Creuse-Citron N°20

download Creuse-Citron N°20

of 16

Transcript of Creuse-Citron N°20

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    1/16

    Journal de la Creuse libertaire - N 20 mai-juillet 2009 - prix libre

    Creuse-Citron

    T o u s e

    n c o l r e

    C h e u n o u s a u

    s s i p . 2

    R o u l o t t i e r s e n m i r

    e p . 3

    C o u p d e g

    u e u l e

    U n p l a n d e p

    u t ' p . 4

    C a p i t a l i s m

    e

    l a p o u b e l

    l e

    L e c a u c h e m a

    r c l i m a t i s p . 5

    L a d i g n e r a g

    e p . 6

    U n j o u r d e g

    r v e p . 7

    M a u v a i s e

    s

    f r q u e n t a t i o

    n s

    U n s i m p l e c u

    e i l l e u r p . 8 - 9

    M m o i r e

    a u x

    p o i n g s

    A d r i e n n e M o

    n t e g u d e t p . 1

    0

    l ' a f f t

    b t o n s r

    o m p u s p . 1 1

    M a u v a i s e s

    l e c t u r e s, R

    e v u e d e

    c r i s e, R e n

    d e z -

    v o u s p p . 1 4 -

    1 5 - 1 6

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    2/16

    2 Tous en colre

    Cest arriv prs de chez vous

    IL EST VRAIque nous navions pas vu unetelle mobilisation depuis longtemps. Lacote de lapprenti Napolon na jamais taussi basse, en chute libre nous disent lesmdias qui sy connaissent, oui, mais pourquoi avait-elle t aussi haute ? Leslecteurs enfin ont compris la blague : tra-vailler plus pour gagner Le chmageaugmente de faon vertigineuse, les

    salaires au mieux stagnent, le pouvoir dachat, lui, seffondre. Ltat offre desaides pour pallier la pauvret, des aides qui ? aux banques Ah bon, a ne rassure personne ! Yen a marre, trop de raisonsdtre en colre, de faire du bruit, de lefaire savoir, oui mais des raisons cono-miques, vous tes sr quil ny en a pasdautres dans ce bilan provisoire des deuxans de lagit !

    Dans notre beau pays des droits delhomme, des types en uniformes, cas-qus, arms, tt le matin, dfoncent une

    porte, se saisissent des personnes et lesemmnent dans des cars. Cela se fait telle-ment gentiment que certains prfrentsauter par les fentres et mourir plutt quedtre pris. Les mmes troupes vont lasortie des coles, voire dans les classes,semparer denfants, direction les cars,adultes et enfants vont dans des camps enattente dune destination ultrieure. Desrafles voil qui nous ramne une priodede notre histoire o notre pays ne faisait plus rfrence aux droits de lhomme.

    Ce pourrait tre une vision paranoaque,si un ministre, ex socialiste, ntait venudans les mdias expliquer que la dlationdevenait dans certains cas un acte patrio-tique ; Pierre Laval nest pas loin aider ou cacher un sans-papier est condamnabledevant la loi, les passagers qui, dans unavion, sopposent une expulsion sontarbitrairement interdits de vol sur Air

    France.Dans le mme temps et le mme pays,des rfugis politiques italiens, CesareBattisti, entre autres, qui Mitterrandavait reconnu le droit dasile, sont recher-chs, arrts, et risquent dtre renvoysdans lItalie combien dmocratique deBerlusconi, alors quils vivaient et taientintgrs dans la socit franaise depuis plus de vingt ans.

    Tout cela ne concerne que des trangers,nous navons pas grand-chose y voir.Est-ce si sr ?Fin 2008, J.-M. Rouillan, ancien mem- bre dAction directe, aprs vingt-et-unans de prison dans des conditions particu-lirement dures, est libr en condition-nelle, il dclare la presse quil neregrette pas sa vie passe, il est immdia-tement rincarcr : qui savait quundtenu ayant effectu son temps doit en plus regretter Il est toujours derrire les barreaux ; la loi aurait chang linsu denotre plein gr !

    La France est rgulirement montre dudoigt par la Commission europenne desdroits de lhomme et par Amnesty Interna-tional pour ses conditions dplorables dedtention : 62 000 dtenus pour 30 000 places, on estime 30 % le nombre demalades mentaux emprisonns qui nau-raient rien faire dans ces tablissementset devraient tre soigns, mais la psychia-

    trie na plus dargent ! En 2008 et dbut2009, pratiquement un suicide par jour dans les prisons de France, dont un bonnombre de dtenus en prventive, nonencore jugs ni condamns. La peine demort nexiste plus depuis 1981, mais il nya jamais eu autant de mortalit chez lesdlinquants ou supposs tels. Des prison-niers de Fleury-Mrogis ont film clan-destinement leurs conditions de vie,effarant. Il nest pas prcis, lors des juge-ments, quoutre la privation de libert, onest galement condamn la promiscuit,la surpopulation, linsalubrit, le racket, laloi de la jungle, le viol pour certains, et parfois la mort.

    La rponse gouvernementale ceci estsimple, la construction de plus de places,de btiments supplmentaires en faisantappel au priv, Bouygues est dj sur lesrangs, attention il faudra remplir, rentabi-lit oblige ; soyez innocents 200 %, lerecrutement commence.

    Le collge de Marciac en novembre2008 est investi pendant les cours par la police, sous prtexte dinfo anti-drogues,avec chiens policiers, fouilles au corps etdans les cartables, mme chose Arthez-de-Barn dbut fvrier 2009, cette fois ladescente des cars scolaires le lundi matin.Lennemi : le jeune, le pr-adolescent, ilest mme prvu de les dbusquer [par psy-chologues interposs] dans les maternelleset les crches.

    La ministre de lIntrieur vient de nous promettre, pour notre scurit, de passer de 20 000 60 000 camras de surveil-lance, nous allons tre bien protgs, maisde quoi ? Se promener la nuit en villedevient suspect, les contrles didentit,les fouilles au corps et du vhicule laidede chiens se multiplient. Le soir onregarde la tl, cest tout.

    Le mcontentement samplifie, la France gronde, le populo est dans la rue, deux millions et demile 29 janvier, un peu plus le 19 mars ! Tous les deux mois ? Attention, il y aura les vacances dt

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    3/16

    CEST UNE VRITABLE SITUATION DE CRISEque vivaient depuis quelques mois des famillesinstalles sur leur propre terrain dans des habitations lgres, en loccurrence yourtes etroulottes. Situ un kilomtre du petit village de Bussire-Boffy 350 mes environ ,lendroit pourrait paratre idyllique mais ctait sans compter la guerre dclare en 2008 par le nouveau maire pour chasser ces familles ; il avait mme employ les termes de nettoyage de marginaux Nous avons rencontr Alex et Sara, un des couples vivanten yourte avec leur bb. Certains sont arrivs l il y a une quinzaine dannes. Nousavons cr une vie de village solidaire dont le ciment est les enfants. En effet quinzefamilles avec 26 enfants vivaient en harmonie avec lancienne municipalit. Les habi-tants du Petit Pic et du Grand Pic apportaient au village une vie associative et culturelleriche, des auto-entreprises diverses. Alex et Sara vivent en autonomie complte. Ils ontmis en place un bassin de lagunage, des toilettes sches, une olienne, une source

    proximit, un potager. Ils travaillent la terre quils respectent par leur choix de vie. Leshabitants des yourtes souhaitaient un raccordement qui leur a t tout bonnement refus parce que le maire a fait approuver une carte communale excluant leurs terrains, malgrles recommandations du commissaire-enquteur charg de lenqute publique ! Si centait pas de la mauvaise foi quest-ce que a pouvait bien cacher ? Et finalement les2 500 signatures de la ptition auront eu gain de cause comme quoi il ne faut jamaisabandonner. Le maire a dcid de lgaliser 4 yourtes sur 5 en effet la 5e yourte a tinstalle sur le site aprs ltablissement de la carte communale et de crer un co-vil-lage. Le combat est-il termin ?

    Pour se tenir au courant de lvolution de cette affaire suivre ces liens : www.maca- bane.info ou www.yourtesbussiere-boffy.com http://tipikelt.over-blog.com/article-28799165.html http://yourtesbussiere-boffy.info/

    Sommes-nous la croise des chemins o demain choisir son habitat ne sera plus pos-sible ? Visiblement, le cas de Bussire-Boffy nest pas un cas isol. Dans certainsdpartements comme les Pyrnes-Orientales, la prfecture sest dote dune charte anti-cabanisation en 2006 et annonce ainsi clairement sa position. Dfinition de la cabanisa-tion extraite de cette charte de bonne conduite : La cabanisation consiste en uneoccupation et/ou une construction illicite servant dhabitat permanent ou occasionnel. Elle se matrialise par une rappropriation et/ou une extension de cabanons tradition-nels et par le stationnement, sans autorisation, de caravanes ou de mobil homes aux-quels sont ajouts terrasses, auvents ou cltures. Je vous invite prendre connaissancede cette charte sur le site de Ma Cabane, cest fort intressant. Comme Bussire-Boffy,ils mettent en avant la lutte contre lexclusion sociale et linsalubrit. Lgitimation duneinterdiction dopter pour un mode de vie autonome (nous devons absolument consom-mer pour tre citoyen ?) et cologique (les logements collectifs sinsrent-ils mieux dansle site quune yourte ? Il est plus facile dentasser les gens les uns sur les autres dans des botes, rassembles pour mieux les centraliser et les matriser plutt que dans des your-tes dans la nature !). La dcroissance sereine nest pas pour demain ! Cette faon devivre met pourtant en exergue une empreinte cologique faible. lheure o lon nousdit et redit quil faut prendre soin de notre plante, la lgislation saffole ou plus exacte-ment ceux qui veulent lgifrer sur tout. Quels en sont les enjeux ? Lintrt gnral ? Ilserait intressant maintenant douvrir un dbat pour dfinir cet intrt gnral quiautorise les pouvoirs publics prendre des positions discriminantes vis--vis de certaines populations. Lintrt gnral des uns nest pas forcment celui des autres ! Quest-ce-qui fait peur ? Que les gens vivent dans des conditions simples o quils ne puissent plus engraisser le systme ? Heureusement des associations comme Cantoyourte, Halemet Ma Cabane se battent pour la reconnaissance de lhabitat lger. Une associationcomme Ardheia (Association de recherche et de dynamisation de la filire pour un habi-tat cologique, innovant et alternatif) parcourt les routes de France pour aider lauto-construction de yourtes, maisons en bois cords, cabanes ou rfection de charpentes labandon. Force est de constater que dans ce domaine la lutte ne fait que commencer !

    SYLVIE

    xxx 3 Tous en colre 3

    Un comique a jet un uf au prsident :condamnation, un autre, sur son passage, a brandi une pancarte : Casse-toi pauvrecon (ses propres termes), il risque la prison.

    Les liberts senvolent, regardez-les passer ! Ce nest pas une migration, ilnest pas sr quelles reviennent.

    On se rapproche. Tarnac, 11 novembre2008 : une horde casque et masqueencercle le village, sensuivent les arresta-tions que lon sait, devant les camrasinvites pour loccasion, cinq personnessont emprisonnes pour terrorisme,aujourdhui, Julien Coupat est toujoursenferm ; sans la moindre preuve !

    Limoges le 22 janvier 2009, dans un bar, parce quils recherchent un sans- papier, les policiers sinvitent, menacentceux qui posent des questions, les fouil-lent violemment, gazent le local, refer-ment les portes et sen vont. Limogestoujours, mai 2008, Kevin, 19 ans, mani-feste devant la prfecture contre la sup- pression de postes denseignants. Aprsune charge violente de la police, il est jetau sol puis interpell, inculp de violencesenvers les forces de lordre, il risque troismois de prison, le procs doit se drouler le26 fvrier, mais nous sommes en avril

    Les liberts labandon, partout, maisaussi prs, trs prs de chez nous.

    Il est important de protester dans la rue,contre la vie chre, contre la chute du pou-voir dachat, contre le chmage, les licen-ciements, en un mot contre la misre, mais pour autant ne mettons pas la tte dans lesable : caches par les effets dsastreux delconomie librale, les destructions syst-matiques des liberts collectives et indi-viduelles se multiplient, presque danslindiffrence, car la lutte contre la misre etla faim semble prioritaire. Si la crisesestompe doucement dans quelquesannes, les liberts disparues ne reviendront pas delles-mmes, elles avaient t con-quises par la lutte, et ne reviendront (ou neseront conserves) que de la mme manire.

    Tout ce qui est dcrit plus haut est arriv prs de chez vous ; refusez lindiffrence, protestez, avant que lon vienne frapper votre porte.

    On ne nat pas libre, on le devient.

    PHILIPPE

    Yourtes et roulottes Bussire-Boffy (87)

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    4/16

    4 Coup de gueule

    Un plan de put pour Mayotte

    LE GOUVERNEMENT FRANAISne man-que pas de culot. Malgr le mouve-ment qui secoue les quatre vieilles

    colonies, il concocte en louced un plan de pute pour choper Mayotte, sur laquelle ilrgne en toute grossire illgalit depuistrente-trois ans. Il refait aux Mahorais lecoup du rfrendum : en violation du droitonusien, qui voulait que le rfrendum soitcompt sur lensemble du territoire colo-nial, o 95 % des Comoriens avaient vot pour lindpendance, il la t le par le, permettant la France de garder Mayotte,o grce sa campagne dintimidation lesMahorais staient prononc 65 % pour rester dans le giron franais. Quant au restedes Comores, elles ont connu depuis, grce la diligence des barbouzes franais, une

    vingtaine de coups dtat et deux assas-sinats de prsidents, sombrant dans unemisre et une instabilit chroniques. Cer-

    tains se souviennent peut-tre de ce vieuxsalopard de Bob Denard, paradant la sor-tie du palais de justice sur fond dopposantscomoriens rvolts.

    Denard est mort, mais son uvre pros- pre. Sur lle de Mayotte, le prfet blancna pas lair choqu dexercer son sacer-doce. Les 20 rsolutions de lONUcondamnant loccupation illgale deMayotte par la France ne lempchent pasdexpulser tour de bras les sans-papiersvenus en kwasa-kwasa des autres lescomoriennes : 13 000 expulsions lannedernire ! Depuis que Balladur, inspir par Pasqua, a instaur en 1995 le visa dentrequi porte son nom, restreignant drastique-ment le droit de circulation entre les les,les 70 bornes qui sparent Anjouan deMayotte sont devenues le plus grandcimetire marin . Y reposent les quelque6 000 noys quon appelle ici les mortsBalladur . Mais faudrait pas croire pour

    autant quil suffit dtremahorais pour avoir droit ses papiers franais.

    Mayotte, la Franceapplique un droit du sang plus que restrictif :

    Les illgaux y sont donc60 000, sur une populationde 185 000 habitants. Et lesuns profitant du quasi escla-vage des autres, musels par la violence de la PAF et la perspective de se faire bot-ter le cul jusqu leur le dedpart, une haine xno- phobe, nourrie de la misredes uns, de limpunit desautres, sinstalle doucement, pour le plus grand profit desautorits illgales. Ah ! lamission civilisatrice de laFrance... En son temps, la

    Belgique avait russi fabri-quer de toutes pices deuxethnies qui se hassaient auRwanda, en racialisant desdiffrences sociales.

    Aujourdhui encore, Hutuset Tustsis, quoiquaucunediffrence linguisitique, reli-gieuse ou culturelle ne per-mette de les distinguer, ce

    qui est pourtant la base de la diffrencia-tion ethnique, sont considrs et se con-sidrent eux-mmes comme deux peuples

    spars, ennemis. La France est en traindoprer la mme manipulation criminelleaux Comores. Cest quelle tient sa basede communication par satellite et ses

    culottes de peau qui veillent sur le canaldu Mozambique. Et pour que la chose soitgrave dans le marbre une bonne fois pour toutes, elle a organis le 29 mars unrfrendum o les Mahorais se sont prononcs 98 % pour la dpartementali-sation de Mayotte

    Lorganis ati on du monde reste colo-niale. Le capitalisme, totalitaire (et sub-claquant, youpi !) que nous connaissons,est fond sur cette distribution colonialegre la fois par les instances transna-tionales telles que lONU, lOMC oulUE, et par les entreprises transnationalespaules par les excutifs vassaliss destats les plus riches. Dont la France. Etdailleurs, je ne veux pas avoir lair duneobsde, mais quest-ce quelle fout Madagascar, la France ? Elle ne va quandmme pas proposer aux Malgaches unedpartementalisation ? Non, elle nen a pas besoin, elle est dj premier bailleur, premier partenaire et premire commu-naut trangre. Madagascar reprsenteson troisime budget de coopration mili-taire. Cest vrai que la France soutenait plutt Ratsiraka contre Ravalomanana, etque maintenant elle protge tendrementRajoelina, pote de Ratsiraka, contre lemme Ravalomanana (une sombre crapule par ailleurs). Bon, cessons de tergiverser,quon mannexe sance tenante tout ce quise trouve entre la Runion et le Mozam- bique, on y verra plus clair, bordel !

    Si ces soubresauts colonialistes ne fai-saient pas autant de morts, ils prteraient rire. Ou pleurer : sans le pognon des pays CFA pris en otage par la Banque deFrance pour garantir le franc du mmenom (65 % de leurs rserves de change),

    nous aurions dj bu le bouillon de lacrise. En somme, le pognon que notregouvernement balance tour de bras danslescarcelle des banquiers et des fabri-quants de bagnole, cest celui desAfricains qui crvent de ne pouvoir yavoir libre accs. Ah ! le joli temps descolonies... ctait hier, cest aujourdhui.Et demain ? Comme le dit le manifeste desneuf intellectuels antillais :

    Lautre trs haute ncessit est desinscrire dans une contestation radicaledu capitalisme contemporain qui nest pas

    une perversion mais bien la plnitude hys-trique dun dogme.

    LAURENCEBIBERFELD

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    5/16

    DEPUIS QUE LCOLOGIEde marchest devenue un des lments fon-damentaux de lidologie contem- poraine, il est dusage den appeler tout bout de champ la responsabilit duconsommateur . Un texte publi dans un prcdentC. C.lillustrait dans son genre : Nous y sommes de Fred Vargas.

    Mais quest-ce en ralit quun con-sommateur ? Et quel est son rle dans la socit de consommation moderne ou pour mieux dire dans la socit bureaucratique de consommation dirige (Henri Lefevre, en 1968. Cit dans De lamisre humaine en milieu publicitaire,Groupe Marcuse, La Dcouverte, 2004).

    Bien des gens ont crit sur cette ques-tion, depuis que Huxley a publi Le Meilleur des mondesen 1932 (de lcolede Francfort aux situationnistes). Ledernier roman de lauteur de science-fiction anglais J.-G. Ballard (I.G.H.,Lle de bton, Crash,...) se situe danscette ligne.

    Par-del lespce denqute policirequi constitue la trame et le prtexte dulivre, le personnage principal deQuenotre rgne arrive(Folio, 2008), cest le Mtro-centre , un gigantesque centrecommercial, cur dune banlieue rsiden-tielle de Londres, coince entre uneancienne zone industrielle, un aroport etun nud autoroutier.

    Et cest aussi bien sr la masse de sesconsommateurs-habitants.

    Le roman est dj remarquable par lesdescriptions trs convaincantes de lu-nivers de la banlieue et de son amnage-ment de lespace, qui constituent lessentieldes premiers chapitres. On sait que lamajorit des populations occidentalesvivent dsormais dans un tel environ-nement ; pourtant celui-ci, si omni- prsent, et videmment si dcisif pour lanature de la socit et des hommes dau- jourdhui, nest presque jamais vritable-ment regard, eta fortiori pens etformul. Il est presque partout invisible,ou masqu sous les idologies et les slo-gans les plus divers.

    Et certes limage familire que nous prsente lauteur dans ce miroir nestgure flatteuse

    Lautre lment marquant du livre, cesont les considrations des diffrents per-sonnages et du narrateur sur la nature pro-fonde du consumrisme et sonvolution prsente. Nous en dgageronsquelques lignes directrices.

    La consommation de masse nest pas, principalement, une rcration (Nico-las Hulot), ou un amusement (FredVargas). Cest plutt une forme particu-lirement dgrade et vide de sacr, ledernier terrain pour une expriencereligieuse (quasi-mystique), une magietotmique ; si lon prfre, cest unemtaphysique et une vision du monde.

    Le lche-vitrine tait devenu le modlede tous les comportements humains.

    la caisse, o se droulait la plus grande confrontation de lhumanit aveclexistence, il ny avait pas dhier, pasdhistoire revivre, juste un ardent

    prsent de transaction. Cest ainsi la rponse et le remde demoins en moins suffisant au nant de lavie moderne , cest--dire de la vie dans

    la banlieue, et lennui quelle distille.La consommation de masse est aussi le

    contraire de la libert. La socit de consommation est une

    sorte dtat policier mou. On croit avoir le choix mais tout est coercitif. Si onnachte pas encore et toujours, on est mauvais citoyen.

    Le consumrisme est le meilleur instrument de contrle de la populationqui ait jamais t invent. De nouveaux phantasmes, de nouveaux rves et anti- pathies, de nouvelles mes soigner.

    Ballard expose en quoi le rgne sans partage du consumrisme sur la viemoderne correspond une forme nou-velle dorganisation sociale, o les cat-gories censes tre le fondement dessocits dites librales ou dmocratiquesse sont progressivement transformes encoquilles vides.

    Il faut prparer nos enfants une socit diffrente. [] quoi sert la libertdexpression, quand on na rien dire ?Soyons ralistes : la plupart de nos conci-toyens nont rien dire, ils le savent per-tinemment. quoi sert la vie prive, si cenest quune prison personnalise ? Leconsumrisme est une entreprise collec-tive. Ici, les gens veulent partager et clbrer ce partage. Ils veulent tre unis. En faisant les magasins, chacun prend part une crmonie collective daffir-mation.

    Le roman insiste longuement sur lessimilitudes entre la consommation demasse et le vieux totalitarisme politique :conformisme radical, soumission volon-taire lautorit, irrationalisme rgressif

    Le consumrisme est une forme nou-velle de politique de masses [] Il tire son impulsion des motions, seulement ses promesses sont ralisables.

    Des impressions fugaces, une illusionde sens flottant sur un ocan dmotionsindfinies. Bref nous parlons de politiquevirtuelle, sans le moindre lien avec laralit, quelle redfinit son image.

    Fort logiquement, lauteur pousse jusquau bout ces similitudes ; il imagine

    Dernires nouvelles du cauchemar climatisNotes sur le consommateur, partir du dernier roman de Ballard

    Capitalisme la poubelle 5

    Les zones commerciales, la culture de laroport et de la voie rapide Bref, un enfer dun genre nouveau ,J.-G. BALLARD, Que notre rgne arrive.

    Le citoyen, cette chose qui a remplac lhomme que dire alors du consommateur ?

    p. 7

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    6/16

    Emiliano Zapata,un anarcho-autonome ?

    Malgr loccultation des me(r)dias, lchode nombreuses rsistances au dsordrecapitaliste samplifie. Ainsi au Chiapas,des communauts indignes ont mis enuvre lautonomie comme principe poli-tique. En totale indpendance vis--vis deltat mexicain, chaque commune auto-nome choisit un Conseil, dont les mem- bres sont lus, mandats et contrls par lassemble. Il est charg de promouvoir la sant, lducation, le logement, lali-mentation, la culture, linformation, la jus-tice. Dans chaque zone zapatiste lesinitiatives sont coordonnes par desdlgus de chaque commune, renouvelsrapidement par roulement. travers unfonctionnement bas sur les us et coutu-mes amrindiennes, on retrouve des pra-tiques anarchistes : dmocratie directe,fdralisme. Bien sr ltat et les partis politiques, au service des vautours desentreprises transnationales avides desressources nergtiques locales, tentent par tous les moyens dentraver leur dveloppement. Mais la dynamique esttelle que leur influence dpasse largementles frontires du Mexique, parmi les peu- ples indignes et mme au-del.

    Pour clbrer le quinzime anniversairedu soulvement zapatiste, a t organis,du 25 dcembre au 15 janvier, le Festivalde la digna rabia(digne rage) , pendantlequel plusieurs milliers de participantsont chang informations, convictions,motions, sur de multiples rsistances audsordre capitaliste.

    Changer le mondesans prendre le pouvoir

    Une des interventions les plus remarquesfut celle de John Holloway, conomiste et philosophe rsidant Puebla. Il est lau-teur deChanger le monde sans prendre le pouvoir , qui a eu un grand cho enAmrique Latine et fut traduit en franais

    aux ditions Syllepse en 2008. Il est lob- jet de fortes oppositions de la part des par-tis politiques hritiers du bolchevisme etde la social-dmocratie, dont il remet encause le fondement : la prise du pouvoir comme perspective privilgie de laction politique. Il appuie les zapatistes qui mon-trent quil est possible de sefforcer dechanger le monde en se centrant sur desactes de rsistance dans le quotidien. Ilrejoint ainsi la tradition libertaire et offreune critique en rgle de la tradition mar-xiste-lniniste et troskiste. Il comprend larvolution comme lutte CONTRE le pou-voir, et non lutte POUR le pouvoir. Il partde la conviction que nous sommes capa- bles dactions de crativit dans notreenvironnement, participant ainsi unetransformation du monde qui nousenserre. Pour lui, cest le fait de poser desquestions, individuellement et collective-ment, qui est essentiel, et non de donner des rponses toutes faites :

    Nous nous posons des questions parceque nous ne connaissons pas le chemin,mais aussi parce que mettre en question lechemin fait partie du processus rvolu-tionnaire.

    Voici, pour les lecteurs deCreuse Cit-ron, de larges extraits de son intervention(indite en France) quelque part dans lafort lacandone. LAN NOIR

    Linsubordination crative,ici et maintenant

    1. Rage, rage ici, tous les jours. Rageface la violence quotidienne de la police. Rage face la destruction desforts. Rage face au racisme, rage face aufoss obscne entre les revenus desriches et la misre des pauvres, rage face larrogance des puissants. Rage parcequils sont en train de transformer un pays magnifique en un pays pourri, un pays o vivre, cest vivre dans la peur.

    Rage parce que ce nest pas seulementle Mexique, mais le monde entier qui pourrit, quon est en train de dtruire.Rage parce que nous vivons dans unmonde fond sur la ngation de lhuma-nit, la ngation de la dignit. Rage parceque la seule faon de survivre est de sevendre. Rage parce que la crise de ce sys-tme se traduit par plus de pauvret, plusde violence, plus de frustrations.

    2. Avant lexplosion de rage nous som-mes victimes, victimes du systme capi-taliste. Tout ce que nous pouvons faire entant que victimes cest souffrir, demander des changements, formuler des revendica-

    tions. En tant que victimes, nous avons besoin dun leader, dun parti. En tant quevictimes nous esprons un changementdans le futur, une rvolution dans le futur.

    Par le cri de rage nous rompons avec a,nous disons : Non, nous ne sommes pasdes victimes, nous sommes des humains, asuffit de vivre comme a, a suffit de souf-frir ! Nous nallons plus rien demander personne, nous nallons plus formuler derevendications, nous nallons plus attendrela rvolution dans le futur, parce que lefutur nen finit pas darriver. Nous allons

    changer les choses ici et maintenant. 3. Le plein dveloppement de la dignerage ne signifie pas seulement le cri de Non, nous nacceptons pas, nous ne

    Sous les pavs, la rage

    O donc se ballade la main invisible du march sense rguler rigoureusement lconomie librale ? Fuyant lenfer capitaliste, sest-elle rfugie dans les paradis fiscaux , deux visages du dieu Janus delargent ? Les cohortes de patrons, banquiers, politiciens, experts, journaleux, qui ont conduit le monde la russite actuelle, vont-elles conserver des fidles, croyant aveuglment dans des propositions qui netentent que de sauver le systme et ses seuls bnficiaires ? Les solutions ne pourront sortir que de nosinitiatives, nos rvoltes, nos rflexions, nos changes, nos solidarits, que la rpression tatico-policirene suffira pas contenir.

    6 Capitalisme la poubelle

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    7/16

    xxx 7

    nous soumettons pas. Cest aussi le Nous allons faire autre chose, nousallons vivre dune manire qui ne colle pas avec le capital. Nous luttons contre lecapitalisme non seulement avec des man-ifestations et des pierres mais surtout enconstruisant autre chose. Nous luttonscontre le capitalisme en vivant le mondeque nous voulons crer.

    4. La politique de la digne rage laisse enarrire la politique des victimes, la poli-tique des revendications, la politique desconstantes dnonciations, la politique deleaders, des partis et de ltat. La dignerage nous met au centre. Nous, hommes etfemmes, crons le monde avec notre cra-tivit, notre activit. Cest nous aussi quicrons le capitalisme qui nous tue : cest pour cela que nous savons que nous pou-vons arrter de le crer.

    Ce nest pas que nous ayons faire larvolution, car nous sommes dj en trainde la faire, et la crise est lexpressionvisible du fait que nous sommes en trainde la faire. Le capitalisme est un systmede domination, de subordination. Et desurcrot, il dpend dune subordinationtoujours plus absolue de la vie au travailalin. Sil ne parvient pas imposer cette subordination totale, il entre encrise ouverte.

    5. Nous ne sommes pas les ternels per-dants ; notre rbellion, notre insubordina-tion, notre dignit sont en train de secouer le systme. Il ne faut pas regarder la crisecomme lcroulement du capitalisme,mais comme lruption de notre dignit, lanaissance dautre chose, dautres rapportssociaux, des rapports sociaux fonds sur ladignit, sur la digne rage.

    Le dfi est de renforcer ce processus,cette cration dun autre monde. Il ne peut tre question de demander plusdemplois ou plus dtat, parce que ceux-ci signifient le renouvellement de la sub-ordination au capital. Nous nedemandons rien personne, nousdveloppons ici et maintenant linsubor-dination crative : Nous nallons pasnous subordonner aux injonctions ducapital, nous allons faire autre chose,nous allons encourager laide mutuelle,la coopration, la cration, contre le cap-

    ital. Avec rage, mais avec une rage quiouvre dautres perspectives, qui credautres choses, une digne rage.

    JOHNHOLLOWAY

    Capitalisme la poubelle 7

    un avenir proche o les consommateurs,lasss de leur passivit, en viendraient se constituer en un mouvement de masseactif, en retrouvant alors la plupart descaractristiques du vieux fascisme, quoi-que sans aucun programme ou idologie

    prcis. Il nest pas question de message. C-tait bon pour autrefois.

    Les rencontres sportives et les clubs desupporters sont dans le roman les occa-sions de ces mobilisations de masse desconsommateurs.

    Les gens entrent l-dedans [dans lecentre commercial], et ils se rveillent, ilsdcouvrent le nant de leur vie. Alors ilscherchent un autre rve

    Comme dans ses autres romans, Ballard

    insiste sur la violence et le nihilisme, la barbarie, qui se trouve au cur de lasocit de masse moderne, derrire le para-vent polic, dmocratique, humaniste.

    Les banlieues rvent de violence. Assoupies dans leurs pavillons somno-lents, sous laile de leurs centres commer-ciaux bienveillants, elles attendent patiemment les cauchemars qui lesveilleront un monde de passion.

    Cette violence latente nest pas du toutincompatible avec la soumission uneautorit, bien au contraire.

    Ils adorent quon leur impose unevraie discipline, de temps en temps, quonleur donne des ordres. [] Ils adorent tre punis punis et aims. Mais pas par

    un pre quitable, plutt par un gelier capricieux, qui les surveille travers lesbarreaux.

    [] Les gens veu-lent de la discipline,de la violence, mais surtout, de la vio-lence structure.

    Les gens raison-nables, les gensralistes, trouveront peut-tre quelque peu paranoaque defaire des banlieues dela classe moyenne etdes paisibles vies deconsommateurs, detels tableaux decauchemars.

    Il est pourtant des cauchemars dont nulne peut dsormais mettre en doute lavracit : de luniversel empoisonnementchimique et radioactif, aux famines plani-fies daujourdhui et de demain (le bouleversement climatique nest dans toutcela quun lment parmi bien dautres).Pour qui veut bien faire preuve de bonne foi et dun peu de distance critique,il nest pas trs difficile de comprendre,ou de sentir, que le cauchemar que dcritBallard en exagrant un petit peu, selonles lois du genre est le complment par-faitement logique, le reflet ce niveau silon veut, du saccage universel ; une piceindispensable de la grande machineriesociale qui broie le monde et lhumanit.

    Pour que tourne la machine, il faut pro-duire, et pour produire, il faut consommer,

    cest aussi simple que cela.

    Revenons notre point de dpart et la responsabilit du consommateur . Ilest bien vident que la question ne peuttre pose avec ce simplisme moralisateur qui ignore sciemment le monde rel et lasocit.

    Brutalement dit, pour quune socitindustrielle, cest--dire une socit de pro-duction de masse, puisse fonctionner, ilfaut imprativement que le consommateur consomme ce quon lui dit de consommer :

    la planification indispensable ce typede production doit en effet rpondre lecontrle strict, la planification, de la con-sommation correspondante.

    p. 5

    p. 9

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    8/16

    8 Capitalisme la poubelle

    Jour de grve en septembre

    PART LGITIMER les culs poss dans lesfauteuils des ngociations et la grosseur des chques aux divers participants, enhaut de la pyramide rpublicaine, et pour

    nous en bas, la pitaille de base : nous per-mettre doffrir 4, 5 ou 6 jours de salaire nos ministres et nos patrons, quoi sertla chanson quon nous fait chanter depuissix ans, depuis les grves rates de 2003 ?

    Aujourdhui comme hier, il ny a rien ngocier, juste savoir sils ont besoin de10 ou 12 heures pour dmissionner, ficher leur camp ! Avant que a saigne !

    Entendons-nous bien : cest le seulobjectif qui soit digne dune lutte efficace,radicale, raisonnable ! Grve gnrale,comme en 36 et comme en 68.

    Rsumons vite fait pour ceux quau-raient pas compris : ils dtruisent tout, ils pillent ils trononnent ils cassent ils dlo-calisent ils polluent ils accaparent ilsvendent ils vident ils salissent ils se parta-gent le butin ils dilapident ils volent ils

    chassent ranonnent et exploitent lesimmigrs, les vieux, les jeunes, les pau-vres, les malades, les salaris, les retraits,les artisans les tudiants les hospitaliers et

    les ducateurs, les chercheurs, les enfantsles femmes enceintes, etcEt la seule rponse serait : des aides

    pour supporter la crise ? une augmenta-tion de salaire ?

    Mais cest eux, la crise ! Ils trbuchent,font cahoter le systme avec leurs multi-nationales, leurs banques et leurs boursesquils ont rendues incontrlables, exprs pour sen mettre plein les fouilles, et cestencore le peuple qui trinquerait ?

    Des aides pour la relance, pour lem- ploi ? Mort de rire ! La relance de l-

    conomie, cest comme lexclusion , quicest qui parle ? Ces mots sortent de quelle bouche ? Si cest pour nous parler de lacomptitivit des entreprises frannnnaii-ises et de lconomie de march mondi-aaaalise et nous faire pleurer de rire,

    cest inutile, les emplois, les vrais, sont enchute libre depuis trente ans et les perfu-sions et les cache-misre des stages, RMIet TUC, CES et autres radiations limina-

    tions des chiffres dj bien dguiss nychangeront rien : les richesses produitescontinuent de crotre et la main duvreest de moins en moins ncessaire avecleur systme, leurs rgles et leur mafia !

    Alors, ceux qui bavent encore en utili-sant le vocabulaire patronal ont dj perduloccasion de se taire, et ne sont que devils collabos. Nous refusons la guerresociale plantaire, consommateurs de tousles pays, crosses et cabas en lair !

    Et nos pieds dans leurs derrires, quilsy aillent au chagrin pour concurrencer lesesclaves de lEst ou du Sud ! Ni patrie nifrontire, non seulement on nest pas n pour retourner au moyen-ge et fairemieux que les sans-papiers sur les chan-tiers ou dans les caves de par chez nous, faire plus que les Chinois 15 heures par jour enchans dans lusine sept jourssur sept. Mais en plus nous leur crions, nos frres exploits chinois, africains, sud-amricains et europens le mme mes-sage :

    Stop ! Basta, que se vayan todos !comme disaient les Argentins il y a dixans, quils sen aillent tous, grve gn-rale, boycott, dsertion et sabotage, etsolidarit internationale contre les multi-nationales, les paradis fiscaux, les action-naires et autres fonds de pension !

    En prison, avec une pioche pour lesdmolir, les geles infectes, et en cadence,on vous donne la musique pour un vrai boulot dintrt gnral, de service public !

    Boulot ? Travail ? Augmentation desalaires ? Mais ces hausses, ils les rcu- preront en quelques mois avec les taxes,linflation, les prlvements et autres coti-sations genre complments retraites ren-dus obligatoires ; et les salaires pour qui, puisquil y a de moins en moins de tra-vail !?

    Un jour de grve en septembre . . . . . .tous ensemble ! tous ensemble !Un jour de grve en novembre . . . . . .encore maintenant on en trembleUn jour de grve en janvier . . . . . . . . .il a gelUn jour de grve en mars . . . . . . . . . . .nulle traceUn jour de grve en mai . . . . . . . . . . . . faisait frisquet, bon, bise, on se revoit la rentre(et on recommence depuis le dbut ci-dessus et ainsi de suite la chansonnette tradridra).

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    9/16

    Capitalisme la poubelle 9

    Du travail ? Mais il y en a plein, destravaux qui urgent ! Dans les secteurs :social, culturel, agricole et paysan, arti-sanal et local, sant, ducation yen ades tombereaux demplois possibles,ncessaires et vitaux !

    Sauf que ces fumiers qui nous gouver-nent nen ont rien foutre, des besoinsdun ct et des salaires de lautre, dunct il leur faut de la productivit-rentabil-it et des gogos-clients solvables, et delautre ct, lautre bout de la chane, ilscrent des esclaves et des prcairesdociles ! Leur rve, notre cauchemar : desusines, hyper-spcialises concentres,une ou deux de chaque sorte sur la plante pour chaque type de produit, des milliardsde consommateurs dcrbrs totalementdpendants, gavs de chimie et de tech-nologie, et un ou deux milliards dhu-mains malchanceux offrant leurs bras pour des travaux pnibles

    Alors ? Balanons-les, organisons-nousnous-mmes, grons nos propres services,nos propres productions, liminons lesemplois dbiles, nocifs, sparons lesrevenus et les boulots !

    Un revenu pour tous, une gale rparti-tion des efforts et des richesses selon les besoins et les capacits ! Selon lge, lestalents, la formation, la culture, demanire souple, libre, volutive et variableet petite chelle puis de manire commu-nale et fdrative ! Reconstruisons devraies solidarits vers les dmunis, lesmalades, les blesss , les enfants et les personnes ges !

    Grve gnrale et expropriatrice, rvolteet mancipation : sauvons-nous nous-mmes puisque nous navons rien atten-dre des gouvernements quels quils soient,des prcdents comme des suivants !

    Suffit dattendre les prochaines lec-tions ! , Sagiter dans la rue fait mon-ter les extrmes.

    Voil deux styles de dbilits entenduesdepuis des annes : et en effet dans le pre-mier cas suffit de se rappeler la successionde joies apporte par De Gaulle, Pompi-dou, Giscard, les quatorze ans de Mitter-rand, hier Chirac et aujourdhui Sarkozy,et suffit de bien capter les roucoulades deSgolne royale et de sinformer des gte-ries de Martine impriale Lille, il ny al que des promesses de bonheur ! Tout desuite lavenir sclaire ! Alors il y a les petits partis, youpi, regardez le modle

    amricain, savez-vous que derrireObama et son concurrent se trouvaient unedizaine de petits candidats ? Youpla, sur un terrain de foot ne demandez pas autrechose que du foot, dans un spectacle deguignol orchestr par les milieux finan-ciers, de larmement, des sponsors et desmdias, ne demandez pas autre chose quedu spectacle, merci la prochaine.

    Dans la deuxime catgorie de science politique, gare aux extrmes , on peutremarquer que le fait mme de cadenasser les mouvements sociaux les a logiquementtransforms en frtillements de la queue,lgers et temporaires. Rsultat : desWaterloo politiques senchanent et sag-gravent gaiement. Cest lextrme libra-lisme et lextrme crasse autoritaire qui progressent chaque coup. En effet, par lesimple fait que les deux mamelles censesservir dexpression dmocratique aux sen-timents et volonts du peuple sont taries :la politique qui voit saffronter des ges-tionnaires capitalistes, pour parler par exemple de la relance , et la mamellesyndicale qui voit saffronter des entre- prises de cogestion pour parler de ngo-ciation. Pleutres daujourdhui, cocus dedemain, pleurnicheurs et dpressifsdaprs-demain, la gueule de bois est votreseule certitude ! Au fait, vous gotez aunectar chaque fois, mais vous avez quelge, l en 2009 ?

    Allez ! Rien na jamais chang dans cecadre de bouffons institu par la bonne bourgeoisie de la fin duXVIIIe et premiremoiti duXXe, sans des millions de bravesdans les rues, piques la main, des mil-lions de grvistes en train doccuper lesusines, les ateliers et les places et sans des

    milliers de bons gars et de bonnes garcessur les murs des btiments publics au nezdes baonnettes. Bien, bon, alors, on symet ? On sorganise hein, dabord, un peu,on peaufine, on aiguise Rage etcourage, vivement lorage

    R OBERTPOURL

    p. 7

    Ce nest pas moi qui le dit, cest par exemple Edward Bernays, lun des pre-miers (et en son temps fort influant)thoricien de la publicit moderne,(Pro- paganda, comment manipuler lopinionen dmocratie,La Dcouverte, 2007 ; 1redition 1928 ).

    La seule volution de ce point de vue,depuis cette poque, a consist dans lamanire de se faire obir, dobtenir ladh-sion ou le consentement ; dans le style, ensomme.

    Aujourdhui on (ltat, les industriels,et leurs relais idologiques divers) dit auconsommateur de consommer respon-sable , durable , ventuellement bio et quitable cest--dire denouvelles marchandises pour de nouveauxmarchs.

    Pour autant, le consommateur nestvidemment pas innocent .

    Le capitalisme consumriste ne stait jamais panoui en croyant la vrit. Le peuple des centres commerciaux aimait les mensonges, parce quil pouvait en trecomplice.

    Autrement dit, le public est complicedu mensonge dont il est victime .

    Que peut signifier alors la responsa- bilit dans un tel contexte ? Gunther Anders nous dit sa manire :

    Empche la naissance de situationso il nest plus possible dtre moral et qui pour cette raison se soustraient la com- ptence de tout jugement moral. ( LHomme sur le pont , 1958 ; dans Hiroshima est partout , Seuil, 2008). Ceque je reformulerais ainsi : dans uneorganisation sociale qui a fait de lirres-

    ponsabilit universelle la norme, la seuleforme de responsabilit possible consiste rejeter une telle norme en combattant,selon ses forces, cette organisationsociale.

    Ce qui a peu voir, on en conviendra,avec le consommacteur dont on nousrebat les oreilles.

    Que les forces soient aujourdhuitrs faibles, sans aucune communemesure avec les tches, avec les enjeux,avec les chances, ne change rien au

    constat.

    CDRIC

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    10/16

    10 - Mauvaises frquentations

    Un simple cueilleur Thierry Thvenin, agriculteur cueilleur, botaniste de terrain, herboriste mticuleux et

    passionn, vit en Creuse du ct de Mrinchal. Il vient de publier Les Plantes sauvages

    chez Lucien Souny. Pierre Lieutaghi, dans sa prface, met l'accent sur le contenusubversif de cet ouvrage. Thierry Thvenin milite en effet contre la privatisation du savoir sur la nature, pour la rappropriation par l'homme de son propre corps dans son rapport son environnement, ce qui ne fait pas le jeu des grands trusts chimico-pharmaceutiquesni de la mdecine courte vue.

    C reuse-Citron : Bien que tondomaine soit celui des plantes, enlisant la prface de ton dernier livre, j'ai trouv toute une srie de choses quiavaient une porte politique ou sociale...

    Thierry Thvenin : J'ai appris pas malde choses en vingt ans de travail sur les

    plantes, et je me suis demand ce que je pourrais laisser de vraiment utile pour lavie de tous les jours aux gens du pays, et mme d'un peu plus loinque la Creuse, pour retrouver un peu d'autonomie, pour tre moinsdpendant des grandes surfaces pour manger et se soigner. J'aivoulu aussi qu'il y ait une perspective historique : quandune plante devient trs intres-sante on essaye de nous la rendreinaccessible par des lois, par desrglements, il y a deux ou trois plantes, comme le millepertuis,le tussilage, la berce qui sontclasses en plantes toxiques !Pour savoir si une plante est dan-gereuse, il ne faut pas se fier aveugl-ment aux rglements qui sont souventlis des intrts privs etcommerciaux. La vraie scurit c'estd'abord d'apprendre les connatre, seconnatre et les utiliser correctement.Une plante, selon comment on l'utilise peut tre dangereuse ou pas. Pour lemillepertuis c'est caricatural, c'est un re-mde d'actualit, qui rpond un prob-lme de socit, la dpression, et qui estkidnapp par un trust pharmaceutique.

    Dans ce livre, j'essaye aussi de donner un peu d'ducation l'environnement. Je pars du principe qu'on n'est pas tout seulsur terre et qu'on doit apprendre treun peu moins destructeur. J'ai donc vou-lu mettre l'accent sur des plantes trscommunes, voire en expansion du faitde nos activits. J'ai essay de casser un peu la dualit qu'il y a entre nous et la na-ture.

    Justement, qu'y-a-t-il derrire ce mot nature qui est li la proccupationcologique au sens large ?

    Pour moi c'est tout ce que tu ne peux pas saisir ni contrler : c'est quand tu asles boules et que tu balances un pav,

    c'est quand tu as faim et que tu ne penses plus rien d'autre. Il n'y a pas defrontires entre l'homme et la nature, onen fait partie. On construit tout un tasd'illusions, de prothses, pour se prot-ger du chaud, du froid, etc. mais on restedes sauvages, mme si c'est souvent

    notre insu.

    En mme temps un jardinier, uncueilleur essaye de connatre, de contr-ler, de maitriser son environnement.

    Je crois qu'il y a toutes les nuances, decelui qui fait la gu-guerre avec masque gaz et sulfateuse au cueilleur qui va juste prendre ce que son environnementlui propose. Le problme que nousavons maintenant c'est de n'avoir plus de

    lien avec les possibilits de notre lieu,on croit qu'on peut faire tout etn'importe quoi car on compte sur la provi-dence qui va venir d'ailleurs, par le train,l'avion, par le magasin. Je pense quec'est bien d'inciter les gens, mme si onne peut pas tout faire avec les plantes, aumoins d'en faire une partie car a rap- prend les limites de notre environne-ment.

    Quand tu t'intresses une plante etque tu en ramasses tant qu'il n'y en a plus, tu comprends que les ressources nesont pas inpuisables. Et a le systmemarchand nous le fait oublier puisqu'ildonne l'impression que tant que tu as del'argent tu peux avoir tout ce dont tu asenvie. La plupart des gens ont perdutoute familiarit avec l'environnement,

    ne savent plus ce que c'est que chaud,froid, nuit, jour. Notre monde estl'aboutissement du hors sol, avec Inter-net comme une cerise sur le gteau :manger se rsume commander une pizza et si on veut causer quelqu'un ilsuffit de l'appeler sur son portable. Il n'y

    a plus de limites au consumrisme. Nous parlons de nature, maisest-ce que la campagne est natu-relle ?

    La nature, moi je dis qu'elle est partout. Dans le mtro tu trouvesdes cafards ! Mais on peut dif-frencier des milieux qui sont g-nrateurs de beaut, de diversit,de sant et d'autres qui sont beau-coup plus morbides et rduits auminimum. Dans le mtro, il y al'tre humain et quelques insectes,mais au niveau bio-diversit c'estmort. Pour moi, dans l'attitude co-logique, il y a d'abord l'ide de par-tage avec les autres tres vivants.Je n'ai pas expriment une vie en

    totale interdpendance avec la naturecar j'ai aussi plein de prothses, j'ai unevoiture et d'autres choses en parfaite in-cohrence avec mes ides, mais je mesens beaucoup mieux Mrinchal enCreuse qu' la gare de l'Est Paris.

    Je pense que la ville est une impasse,une maladie. Ds que des civilisationsont dvelopp des villes, elles ont laiss

    des dserts derrire elles comme en M-sopotamie par exemple. La ville estconstruite sur un gchis pouvantable, ilfaut un tas d'intermdiaires et de ser-vices.

    Aucun urbain n'est prt remettre encause son milieu de vie, renoncer saville, son mtro et ses tours. Je dis quec'est une impasse parce que c'est justeun problme d'quilibre. Le systme ur- bain marche tant qu'il y a de la nature grignoter autour, mais l on est au pointde rupture, sur la plante il y a mainte-nant plus d'urbains que de ruraux.

    Les plantes taient traditionnellement utilises la campagne, j'ai l'impres- sion que cela a disparu en mme tempsque la paysannerie.

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    11/16

    Mauvaises frquentations - 11En fait c'est surtout l'cole qui a dvalo-

    ris ces savoirs-l. Mme s'il y avait uneapproche de la botanique ce n'tait pasune approche de tradition dans une op-tique d'automdication familiale. On don-nait des rudiments de botaniquescientifique mais pas de botanique pay-sanne, on apprenait dissquer une fleur mais pas utiliser celles qui poussaientsur le chemin de l'cole. En Creuse etailleurs, il y a eu un vrai problme : toutle savoir sur les plantes pour se soigner et pour se nourrir tait en patois etl'instit ne parlait pas le patois,ainsi il y a eu rupture de la trans-mission du savoir. Mais jetrouve que ce n'est pas grave,un savoir n'est pas ternel. Il yavait toute une culture trs lie

    la religion chrtienne avec beaucoup de prires qui allaitavec ces pratiques autour des plantes dans laquelle la plupartd'entre nous ne se retrouveraient pas aujourd'hui. Et puis les prob-lmes de sant que l'on peutavoir aujourd'hui, l'alimentationque l'on a, font que l'on n'a pasles mmes besoins qu'il y a cin-quante ans et qu'on ne peut pasutiliser les recettes de la mmemanire. Il y a aussi le fait queles gens du dbutXXime ou d- but XIXime avaient dj une culture li-vresque avec des bouquins comme Le Mdecin du pauvre, ce n'tait dj plusune tradition orale vivante.

    Depuis la Deuxime Guerre mondialeon a multipli des rglements pour nouslimiter l'accs aux plantes et a c'est in-quitant, mais l'ide de dire qu'on a per-du la tradition ce n'est pas trs grave car une tradition populaire se rinvente, se r-adapte et fait avec les matriaux qu'onlui propose que ce soit avec les plantesqui poussent dehors - aujourd'hui il y a

    de nouvelles plantes invasives - ou avecdes plantes venues d'ailleurs, de plus en plus de gens utilisent le ginko. Je croisau gnie populaire.

    Le milieu volue beaucoup, ici la florenaturelle n'est plus la mme qu'il y avingt ans. cause des pratiques agri-coles, broyages, abattages des haies, drai-nages, etc., les prairies se sontappauvries. Il y a une vritable dif-frence de paysages et de ressources, ilest vrai qu'un agonisant est encore envie, mais il n'en n'a plus pour longtemps.Au niveau ressources et diversit on enest l. Je pourrais peut-tre citer deux outrois espces, sur Mrinchal, qui ontdisparu mais pour cent espces il y en asoixante qui sont devenues peau de cha-grin, il n'en reste que trois pieds par ci

    par l et qui peuvent tre balays en trs peu de temps. Donc les traditions qu'ona pu avoir avant ne sont plus valables etil va falloir s'en rinventer. Je pensequ'on est capable de retrouver d'autres re-mdes dans ce que l'environnement nous propose, c'est souvent dans les milieuxles plus pollus que poussent les plantesles plus dpolluantes. Je pense qu'on peut rester optimiste mais il faut arrter les dgts, sinon on va finir par se faireun monde vraiment hostile.

    Ce que tu dis est encore valable pour la Creuse et certains dpartements. D'autres comme le Gers sont devenusdes dserts. Mais ici aussi on passe leshaies au broyeur et on ne laisse plus pousser d'arbres dedans.

    Le problme avec les arbres c'estqu'on n'a pas le mme rythme, un arbrea vit longtemps et nous on a une vision court terme. Les gens ne se rendent pas compte, il suffit de regarder attentive-ment les arbres, ils ne sont pas en bontat, ils crvent de tristesse, il leur manque tous leurs cortges vgtaux, unchne n'est pas un arbre solitaire, il a be-soin de compagnie.

    Vue de loin la Creuse ressemble vrai-ment de la campagne : sa couvertureboise est importante. Mais des taillisnaturels poussent dans les terres l'aban-don en mme temps qu'on taille les haies la coupe militaire.

    En effet le taillis ne compense pas ladisparition des arbres de haies, il est plus pauvre au niveau biodiversit. Le bo-cage est fabuleux pour la richesse de la

    flore et de la faune. On peut dire quel'homme avait trouv une espce de pacte qui a dur un certain temps. Maisa ne pouvait peut-tre pas durer plus, le bocage tait dj dans une dynamique

    d'augmentation de la population. Onvoudrait que la nature soit le jardind'Eden, un milieu idal pour nous et quine bouge pas. On n'accepte pas de mou-rir et de disparatre, on veut se sauver tout prix.

    Quel est le statut lgal des genscomme toi qui cultivent les simples ?

    Nous sommes la croise de plu-sieurs mtiers mais sans rentrer vrai-ment dans aucune case : agriculteurs puisqu'on fait pousser des vgtaux,

    mais comme ce sontdes plantes mdici-nales, il y a un aspectsant. Et il n'y a pasde cadre lgal pour cette profession l :nous pouvons tre at-taqus pour exerciceillgal de la mdecineou de la pharmaciemme si nous don-nons des plantes titre gratuit. Dans cedomaine l'Europe estcoupe en deux, enEurope du nordl'exercice de la mde-cine est libre. Jusqu'la dernire guerre lesgurisseurs taient en-

    core tolrs dans lesvillages, mais avec l'Ordre des mdecinsles procs ont commenc. Je n'ai pas ledroit de me dire herboriste car ce mtier a t supprim en 1941 par Ptain, je nesuis pas mdecin donc je ne pose pas dediagnostic, si quelqu'un vient avec undiagnostic je vais dire que d'aprs latradition et d'aprs ce que je sais cette plante l va tre indique.

    Je pense qu'il est dangereux de se re- poser sur des spcialistes, y compris desherboristes. Manipuler trois cents plantes pour soigner des maladies un peu problmatiques c'est du domaine duspcialiste. Mais pour quatre vingt pour cent de nos maux on peut trs bien se prendre en charge et rapprendre prendre soin de soi. Le projet de ce livrec'est aussi que les plantes ne deviennent pas une affaire de spcialistes.

    Dans tout ce que tu dis il y a l'ided'enracinement, de dpendre de son mi-lieu, quelle ide as-tu de la libert ?

    Pour moi la libert c'est qu'on mefoute la paix si j'ai envie de vivre decette manire-l. Je me sens libre. La li-

    bert c'est quelque chose qui se saisit degr ou de force, qui a un prix payer, cen'est pas quelque chose qu'il faut r-clamer mais qu'il faut prendre.

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    12/16

    12 - Mmoire aux poings

    Adrienne MontegudetUne anarchiste aubussonnaise

    Nous nous sommes intress(e)s Adrienne Montegudet, une mili-tante communiste qui, au soir de sa vie, se-rait devenue libertaire.

    Petite bio : Ne le 12 juin 1885 dansune famille paysanne de la Creuse, elle de-viendra institutrice. Marie en 1908 avec

    Lon Montegudet, enseignant et fonda-teur du syndicat CGT des instituteurs(trices) de la Creuse, ayant pris la tte dela riposte quand le gouvernement avait prtendu interdire aux enseignant(e)s ledroit de se syndiquer. Membre du parti so-cialiste SFIO, il opte ensuite pour l'adh-sion l'Internationale communiste. la mort de Lon, Adrienne Montegudet poursuit son militantisme la CGT etanime en 1921 les "Comits syndicalistesrvolutionnaires" Aubusson. Ces Comi-ts taient un courant minoritaire de laCGT qui restaient fidles la Charted'Amiens et qui taient trs influencs par le lninisme en opposition au courantmajoritaire de Lon Jouhaux, de laSFIO...

    la scission de la CGT en 1921,Adrienne Montegudet passe la CGTUen 1922 et participe la commission fmi-nine. La CGTU tait lie exclusivementau Parti Communiste de 1921 1936 et apure de ses rangs au fur et mesure et

    assez brutalement les anarchistes ayant

    tent d'y apporter leurs points de vue.Quand le syndicat des Mineurs de Lava-veix-les-Mines dcide avec des organisa-tions de cheminots, de lignards des PTT,des ouvriers du btiment et quelquesautres cgtistes de rejoindre la CGTU,elle est lue comme secrtaire de la nou-velle Union dpartementale.

    Ayant vit de peu la rvocation cause de son militantisme, AdrienneMontegudet eut subir une censure, etd'autorit, le prfet la fit muter de soncole d'Aubusson celle de la petite com-

    mune de Jalesches, entre Boussac etGuret.Sa rencontre avec un militant d'origine

    italienne l'amne ensuite un temps Moscou o elle devient professeur de fran-ais.

    En 1927, elle est de retour en Franceo elle tente d'impulser une propagandedans le milieu paysan en rompant avec leParti Communiste. Elle retourne nan-moins en URSS en septembre 1930 pour le congrs de l'Internationale syndicalisterouge mais se montre trs critique envers

    le rgime sovitique et les dlgus fran-ais qui refusent de voir les ralits. (Ds1917, de nombreux anarchistes avaient d- j point du doigt la supercherie du r-gime marxiste-lniniste).

    En 1931, elle collabore L'mancipa-tion, journal de la Fdration de l'Ensei-gnement, puis frquente le groupe dePierre Monatte qui dite La Rvolution Proltarienne.Pierre Monatte, ayant tanarcho-syndicaliste jusqu'au congrsanarchiste d'Amsterdam de 1907 puissuite sa fameuse querelle avec ErricoMalatesta sur le rle du syndicalisme (Mo-natte pensait que le syndicalisme luiseul permettrait la rvolution socialealors qu'Errico Malatesta soutenait qu'iln'tait qu'un levier possible parmi d'au-tres) a fond le journal La Vie Ouvrire et fut un grand ponte des Comits syndica-listes rvolutionnaires. Il a t galementmembre du Parti Communiste et de laCGTU.

    Adrienne Montegudet quitte ensuite la

    Creuse pour Marseille o elle prend parten 1936 aux runions anarchistes et de-vient secrtaire du Comit des femmes li- bertaires, l'quivalent des "Mujereslibres" pendant la guerre d'Espagne, cou-rant fministe et demandant l'mancipa-tion des femmes. Elle apporte alors sonaide aux rfugi(e)s italien(ne)s et espa-gnol(e)s.

    Au dbut de la Seconde Guerre mon-diale, elle s'installe Antibes puis StPaul-de-Vence o, en contact avecClestin Freinet (instit aux mthodes p-dagogiques en avance sur son temps etancien membre du Parti Communiste ex-clu pour a), elle prend en charge ungroupe de rfugi(e)s tchques (Juifs pour la plupart) qu'elle cachera enCreuse puis prs de Bayonne.

    Adrienne Montegudet s'teindra le 23aot 1948 Bayonne.

    Cette petite biographie appelle plu-sieurs remarques :

    Sur le parcours de cette militante quitait la base communiste, syndicalisterouge puis progressivement qui s'oriente

    vers une dmarche anti-communiste,fministe, sensible des mthodes d'du-cation novatrice. Sensible aux idesanarchistes ensuite.

    Sur sa priode creusoise qui n'a riend'anarchiste : elle semble encore bientrop lie au communisme.

    Sur son syndicalisme (li la CGT puis la CGTU) mais c'est peut-tre l,rencontrant des militant(e)s anarchistesqu'elle a commenc basculer et de-venir de plus en plus critique des m-thodes autoritaires communistes.L'affrontement des communistes et desanarchistes au sein de la CGTU tait trsviolent. Ayant vcu en URSS plusieursannes, elle a certainement pu s'aperce-voir de la "tromperie communiste"...

    Alors ? Adrienne Montegudet nousfait penser ces trop rares communistes,aveugls par l'URSS, qui se sont manci- ps de la mainmise du Parti Communisteet ont su reconnatre un moment queles anars avaient raison.

    Abonnement Creuse-CitronLes frais denvoi postaux sont de 1,25 par numro. Creuse-Citron tant prix libre, vous pouvez ajouter ceque vous voulez, sachant que le cot de fabrication dun numro est de 50 cts.

    1 an (4 n) = 5 (frais de port) + ... (prix libre) / 2 ans (8 n) = 10 (frais de port) + ... (prix libre)20 ans (80 numros) = 100 (frais de port) + ... (prix libre)

    Indiquez le nombre de numros que vous dsirez recevoir, libellez votre chque lordre de Citron Libre etadressez-le Creuse-Citron, C/o CNT 23, BP 2, 23 000 Sainte-Feyre.

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    13/16

    A l'afft - 13

    Il y a quelques temps, faisant le marchde Felletin, jai crois Sylvie qui proposait son livre LHeure Creuse; bienson livre parce quil est simplement crit.Cest lhistoire de son arrive dans laCreuse. Elle dbarque Lupersat, yrencontre un ami-bistrot, qui avait endpt Creuse-Citron, elle rencontre aussiun commissaire la retraite et loncomprendra vite que contrairement la pice de thtre : Le Commissaire est bon enfant , l non ! Mais je nen dis pas plus, il est prix libre le livre de Sylvie.Elle a un projet ddition libertaire, maiselle en parlera elle-mme. Vous pouvez joindre Sylvie : [email protected], jedonne a puisque cest indiqu sur sonlivre, je ne balance pas, je narre, nonmais !!! Elle ma offert, avec un copain elle, un pot avec un thym magnifiquevenant de l-bas, Forcalquier ; il y a des jours qui sont jolis !...

    propos des marchs, si a vous in-tresse, a commence par l le commercequitable, faire vivre les producteurslocaux, comparez les prix, cest souventmoins cher et en tout cas plus convivialque les grandes surfaces.

    Visite de l'expo Mauvaise nouvelle

    de Jacques Trouv, sur, autour, de laguerre de 14-18, chez Jean Estaque laMaison du tailleu Savennes. Dans lelieu, sur la gauche une ouverture, tudescends deux marches, pile en face detoi, peint en couleur sur de grandscartons genre rcup, des soldats ; desmecs soldats, ten es sr parce que il y ades jambes zizi de garon au milieu,des jambes pour marcher, les crateurssont rigolos, parfois ! Des soldatshabills avec la tunique bleu-horizon etle pantalon-garance dont taient affublsles soldats au dbut de 1914, tu saishistoire quen face ils soient srs de paslouper la cible. En haut de chaquetableau, le visage masqu dun bandeau blanc, mais cru le blanc. Debout, vivant,toi face eux, et a fout une claque. Ilssont l debout aligns et toi tes qui ? Le juge du tribunal militaire ? Toi tout seul,le peloton dexcution ? Cest bien vuelinstallation. Sur les autres murs, encoredes soldats, dans des teintes spia plutt,et toujours aussi terriblement anonymes,uniformiss. a parle tout seul et cest bien.

    Pendant cette expo, javais lesoreilles qui tranaient, jai entendu quelon mettait une certaine valeur sur laqualit des morts de 14-18 : y a les bonsmorts, morts en hros pour la patrie, dont

    le nom est sur le monument aux morts. Ily a ceux qui sont morts pour lexemple,ceux dont parlent en silence les tableauxvoqus plus haut. Ces morts pour lexemple, putain la honte ! Avoir fusilldes mecs pour lexemple ! Lesdserteurs, les crosses en lair, lesmutins de 17, ceux qui passaient lamain au dessus de la tranche en esprantla balle salutaire qui les enverrait larrire se faire bichonner linfirmerie,FUSILLS !!! Tous fusills. Dans tousces morts, cest qui les bons ? Jy voisque des morts personnellement. Je suissr quil faut arrter avec ce genre de va-leurs avec lesquelles on a fait pter la

    honte ceux qui sont revenus, mmeestropis, casss en dedans comme endehors. Dans un livre de Jean Meckert, lefils dun fusill : Tu vois une diffrencetoi ? Moi je ne vois quun tas dos tout blanc. . Pas de pension pour les veuvesde lches, de bolchviques.Bolchviques, cest comme a quon lesnommait tous ceux qui disaient non !Un jour je suis all Verdun, une manif antimilitariste on se faisait pourrir par lesgens aux fentres, Cest honteux , quimon pre, qui mon, ou mes frres sont res-

    ts l-bas, ctaient pas des lches eux aumoins, tas de fainants. Puis y en a unede vieille qui a gueul : je descends,moi aussi mes frres ils sont morts danscette saloperie, je suis avec vous Elle est descendue avec nous, toutechenue, rigolote et tout ; aprs elle nousa offert un canon, elle crachait pas dessusle jaja. On avait sympathis. Noussommes rests en relation nous lavons re-vue plus chenue mais toujours blagueuse.Aujourdhui elle est morte, bien sr, maiscest un bon souvenir de Verdun, le seul !

    la bibliothque dpartementale deCreuse ils ont les livres de JeanMeckert : Le boucher des Hurlusentreautres ; il signait aussi des polars sous le pseudo Jean Amila.

    Jsuis colre ! Si tu prends du carburedans une grande surface, ici, l-bas ouailleurs, si, donc un gars, une fille, te propose de faire lessence, fais gaffe pas lui laisser de pourliche, cette bandede maquereaux, les tliers, ils obligentlemploy(e) donner ses pourboires lacaisse sur lesquels on lui redonne 10 %

    et bien sr dclars sur la fiche de paye.Le tlier y gagne tous les niveaux, ilembauche un prcaire : aides de ltat, illui fait faire la pute, sourire, pare-brise,le plein, et ferme ta gueule ; par ici la

    monnaie. Plus tu fais la pute plus taurastes 10 %, tes pauvre, tu crves la dalle,tu fermes ta gueule.

    Une dernire chose, le planningfamilial , cest important quil vive,non ? Les aides rgionales chutent dansun silence assourdissant. Faudra pasvenir gueuler quand y en aura plus, cestmaintenant quil faut se remuer : cenumro est gratuit 0800-803-803,anonyme pour de vrai, Alors a concerneles filles et aussi les garons. GABAR

    btons rompus

    Une Association pour le Maintiend'une Agriculture Paysanne vientde se crer en Creuse.

    Rappelons qu'une Amap runit ungroupe de consommateurs et un ou

    plusieurs agriculteurs autour dun contratdans lequel chaque consommateur achteen dbut de saison une part de la production qui lui est livre priodiquement un prix constant. Le producteur sengage fournir des produits de qualit dans le respect de lacharte de lagriculture paysanne.

    Plusieurs producteurs sont impliqus proposant viande de buf, d'agneau,fromages, ufs, lgumes et petits fruits.La distribution des produits se fera lesvendredis soir entre 17h et 20h chez Eveet Filip Claes, marachers au bourg deChambonchard. Les paniers de lgumescoteront entre 10 et 20 . La premiredistribution a lieu le 30 avril.

    AMAP

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    14/16

    14 - Mauvaises lectures

    Attention anarchiste ! - Une vie pour la libert - Mmoires par Augustin Sou-chy aux ditions du Mondelibertaire,260 pages, 2006, 10 .

    Mon engagement libertaire a pour but constant de remplacer la violence institu-tionnalise par l'dification d'une socit sans Autorit.

    Doyen des anarchistes allemands, Au-gustin Souchy, n en 1892 et mort en1984, a suivi et vcu 75 ans de rvolu-tions dans le monde. Le rcit de sa vie, tra-

    duit pour la premire fois en franais, estun tmoignage vivant des tournants histo-riques duXXme sicle, auxquels il a vou-lu chaque fois participer, faisantconnaissance au passage avec de nom- breux camarades anarchistes impliqusdans ces vnements.

    Il raconte ainsi de l'intrieur lesguerres mondiales, la rvolution russe, lergime de Weimar, le Mexique, la rvolu-tion espagnole, les kibboutz israliens...

    Impliqu lui-mme en tant que syndica-liste rvolutionnaire, cet homme d'actionest aussi un homme de rflexion : il futgalement confrencier, orateur et un au-

    teur prolixe.Cet ouvrage permet de revisiter desvnements d'une porte historique mon-diale avec l'il du militant qui les avcus. S'il rsume modestement sa vie par le constat debeaucoup d'aspirations, peu de ralisations, son tmoignage prouve surtout que, malgr les preuvesde l'histoire, ses convictions libertairesne l'ont jamais quitt et l'ont guid toutesa vie.

    Cet homme a travers les pages lafois les plus noires de l'histoire, mais aus-

    si celles qui ont t les plus porteusesd'espoir en un monde meilleur. Ce rvefut partag par des millions de per-sonnes.

    Augustin Souchy, malgr les dsillu-sions successives, n'a jamais perdu deson nergie militante ni de cet idal.

    Augustin Souchy dit que si, pour abattre ce monde de brutalit, la rvolu-tion sociale triomphante peut redistribuer quitablement les biens disponibles et enfinir avec l'oppression tatique, elle ne peut garantir, elle seule et jusqu' la findes temps, le bien-tre gnral. Il estncessaire, ses yeux, d'entretenir une

    dynamique rvolutionnaire, car la libertest un combat au quotidien. l'heure du relativisme et de la dpoli-

    tisation gnralise, lire Augustin Sou-chy est un acte d'insoumission contretoutes les barbaries de ce monde, pass, prsent et venir.

    Plus d'infos et notamment une biogra- phie d'Augustin Souchy crite par Mar-tine Remon, incluse dans l'ouvrage et enligne sur http://anarchie23.centerblog.netdans la rubrique "Portraits d'Anars".

    L'Humanisphre par Joseph D- jacque chez Burozoque, 10

    Joseph Djacque (1822-1864), inven-

    teur du mot libertaire , est ouvrier, d-corateur, crivain et anarchiste militant.C'est New-York, o il est exil, entre1858 et 1861, qu'il va crire, diter et dif-fuser lui-mme Le Libertaire, journal du mouvement social . Il y dnonce l'in- justice du capitalisme naissant qui favo-rise la concurrence et l'asservissementdes uns au profit des autres. Il y publie,en feuilleton, L'Humanisphre , une uto- pie anarchique et passionnelle, imagi-

    nant, aprs avoir esquiss grands traitsl'histoire de l'humanit et le passage de lasauvagerie la civilisation, un monde fu-tur o les liens entre les hommes seraientrgls par l'harmonie et la libert.

    Ce livre est un tmoignage trs

    intressant sur l'idologie d'une poque.On y trouve une critique trs tonique dela proprit prive, de la famille, de lareligion, une apologie de l'amour libre etd'un mode de vie la fois individualisteet collectiviste, particulirement auniveau de l'ducation des enfants. Danscette sorte de phalanstre qu'estl'Humanisphre, la famille et la proprit lgale sont des institutionsmortes. [...] Dans cette communion fraternelle, libre est le travail, libre est l'amour, [...], tout ce qui est objet de production et de consommationappartient tous et chacun.

    On se trouve dans un monde descience-fiction o les machines prennenten charge toutes les tches pnibles lies notre survie, on y trouve mme desmachines laver le linge et la vaisselle !Tous les travaux sont plus des jeux quedes peines car la science a dtruit cequi est le plus rpugnant dans la production et ce sont des machines vapeur ou lectricit qui se chargent de

    toutes les grossires besognes. Et cesngresses de fer agissent toujours avecdocilit et promptitude .

    Ce qui rend possible ce mondeanarchique c'est le Progrs, le progrssocial tant intimement li celui des

    sciences et techniques est-il possibleque le Progrs, ce gant des gants,continue de marcher piano piano sur lesrailways de la science sociale ? Dansce monde futur, la nature estcompltement matrise la Terre achang de physionomie. la place des plaies marcageuses qui lui dvoraient les joues, brille un duvet agricole [...]l'air, le feu et l'eau, tous les lments auxinstincts destructeurs ont t dompts[...] L'homme, tenant en main le sceptrede la science, a dsormais la puissancequ'on attribuait jadis aux dieux. Il commande aux saisons et les saisons s'inclinent devant leur matre .

    Avec de tels prsupposs, construireune socit anarchique est presque un jeu d'enfant. On pourrait sourire avectendresse sur ce scientisme vieillot, maisce serait oublier qu'aujourd'hui encore,mme chez certains libertaires, persistecette foie diste dans la science commesolution tous nos maux.

    Le monde est bien fait :Dieu croit aux cons, les cons croient en Dieu

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    15/16

    Revue de crise - 15

    La lchet par excellence est le respect des lois

    En ces temps de rpression et decriminalisation tous azimuts de lamoindre contestation sociale politiquement incorrecte (ou nond'ailleurs), la presse libertaire et autrescontinuent d'voquer le feuilleton tragi-comique, non termin, de l'affaire dite deTarnac.

    Barricata, fanzine de contre-cultureantifasciste et libertaire, dans son dernier numro (n 18 mars 2009) nous livre,dans un petit dossier sur cette affaire, unetrs intressante interview de MathieuRigouste. Celui-ci, ancien chanteur dugroupe de rap musette aux textesengags, L'ennemi l'intrieur vientde publier aux ditions La Dcouverte sathse de sociologie compltement en phase avec une actualit des plus brlantes ( L'Ennemi intrieur. La gnalogie coloniale et militaire del'ordre scuritaire dans la Francecontemporaine).

    On y trouve aussi le beau texte deGabrielle, Tarnac ou les fantasmes du pouvoir qui avait t publi dans Le Mondedu 20 janvier 2009. Bien sr, larevue regorge de plein d'autres critsintressants (des interviews, deschroniques, des notes de lecture et beaucoup d'informations bien peudiffuses par la grande presse).

    Qui dit rpression, dit punition, et le

    plus souvent cela rime avec prison. Letrimestriel d'offensive libertaire et sociale, Offensive, propose un dossier d'une vingtaine de pages sur l'industriede la punition (n 21 fvrier 2009).Il commence par un article dcrivant la prison comme un systme politique etconomique, prsent par un chapeau onne peut plus clair : La prison moderne fait partie des institutions disciplinaires sur lesquelles la socit moderne s'est forge. la fois lieu d'enfermement, de punition et d'exploitation, la prison a sa propre conomie, que l'on peut comparer celle du complexe militaro-industriel. La judiciarisation de nos vies ne fait

    qu'accrotre son influence. Et cela finit par l'ternelle question que se posent leslibertaires : comment penser l'abolitionde la prison ? Il nous est alors proposquelques pistes autour du projetabolitionniste.

    Le mensuel de la Libre Pense, LaRaison revient dans son numro demars2009 (n 539) sur deux faits historiquesindfendables pour nombre d'entre nous.D'abord l'ignoble et bien mconnue pendaison pour l'exemple de 19 soldatsnoirs lors d'une mutinerie au Texas endcembre 1917, cela dans un contexteraciste et de rpression gnraliseenvers le mouvement syndicaliste desIWW (Industrial Workers of the World)et les ides politiques des socialistes et des anarchistes.

    L'autre fait concerne les 306 soldats britanniques fusills pour l'exempledurant la Premire Guerre mondiale. Il ya prs de trois ans, au terme d'une longuecampagne, une loi sur le pardon tait promulgue, rhabilitant de manireglobale les soldats de l'Empirebritannique excuts durant la GrandeGuerre de 1914 1918, pour dlit delchet, de dsertion... avoir jet lesarmes ou frapp un officier suprieur . quand la mme chose en France,mme si nous n'accordons pas uneimportance considrable ce genre derhabilitation ?

    Anartiste ( Les nouvelles libertaires n 13 novembre 2008) nous offrecomme couverture et quatrime decouverture (et l'intrieur) demagnifiques peintures d'Anne Van der Linden. Cette artiste qui vit et travailleactuellement Saint-Denis, aprs denombreuses expositions en France et l'tranger, continue dployer sessystmes sexuels tous azimuts dans des performances, des films et surtout dans

    ses dessins la plume et sesincomparables toiles. ct d'unelongue rflexion sur l'oeuvre de cetteartiste considre par certains comme le peintre de la cruaut , cruaut desindividus et cruaut de la socit, nous

    pouvons aussi relire le fameux discoursintitul L'Anarchie que prononaElise Reclus au sein de la logemaonnique des Amis Philanthropes deBruxelles en 1894.

    Un nouvel espace anarchiste pourraitvenir agrandir celui dj existant de lalibrairie Publico Paris ; bien sr, si lefinancementr ncessaire est au rendez-vous. Il pourrait servir des runions publiques, un cin-club, des cyclesde formation anarchiste, des dbats...

    Le Monde libertaire (n 1551 du 9au 15 avril 2009) nous prsente ce projet et l'avancement des souscriptions.Comme bien souvent, l'argent est le nerf de la guerre... sociale. En les aidant,vous vous aiderez !

    Voici un nouveau venu (n 1 printemps 2009) dans le petit monde dela presse alternative,Rebetiko (Chantsde la plbe). La phrase en exergue propose tout un programme que chacunapprhendera l'aune de sa sensibilit politique : Il faut absolument mettre fin

    cette sensation dprimante de gibier poursuivi, lui substituer l'allant ducombattant sur des coups qu'il doit porter . Les pages centrales sontconsacres l'affaire de Tarnac et cefameux plateau insoumis .

    N'oublions pas Julien, dernier emprisonn des 9 inculps de Tarnac, quin'a pas la chance, comme nous, de pouvoir lire les revues de son choix. On peut lui crire :

    Maison d'arrt(Julien Coupat, n d'crou : 290 173)

    42, rue de la Sant75 674 PARIS Cedex 14

  • 7/31/2019 Creuse-Citron N20

    16/16