CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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UKIVERSIDAD _ ACIONAL DE T"GOU.iVLL Mllseo de Historia Natural : Instituto de Etnologfa A - SUJET DU CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS QUE J 'Al REC1"EILLlS 1 l'AR K. 'rH . PREUSS Pl'ofesseltl' à l'Université de Bodin De 1a, 'RIl:VISTA DEL Ix 9"1'1UTO Ill>; E 'fNOLOGÜ, tOIlIO n, IJ{,gintls 44.5 Il 457 TUCUMAr . UNlVEH'lD-AD NACIONAL DE TUCntAN 1932

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UKIVERSIDAD _ ACIONAL DE TGOUiVLL

Mllseo de Historia Natural Instituto de Etnologfa

A - SUJET

DU

CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

QUE J Al REC1EILLlS

1

lAR

K rH PREUSS Plofesseltl agrave lUniversiteacute de Bodin

De 1a RIlVISTA DEL Ix 911UTO Illgt E fNOLOGUuml tOIlIO n IJgintls 445 Il 457

TUCUMAr

UNlVEHlD-AD NACIONAL DE TUCntAN

1932

AU sUJlitr DU CARAcrliEgraveRE DES MYTHES ET DES CHANTS HUlCHOLS

QUE JAI RECUEILLIS (1)

PAR K TH PREUSS Professeur il j Universiteacute ltle Berlin

Edouard Seler (2) nou dit en terminant les longs extraits si inteacuteresshysants pour larcheacuteologie mexicaine quil [l tireacutes pour la ZeitschTift jur Ethnologie (1903) de louvrage de Carl Lumholz sur les Huicllols aetuels laquo Eepeacuterons que dans un avenir prochain ces r echerches soient reprises agrave nouveau et cette fois-ci SUl des bases plus ampJes_ NolU aurons pentshyecirctre un jour les traditions de ces Indiens lenrs hymnes leurs priegraveres et leurs chants dans leur langue originale Cest agrave ce moment qu appashyraicirctra dans toute son importance ce que nous savons de la vie et dei croyances de ce penple fossiliseacute qui sest maintenu dans les montagnes de Jalisco gracircce agrave UI1 heureux concours de circonstances et qui offre tant dinteacuterecirct pour la connaissance de tous les problegravemes se rattachant an vienx lVIexique raquo

Qnelques anneacutees apregraves je ramenai de ma mi ssion au Mexique (1905shy1907) nne quantiteacute consideacuterable des textes dem andeacutes Jeus souvent

loccasion dans des rapports preacuteliminaires dinsister sur la porteacutee que leacutetnde des ceacutereacutemonies et des pratiques de ces Indi ens 0 peut avoir pour lintelligence des faits mexicains Je confirmai cette maniegravere de voir dans le seul livre qui ait paru jusquici sur cette expeacutedition (3) J y traite des Indiens Cora voisins de~ Huichols qui comme eUx preacutesentent avec les anciens Mexicains cPeacutetranges analogies Les reacutesultats obtenus faishysaient pressentir q lUgrave1lle eacutetude analogue sur les H nichols serait encore pIns feacuteconde

(1) Cet article a eacuteteacute t radu it du manuscrit original allemand par A Meacutetraux

(2) SrLrΠ(E ) Gesammelte Abhandlnngen Berlin 1908 tome III page 39l

(3) PRIWSS (TH R) Die NaY((lit -Expedi tion l Die Religion deI Com-lndiarw Leipig 1912

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Pendant la grierre alors que eacutetais en Oolombie je reccedilus pOUT ce livre le prix Lo l1batque me deacutecerna lAcadeacutemie Royale des Sciences de 1russe Aussi pouvais-je espeacuterer quagrave mon retour et sitocirct publieacutes les reacutesultats de mon expeacutedition en Oolombie je serais en mesure de remshyplir les clauses du contrat passeacute avec mon eacutediteur Toute cette tacirccbe anrait pu ecirctre meneacutee agrave chef quoiquau prix de grands sacrifices lVlalbeushyreusement leacutepoque critique qui suivit la guerre ct au cours de laquelle tous les contrats furent reacutesilieacutes en conseacutequence de linflation vint deacuteshytruire cet espoir Le 1Yfyseum fUr Volkerkunde de Berlin a vu tomber 1

110 de ce quelle eacutetait avant la guerre lactiviteacute quil deacuteployait en Ameacuteshyrique dautre part en etbnographie geacuteneacuterale seules des syllthegraveses hacirctishyves de courts travaux de vulgarisation ou des ouvrages conccedilus d~tIis un but purement estheacutetique jouissent actuellement de quelque appreacuteciashy

tian Au milietl de cet affaissement de la curiositeacute scientifique lon ne peut guegravere se sClltir encourageacute agrave poursuivre lanaIyse dun mateacuteriel aussi vaste que celui que jai recueilli sur les Huicbols ni mecircme espeacuterer receshyvoir une aide pour sa publication agrave moins quaux Eacutetats-Unis lon nesy inteacuteresse ce qui nest pas exclu

On discerne mieux les rapports existant entre les cllants et les myshytbes des Huichols et ceux des anciens 1Yfexicains lorsquol compare entre eux certains faits et certaines conceptions fondamentales propres agrave ces indigegravenes et quon deacutemontre lexistence de ces relations par quelshyques preuves dordre litteacuteraire

Je nai pas besoin de revenir SUI le contenu des mythes et des bymshynes car jen ai deacutejagrave parleacute ailleurs (1) Oependant il nous importe de savoir que le nombre des fecirctes annuelles des Huichols est plus grand que celui des Ooraet quil en est de mecircme des longues chansons que les laquosbamans chanteursraquo font entendre toute la nuit jusquau matin Les Oora nont que trois f8tes annuelles reacuteguliegraveres celle des semailIes du jeune eacutepis de maiumls et du maiumls grilleacute alors que les Huicbols en ceacutelegravebrent de 10 agrave 11 la fecircte de la pluie de la pnrification des cbamps de la deacuteesse de la terre Tcucircrutsi Na7cau~ de la jeune citrouille du jeune eacutepi de maiumls de la cuishyson des eacutepis de maiumls la fecircte du soleil destineacutee aussi agrave eacuteloigner les malashydies celle du Peyote du rocirctissage du maiumls celle de kanuinirne cest-agraveshydire de la consommation de galettes de maiumls cru et la fecircte de heucUgravesiise cest-agrave-dire laquoles derniegraveres raquo car elle est la derniegravere fecircte de lanneacutee avant celle des semailles en juin au cours de laquelle la deacuteesse dn maiumls prend congeacute des autres dieux

(1) Die r-eliguumlisen Gestinge nnd Mythen e~mger Stiimme der mexi1canisehen Sierra Mashy

dre in Achiv fiil Religion- Wissen8chajiuml tome XI 1908 voyez nllssi Ethllographische

E-gcbnissc cineT Reise in ilie me~ikanische SieJ1a Maile iu Zeitschrift fii Ethnologie

1908 Reise zu ilen Sttinnnen der westlicTlcn SielJa J11aille in Mexico in Zeitschift iler

Geselschaft fii Eldkllnde Berlin 1908

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Uommeon le voit les Hriicbols pour ce qui est du nornore degrave leJlrS fecirctes se rapprochent beaucoup des agravenciens JYlexicails qui e11 ceacuteIebntient annu ellement 18 reacuteparties avec une grande reacutegulariteacute sur les 18 mois de leur anneacutee Les fecirctes huicbols paT contre nont pas lieu agrave des intershy shy

vamplles dccediltermineacutes et suiventplutocirct les pheacutenomegravenes naturelsde ianneacutee -Ces Indiens onten ougravetre certaines ceacutereacutemonies comm~ celle de la laquo glleacutemiddot rison de la terre raquo dont le but est dam(lner celle-ci agrave fa()ilit~r la crQisshysance cles v-eacutegeacutetaux ainsi que deux sortes de fecirctes des morts qni nesont pas comprises dans lalternance reacuteguliegravere des fecirctes annuelles Obez les anciens Mexicains la- fecircte des morts faisait partie de celles qui eacutetaient ceacuteleacutebreacutees agrave date fixe Si agrave celles ci on lljoute les fAtes des pluie des MeshyxicaIcirclls qllIcirc avaient lieu en diffeacuterents mois et qui par rapport agrave celles des HU1Chols eacutetaient en surnumeacuteraire le nombre des fecirctes dans lun et lautre de ces peupleR est sensiblement le mecircme La fecircte de la gueacuteriSon des dieux qui chez les Huichols a lieu chaque dix aus offre un parallegravele frappant avec celle qui chez les Mexicains eacutetait destinpe agrave perlllettre anx dieux de se reposer et se reacutepeacutetait tous les buit ans Son nom at(~shymalqualiztl-i peu t se traduire par lt Fecircte des boulettes de maiumls cuites agrave leau gt

Ce qui llons inteacuteresse ici ce sont les curieuses diffeacuterences quise manimiddot festent dans les fecirctes des Huicbols et des Ooms et leurs causes ainsi que leur influence SUl les chants etles mythes En gros les croyances relishygieuses des Coras correspondent agrave celles des Huichols et des Mexicains de mecircme quan point de vne rituelles Ooms ont plus dun point commun aec les Mexicains Nous avons appris agrave connaicirctre la fecircte du vin ou Reacuteveil et la quatriegraveme fecircte annuelle des Mexicains ( la petite et la gra nde veille raquo quoique la fecircte en question eh(z les OOtaS soit une ceacuteshyreacutemonie non annuelle dinitiation des enfants (1)_

La diffeacuterence du nomhre des fecirctes chez les Huichols et les lVIexi eains dune part et chez les Coras de lautre provient de la quantiteacute plus ou moins grande de diviniteacutes daus ces tribus Les Huicbols croient qnil y

a plus de dieux que dhommes et cela n()n en raison dune consiagraveeacuterashytion geacuteneacuterale inspireacutee par la multitude des mortR qui chez eux ne sont pas du tont promus au rang de dieux nl agrave cause des activiteacutes varieacutees de la nature mais parce quils ont pour chaque pheacutenomegravene naturel (par exemple pour les deacuteesses de la pluie qui manifestent leur puissance en diverses directions) pour le8 montagnes etc deux noms et par conseacuteshyquent beaucoup de dieux On va jusqnagrave supposer quune deacuteesse adoreacutee sons le mecircme nom daus deux villages diffeacuterents nest pas toujours la mecircme Chaque village en plus dun temple rond symbolisant le monde

(1) Pl1EGSS (K TH) Das Fest les E--wachens bAi den COla-1I(liane1ll in VerhandlwYlshygen des 16 1l1temationalen Li melikanisten -Kon g1esses Z11 Wien pages 489 et sui vantes

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possegrave(le plusienrs huttes consacreacutees ft un on ft deux dieux et il en reacuteshy suIte que par la force de lImbitude ils simaginent avoir agrave lenr seule

disposition nn nombre limiteacute (le dieux quoique cenx-ci apparaissent aussi mais en vertu dun choix diffeacuterent dans le pantheacuteon dantres villa shyges Cette tendance agrave ht speacutecial isation et ugrave 1inc1i vic1ualuumlation des dishyviniteacutes a en pom reacutesultat que Fon apporte anx dieux leurs offrandes (lans les lieux qni leur sont assigneacutes et que lon concreacutetise leur preacuteshyseJwe agrave laifle d une image on (lune chaise Ohez les lfexicains nons retrouvons la multipliciteacute des dieux individuels et de leurs figuratiolJs mateacuterielles Ces diviniteacutes par suite de lellrs fonctiolls ChtllS la nature et (le par les liens qni les unissent wx eacuteleacutements de cette mecircme nature peuvent se reacutepartie en groupes Enfin eeacutetait eacutegalement un trait typiqne de la religion mexicaine que davoir pour chaque commllnauteacute des diishyniteacutes particuliegraveres qui en eacutetaient les protectrices Une des conseacutequenceR de cet eacutetat de choses ou du moins un pheacutenomegravene correacutelatif est lindiffeacuteshyrence que ces deux peuples ont manifesteacutee Ugrave la conception dune senle diviniteacute creacuteatrice et dun dieu suprecircme Ponr les Huicltol s lou ne pent parler dun tel type de dieux et les Mexicains aVlt1ient quatre ltliviniteacutes creacuteatrices alors lue Tonacatecutli) en tant qlle dien sllprecircme passait au second plan

Il en va tout an trempnt ebp7 les Conls Ils nont ni lieux sacreacuteR ni images de diviniteacutes IIi temple Ocst tout an plu s si Fon peut donner ce dernier titre au x p laces ougrave ils ceacutelegravebren t lems fecirctes et anx Cftvernes dans lesq uelles ils gardent les objets rituels et ougrave ils deacuteposent souvent des flegraveshyches-offrancles Bien qne leurs morts devienn ent des dieux principtleshyment des dieux de la pluie et que de nombreux objets naturels possegravedent les attributs de diviniteacutet ils sont toujours repreacutesenteacutes comme constituant des gronpes inltlifteacuterencieacutes Des animanx isoleacutes qui so nt eeacuteleacutebreacutes dans leur chanson ft cause ltle leur action SUl la na ture forment toujonrs des espegraveces jamais des indi viti us Il en reacutesnl te qne le nombre de di vini teacutes individ nal ishyseacutees est chez eux tregraves petit et quelles ont un caractegravere plus extensif En fl1it il n y en a qUB trois le dieu middotsoleil la deacuteesse de la terre et de la lune et parfois du ciel eacutetoileacute qui est en mecircme temps la deacuteesse du maiumls ainsi que le fils des deux leacutetoile du matin qni est aussi le dieu du maiumls Parshytant le dieu soleil est le personnage le plus important de lunivers et il unit en llli la position de Tonacatecntli) que les Mexicains consideacutemient comme eacuteloigneacute du monde et celle dune di vi ni teacute vi vante Plus proch es tles hommes sont leacutetoile (lu matin qui a donneacute aux hommes lem relishygion et la deacuteesse de la terre et (le la lune puisque d accord ltvec le soleil et leacutetoile du matin elle ltt creacuteeacute la terre Ces trois diviniteacutes agrave cocircteacute de leur fonction particuliegravere dans la natnre se partagent entre elles les attributs dnn dieu suprecircme et ce fait rapgtelle encore dans une certaine mesure les croyances des anciens Mexicains en deacutepit des nombrenx

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dieux individuels quatre dentre eux seacutetaient deacutega geacutes de la masse des autres et eacutetaient consideacutereacutes COillme uumles divilliteacutes ( leacuteaMices (eacutetaient (Jnetzalc()atl) Tezcatlipoca) Jl1ixcoatl et Uitzilopohtli Ils eacutetaient en mecircme telll[)sdes dienx tribaux qni seacutetaient incorporeacute pIns ou moins les quashyliteacutes ltle dieux su[wecircmes

Les an(iens Mex icains form ent agrave (e t eacutegard le trait dnnion entre les Hui (hols et les Ooras et ne peuven t ecirctre s implement identifieacutes mu preshymiers Allons p lus 10ilI et voyons sil existe lin rapport tlu mecircme ordre dans les prodnctiolls litteacuterailes uumle (es peuples On est de prime tborcl frapp eacute par le fa it qne les OOlas dlttlli3 leurs chan ts font cles descriptions geacuteneacuterales des pLeacutenomegravenes naturels en rappor t avec les figures myt-hicoshyreligieuses q nil s incarnent Dans lcnrs priegraveres en dehors des di ffeacuteshyrents grollpes de dieux ils sadressent aux troi s diviniteacutes principales Les Buichols par contre (l er(tent agrave traiter avec tout lessaim des dieux et a ntant que possible avec cha cun seacutepareacutement On ne se (011shytente PecircLS (le dresser de longnes listes de dienx mais pour nen oublier aucun on a Cloiu (lnjouter agrave la fin de chaque priegravere nazte) naite) laquo tou s tous raquo IDn plus de C(cL les relat- ions avec des perlonnages individ LHoshyli seacutes ont enh-aineacute avec ellei3 la formation dLm veacuteri table style dram ltLtishyque dial ogueacute Leacuteleacutement eacutepiqne cles COtas passe au se(oIHl plan eLez legraveS Hui cLoh Les lVIexicains se rapprocLent beauco Llp tles Oaras mais ils ne nous ont pas cLisseacute dhymnes semblahles Ft ceux des Oaras ct des HnishychoIs Peut ecirctre nen ont-ils jamais eu Malgreacute Lout lindividtlaliteacute de le l1ls nombrenses di vi niteacutes est fortement marq neacutee bien quelle n fLi t pas condui t agrave la creacuteation dun dialogne dramatique comme che les Hlli chols En fin de com pte ces diffeacuterences entre diviniteacutes individuell ts et geacuteneacuterashyles se man ifestent avec benucoLlp de relief dalls les mytiJ es

Leurs rapports avec les diffeacuterents dieux ne lwrmettent pas a nx HuishychoIs de reacutealiser des actions concregravetes de caractegravere dramatique Celles(Icirc sont insignifiantes et se bornent ft relever fIes hfttons emplumeacutes agrave se tourner anns fliffeacuterentes direct ions ft s us pend re nne ceinture ou ft repreacuteshysenter le chemin da ciel etc Seuls quelqu es eacutepisodes de la (basse au cerf 80n t reprodni ts Les ceacutereacutemonies des Ooras ont un (aractegravere dramashytique et imitatif beaucoup plus accuseacute On ne peut attribuer cependant ce fai t Ugrave la rareteacute l1 e persol1lmges llldi vid ua liseacutes dans l~ monde des cl ieux Nous voyons par lexemple des Mexicains jnsqn) quel point le SOlt des dieu x pellt precircter agrave des re preacuteiip ll tations dramati q Iles Il semblemi t q ne les fecirctes des Hllichols lttien t LlUe tenuumlan(e agrave la drc)IDatisat ion mointlre que cell es des Uoras ql1Icirc sont hc)bitueacutes ft fcl iee figurer (oft te que (ofLte clall s leurs pratiques religi enses la c1eacuteesse de la terre et leacutetoile (hl matin

Lexpression nramatiql1e nee trouve don( pas dans un rapport de cause agrave effet avec la forme dialogueacutee des clJants lJui chols Cette cnr ieuse faccedilon de ~adresser aux dieux se preacutesente citez les Bni clIols sons un

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~spect forblogiqlle Ces chants agrave lexception de celni des semailleB (l~eacutell(it$iise) qJicommence 1 e matin ont l)OHI iutroduction Hne imQcatioD aU mpssager des dieux KUllyumaricirc le dieu deJeacutetoile du maMn Dans ce but le chanteur sentretient de la fecircte sons forme dialogu eacutee avec 18 feu qni setronve au milieu du temple cestagravedire avec le llien du feu Xatenari laquo notre grand-pegravere raquo Tateuari explique quil ne peut agir seul et envoie fIeux plu III es (deux flegraveches ceacutereacutemollielles on bfltons emplumeacutes

d olt pendent les plumes de certaines espegraveces doiseaux) qni sen vont en q naliteacute decirctre personllitieacutes eb qui finissetit apregraves avoir rencontreacute en cheshymin diverses div initeacutes par trouver Kauyumari endormi flans L1JI lien obscur enbomeacute de plumes magiques Des jaguars des pumas et des sel rrents venimeux veillent snr lui Les plnmes lui tOLH~hent les pieds et il sensuit toute une longue conversation Tout dabord il se montre peu disposeacute ft venir agrave la fecircte Il est tonjours malade tantocirct il est elllhumeacute ou a mal au pied tantocirct il souffre fIun accegraves (le mal aria et sa femme lexhorte agrave rester ft la maison Pon finir il se ltl eacutecicle agrave partir mais il ne peut mettre tont de suite la main sm ses bacirctoIlS emplnmeacutes Sa femme le pourvoit cIe tOLlt Co qui lui est neacutecessaire pour le voyage et lui recomshymamll de ne pas se commettre avec ltlautres femlIlPs Apregraves ces scegraveneii domestiques que les Huicllols agreacutementent chaque fois de deacutetails noumiddot veaux il arrive au temple non sans avoir fait auparavant diverses stashytions Sitocirct SUl les lieux il prelld en main les neacutegoci ations avec les di e ll ~

Il les convoque leur preacutesente ce cas speacutecial et discute avec enx de la maniegravere (le mettre fin agrave ces maux Il est aussi le l1ernier agrave quitter la scegravene (1)

La scegravene suivante nons montre jusquagrave quel point lon neacutegocie avec les dieu x dans une fecircte ordinaire par ex~mple celle de la pluie que lon ceacutelegravebre qlHlIlcl laneacutecessiteacute sen fait sentir Les (lienx font leur apparimiddot tion au cours dune fecircte de ce type sur la convocation de K(l1ty~~mari

Ils expri ment dabord leurs deacutesirs et deacuteclarent ecirctre precircts agrave faire tom ber la IJluie si on les satisfait Ils ne veulent pas seulement des aliments de la soupe de la viande de taureau et de la biegravere de maiumls mais snrtollt ltl es objets magiques (lont ils ont besoin pour leurs activiteacutes~ cest agraved ire ceux qui ont pon1 eux une vertu magique Ce sont pHr exemple desftegraveshyches ceacutereacutemonielles des calebass0s ayec des emblegravemegraves sacreacutes ltles appa reils pour voir laquolt Sellerkzellge raquo niericirclca) (les figures en hois et en lai IlC

semblables agrave des pierres avec un trou au lllilien des cierges et antres choses de ce geJlre enfin des animaux et des plantes qui sout sacreacutes pour le diell x en question ct avec lesqnels il s sont occasionnellement

(1) Cettemiddotrepreacutesell t1tioll qui avec quelques leacutegegraveres variantes se reacutepegravete dan toutes les fecirctmiddotes ~ eacuteteacute pnugravelieacutee llresqlle mot ft Illot dans ma dcscripti oll de la fecircte dl rocirctisshysage du JIlaiuml~ (Gob1s t XLV 1909 p~ges 43 et s ui vantes)

~

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 2: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

AU sUJlitr DU CARAcrliEgraveRE DES MYTHES ET DES CHANTS HUlCHOLS

QUE JAI RECUEILLIS (1)

PAR K TH PREUSS Professeur il j Universiteacute ltle Berlin

Edouard Seler (2) nou dit en terminant les longs extraits si inteacuteresshysants pour larcheacuteologie mexicaine quil [l tireacutes pour la ZeitschTift jur Ethnologie (1903) de louvrage de Carl Lumholz sur les Huicllols aetuels laquo Eepeacuterons que dans un avenir prochain ces r echerches soient reprises agrave nouveau et cette fois-ci SUl des bases plus ampJes_ NolU aurons pentshyecirctre un jour les traditions de ces Indiens lenrs hymnes leurs priegraveres et leurs chants dans leur langue originale Cest agrave ce moment qu appashyraicirctra dans toute son importance ce que nous savons de la vie et dei croyances de ce penple fossiliseacute qui sest maintenu dans les montagnes de Jalisco gracircce agrave UI1 heureux concours de circonstances et qui offre tant dinteacuterecirct pour la connaissance de tous les problegravemes se rattachant an vienx lVIexique raquo

Qnelques anneacutees apregraves je ramenai de ma mi ssion au Mexique (1905shy1907) nne quantiteacute consideacuterable des textes dem andeacutes Jeus souvent

loccasion dans des rapports preacuteliminaires dinsister sur la porteacutee que leacutetnde des ceacutereacutemonies et des pratiques de ces Indi ens 0 peut avoir pour lintelligence des faits mexicains Je confirmai cette maniegravere de voir dans le seul livre qui ait paru jusquici sur cette expeacutedition (3) J y traite des Indiens Cora voisins de~ Huichols qui comme eUx preacutesentent avec les anciens Mexicains cPeacutetranges analogies Les reacutesultats obtenus faishysaient pressentir q lUgrave1lle eacutetude analogue sur les H nichols serait encore pIns feacuteconde

(1) Cet article a eacuteteacute t radu it du manuscrit original allemand par A Meacutetraux

(2) SrLrΠ(E ) Gesammelte Abhandlnngen Berlin 1908 tome III page 39l

(3) PRIWSS (TH R) Die NaY((lit -Expedi tion l Die Religion deI Com-lndiarw Leipig 1912

00

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Pendant la grierre alors que eacutetais en Oolombie je reccedilus pOUT ce livre le prix Lo l1batque me deacutecerna lAcadeacutemie Royale des Sciences de 1russe Aussi pouvais-je espeacuterer quagrave mon retour et sitocirct publieacutes les reacutesultats de mon expeacutedition en Oolombie je serais en mesure de remshyplir les clauses du contrat passeacute avec mon eacutediteur Toute cette tacirccbe anrait pu ecirctre meneacutee agrave chef quoiquau prix de grands sacrifices lVlalbeushyreusement leacutepoque critique qui suivit la guerre ct au cours de laquelle tous les contrats furent reacutesilieacutes en conseacutequence de linflation vint deacuteshytruire cet espoir Le 1Yfyseum fUr Volkerkunde de Berlin a vu tomber 1

110 de ce quelle eacutetait avant la guerre lactiviteacute quil deacuteployait en Ameacuteshyrique dautre part en etbnographie geacuteneacuterale seules des syllthegraveses hacirctishyves de courts travaux de vulgarisation ou des ouvrages conccedilus d~tIis un but purement estheacutetique jouissent actuellement de quelque appreacuteciashy

tian Au milietl de cet affaissement de la curiositeacute scientifique lon ne peut guegravere se sClltir encourageacute agrave poursuivre lanaIyse dun mateacuteriel aussi vaste que celui que jai recueilli sur les Huicbols ni mecircme espeacuterer receshyvoir une aide pour sa publication agrave moins quaux Eacutetats-Unis lon nesy inteacuteresse ce qui nest pas exclu

On discerne mieux les rapports existant entre les cllants et les myshytbes des Huichols et ceux des anciens 1Yfexicains lorsquol compare entre eux certains faits et certaines conceptions fondamentales propres agrave ces indigegravenes et quon deacutemontre lexistence de ces relations par quelshyques preuves dordre litteacuteraire

Je nai pas besoin de revenir SUI le contenu des mythes et des bymshynes car jen ai deacutejagrave parleacute ailleurs (1) Oependant il nous importe de savoir que le nombre des fecirctes annuelles des Huichols est plus grand que celui des Ooraet quil en est de mecircme des longues chansons que les laquosbamans chanteursraquo font entendre toute la nuit jusquau matin Les Oora nont que trois f8tes annuelles reacuteguliegraveres celle des semailIes du jeune eacutepis de maiumls et du maiumls grilleacute alors que les Huicbols en ceacutelegravebrent de 10 agrave 11 la fecircte de la pluie de la pnrification des cbamps de la deacuteesse de la terre Tcucircrutsi Na7cau~ de la jeune citrouille du jeune eacutepi de maiumls de la cuishyson des eacutepis de maiumls la fecircte du soleil destineacutee aussi agrave eacuteloigner les malashydies celle du Peyote du rocirctissage du maiumls celle de kanuinirne cest-agraveshydire de la consommation de galettes de maiumls cru et la fecircte de heucUgravesiise cest-agrave-dire laquoles derniegraveres raquo car elle est la derniegravere fecircte de lanneacutee avant celle des semailles en juin au cours de laquelle la deacuteesse dn maiumls prend congeacute des autres dieux

(1) Die r-eliguumlisen Gestinge nnd Mythen e~mger Stiimme der mexi1canisehen Sierra Mashy

dre in Achiv fiil Religion- Wissen8chajiuml tome XI 1908 voyez nllssi Ethllographische

E-gcbnissc cineT Reise in ilie me~ikanische SieJ1a Maile iu Zeitschrift fii Ethnologie

1908 Reise zu ilen Sttinnnen der westlicTlcn SielJa J11aille in Mexico in Zeitschift iler

Geselschaft fii Eldkllnde Berlin 1908

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Uommeon le voit les Hriicbols pour ce qui est du nornore degrave leJlrS fecirctes se rapprochent beaucoup des agravenciens JYlexicails qui e11 ceacuteIebntient annu ellement 18 reacuteparties avec une grande reacutegulariteacute sur les 18 mois de leur anneacutee Les fecirctes huicbols paT contre nont pas lieu agrave des intershy shy

vamplles dccediltermineacutes et suiventplutocirct les pheacutenomegravenes naturelsde ianneacutee -Ces Indiens onten ougravetre certaines ceacutereacutemonies comm~ celle de la laquo glleacutemiddot rison de la terre raquo dont le but est dam(lner celle-ci agrave fa()ilit~r la crQisshysance cles v-eacutegeacutetaux ainsi que deux sortes de fecirctes des morts qni nesont pas comprises dans lalternance reacuteguliegravere des fecirctes annuelles Obez les anciens Mexicains la- fecircte des morts faisait partie de celles qui eacutetaient ceacuteleacutebreacutees agrave date fixe Si agrave celles ci on lljoute les fAtes des pluie des MeshyxicaIcirclls qllIcirc avaient lieu en diffeacuterents mois et qui par rapport agrave celles des HU1Chols eacutetaient en surnumeacuteraire le nombre des fecirctes dans lun et lautre de ces peupleR est sensiblement le mecircme La fecircte de la gueacuteriSon des dieux qui chez les Huichols a lieu chaque dix aus offre un parallegravele frappant avec celle qui chez les Mexicains eacutetait destinpe agrave perlllettre anx dieux de se reposer et se reacutepeacutetait tous les buit ans Son nom at(~shymalqualiztl-i peu t se traduire par lt Fecircte des boulettes de maiumls cuites agrave leau gt

Ce qui llons inteacuteresse ici ce sont les curieuses diffeacuterences quise manimiddot festent dans les fecirctes des Huicbols et des Ooms et leurs causes ainsi que leur influence SUl les chants etles mythes En gros les croyances relishygieuses des Coras correspondent agrave celles des Huichols et des Mexicains de mecircme quan point de vne rituelles Ooms ont plus dun point commun aec les Mexicains Nous avons appris agrave connaicirctre la fecircte du vin ou Reacuteveil et la quatriegraveme fecircte annuelle des Mexicains ( la petite et la gra nde veille raquo quoique la fecircte en question eh(z les OOtaS soit une ceacuteshyreacutemonie non annuelle dinitiation des enfants (1)_

La diffeacuterence du nomhre des fecirctes chez les Huichols et les lVIexi eains dune part et chez les Coras de lautre provient de la quantiteacute plus ou moins grande de diviniteacutes daus ces tribus Les Huicbols croient qnil y

a plus de dieux que dhommes et cela n()n en raison dune consiagraveeacuterashytion geacuteneacuterale inspireacutee par la multitude des mortR qui chez eux ne sont pas du tont promus au rang de dieux nl agrave cause des activiteacutes varieacutees de la nature mais parce quils ont pour chaque pheacutenomegravene naturel (par exemple pour les deacuteesses de la pluie qui manifestent leur puissance en diverses directions) pour le8 montagnes etc deux noms et par conseacuteshyquent beaucoup de dieux On va jusqnagrave supposer quune deacuteesse adoreacutee sons le mecircme nom daus deux villages diffeacuterents nest pas toujours la mecircme Chaque village en plus dun temple rond symbolisant le monde

(1) Pl1EGSS (K TH) Das Fest les E--wachens bAi den COla-1I(liane1ll in VerhandlwYlshygen des 16 1l1temationalen Li melikanisten -Kon g1esses Z11 Wien pages 489 et sui vantes

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possegrave(le plusienrs huttes consacreacutees ft un on ft deux dieux et il en reacuteshy suIte que par la force de lImbitude ils simaginent avoir agrave lenr seule

disposition nn nombre limiteacute (le dieux quoique cenx-ci apparaissent aussi mais en vertu dun choix diffeacuterent dans le pantheacuteon dantres villa shyges Cette tendance agrave ht speacutecial isation et ugrave 1inc1i vic1ualuumlation des dishyviniteacutes a en pom reacutesultat que Fon apporte anx dieux leurs offrandes (lans les lieux qni leur sont assigneacutes et que lon concreacutetise leur preacuteshyseJwe agrave laifle d une image on (lune chaise Ohez les lfexicains nons retrouvons la multipliciteacute des dieux individuels et de leurs figuratiolJs mateacuterielles Ces diviniteacutes par suite de lellrs fonctiolls ChtllS la nature et (le par les liens qni les unissent wx eacuteleacutements de cette mecircme nature peuvent se reacutepartie en groupes Enfin eeacutetait eacutegalement un trait typiqne de la religion mexicaine que davoir pour chaque commllnauteacute des diishyniteacutes particuliegraveres qui en eacutetaient les protectrices Une des conseacutequenceR de cet eacutetat de choses ou du moins un pheacutenomegravene correacutelatif est lindiffeacuteshyrence que ces deux peuples ont manifesteacutee Ugrave la conception dune senle diviniteacute creacuteatrice et dun dieu suprecircme Ponr les Huicltol s lou ne pent parler dun tel type de dieux et les Mexicains aVlt1ient quatre ltliviniteacutes creacuteatrices alors lue Tonacatecutli) en tant qlle dien sllprecircme passait au second plan

Il en va tout an trempnt ebp7 les Conls Ils nont ni lieux sacreacuteR ni images de diviniteacutes IIi temple Ocst tout an plu s si Fon peut donner ce dernier titre au x p laces ougrave ils ceacutelegravebren t lems fecirctes et anx Cftvernes dans lesq uelles ils gardent les objets rituels et ougrave ils deacuteposent souvent des flegraveshyches-offrancles Bien qne leurs morts devienn ent des dieux principtleshyment des dieux de la pluie et que de nombreux objets naturels possegravedent les attributs de diviniteacutet ils sont toujours repreacutesenteacutes comme constituant des gronpes inltlifteacuterencieacutes Des animanx isoleacutes qui so nt eeacuteleacutebreacutes dans leur chanson ft cause ltle leur action SUl la na ture forment toujonrs des espegraveces jamais des indi viti us Il en reacutesnl te qne le nombre de di vini teacutes individ nal ishyseacutees est chez eux tregraves petit et quelles ont un caractegravere plus extensif En fl1it il n y en a qUB trois le dieu middotsoleil la deacuteesse de la terre et de la lune et parfois du ciel eacutetoileacute qui est en mecircme temps la deacuteesse du maiumls ainsi que le fils des deux leacutetoile du matin qni est aussi le dieu du maiumls Parshytant le dieu soleil est le personnage le plus important de lunivers et il unit en llli la position de Tonacatecntli) que les Mexicains consideacutemient comme eacuteloigneacute du monde et celle dune di vi ni teacute vi vante Plus proch es tles hommes sont leacutetoile (lu matin qui a donneacute aux hommes lem relishygion et la deacuteesse de la terre et (le la lune puisque d accord ltvec le soleil et leacutetoile du matin elle ltt creacuteeacute la terre Ces trois diviniteacutes agrave cocircteacute de leur fonction particuliegravere dans la natnre se partagent entre elles les attributs dnn dieu suprecircme et ce fait rapgtelle encore dans une certaine mesure les croyances des anciens Mexicains en deacutepit des nombrenx

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dieux individuels quatre dentre eux seacutetaient deacutega geacutes de la masse des autres et eacutetaient consideacutereacutes COillme uumles divilliteacutes ( leacuteaMices (eacutetaient (Jnetzalc()atl) Tezcatlipoca) Jl1ixcoatl et Uitzilopohtli Ils eacutetaient en mecircme telll[)sdes dienx tribaux qni seacutetaient incorporeacute pIns ou moins les quashyliteacutes ltle dieux su[wecircmes

Les an(iens Mex icains form ent agrave (e t eacutegard le trait dnnion entre les Hui (hols et les Ooras et ne peuven t ecirctre s implement identifieacutes mu preshymiers Allons p lus 10ilI et voyons sil existe lin rapport tlu mecircme ordre dans les prodnctiolls litteacuterailes uumle (es peuples On est de prime tborcl frapp eacute par le fa it qne les OOlas dlttlli3 leurs chan ts font cles descriptions geacuteneacuterales des pLeacutenomegravenes naturels en rappor t avec les figures myt-hicoshyreligieuses q nil s incarnent Dans lcnrs priegraveres en dehors des di ffeacuteshyrents grollpes de dieux ils sadressent aux troi s diviniteacutes principales Les Buichols par contre (l er(tent agrave traiter avec tout lessaim des dieux et a ntant que possible avec cha cun seacutepareacutement On ne se (011shytente PecircLS (le dresser de longnes listes de dienx mais pour nen oublier aucun on a Cloiu (lnjouter agrave la fin de chaque priegravere nazte) naite) laquo tou s tous raquo IDn plus de C(cL les relat- ions avec des perlonnages individ LHoshyli seacutes ont enh-aineacute avec ellei3 la formation dLm veacuteri table style dram ltLtishyque dial ogueacute Leacuteleacutement eacutepiqne cles COtas passe au se(oIHl plan eLez legraveS Hui cLoh Les lVIexicains se rapprocLent beauco Llp tles Oaras mais ils ne nous ont pas cLisseacute dhymnes semblahles Ft ceux des Oaras ct des HnishychoIs Peut ecirctre nen ont-ils jamais eu Malgreacute Lout lindividtlaliteacute de le l1ls nombrenses di vi niteacutes est fortement marq neacutee bien quelle n fLi t pas condui t agrave la creacuteation dun dialogne dramatique comme che les Hlli chols En fin de com pte ces diffeacuterences entre diviniteacutes individuell ts et geacuteneacuterashyles se man ifestent avec benucoLlp de relief dalls les mytiJ es

Leurs rapports avec les diffeacuterents dieux ne lwrmettent pas a nx HuishychoIs de reacutealiser des actions concregravetes de caractegravere dramatique Celles(Icirc sont insignifiantes et se bornent ft relever fIes hfttons emplumeacutes agrave se tourner anns fliffeacuterentes direct ions ft s us pend re nne ceinture ou ft repreacuteshysenter le chemin da ciel etc Seuls quelqu es eacutepisodes de la (basse au cerf 80n t reprodni ts Les ceacutereacutemonies des Ooras ont un (aractegravere dramashytique et imitatif beaucoup plus accuseacute On ne peut attribuer cependant ce fai t Ugrave la rareteacute l1 e persol1lmges llldi vid ua liseacutes dans l~ monde des cl ieux Nous voyons par lexemple des Mexicains jnsqn) quel point le SOlt des dieu x pellt precircter agrave des re preacuteiip ll tations dramati q Iles Il semblemi t q ne les fecirctes des Hllichols lttien t LlUe tenuumlan(e agrave la drc)IDatisat ion mointlre que cell es des Uoras ql1Icirc sont hc)bitueacutes ft fcl iee figurer (oft te que (ofLte clall s leurs pratiques religi enses la c1eacuteesse de la terre et leacutetoile (hl matin

Lexpression nramatiql1e nee trouve don( pas dans un rapport de cause agrave effet avec la forme dialogueacutee des clJants lJui chols Cette cnr ieuse faccedilon de ~adresser aux dieux se preacutesente citez les Bni clIols sons un

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~spect forblogiqlle Ces chants agrave lexception de celni des semailleB (l~eacutell(it$iise) qJicommence 1 e matin ont l)OHI iutroduction Hne imQcatioD aU mpssager des dieux KUllyumaricirc le dieu deJeacutetoile du maMn Dans ce but le chanteur sentretient de la fecircte sons forme dialogu eacutee avec 18 feu qni setronve au milieu du temple cestagravedire avec le llien du feu Xatenari laquo notre grand-pegravere raquo Tateuari explique quil ne peut agir seul et envoie fIeux plu III es (deux flegraveches ceacutereacutemollielles on bfltons emplumeacutes

d olt pendent les plumes de certaines espegraveces doiseaux) qni sen vont en q naliteacute decirctre personllitieacutes eb qui finissetit apregraves avoir rencontreacute en cheshymin diverses div initeacutes par trouver Kauyumari endormi flans L1JI lien obscur enbomeacute de plumes magiques Des jaguars des pumas et des sel rrents venimeux veillent snr lui Les plnmes lui tOLH~hent les pieds et il sensuit toute une longue conversation Tout dabord il se montre peu disposeacute ft venir agrave la fecircte Il est tonjours malade tantocirct il est elllhumeacute ou a mal au pied tantocirct il souffre fIun accegraves (le mal aria et sa femme lexhorte agrave rester ft la maison Pon finir il se ltl eacutecicle agrave partir mais il ne peut mettre tont de suite la main sm ses bacirctoIlS emplnmeacutes Sa femme le pourvoit cIe tOLlt Co qui lui est neacutecessaire pour le voyage et lui recomshymamll de ne pas se commettre avec ltlautres femlIlPs Apregraves ces scegraveneii domestiques que les Huicllols agreacutementent chaque fois de deacutetails noumiddot veaux il arrive au temple non sans avoir fait auparavant diverses stashytions Sitocirct SUl les lieux il prelld en main les neacutegoci ations avec les di e ll ~

Il les convoque leur preacutesente ce cas speacutecial et discute avec enx de la maniegravere (le mettre fin agrave ces maux Il est aussi le l1ernier agrave quitter la scegravene (1)

La scegravene suivante nons montre jusquagrave quel point lon neacutegocie avec les dieu x dans une fecircte ordinaire par ex~mple celle de la pluie que lon ceacutelegravebre qlHlIlcl laneacutecessiteacute sen fait sentir Les (lienx font leur apparimiddot tion au cours dune fecircte de ce type sur la convocation de K(l1ty~~mari

Ils expri ment dabord leurs deacutesirs et deacuteclarent ecirctre precircts agrave faire tom ber la IJluie si on les satisfait Ils ne veulent pas seulement des aliments de la soupe de la viande de taureau et de la biegravere de maiumls mais snrtollt ltl es objets magiques (lont ils ont besoin pour leurs activiteacutes~ cest agraved ire ceux qui ont pon1 eux une vertu magique Ce sont pHr exemple desftegraveshyches ceacutereacutemonielles des calebass0s ayec des emblegravemegraves sacreacutes ltles appa reils pour voir laquolt Sellerkzellge raquo niericirclca) (les figures en hois et en lai IlC

semblables agrave des pierres avec un trou au lllilien des cierges et antres choses de ce geJlre enfin des animaux et des plantes qui sout sacreacutes pour le diell x en question ct avec lesqnels il s sont occasionnellement

(1) Cettemiddotrepreacutesell t1tioll qui avec quelques leacutegegraveres variantes se reacutepegravete dan toutes les fecirctmiddotes ~ eacuteteacute pnugravelieacutee llresqlle mot ft Illot dans ma dcscripti oll de la fecircte dl rocirctisshysage du JIlaiuml~ (Gob1s t XLV 1909 p~ges 43 et s ui vantes)

~

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 3: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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Pendant la grierre alors que eacutetais en Oolombie je reccedilus pOUT ce livre le prix Lo l1batque me deacutecerna lAcadeacutemie Royale des Sciences de 1russe Aussi pouvais-je espeacuterer quagrave mon retour et sitocirct publieacutes les reacutesultats de mon expeacutedition en Oolombie je serais en mesure de remshyplir les clauses du contrat passeacute avec mon eacutediteur Toute cette tacirccbe anrait pu ecirctre meneacutee agrave chef quoiquau prix de grands sacrifices lVlalbeushyreusement leacutepoque critique qui suivit la guerre ct au cours de laquelle tous les contrats furent reacutesilieacutes en conseacutequence de linflation vint deacuteshytruire cet espoir Le 1Yfyseum fUr Volkerkunde de Berlin a vu tomber 1

110 de ce quelle eacutetait avant la guerre lactiviteacute quil deacuteployait en Ameacuteshyrique dautre part en etbnographie geacuteneacuterale seules des syllthegraveses hacirctishyves de courts travaux de vulgarisation ou des ouvrages conccedilus d~tIis un but purement estheacutetique jouissent actuellement de quelque appreacuteciashy

tian Au milietl de cet affaissement de la curiositeacute scientifique lon ne peut guegravere se sClltir encourageacute agrave poursuivre lanaIyse dun mateacuteriel aussi vaste que celui que jai recueilli sur les Huicbols ni mecircme espeacuterer receshyvoir une aide pour sa publication agrave moins quaux Eacutetats-Unis lon nesy inteacuteresse ce qui nest pas exclu

On discerne mieux les rapports existant entre les cllants et les myshytbes des Huichols et ceux des anciens 1Yfexicains lorsquol compare entre eux certains faits et certaines conceptions fondamentales propres agrave ces indigegravenes et quon deacutemontre lexistence de ces relations par quelshyques preuves dordre litteacuteraire

Je nai pas besoin de revenir SUI le contenu des mythes et des bymshynes car jen ai deacutejagrave parleacute ailleurs (1) Oependant il nous importe de savoir que le nombre des fecirctes annuelles des Huichols est plus grand que celui des Ooraet quil en est de mecircme des longues chansons que les laquosbamans chanteursraquo font entendre toute la nuit jusquau matin Les Oora nont que trois f8tes annuelles reacuteguliegraveres celle des semailIes du jeune eacutepis de maiumls et du maiumls grilleacute alors que les Huicbols en ceacutelegravebrent de 10 agrave 11 la fecircte de la pluie de la pnrification des cbamps de la deacuteesse de la terre Tcucircrutsi Na7cau~ de la jeune citrouille du jeune eacutepi de maiumls de la cuishyson des eacutepis de maiumls la fecircte du soleil destineacutee aussi agrave eacuteloigner les malashydies celle du Peyote du rocirctissage du maiumls celle de kanuinirne cest-agraveshydire de la consommation de galettes de maiumls cru et la fecircte de heucUgravesiise cest-agrave-dire laquoles derniegraveres raquo car elle est la derniegravere fecircte de lanneacutee avant celle des semailles en juin au cours de laquelle la deacuteesse dn maiumls prend congeacute des autres dieux

(1) Die r-eliguumlisen Gestinge nnd Mythen e~mger Stiimme der mexi1canisehen Sierra Mashy

dre in Achiv fiil Religion- Wissen8chajiuml tome XI 1908 voyez nllssi Ethllographische

E-gcbnissc cineT Reise in ilie me~ikanische SieJ1a Maile iu Zeitschrift fii Ethnologie

1908 Reise zu ilen Sttinnnen der westlicTlcn SielJa J11aille in Mexico in Zeitschift iler

Geselschaft fii Eldkllnde Berlin 1908

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Uommeon le voit les Hriicbols pour ce qui est du nornore degrave leJlrS fecirctes se rapprochent beaucoup des agravenciens JYlexicails qui e11 ceacuteIebntient annu ellement 18 reacuteparties avec une grande reacutegulariteacute sur les 18 mois de leur anneacutee Les fecirctes huicbols paT contre nont pas lieu agrave des intershy shy

vamplles dccediltermineacutes et suiventplutocirct les pheacutenomegravenes naturelsde ianneacutee -Ces Indiens onten ougravetre certaines ceacutereacutemonies comm~ celle de la laquo glleacutemiddot rison de la terre raquo dont le but est dam(lner celle-ci agrave fa()ilit~r la crQisshysance cles v-eacutegeacutetaux ainsi que deux sortes de fecirctes des morts qni nesont pas comprises dans lalternance reacuteguliegravere des fecirctes annuelles Obez les anciens Mexicains la- fecircte des morts faisait partie de celles qui eacutetaient ceacuteleacutebreacutees agrave date fixe Si agrave celles ci on lljoute les fAtes des pluie des MeshyxicaIcirclls qllIcirc avaient lieu en diffeacuterents mois et qui par rapport agrave celles des HU1Chols eacutetaient en surnumeacuteraire le nombre des fecirctes dans lun et lautre de ces peupleR est sensiblement le mecircme La fecircte de la gueacuteriSon des dieux qui chez les Huichols a lieu chaque dix aus offre un parallegravele frappant avec celle qui chez les Mexicains eacutetait destinpe agrave perlllettre anx dieux de se reposer et se reacutepeacutetait tous les buit ans Son nom at(~shymalqualiztl-i peu t se traduire par lt Fecircte des boulettes de maiumls cuites agrave leau gt

Ce qui llons inteacuteresse ici ce sont les curieuses diffeacuterences quise manimiddot festent dans les fecirctes des Huicbols et des Ooms et leurs causes ainsi que leur influence SUl les chants etles mythes En gros les croyances relishygieuses des Coras correspondent agrave celles des Huichols et des Mexicains de mecircme quan point de vne rituelles Ooms ont plus dun point commun aec les Mexicains Nous avons appris agrave connaicirctre la fecircte du vin ou Reacuteveil et la quatriegraveme fecircte annuelle des Mexicains ( la petite et la gra nde veille raquo quoique la fecircte en question eh(z les OOtaS soit une ceacuteshyreacutemonie non annuelle dinitiation des enfants (1)_

La diffeacuterence du nomhre des fecirctes chez les Huichols et les lVIexi eains dune part et chez les Coras de lautre provient de la quantiteacute plus ou moins grande de diviniteacutes daus ces tribus Les Huicbols croient qnil y

a plus de dieux que dhommes et cela n()n en raison dune consiagraveeacuterashytion geacuteneacuterale inspireacutee par la multitude des mortR qui chez eux ne sont pas du tont promus au rang de dieux nl agrave cause des activiteacutes varieacutees de la nature mais parce quils ont pour chaque pheacutenomegravene naturel (par exemple pour les deacuteesses de la pluie qui manifestent leur puissance en diverses directions) pour le8 montagnes etc deux noms et par conseacuteshyquent beaucoup de dieux On va jusqnagrave supposer quune deacuteesse adoreacutee sons le mecircme nom daus deux villages diffeacuterents nest pas toujours la mecircme Chaque village en plus dun temple rond symbolisant le monde

(1) Pl1EGSS (K TH) Das Fest les E--wachens bAi den COla-1I(liane1ll in VerhandlwYlshygen des 16 1l1temationalen Li melikanisten -Kon g1esses Z11 Wien pages 489 et sui vantes

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possegrave(le plusienrs huttes consacreacutees ft un on ft deux dieux et il en reacuteshy suIte que par la force de lImbitude ils simaginent avoir agrave lenr seule

disposition nn nombre limiteacute (le dieux quoique cenx-ci apparaissent aussi mais en vertu dun choix diffeacuterent dans le pantheacuteon dantres villa shyges Cette tendance agrave ht speacutecial isation et ugrave 1inc1i vic1ualuumlation des dishyviniteacutes a en pom reacutesultat que Fon apporte anx dieux leurs offrandes (lans les lieux qni leur sont assigneacutes et que lon concreacutetise leur preacuteshyseJwe agrave laifle d une image on (lune chaise Ohez les lfexicains nons retrouvons la multipliciteacute des dieux individuels et de leurs figuratiolJs mateacuterielles Ces diviniteacutes par suite de lellrs fonctiolls ChtllS la nature et (le par les liens qni les unissent wx eacuteleacutements de cette mecircme nature peuvent se reacutepartie en groupes Enfin eeacutetait eacutegalement un trait typiqne de la religion mexicaine que davoir pour chaque commllnauteacute des diishyniteacutes particuliegraveres qui en eacutetaient les protectrices Une des conseacutequenceR de cet eacutetat de choses ou du moins un pheacutenomegravene correacutelatif est lindiffeacuteshyrence que ces deux peuples ont manifesteacutee Ugrave la conception dune senle diviniteacute creacuteatrice et dun dieu suprecircme Ponr les Huicltol s lou ne pent parler dun tel type de dieux et les Mexicains aVlt1ient quatre ltliviniteacutes creacuteatrices alors lue Tonacatecutli) en tant qlle dien sllprecircme passait au second plan

Il en va tout an trempnt ebp7 les Conls Ils nont ni lieux sacreacuteR ni images de diviniteacutes IIi temple Ocst tout an plu s si Fon peut donner ce dernier titre au x p laces ougrave ils ceacutelegravebren t lems fecirctes et anx Cftvernes dans lesq uelles ils gardent les objets rituels et ougrave ils deacuteposent souvent des flegraveshyches-offrancles Bien qne leurs morts devienn ent des dieux principtleshyment des dieux de la pluie et que de nombreux objets naturels possegravedent les attributs de diviniteacutet ils sont toujours repreacutesenteacutes comme constituant des gronpes inltlifteacuterencieacutes Des animanx isoleacutes qui so nt eeacuteleacutebreacutes dans leur chanson ft cause ltle leur action SUl la na ture forment toujonrs des espegraveces jamais des indi viti us Il en reacutesnl te qne le nombre de di vini teacutes individ nal ishyseacutees est chez eux tregraves petit et quelles ont un caractegravere plus extensif En fl1it il n y en a qUB trois le dieu middotsoleil la deacuteesse de la terre et de la lune et parfois du ciel eacutetoileacute qui est en mecircme temps la deacuteesse du maiumls ainsi que le fils des deux leacutetoile du matin qni est aussi le dieu du maiumls Parshytant le dieu soleil est le personnage le plus important de lunivers et il unit en llli la position de Tonacatecntli) que les Mexicains consideacutemient comme eacuteloigneacute du monde et celle dune di vi ni teacute vi vante Plus proch es tles hommes sont leacutetoile (lu matin qui a donneacute aux hommes lem relishygion et la deacuteesse de la terre et (le la lune puisque d accord ltvec le soleil et leacutetoile du matin elle ltt creacuteeacute la terre Ces trois diviniteacutes agrave cocircteacute de leur fonction particuliegravere dans la natnre se partagent entre elles les attributs dnn dieu suprecircme et ce fait rapgtelle encore dans une certaine mesure les croyances des anciens Mexicains en deacutepit des nombrenx

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dieux individuels quatre dentre eux seacutetaient deacutega geacutes de la masse des autres et eacutetaient consideacutereacutes COillme uumles divilliteacutes ( leacuteaMices (eacutetaient (Jnetzalc()atl) Tezcatlipoca) Jl1ixcoatl et Uitzilopohtli Ils eacutetaient en mecircme telll[)sdes dienx tribaux qni seacutetaient incorporeacute pIns ou moins les quashyliteacutes ltle dieux su[wecircmes

Les an(iens Mex icains form ent agrave (e t eacutegard le trait dnnion entre les Hui (hols et les Ooras et ne peuven t ecirctre s implement identifieacutes mu preshymiers Allons p lus 10ilI et voyons sil existe lin rapport tlu mecircme ordre dans les prodnctiolls litteacuterailes uumle (es peuples On est de prime tborcl frapp eacute par le fa it qne les OOlas dlttlli3 leurs chan ts font cles descriptions geacuteneacuterales des pLeacutenomegravenes naturels en rappor t avec les figures myt-hicoshyreligieuses q nil s incarnent Dans lcnrs priegraveres en dehors des di ffeacuteshyrents grollpes de dieux ils sadressent aux troi s diviniteacutes principales Les Buichols par contre (l er(tent agrave traiter avec tout lessaim des dieux et a ntant que possible avec cha cun seacutepareacutement On ne se (011shytente PecircLS (le dresser de longnes listes de dienx mais pour nen oublier aucun on a Cloiu (lnjouter agrave la fin de chaque priegravere nazte) naite) laquo tou s tous raquo IDn plus de C(cL les relat- ions avec des perlonnages individ LHoshyli seacutes ont enh-aineacute avec ellei3 la formation dLm veacuteri table style dram ltLtishyque dial ogueacute Leacuteleacutement eacutepiqne cles COtas passe au se(oIHl plan eLez legraveS Hui cLoh Les lVIexicains se rapprocLent beauco Llp tles Oaras mais ils ne nous ont pas cLisseacute dhymnes semblahles Ft ceux des Oaras ct des HnishychoIs Peut ecirctre nen ont-ils jamais eu Malgreacute Lout lindividtlaliteacute de le l1ls nombrenses di vi niteacutes est fortement marq neacutee bien quelle n fLi t pas condui t agrave la creacuteation dun dialogne dramatique comme che les Hlli chols En fin de com pte ces diffeacuterences entre diviniteacutes individuell ts et geacuteneacuterashyles se man ifestent avec benucoLlp de relief dalls les mytiJ es

Leurs rapports avec les diffeacuterents dieux ne lwrmettent pas a nx HuishychoIs de reacutealiser des actions concregravetes de caractegravere dramatique Celles(Icirc sont insignifiantes et se bornent ft relever fIes hfttons emplumeacutes agrave se tourner anns fliffeacuterentes direct ions ft s us pend re nne ceinture ou ft repreacuteshysenter le chemin da ciel etc Seuls quelqu es eacutepisodes de la (basse au cerf 80n t reprodni ts Les ceacutereacutemonies des Ooras ont un (aractegravere dramashytique et imitatif beaucoup plus accuseacute On ne peut attribuer cependant ce fai t Ugrave la rareteacute l1 e persol1lmges llldi vid ua liseacutes dans l~ monde des cl ieux Nous voyons par lexemple des Mexicains jnsqn) quel point le SOlt des dieu x pellt precircter agrave des re preacuteiip ll tations dramati q Iles Il semblemi t q ne les fecirctes des Hllichols lttien t LlUe tenuumlan(e agrave la drc)IDatisat ion mointlre que cell es des Uoras ql1Icirc sont hc)bitueacutes ft fcl iee figurer (oft te que (ofLte clall s leurs pratiques religi enses la c1eacuteesse de la terre et leacutetoile (hl matin

Lexpression nramatiql1e nee trouve don( pas dans un rapport de cause agrave effet avec la forme dialogueacutee des clJants lJui chols Cette cnr ieuse faccedilon de ~adresser aux dieux se preacutesente citez les Bni clIols sons un

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~spect forblogiqlle Ces chants agrave lexception de celni des semailleB (l~eacutell(it$iise) qJicommence 1 e matin ont l)OHI iutroduction Hne imQcatioD aU mpssager des dieux KUllyumaricirc le dieu deJeacutetoile du maMn Dans ce but le chanteur sentretient de la fecircte sons forme dialogu eacutee avec 18 feu qni setronve au milieu du temple cestagravedire avec le llien du feu Xatenari laquo notre grand-pegravere raquo Tateuari explique quil ne peut agir seul et envoie fIeux plu III es (deux flegraveches ceacutereacutemollielles on bfltons emplumeacutes

d olt pendent les plumes de certaines espegraveces doiseaux) qni sen vont en q naliteacute decirctre personllitieacutes eb qui finissetit apregraves avoir rencontreacute en cheshymin diverses div initeacutes par trouver Kauyumari endormi flans L1JI lien obscur enbomeacute de plumes magiques Des jaguars des pumas et des sel rrents venimeux veillent snr lui Les plnmes lui tOLH~hent les pieds et il sensuit toute une longue conversation Tout dabord il se montre peu disposeacute ft venir agrave la fecircte Il est tonjours malade tantocirct il est elllhumeacute ou a mal au pied tantocirct il souffre fIun accegraves (le mal aria et sa femme lexhorte agrave rester ft la maison Pon finir il se ltl eacutecicle agrave partir mais il ne peut mettre tont de suite la main sm ses bacirctoIlS emplnmeacutes Sa femme le pourvoit cIe tOLlt Co qui lui est neacutecessaire pour le voyage et lui recomshymamll de ne pas se commettre avec ltlautres femlIlPs Apregraves ces scegraveneii domestiques que les Huicllols agreacutementent chaque fois de deacutetails noumiddot veaux il arrive au temple non sans avoir fait auparavant diverses stashytions Sitocirct SUl les lieux il prelld en main les neacutegoci ations avec les di e ll ~

Il les convoque leur preacutesente ce cas speacutecial et discute avec enx de la maniegravere (le mettre fin agrave ces maux Il est aussi le l1ernier agrave quitter la scegravene (1)

La scegravene suivante nons montre jusquagrave quel point lon neacutegocie avec les dieu x dans une fecircte ordinaire par ex~mple celle de la pluie que lon ceacutelegravebre qlHlIlcl laneacutecessiteacute sen fait sentir Les (lienx font leur apparimiddot tion au cours dune fecircte de ce type sur la convocation de K(l1ty~~mari

Ils expri ment dabord leurs deacutesirs et deacuteclarent ecirctre precircts agrave faire tom ber la IJluie si on les satisfait Ils ne veulent pas seulement des aliments de la soupe de la viande de taureau et de la biegravere de maiumls mais snrtollt ltl es objets magiques (lont ils ont besoin pour leurs activiteacutes~ cest agraved ire ceux qui ont pon1 eux une vertu magique Ce sont pHr exemple desftegraveshyches ceacutereacutemonielles des calebass0s ayec des emblegravemegraves sacreacutes ltles appa reils pour voir laquolt Sellerkzellge raquo niericirclca) (les figures en hois et en lai IlC

semblables agrave des pierres avec un trou au lllilien des cierges et antres choses de ce geJlre enfin des animaux et des plantes qui sout sacreacutes pour le diell x en question ct avec lesqnels il s sont occasionnellement

(1) Cettemiddotrepreacutesell t1tioll qui avec quelques leacutegegraveres variantes se reacutepegravete dan toutes les fecirctmiddotes ~ eacuteteacute pnugravelieacutee llresqlle mot ft Illot dans ma dcscripti oll de la fecircte dl rocirctisshysage du JIlaiuml~ (Gob1s t XLV 1909 p~ges 43 et s ui vantes)

~

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

456 shy

le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 4: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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Uommeon le voit les Hriicbols pour ce qui est du nornore degrave leJlrS fecirctes se rapprochent beaucoup des agravenciens JYlexicails qui e11 ceacuteIebntient annu ellement 18 reacuteparties avec une grande reacutegulariteacute sur les 18 mois de leur anneacutee Les fecirctes huicbols paT contre nont pas lieu agrave des intershy shy

vamplles dccediltermineacutes et suiventplutocirct les pheacutenomegravenes naturelsde ianneacutee -Ces Indiens onten ougravetre certaines ceacutereacutemonies comm~ celle de la laquo glleacutemiddot rison de la terre raquo dont le but est dam(lner celle-ci agrave fa()ilit~r la crQisshysance cles v-eacutegeacutetaux ainsi que deux sortes de fecirctes des morts qni nesont pas comprises dans lalternance reacuteguliegravere des fecirctes annuelles Obez les anciens Mexicains la- fecircte des morts faisait partie de celles qui eacutetaient ceacuteleacutebreacutees agrave date fixe Si agrave celles ci on lljoute les fAtes des pluie des MeshyxicaIcirclls qllIcirc avaient lieu en diffeacuterents mois et qui par rapport agrave celles des HU1Chols eacutetaient en surnumeacuteraire le nombre des fecirctes dans lun et lautre de ces peupleR est sensiblement le mecircme La fecircte de la gueacuteriSon des dieux qui chez les Huichols a lieu chaque dix aus offre un parallegravele frappant avec celle qui chez les Mexicains eacutetait destinpe agrave perlllettre anx dieux de se reposer et se reacutepeacutetait tous les buit ans Son nom at(~shymalqualiztl-i peu t se traduire par lt Fecircte des boulettes de maiumls cuites agrave leau gt

Ce qui llons inteacuteresse ici ce sont les curieuses diffeacuterences quise manimiddot festent dans les fecirctes des Huicbols et des Ooms et leurs causes ainsi que leur influence SUl les chants etles mythes En gros les croyances relishygieuses des Coras correspondent agrave celles des Huichols et des Mexicains de mecircme quan point de vne rituelles Ooms ont plus dun point commun aec les Mexicains Nous avons appris agrave connaicirctre la fecircte du vin ou Reacuteveil et la quatriegraveme fecircte annuelle des Mexicains ( la petite et la gra nde veille raquo quoique la fecircte en question eh(z les OOtaS soit une ceacuteshyreacutemonie non annuelle dinitiation des enfants (1)_

La diffeacuterence du nomhre des fecirctes chez les Huichols et les lVIexi eains dune part et chez les Coras de lautre provient de la quantiteacute plus ou moins grande de diviniteacutes daus ces tribus Les Huicbols croient qnil y

a plus de dieux que dhommes et cela n()n en raison dune consiagraveeacuterashytion geacuteneacuterale inspireacutee par la multitude des mortR qui chez eux ne sont pas du tont promus au rang de dieux nl agrave cause des activiteacutes varieacutees de la nature mais parce quils ont pour chaque pheacutenomegravene naturel (par exemple pour les deacuteesses de la pluie qui manifestent leur puissance en diverses directions) pour le8 montagnes etc deux noms et par conseacuteshyquent beaucoup de dieux On va jusqnagrave supposer quune deacuteesse adoreacutee sons le mecircme nom daus deux villages diffeacuterents nest pas toujours la mecircme Chaque village en plus dun temple rond symbolisant le monde

(1) Pl1EGSS (K TH) Das Fest les E--wachens bAi den COla-1I(liane1ll in VerhandlwYlshygen des 16 1l1temationalen Li melikanisten -Kon g1esses Z11 Wien pages 489 et sui vantes

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possegrave(le plusienrs huttes consacreacutees ft un on ft deux dieux et il en reacuteshy suIte que par la force de lImbitude ils simaginent avoir agrave lenr seule

disposition nn nombre limiteacute (le dieux quoique cenx-ci apparaissent aussi mais en vertu dun choix diffeacuterent dans le pantheacuteon dantres villa shyges Cette tendance agrave ht speacutecial isation et ugrave 1inc1i vic1ualuumlation des dishyviniteacutes a en pom reacutesultat que Fon apporte anx dieux leurs offrandes (lans les lieux qni leur sont assigneacutes et que lon concreacutetise leur preacuteshyseJwe agrave laifle d une image on (lune chaise Ohez les lfexicains nons retrouvons la multipliciteacute des dieux individuels et de leurs figuratiolJs mateacuterielles Ces diviniteacutes par suite de lellrs fonctiolls ChtllS la nature et (le par les liens qni les unissent wx eacuteleacutements de cette mecircme nature peuvent se reacutepartie en groupes Enfin eeacutetait eacutegalement un trait typiqne de la religion mexicaine que davoir pour chaque commllnauteacute des diishyniteacutes particuliegraveres qui en eacutetaient les protectrices Une des conseacutequenceR de cet eacutetat de choses ou du moins un pheacutenomegravene correacutelatif est lindiffeacuteshyrence que ces deux peuples ont manifesteacutee Ugrave la conception dune senle diviniteacute creacuteatrice et dun dieu suprecircme Ponr les Huicltol s lou ne pent parler dun tel type de dieux et les Mexicains aVlt1ient quatre ltliviniteacutes creacuteatrices alors lue Tonacatecutli) en tant qlle dien sllprecircme passait au second plan

Il en va tout an trempnt ebp7 les Conls Ils nont ni lieux sacreacuteR ni images de diviniteacutes IIi temple Ocst tout an plu s si Fon peut donner ce dernier titre au x p laces ougrave ils ceacutelegravebren t lems fecirctes et anx Cftvernes dans lesq uelles ils gardent les objets rituels et ougrave ils deacuteposent souvent des flegraveshyches-offrancles Bien qne leurs morts devienn ent des dieux principtleshyment des dieux de la pluie et que de nombreux objets naturels possegravedent les attributs de diviniteacutet ils sont toujours repreacutesenteacutes comme constituant des gronpes inltlifteacuterencieacutes Des animanx isoleacutes qui so nt eeacuteleacutebreacutes dans leur chanson ft cause ltle leur action SUl la na ture forment toujonrs des espegraveces jamais des indi viti us Il en reacutesnl te qne le nombre de di vini teacutes individ nal ishyseacutees est chez eux tregraves petit et quelles ont un caractegravere plus extensif En fl1it il n y en a qUB trois le dieu middotsoleil la deacuteesse de la terre et de la lune et parfois du ciel eacutetoileacute qui est en mecircme temps la deacuteesse du maiumls ainsi que le fils des deux leacutetoile du matin qni est aussi le dieu du maiumls Parshytant le dieu soleil est le personnage le plus important de lunivers et il unit en llli la position de Tonacatecntli) que les Mexicains consideacutemient comme eacuteloigneacute du monde et celle dune di vi ni teacute vi vante Plus proch es tles hommes sont leacutetoile (lu matin qui a donneacute aux hommes lem relishygion et la deacuteesse de la terre et (le la lune puisque d accord ltvec le soleil et leacutetoile du matin elle ltt creacuteeacute la terre Ces trois diviniteacutes agrave cocircteacute de leur fonction particuliegravere dans la natnre se partagent entre elles les attributs dnn dieu suprecircme et ce fait rapgtelle encore dans une certaine mesure les croyances des anciens Mexicains en deacutepit des nombrenx

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dieux individuels quatre dentre eux seacutetaient deacutega geacutes de la masse des autres et eacutetaient consideacutereacutes COillme uumles divilliteacutes ( leacuteaMices (eacutetaient (Jnetzalc()atl) Tezcatlipoca) Jl1ixcoatl et Uitzilopohtli Ils eacutetaient en mecircme telll[)sdes dienx tribaux qni seacutetaient incorporeacute pIns ou moins les quashyliteacutes ltle dieux su[wecircmes

Les an(iens Mex icains form ent agrave (e t eacutegard le trait dnnion entre les Hui (hols et les Ooras et ne peuven t ecirctre s implement identifieacutes mu preshymiers Allons p lus 10ilI et voyons sil existe lin rapport tlu mecircme ordre dans les prodnctiolls litteacuterailes uumle (es peuples On est de prime tborcl frapp eacute par le fa it qne les OOlas dlttlli3 leurs chan ts font cles descriptions geacuteneacuterales des pLeacutenomegravenes naturels en rappor t avec les figures myt-hicoshyreligieuses q nil s incarnent Dans lcnrs priegraveres en dehors des di ffeacuteshyrents grollpes de dieux ils sadressent aux troi s diviniteacutes principales Les Buichols par contre (l er(tent agrave traiter avec tout lessaim des dieux et a ntant que possible avec cha cun seacutepareacutement On ne se (011shytente PecircLS (le dresser de longnes listes de dienx mais pour nen oublier aucun on a Cloiu (lnjouter agrave la fin de chaque priegravere nazte) naite) laquo tou s tous raquo IDn plus de C(cL les relat- ions avec des perlonnages individ LHoshyli seacutes ont enh-aineacute avec ellei3 la formation dLm veacuteri table style dram ltLtishyque dial ogueacute Leacuteleacutement eacutepiqne cles COtas passe au se(oIHl plan eLez legraveS Hui cLoh Les lVIexicains se rapprocLent beauco Llp tles Oaras mais ils ne nous ont pas cLisseacute dhymnes semblahles Ft ceux des Oaras ct des HnishychoIs Peut ecirctre nen ont-ils jamais eu Malgreacute Lout lindividtlaliteacute de le l1ls nombrenses di vi niteacutes est fortement marq neacutee bien quelle n fLi t pas condui t agrave la creacuteation dun dialogne dramatique comme che les Hlli chols En fin de com pte ces diffeacuterences entre diviniteacutes individuell ts et geacuteneacuterashyles se man ifestent avec benucoLlp de relief dalls les mytiJ es

Leurs rapports avec les diffeacuterents dieux ne lwrmettent pas a nx HuishychoIs de reacutealiser des actions concregravetes de caractegravere dramatique Celles(Icirc sont insignifiantes et se bornent ft relever fIes hfttons emplumeacutes agrave se tourner anns fliffeacuterentes direct ions ft s us pend re nne ceinture ou ft repreacuteshysenter le chemin da ciel etc Seuls quelqu es eacutepisodes de la (basse au cerf 80n t reprodni ts Les ceacutereacutemonies des Ooras ont un (aractegravere dramashytique et imitatif beaucoup plus accuseacute On ne peut attribuer cependant ce fai t Ugrave la rareteacute l1 e persol1lmges llldi vid ua liseacutes dans l~ monde des cl ieux Nous voyons par lexemple des Mexicains jnsqn) quel point le SOlt des dieu x pellt precircter agrave des re preacuteiip ll tations dramati q Iles Il semblemi t q ne les fecirctes des Hllichols lttien t LlUe tenuumlan(e agrave la drc)IDatisat ion mointlre que cell es des Uoras ql1Icirc sont hc)bitueacutes ft fcl iee figurer (oft te que (ofLte clall s leurs pratiques religi enses la c1eacuteesse de la terre et leacutetoile (hl matin

Lexpression nramatiql1e nee trouve don( pas dans un rapport de cause agrave effet avec la forme dialogueacutee des clJants lJui chols Cette cnr ieuse faccedilon de ~adresser aux dieux se preacutesente citez les Bni clIols sons un

450 shy

~spect forblogiqlle Ces chants agrave lexception de celni des semailleB (l~eacutell(it$iise) qJicommence 1 e matin ont l)OHI iutroduction Hne imQcatioD aU mpssager des dieux KUllyumaricirc le dieu deJeacutetoile du maMn Dans ce but le chanteur sentretient de la fecircte sons forme dialogu eacutee avec 18 feu qni setronve au milieu du temple cestagravedire avec le llien du feu Xatenari laquo notre grand-pegravere raquo Tateuari explique quil ne peut agir seul et envoie fIeux plu III es (deux flegraveches ceacutereacutemollielles on bfltons emplumeacutes

d olt pendent les plumes de certaines espegraveces doiseaux) qni sen vont en q naliteacute decirctre personllitieacutes eb qui finissetit apregraves avoir rencontreacute en cheshymin diverses div initeacutes par trouver Kauyumari endormi flans L1JI lien obscur enbomeacute de plumes magiques Des jaguars des pumas et des sel rrents venimeux veillent snr lui Les plnmes lui tOLH~hent les pieds et il sensuit toute une longue conversation Tout dabord il se montre peu disposeacute ft venir agrave la fecircte Il est tonjours malade tantocirct il est elllhumeacute ou a mal au pied tantocirct il souffre fIun accegraves (le mal aria et sa femme lexhorte agrave rester ft la maison Pon finir il se ltl eacutecicle agrave partir mais il ne peut mettre tont de suite la main sm ses bacirctoIlS emplnmeacutes Sa femme le pourvoit cIe tOLlt Co qui lui est neacutecessaire pour le voyage et lui recomshymamll de ne pas se commettre avec ltlautres femlIlPs Apregraves ces scegraveneii domestiques que les Huicllols agreacutementent chaque fois de deacutetails noumiddot veaux il arrive au temple non sans avoir fait auparavant diverses stashytions Sitocirct SUl les lieux il prelld en main les neacutegoci ations avec les di e ll ~

Il les convoque leur preacutesente ce cas speacutecial et discute avec enx de la maniegravere (le mettre fin agrave ces maux Il est aussi le l1ernier agrave quitter la scegravene (1)

La scegravene suivante nons montre jusquagrave quel point lon neacutegocie avec les dieu x dans une fecircte ordinaire par ex~mple celle de la pluie que lon ceacutelegravebre qlHlIlcl laneacutecessiteacute sen fait sentir Les (lienx font leur apparimiddot tion au cours dune fecircte de ce type sur la convocation de K(l1ty~~mari

Ils expri ment dabord leurs deacutesirs et deacuteclarent ecirctre precircts agrave faire tom ber la IJluie si on les satisfait Ils ne veulent pas seulement des aliments de la soupe de la viande de taureau et de la biegravere de maiumls mais snrtollt ltl es objets magiques (lont ils ont besoin pour leurs activiteacutes~ cest agraved ire ceux qui ont pon1 eux une vertu magique Ce sont pHr exemple desftegraveshyches ceacutereacutemonielles des calebass0s ayec des emblegravemegraves sacreacutes ltles appa reils pour voir laquolt Sellerkzellge raquo niericirclca) (les figures en hois et en lai IlC

semblables agrave des pierres avec un trou au lllilien des cierges et antres choses de ce geJlre enfin des animaux et des plantes qui sout sacreacutes pour le diell x en question ct avec lesqnels il s sont occasionnellement

(1) Cettemiddotrepreacutesell t1tioll qui avec quelques leacutegegraveres variantes se reacutepegravete dan toutes les fecirctmiddotes ~ eacuteteacute pnugravelieacutee llresqlle mot ft Illot dans ma dcscripti oll de la fecircte dl rocirctisshysage du JIlaiuml~ (Gob1s t XLV 1909 p~ges 43 et s ui vantes)

~

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

452 shy

mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 5: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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possegrave(le plusienrs huttes consacreacutees ft un on ft deux dieux et il en reacuteshy suIte que par la force de lImbitude ils simaginent avoir agrave lenr seule

disposition nn nombre limiteacute (le dieux quoique cenx-ci apparaissent aussi mais en vertu dun choix diffeacuterent dans le pantheacuteon dantres villa shyges Cette tendance agrave ht speacutecial isation et ugrave 1inc1i vic1ualuumlation des dishyviniteacutes a en pom reacutesultat que Fon apporte anx dieux leurs offrandes (lans les lieux qni leur sont assigneacutes et que lon concreacutetise leur preacuteshyseJwe agrave laifle d une image on (lune chaise Ohez les lfexicains nons retrouvons la multipliciteacute des dieux individuels et de leurs figuratiolJs mateacuterielles Ces diviniteacutes par suite de lellrs fonctiolls ChtllS la nature et (le par les liens qni les unissent wx eacuteleacutements de cette mecircme nature peuvent se reacutepartie en groupes Enfin eeacutetait eacutegalement un trait typiqne de la religion mexicaine que davoir pour chaque commllnauteacute des diishyniteacutes particuliegraveres qui en eacutetaient les protectrices Une des conseacutequenceR de cet eacutetat de choses ou du moins un pheacutenomegravene correacutelatif est lindiffeacuteshyrence que ces deux peuples ont manifesteacutee Ugrave la conception dune senle diviniteacute creacuteatrice et dun dieu suprecircme Ponr les Huicltol s lou ne pent parler dun tel type de dieux et les Mexicains aVlt1ient quatre ltliviniteacutes creacuteatrices alors lue Tonacatecutli) en tant qlle dien sllprecircme passait au second plan

Il en va tout an trempnt ebp7 les Conls Ils nont ni lieux sacreacuteR ni images de diviniteacutes IIi temple Ocst tout an plu s si Fon peut donner ce dernier titre au x p laces ougrave ils ceacutelegravebren t lems fecirctes et anx Cftvernes dans lesq uelles ils gardent les objets rituels et ougrave ils deacuteposent souvent des flegraveshyches-offrancles Bien qne leurs morts devienn ent des dieux principtleshyment des dieux de la pluie et que de nombreux objets naturels possegravedent les attributs de diviniteacutet ils sont toujours repreacutesenteacutes comme constituant des gronpes inltlifteacuterencieacutes Des animanx isoleacutes qui so nt eeacuteleacutebreacutes dans leur chanson ft cause ltle leur action SUl la na ture forment toujonrs des espegraveces jamais des indi viti us Il en reacutesnl te qne le nombre de di vini teacutes individ nal ishyseacutees est chez eux tregraves petit et quelles ont un caractegravere plus extensif En fl1it il n y en a qUB trois le dieu middotsoleil la deacuteesse de la terre et de la lune et parfois du ciel eacutetoileacute qui est en mecircme temps la deacuteesse du maiumls ainsi que le fils des deux leacutetoile du matin qni est aussi le dieu du maiumls Parshytant le dieu soleil est le personnage le plus important de lunivers et il unit en llli la position de Tonacatecntli) que les Mexicains consideacutemient comme eacuteloigneacute du monde et celle dune di vi ni teacute vi vante Plus proch es tles hommes sont leacutetoile (lu matin qui a donneacute aux hommes lem relishygion et la deacuteesse de la terre et (le la lune puisque d accord ltvec le soleil et leacutetoile du matin elle ltt creacuteeacute la terre Ces trois diviniteacutes agrave cocircteacute de leur fonction particuliegravere dans la natnre se partagent entre elles les attributs dnn dieu suprecircme et ce fait rapgtelle encore dans une certaine mesure les croyances des anciens Mexicains en deacutepit des nombrenx

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dieux individuels quatre dentre eux seacutetaient deacutega geacutes de la masse des autres et eacutetaient consideacutereacutes COillme uumles divilliteacutes ( leacuteaMices (eacutetaient (Jnetzalc()atl) Tezcatlipoca) Jl1ixcoatl et Uitzilopohtli Ils eacutetaient en mecircme telll[)sdes dienx tribaux qni seacutetaient incorporeacute pIns ou moins les quashyliteacutes ltle dieux su[wecircmes

Les an(iens Mex icains form ent agrave (e t eacutegard le trait dnnion entre les Hui (hols et les Ooras et ne peuven t ecirctre s implement identifieacutes mu preshymiers Allons p lus 10ilI et voyons sil existe lin rapport tlu mecircme ordre dans les prodnctiolls litteacuterailes uumle (es peuples On est de prime tborcl frapp eacute par le fa it qne les OOlas dlttlli3 leurs chan ts font cles descriptions geacuteneacuterales des pLeacutenomegravenes naturels en rappor t avec les figures myt-hicoshyreligieuses q nil s incarnent Dans lcnrs priegraveres en dehors des di ffeacuteshyrents grollpes de dieux ils sadressent aux troi s diviniteacutes principales Les Buichols par contre (l er(tent agrave traiter avec tout lessaim des dieux et a ntant que possible avec cha cun seacutepareacutement On ne se (011shytente PecircLS (le dresser de longnes listes de dienx mais pour nen oublier aucun on a Cloiu (lnjouter agrave la fin de chaque priegravere nazte) naite) laquo tou s tous raquo IDn plus de C(cL les relat- ions avec des perlonnages individ LHoshyli seacutes ont enh-aineacute avec ellei3 la formation dLm veacuteri table style dram ltLtishyque dial ogueacute Leacuteleacutement eacutepiqne cles COtas passe au se(oIHl plan eLez legraveS Hui cLoh Les lVIexicains se rapprocLent beauco Llp tles Oaras mais ils ne nous ont pas cLisseacute dhymnes semblahles Ft ceux des Oaras ct des HnishychoIs Peut ecirctre nen ont-ils jamais eu Malgreacute Lout lindividtlaliteacute de le l1ls nombrenses di vi niteacutes est fortement marq neacutee bien quelle n fLi t pas condui t agrave la creacuteation dun dialogne dramatique comme che les Hlli chols En fin de com pte ces diffeacuterences entre diviniteacutes individuell ts et geacuteneacuterashyles se man ifestent avec benucoLlp de relief dalls les mytiJ es

Leurs rapports avec les diffeacuterents dieux ne lwrmettent pas a nx HuishychoIs de reacutealiser des actions concregravetes de caractegravere dramatique Celles(Icirc sont insignifiantes et se bornent ft relever fIes hfttons emplumeacutes agrave se tourner anns fliffeacuterentes direct ions ft s us pend re nne ceinture ou ft repreacuteshysenter le chemin da ciel etc Seuls quelqu es eacutepisodes de la (basse au cerf 80n t reprodni ts Les ceacutereacutemonies des Ooras ont un (aractegravere dramashytique et imitatif beaucoup plus accuseacute On ne peut attribuer cependant ce fai t Ugrave la rareteacute l1 e persol1lmges llldi vid ua liseacutes dans l~ monde des cl ieux Nous voyons par lexemple des Mexicains jnsqn) quel point le SOlt des dieu x pellt precircter agrave des re preacuteiip ll tations dramati q Iles Il semblemi t q ne les fecirctes des Hllichols lttien t LlUe tenuumlan(e agrave la drc)IDatisat ion mointlre que cell es des Uoras ql1Icirc sont hc)bitueacutes ft fcl iee figurer (oft te que (ofLte clall s leurs pratiques religi enses la c1eacuteesse de la terre et leacutetoile (hl matin

Lexpression nramatiql1e nee trouve don( pas dans un rapport de cause agrave effet avec la forme dialogueacutee des clJants lJui chols Cette cnr ieuse faccedilon de ~adresser aux dieux se preacutesente citez les Bni clIols sons un

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~spect forblogiqlle Ces chants agrave lexception de celni des semailleB (l~eacutell(it$iise) qJicommence 1 e matin ont l)OHI iutroduction Hne imQcatioD aU mpssager des dieux KUllyumaricirc le dieu deJeacutetoile du maMn Dans ce but le chanteur sentretient de la fecircte sons forme dialogu eacutee avec 18 feu qni setronve au milieu du temple cestagravedire avec le llien du feu Xatenari laquo notre grand-pegravere raquo Tateuari explique quil ne peut agir seul et envoie fIeux plu III es (deux flegraveches ceacutereacutemollielles on bfltons emplumeacutes

d olt pendent les plumes de certaines espegraveces doiseaux) qni sen vont en q naliteacute decirctre personllitieacutes eb qui finissetit apregraves avoir rencontreacute en cheshymin diverses div initeacutes par trouver Kauyumari endormi flans L1JI lien obscur enbomeacute de plumes magiques Des jaguars des pumas et des sel rrents venimeux veillent snr lui Les plnmes lui tOLH~hent les pieds et il sensuit toute une longue conversation Tout dabord il se montre peu disposeacute ft venir agrave la fecircte Il est tonjours malade tantocirct il est elllhumeacute ou a mal au pied tantocirct il souffre fIun accegraves (le mal aria et sa femme lexhorte agrave rester ft la maison Pon finir il se ltl eacutecicle agrave partir mais il ne peut mettre tont de suite la main sm ses bacirctoIlS emplnmeacutes Sa femme le pourvoit cIe tOLlt Co qui lui est neacutecessaire pour le voyage et lui recomshymamll de ne pas se commettre avec ltlautres femlIlPs Apregraves ces scegraveneii domestiques que les Huicllols agreacutementent chaque fois de deacutetails noumiddot veaux il arrive au temple non sans avoir fait auparavant diverses stashytions Sitocirct SUl les lieux il prelld en main les neacutegoci ations avec les di e ll ~

Il les convoque leur preacutesente ce cas speacutecial et discute avec enx de la maniegravere (le mettre fin agrave ces maux Il est aussi le l1ernier agrave quitter la scegravene (1)

La scegravene suivante nons montre jusquagrave quel point lon neacutegocie avec les dieu x dans une fecircte ordinaire par ex~mple celle de la pluie que lon ceacutelegravebre qlHlIlcl laneacutecessiteacute sen fait sentir Les (lienx font leur apparimiddot tion au cours dune fecircte de ce type sur la convocation de K(l1ty~~mari

Ils expri ment dabord leurs deacutesirs et deacuteclarent ecirctre precircts agrave faire tom ber la IJluie si on les satisfait Ils ne veulent pas seulement des aliments de la soupe de la viande de taureau et de la biegravere de maiumls mais snrtollt ltl es objets magiques (lont ils ont besoin pour leurs activiteacutes~ cest agraved ire ceux qui ont pon1 eux une vertu magique Ce sont pHr exemple desftegraveshyches ceacutereacutemonielles des calebass0s ayec des emblegravemegraves sacreacutes ltles appa reils pour voir laquolt Sellerkzellge raquo niericirclca) (les figures en hois et en lai IlC

semblables agrave des pierres avec un trou au lllilien des cierges et antres choses de ce geJlre enfin des animaux et des plantes qui sout sacreacutes pour le diell x en question ct avec lesqnels il s sont occasionnellement

(1) Cettemiddotrepreacutesell t1tioll qui avec quelques leacutegegraveres variantes se reacutepegravete dan toutes les fecirctmiddotes ~ eacuteteacute pnugravelieacutee llresqlle mot ft Illot dans ma dcscripti oll de la fecircte dl rocirctisshysage du JIlaiuml~ (Gob1s t XLV 1909 p~ges 43 et s ui vantes)

~

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 6: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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dieux individuels quatre dentre eux seacutetaient deacutega geacutes de la masse des autres et eacutetaient consideacutereacutes COillme uumles divilliteacutes ( leacuteaMices (eacutetaient (Jnetzalc()atl) Tezcatlipoca) Jl1ixcoatl et Uitzilopohtli Ils eacutetaient en mecircme telll[)sdes dienx tribaux qni seacutetaient incorporeacute pIns ou moins les quashyliteacutes ltle dieux su[wecircmes

Les an(iens Mex icains form ent agrave (e t eacutegard le trait dnnion entre les Hui (hols et les Ooras et ne peuven t ecirctre s implement identifieacutes mu preshymiers Allons p lus 10ilI et voyons sil existe lin rapport tlu mecircme ordre dans les prodnctiolls litteacuterailes uumle (es peuples On est de prime tborcl frapp eacute par le fa it qne les OOlas dlttlli3 leurs chan ts font cles descriptions geacuteneacuterales des pLeacutenomegravenes naturels en rappor t avec les figures myt-hicoshyreligieuses q nil s incarnent Dans lcnrs priegraveres en dehors des di ffeacuteshyrents grollpes de dieux ils sadressent aux troi s diviniteacutes principales Les Buichols par contre (l er(tent agrave traiter avec tout lessaim des dieux et a ntant que possible avec cha cun seacutepareacutement On ne se (011shytente PecircLS (le dresser de longnes listes de dienx mais pour nen oublier aucun on a Cloiu (lnjouter agrave la fin de chaque priegravere nazte) naite) laquo tou s tous raquo IDn plus de C(cL les relat- ions avec des perlonnages individ LHoshyli seacutes ont enh-aineacute avec ellei3 la formation dLm veacuteri table style dram ltLtishyque dial ogueacute Leacuteleacutement eacutepiqne cles COtas passe au se(oIHl plan eLez legraveS Hui cLoh Les lVIexicains se rapprocLent beauco Llp tles Oaras mais ils ne nous ont pas cLisseacute dhymnes semblahles Ft ceux des Oaras ct des HnishychoIs Peut ecirctre nen ont-ils jamais eu Malgreacute Lout lindividtlaliteacute de le l1ls nombrenses di vi niteacutes est fortement marq neacutee bien quelle n fLi t pas condui t agrave la creacuteation dun dialogne dramatique comme che les Hlli chols En fin de com pte ces diffeacuterences entre diviniteacutes individuell ts et geacuteneacuterashyles se man ifestent avec benucoLlp de relief dalls les mytiJ es

Leurs rapports avec les diffeacuterents dieux ne lwrmettent pas a nx HuishychoIs de reacutealiser des actions concregravetes de caractegravere dramatique Celles(Icirc sont insignifiantes et se bornent ft relever fIes hfttons emplumeacutes agrave se tourner anns fliffeacuterentes direct ions ft s us pend re nne ceinture ou ft repreacuteshysenter le chemin da ciel etc Seuls quelqu es eacutepisodes de la (basse au cerf 80n t reprodni ts Les ceacutereacutemonies des Ooras ont un (aractegravere dramashytique et imitatif beaucoup plus accuseacute On ne peut attribuer cependant ce fai t Ugrave la rareteacute l1 e persol1lmges llldi vid ua liseacutes dans l~ monde des cl ieux Nous voyons par lexemple des Mexicains jnsqn) quel point le SOlt des dieu x pellt precircter agrave des re preacuteiip ll tations dramati q Iles Il semblemi t q ne les fecirctes des Hllichols lttien t LlUe tenuumlan(e agrave la drc)IDatisat ion mointlre que cell es des Uoras ql1Icirc sont hc)bitueacutes ft fcl iee figurer (oft te que (ofLte clall s leurs pratiques religi enses la c1eacuteesse de la terre et leacutetoile (hl matin

Lexpression nramatiql1e nee trouve don( pas dans un rapport de cause agrave effet avec la forme dialogueacutee des clJants lJui chols Cette cnr ieuse faccedilon de ~adresser aux dieux se preacutesente citez les Bni clIols sons un

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~spect forblogiqlle Ces chants agrave lexception de celni des semailleB (l~eacutell(it$iise) qJicommence 1 e matin ont l)OHI iutroduction Hne imQcatioD aU mpssager des dieux KUllyumaricirc le dieu deJeacutetoile du maMn Dans ce but le chanteur sentretient de la fecircte sons forme dialogu eacutee avec 18 feu qni setronve au milieu du temple cestagravedire avec le llien du feu Xatenari laquo notre grand-pegravere raquo Tateuari explique quil ne peut agir seul et envoie fIeux plu III es (deux flegraveches ceacutereacutemollielles on bfltons emplumeacutes

d olt pendent les plumes de certaines espegraveces doiseaux) qni sen vont en q naliteacute decirctre personllitieacutes eb qui finissetit apregraves avoir rencontreacute en cheshymin diverses div initeacutes par trouver Kauyumari endormi flans L1JI lien obscur enbomeacute de plumes magiques Des jaguars des pumas et des sel rrents venimeux veillent snr lui Les plnmes lui tOLH~hent les pieds et il sensuit toute une longue conversation Tout dabord il se montre peu disposeacute ft venir agrave la fecircte Il est tonjours malade tantocirct il est elllhumeacute ou a mal au pied tantocirct il souffre fIun accegraves (le mal aria et sa femme lexhorte agrave rester ft la maison Pon finir il se ltl eacutecicle agrave partir mais il ne peut mettre tont de suite la main sm ses bacirctoIlS emplnmeacutes Sa femme le pourvoit cIe tOLlt Co qui lui est neacutecessaire pour le voyage et lui recomshymamll de ne pas se commettre avec ltlautres femlIlPs Apregraves ces scegraveneii domestiques que les Huicllols agreacutementent chaque fois de deacutetails noumiddot veaux il arrive au temple non sans avoir fait auparavant diverses stashytions Sitocirct SUl les lieux il prelld en main les neacutegoci ations avec les di e ll ~

Il les convoque leur preacutesente ce cas speacutecial et discute avec enx de la maniegravere (le mettre fin agrave ces maux Il est aussi le l1ernier agrave quitter la scegravene (1)

La scegravene suivante nons montre jusquagrave quel point lon neacutegocie avec les dieu x dans une fecircte ordinaire par ex~mple celle de la pluie que lon ceacutelegravebre qlHlIlcl laneacutecessiteacute sen fait sentir Les (lienx font leur apparimiddot tion au cours dune fecircte de ce type sur la convocation de K(l1ty~~mari

Ils expri ment dabord leurs deacutesirs et deacuteclarent ecirctre precircts agrave faire tom ber la IJluie si on les satisfait Ils ne veulent pas seulement des aliments de la soupe de la viande de taureau et de la biegravere de maiumls mais snrtollt ltl es objets magiques (lont ils ont besoin pour leurs activiteacutes~ cest agraved ire ceux qui ont pon1 eux une vertu magique Ce sont pHr exemple desftegraveshyches ceacutereacutemonielles des calebass0s ayec des emblegravemegraves sacreacutes ltles appa reils pour voir laquolt Sellerkzellge raquo niericirclca) (les figures en hois et en lai IlC

semblables agrave des pierres avec un trou au lllilien des cierges et antres choses de ce geJlre enfin des animaux et des plantes qui sout sacreacutes pour le diell x en question ct avec lesqnels il s sont occasionnellement

(1) Cettemiddotrepreacutesell t1tioll qui avec quelques leacutegegraveres variantes se reacutepegravete dan toutes les fecirctmiddotes ~ eacuteteacute pnugravelieacutee llresqlle mot ft Illot dans ma dcscripti oll de la fecircte dl rocirctisshysage du JIlaiuml~ (Gob1s t XLV 1909 p~ges 43 et s ui vantes)

~

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 7: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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~spect forblogiqlle Ces chants agrave lexception de celni des semailleB (l~eacutell(it$iise) qJicommence 1 e matin ont l)OHI iutroduction Hne imQcatioD aU mpssager des dieux KUllyumaricirc le dieu deJeacutetoile du maMn Dans ce but le chanteur sentretient de la fecircte sons forme dialogu eacutee avec 18 feu qni setronve au milieu du temple cestagravedire avec le llien du feu Xatenari laquo notre grand-pegravere raquo Tateuari explique quil ne peut agir seul et envoie fIeux plu III es (deux flegraveches ceacutereacutemollielles on bfltons emplumeacutes

d olt pendent les plumes de certaines espegraveces doiseaux) qni sen vont en q naliteacute decirctre personllitieacutes eb qui finissetit apregraves avoir rencontreacute en cheshymin diverses div initeacutes par trouver Kauyumari endormi flans L1JI lien obscur enbomeacute de plumes magiques Des jaguars des pumas et des sel rrents venimeux veillent snr lui Les plnmes lui tOLH~hent les pieds et il sensuit toute une longue conversation Tout dabord il se montre peu disposeacute ft venir agrave la fecircte Il est tonjours malade tantocirct il est elllhumeacute ou a mal au pied tantocirct il souffre fIun accegraves (le mal aria et sa femme lexhorte agrave rester ft la maison Pon finir il se ltl eacutecicle agrave partir mais il ne peut mettre tont de suite la main sm ses bacirctoIlS emplnmeacutes Sa femme le pourvoit cIe tOLlt Co qui lui est neacutecessaire pour le voyage et lui recomshymamll de ne pas se commettre avec ltlautres femlIlPs Apregraves ces scegraveneii domestiques que les Huicllols agreacutementent chaque fois de deacutetails noumiddot veaux il arrive au temple non sans avoir fait auparavant diverses stashytions Sitocirct SUl les lieux il prelld en main les neacutegoci ations avec les di e ll ~

Il les convoque leur preacutesente ce cas speacutecial et discute avec enx de la maniegravere (le mettre fin agrave ces maux Il est aussi le l1ernier agrave quitter la scegravene (1)

La scegravene suivante nons montre jusquagrave quel point lon neacutegocie avec les dieu x dans une fecircte ordinaire par ex~mple celle de la pluie que lon ceacutelegravebre qlHlIlcl laneacutecessiteacute sen fait sentir Les (lienx font leur apparimiddot tion au cours dune fecircte de ce type sur la convocation de K(l1ty~~mari

Ils expri ment dabord leurs deacutesirs et deacuteclarent ecirctre precircts agrave faire tom ber la IJluie si on les satisfait Ils ne veulent pas seulement des aliments de la soupe de la viande de taureau et de la biegravere de maiumls mais snrtollt ltl es objets magiques (lont ils ont besoin pour leurs activiteacutes~ cest agraved ire ceux qui ont pon1 eux une vertu magique Ce sont pHr exemple desftegraveshyches ceacutereacutemonielles des calebass0s ayec des emblegravemegraves sacreacutes ltles appa reils pour voir laquolt Sellerkzellge raquo niericirclca) (les figures en hois et en lai IlC

semblables agrave des pierres avec un trou au lllilien des cierges et antres choses de ce geJlre enfin des animaux et des plantes qui sout sacreacutes pour le diell x en question ct avec lesqnels il s sont occasionnellement

(1) Cettemiddotrepreacutesell t1tioll qui avec quelques leacutegegraveres variantes se reacutepegravete dan toutes les fecirctmiddotes ~ eacuteteacute pnugravelieacutee llresqlle mot ft Illot dans ma dcscripti oll de la fecircte dl rocirctisshysage du JIlaiuml~ (Gob1s t XLV 1909 p~ges 43 et s ui vantes)

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 8: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

~

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ide1ltifieacutes La deacuteesse de la pl uie de lEst (tateacutea) laquo N otlC megravereraquo (Na a li1l(Icircshy

me) veH lim rtge dun monstre marin mytlJiqnc quia lappaJencedun tatUeall Lorsquune tempecircte se deacutechaicircne ana coutullle de (lire tI lle cette becircte (ha7wyucircka) fouille la tmTe et lllanifeste son existence La rleacuteesse dn llJaiumls Utianaka exige UIl bagre (silure) qui a Jaspect dun seqient et qui Cil tant que serpent correspond fi la fignre primitiyc ltJe eette deacuteesse La terre megravere et deacuteesse de la lune Takucirctsi Naku-~laquolt Notre grandw8re qui croicirctraquo) (lemande une petite varieacuteteacute dagave qui pousse sur les rochers les racinesde jikama et de camote) un iguane 1111 peacutecari et un modegravele du tronc darbre ereux mais fermeacute dans lequel le seul survivant du deacutelllge alla se reacutefugier Le soleil dont Hl foml tOluumle pluie deacuterive sans doute parce que la saison des pluies commence Hll solstice exige entre autres une butte sur le lieu de sa naissanee agrave lorient

La chanson est finie se dirat on tous les dieux ont reccedilu lassurance qne leurs vœux seront combleacutes et tamatsi Ecirc7cate7~ari) laquonotre fregravere aicircneacute le vent raquo qui vit fi l r~st avec la megravere de la pluie Naarugravetame a promis de ne pas rester laquodevant sa megravereraquo et de ne pas lempecirccber de descenshy(1re Mais voilagrave que hrusquement la deacuteesse deacuteelare laquoJai penr de larcshyen-eiel Je ne pnis men aller Devant nm porte sur la montagne il y a de Fean cacheacutee par un rnagicien 11 a planteacute unetlegravecbe au Nord llUe au Sud et une autre nu milieu raquo En mecircme temps en deacutepit de sa promesse le vent Eacutekateua1i est toujours lagrave qui dissipe les nuages de NaaTi1~acircmre Kauyl~lIlari se rend sur le lieu ougrave ces flegraveches pernicieuses se trouvent et apaise le vent par des aspersions de twmari) grossiegravere bouillie de maiumls eonpeacutee deau A son retour J[a1~ywnari entend nn bruit provenant dnn itauki llne becircte magique qni sort ugraveu fen ce qui empecirccbe les dieux de faire pleuvoir et les rend malades ainsi que les hommes Itau7ci mot qui exprime seulement le fait decirctre cacheacute est aussi lœuvre dun magicien Il burle comme un loup il peut aussi traverser les airs en bOllrdonuant On le tue en environ liant le feu de flegravecbes et en les approchant fle plus en plus clu brasier Kemy1l1nari prie SW((iI(tacirclllai) laquolenfant de Jeacutetoileraquo qui est eacutetroitement associeacute 8 leacutetoile du matin de lui donner ses flegraveshyches cest-agrave-dire ses bacirctons emplumeacutes et tue litacirc1Ucircci La chasse est tregraves fatigante le tireur tombe par terre et on lui verse de PeilU sur la tecircte On jone reacuteellement cette scegravene le chanteur plenant la place de Kauyttshy

mari dont on ne voit rien pas pIns dailTeus que de Suraivetucircmai ou des autres dieux Alors que litau1ci lorsquil est en yie nest visible qnan chanteur on le montre ellsuite au reste de lassistance sous laspect de cierges de cheveux de maiumls on de flegraveches etc

lontes ces pratiques nous prouvent quil ny a pas de diviniteacute suprecircme chez les Huicltols Les dieux forment nne communanteacute deacutemocratiqne et lmtoriteacute reacuteside lansles ceacutereacutelllonies si efficaces des Lommes Oeuxci sefforcent en donnHnt satisfaction aux exigences divines et en reconshy

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

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(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

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encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

456 shy

le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

- 457shy

Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 9: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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mnt agrave la diplomatie par lintermeacutediaile de l eacutetoile dn matin ltlapaise l les Lliffeacuterends qui ne peuvent II1futquerfle se iwoduie au sein d nnpan shytbeacuteoll si barioleacute et de mener le monde agrave leurgreacute Oette deacutemocratie divine se manifeste dans les mythes durfe faccedilon particnliegraverement nette surtout 10rsqll)011 les compare agrave ceux des Coras bull middot

Voi ci comment les H nichols racontent la creacutefl tion de la terre ~lt A

Titiacircpa (dans le monde souterrain) nos pegraveres et nos megraveres eacutetaient occu shypeacutes agrave eacutetendre leuts lits cIe roseail x au milieu de leau Il les eacutetenllaient au Sud au Nord agrave lEst agrave lOnest et an milieu 1113 se mirent agrave croicirctre et leur monde se mit ft grandir vers le Sud le Nord lOnest lEst et le milieu Au milieu de leau grandirent nos megraveles Haiynracircme laquolt le nuage qui croicirctraquo) Utianacirc1ca (la deacuteesse du maiumls) Utsi1)u1viw laquoltqui garde le mflls raquo) Naarinacircme (la deacuteesse de la pluie agrave lOrient) Kie1cillducircca (Iamiddotpluie occidentale) Sapalciyeacuteme (la pluie ltlu Sud) et tons les lia7cauyacircrite (surshytont les dieux dei- montagnes) tous ceux qui existent se mirent agrave croicirctre le(dieux neacutes et en pIns TUgraven7~8acircve (le feu) qui preacutepare un champ pour y planter du mflIumls (Uatakame laquole planteur de maiumlsraquo) Talcucirctsi Naka1Oe resteacute tont seul se mit agrave croicirctre Son monde se constitua ce monde SUl

leq uel nous vivons Voilagrave ce quelles firent nos megraveres Elles grandirent s ur leur monde mais naquirent agrave Tatiacircpa

Contrairement aux Coras les dieux de la pluie et ceux qui preacutesident agrave la croissance des plantes et en gros tons les antres (lia7ca1tyaTite)

sont ltJeacutesigneacutes comme creacutealeurs Seule 1a (leacuteesse deacute IH terre TaJclicirctsi Nakaue est repreacutesenteacutee comme Ull ecirctre agrave part Chez les CO[flS cettedeacutemiddotesse creacutee la terre ainsi que les dieux de la piuie soit les dieux infeacuterienrs Les ltJeux reacutecits ont- ceci de commun le monde na pas eacuteteacute fait pour les hommes mais pour les dienx et nous constatOlls aussi qne leacuteleacutement feacutemitlin a line importance particuliegravere Dans lune et lautre version la terre naicirct sur la mer primitive pM contre chez les Huichols cellemiddotci est e1l une certaine mesure identifieacutee avec le monde sontermin

Comlllccompleacutement agrave cette creacuteation les Huicl]()ls raeontent lbistoire ltlu deacuteluge quils rattachent agrave la personne du laquoPlantenrdeillaiumlsraquo TilnushyMme Oc TugravenllSacircve qui fait son apparition aux origines avec les premiegraveshyres tli riniteacutes est en reacutealiteacute le repreacutesentant de lhumaniteacute qui est lagrave ponr pourvoir les dieux de maiumls et (les instruments ]l1flgiques qui leur sont neacutecessaires Oest pour cette laison quil est (lit plus loin que lorsque leur monde fut formeacute et que ses pegravens et ses megraveres sy promenaient le laquo Plantenr de maiumlsraquo parla cie laquolemlit raquo de laquo leur champ cie maiumlsraquo et en preacutepara lin Dans la suite (lu reacutecit on raconte comment quelques ann0es flpregraves les semailles les arbres qui couvraient le terrain deacutefricbeacute se mirent nn beau jour agrave surgir de nouveau ehaque foi que le planteur (le maiumls rentrait agrave la mflisoll Il finit par deacutecouvrir que ceacutetflit Lll1e vieille femme agrave savoir Ta7cucirctsl Na7cawe) qui passait son temps agrave redrestier les

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

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encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 10: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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arbres abattns Oellemiddotci lui apprit qne la terre allait nagel et qUull vent violent eacuteuivlerai t les animanx et mangerait tous ses pareuts II devait crenser nu arbre 8alate en forme de hutte et le pourvoir dnn couvercle lDlle lui enjoignit demporter toutes les varieacuteteacutes ltle maiumls et de harieots etc en mecircme temps que du feu et une chienne Tontes les espegraveces d animaux et doiseaux entregraverent avec lui La mer monta et emporta le canot snl lequel la deacuteesse seacutetait assise vers tons les points cardinaux et mecircme vers le ciel ougrave tous les oiseaux senvolegraverent Il finit par eacutecuouer au Sud Les enfants de Vauumli7carne (lt le Planteur de maiumlsraquo) et de la clIienne fonmiddot degraverent la nouvelle humaniteacute

Oe cleacuteluge avec lavertissement preacutealable davoir agrave creuser un tronc dgtarbre pour en faire un callot et davoir agrave emporter des semenees et des animaux eorrespond tellement au texte hiblique qnon se demande s il nen est pas lleacuteriveacute quoique lon doive rechercher si certains eacuteleacute middot ments nont pas une base commune avec la version biblique du deacuteluge

La version mexiGaine du deacuteluge qui se trou ve dans lHi8t01Uuml~ de Colshyhuacam y de Meacutexico (1) preacutesente le mecircme caractegravere du moins sur le point suivant un couple Nota et Nana reccediloivent lannonce du deacuteluge et lordre davoir agrave creuser nn tronc darbre pour se sauver

Ici apparaicirct en toute eacutevidence lincorporation de leacutepisode du SitL1Veshytage agrave lancienne conception mexicaine des quatre peacuteriodes de lunivers ou soleils repreacutesentant les quatre eacuteleacutements la terre le vent le feu et leau et qui contribuent agrave sa destruction ou sont deacutetruits eux-mecircmes Le Oodex Vaticanus ndeg 3738 (2) lorsquil veut figurer ces peacuteriodes qui ont preacuteceacutedeacute le soleil et le monde actuels repreacutesente toujours un couple humain dans une grotte Il doit symboliser la continuiteacute de Phnshymaniteacute alors que les traditions mexicaines se contentaient dindiquer que les contemporains de chaque peacuteriode furent aneacuteantis avec elle ou changeacutes en becirctes

Les Uoras ont comme les anciens Mexicains un reacutecit du deacuteluge SHns rapport avec celui de la Bible Ils attribuent ce cataclysme agrave un sershypent qui vit dans la mer occidentale et qui est la personnification dn ciel noir de la nuiteonccedilu comme de leau Actuellement leacutetoile du matin le tue chaque fois avec sa flegraveche et le dieu-soleil auquel on apporte le sershypent pour quil le mange transforme son eacutenergie destructrice en beacuteneacuteshydiction cest ainsi quil fait tomber la roseacutee sur la terre Jadis lorsque leacutetoile du matin ne le dominait pas encore ce serpent a effeetivement deacutetruit le monde et les hommes et le seul vestig-e de ce deacuteluge est le lac de Santa Teresa situeacute sur un des hautsmiddotplateaux clll pays Aujourdhui

(1) JOU1nal d~ la Socieacuteteacute de3 ameacuteicanistes de Pai3 nOllvelle ~ eacuterie tOllle III 1900

pages 245 et suivantes

(2) Bdition UgraveU clue ugravee Lou1Jat Rome 1900 foL 4-6

4-(54

encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

() PrŒuss Die Naymit-Expedition page xxvrr

(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

456 shy

le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

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encore les Ooras cOI]sicl egraveren t leacute danger ( )Jn nouveau d eacutelt~geeomllle s1 imrninellt qnils font entenltlre au cours ltle lems fegravetes religieuses le ecirch~llt de la mise Ugrave mOlt du serpent par leacutetoile dn matin l1s en font lobjet dune repreacutesentation rlramatique qui agit comme une pratique de magie illlitfttive (-1) Les Hniugravebols ont si bien percln lacraicircnte dun nOllshy

Teau rleacuteluge quagrave leacutepoque des pluiespour que ~elles -citombent eu abondance ils font loffrande agrave If deacuteesse TakucirctsiNa7cam)~ (ltin petit canot en forme (le tronc ltlarbre creux qn i a servi agrave sauver Tinwsacircve et j Is le pourvoient de tous ses accessoires_ Il est permis toutefois de suppostr que cette offrande avait jadis pour but deacuteviter lHI nouveau deacuteluge

Nous constatons donc qne de tels mytbes ne sont pas destineacutes agrave satisshy raire une limple 0uriositeacute scientifique Hais sont la projection dans le

passeacute dune crainte reacuteelle et en quelque sorte 1a garantie q ne par des pr(ttiqnes approprieacutees on eacutevitera le Tenou vellement de la catastrophe qui sest produite au lleacutebut du monde Les anciens Nlexicains comme les Coras ne croient pas seulement que le monde a eacuteteacute tireacute de leau (les Mexicains par exemple disent quil est sorti dlUl animal semblable agrave nn crocodile et vivant dans leau) mais simaginent aussi quumle le monde infeacuteriClr est plein dlan et que celle-ci seacutecoule par les fleuves et les lacs de la superficie (2) Oest pouequoi nons sommes entoureacutes par limshymense oceacutean On comprendalors que le simple eacutetat des choses joint agrave quelques manifestations natnrelles comme des inondations ou des pIleacuteshynomegraveues meacuteteacuteorologiques aient pn provoquer un t telle peur et le sysshytegraveme de deacutefense que ces illytbes nons font connaicirctre Point nest besoin ltle supposer agrave lorigine de la croyance en un deacuteluge nn eacuteveacutenement hismiddot toriqne deacutepassant la reacutealiteacute ordinaire Bien entendu de tels reacutecits eacutetaient susceptibles de causer une impression profonde partout ougrave on ne Ies connaissait pas et de peacuteneacutetrer comme chez les Huichols dans le culte En fai t leacutepisode du deacuteluge occupe une place relativement disproporshytionneacutee dans le court reacutecit de la creacuteation et ce dernier nes~mis en tecircte quumle ponr deacutemontrer que les mytbes dudeacutelnge contribuent souvent en une certaine mesuee agrave la creacuteation lthl mOnde comme cest parfois le cas et agrave la consolidation de la terre

Lancien mythe mexieain de quatre soleils ou peacuteriodes preacutehistoriques met en eacutevidence qnil apparaissait nomme neacutecessaire deacutecarter systeacutemashytiquement et une fois pour toutes les catastrophes menaccedilantes que h

terre~ le vent le feu on leau pouvaient provoquer Il fallait que lactiOll de ces eacuteleacutements focirct contrecarreacutee Oomme on le sait ils avaient encore agrave redouter lextinction du soleil actuel dont la fin menaccedilait au terme de

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(2) PtUltUSS (K TH) Mexikllnisch~ Religion (Hans Haas Bilcleratlas zur Religionsshygeschichte) Leipzig 1930 pages III et sLlivantes

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

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chaque peacuteriode de 52 ans Souvent aussi on met en relati on avac Ces_

mythes du deacutel ng-e dautres eacuteleacutements tels que le feu etf dans fes reacutegibns plus septentrionales la neige le froid et la glauumle Entoas uumles cas ilne fait a-l1Clln dOllteql1e des aceuumllents dn milieu tels qttincCIlc1ieR eacuternlicircshyti0r~s volcanignesplaines glaceacutees eacutetaient indispensables ft hi for(uatipIi dl ces eacutepisodes Ils les tendaient plus acceptables et ce recnl d~ns le passeacute avait qnelque chose de rassurant Le cocircteacute mytbicomiddotreligieux qui au moyen middot tluumlne ~Illicircon complexe dn reacuteel avec des pheacutenomegravenes ceacutelestes veut faire de ceux-ci la calle nnique dnn deacuteluge ou dun embrasement shygeacuteneacuteral ne peut avoir quun caractegravere Reconclaire A cet eacutegard il est cuiieux de noter leacutet roite union entr-e leau et le feu qui se manifeste souverit dans de tels eacuteveacutenements En fait il semble que ce soit moins laction simuJtaneacutee de ces d~ux eacuteleacutements dans les catastropbes qui jone un rocircle que lideacutee complexe (participation) qni fait qu e ces deux eacuteleacute~

ments sont identifieacutes en vertu lnne association provoqueacutee par lenrcoll- shytiguumliteacute spatiale ou temporelle ou par quelque ressemblance A lacircge du Soleilmiddotde-feu an Mexique la terre fut deacutetruite par une pluied~ flammes En iconographie cette peacuteriorle est repreacutesenteacutee par le dien dn feu et aussi par celui de la pluie qui lun et lautre apparaissent parfois pour deacutesigner le feu et leau On peut expliquer cette union par le fiacirct quau Mexique le feu volcanique et lea u soutelTaine voi sinent sonvellt et que tOUR deux aussi se retrouvent eu eacutetroite relation dans le cie] qui nest quune reproduction du monde infeacuterieur

Chez les Huichols le dieu du feu Tatei(wi laquonotee grand-pegravereraquo est eacutegalement issu du monde souterrain ainsi que les deacuteesses de leaugrave et Pean elle-mecircme comme nous lavons vu dans le reacutecit de la creacuteation Leacutepisode de larriveacutee du fen dans le monrle est raconteacutee de hl faccedilon suivante quelque peu abreacutegeacutee

laquo Dans le monele illfeacuterienr laquoceux qui ont parn raquo sont neacutes lorsquil -faisait encore nnit Alors laquo ceux qlli swent raquo quand ils furent neacute dirent laquoQue ferons-nous pOllr avoir de la huniegravere dans notre monde1raquo D abord naquit la lune leur grallllmegravere et ils avaient sa lumiegravere Mais elle les trompa (1) Il arriva que dans la nuit il se produisit nn bouilmiddot lonnement au milieu des rochers rouges et bleus et une lumiegravere sulgit disparut brilla de nouvean et seacuteteignit Les Kaka1tyacircrite (Saurisete) la virent et dirent laquo Quest middotce ql1i sest pltsseacute au milien des rochers ~ Allons voingt L nn deu x se leva et alla jusquan bord de labicircme pour voir Au fond eacutetait coucbeacute nn homme acircgeacute un rocuer bleu horrible agrave contempler Il avait des flegraveches un bracelet des sandales et un bacircton emplumeacute qui deacutegageait de la lumiegravere Lorsque lcoutre eut vu cela il le raconta agrave ses pegraveres et les KakcHtyacircrite dirent laquo Comment faire pour

(1) On veut-pent-ecirctre faire ent endre par lagrave fju elle nc Init pas toujou rs

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 13: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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le vdir de pregravesraquo Les Scmrisete laquoceux qui saventraquo dirent laquoNous allon s tirer une jlegravechesur luiraquo Ils lui deacutecochegravelent depetits serpents qui ina11q uegravereut)e butmiddotet retombegraverent sans succegraves Alors Sltravetacircmai (( 1f11shyfant de leacutetoile raquo) dit Je vais allei me placer sur lepetit rocher au-cl eacutesshysus de lni regardez mes pegraveres) 11 se miumlt donc lagrave visa hien et fit voler sa flegraveche iJllegrave tomba surIe rocher bleu et le renversa Il en sortit beaushyCOllp de ftllneacutee Le vieux roula sur les pentes semeacutees de pierres bleues et rouges jYautres le soulevegraverent ceacutetaient les cerfs du Sud et du Nord (1)11s le nommegraverent lenr grand~pegravereacute et le placegraverent surdes chaimiddot ses en bois (le lt1sache dltpa et dochote (2) Ils le laissegraverent se reposer et il deacutegageait de la lumiegravere Il brillait dans la nuit avec un tel eacuteclat que tous 1esKalwnyacircrite qui eacutetaient lagrave pouvaient se regarrler mutuellemiddot

middot ment et se reconnaicirctre laquo Notre grand-pegravere est neacute raquo

Oest dans labicircme dans le monde infeacuterieur que TŒteuarinotre grandmiddot pegravere est neacute Il est agrave la fois U1 eacutel~mellt et un homme acircgeacute qui apregraves sa naissance est consaereacute dans sa fonction par la flegraveche que lui deacutecoche lenfant de leacutetoile qui est lni-mecircme en eacutetroite relation avec leacutetoile du matin Ohez les Huichols comme chez les Mexicains le dieu du feu est un dieu Yivant1 objet dun culte Il est repreacutesenteacute chez les premiers comme le feu ~entral qui bruumlle au milieu de la hutte symbolisant le monde au~dessus et sous la terre au moyen dune statue Il passegrave ponr entretenir des rapports avec le soleil qui nous eacuteclaire et avec celui de

lautre monde De mecircme le dien dn feu mexicain Xi1thtecntli est supposeacute habiter [tU laquo Nom bril de la tfrre raquo Par contre le feu chez les Ooras nest pas un dieu du clllte et ce nest que dans les chants et dans les mythes quil est dit que le feu central de la place des fecirctes qui symbolise eacutegashylegravement le monde a eacuteteacute allumeacute par le fen du soleil couchant et que penmiddot daut toute la nuit il se ment comme laigle qui na pas encore pris sa voleacutee (le ciel lnmineux) Il sentretient avec les vieillards chefs de la ceacutereacutemonie Au levee du soleil il seacutelegraveve et va reprendre sa place an ciel

Tatiacircpa) le monde sontc1lain des HnicLols dont les dieux et les homshymes sont issus lors de la creacuteation et auquel le dieu dn feu appartient rappelle beaucollp le 1ornoanchan) laquo la maison (le la provenance ) des Mexicains Oest aussi un lieu ougrave jadis les dieux sont neacutes et ont eacuteteacute reacuteunis et ougrave les hommes sont toujours revenus au coues de leurs migrashytions dans les temps tregraves anciens Il nest pas constamment situeacute dans le ciel llocturne dans la partie occidentale ougrave apparaicirct le nouveau croisshysant de la lune mais conserve aussi qllelques traits caracteacuteristiques des reacutegions du monde infeacuterieur (3)

(1) On entend pnr lagrave les eacutetoiles

(2) Ces trois espegraveces de bois sont celles que lOD emploie pOUT le feu

(3) Plmuss Mrxikani8Che Religion p age Y

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925

Page 14: CARACTERE DES MYTHES ET DES CHANTS llUICHOLS

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Les diffeacuterences entre la religion de ces deux tribl1s lm Huichols et les Coras sont dans 1C11r ensemugravele assez grandes en deacutepit ltje la eoIumlncic1Pllce de mainte ideacutee isoleacutee Elles doiveut avoir eacuteteacute unies par dps liens bismiddot toriques et en effet les deux langues sont tregraves proches lune de lautre On est en droit de se demander comment a pu se produire une eacutevolution si diffeacuterente dans la conception des dieux et sil sagit hien dune eacutevomiddot lution et non de pheacutenomegravenes pnrement historiques Les Mexicains occupent une situation intermeacutediaire soit sous le rapport de la mulshytipliciteacute des dieux soit sous celui de la situation preacutepondeacuterante de quelqnes diviniteacutes tribales Krickeberg (1) a trouveacute des analogies entre les Coras et les Totonaques de la cocircte de JAtlantiqlle en ce qui cOJrerue les trois diviniteacutes principales le (lieu dn soleil la deacuteesse Ile la terre et de la lune et leacutetoile du matin Peut-ecirctre dantres chaicircnons serontmiddotils deacutecouverts un jour

(1) KHICK1Œ1ŒG (W) Di~ Totollaken) iu Biis81e1middot-ATchimiddotv tome IX 1925