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  • Notre Père qui êtes aux cieux, restez-y, et nous, nous restons sur la terre qui est, quelque fois, si jolie

  • 8 – démo… des mots

    LES ELECTIONS, ON S’EN TAPE !

    IL RESTE À MES YEUX ce phénomène ahuris-sant qu’est l’électeur. N’en resterait qu’un,de ces électeurs, que je continuerais à mequestionner sur son étrange motivation.

    Alors ne nous étonnons pas qu’il y en aitqui ne veulent pas laisser à autrui le soin deveiller à notre bien-être, surtout sans nousdemander la permission, surtout quand onsait que le clampin élu en question se contre-fout du quart comme du tiers de notre bien-être. Ce qui conduit un personnagequelconque à prendre le pouvoir est toujoursguidé par une mégalomanie galopante et sesintérêts propres et, avec, ceux de ses affidés ;si on ajoute ses rapports consanguins etincestueux avec la gent de la finance et deleurs médias aux ordres, on a compris sesmotivations. C’est tout à fait étrange qu’unquidam, après des siècles de maîtres avidesqui le grugent, puisse encore croire qu’un élu

    lui inspire les mots de probité, de dévoue-ment, de travail utile au plus grand nombre,idées de justice, promesses de bien-être futuravec soulagement immédiat de ses misères.Voilà c’est ainsi – et c’est effrayant que rienne lui serve de leçon, à notre électeurlambda, pas plus que les comédies grotes-ques et tristes qui, des siècles durant, ontconsisté à la protection des puissants et parlà même à l’écrasement des petits. Cet élec-teur qui devrait s’apercevoir à l’évidencequ’il ne fait que payer pour tout un tas dechoses dont il ne jouira jamais et qui crèvede ces combines politiques qui ne le regar-dent même pas tant elles ne concernent queceux pour qui cet élu est en place, manipula-teurs de ce système pervers, lui-même mani-pulé par ceux qui le laissent s’amuser de safonction servile. Car dans la servitude –ombre ou rien ne pénètre –, on a pour chef

    l’esclave à qui parle le maître (V. Hugo).Une révolution bourgeoise a abouti à per-mettre de choisir son bourgeois, lui-même auservice des charognards qui éviscèrent notreélecteur ravi et plein d’orgueil car pensantqu’il peut changer quelque chose avec sapetite enveloppe glissée dans la fente d’uneurne.

    Une révolution pour acquérir le triste droitde tendre le couteau à son saigneur, ça laisserêveur et à ce titre je n’accepte pas «de m’entaper». Les charognards, les vrais, ne serepaissent que de cadavres, alors que là nousavons à faire à une espèce qui dépouille àvif : il ne faut pas que la bête meure car elleest reproductive et productrice de sueur et derevenus qui ne lui permettent pourtant quede survivre.

    Sinon bonne chair à canon et à monu-ments patriotiques. Parce que sans monu-

    À propos d’une réflexion nombriliste et péremptoire : «Les élections, on s’en tape!», réfléchissons unpeu… Ça me fait penser à un individu qui, regardant le paysage qu’il a devant sa résidence campa-gnarde, se dit : le nucléaire, on s’en tape! sous prétexte que l’ombre de la centrale se trouve à cent bor-nes de là. On peut aussi faire comme si la question des élections ne se posait plus. Or, le fait est : lesélections existent, et le climat ambiant m’incite plutôt à ne pas pouvoir m’en taper.

  • démo… crazy – 9

    ments pas de patrie avec son cortège dexénophobie haineuse qu’il est bon d’entrete-nir pour donner l’orgueil indispensable àl’acceptation de cet esclavage qui fait laforce des nations.

    Les élections, on s’en tape? Impossible !Cet électeur, le seul, le dernier, croit encoreque quand il vote pour une telle ou un tel, ila la fierté illusoire de penser qu’il votecontre celui-là qu’il ne veut plus voir l’humi-lier ; la triste blague alors que c’est contrelui, contre son épanouissement d’hommelibre qu’il vote.

    Et l’on voudrait qu’avec une joie sadiqueje prenne plaisir de voir une nouvellepériode électorale s’ouvrir alors que l’onpeut affirmer qu’elle l’est déjà, ouverte,qu’elle l’a toujours été, et qu’étant donné nosmœurs parlementaires et nos goûts politi-ques (qui sont de nous mépriser les uns lesautres), cela ne changera rien. Il faut leregretter, mais le fait est là ! Diviser pourmieux régner c’est bien connu et ça marcheencore, ainsi cette Europe avec laquelle onnous bassine, qui devait nous ouvrir deshorizons vastes et enchanteurs, plus de fron-tières et pour faire simple une monnaie uni-que, pour être plus fort. Curieusementinsidieusement les politiques, les industrielscrapules, ont commencé à diviser cetteEurope en tranches et à accuser les autres deviles turpitudes : les Grecs feignasses, lesAnglais pas francs du collier (ils gardent leurmonnaie pour mieux nous niquer), lesRoumains et les Polonais font rien que jouerles jaunes en cassant le prix du boulot, lesAllemands qui font rien qu’à bosser et à pasprendre de retraite et ce dans un ordre natio-nal et volontaire qui force l’admiration, doncla haine (salauds de laborieux !). Alors, quedire des Arabes, des Roms, des Noirs, qui nesont rien que des étrangers sales et voleurs.Diviser toujours : malignement titiller lajalousie du voisin proche, et les retraités, lesfonctionnaires, chômeurs, jeunes, vieux,pour faire simple tous les autres sauf moi,parce que moi je vote, je bosse, je suis malpayé à cause des autres, pas à cause dupatron, ni du système qui est pourri gâté del’intérieur, ni du député qui vote des lois deplus en plus répressives, ni du maire qui, lepauvre, n’est là que parce que sinon y auraitpersonne d’autre (au fait, et alors si on ten-tait le coup de, sans lui, personne d’autre,chiche ! La Belgique plus d’une année sansgouvernement et alors ?). Revenons à cetteEurope providentielle : leur faire voir auxautres comme on allait péter dans la soie,devenir arrogants, voire méprisants. Ilsallaient voir les Ricains et leur dollar, com-ment qu’on allait le mettre à plat ventre, de

    vert il allait devenir gris tout pâlichon, et lesChinois, les Patagons et que sais-je encore,des tunes plein les fouilles : travailler, pas ! etgagner, un max! Mais voilà, c’était sanscompter le pourquoi du système, tous lesmercantiles sont là ! Petits et grands. Lecaoua du matin chagrin, il était à unfranc, ben il est à un euro ; et vapas chercher le petitcommerçant chéri.

    Et oùqu’elle estla femmedu bou-langer?Encoreen train decompter fleu-rette avecle beaubergerténébreuxqui sentbon lethym etle serpo-let ?J’t’enfous,elle a filé à labanque planquer les picaillons. Tous ceux qui l’ont pu se sont jetés commevérole sur la manne céleste ; on calcule pasplus loin que le bout du nez, c’était courud’avance cette avidité à courte vue et alors,bien évidemment que tout s’est engouffrédans cette fumisterie et vas-y de tirer sur laficelle, aussi énorme soit-elle, tout est bondans le pognon ! Mais les réveils sont dou-loureux parfois parce que les salaires, lesretraites, zont pas suivi le mouvement. À unmoment donné, n’en voulait plus tout à faitdu bourbier européen, le zélecteur zélé. On amême feint de lui demander son avis à notreélecteur et il s’est dit, tu vas voir, je vais leurdire NON! et ils vont faire machine arrière.Crotte-zut, celui que j’ai élu pour faire chefil contourne ma décision ! dis-donc, faut êtregonflé des fois ! Sitôt passé le malaise, il aoublié notre électeur, prêt à recommencer.Aujourd’hui quand ça va un peu, c’est grâceau chef des Zélus, quand ça chahute dans leLandernau? Pardon les gars, c’est pas moi,c’est l’Eeeuuurope !

    Les Grecs, on a failli leur demander leuravis à eux aussi sur la taille du couteau pourles saigner, ben même pour ça, niet ! Ça vapas, non? Mais il est barge le Premier minis-tre grec, et pourquoi pas la démocratie enplus? On change le charognard et allez hop,feignasses, au chagrin. Ça non plus notre

    électeur il ne l’a pas vu. Dac ! c’est ailleursque ça s’est passé, toujours les doigts de pieden éventail dans des paysages idylliques, y aqu’à les vendre aux Chinois leurs ruinesPanthéonesques et tu vas voir comment ilsvont y retourner au trimard, non mais ! Cette

    Europe qui, aux jours d’aujourd’hui,n’a abouti qu’au réveil de nationa-

    lismes exacerbés les plus chevelus,attention pas à de saines révo-lutions, non ! plutôt des appelsà la guerre, ce qui pourraitêtre charmant tant il est

    prouvé qu’il est bon, pour unsang neuf des peuples affamés,

    que d’être saigné à blanc. Rienne semble plus efficace pouraccélérer la vie comme de mou-

    rir. Laquelle de ces deuxoptions : révolution ou guerre?On peut rêver aux deux enmême temps? C’est curieux

    comme cette Europe chante une mélo-die qui, je ne sais pas pourquoi, me

    fait penser à… Pétain !À l’évidence de tout cela, on

    s’en tape ! Nous qui sommes au-dessus, à côté de tout cela. Pourma part, il m’apparaît évident

    que nous sommes, non pas àl’aube, mais en plein cœur

    d’une immense pagaille face à laquelle cesélus – qui nous ont entraînés par avidité etconcupiscence contents qu’ils sont à s’y vau-trer voluptueusement, aveuglés par le désirimmédiat de leur propre jouissance – n’ontpas conscience ou bien, plus affreusement,l’appellent de leurs vœux (ça s’est vu moultfois), l’immense gabegie bouchère en pers-pective, sanguette patriotique qui appellerade si beaux discours pleins de trémolos lar-moyants. Il est facile pour cet électeur com-pulsif de se planquer derrière l’idée qu’untyran sanguinaire se devine avant mêmed’avoir assis son système, la blague quevoici ; ça commence par : «avec moi touspour le redressement joyeux et facile, avecmoi nous vaincrons», avec ce malentendu dequi vaincrons-nous? Ça, en général, ça sedévoile après : c’est quand tout est en placequ’on désigne les ennemis. Pourtant,aujourd’hui, ce nationalisme putride, lahaine viscérale des autres gouvernent cepays… la mauvaise graine est en terre etc’est ça qu’il faut changer.

    Voter n’y change rien ! Se remonter lesmanches, car ce sont les mentalités qu’il fautchanger, pas les élus.

    Non décidément, je ne m’en tape pas !

    GABAR

  • 10 – coup de gueule

    On le sait : l’homme est une sale bête, toujours sur les starting-blocks pour massacrer son semblable.Pas trop en Europe ni aux États-Unis, ni en Australie, enfin bref pas trop dans tous les coins où la civi-lisation est un fait accompli depuis des siècles. Non, il existe malheureusement encore des endroits surcette pauvre terre où l’humain se lâche comme un gros porc, ne mange pas avec une fourchette et uncouteau, ignore l’usage du rince-doigts, passe ses semblables au fil de l’épée par simple désœuvrement,pratique en amateur le massacre en série, le viol industriel, bref, oublie qu’il est de l’espèce de Jésus etMozart.

    ON L’AURA REMARQUÉ, ce genre d’événe-ment déplorable se passe souvent sur lescontinents déshérités que sont l’Afrique,l’Asie et, dans une moindre mesure, l’Amé-rique latine. C’est que les humains qui lespeuplent ne sont pas tout à fait comme ceuxqui ont pondu la Déclaration des droits del’homme et du citoyen tout en pratiquant latraite négrière. Heureusement, l’humanismereste une valeur universelle et reconnue,comme la justice. C’est pourquoi les payscivilisés, c’est-à-dire ceux qui sont membrespermanents du Conseil de sécurité de l’Onu,peuvent s’assurer, par le biais des Tribunauxpénaux internationaux (TPI), que les crimi-nels de guerre et les génocidaires qui bousil-lent l’humanité et s’essuient les pieds surleurs intérêts privés répondront de leurs cri-mes. Pour les crimes par eux perpétrés, oupar les criminels qui bousillent l’humanitémais servent leurs intérêts, vous n’y pensezpas, allons, il existe un droit de veto pour ça,qu’exercent la Chine, les USA, la Grande-Bretagne, la France et la Russie.

    Côte d’IvoireUn seul exemple, au hasard : la Côted’Ivoire. Voilà un pays qui n’a vraiment pasde pot. Depuis 2002, il est de fait tronçonnéen deux sous l’œil paternel des soldats fran-çais de l’opération Licorne, qui ont empêchéles vilains rebelles de prendre le pouvoir,tout en aménageant leur installation pourlongtemps dans le paysage politique et enleur laissant leurs pétards pour qu’ils conti-nuent à jouer aux cow-boys et aux Indiens. Ilfaut dire que les entreprises françaises ontbeaucoup souffert de cette étrange maniequ’ont les Africains de vouloir faire deuxrepas par jour. Heureusement, en règle géné-rale, la présence de treillis en nombre suffi-sant calme les estomacs insatisfaits. C’est

    Les Tribunaux pénaux internationaux

    qu’il fallait maintenir la paix, c’est-à-direfaire entrer les rebelles au gouvernement touten leur laissant une impunité totale dans lenord du pays. Et rien ne maintient mieux lapaix que des militaires armés jusqu’aux dentsqui prennent leurs quartiers pour prendresoin de la guerre civile.

    Bref, des morts il y en a eu, et de toutepart. Le concept nauséeux d’ivoirité, queGbagbo n’avait pas inventé mais qu’il abeaucoup utilisé, en a fait son contingent.Mais depuis que Gbagbo est à l’ombre, iln’en occasionne plus des masses. On aime-rait pouvoir en dire autant de Ouattara, l’au-thentique président élu à mort de la Côted’Ivoire, ci-devant chef des rebelles et outsi-der des USA, de l’Onu et de la France sarko-zienne. Celui-là, depuis qu’il a été proclamévainqueur des élections par le monde entier,il n’a pas changé grand-chose à la situationde fait : le pays n’est pas réunifié, et les rebel-les, ou plutôt les ex-rebelles, ramassent lestaxes, contrôlent les douanes et font fruc-tueuse exportation des ressources du payspour leur propre compte ; il faut bien vivre.Quelques centaines de milliers de personnesdéplacées continuent à en chier dans ceszones toujours tenues par eux, et dansl’ouest, comme le note l’Onu : «Compte tenude la persistance d’attaques en représailles,d’arrestations arbitraires, de tueries, de vio-lences sexuelles, de harcèlement verbal et detaxations illégales, la population continue devivre dans la peur dans une région «inondéed’armes»». Mais enfin l’essentiel, c’est quela Démocratie a eu le dernier mot, parce queGbagbo, c’était vraiment un mec dangereux,pour ainsi dire un dictateur. Alors d’accord,OK, les rebelles de Ouattara, de leur côté, ontun peu torturé, violé et massacré un petit mil-lier de personnes à Duékoué fin mars 2011,alors que Gbagbo s’accrochait au pouvoir

    comme une arapède, mais ça, ça ne relèvepas du TPI, c’est différent. C’était dans le feude l’action. Et puis merde, à un moment ou àun autre, il faudra bien que les chefs d’Étatafricains réalisent les risques qu’ils courenten faisant les yeux doux à la Chine alors queles entreprises françaises, et de façon pluslarge occidentales, souffrent d’un contexteéconomique difficile. Les gens pourraientcomprendre ça. Ouattara, lui, l’a très biencompris. Il est du côté de la Démocratie.

    C’est d’ailleurs un homme simple etentier. Sa dernière lubie : fermer les universi-tés du pays jusqu’à la rentrée 2012, a remplid’allégresse le cœur des étudiants commedes enseignants, déjà le cul dans l’eau depuisun an à cause de la guerre civile. Il faut direque ces salopards avaient voté en écrasantemajorité pour Gbagbo. Lors de la conquêtedu pays, les universités ont été littéralementrayées de la carte. L’université de Bouaké aété démontée et vendue planche par plancheaux pays voisins par les rebelles. Ouattara afait le projet d’entourer d’un grand mur lecampus de l’université de Cocody, mur déjàsurnommé « mur de la honte » par toutAbidjan. Ouattara ne peut pas encadrer tousces intellectuels de gauche, il a pour eux lasympathie que notre président éprouve pourla culture en général et les idées dites de gau-che en particulier. Ce qui ne l’empêche pasd’être un excellent démocrate, la preuve, ilne comparaît pas devant le TPI, lui.

    Heureusement qu’une justice internatio-nale existe, quand même. Ça rassure. Quandon pense que sans ça, peut-être, Gbagbocourrait encore… Ça fout la chair de pouled’y penser. Au moins, ça y est, la Côted’Ivoire est libérée. Oui, en deux morceaux,mais ces morceaux sont libres. Surtout celuidu nord. Et la Liberté, comme la Démocratie,c’est hyper important. Ici, dans nos Démo-

  • coup de gueule – 11

    craties avancées, on est absolument libres.On élit des élus, et les élus nous gouvernent,sous le tendre patronage de la finance. Car leproblème des élus, c’est qu’ils veulent êtreréélus. Ils le veulent à tel point qu’ils pour-raient se laisser aller à des écarts lâches etpopulistes comme de refuser de casquer lesdettes des banquiers. Ou d’instaurer une taxeconséquente sur les transactions financières,ce genre de choses.

    Les virer et les remplacerBon, quand le peuple devient dur et le gou-vernement mou, Démocratie ou pas, évidem-ment il faut faire quelque chose, car sinon lesélus pourraient se laisser influencer par lepeuple, et ce serait un comble. Le mieux estde les virer pour les remplacer par des gensqui savent ce qu’est l’économie. Oui, alorsévidemment eux, on ne va pas attendre qu’ilsse fassent élire, ça pourrait durer un peulongtemps. Mieux vaut coller les États soustutelle de l’Union européenne et les gratifierd’experts patentés ès finances, après avoirgiclé en beauté leurs gouvernements élus. On

    l’a fait à l’Irlande, à la Grèce, à l’Italie, à…qui le tour?

    Car tout se joue ainsi. Le seul pouvoir estfinancier. Alassane Ouattara, par exemple,pas besoin de lui coller un expert sur les bre-telles : il est économiste de profession. Il abossé au FMI, dont chacun connaît la voca-tion à mettre de l’ordre dans les petits papiersdes pays pauvres. Il a même été vice-gouver-neur, puis gouverneur de la Banque centraledes États d’Afrique de l’Ouest, l’institutionqui verrouille les chaînes du franc CFA surles économies des pays de la Françafrique,pour le plus grand profit de la maison mère, àsavoir la Banque de France. Voilà un hommequi sait par le menu ce qu’est le néocolonia-lisme, et que les billets de banque sont plusefficaces pour dominer et soumettre que leskalachnikov.

    L’homme providentiel, l’homme qu’il fal-lait pour sauver la Côte d’Ivoire. Alors queGbagbo, le prof Gbagbo, ah ! ah ! un histo-rien, un écrivain, autant dire un parfait ignarede comment les vraies choses se passent dansla vraie vie. Et pourquoi pas un poète? Non,

    il mérite bien son TPI, qu’on le juge et puis,après, qu’on le pende haut et court. Pas parcequ’il a fait massacrer des gens, qu’est-cequ’on s’en fout, des gens ! mais parce qu’ils’est pris pour quelqu’un, et qu’il n’a pasmesuré les risques qu’il courait en nouant descontacts en dehors du pré carré français, voireoccidental. Eh bien on va le lui rappeler.C’est ça, la justice pénale internationale. Ellereçoit sa maille de l’Otan et est suscitée par leConseil de sécurité de l’Onu, ce qui garantitsa parfaite neutralité.

    Quant aux guerres coloniales avec leur cor-tège d’atrocités, elles attendront. On ne saitmême plus qui a fait quoi. Comme disait unélu déposant une gerbe sur le monument auxmorts de la guerre d’Algérie dans une petiteville du Gard : « Ils ont défendu la civilisationcontre l’obscurantisme et la barbarie. » Etpuis les cendres de Bigeard vont être transfé-rées aux Invalides. Il y sera en bonne compa-gnie, parmi tous les buveurs de sang. Non, lesguerres coloniales, franchement, il n’y a pasde quoi en faire un TPI.

  • 12 – la gueule toute verte

    La mer a des reflets d’argent…

    Quand RoRo et LiLi fendent les flots…

    Dès le xve siècle, les mers servaient de sup-port au remplissage des coffres du «vieuxmonde». Les navires, remplis de marchandi-ses pillées et d’esclaves razziés, voguaient àl’énergie éolienne, préfigurant une touchantesensibilité écologique…

    Aujourd’hui, l’économie « globalisée »implique la « fluidité» des flux qui relientzones de production et de consommation 1.Les «grands chantiers» bouleversent notreenvironnement : autoroutes, tunnels, TGV,ponts, etc. Les populations qui en subissentles conséquences se révoltent parfois massi-vement, tels les Italiens de Val de Susa 2.Pour les capitalistes, l’enjeu principal est letransport maritime, qui représente 90% dutrafic mondial de marchandises.

    La logique productiviste nécessite l’accé-lération de l’acheminement des matières pre-mières et des biens de consommation. Le«progrès» permet aujourd’hui la manuten-tion de 200000 tonnes en quelques heures,alors qu’il y a quelques dizaines d’années,elle nécessitait plusieurs jours pour 10000tonnes, les escales représentant plus de 50%du temps !

    Les marchandises solides en vrac (sable,céréales, minéraux, etc.) sont transportéesdans des vraquiers. Appelés les «chevaux detrait des mers», ils comprennent aussi biendes caboteurs côtiers que des géants de

    350000 tonnes.Le fret emballé se répartit entre Ro-Ro et

    Li-Li. Les premiers sont des rouliers et doi-vent leur nom (Roll on-Roll off) au faitqu’ils se chargent d’un côté (avant ouarrière) et se déchargent de l’autre. Lesseconds utilisent des grues (Lift on-Lift off)et, depuis 1970, se sont développés lesporte-conteneurs (70 % du fret emballé) oùs’empilent des boîtes métalliques de 20 ou40 pieds 3. Ils peuvent transporter jusqu’àplusieurs milliers de conteneurs et mesurerplusieurs centaines de mètres ! Leur taille etleur relative rapidité augmentent les risquesd’accident, par collision dans les zones trèsfréquentées, ou par les énormes vaguesqu’ils génèrent.

    En France, un tiers des 1,5 million demarins sont des officiers, issus de diverspays de l’OCDE, les « subalternes » étant,eux, issus de divers pays du Sud. C’est dansces derniers qu’on observe un « volant dechômage » d’environ 200 000 travailleurs.Les tâches sont de plus en plus automati-sées, le travail dépendant d’experts définis-sant la navigation depuis la terre, partélécommande. Un équipage comprend unequinzaine de postes : 3 à 4 officiers, de lanationalité de l’armateur, un personnel depont de manœuvriers (matelots, mécani-cien, cuistot) commandés par un bosco, etquelques ouvriers de maintenance (peintre,soudeur). Les équipages, de nationalités etde statuts différents, sont fournis par desmarchands de main-d’œuvre, les manningagencies, qui prélèvent jusqu’à 50 % dessalaires, qui sont donc faibles. Il subsisteseulement 10 000 marins français, essen-tiellement des officiers : Au niveau descoûts, un poste malgache revient quatre foismoins cher qu’un poste français, avouecyniquement le président de France-Télécom marine.

    Les nouveaux voyages de «Marco Polo»

    Les marges de l’industrie et des servicesreposent sur les pressions exercées sur lesentreprises de transport, particulièrementdans le secteur maritime qui connaît de rapi-

    des transformations :•modernisation des flottes, gigantisme des

    navires, accroissement de leur vitesse,•doublement des capacités d’accueil de

    certains terminaux portuaires,• restructuration du travail dans les ports,

    destruction du statut des dockers,• automatisation des tâches à bord, dimi-

    nution de la taille des équipages.D’énormes projets sont en voie de réalisa-

    tion :•grands travaux liés à l’encombrement

    des corridors maritimes (Suez, Panama,Bosphore, etc.),

    • bateaux à grande vitesse (BGV), auto-routes de la mer (ADM), super-ports, plate-formes multi-modales, etc.

    Ces réseaux hiérarchisent les territoires,renforcent la compétition, imposent des axesprivilégiés.

    Au niveau européen, le programme« Marco Polo », aux énormes investisse-ments, fait saliver les sociétés du secteur :Les transports routiers sont très chers enraison des repos, des accidents et des grèves,les autoroutes maritimes sont créées pourfaire face à cette situation. Ce n’est qu’avecla grande vitesse que les autoroutes de lamer sont rentables. Elles ont créé l’ERT(European round table) qui reçoit des res-ponsables politiques, anime le «Cercle pourl’optimodalité en Europe», où se retrouventsociétés de transport, banques, entreprises deconstruction.

    La « refonte totale des voies de communi-cation» en cours prévoit de nouvelles lignesmaritimes reliant le nord et le sud del’Europe, rejoignant la Mer Noire et le Canalde Suez. Ainsi plusieurs ports sont concur-rents en Espagne pour, notamment, recevoirles ferraillescollec-t é e se t

    trans-f o r -mées

    p a r

    Pour la réalisation d’un jean, les composants parcourent 65000 km, impliquant la main-d’œuvre d’unedouzaine de pays. Ce tour du monde se fait de plus en plus sur les océans, dans des milliers de conte-neurs entassés sur des bateaux plus lourds, plus rapides, fonçant sur les autoroutes de la mer. L’espace,le temps se rétrécissent et nos vies, comme celles des marins et des dockers, sont sacrifiées au dieu profit.

  • la gueule toute verte – 13

    Arcelor en France et en Belgique, puis utili-sées pour la production automobile de lazone cantabrique où a lieu un assemblagepartiel ; la fin de l’assemblage est réalisée enBelgique, le port de Zeebruge étant relié, parla première ADM, à Bilbao. De mêmeCitroën doit bientôt pouvoir utiliser uneADM Vigo-Saint-Nazaire pour acheminervers le Nord ses véhicules fabriqués enEspagne.

    Plus généralement sont envisagés laconstruction de 3 grands ports entre Suez etGibraltar et, à plus long terme, le ravitaille-ment en pétrole sibérien (25% de la produc-tion mondiale) en remplacement desoléoducs.

    Super flux, super-port et méga-profits

    Des recherches sont réalisées pour des BGVmilitaires, chargés de la surveillance et de l’in-terception des «boat-people». De son côté,«BGV International» construit des bateauxpouvant transporter 150 remorques à 70 km/h,contre 30 km/h actuellement. Boulogne-sur-mer avait passé un contrat de 5 BGV avecJohn Paul Airs, de la société ChikaraShipping. Celui-ci, après une fière déclara-tion: Nous sommes en train de changer la facedu transport maritime en Europe, s’est volati-lisé, après avoir empoché les subventionspubliques… Sans se décourager, le patronatlocal affirme sa volonté d’inscrire le port deBoulogne dans lecadre des autoroutesde la mer et du déve-loppement durable :une passerelle capa-ble d’accueillir descatamarans rapides etdes BGV vient d’êtreinaugurée. La «sécu-rité » n’a pas étéoubliée afin de tra-quer les sans-papiers:arsenal policier, bar-belés, vidéo-surveil-lance, détecteurs debattements cardia-ques, etc.

    Et ce n’est rien àcôté du super-portprévu à Cap Djinet,près d’Alger. Ceprojet pharaonique

    comporte 20 km de quais adossés à 5000hectares de zones d’activités : pétrochimie,production d’aluminium, complexe sidérur-gique, construction navale, constructionautomobile, fabrication de conteneurs, cen-trales électriques, dessalement d’eau de mer.Les emplois annoncés accentueraient le«désert industriel» des zones délaissées.

    Le dernier concept « tendance» remis à lamode est celui de «Hub Port», développépendant la Seconde Guerre mondiale afind’accroître la rapidité d’acheminementd’énormes quantités de matériel militaireaméricain. Depuis, l’informatisation destâches permet la spéculation financière et latraçabilité des marchandises : localisation,quantité, état, valeur des stocks. Chaqueopération – emballage, vérification, trans-port, assurance, transfert de propriété,dédouanement, livraison, paiement – faitl’objet de négociations commerciales. Celaimplique des investissements technologi-ques considérables, et l’action de véritables« traders» de la mer.

    Éloge de la lenteur…Le pavillon du «capitalisme vert» 4 flotte auvent : Les ADM sont la proposition concrèteapportée au Grenelle de l’environnement(Armateurs de France), Les BGV sont desnavires verts d’une grande rapidité pour unefaible consommation énergétique (BGV-France), La première autoroute de la mer

    ainsi créée serait une alternative à la route,une bonne chose côté environnement (Vertsdu Boulonnais). Aucune allusion aux peintu-res «anti-fooling» 5 contenant des pesticides,aux dégazages rejetant hydrocarbures et rési-dus de ballasts, à l’utilisation de «bunkerfuel». Ce fuel lourd, très bon marché, est uncarburant particulièrement polluant, géné-rant des substances toxiques (CO2, soufre,etc.), causant la mort par empoisonnementde milliers de marins !

    Le projet de super-port à Pasaïa en Espagneimplique destruction des falaises, disparitiondes calanques, aplanissement des collines…Face à la réaction des populations, est envisa-gée la création d’une île artificielle géante, àpartir de millions de mètres cubes de terreprélevés dans la montagne voisine!

    Nous laisserons-nous mener en bateau,soumis aux choix des capitalistes et de leurscomplices, tels Rupert Murdoch qui assène,du haut de son immense fortune et de sonempire médiatique : Le monde change à unevitesse folle. Désormais ce sera le rapide quibattra le lent.

    Dans nos luttes sociales, ralentissons,immobilisons la circulation des produits,donc des profits.

    Dans ce monde où la vitesse est devenuele nouvel absolu pour l’acquisition desrichesses, le vecteur d’une véritable «dromocratie» 6, revendiquons, pour profiter

    de notre vie, aprèsle « droit à laparesse», le «droità la lenteur».

    ÉLAN NOIR

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    1. Voir Creuse-Citron,n° 5, «Transports : tra-fics en tous genres».2. NO TAV : Non autrain à grande vitesseLyon-Turin.3.de 6 ou 12 mètresenviron.4. Voir Creuse-Citron,n° 29, «Vert et dura-ble… le capitalisme?»5. Suppression desorganismes vivants dela coque.6.De dromos = course.

    [Cet article s’inspire de Fortunes de mer,

    Acratie, 2010.]

  • Roger et Bella Belbéoch,