AUTREFOIS EN LORRAINE Section Arts et Traditions …...La vie rurale dans les Vosges s’organise...
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DOSSIER ENSEIGNANTS
LES ARTS ET TRADITIONS POPULAIRES
Les collections d’arts populaires du musée
Lorrain, présentées dans l’ancien couvent des
Cordeliers, résultent d’une collecte initiée dès
1909 et jamais interrompue depuis lors.
Leur diversité
et leur richesse permettent
aujourd’hui de rappeler ce que furent les
conditions de vie quotidienne en Lorraine avant
l’ère industrielle.
Artisanat, mobilier régional, architecture et
décors de maisons, objets domestiques, images
populaires, céramiques, outils, costumes et
textiles ou encore objets de piété
forment ainsi
autant d’indices permettant de retracer les
modes de vie de la société
rurale.
Le présent dossier offre une synthèse des thèmes pouvant
être abordés avec les élèves durant la visite.
SOMMAIRE
Du village à
la maison p.3
Cuisine et alimentation. p.8
Se chauffer et s’éclairer p.17
Travaux et saisons p.22
Pistes pédagogiques p.28
1
PLAN DES ESPACES
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DU VILLAGE A LA MAISON
L’habitat lorrain traditionnel constitue un thème majeur de la section
des arts et traditions populaires. En effet, meubles, outils agricoles,
objets domestiques et objets d’arts populaires ont été
organisés de
manière à
évoquer ce à
quoi pouvaient ressembler les intérieurs
lorrains de la fin du XVIIIème siècle au milieu du XXème siècle dans
les campagnes.
La Lorraine rurale
Caractéristiques générales
La Lorraine est une vieille région rurale qui présente un certain
nombre de traits originaux
:
Un village allongé, le village-rue, avec des maisons accolées
prolongées sur la rue par les usoirs
où
triomphent le fumier et les
poules.
Un système de champs ouverts
(ou openfield), dans lequel
l’utilisation du sol était minutieusement réglée par de strictes
disciplines communautaires.
Une structure sociale diversifiée alliant les cultivateurs les plus aisés,
les laboureurs, aux plus humbles,
les manœuvres.
Autrefois s’imposait la préoccupation de se suffire sur place
; le
terroir portait des céréales (blé, seigle..), des légumes (pois, lentilles,
haricots..), des oléagineux (colza, navette, moutarde, pavot), des
textiles (chanvre et lin) ainsi que les vignes et les forêts pastorales. Au
XVIIIème siècle s’est ajoutée la pomme de terre.
Depuis la Première Guerre mondiale, ce système a subi quelques
modifications
avec la disparition des manœuvres et l’accroissement
du machinisme agricole, l’assouplissement du système de culture
basé
sur
l’assolement triennal et la disparition du troupeau communal et
de la vaine pâture.
Alors que l’organisation en champs ouverts a subsisté, la structure
économique a sensiblement évolué. Depuis les années trente, les
labours se sont réduits au profit du fourrage. Le bétail est plus
nombreux et mieux choisi. Le blé
est en recul comme le seigle et le
méteil au profit de l’avoine. La pomme de terre est également en
recul. Les cultures industrielles ont également chuté
tandis que le
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vignoble a reculé
au profit des arbres fruitiers (pruniers surtout). Les
cultures fourragères ont progressé
(betteraves, prairies artificielles,
pâtures
closes appelées «
parcs
»). La production animale a été
augmentée par la constante amélioration des races bovines et par
l’accroissement du cheptel.
Diversité
régionale: les pays
On divise habituellement la Lorraine en pays. Ces petites unités
géographiques tiennent leur origine des divisions des anciennes cités
gallo-romaines et correspondent à
un espace de l’ordre de 1000 km2.
Elles sont définies soit par leurs caractères physiques, soit par la zone
d’influence d’un centre urbain. Le «
pays
»
demeure, dans les
campagnes de la Lorraine profonde, la cellule de base d’une étude
régionale.
Les pays forestiers :
-
La Vôge, une zone de forêts qui enveloppe les sources de la
Saône au sud-ouest des Vosges.
-
Les Hauts de Meuse.
-
Le plateau calcaire du Barrois monotone couvert de forêts et de
terres cultivées.
Ces pays ont une vie rurale chétive où
dominent la pomme de terre
(Vôge), le seigle et la pomme de terre, l’avoine (Hauts de Meuse),
l’élevage des ovins (Barrois).
Les pays céréaliers :
-
Le Xaintois
dominé
par la butte témoin de Sion Vaudémont est
un vieux pays rural considéré
comme un des greniers à
blé
du duché.
-
Les plaines de la Sarre et de la Seille.
-
Le pays haut de Briey conserve un paysage rural à
peine modifié
par l’exploitation minière.
-
La Woëvre au pied des côtes de Meuse.
La montagne :
La vie rurale dans les Vosges s’organise autour de l’opposition entre les
Hautes-Vosges au Sud et les Basses-Vosges au Nord.
La principale ressource du paysan vosgien est le pré. Au dessous de la
forêt s’étendent des prairies de fauche auxquelles il donne tous ses
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soins par l’entretien des rigoles de drainage et d’irrigation et par des
arrosages de purin. La chaume des sommets est une autre prairie
: c’est
un pâturage d’été
où
les vaches laitières des villages des vallées (surtout
alsaciennes) viennent séjourner pendant quatre mois de la belle saison,
la montée se faisant vers le 20 mai. Cependant, cette utilisation des
hautes chaumes est en pleine régression depuis le début du XXème
siècle. La maison typique vosgienne est la
«
grange
»
large et basse à
toit écrasé. Elle est souvent bordée de bois ou de tôles, surtout sur le
pignon ouest. Tout est fait pour y retenir le plus de chaleur possible en
hiver
: le grenier à
fourrage est au-dessus des pièces d’habitation et de
l’étable
; les fenêtres sont petites, le couloir bien fermé.
Les Vosges du Nord ont des ressources moindres. Le bois leur a
donné
une petite activité
industrielle mais les possibilités restent
inférieures à
celles des Vosges du Sud.
Le village lorrain
L’habitat lorrain repose sur l’association entre le village-rue
et la
maison en profondeur. L’expansion du village-rue s’explique par un
parfait accord avec le système agricole jadis fondé
sur les contraintes
collectives d’assolement et de vaîne
pâture.
Un pays d’habitat groupé
La Lorraine est un pays d’habitat groupé
même s’il existe localement
de grosses fermes isolées (le plus souvent d’origine seigneuriale ou
monastique) et que l’habitat reste dispersé
dans la montagne
vosgienne. En moyenne, le ban
ou finage
particulier à
chaque village
n’est pas de superficie uniforme. Ces différences ont des causes
historiques ou naturelles (nature des sols). En dehors de la faible partie
couverte par le village, le territoire se répartit inégalement entre la
forêt, la prairie, les terres labourées et éventuellement les vignes. Les
champs sont sans clôture et l’utilisation du sol est minutieusement
réglée −
jusqu’aux années cinquante −
par de strictes disciplines
communautaires (assolement triennal obligatoire, vaine pâture, vendanges et fauchaisons réglementées).
Village-tas et village-rue
Si le village-tas
représente la structure la plus ancienne, le village-rue
constitue le type de plan le plus original avec ses maisons jointives ou
pas, perpendiculaires à
la rue et séparées de celle-ci par un usoir,
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espace communal non construit (profond de 5 à15 m entre façade et
caniveau) où
s’entassent les chariots et les instruments agricoles. Ce
village est un type de référence pour toute la Lorraine centrale du
Barrois à
la plaine sous-vosgienne.
Outre les maisons, on rencontre dans chaque village un certain
nombre d’édifices qui diffèrent suivant l’importance de la localité
:
L’église et son cimetière, refuge pour les habitants en cas de guerre.
Puits, fontaines et lavoirs sont des endroits de rencontre privilégiés.
La halle où
se tenaient les marchés.
Les grands fours banaux condamnés par la Révolution.
Le village
: une communauté
unie
Les laboureurs possédaient le matériel aratoire et la terre. Certains ne
possédaient que quelques hectares, d’autres pouvaient en avoir jusqu’à
une trentaine. Les manœuvres travaillaient pour le laboureur.
Dépendants en toute chose –
ils ne possédaient ni charrue, ni
attelage−, ils vivaient cependant dans leur propre maison. Les artisans
(maréchaux, maçons et charpentiers, tisserands et tailleurs d’habits,
charrons, tanneurs, bourreliers et cordonniers, potiers, tuiliers et
chaufourniers, meuniers et huiliers) vivaient aussi plus ou moins de la
culture de quelques terres. Les notables (curé, tabellion, maître d’école,
chirurgien, etc) étaient issus de la classe des laboureurs. Malgré
ces
différences, les services communautaires et les croyances religieuses
contribuaient à
faire du village une communauté
homogène.
A l’intérieur de la maison
Une maison en profondeur
La maison lorraine est rectangulaire et perpendiculaire à
la rue. Elle
abrite sous le même toit hommes, bêtes et récoltes. Elle est composée
dès le XVIème siècle de un, deux, trois ou quatre rains
(ou travées)
:
un pour les hommes (l’habitation), un pour les récoltes (la grange), et
selon la richesse du propriétaire un pour les chevaux (l’écurie) et plus
tard un quatrième pour les vaches (l’étable) quand l’élevage bovin
deviendra plus important. La maison est recouverte d’une charpente de
bois formée de grands poteaux appelés parfois «
hommes debout
»
et
reposant au sol sur un sabot de pierre ou une semelle de bois. A
l’origine, la maison lorraine est une maison en bois que la pierre
n’a
jamais remplacée complètement.
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Les toits sont à
faible pente. Ils avancent fortement en avant des
façades, jusqu’à
2 m par endroits. Cette avancée permettait de faire
sécher les récoltes suspendues en dessous. Une faible partie des
maisons rurales était encore couverte de toits de chaume en 1850, mais
on sait que les tuiles creuses ont été
utilisées en Lorraine dès le
XVIIème siècle.
Une stricte organisation de l’espace
La maison du laboureur
a été
construite plus tôt que les autres en
matériaux durables, c’est donc essentiellement elle qui a survécu.
L’habitation n’occupe généralement que le rez-de-chaussée. A l’étage
se trouvent les greniers. Cependant, à
partir du XIXème siècle, on voit
se multiplier les chambres d’étage. Le premier rain
abrite l’habitation. Il
est composé
de trois pièces en enfilade
: une chambre sur la rue, la
cuisine et une chambre arrière.
Seule la chambre sur rue, appelée «
poêle
»
ou «
belle chambre
», est
pourvue d’une fenêtre. La chambre du fond est souvent une pièce
borgne qui reçoit un peu de lumière de la cuisine par une petite fenêtre
intérieure ou par une porte vitrée. Quant à
la cuisine, elle est aérée et
éclairée par l’ouverture de la cheminée. A partir du XIXème siècle, on
a aménagé
dans certaines maisons une flamande
(sorte de deuxième
hotte de cheminée parallèle à
celle du foyer, qui part d’une grande
ouverture dans le plafond et se termine, au ras du toit, par un
lanternon vitré). La cuisine contient la cheminée, unique foyer de la
maison. Elle se situe le plus souvent contre le mur de la chambre, ce
qui permet de chauffer la chambre grâce à
une taque de fonte derrière
laquelle la maçonnerie était évidée.
La grange sert de lieu de travail. On y bat le blé, on y prépare les liens
pour la moisson. Les femmes s’y réunissent pour broder ou tricoter,
nettoyer les légumes etc
… C’est là
que l’on rentre toutes les récoltes
et que l’on range le matériel. Les troisième et quatrième travées sont
aux animaux (étable et écurie). Au dessus du logis et des écuries, le
grenier contient en hiver toutes les récoltes du laboureur.
La maison du manœuvre
n’a qu’une seule travée sans écurie (ne
possédant pas de train de culture, il n’a pas de cheval ) avec une toute
petite étable à
l’arrière. Elle n’a généralement que deux pièces (la
chambre et la cuisine). Au dessus de la porte se trouve une ouverture
(la gerbière) par où
l’on engrange les récoltes.
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CUISINE ET ALIMENTATION
Etymologiquement, le mot «
cuisine
»
vient du latin coquere
qui
signifie
«
cuire
». Par conséquent, le terme «
cuisine
»
désigne d’abord
l’action de préparer les aliments avant d’être employé
pour désigner la
seule pièce de la maison équipée d’une cheminée.
La cuisine, cœur de la maison lorraine
Caractéristiques générales
On y fait le feu grâce auquel on cuit les aliments mais aussi on
chauffe la maison. C’est la raison pour laquelle, traditionnellement, la
cuisine est la pièce privilégiée de la maison, celle où
la famille se tient
le plus souvent et se réunit pour les veillées.
La cuisine se trouve généralement au
cœur de la maison lorraine
toute en profondeur. Elle est donc le plus souvent borgne, sauf dans
les montagnes vosgiennes, le Pays-Haut et la Meuse où
elle est dotée
d’une fenêtre. Son sol dallé
est en pierre.
L’équipement de la cuisine
La taque de cheminée
Très importante dans la maison lorraine, elle permet de chauffer la
pièce avoisinante. Le terme de « taque » ou « plaque » désigne en
réalité
2 équipements différents mais complémentaires
:
-
la plaque de fonte verticale, souvent travaillée ou ornée de
moulures, fixée au fond de l’âtre. En effet, la cheminée de la cuisine
étant souvent la seule source de chaleur de tout l’espace habité, un
trou de communication était établi entre la cuisine et la pièce
contiguë
; la taque servait alors de «
cloison
», le métal de la plaque
permettant à
la chaleur de l’âtre de se propager dans la chambre
voisine.
-
la plaque de fonte horizontale, lisse et non ornée
sur laquelle on fait
le feu.
Le mobilier
Simple et fonctionnel, il a longtemps été
limité. Il se compose
essentiellement des éléments suivants
:
- des placards
évidés dans le mur. On range dans ceux qui se situent
de part et d’autre de la cheminée les denrées qu’il faut tenir au sec
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telles que certains aliments, la boîte à
sel, quelques épices...
-
le sel peut également être gardé
dans une saunière, meuble bas en
forme de véritable coffre à
sel (parfois à
plusieurs tiroirs) placé
à
côté
de la cheminée et sur lequel on peut s’asseoir.
-
chaque cuisine possède une table,
longue et étroite, et des bancs,
aussi longs que la table. Personne ne s’assied aux bouts.
-
on trouve également pour s’asseoir quelques tabourets
ou sellettes
à
trois pieds obliques que l’on place souvent près du foyer. Les chaises
apparaissent au XVIIIème siècle.
-
les coffres
sont
appréciés pour leur mobilité
(qui reste relative) et leur
capacité
de rangement. De toutes tailles, certains étaient décorés de
motifs peints, surtout dans les Vosges. Selon leur fonction, un nom
spécifique leur était donné
: par exemple, on appelait «
huges
»
ou
«
huches
»
des coffres de taille moyenne où
l’on rangeait du grain, des
légumes secs ou quelques autres denrées. Les plus petites d’entre elles,
les «
hugeottes
», parfois en osier, conservaient le lard, le jambon ou
encore des fromages.
-
on gardait la farine dans des burtoires
ou maies, sortes de coffres sur
pieds, utilisées comme pétrin dans la confection du pain. Un plateau
mobile permettait de l’utiliser comme plan de travail.
-
jusqu’à
une époque récente, on trouvait aussi un lit
car les parents
dormaient dans la cuisine. Ce lit est souvent sous forme d’alcôve
simple, en angle, ou double. Dans ce cas, les deux alcôves sont
séparées par un étroit placard et occupent un mur de la pièce. Parfois,
on trouve à
la place des alcôves un lit mobile à
rideaux
exceptionnellement pourvu d’une petite armoire à
son pied.
-
enfin, on trouve dans une cuisine un meuble où
mettre la vaisselle.
Celle-ci est cachée ou exposée selon les cas. On distingue
:
le buffet
: il renferme l’argenterie, du linge de table, des
papiers, de l’argent, mais aussi des denrées alimentaires.
le dressoir
: il sert surtout à
exposer en permanence c’est-à-
dire «
dresser
»
des ustensiles tels que des chaudrons, pots ou
poêles mais aussi de la vaisselle diverse (assiettes de faïence..).
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Les ustensiles
liés à
l’eau
: chaudron à
eau, baquets de bois, pots et bassines de
cuivre, fer blanc ou terre cuite...
liés au feu
: pincettes, tire-braises, pelle à
cendres, soufflet... On
appelle «
cendrier
»
un récipient dans lequel on garde les cendres en
vue des lessives à
venir.
pour cuisiner
: casseroles diverses (cocottes, marmites, tourtière,
daubière, poêles, etc..) tripodes ou posées sur un trépied, bras mobile
appelé
«
la servante
»
fixé
à
un montant latéral de l’âtre et pouvant être
ramené
en avant pour soutenir la queue d’une longue poêle,
crémaillère, mais aussi écumoire, louche, fourchette à
grandes dents,
grils ou encore gaufrier.
Ces ustensiles sont le plus souvent pendus à
des clous, sous le manteau
de la cheminée.
L’eau
Les puits et fontaines
Rares sont les maisons pourvues de puits particuliers
: le plus souvent,
les gens s’approvisionnent en eau à
des fontaines ou des puits, publics
ou partagés avec d’autres propriétaires. L’usage de puits à
balancier est
une caractéristique de la Lorraine jusqu’au XVIIIème siècle où
leur
usage décline à
mesure que l’on parvient à
capter l’eau des sources.
Dès lors, on amène l’eau jusqu’aux fontaines des villages où
elle coule
en permanence.
La pierre à
eau
A l’intérieur de chaque cuisine se trouve une pierre à
eau fabriquée
avec une pierre locale. Elle est de grande dimension, jusqu’à
1,80 m de
long, et se situe souvent dans une sorte de niche ou enfeu. Elle
est
fréquemment surmontée d’étagères ou de placards. Lorsque la cuisine
a une fenêtre, la pierre à
eau est placée devant celle-ci et l’écoulement
des eaux usées se fait directement à
l’extérieur.
Lorsque la maison a un puits particulier, une pompe alimente
directement la pierre à
eau, placée juste à
côté. Ce confort est un luxe
!
Dans tous les cas, un seau rempli d’eau est posé
en permanence sur la
pierre. On y puise de l’eau avec une sorte de louche en cuivre à
fond
plat appelée «
poche
».
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L’alimentation traditionnelle en Lorraine
Caractéristiques générales
Jusqu’à
la diffusion de plats ou recettes d’autres régions puis d’autres
pays à
partir de 1925 environ, la population lorraine consomme
uniquement des produits locaux qu’elle produit souvent elle-même,
surtout en milieu rural.
La Lorraine procède dès le Moyen Age à
des échanges commerciaux
de denrées, aussi bien à
l’intérieur de la région qu’avec les provinces
voisines. Il existe ainsi des relations séculaires entre la Lorraine et le
Luxembourg mais aussi l’Alsace ou la Franche-Comté
dont les
traditions culinaires sont spécifiques. Par conséquent, la cuisine
lorraine est géographiquement variée
: celle que l’on pratique dans la
Moselle germanophone diffère de celle de la Lorraine centrale, des
vignobles, du Barrois, de la Vôge, de la
montagne, ou encore des
grandes villes. Enfin, le développement de communautés religieuses ou
émigrées en Lorraine introduit aussi dans la région de nouvelles
pratiques culinaires issues de traditions juives sous l’Ancien Régime,
italiennes ou encore polonaises au XXème siècle.
Enfin en raison du climat, les ressources sont limitées. La peur de
manquer ou la pauvreté
font que l’alimentation lorraine est régie par
un strict souci d’économie. Ainsi, quelle que soit la catégorie sociale, le
pain et les végétaux dominent l’alimentation toute l’année.
L’introduction de la pomme de terre au XVIIIème siècle fut toutefois
un progrès essentiel contre la misère et ce tubercule domine encore la
cuisine régionale à
l’heure actuelle.
Les bases de l’alimentation quotidienne
Les légumes
La soupe est le plat quotidien essentiel des Lorrains jusqu’au XIXème
siècle. Cela occasionne une certaine monotonie des repas car toutes
les
familles cultivent les mêmes produits
: des féculents
(pois, fèves puis
pommes de terre), des légumes tendres
(choux divers, raves, radis,
rutabagas, navets, poireaux, carottes, bettes, épinards et salades
diverses) et des aromates
(thym, persil, cerfeuil, estragon, ciboulette).
En cuisine, l’oignon et l’échalote sont bien plus utilisés que l’ail.
Au cours du XIXème siècle, on adopte d’autres légumes tels que les
lentilles blondes, le raifort ou le chou rouge. La culture de la
lentille a
totalement disparu de nos jours alors que, vers 1860, La Lorraine en
était une très grosse productrice. La bourgeoisie, curieuse de
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nouveautés, demande à
ses jardiniers de cultiver des légumes plus
raffinés tels que la laitue, les endives de Bruxelles, les asperges, les
artichauts, les salsifis, les potirons. Enfin, les guerres et l’émigration
introduisent la choucroute et les plats méridionaux à
base de tomates,
courgettes et poivrons. Cette grande diversité
de légumes est demeurée
le plus souvent inconnue de la cuisine populaire tant que l’unique plat
de légumes proposé
chaque jour à
table fut la soupe au lard, le pot-au-
feu, la potée et les pommes de terre diversement cuisinées.
Les laitages
La pauvreté
rend la viande rare. On cherche alors des protéines dans
des recettes à
base de lait, de farine, d’œufs et de crème. A la
campagne, la plupart des ménages possédaient des volailles voire une
vache. En ville, des laitiers allaient dans tous les quartiers vendre du
lait. Quoi qu’il en soit, le lait était un produit précieux. Il est bu entier,
écrémé
par le consommateur lui-même,
ou allongé
d’eau afin de
l’économiser.
Il sert aussi à
fabriquer de nombreux produits laitiers
: la crème,
omniprésente dans la cuisine lorraine mais utilisée avec mesure pour
épaissir un potage, enrichir une sauce..., ou encore le beurre
obtenu
grâce à
l’adjonction de présure de veau et fabriqué
dans des barattes. Il
se conserve tout l’hiver à
la cave dans des pots de grès. Vendu en
motte ou converti en pains dans des moules en bois, il était surtout
utilisé
à
la ville car, à
la campagne, on lui préfère le lard, le saindoux et
la crème. Le fromage
est un produit laitier fort répandu car il a
l’avantage de se conserver. Il est apprécié
en Lorraine depuis des
siècles. Certains fromages vosgiens sont commercialisés mais, le plus
souvent, le cultivateur se contente du fromage qu’il fabrique lui-même.
Il en existe 3 sortes: le fromage blanc, le fromage salé
et le fromage
fondu. Le plus simple, le «
blanc fromage
», était du lait caillé
égoutté
dans un moule en bois. On le mangeait chaque soir avec des oignons,
du sel et du poivre ou encore avec des pommes de terre à
l’eau
..
Certaines personnes, moins économes, l’agrémentent d’un peu de
crème. On peut égoutter encore le reste, le saler puis le faire sécher de
quelques jours à
quelques semaines environ, pendant lesquelles il se
tasse, durcit encore et jaunit. En Argonne, on le conserve dans la
cendre. Enfin, on mange aussi en Lorraine du fromage fondu proche
de la cancoillotte comtoise à
partir de fromage blanc fait auquel on
ajoutait de la crème ou du beurre avant de le faire fondre doucement.
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Pain et gâteaux
La farine tient une place très importante dans la cuisine populaire
lorraine. La maîtresse de maison met un point d’honneur à
confectionner des aliments nourrissants et savoureux. Ceux-ci
permettent à
la fois de donner de la consistance aux repas quotidiens,
souvent dépourvus de viande, et de leur apporter une certaine fantaisie
gustative qui rompt la monotonie des menus. Elle fabrique des
produits à
base de pâte à
pain qu’elle pétrit et façonne elle-même mais
elle aime également faire de la pâtisserie. Elle confectionne enfin des
pâtés, appelés de nos jours «
pâtés lorrains
».
Quand sa cuisson à
domicile n’est pas interdite, le pain
est cuit sur
place, à
la maison. La farine de blé
compose l’essentiel du pain lorrain
même si, en Moselle ou en cas de disette, l’orge et le seigle sont aussi
utilisés. On distingue plusieurs sortes de pain au blé
: les plus connues
sont le pain blanc et le pain bis, équivalent du pain complet actuel. A la
campagne, on mêle souvent un peu de seigle à
la farine de blé
afin que
le pain se conserve plus longtemps, jusqu’à
quinze jours. La
consommation quotidienne de pain a longtemps été
élevée et atteignait
une à
deux livres par jour. Dès 1863, des boulangers font des tournées
dans les plus gros villages puis dans chaque commune. Ils proposent
des pains en forme de couronne, plus légers et plus petits que les
miches de 6 à
12 livres que les habitants peuvent cuire eux-mêmes. Par
conséquent, la fabrication du pain à
la maison a tendance à
se raréfier
voire disparaître car, de plus en plus, les gens préfèrent acheter du pain
frais chez le boulanger. Ainsi, on trouvait en 1876 1 four par ménage
;
30 ans plus tard, il ne restait plus que 1 ou 2 fours à
pain par
commune.
Traditionnellement, le pain garde un caractère sacré. La Lorraine est
une région très pratiquante et, au quotidien, certains rituels sont
associés au pain
: on fait un signe de croix en le fabriquant, le père de
famille fait également un signe de croix sur la croûte d’une miche avant
de l’entamer et chaque membre de la famille respecte le pain
: il est
hors de question de le gâcher, d’en perdre le moindre morceau ou
d’enfoncer la pointe d’un couteau dans une miche. On ne doit pas non
plus poser le pain à
l’envers, côté
croix, sinon on risque de manquer de
pain un jour. Entre les repas, le pain est enveloppé
dans une nappe à
pain posée sur une table du poêle, le côté
entamé
tourné
vers la porte.
Les pains non entamés sont, quant à
eux, conservés dans une huche
(sorte de coffre) ou à
la cave. Enfin, les familles pratiquantes font bénir
le dimanche leur pain de la semaine.
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Les gâteaux
servent à
rompre la monotonie des repas, mais certains,
plus élaborés ou coûteux, agrémentent seulement les menus de fête.
Tant que l’âtre fut le seul mode de cuisson, les douceurs étaient cuites
dans des poêles, des gaufriers ou des cocottes en fonte. On mangeait
donc des crêpes, des gaufres, des clafoutis... Pour mardi gras, on faisait
aussi des beignets «
de carnaval
»,
d’abord cuits et dorés dans la poêle.
Il faut en revanche porter au boulanger les tartes et gâteaux de
fête
pour qu’ils soient cuits. Enfin, on profite du jour où
on cuit le pain
familial pour «
quichotter
», c’est-à-dire faire des «
quiches
». Ce mot
est issu de l’alsacien «
Kuche
»
qui signifie «
gâteau
». Par conséquent, à
l’origine, on appelait «
quiches
»
en Lorraine toutes sortes de tartes. Les
premières furent garnies de prunes puis, selon les saisons et
l’inspiration de la cuisinière, on mit tout ce qu’on voulait ou pouvait
mettre sur la pâte. Les plus célèbres sont la tarte aux mirabelles et la
fameuse «
quiche lorraine
»
(seule à
avoir gardé
son nom d’origine).
Outre la brioche, les gâteaux les plus typiques sont «
l’oriquette
», sorte
de gâteau de Noël, et le «
pain galu
». Le premier est également appelé
«
cougneux
»
(= gui neuf) car il est servi lors des fêtes de fin d’année.
C’est un gâteau constitué
de triangles de pâte à
la levure de bière, très
riche en œufs et en beurre, étalé
entre les couches de pâte. Le «
pain
galu » (ou « raima » au Val-d’Ajol) est, quant à
lui, une douceur à
base
de pâte à
pain faite à
partir de farine de seigle et de miel, truffée de
quartiers de pommes, de poires, et de fruits secs (noix et raisins). Cette
recette est typique des Vosges où
l’influence de l’Alsace fait que
certaines ménagères font aussi des «
kouglofs
». En plaine, depuis
Stanislas, on mange du baba même si le baba lorrain, proche du
savarin, diffère du baba polonais qui est au seigle et au vin doux.
la quiche lorraine
Sa recette a beaucoup varié
; au début du XVIème siècle, elle était à
base de pâte à
pain. Au cours des siècles, la
quiche est devenue plus raffinée et, finalement, sa recette s’est fixée de la manière suivante qui correspond à
celle
que nous connaissons encore actuellement
:
Foncez une tourtière avec une pâte brisée (et non feuilletée
!) mince mais assez résistante pour supporter le poids
d’une «
migaine
». Préparez cet appareil à
l’aide d’œufs (un par convive), de crème fraîche, de sel, de poivre, et de
petits morceaux de lard maigre, frais ou rôtis dans la poêle. Ces lardons peuvent être soit intégrés à
la migaine
et
battus avec l’ensemble, soit posés directement sur la pâte avant qu’on ne verse l’appareil jusqu’à
moitié
de la
hauteur du moule. Laissez cuire le tout au four une demi-heure.
Cette recette fort simple est réputée dans le monde entier. Des essais ont été
faits pour l’enrichir avec du
fromage, du jambon, et bien d’autres choses encore mais les spécialistes disent que cela «
pervertit
»
la saveur de
l’authentique quiche lorraine qui a longtemps été
le plat de résistance des repas qui sortaient de l’ordinaire ... Il
faut toutefois reconnaître qu’elle a toujours eu une grande rivale, la tourte, élégant moyen de cuisiner le porc.
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Les viandes
Traditionnellement, en Lorraine, les bêtes servent surtout de force de
travail. Pourtant, à
la campagne, on abat périodiquement des animaux
qu’on élève tels que des porcs et des volailles.
Le cochon
domine dans l’alimentation lorraine. Il est consommé
sous
toutes ses formes et, à
la campagne, chaque ménage même modeste, a
un ou deux porcs à
engraisser
: l’un est destiné
à
la vente et l’autre à
la
consommation personnelle. En ville, chaque ouvrier d’usine disposant
d’un peu de terre en élève un. Le cochon est apprécié
des couches
populaires de la société
car la possibilité
d’élever puis tuer et enfin
transformer sur place l’animal donne à
chaque famille des provisions
carnées et de la graisse (saindoux) en quantité
suffisante pour l’hiver.
Le tuage du cochon est un rituel immuable auquel participent les
gens
du village. Dans le Nord de la Lorraine, une fois tué, on grille l’animal
sur un lit de paille. Dans le Sud, la coutume veut qu’on ébouillante le
cochon dans un cuveau. Quel que soit le mode opératoire utilisé, il
s’agit d’un événement convivial et social grâce auquel la famille qui
sacrifie un animal manifeste sa capacité
à
assurer sa subsistance en
viande et en corps gras. L’aide apportée par les habitants du village lors
du rituel est à
charge de revanche car le travail, immense, ne peut être
accompli par la famille seule
: une fois que le cochon est tué
et vidé
de
ses entrailles, on dispose en effet de trois jours pour transformer 300 à
400 livres de viande et d’abats
!
Rien ne se perd dans le cochon
: on fabrique des charcuteries variées,
du boudin, des saucisses, des jambons etc. Chaque pays rivalise
d’ingéniosité
pour diversifier ses recettes, possède sa propre tradition
charcutière et possède ses foires au cochon. Le mode de conservation
de la viande diffère selon le pays
: à
l’est de la région, on a tendance à
fumer le porc alors qu’à
l’ouest, on le sale.
A la campagne, on possède souvent un poulailler
et des clapiers
à
lapins
qui fournissent de la viande plus légère que le porc, que l’on
consomme essentiellement pour agrémenter les repas de fête et les
réceptions. Le bœuf
n’est pratiquement jamais tué
à
la campagne. Par
conséquent, sa viande s’achète chez le boucher et on n’en trouve que
dans les bourgs. Les gens de la campagne n’en achètent
qu’occasionnellement, quand ils vont à
la ville. A partir de 1905, les
bouchers font des tournées dans les villages. Le bœuf reste toutefois
une denrée chère et seules les personnes disposant d’un salaire régulier
en achètent.
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Les boissons
La vigne
a été
très tôt implantée en Lorraine. Il existait déjà
des ceps
sauvages avant l’occupation romaine mais c’est cette dernière qui a
développé
la culture de la vigne dans notre région, sur les versants
abrités des vallées, surtout celle de la Moselle. Toutefois, les récoltes
sont de qualité
irrégulière et le vin lorrain reste souvent médiocre par
rapport à
ses voisins alsaciens ou bourguignons. Excepté
en montagne,
tous les villages ont eux aussi quelques vignes destinées à
l’auto-
consommation. La «
piquette
», réservée à
la consommation locale, est
obtenue après une 3°
pression du moût mais ce dernier peut aussi être
obtenu à
partir d’autres fruits que le raisin.
La bière
existait déjà
à
l’époque gauloise mais c’est seulement à
partir
du XVIème siècle que la Lorraine devint réputée dans ce domaine. Les
brasseries se développèrent à
partir du XVIème siècle, la production
était le plus souvent effectuée par des moines. Le duc Charles III
(1543-
1608) finança l’installation de deux brasseries à
Nancy et à
Hombourg
en Moselle car, non seulement cela créait du travail, mais
cela donnait à
ses sujets comme à
l’armée ducale une boisson moins
chère que le vin. Au XVIIIème siècle, de nouveaux fabricants
améliorèrent les techniques de fabrication. Enfin, avec la suppression
des monopoles à
la Révolution, le nombre des brasseries augmenta
énormément et, dès 1805, on comptait plusieurs centaines de
brasseries dans toute la région (concentrées surtout dans le Nord).
La «
petite bière
»
est, quant à
elle, une boisson que les cultivateurs
produisaient eux-mêmes à
partir d’orge et de houblon de jardin.
Contrairement à
la bière, il s’agit seulement d’une boisson infusée,
sucrée, fermentée par de la levure, puis colorée à
la chicorée. Elle ne
titre qu’autour de 1,5°
(au lieu de 5°
pour la bière) donc est aussi peu
alcoolisée que les boissons de ménage habituelles. C’est une boisson
du quotidien.
Au XVIIIème siècle, seul le marc de raisin était distillé. L’eau de vie
s’est toutefois développée et diversifiée en Lorraine au fur et à
mesure
que les vignobles disparaissaient. On les a en effet, remplacés par des
vergers et l’abondance de fruits a conduit les propriétaires à
distiller les
surplus. Cet alcool, fort et presque gratuit, a connu un succès très
important car on en donnait aussi bien aux enfants (même bébés
!)
pour les fortifier, aux hommes pour les aider à
endurer les travaux de
force tout au long de la journée ou aux visiteurs éventuels pour les
accueillir chaleureusement. Enfin, on en buvait encore le soir avant de
se coucher pour mieux dormir.
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SE CHAUFFER ET S’ECLAIRER
Dans une région aux hivers longs et rigoureux telle que la Lorraine, il
serait logique que les questions du chauffage et de l’éclairage aient
toujours été
des soucis majeurs. Etonnamment, il n’en est rien et, la
maison lorraine était le plus souvent mal chauffée et mal éclairée.
Le chauffage
Jusqu’au XIXème siècle, la
cuisine est, traditionnellement,
la seule
pièce de la maison à
être chauffée. C’est en effet dans cette pièce que
se trouve une cheminée dans laquelle un feu à
l’âtre brûle en
permanence.
Afin de mieux rentabiliser cette source de chaleur, au XVIème siècle,
on invente un système de taques
assurant un meilleur rayonnement
de la chaleur. On appelle «
taque
»
une épaisse plaque de fonte.
Certaines cheminées sont pourvues de deux taques, l’une sous le
foyer et l’autre verticale, mais c’est surtout cette dernière qui assure la
diffusion de la chaleur. Certaines taques viennent des forges du
Pays-
Haut. Leur usage se généralise rapidement et, dès le XVIIème siècle,
on perfectionne le système en pratiquant une ouverture dans le mur
de séparation entre la cuisine et le «
poêle
», c’est-à-dire la chambre
voisine. L’ouverture est masquée par la taque verticale qui, par
conduction, apporte une partie de la chaleur de l’âtre dans la pièce
voisine. Dans certaines maisons, on joint l’utile à
l’agréable et la taque
devient également un véritable élément de décoration de la maison
lorraine.
Au XVIIIème siècle, surtout dans la région du Lunévillois, on
améliore encore le système en créant dans la chambre la boiserie de
poêle.
Celle-ci est une sorte de placard chauffant, dit aussi parfois
«
armoire à
taque
», aménagé
dans l’épaisseur du mur séparant la
cuisine de la belle chambre. Ce placard, dont les portes donnent
sur
le revers de la taque, est bien utile pour garder au sec les provisions
de sel et d’épices, cailler le lait ou faire gonfler la pâte à
pain.
L’ouverture des portes du placard permet de régler la température de
la pièce. Enfin, il arrive que, par pur souci esthétique, on fasse poser
une fausse cheminée devant la taque. Celle-ci donne sans doute un
aspect plus confortable à
la pièce mais ne change en rien la
température de cet espace parfois appelé
«
la chambre tiède
»
(par
opposition à
la chambre froide située à
l’arrière de la maison).
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Par conséquent, les femmes recourent à
des chaufferettes appelées
couvots.
En laiton, en cuivre, en tôle ou en terre, ces systèmes de
chauffage d’appoint transportables permettent de se réchauffer les
pieds
: on y met des braises rouges et on les remue de temps en
temps avec une pelle à
couvot
dont le musée possède de nombreux
modèles décorés et personnalisés.
Enfin, le soir, on tiédit le lit avec une bassinoire
en cuivre, de forme
ronde et aplatie, remplie de braises incandescentes et que l’on fait
aller et venir entre les draps grâce à
son long manche de bois.
D’autres utilisent une brique de terre chaude, une bouillotte
remplie d’eau fumante ou encore, un «
moine
»
constitué
d’une
structure en forme de cage en bois et d’un réchaud de cuivre qui
risque de mettre le feu à
la literie...
Ce n’est qu’au XIXème siècle que le chauffage de la maison lorraine
devient performant avec l’introduction des poêles en fonte
dans les
maisons. Ils sont parfois utilisés en plus du feu à
l’âtre de la cuisine.
En fait, on le trouve surtout dans la «
belle chambre
». Il en existe
plusieurs sortes. Dans le Pays-Haut, l’usage du fourneau se développe
très vite selon une technique particulière permettant d’approvisionner
le poêle en braises depuis la cuisine grâce à
une ouverture pratiquée
sans le mur. On appelle ce type de fourneau le «
gueulard
»
près
d’Homécourt, le «
poêle à
calotte
»
vers Conflans, Longwy ou
Villerupt et, «
le fourneau dans le mur
»
à
Longuyon. La plupart de
ces fourneaux proviennent de Herserange
et sont décorés de motifs
en relief. On trouve également dans le Pays-Haut une autre sorte de
fourneau, coulé
près de Longuyon, constitué
de plusieurs corps
horizontaux reliés entre eux par des colonnes de fonte...
L’éclairage
La configuration même de la maison lorraine, tout en longueur et
souvent mitoyenne, fait que cet habitat est naturellement
sombre. Le
plus souvent, seules une à
deux fenêtres sur la rue et une à
l’arrière de
la maison permettent à
la lumière du jour de pénétrer dans les
chambres. Généralement, la principale pièce à
vivre de la maison, la
cuisine, est borgne. Afin de remédier à
ce manque de lumière, les
Lorrains utilisent, bien évidemment des lampes mais ils peuvent
également réaliser des aménagements structurels leur permettant de
mieux capter la lumière du jour.
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Aménagements de l’espace
Dans son état le plus archaïque la cheminée de la cuisine ne possède
pas de manteau. Le foyer est alors constitué
de ce que l’on appelle un
«
trait de feu
»
où
une simple ouverture aménagée dans le plafond et
le toit permet d’évacuer la fumée par un conduit. Ce système de
relation directe entre le foyer et l’extérieur n’est, certes, guère
commode pour le chauffage mais permet un peu à
la lumière du jour
de pénétrer dans la pièce.
Lorsque la maison lorraine n’est pas jointive mais séparée de sa
voisine par une étroite ruelle, on perce une fenêtre
dans le mur de la
cuisine, afin de permettre au jour d’éclairer quelque peu la pièce.
Certes, la proximité
de la maison voisine rend cet éclairage modeste
mais c’est toujours un aménagement bien agréable. Souvent, on place
alors devant la pierre à
eau. On recourt parfois, quand on le peut, à
une autre sorte d’aménagement
: on met une porte vitrée ou, mieux
encore si les finances le permettent, une cloison
vitrée
entre la
cuisine et la chambre. Ce système permet à
la lumière qui entre par la
fenêtre de la chambre de pénétrer jusque dans la cuisine. Plus tard, au
XIXème siècle, on reprend le principe du «
trait de feu
»
en le
modernisant
: il s’agit encore d’amener de la lumière du jour par le
toit grâce à
un conduit d’abord commun puis distinct de celui de la
cheminée. Ce conduit indépendant permet de résoudre le problème
du chauffage car il est obturé
par une verrière au niveau du toit. Ce
système appelé
«
flamande
»
permet donc d’avoir la lumière de
l’extérieur sans faire rentrer le froid.
Toutefois, quels que soient les aménagements effectués, l’intérieur de
la maison lorraine reste faiblement éclairé. On est donc obligé
de
recourir à
un système d’éclairage artificiel.
L’éclairage artificiel
Depuis l’Antiquité, la lampe à
huile
est un système d’éclairage
fréquemment utilisé. Il existe diverses sortes de lampes à
huile
: en
terre, en métal, de forme et taille variables, etc.. Elle possède une
mèche qu’il faut déplacer manuellement quand elle se consume. Dans
la maison lorraine traditionnelle, il est fréquent de voir une lampe à
huile non pas posée sur un meuble mais suspendue
par un crochet à
un anneau situé
au plafond
ou à
la tablette de la cheminée. On
appelle «
copion
», une lampe à
huile à
quatre becs, en fer martelé,
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souvent pourvue d’une crémaillère pour en régler la hauteur.
Chandelles, cierges et bougies
sont également des moyens
d’éclairage répandus dans la région. Les chandelles sont constituées
de suif, c’est-à-dire de graisse animale fondue ou moulée autour d’une
mèche. A température ambiante, le suif est à
l’état solide mais n’est
pas dur
: il a une consistance pâteuse qui rend la chandelle assez
désagréable à
manipuler. Lorsqu’on allume une chandelle, on obtient
une belle flamme claire. Toutefois, en plus du désagrément provoqué
par l’odeur du suif, la flamme devient très vite de moins en moins
intense et la mèche, noircie de charbon, fume. Si l’on ne veut pas que
l’intensité
de la flamme décroisse ni que le suif ne se mette à
couler, il
convient absolument de couper l’extrémité
de la mèche toutes les
trente minutes environ pour enlever la petite boule de charbon. On
dit alors que l’on «
mouche
»
la chandelle. L’instrument utilisé
pour
effectuer cette opération, sorte de paire de ciseaux plus ou moins
ouvragée terminée par une boîte, s’appelle une
mouchette. La boîte,
de forme et décoration variables, sert à
recueillir directement les
mouchures car, si elles tombaient par terre, elles pourraient
provoquer un incendie. Ces mouchettes «
à
récipient
»
apparaissent
dès le XVIème siècle mais le système s’est par la suite perfectionné.
Le cierge, quant à
lui, est fabriqué
à
partir de cire d’abeille d’où
son
nom. Comme la cire vaut cher, le cierge n’est pas un moyen
d’éclairage répandu dans les intérieurs
: on le réserve pour les
pratiques liturgiques et les éclairages prestigieux.
Au XIXème siècle, l’invention de la bougie
permet de mettre fin aux
désagréments causés par les chandelles
: en effet, après de
nombreuses recherches faites par des scientifiques (dont le Nancéien
Braconnot), on parvient à
extraire l’acide stéarique de la graisse
animale. La matière obtenue permet la fabrication par moulage de
bougies plus pratiques que les chandelles car elles sont plus dures, ne
tachent pas. On crée également des bougies en paraffine. De plus,
une amélioration du système de mèche permet de ne plus avoir
besoin de recourir aux mouchettes. Désormais, on utilise en effet une
mèche de coton non plus torsadée mais tressée puis imprégnée
d’acide borique. Cela lui permet de se consumer sans «
filer
».
Enfin, au XIXème siècle, on utilise une lampe utilisant de l’huile
minérale et non plus végétale, le pétrole. Comme ce combustible est,
à
l’époque, bien moins cher que l’huile, les lampes à
pétrole
se
diffusent très vite dans la région. Elle est plus perfectionnée que la
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lampe à
huile car un mécanisme permet de régler la hauteur de la
mèche et l’adjonction d’un verre de lampe favorise la combustion
donc procure un meilleur éclairage. Les lampes à
pétrole peuvent en
outre être des objets décoratifs car il en existe une infinie variété, de
la plus simple à
la plus richement décorée.
A Lunéville où
des centaines de brodeuses travaillaient à
domicile, on
utilisait une «
lampe de brodeuse
». Le principe consistait à
placer une
carafe remplie d’eau devant la source de lumière utilisée. La carafe
servait ainsi de lentille grossissante et permettait à
la brodeuse de
mieux voir son ouvrage.
Les lanternes, connues depuis longtemps, étaient utilisées pour les
sorties nocturne et pour les écuries et granges. Fautes de protection,
elles étaient à
l’origine d’incendies dévastateurs.
Les modes d’éclairage traditionnels sont nombreux et variés, les
Lorrains ont fait preuve d’ingéniosité
pour tirer le meilleur parti de ce
qu’ils avaient à
leur disposition mais ces moyens manquent
d’efficacité
et ne sont pas sans danger.
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TRAVAUX ET SAISONS
L’existence des populations rurales avant la mécanisation du XXème
siècle repose avant tout sur l’autosubsistance. Synonyme d’un travail
physique éprouvant auquel tout le monde participe (hommes,
femmes, enfants et personnes âgées), le quotidien est rythmé
par les
travaux agricoles saisonniers et les pratiques religieuses qui, de l’office
aux grandes fêtes liturgiques, ponctuent l’année de chaque individu.
L’activité
rurale en Lorraine
Les structures agraires
Le territoire communal (ou finage)
couvre une superficie moyenne
d’un millier d’hectares mais les différences sont grandes d’une région
à
l’autre (quelques centaines d’ha dans les plaines fertiles, trois ou
quatre fois plus sur les plateaux calcaires au sols pauvres).
Le finage a été
divisé
en deux parties bien distinctes
: les propriétés
individuelles et les propriétés communes. Les meilleurs sols du terroir
communal sont consacrés à
la culture. Divisés en un nombre de
parcelles égal à
celui des ménages, les lots sont répartis par tirage au
sort pour une période de neuf ou dix années. Chaque bénéficiaire
verse à
la caisse municipale une taxe de jouissance destinée au
paiement des impositions et des menus frais d’arpentage. Les pacages
couvrent des étendues de terrain de plusieurs hectares d’un seul
tenant
; ils se localisent dans les dépressions humides et dans les
parties hautes et sèches impropres aux cultures, souvent à
la lisière
des bois. Les propriétés individuelles consistent en champs, prés,
vignes, jardins et clos.
La mise en valeur du finage
Jadis, les paysans envoyaient leurs bêtes paître en forêt. Mais depuis
la Première Guerre mondiale, le pâturage du bétail en forêt a disparu.
La liberté
complète n’existe que pour les jardins et les clos. Ces
derniers étaient jadis réservés aux plantes industrielles (on y
produisait le chanvre dont la filasse portée au tissier
local servait à
fabriquer les fortes toiles qui emplissaient les armoires lorraines).
L’ensemble des champs ouverts forme le ban
c’est-à-dire la surface
de terrain exploitée suivant des contraintes communes. Les
vendanges étaient réglementées
: à
partir du jour où
les raisins
commençaient à
«
mêler
», jusqu’à
la récolte, on mettait les vendanges
en ban (il était interdit d’entrer dans les vignes non closes, même
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dans les siennes). De la même manière, un ban de fenaison fixait la
date d’ouverture de la prairie aux faucheurs. Tous y pénétraient le
jour prescrit et commençaient la coupe par les parcelles de l’entrée
afin de ne pas endommager l’herbe par le passage des chevaux et des
chariots.
Le territoire labourable est divisé
en trois parties de superficie à
peu
près égale appelées soles ou saisons. L’assolement triennal
consiste
en une rotation des cultures sur trois ans: blé
ou seigle, la première
année
; avoine ou orge, la seconde
; la troisième année, la terre était
laissée en repos. Après la Première Guerre mondiale, la jachère est
remplacée par les pommes de terre, les betteraves et les prairies
artificielles. La réglementation du travail en période de récolte est très
stricte. Comme pour la vendange et la moisson, la fixation de la
date
de la récolte s’est longtemps faites par les bans de moisson, de
pommes de terre.
Les terres labourables sont, comme les prés, utilisées pour le pâturage
du bétail. Selon le principe de la vaine pâture, les troupeaux peuvent
les parcourir durant le temps où
elles sont vaines, c’est-à-dire
dépouillées de leurs fruits et vides de semences. La commune engage
un pâtre pour les bêtes à
cornes et un berger pour le petit bétail.
Chaque matin, au son de la trompe ou à
l’appel du clairon du pâtre
ou du berger, les bêtes lâchées se rassemblent en un troupeau
commun dans la rue principale du village. A la nuit tombante, elles se
pressent aux portes des étables et des bergeries et le même signal
avertit du retour les propriétaires.
Le calendrier agricole
Printemps
En mars, le paysan va au labour de l’aube à
la fin de matinée, du
début de l’après-midi à
la nuit. Il utilise une charrue à
avant-train et à
pièces de fer (qui a remplacé
au milieu du XIXème siècle l’araire à
soc
conique avec une planche pour versoir) tirée par une paire de bœufs
ou un robuste cheval. Après avoir semé
de l’avoine un peu claire, il
répand de la luzerne ou du trèfle par-dessus et passe la herse à
dents
de fer ou à
dents de bois. Après les semailles de blé
de mars (le
froment étant la production essentielle des céréales), le paysan
sème un peu de vesces, quelques lentilles et des pommes de terre en
grande quantité. Dans les jachères réservées au blé
d’octobre, il
donne un second labour et fume avec du fumier essentiellement.
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En avril,
labours et semailles continuent. Le paysan achève le
troisième labour où
il a projet de semer du seigle, de l’orge ou du
chanvre. Il s’occupe des plantations de pommes de terre. C’est le
temps également de travailler dans le jardin, tout proche de la
chènevière où
le chanvre va être semé. Le chanvre aimant la terre
fraîche et bien fumée, la chènevière est située à
proximité
de la
maison.
En mai, le cultivateur commence la première coupe de trèfle semé
en
septembre, sans mélange d’autres graines, quand la fleur est nouée ou
boutonnée. Il continue de fumer au second labour les terres qu’il
sèmera en blé
d’octobre.
Eté
En juin, il faut faucher les luzernes, aussitôt que les premières graines
apparaissent. Les prés se remplissent de faucheurs à
façon, de
journaliers qui utilisent la faux qui a remplacé
la faucille au cours de la
première moitié
du XIXème siècle. Le soir même, si le temps est sec,
le foin est retourné. Le lendemain matin il est fané
à
l’aide du râteau
(plus tard de la faneuse) et mis en petites meules le soir. Le troisième
jour, il doit être entièrement ramassé
pour gagner la grange sur la
voiture à
échelle.
En juillet, on achève la fenaison et on prépare la moisson après avoir
nettoyé
la grange. Participent à
la moisson, tous les bras de la famille,
les militaires, les journaliers, les saisonniers venant des départements
voisins ou de l’étranger (d’Allemagne jusqu’à
la guerre franco-
prussienne de 1870).
On ramasse dans les vergers, sous les arbres, les
fruits véreux et on les donne aux cochons. Le paysan pense
également à
mettre dans un fût, prunes ou cerises, pour préparer de
l’eau de vie.
En août, on moissonne le froment ainsi que le méteil qu’on cultive
beaucoup au XIXème siècle pour parer aux aléas du climat (gelées
trop tardives, pluies trop abondantes), de l’avoine et de l’orge. Après
1850, pour moissonner, la faux remplace la faucille qui reste
employée pour couper le seigle lorsqu’il s’agit de faire avec ses tiges
des liens, des nattes, des chapeaux…
le paysan donne un troisième
labour aux terres qu’il destine à
l’ensemencement en blé
d’automne.
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Automne
On laboure une quatrième fois les terres qu’on veut ensemencer en
seigle, méteil et froment. On sème le trèfle seul, sans mélange
d’autres graines, comme on l’avait fait en mars. On récolte le chanvre
qu’on cueille quand la graine est mûre. Ensuite, on le bat pour en
tirer la graine, puis on le lie en petites gerbes avant de le mettre à
rouir, soit en étendant les tiges sur un champ humide, soit en le
plongeant dans des trous d’eau de la rivière ménagés à
cette effet, afin
qu’il se gorge d’eau pendant plusieurs semaines. On fauche les
regains. On commence à
récolter des fruits et des légumes. On
charrie du fumier sur les terres avant le dernier labour. On commence
à
battre le blé
pour les semences
; le grain le plus petit, fin et sec, sera
choisi.
Le temps des récoltes de fruits et de légumes est déjà
bien
avancé. Lorsque tous les labours sont terminés, le cultivateur sème du
seigle et ensuite du froment. Le blé
est battu au fléau sur l’aire de la
grange avec l’aide d’un ou de deux parents ou amis, selon un rythme
bien particulier acquis par l’expérience. Le tri entre la pousse et la
graine est effectué
à
l’aide d’un «
van
»
et d’un «
crible
». La paille est
alors employée à
la nourriture et à
la litière du bétail
; celle du seigle
pouvant servir, au XIXème siècle encore, à
la confection de chaume.
Hiver
La vie laborieuse à
l’extérieur se ralentit. Le paysan dépose sur les
prés naturels ou artificiels de la fiente de pigeon, des cendres, de la
suie, de la poussière de chaux, du fumier également, quand le souci de
fumer les prairies pénètre à
la campagne au cours de la deuxième
moitié
du XIXème siècle. Il va faire sa coupe
: tirer les bois,
confectionner les fagots, les charrier. Il ne doit pas oublier non plus
d’effectuer –
tout au moins au cours des deux premiers tiers du
XIXème siècle –
ses prestations
: empierrer un certain nombre de
mètres carrés de chemins communaux et vicinaux, sous la
surveillance du garde-champêtre. Il poursuit le battage des grains, les
labours et les plantations d’arbres quand le temps le permet. Il répare
outils et instruments aratoires et participe intensément à
la vie
domestique.
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Le calendrier des fêtes
L’automne et l’hiver
Dans la vie traditionnelle lorraine, l’année s’achève en automne.
Après la moisson et la fenaison, les champs sont ouverts à
tous les
animaux (vaine-pâture) et on prépare l’hiver en tuant le cochon.
La Toussaint
est la veillée des morts. Elle se tenait au soir du 1e
novembre et consiste en la visite au cimetière. Toutefois, il était
habituel que les hommes sonnent les cloches de l’église une partie de
la nuit.
La Sainte-Catherine et la Saint-Nicolas sont deux fêtes de jeunesse
qui se répondaient en écho. A la Sainte-Catherine (25 novembre), les
jeunes filles préparaient un repas dans un café
auquel on conviait les
garçons. A l’issue de ce repas, les filles pouvaient inviter les garçons à
danser (dans les sociétés traditionnelles, le célibat des filles était
stigmatisé). Quinze jours plus tard, la Saint-Nicolas
permettait aux
jeunes gens de rendre la politesse. La fête de saint Nicolas (06
décembre) est celle qui a le plus perduré. Il est accompagné
du «
Père
Fouettard
»
( «
Hans Trapp
»
en Lorraine germanophone). L’épisode
des trois enfants ressuscités par le saint est toujours figuré. Dans
l’église de Saint-Nicolas-de-Port, a lieu une procession où
apparaît le
Sire de Réchicourt, un miraculé
de saint Nicolas enveloppé
dans une
cape et portant bottes et gants de cuir ainsi qu’un heaume de métal à
la visière rabattue. On faisait croire aux enfants que le saint viendrait
la nuit distribuer des cadeaux (pommes, noisettes et orange au début
du siècle) aux enfants sages.
Noël
est une fête plus familiale et plus religieuse que la Saint-
Nicolas. En soirée, on brûlait une bûche
: un tronc d’arbre que le
grand-père bénissait en l’aspergeant d’eau bénite ou de vin. Une
demi-heure avant minuit, on se rendait à
l’église pour assister à
la
messe de minuit. Enfin avait lieu le repas de Noël où
l’on servait
uniquement de la viande de porc, du jambon voire du boudin.
Carnaval
marque la fin de l’hiver et le retour aux travaux des
champs. Le port des masques et des déguisements était courant sauf
dans les Vosges. Dans de nombreux villages, des cavalcades
parcourent les rues du village. On noircissait aussi le visage des filles
avec de la suie ou du cirage et on n’hésitait pas à
mettre du désordre
dans les cuisines. Enfin, faire des crêpes ou des beignets faisait partie
des coutumes de Carnaval.
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Le printemps
Le cycle pascal
:
le dimanche des Rameaux, on faisait bénir le buis
qui assurerait la protection des bêtes et des gens. A partir du Jeudi
Saint, les cloches de l’église ne sonnaient plus. Les enfants de chœur
parcouraient alors le village et annonçaient les heures du jour et les
offices avec des crécelles. Puis, ils passaient de maison en maison
récolter des œufs teints dans des décoctions de pelures d’oignons, de
grains de chicorée ou de fleurs d’anémone. Le Samedi Saint, ils
faisaient une tournée de quête et chantaient aux maîtresses de
maisons visitées un chant sur l’air du Stabat Mater.
Les Rogations
Le cycle de pâques annonçait le temps de processions. Celles
organisées durant les trois jours précédent l’Ascension portaient le
nom de Rogations. Le caractère agricole utilitaire de ces cérémonies,
consistant à
protéger les cultures, explique la faveur dont elles
bénéficient dans les villages.
La Fête-Dieu
:
à
l’époque de la fenaison et des moissons, il y avait
peu de place pour les distractions et les réjouissances. C’était le temps
des communions solennelles qui ont commencé
à
disparaître à
la fin
des années soixante. Le deuxième dimanche après la Pentecôte, la
Fête-Dieu (une fête mobile rattachée au cycle lunaire de Pâques) est
la cérémonie la plus fastueuse de la saison où
l’on vénère le Saint
sacrement. La fête consiste en une procession à
travers le village où
des branchages et des fleurs jonchent le sol; le prêtre dépose
l’ostensoir du Saint Sacrement sur des autels provisoires où
prières,
coups d’encensoir et bénédiction des paroissiens se succèdent.
Chaque maison située à
proximité
de ces reposoirs avait à
cœur de
participer à
la décoration (nappe blanche, chandelier, vases avec
fleurs cueillies dans le jardin). La procession terminée, on récupérait
précieusement les fleurs bénies.
L’été
La Saint Jean
est une fête solaire qui a lieu au solstice d’été, le 24
juin. Le principal rite consiste à
allumer un bûcher.
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Pistes d’exploitation pédagogique
Le village et la maison
LE VILLAGE LORRAIN
A partir de l’observation des photographies
Les maisons lorraines sont généralement disposées
le long de la rue principale. Quel nom donne-t-on à
ce type de village ?
Comment s’appelle l’espace situé
devant chaque
maison où
sont mis les tas de fumier ?
LA MAISON LORRAINE
A partir de l’observation des maquettes
A quel usage sont destinées les 2 ou 3 travées d’une
maison lorraine ?
De combien de fenêtres est pourvue chaque
maison ? Où
les trouve-t-on ?
La maison se compose en général de 3 pièces.
Citez-les en partant de la rue :
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L’OBJET DE MUSEE
A partir de l’observation d’un intérieur
Observez les objets de cette pièce (taille, matière,
traces d’utilisation, position), identifiez-les puis
expliquez leur fonction ?
Quelles différences faites-vous entre cette mise en
scène des objets et une salle d’exposition classique
(avec socles, vitrines..) ? Quel est selon-vous l’intérêt
d’une telle présentation ?
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Pistes d’exploitation pédagogique
Le village et la maison
LE VILLAGE LORRAIN
Observation et description des photographies
Comment les maisons sont-elles disposées le
long de la rue ? Et les unes par rapport aux
autres ?
Compare l’une des photographies avec ta
rue; qu’est-ce qui est différent ?
En l’absence de voitures, la rue est un lieu de
jeu, de rencontres et d’activités. Quels animaux
sont laissés en liberté
? Que font les personnes
que tu vois sur les photographies ?
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DES MAISONS, UN MUSEE
Immersion dans les intérieurs, perceptions sensorielles
Déplace toi dans la pièce et observe la couleur
des murs, la matière du sol, l’origine de la lumière,
le bruit que tu fais en te déplaçant. Que ressens-tu?
Imagine que tu remontes le temps et que tu vis
dans une ancienne maison lorraine: quels seraient
les sons familiers ? Les odeurs ? Les activités
quotidiennes ? Les personnes présentes dans la
pièce ?
Quels indices montrent qu’il s’agit bien d’un
musée et non d’une ancienne maison ?
Compare les objets de cette cuisine et de la
tienne: quels sont les différences ?
Tous les objets présentés sont d’anciens objets
utilisés au quotidien. Repère sur certains d’entre
eux les marques d’utilisation ou les traces d’usure,
ou encore les indices qui évoquent leur ancien
propriétaire (initiales, date, dessin).
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Pistes d’exploitation pédagogique
Cuisine et alimentation
LA CUISINE
Curiosité, observation et expression
Retrouve chaque objet sur ce dessin et indique son nom. Sais-tu à
quoi chacun sert ?
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L’ALIMENTATION
Transformation des matières premières
Replace ces illustrations dans le bon ordre afin de fabriquer un
délicieux beurre.
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Pistes d’exploitation pédagogique
Se chauffer et s’éclairer
AMBIANCE D’UNE VEILLEE LORRAINE
Ecoute et imagine…. retrouve ensuite les objets dans les vitrines ou les intérieurs du
musée.
«
Un bon feu flambe dans l’âtre et éclaire la taque décorée. Dehors, un vent d’hiver secoue les branches des
arbres et siffle au-dessous des portes. La lampe à huile éclaire la cuisine d’une faible lueur. Pour mieux y
voir, les femmes ont apporté
des bouteilles d’eau où
la petite flamme reflète sa pâle lumière. Les mâmiches
(mamies) se chauffent frileusement les pieds sur un couvot empli de braises. Les hommes fument
tranquillement leur pipe en bavardant. Ils parlent du temps, des
semailles d’automne, des bêtes…
Et, de fil
en aiguille, l’un deux commence à
raconter une petite histoire. Un autre lui succède. Et les éclats de rire
fusent.
»
(d’après A. Jeanmaire, Veillées lorraines, 1978)
élémentaire
Henri Valentin, le coin du feu dans les Vosges
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Pistes d’exploitation pédagogique
Travaux et saisons
ACTIVITES TRADITIONNELLES
A quelles activités correspondent ces photographies ? A quelle période de l’année avaient-elle
lieu ? Retrouve dans le musée certains outils visibles sur ces photographies.
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Légendes et crédits photographiques
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Pour tous les visuels, crédits photographiques ©
musée Lorrain, ville de Nancy.
p.3/cartes postales : Bertrichamps, Allarmont, Bertrambois, Brû
p.4/cartes postales : Le repas des bûcherons au Ballon d’Alsace, fenaison à
Longemer p.5/cartes postales : Gérardmer le Haut de l’Urson, scierie communale de La Bresse, Aubrives, Burey-en-Vaux p.6/cartes postales : Beauzée-sur-Aire, Létricourt; photographie : façade de maison lorraine p.7/ village lorrain; vues de l’intérieur I (cuisine et chambre); vue de la grange p.8/ cuisine de l’intérieur IV; plaque de cheminée en fonte de 1709 (intérieur I); cuisine de l’intérieur III (détail) p.9/ saunière formant tabouret (intérieur I); table (intérieur II); coffre peint 1775-1800 (Vosges); lit mi-clos (intérieur III); cuisine de l’intérieur II (détail) p.10/ David Dugay, aquarelle d’après un relevé
de 1943 d’une maison de Brizeaux
, Meuse (détail); carte postale représentant le puits à
balancier de Parroy; cuisine de l’intérieur I (détail) p.11/ femme cuisinant à
Vandoeuvre
en 1906; moissonneurs à
Vandoeuvre
en 1903; Charles Pinot, La
cuisine d’une maison lorraine vers 1850
p.12/ Ferme à
Bussang; moule à
fromage (espace laiterie); carte postale: le marché
au beurre à
Nancy (détail) p.14/moule à
agneau pascal: espace boulangerie (détail) p.15/ espace laiterie (détail); le tuage du cochon à
Villers-lès-
Nancy; Adrienne Jouclard, Raclage du cochon à
Onville
et Homme râclant
un cochon saigné
(détails) p.16/ cartes postales: le travail de la vigne à
Brûley, chargement de vin à
Lucey; alambic de Selaincourt, 1800-1825 p.17/ Henri Valentin, le coin du feu dans les Vosges;
chambre de l’intérieur IV (détail); chambre de l’intérieur II (détail) p.18/ chaufferette utilisée par Louise Adam (1847-1933); pelle à
couvot
en laiton, poêle de Longwy 1775-1800, femme lisant dans une cuisine à
Vandoeuvre
en 1909 p.19/ cuisine de l’intérieur III: cuisine de l’intérieur II; paroi vitrée de l’intérieur I; lampe à
huile p.20/ bougeoir en cuivre 1850-1900; mouchette en fer XIXème siècle; lampe à
pétrole p.21/ lampe de brodeuse 1875-1900; lanterne p.22/ départ aux champs en 1905 à
Vandoeuvre; cartes postales:
Arnaville, Gémonville, Maxey-sur-Vaise
p.23/ Adrienne Jouclard, Deux femmes et un homme arrachant des pommes de terre, 1907; Joseph-Emile Gridel, Le berger communal de Deneuvre
gardant son troupeau, vers 1890; Adrienne Jouclard, Le semeur à
Chambley, début du XXème siècle p.24/ Adrienne Jouclard, Homme et femme bêchant, début du XXème siècle; paysannes et paysans dans un champ devant une grande charrette pleine de foin tirée par deux bœufs; la fenaison en Lorraine, 1895; un paysan faisant des bottes de foin, Vandoeuvre
p.25/ Henri Valentin, Une coisseuse
de chanvre dans
les Vosges; crible provenant de Messein, fin du XIXème siècle; deux hommes avec une charrette pleine de bois, forêt de Haye; homme assis nettoyant des betteraves, Vandoeuvre, 1908 p.26/ Miracle de saint Nicolas, imagerie Pellerin, Epinal; Nativité, Lagney, XVIIIème siècle p.27/ Henri Valentin, le dimanche des bures; crécelle, XXème siècle;
bannière de procession, XIXème siècle.