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  • 6 goulag mou

    La premire chose quil faut faire, cest prendre soin de votre cerveau. La deuxime est de vousextraire de tout ce systme dendoctrinement. Il vient alors un moment o cest un rflexe de lire la pre-mire page dun journal en y recensant les mensonges et les distorsions. Pour y arriver, vous devezencore reconnatre que ltat, les corporations, les mdias vous considrent comme un ennemi : vousdevez donc appendre vous dfendre. Si nous avions un vrai systme dducation, on y donnerait descours dautodfense intellectuelle.* NOAM CHOMSKY

    Les ministres de la VritLors dun rcent dbat organis par RadioLibertaire autour de la libert dexpression,Normand Baillargeon, universitaire liber-taire qubcois, rappelait que, face aux avan-ces de lirrationalisme, de la propagande etdes manipulations, il y a ncessit urgentedopposer une pense critique et sceptique.Nous sommes englus dans une bouilliedinformations, touille vigoureusement parexperts, politiciens, professionnels desmdias, conseillers en communicationMme si les supports actuels se sont norm-ment dvelopps, dillustres spcialistesavaient depuis longtemps pratiqu un desmoyens permettant de mainte-nir les peuples dans la servi-tude volontaire, ou dans ceque Chomsky dsigne par lesgoulags mous de nos soci-ts dmocratiques.

    Citons-en deux : force de rptitions et

    laide dune bonne connais-sance du psychisme des person-nes concernes, il devrait tretout fait possible de prouverquun carr est en fait un cer-cle. Car aprs tout, que sontcercle et carr ? De simplesmots. Et les mots peuvent trefaonns jusqu rendremconnaissables les idesquils vhiculent.

    Bien sr le peuple ne veutpas la guerre. Mais quilsagisse dune dmocratie,dune dictature fasciste, dunparlement ou dune dictaturecommuniste, il sera toujoursfacile damener le peuple sui-vre. Quil ait ou non droit laparole, le peuple peut toujourstre amen penser comme les

    dirigeants. Il suffit de lui dire quil est atta-qu, de dnoncer le manque de patriotismedes pacifistes.

    Le premier est Joseph Goebbels, le secondHermann Goering Dans 1984, clbreroman de Georges Orwell, dnonciation desunivers totalitaires, le hros Wilson estemploy au Ministre de la Vrit pourmodifier chaque jour les informations enfonction des directives volutives du pou-voir.

    Les mots sont des armesAvant dimaginer, dans 1984, la novlan-gue, langage dcharn ne permettant de

    nourrir aucune pense critique, GeorgesOrwell avait bien compris lusage dtournque les politiciens font des mots, notamment propos de la domination anglaise en Inde :

    Le langage politique doit pour lessen-tiel tre constitu deuphmismes, depseudo-banalits et de vaporeuses ambigu-ts. Des villages sont-ils bombards depuisles airs, leurs habitants forcs de fuir vers lacampagne, leurs troupeaux passs lamitrailleuse, cela sappelle pacification.

    Depuis, les publicitaires, au service despuissances conomiques, pervertissent notreunivers visuel et sonore. Ainsi lInternatio-nal Food Information Concil des tats-Unis

    sinquite en 1992 de la perceptionngative qua le public des biotech-nologies alimentaires. Un vasteprogramme de recherches est misen place pour dterminer commenten parler avec une langue develours. Des mots sont fortementrecommands : abondance, diver-sit, terre, gnrations futures, tra-dition, dautres sont prohibs :biotechnologie, industrie, labora-toire, machines, argent, profit, pes-ticides.

    Beaucoup de procds sont utili-ss pour enrgimenter les mots dansdes jeux truqus. Citons-en quel-ques-uns, faciles reprer dansnotre environnement quotidien :

    Jargon et pseudo-expertise,utiliss pour complexifier artificiel-lement des choses simples ou mas-quer lindigence de la pense.Certains intellectuels nhsitent pas sy prter, ainsi que le dnonceChomsky :

    Il sagira de prendre ce qui estplutt simple et de le faire passerpour trs compliqu et trs profond.Les groupes dintellectuels inter-agissent comme cela. Ils se parlent

    Autodfense intellectuelle

  • goulag mou 7

    entre eux, et le reste du monde est supposles admirer, les traiter avec respect.

    Lhumoriste Pierre Desproges sinquitait :Quand un philosophe me rpond, je necomprends plus ma question.

    Ad populum, un choix est juste puis-que cest lavis de tout le monde ! Lappel la foule et la tradition sont des stratgiestrs efficaces. Elles offrent lavantage deflatter les convictions les plus conformistes,et donc les plus courantes. Dans leur forme laplus dangereuse, cela peut devenir un appel la pression populaire, allant jusquau racismeet la xnophobie.

    Appel lautorit, la publicit utilisedes gens clbres pour influencer leconsommateur. Parfois des experts sontappels la rescousse pour ajouter un zestede bonne parole scientifique. Sont passssous silence les liens de certains avec des fir-mes concernes par leurs affirmations for-melles. Lexemple rcent du Mediatordmontre que la plupart des participants des commissions mdicales dpendent delaboratoires pharmaceutiques

    Retour vers lgosystme ?Face toutes ces manipulations, faut-il serfugier dans la seule exprience person-nelle ? Mme sil sagit dune source essen-tielle de donnes, il est dangereux de senremettre elle de faon aveugle et exclusive.En effet, nous construisons peu peu desschmas explicatifs pour interprter lemonde qui nous entoure. Cette grille dana-lyse peut nous rendre rticents digrer desfaits qui la contredisent : Vladimir Borissov,dissident ouvrier russe fondateur du Smot(Syndicat interprofessionnel des travailleurslibres), divisait les individus entre ceux quiles rejettent 100% et les plus ouverts,qui les rejettent 90%!

    Dautre part ltre humain est un tresocial, et son jugement est influenc par lat-titude des autres, ainsi que le montrent diver-ses expriences :

    Leffet Pygmalion, des prdictionsdeviennent vraies du fait quon les croitvraies. Un test dintelligence est appliquaux enfants dune cole maternelle. Le rsul-tat en est fourni aux enseignants, en leursignalant les lves (environ 20 %) quidevraient connatre un excellent dmarragescolaire. la fin de lanne scolaire, unepartie importante de ceux-ci a effectivement

    fait de grands progrs. La liste avait t choi-sie au hasard

    Lexprience de Milgram, soumissionaveugle lautorit. Un laboratoire recrutedes volontaires pour tudier les effets de lapunition sur lapprentissage. Un chercheur enblouse blanche les accueille par paire, et tireau sort entre un professeur et un lve.Ce dernier passe dans une pice adjacente, etsassoit sur une chaise qui peut transmettreune dcharge lectrique. Le professeurcommandera le niveau de la dcharge, quicrot avec le nombre de mauvaises rponsesde llve une liste de questions prta-blies. Lexprience montre que 63 % desprofesseurs vont administrer des dchar-ges atteignant 450 volts, malgr les hurle-ments de douleur et les supplications dellve. Le chercheur utilise quatre injonc-tions : veuillez poursuivre, lexpriencedemande que vous poursuiviez, il estabsolument essentiel que vous poursuiviez, vous navez pas le choix, vous devez pour-suivre. Heureusement, tout est truqu, seulle professeur est lobjet de lexprience

    Lexprience de Asch, les mfaits duconformisme. Des volontaires sont assis dansune pice. On leur projette une seule ligne,puis trois lignes, dont une seule a lpaisseurde limage prcdente.

    Les volontaires, interrogs sur le choix dela ligne de bonne paisseur, choisissentcurieusement une ligne manifestement diff-rente. Le volontaire interrog en dernier estvisiblement interloqu Cest en fait lui leseul objet de lexprience, qui montre queplus du tiers se rallie une opinion manifes-tement fausse

    Pour le dveloppement durable de lesprit critique

    Ces expriences inquitantes prouvent-ellesnotre fragilit face aux manipulations au ser-vice de la socit dominante? Peut-on secontenter de sourire quand Coluche affirme :On ne peut dire la vrit la tlvision, il ya trop de gens qui regardent. ? Lenjeu estpourtant essentiel, comme le soulignait JamesMadison, un des rdacteurs de la Constitutionamricaine :

    Un peuple qui veut se gouverner lui-mme doit sarmer du pouvoir que procurelinformation. Un gouvernement du peuple,quand le peuple nest pas inform ou na pasles moyens dacqurir linformation, neserait quun prlude une farce ou une tra-gdie.

    Dsempars par ce tsunami de mots etdimages distordant le rel, devons-nous nousrfugier dans les bras du socialisme scienti-fique , ainsi que les marxistes dsignent leurcredo ? Les certitudes du matrialisme histo-rique leur ont permis deprvoir lavne-ment inluctable du communisme, laissant aubord du chemin les collectivits condamnesconomiquement, paysans, communautsindignes, etc. Dans les multiples chapellesissues des prophtes marxistes, doit-on prieravec ceux qui annoncent dtenir LaVrit, titre depuis 1929 de nombreusespublications du courant trotskiste lambertiste(aujourdhui le POI)?

    Ce nest pas du ct des croyants, quelsquils soient, que nous avons la possibilit de dvelopper une salutaire autodfense intellectuelle. Munis de la connaissance desdiffrents moyens de maltraitance de linfor-mation, il est conseill de multiplier nos sour-ces et de les comparer, afin de construirenotre opinion personnelle. Pour sortir de noscertitudes rigides, noublions pas de confron-ter nos opinions celles des autres.

    Le sociologue William Graham Sumneraffirme :

    Si lhabitude de penser de manire criti-que se rpandait au sein dune socit, elleprvaudrait partout, puisquelle est unemanire de faire face aux problmes de la

    vie. LAN NOIR

    *Cit par Normand Baillargeon dans Petitcours dautodfense intellectuelle, Lux,2005. Ce livre est la matire du prsent arti-cle.

  • 8 coup de gueule

    La crise en cours, ainsi que les lois rgressives qui se succdent au mpris le plus complet de lavis popu-laire, nous font un peu perdre de vue des broutilles telles que le partage des ressources lchelle pla-ntaire, et lordre colonial maintenir pour le faire perdurer sous un fond de teint dmocratique.

    CAR LES PEUPLES RICHES sont sensibles etnaiment pas les images de pillages, de pol-lutions hideuses, de gnocides et de dictatu-res sanglantes. Ils aimeraient que luranium,le ptrole, lor, le cuivre, le coltan et autresprcieux adjuvants de leur niveau de vie leurarrivent sous une jolie tiquette Fair Trade,comme le chocolat et le caf. Hlas, pas deMax Havelaar dans les secteurs de lnergieet des ressources minires.

    Les derniers vnements ont rappel auxdistraits le rle dun gouvernement : servir lasoupe aux ploutocrates nationaux. Dansdautres pays, qui sont nos fournisseurs dematires premires, le rle du gouvernementest de servir la soupe aux ploutocrates colo-niaux, par le biais de satrapes locaux qui, aupassage, se gavent comme des oies. Recon-naissants, ils renvoient lascenseur en finan-ant les campagnes lectorales des candidatsde tous bords qui concourent pour leur cirerles pompes, dans les pays nocolonisateurs.

    Pour que ceci ait lair dtre librementconsenti par les populations spolies, affa-mes et brutalises, les satrapes se prvalentdlections dmocratiques. En Afrique, deschefs dtat comme Faure Gnassingb Eya-dema, fils de son pre et successeur de lui-mme au Togo, Ali Bongo, fils de son pre,au Gabon, Denis Sassou Nguesso, succes-seur de lui-mme au Congo-Brazza, BlaiseCompaor, successeur de lui-mme itou auBurkina, doivent leur charisme et leursqualits humaines davoir t lus ou rlusles doigts dans le nez. Oh bien sr, il y a euquelques enlvements de militants de lop-position suivis de tortures, quelques mani-festations rprimes de faon un peu viveaprs lannonce des rsultats au Togo, enmars dernier. Il faut dire que les Togolais ontle sang chaud. Ils navaient dj pas voulucroire llection de Faure la mort de sonpre, en 2005, allant jusqu se faire massa-

    crer par les forces de lordre pour jeter lop-probre sur un processus lectoral pourtantlimpide. Par mesure de prcaution, Chiracavait envoy une quipe de la DGSE rcup-rer fissa dans les ministres et les adminis-trations togolais tous les fafiots qui auraientpu faire croire une troite collaborationentre la France et le rgime sanglant dEya-dema pre. Les gens sont si malveillants, ilssautent tout de suite aux conclusions htives.Au Gabon, en septembre 2009, quand estmort le plus vieux dinosaure de laFranafrique et que son fils a t lu, lesGabonais, qui ont la tte prs du bonnet toutautant que les Togolais, ont oblig les forcesde lordre tirer dans le tas. Bourgi, leFoccart au petit pied de Sarko, a pourtantjur ses grands dieux que la France navaitpas de candidat au Gabon. On se demandepourquoi alors les Gabonais hurlaient desinjures anti-franaises dans les rues deLibreville. Sans compter quici, chez nous,des Gabonais de la diaspora ont gueulcomme des putois devant les tours Total etAreva pour dnoncer ce quils ont appel uncoup dtat lectoral. Et voil comment ilstraitent le pays qui les accueille, ces ingrats.

    Quant Denis Sassou Nguesso, que desmdisants honts accusent de crime contrelhumanit sous le prtexte fallacieux quequelques centaines dexils auraient t unpeu houspills en 1999 du ct du Palais pr-sidentiel, et auraient si bien pris le largeaprs ces semonces que nul ne les a jamaisrevus, il a eu la preuve en juillet 2009 de laconfiance des Congolais. En effet, sans serendre dans les bureaux de vote o les asses-seurs semmerdaient ferme, ils ont nan-moins lu leur prsident sortant 78%, avecun taux de participation de 64%. En Afrique,les votants savent tre discrets, et mmeinvisibles. Comme toujours, la France aapplaudi des deux mains. Les Congolais, qui

    tiennent leur peau, savent quoi sen tenir.Les enlvements, tortures, exactions et dis-paritions sont monnaies courantes sous cergime chri par le gouvernement franais.Et je passe sur Idriss Dby, rlu triomphale-ment en 2007 prsident du Tchad, etc., etc.

    Mais arrivons aux dernires lections quinous concernent tout autant, sinon plus, quecelles qui se droulent sur notre territoire,puisque nos ressources en dpendent, etquelles sont truques par nos spcialistes,depuis peu largis lUE entire. Le21 novembre dernier, lami Blaise Com-paor, dont les mains, en matire de sang, necraignent certes pas celles de Sassou, a trlu par la foule en dlire sa propre suc-cession. Cest croire quen vingt-trois ans,depuis quil a assassin Sankara avec labndiction du gouvernement franais, lesBurkinabs nont pas encore russi en fairele tour et en redemandent. Ils ne sont pasrancuniers, les Burkinabs, avec tout cequils ont endur. Et maintenant, toutaurol de cette victoire, Compaor qui aensanglant non seulement le Burkina maisle Sierra Leone, o il a longtemps traficotavec cet autre humaniste quest CharlesTaylor, et la Cte dIvoire, o il a mordicussoutenu la rbellion nordiste se pose enmdiateur dans le sac de nuds lectoral deladite Cte dIvoire. Il y a de quoi se taper lecul par terre.

    Il faut dire quen Cte dIvoire, la Francese plante avec obstination dans le choix deses poulains. Elle refuse Gbagbo depuis dixans. Et puisque les Ivoiriens prfrent quandmme Gbagbo, elle se dmerde pour couperle pays en deux en engraissant la rbellionnordiste. Ouattara tait le candidat delUMP, de la France, des USA, de lUE.Rien que a. Gbagbo est un politicien aussicynique quun autre, mais un politicien peuenclin tendre toutes les joues du pays la

    Cuisine africaine

  • coup de gueule 9

    France. Qui a gagn les lections? Gbagbo,depuis, a reu le soutien de la Chine et de laRussie, toujours promptes remuer le mgotdans la plaie. En 2002, le processus lectorala dbouch sur une sanglante guerre civile.Les soldats franais, dj nombreux en CtedIvoire, se sont mis prolifrer comme despetits pains. Agresss par la foule, ils ont tirdans le tas, faisant 67 morts et des milliers deblesss. Jusqu aujourdhui, les troupesdoccupation, ONU comprise, se sontdbrouilles pour maintenir une partition defait du pays. Cest bien connu, rien ne vautune bonne petite guerre civile pour que lesaffaires marchent du feu de dieu. Qui a int-rt ce que la Cte dIvoire prospre? Pasnous, elle nous ferait payer ses richesses unprix normal. Pas nos entreprises, qui lontdpece comme lquarissage. Ouattaratait prt servir les intrts des Occiden-taux, et tout particulirement la France, lepetit doigt sur la couture du pantalon. On nepeut pas en dire autant de Gbagbo. Eh bientant pis, la Cte dIvoire sera coupe endeux, a lui apprendra. Lami Blaise doit se

    frotter les mains, lui qui avait accueilliOuattara bras ouverts et qui arrose la rbel-lion nordiste. Il est en passe de remplacerBongo pre comme tordu en chef de laFranafrique.

    Enfin, lessentiel, cest que Liu Xiaobo aeu le prix Nobel de la paix : ctait vache-ment mouvant. On aurait pu le filer Norbert Zongo, le directeur de publicationde LIndpendant, parce que cest courageuxaussi de faire de linfo indpendante auBurkina, mais il a t assassin en 1998. Etpuis le Burkina est un pays libre, ami de laFrance, pas une sanglante dictature commela Chine. On aurait pu le filer Pius Njaw,courageux fondateur du Messager, arrt126 fois en trente ans, et dont la femme aperdu lenfant quelle attendait pour strefait tabasser par les matons en venant voirson poux lors de lun de ses emprisonne-ments. Mais Pius est mort cet t aux USAdun accident de la route. Et puis leCameroun est un pays libre, pas une odieusedictature. Si Bibi Ngota, tmraire directeurde Cameroun Express, y est mort en taule en

    avril dernier, cest la faute pas de chance,pas celle de Paul Biya. On aurait pu le filer lincrevable dput Ngarlejy Yorongar, quiraconte dans un livre courageux : Tchad :Dmocratie, crimes, tortures et mensongesdtat comment, en fvrier 2008, la France avol au secours du dictateur et couvert las-sassinat de Saleh, un opposant trs popu-laire, et le sien propre, puisquil fut laisspour mort tandis que les autorits franaisesannonaient son dcs. Mais merde, le Tchadnest pas une dictature, enfin !

    Il parat que Blaise Compaor voudraitsacheter un prix Nobel de la paix. Avec lesoutien de la France, de lOnu et de lUE, etpourquoi pas des USA, il aurait peut-tre seschances ? Mais cette anne, cest LiuXiaobo, professeur duniversit et crivainchinois partisan des droits de lhomme. Entout cas en Chine, pas forcment en Irak, carcest un bushiste forcen qui a beaucoup tra-vaill pour les USA. Ceci explique peut-trecela Et on stonnera encore que la Chinesoutienne Gbagbo

    LAURENCE BIBERFELD

  • Ah! Je les vois djCompasss et frileuxLa mine affligeTous nos ncrophages patentsIls se poussent du curPour tre le plus tristeIls se poussent du coudePour tre le premierDevant ces monuments grisAux noms presque effacsMais bon sang de croix de boisEt la 3e, alors, cest pour quand?

    La guerre de 3 naura pas lieu

    10 capitalisme la poubelle

    LA GUERRE DE 3 NAURA PAS LIEU

    ALLONS ne baissons pas les bras. Ne vouslamentez pas, les attentistes de combats loin-tains. Les bellicistes organiss, regardez biendans les lointains. Bien sr on ne vous ditrien ! On vous cache tout ! Alors voici qui vavous faire bander : 45000 50000 morts/j.Oui, cest une fourchette, odieuse. Cestapproximatif, mais 5000 prs, cest cer-tain. Le dcompte se fait hasardeusementpour ceux-l pour qui, cest chaque jour, unefte de faim damne. Un certain a, volontai-rement, ironis sur le fait que la misre seraitmoins pnible au soleil, surtout quand, silen-cieusement, discrtement, certes un peu bal-lonn, on sy dessche comme un pruneau

    sous ce sacr soleil. Comme ces morts-lsont trop discrets et puis si loin. Mme pasdignes dun cimetire. Cest vrai que lonimagine mal entendre prononcer la voixtremblante de gtisme : Entre l crve-la-faim, dans ce panthon incertain. Victime decette arme des ombres, celle des morts defaim. Vous qui navez mme pas parl, justeun peu trembl, frileux sous ce soleil denfer.

    Bon, cest vrai que cest moins porteurquune bonne guerre bien nous, avec desmartyrs bien nous. Tous ceux-l on ne lesconnat mme pas. Si, parfois, quelques ONGen mal de cotation nous exposent une superbephoto en noir et blanc et quatre par quatre sil

    vous plat. LONG se fait sa pub. Le photo-graphe de renom est indemnis et aura un prixclbre. Le publicitaire qui aura conu le pro-jet fait sa com. Lafficheur occupe ses pan-neaux et dduira de ses impts. Toi, le petitngrillon, mort depuis la photo, tu ntaismme pas de chez nous, on ne sait mme doquttait, encore dun de ces pays o lonnirait mme pas en vacances?

    La 3e guerre mondiale contre lafaim, la misre, la soif, lexploi-tation, ce nest pas parlant, cenest pas vendeur, o si peu.

    Ah! Je les vois djLes courtisans dla viergeLes peloteurs de SaintsTous ces aumniers jouisseursDe quelques coulures de ciergeLeur collant encore aux doigtsSe dsoler piteux un crucifixTendu impudique obscneLa besace pleine de de profondisPriant dieu que surtout :La 3e guerre mondialeAlors aura bien lieu!

    La guerre de 3 naura pas lieu

    Ah! Je les vois djLes ceula qui ne sont fiersDe leur belle jeunesseQue quand elle part offerteAu champ dhorreursFaut-il quils les dtestentLeurs enfants qui ne leurOnt rien fait pour ne les aimerQue gueulant ventre ouvertMaman jai peurUne dernire foisMais scrogneugneu dune pipe en bois

    Cette 3e guerre il la leur faut !

  • Alors encore ceci : enChine, en Inde, en Afrique,des volontaires (tous, dans lapire des mouises, les volon-taires), contre quelques rou-pies de sansonnets reoivent travers le corps des testsmdicamenteux pour desmaladies quils nont aucunechance de chopper dans leurscontres. Ils en crvent, onsen fout, les docteurs Man-gele ne sont pas morts. Lespuissants groupes Mdicaux-Pharmaceutiques ne peuventplus trop se permettre der-reurs avec de coteux volon-taires de nos rgions riches,cest trop onreux et mauvaispour limage. Cela dit, troisdcs rcemment en Grande-Bretagne, mais, bof! ctaittrois femmes du peuple. EnFrance, sous lgide duministre de lAgriculture, uncomit dthique sest consti-tu pour contrler au mieuxles conditions de vie et detraitements des animaux delaboratoire. Ce qui est un minimum normal,dautant que, par nature, il ny a pas dani-maux de laboratoire, il y a seulement des ani-maux. Mais alors pourquoi et commentpeut-on passer sous silence les conditions devie des humains de laboratoire? Humains qui,eux non plus ne sont pas destins tre delaboratoire. Bien entendu nous ne voulons pasvoir souffrir un proche ou soi-mme, maisfranchement cest se demander? Jusquoest-ce tolrable que notre petit confort soit sicher pay par dautres? Alors a non plus ane mrite pas le titre de 3e guerre mondiale?

    Peut-tre aussi quils ny mettent pas duleur tous ces misreux ; dabord sur nosmonuments aux morts, leurs noms graversont trop difficiles. Puis ils sont si loin de parchez nous, presque aussi loin, voire peut-tremoins parfois ? que l o nous sommes allsen vacances, pour voir, en touristes vaccins,dorlots protgs mais tout de mme quest-ce quon a eu chaud et soif, et cest pas pourdire, mais la bouffe !? Pardon?

    Un petit dernier pour la route. Encore unefois chez ceux-l, presque exsangues, unersistance pour la survie les fait se portervolontaires pour trier nos ordures, nos

    11 capitalisme la poubelle

    tains, ce qui nempche quenous pouvons, autant quefaire se peut, tre au moinsvigilants. Il nest pas ques-tion de battre notre coulpe,qui peut-tre ne nous a rienfait, mais rveillons-nous enrsistant la facilit de lin-diffrence et mme saforme la plus faux-jeton quelon appelle la srnit.

    Pour ceux-l, qui a nesuffirait pas, il y a une pers-pective despoir. Nenten-dons-nous pas le sinistrebruit que font leurs mainsqui se frottent, lune lautre,celles de ces fabricants et deces marchands darmementaccompagns de leurs indis-pensables religieux, quiconstatent avec dlice etdun seul cur que se poin-tent nos horizons la relancede la relance par lespoir quedonne ces guerres contre leterrorisme, dont chacun saitque lon est toujours le terro-riste de lautre. Quand cha-

    cun regarde par le petit bout de sa lorgnettepour voir do vient la barbarie. Celle de nosbrillants pays que lon dit civiliss sexercedepuis de si longues annes avec tant demorgue que lon sest habitu trouver celanormalement normal, au point mme quelon est surpris, aujourdhui, que jaillissentdes fous furieux de dsespoir qui dcidentden dcoudre et, effectivement avec autantde grce et dlgance que celles que lon aeues leur gard. Mais nous faisons tablerase du pass, nous avons oubli qui les a misen colre. Basta ! Vous allez lavoir votre 3e

    guerre mondiale ! Alors, allez-y sans vergo-gne, lustrez-vous-le, le monument pleinepaluche. Juste, sans moi. Non, merci !

    GABAR

    gadoues immondes parce que : pas de a cheznous ! Ces milliards de tonnes de pourrituresqui nous sont indispensables, il faut les trier,en dgager la substantifique moelle, rien nedoit se perdre, il faut recycler ? Oh, non, paspar esprit cologiste ! Juste, encore une fois,par mercantilisme! Et puis nous crverions,nous, enfouis sous ces tonnes dinutilitsindispensables notre confort avec lequelnous ne sommes mme pas heureux, parcequil en faut toujours plus. Nous vivonscomme ces rats qui, lorsque le grenier estplein, bouffent sen faire pter la sous-ven-trire et qui, devant labondance, croissent etse multiplient jusquau moment o la mannese tarit, alors ils terminent en se bouffantentre eux. Belle perspective !

    La guerre de 3 naura pas lieu? Elle est l,sous nos yeux depuis la dernire. Cette 3e

    guerre mondiale chaque jour, avec, toujourscette ironique fourchette des crve-la-faim,45000 50000 et ce ne sont que les gaminsque lon comptabilise l dans cet immensecamp dextermination quest cette planteTerre sur laquelle nous sommes tous.Collabos probablement. Coupables probable-ment, mme si, directement moins que cer-

    Les Nations-Unies destinaient 1 mil-liard 300 millions de dollars de laideinternationale Hati ; mais ils se sontenvols avant larrive ! Sur place leflou le plus troublant rgne quant au par-tage qui en a t fait entre les diffrentesONG

  • 12 mmoire aux poings

    Le A cercl

    NI PROUDHON ni Bakounine nont invent leA cercl, encore moins les jeunes dtenteursdu permis de conduire.

    En effet, contrairement au drapeau noir,arbor au XIXe sicle pour se dmarquer dudrapeau rouge des Communards, le A cer-cl a t invent tardivement, au milieu duXXe, prcisment en avril 1964 Paris etrinvent Milan en 1966.

    Cest sur la couverture du Bulletin desJeunes Libertaires de Paris quapparatpour la premire fois un Acercl, dessin par RenDarras du groupe ponyme deParis, sur une ide de TomasIbanez fortement inspire dusigle antimilitariste des beatnikset hippies opposs la guerre auVietnam.

    Propos lensemble du mou-vement anarchiste par-del les dif-frents courants et les diversgroupes ou organisations, TomasIbanez rappelle les motivations surle choix dun tel emblme :dabord faciliter et rendre plus efficace lesactivits pratiques dinscriptions et afficha-ges, ensuite assurer une prsence plus large

    Tous les vieux (et moins vieux) briscards anars connaissent son histoire, mais cest pour toi, la passante,que je vais la refaire (et pour plein dautres assurment) qui ma demand ce que a voulait dire ce trucque tu as vu sur un autocollant en bas de chez moi, et parfois dans le Creuse-Citron quil tarrive defeuilleter

    En 1971, alors que se pr-parait linauguration de la Caserne Bongeot Guret (groupement de gendarmerie dparte-mentale), avec la bndiction des lus, dontOlivier de Pierrebourg, dput-maire deGuret, un tract anonyme et une affiche claire-ment signe Les anarchistes de Guret exprimaient une petite rsistance libertaire. Letract, tir la rono de la Maison des Jeunes,avait t distribu dans les botes aux lettres deplusieurs HLM, au grand dam de la Mairie, yvoyant tort la main de lopposition de gau-che Lauteur du tract, toujours enrag,apprend lexistence de laffiche (sur le site duCira) quaranteans plus tard. Morale de lhis-toire : coordonnons les luttes !

    Le tract et laffiche sont visibles sur le [email protected]

    GURTOIS

    Un escadron de mouches merde envoy par Marcellin va simplanter Guret.Or, une mouche merde de Marcellin, cest un CRS.Et un CRS cest la dernire des mouches merde.Des pourceaux croient shonorer en semployant acclrer limplantationde cet escadron sous le prtexte de lexpansion conomique de Guret.Mais ne vous leurrez pas !!!Cest une manuvre lectorale. Vos futurs administrateurs pensent avanttout favoriser lexpansion de la rpression organise par le FLICMarcellin.

    REAGISSEZ pour sauvegarder vos aspirations et ce qui vous reste deliberts.DITES NON ceux qui vous trompent sournoisementNON ces FLIC EN PUISSANCE.NON leur projet de REPRESSION et de FASCISATION.

    du mouvement anarchiste aux yeux des gens,par un caractre commun toutes les expres-sions de lanarchisme dans ses manifesta-tions publiques. Le sigle adopt a parurpondre le mieux ces critres. En lasso-ciant constamment au mot anarchiste, le siglefinira, par un automatisme mental bienconnu, par voquer tout seul lide de lanar-chisme dans lesprit des gens.

    Le succs escompt nest pasau rendez-vous, en grande partie cause des moyens techniquesrudimentaires utiliss dans lesannes 1960. cette poque,les militants, imprimant sur stencils , se devaient dereproduire fastidieusement la main le sigle chaqueimpression Aprs que laGiovent libertaria de Milanla repris et utilis en 1966,le A cercl se met en grveen Mai 68, avant de pren-

    dre vraiment son essor dans lesannes 1970. Redessin en 1971 par GianniBertolo pour figurer dans le titre dun officielmensuel anarchiste, il retrouve sa place dansle mouvement anarchiste, aprs avoir t uti-

    lis par lextrme droite, notamment enItalie. Le A est alors strictement inscrit dansun cercle.

    Ce sont les autonomes allemands quiladapteront pour en faire cette belle signa-ture des anarchistes, nerveuse, simple etfacile excuter, qui fleurit aujourdhui, par-tout dans le monde, sur les faades, les affi-ches, les tracts, les vtements.

    Nanmoins, quand une touche A cerclsur le clavier de nos ordinateurs?

    A. P.

    Pour en savoir un peu plus :A cercl, histoire vridique dun symbole,

    ditions alternatives, 128 p.http://jccabanel.pagesperso-orange.fr/mt_a_propos_du_a_cercle.htm;h t t p : / / f o rum.ana r -c h i s t e . f r e e . f r /viewtopic.php