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  • Asaradura Notes de voyages contre le TAV

    Introduction"C'est l 'histoire d'un train qui ne passe pas"

    Historique du projet de ligne grande vitesseLyon-Turin et du mouvement No TAV

    Ce qui fait la forcedu mouvement No Tav

    Une lutte habiteUn mouvement htrogne

    Comment le No TAV a dj gagn

    Art de la guerre, arts du mouvement :comment raconter le mouvement No TAV

    Cest l histoire dun train qui ne passe pas

    Historique du projet de ligne grande vitesseLyonTurin et du mouvement No TAV

    Au dbut des annes 90, trente axes de communication sont dessins lchelle europenne pour assurer une meilleure liaison entre lesgrandes mtropoles, et relancer encore le dveloppement indfini delconomie de la zone euro. Le cinquime de ces corridors stratgiques prtend relier grande vitesse Lisbonne et Kiev, en passantpar Lyon et Turin, et donc par une zone montagneuse o est prvu lepercement de deux mgatunnels de 23 et 57 kilomtres. Ct italien,en Val de Suse, cestdire dans une valle pourtant dj bien strie parune autoroute, une nationale et une voie de chemin de fer, ce projet vaprogressivement gnrer un mouvement dopposition dune ampleuringale en Europe.

    Des campagnes dinformation, puis des actions de sabotage contreles travaux prparatoires se succdent au cours de lanne 1996 ; cesattaques, visant principalement des installations lectriques et desrelais de tlvision, restent alors relativement mystrieuses aux yeuxde la plupart des habitants du Val de Suse. La premire grosse publicitautour de la lutte contre le TGV LyonTurin est pourtant lie, un anplus tard, larrestation en fanfare de trois anarchistes accuss dtreles auteurs de ces sabotages. Le gros des accusations tombera, fautede preuves. Mais, entretemps, Sole et Baleno (Edoardo Massari etMaria Soledad Rosas) sont morts en dtention : les autorits parlent desuicides ; certains activistes restent persuads que leurs deux camaradesont t assassins.

    Malgr le caractre confidentiel des premires campagnes No TAV, eten dpit de la rpression froce qui a caractris cette premire phase,en une dizaine dannes un important mouvement dopposition vanatre et se renforcer notamment partir des premires occupations depresidi, en plusieurs points du Val de Suse. Le presidio, hautlieu de lalutte No TAV, dsigne en italien tout la fois un rassemblement , une garnison et va peu peu quali fier au cours de la lutte une position tenir, soit un bout de terrain occup par les opposants au projet, qui,en fonction de lactualit peut rester quasiment dsert ou se couvrirsubitement de cabanes et de tentes, dinfrastructures indispensablescomme des cantines, des toilettes ou des scnes de concert.

    Le mouvement franchit un seuil en dcembre 2005, aprs lattaque parla police dun presidio baptis par les occupants Libre rpublique deVenaus (du nom du lieudit o une cabane collective a t construite).Alors que le presidio de Venaus est violemment expuls pendant lanuit, des textos dalerte sont envoys au quatre coins de la valle etds le lendemain, 10 000 opposants au projet encerclent le camp des

  • carabiniers. Pendant prs de 48 heures, les opposants font un sigequi empche les policiers de quitter leur position, toutes les routesde la valle sont bloques. Certains petits malins russiront mme drober leur ravitaillement en nourriture... Tout se termine par uneretraite piteuse des forces de lordre, entre deux haies de manifestants,sous les hues, les crachats et les insultes. Dans la foule, le presidio deVenaus a pu tre reconstruit, et les quipements abandonns sur placepar les forces de lordre se sont rapidement retrouvs mis en pices, oudisperss aux quatre vents. Cette journe restera grave dans toutes lesmmoires, ce sera le fameux 8 dcembre , dont lanniversaire est ftchaque anne par le mouvement, la victoire de Venaus...

    Fort de cette victoire, le mouvement gagne soudainement en force. Lescomits prolifrent ; un peu partout dans la valle, des drapeaux NoTAV apparaissent aux fentres, des comits locaux sont crs dans lesvillages, et les maires de nombreuses communes se retrouvent sommsde se positionner contre le projet par leurs administrs. Le premierporteparole du mouvement, partisan de la ngociation avec lesautorits, est dsavou. Le gouvernement Berlusconi finit par dcider un moratoire sur les travaux, qui sont suspendus jusqu la remise durapport sur les impacts sanitaires et environnementaux du projet detunnel. Pendant cette pause , qui se prolongera en gros de la fin 2005 2010, de nombreuses actions sont organises malgr tout pour bloquerles travaux prliminaires aux percements des galeries dexploration.Des terrains sont galement achets l o les futurs travaux des tunnelssont prvus, et par plus dun millier dacqureurs, pour tenter de ralentiradministrativement toute tentative dexpropriation et de vente force...Sur lun de ces terrains, tout ct du presidio de Venaus, une maison endur est construite, la clbre Bata, en Val Clarea.

    Petites machines de crise

    Les hostilits reprennent clairement en 2010, dans un contexte decrise et daustrit, un moment o le projet LyonTurin est prsentcomme un puissant outil de relance conomique. Lide que ledveloppement des grandes infrastructures serait indispensable pour sortir de la crise nest pas vraiment nouvelle. Dj dans les annes30, la politique des grands travaux tait cense sauver les conomiesoccidentales ravages par la grande dpression . Au fond, crise pourrait tre le nom, chaque fois rpt, des phases de restructurationdu capitalisme. Et le dveloppement des infrastructures la solutionmiracle cense y remdier. La crise comme fonctionnement normalde lconomie, comme toile de fond.

    En 2011, Mario Monti remplace Berlusconi, mais il ne sagit pas proprement parler dune alternance politique : il se retrouve la ttedun gouvernement technique qui doit rparer les rouages conomiquesdu pays, en appliquant les mesures dajustement ncessaires et enfaisant aboutir ce fameux chantier du TAV. Ct franais, le projet deTGV LyonTurin avait t remis au got du jour en 2008 sans susciterde dbat particulier, dans le cadre dun simple plan de relance. Pour rtablir la rentabilit de lUnion europenne face la concurrencedes conomies mergentes , il faudrait la fois serrer les boulons etfaire circuler davantage de marchandises ou de voyageurs friqus. Aunom de la crise, ou dans le silence assourdissant des engins de chantier,cest le mme passage en force qui se joue, la mme stratgie du choc. La rformes des retraites est indispensable , le train grande vitessedoit passer , il faut rformer le systme de sant . Les grands amnagementset la crise fonctionnent au sein dune mme machineriepolitique qui vise transformer les conditions de vie des populationscomme si, prcisment, cette opration navait rien de politique,comme si les volutions simposaient dellesmmes, avec la fatalitdun ordre des choses, dune inluctable marche en avant.

    Ce qui se joue avec la crise et ses ncessaires restructurations ,cest une nouvelle organisation du monde. La stratgie : dune part,intensi fier les conditions dexploitation (en gelant les salaires, rduisantles retraites, en dveloppant la flexibilit et en assouplissant lesprotections sociales... voir les thrapies de choc imposes en Grce, enItalie ou en Espagne au cours des dernires annes) ; dautre part, oprerune meilleure connexion entre des zones fortes valeurs ajoutes ,transformant de facto les autres territoires en zones de relgation. Il ya les centres villes intelligents, durables, hauts lieux de la performanceconomique, et les banlieues pourries. Il devrait y avoir le LyonTurin,comme si les mtropoles pouvaient dj se toucher, sinterpntrer...mais condition de faire disparatre le Val de Suse, sous un trait dunion

  • ou sous les gaz lacrymognes.

    Dans ce contexte historique marqu par la crise comme mode degestion politique des populations, le mouvement No TAV devient unelutte emblmatique : il saffronte en effet directement lexpression laplus nette de la gouvernementalit contemporaine. La bonne gouvernancedes annes 2000, cest celle qui, sur le modle de la gestion decrise ou du gouvernement par les experts, prtend relancer lconomiepar des rajustements indispensables et par le dploiement sans fin durseau des grandes infrastructures : fibres optiques pour les villes intelligentes,autoroutes, lignes trs haute tension, lignes grande vitesse...(cest dans la lutte No TAV que nat le sloganaxiome : le pouvoir estlogistique, il potere logistico ). Et en Val de Suse il apparat clairementque faire passer une ligne grande vitesse est un acte de guerre, quonne peut plus distinguer scurisation (contreinsurrection), dveloppementconomique, et investissement de formes technologiques en vuede la gestion des flux. Cette dimension emblmatique du mouvement No TAV explique pour une part ses rsonances en Italie et plus largement en Europe. Mais audel de son caractre exemplaire la lutte contre le TGV LyonTurin fait rfrence parce quelle se met la hauteur de cettetentative de restructuration capitaliste (qui est aussi restructuration du territoire) et quelle parvient lui faire opposition, du fait de sa puissance propre.

    Ce qui fait la force du mouvement No Tav

    Une lutte habite

    Densit thique : la lutte No TAV part de lhabiter, de ce qui se vit dansla valle, mais elle soppose une lutte identitaire ou ractionnaire dansla mesure o sa consistance est la vie partage qui sinvente dans la lutte(et pas un pseudo mode de vie prexistant la lutte), sur une autoroutebloque, en se donnant des moyens de fortune pour quexiste autrechose que nos dprimantes conditions dexistence ; on part de barricades,dune cantine, dassembles et de discussions un peu parpilleset tout a fait signe et se projette jusqu une Libre Rpublique de laMaddalena, une commune o des centaines de personnes peuvent seretrouver, manger, dormir, discuter et sengueuler, faire la fte, prendredes nouvelles du Kurdistan et prparer les prochaines bagarres contreles flics et les bulldozers...

    La lutte No TAV est une lutte de territoire avec ses complicits ou sesinimitis de voisinage, ses sentiers quon reparcourt depuis la mmoiredes partisans ( mon oncle avait tendu une embuscade en passant parl... ). On lutte depuis ce qui nous attache icibas ; les attachements,cest ce qui fait quon nest pas prt laisser les vignes du voisin se faireventrer, cest aussi ce qui nous donne prise sur la situation : des sentiersqui permettent de sapprocher du chantier et de rapidement disparatre,des rseaux dinterconnaissance qui font que tout se sait, quon est aucourant des mouvements de troupe, quon sait o trouver une trononneuse,un tracteur... Cette insistance du territoire nous mne jusquaugnie du lieu, les lutins des bois, saboteurs occasionnels et quon accusedun air complice quand dans un bar on se met discuter de la dernireattaque sur le chantier ou contre des engins de construction appartenant une entreprise pro TAV. Le territoire est la fois lobjet de la lutte, lethtre dopration, une arme pour les opposants, et la texture mme desliens, le mouvement avec ses asprits et son htrognit. Il est ce qui seconstruit dans la lutte No TAV.

    Un mouvement htrogne

    Pour le No TAV, on parle beaucoup de mouvement de masse, demouvement populaire Cest vrai quil y a parfois du monde dansles assembles (plusieurs centaines) et encore plus dans les grandesmanifestations (plusieurs dizaines de milliers), mais la puissance dumouvement vient surtout de sa capacit composer, articuler cenombre. Le mouvement est composite : une composition parfoisimprobable de tactiques, de formes de vie et de prsences (entre lesgrandsmres catholiques et les anarchistes insurrectionnalistes ounon, entre recours juridiques et blocages de routes, manifs massives etactions de sabotages nocturnes).Et au travers de ce divers merge bien une rsultante, videntepour tous : cest prcisment a quon appelle le mouvement , unedynamique collective qui a, jusquel, rsist aux tiraillements internes,

  • la rpression policire et aux offensives mdiatiques Comment atient ? Par cette dtermination commune minimale : le non au projet(et tout ce quouvre ce refus, tout ce quil libre) ; du fait aussi duneadversit, un ennemi commun ; et grce sans doute aux assembles etaux occupations larges, pas tant comme lieux de dcision que commeoccasions de forger une histoire et une langue commune (il est cetgard frappant de constater comment, des anarchistes aux paci fisteschrtiens, les mmes anecdotes circulent pour dcrire le mouvement etses diffrentes phases).Comment le No TAV a dj gagnLe mouvement No TAV est victorieux ; non pas du point de vue dunarrt du chantier : des protocoles narrtent pas dtre re re et re signspour la tenue des travaux ; le tunnel de Chiomonte, mme sil ne sagitque dune galerie dexploration, a commenc tre creus sous hauteprotection militaire ; trois descenderies ct franais ont t ralises etle percement du tunnel principal doit commencer en 2016. La victoireest plutt aller chercher du ct de cette vie en lutte : les bifurcationsdans des dizaines dexistences, les amitis la vie la mort et unenouvelle gographie qui sinvente dans la valle. Il y a ces complicitsinattendues, comme quand on est pris en stop par un 4x4 rutilant quiporte sur le pare brise arrire lautocollant proclamant nous sommestous black bloc . La victoire du mouvement cest la diffusion dunetonalit diffrente, une dissonance dans la vie dune fraction importantede la population qui justement devient autre chose quune populationgrable merci : parce quon sorganise, parce quon fait autre chose quece qui tait attendu de nous.

    Face loffensive mdiatique stigmatisant le black bloc (notammentcomme corps tranger : les activistes professionnels venus dailleurs), unslogan se rpand comme une trane de poudre, au point mme dtrerepris par Perino, le porteparole du mouvement, devant les camrasde tlvision : N ous sommes tous black bloc . Sorte de revanchehistorique sur la dissociation ayant suivi les vnements de Gnes de2001, et qui avait laiss des dizaines dinculps dans un isolement quasitotal. Audel du simple slogan, son usage massif depuis lors signi fiesurtout que le mouvement sassume dans toutes ses composantes, parcequil assume de se donner les moyens : se donner les moyens de fairereculer la police, de faire manger pour des centaines ou des milliersde participants aux blocages, discuter de ce quon veut et exposerdes dsaccords ; on se donne le temps ensemble, pour reprendre leterrain ; on arrache des lieux pour suspendre la fuite du temps sous saversion conomique, lorsque lon perd simplement sa vie la gagner.

    Art de la guerre, arts du mouvement :comment raconter le mouvement No TAV

    Le mouvement a produit des centaines danecdotes, de chansons,de rcits, de lgendes, danalyses, dhypothses stratgiques, demaldictions, dinepties La saisie quon en propose sera ncessairementpartielle, rduite, et en loccurrence un peu aride. On proposede sattacher cette part danalyse et de posie produite depuis unepublication rgulire, un journal intitul un peu mystrieusementLavanda et dont les cinq numros se succdent entre octobre 2011 etnovembre 2013. Lenjeu : ressaisir lintelligence dune phase rcente dumouvement No TAV qui fait largement cho cette squence historiqueimmdiate, ce prsent qui dfinit notre actualit avec ses possibilitsde bouleversement de grande ampleur, depuis la crise conomique de2008 et les rvolutions arabes en passant par la commune de Tahrir etde Taksim, les ripostes aux politiques daustrit en Espagne et en Italie,lirruption des ZAD en France

    Lavanda

    Chaque numro souvre par les mmes paragraphes de prsentation. Gi le mani della Lavanda ! a t le cri ironique par lequel les policierset les journalistes ont t accueillis, le 27 Juin, sur les barricades de la LibreRpublique de la Maddalena. Le fait que le mouvement No Tav ait toujourspris soin des champs de lavande, alors que ltat les pitinait de ses arrogantesbottes noires, contenait, cette chelle, un signe, une ligne de partage. Lavanda ! , a ressemble aussi une sorte de cri de guerre, un peu trange,bien loin des slogans triomphalistes. Lavanda , ce sont galement des notes de voyage crites plusieurs dont les

  • chemins se sont croiss entre les presidi et les bois du Val de Suse. Certains seconnaissaient bien, dautres moins, dautres encore pas du tout. Lavanda nestdonc pas lorgane dun groupe politique, mais lexpression dune exigence ne etpartage durant la lutte No Tav. Une exigence ne avec les gaz lacrymognes.Ceux qui la couchent sur le papier sont des ennemis de la Grande Vitesse, maisaussi du monde qui nous limpose. Criminels ? Certainement, comme les rvesveills dune vie sans forts ni coffreforts, libre et sauvage comme la lavande. Les Lavanda se veulent lexpression dune position radicale ou rvolutionnaireau sein du mouvement, produite partir de lexprience depersonnes impliques de longue date dans la lutte contre le LyonTurin.Lavanda constitue surtout notre connaissance la seule publicationNo TAV rgulire au format papier, et dune certaine ampleur (chaquenumro est tir plusieurs milliers dexemplaires, diffuss notammentlors des grandes manifestations No TAV de ces dernires annes). Ce quiexplique sans doute aussi pourquoi ce journal sest trouv particulirementcibl par la police et la justice italienne.Le projet de cette compilation des diffrents numros de Lavanda,permettant au passage de documenter les phases les plus rcentes de lalutte No TAV, nat dabord dune volont de contrer la stratgie dcrasementmise en oeuvre par les autorits italiennes depuis le dbut de lalutte No TAV, mais qui a pris depuis ces dernires annes un tour encoreplus explicite : arrestations par dizaines, procs massifs et au long courspour plus dun millier dopposants, condamnations plusieurs annesde prison pour les participants avrs aux manifestations massives etoffensives de lanne 2011, recours la catgorie juridique de terrorismepour dsigner les tentatives dentraves directes au bon fonctionnementdu chantier, surveillance gnralise des activistes No TAV, occupationmilitaire de la valle, campagne de dnigrement dans les mdias

    Le Val de Suse, et plus loin

    Face ladversit, le mouvement dopposition la ligne LyonTurin ad en permanence trouver les moyens de son approfondissement etde sa transformation. Chaque numro de Lavanda sera introduit, dansles pages qui suivent, par une mise au point explicitant comment, pourchaque priode, les No TAV ont d ajuster leurs options stratgiqueset tactiques lavance des travaux, loccupation policire et leurspropres impasses.

    Plus largement le mouvement No TAV, notamment au travers de sesdbats stratgiques et tactiques, doit permettre de renseigner dautresluttes, prises dans une configuration des hostilits similaire (luttescontre des projets damnagement type oliennes, gaz de schiste,incinrateurs, lutte contre laustrit ou la gestion de crise, etc.) oucherchant les mmes lignes victorieuses : faire composer diffrentestendances, trouver une prise de consistance territoriale.

    Le second grand contexte pour cet ouvrage, ce qui a motiv galementsa publication rapide cest le mouvement qui se rpercute en Francedepuis les diffrentes ZAD, avec le sentiment que les choses se sontacclres ou tendues encore avec lassassinat de Rmi Fraisse par lesgendarmes mobiles sur le site du barrage de Sivens en octobre 2014,puis lexpulsion de ce mme site mene conjointement par les agriculteursfascisants de la FNSE A et les flics au dbut 2015.

    Dernier lment de contexte : la reprise des travaux ct franais.

    Pour tayer cet largissement de focale partir de la lutte en Val deSuse, les diffrents numros de Lavanda seront accompagns de textesissus dautres luttes et dencarts permettant de rpercuter lcho dautresbatailles, en Italie, autour de la ZAD de NotreDameDesLandes etjusquau coeur des mtropoles europennes (Rome, Nantes et Barcelone).Le patchwork qui en ressort nest pas tout fait tiss au hasard : ildoit permettre de ressaisir une situation transnationale o la possibilitde scessions territoriales de grande ampleur, depuis les valles alpinesjusquaux quartiers de Barcelone, fait son cheminSintresser au mouvement No TAV cest sinspirer dune situation oune position de force slabore au fil du temps, pour penser ce queveut dire gagner . Cette publication veut renouer avec une lecturestratgique des situations : stratgie ne doit pas tre entendue commeun gros mot qui servirait surtout craser tout ce qui a trait laffectifou au jeu de nos faiblesses, de nos dlires Stratgie veut dire : accepterde se poser la question de gagner en puissance et de gagner tout court.

  • Comment on gagne ? Comment projeter un plan dorganisation quine croise quincidemment celui de lennemi (a veut dire que laffrontementavec la police nest au fond quun malheureux accident, unecollision fortuite entre nos aventures collectives et les forces de lordreplaces malencontreusement sur notre passage), un plan qui tire saconsistance de toute autre chose, dailleurs.

    Cest ainsi que nous comprenons llment populaire de la lutte dans leVal de Suse : toutes ces vies, cette inventivit, les joies et les peines quela rpression cherche neutraliser sans jamais pouvoir les rduire tout fait. Le pouvoir nest pas menac par quelques lments subversifs dublack bloc, une poigne de poissons encapuchonns dans un bassin queles forces de lordre auraient pour mission dasscher. La menace cestlonde commune, vague daffects, dlans incontrlables, de solidaritset dhabitudes quotidiennes, le tout prenant forme pour emporter lesbarbels drisoires du chantier et les digues qui nous tiennent loignsde notre propre puissance. Se jeter ensemble dans linconnu.