Auschwitz : “Ne jamais oublier“Oswiecim n'évoque pas grand chose hors de Pologne. Cette petite ville située à moins de100 km à l'ouest de Cracovie est pourtant connue dans le monde entier, une notoriété dontelle se passerait bien : Auschwitz, son nom germanisé, suffit à inspirer l'horreur et l'effroi.Dans ce lieu qui fut l'un des six camps installés par les nazis sur le territoire polonais, onestime que deux millions de personnes appartenant à 28 nationaliés différentes ont périentre mai 1940 et janvier 1945. La visite est pénible mais indispensable, comme unhommage à la mémoire des victimes mais aussi des survivants qui plus que tout redoutentque l'on oublie ces temps de barbarie.

Auschwitz I Auschwitz II - Birkenau

Témoignages de déportés

Auschwitz I

Dès septembre 1939, les Allemands contrôlent une bonne partie du territoire polonais et les nombreuses arrestationsauxquelles ils procèdent ne tardent pas à poser un problème. Les prisons sont déjà pleines ; que fera t-on desprisonniers à venir? Dès la fin de l'année, l'idée d'ourvir un camp de concentration prend forme. Le terrain de l'anciennecaserne d'Oswiecim constitue un bon choix. Sa situation en dehors de la ville permet - déjà - d'envisager des possibilitésd'agrandissement. Les travaux commencent en avril 1940 et deux mois plus tard, 782 prisonniers politiques polonaisarrêtés par la Gestapo inaugurent les lieux. Un début prometteur...

Un camp de concentration Le musée de l'horreur

Des traces...

Un camp de concentrationAvec ses petits bâtiments en brique rouge et ses allées bien agencées, l'endroit évoque presque une cité ouvrière. Mais lesbarbelés et les miradors ramènent à la triste réalité : Auschwitz I regroupait des prisionniers réduits en esclavage aux travauxforcés ou soumis à des expériences médicales.

Un avertissement éloquent, et sur le portail, la sinistre devise de l'universconcentrationnaire nazi : Arbeit macht frei, “Le travail rend libre“...

Quitter Auschwitz? Difficile à imaginer. Pourtant, 667 prisonniers ont tenté des'évader de cette véritable forteresse. Les deux tiers ont réussi à s'enfuir. Unchâtiment exemplaire attendait ceux qui étaient repris.

Ici comme dans tous les camps qu'ils ont dirigés, les nazis se sont livrés sur une“matière première humaine“ abondante et impuissante à des expériences médicalesaussi douteuses que cruelles. Le docteur Mengele, de sinistre mémoire, s'est pour sapart particulièrement intéressé à la génétique et à l'anthropologie, travaillantbeaucoup sur la gémellité.

Le musée de l'horreurAuschwitz I abrite notamment aujourd'hui les principaux pavillions du musée. L'exposition est organisée autour de bâtiments“nationaux“ qui évoquent le sort réservé aux opposants politiques et aux juifs, premières victimes en nombre, dans lesdifférents pays occupés par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale. Le lieu reçoit de nombreux groupesscolaires venus de tous horizons. Ils savent pour la plupart à quoi s'en tenir, pourtant la visite est rarement autre chose qu'unmoment d'effroi.

L'entrée du musée.

Dans les différents pavillons, des photos et des souvenirs retracent le calvaire despopulations civiles et les persécutions de la guerre.

Dans les rues du camp, chacun, les yeux remplis d'images cent fois déjà vues etpourtant toujours aussi fortes, est livré à ses pensées...

Des cendres humaines recueillies dans l'un des fours crématoires.

Hors du camp, dans les rue de la ville : Oswiecim est une ville presque comme lesautres.

Des traces...Des traces de l'horreur, palpables et impalpables. Une odeur, un éclairage, un courant d'air... Qu'importe la part de“reconstruction“ effectuée a posteriori par les visiteurs. Ici, chacun a rendez-vous avec l'idée que l'on se fait du mal absolu.

Le premier bloc de gazage des prisonniers.

Au mépris de toutes les conventions internationales, les installations ont étéinaugurées par des prisonniers militaires soviétiques en septembre 1941 : le Zyklon Ba révélé sa redoutable efficacité.

Des fours crématoires.

Auschwitz II - Birkenau

Dès 1941, la construction d'un deuxième camp situé à 3 km du précédent commence. Il se trouve non loin du village deBrzezinka, Birkenau en allemand, dont le nom évoque les bois de bouleaux voisins... Comme on s'en doute, la poésie n'apas sa place dans cette véritable usine à mort, pièce maîtresse dans le dispositif de la “solution finale“. Tout a été trèsbien pensé. Les juifs arrivés en train jusque dans le camp sont immédiatement triés : la plupart se trouvent dirigésdirectement vers les chambres à gaz ; les autres, jugés aptes au travail, se voient promis à une mort moins immédiatemais presque aussi certaine. Par l'usage auquel ils étaient destinés et leur superficie (175 ha), les lieux font frémir.L'intelligence et le savoir-faire déployés à de telles fins effraient tout autant.

Un camp d'extermination En souvenir des victimes

L'intérieur d'une baraque en360°

Un camp d'exterminationDès le début, la vocation de Auschwitz II-Birkenau est claire : la plupart de ceux qui débarquent ici périssent dès lespremières heures de leur arrivée, un mouvement qui s'accélèrent particulièrement à partir d'août 1942. A la fin de la guerre,les nazis ont tenté de détruire les preuves de leurs activités criminelles en détruisant notamment les chambres à gaz et lesbaraquements. Il ne reste aujourd'hui que 45 baraquements en briques et 22 en bois sur plus de 300 mais l'emplacementdes bâtiments détruits se dévine aisément.

La voie ferrée permettait de débarquer les prisonniers à l'intérieur même du camp.

Les ruines d'un crématoire...

... Birkenau en comptait quatre.

Les baraquements destinés à loger les prisonniers réduits aux travaux forcés. Cesblocs d'habitation étaient construits sans fondations sur un terrain marécageux. Le solen terre battue se transformait souvent en boue.

Dans les baraquements, les châlits de trois étages occupaient l'essentiel de l'espace.La literie ? De la paille pourrie. Sur chaque niveau s'entassaient 8 à 10 personnes.

Dans le baraquement réservé à la compagnie pénale du camp, une fresque réaliséepar un détenu a miraculeusement été conservée : elle montre les prisonniers occupésà creuser un fossé de drainage, sous la surveillance de leurs geôliers.

Dans les latrines, une inscription engage les détenus à se tenir tranquilles. Leseffroyables conditions d'hygiène, le froid et les rations alimentaires minimales ont faitde nombreuses victimes.

En souvenir des victimesLa bataille des chiffres n'est pas terminée. A la fois enjeu politique et débat historiographique, elle continue de diviser ceuxqui se penchent sur la question. Combien de morts ? Et combien de juifs parmi les victimes : 1,3 million, 1,5 millions ? On nele saura jamais, mais on est certain qu'ils constituent la grande majorité de ceux qui ont perdu la vie ici.

Un mémorial international aux victimes du fascisme, comportant des inscriptions en10 langues, a été inauguré en 1967. C'est ici que se recueillent les officiels quivisitent le camp...

... et les anonymes aussi.

Tous les prisonniers étaient dépouillés de leurs biens dès leur arrivée au camp. Ceuxdestinés à mourrir n'avaient plus besoin de rien. Aux autres, on donnait l'uniformerayé réglementaire, puis, plus tard, des effets priochés dans les bagages.

La douche collective, glacée ou brûlante mais toujours sans savon ni serviette : étapeobligatoire dans le parcours des nouveaux arrivants.

Les autoclaves destinés à désinfecter les effets récupérés. Une grande partie dulinge était acheminée en Allemagne, distribuée à la population ou recyclée. Lerecyclage a aussi concerné... les cheveux tondus des détenus qui sont entrésnotamment dans la fabrication de matières textiles. A la libération du camp, lesSoviétiques ont trouvé 7 tonnes de cheveux emballés dans des sacs, en attented'être expédiés vers les usines du Troisième Reich.

Le mur du Souvenir, dans le bâtiment du Sauna. Victimes anonymes ou identifiées dela barbarie nazie... On les voit ici dans leur “vie d'avant“ : souvenirs de vacances,réunions de familles, sourires de fête ou postures officielles. Autant de destins brisés.

Auschwitz II - Birkenau : l'intérieur d'une baraqueréservée aux femmes

Témoignages de déportés

Extraits du reportage “Auschwitz, le temps de la mémoire“

Il y a soixante ans ils ont été déportés depuis la France vers les camps d'extermination d'Auschwitz, mais restentindéfectiblement liés à un passé qui malgré l'horreur et la disparition a fait d'eux des hommes et des femmes tournés versla vie.Tous à leur manière sont des rescapés du génocide. Au travers de séquences vidéos, depuis leur domicile parisien, ilslivrent leurs témoignages entre sensation immédiate et analyse distanciée, entre évocation et réflexion, entre devoir eturgence. Sans pathos mais avec passion.

Séquence sonore : Addy Fuchs , né le 26 février 1926.Arrêté le 26 juillet 1942 et déporté à Auschwitz III / Blechhammer par le convoi N°35 (enregistré en janvier 2005)