait été portée aux modalités

de concertation et aux collectivités locales à impliquer, tout au long de l’élaboration du schéma.

Un exercice complexeSi le schéma de développement économique a réussi à mobiliser élus régionaux et locaux autour d’un objet assez clair et délimité, tel ne semble pas être le cas du Sraddet. Pour preuve : un état d’avancement inégal entre régions et un portage politique qui nécessite encore une période d’appropriation.Cette situation contrastée s’explique à la fois par la technicité et la densité d’éléments à réunir par les équipes régionales, par le grand nombre d’acteurs à concerter mais également

par l’objet lui-même, qui souffre peut-être d’une image quelque peu négative.Au regard de la situation actuelle, les Sraddet devraient bien être adoptés à l’été 2019. Fin 2017, les régions auront probablement terminé la première phase de rédaction de la stratégie et des orientations, avant d’en-tamer la séquence suivante consacrée à la mise en œuvre opérationnelle et territoriale, intégrant la concertation avec les acteurs infrarégionaux.Du côté des régions, aucun signal d’alerte n’est jusqu’à présent apparu. Deux sujets préoccupent toutefois un peu plus que les autres : la question des transports (et de leurs infrastructures ) et celle des déchets. RB

La région Hauts-de-France souhaite profiter de l’élaboration du Sraddet pour construire une vraie relation avec les territoires. / © Jacky D / Shutterstock

Exemple en Centre-Val de LoireEn réponse à une proposition portée, en conférence territoriale de l’action publique (CTAP), par Charles-Éric Lemaignen au titre de la délégation régionale de l’AdCF, la région Centre-Val de Loire a accepté d’élargir l’instance de concertation mise en place à l’ensemble des intercommunalités de la région (et non uniquement à celles compétentes en matière de PLU). Ainsi, « le cercle des acteurs associés » se réunira à trois reprises, de décembre 2017 au printemps 2018, pour discuter des enjeux, objectifs et règles composant le Sraddet.

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19DOSSIER

Page 20: Cohésion des territoires · Nous connaissons parfaitement les efforts à fournir sur les dépenses publiques, mais les collectivités ont assumé près de la moitié des baisses

Les grands leviers nationaux de la cohésion territorialeLa future politique de cohésion territoriale gagnera à s’appuyer sur les stratégies régionales en cours de définition dans les projets de Sraddet. Elle ne pourra cependant oublier les puissants leviers qui relèvent du cadre national, de l’État ou de ses opérateurs : dépenses de protection sociale, organisation du système éducatif, politiques de santé et de logement, péréquation financière entre collectivités…

A vec la mise en chantier des schémas régionaux d’aménagement, de déve-loppement durable et d’égalité des

territoires (Sraddet), les nouvelles régions exerceront des responsabilités majeures en matière de cohésion des territoires. La nou-velle planification « intégratrice » et « pres-criptrice » vient compléter le renforcement de leur rôle en matière de développement économique, de transports interurbains et

de gestion des fonds structurels européens.Une question va néanmoins s’ouvrir au cours des prochaines années : celle de

l’articulation des politiques nationales et des options régionales en matière d’amé-nagement du territoire. Rien ne serait pire que placer les territoires dans des conflits de loyauté entre l’État et les régions en cas de divergence stratégique. Un tel scéna-rio doit être conjuré au plus tôt tant il est aujourd’hui évident que notre pays ne peut plus s’autoriser le luxe d’une déperdition d’énergies et de rivalités institutionnelles. C’est un fait : les territoires ont aujourd’hui besoin aussi bien des soutiens des régions et des départements que de ceux de l’État et de ses opérateurs. Ces derniers ne sau-raient en revanche se résumer à quelques appels à projets sans moyens ou plans sans lendemain. Le rôle structurant de l’État et des politiques nationales se joue ailleurs.

Les effets territoriaux de la protection socialeRappelons tout d’abord que le premier levier de la cohésion territoriale réside, en France, dans la puissance de nos dispositifs de protection sociale. Ceux-ci redistribuent chaque année plus de 700 milliards d’euros de prestations diverses et variées à travers

les pensions de retraite (300 milliards), la couverture santé (200 milliards), les dif-férentes allocations (chômage, aides au logement, solidarité…). Ces 700 milliards représentent près de 34 % du PIB et 55 % de la dépense publique. Leurs effets territoriaux sont massifs et largement prépondérants sur tout autre.Ce sont ces « stabilisateurs automatiques » qui ont protégé nombre de bassins de vie et

d’emploi durant la période de récession. Un rapport du Haut Conseil du finan-cement de la protection sociale, paru en 2015, a pour la première fois chiffré avec précision les effets redistributifs de ces mécanismes qui jouent une fonction « assurancielle » entre territoires. Le

rapport prenait soin de préciser que cette cir-culation des richesses n’était en rien assimi-lable à une logique d’assistance des régions

pauvres par les régions riches. Les flux de transferts proviennent pour l’essentiel de la circulation des personnes au cours de leur vie active. Par exemple, nombre d’actifs franciliens à revenus élevés consomment ailleurs durant l’année (résidences secon-daires, séjours prolongés…) ou prennent

leur retraite sur les façades littorales, trans-portant avec eux leurs « revenus différés ». Ainsi, les analyses qui soulignent que notre région capitale « redistribue » chaque année 300 milliards d’euros au profit des autres régions doivent être nuancées et expliquées.

Une économie très intégréeDe même, la haute productivité de certains territoires n’a de fondement que dans leur complémentarité avec des sites de pro-duction plus banals. De ce point de vue, la France n’a pas (encore) à souffrir des

conflits géopolitiques que connaissent nos voisins espagnols, italiens ou belges à partir des balances comptables des flux de revenus « sortants » ou « entrants » entre régions. L’Île-de-France est elle-même une « délé-gation de toutes les provinces », comme disait François Mauriac, et ne saurait attribuer au seul génie des lieux ses performances en termes de PIB. La très forte intégration de l’économie française se traduit par une extrême division du travail entre régions et une remontée des valeurs ajoutées dans les sièges sociaux et têtes de groupe, historiquement situés à Paris, rare capitale des grands pays développés à concentrer toutes les grandes fonctions de commandement (économie, adminis-tration, recherche, culture…).

Désenclavement universitaireAu-delà de la protection sociale, plusieurs politiques nationales sectorielles restent très agissantes dans les territoires. La prin-cipale demeure sans doute celle de l’éduca-tion bien sûr, qui concentre l’essentiel des agents de l’État mais surtout façonne les

qualifications de demain. Tout en visant l’égalité des chances entre élèves de l’enseignement primaire et secondaire (qui est de moins en moins assurée selon les provenances

géographiques), l’État se doit d’avoir une stratégie d’aménagement universitaire du territoire. Alors que la stratégie de Lisbonne nous invite à viser l’objectif de 50 % d’une tranche d’âge diplômée bac+3, la bonne répartition territoriale des options de formation, que celle-ci soit initiale ou continue, sera à l’avenir l’un des leviers les plus efficaces des politiques de cohé-sion territoriale. Là où il n’était question naguère que de désenclavement routier, c’est de désenclavement universitaire qu’il s’agit aujourd’hui.

Territorialisation de l’offre de soinsC’est par ailleurs sur la question hospi-talière et sanitaire que l’État sera de plus en plus attendu, à travers les mécanismes de solvabilisation des patients bien sûr,

mais surtout des implantations territo-riales de l’offre de soins (hôpitaux, centres médicaux, maisons de santé, libéraux…). La création des agences régionales de santé (ARS) n’a été qu’une régionalisa-tion de façade. La plupart des orientations demeurent dictées par les tutelles et le pilotage centralisé de l’assurance maladie. La gestion de la démographie médicale, si contestée aujourd’hui, demeure nationale.Il est en outre important de rappeler les effets particulièrement structurants sur les territoires des orientations de la politique du logement, partiellement déléguée aux intercommunalités mais qui demeure pour l ’essentiel marquée par des zonages, des aides fiscales défi-nies au niveau national, des normes de construction et des objectifs de mixité (loi SRU) inscrits dans le marbre de textes législatifs. Dans leur prolongement, les dispositifs de rénovation urbaine, les moyens de l ’Anru comme les contrats de ville sont des politiques éminemment nationales qu’il faudra prendre en compte dans les stratégies régionales.

« Pouvoir d’achat » des territoiresEnfin, c’est naturellement à travers l’allo-cation de ses dotations aux collectivités que l’État peut agir en matière de cohésion territoriale. Inscrite désormais dans nos objectifs de portée constitutionnelle, la péréquation financière et fiscale constitue le régulateur du « pouvoir d’achat » des territoires et le principal levier d’harmo-nisation des niveaux de services rendus aux populations. Indirectement, elle détermine également la capacité des territoires à répondre à certaines offres contractuelles des ministères ou agences nationales. Elle est en cela le premier levier de la cohésion territoriale en agis-sant sur les programmes d’investissement mais aussi sur le financement de services quotidiens et de capacités administratives (ingénierie).À bien des égards, les incidences territo-riales de ces divers mécanismes nationaux d’intervention mériteraient une attention et une évaluation beaucoup plus fortes des pouvoirs publics. Et relativiseraient la portée des maigres crédits budgétaires affectés de manière explicite, dans les lois de finances, à la cohésion territoriale.

Nicolas Portier

L’action de l’État sera attendue en matière de désenclavement universitaire et d’accès à l’éducation. / © Matej Kastelic / Shutterstock

L’État se doit d’avoir une stratégie d’aménagement universitaire du territoire

La création des agences régionales de santé (ARS) n’a été qu’une régionalisation de façade

La péréquation financière et fiscale constitue le régulateur du pouvoir d’achat des territoires

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20 DOSSIER COHÉSION DES TERRITOIRES

Page 21: Cohésion des territoires · Nous connaissons parfaitement les efforts à fournir sur les dépenses publiques, mais les collectivités ont assumé près de la moitié des baisses

Des nouveaux enjeux pour les territoires

Dans un

contexte mar-

qué par une éco-

nomie morose,

les contraintes

budgétaires, le

changement cli-

matique et la

pression sur les

ressources, les

territoires cherchent à être toujours

plus compétitifs, attractifs et durables.

Compétitifs, pour attirer les entre-

prises ; attractifs, pour séduire les po-

pulations ; et durables, pour garantir

leur bien-être et leur pérennité.

Le développement économique du

territoire devient plus que jamais une

priorité pour les élus locaux et leurs

services.

Soucieux du partenariat qui lie l’en-

treprise aux collectivités territoriales

depuis maintenant plus de 160 ans,

Veolia propose un accompagne-

ment construit autour de cinq grands

challenges : favoriser l’économie circu-

laire ; associer les citoyens et les par-

ties prenantes aux services ; améliorer

la résilience des territoires ; profiter du

développement du numérique ; rendre

les villes agréables à vivre.

Au-delà de la valeur propre apportée

par le service délivré, chacun de ces

cinq challenges contribuent au dé-

veloppement économique des terri-

toires. C’est en particulier le cas des

services relatifs à l’économie circulaire

qui permettent de créer de la valeur

positive sur le plan social, économique

et environnemental tout en prenant

en compte les dynamiques des terri-

toires.

Veolia, un acteur engagé dans

l’économie circulaire

Ainsi, dès 2012, Veolia a développé

des projets ambitieux d’économie cir-

culaire avec ses clients historiques,

les collectivités et les industriels. Le

groupe a notamment mis l’accent sur

des solutions permettant de croiser

les usages de l’eau, de l’énergie et des

déchets, agissant ainsi en tant que

facilitateur de l’économie circulaire à

l’échelle des territoires.

Ce positionnement stratégique dans

l’économie circulaire a permis au

groupe de devenir un acteur clé de la

transformation de la matière pour de nouveaux usages. Par exemple, le recy-

clage des bouteilles plastiques à Ros-

tock, en Allemagne, permet une réuti-

lisation par l’industrie agro-alimentaire

locale et évite l’émission de pas moins

de 113 000 tonnes de CO2. Veolia ac-

compagne également les collectivités

dans leur transition vers les énergies

renouvelables, grâce à des procédés

de transformation innovants comme

la méthanisation des bio-déchets,

la récupération de biogaz dans les

centres d’enfouissement techniques,

ou encore la va-

lorisation éner-

gétique dans les

incinérateurs.

Ces procédés

permettent si-

multanément

de produire de

l’électricité et

d’alimenter les réseaux de chaleur.

Ainsi, l’Unité de Valorisation Energé-

tique de Lille traite environ 350 000

tonnes de déchets par an, permettant

de fournir de l’électricité à 70 000 lo-

gements, et alimentera également les

réseaux de chaleur urbains de Roubaix

et de Lille. Pour chacun de ces cas, il

y a création de richesse localement !

Veolia est aussi capable de transfor-mer les eaux usées en source d’éner-gie, par la méthanisation de boues ou

encore la récupération de chaleur par

procédé Energido®. A Arras, le chauf-

fage des bassins du centre aquatique

Aquarena par les eaux résiduelles per-

met à celui-ci de couvrir 75 % de ses

besoins annuels.

Enfin, Veolia est aussi engagé dans

l’économie circulaire à travers ses

offres dans l’efficacité énergétique des bâtiments. Sa solution de centre

de pilotage à distance et en temps

réel « Hubgrade », permet de super-

viser des installations afin de réduire

la facture énergétique, et notamment

celle des bâtiments communaux.

Mais pour Veolia, il ne peut y avoir

de développement économique sans

associer les populations locales. À

ce titre, Veolia soutient des struc-

tures comme le Tuba et le Centsept à

Lyon qui permettent à des petites et

moyennes entreprises locales de créer

des emplois et de se développer. Veo-

lia est convaincu qu’une croissance

durable ne pourra se faire sans une

co-création et un partage de la valeur

entre tous les acteurs économiques

locaux.

C’est ainsi, à l’instar des solutions

d’économie circulaire, que les cinq ré-

ponses aux nouveaux challenges des

villes, élaborées par Veolia (voir illus-

tration ci-contre), permettent de créer

de la richesse locale et de contribuer

ainsi au développement économique

des collectivités territoriales.

Repenser la ressource pour un développement économique au service des territoires

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Patrice Novo, Directeur Marketing Cities, Veolia

Page 22: Cohésion des territoires · Nous connaissons parfaitement les efforts à fournir sur les dépenses publiques, mais les collectivités ont assumé près de la moitié des baisses

Territoires en mutation économique : priorité à la solidarité nationale ?Après les pôles de reconversion des années 1980, les conventions de revitalisation des années 2000 et les commissaires au redressement productif, les politiques nationales de soutien aux bassins d’emploi peuvent-elle dépasser la seule logique défensive et curative ? Pour anticiper, sécuriser les parcours professionnels et assurer la transmission des savoir-faire industriels, un dialogue social territorial est à réinventer.

Dans un contexte d’accélération des mutations économiques, les bassins de sous-traitance manufacturière

continuent, notamment dans les régions du grand quart nord-est, à encaisser les chocs. La réduction généralisée des investissements publics locaux et le ressac de la présence publique (retrait de certaines implantations de l’État) pro-duisent des effets d’autant plus sensibles dans ces territoires souvent dépourvus d’ « amortisseurs ».Les analystes territoriaux et économistes divergent sur les réponses à apporter en termes d’action publique. Pour certains experts de France Stratégie, il convient de

s’appuyer sur les métropoles pour consti-tuer des moteurs de croissance profitant à l’ensemble des territoires.Pour d’autres, le ruissellement métro-politain n’est pas garanti ; il s’agit alors de mettre à jour les complémentarités entre les territoires urbains, périurbains et ruraux pour construire des stratégies de développement à l’échelle des bassins d’emploi. Laurent Davezies, interrogé dans nos colonnes en 2013 (Intercommunalités n° 175), préconisait de « repenser un modèle d’efficacité territoriale par la reconversion des bassins d’emploi, l’accélération des mobilités résidentielles, mais aussi par de nouvelles solidarités horizontales en complément des solidarités verticales habi-tuelles ». L’économiste identifiait ainsi deux leviers complémentaires pour intervenir dans les bassins d’emploi les plus fragilisés : faire jouer la solidarité nationale et desser-rer les freins à la mobilité professionnelle.

Mobilités professionnelles et flexisécuritéMais seule la mobilité interrégionale des cadres demeure une mobilité choisie. Pour les bassins de sous-traitance indus-trielle, il convient sans doute d’apporter des solutions spécifiques, notamment en matière de politique du logement et de formation professionnelle.Les débats en cours autour des lois sur l’organisation du marché du travail n’ont, à ce stade, que peu abordé les contrepar-ties à la f lexibilité des actifs. La gestion des transitions professionnelles par la mobilité géographique des travailleurs est souvent évoquée. Cette flexibilité externe

doit s’accompagner de nouvelles garanties et protections pour sécuriser les parcours profes-sionnels. C’est tout l ’enjeu du prochain acte de la loi Travail qui se jouera cet hiver avec la réforme visant à réorienter le financement de la formation

professionnelle vers les demandeurs d’emploi et les travailleurs les moins qualifiés.

Investir dans le capital humain, territorialiser, expérimenterC’est pourquoi il faut inventer une combi-naison de politiques nationales, régionales et locales pour répondre aux enjeux de transmission des savoir-faire industriels et de montée en gamme des qualifica-tions professionnelles. Un programme spécifique à destination des bassins d’emploi les plus exposés aux mutations économiques mérite à présent d’être mis à l’agenda. L’investissement dans le capital humain tant par les pouvoirs publics que les entreprises sera décisif. La performance de l ’appareil de formation tout au long de la vie, la connectivité de nos tissus de PME à un ensemble de ressources et de milieux innovateurs, la qualité des

relations interentreprises, le soutien des réseaux d’entreprises (au-delà des seuls pôles de compétitivité) sont autant d’ingrédients à assembler pour constituer des écosystèmes locaux de la croissance.De nouvelles expérimentations devraient

pouvoir être engagées avec les collectivités, les régions et les partenaires sociaux. C’est à l’échelle des bassins d’emploi qu’il faudra apporter des garanties tant aux salariés qu’aux entrepreneurs.

Olivier Crépin

Un programme à destination des bassins d’emploi les plus exposés mérite d’être mis à l’agenda

Clément Dherbécourt et Boris Le Hir, Dynamiques et inégalités territoriales, note de France Stratégie, juillet 2016 (téléchargeable en ligne)

Laurent Davezies, La crise qui vient. La nouvelle fracture territoriale, Paris, Éditions du Seuil, coll. « La république des idées », 2012

Philippe Frocrain, Pierre-Noël Giraud, Dynamique des emplois exposés et abrités en France, La Fabrique de l’Industrie, Presses des MINES - Transvalor, 2016 (téléchargeable en ligne)

Les territoires du grand quart nord-est sont les plus sujets à l’accélération des mutations économiques. / © Tobago77 / Fotolia

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22 DOSSIER COHÉSION DES TERRITOIRES

Emplois abrités ou exposés à la mondialisation ?L’imbrication de l’industrie manufacturière et des services marchands est progressivement devenue si forte qu’elle rend de moins en moins pertinente la distinction traditionnelle entre secteurs secondaire et tertiaire. Les récents travaux de Philippe Frocrain et Pierre-Noël Giraud conduits pour La Fabrique de l’Industrie ont permis d’établir une cartographie des « emplois abrités » et des « emplois exposés » à la mondialisation.On observe ainsi que l’emploi exposé est minoritaire et en recul : entre 1999 et 2013, il est passé de 30 % à 26,8 % de l’emploi total en France. Le secteur abrité est le véritable moteur de l’emploi : il progresse de 2,37 millions d’unités sur la même période, alors que le secteur exposé perd 204 000 emplois. Les gains de productivité sont néanmoins supérieurs dans le secteur exposé. Les salaires y sont en moyenne 25 % plus élevés que dans le secteur abrité, et croissent plus rapidement, alors que les niveaux de qualification sont comparables. Enfin, les emplois de services exposés représentent désormais plus d’un emploi exposé sur deux (sièges sociaux, centres d’appel, programmation informatique, hôtellerie, etc.).Toutefois, selon Philippe Frocrain et Pierre-Noël Giraud, l’essor de ces activités (+ 780 000 emplois entre 1999 et 2013) profite à un nombre restreint de bassins d’emploi, correspondant aux espaces métropolitains, à la façade atlantique et au pourtour méditerranéen. Inversement, la diminution continue de l’emploi industriel (- 755 000 emplois) déstabilise un grand nombre d’économies locales.

Effet multiplicateurPour différents qu’ils soient, les emplois exposés et les emplois abrités n’en demeurent pas moins articulés et interdépendants. En particulier, l’implantation

d’entreprises de secteurs exposés est un puissant levier de développement de l’emploi abrité local, car les nouveaux travailleurs consomment des biens et services abrités. On parle de « multiplicateur d’emploi local ». Selon les estimations de Philippe Frocrain et Pierre-Noël Giraud, sur la période 2004-2013, lorsque 100 emplois exposés apparaissent dans une des 304 zones d’emploi de France métropolitaine, environ 64 emplois abrités sont créés au sein de la même zone. « Le  maintien  de  la  compétitivité  des  premiers  suppose  généralement  un accroissement des inégalités de revenus entre les deux, qui peut être insoutenable politiquement ou socialement », notent toutefois les deux économistes.

Agir sur les emplois abritésPour éviter d’accroître les inégalités, ils préconisent d’améliorer la productivité des secteurs abrités. « En suivant cette voie, on peut améliorer la compétitivité-coût du secteur exposé tout en contenant les inégalités salariales entre emplois exposés et abrités. Pour y parvenir, reste à déterminer comment combiner des politiques d’intensif ication de  la concurrence au sein du secteur abrité avec d’autres  politiques  de  formation,  de  soutien  à  l’innovation  et  de  dif fusion des technologies », plaident les économistes. Conclusion pour La Fabrique de l’Industrie : « Il faut également tenir compte de l’effet multiplicateur de l’emploi exposé sur l’emploi abrité au niveau local, en particulier dans les territoires où le chômage est élevé. »

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Transferts de compétences et réorganisation des services : la solution transitoire des conventions de gestionIntroduits par la loi, causés par les harmonisations de compétences consécutives des fusions ou engendrés par la réduction du périmètre d’intervention des syndicats, de nombreux transferts de compétences aux communautés et métropoles sont actuellement en cours. Leur mise en œuvre est parfois contrainte, si bien que les communautés peuvent être amenées à confier d’abord l’exercice de leurs nouvelles compétences à d’autres collectivités, le temps de se mettre en ordre de marche.

L a réorganisation des services d’une communauté en vue des compé-tences nouvellement transférées

peut nécessiter un certain temps pour des raisons variées : recrutements exté-rieurs ou mobilités internes en cours, besoin d’adapter les modes d’intervention communaux… À tel point que la commu-nauté n’est pas toujours en mesure d’agir dans les meilleures conditions lorsqu’elle devient pleinement compétente.Le recours aux services d’une autre col-lectivité locale peut dès lors permettre de finaliser la nouvelle organisation des services intercommunaux. Le choix de la communauté peut logiquement se porter sur l’une de ses communes membres ou un syndicat mixte quand ceux-ci exerçaient jusqu’alors la compétence qui est désor-mais la sienne.

Délégations limitées, prestations de service étenduesLa délégation de compétence n’est pas ouverte aux communautés et aux métro-poles de droit commun, sauf (et au profit de certains délégataires seulement) dans le cas de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations1, des transports scolaires2 et des réseaux de com-munications électroniques3. Dans le cadre des autres compétences, les dispositions générales per-mettent seulement à la communauté d’être délégataire, c’est-à-dire d’exercer une compétence pour le compte d’une collectivité territoriale4.Une communauté ou une métropole peut néanmoins arriver à ses fins en ayant recours à une prestation de service qu’elle confie à une autre personne publique, donnant lieu à ce qui est parfois appelé une « convention de gestion ». La loi l’habilite à « confier, par convention conclue avec les collectivités territoriales ou les éta-blissements publics concernés, la création ou la gestion de certains équipements ou services relevant de ses attributions à une ou plusieurs communes membres, à leurs groupements ou à toute autre collectivité territoriale ou établissement public »5.

Depuis la loi NOTRe6, les communautés de communes bénéficient également de cette habilitation large, qui dispense de modifier les statuts, en lieu et place des précédentes dispositions qui visaient leurs seules communes membres.

Conditions d’intervention du prestatairePeuvent donc agir au nom d’une commu-nauté aussi bien des collectivités territo-riales, comme les communes membres, que tout type d’établissement public, qu’il s’agisse d’une autre communauté, d’un syn-dicat de communes, d’un syndicat mixte fermé ou ouvert, ou, par exemple, d’un centre communal d’action sociale. Si les communautés et les métropoles sont habili-tées par la loi à agir en tant que prestataires, les autres établissements publics locaux doivent y être autorisés par leurs statuts en raison du principe de spécialité. Par ailleurs, le Conseil d’État a précisé dans son arrêt « Société Armor SNC »7 que les collectivités et établissements publics doivent justifier d’un intérêt public à se constituer prestataires. Et de poursuivre

que cette condition est remplie dès lors que la prestation de service est assurée « dans le prolongement d’une mission de service public dont la collectivité ou l’établissement public de coopération a la charge », afin « notamment d’amortir des équipements, de valoriser les moyens dont dispose le service ou d’assurer son équilibre financier », et que ceci ne compromet pas la réalisation de cette mission de service public qui lui incombe.Lorsqu’une commune membre est pres-sentie pour assurer le service au nom de sa communauté nouvellement com-pétente, la question se pose de savoir comment elle peut s’inscrire, ce faisant, dans le prolongement d’une de ses missions alors que le transfert d’une compétence à

l’intercommunalité implique le transfert des services communaux8 : quels sont ses moyens pour réaliser une prestation rele-vant d’une compétence qui n’est plus la sienne et pour laquelle elle est censée ne plus disposer de services en propre ?Selon les situations, la convention de prestation de service et la délibération l’approuvant pourront souligner que cette commune continue d’exercer une compé-tence proche de celle qui a été transférée, qu’elle dispose d’agents non attachés à l’exercice d’une compétence spéci-fique ou que le transfert des services communaux à la communauté requis lors du transfert de compétence n’a pas encore été mené à bien. Autant de raisons pour justifier que son activité en tant que prestataire de la communauté s’inscrit logiquement dans le cadre de sa propre organisation.Dernière condition pour les prestataires qui relèvent de la catégorie des EPCI et des syndicats mixtes fermés : conséquence du principe de spécialité, la constitution d’un budget annexe est obligatoire pour identi-fier l’ensemble des opérations financières relatives à la prestation qu’ils assurent, sauf lorsqu’elles sont retracées comme opéra-tions sous mandat9.

Points d’attention pour la communauté responsablePour sa part, la communauté doit vérifier si elle est autorisée à confier la gestion d’un service à une collectivité en dehors du respect des règles de la commande publique car la candidature d’une personne publique « ne doit pas fausser les conditions de la libre concurrence » (arrêt « Société Armor SNC » précité). Il faut pour cela satisfaire au cadre de la coopération entre pouvoirs adjudicateurs (ou coopération « public-public ») qui permet de s’exonérer de la publicité et de la mise en concurrence : cette

coopération obéit uniquement à des consi-dérations d’intérêt général et le prestataire doit réaliser « sur le marché concurrentiel moins de 20 % des activités concernées par cette coopération »10.La rédaction de la convention de gestion doit également retenir l ’attention de la communauté, dont les relations avec l’autre collectivité s’apparentent à celles qu’elle entretiendrait avec un prestataire privé. Aussi la communauté garde-t-elle la main sur les orientations principales, au

titre de sa compétence, tout en s’assurant que la convention est à la fois précise et fluide pour en faciliter l’exécution sur la période déterminée.Car ces conventions de gestion ont voca-tion à être transitoires : une prestation a habituellement un objet limité et la commu-nauté est censée s’organiser pour, à terme, exercer plus directement les attributions qui sont les siennes.

Simon Mauroux

1- C. environnement, art. L. 213-12. 2- C. transports, art. L. 3111-9. 3- CGCT, art. L. 1425-1. 4- CGCT, art. L. 1111-8 ; voir Intercommunalités n° 167, mai 2012, rubrique Droit en p. 21. 5- CGCT, art. L. 5214-16-1, L. 5215-27, L. 5216-7-1 et L. 5217-7. 6- Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, art. 72. 7- CE, 30 décembre 2014, n° 355563, Société Armor SNC. 8- CGCT, art. L. 5211-4-1. 9- CGCT, art. L. 5211-56. 10- Ord. n° 2015-899 du 23 juillet 2015, art. 18.

Sauf exceptions, pas de délégation possible de la part des communautés

La collectivité prestataire doit agir dans le prolongement de l’une de ses missions

L’AdCF et Territoires Conseils, service de la Caisse des dépôts et consignations, proposent des modèles de conventions de gestion

à adapter, dans leur note commune Transferts de compétences aux communautés et métropoles, septembre 2016.

Les collectivités peuvent devenir prestataires uniquement si un intérêt public le justifie. / © hurca.com / Fotolia

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DROIT24

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Les chantiers financiers de l’automne pour les collectivités du bloc localAu cours de l’automne, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, le nouvel exécutif devrait préciser le contenu des réformes financières et fiscales annoncées lors de la campagne présidentielle. L’engagement d’une réduction significative du déficit public à l’horizon 2022 constitue la clé de voûte de ces réformes, qui touchent directement les collectivités locales.

L es objectifs de réduction du déficit public devraient se traduire par des coups de rabot dans de nombreux

domaines, qui concerneront l’ensemble des acteurs publics locaux et nationaux. Par ailleurs, le gouvernement, qui souhaite relancer la croissance économique, entend procéder à des allégements fiscaux en direction des entreprises et des ménages.La Conférence nationale des territoires, qui s’est tenue le 17 juillet au Sénat, a été l’occasion de lever un coin du voile sur l’implication attendue des collectivités dans l’équation financière gouvernementale et sur les politiques à venir.À cette occasion, l’AdCF a présenté ses principales propositions en faveur d’une pause législative sur le plan des réformes institutionnelles. L’association plaide en revanche pour redonner aux collectivités une réelle visibilité budgétaire et souhaite qu’aboutissent les réformes financières et fiscales essentielles à la réussite de la réorganisation des territoires intercom-munaux engagée ces dernières années (évolution des périmètres, création des métropoles, renforcement des compétences des intercommunalités…).Passage en revue des principaux chantiers.

Une participation de 13 milliardsLa question de la participation des col-lectivités locales à la réduction du déficit public constitue le premier des chantiers. Ouvrant la Conférence nationale des terri-toires, le ministre des Finances a annoncé la couleur : « Les collectivités locales devront réaliser 13 milliards d’euros d’économies d’ici 2022 », soit 3 milliards d’euros de plus que ce que prévoyait initialement le pro-gramme électoral d’Emmanuel Macron.Les modalités restent à définir et relèvent du travail de concertation à mettre en œuvre cet automne. « Cette contribution à l’effort ne consistera pas en une baisse brutale des dotations », a précisé le chef de l’État, mais les collectivités devront faire des économies. Pour celles qui ne « joueraient pas le jeu », un « mécanisme de correction » pourrait se mettre en place en 2018. En d’autres termes, un système de

bonus-malus devrait être proposé. Reste à savoir de quelle manière il se déclinera localement et prendra en compte la réalité des charges des collectivités, en distinguant effort collectif et effort individuel.Au cours des dernières années, les collecti-vités locales ont entrepris des efforts signi-ficatifs de réduction de leurs dépenses pour faire face à la baisse drastique des dotations de l’État (près de 10 milliards d’euros de baisse entre 2014 et 2017). Ces efforts se sont traduits par un net ralentissement de

la croissance des dépenses de fonctionne-ment de l’ensemble des collectivités, pour atteindre en 2016 un taux négatif (- 0,2 %).Ces efforts, salués par la Cour des comptes dans son dernier rapport, sont inédits et n’ont pas d’équivalent au sein des autres secteurs des administrations publiques. Ils conduisent les collectivités à assumer 50 % des économies réalisées alors qu’elles ne sont plus à l’origine que de 18 % des dépenses publiques.Les collectivités seront-elles en mesure de réaliser 13 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur cinq ans ? Beaucoup d’entre elles ont déjà adopté les principales mesures d’économie et ne pourront pas aller au-delà à court terme sans réduire et réorganiser leur offre de services publics. D’autant que les récentes lois ont fortement élargi le champ des compétences locales.

La révision en profondeur de l’OdedelL’actualisation de l’objectif d’évolution de la dépense locale (Odedel) est au cœur du dispositif de maîtrise de la dépense publique ; elle en constitue même la pièce

maîtresse, qui permettra d’engager une démarche de contractualisation entre l’État et les collectivités ter-ritoriales. Cela implique une révision en profondeur de cet outil, aujourd’hui totalement

opaque, défini sans concertation et reposant sur des prévisions budgétaires erronées.Un cadre de travail devra être défini en concertation avec les collectivités. L’AdCF propose d’adopter une méthodologie d’éva-luation de la dépense locale agrégeant les dépenses des communes et des communautés pour tenir compte de l’exercice partagé des compétences, très variable d’un territoire à l’autre. Nouvellement mis en place, l’Obser-vatoire des finances et de la gestion publique locales pourra utilement y contribuer.

La suppression de la THAutre chantier d’envergure, celui de la suppression progressive de la taxe d’habi-tation (TH) pour 80 % des ménages qui suscite de nombreuses inquiétudes parmi les élus locaux concernant l’autonomie fiscale des collectivités.Outre le fait que cette taxe constitue un lien quasi-organique de la participation des citoyens à la mise en œuvre des services publics du quo-tidien, de nombreuses ques-tions restent en suspens : le mode de compensation et son fonctionnement, l’évo-lution dans le temps des dynamiques fiscales, la diversité des effets locaux de cette mesure… Certaines com-munes et communautés verront la quasi-totalité de leurs contribuables exonérés, d’autres très peu.Dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, les associations représen-tatives des collectivités ont plaidé pour un dispositif de dégrèvement, dont il convien-dra de vérifier la réalité et le fonctionne-ment dans la prochaine loi de finances.

L’indispensable révision des valeurs locativesLa révision des valeurs locatives, qui s’ap-plique cet automne pour les locaux profes-sionnels, devra impérativement s’étendre aux locaux d’habitation. Ce chantier, de longue haleine, est indispensable pour rendre la fiscalité plus équitable, rétablir son dynamisme et lui redonner sa véritable place au sein des ressources locales.

La réforme de la DGFLaissée en suspens en 2015 pour cause de réorganisation territoriale, la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) s’impose. Le dispositif actuel n’est plus en phase avec la nouvelle carte intercommu-nale et l’évolution des différentes catégories

de groupement, qu’il conviendrait d’ailleurs de simplifier. La réforme devra prendre appui sur une analyse exhaustive des richesses financières et fiscales, et ce à l’échelle des communautés.Corollaire de ce chantier ? La remise à plat des outils de péréquation, dont le fonds de péréquation des ressources intercommu-nales et communales qui a largement fait

ses preuves pour atténuer les écarts de res-sources et de charges, comme l’a souligné à plusieurs reprises la DGCL.

La relance de l’investissementLa relance de l’investissement est sans doute le chantier décisif pour accompa-gner un retour significatif à la croissance de l’économie nationale.Ces dernières années, la réduction des dépenses publiques locales s’est traduite par une forte chute de la commande publique et des investissements locaux, comme le confirme le baromètre de la commande publique mis en place par l’AdCF et la Caisse des dépôts.Dans le prolongement de la conférence de juillet dernier, l’AdCF appelle à la tenue d’une Conférence nationale des inves-tissements publics, pour identifier les domaines d’investissement prioritaires pour le quinquennat, en concertation avec les collectivités et à partir d’un état des lieux objectif des besoins.Le cadre de travail pour venir à bout de ces différents chantiers devrait être défini à l’automne. L’année 2018 sera le temps de la mise œuvre et des premiers résultats… Une autre aventure se prépare.

Claire Delpech

Les collectivités locales devront réaliser 13 milliards d’euros d'économies d’ici 2022

Le dispositif de DGF actuel n’est plus en phase avec la nouvelle carte intercommunale

L’automne est synonyme de reprise de l’activité parlementaire, en particulier de la préparation du projet de loi de finances pour 2018. / © karen roach / Shutterstock

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FINANCES 25

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COMMUNAUTÉ DE COMMUNES DU PAYS FOUESNANTAIS (FINISTÈRE)

Finistère Mer Vent : l’innovation pour faire rayonner le territoire

Avec le projet Finistère Mer Vent, le Pays Fouesnantais se donne pour objectif de stimuler l’innovation dans le domaine des courses au grand large, créer de l’emploi et faire rayonner le territoire. Une ambition portée par un partenariat public-privé renouvelé sous la forme d’une société coopérative d’intérêt collectif avec le Crédit Agricole.

T out commence dans les années 1950 dans une anse sauvage, reculée sous le Cap Coz, face aux îles de Glénan.

Henri Desjoyeaux, fondateur de l’école de voile Les Glénans et personnage important de la vie locale du bassin de La Forêt, repère la baie comme un potentiel port de gardiennage et la rachète. Il s’agissait alors d’un « jardin d’expérimentation », explique Roger Le Goff,

président de la communauté de communes du Pays Fouesnantais. Aujourd’hui, Port-la-Forêt n’est pas seulement un port de gardiennage ; c’est également un pôle d’activités écono-miques axé sur le nautisme (notamment grâce à la présence de CDK Technologies, célèbre constructeur de bateaux de course) et un centre d’entraînement de course au grand large : le Pôle « Finistère course au large ». Les grands vainqueurs du Vendée Globe se sont entraînés dans ce pôle d’excellence. Dès les années 1980, le Pays Fouesnantais est rebap-tisé « la Vallée des fous » en leur honneur.

Un laboratoire d’innovationL’un d’eux, Jean Le Cam, et son sponsor, le Crédit Agricole du Finistère, sont à l’origine de Finistère Mer Vent. Ce projet s’appuie sur un constat : la présence de coureurs de renom confère au port des compétences exceptionnelles en matière de course au large, mais ces derniers sont en quête continuelle de sponsors pour financer leurs courses.« On s’est vite rendu compte qu’on ne pouvait pas y aller seuls, on devait y associer les acteurs qui font le territoire », précise Arnaud Gourret, responsable du projet au Crédit Agricole du Finistère. Les premières ébauches de Finistère Mer Vent sont présentées à la communauté de communes du Pays Fouesnantais, qui

accepte de s’associer au projet. Celui-ci repose sur la création d’un laboratoire d’innovations autour de la course au large, qui devra notamment favoriser la création d’emplois sur le territoire. Concrètement, il s’agit de mettre à dis-position d’une vingtaine de porteurs de projets un bâtiment de 500 m² afin de les accompagner techniquement et économi-

quement dans la recherche et l’innovation, mais également permettre la transmission des connaissances liées au nau-tisme. « Mettons des talents et des compétences à dispo-sition pour créer l’émulation

et faire de ce lieu une référence », résume ainsi Roger Le Goff.

Partenariat public‑privéSi, pour Roger Le Goff, le rayonnement économique du territoire se joue désormais à l’échelle de l’intercommunalité, il n’en reste pas moins que celle-ci doit travail-ler avec d’autres partenaires : « Il y a un

moment où la collectivité ne peut pas tout faire, il faut savoir partager, insiste-t-il. Je trouve que les compétences de l’organisme bancaire et d’une collectivité, associées sur un projet de développement écono-mique, c’est du gagnant-gagnant : ce que nous recherchons, c’est la créa-tion d’emplois et d’entreprises, c’est la richesse de demain. »Le Crédit Agricole, la collectivité et Jean Le Cam reconnaissent leur com-plémentarité : l’un possède le pouvoir financier et la connaissance des acteurs économiques, l’autre le pouvoir décisionnel et la connaissance des citoyens, et le dernier les connaissances en matière de course au large. « Le sud du Finistère est un territoire qui connaît bien le mutualisme, qui est capable de se fédérer », rappelle Arnaud Gourret. Et qui est habitué aux coopéra-tions public-privé.

Une forme coopérative originaleDans le cas du projet Finistère Mer Vent, le partenariat public-privé a pris la forme,

plus originale, d’une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC). Née d’une pre-mière expérience du Crédit Agricole à Brest, la SCIC est une coopérative associant à un

même niveau acteurs publics, privés et asso-ciations : le fonctionnement par collèges (collèges des fondateurs, des salariés puis des porteurs de projets) permet d’intégrer au fil du projet les nouvelles entreprises aux investisseurs initiaux. Ce mode de contrac-tualisation souple confère une nouvelle dimension plus coopérative à ce type de partenariat.Pour que ce projet voie le jour, le Crédit Agricole et la communauté vont investir 2,5 millions d’euros, dont 250 000 euros pour cette dernière.

Vers un lieu ouvertLe contrat de partenariat a été signé le 12 mai dernier. Suivront les étapes de construction dudit bâtiment-totem et son ouverture aux porteurs de projets sélec-tionnés. Le bâtiment doit pouvoir offrir les services nécessaires à l’innovation et l’émulation mais également ancrer ce dyna-misme à Port-la-Forêt : pour l’heure, les plans prévoient un espace de travail, indi-viduel ou partagé, une salle de formation pouvant accueillir des conférences voire des séminaires et un espace showroom, témoignant de la volonté d’ouverture sur le port et d’une nouvelle forme de coo-pération dans l’innovation. Le lieu doit aussi être accessible au grand public pour lui permettre de découvrir la technologie dans la course au large : « Il faut que ce soit un lieu de pédagogie, un lieu de vie qui ait une âme », conclut Arnaud Gourret.

Adèle Venard

La SCIC est une coopérative associant à un même niveau acteurs publics, privés et associations

Associer les compétences de l’organisme bancaire et d’une collectivité, c’est du gagnant-gagnant

Les vainqueurs du Vendée Globe sont la figure de proue du pôle d’excellence. / © Serge TENANI / Citizenside / AFP

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