CH147205 Rapport d’enquête sur la sécurité des vols

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1010-CH147205 (DSV 2) 27 janvier 2015 CH147205 Rapport d’enquête sur la sécurité des vols

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FORCES CANADIENNESRAPPORT D’ENQUÊTE SUR LA SÉCURITÉ DES VOLSRAPPORT FINAL

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1010-CH147205 (DSV 2)

27 janvier 2015

CH147205

Rapport d’enquête sur la sécurité des vols

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AVIS

Cette documentation a été révisée par l’autorité technique et ne contient pas de marchandises contrôlées. Les avis de divulgation et les instructions de manutention reçues originalement doivent continuer de s’appliquer.

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FORCES CANADIENNES RAPPORT D’ENQUÊTE SUR LA SÉCURITÉ DES VOLS

RAPPORT FINAL

NUMÉRO DE DOSSIER : 1010-CH147205 (DSV 2)

NUMÉRO D’IDENTIFICATION DU SGESV :

147388

DATE DU RAPPORT : 27 janvier 2015

CATÉGORIE D’ÉVÉNEMENT : A

TYPE D’AÉRONEF : CH147D Chinook

NUMÉRO D’IMMATRICULATION DE L’AÉRONEF :

CH147205

DATE DE L’ÉVÉNEMENT : 15 mai 2011

HEURE DE L’ÉVÉNEMENT (L) : 02:00

ENDROIT : Province de Kandahar, Afghanistan

EXPLOITANT : Force d’hélicoptères du Canada en Afghanistan

Le présent rapport a été rédigé avec l’autorisation du ministre de la Défense nationale (MDN) en vertu de l’article 4.2 de la Loi sur l’aéronautique et

conformément au document A-GA-135-001/AA-001, Sécurité des vols dans les Forces canadiennes.

Sauf en ce qui a trait à la Partie 1, le contenu du présent rapport ne doit

servir qu’aux fins de prévention des accidents. Le rapport est rendu public avec l’autorisation du Directeur de la sécurité des vols, quartier général de la Défense nationale en vertu des pouvoirs qui lui sont délégués par le ministre

de la Défense nationale en tant qu’autorité chargée des enquêtes sur la navigabilité aérienne pour les Forces canadiennes.

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SOMMAIRE

La mission de nuit consistait en une insertion simultanée de troupes par deux hélicoptères CH147D Chinook dans un site d’atterrissage d’hélicoptère non aménagé, pendant que deux hélicoptères CH146 Griffon assuraient leur protection. Après leur arrivée sur place, les hélicoptères Chinook ont contourné un terrain surélevé au sud pour s’établir en approche finale. Le Chinook accidenté suivait l’hélicoptère à la tête de la formation.

En se posant, l’hélicoptère Chinook à la tête de la formation a soulevé un énorme nuage de poussière, mais l’équipage de l’appareil accidenté a jugé que celui-ci ne compromettait ni son approche ni son atterrissage. En descente à environ 30 pieds au-dessus du sol, les deux pilotes ont perdu leurs références visuelles au sol même s’ils portaient des lunettes de vision nocturne. Poursuivant l’arrondi jusqu'au toucher des roues, les pilotes ont alors ressenti un mouvement inhabituel vers la droite. Se rendant immédiatement compte que l’hélicoptère commençait à basculer, le commandant de bord a essayé de prendre les commandes pour tenter de ramener l’appareil à l’horizontale, tandis que les occupants se préparaient à l’impact. Une fois l’hélicoptère immobilisé sur son côté droit, les deux moteurs ont été coupés, et les cinq membres d’équipage et 26 passagers sont sortis de l’appareil. Un passager a été grièvement blessé, tandis que huit autres ont subi des blessures légères. L’hélicoptère a été détruit.

L’enquête a permis de conclure que le recours à des procédures d’atterrissage inadéquates dans de mauvaises conditions de visibilité a entraîné l’hélicoptère dans une dérive vers la droite; son train d’atterrissage avant droit s’est alors enfoncé dans le sol créant un point de pivotement et provoquant son basculement dynamique.

Depuis l’accident, le CH147D a été remplacé par le CH147F qui est un hélicoptère beaucoup plus évolué. Bon nombre des recommandations liées à la sécurité et formulées à la suite de l’enquête ont déjà été mises en œuvre. Plus particulièrement, une évaluation de la sécurité des occupants du CH147F a permis de recommander d’améliorer davantage le niveau de sécurité des occupants, et les procédures d’approche à vue du CH147F ont été modifiées. On n’a pas encore donné suite aux recommandations voulant que certains éléments des lunettes de vision nocturne et de leur utilisation soient validés.

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TABLE DES MATIÈRES

1. RENSEIGNEMENTS DE BASE ............................................................. 1

1.1. DÉROULEMENT DU VOL ............................................................................. 1

1.2. VICTIMES ................................................................................................. 2

1.3. DOMMAGES À L’AÉRONEF .......................................................................... 2

1.4. DOMMAGES INDIRECTS ............................................................................. 3

1.5. RENSEIGNEMENTS SUR LE PERSONNEL ...................................................... 3

1.6. RENSEIGNEMENTS SUR L’AÉRONEF ............................................................ 4

1.7. RENSEIGNEMENTS MÉTÉOROLOGIQUES ...................................................... 5

1.8. AIDES À LA NAVIGATION ............................................................................. 5

1.9. TÉLÉCOMMUNICATIONS ............................................................................. 5

1.10. RENSEIGNEMENTS SUR LE SITE D’ATTERRISSAGE D’HÉLICOPTÈRE................. 5

1.11. ENREGISTREURS DE BORD ........................................................................ 5

1.12. RENSEIGNEMENTS SUR L’ÉPAVE ET SUR L’IMPACT ....................................... 6

1.13. RENSEIGNEMENTS MÉDICAUX .................................................................... 6

1.14. INCENDIE, DISPOSITIFS PYROTECHNIQUES ET MUNITIONS ............................. 7

1.15. QUESTIONS RELATIVES À LA SURVIE ........................................................... 7

1.16. ESSAIS ET RECHERCHES ........................................................................... 8

1.17. RENSEIGNEMENTS SUR L’ORGANISATION ET LA GESTION .............................. 9

1.18. RENSEIGNEMENTS SUPPLÉMENTAIRES ....................................................... 9 Planification de la mission ...................................................................... 9 Procédures opérationnelles ................................................................... 9 LVN-HUD ............................................................................................. 10 Configuration des sièges dans la cabine ............................................. 11 Qualification de l'équipage navigant dans le théâtre ............................ 11 1.19. TECHNIQUES D’ENQUÊTE UTILES OU EFFICACES ........................................ 11

2. ANALYSE ............................................................................................ 13

2.1. GÉNÉRALITÉS ........................................................................................ 13

2.2. ANALYSE DE L’ATTERRISSAGE ................................................................. 13

2.3. MARQUES D’IMPACT AU SOL .................................................................... 13

2.4. BASCULEMENT DYNAMIQUE ..................................................................... 16

2.5. MAUVAISES CONDITIONS DE VISIBILITÉ ...................................................... 17

2.6. APPROCHE VMC DANS DE MAUVAISES CONDITIONS DE VISIBILITÉ ............... 17

2.7. UTILISATION DES LVN-HUD.................................................................... 20

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3. CONCLUSIONS .................................................................................. 22

3.1. APERÇU ................................................................................................ 22

3.2. CONSTATATIONS .................................................................................... 22

3.3. FACTEURS CONTRIBUTIFS ....................................................................... 24 Facteurs contributifs actifs ................................................................... 23 Facteurs contributifs latents ................................................................. 23

4. MESURES DE PRÉVENTION ............................................................. 25

4.1. MESURES DE PRÉVENTION PRISES ........................................................... 25

4.2. MESURES DE PRÉVENTION RECOMMANDÉES ............................................. 25

4.3. AUTRES PRÉOCCUPATIONS LIÉES À LA SÉCURITÉ ....................................... 25

4.4. COMMENTAIRES DU DSV ........................................................................ 26

ANNEXE A : Photos

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RENSEIGNEMENTS DE BASE 1.

1.1. DÉROULEMENT DU VOL

1.1.1. L’opération délibérée de nuit comprenait une insertion de troupes à l’aide de deux hélicoptères CH147D Chinook. Parallèlement, deux hélicoptères CH146 Griffon assuraient une protection des forces, tandis qu’un véhicule aérien sans pilote (UAV) CU170 Heron observait la mission. Le site d’atterrissage d’hélicoptère (SAH) non aménagé était situé sur la rive nord du lit d’une rivière asséchée, et un terrain surélevé se trouvait au sud de celui-ci.

1.1.2. Les hélicoptères sont arrivés de l’est et ont viré vers le nord-ouest pour s’aligner sur le SAH en courte finale. L’hélicoptère Chinook à la tête de la formation s’est posé en premier et, ce faisant, il a soulevé un énorme nuage de poussière. Tout juste derrière l’hélicoptère de tête, à sa droite, l’équipage de l’hélicoptère Chinook accidenté a observé le nuage de poussière ainsi produit, mais il a jugé que celui-ci ne compromettrait pas son approche ni son atterrissage. À un moment donné, en descente entre 30 et 20 pieds au-dessus du sol, les deux pilotes de l’hélicoptère accidenté ont perdu leurs références visuelles au sol. En utilisant les données de l’affichage tête haute jumelé à ses lunettes de vision nocturne (LVN-HUD), le copilote, qui se trouvait aux commandes, a amorcé l’arrondi à 20 pieds d’altitude conformément aux procédures normales d’atterrissage. Les commandes de vol ont alors été maintenues en place en prévision de l’atterrissage. L’hélicoptère s’est posé un peu plus durement qu’à l’habitude, et les pilotes ont tout de suite ressenti un mouvement inhabituel vers la droite. Le commandant de bord a immédiatement pris les commandes pour tenter de stabiliser l’hélicoptère et de ramener celui-ci à l’horizontale. Pendant un moment, l’équipage navigant a cru qu’il avait repris la maîtrise de l’hélicoptère, mais ce dernier a commencé à s’incliner vers la droite malgré les efforts continus du commandant de bord pour le garder à l’horizontale. Une fois l’appareil immobilisé sur son côté droit, le commandant de bord a coupé les moteurs en ramenant les leviers de commande du régime moteur à la butée « STOP ».

1.1.3. Tout de suite après l’accident, les membres d’équipage ont aidé les passagers à sortir de l’hélicoptère, et l’équipage de la cabine arrière de l’hélicoptère Chinook de tête est venu leur prêter main-forte. Les troupes des deux hélicoptères Chinook ont rapidement établi un périmètre de sécurité et porté secours aux blessés. L’hélicoptère Chinook de tête a ensuite ramené l’équipage navigant de l’appareil accidenté à l’aérodrome de Kandahar (KAF), afin qu’il puisse subir l’examen médical prescrit à la suite d’un accident. Un hélicoptère d’évacuation sanitaire a aussi ramené certains des blessés à l’installation médicale de KAF. Quelques troupes au sol sont restées sur le lieu de l’accident pour protéger l’hélicoptère accidenté.

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1.2. VICTIMES

1.2.1. L’hélicoptère transportait cinq membres d’équipage et 26 passagers, dont un journaliste civil. La plupart des 26 passagers ne portaient pas leur ceinture de sécurité. Toutes les blessures des membres d’équipage et des passagers ont été causées parce qu’ils ont été projetés contre la structure de l’hélicoptère, que des objets non arrimés les ont heurtés, qu’ils sont tombés sur d’autres occupants ou que d’autres occupants sont tombés sur eux. Aucune blessure n’était attribuable à des débris projetés par l’hélicoptère (p. ex. les pales du rotor). Un membre a été grièvement blessé et huit autres ont été légèrement blessés, tandis que tous les autres occupants n’ont subi que des blessures très légères (petites bosses et ecchymoses), sinon aucune blessure.

1.3. DOMMAGES À L’AÉRONEF

1.3.1. L’hélicoptère a été détruit. Les deux rotors principaux ont été complètement détruits lorsqu’ils ont heurté le sol. Le mât arrière était visiblement déplacé et déformé. Deux des arbres de transmission, un à l’avant et un à l’arrière, ont cédé sous l’effet de l’arrêt soudain des pales du rotor principal, et certaines de leurs pièces ont transpercé le plafond de l’hélicoptère; elles ont été retrouvées dans la cabine, mais elles n’ont blessé aucun de ses occupants.

1.3.2. Le train d’atterrissage gauche ne présentait aucun signe visible de dommage. Une inspection visuelle a toutefois révélé que du gravier s’était incrusté entre les pneus et la jante du train d’atterrissage avant droit. En outre, le caisson de torsion du train d’atterrissage avant droit s’était rompu, et le train d’atterrissage s’était déplacé latéralement vers le centre de l’hélicoptère. Le train d’atterrissage arrière droit a également été endommagé; sa contrefiche inférieure était complètement séparée sur son axe longitudinal.

1.3.3. Les deux trains d’atterrissage de droite ont été endommagés davantage lorsque l’appareil a été redressé en vue de sa récupération. Le train d’atterrissage avant droit s’est rompu et complètement détaché de l’hélicoptère, tandis que la contrefiche supérieure du train d’atterrissage arrière droit a cédé juste à l’arrière de son point d’attache avant.

1.3.4. L’hélicoptère a également subi d’autres dommages lors des tentatives de récupération à l’aide de véhicules terrestres. Des véhicules blindés du génie ont tenté de soulever l’appareil au moyen de sangles de récupération. Lorsqu’ils ont commencé à soulever le Chinook, les sangles se sont déplacées le long du fuselage, et elles ont endommagé (par compression) l’extrémité avant des réservoirs de carburant. Les réservoirs de carburant de l’hélicoptère ont été endommagés davantage au moment de préparer l’épave en vue de son transport aérien. Comme certains des robinets de purge des réservoirs fonctionnaient mal parce qu’ils avaient été contaminés par la poussière et le sable et que le débit de purge du carburant retarderait la mission de récupération, les réservoirs de carburant ont été percés à l’aide de haches.

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1.3.5. Pour que l’hélicoptère CH53 Super Stallion du Corps des Marines des États-Unis puisse ramener l’épave à l’élingue à KAF, le Chinook accidenté a été dépouillé de tout équipement inutile et vidé de son carburant sur le lieu de l’accident. Comme il n’y avait aucun moyen de récupérer le carburant, ce dernier a été déversé dans une tranchée creusée sur place, puis brûlé après le départ des hélicoptères. Le propriétaire de l’endroit où les combats avaient lieu a donné une autorisation à cet effet.

1.3.6. Une fois à KAF, l’inspection de l’hélicoptère en vue de relever les signes d’un atterrissage dur était surtout axée sur les butées d’affaissement des têtes de rotor. Aucune des butées d’affaissement ne présentait des signes laissant croire à un atterrissage dur.

1.4. DOMMAGES INDIRECTS

1.4.1. Les dommages indirects sont liés au déversement de carburant contrôlé. Des tranchées de drainage ont été creusées à proximité de l’épave afin de contenir le carburant et le déversement, mais le sol sablonneux a absorbé assez rapidement une grande partie du liquide. En outre, de petits débris qui ne pouvaient pas être récupérés en raison du manque de place à bord des moyens de transport aériens et terrestres ont dû être laissés sur place. Ces débris ont été enterrés sur place pendant que le carburant brûlait. Le déversement de carburant a été signalé à l’officier de l’environnement de l’Escadre aérienne de la Force opérationnelle interarmées en Afghanistan (FOI-Afg) qui a informé à son tour l’officier de l’environnement de la Force opérationnelle.

1.5. RENSEIGNEMENTS SUR LE PERSONNEL

1.5.1. Les renseignements recueillis sur les occupations des membres de l’équipage navigant dans les 72 heures qui ont précédé le vol ont révélé qu’ils étaient sur le quart de nuit depuis environ 48 heures avant l’accident. Les pilotes n’ont signalé aucun problème concernant leur cycle de sommeil; ils étaient bien reposés et prêts à exécuter la mission qui s’est déroulée durant le premier tiers de leur période de service. L’équipage navigant a indiqué que le rythme des opérations était très élevé, mais il se sentait bien reposé et en mesure d’accomplir la mission qui lui avait été confiée.

1.5.2. Le commandant de bord et le copilote répondaient à toutes les conditions de maintien à jour des compétences, mais le copilote avait pris du retard dans la lecture de certaines publications obligatoires. Les deux pilotes satisfaisaient aux exigences de pilotage dans un nuage de poussière qu’ils devaient renouveler aux trente jours, et ils avaient effectué un entraînement de pilotage dans un nuage de poussière au cours de la nuit précédant l’accident. Le commandant de bord avait été pilote-instructeur sur le CH147 durant son premier déploiement lors de la Roto 7.

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1.5.3. Les deux mécaniciens de bord respectaient toutes les exigences obligatoires liées au maintien des compétences.

1.6. RENSEIGNEMENTS SUR L’AÉRONEF

1.6.1. Le Chinook peut être configuré de manière à transporter du fret, des passagers ou les deux. L’hélicoptère accidenté était configuré pour le seul transport de passagers, et le seul fret à bord était le matériel personnel des troupes. CH147205 comprenait 29 sièges en tout : 16 du côté gauche et 13 du côté droit. De ces 29 places, 26 étaient occupées.

1.6.2. L’hélicoptère totalisait 8349,1 heures de vol. Les heures de vol du moteur et des transmissions respectaient les limites. La masse opérationnelle de l’hélicoptère était de 28 419 lb (ce qui comprend la masse de base de l’appareil ainsi que celle de l’équipage, du matériel, des trois mitrailleuses de sabord et des munitions). Au moment de l’accident, il restait environ 3950 lb de carburant à bord. La valeur utilisée pour calculer la masse des troupes de combat était de 280 lb par membre, ce qui donnait 7280 lb pour 26 soldats. Par conséquent, la masse totale au décollage (AUW) de l’hélicoptère était d’environ 39 649 lb. La limite de la masse maximale autorisée à l’atterrissage du CH147D est de 50 000 lb. Le devis de masse et de centrage a été établi pour l’hélicoptère, et ce dernier respectait les limites de centrage avant et arrière (323,12 po et 315,61 po respectivement) au décollage et à l’atterrissage. Toutefois, la valeur de la charge latérale n’a pas été calculée.

1.6.3. Le train d’atterrissage de l’appareil comprend quatre atterrisseurs non escamotables. Les trains d’atterrissage avant sont fixes et sont munis de roues jumelées, tandis que les trains d’atterrissage arrière comprennent une seule roue orientable (pivotant sur 360 degrés) avec rappel dans l’axe assisté, dont la position peut être bloquée en ligne. De plus, l’atterrisseur arrière droit peut être orienté du poste de pilotage au moyen de la commande de direction située dans la console.

1.6.4. Voici la distance entre les trains d’atterrissage (mesurée à partir du centre de chaque composant) :

a. distance entre les deux trains d’atterrissage avant : 126 pouces;

b. distance entre les deux trains d’atterrissage arrière : 135 pouces;

c. empattement (entre le train d’atterrissage avant et arrière de chaque côté) : 270 pouces.

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1.7. RENSEIGNEMENTS MÉTÉOROLOGIQUES

1.7.1. Les renseignements météorologiques concernant KAF et la base d’opérations avancée (BOA) la plus proche du SAH ont été recueillis et analysés. Le ciel était dégagé avec un vent léger soufflant du nord-est (à moins de 5 nœuds), et l’altitude-densité était d’environ 5300 pieds. La lune était visible à 96 % et se trouvait toujours au-dessus de l’horizon au moment de l’accident. Elle se serait trouvée à gauche de l’hélicoptère à l’atterrissage. L’enquête a permis de conclure que les conditions météorologiques n’étaient pas un facteur contributif à l’accident.

1.8. AIDES À LA NAVIGATION

1.8.1. Sans objet.

1.9. TÉLÉCOMMUNICATIONS

1.9.1. Sans objet.

1.10. RENSEIGNEMENTS SUR LE SITE D’ATTERRISSAGE D’HÉLICOPTÈRE

1.10.1. Le SAH était une surface non aménagée située au nord du lit d’une rivière asséchée. La rivière se trouvait sur la gauche de l’hélicoptère accidenté, qui était orienté vers le nord-ouest à l’atterrissage, et derrière celui-ci. Du sud au nord, le sol du SAH était composé de deux éléments distincts : le lit de la rivière asséchée était composé de gravier, tandis que la rive comprenait un mélange de petites dunes de sable et de broussailles. À cet endroit, la texture du sable était typique de l’Afghanistan : un sable très fin et léger propre à créer de mauvaises conditions de visibilité lorsqu’il est soulevé par le souffle du rotor. La rive s’élevait de 5 à 10 pieds au-dessus du lit de la rivière. L’hélicoptère accidenté a atterri à l’extrême droite de la zone graveleuse du lit de la rivière, la rive plus élevée se trouvant à sa droite.

1.10.2. Le sol ferme du lit de la rivière était suffisamment large pour accueillir les deux hélicoptères Chinook sans problème. L’hélicoptère Chinook de tête a seulement laissé de légères marques sur le sol après son atterrissage, ce qui confirme la fermeté du sol.

1.11. ENREGISTREURS DE BORD

1.11.1. L’hélicoptère CH147D Chinook n’était pas équipé d’un enregistreur phonique dans le poste de pilotage, d’un enregistreur des données de vol ni d’un système de contrôle et de maintenance d’hélicoptères (SCMH). Le seul dispositif d’enregistrement à bord était un enregistreur numérique du système de régulation moteur; l’analyse de ses données n’a révélé aucun renseignement présentant un intérêt pour la présente enquête.

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1.12. RENSEIGNEMENTS SUR L’ÉPAVE ET SUR L’IMPACT

1.12.1. Le lieu de l’accident comportait cinq marques d’impact distinctes, dont quatre avaient été manifestement laissées par les trains d’atterrissage. Le mécanisme ayant causé la cinquième marque n’a pu être déterminé. Les marques d’impact étaient plutôt droites, parallèles et orientées vers le nord. À l’atterrissage, l’orientation prévue était le nord-ouest. Les marques étaient équidistantes et formaient un rectangle correspondant aux emplacements des atterrisseurs du Chinook. Les dimensions des marques d’impact sont présentées dans le tableau 1 ci-après.

Marque Description Largeur (pouces)

Longueur (pouces)

Profondeur (pouces)

Distance par rapport à la ligne de référence (pouces)

Commentaires

1 Train arrière gauche 17 70 4 -39 Trace d’une

seule roue

2 Train arrière droit 27 120 6 66 Trace d’une

seule roue

3 Train avant gauche 30 60 4 -195 Trace d’une

roue jumelée

4 Train avant droit 48 122 10 -94 Trace d’une

roue jumelée

5 Non déterminé 40 215 6 Forme très irrégulière

Tableau 1. Dimensions des marques d’impact

1.12.2. Une ligne a été tracée pour établir un point de référence entre les marques laissées par les atterrisseurs. La ligne a été établie parallèlement à l’orientation des marques laissées sur le sol par les atterrisseurs et elle a servi d’axe de référence pour mesurer les distances latérales (voir la figure 2, article 2.3.3).

1.13. RENSEIGNEMENTS MÉDICAUX

1.13.1. L’équipage de l’hélicoptère accidenté a été transporté aux installations médicales de KAF pour subir un examen médical. L’analyse toxicologique des échantillons prélevés et envoyés à l’Institut de pathologie des forces armées n’a révélé aucun problème. Les membres de l’équipage navigant possédaient tous un certificat médical valide.

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1.14. INCENDIE, DISPOSITIFS PYROTECHNIQUES ET MUNITIONS

1.14.1. Une fois le Chinook accidenté immobilisé au sol, aucun incendie ne s’est propagé. Le mécanicien de bord de la rampe a aperçu quelques petites flammes dans le moteur droit qu’il a éteintes à l’aide de l’extincteur portatif de la cabine.

1.14.2. À son arrivée sur le lieu de l’accident, les spécialistes de récupération et de sauvetage d’aéronefs ont désarmé et retiré de l’hélicoptère les fusées éclairantes de la suite d’aides de défense. Les munitions des armes personnelles et des mitrailleuses de sabord se trouvaient aussi à bord de l’appareil. Les troupes qui assuraient le périmètre de sécurité au sol ont récupéré presque toutes les munitions d’armes personnelles, mais elles ont laissé toutes les munitions des mitrailleuses de sabord sur place; les spécialistes de récupération et de sauvetage d’aéronefs ont ultérieurement récupéré celles-ci.

1.15. QUESTIONS RELATIVES À LA SURVIE

1.15.1. Tout l’équipement de survie d’aviation (ESA) du personnel navigant était en bon état avant l’accident. Son inspection après l’accident a révélé que trois casques, deux radios de survie PRC-112 et une veste de survie avaient été endommagés. Deux des trois casques avaient subi des dommages superficiels, c’est-à-dire que leur coquille était rainurée. Comme le manuel d’ESA (C-22-469-004/MF-001, fig. 4-14) traitant des casques ne précise pas la tolérance des casques aux dommages par rainure, les deux casques ont été déclarés inutilisables. La partie supérieure de la coquille du troisième casque s’est fendue en forme de V. Le bloc-piles des deux radios de survie PRC-112 s’est détaché de l’appareil; les rendant donc inutilisables. La poche latérale droite de la veste de survie que portait le mécanicien de bord de la rampe a été arrachée en partie.

1.15.2. Comme la mission se déroulait dans le cadre d’une opération délibérée, tous les passagers portaient une veste balistique, un casque et un sac à dos alors qu’ils occupaient leur siège. La plupart d’entre eux ne portaient pas leur ceinture de sécurité. Lorsque l’hélicoptère a basculé sur son côté droit, de nombreux passagers, dont le mitrailleur de sabord qui se trouvait à gauche de la cabine, ont été projetés sur les passagers assis du côté droit de la cabine. Le fait que les passagers étaient empilés les uns sur les autres et qu’il a fallu placer un passager sur une civière afin de le sortir de l’appareil a nui à l’évacuation d’urgence.

1.15.3. Tel que l’enquête de la DSV sur l’accident de CH147202 l’a révélé, les raisons invoquées pour ne pas utiliser le dispositif de retenue comprenaient la difficulté pour les passagers d’attacher ou de détacher leur ceinture lorsqu’ils portent un équipement de protection individuelle, le peu d’espace entre les passagers ainsi que le peu de temps ou le peu d’espace (car les bagages se trouvent sur le plancher) dont dispose le mécanicien de bord pour faire une vérification durant l’embarquement à une BOA. La nature peu conviviale des dispositifs de retenue peut être attribuable à l’équipement de combat type du

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soldat. En vue de régler ces problèmes, on a recommandé d’évaluer les dispositifs de retenue utilisés dans l’hélicoptère de transport moyen à lourd des Forces armées canadiennes afin de déterminer la nature et l’importance des lacunes (voir l’article 4.1.4).

1.15.4. L’Ordonnance 2-007 de la 1 DAC stipule que : « tous les passagers doivent être assis dans un siège approuvé muni d’une ceinture abdominale approuvée au moment du décollage et de l’atterrissage, à moins d’avoir obtenu une autorisation contraire auprès du commandant de l’unité de vol ». De plus, elle souligne que : « une telle autorisation ne doit être accordée qu’après considération des exigences opérationnelles et à la suite d’une évaluation convenable des risques ». Dans le cadre de l’enquête, il est reconnu qu’une évaluation exhaustive des risques liés à cette question a été menée et que le commandant (Cmdt) de la 1 DAC a été avisé de ses conclusions durant la Roto 7. La nécessité pour les passagers de porter une ceinture de sécurité rivalisait avec une réduction des risques d’exposition à la menace d’insurgés dans les BOA. Dans un message diffusé le 16 décembre 20091, le Cmdt de la 1 DAC reconnaissait et acceptait officiellement ce risque.

1.16. ESSAIS ET RECHERCHES

1.16.1. Les quatre atterrisseurs ont été déposés et envoyés au Centre d’essais techniques de la qualité (CETQ) afin de les analyser en détail. L’objectif d’une telle analyse était de déterminer les modes de défaillance et la direction de la défaillance. Le faciès de rupture a révélé au CETQ que la fracture était entièrement attribuable à une surcharge, mais que la charge qui avait été exercée était complexe et sa direction, difficile à établir. La déformation du composant laissait entendre qu’une charge latérale avait pu s’exercer au moment de l’atterrissage initial ou durant le basculement dynamique, alors que l’hélicoptère pivotait sur son train d’atterrissage droit. Le manque de preuve matérielle provenant de la zone initiale de toucher des roues et la grande quantité de pièces se trouvant à l’endroit où l’appareil s’est immobilisé laissent croire que le train d’atterrissage arrière s’est rompu durant le capotage de l’hélicoptère.

1.16.2. Les enquêteurs ont fait appel au centre de sécurité de l’armée américaine pour obtenir des renseignements et des données historiques sur les cas de capotage de Chinook aux États-Unis. L’étude de tels renseignements visait à comprendre et à valider les facteurs contributifs techniques et opérationnels propres à ce type d’accident pour cet appareil. Même si le représentant du centre de sécurité de l'armée américaine n’a fourni aucun rapport officiel, des rapports anecdotiques reposant sur des renseignements

1 UNCLASS, COMD 145, 161533 Z DEC 09.

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recueillis au cours de plusieurs décennies de vol opérationnel indiquaient que la flotte de Chinook des États-Unis avait subi de nombreux capotages. Même si le nombre exact d’accidents n’a pas été fourni, le principal facteur contributif indiqué dans la plupart des cas consistait en une rupture du train d’atterrissage provoquée par l’application de charges latérales au moment de l’atterrissage. Les charges latérales ainsi exercées étaient habituellement le résultat d’un atterrissage dur accompagné d’un mouvement de lacet, de dérive ou de déplacement latéral.

1.17. RENSEIGNEMENTS SUR L’ORGANISATION ET LA GESTION

1.17.1. Sans objet.

1.18. RENSEIGNEMENTS SUPPLÉMENTAIRES

Planification de la mission

1.18.1. L’équipage navigant a suivi des procédures normalisées et détaillées pour évaluer le site d’atterrissage durant les étapes de planification et d’exécution de la présente mission.

Procédures opérationnelles

1.18.2. Le CH147D était surtout exploité conformément aux publications américaines, comme les manuels techniques du département des forces terrestres (TM 1-1520) et les manuels d’instruction du personnel navigant (TC 1-240). Comme il était reconnu que les publications américaines comportaient des lacunes pour mener certaines des opérations que les FAC effectuaient à l’aide de CH147D et que des précisions ou d’autres procédures étaient parfois jugées nécessaires, la 1 DAC avait publié des directives de navigabilité opérationnelle supplémentaires, comme un supplément à la publication traitant du CH147D. Voici les publications présentant un intérêt pour la présente enquête :

a. Supplément au document B-GA-002-147/FP-001 – CH147D, en date du 2010-04-15 (CAN);

b. TC 1-240 – Aircrew Training Manual, Cargo Helicopter, CH-47D/F, en date d’octobre 2007 (États-Unis).

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1.18.3. Les deux publications donnent les procédures à suivre pour exécuter une approche dans des conditions météorologiques de vol à vue (VMC). La page 1-2, paragraphe 11, chapitre 4, section 1 du supplément à la publication sur le CH147D (B-GA-002-147/FP-001; diffusée en anglais seulement) stipule que : [TRADUCTION]

d. durant les dernières étapes d’une approche, le pilote aux commandes peut décider de poursuivre l’atterrissage dans les circonstances suivantes, à moins qu’une remise des gaz ne soit pas possible en raison d’une puissance limitée ou d’autres facteurs :

(1) l’aéronef est stabilisé en légère décélération aux paramètres que prescrit le jalon;

(2) lorsqu’il y a perte des références, le pilote aux commandes est convaincu que l’aéronef peut atterrir en toute sécurité;

(3) le lieu d’atterrissage a été évalué visuellement et jugé convenable durant l’approche finale.

1.18.4. Le même document de référence, à la page 1-2, paragraphe 11, chapitre 4, section 1 (publié en anglais seulement) indique également que : [TRADUCTION]

b. dans des conditions de poussière dense, en vue d’atteindre la surface sans vitesse vers l’avant, il est possible que l’aéronef soit complètement enveloppé par la poussière qu’il soulève à environ 10 pieds AGL. Cette situation est acceptable si tous les jalons de la procédure d’approche ont bien été suivis et franchis, afin de confirmer que l’aéronef a adopté le bon profil d’approche et qu’il est bien aligné sur le cap souhaité à l’atterrissage;

et

11. L’atterrissage à vitesse nulle est l’approche privilégiée. Idéalement, l’aéronef devrait atterrir sans glisser afin de réduire au minimum les risques de basculement dynamique, de balancement ainsi que de dommages au train d’atterrissage.

LVN-HUD

1.18.5. Le CH147D était équipé d’un affichage tête haute (HUD) pouvant être jumelé aux lunettes de vision nocturne (LVN). Les LVN-HUD du CH147D diffèrent de celles du CH146, puisque la configuration des pages du HUD du CH147D n’est pas normalisée. Ainsi, à bord du CH147D, chaque pilote programme les pages de son propre HUD selon ses préférences personnelles et, par conséquent, l’ensemble des symboles peut ne pas être uniforme d’un pilote à

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l’autre. Après une mission, le système garde en mémoire les pages programmées d’un HUD, et l’équipage qui prend la relève verra (et utilisera peut-être) les symboles que l’équipage précédent a programmés lorsque le HUD est mis sous tension.

1.18.6. Les deux pilotes utilisaient les LVN-HUD pour effectuer la mission. Le copilote a programmé ses LVN-HUD de manière à obtenir, entre autres symboles, l’indicateur de virage et de dérapage ainsi que l’indicateur d’assiette de l’hélicoptère, mais n’a pas activé le vecteur de dérive. Le commandant de bord ne se souvenait pas des modes sélectionnés pour configurer ses LVN-HUD.

Configuration des sièges dans la cabine

1.18.7. L’accident de CH146434 en juillet 2009 et celui de CH147202 en août 2010 ont attiré l’attention sur le fait que les ceintures de sécurité n’étaient pas utilisées à bord des aéronefs déployés en Afghanistan. L’accident de CH147205 était le deuxième révélant que les passagers n’attachaient pas leur ceinture de sécurité à bord des hélicoptères Chinook. Un échange de courriels entre la 1 DAC et l’Escadre aérienne de la FOI-Afg indiquait clairement que la pratique courante consistant à ne pas attacher sa ceinture de sécurité durant certaines missions avait été reconnue et approuvée dans le message du 16 décembre 2009. Le Directeur – Navigabilité aérienne et soutien technique (DNAST) a ultérieurement produit un rapport d’évaluation sur la sécurité des occupants du CH147F Chinook, le 4 mars 2014, pour documenter les risques et formuler des recommandations en vue d’améliorer la sécurité des passagers.

Qualification de l’équipage navigant dans le théâtre

1.18.8. Tous les membres d’équipage navigant de Chinook nouvellement arrivés en Afghanistan devaient suivre une instruction au pilotage de trois jours et de trois nuits avant d’obtenir la catégorie de vol prescrite. Cette instruction menant à une qualification comprenait les atterrissages et les décollages dans un nuage de poussière.

1.19. TECHNIQUES D’ENQUÊTE UTILES OU EFFICACES

1.19.1. Aucune.

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PAGE LAISSÉE INTENTIONNELLEMENT EN BLANC

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ANALYSE 2.

2.1. GÉNÉRALITÉS

2.1.1. Dans le cadre de l’enquête, les marques d’impact dans le sol ont été examinées afin de déterminer si le capotage était le résultat d’un atterrissage dur ou d’un atterrissage avec dérive. Après avoir relevé des signes de dérive vers la droite, l’approche effectuée dans de mauvaises conditions de visibilité a été examinée. Plus spécifiquement, les procédures d’approche et la configuration des LNV-HUD ont été analysées dans le contexte de l’approche en question.

2.2. ANALYSE DE L’ATTERRISSAGE

2.2.1. Les signes d’un atterrissage vertical dur d’un hélicoptère Chinook comprennent notamment des dommages aux butées d’affaissement de la tête des rotors. Une inspection des deux têtes de rotor principal n’a révélé aucun dommage des butées d’affaissement statique.

2.2.2. Même si les butées d’affaissement n’étaient pas endommagées, les témoignages ont indiqué que l’atterrissage était plus dur qu’à la normale. Ils ont également révélé qu’un passager assis dans la partie avant gauche de la cabine arrière a été expulsé de son siège, et s’est retrouvé à genou au centre du couloir de la cabine avant que l’hélicoptère ne bascule. Le fait que ce passager se soit retrouvé au centre du couloir appuie l’hypothèse voulant que l’hélicoptère ait dérivé vers la droite avant de s’immobiliser brusquement au toucher des roues, ce qui aurait soulevé le passager de son siège avant de le projeter latéralement dans le couloir, entraîné par l’élan de son corps. Ces éléments, tout comme la marque d’impact de dix pouces de profondeur laissée dans le sol par l’atterrisseur avant droit, laissent croire que l’atterrissage était bel et bien un atterrissage dur.

2.2.3. L’orientation, la forme et la profondeur des marques d’impact laissées dans le sol par les trains d’atterrissage ne portent pas à croire qu’un ou l’autre des atterrisseurs se soient rompus au toucher des roues à cause d’un atterrissage vertical dur. Néanmoins, les quatre atterrisseurs ont été envoyés au CETQ aux fins d’analyse approfondie. Le CETQ a déterminé que la défaillance des matériaux observée laissait croire à l’application d’une charge latérale, ce qui vient appuyer le scénario d’un basculement dynamique plutôt que celui d’un atterrissage vertical dur à angle droit causant une défaillance du train d’atterrissage et menant à un capotage.

2.3. MARQUES D’IMPACT AU SOL

2.3.1. Les marques d’impact au sol n’étaient pas orientées vers le nord-ouest (orientation prévue de l’atterrissage), mais bien vers le nord. Les caractéristiques des marques au sol indiquaient un certain mouvement vers l’avant (vers le nord-ouest) ainsi qu’un important mouvement de dérive vers la droite (vers le nord) au toucher des roues. Une vue aérienne des marques

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d’impact au sol et de la disposition de l’épave prise sur bande vidéo par le CU170 Heron peu après l’accident appuie un mouvement vers l’avant et une dérive vers la droite au toucher des roues (figure 1). En outre, le gravier profondément incrusté entre le pneu et la jante de la roue de l’atterrisseur avant droit correspondait à l’effet que cause une dérive latérale vers la droite se terminant par l’enfoncement de l’atterrisseur dans le sol, comme le confirme l’extrémité de la marque d’impact.

Figure 1. Images prises par le CU170 Heron (NON CLASSIFIÉ)

2.3.2. L’analyse et les mesures des marques d’impact au sol, tel qu’elles sont présentées dans la figure 2, révèlent que les marques d’impact du train d’atterrissage avant se trouvaient à 158 pouces à gauche des marques d’impact du train d’atterrissage arrière, ce qui suggère encore une fois une dérive importante. Sans une dérive de l’hélicoptère à l’atterrissage, les marques d’impact laissées dans le sol par le train d’atterrissage avant auraient été alignées à celles du train d’atterrissage arrière.

2.3.3. La distance entre les deux marques d’impact des atterrisseurs arrière était de 105 pouces, c’est-à-dire 30 pouces de moins que l’écart normal entre les deux atterrisseurs arrière d’un hélicoptère en bon état de service. La distance entre les deux atterrisseurs avant était de 101 pouces, ce qui est 25 pouces de moins que l’écart normal entre les atterrisseurs avant. Dans la figure 2, l’arc-cosinus permet de calculer l’angle de dérive en comparant la distance entre les marques de pneu à la distance entre les pneus d’un hélicoptère en bon état de service. Dans ce cas-ci, l’angle de dérive a été établi à 36,7 degrés pour les marques des pneus avant et à 39,4 degrés pour les marques des pneus arrière. Ces calculs confirment une dérive au toucher des roues de l’hélicoptère, plus précisément une dérive de 36,7 à 39,4 degrés.

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Figure 2. Analyse du cap de l’hélicoptère en fonction des marques des pneus

2.3.4. Les marques d’impact laissées au sol par le train d’atterrissage gauche et le droit étaient de longueur différente. Le train d’atterrissage gauche a laissé des marques de 70 pouces et de 60 pouces de longueur, tandis que le train d’atterrissage droit a fait des marques de 120 pouces et de 122 pouces de longueur, ce qui indique que l’hélicoptère, à un moment donné, était incliné vers la droite et que ses roues gauches ne touchaient plus le sol. En outre, puisque les roues gauches ne touchaient plus le sol, l’enquête a permis de conclure que deux vecteurs de force avaient contribué à l’accident : la poussée devait être supérieure à la masse et l’effet d’entraînement des structures supérieures de l’hélicoptère (p. ex. les moteurs et les transmissions) a créé un vecteur de force latéral alors que les roues droites s’enfonçaient dans le sol. Ces forces correspondent à la phase initiale d’un basculement dynamique. Le fait que les roues gauches aient quitté le sol durant la séquence d’atterrissage explique pourquoi l’équipage navigant a eu l’impression que l’assiette de l’hélicoptère était anormale à l’atterrissage.

2.3.5. La marque d’impact laissée au sol par l’atterrisseur avant droit avait dix pouces de profondeur, ce qui en fait la plus profonde des quatre marques d’impact au sol et appuie les témoignages indiquant que l’atterrissage était plus dur qu’à la normale. La profondeur de cette marque d’impact au sol laisse entendre qu’une importante force vers le bas s’est exercée sur l’atterrisseur avant droit. En outre, les dommages subis par l’atterrisseur avant droit indiquent qu’une force latérale considérable a compromis la structure abritant le caisson de torsion, ce qui vient appuyer ce scénario.

2.3.6. L’enquête a permis de conclure que l’hélicoptère s’est posé en glissant vers l’avant et en dérive vers la droite, compte tenu de l’écart entre l’orientation des marques d’impact laissées au sol par les trains d’atterrissage avant et arrière, de la distance séparant les marques d’impact avant et arrière,

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du gravier incrusté dans l’atterrisseur avant droit et des caractéristiques des dommages subis par l’atterrisseur avant droit et par sa structure. De plus, les marques d’impact de longueur différente indiquent que l’hélicoptère était incliné vers la droite alors que les moteurs étaient réglés à une puissance relativement élevée jusqu’à ce que l’atterrisseur avant droit s’enfonce dans le sol de la zone d’atterrissage.

2.4. BASCULEMENT DYNAMIQUE

2.4.1. La « Flight Safety Fondation » a publié un bulletin sur la sécurité des hélicoptères qui traite de la prévention du basculement dynamique2, lequel indique que le phénomène dépend de quatre conditions :

a. une roue ou un patin de l’hélicoptère doit toucher le sol; b. l’hélicoptère doit pivoter autour du point de contact avec le sol

au lieu de son centre de gravité; c. l’hélicoptère doit développer une certaine vitesse angulaire

autour du point de pivotement; d. habituellement, l’hélicoptère développe une poussée de

décollage ou repose légèrement sur ses patins.

2.4.2. Le sable incrusté dans le train d’atterrissage avant droit et les dommages subis par ce dernier et sa structure ainsi que l’analyse des marques d’impact et du sillon laissé par l’épave indiquent tous un mouvement vers la droite de l’hélicoptère. Les marques d’impact sur la droite étaient plus longues que celles sur la gauche, ce qui indique que l’hélicoptère était incliné vers la droite durant la phase finale de contact avec le sol de la tentative d’atterrissage. Toutes ces preuves appuient le scénario voulant que le train d’atterrissage avant droit ait touché le sol et servi de point de pivotement pour l’hélicoptère.

2.4.3. Les témoignages ont signalé que l’hélicoptère effectuait un mouvement inhabituel vers la droite. En outre, en raison de la dérive vers la droite, les marques laissées par les trains d’atterrissage étaient de 60 à 122 pouces de longueur de même que de 37 à 39 degrés hors du plan de rotation des roues, ce qui laisse entendre que l’hélicoptère développait une vitesse angulaire vers la droite et que l’atterrisseur avant droit servait de point de pivotement. Tel qu’il a été indiqué précédemment, l’hélicoptère était incliné vers la droite, ce qui indique un vecteur de poussée plus élevée que la masse, remplissant ainsi la dernière condition pour aboutir à un basculement dynamique. Par conséquent, comme les quatre conditions d’un basculement dynamiques

2 Major J. Schmid, Preventing Dynamic Rollover, Flight Safety Foundation Helicopter Safety, volume 14, no 1, janvier/février 1989, http://flightsafety.org/hs/hs_jan-feb89.pdf.

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étaient présentes, l’enquête a conclu que l’hélicoptère a bel et bien subi un basculement dynamique.

2.5. MAUVAISES CONDITIONS DE VISIBILITÉ

2.5.1. Dans le cadre des missions, les hélicoptères Chinook doivent atterrir dans des BOA ou des SAH non aménagés. La plupart de ces atterrissages mènent à un niveau de mauvaises conditions de visibilité. La mesure dans laquelle les conditions de visibilité se détériorent dépend de la composition du sol, du vent et d’autres facteurs comme la puissance nécessaire à l’atterrissage et l’humidité du sol.

2.5.2. La nature adéquate du SAH a été rigoureusement évaluée au cours de l’étape de planification de la mission. Comme il s’agissait du lit asséché d’une rivière, une partie de l’analyse consistait à déterminer si le sol était bien sec ou si le SAH contenait de l’eau. Il a été conclu que le SAH convenait probablement à la mission, et qu’une certaine quantité d’eau contribuerait à limiter le soulèvement de la poussière. En outre, les enquêteurs sur le terrain ont examiné les terrains avoisinants du SAH, ce qui a permis d’établir que le lit asséché de la rivière était en fait le meilleur SAH de la région. Toutes les autres zones étaient recouvertes d’un sable fin, plus léger que celui qui se trouvait à l’endroit sélectionné, lequel était davantage à risque de créer de mauvaises conditions de visibilité s’il était soulevé par la déflexion de l’air vers le bas produit par l’hélicoptère.

2.6. APPROCHE VMC DANS DE MAUVAISES CONDITIONS DE VISIBILITÉ

2.6.1. Les témoignages ont indiqué que le nuage de poussière était plus important que prévu. Toutefois, le Chinook de tête a réussi son atterrissage, et l’équipage navigant du Chinook accidenté, en très courte finale, était convaincu que le déroulement de l’approche ne pouvait qu’aboutir à un atterrissage réussi. Étant donné l’approche, la région et le SAH, l’équipage navigant n’a cru en aucun temps qu’il devait remettre les gaz; il a donc poursuivi son approche pour effectuer l’atterrissage.

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2.6.2. En Afghanistan, les équipages navigants canadiens des hélicoptères Chinook ont recours aux procédures américaines et canadiennes. La figure 3 présente la technique d’atterrissage dans la poussière et le sable, extraite du supplément à la publication B-GA-002-147/FP-001 sur le CH147D, qui est publié par la 1 DAC et utilisé par les équipages navigants canadiens du Chinook depuis la Roto 6 en 2008. Les procédures de pilotage américaines n’indiquent pas la hauteur à laquelle il est acceptable de poursuivre une approche en cas de perte des références visuelles au sol. Les procédures de pilotage canadiennes mentionnent qu’il est possible que l’aéronef soit complètement enveloppé par la poussière qu’il soulève à environ 10 pieds AGL. Cette situation est acceptable si tous les jalons de la procédure d’approche ont bien été suivis et franchis, afin de confirmer que l’aéronef a adopté le bon profil d’approche et qu’il est bien aligné sur le cap souhaité à l’atterrissage. Même si le document établit qu’il est acceptable que l’hélicoptère soit stabilisé à 10 pieds AGL pour poursuivre son approche et son atterrissage, la procédure ne prescrit pas une remise des gaz obligatoire en cas de perte des les références visuelles au sol avant la hauteur en question.

Figure 3. Technique d’atterrissage dans un nuage de poussière ou de sable

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2.6.3. Les témoignages ont révélé que le point de décision critique habituellement utilisé pour remettre les gaz était fixé à 25 pieds AGL. Au point de décision en question, l’hélicoptère doit être stabilisé dans son profil d’approche et être aligné sur le point d’atterrissage et les pilotes doivent voir les références visuelles au sol, sinon une remise des gaz est nécessaire. L’enquête n’a pas permis d’établir l’origine de la valeur en question, car elle n’est pas une hauteur publiée.

2.6.4. L’équipage navigant a jugé que tous les jalons de l’approche avaient été bien franchis et a continué son approche. Il a perdu toutes ses références visuelles au sol avant d’amorcer l’arrondi (à plus de 20 pieds). Comme il avait perdu toutes ses références visuelles au sol, l’équipage a exécuté l’arrondi à environ 20 pieds AGL à l’aide des données des LVN-HUD au lieu des références visuelles. Il est fort probable que le changement d’assiette au moment d’amorcer l’arrondi est à l’origine de la dérive latérale vers la droite, car les commandes de vol ont été déplacées en fonction des seules données des LVN-HUD.

2.6.5. Tel qu’il est indiqué à l’alinéa 1.18.3, le manuel des manœuvres officielles (MMO) du CH147D signale que le pilote aux commandes peut poursuivre l’atterrissage si l’hélicoptère est stabilisé en légère décélération conformément aux paramètres du jalon, s’il est convaincu que l’hélicoptère peut atterrir en toute sécurité et si le site d’atterrissage a été évalué visuellement durant l’approche finale et jugé convenable. Le MMO du CH147D n’indique pas comment les paramètres du jalon devraient être évalués ni confirmés. Au cours des premières rotations, le pilote qui n’était pas aux commandes surveillait les instruments et annonçait les jalons au pilote aux commandes.

2.6.6. Au cours de la Roto 10, on a remplacé les annonces verbales par le pilotage en fonction des vibrations (ressentir la vibration de la sustentation de translation). Ce changement avait eu lieu parce que le personnel de la Roto 10 considérait qu’il était trop risqué de demander au pilote n’étant pas aux commandes de se concentrer sur des instruments dans le poste de pilotage et d’annoncer les jalons au lieu de regarder à l’extérieur de l’appareil et d’être prêt à prendre les commandes si le pilote aux commandes perdait ses références visuelles au sol. La méthode voulant qu’on pilote en fonction des vibrations est moins précise que le vol aux instruments, car elle repose sur la sensibilité proprioceptive du pilotage par instinct qui subit les effets de facteurs externes et internes pouvant créer des illusions visuelles et vestibulaires.

2.6.7. À la Roto 11, la mise en service des LVN-HUD à bord des hélicoptères CH147D a permis d’obtenir les données nécessaires à la surveillance et à l’annonce des jalons, car le pilote n’étant pas aux commandes n’avait plus à se concentrer sur les instruments dans le poste de pilotage pour surveiller les paramètres des jalons. Même si le MMO du CH147D ne prescrivait pas d’annoncer les jalons, une telle procédure aurait pu mener à une approche mieux stabilisée. La grande diversité des procédures d’approche employées dans de mauvaises conditions de visibilité (surveillance des jalons aux instruments, par sensibilité proprioceptive ou à l’aide des LVN-UD) laisse croire

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que les lignes directrices fournies par l’autorité de navigabilité opérationnelle à l’égard des procédures de pilotage dans de mauvaises conditions de visibilité, notamment les critères d’approche, les paramètres commandant une remise des gaz et la surveillance des jalons, étaient insuffisantes et donnaient à interprétation.

2.7. UTILISATION DES LVN-HUD

2.7.1. Les LVN-HUD ont été utilisées à bord du Chinook pour la première fois dans le cadre de la Roto 11. Même si les pilotes de l’hélicoptère CH146 se servaient de quatre pages préprogrammées dans les LVN-HUD, dont les cycles étaient assujettis à la phase de vol (c’est-à-dire la phase de mise en stationnaire, de transition et en route ainsi qu’une page laissée en blanc), les procédures relatives au CH147D étaient différentes. Les équipages navigants du CH147D programmaient leur LVN-HUD au début du vol, pendant la vérification des systèmes, et utilisaient cette seule page pour tout le vol, peu importe la phase de vol.

2.7.2. Il était entendu parmi les équipages navigants du CH147D et du CH146 ayant leur qualification pour utiliser des LVN-HUD qu’on ne pouvait pas activer tous les symboles de l’appareil en même temps, car l’écran aurait été surchargé. En utilisant une seule page, les équipages navigants du CH147D ne tiraient pas pleinement avantage des symboles des LVN-HUD dans une phase de vol donnée. Par exemple, le symbole de vecteur de dérive n’est pas nécessaire durant la phase de vol en route, mais il peut fournir de précieux renseignements dans la phase de transition vers le vol stationnaire, pendant ce dernier et en quittant celui-ci. Bien que l’enquête n’a pas permis de déterminer si l’absence de données du vecteur de dérive dans les LVN-HUD du pilote aux commandes a contribué à l’accident, l’utilisation du vecteur de dérive aurait pu aider l’équipage navigant à garder une vue d’ensemble de la situation, comme l’auraient également fait de solides procédures à l’égard de son utilisation, si elles avaient été élaborées à ce moment-là. Cela étant dit, l’enquête a également permis d’apprendre que le vecteur de dérive du HUD utilisé de jour ou de nuit n’avait pas été évalué dans le cadre des essais opérationnels et évaluations du CH147D, donc, même si les pilotes pouvaient se servir du vecteur de dérive, ce dernier aurait pu ou non empêcher le présent accident.

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2.7.3. L’enquête sur l’accident de CH146434 a révélé que : « le vecteur de dérive du HUD de jour aurait seulement offert au pilote aux commandes une autre source de renseignement sur la dérive, ainsi que confirmé de nouveau la direction et la vitesse de la dérive. On ne sait pas si l’utilisation du HUD de jour aurait aidé le pilote aux commandes à reconnaître, à atténuer ou à éliminer la dérive plus rapidement. » Compte tenu des conclusions de l’enquête sur l’accident de CH147205 et du rapport d’accident de CH146434, l’enquête a déterminé que le Centre d’essais techniques (Aéronautique) (CETA) ou le Bureau du projet d’hélicoptères de transport moyens à lourds (BP HELTML) devrait valider la capacité et l’utilisation du vecteur de dérive dans de mauvaises conditions de visibilité pour le CH147.

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CONCLUSIONS 3.

3.1. APERÇU

3.1.1. L’enquête a permis de conclure que l’accident s’est produit dans de mauvaises conditions de visibilité. L’altitude et la vitesse indiquée n’étaient plus annoncées, aucune altitude de remise des gaz dans de mauvaises conditions de visibilité n’était publiée et aucune donnée sur la dérive n’était fournie par les LVN-HUD. À un moment donné avant de toucher le sol, fort probablement lorsque l’assiette de l’hélicoptère a été modifiée pour effectuer un arrondi au-dessus de 20 pieds d’altitude, l’hélicoptère a amorcé une dérive non reconnue vers la droite pendant que l’équipage navigant se préparait à un atterrissage glissé droit devant sans mise en stationnaire. Le train d’atterrissage avant droit s’est profondément enfoncé dans le sol à cause de la dérive vers la droite, ce qui a fourni un point de pivotement et amorcé la séquence d’événements qui ont mené au basculement dynamique. La figure 4 présente la chaîne d’événements du présent accident.

Figure 4. Chaîne d’événements de l’accident

3.2. CONSTATATIONS

3.2.1. Les lignes directrices de l’autorité de navigabilité opérationnelle concernant les procédures à suivre lors de mauvaises conditions de visibilité, y compris les critères d’approche, les paramètres de remise des gaz et la surveillance des jalons, étaient insuffisantes et donnaient à interprétation (1.18.3, 1.18.4, 2.6).

3.2.2. La pratique courante voulait que la décision de remettre les gaz se prenne à 25 pieds AGL si l’aéronef était enveloppé dans la poussière qu’il avait soulevée, mais aucune procédure de pilotage canadienne ni américaine ne l’indiquait (2.6.3).

3.2.3. La pratique voulant qu’un pilote annonce les paramètres d’altitude et de vitesse indiquée a été abandonnée tout juste avant la mise en service des LVN-HUD (2.6.6).

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3.2.4. Les LVN-HUD du copilote étaient programmés de manière à afficher les données de virage et de dérapage, mais le symbole du vecteur de dérive n’était pas activé (1.18.6).

3.2.5. Le vecteur de dérive des LVN-HUD n’a pas été évalué dans le cadre des essais opérationnels et évaluations du CH147D (2.7.2).

3.2.6. Par la diffusion du document B-GA-002-147/FP-001 en 2008, l’autorité de navigabilité opérationnelle acceptait le risque que les équipages navigants du CH147 puissent perdre toute référence visuelle au sol dans le nuage de poussière qu’ils avaient soulevé à 10 pieds AGL (1.18.4, 2.6.2).

3.2.7. Les pilotes ont perdu leurs références visuelles au sol avant d’effectuer l’arrondi entre 20 et 30 pieds AGL (1.1.2).

3.2.8. L’arrondi a été exécuté à l’aide des seules données des LVN-HUD (1.1.2, 2.6.4).

3.2.9. Il est probable que la dérive latérale se soit amorcée lorsque les commandes de vols ont été déplacées en vue d’exécuter l’arrondi (2.6.4).

3.2.10. Les marques d’impact au sol témoignent d’une vitesse vers l’avant accompagnée d’une dérive vers la droite au moment du toucher des roues, puis d’une inclinaison de l’hélicoptère vers la droite (2.3.6).

3.2.11. La défaillance des deux trains d’atterrissage de droite correspond à celle que cause un contact avec le sol pendant que l’appareil dérive vers la droite (2.2.3).

3.2.12. L’accident a été causé par un basculement dynamique au terme duquel l’hélicoptère s’est immobilisé sur son côté droit (2.4.3).

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3.2.13. La pratique voulant que les passagers ne portent pas leur ceinture de sécurité dans le cadre de certaines missions avait été reconnue et approuvée par le Cmdt de la 1 DAC (1.18.7).

3.2.14. Au moins un des passagers assis du côté gauche de l’hélicoptère a été projeté latéralement hors de son siège, vers la droite, au toucher des roues (2.2.2).

3.2.15. La plupart des 26 passagers ne portaient pas leur ceinture de sécurité, et les blessures subies sont attribuables à des passagers tombant les uns sur les autres, des occupants projetés contre la structure de l’hélicoptère ou des objets non arrimés heurtant les occupants (1.2).

3.3. FACTEURS CONTRIBUTIFS

Facteurs contributifs actifs

3.3.1. Le pilote aux commandes a involontairement introduit un mouvement du cyclique vers la droite durant l’arrondi, ce qui a mené l’hélicoptère à dériver vers la droite et à effectuer un basculement dynamique au contact avec le sol.

Facteurs contributifs latents

3.3.2. L’énorme nuage de poussière a contribué aux mauvaises conditions de visibilité qui ont fait perdre à l’équipage navigant toutes ses références au sol de même que la capacité du pilote aux commandes à détecter la dérive de l’hélicoptère.

3.3.3. Les procédures de pilotage du CH147 n’étaient pas claires quant à l’altitude commandant obligatoirement une remise des gaz en cas de perte des références visuelles au sol, aux procédures d’annonce des « jalons » nécessaires ou des recommandations concernant le réglage et l’utilisation des LVN-HUD.

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MESURES DE PRÉVENTION 4.

4.1. MESURES DE PRÉVENTION PRISES

4.1.1. La FO Freedom a effectué, à divers échelons, une analyse après action pour discuter des circonstances de l’accident.

4.1.2. Le cmdt de la FO Freedom a demandé au cmdt esc des CH147 de normaliser les pages des LVN-HUD du CH147D, comme il a été fait pour le CH146, et de s’assurer que le vecteur de dérive figure sur au moins une page qui sera utilisée durant les phases critiques de vol ou dans de mauvaises conditions de visibilité.

4.1.3. Le cmdt de la FO Freedom a demandé au cmdt esc des CH147 d’évaluer les procédures de pilotage actuelles servant à exécuter des approches dans de mauvaises conditions de visibilité.

4.1.4. Le DNAST a effectué une évaluation de la sécurité des occupants du CH147F, ce qui a permis de formuler des recommandations afin d’améliorer davantage la sécurité des occupants.

4.2. MESURES DE PRÉVENTION RECOMMANDÉES

4.2.1. CETA/BP HELTML : valider la capacité et l’utilisation du vecteur de dérive des LVN-HUD lors du pilotage dans de mauvaises conditions de visibilité.

4.2.2. OSEM Avn Tac de la 1 DAC : normaliser les procédures d’approche du CH147F dans de mauvaises conditions de visibilité de manière à y intégrer les critères des procédures d’approche stabilisée et de remise des gaz.

4.3. AUTRES PRÉOCCUPATIONS LIÉES À LA SÉCURITÉ

4.3.1. Aucune.

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4.4. COMMENTAIRES DU DSV

Les équipages navigants d’hélicoptère sont souvent confrontés à un milieu opérationnel difficile en raison du vol à basse altitude. Ils sont exposés aux risques d’impact d’oiseaux, de collision avec des câbles et de pilotage dans de mauvaises conditions de visibilité. En outre, l’environnement du champ de bataille comporte ses propres défis et impératifs, comme l’intégrité de la section et l’appui réciproque. Les décollages et les atterrissages dans de mauvaises conditions de visibilité ne sont pas des compétences nouvellement acquises pour les pilotes d’hélicoptère. Les pilotes d’hélicoptères tactiques canadiens effectuent depuis longtemps leur travail dans de difficiles conditions de mauvaise visibilité causée par la neige. En outre, ils ont connu les mauvaises conditions de visibilité que pouvait engendrer la poussière à bord du Twin-Huey, d’abord dans le Sinaï au cours des années 80, puis en Somalie dans les années 90. Les nuages de poussière de l’Afghanistan sont de même nature, mais beaucoup plus difficiles à gérer en raison de l’environnement et de la nature des opérations lorsqu’ils se produisent. L’altitude-densité élevée, la température chaude et le sable très fin créent des conditions de mauvaise visibilité exceptionnellement difficiles. Le niveau de compétence que doivent posséder les pilotes pour réussir un atterrissage dans des conditions de mauvaise visibilité commande une formation de haute qualité et l’adoption de procédures précises et éprouvées. L’accident de CH147205 prouve qu’il est nécessaire de mettre en place de telles procédures détaillées et claires, ne donnant pas à interprétation. Toutefois, même si un accident s’est produit et que nous avons perdu un hélicoptère, la chance nous a souri. Tous les occupants ont survécu et peuvent maintenant raconter leur histoire. Nous devons tirer des leçons de cet accident afin d’éviter qu’il ne se répète. Que ce soit dans un nuage de neige ou un nuage de poussière, au pays ou à l’étranger, les opérations héliportées dans de mauvaises conditions de visibilité ne sont pas près de cesser.

Colonel S. Charpentier Directeur de la sécurité des vols

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Annexe A de 1010-CH147205 (DSV 2) 27 janvier 2015

ANNEXE A : PHOTOS

Photo 1 : Vue du devant de CH147205.

Photo 2 : Vue du dessous de CH147205 (rupture du train d’atterrissage avant droit).

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Annexe A de 1010-CH147205 (DSV 2) 27 janvier 2015

Photo 3 : Vue du dessous dans la partie arrière de CH147205 (rupture du train d’atterrissage arrière droit).

Photo 4 : Sièges du côté gauche de CH147205 (ceintures de sécurité toujours non bouclées).

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