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    II. ISLAMOLOGIE, DROIT, PHILOSOPHIE, SCIENCES

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    Brw Jonathan, Te Canonization of al-Bukhr and Muslim. Te Formation and Function of the Sunn adth Canon. [Lahcen Daaif]

    B Jonathan,The Canonization of al-Bukhr and Muslim.The Formation and Function of the Sunnadth Canon.

    Leiden, Brill (Islamic History andCivilization, 69), 2007, + 431 p.ISBN : 978-9004158339

    Au travers du titre de louvrage, on croit deprime abord tre en prsence dune nime tudesur un vieux thme us, explor outrance, si bienquil nest plus possible dornavant desprer y faireacte dune quelconque originalit. En effet, les deuxillustres traditionnistes Ab Abd Allh al-Bur(m. 256/870) et Muslim b. al-a (m. 261/875),ainsi que leur recueil canonique de ad-s (aayn)ont fait lobjet de maintes thories contradictoiresdans de nombreuses tudes critiques, surtout enOccident, rarement sous cet angle en Orient mu-sulman. En outre, lors mme que le dbat sur lestapes historiques de canonisation du Coran batson plein, quoi de plus ordinaire que dtre dubitatif lide dune quelconque avance sur le mme plan,qui plus est applique lautre versant du corpusislamique, le ad, que lon sait bien videmmentplus touffu et controvers que le Coran. Mais lauteur,qui nest pas en reste ce propos, est trs conscient

    de lampleur de la tche laquelle il sattaque. Onest vite rassur de savoir que J. Brown est bien avertien ce qui concerne la question de la valeur de sonsujet, eu gard aux nombreuses recherches qui y sontconsacres bien avant lui. Sauf que lui, prcise-t-il, sepropose de porter son intrt non pas sur la questionde lauthenticit de ces deux grandes collections dead-s qui proccupent particulirement les cher-cheurs occidentaux, mais sur le rle du ad sunnitedans la civilisation islamique aprs la disparition de laquestion de lauthenticit (p. ). Dans la prface, il

    insiste sur le point de dpart de cette recherche quitrouve son origine dans cette question laquelle ilavait souvent pens des annes avant dentreprendrece travail : In the history of Sunni Islam, why are theSahhaynof al-Bukhr and Muslim so special, whatis their true, and how did they achieve this station? (p. ). Cest pourquoi, rappelle-t-il, son ouvrage napas pour objet de critiquer ni les deux auteurs, nileurs uvres. Ds lintroduction (p. 3-19), il fait untat des lieux quasi exhaustif des ouvrages et diversarticles, dont le sujet, plus ou moins directementli la thmatique des ad-s canoniques, est tou-

    tefois loin dembrasser la problmatique du Canondes aayntelle quil envisage de sy atteler danscet ouvrage. Il passe ensuite en revue les positionsdes uns et des autres parmi les orientalistes les plus

    minents, dont nous citrons titre indicatif I. Gold-ziher (Muslim StudiesII), M. Hodgson (The Ventureof Islam), G. E. von Grunebaum (Classical Islam: AHistory 600-1258), N. Calder (Studies in Early Muslim

    Jurisprudence),J. van Ess (Theologie und Gesellschaft),

    et relve labsence dintrt chez ces derniers concer-nant linvestigation quil sapprte en consquence mener sur le sujet prcis du phnomne de cano-nisation des aayn. Mme si elle nest pas tout fait fidle aux thories de Max Weber, lapproche seveut irrmdiablement weberienne, avoue J. Brown,puisquelle gravitera autour de plusieurs concepts clsproprement weberiens, tels que standard, conventionet autres, qui impliquent en fin de compte la ritua-lisation de lautorit charismatique du prophte. Etcest sous ce rapport danalyse que sa thse se veutinnovatrice par comparaison avec les multiplescontributions de ses prdcesseurs.

    Mais auparavant, donnons un descriptifsommaire de cette tude. Pour volumineux etdense quil soit, louvrage est divis seulement endeux parties de taille quasi gale, mais non titres.La premire, qui compte 208 pages, est subdiviseen cinq chapitres, dont le premier correspond lintroduction ; la seconde, totalisant 200 pages,est subdivise galement en cinq chapitres, maisde longueur ingale, le dernier tant la conclusiongnrale. Suivent deux appendices consacrs, lun

    (p. 379-383) aux rfrences principales dont sonttirs les renseignements relatifs la constitutiondu rseau complexe de transmission des aaynminutieusement rendu dans une excellente cartegraphique propose au quatrime chapitre (p. 103),lautre (p. 384-385) la question de la qualit desaayn.Mais il semblerait que la dlimitation dechacune des deux parties, au moins sur le plan th-matique, soit difficile tablir, tant on a limpressionque certains chapitres trouveraient tout autant leurplace dans la premire partie que dans la seconde.

    Nous en voulons pour exemple le dernier chapitre dela premire partie intitul Canon and community:al-Hkim al-Naysbr and the canonization of theSahhayn (p. 154-206), qui aurait mieux convenucomme premier chapitre de la seconde partie. Nan-moins, du point de vue de lauteur, cette division bi-partite obit un schma chronologique qui permetde dgager les deux grandes tapes dcisives dans laligne volutive des deux uvres. Outre les questionsthoriques du Canon exposes et critiques (p. 20-46) (1), la premire partie a pour matire dune part

    (1) Chapitre dans lequel, lexception dun article de LanneEmmanuel, La rgle de la vrit , inLex Orandi Lex Credendi,Rome, ditrice Anselmiana, 1980, p. 57-70, toutes les sourcessecondaires cites sont en langue anglaise, y compris les contri-butions de chercheurs arabes (ex. Aziz al-Azmeh).

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    la prsentation des deux auteurs et du contenu deleurs livres respectifs en mettant en exergue leursparticularits psychologiques et mthodologiques ;dautre part la mise en vidence des mcanismessocioculturels censs avoir favoris la canonisation

    progressive des Sahhayn. Dans la seconde partie,lauteur investit analytiquement certaines modali-ts techniques dont la canonisation semble avoirtir parti, tout en accordant une place de choix auxfigures traditionnistes et aux cercles denseignementtraditionnel qui taient davis contraire propos dustatut des aayn.Toutefois, il faut rappeler que,sur le plan chronologique, ces deux parties renvoientgalement aux deux principales priodes historiquessuffisamment mises en relief dans le processus decanonisation dont le point de sparation se situe auxenvirons de 450/1058.

    En consacrant un chapitre entier aux publica-tions de chercheurs, anglo-saxons dans leur majorit,sur le phnomne du Canon, J. Brown nous fait savoirque, ds le dpart, il y rgne le langage commun destudes hermneutiques articul aux politiques delinterprtation , malgr les diverses thories actuel-lement en confrontation dans le domaine. Il observeque, depuis les tudes pionnires de Frank Kermodeet Stanley Fish sur la Bible et la littrature ainsi que surle droit, le concept Canon est la rsultante dunrapport particulier entre culture et pouvoir. Depuis

    lors, ce champ unifi dinvestigations, accdant lgede la maturit, donne lieu des rflexions nouvelleset suscite des dbats autour de la notion de Canon et sa valeur, crant un niveau de recherche o affleu-reront des thses soutenues dans louvrage de JanGorak (2). Lune des contributions anciennes dordreapologtique religieux remonte la fin du esicle.On la doit Allan Manzies qui sefforait, dans sonarticle, de prsenter le Nouveau Testament comme le Canon par excellence. Pour quil y ait canonisation,crit ce dernier, deux conditions doivent tre runies :

    un livre qui reprsente pour la nation la norme de sapropre religion ; une autorit avec suffisamment depouvoir pour prescrire la nation que le livre doittre peru comme une norme. Thorie sduisante,ajoute juste titre J. Brown, parce quelle supposedj, comme premier lment, lexistence duneautorit religieuse jouissant dun degr de pouvoirncessaire ltablissement et au renforcement du Canon aux cts des deux autres principaux l-ments, savoir la nation et la norme. Cette structureternaire marquera fortement les tudes ultrieureset participera lmergence de nouvelles interroga-

    tions relatives aux formes potentielles de lautorit travers les diverses communauts. Mais cest vi-demment aux spcialistes allemands que revientle rang de pionniers dans les tudes de lAncien et

    Nouveau Testaments, ralises entre fin du eetdbut du esicle. Au terme de ce parcours quenous avons abrg, lauteur voquera ltude sur laBible hbraque, par Moshe Halbertal (3), quil tientpour le nouveau standard dans les investigations

    thoriques sur le Canon, une nouvelle tape dans lestudes du phnomne du Canon. Contrairement ses prdcesseurs, Halbertal donne le coup denvoidune structure pratique rvolutionnaire, renchritJ. Brown pour tudier la relation entre processusde canonisation, autorit et identit, en mettant contribution plusieurs disciplines allant de la juris-prudence la philosophie du langage. Il a galementforg de nouveaux concepts opratoires, tel celui detexte formateur auquel une communaut donnese doit de rfrer en vue damliorer son expressionet dvelopper son interprtation propre. Le textedevient de suite, par son examen, source dautoritet de prestige lintrieur de la communaut, sontude elle-mme sassimile un acte prpondrantde dvotion, eu gard lexprience religieuse dontil est lexpression, et cest finalement lui que londoit la fixit des frontires de la communaut qui laadopt. Halbertal a us judicieusement de la notionde charit, qui sest avre trs utile pour cerner detrs prs le principe de canonicit de sorte lextirperdu flottement conceptuel qui le caractrisait dansles tudes antrieures (p. 30). Do cette conclusion

    frappante que le degr de canonicit dun textecorrespond dune certaine manire la somme decharits quil reoit dans ses interprtations (p. 44).Cest pour ces raisons, qui tmoignent de loriginalitde lapproche de Halbertal en matire danalyse duCanon en tant que phnomne historique et socio-culturel, que J. Brown accorde une large place sontude, qui lui a inspir le septime chapitre de sonouvrage, The Principle of Charity and the Creationof Canonical Culture (p. 262-299). La notion de cha-rit, rappelons-le, na t que rcemment applique

    aux tudes sur la canonicit. Ce fut lorigine un ter-me de la philosophie analytique, qui parviendra trsvite simposer comme concept dusage significatifdans les tudes du langage (p. 43). Elle supposegrosso modo que le peuple est enclin gnralement interprter les signes sous la meilleure lumirepossible, une espce de rapport charitable, par lequelsont minimises en consquence les contradictionsinternes du texte de base, comme sont concilies lesnotions de vrits que celui-ci tablit avec celles dumonde extrieur. En ce sens, N. L. Wilson confirmera

    (2) L. Emmanuel, e Making of the Modern Canon, London,Athon, 1991.(3) Id., People of the Book : Canon, Meaning and Authority,Cambridge, Harvard University Press, 1997.

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    dans son article cette tendance chez lindividu, dansun champ de donnes et de propositions, porterson choix sur la partie qui offre le plus grand nombrede dclarations vraies (4). Il faut savoir gr lauteurdavoir consacr ce deuxime chapitre lexposition

    et lnumration des points forts des plus intres-santes thories qui ont apport de nouvelles lumiressur le phnomne du Canon , ce qui constitue unprlude extrmement important dun point de vuemthodologique, bien que les rfrences anglaisessy taillent la part du lion.

    Ce nest quau troisime chapitre que lon estdans le vif du sujet, cest--dire sur le terrain delhistoire du dveloppement des sciences du ad.En effet, les deux imams al-Bur et Muslim sontprsents et tudis respectivement dans leur in-dividualit historique et psychologique, en relationavec leur milieu et les figures politiques et savantesde leur poque. Chacune des deux notices senracinedans des sources les plus recules que lon puissetrouver lheure actuelle. Nous apprenons quaudpart, quelques dcennies aprs la mort des deuximams, les aaynmarquaient une bifurcation dansla littrature duad, dans la mesure o ils taientconsidrs comme une dviation de la voie du tradi-tionnisme par certains traditionnistes bien en vue cette poque. Ainsi, Ab Zura al-Rz (m. 264/878),lun des illustres matres frquents par Muslim qui

    reprsentait lui seul une institution de ad Rayy,et son collgue Ibn Wr al-Rz (m. 270/884) incar-naient lopposition de lorthodoxie contre adeMuslim. Leur raction tait vhmente lide dunouvrage authentique de ad, traduisant un grandmalaise face une telle entreprise demble peruecomme un acte dgosme qui risquait fort de saperles fondements de la transmission lgale. Ce fut unpremier choc pour lancienne cole qui, en vertu desvaleurs asctiques qui fondaient la morale tradition-niste de cette poque, dniait toute lgitimit la

    qute de lauthenticit pure en matire de tradition.Et pour mieux montrer quel point les deux imamsntaient que deux savants traditionnistes ordinairesparmi tant dautres, J. Brown nous invite examinerun florilge des tmoignages de leurs contemporainspour juger de leur valeur alors par comparaison avecles grands traditionnistes de leur poque. On a ainsides propos remontant lun des compagnons desdeux imams, dont il ne viendrait pas lesprit de citerlun deux comme digne successeur de ses matres.Un autre collgue de Muslim, ammd b. Salma(m. 286/899) est un exemple significatif en ce sens.

    On lui prte davoir dclar ne reconnatre dgal, enmatire de ifz al-ad, Yahy al-uhl (m. 258/872)et Isq b. Rawayh (m. 238/853) quAb tim al-Rz (m. 277/889-890). De mme, dans le tmoignage

    de leur contemporain Ab Kurz (m. 281-284/894-988), il est question de quatre traditionnistes di-gnes de leurs matres, dont sont absents nos deuximams. Toutefois, ils ne sont pas ignors aux yeuxdautres traditionnistes qui les identifiaient aux plus

    marquantes figures des sciences du ad, au mmetitre quIbn anbal (m. 241/855) et Ibn al-Madn(m. 234/849). La dimension hagiographique est mise contribution, travers loniromancie laquellerecourraient les disciples dvous pour rehausser durang leurs matres dfunts. Ab Abd Allh al-Firabr(m. 320/932), disciple dal-Bur, aurait vu en rvecelui-ci marcher derrire le Prophte en suivant pas pas ses traces (5). Il convient de nous attarder unmoment sur lincontournable dispute entre al-Buret al-uhl relate dans toutes les collections biogra-phiques. Elle est retrace non seulement en tant quedivergence thologique propos de la prononcia-tion cre du Coran (alq laf al-Qurn), mais aussicomme animosit ressentie par al-uhl la suite dusuccs dal-Bur dans son propre cercle dinfluence.Mme si ce dernier sexplique dans son alq afl al-

    ibd (la cration des actes humains) (6), il ne faut passe hter de linscrire au nombre des traditionnistes tendance rationaliste, par opposition aux ber-Sunnis (ultra-conservateurs), dans la mesure o il yconfesse son allgeance aux ahl al-ad.La solutionsubtile dune catgorie mdiane de semi-rationalis-

    tes entre les ultra-conservateurs et leurs adversairesrationalistes, avance par Ch. Melchert, qui permet-trait de ranger al-Bur aux cts de deux autresillustres fiites, al-abar (m. 310/923) et al-Muzan(m. 264/878) tend en fin de compte rapprocher unpeu plus al-Bur du camp des rationalistes. En outre,contrairement al-abar dont la dfense de la thsedu Coran incr consiste dans des dveloppementssophistiqus largement tributaires de la logiqueformelle, al-Bur, lui, ne recourt jamais dans aucunde ses crits qui nous sont parvenus pour fonder son

    argumentation, ni aux termes techniques de la logi-que islamique, ni au jargon philosophique. Ds lors, laplace qui lui convient devrait tre fixe plutt du ctdIbn anbal que de celui dal-abar (p. 79). cettepertinente comparaison entre les deux hommes, lonregrette que lauteur ait compltement ignor ltude

    (4) Id., Substance without Substrata , in Review of Metaphysics,12, n 4, 1959, p. 521-239.(5) Propos rapports par le disciple dal-Firabr, Ibn Ad Ab

    Amad Abd Allh al-urn (m. 365/975-976) dans sa collectionconsacre la critique des garants faibles, al-Kmil f uaf al-ril, I-VII, Beyrouth, Dr al-Fikr, 1405/1985, I, p. 140.(6) Ibid., d. Abd al-Rahmn Umayra, Riyadh, Dr al-Marifal-Sudiyya, 1398/1978.

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    sur lexgse coranique dal-abar (7), par Cl. Gilliot non cite dans la bibliographie qui lui aurait tdun grand intrt ce stade danalyse. On saperoitfinalement que, de leur vivant et plus dun sicle aprsleur disparition, les deux imams taient considrs

    comme de simples experts en adparmi dautres,que lon mettait au mme rang que leurs matres.Lauteur apparat ce niveau de son travail dunerudition matrise, tant par laisance dont il faitpreuve dans la manipulation des sources que par lesdtails sur lesquels il sattarde bon droit dans desnotes touffues de bas de page. Il revient sur la diff-rence majeure de mthode entre les deux imams, enmettant laccent sur la rencontre effective des garantsqui constitue la rgle principale de lauthenticit duad chez al-Bur et son matre Ibn al-Madn, rgleouvertement conteste par Muslim, qui soutenaitquentre deux transmetteurs contemporains, la ren-contre ne doit pas dtre rige en rgle dauthenticit.En effet, dans son introduction (muqaddima) sona, il crit que, lorsque lisnd est formul enanana, cest--dire avec la particule an (de),il suffit que les deux transmetteurs soient contempo-rains et quil ny ait videmment aucune indicationcontraire quant limpossibilit de leur rencontre.Il appuie sa position sur les avis des grands matrestraditionnistes comme Mlik b. Anas (m. 179/795) etuba b. al-a (m. 160/776), pour qui une telle

    preuve ntait pas exige, sauf dans le cas prcis oun rapporteur tait souponn de falsification dansles isnd-s(tadls).Cette divergence de mthode adonn lieu un cart entre les deux imams en termesdu nombre de transmetteurs : 420 chez al-Bur sontabsents chez Muslim, tandis que 620 chez celui-cisont exclus chez celui-l. Curieusement cela na pasempch le nombre de traditions communes auxdeux uvres datteindre 2 326, et celui de rapporteursde totaliser 2 400 environ. Il est une autre distinction considrer entre les deux imams : alors que le primat

    dufiqh est au cur de la mthodologie dal-Burdans lordonnancement de son recueil, la tendancemthodologique chez Muslim favorise les traditionsprophtiques au dtriment des propos des Compa-gnons, ne tenant que rarement compte des thmes

    juridiques proprement dits et en faisant fi des rcitset commentaires personnels sans chane de garants.Il en ressort la facilit daccs que lon reconnat aua de Muslim.

    Tout au long du esicle de lhgire, le besoindun consensus communautaire autour des ad-sse fait sentir partout dans les diffrents milieux

    thologiques et juridiques, tout comme au sein despolmiques entre sunnites et ites. Et jusqu la moi-ti du sicle suivant, se constituera progressivementun rseau dense et complexe denseignement et de

    transmission de ad-s par lequel sera pris en chargeltude des deux aayn. Le sectionnement go-graphique, rigoureusement tabli par lauteur pournous rendre compte de ce foisonnement intellectuel,rvle que les centres les plus fertiles de ce rseau

    taient situs Naysbr et sa rgion pendant leesicle (p. 124-128), puis Badd principalementpendant la premire moiti du esicle, mais aussi urn (p.128-130), Isfahn et en Asie centrale(p.134-135). Durant cette mme priode, dautresrecueils de traditions verront le jour dont certainsaspireront, linstar des deux imams, lauthenticit,comme lillustre le titre de a pour le recueil dIbnHibbn (m. 354/965). Mais cest aussi pendant celaps de temps que les deux aayn accderont austatut de textes formateurs, en ce quils donnerontnaissance un nouveau genre dans la littrature duad : mustara. La discipline de listir, par lemoyen des deux procds distincts qui la constituent, savoir l extraction et le rattrapage , a pourseule fin de chercher inclure des traditions, enconformit avec les rgles observes dans le recueildead-ssur lequel est pratiqu listir. traverscelui-ci, la qute dun isnd vivant, plus prcismentun isnd l (suprieur), retrouve un nouveausouffle qui, ce faisant, va prsider linstauration delautorit des deux recueils authentiques. Lauteura fait tat des plus importants mustarat, dont

    ceux dAb Awna (m. 312/924-925) et dal-Isbahn(m. 430/1038), suraMuslim, et celui dal-Isml(m. 371/981-982) sur aal-Bur, pour marquerle grand intrt que lon prtait alors cette nou-velle production en matire de ad. Paralllement listir qui a fait flores Naysbr, se dveloppeun genre similaire, appel atrf (les bouts des tradi-tions),une sorte dindex des ad-s qui a pour objetde fournir lensemble des matns des recueils de basedune manire ramasse, en ne citant quun boutsignificatifde chaque tradition. Quoique de porte li-

    mite par rapport au premier, le genreatrf nen restepas moins une activit intellectuelle dterminantedans le processus de canonisation des deux uvres.La contribution en ce sens est avantage tout autantpar les uvres critiques sur les aayn, celle qui ytraque les transmissions dfectueuses (ilal) et celledite ilzmt(8), qui sattachent transcrire les tradi-tions qui auraient d tre incluses dans les aayn.

    (7) Ibid., Exgse, langue et thologie en Islam. Lexgse coraniquede abar, J. Vrin (coll. tudes musulmanes, XXXII, Paris, 1990,

    notamment IV. Lessence de Coran , p. 254-259, et V. Les acteshumains et les Qadarites , p. 259-276.(8) Dont le plus souvent cit est louvrage dal-Draqutn(m. 385/995), Kitb al-ilzmt wa l-tatabbu, d. Muqbil b. Hdal-Wdi, Mdine, al-Maktaba al-Salafiyya, 1978.

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    Ainsi que tient le souligner J. Brown en intitulant cequatrime chapitre Priode du processus de cano-nisation intense , cest lors de cet espace historiqueque sest rellement constitu le noyau dur doulmastraditionnistes qui se sont saisi des aayncomme

    dun texte formateur pour simpliquer dans lhritageprophtique. la diffrence des mustarat qui ont vu le

    jour trs tt, approximativement vers lan 270/880,les mustarakt, y compris dans leur forme dilzmt,ne se dvelopperont quau cours du sicle suivant. Leplus clbre ouvrage en matire distirkreste sansconteste celui dal-kim al-Naysbr (m. 405/1014),qui stait investi dans cette entreprise dans un butapologtique bien prcis. En effet, il visait lextensiondes rgles dauthenticit en uvre dans les aaynpour les faire partager lensemble des corps tho-logiques et juridiques de la sphre sunnite. Grce son mustarak al al-aayn(9)et lensemble deses uvres qui traitent de la tradition, la suite deson matre al-Draqutn (m. 385/995), on apprendque sa vision des aayn est largement distinctede celle des auteurs des Mustarat. De textes debase soumis ltude critique chez les premiers, ilsdeviennent pour al-kim le point culminant dessciences du ad.Ainsi, bien quil ne les tienne paspour infaillibles, tout isnd absent des aayn,crit-il, doit faire lobjet de lexamen des experts. Le

    consensus (im) de la umma, notion originaire desfondements du droit, se voit dornavant introduitdans la sphre du ad, la faveur dal-kim qui,pour la premire fois semble-t-il, en fait usage parrfrence aux conditions dauthenticit tablies parles deux imams. Dans les citations qui subsistent deson monumental ouvrage perdu, Tr Naysbr,ainsi que le rapporte al-ahab (m. 728/1328) (10), ilrecourt cette notion dimpour tmoigner dela disqualification unanime dun garant de ad,au lieu de recourir aux termes techniques dusage

    dans son milieu tels que mahr,mustafd, etc. Ceprojet communautaire sexplique galement parles critiques mutazilites des rgles de lauthenticitauxquelles tait confront al-kim dans sa rgionde ursn et Naysbr par lintermdiaire descrits dAb al-Qsim al-Bal (m. 319/931) et de soncontemporain, et non des moindres, al-Q Abdal-abbr (m. 303/915-916) qui, lors de sancesde transmission des traditions (aml), avait rap-port une quantit considrable de ad-s via sespropres canaux (isnd-s). Ils avaient pour rgle enmatire de droit (fiqh) et de ses fondements (ul)

    de ne tenir compte que des ad-s dau moins deuxrapporteurs, rcusant les ad-s al-aad. Ils admet-taient lauthenticit des aayn lexclusion desautres collections. Ctait l la menace qui inquitait

    al-kim et le motivait la fois au cours de toute sacarrire de traditionniste. Cest lui, prcise lauteur,que revient le mrite davoir fait des aayn,tantenfiqh quen ul,le tronc commun dauthenticit lusage de toutes les coles juridiques. Ltendue

    de son rle est perceptible dans les positions deshautes figures fiites qui avaliseront, comme fiableset certaines, les mthodes dexamen pratiques parles deux imams, ainsi que par son collgue Ab Isqal-Isfaryn (m. 418/1027), son disciple Ab Naral-Wil (m. 444/1052) et le grand imam al-aramayn

    Abd al-Mlik al-uwayn (m. 478/1085). Lauteur araison de consacrer un sous-chapitre pour traiter dece nouveau fond commun que reprsente dsormaislauthenticit des aayn (p.194-204) admise entreles grands blocs actifs du sunnisme : les anbalites/ultra-conservateurs et lcole fiite/aarite.

    Le esicle de lhgire sera celui au cours duquelles deux aaynpasseront progressivement duneautorit thorique acquise au sein du corps savantde la transmission (riwya), au statut de textesdautorit lchelle communautaire. Le tar, ence quil constitue le procd dans lequel les deuxaayn trouvent leur plus saillante application, estappel avoir un rle dterminant dans ce nouveauprocessus lissue duquel ils seront identifis, danspresque tous les domaines du savoir religieux par-delle cadre restreint du ad, comme seules rfrences

    communes dauthenticit. La question de lauthenti-cit des ad-s ne stait effectivement impose auxjuristes et thologiens qu la suite de positions di-vergentes, voire contradictoires, ncessitant lexamendes preuves scripturaires qui les fondaient. Parmi lesnombreux exemples cits, celui du thologien fiiteAb Isq al-rz (m. 476/1083) illustre cet veil lancessit de passer au crible les traditions sur lesquel-les reposaient les arguments des adversaires. Celui-cinexclut pas lventualit, pour un savant fiite, danscertains cas spcifiques, dexiger de son contradicteur

    de fournir les chanes de transmission pour les ad-squil aurait avancs comme arguments scripturaires(p. 210). En revanche, poursuit-il, si un adversaire lesoumettait la mme preuve, il suffirait alors aufiite de le renvoyer au kitb al-mutamad, cest--dire aux livres des sunan, et plus clairement auxaayn. On retrouve chez Ab mid al-azl(m. 505/1111) une dclaration analogue dans laquelleil faisait tat de valeur de preuve incontournableque constituent les aayn sans toutefois prou-

    (9) Ibid., d. Ysuf Abd al-Rahmn al-Maral, I-V, Le Caire, 1997,rimp. Beyrouth, Dr al-Marifa.(10) Al-ahab, Mzn al-itidl f naqd al-ril, I-IV, d. AlMuammad al-Baw, Beyrouth, Dr Ihy al-Kutub al-Arabiyya,s.d., II, p. 503.

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    ver le besoin de sy attarder. Le jurisconsulte, crit-il,est dans lobligation de se conformer aux ad-squil trouve dans ces deux uvres, au risque, ensen dtournant, de briser sciemment le consensusde la communaut (11). propos de cette position

    dal-azl, il faut garder lesprit que sa connaissancetrs lacunaire en la matire lui avait valu de trs v-hments reproches de la part des traditionnistes, lasuite de la publication de son Ihy. Il en sera questiondailleurs plus loin (p.354-356). Peut-tre cet tat defait ntait-il pas tranger son opinion en faveur desaayn et quil y visait une rputation dalli auprsdes parangons des coles du adde plus en plusinfluents. Mais il semble que lauteur prfre ne pastrop simpliquer dans ces considrations approxima-tives. Le contemporain dal-azl, le mystique Abal-Fal al-Maqdis (m. 507/1113) dans son trait desoufisme, tait du mme avis sur les aayn quilconsidrait les seules estampilles de lauthenticitde lavis commun de toute la communaut. Cestpour cette raison quil ne tiendra compte dans sontrait que des ad-s des aayn, mais aussi deceux qui satisfont aux rgles dauthenticit exigespar les deux imams (arihim) sans quils y figurent, lexclusion de tout adtrange (arb) (12). Preuveque le tar a aussi bien particip au renforcementde lautorit intrinsque de ces deux uvres qu leurextension au-del des cercles du adproprement

    dits. Tout comme avec les personnages fiites citsplus haut, avec les reprsentants des autres colessunnites aussi suivant la contribution juridiqueet thologique de chaque cole et en fonction deleurs propres rapports aux recueils canoniques encirculation cette poque , les deux livres majeursallaient devenir une rfrence dautorit en matirede ad. Le particularisme mlikite dans cette entre-prise est manifeste, dune part travers la productiondAb al-Wald al-B (m. 474/1081) dont le soucimajeur, en se rfrant aux aayn, tait de fonder

    les principes de la thorie lgale de limam Mlik(p. 225-226) et subsquemment dasseoir lautoritdu Mawatta comme texte formateur (13); dautrepart, au travers des efforts de tar effectus parson disciple Ibn Abd al-Barr (m. 463/1070) pour lesmmes raisons (14). En cela, ils diffrent dun minentthoricien du droit anbalite Ab Yal Ibn al-Farr(m. 458/1066), qui sappliquait avec acharnement critiquer les thses mutazilites autant que lesdoctrines aarites sur les attributs divins, dans sonfameux ouvrage Kitb al-mutamad(15)en recourantmassivement aux aayn en tant que rfrences

    authentiques. Son fils, Ibn Ab Yal (m. 525/1131),poursuivra le mme but, plus spcialement contreles aarites au moyen du mme procd. Dans cetteconfiguration volutive des rapports des coles aux

    deux uvres, on saperoit que seuls les anafitesrestaient encore la trane. Bien quils aient jouun rle prpondrant dans la transmission desaayn, ainsi que lauteur en a fait tat dans lequatrime chapitre, ils ne les ont adopts comme

    talon dauthenticit que tardivement, compter duesicle de lhgire. Entreprise rticente qui plus est,car, en dpit du retard accumul, elle nen tait pasmoins ttonnante ses dbuts : ainsi avec Al al-Dnal-Bur (m. 730/1329-30) (16)dans son commentairesur le trait de thorie lgale de son prdcesseuranafite Ab al-asan al-Bazdaw (m. 482/1089)(p. 226-227) (17). Reste savoir pourquoi trois siclesde retard par rapport aux fiites. Pour nous clairersur ce problme, J. Brown rappelle le point focal duanafisme, dont il tirait sa singularit caractristique, savoir quil reprsentait dans sa majeure partielcole des partisans de la raison contre laquelle setenaient en constante opposition les tenants de lathse inverse, les dfenseurs de la transmission. Parailleurs, le mpris des anafites pour les gens du adavait t suscit par leur condamnation formellepar al-Bur et al-Hkim al-Naysbr qui leur re-prochaient de stre dtourns de la vraie sunnaduProphte au profit de leur propre ray. Et pour nenciter quun seul exemple, lauteur mentionne MutMakl al-Nasaf (m. 318/930) qui aurait dclar queles gens du ad ntaient que de stupides littralistes

    (11) Al-rz, Kitb al-mana f al-adal, d. Abd al-MadTurk, Beyrouth, Dr al-arb al-Islm, 1408/1988, p. 55 ; al-Razl,al-Mankl min talqt al-ul, d. Muammad asan Ht, s.d.,p. 269.(12) Id.,afwat al-taawwuf, d. Rdah al-Muqaddam Adrah,Beyrouth, Dr al-Muntaab al-Arab, 1995, p.133.(13) Surtout dans son ouvrage al-Muntaq ar al-Muwatta,I-VII, Le Caire, Dr al-Fikr al-Arab, [1982], mais galement dansson Ikm al-ful f akm al-ul,d. Mu. Abdel-MadTurk, Beyrouth, Dr al-arb al-Islm, 1407/1986, o il dfendaitagressivement les positions de Mlik en matire de thorie lgalecontre les critiques des anafites et des ultra-sunnites.

    (14) titre dexemple, dans son monumental ouvrage Kitbal-Tamhd li-m f al-Muwatta min al-man wa l-asnd, d.Mustaf b. Amad al-Alaw et Muammad Abd al-Kabr al-Bakr, I-XXVI, 2ed., Rabat, Wizrat Umm al-Awqf wa-l-unal-Islmiyya, 1402/1982 [1red. 1387/1967].(15) Id.,K. al-mutamad f ul al-Dn, d. Wad Zaydn addd,Beyrouth, Dr al-Mariq, 1974 ; mais aussi dans son al-Udda ful al-fiqh, I-III, d. Amad b. Al Sr al-Mubrak, Beyrouth,Muassasat al-Risla, 1400/1980.(16) Il sagit de son Kafal-asrr an ul Fakr al-Islm al-Bazdaw,I-II, Beyrouth, Dr al-Kitb al-Arab, 1394/1974.(17) Il sagit dAb Ur Al b. Muammad et de son trait inti-Il sagit dAb Ur Al b. Muammad et de son trait inti-tul Kanz al-wul il marifat al-ul, quil ne faut surtout pas

    confondre avec son frre cadet al-Bazdaw Ab Yusr Muammadb. Muammad (m. 493/1100), auteur galement dun traitdul, Kitb fhi marifat al-hua al-ariyya, d. M. Bernand &. Chaumont, Le Caire, IFAO, 2003, dans lequel en effet il nest faitaucune distinction caractre canonique des deux aayn.

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    tout juste bon prorer les propos du Prophte sanscomprendre son vritable message. Ainsi, loriginedu retard anafite, on trouve des rapports tendus quimettaient aux prises les imams traditionnistes et lessavants anafites et allaient se perptuer longtemps

    travers les gnrations ultrieures jusquau e

    siclede lhgire.Dans le septime chapitre lauteur revient sur le

    principe de charit, dont il a t question au dpart,pour larticuler cette fois au processus de lmer-gence de la culture canonique en ce qui concerne lesaayn. Les tapes de ce processus, dans la mesureo elles sont rigoureusement dcoupes par lauteur,se rvlent dautant plus pertinentes que chacunedelles se prsente comme un espace historiquedans lequel sest ralis un segment constitutif dece phnomne. Les dbuts de la culture canoniquesurvenaient ainsi Badd, ds la fin du esicle /dbut du esicle, pour arriver son terme vers460/1070. Et lon passe ainsi dune premire tapedtude des aayn, due aux matres illustres ensciences du ad, ltape suivante, celle de leursdisciples dont lapproche ntait dj plus la mme.Il en ressort un passage retraant cette relation queHalbertal instaure entre le niveau de canonicitauquel succde celui o lesprit de charit se mle ltude du texte canonique. Les premiers, telsquIbn Ammr al-ahd (m. 317/929-930), Ab Bakr

    al-Ismli (m. 371/981-982), dans sa fibre rationaliste,et al-Draqutn (18), malgr le grand intrt quilsavaient manifest pour les deux uvres, nprou-vaient le moindre scrupule les critiquer sil staitavr que leurs auteurs avaient pch contre les rglesde transmission quils staient fixes eux-mmes. Or,leurs disciples, quant eux, allaient ouvertementprendre parti pour les auteurs desaayn, commelillustre parfaitement le cas dAb Masd al-Dimaq(m. 401/1010-1011), qui composa spcialement untrait (19)pour dfendre Muslim contre les critiques

    non fondes de son matre al-Draqutn. Mais lors-que les critiques de ce dernier taient solidementjustifies, Ab Masd ne se faisait pas faute de laverMuslim de tous les soupons pour les mettre sur lecompte de ses transmetteurs, allant parfois jusqudclarer, sa dcharge, que telle ou telle versionde tel ou tel ad ntait pas alors sa disposition(p. 264-265). Le contraste est sans doute saisissantentre limpartialit de la critique des matres et lapropension au pangyrique, sous leffet de lespritcharitable qui caractrise la critique des disciples. Leplus frappant ce sujet est quil rgne dornavant

    une atmosphre o il nest plus bon de relever lesimperfections des deux auteurs sans mnager aupralable les susceptibilits des lites religieuses. Entout cas, la prudence et la discrtion en tant que

    marques dune dfensive prventive sont de rigueur.Cest ce que laisse supposer lusage quen a fait al-ab al-Badd (m. 463/1071) dans sa critique dudictionnaire biographique dal-Bur(20). Contraire-ment aux matres du sicle dernier qui ne ressentaient

    pas le besoin de se justifier systmatiquement deleurs critiques, al-Badd semble contraint de le fairepour viter dtre la cible de lire des traditionnistes la tte desquels se tenaient les anbalites. Les noticesbiographiques des deux imams, dans Tr Badd,sinscrivent avec autant defficacit que ltude desaayndans cette perspective de canonisationculturelle (p. 267-275), puisquelles seront la basede lensemble des notices ultrieures. Mais danslensemble des aspects de la culture canoniquedes aayn, cest Ibn al-alh (m. 643/1245) etal-Nawaw (m. 676/1277) que reviennent les rlesles plus dterminants : rfuter les critiques, notam-ment celle dal-Draqutn, valuer lauthenticit desaayn et sy rfrer mme pour dlivrer des avisjuridiques (fatw)(p. 246-247).

    Cette culture canonique dominante se verra, dslpoque dIbn al-alh qui en est lartisan principal,conteste et subira la raction toute prvisible desadversaires parmi les juristes et savants traditionnis-tes de tous bords. Si dun ct il y a des partisans dela thorie de la charit pour les aayn dfenduepar Ibn al-alh et al-Nawaw, tels qual-ahab

    (m. 748/1348) et Ibn Haar (m. 852/1448-1449), delautre se tiennent les antagonistes de cette tho-rie parmi les hautes figures de la jurisprudence etdu traditionnisme, tels que le fiite Ibn Daqqal-d (m. 702/1303) et le anafite Ibn Ab al-Waf(m. 775/1374), pour lesquelles une telle assertion estdpourvue du moindre fondement lgal. Au reste,il ne sagit pas l du dbut dune remise en causedu statut canonique des uvres majeures du ad(al-kutub al-sitta). En effet, environ un sicle aprsles orientations dIbn al-alh et al-Nawaw, le rejet

    de la culture canonique des aayn reprend deplus belle, mettant bullition les tensions dantanentre les desseins idologiques de linstitution qui atransform les aayn en rfrence dautorit et le

    (18) Respectivement, Ilal al-ad f kitb al-a li-Muslimb. al-Ha, d. Al b. al-asan al-alab, Riyad, Dr al-Hira,1412/1991 ; al-Mustara al a al-Bur (cf. sur al-Isml,p. 109-111) ; Kitb al-ilzmt wa l-tatabbu, d. Muqbil b. Hdal-Wdi, Mdine, al-Maktaba al-Salafiyya, 1978 ; ikr aqwmaraahum al-Bur wa Muslim b. al-Ha f kitbayhimwa araahum Ab Abd al-Ramn Amad b. uayb al-Nasf Kitb al-uaf, Ms. Ahmet III 624, Istanbul, Bibliothque de

    Topkap Saray, . 253a-4b.(19) Id., Kitb al-awiba,d. Ibrhm b. Al Kulayb, Riyad, Dral-Warrq, 1419/1998.(20) Al-Badd, Kitb mi awhm al-am wa- l-tafrq, I-II,Haydarbd, Dirat al-Marif, 1378/1959.

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    parti iconoclaste constamment attach lexamencritique des matn-s dits uni-individuels (ad al-aad) (p. 301). Cette tension atteindra son paroxysmeavec lmergence de la rforme salafite au esiclede lhgire. Aussi, ayant prt une attention particu-

    lire ltude critique des ad-s au dtriment destraditionnelles interprtations dcoles (mahib)etfavoris lesprit critique au point de remettre en causele principe dim sur lequel repose la canonisationdes deux Livres,ce courant assaille-t-il les fondationsde ldifice du ad en tant que Canon. Les deuxfigures salafistes les plus actives sur lesquellessest attard lauteur juste titre, grands renfortsde citations et de rfrences comprenant les lienset sites Internet sont celle du Ymnite al-Amral-ann (m. 1768) (p. 314-318) et, surtout, celle denotre contemporain Nir al-Dn al-Albn (m. 1999)(p. 321-331). La frocit de la critique des partisansdes mahib lgardde ce dernier en dit long aussibien sur le rle du Canon, comme symbole puissantde la tradition institutionnelle de lIslam classique,que sur sa fonction efficiente au sein de la culturereligieuse savante. Depuis la dclaration dal-Badden vertu de laquelle, hormis le Coran, nul livre nesaurait se soustraire la critique, jusqu sa reprisepour ainsi dire par al-Albn, mille ans plus tard, forceest de constater que leffort de lcole iconoclastedu ad, loin de flchir, sest au contraire poursuivi

    continuellement aux cts de celle de la culture ca-nonique des aayn durant son expansion. cettediffrence prs, qu lpoque moderne elle va susciterpour la premire fois de vives condamnations, tellescelles diriges contre al-ann par lIndien Shh WalAllh al-ihlaw (m. 1762), investi dans la qute delunit perdue de la umma,et celles diriges contreal-Albn, au esicle, par plusieurs dtracteurs dontle soufi marocain Abd Allh b. al-iddq al-umr(m. 1993), Mull ir all (m. 1994) (21), le anafiteAb Rudda Abd al-Fatth (d. 1997) et Mamd

    Sad Mamd

    (22)

    . Mais la dtermination dal-Albnsavre inbranlable, comme on peut aisment senapercevoir dans ce passage o, lgitimant du coupson orientation par affiliation al-fi (m. 204/820),il dclare : [] a scholar must admit an intellectualtruth expressed by Imm al-Shfi in a narration attri-buted to him: God has forbidden that any except HisBook attain completion (ab Allah (sic)an yatimmaill kitbuhu)(23). Bien plus, dans un autre passage,il traite dignorants ceux de ses contradicteurs qui,par chauvinisme, professent aveuglment que len-semble des matn-s contenus dans les aayn est

    authentique (24).Dans le neuvime et pnultime chapitre, intitul

    Canon and Synecdoche: The Sahhaynin Narrativeand Ritual , J. Brown sefforce de mettre en lumire

    un tout autre aspect en corrlation directe avec lestatut de Canon dont jouissent les deux recueils. Ilfait appel la figure de rhtorique de la synecdoquequil distingue, dune touche nuance de sens, de lamtonymie en saidant des dveloppements raliss

    par Hayden White(25)

    . Bien que les deux figures, eneffet, renvoient des procds de langage analogues premire vue, la fonction de la synecdoque consistedans lessentialisation du rsultat de la mtonymieapplique aux deux lments de comparaison. Ainsi,siprendre la partie pour le touten tant que figuremtonymique rfre un rapport de reprsentationentre les deux lments, sur le plan de la synecdoquelaccent est plutt mis sur le premier lment, lieude la cristallisation en quelque sorte du caractredu second, do ce concept dessentialisation. Il y alieu de faire le lien entre la fonction qualitative de lasynecdoque et les consquences de la canonisationdes deux recueils : la vnration dmesure que lemonde sunnite tmoignait pour eux, comme fondsauthentique du legs prophtique, se muait en qualitparfaitement approprie pour les doter de cette qua-lit dessentiel. Ds la fin du e/esicle, on assiste ldition dune plthore de livres sur les mrites dela lecture globale (katm) des aaynet dautresrecueils du ad. Au reste, lusage rituel que lon faitdes deux recueils, soit pour marquer un momenthistorique ou rehausser le rang dun vnement

    religieux ou politique, parat avoir dbut peu aprsquils ne deviennent objets de rituels de supplication,et cela presque au mme titre que le Coran. Dj audbut du e/esicle, lintrieur des mosques(au Caire la fameuse Zhiriyya, Tombouctou souslEmpire malien, fonde vers le esicle, en Syrie dansle dme de la grande mosque des Umayyades, auMaroc dans deszwiya), les fidles lisaient le recueildal-Bur et, un degr moindre, celui de Muslim,pendant les trois mois successifs de raab, abn,raman, et faisaient concider la fin de la rcita-

    tion avec la veille de la fte de dal-fir(p. 343). lasuite de la rnovation de la grande mosque de LaMecque par le sultan ottoman Ahmed III, le doctejuriste Abd Allh b. Slim al-Bar (m. 1722) ordonna

    (21) Id.,Maknat al- aayn, addah, Dr al-Qibla li-l-aqfaal-Islmiyya, 1415/1994.(22) Id.,Tanbh al-Muslim il taadd al-Albn al a Muslim,Le Caire, 1408/1987.(23) Al-Albn, d. ar al-Aqda al-ahwiyya,al-Dr al-Islm,

    Ammn, 1419/1998, p. 23 ; et aussi dans son Mutasar aal-Bur, Beyrouth, al-Maktab al-Islm, I-IV, Riyd, Maktabatal-Marif, 1422/2002, II, p.5-6.

    (24) Id.,Silsilat al-ad al-aa, I-VI, Riyd, Maktabat al-Marif, 1416-1996, VI, p . 93.(25) Id.,Metahistory: the Historical Imagination in Nineteenth-Century Europe, Baltimore, Jones Hopkins University Press, 1973,p. 31-34.

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    quon y lt entirement le recueil dal-Bur. Mmedans le registre politique et parfois militaire, les deuxrecueils taient sollicits maintes reprises partoutdans le monde musulman, comme soutien spirituelavant dengager la bataille contre les infidles. Tmoin

    ds le dbut du e

    /e

    sicle, larme mameloukequi se jetait lassaut des Mongols hors du Cairesous la conduite dun chef muni ostensiblement dua dal-Bur. Cest dans lexemple de Mawly(non Mawl) Isml (m. 1727), le souverain alawitedu Maroc, que cette orientation revt tout son sensau plan de la synecdoque. Il russit transformerdes esclaves, capturs en guerre lors de la conqutedu Sud (vers le Mali), et des hordes de malfaiteursagissant la solde des tribus berbres rivales, en unearme dtat, unifie sous son commandement, dontle nom porte encore lempreinte de la procdure delallgeance : Abd al-Bur (les esclaves dal-Bur).Les chefs des esclaves sont runis en prsence dusouverain pour lui prter serment dallgeance,non sur le Coran, mais sur un exemplaire du adal-Bur. Il leur ordonna de prendre soin de cetexemplaire et de le transporter avec eux pendantles campagnes militaires, comme si ctait lArchedAlliance des Isralites.

    Tout comme ils reprsentent un certain seuilde perception de la personne du Prophte et de soncharisme, les deux recueils, de par la barakadont ils

    dtiennent la cl, vont figurer le point culminant delauthenticit aux yeux des savants traditionnistesultrieurs. Dans cet ordre dides, le mcanisme rh-torique de la synecdoque est pleinement appropri,compte tenu de lessentialisation des aaynparrapport la littrature du ad. Lauteur voquela controverse (munara) qui na pas pu avoirlieu entre le anbalite e Abd Allh al-Haraw(m. 481/1088-1089), tendance mystique, mais quinen tait pas moins un ultra-conservateur, et lesthologiens fiites et anafites en prsence du

    grand vizir seldjoukide Nim al-mulk (m. 485/1092).La raison en est qual-Haraw posait comme conditionpralable la rfrence unique du Coran et des deuxrecueils canoniques, prsents comme lauthentiquesunna de lEnvoy de Dieu. En rapportant ce rcitdans son ouvrage dhistoire aujourdhui perdu, Abal-Fal al-Maqdis (m. 507/1113-1114) sinscrit dansle sillage de son matre e al-Haraw, en faisantainsi des aayn le synecdoque de la sunna duProphte, unique fidle reprsentation de celle-ci, devaleur suprieure toute autre uvre. Il en sera demme avec les partisans dal-azl qui, pour obvier

    aux griefs de zlateurs traditionnistes, vont rcriresa biographie la lumire de la nouvelle orthodoxiedans laquelle les aaynconstituent la cime de latradition prophtique. Ainsi, Abd al-fir al-Fris

    (m. 529/1134-1135) dclare qual-azl, la fin desa vie, sest vou ltude du aden se consacrantplus particulirement aux aayn; Ibn Askir(m. 571/1176) commence la notice biographique decelui-ci en affirmant quil a tudi le a dal-Bur

    auprs dun certain Muammad al-af(26)

    ; demme, Abd al-Karm al-Samn (m. 562/1166)rapporte quaux dernires annes de sa vie, passesdans sa ville natale de , il aurait invit un minentsavant du nom dal-aww (m. 503/1109) pour luidispenser des cours privs portant sur les aayn(p. 354-356). Cette tendance se poursuit en sac-centuant avec al-ahab (m. 748/1348) qui, dansla plupart de ses ouvrages, enjoint ses lecteurs desadonner ltude des aayn(27). Mais si J. Brownse donne la peine de vrifier les informations que Tal-Dn al-Sub (m. 771/1370) rapporte sur al-azldans sa grande notice (environ 200 pages) (28), commeil la fait en prcisant le volume et la page dans le TrDimaq dIbn Askir (29), il ne sacquitte pas avec lemme soin de linformation attribue al-Samn.Il sest content de la notice biographique dal-azlqui serait rdige par ce dernier, en sen tenant auxaffirmations dal-Sub. Et dans la mesure o lon saitqual-Ansb(30)est le livre le plus souvent associ al-Samn,on est enclin croire que cest de lui quilsagit. Mais il nen est rien, car ni lentre azl ,ni celle ne mentionnent al-azl dans al-

    Ansb. Il aurait t judicieux de sinterroger, tout lemoins, sur la source laquelle fait rfrence al-Suben citant al-Samn quand bien mme elle seraitperdue. Il sagit vraisemblablement de son autreclbre ouvrage rpertoire des autorits (muamal-uy)qui ne nous est pas parvenu.

    Arriv au dernier chapitre, cest--dire la conclu-sion, lauteur entend saffranchir quelque peu de lamthode consacre dans les milieux universitairespour mieux rpondre aux attentes des tudiantsen traditions islamiques. Il reprend sous le mode

    interrogatif les points darticulation essentiels de son

    (26) Id., Tr madnat Dimaq, d. Muibb al-Dn Ab SadUmar b. arma al-Amrw, I-LXXX, Beyrouth, Dr al-Fikr,1416/1995-1421/2001, LV, p. 200.(27) Par exemple dans son Takirat al-uffz, d. Zakariyy

    Umayrt, I-IV (en 2 vol.), Beyrouth, Dr al-Kutub al-Ilmiyya,1419/1998 ; et Siyar alm al-nubal,d. uayb al-Arnt etal.,3e d., I-XXV, Beyrouth, Muassasat al-Risla, 1412-1419/1992-1998.(28) abaqt al-fiiyya al-kubr,d. Abd al-Fatth Muammadal-ulw et Mamd Muammad al-ann, Le Caire, Matbaat

    s al-Bb al-alab, 1964-1976, rimp. Beyrouth, Dr Ihy al-Tur al-Arab, s.d., V, p.191-389, n 694.(29) Ibn Askir, op. cit., LV, p. 200-204, n 6964.(30)Al-Ansb, I-V, d Abd Allh Umar al-Brd, Beyrouth, Dral-Kutub al-Ilmiyya, 1408/1988.

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    sujet, quil ordonne en six sous-chapitres, de sorte pouser le plus largement possible les contours decette riche tude. Il procde ainsi un rappel dordrehistorique qui replace le thme de la canonisationdes aayn au centre des multiples facteurs qui

    ont massivement contribu sa venue au monde dsle esicle de lhgire. Aussi, dans le but den situerlorigine intellectuelle, roriente-t-il ses analyses versles tensions, particulirement fcondes, entre les ten-dances thologico-juridiques (fiites notamment)et les rapports complexes des reprsentants de celles-ci la sphre du pouvoir dans linstitutionnalisationde sunnisme : la culture canonique des deux uvresserait-elle une simple rplique au isme, un pur pro-duit de ltat seldjoukide ? Sensuit, une interrogationsur le dveloppement et la fonction du Canon entant que reflet de la formation de lidentit sunnite,dautant plus que la corrlation ne souffre nul douteentre lpanouissement du Sunnisme et le succs desdeux canons. Depuis les aveux de Ab Zura al-Rz

    jusquaux rvlations dal-Albn, lauthenticit, quiest au cur de la canonisation, aura toujours besoindesprits critiques intgres, observe J. Brown, qui cltsa conclusion par cette interrogation : What doesthe Muslim community need today? (p. 378). Cestdire quel point la conclusion se rattache parfaite-ment lensemble du corps de la thse quelle sefforcede dpasser pour dboucher sur des perspectives

    nouvelles.Est-il besoin de rappeler que nous sommes l

    en prsence dun excellent travail, quasiment tousles niveaux ? preuve, sa qualit scientifique qui estdue autant lrudition certaine de lauteur dontil fait preuve modrment qui plus est , quau soinscrupuleux quil apporte aux exigences acadmiquesdans le respect des rgles de translittration et denotes de bas de page. Certes, la qualit de cet ouvragene se limite pas seulement ces deux paramtres,tant elle rside aussi dans une double originalit, qui

    sincarne dans les choix pertinents des arguments,soutenant ldifice de cette recherche, et notammentdans lordre dagencement que leur assigne lauteur.Ceci bien videmment a pour but de leur imprimerun certain quilibre afin daboutir une harmoniepour lensemble des chapitres ; do les menus dtailsqui trouvent systmatiquement, ou peu sen faut,leur place dans les notes de bas de page. Dautre part,peu de digressions russissent, en effet, sinsinuerdans le corps du texte et les rptitions se dissipentaussitt que lon prend en compte la nouvelle finalitque se propose lauteur dentre de jeu. Le retour

    dal-azl et dal-Maqdis dans le neuvime chapi-tre (p. 335-359), par exemple, alors que lon est djinform de leurs positions respectives au siximechapitre (p. 209-261), sexplique par le complment

    dinformations quils apportent au nouveau sujetdont traite ce chapitre.

    Mais en dpit de ces qualits indniables, dontatteste cette contribution, et les efforts incontes-tables dploys par lauteur, on dplore quand

    mme quelques erreurs de transcription, parfoismme des solcismes et des lacunes dans lexcellentindex gnral. Voici au niveau de la transcriptionquelques erreurs, signales en premier et suivies deleurs corrections : ibn amas sinn pour ams (p. 223,n 42) ; masnd pour asnd (p. 231),erreur dailleurscorrige dans la bibliographie ; le verset coraniqueIV, 114 : Ibrhm [] mawida pour Ibrhma []mawidat(p. 111, n 27) ; Allah pour Allh (p. 311).Erreur dans certains termes emprunts au franais : coup de grace pour coup de grce (p. 308).Mais ce sont la bibliographie et lindex qui concen-trent le plus derreurs : Geschichte der aribischenpour arabischen (p. 389) ; al-Laqy pour al-Luqy;mutazilite pour mutazilite; berlieferungsgeschictepour berlieferungsgeschichte [article publi dansZDMG92, 1938, p. 60-87 et non pas 60-82] ; larticlede C. Gilliot, mentionn ainsi Le Traitement duadt dans le Tahdb al-atr de Tabar pour LeTraitement du ad dans le Tahb al-r de Tabari [Arabica, 41, 1994, p. 309-351] (p. 390); les pages delarticle de W. al-Q, in al-Fikr al-tarbaw al-islm,ne sont pas mentionnes (p. 393) ;AlmpourAlm;

    N. ammad pour ammd (p. 396) ; an iddihipour an addihi(p. 397) ; Dr al-Sdir pour Drir (p. 398) ;f al-Qurn pourf al-Qurn (p. 403) ;Umm al-Qurra pour Umm al-Qura ; Kitbal-sulkpour Kitb al-sulk; l yasuu pour l yasau (p. 404) ;f asm maayaihi pourf asm mayiihi; bihikull minhum pour bihi kulunminhum [tanwn ncessairement extrioriser] ; al-abarpour al-abr(p. 406) ; Awz pour Awz (p. 413) ; Ifat pourIfdat (p. 420) ; Abd al-Mlik pour Abd al-Malikal-uwayn (p. 422) [erreur absente dans le corps du

    texte] ; enfin, la vocalisation Ibn al-Mussayab pourIbn al-Mussayib est dsormais viter (p. 426 et 449).Lindex semble incomplet, puisquil ne contient pasles personnages suivants : Isml (p. 264) ; al-af etal-aww (p. 356).

    Lahcen Daaif

    EPHE - Paris