[Armand Puig i Tàrrech] La Parabole Des Dix Vierg(BookZZ.org)

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analecta biblica - 102 col.lectània sant pacià XXVIII ' ARMAND PUIG i , TARRECH ROME BIBLICAL INSTITUTE PRESS 1983

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teologie

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  • analecta biblica - 102 col.lectnia sant paci XXVIII

    ' ARMAND PUIG i , TARRECH

    ROME BIBLICAL INSTITUTE PRESS

    1983

  • ISBN 88-7653-102-5

    Il est indniable que l'tude des paraboles occupe une place pnvi-lgie dans la recherche no-testamentaire actuelle. Cependant, les dernires approches globales aux paraboles synoptiques se limitent reproduire, en ce qui concerne celle des dix vierges, des positions fort connues. Cet ouvrage prtend dbloquer l'tude de cette pa-rabole en utilisant un modle d'analyse multiforme qui ne se rattache aucune thorie parabolique pralable, mais qui reste attentif aux prsupposs mthodologiques employs. L'analyse narrative (formelle et dramatique) du texte met en vidence une rinterprtation mat-thenne typique du Premier vangile. Cette analyse est complete par une tude de tradition-rdaction qui nous conduit l'identifi-cation d'un schma parabolique divergent de Mt 25,1-13. Ce schma peut tre situ avec vraisemblance dans les coutumes palestiniennes du Ier sicle ap .-J .C. En dcrivant la nouvelle articulation narrative, nous reprons l'ouverture du processus mtaphorique l'aide des catgories de tension et

  • ANALECTA BIBLICA INVESTIGA TIONES SCIENTIFICAE IN RES BIBLICAS

    102

    col.lectnia sant paci XXVIII

    LA PARABOLE DES DIX VIERGES (Mt 25,1-13)

    ROMAE BARGINONE E PONTIFICIO INSTITUTO BIBLICO E FACULTATE THEOLOGICA (SSP)

    1983

  • ARMAND PUIG i TRRECH

    LA PARABOLE DES DIX VIERGES {Mt 25,1-13)

    ROME BIBLICAL INSTITUTE PRESS

    1983

    BARCELONA FACULTAT DE TEOLOGIA (SSP)

  • Liber cui titulus est LA PARABOLE DES DIX VIERGES (MT 25,1-13), aR. D. Armand Puig i Trrech conscriptus, imprimi potest.

    Hierosolymis die 22 mensis decembris 1983

    ISBN 88-7653-102-5

    HENRI CAZELLES, S.S. Secretarius Pontificiae Commissionis Biblicae

    I u r a e d i t i on i s et v er s i o ni s re s e r v a n tu r PRINTED IN ITALY

    TYPIS PONTIFICIAE UNIVERSITATIS GREGORIANAE - ROMAE

  • Au P. Jacques Dupont, l'occasion de son soixante-cinquime anniversaire

  • Demanaren a l'amie: - Quais son tes riquees? Respos: - Les pobretats que sostenc per

    mon amat.

    - E qual s ton repos? Lo languiment que'm dona amor. E qui s ton metge? La confiana que he de mon amat.

    - E qui s ton maestre?

    Respos, e dix que les significances que les creatures donen de son amat.

    (RAMON LLULL, Libre d'Amie e Amat, n. 56)

  • PRSENTATION

    Ce livre rassemble la plus grande partie des matriaux de ma thse doctorale, dfendue devant la Commission Biblique Pontificale en mai 1982. Le texte reste fondamentalement le mme, bien que pour des ques-tions d'dition les notes ont t notablement rduites.

    L'tude se veut une contribution l'investigation des paraboles van-gliques, plus concrtement l'une d'elles: la parabole des dix vierges (Mt 25,1-13). Cette entreprise n'aurait cependant pas t possible si, ds le premier instant, je n'avais pas pu compter sur les conseils et encourage-ments, comptents et srs, de mon matre, le P. Jacques Dupont O.S.B., membre de la dite Commission. Sans sa grande finesse exgtique et sans sa constante attention, les pages qui suivent auraient pu difficilement tre crites. C'est lui que je les ddicace, en tmoignage de ma reconnaissance et de mon amiti. Je dois galement exprimer toute ma reconnaissance aux deux autres censeurs, notamment au P. Albert Vanhoye S.J. (Institut Biblique Pontifical), qui a apport de judicieuses indications au manuscrit, ainsi qu'au P. Romano Penna (Universit Pontificale du Lateran). Ces pro-fesseurs ont fait partie du jury prsid par S.E.le Cardinal Joseph Ratzinger, Prsident de la Commission Biblique Pontificale, assist par le P. Henri Cazelles P.S.S. (Institut Catholique de Paris), Charg du Secrtariat de cette Commission.

    Pendant la priode d'laboration de ce travail, j'ai reu des appuis de valeur qui m'ont permis un long sjour Rome. Il me faut tout d'abord mentionner la collaboration de mon Archevque, le Dr. Josep Pont i Gol, pasteur de l'glise de Tarragone, qui n'a pargn aucun effort afin que la thse puisse tre mene bien. En ce qui concerne la ralisation de ce livre, j'ai pu bnficier de l'aide de la > (Bar-celone), prside par S.E. le Cardinal Narcis Jubany i Arnau; m'ont de mme soutenu la Facult de Thologie de Barcelone (SSP) et l'>,institutions auxquelles j'exprime ma reconnaissance.

    Je voudrais encore mentionner les anciens tudiants du Collge Belge de Rome, PP. J.-P. Delville, J.-F. Scheffers et A. Wnin. Leur collabora-tion m'a t prcieuse pour la traduction de la thse du catalan au franais, traduction laquelle ont galement particip Mme Madeleine Taradach et Antoni Plasencia. La dactylographie a t assure par M. Carme Baqu et Roser Caminal. Ma soeur Roser et F.J. Viger (Montserrat) ont con-tribu l'laboration de la bibliographie et des index.

  • 10 PRSENTATION

    Toute ma reconnaissance, enfin, aux PP. M. Gilbert S.J., Recteur de l'Institut Biblique Pontifical, L. Alonso Schkel S.J., et J. Swetnam S.J., qui ont accept cette tude dans la collection .

    Armand Puig i Trrech

    Rome-Guimer, juin 1982

  • INTRODUCTION

    Ce n'est un secret pour personne qu'au cours des dernires annes, l'tude des paraboles a gagn en importance et en intrt. Il n'est pas exagr d'affirmer que les paraboles occupent une des places privilgies dans l'actuelle recherche no-testamentaire. La ligne d'investigation initie par A. Jlicher et poursuivie par C.H. Dodd et J. Jeremias a t, de nombreuses reprises, mise en question et substitue par d'autres options critiques fort diffrentes. On a vu l'apparition non seulement de la > (E. Fuchs et E. Jngel), mais aussi de ce que Perrin a appel l'> (A.N. Wilder, R.W. Funk, D.O. Via et J.D. Crossan), ct de certains essais structuralistes surtout dans le monde francophone et d'autres dans la ligne de l'analyse linguistique (E. Gtt-gemanns). Les dernires contributions dans la sphre allemande (T. Aurelio, H.J. Klauck etH. Weder) et dans la sphre franco-amricaine (P. Ricoeur) ont propos diverses thories d'interprtation pour les paraboles synopti-ques (cf. le bon compte-rendu de W. Harnisch dans Verkndigung und Forschung. Beihefte zu >, 1979/1, 53-89). Ce n'est pas ici le lieu de faire une critique de ces essais. Cependant, mme si la plu-part de ces tudes rcentes ont l'avantage de prendre en bloc les paraboles synoptiques, on a l'impression qu'elles se ressentent l'excs d'une probl-matique extra-parabolique (Weder) ou de la thorie linguistique de base (Aurelio) ou encore d'Un cloisonnement de la discussion (Klauck). Il fau-drait se poser la question de savoir si l'tude des paraboles synoptiques admet un modle d'analyse uniforme ou s'il ne faut pas valoriser les diff-rences et la flexibilit de chaque parabole. En d'autres mots, il convient d'adopter un modle d'analyse suffisamment large sous peine d'en arriver un nivellement des rsultats et de rpter sans cesse le mme schma d'interprtation, quelle que soit la matrice de ce dernier. En consquence, dans notre cas, l'utilisation d'une mthode inductive (ou plutt la re-cherche d'une mthode d'analyse) ne signifie pas appliquer une mthodo-logie artificielle ou incomplte, mais bien de nous ouvrir avec rigueur cri-tique aux caractristiques spcifiques de la parabole que nous tudions, tout en utilisant un large ventail de perspectives mthodologiques selon les ncessits de chaque moment de la recherche (parmi ces mthodes, l'approche historico-critique joue un rle fondamental). En ce sens, le travail doit beaucoup la mthodologie dveloppe par J. Dupont dans ses nombrem;es tudes sur les paraboles de Jsus.

  • 12 INTRODUCTION

    En plus du prsuppos mthodologique selon lequel chaque parabole mrite une attention particulire cause de sa spcificit propre, un autre motif qui justifie l'tude d'un seul texte est notre avis la parabole mme que nous avons choisie: les dix vierges (Mt 25,1-13). Comme nous le montre-rons au cours de ce travail, la recherche propos des dix vierges a parcouru des chemins trs diffrents, sans pour autant qu'on soit arriv un accord plus ou moins gnral entre les commentateurs. En outre, les exgtes se sont curieusement rpts les uns les autres sur une srie de points qui, passs au crible de l'analyse, ne cessent pas de prsenter des difficults que l'on ne peut aucun prix ngliger. Enfin, la division des auteurs en deux positions antagonistes sur l'authenticit d3 Mt 25,1-13 n'a certaine-ment pas contribu clarifier la discussion. Dans ces conditions, l'tude de la parabole est reste bloque, la diffrence d'autres paraboles (nous pensons par exemple au bon samaritain et au fils prodigue) dont la re-cherche a progress d'une manire constante. Les difficults et les probl-mes soulevs par les dix vierges ne doivent pas faire oublier pourtant qu'il s'agit d'une des de la tradition synoptique et que par consquent c'est un texte qui, au moins comme hypothse de travail, peut constituer une voie d'accs au Jsus historique. L'hypothse, bien sr, doit tre confirme. Mais - et ici la critique est unanime - les para-boles sont des lieux privilgis pour s'approcher de la prdication de Jsus de Nazareth sur un terrain qui, en comparaison avec le reste du matriau synoptique, prsente peu de fissures. On pourrait dire que le genre > constitue dj par lui-mme une garantie de proximit avec la pr-dication de Jsus bien que, naturellement, il faille se poser la. question de savoir ce que reprsentent les paraboles en gnral et chaque parabole en particulier dans le cadre dP la vie historique de Jsus et de sa prdication du Royaume de Dieu.

    Aussi, s'il s'agit de partir de Mt 25,1-13 pour rejoindre l'ventuelle parabole originale, il faut commencer, en partant d'une analyse narrative et scnique, par les implications rdactionnelles du texte matthen: sa position dans le contexte du Premier vangile, les intrts que le rdacteur y laisse transparatre et les motivations qui les engendrent. Cette premire phase nous fournira galement les donnes qui nous permettront d'envi-sager les modifications et les ajouts que le rdacteur a introduits en fonction des intrts en question. Ensuite, et aprs un bref coup d'oeil au stade traditionnel (peu contrlable cause du manque d'lments), il faudra dterminer, dans la mesure du possible, le primitif en reprena1it l'analyse narrative. La dtermination du primitif permettra l'-tude de la forme littraire telle qu'elle apparat dans ce texte>>. C'est ce point de la recherche que dbute l'analyse du niveau-Jsus proprement dit, bien que la question de l'authenticit ne puisse tre traite qu'en finale de tout le processus. Une fois analyse la forme littraire sp-cifique, l'application des catgories de et (Ri-

  • INTRODUCTION 13

    coeur) permettront de reprer l'ouverture du processus mtaphorique et d'expliciter le paradigme d'existence que la parabole met en mouvement. Mais l'hermneutique de la parabole ne se termine pas ici; elle doit inclure aussi l'tude de l'interprtation que le paraboliste a voulu lui donner. A cet effet, il faut d'une part apprcier le dialogue qui s'tablit entre le narrateur et les auditeurs afin de se rendre compte comment celui-l con-duit adopter son propre point de vue; il faut, d'autre part, situer la m-taphore parabolique dans les coordonnes du ministre de Jsus afin d'y voir l'incidence de la thmatique du Royaume. Arrivs ce point, il sera possible de prciser si le schma parabolique - diffrent du texte rapport par l'vangliste- peut tre attribu ou non Jsus. La problmatique de l'authenticit consiste dans la vrification des cohrences interne (narra-tive par rapport la mtaphorique) et externe (la situation par rapport au Royaume) de la narration.

    Voici donc bauch dans ses grandes lignes le parcours mthodolo-gique que notre tude se propose de raliser. En un moment de la recherche o l'on essaye de nouvelles mthodes et o l'on cherche de nouveaux ho-rizons de prcomprhension, notre tentative se situe dans la ligne de la mthodologie historico-critique complte par les analyses narratives et scniques (fondamentalement comme elle est applique par J. Dupont l'tude des paraboles), tout en tenant compte des questions souleves par la thorie hermneutique de P. Ricoeur propos de la parabole comme mtaphore. Il semble incontestable que les paraboles dclenchent un pro-cessus mtaphorique. Mais il semble galement incontestable que ce pro-cessus ne peut tre isol de la situation concrte qui a vu natre la pa-rabole. Peut-tre faudrait-il parler de

  • AVERTISSEMENTS

    Les abrviations des livres bibliques sont empruntes la TOB ( > ). A quelques exceptions prs, les textes scripturaires sont cits galement selon cette traduction. Les autres abr-viations, oeuvres extrabibliques et bibliographie en gnral, suivent de prs celles que propose la TRE (>). Il n'est donc pas ncessaire de les rpter ici. Quant aux abrviations d'ouvra-ges et d'articles cits dans les notes, on peut les trouver dans la liste gn-rale de la bibliographie, la fin du travail.

    En ce qui concerne les notes, remarquons qu'un chiffre arabe suivi d'un numro romain indique, respectivement, le numro de la note et le chapitre o elle se trouve. Ainsi, par exemple, 42-III: n. 43 du chapitre troisime.

  • PREMIRE PARTIE

    L'INTERPRTATION MATTHENNE DE LA PARABOLE DES DIX VIERGES

  • CHAPITRE PREMIER

    Le contexte de Mt 25,1-13

    La parabole appele communment (Mt 25,1-13) s'inscrit dans le contexte voisin des chapitres 24-25 de l'vangile de Matthieu 1. Ces deux chapitres constituent la dernire grande sous-unit littraire de cet vangile immdiatement avant la narration de la Passion et de la Rsurrection (ch. 26-28) 2. La formule de 26,1 dlimite clairement le dbut du dernier bloc. Par contre, en ce qui concerne l'autre extrmit, savoir s'il faut unir ou sparer les ch. 24-25 du matriau qui les prcde, les propositions sont divergentes. Faut-il envisager ces deux chapitres comme une unit en elle-mme? 3; ou, au contraire, font-ils partie d'un bloc plus large? Et, s'il en est ainsi, o devons-nous situer son point de dpart?

    Tout d'abord, il faut remarquer les contacts troits entre la fin du ch. 23 et le dbut du ch. 24. Le logion sur le refus coupable de Jrusalem et la dsolation qui s'ensuivra (23,37-39) ainsi que la rponse de Jsus aux disciples leur annonant la destruction complte du Temple (24,1-2), donnent l'impression d'tre deux lments du mme thme: la ralisation historique de la prdiction de la ruine de la ville. C'est pourquoi, les der-nires paroles (23,37-39) que Jsus adresse (23,1) se continuent durant la sortie du Temple (24,1) pour se conclure avec l'annonce prophtique faite aux seuls disciples (24,2). Toute la scne est mue partir d'un seul point de rfrence: l'vnement de l'an 70 4 Ainsi, Matthieu veut faire une distinction entre le fait pass de la destruc-tion de Jrusalem (23,37- 24,2) et le discours, centr sur une perspective future, sur la parousie du Fils de l'homme (24,3- 25,46); ce discours est prsent comme la rponse-explication fournie par Jsus la demande de ses disciples (24,3) 5. La csure entre 24,2 et 24,3 se justifie donc par

    1 Les noms que les auteurs donnent ces deux chapitres vont de > > en passant par la > ou discours apocalyptique >>.

    2 Cf. ScHNIEWIND, Matthaus, 231. Cf. aussi TRILLING, Matthaus, vol. II, 245. 3 Cf. MARZOTTO, Quando verr, 547-570. 4 Cf. ScHwEIZER, Matthaus, 290. 5 Notez qu'en 24,3b il s'agit d'une seule demande et non de deux: la>

    quivaut la . D'autre part, font rfrence

  • 20 DIX VIERGES

    le changement de thmatique 6 et par les dtails rdactionnels qui co-lorent le verset 3 de manire typiquement matthenne7. Le discours sur la parousie commence seulement en Mt 24,3, aprs la construction d'une unit rdactionnelle, 23,37- 24,2 (rappelons que la pricope de l'obole de la veuve (Mc 12,41-44) est limine et que Mt 23,37-39 appartient Q, en opposition avec une bonne part de ce qui prcde), laquelle agit comme articulation thmatique et fonctionnelles entre 23,1-36 et 24,3- 25,46 9.

    En second lieu, nous devons nous interroger sur la structure plus large dans laquelle il faut inscrire le discours sur la parousie de Mt 24,3- 25,46. D'emble, nous faisons ntre l'affirmation de J. Dupont: (Mc 13,3) parce que le Temple est une ralit qui appartient au pass.

    8 DuPONT (La ruine du Temple) crit: (263).

    9 Quelques exgtes considrent 24,1-4a comme l'introduction du discours sur la parousie. Par exemple, LAMBRECHT, Parousia Discourse, 313. Consulter la n. 22. galement, MARZOTTO, Quando verr et Go:M, Mateo, vol. II, 469. Par contre, Schnie-wind, Grundmann, Schmid, Trilling, Schweizer, Marxsen, Walker, Lohmeyer, R. Fesch, Strecker, Klostermann, Rare ... placent une csure entre 24,2 et 24,3. BoNNARD (Matthieu, 345) la situe entre les vv. 3 et 4. De mme, SuMMERS, Matthew 24-25, 501ss. Pour une plus longue liste d'auteurs, cf. DuPONT, Batitudes, vol. III, 467 n. 3.

    10 La ruine du Temple, 263. Cf. encore HOET, Fratres, 79. 11 Par contre, GARLAND (Matthew 23, 32-33) ne semble pas avoir tir les cons-

    quences du fait que la finale du ch. 23 forme une unit avec le dbut du ch. 24. 12 Jrusalem (la forme 'Iepoucrot-IJfL, unique fois chez Mt: 23,37 par. Le 13,34)

  • I. CONTEXTE DE MT 25,1-13 21

    Si donc Matthieu a historicis, pour ainsi dire, tout le bloc des ch. 23-25 partir d'un pass-prsent (le refus d'Isral) et d'un prsent-futur (la parousie du Fils de l'homme), il semble qu'il l'ait fait pour prciser le locus dans lequel se trouve sa communaut 13. Il faut donc situer les chrtiens de Matthieu 14 entre Isral, qui n'a pas accept le Mes~e et qui continue encore refuser ses envoys (23,34), et l'attente de la venue du Fils de l'homme, vers laquelle tendent les vnements prsents et la si-tuation actuelle de la communaut (24,4b-14) 15.

    Les rsultats acquis jusqu' prsent montrent comment Mt 25,1-13 doit. tre considr comme un lment du second panneau (24,3-25,46) du dernier discours du Jsus matthen (23,1-25,46), puisque Mt 23,1-3() constitue le premier panneau et Mt 23,37-24,2 est la charnire entre les deux. Le nom gnrique que nous avons donn au second panneau est le discours sur la parousie, car le mot 7t1Xpoucrl!X semble tre une caractristique rdactionnelle centrale (le mot, hapax dans les Synoptiques, apparat seulement en Mt 24,3.27.37.39) 16. Matthieu; comme on le sait, a suivi la source marcienne jusqu'en 24,36 (Mt 24,3-36 correspond Mc 13,3-32), mme s'il a introduit des modifications importantes en 24,9-14 (cf. Mt 10,17-22) et en 24,26-28 (cf. Le 17,23-24.37). A partir du v. 37, le matriau se diversifie en se basant sur Mc 13,33.35a (cf. Mt 24,42 et 25,13), Q (cf. Mt 24,37-41.43-44.45-51; 25,14-30?) et SgMt (cf. Mt 25,1-12; 25,14-30?; 25,31-46). Malgr cette disparit, la rdaction s'est cristallise en une disposition prcise et co,hrente des matriaux, comme nous allons le voir de suite.

    Le discm\J.rs sur la parousie chez Matthieu arrive au moment culminant de son dveloppement en 24,29-31, la description apocalyptique de la venue du Fils de l'hbmme, laquelle est prcde d'une srie de catastrophes cosmi-ques. Ces catastrophes sont prsentes cependant comme des faits ant-rieurs la parousie proprement dite du Fils de l'homme 17 L'arrive de

    semble tre le chiffre qui dsigne l'Isral historique. Par contre, la forme 'Ie:pocr6Ufl-OC indiquerait plutt la localisation gographique (li fois dans Mt).

    1 3 Il faut rappeler que pour Matthieu les vnements de l'an 70 ont une fonction pdagogique pour la communaut, dans la mesure o l'Isral historique a abouti seulement la destruction et au chtiment. Cf. HuMMEL, Auseinandersetzung, 89.

    14 SCHWEIZER (Matthaus, 21-25) montre trs justement que les deux grands thmes de Mt 21-25 sont le refus d'Isral, le chtiment subsquent et la parousie.

    15 24,4b-14 reflte le temps prsent-futur de l'glise, considre comme ralit de cet on. Cf. ci-dessous pp. 112-114.

    16 Ilocpoucr(cx appartient la terminologie propre de la communaut de Matthieu. Cf. KUEMMEL, Verheissung, n. 63.

    17 La particule grecque -r6n possde une ambigut semblable celle de l'ad-verbe franais . Ou bien elle relie une action avec une autre (ou avec une srie d'autres) simultane. Ou bien les actions se suivent immdiatement. Il y aurait encore un troisime usage de -r6-re: (cf. 24,40; 25,1.7), qui ajouterait la succession narrative la nuance de lien une rfrence temporelle (la parousie dans les trois cas mentionns).

  • 22 DIX VIERGES

    celui-ci est le signe unique et authentique que les disciples doivent attendre, le signe clair que lgitime la conviction que la consommation de cet on est arrive, l'unique rponse la question de 24,3.

  • I. CONTEXTE DE MT 25,1-13 23

    Dans la thologie de Matthieu, cette ligne de pense est contrebalance par la perspective du retard de la parousie, savoir, par 24,6 ( (SCHWEIZER, Matthaus, 299). Si cette interprtation est valable, alors 24,32-35 cadre avec la thologie matthenne la plus typique: a) le temps dans lequel l'glise vit, le temps prsent, est le temps de 6)cjn (24,9) et de perscution (cf. 10,17-22); dans ces tribulations la synagogue joue un rle important; b) ce temps est un temps proche de la fin, bien que la consommation de l'on prsent ne soit pas encore arrive. Pour une comprhension correcte du terme > avant Domitien, voir mon article Mt 24-25, surtout 314-316.

    23 Dans la structuration de Mt 24-25, les exgtes s'attachent trop souvent la source marcienne, comme si Matthieu avait labor sa composition en voulant conserver scrupuleusement le matriau traditionnel. Ceci est une erreur d'analy~;~e.

    24 Ceci est l'hypothse de LAMBRECHT (cf. Parousia Discourse, 341 et Parables, 214-222). Cf. n. 27-I.

    25 Le cas de 24,39 est trs significatif, car Matthieu introduit xocl ox lty\lwcroc\1 pour reprsenter le point de vue de ses destinataires (comparez avec Le 17 ,27). L'in-sertion a un sens parntique: de la mme manire qu'aux jours de No personne ne connaissait le > du dluge; ainsi maintenant personne ne peut connatre le de la parousie (24,36).

    26 En 24,43 on trouve un phnomne semblable celui de 24,39. Matthieu a introduit yp1Jy6p1Jcre:\l &11: l'union du et de veiller>>, comme thmes lis et interdpendants, semble tre la raison de l'insertion.

  • 24 DIX VIERGES

    L'un justifie l'autre: la parnse s'enracine dans l'ignorance de la fin. Le temps prsent est conditionn par un futur qui retarde pourtant son action finale sur cet on. L'thique a une motivation eschatologique.

    De toute faon, quoiqu'il y ait un contraste et une tension vidents entre 24,3-35 et 24,36- 25,30, l'> et la > ne jouent pas comme caractristiques de l'une des deux units, mais dans toutes les deux la fois 27. Schmatiquement:

    information:

    parnse:

    24-3,35 certitude sur le fait

    de la parousie +

    ne pas se laisser tromper

    24,36 - 25,30 ignorance du >

    de la parousie +

    veiller

    On dirait ainsi que Matthieu veut insister sur deux points apparem-ment antithtiques. D'un ct, il affirme la certitude de la venue de la parousie. Venue qui se produira comme point culminant d'une srie d'v-nements - non pas de signes! - plus ou moins concrets 28, de manire claire et visible pour tous (24,27), sre (24,28), car dj maintenant on entrevoit qu'elle est aux portes (24,32-35). D'un autre ct, Matthieu dit fermement et de manire rpte que la date de la parousie est compltement in-connue et inaccessible: le jour et l'heure, nul ne les connat > (24,36); personne ne sait ni ne peut savoir le moment prcis o le signe du Fils de l'homme sera visible pour toute la terre. Pour cela, il faut veiller; c'est l'attitude spcifiquement chrtienne en face de cette ignorance ab-solue.

    Faisons un pas de plus. Si les points d'articulation de 24,3-35 et de 24,36 - 25,30 sont respectivement la certitude du fait de la parousie et l'ignorance du quand, et si la section 24,3-35 est parallle 25,31-46, alors il est clair que les correspondances entre ces deux sections peuvent tre expliques ainsi 29:

    27 Lambrecht suppose qu'en 24,4b35 il s'agit presque exclusivement d'> et que dans 24,36-25,30 la est l'ide dominante. Cependant la parnse n'est pas absente de 24,4b-35 (cf. 4b.6a.9-13.25.28) ni l'information de 24,36-25,30 (Matthieu souligne l'ignorance du maintes reprises).

    28 On voit comment 24,4b-14 tait une historicisation du prsent-futur vers la fin, la consommation (v .. 14). Par ailleurs, au v. 29 se trouve un signe chronolo-gique clair qui qualifie ce qui prcde (la , 6Xi:ljn [J.e:y

  • 24,3-35 certitude du fait de la parousie

    1. CONTEXTE DE MT 25,1-13

    24,36 - 25,30 ignorance du

  • 26 DIX VIERGES

    mmes de la seconde unit (la parabole des talents est comme une pre-mire bauche de la fresque du ihgement). C'est la raison pour laquelle, quand on reprend le fil narratif (25,31), tout est prt du point de vue de la dynamique narrative. En fonction du jugement unive!'sel, il semble par consquent, que Matthieu ait tenu compte, plus ou moins consciemment, d'un des principes de la rhtorique antique, que Quintilien a formul avec le > 33 . Notons en effet que, dans la com-position des ch. 24 - 25, il y a dj une premire rfrence la sparation ou jugement en 24,40-41. De leur ct, les trois paraboles (24,45-51; 25,1-13 et 25,14-30) sont bties sur deux groupes de personnages: on oppose dans la conclusipn de chaque parabole la fin des uns et la fin des autres. De plus, le fait de la sparation pntre avec plus de force l'intrieur de chaque parabole mesure que l'on s'approche de la description du juge-ment universel. Ici le module de sparation en arrive dterminer la struc-ture de composition du texte en l'amenant une symtrie quasi parfaite: le jugement, si l'on peut dire, est double (comparez 25,34-39 et 25,40-45) 34.

    Arrtons-nous la seconde section du discours sur la parousie (Mt 24,36- 25,30) 35. Matthieu s'est arrang pour rpter le leitmotiv l'int-rieur des pricopes et dans leur cadre. Aprs l'e~i-tte (v. 36), nous trou-vons trois comparaisons ou exemples 36. Leur mission semble tre de sp-cifier le leitmotiv de l'ignorance de la date de la parousie et de l'attitude de la veille, nonce pour la premire fois au v. 36 (cf. aussi le v. 42). Ce sont ici trois courts textes, extraits de Q et retouchs considrablement par le rdacteur. Chacun d'eux commence par une construction typique de Mt. La comparaison de No et du dluge (vv. 37-39) rpte deux fois la formule &crrcep (&c;) y&.p ... o!51"wc; ~cr1"oc:L37. L'exemple des couples dont le sort se termine de manire oppose (vv. 40"41) est introduit par la parti-cule 1"61"e, dont la valeur dpasse ici celle de simple lien entre deux pri-copes. Il faut parler plutt d'une volont de mettre en relation cet exemple

    33 Cf. STANDAERT, Marc, 35. 34 Par contre, la section suivante ou parenthse (24,36-25,30) ne prsente pas

    le creBcendo que Matthieu a cherch pour tout le thme de la troisime section. Il s'agit plutt d'un leitmotiv qui, rpt de manire insistante, encadre et consolide les matriaux.

    35 En ce qui concerne la csure que nous avons place entre 24,35 et 24,36, les positions des auteurs diffrent. Lambrecht (qui souligne avec raison propos du v. 36, son caractre de transition), Lohmeyer et Weren penchent pour le choix que nous avons fait. Au contraire, Zahn, Klostermann, Schlatter, Schweizer, Plummer, McNeile, Gom, Bonnard, Camps, Trilling placent la csure entre les vv. 36 et 37. Grundmann considre les vv. 32-44 comme une unit. Dans un article rcent (Mat-thean ApocalypBe), S. BROWN la situe au v. 32.

    36 Les trois petites pricopes 24,37-39.40-41.43-44 seront dnommes> puisque telle est leur fonction dans le schma rdactionnel.

    37 Cette formule est rdactionnelle. Cf. aussi 12,40; 13,40; 24,27.

  • I. CONTEXTE DE MT 25,1-13 27

    avec le fait de la parousie 38. Le troisime texte, l'exemple du voleur qui pntre par effraction dans la maison (vv. 43-44), est introduit par une formule peu courante 39. Ces trois exemples sont tays par la rptition du leitmotiv ou fil conducteur, de sorte que les vv. 36, 42 et 44 regroupent et dterminent le matriau traditionnel. Cependant, le fait qu'il n'y ait pas de rptition du leitmotiv entre le premier exemple (vv. 37-39) et le second (vv. 40-41) fait voir que Matthieu n'a pas ici de proccupation de symtrie et que, dans l'unit des vv. 36-44, le matriau joue presque uni-quement en fonction de la thmatique nonce au v. 36 (en contraste avec la seconde unit, 24,45- 25,30, o il y aura un certain balancement entre intrts du rdacteur et apport traditionnel) 40 Cela devient vident, par exemple, en 24,42, o Matthieu reprend Mc 13,35 pour expliciter les thmes de l'ignorance du > (24,36!) et de la veille, bien plus que pour en infrer une consquence des logia antrieures (la particule ov, tire de Mc, a ici une porte limite) 41. Plus encore, 24,42 s'accorde mieux l'exemple du voleur (vv. 43-44) qu'aux deux autres exemples antrieurs (vv. 37-39 et 40-41). Matthieu procde par coups d'oeil rapides plus que par un ample discours. D'autre part, en deux occasions, la pression du leitmotiv est telle qu'il entre dans le matriau traditionnel. En 24,39 (cf. n. 25-I), le rdacteur introduit ox ~yvwcra.v et en 24,43 (cf. n. 26-I) il ajoute par rapport Q yp'Y)y6pYJcre:v &.v. Dans les deux cas, la perspective originelle a t transforme par les intrts de l'vangliste qui se refltent dans ces deux modifications. Finalement, 24,44 sert non seulement de conclu-sion l'exemple du voleur, mais en plus il clt l'unit 24,36-44. La locution aLiX 't"OU't"O 42 et la mention du double thme de l'ignorance du > (provenant des vv. 36 et 42) et de la veille (provenant du v. 42) semblent le supposer avec une certaine sret. En ce sens, le leitmotiv apparat comme nonc pour la premire fois au v. 36 mais il n'est pas exprim comme double thme jusqu'aux vv. 42 et 44.

    La seconde unit de ce que nous avons appel parenthse du discours sur la parousie (24,36- 25,30) est constitue de trois paraboles: celle du bon et du mauvais intendant (24,45-51), celle des dix vierges (25,1-13) et celle des talents (25,14-30). Les trois en-ttes appartiennent l'apport

    38 C'est ce qui semble dcouler de l'usage des -r6-re: en Mt 24-25 (cf. n. 17-I). ao Cf. une formule semblable en Le 17,27 (SgLk). 40 Matthieu n'limine donc pas la (PlOtzlichkeit) originale dans les

    exemples du dluge, de Lot, de la femme de Lot, des laisss/arrachs (cf. Le 17,26-36), bien qu'il subordonne le thme ses intrts parntiques: ignorance du>-attitude de veille.

    41 Comme le dit DoDD (Parables, 123): .

    42 Cette locution est souvent utilise par Matthieu pour dbuter ou terminer des units de son rcit (cf. 13,13.52; 18,23) ou pour introduire des conclusions dans le mme discours (cf. 6,25; 12,31; 21,43). En 24,44, comme presque toujours, il est rdactionnel.

  • 28 DIX VIERGES

    rdactionnel de Matthieu 43_ De plus, en 25,13 on rpte le leitmotiv de 24,36- 25,30 avec des mots qui rappellent de prs Mt 24,42 et Mc 13,35 44_ Dans ce sens, Mt 25,13 est utilis comme expression-pivot tant pour la parabole des dix vierges que pour celle des talents 45 , de la mme manire que 24,42 fonctionne vis--vis de ce qui prcde {24,37-41) et de ce qui suit (24,43-44), comme nous l'avons dj vu. En effet, bien que nous par-lions de deux units (24,36-44 et 24,45- 25,30) l'intrieur de la paren-thse ou seconde section du discours sur la parousie, il n'y a pas de doute que les vv. 24,42; 24,44 et 25,13 fonctionnent toujours dans deux direc-tions, en relation avec ce qui prcde et avec ce qui suit, en tant que r-ptition du leitmotiv de toute l'unit 46.

    Nanmoins, il est certain que la seconde unit (24,45- 25,30), outre qu'elle continue le double thme de l'ignorance du et de la veille (cf. 24,50 et 25,13) 47, thme propre toute la section, compte deux thmes nouveaux. Le premier, qui est son thme spcifique et exclusif, est celui du retard de la parousie (cf. 24,48; 25,5; 25,19), qui est en relation avec celui du temps intermdiaire (Zwischenzeit). Ce thme du retard de la pa-rousie - temps intermdiaire marque fortement la comprhension matth-enne des trois paraboles qui forment la seconde unit et le traitement r-dactionnel qu'elles reoivent de l'vangliste 48. D'autre part, le thme du jugement et de la rcompense eschatologique apparat chaque fois avec plus d'intensit, en une progression ascendante: les formules paral-lles de 24,51; 25,30, rdactionnelles, ainsi que la finale de la parabole des dix vierges (25,11-12) trahissent un intrt qui culmine dans le juge-ment u:niversel (25,31-46). Ces versets constituent la troisime section du discours sur la parousie.

    C'est ainsi que Matthieu semble avoir pens l'unit 24,45- 25,30 comme un tout en trois parties (24,45-51; 25,1-13, 25,14-30), dans lequel se produit un croisement de thmes diffrents: ceux qui procdent de 24,36-44 (ignorance du -veiller), le thme de 25,31-46 (le juge-

    43 L'expression rlc; &poc est employe rdactionnellement en 18,1 (comp. Mc 9,34 et Le 9,46), en 19,25 (omp. Mc 10,26 et Le 18,26) et en 19,27 (comp. Mc 10,29 et Le 18,29). Quant au -r6-re: de 25,1, cf. nn. 17-I et 38-I. En ce qui concerne le &crmp yocp de 25,14, cf. n. 37-I.

    44 Mt 25,13 sera trait en dtail aux pp. 92-95. 45 Cf. JEREMIAS, Gleichnisse, 57. 46 On a une technique semblable dans la parabole des ouvriers de la vigne (Mt

    20-1,15). Les vv. 19,30 et 20,16 rptent le motif rdactionnel suivant lequel la para-bole est rinterprte.

    47 Il faut peut-tre voir dans le fait que le thme principal est dj mentionn en 24,50 (au jour qu'il n'attend pas et l'heure qu'il ne sait pas>>), la raison pour laquelle Matthieu ne rpte pas le leitmotiv entre la parabole du bon et du mauvais intendant, et celle des dix vierges.

    48 L'analyse complte au chapitre IV (pp. 92-ll7) tentera de le montrer en dtail.

  • I. CONTEXTE DE MT 25,1-13 29

    ment) et les motifs spcifiques de l'unit (retard de la parousie-temps in-termdiaire). D'une manire ou d'une autre, tous ces thmes peuvent se retrouver dans chacune des trois paraboles (intendants, dix vierges, talents), soit dans le cadre, soit dans le corps de la parabole. Le paralllisme sur-prenant entre ces paraboles est le fruit d'une option rdactionnelle, qui cherche expliciter d'une triple manire une mme ligne de pense, en ajoutant cependant chaque occasion des traits nouveaux.

    Finalement, et sans vouloir avancer de conclusions, il faut dire que la parabole des dix vierges (25,1-13) non seulement se trouve au milieu de la triade, mais elle y tient en plus une position centrale 49. En effet, la parabole des intendants (24,45-51) et celle des talents (25,14-30) pr-sentent des affinits bases surtout sur l'accentuation de la tche que les chrtiens ont mener terme durant le temps intermdiaire; tandis que la parabole des dix vierges semble vouloir aborder de manire synthti-que quelques-uns des thmes les plus importants de la thologie de Matthieu, spcialement celui de la motivation eschatologique de la veille en tant que qualification thique radicale dans le temps prsent 50. Par cons-quent, il n'est pas exagr d'affirmer que 25,1-13 fonctionne comme cl de vote de la seconde section du discours sur la parousie (24,36- 25,30) 51 et, d'une certaine manire, de l'ensemble de ce discours, considr comnie une narration pleine d'implications pour la communaut destinataire du Premier vangile 52.

    49 Nous proposons un groupe d'exemples (24,37-44) et une unit de trois para-boles (24,45-25,30). Pour une hypothse diverse, cf. WEISER, Knechtsgleichnisse, 215.

    50 Notre hypothse veut se situer en fonction du matriau concret et non en fonction d'une univocit thmatique. Ds lors, c'est simplifier les choses que de vou-loir trouver, cote que cote, une structure dans laquelle 24,42-44 et 25,1-13 soient qualifis respectivement par 24,45-51 et 25,14-30 (cf. LAMBRECHT, Parousia Discourse, 327-328 et SCHENK, Mattaus XXV 1-13, 293).

    51 Avec une mthodologie trs diffrente de la ntre, SMIT SIBINGA (Matthew XXIV and XXV) est arriv une conclusion semblable en ce qui concerne la position centrale de la parabole des dix vie.rges.

    52 Cette affirmation, qui peut paratre maintenant exagre, sera fonde aux pp. 59-91.

  • 30 DIX VIERGES

    Cadre gnral de Mt 23 - 25

    premier panneau 23,1-36: Discours contre l'autoritarisme religieux 1-12: Introduction. Scribes et pharisiens,

    contre-figures du vrai dirigeant. 13-33: Les sept malheur >>. 34-36: Epilogue. Le sang retombera sur eux

    comme chtiment.

    charnire 23,37- 24,2: Le Messie qui abandonne le Temple et qui se manifeste la fin des temps, annonce la destruction de Jrusalem.

    second panneau 24,3- 25,36: Le discours sur la parousie. 24,3: la question des disciples.

    premire section 24,4-35: Jusqu' la parousie du Fils de l'homme (la certitude du fait) 1) 24,4-14: Le moment prsent

    de la communaut matthenne.

    2) 24,15-28: La grande tribula-tion la fin.

    3) 24,29-35: La venue prochaine du Fils de l'homme.

    deuxime section 24,36 - 25,30: Parenthse parntique (l'igno-rance du >) 1) 24,36-44: Trois exemples pa-

    raboliques (37-39 40-41.42-44) sur l'ignorance du > - la veille.

    2) 24,45- 25,30: Trois paraboles (24,45-51; 25,1-13; 25,14-30) sur le re-tard de la parousie - le temps interm-diaire -le jugement.

    troisime section 25,31-46: Le jugement universel du Fils de l'homme (la certitude du fait)

  • CHAPITRE DEUXIME

    Analyse narrative de Mt 25,1-13

    Il convient tout d'abord qu'une considration dtaille de la parabole des dix vierges du point de vue narratif prcde l'analyse des motivations et des contenus. Dans les pages suivantes, nous envisageons de suivre le fil de la narration sous l'angle formel et .sous l'angle dramatique, c'est--dire du point de vue de la construction interne de la narration et du point de vue de l'action dramatique qui s'y droule. Nous laisserons de ct le v. 13 car il n'appartient pas la narration comme telle, mais son lien avec le contexte.

    1. ANALYSE FORMELLE

    Il faut faire une distinction entre les personnages et la construction syntactique. Les premiers constituent les lments de base de la structure dramatique, tandis que la disposition des verbes et des partic11les montre comment la narration a t construite.

    1. Les personnages

    Ils sont de trois types: les cinq jeunes filles insenses, les cinq jeunes filles avises, l'poux 1. Notons que dans les deux premiers cas il s'agit de groupes, de collectivits, qui sont individualiss. Il n'y a donc aucune mention d'un individu dans les groupes. On mentionne aussi un personnage secondaire qui n'a aucune importance dans le droulement de la narration: les marchands (v. 9). De leur ct, les deux groupes de jeunes filles pr-sentent des caractristiques jumelles, quoique antithtiques 2, tant en ce qui concerne l'action qu'elles mnent terme qu'en ce qui concerne

    1 Pour la discussion de la variante xoct -j VfLcp'ij cf. pp. 150-152. Les questions de critique textuelle se trouvent disperses tout au long de ce travail. Ce qui, notre avis, est l'dition textuelle correcte de Mt 25,1-13 apparat dans la page 181. La forme oc"t"o de Mt 25,6 est discute dans la n. 103-VII. La formule d oc7t&:V"t"1JOW oc"t"o 1 d &:7t&:V"t"1JOW de ce mme verset est traite dans les pp. 156-157. Enfin, l'tude de la formule fL~7to"t"e: ox 1 o fL~ (v. 9) occupe lan. 13-II et les pp. 169-174. D'autres ques-tions textuelles mineures apparaissent dans les nn. 4-IV, 155-VII, 177-VII et 241-VII.

    2 SELLIN les appelle >.

  • 32 DIX VIERGES

    la qualification qu'elles reoivent (, ) 3 Les deux groupes, unis pour un moment au dbut, sont ensuite en opposition; ils sont regroups encore une fois (, vv. 5 et 7) et la narration se clt avec une autre opposition. C'est--dire qu'il se produit un processus de diffrentiation-union-diffrentiation partir d'une union initiale, qui donne la narration une physionomie particulire 4 Sont encore en relation avec les personnages les actions de (v. 6) et (v. 10). La premire, c'est une voix anonyme qui la ralise. Pour la seconde: le sujet reste inexprim. Ces deux actions reprsentent chacune un seuil dans la progression narrative; mais dans l'une et dans l'autre les personnages apparaissent ponctuellement et sans s'identifier.

    En resum, les personnages principaux de la narration sont au nombre de trois (jeunes filles insenses, jeunes filles avises, poux), mme s'il en est trois autres qui sont secondaires: deux qui ralisent une action ( et ouvrir la porte) et un qui est nomm en passant (marchands). Parmi les trois personnages principaux, il y a une , l'poux, et deux acteurs opposs entre eux qui jouent en fonction de la >: les jeunes filles insenses ( >) et les jeunes filles avises (). La conduit l'action et domine, pour ainsi dire, le binme des jeunes filles 5 . C'est en effet l'poux qui est la figure en fonction de laquelle se situent les deux autres: leur positivit ou leur ngativit est dtermine non seulement par l'issue finale mais encore par le type de relations qu'elles entretiennent avec la , au moins en ce qui concerne les insenses 6 En un mot, la narration est btie autour du point de vue de l'poux 7

    2. La disposition des particules et des verbes

    Mt 25,1-12 est une pice narrative remarquable. Son architecture est riche et harmonieuse, qu ce soit par la varit des temps verbaux ou par la succession des particules qui marquent les changements de scne et les progressions dans chacune de ces scnes. L'aoriste, temps narratif par excellence, marque le droulement de l'action principale, laquelle com-mence au v. 1 (~Yj:t.Jlov ), mme si une fois (v. 6) il est jumel un imparfait qui tempre l'action (x.&.6euaov, continuit dans le pass) (l'autre imparfait, ~crcxv, v. 2, est secondaire). En outre, l'attention est attire de faon spciale

    3 La qualification ne semble pas absolument ncessaire. Sa fonction est de souligner le comportement.

    4 Voyez le cadre de la p. 30. 5 SELLIN semble exprimer cela en disant que la > et

    la concident. Cf. Lukas, 185. Quand mme, cf. pp. 192-196 de notre tude.

    6 Cf. vv. 11-12. 7 BuLTMANN parle de

    (cf. Geschichte, 204).

  • II. ANALYSE NARRATIVE 33

    par Je prsent historique ~pzov't"ot~ (v. 11). La progression narrative (qui combine aoriste, imparfait et prsent historique) est coupe trois reprises par le discours direct: une exclamation (v. 6) et deux dialogues (vv. 8-9, entre les insenses et les avises, et ll-12, entre les insenses et l'poux) 8 . Il faut galement envis'ager le participe prsent du v. 10 et la prsence d'un futur ([Lotw6~cre:'t"ot~, v. 1), dont la fonction est de convoyer le matriau qui suit et de le transposer dans le registre de ce qui doit arriver. Ce futur appartient ce que nous appelons le de la narration 9 .

    Pour ce qui est du systme des particules et des formules d'union, le texte . fait un usage extraordinaire de a pour indiquer les changements de scne ou les progressions intra-s.cniques (v. 2), ou bien encore une tournure adversative (vv. 3-4). Le xotl peut avoir un caractre additif (v. 2), successif (vv. 5.7.9.10)cou emphatique (v. upo. On trouve un seul y&p (v. 3) qui fonde la qualification des jeunes filles par un seul fait (prendre de l'huile ou non), dont les consquences reprsentent la situation actuelle: les jeunes filles sont insenses ou avises parce que leur comportement est insens ou av1s .. Ce." qu'il s'ensuit de ce comportement esf vident partir du v. 5 mis est prvisible dj aux vv. 3-4. En plus de l'adverbe

    -'t"6't"e: du v. 1, qui, comme le v. 13, appartient au (>, il est un autre "6"e: au v. 7; celui-ci signale, une progression l'intrieur de la scne (la raction des jeunes filles au qui retentit dans la nuit) mais il a une porte plus large parce qu'il se rfre indirectement la parousie 11 . Au v. 8, apparat un iSn avec valeur causale faible 12 . La conjonction

    [L~TIO't"e: ox[[L~] du v. 9 exprime une ngation qui doit pourtant tre en-tendue en connexion av:ec l'adverbe [LCXov qui suit 13. Enfin, l'adverbe 6cr't"e:pov du v. ll introduit la dernire scne (vv. ll-12) qui est postrieure la fermeture de la porte 14. Il y a l encore une autre expression adver-biale: [Lcr'Y)c; vux't"6 au v. 6.

    Dans ce systme de formules d'union, il faut considrer aussi une proposition relative (v. 1) et deux gnitifs absolus (vv. 5.10). La relative nonce le rle des jeunes filles qui accompagnent un cortge de noces.

    8 propos du v. 5 il faut parl~r d'une action de base (dormir>>) exprime par un tat inchoatif (t'Jucr1:ot1;ot'J) et par la continuit qui en rsulte (&xcHku3ov).

    9 Nous entendons par cadre intrieur>) de la narration le rfrent qui la situe et l'oriente dans une cl prcise d'interprtation (l'expression ). En revanche; le a comme fonction de situer le rcit dans le contexte (l'adverbe 1:61:e: et le v. 13).

    10 Le xotl du v. 9 a, de plus, une nuance conscutive. 11 Notons que le 1:61:e: du v. 7 a 1.m point de rfrence immdiat: (v. 6). 12 BDR & 456,1. 13 Cf. plus loin pp. 43-44 pour le sens que semble avoir la rponse des cinq avi-

    ses. Cf. une discussion complte aux pp. 219-222. 14 Faut-il traduire > ou ? La distinction entre

    comparatif et superlatif se perd dans le grec koin (cf. ZERWICK, Graecitas, n. 147).

  • 34 DIX VIERGES

    Les deux gnitifs absolus, qui servent d'en-tte deux scnes, constituent, l'un, une dtermination temporelle, l'autre, une dtermination spatio-temporelle: le retard de l'poux, et le dpart des insenses parties acheter de l'huile.

    Le schma suivant, qui exclut les , aidera comprendre le droulement formai de la narration partir des verbes (A= aoriste, I= imparfait, P= participe, PH= prsent histo-rique) 15 et des particules et connexions adverbiales (a:, xl, yocp, 't"6't"E,

  • (xC'lL) a a~--------~

    II. ANALYSE NARRATIVE

    A

    A

    A

    (A) ~imp

    A

    A

    A ~ imp on ind

    A ~ fL~1tO't'E:. ox /o fL~ sub

    A

    A

    A

    imp xC'l( imp

    ~imp ----- A ~ ind + ind

    35

    premire scne (vv. 1-4)

    j. deuxime scne (v. 5) troisime .scne (vv. 6-9)

    quatrime scne (v. 10)

    cinquime scne (vv. 11-12)

  • 36 DIX VIERGES

    II. ANALYSE DRAMATIQUE

    l. L'action

    L'tude formelle des particules et des verbes nous a montr que la narration matthenne pouvait tre divise en cinq scnes. A part la pre-mire scne, les quatre autres offraient des caractristiques semblables: dterminations adverbiales (expressions adverbiales ou gnitifs absolus) fonctionnant comme moyens de sparation entre les scnes, aoristes fonc-tionnant comme temps narratif de base, style direct entrant en combinaison dans la narration. Maintenant, nous devons nous interroger sur le droule-ment narratif comme tel. D'emble, la narration apparat avec une forte tension dramatique; elle provient surtout des frquentes interventions en style direct (trois au total: une exclamation invitatoire et deux dialogues) et naturellement de l'argument lui-mme. Comme le dit D.O. Via, nous sommes devant une > 18. Ainsi:

    premire scne.- titre-prsentation (vv. 1-4): les personnages du drame (l'poux et les jeunes filles)

    deuxime scne.- pisode intermdiaire (v. 5): le retard et le sommeil troisime scne.- noeud (vv. 6-9): quatrime scne.- dnouement (v. 10):

    cinquime scne.- pisode final (vv. 11-12):

    l'annonce et le conflit celles qui entrent et celles qui n'entrent pas le refus

    Ces titres brossent grands traits le droulement du drame, sans prtendre puiser le contenu des scnes. Ils montrent simplement combien l'action dramatique est courte et rapide, avec de frquents changements et avec un dnouement qui arrive, semble-t-il, comme la consquence ap-parente d'une faute lgre au dbut.

    Premire scne. Dans le titre (v. 1) on prsente les personnages: l'-poux, les jeunes filles qui doivent l'accompagner dans le cortge de noces; elles doivent tre prsentes au moment de son arrive, chacune d'elles avec une lampe allume. C'est cela qu'il leur appartient de faire durant la fte de noces. Aucun autre personnage n'est mentionn. Ensuite, il est clair que dans la scne il n'y a que dix jeunes filles: cinq d'entre elles por-

    25,31a qui rsume 24,30-31 (cf. p. 25 et n. 30-I). En tout cas, si le v. 1 est le titre de la parabole, alors on explique aisment la rptition de la mme expression (

  • II. ANALYSE NARRATIVE 37

    tent leurs lampes (allumes 1) mais n'ont pas d'huile de rechange; les cinq autres portent leurs lampes (allumes~) et des fioles avec de l'huile de re-change pour le moment opportun 19. Leur comportement est videmment insens dans le cas des premires, et avis chez les secondes.

    Deuxime scne. L'poux tarde. Le temps passe. Les dix jeunes filles s'assoupissent et s'endorment. Toutes sont plonges dans le sommeil. En scne, il n'y a qu'elles. L'action est presque inexistante, suspendue, elle ne progresse pas. Le retard de l'poux bloque le mouvement drama-tique. Le sommeil ne fait que souligner l'absence d'action.

    Troisime scne. Tout se met soudain en mouvement. Une annonce, un dans la nuit rveille le jeu dramatique zo. L'action se prcipite, les dix jeunes filles se rveillent et se lvent. Fbrilement, elles commencent prparer leurs lampes. Le moment de la vrit est arriv, L'poux va se prsenter. Encore un peu et, leurs lampes allumes, elles vont entrer la noce avec lui. Mais le manque du dbut devient maintenant dtermi-nant: l'huile de rechange qui est dans les fioles ne suffit pas pour les dix lampes. Le dilemme est brlant: n'entrera que celle qui tiendra la lampe allume et participera ainsi au cortge de noces; les avises ne peuvent se dfaire de l'huile des fioles si elles ne veulent pas rester dehors. La seule rponse possible est la ngative. Puisque la situation est, et reste, conflic-tuelle, le dialogue demeure conflictuel lui aussi.

    Quatrime scne. Les vnements se prcipitent. Les cinq jeunes filles insenses accueillent la suggestion de leurs compagnes et s'en vont acheter l'huile qui leur manque afin de pouvoir allumer leurs lampes. Entretemps, le mobile de la narration se ralise: l'poux arrive et entre la fte. Seules celles qui taient prpares, qui taient en place avec leurs lampes allu-mes, accompagnent l'poux. La porte se ferme. Voil donc les trois actions successives: l'arrive de l'poux, son entre avec les jeunes filles avises et la fermeture de la porte. Aucun choix n'est laiss. La porte donnant accs la noce ne s'ouvrira plus. Les cinq jeunes filles insenses n'ont pu entrer.

    Cinquime scne. Plus tard arrivent les insenses; elles demandent d'tre admises aux noces. Veulent-elles se targuer du fait qu'elles connais-sent l'poux~ Leur supplication n'est pas motive explicitement. Elles n'ajoutent aucune raison: se sont-elles procur de l'huile~ N'en ont-elles pas trouv~ On n'en. sait rien 21. Reconnaissent-elles leur erreur? Ne se

    19 Jusqu'aux pp. 210-213, o on discute la traduction du mot dans la nuit rappelle la technique de la voix en off. 21 Les cinq insenses reoivent un dur chtiment alors, qu'on attend mieux de

    la bienveillance d'un poux qui clbre ses noces ..

  • 38 DIX VIERGES

    rendent-elles pas compte de ce qu'elles ont fait? On n'en sait rien 22. Le ton est pathtique. Il semble qu'elles appellent la misricorde, la bonne volont du seigneur-poux. Leur cri parat vouloir toucher son coeur, avec l'espoir d'tre acceptes. Mais l'poux les refuse. Il dit ne pas les connatre. L'action dramatique s'achve sur une catastrophe.

    Parmi ces cinq scnes, c'est la troisime ( se ralise dans toutes les scnes sauf dans la seconde, o le groupe apparat de manire compacte. Schmati-quement:

    premire scne.- dix jeunes filles: cinq insenses et cinq avises deuxime scne.- (dix) jeunes filles troisime scne.- toutes les jeunes filles: les insenses et les avises quatrime scne.- a) les (cinq) insenses s'en vont (les cinq avises

    restent) b) les (cinq) avises et l'poux

    cinquime scne.- les (cinq) insenses et l'poux

    22 La parabole manque d'explication d'intention, de sentiments, de motivations. Et, par consquent, il faut viter de la >.

  • II. ANALYSE NARRATIVE 39

    Dans la quatrime scne (v. 10), on trouve un genre de ddoublement car les cinq insenses, en un premier temps, abandonnent la scne (d'un ct) tandis que l'poux entre (de l'autre ct). Les verbes de mouvement s'accumulent: &7tpxofLou, ~PXOfLCX:t, dcrpxofLCX:t. Ensuite, la scne reste vide - pour la premire fois dans toute la narration! -, la porte s'est ferme. Les uns (l'poux et les avises) sont l'intrieur, les autres (les insenses) ne sont pas encore revenues. La scne cinq s'ouvre sur leur arrive, aprs un certain laps de temps (6cr-re:pov, v. 11) o aucun personnage n'apparat. Leur arrive est mise en relief par l'unique prsent historique du rcit

    (~pxov-rcx:t). Quelques observations encore sur le rythme de la narration. Mt 25,1-

    12 est une narration irrgulire au niveau du rythme car elle subit une srie de ralentissements et d'acclrations. Aprs la premire scne, premier ralentissement: l'poux tarde, les jeunes filles dorment. Durant la seconde scne, la scne est remplie (on y trouve les jeunes filles qui dorment), mais l'action dramatique est inexistante. En revanche, les scnes trois et quatre reprsentent le moment de l'acclration maximale. Aprs une dtermi-nation adverbiale de temps (, v. 6), qui suppose la fin du ralentissement, la rapidit du rcit augmente progressivement: face l'imminence du dnouement (l'arrive de l'poux), (v. 7), les jeunes filles se mettent en jeu par les actions de s'veiller, de prparer les lampes et de se confronter propos de l'huile. Prcipitamment (entre les scnes trois et quatre, l'intervalle est quasi inexistant), les insenses s'en vont, l'poux arrive et entre avec les avises. La fermeture de la porte donne le coup final au mouvement acclr. Seulement une dernire touche fera resurgir l'action. Les insenses arrivent et sont refuses. Le dialogue est rduit au minimum, mme s'il est trs dramatique. La finale est suspendue en l'air, sans continuit. La parnse (v. 13) joue ainsi un grand effet.

    2. Les personnages

    Nous avons dj vu comment l'poux tait la et les autres acteurs (les deux groupes de jeunes filles) jouaient en fonction de lui. Il est le mobile de la narration. Toute l'action dramatique pointe ve:rs le dnouement, lorsque l'poux arrive et entre la noce. Quand l'-poux tarde, l'action ralentit (deuxime scne). Quand rsonne le cri

  • 40 DIX VIERGES

    jeunes filles vers l'poux (i;pxofJ.IX~, rpt aux vv. 1 et 6). Ce mouvement de (i;pxofliX~ d) devient, chez les insenses, un mou-vement de (&7t6-:pxof1.1X~) (v. 10): cela se passe au dbut de la scne quatre, prcisment quand va se produire le croisement entre le mouvement de l'poux et celui des jeunes filles. Le mouvement de l'-poux vers la scne (:pxofliX~, v. 10) ne converge que vers cinq d'entr'elles: pendant que les insenses sont alles chercher de l'huile (7tope:OfJ.IX~ et

    &7tpxof1.1X~ au prsent, action continue), les avises et l'poux entrent la noce (d-:pxof1.1X~) (v~ 10). Cette action (dcrpxof1.1X~) est antithtique celle des jeunes filles insenses (&7tpxof1.1X~). La rencontre, la convergence des jeunes filles et de l'poux (u7t&:v-r'Y)mc;, &7t&:v-r'Y)mc;, vv. 1.6) ne russit que dans le cas des avises. C'est pourquoi, la dernire entre des insenses

    (:pxofJ.IX~, v. 11) est inutile, elle ne converge avec personne. Elle se produit quand le cycle des entres et des sorties s'est termin avec l'entre dfi-nitive aux noces.

    Ainsi donc, partir de l'importance qu'ont :pxofliX~ et ses composs dans la narration, on peut dterminer le droulement de l'action narrative du point de vue de l'poux 24:

    premire scne (titre-prsentation): celui qui doit arriver troisime scne (noeud): celui qui est sur le point d'arriver quatrime scne (dnouement): celui qui arrive

    A ce schme, correspond, du point de vue des jeunes filles, un autre parallle, que nous pourrions construire partir de l'action de dcrpxofliX~; celle-ci est le terme, le but dernier du mouvement des jeunes filles; elle est en plus le lieu du croisement avec l'poux 25:

    titre-prsentation

    noeud

    dnouement

    poux.

    (celui qui doit arriver) celui qui est sur le point d'arriver

    Jeunes filles

    (celles qui doivent entrer) ( cell(;)S qui sont sur le point d'entrer)

    celui qui arrive et entre celles qui entrent/n'entrent pas

    24 La classification de WEDER (Gleichnisse, 243) a l'inconvnient de mlanger les points de vue de l'poux et des jeunes filles. Cf. n. 95-VI.

    25 Le fait que le mot

  • II. ANALYSE NARRATIVE 41

    Notons que, dans ce schma, les pisodes que nous avons appels (v. 5) et (vv. 11-12) ne jouent pas un grand rle. En effet, ni l'poux, ni les jeunes filles ne peuvent tre qualifis par les termes qui dominent dans ces deux scnes. Dans la deuxime scne (v. 5):

    poux jeunes filles celui qui tarde arriver (celles qi tardent entrer)

    Le seul lment neuf est le retard des actions respectives. Pour ce qui est de la scne cinq:

    poux jeunes filles celui qui est dj arriv celles q11i n'entrent pas

    Il est clair que cette qualification de l'poux se dduit de la dynamique narrative. Le fait est dj pass. Quant aux jeunes filles, nous devons rpter ce qui tait dj clair au dnouement. Le doublage qui caractrise les scnes quatre et cinq du point de vue narratif est vident. Le dnoue-ment s'est dj produit. C'est pourquoi la scne cinq apporte peu de chose du point de vue strictement narratif. On constate un phnomne semblable avec la deuxime scne. Ici un lment nouveau ajourne et arrte le d-roulement. de l'action: 'le retard de l'poux. La scne est un plan fixe, la camra est arrte un endroit. Pourtant ce fait nouveau ne drange pas ce qui suit. Le retard commence et finit dans cette mme scne. Tout continue comme si de rien n'tait. C'est le qui met l'action en branle; or, au moment du conflit (vv. 8-9), le dialogue ne fait pas rfrence la deuxime scne mais la premre (vv; 3-4). Le retard de l'poux et l'as-soupissement des jeunes filles semblent tre des lments pisodiques qui ne constituent pas l'action dramatique. Quand on en arrive au noeud, aucun de ces lments n'est invoqu.

    Le caractre pisodique de la deuxime scne apparat mieux encore quand on refait le processus de sparation-union-sparation du groupe de jeunes filles. Comme nous l'avons dj suggr, aprs avoir divis soi-gneusement les dix jeunes filles en deux groupes antithtiques de cinq (premire scne), l'auteur souligne la seconde scne, et sans que rien ne le justifie apparemment, que toutes mnent ensemble une srie d'actions. Cette insistance se poursuit jusqu'au dbut de la troisime scne. Alors, avec le conflit, apparat la division dfinitive:

  • 42

    premire scne (vv. 1-4)

    deuxime scne (v. 5)

    troisime scne (vv. 6-9)

    quatrime scne (v. 10)

    cinquime scne (vv. 11~12)

    DIX VIERGES

    dix jeunes filles t t

    cinq insenses cinq avises qui ne prennent qui prennent pas d'huile (-) de l'huile ( +)

    t t TOUTES

    s'endorment (s'assoupissent et s'endorment) t

    se rveillent t

    se prparent t t

    les insenses les avises n'ont pas d'huile(-) ont de l'huile ( +) demande de l'huile ~ rponse ngative

    t t s'en vont (restent) (n'entrent pas) entrent

    1 sont refuses

    Ce schma montre comment la narration, envisage sous le point de vue des jeunes filles, fait la deuxime scne un mouvement inattendu qui se prolonge jusqu'au dbut de la troisime. Le fait que les jeunes filles se trouvent ensemble au beau milieu de la narration (vv. 5.7a) n'a plus aucune influence dans la suite. En revanche, surgissent une tension et une surprise remarquables quand par la suite se prsente un conflit radical entre les deux groupes, . qui introduit la coupure dfinitive. Il faut donc dire que le mouvement de rapprochement et de runion de la seconde scne est dconcertant dans l'ensemble de la narration 26. En ce qui con-cerne la cinquime scne, la narration devient boiteuse, pour ainsi dire. Si dans la seconde scne, il se produisait une trange runion, ici deux faits attirent l'attention: d'une part, le binme des deux groupes de jeunes filles, conserv dans chacune des scnes, se coupe, car les avises disparais-sent ds la fin de la scne prcdente; d'autre part, l'poux, qui tait ap-paru (~pxofLoc~; v. 10) et disparu (dcrpxofLoc~, v. 10), en un clin d'oeil, occupe maintenant le beau milieu de la scne (comment y est-il parvenu?); il

    26 Cf. SCHENK, Mattaus XXV, 1-13, 288.

  • II. ANALYSE NARRATIVE 43

    domine la situation et clture l'action narrative 27. Le setting, de plus, est remarquablement ambigu: quelle est la place scnique de l'poux~ Il est bien difficile d'imaginer 28. Il n'y a qu'une chose claire: l'poux est dedans (la porte est ferme) et les insenses sont dehors (demandant qu'on leur ouvre).

    3. Le dialogue des vv. 8-9

    Dans le schma prcdent, nous avons voulu exprimer par un signe d'opposition (+--+) la relation qui s'tablit dans les vv. 8-9 entre les deux groupes de jeunes filles. Nous sommes au moment du conflit. Dans le dia-logue, on veut montrer comment les avises sont amenes, contraintes refuser toute aide leurs compagnes par la logique mme des vnements (ou, si l'on veut, par les consquences de l'imprvoyance des insenses dcrite aux vv. 3-4). Il semble (cf. n. 13-II) qu'il faut chercher la solu-tion au problme de ce refus dans la dynamique du rcit. D'abmd, le dialogue n'est pas moralisant, ironique ou goste 29. Nanmoins, l'ex-' pression (v. 9), qui quivaut , . Le texte cependant est d'un herm-tisme total.

    29 Cf. BORNKAMM, Verzogerung, n. 25. Aussi LINNEMANN, Gleichnisse, 131. ZuMSTEIN, Condition du croyant, 258. MAISCH, Mt 25,1-13, 256. Parmi les commen-taires, Klostermann, Schmid, Schweizer, Lagrange ...

    3o Cf. plus bas pp. 219-222. 31 Voyez les pp. 221-222.

  • 44 DIX VIERGES

    Quoi qu'il en soit de ces considrations, il est lgitime de se demander si dans la formule du v. 9 (

  • II. ANALYSE NARRATIVE 45

    savoir de la requte des jeunes filles. Son refus n'est pas motiv, il est sans appel (diffrent en cela du refus des avises, v. 9). Quoique le texte n'explicite pas la raison du refus adress aux insenses, nous pouvons supposer que leur faute a t de ne pas avoir accompli leur tche d'accom-pagnatrices d'un cortge de noces 35. En effet, si les avises sont entres la noce, c'est parce qu'elles taient en lieu et place au moment convenu; nous devons donc en dduire que le refus essuy par leurs compagnes est d au fait qu'elles taient absentes au moment opportun, au moment de la convergence entre l'poux qui arrivait et celles qui devaient aller sa rencontre .. C'est pourquoi, dans les mots de l'poux la scne cinq, il semble qu'on entende rsonner le chtiment que les insenses ont mrit 86. Maintenant, le lecteur se rend compte que entrer/ ne pas entrer la noce est la rcompense /le chtiment que le seigneur-poux donne selon qu'on s'est prpar/ ne s'est pas prpar pour mener bien la tche demande.

    5. L'pisode intermdiaire (v. 5) Apr:s ces rflexions, nous pouvons poser le problme de la place du

    retard de l'poux dans l'ensemble de l'action narrative. Il ne s'agit pas dans cette discussion d'aborder la question de l'importance ou non du retard 37, mais de savoir comment s'articule ce retard dans la narration que Matthieu nous a laisse. Nous avons vu combien le retard caractrisait la deuxime scne, scne presque fige du point de vue dramatique et qui constitue une sorte de pause, d'intervalle, dans l'action narrative. Notons que cette scne est l'unique qui ne compte aucun verbe de mouvement 38. D'autre part, l'action dramatique dessine une ~ne qui, sautant de la pre-mire scne (vv. l-4) par dessus la seconde (v. 5), atterrit directement dans la troisime (vv. 6-9). En d'autres termes, la prsentation aboutit au noeud de notre rcit, sans passer par l'pisode intermdiaire (v. 5). L'analyse du dialogue conflictuel des vv. 8-9 et sa relation troite avec les vv. 3-4 l'a montr suffisamment. Alors si prendre/ ne pas prendre de l'huile (vv. 3-4) joue en fonction du moment o les lampes doivent tre allumes (vv. 8-9) et si le retard de l'poux appartient une scne-parenthse, pisodique, de l'action narrative, il faut dire que le retard est un lment indpendant

    35 Cf. LINNEMANN, Gleichnisse, 132. 36 L'poux parle comme un seigneur qui punit les insenses. Ce n'est qu' partir

    d'ici que l'entre des avises revt un caractre de rcompense, par rapport au chti-ment que les autres reoivent. Le glissement est presque imperceptible, mais trs significatif.

    37 Cf. plus bas pp. 123-141. 38 Premire scne. - t~'ij6ov (v. 1): un verbe

    Deuxime scne. - aucun verbe Troisime scne. - t~pxecr6e (v. 6), rropeue:cr6e: (v. 9): deux verbes Quatrime scne. - &rrepxofLVwv, ij6ev, dcr'ij6ov (v. 10): trois verbes. Cinquime scne. - ~pxov-r

  • 46 DIX VIERGES

    du prendre j ne pas prendre de l'huile. C'est--dire que les jeunes filles sont insenses ou avises non parce qu'elles comptent ou ne comptent pas sur un retard de l'poux, mais parce qu'elles sont sorties de la maison ou bien sans huile, ou avec les fioles pleines 39. Toute l'action narrative (vv. 4.6-9.10.11-12) dpend de ce fait, qui parle de lui-mme, et non pas du retard de l'poux 4o. Preuve en est que le retard n'intervient en rien dans cette action. En revanche, les consquences de la non-prparation et de l'imprvoyance du dbut se manifestent de manire dramatique dans le dnouement de la narration 41.

    Ainsi, pour rpondre notre question, le retard de l'poux est un l-ment isol dans l'action narrative, qui est situ dans une pause (la deu-xime scne) et qui, comme nous le verrons, se trouve en connexion troite avec un autre lment de cette. scne, le sommeil des jeunes filles. Ces deux lments apparaissent et disparaissent sans laisser de trace dans la narra-tion. La deuxime scne est pisodique et non centrale, marginale et non essentielle dans l'ensemble de la narration 42. Celle-ci ne perd rienr de sa force ni de sa dynamique si cette scne est laisse de ct et que l'on se contente de suivre le droulement dramatique des vv. 1-4 (titre-prsen-tation), 6-9 (noeud) et 10 (dnouement). A partir d'ici, les questions qui nous intriguent encore plus sont les suivantes: quelle est la signification des lments de la seconde scne? que signifie le fait que l'poux tarde et que les jeunes filles s'endorment?

    6. L'pisode final (vv. 11-12) Pour finir, il faut discuter le caractre de ce que nous avons appel

  • II. ANALYSE NARRATIVE 47

    Si nous reprenons le double mouvement de la quatrime scne (v. 10) (cf. le schma p. 42), nous sommes en prsence de deux lments explicites (les insenses s'en vont et les avises entrent) et de deux lments impli-cites (les avises restent et les insenses n'entrent pas). C'est--dire que la situation qui en rsulte la fin de cette scne est la suivante: l'poux et les avises sont l'intrieur, la noce, et les insenses sont l'extrieur. La porte est ferme 43. Commence la cinquime scne. Les insenses arrivent et l'poux les refuse, il ne veut pas leur ouvrir la porte. Le rsuJtat est exactement le mme qu' la fin de la scne prcdente: poux et avises l'intrieur, insenses l'extrieur. La porte reste ferme. C'est pourquoi, face au jeu dramatique, la scne cinq, ou pisode final (vv. ll-12), ne fait que confirmer la situation qui s'tait tablie avec la scne prcdente 44. Son apport l'action dramatique est subordonn. Le dnouement de la narration se trouve dans le v. 10. Les vv. ll-12 ont un caractre plutt pisodique 45. Cependant, et comme dans le cas de la deuxime scne que nous avons dcrit prcdemment, nous avons nous demander: que font les vv. ll-12 dans notre narration~ pourquoi l'poux apparat-il au premier

    plan~ quel sens y a-t-il confirmer l'exclusion des insenses par un refus exprim aussi durement~

    III. RSULTATS

    Voici les rsultats acquis par l'analyse d~ la narration qui se trouve en Mt 25,1-12:

    a) La est l'poux qui doit clbrer ses noces. En contrepoint cette figure, apparaissent deux figures jumelles, l'une (les jeunes filles insenses) et l'autre (les jeunes filles avises). Le devoir de ce groupe bipolaris est de participer au cortge de l'poux quand il arrivera. Il y a en plus trois personnages secondaires: ceux qui ralisent les actions de ((crier)) dans la nuit (v. 6) et de fermer la porte (v. 10), ainsi que les marchands, mentionns de passage au v. 9.

    D'autre part, le systme des verbes et des particules forme un tout homogne et bien trait, o la ligne des aoristes constitue le squelette nar-ratif auquel s'accrochent les formes subordonnes (participes) et adjacentes (imparfaits). Ce squelette soutient une exclamation (v. 6) et deux dialogues

    43 Au v. 10, la disposition des actions implicites (a) et explicites (b) a une shuc-ture croise:

    insenses: avises: s'en vont-b~-======-......,..===:::.:a:_::-:__(restent) (n'entrent pas)- -entrent

    "Cf. KAHLEFELD, Gleichnisse, 137. 46 Cf. GoM, Mateo, 555.

  • 48 DIX VIERGES

    (vv. 8-9 et 11-12) en style direct. A un endroit, le prsent historique qualifie la narration d'une manire spciale (v. 11).

    Les changements de scne sont marqus par des signaux non-quivo-ques que nous avons appels (DA). Elles sont quatre: > (v. 10) (gnitif absolu), (v. 11) (adverbe). L'adverbe "t"6"t"e: du v. 7 n'indique pas un changement de scne, mais un lien avec la rfrence temporelle . Ainsi ces quatre dtermi-nations permettent de diviser Mt 25,1-12 en cinq scnes: 1) les protago-nistes du drame (vv. 1-4); 2) le retard et l'assoupissement (v. 5); 3) l'an-nonce et le conflit (vv. 6-9); 4) celles qui entrent et celles qui n'entrent pas (v. 10); 5) le refus (vv. 11-12).

    Si l'on transpose ces titres la narration, les cinq scnes peuvent tre requalifies de la manire suivante: 1) titre-prsentation (vv. 1-4); 2) pi-sode intermdiaire (v. 5); 3) noeud (vv. 6-9); 4) dnouement (v. 10); 5) pi-sode final (vv. 11-12). Il y a donc trois scnes qui constituent l'action dramatique (la premire, la troisime et la quatrime) et deux scnes qui sont pisodiques (la deuxime et la cinquime).

    b) L'action dramatique se droule avec une acclration progressive qui culmin avec l'entre de l'poux et les avises la noce, et avec la fermeture de la porte, qui laisse dehors les insenses. L'analyse des verbes de mouvement montre un crescendo dans le cours de l'action dramatique (cf. n. 38-II). La progression du mouvement concorde parfaitement avec l'argument et donne . l'action une dynamique particulire. Le mobile en est l'poux. Chacune des trois scnes principales (premire, troisime et quatrime) correspond un chelon de plus dans l'approche de l'arrive en scne de l'poux. Celui-ci apparat successivement comme (titre-prsentation), > (noeud) et

  • II. ANALYSE NARRATIVE 49

    ment des jeunes filles (vv. 3-4), que le texte pourtant ne rendra effective qu'aux vv. 8-9. C'est ici seulement que la division entre les deux groupes devient explicite dans l'action, et vidente travers le dialogue conflictuel (vv. 8-9) qui oppose les unes aux autres. Malgr la difficult de prciser l'articulation exacte du dialogue, on peut dire que la rponse ngative faite aux avises est la consquence de l'imprvoyance initiale des insenses et comporte qu'effectivement l'huile ne suffise pas pour toutes. C'est donc la situation celle qui provoque le conflit (il y a une certaine dose de fatalis-me dans les faits), mme si la rponse des avises manifeste une certaine habilet. Rsultat: un dnouement prvisible achve cette chane d'v-nements qui font prcipiter l'action vers une fin aigre-douce (combinaison de bonheur et de catastrophe).

    c) Les scnes deux et cinq donnent l'impression de n'tre pas cen-trales dans le tissu narratif. C'est pourquoi, nous les avons nommes res-pectivement: pisode intermdiaire et final. Ce sont des scnes qui man-quent d'une certaine cohrence narrative et qui, surtout, sont caract-rises par leur isolement vis--vis du fil autonome de l'action dramatique. Du point de vue dramatique, elles sont donc des doublets. La premire met profit l'intervalle narratif qui se produit entre la prsentation (la des jeunes filles) et le dbut du noeud (le dans la nuit). La deuxime renforce l'argument de l'exclusion des insenses par l'inter-vention du seigneur-poux. En effet, l'pisode intermdiaire (v. 5) suppose un ralentissement de l'action dramatique, une sorte de plan fixe qui re-tarde la progression du mouvement. Ce ralentissement est accompagn d'une coupure du rythme de l'action, avec l'introduction de l'lment (vv. 5. 7a) qui semble porter ombrage une donne dj acquise: l'existence de deux groupes jumeaux. Le v. 5 efface la sparation des cinq insenses / cinq avises, exprime avec tant de soin aux vv. 3-4 et reprise avec clart aux vv. 8-9. Il faut ajouter quelque chose la surprise que produisent ces modifications et l'tranget du contenu de la scne (les jeunes filles s'endorment!): c'est l'incidence neutre qu'elles exercent sur la scne suivante. Il faut donc dire que la deuxime scne est un pisode isol et indpendant de l'action dramatique. Ainsi, ce n'est pas le fait de compter ou non sur le retard de l'poux qui justifie la dnomination H< insense >>, mais le fait que les jeunes filles se munissent d'huile ou non.

    L'pisode final (vv. 11-12), quant lui, prsente une stylisation narrati-ve maximale, une expression quasi hermtique. La seule chose claire est que les insenses supplient qu'on leur ouvre et que le seigneur-poux refuse de les reconnatre, qu'il leur fait la sourde oreille. Tout le reste est pure conjecture, car les motivations des deux attitudes ne sont pas explicites. Il semble cependant que l'on ressente un certain ton de chtiment: le refus de l'poux semble se fonder sur l'erreur que les insenses ont commise, sur leur manque de prvoyance qui les a empches de raliser ce qu'elles

  • 50 DIX VIERGES

    devaient mener terme. La figure de l'poux domine totalement la scne, sans qu'on puisse en prciser le setting. Les jeunes filles avises ont disparu (pour la premire fois dans la narration). Il n'y a plus en scne que les cinq insenses et l'poux qui semble leur rpondre de l'intrieur (la porte est ferme!). En rsu:n1, il s'agit d'une scne-clair, rapide, qui fait fonction subordonne par rapport l'action dramatique. Celle-ci semble s'tre termine la scne quatre.

    Par consquent, si les scnes deux et cinq sont des simples pisodes au caractre non-essentiel par rapport l'action, si elles peuvent en tre spares sans que la narration souffre des dommages irrparables, sans qu'elle change de mouvement, la question sur le rle de ces deux units (vv. 5 et 11-12) devient une question sur les modifications que la narration a pu subir. Quelle est leur signification? Comment et pourquoi se trouvent-elles dans la narration actuelle, telle qu'elle nous est parvenue? Qu'est-ce qui fait que le dernier rdacteur les considre importantes (prsent histo-rique, signe d'intrt, au v. 11 ! ) ?

    Voici donc, les questions auxquelles nous nous efforcerons de rpondre dans le chapitre suivant.

  • CHAPITRE TROISIME

    Les intrts du rdacteur de Mt 25,1-13

    L'analyse de la structure narrative et de l'action dramatique nous a amens considrer le caractre pisodique des scnes deux (v. 5) et cinq (vv. 11-12). Cependant cet aspect secondaire au niveau strictement narratif n'implique en aucune manire que ces deux scnes soient secondaires au niveau de la thmatique et de la rdaction. De plus, cela favorise la possi-bilit que le rdacteur soit intervenu dans ces deux scnes. D'autre part, il est facile de prouver que Matthieu est intervenu dans le > (cf. l'adverbe T6Te: du v. 1 et surtout le v. 13). Ajoutons encore que le thme de l'huile lie aux bonnes oeuvres contient une srie de rsonances matthennes: on peut le prsumer partir de la thologie du rdacteur du Premier vangile. Nous allons donc suivre la trace les trois grands thmes que Mt 25,1-13 prsente: la parousie, le jugement et les bonnes oeuvres.

    l. LA pAROUSIE

    Avant d'entrer en matire, preCisons comment le thme de la pa-rousie intresse notre parabole. Nous avons vu que les verbes vucrTOC~w et x0 se clt par l'action du

    1 BAUER s. v. 2: >. 2 La finale de la squence ou commence la suite d'actions

    qui caractrisent la troisime scne.

  • 52 DIX VIERGES

    rveil des jeunes filles, le retard de l'poux se clt avec l'annonce de son arrive. Ces deux processus (notons que xpov[~OV"t"O, participe prsent, et lxcHku8ov, imparfait, dnotent une continuit) s'articulent entre la scne de la prsentation (vv. l-4) et la mise en mouvement du drame avec le dans la nuit. Leur complmentarit s'entrevoit donc partir des fonctions parallles de > et d'> qui convergent vers le point temporel du (v. 6). C'est en tirant parti de l'arc temporel offert par cette expression que le retard de l'poux et l'> trouvent un lieu propre, comme pisode intermdiaire. En ce sens, on peut dire que les fonctions de > et d'> occupent un espace facilit par l'action narrative elle-mme.

    l. Le retard du Christ et la mort des chrtiens

    L'identit de l'poux est le point partir duquel toute la narration prend sa couleur. La rponse de Matthieu est claire: l'poux est le Christ. A une poque trs primitive, la tradition avait dj labor cette symbologie du Christ-poux. L'vangliste ne fait pas autre chose que de la recueillir. L'exemple du logion de Mc 2,19-20 par. Mt 9,15 par. Le 5,34-35 montre que la signification allgorique du Messie-poux provient d'une interpr-tation primitive de la communaut 3. En effet, c'est la communaut qui a amplifi le logion original (Mc 2,19a), en identifiant l'poux avec le Messie et en fondant une praxis communautaire de jene 4. D'est pourquoi, il faut considrer la mtaphore du Messie-poux, comme un apport chrtien spcifique 5, inspir certainement des mtaphores vtro-testamentaires de Dieu, comme l'poux du peuple 6 et de l'assimilation du temps du salut des noces. C'est dans ce courant de tradition que l'on pourra justifier pleinement l'interprtation du retard de l'poux de Mt 25,5a comme le retard de la parousie du Fils de l'homme.

    Si donc l'poux est le Christ et si cet poux retarde son arrive, cette circonstance ne peut que faire rfrence au retard de la parousie. Le temps prsent correspond au temps du retard, au temps qui prcde la venue

    3 JEREMIAS (TWNT IV, 1096) a montr de faon convaincante que la mta-phore poux-Messie est trangre l'AT et au judasme, et qu'elle ne peut pas tre attribue Jsus. Jeremias n'a trouv qu'une seule instance (PesR 149a) o apparat la mtaphore poux-Messie (Gleichnisse, 49). Cf. aussi GNILKA, Brautigam, 298-301, confirmant la conclusion de Jeremias devant les doutes suscits par 1QEsa 61,10.

    4 Le fait que Matthieu et Luc aient limin Mc 2,19b - peut tre dpendant du fait que la mtaphore Jsus-poux-Mossie est dj utilise couramment dans la communaut et qu'il n'est pas ncessaire d'insister, d'une faon presque tautolo-gique, comme chez Marc, sur le sens du logion primitif (Mc 2,19a).

    6 Cf. GRAESSER, Parusieverzogerung, 121-122. 6 Cf. Os 1-3; Ez 16,71; 23,4; Es 50,1; 54,4ss. De plus, en Es 61,10 et 62,5, la

    joie du temps du salut est compare la joie de l'poux pour l'pouse.

  • III. INTERETS DU REDACTEUR 53

    de l'poux cleste. En consquence, le verbe x_pov[~w 7 est l'expression d'une ralit que la communaut constate jour aprs jour: le Christ retarde son arrive, la venue-retour de l'poux se fait attendre. Le retard de la parousie est un facteur qui joue dans la dtermination du moment prsent s.

    En parallle au retard de l'poux (v. 5a), on trouve l'

  • 54 DIX VIERGES

    On peut analyser travers les verbes xa6Euaw (v. 5b) et ydpw (v. 7a) la porte de la constatation faite par Matthieu de la mort progressive des chrtiens de sa gnration et de la rsurrection future d~ tous ceux qui meurent maintenant 16. Le verbe xa6Euaw a chez Mt diffrentes significations. D'une part, il indique le sommeil physique (8,24 par. Mc 4,38; J,24 par. Mc 5,39 par. Le 8,52; 13,25. Et aussi Mc 4,27). D'autre part, il semble avoir une double connotation, physique et morale (dans l'pisode du jardin de Gethsmani: 26,40.43.45 par. Mc 14,37.40.41 par. Le 22,46. Et aussi Mc 13,36) 1 7. Enfin il y aurait le sens non-propre de 25,5, dans la ligne de deux autres textes du NT (1Th 5,10 et Ep 5,14) 18. Cette pluralit de sens se concentre, semble-t-il, dans le verbe xo~fL&OfLIX~, qui appartient au mme champ smantiq1ri.e que xa6Euaw: en Mt 28,13 () il indique lf sommeil physique, tandis qu'en 27,52 (), il se rfre au sommeil de la mort 19. De plus, l'utilisation non-propre de xa6Euaw est constante dans la pro-duction littraire contemporaine de Matthieu 2o. Quant ydpw, c't;st le verbe utilis normalement par le Premier vangile pour exprimer des actions du type de , rsurrection du Christ d'entre les morts (16,21; 17,9.23; 20, 19; 26,32; 27,-63.64; 28,6. 7) soit de la rsurrection d'autres personnes (9,25; 10,8; 11,5; 14,2; 27,52). Ainsi donc les deux verbes, xa8Euaw et ydpw, concident dans leur manire de se comporter car l'un et l'autre peuvent avoir un sens immdiat, physique (dormir-s'veiller) ou un sens non-propre (mourir-ressusciter). Les deux binmes, avec de lgres modifications de vocabulaire, se retrouvent souvent chez Matthieu 21 .

    Ces conclusions 22 sont renforces par le fait que ydpw est un verbe

    16 Cette interprtation avait dj t suggre par JuELICHER, Gleichnisreden' Il, 455. Elle a t dveloppe par DoNFRIED, Ten Virgins. Elle a t dernire-ment accepte par SCHENK, Mattdus XXV, l-13. Ce[il'lndant, c'est dj une inter-prtation patristique trs courante (cf. n. 24-III).

    17 Cf. pp. 95-97. En l Th 5,6-8, Paul construit deux binmes qui vont dans la mme ligne: a) la nuit, temps de tnbres et de dormir (xodle:B(J)) (ce qui caractrise la vie des paens); b) le jour, temps de lumire et de vigilance (yp1]yop(J)) (ce qui ca-ractrise la vie des chrtiens).

    18 En ce qui concerne Ep 5,14, cf. SCHLIER, Epheser, 240-242. 19 Cf. aussi Jn 11,11.12; Ac 7,60; 13,36; lOo 15,6.18.20.51; lTh 4,3.14.15; 2o Voyez 4Esd 7,32-37. 21 Pour le second sens, cf. 10,8; 11,5; 14,2; 17,9; 27,64; 28,7; encore 16,21; 17,23;

    et 20,19; 26,31-32. 22 Quelques auteurs (par exemple JEREMIAS, Gleichnisse, 48) veulent expliquer

    le sommeil des jeunes filles en fonction de l'irruption du Royaume (niveau-Jsus) ou de l'arrive subite de la parousie (niveau-Matthieu). En ce cas, le retard de. la parousie, exprim par le retard de l'poux, correspondrait l'arrive inattendue (plotzlich) de la fin, exprime par l'assoupissement des jeunes filles. Or, l'ide de Plotzlichkeit n'apparat directement dans aucun lment de la parabole. En second

  • III. INTERETS DU REDACTEUR 55

    typiquement matthen, utilis en plusieurs occasions par le rdacteur 23. Son apparition en Mt 25,7a, ainsi que son usage non-propre (= >), aux cts de xa.:8c:3w (= (Cf. n. 181-III). Men' tionnons finalement deux commentateurs latins de Mt 25,6: Jrme et Hilaire de Poitiers. En revanche, pour Origne, l'assoupissement a un sens spirituel (d. E. KLOSTERMANN, Origines Matthduserkliirung, (II) GCS 38, p. 147). Sur la mort comme sommyil, voyez encore P. HoFFMANN, Die Toten in Christus. Eine religionsgeschicht-liche und exegetische Untersuchung zur paulinischen Eschatologie (NTA N.F.2) Mnster 19692, pp. 186-206.

    25 Cf. HoFFMANN, TRE IV, 450-463. 2s Cf. aussi Ez 37. 27 RusSELL (Jewish Apocalyptic, 366-374) rpertorie les livres uans lesquels

    ne se trouve aucune rfrence la rsurrection des morts mais o une autre forme de survie est suggre: Jub, 1Hen 91-104, AssMos, ApAbr. LARCHER (Sagesse, 323, n. 10) y ajoute PsSal 17, Sib III et 2Hen.

  • 56 DIX VIERGES

    me dans celui des Synoptiques (et Mt ne constitue pas une exception), la rsurrection gnrale n'occupe pas une place de choix. Il semble plutt qu'il s'agisse d'une opinio communis que l'on accepte sans gure de diffi-cult 28. L'pisode de la controverse entre Jsus et les sadducens, qui nous est rapporte par la triple tradition (Mc 12,18-27 par. Mt 22,23-33 par. Le 20,27-38) est reprsentative de cet tat de choses 29. Il y a aussi une srie de textes disperss dans les Synoptiques qui font rfrence, d'une manire ou d'une autre, au jugement, la vie ou au chtiment ternels, au ciel... 30. Les trois prdictions de la passion et de la rsurrection du Fils de l'homme constituent finalement un cas part 31.

    Or, pour essayer de comprendre les limites et la porte de la con-ception matthenne, il faut que nous la situions dans l'horizon concret des ides en rapport avec la rsurrection des morts, telles qu'elles sont dve-loppes dans les crits apocalyptiques. Nous avons dj dit dans le pa-ragraphe prcdent que Jsus et les Synoptiques croient en la rsurrection. Maintenant, nous voudrions prciser comment cette croyance apparat dans le Premier vangile et les particularits qu'elle prsente. Tout d'abord, nous ferons une analyse comparative de Matthieu et du milieu apocalypti-que. Nous nous attarderons ensuite Mt 27,51-53, la rsurrection des justes aprs la mort de Jsus 32.

    Le lien entre le Messie et la rsurrection des morts se situe selon l'apo-calyptique aux temps derniers. C'est dans la mesure o le salut messia-nique fera irruption la .fin des temps que la rsurrection des morts sur-viendra comme un vnement de la parousie 33 . Quoique nous possdions relativement peu de textes qui tablissent une relation directe entre la venue du Messie et la rsurrection des morts (TestBenj 10,6.8; TestJud 24-25; 1Hen 49,3; 51,1ss; Sib IV, 178ss), la norme gnrale est que le salut messianique doit comporter galement une rsurrection prcdant le juge-ment universel34. Ainsi, partir du lien entre X!:lil c',l~il et la rsurrection 35, on constate une srie de squences qui la mettent en connexion avec diff-

    2s Cf. BECKER, Auferstehung, 13. . 29 En laissant de ct la question de l'historicit, la pricope met en vidence

    le fait qu'il y a une croyance en la rsurrection des morts, que cette croyance passe par la tradition apocalyptique de la transformation des corps des ressuscits (cf. 1Hen 51,4; 104,6; 2Bar 51,10) et que c'est la llUvoqJ.L 'tou 6Eo qui rend possible le rveil du sommeil de la mort.

    30 Ainsi, par exemple, Mt 8,11-12 par. Le 13,28-29 (vie ternelle/chtiment ternel); Mt 7,21-23 par. Le 13,25-27; Mt 11,21-24 par. Le 10,12-15 (vie ternelle) ...

    31 Sur l'enseignement de Jsus, cf. aussi F. MusSNER, Jesu Lehre ber das kommende Leben nach den Synoptikern, Cane (D) C (1970) 692-695.

    32 Notons que chez Mt la rsurrection finale des chrtiens est interprte en harmonie avec les esprances apocalyptiques, mme si on ne peut pas oublier la phrase matthenne (27,53).

    33 VoLz (Eschatologie, 225-226) fournit une longue liste de textes. 34 Cf. Bill. IV, 887 et SrBER Mit Christus, 49. 35 Textes dans Bill. IV, 972-973.

  • III. INTERETS DU REDACTEUR 57

    rents vnements de la parousie et qui l'intgrent dans l'ensemble des vnements qui marquent l'irruption de l'on futur36_ Mais qu'entend-on par rsurrection~ Le rveil de certains (Isral, les justes)1 Le rveil de toute l'humanit~ D'emble on peut prouver par de nombreux textes que les membres du peuple choisi ressuscitei;iont (GnR 13, par exemple). En d'autres cas, on ne parle que des justes (2M 7,9.14.23; 12,43ss; lHen 90,33) ou bien on dit que les pcheurs n'y participeront pas (San 10,1.2; bSan 106b). Par contre, en ce qui concerne la rsurrection gnrale de tous les hommes (isralites et paens), les textes se font plus rares 37_ Il semble que l'on parle d'une rsurrection de toute l'humanit dans les textes suivants: lHen 22; 51,1; 4Esd 5,45; 7,32; 2Bar 26,10ss; 50,2ss; 51,3; Test-Benj 10; VitAd 51; Sib IV,l80; AssMos 4138_ La liste est cependant varia-ble. Les rabbins sont diviss, bien qu'une bonne majorit, surtout parmi les tannates, dfendent la thse d'une rsurrection de toute l'humanit 39.

    la lumire de ces rsultats, il n'est pas tmraire d'affirmer que, pour Matthieu, le retour du Fils de l'homme la parousie comporte la rsurrection des morts; celle-ci doit tre entendue probablement comme une rsurrection gnrale de toute l'humanit. Il est vrai que la parabole des dix vierges permet d'affirmer seulement que les chrtiens, bons et mau-vais, tous les membres de la communaut, se rveilleront du sommeil de la mort (vv. 5b-7a) pour tre jugs (vv. 11-12); cependant les conceptions dominantes au Ier. sicle ap.-J.C. (aussi bien celles qui proviennent de l'apocalyptique que celles du rabbinis