Arcotedazur N°12
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SUPPLÉMENT CULTUREL DES PETITES AFFICHES DES ALPES MARITIMES
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SUPPLÉMENT CULTUREL DES PETITES AFFICHES DES ALPES MARITIMES
GIACOMETTIà la fondation maeght
OPÉRAS BALLETS CONCERTS
saison2o1o/11
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PÉRA Nice Côte d ’Azur
Art Côte d’AzurSupplément culturel des Petites Affiches des Alpes Maritimes Numéro 3508 duDu 11 au 17 Juin 2010BimestrielISSN 1962- 3569
Place du Palais17 rue Alexandre Mari06300 NICE Ont collaboré à ce supplément culturel :
RédacteursAlain AmielRodolphe CosimiOlivier MarroFaustine Sappa
Direction ArtistiqueFrançois- Xavier Ciais
Création GraphiqueMaïa BeyroutiCaroline GermainHenri Bouteiller
PhotographeHugues Lagarde
Photo de Couverture“L’Homme qui marche”Alberto Giacometti - Collection de la Fondation Maeght - © H.Lagarde
Contacter la Rédaction :Valérie NoriegaTél : 04 93 80 72 72Fax : 04 93 80 73 [email protected] Publicité :Anne AgullesTél : 04 93 80 72 [email protected]
Abonnement :Téléchargez le bulletin d'abonnement sur :www.artcotedazur.frou contactez-nous par tél : 04 93 80 72 72
Art Côte d’Azur est imprimé par les Ets Ciais Imprimeurs/Créateurs « ImprimeurVert », sur un papier répondant aux normes FSC, PEFC et 100% recyclé.
La rédaction décline toute responsabilité quant aux opinions formulées dans les articles, celles-ci n’engagent que leur auteur. Tous droits de reproduction et de traductions réservés pour tous supports et tous pays.
Beyond PetroleumDes hommes meurentUne plateformeExplose l’horizonRépand la peurEt son poisonIn the deep waterSon of a bitchLa cie british
TricheLes nouveaux barbaresComptent leurs milliardsDe dollarsMalgré la tache là-basDans le deltaLes lâchesAssassinentSans relâcheÀ coup de benzine
Les plages de VeniceLes rives du MississipiPour le culte du BeneficeÀ tout prixUn été Bien mal PartiPour tous les gensQui ne sont pas des banditsEn col blanc.
Arnaud Duterque
On nous faisait croire aux bienfaits énergétiques en totale sécurité de cette huile désormais destructrice, la terre saigne de la ganacherie humaine.
Exposez-vous, côte épile.
Sur nos rivages bien heureusement nous nous abreu-verons de lumières solaire et artistique, foisonnement de créations et d’expositions qui participeront à l’élévation énergétique de nos émotions.Tout d’abord à la Fondation Maeght à St Paul de Vence, magnifique exposition Giacometti, seulement quelques kilomètres vous sépareront dès lors du Musée Rétif à Vence, fêtant dignement les 50 ans de l’École de Nice sous la direction magistrale d’Alexandre de la Salle, avec la complicité active et dynamique de France Delville.
Nous évoquerons également, Bruno Mendonça à Contes, Paola Cantalupo à Cannes, Michel Butor et Henri Maccheroni à Nice, ville qui célèbre les 150 ans de son rattachement avec notamment une œuvre de Bernar Venet ; Botero et de nombreux sculpteurs de renom à St Tropez/Gassin, Guy Champailler à Cagnes
sur Mer, Maubert, Taburchi, Lorenzoni, Tiboise pour une découverte de la nouvelle vague d’artistes locaux.
Retournez-vous, côte et face.
Un été qui se veut donc haut en couleurs, en créativité, et en hommages, mais n’oublions pas les nombreux festivals de musique qui dès le 21 juin nous ferons vibrer et danser sur des rythmes endiablés.
Maintenant, jetez-vous à l’eau.
Tout cela exprimant oh combien notre région reste encore aujourd’hui « LA » principale destination artistique mondiale. Alors soyons audacieux, soutenons nos artistes et tous ceux qui font vivre l’Art et la Culture, maintenons sans tarir le plus bel écrin de leur expression.
Désormais vous pouvez rentrer l’huile, ou sur le papier vous ne serez plus durable.
François-Xavier Ciais
Un Été de goudron
OPÉRAS BALLETS CONCERTS
saison2o1o/11
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PÉRA Nice Côte d ’AzurBeeeeeP, sortez l’Huile. An 2010, l’était pas un peu meurtrier ?
En Ville
6 SAINT PAUL DE VENCE Fondation Maeght Expo événement Giacometti & Maeght
8 VENCE
Musée Rétif
10 MOUGINS Galerie Sintitulo
12 ROQUEBRUNE Maison Eileen Grey
14 CAGNES SUR MER Installation De Guy Champaillet
16 CONTES Bruno Mendonça Exposition à la Médiathèque
18 CANNES Paola Cantalupo École Rosella hightower
20 NICE Henri Maccheroni et Michel Butor
©H Lagarde
© Archives Fondation Maeght
© Aurore Valade
© Courtesy P. Cantaloupo
La Vie des Arts
© H Lagarde
© H Lagarde
© H Lagarde
© J. Taburchi
24 150 Ans Du Rattachement de Nice
éVéNEMENT
26 Bernar Venet
FIGURE DE L’ART
30 Jérémy Taburchi
DESSIN
32 Christophe Lorenzoni
ARTISTE
34 Christophe Tiboise
ARTISTE
36 Parc Des Sculptures
HORS LES MURS – VAR
40 Maurice Maubert
ARTISTE
42 Van Gogh revisité par Alain Amiel
LITTERATURE
45 Le Centre Universitaire Méditerranéen
BILAN 2010
6
Pour sa réouverture après 5 mois de travaux la Fondation Maeght invite dès le 27 juin, Alberto Giacometti. Une exposition estivale très attendue, dans ce lieu qui dès son inauguration il y a près d’un demi siècle accueillait déjà le sculpteur et son premier « homme qui marche »…
E N V I L L E S A i n t p A u l d e v e n c e
F o n d at i o n M a e g h t
« L’homme qui marche » sort de la cour !
Après celle dédiée à Miro l’an der-
nier cette exposition estivale sem-
ble poursuivre un cycle visant à
montrer au grand public, un peu comme
on feuillette un album de famille quel-
ques uns des illustres artistes de la col-
lection Maeght qui tissèrent dès l’origine
des liens étroits avec Aimé Maeght et sa
famille. Ainsi sa petit fille Isabelle Maeght
(qui veille aujourd’hui avec sa sœur Yoyo
sur la Fondation et les entités Maeght) a
tenu à dévoiler les talents multiples de
Giacometti (1901-1966) au travers de
170 pièces dont une soixantaine de bron-
zes qui retracent le parcours entre l’ar-
tiste et son grand-père Aimé, mais aussi
Adrien Maeght qui rencontra Giacometti
dès 1947 alors qu’il n’avait que 17
ans. Point d’orgue de cette complicité :
Alberto Giacometti se verra confier son
propre espace à la Fondation Maeght,
inaugurée le 28 juillet 1964 : une cour
qui prit le nom de Cour Giacometti. Les
années suivantes, l’artiste poursuivra
ses recherches sur la gravure dans les
ateliers d’Adrien avant de disparaître
en 1966. Isabelle Maeght, Commissaire
de l’exposition nous parle de ses choix
pour faire revivre dans son berceau cette
longue amitié qui ouvrit une grande page
de l’histoire de l’art moderne.
comment Aimé maeght rencontra-t-il
Alberto Giacometti ?
Isabelle Maeght : Par l’intermédiaire de
André Breton en 1946 car Giacometti fit
parti un temps des surréalistes. Aimé qui
venait alors d’ouvrir sa galerie à Paris
lui proposa de participer à l’Exposition
Internationale du Surréalisme qu’il orga-
nisa en 1947. Et même si le mouvement
surréaliste était déjà loin de ses préoccu-
pations artistiques, Giacometti accepta.
Puis Aimé devint son marchand et com-
plice et l’invita à plusieurs expositions
personnelles à Paris dont la première en
1951. D’autres suivirent en 1954, 1957
et 1961.
des liens qui ont conduit l’artiste à
participer plus tard à la création de la
fondation à vence
Giacometti s’est investi totalement dans
le projet architectural de la Fondation.
Nous avons des photos de lui sur le
chantier. Les œuvres présentes dans la
cour centrale furent choisies avec lui.
Giacometti a même fait refaire quelques-
unes de ses œuvres comme le cube qui
datait des années 30 pour qu’elles s’y
intègrent parfaitement.
À l’époque Giacometti était également
« suivi » par pierre matisse
C’est vrai mais il n’y eut jamais de
concurrence entre Pierre Matisse et Aimé
Maeght. Ils s’étaient répartis les taches.
Pierre qui avait une galerie à New York
Propos recueillis
par Olivier Marro
A. Giacometti : portrait de Jean Genet, 1955Collection Centre Pompidou © Archives Fondation Maeght
A. Giacometti au vernissage de son exposition à la Galerie maeght en 1959 © Archives Fondation Maeght
Annette, A. Giacometti et Aimé maeghtGalerie Maeght © Archives Fondation Maeght
7S A i n t p A u l d e v e n c e E N V I L L E
s’occupait de Giacometti aux USA et Aimé
de l’artiste sur le front Européen.
cette exposition est-elle la première
consacrée à Giacometti à vence?
Non, nous en avions déjà organisé une en
1978, mais elle n’abordait pas les relations
entre Aimé Maeght et l’artiste. L’objectif
cette fois est de montrer au travers d’œu-
vres emblématiques et d’autres plus rares
mais aussi de documents, lettres, photos,
films, la belle aventure qui unit ces deux
hommes qui partageaient la même vision
de l’art.
l’occasion de découvrir quelques
perles rares ?
Bon nombre de collectionneurs ayant
accepté de nous confier des pièces dont
ils ne se séparent pas habituellement,
il y aura en effet beaucoup d’œuvres
rarement exposées comme sa première
sculpture, la tête de son frère Diego,
la table surréaliste ou des plâtres qui
appartiennent à la famille Maeght dont
un, « la Femme debout avec Bouquet de
fleurs » qui fut offert par Giacometti à
mon père pour son anniversaire. C’est
aussi la première fois que nous pouvons
réunir les portraits de notre grand-père et
de notre grand-mère.
Quelle est la part de l’emprunt extérieur
?
Environ la moitié provient de notre propre
fond, l’autre partie étant prêtée par de
grands musées nationaux et
internationaux ou par des
collections privées.
en tant que commissaire
d’exposition quels ont été
vos choix ?
J’ai voulu montrer toute
l’étendue du travail de Gia-
cometti, ses peintures, des-
sins et gravures et privilégier
la période de l’après-guerre. Nous avons
tenu à réunir « les places » ces groupes de
sculptures comme « les neuf femmes de
Venise ». Et si nous avons choisi de pré-
senter l’œuvre sculptée à l’intérieur c’est
pour offrir au public une autre lecture de
ce travail. C’est aussi une façon de créer un
dialogue entre sculptures et travaux moins
connus. C’est ce regard plus intimiste et
interactif entre les œuvres et la famille
Maeght qui fait toute l’originalité de cette
rétrospective.
cet hommage arrive au moment où la
cote de l’artiste atteint des sommets.
près de 75 millions d’euros, c’est le prix
auquel fut vendu en début d’année chez
Sotheby’s un « homme qui marche ».
Nous n’avons pas attendu cette vente
publique record pour décider d’exposer
Giacometti, Le projet remonte à plus de
trois ans.
« l’homme qui marche » sera d’ailleurs
à l‘honneur, pouvez-vous nous en dire
plus sur sa naissance ?
Giacometti avait réalisé durant le prin-
temps 1960 trois maquettes pour une
commande de la Chase Manhattan Bank
à New York. Un homme qui marche, une
femme debout et une tête sur un socle.
Le projet n’ayant pas été retenu, mon
père a eu l’idée de les faire fondre et elles
sont devenues cette œuvre de 1,80 mètre
qu’Aimé décida d’installer en bonne
place dans la cour dédié à Giacometti à la
Fondation.
combien d’exemplaires existe t-il de
cette sculpture ?
« L’Homme qui marche » existe en deux
versions tirées chacune en 6 exemplaires
numérotés. Mais La Fondation Maeght
est la seule à posséder les deux versions
de « L'Homme qui marche » peinte par
l’artiste sur le bronze.
Giacometti & maeght 1946 – 1966 fondation maeght Saint paul de vence 27 juin > 31 octobre 2010
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E N V I L L E v e n c e8
À la sortie de Vence un bâtiment ultramo-
derne aux lignes claires se profile sur la
route de Grasse. Le musée Rétif a pris ses
aises autour de ses pelouses et d’un vaste par-
king. Bienvenue dans le plus jeune des musées
azuréens ! Mireille et Philippe Rétif propriétaires
du lieu nous ouvrent les portes. « Ce terrain sur
lequel le Musée a été bâti fut acheté dans les an-
nées 80 par mes parents André et Arlette ». Un
couple de sarthois qui fut un temps vençois et qui
créa dans les années 60 l’enseigne Rétif (une cin-
quantaine de grandes surfaces en France). Alors
que ces bâtisseurs en retraite tombent sous le
charme de l’œuvre de Robert Barriot, le fils de
l‘artiste leur confie son désir de créer un lieu où
exposer les émaux polychromes de son père.
Arlette et André proposent aussitôt de mettre à
disposition leur terrain et d’y bâtir un musée à
leur frais. Mais alors que le chantier est entamé,
les héritiers Barriot se désistent faute d’avoir
pu obtenir les subventions qu’ils escomptaient.
du musée à la GalerieDepuis l’inauguration du Musée en Juillet 2009,
Philippe et Mireille Rétif ont donc décidé de faire
vivre sous le signe de l’art contemporain ce magni-
fique espace comprenant une salle d’exposition de
900 m2 aux murs bleu nuit ainsi que deux audi-
toriums. Une salle modulable, qui complètement
ouverte ressemble à un grand cinéma où toiles,
photos, et sculptures sont désormais mises en va-
leur grâce à un éclairage approprié. « On s’est don-
M u s é e R é t i f
Pas de vacances pour l’École de Nice !
Ce n’est pas tous les jours qu’un musée ouvre ses portes sur la Côte d’Azur. Et voilà qu’un beau jour d’été 2009 le mira-cle a lieu à Vence. Un an après, c’est « l’école de Nice » qui s’invite au Musée Rétif sous le commissariat d’Alexandre de la Salle.
né deux à trois ans pour relever le défi » explique
Philippe lui aussi chef d’entreprise à la tête d’un
important négoce de vins. « La première exposition
a été faite dans l’urgence mais grâce à des amis et
créateurs qui croient en notre projet, nous avons pu
offrir au public l’œuvre de Barriot, de Carzou ainsi
que de très belles pièces de Sosno, Nall, Marcestel
et du maître verrier Novaro. Nous avons depuis en-
gagé une médiatrice pour accueillir tous les publics
y compris les scolaires, mais avant d’engager un di-
recteur artistique nous avons préféré confier cet es-
pace à des commissaires d’expositions ». C’est ainsi
que sous l’égide de Claude Guibert (journaliste, ci-
néaste et créateur de l’association DOCUMENTART)
le Musée Rétif ouvrait un second volet du 2 Mars au
30 Mai avec « La Mémoire du geste ». Une scéno-
graphie instaurant un dialogue entre trois peintres
de la Figuration Narrative et étienne Jules Marey,
pionnier de la photographie et du cinématographe.
Jamais deux sans trois ! Cet été le Musée souffle
sa première bougie en même temps que les cin-
quante ans de l’école de Nice. Un anniversaire au
sommet…
vence, le retour !Depuis le 8 Juin, le Musée Rétif déploie en effet son
espace pour fêter le cinquantenaire de l’école de
Nice autour d’une exposition d’envergure. 1960
c’est la date où tout commence : le 16 octobre, le
critique Pierre Restany publie le Manifeste du Nou-
veau Réalisme, où se distinguent Arman, Klein et
Raysse. Cette année là, Alexandre de la Salle ouvre
le volcan - claude Gilli© Courtesy - Musée Rétif
une vue de l’accrochage de l’exposition © H. Lagarde
©H Lagarde
9v e n c e E N V I L L E
sa galerie Place Godeau à Vence. Il y accueillera sept
ans plus tard fort de son amitié avec Robert Malaval
ce groupe protéiforme, autour d’une grande première
qui fera date, l’exposition étant baptisée « école de
Nice ? ». C’est donc à un retour aux sources que nous
convie en 2010 le Musée Rétif en confiant cette rétros-
pective à Alexandre de la Salle qui voit dans ce com-
missariat l’opportunité d’une revisitation en forme de
conclusion : « L’occasion m’est donnée par Mireille et
Philippe Rétif, de revenir, en amitié et en exigence, sur
ce qui s’est passé ici, entre Col de Vence et Baie des
Anges, pour offrir l’après-coup de cette aventure en
pâture aussi bien aux néophytes qu’aux initiés. Que
chacun puisse s’en délecter pour dire, avec ces précur-
seurs « la vie est plus belle que tout ! ».
un chapitre qui se referme, un autre qui s’ouvre ?
Voici donc revenir à Vence pour un remake attendu
trente artistes * (dont 24 sont vivants) qui forment la
richesse de cette école de « l’indiscipline ». Un déploie-
ment foisonnant de talents dont Frédéric Altmann sera
l’autre figure médiante, car il fut non seulement le
photographe témoin du mouvement, son acteur mais
aussi son zélé promoteur via de nombreuses expo-
sitions, colloques et publications. C’est d’ailleurs lui
qui mettra en contact Alexandre de la Salle et Philippe
Rétif. « Nous avons eu de la chance de travailler avec
Alexandre et son épouse France, chargée de réaliser
le catalogue de l’exposition. Sur les 130 œuvres mon-
trées et issues de collections privées près de la moitié
viennent de leur fond personnel ». À l’extérieur deux
sculptures accueilleront les visiteurs : une silhouette
de Sosno et un homme de pierre de 4 mètres prêté
par Max cartier. À l’entrée de la salle sera installé
« Le Volcan », réalisé pour l’occasion par Claude Gilli,
acheté par le Musée et dont 200 reproductions sur
vélin d’arche numérotées et signées seront commer-
cialisées. « De nombreux documents et films comme
celui signé par Pierre Marchou (Maire de Vence entre
2001 et 2008) sur l’école de Nice seront diffusés.
Quand à Pierre Pinoncelli il clôturera par une de ses
performances sulfureuses » commente Philippe qui,
fort de ce baroud d’honneur niçois qui durera 6 mois
compte mettre sur la bonne voie un jeune Musée en
quête d’identité : « Nous espérons profiter de la venue
des 150 000 visiteurs annoncés pour la réouverture de
la Fondation Maeght avec l’hommage à Alberto Gia-
cometti, ainsi que de l’exposition vençoise dédiée à
la collection Yvon Lambert au Château de Villeneuve.
Ces événements devraient nous permettre de passer à
15 000 / 20 000 entrées en 2011 ».
Tous les espoirs sont donc permis pour Philippe et
Mireille Rétif d’autant que l’école de Nice n’en finit
pas de faire parler d’elle depuis la vente aux enchères
organisée à Nice et à Paris et la rétrospective sur Ben
qui se poursuit jusqu’au 11 juillet à Lyon.
* Marcel Alocco, Arman, Ben, César, Albert Chubac, Noël Dolla, Robert Erébo, Jean-Claude Farhi, Claude Gilli, Yves Klein, Robert Malaval, Martial Raysse, Bernar Venet, André Verdet, Louis Chacallis, Max Charvolen, Serge Maccaferri, Martin Miguel, Vivien Isnard, Pierre Pinoncelli, Serge III, Sosno, Max Cartier, Jean Mas, Bruno Mendonça, Nivèse, Guy Rottier, Edmond Vernassa, Bernard Taride, Frédéric Altmann.
M u s é e R é t i f
Pas de vacances pour l’École de Nice !
Bienvenue dansle plus jeune des musées azuréens ! Mireille et Philippe Rétif propriétaires du lieu nous ouvrent les por-tes.
Om
différentes vues de l’exposition © H. Lagarde
10 E N V I L L E m O u G i n S
On ne s’attend pas forcément à
trouver ce type de galerie d’art
à Mougins. Il faut dire que plus
l’on approche des lieux à fort potentiel
touristique, plus on y trouve des propo-
sitions à but éminemment lucratif. Ce
n’est pas l’option choisie par Christina et
son époux José Louis Albertini lorsqu’ils
ouvrent leur « white cube » au cœur du
vieux village à deux pas du Musée de la
photographie André Villers. Car Sintitulo c’est d’abord la volonté
d’un homme à l’écoute des créateurs depuis 40 ans explique Chris-
tina « c’est le troisième projet initié par José, architecte et collection-
neur qui a toujours souhaité faire partager ses découvertes et soute-
nir ceux dont il apprécie le talent. Après une expérience à New York
(GBG Gallery, 1980-1988) il ouvrit à Nice la Galerie Sintitulo de 1992
à 1998. Là où se trouve actuellement la Galerie Depardieu. Pour ma
part je suis arrivée en 2003 au moment où l’enseigne déménageait
sur Mougins. Mon travail consista d’abord à visiter les ateliers d’ar-
tistes susceptibles de nous intéresser. Depuis cette année je m’oc-
cupe à plein temps de la galerie avec Claire et Ophélie ».
trois femmes à la barre……Cela n’est pas de trop pour gérer cette galerie qui ne se veut
pas qu’une vitrine mais travaille sur plusieurs axes afin de sen-
sibiliser le plus grand nombre, car pour Christina chargée de la
coordination « La culture est aussi un formidable outil de dévelop-
pement social ». Depuis 2010 elle est épaulée par Claire Migraine
qui, fort d’un cursus en Histoire de l’art, Métiers des arts, de la
culture et Métiers de l’exposition et de ses expériences en France
et à l’étranger, est responsable des expositions et de la presse.
« Claire s’attache notamment à développer une programmation
attentive à la jeune création méditerranéenne ». Quant à Ophélie
Greco (Master de médiation et Ingénierie culturelle) elle s’occupe
depuis 2009 des nombreuses offres de médiation que la galerie
propose : « On développe cette activité depuis trois ans, ce qui
nous a permis d’accueillir ici des publics très variés et des ate-
liers pour les scolaires qui reviennent avec leurs parents ». Et si
la galerie fonctionne à haut régime, l’été c’est sans se départir de
cette exigence : « Nous avons une forte proportion d’étrangers
de passage très sensibles également à cette démarche qui nous
permet de faire passer de l’émotion là où d’autres se réfugient
SintituloL’art en partage
La Galerie Sintitulo fait partie de ces lieux qui investissent en faveur de la jeune création et de l’art contemporain. Une mission qui doit prendre en compte tous les publics selon Christina, Claire et Ophélie.
thomas tronel Gauthier, Les Os à moelle roudoudoux, 2007, Os poli, bonbon gélatineux aromatisé à la fraise, verre blanc, 28 x 28 cm
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3 4 5©H Lagarde ©H Lagarde
11m O u G i n S E N V I L L E
Om
derrière l’aspect purement technique des créations » et Ophélie
de rajouter : « Nous œuvrons pour que ceux qui poussent notre
porte puissent en repartir plus riches même si ce n’est pas tou-
jours avec une œuvre ».
Apprendre à vivre l’art contemporainEt quand certains hésitent pourquoi ne pas leur offrir la possibi-
lité « « d’essayer l’œuvre » ? Christina et José n’ont pas hésité à
développer cette alternative. « Certaines personnes ne voient pas
toujours les œuvres sous le bon angle en galerie. Ainsi il n’est pas
rare que ceux qui repartent avec une œuvre présentée finissent
par l’acquérir. Ce n’est qu’après avoir vécu avec une toile que l’on
apprend à la regarder, à l’apprécier ». Fort de sa double casquette
d’architecte et collectionneur José intervient parfois en proposant
ses conseils et des prêts aux nouveaux résidents désireux d’ac-
quérir une œuvre d’art. « Dans tout ce que nous faisons nous
essayons de créer une approche différente avec l’œuvre, cela fait
aussi partie du travail de galeriste ».
un été chaud avec les nus de miquelisQuant aux créateurs présentés (une trentaine), le panel d’expres-
sion est large. Seul critère : Privilégier les jeunes artistes régio-
naux y compris ceux d’origines étrangères comme le japonais Shi-
geru Kuriyama qui vient d’exposer ses monochromes au crayon.
« Nous croyons beaucoup également à Yoann Pisterman d’origine
argentine qui vit et travaille entre Nice et Berlin ». Et pour ceux qui
n’ont pas d’attaches en région, un appartement au-dessus de la
galerie sert de résidence d’artiste. Ainsi du 18 au 27 juin la galerie
accueille le jeune photographe rennais Mathieu Harel-Vivier. Des
cultures différentes s’invitent ainsi à Sintitulo dont le catalogue
riche d’artistes aux disciplines diverses reste à dominante locale.
« Nous défendons depuis peu Charlotte Pringuey issue de la Villa
Arson. Nous montrerons ses dessins en fin d’année. Nous allons
également la présenter au « Lavoir » car la ville de Mougins a sou-
haité collaborer avec nous ». Ce n’est d’ailleurs pas la seule im-
plication de la galerie avec la ville. Chaque année pour le Festival
« Les étoiles de Mougins » Sintitulo accueille un plasticien revisi-
tant la notion de comestible. Thomas Tronel-Gauthier y dévoilera
en septembre de surprenantes sculptures alimentaires telles « Les
Os à moelle roudoudoux » (Os poli, bonbon gélatineux aromatisé
à la fraise et verre blanc). Mais avant cela, l’été 2010 s’annonce
très chaud sur ces hauteurs cannoises. Et ce ne sont pas les nus
de l’artiste niçois Gilles Miquelis qui feront baisser le thermomè-
tre en Juillet : « Nous avons découvert Gilles chez Nobert Pastor.
Quand la galerie a fermé nous avons souhaité lui offrir notre es-
pace pour qu’il puisse poursuivre ce travail pictural aussi inso-
lite que fascinant ». Un exercice de style proche de la figuration
narrative qui met en jeu les codes de l’impudeur, du voyeurisme
entre réalité et pastiche, classicisme et trash, tendresse et ironie
vacharde. Aurore Valade (Marseille) photographe lauréate du prix
HSBC connue elle pour son talent à mêler le baroque au quotidien
prendra le relais en août avec une série inédite sur les cactus.
Si elle se veut « sans titre » (Sintitulo en latin) la galerie mougi-
noise n’est pas sans ambitions. Elle a d’ailleurs rejoint le réseau
Botox et relaye comme la Galerie Catherine Issert (Saint Paul) dans
le moyen pays l’effort d’ouverture porté par ce collectif de gale-
ristes niçois.
1. Gilles Miquelis - 2008, Sans titre - 195x40 cm
2. Mathieu Harel Vivier - 2009, Errance - Tirage numérique - 70x90 cm
3. Christina Albertini
4. Ophélie Greco
5. Charlotte Pringuey - Dessin 2
6. Gilles Miquelis - 2008, Sans titre - 200x150 cm
7. Julien Bouillon pour l’exposition Jaune - 2010
8. Œuvre de Vasseux
9. Shigeru Kuriyama - 26 03 2009, Crayon papier - 55x75 cm
10. Aurore Valade, Agave Alain Americana Communis
© Courtesy Galerie Sintitulo
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12 E N V I L L E r O Q u e b r u n e - c A p - m A r t i n
Présentée comme un « programme d’habi-
tation destiné à l’homme moderne », selon
Pierre-Antoine Gatier, architecte en chef des
Monuments historiques et maître d’œuvre du projet
de restauration, la villa E 1027 est une maison de
villégiature typique des années 1920-1930. Conçue
par la décoratrice et architecte irlandaise Eileen Gray
(1878-1976) pour son ami Jean Badovici (1893-1956)
qui cherchait un site où s’installer entre Menton et
Saint-Tropez pour les vacances, elle est bâtie sur un
terrain en forte pente, face à la mer, dans l’anse que
dessinent la plage du Buze et le Cap. Un site inac-
cessible en voiture, avec un cheminement particu-
lier entre des escaliers pour y parvenir… Bref, une
maison qui se mérite. Première œuvre architecturale
de cette artiste, la villa va demander quatre ans de
construction, entre 1926 et 1929. Son appellation
mystérieuse est en fait un nom à clé surréaliste : E
pour Eileen, 10 pour le J (dixième lettre de l’alpha-
bet) de Jean, 2 pour Badovici et 7 pour Gray. Fidèle
aux théories de Le Corbusier, elle respecte les cinq
points de l’Architecture Moderne : pilotis, toit-ter-
rasse, fenêtre en longueur, plan libre et façade libre.
Elle compose à merveille avec le site en terrasse.
D’une surface de 160 m2, elle comporte un étage de
soubassement et un rez-de-chaussée surélevé. Mais
elle fait également la part belle au confort intérieur
et au bien-être des habitants. L’aménagement inté-
rieur et le mobilier sont réalisés dans des matériaux
modernes (celluloïd, câble acier et tendeurs, fibro-
ciment, aluminium et tôle
ondulée ripolinée), selon les
dessins d’Eileen Gray. L’ar-
chitecte invente et réinvente
sans cesse, réinterprète tout,
géométrise, en tendant vers
une abstraction formelle.
Toutefois, elle n’oublie pas
l’aspect fonctionnel des ob-
jets. Chaque détail de la mai-
son exprime le désir intense
de concilier les principes
esthétiques et les besoins
vitaux de l’homme. Malheu-
reusement, ce mobilier a été
en grande partie dispersé.
La restauration comporte-
ra donc des copies à l’identique. Comme d’autres
architectes de son époque, Eileen Gray effectuait
des recherches sur l’habitat minimal. Et si E 1027
comporte de faibles dimensions, elle n’en offre pas
moins une multitudes d’espaces et une grande indé-
pendance entre chaque pièce, permettant de prati-
quer plusieurs activités en même temps.
les fresques de la discordeL’inspiration navale est présente partout, que ce
soit avec la fantasque pergola de la terrasse, bâchée
comme un ponton, avec les échelles d’accès dessi-
nées comme des passerelles, avec la grande carte
marine accrochée au mur ou plus encore avec les
tapis aux motifs géométriques maritimes. Le tout
donnant à l’édifice une impression de mouvement.
Le Corbusier, ami de Jean Bodovici, vient souvent
séjourner à la villa, ainsi que d’autres artistes de
l’époque. Eileen Gray s’éloigne peu à peu de cette
agitation et part construire, en 1932, un autre chef
d’œuvre architectural, non loin de là, à Castellar,
qu’elle appellera « Tempe e Pailla ». En 1938, Le
Corbusier décide de peindre huit fresques sur les
murs intérieurs et extérieurs de la villa E 1027. Ei-
leen Gray, qui n’a pas été mise au courant, en veut
au célèbre architecte pour ce qu’elle considère com-
me une intrusion dans sa maison. C’est suite à cette
V i l l a E i l e e n G r a y
E 1027 « Mon paquebot immobile »
le cabanon et les unités de camping
En 1952, Le Corbusier accole un cabanon à la guinguette L’Etoile de mer appartenant à son ami Thomas Rebutato, située à quelques pas de la villa E 1027. D’une superficie de 16 m2, il est construit en rondins de bois et matériaux industriels. Il comporte un lit, une table, quelques rangements, un lavabo et un WC. Malgré ses dimensions modestes, il présente un plan très élaboré et témoigne des recherches de l’architecte sur la production standar-disée. Autres fruits d’une recherche d’économie dans la construction : les unités de camping. Au nombre de cinq, elles ne se distinguent que par la couleur de leur porte. Prévu pour deux, l’espace intérieur, de 8,27 m2, est divisé par une colonne sanitaire. L’aménagement est sommaire.
Première œuvre architectu-rale de la designer irlandaise Eileen Gray, la villa E 1027 est la propriété de la Mairie de Roquebrune-Cap-Martin et du Conservatoire du Littoral. Classée au titre des Monu-ments historiques en mars 2000, elle fait l’objet d’une restauration à l’identique et devrait ouvrir ses portes au public dans le courant de l’année 2011.
13r O Q u e b r u n e - c A p - m A r t i n E N V I L L E
brouille que Le Corbusier
ira construire son Caba-
non, à côté de la guinguette
L’étoile de mer, et les cinq
unités de camping.
Seules cinq fresques sont
encore visibles aujourd’hui, malgré les restaura-
tions qui ont déjà été effectuées. En août 1949, Le
Corbusier se trouve à Roquebrune-Cap-Martin pour
travailler au « plan Bogota ». À cette occasion, il en-
treprend la première restauration de ses peintures.
Une deuxième restauration semble avoir été effec-
tuée par Le Corbusier pour Madame Schelbert, l’une
de ses mécènes qui devient propriétaire de la villa en
1960, après le décès de Jean Badovici. Cependant, la
date de 1962 est reportée par l’architecte unique-
ment sur la peinture du coin salle à manger. Les pro-
blèmes d’infiltration, existant depuis l’origine, pour-
raient expliquer que cette peinture ait fait l’objet de
deux restaurations.
répétition de thèmesMadame Schelbert fait réaliser la dernière campa-
gne de restauration, entre 1977 et 1978. Toutefois,
on reprochera à cette opération des reprises trop
importantes sur l’œuvre originale, certaines allant
jusqu’à masquer les originaux derrière les contre-
murs, comme les peintures au trait de la terrasse
sous les pilotis, sur lesquelles a été rapportée une
copie. Ces peintures n’ont pas été conçues pour
cette villa. Conformément à sa démarche pictu-
rale, Le Corbusier a adapté des sujets et composi-
tions sur lesquels il travaillait de manière perma-
nente. Ainsi, sur la peinture de l’entrée, on trouve,
en partie basse, une femme et un volet et, en partie
haute, un accordéon. Les deux parties de la peinture
sont séparées par une baguette en bois clouée au
mur et peinte avec l’inscription d’Eileen Gray « en-
trez lentement », à droite pour les invités (à gauche,
l’entrée de la domestique porte l’inscription « sens
interdit »). Dans les peintures restituées sous les
pilotis, on observe des galets et des personnages
entrelacés. De nombreux dessins représentant deux
ou trois figures entrelacées sont présents parmi les
croquis des archives de la Fondation Le Corbusier.
La peinture du coin salle à manger représente une
femme (danseuse) avec spirale (musicale). Plusieurs
croquis antérieurs avec la même composition ou
des détails de la forme dite danseuse, de la porte et
des instruments de musiques existent et sont éga-
lement conservés à la Fondation Le Corbusier. Il est
d’ailleurs amusant de noter que si Le Corbusier a
peint des portes, Eileen Gray ne voulait pas les voir,
car, pour elle, elles ne font pas partie de l’architec-
ture… Elle les cachait donc derrière des désaxés, des
murs ou des meubles.
Madame Schelbert maintiendra la maison et son mo-
bilier en relativement bon état jusqu’à sa mort au dé-
but des années 80. Son médecin personnel occupera
ensuite les lieux jusqu’en 1996. Mais n’ayant pas les
moyens d’entretenir la maison, il vend aux enchères
l’ensemble du mobilier et laisse la maison se dégra-
der. À l’abandon, squattée, tagguée, la maison a été
classée en urgence aux Monuments historiques en
2000, moment où il a été décidé qu’il était temps de
faire revivre ce site prestigieux.
Association de sauvegarde du site eileen Gray et le corbusier à roquebrune-cap-martin
Cette association loi 1901 a pour but la sauvegarde et la mise en valeur de la villa E 1027 maison en bord de mer (promenade Le Corbusier) et de son environnement direct, le site Le Corbusier qui com-prend le Cabanon, L’Etoile de mer et les unités de camping. Cela passe no-tamment par :◆ la restauration dans son intégrité de la villa et des jardins,◆ l’entretien du patrimoine architectural et paysager qui composent le site,◆ la préservation et la mise en valeur de la flore médi-terranéenne constituante du site,◆ la mise en place d’un centre culturel utilisant les éléments du patrimoine du site,◆ l’ouverture au public du site restauré dans le cadre de visites, expositions et manifestations culturelles qui s’y tiendront.
fS
© Toutes photos H Lagarde
14 E n V i l l E C A G N E S S U R M E R
Des villes construites / déconstruites
LGuy Champailler est un constructeur, un bâtisseur qui voit grand. Depuis plus de vingt ans, il déploie un travail
incessant, multiforme et pratique un art de rue, un art déjà hors des musées, ouvert à un public où chacun peut trouver ses réfé-rences.Ses grandes sculptures planes en acier des années 1990 se sont verticalisées en même temps qu’allégées. l’aluminium a remplacé l’acier. Sa légèreté, sa facilité d’assemblage, la peinture plus facile et un rendu net en font le matériau de base idéal de ses « villes » aux volumes simples issus du carré et du cercle.
Ces structures qu’il présente se différen-cient nettement des installations qui sont plutôt des rencontres d'objets de provenan-ces très diverses et jouent davantage sur les contrastes, sans lien évident des construc-tions entre elles.
Des installations tiennent davantage d’une confrontation d'objets dans la tradition sur-réaliste qui donne un sens à l'installation avec compulsion répétitive et herméneu-tique sans fin. Elles présentent une homo-généité d'ensemble où tous les éléments autonomes s’harmonisent pour parvenir à une lumière égale, comme une vue pano-ramique de ville la nuit. Si chaque quartier est différent, la vision se donne comme une totalité. Des structures destinées à être non finissables, toujours ouvertes, accueillantes pour de nouveaux ajouts.
Créer des formes ne suffit plus, il est néces-saire de créer des liens, des ponts, faire avec la pensée des autres, passer d’une impossi-bilité à l’autre. En mettant en place des nor-mes, des symétries afin de célébrer l’idée du beau, Champailler nous propose une esthétique de la complexité maîtrisée, de la beauté, du calme et de la sagesse.Ses créations suscitent l’intérêt des ingé-nieurs des architectes, des techniciens qui peuvent juger de l’adresse et de la com-plexité de son travail, de sa beauté aussi qui réside dans ce vocabulaire de formes géométriques basiques qu’il utilise à l’in-fini. Un monde clair organisé, aux couleurs agencées, agréables à l’œil : brillance, lumi-nance, rutilance. Champailler développe une œuvre dense, très pensée, technique, peu réductible à un concept.
Son hyperville du futur est pensée comme une cité où chaque chose est réfléchie, vou-lue pour le plaisir des yeux, une ville œu-vre de la raison, masquant sa nature par la culture.
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Château du Haut de Cagnes été 2010
Contribution des artistes : Alberghina, Pharisien.Commissaire d'exposition : Simone Dibo-Cohen
Installation
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Portrait Super Crâneur
installation
numérique 1
numérique 3
AA : Déconstruire, n'est ce pas construire
autrement ?
GC : J'ai l'habitude de dire : je mène une ac-
tion. Une action pour quoi faire ? Pour com-
prendre ce qui arrive et dans ce qui arrive :
ce qui me concerne. Or je suis concerné par
la construction et la déconstruction, mais
aussi par la destruction. nous savons que
la déconstruction peut avoir un sens positif
puisque sa méthode a pour but la consti-
tution d'un savoir. En déconstruisant un
texte ou un objet, nous apprenons autant
qu'en le construisant. la philosophie dé-
constructiviste est passée par là. Toute ma
vie, j'ai cherché à savoir quelque chose sur
les objets et les images.
AA : Ta première exposition s'est faite
dans le cadre des concerts de musique
contemporaine à l’Artistique organisés
par Redolfi. Y vois-tu un signe ? Il semble
que ton travail entretient depuis cette
date des rapports constants et particu-
liers avec la musique.
CG : la musique contemporaine m'inté-
resse parce qu'elle a fait voler en éclats la
tradition dans des directions très diverses
souvent savantes mais pas toujours avec
Fluxus. Ce dernier est d'ailleurs plus un
« inspirateur », il n'a pas laissé beaucoup
d'œuvres sensibles, plutôt des protesta-
tions et pas mal d'humour, les composi-
teurs ont pris là des libertés nouvelles.
Cette musique demande une conceptua-
lisation forte qui ne repose pas toujours
sur une instrumentation préétablie et fait
appel à l'invention des sources sonores
autant qu'à leur composition, la notation
musicale est parfois spectaculaire, les pa-
ges des compositeurs sont des dessins ou
schémas et, chose nouvelle, ils ont su très
tôt intégrer l'informatique. J'avoue que c'est
un monde que j'envie, qui sait intégrer les
mathématiques, l'informatique, pour ar-
river à un objet sensible qui, lorsqu'il est
mené à bien, peut rejoindre les plus beaux
moments de la grandeur classique. il a ce
mélange du savant, du bricoleur, du poète
et de l'aventurier. Très beau programme
où l'art contemporain peine à épouser son
siècle.
AA : Quel rapport entretiens-tu encore
avec la peinture ?
GC : Ce que l'on nommait autrefois la
peinture, ce sont aujourd'hui des images,
il semblerait qu'elles soient maîtresses
du jeu dans les arts par leur prolifération
mais aussi par les qualités d'invention des
techniques qu'elles ne cessent de dévelop-
per. Pour ce qui concerne le conflit qu'il y
aurait d'une supériorité des images parce
qu'elles embrassent plus de sensations sur
la sculpture ou les autres arts, je n'y crois
pas. Pourtant je reconnais qu'un objet seul
ne remplit pas l'attente des sensations que
je peux y espérer.
Guy Champailler en (3) questions
Gu
y
ChampaillerC A G N E S S U R M E R E n V i l l E
installation
15
AA
16 E n V i l l E C O N T E S
L'artiste demeure un casse-tête pour l’étiqueteur, autant qu’un
aliment pour le poète. Si ce champion d’échec est si comple-
xe à enfermer dans une case, c’est que son art combinatoire
se nourrit simultanément de toutes les disciplines (et pas seulement
plastiques), c’est que ses interventions rendent au centuple à l’aléa-
toire ce qu’il y puise. Car pour l’artiste l’enjeu n’est pas la cible mais
le geste de l’archer, l’intention. Son chantier c’est l’univers où il défri-
che des pistes nouvelles, qui s’ouvrent elles-même sur d’autres, le té-
léportant là où on ne l’attend pas, là où il ne s’attend pas ! Mendonça
derrière son apparence effacée est-il doué d’ubiquité créative ?
Premières performances« Je suis né à Saint Omer. Ma mère est niçoise je suis arrivé à nice
à 7 ans. 7 ans plus tard en mai 68 j’assistais aux manifs à la fac de
lettres. À 15 ans je faisais du théâtre en irlande, dévorais Jung et
Freud. J’ai appris à doubler mon potentiel très tôt ! ». la première
pierre de cet édifice qui donne le vertige après 37 ans d’activités il
avoue l’avoir posée à Menton : « Je jouais de la basse et écrivais des
textes dans un groupe de rock » « nuthach system » (casse noisette).
Après un accident à moto, j’ai vendu tout mon matériel pour acheter
de la peinture. Un an après je faisais ma première expo ». Et la perfor-
mance, celui qui en a réalisé 40 sur la Côte - « À égalité avec Ben » -
il s’y initiera dès 1974 en immergeant des toiles au fond du lac de
Saint Auban. Des toiles exposées ensuite à l’Art marginal. En 1977
encore à Saint-Jeannet Bruno travaille en aveugle pendant 76 heures
au fond d’une grotte où il produira 15 toiles et 12 dessins. En Chine
il sautera de plaques en plaques tectoniques avec dix mètres de vide
en dessous : « Pas pour le danger, mais toujours pour pousser l’art
contemporain dans des espaces vierges ! ».
À livres ouvert !Car l’artiste est avide de nouveaux territoires et ne tient pas en place
« Voyager me permet de confronter les différentes pratiques. C’est
aussi lié à ma formation à Science po. J’ai eu envie de faire de l’art
comme Claude levi Strauss fit de l’ethnologie ». En travaillant en ter-
rains inconnus l’imprévu dévoile les limites mais ouvre aussi des pers-
pectives dont se nourrit ce bâtisseur d’aléatoire. « En fait j’ai voyagé
dès l’âge de 1 an en avion puis en Enfant non accompagné pour les
compétitions de judo et d’échec. Je draguais les hôtesses qui me don-
naient des jouets et livres ». Est-ce cet émois ou celui qu’il éprouve
en découvrant la bibliothèque de son grand-père riche d’ouvrages
étrangers qui le poussera adulte à créer sa maison d’édition en 1981
puis des bibliothèques éphémères dont certaines présentées au CiAC
de Carros en 2002 virent le jour tel l’igloo de Dictionnaires : « 5000
dictionnaires récupérés pour monter une coupole qui symbolise ces
parties du monde que l’on méconnaît parce que nous n’avons pas
accès à leurs cultures ». l’artiste amoureux des livres réalisera par
ailleurs des livres avec des objets du quotidien. Un ready made cé-
lébrant par la métamorphose, le livre, une matière, sensible, vivante
qu’il traite comme un élément organique. il explorera également lan-
gages et signes inventant 60 alphabets, usant des palindromes et
autres jeux de mots à toutes fins utiles : « Je me sens très proche de
l’Oulipo et du travail de George Perec. Je me défini comme écriteur,
un fabricant de textes, de mots ». l’exposition « les métamorphoses
de l’écriture » jusqu’au 24 juillet à Contes présente sur ce thème
d’étonnants livres d’artistes réalisés de 1984 à 1987, un jeu de tarot
sur la mémoire de Spada, un « Cortext » avec Yves Hayat etc. Elle
donnera lieu aussi à une performance musicale car Bruno travailla
aussi comme luthier à la fabrication d’instruments. Un outil pour un
autre langage universel.
Bruno Mendonça : L’infini commence ici !
BM
Bruno Mendonça, est multirécidiviste et pluridisciplinaire, pointilleux et global, analyste et artisan, performeur et observateur… bref une porte ouverte sur toutes les fenêtres ou plutôt sur toutes les bibliothèques imaginaires.
© H. lagarde
C O N T E S E n V i l l E 17
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De gauche à droite et haut en bas :
Bruno Mendonça joueur d'échec igloo de dictionnaires - 4 x 2 m - 2004 Floraison de livres - 37 x 55 cm - 2007 Bruno Mendonça peintre Bruno Mendonça Quatre boomerangs - diamètre : 105 cm - 1997 Transe control - 12 x 12 cm - 1993
Je suis toujours en train d’entrouvrir de nouvelles pistes
en veillant à tenir à distance la technologie qui est train
de supplanter le sacré
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© H. lagarde
© H. lagarde
Mendonça : « La colle de Nice ? »Mendonça créa aussi un alphabet sur des yourtes car le nomadisme
pour cet intégriste de Bachelard fut un acte fondateur : « J’ai vécu
dans des conditions extrêmes, sous la neige, à l’état sauvage dans
mon atelier à lucéram. J’aurais pu me payer l’hôtel mais je voulais
vivre le collectif. l’artiste qui ne fait pas ça, ne partage que son
ego, un fruit vert ». À l’époque si Bruno soulève des pierres c’est
pour voir s’il y a un lièvre dessous. Quant aux échecs c’est autre
histoire, aussi cruciale : « Je fais de la compétition depuis l’âge de
8 ans. les échecs m’ont appris à construire rapidement, à globali-
ser, à aborder de front plusieurs activités ». Un jeu qu’il intégra à
ses performances. Ainsi en 2000 en Pologne il affronte 40 joueurs
simultanément - après être arrivé sur les lieux enfouis dans le sa-
ble d’une pelleteuse. Son propre déplacement sur l’échiquier créatif
comme sur celui universel ne procède t-il pas de la diagonale du fou ?
Mais que veut mettre échec et mat ce champion de la performance
qui a battu le lettriste isidore isou, à son propre jeu « l’hyper échec
avec deux pièces supplémentaires ». De quelle tribu fait donc parti
Bruno Mendonça ? « Je pourrais être relié à plusieurs mouvements
mais n’appartient à aucun, même si Alexandre de la Salle m’intégra
à l’école de nice, des artistes que je pratique depuis 30 ans. Mais
le label s’use, il faut aller puiser l’énergie ailleurs. C’est aussi pour
cela que je me déplace et pratique autant de disciplines de front ».
Car des projets, Bruno en a toujours plusieurs sur le feu : un squash
bibliothèque pour laquelle il doit trouver des financements. Un projet
de synthèse des arts autour du jeu d’échec pour un Musée suisse.
À Tanger, une bibliothèque observatoire pour le biotope au cœur
d’un ancien volcan etc.
explique celui dont la seule religion semble être celle de l’énergie
vitale !
18 E n V i l l E c a n n e s
Danseuse étoile des Ballets de Monte-Carlo, médaillée d’or du Prix de lausanne, Paola Cantalupo partage aujourd’hui sa passion avec les danseurs de la fameuse École Rosella Hightower qu’elle dirige à Cannes. Un parcours sans faute pour cette figure re-marquable de la danse à travers le monde. La danse. Un mode de vie, une philosophie, une passion ?
C’est tout d’abord une passion bien sûr.
Puis l’on se rend compte au fil des années
que c’est aussi un besoin. Besoin de s’expri-
mer différemment car l’artiste est quelqu’un
d’un peu différent. le danseur s’exprime à
travers un mouvement. Ce besoin que l’on
ressent de bouger est devenu pour moi un
langage à part entière, une autre expres-
sion.
À quand remonte cette passion
pour la danse ?
Très tôt, à vrai dire. il paraît que je dansais
devant le miroir et je me rappelle vague-
ment ce que l’on pourrait qualifier de pre-
mier spectacle. il s’était déroulé devant
la mer, toute seule. C’était une sensation
très belle. J’habitais à Gênes puis ma fa-
mille a déménagé à Milan. J’ai commencé
vers huit/neuf ans dans une école privée
et j’ai eu la chance d’intégrer l’école de
danse de la Scala de Milan où j’ai débuté
dans le corps de ballet.
comment s’est déroulé votre parcours
depuis cette prestigieuse «grande mai-
son» de la danse qu’est la scala ?
J’ai passé du temps à la Scala. En paral-
lèle, j’allais au lycée et c’était un emploi
du temps assez lourd à l’époque, assez…
intense (rires). J’ai terminé cette première
formation et je me suis présentée au Prix
de lausanne en 1977, grande compéti-
tion internationale où j’ai gagné la Mé-
daille d’or. J’avais été vraiment surprise
car je ne m’attendais absolument pas
à remporter ce prix. J’y étais allée avec
mon père pour voir ce qu’il se passait
en-dehors de ce château doré qu’était la
Scala. Cette médaille a été une ouverture
vers l’extérieur et m’a permis de pren-
dre conscience de ma valeur, de m’ouvrir
au monde. Cela a été rassurant pour le
début de ma carrière. la Scala était très
hiérarchisée et je désirais faire d’autres
expériences comme celles que j’ai pu vi-
vre ensuite auprès de Maurice Béjart ou
John neumeier. À ce prix de lausanne,
j’ai aussi rejoint une grande famille dans
laquelle je côtoyais déjà Jean-Christophe
Maillot et Rosella Hightower.
Le parcours d’un danseur est souvent
considéré comme celui du combattant.
cela a-t-il été votre cas ?
Je ne crois pas que ce soit une question
de combat, dans le sens ou il faut être
fort, quoi qu’il arrive. On ne peut qu’être
exigeant avec soi-même lorsque c’est son
chemin que l’on suit, sa passion que l’on
assouvit. Je suis contre cette idée que les
danseurs souffrent, que c’est extrême-
ment dur. Je crois que celui qui veut arriver
à quelque chose doit vivre des moments
difficiles. Que l’on se fatigue ou que l’on
transpire un peu plus peu importe, il ne
faut pas oublier que c’est un besoin. les
sacrifices, les pieds qui souffrent, ça fait
partie de la danse. On fait ce que l’on a
rêvé de faire tout jeune et on accomplit le
travail qu’il faut pour réaliser son rêve, et
cela même si la danse est plus fatigante
que d’autres activités dans d’autres do-
maines. On sait que ça va être difficile.
Quelles expériences, quelles rencontres
ont été les plus marquantes ?
En ce qui concerne les expériences, il y en
a tellement, toutes forgent le caractère....
Par contre, il y a eu de belles rencontres.
C’est vrai que celle avec Béjart au Ballet
du XXème siècle, même si j’étais encore
jeune fille, a été une rencontre impres-
sionnante. Celle qui m’a énormément
marquée a été la rencontre avec noureïev.
C’était quelqu’un de direct, un homme gé-
néreux, qui aimait entrer en contact avec
les jeunes danseurs. il avait cette démar-
che d'essayer de comprendre les autres.
John neumeier, au Ballet de Hambourg en
1980, m’a donné également une ouver-
ture. la Princesse Caroline a été une ren-
contre privilégiée car elle était brillante.
Bien que cachée derrière une certaine ti-
midité, elle a eu le courage de commencer
les Ballets de Monte-Carlo. les personnes
que j’ai rencontrées ont toujours été dé-
terminantes pour moi, comme pour l’art
de la danse. Je connais bien Jean-Chris-
tophe Maillot depuis plus de trente ans.
Après avoir dansé ensemble, nous avons
aujourd’hui développé une autre relation,
au-delà de l’amitié, notamment pour le
Printemps des Arts.
Paola CantalupoSur les traces d’une étoile
Interview réalisée par Rodolphe Cosimi
le 26 avril 2010 - Mougins
19
À travers un répertoire éclectique, vous
avez dansé des rôles majeurs dans les
Ballets russes, les œuvres de Balanchine,
Forsythe, Kylian, Petit... Quels sont vos
souvenirs les plus forts ?
J’ai toujours été polyvalente. J’aime autant
la tradition classique que le contempo-
rain. C’est pour cette raison que je suis
allée chez Béjart. Parmi mes rôles, ceux
qui m’ont vraiment touchée ont été ceux
du ballet de Kilian, et la nuit transfigurée.
Un dernier rôle que j’ai adoré a été celui
de Cendrillon, par Jean-Christophe Maillot.
J’apprécie beaucoup les ballets «abstraits»
mais là, il y avait une histoire et c’est ce
que j’aime surtout : entrer dans une his-
toire, une recherche chorégraphique. J’ai
eu la chance d’être avec Béjart et de béné-
ficier de la stimulation d’un créateur. C’est
un échange véritable qui nous enrichit.
J’aurais pu rester dans la compagnie de la
Scala, danser le "lac des cygnes" – ce que
j’ai fait et que j’ai adoré – mais j’avais en-
vie d’évoluer vers des choses différentes.
J’ai pu comme cela me remettre en ques-
tion. Pour savoir si je pouvais aller plus
loin, il me fallait juste essayer.
comment trouvez-vous la nouvelle
génération de danseurs ? de chorégraphes
aussi ?
Je comprends qu’on ait pu rejeter le classi-
que pendant longtemps. En même temps,
ce serait absurde de vouloir oublier deux
cents ans d’expérience, de travaux et de tra-
dition. Ce sont nos fondations. Que les jeu-
nes veuillent expérimenter, c’est tout à fait
normal, mais il ne faut pas oublier ce que
les maîtres nous ont apporté. la danse clas-
sique est très exigeante. le contemporain
peut être plus souple mais là encore, il faut
savoir à quel niveau on fait de la danse. Pour
être sur scène, il faut un niveau excellent,
c'est ce qui fait la différence. C’est ce que
doivent se rappeler les générations à venir.
Vous avez pris les rênes de l’École
Rosella Hightower, comment avez-vous
vécu cette prise de fonction au début
2009 ?
J’ai toujours eu un lien privilégié avec cette
école ; j’y étais souvent invitée et je connais-
sais très bien Monique loudières. Cette pro-
position s’est présentée et je voulais voir ce
que je pouvais offrir à cette école réputée.
Pour l’anecdote, j’étais, à ce moment-là,
toujours avec les Ballets de Monte-Carlo,
billet pour le Japon en mains (rires) ; il m’a
fallu décommander pour démarrer ce nou-
veau défi. Défi pour lequel j’ai été vraiment
soutenue, bien heureusement. Cela a été un
travail d’équipe et c’est ce à quoi je crois.
l’école a toujours été une référence inter-
nationale. En italie par exemple, les deux
seules écoles dont on parlait dans le milieu
artistique, étaient celle de l’Opéra de Paris
et celle de Rosella à Cannes. Déjà dans les
années 80, Rosella Hightower avait cette
générosité, cet esprit d’ouverture, d’intelli-
gence du travail, et je veux faire perdurer
cette vision universelle de la danse.
après une carrière artistique telle que la
vôtre, quelle approche avez-vous de la
pédagogie ?
Finir une carrière est toujours difficile mais
j’ai eu la chance que, dans mon cas, tout
s’est fait très naturellement. Depuis dix
ans, je suis dans la voie pédagogique et je
vis cela dans la sérénité. Je dois dire que je
trouve la même satisfaction à travailler dans
le studio avec mes filles que celle que j’ai
pu ressentir en étant sur scène. la scène va
me manquer, c’est sûr, mais c’est une conti-
nuité, tout simplement.
Vous avez noué des liens forts avec les
élèves de l’école. Qu’est-ce que vous sou-
haitez leur apporter ? Qu’espérez-vous
qu’ils deviennent ?
J’ai basé mon dernier spectacle sur cela
justement. Je veux qu’ils deviennent des ar-
tistes. ils ont tous ça en eux et je ne veux
pas qu’ils se trompent. Un danseur est un
peu égocentrique, au bon sens du terme, et
cela est presque normal quand on doit se
montrer devant un millier de personnes. S'il
ne l’était pas, le danseur ne pourrait accom-
plir sa vocation. Je veux aider mes élèves
à trouver la lumière qu’ils ont en eux. le
studio, ce n’est pas de la gymnastique en
musique (rires). le message que j’essaie de
faire passer, autant auprès des élèves que
des professeurs, c’est que chacun dégage
quelque chose de lui-même et que chacun
peut se dire : «Ce pas là, je le fais artisti-
quement bien».
Reconnaître un danseur prometteur, un
grand danseur est-ce une chose diffi-
cile ?
J’ai reçu dernièrement la vidéo d’une dan-
seuse. J'ai visionné des petits pas à la bar-
re d’abord, puis une petite variation à la fin.
Je ne l’ai pas reconnue tout de suite dans
cette variation. il y avait comme une lumière
sur scène. À cet instant, je me suis dit que
ce n’était plus la même personne. la techni-
que, c’est une chose, la lumière en est une
autre et ça ne s’explique pas. Je cherche à
faire sortir cela de mes danseurs, sachant
que certains n’y arriveront pas forcément…
Même un physique qui n’est pas «parfait»
mais qui a une tête «claire» peut arriver à de
grandes choses.
et le projet qui vous tient le plus à
cœur ?
Mon projet premier, c’est de permettre à
mes danseurs de s’épanouir sur scène. Der-
nièrement, le Printemps des Arts les a beau-
coup aidés dans cette voie. Ce fut magnifi-
que de pouvoir intégrer un spectacle et de
toucher du doigt la relation avec un public
de cette importance. la danse est, véritable-
ment et avant tout, ce partage généreux.
© Toutes photos Courtesy P. Cantalupo
Rc
E n V i l l E n i c e20
Critique vif, iconoclaste et solitaire, Henri Maccheroni
est un virtuose de techniques plastiques aussi variées
que la peinture à l’huile, la photographie noir / blanc
et couleurs, le photomontage, le collage ou la gravure (eau-
forte, pointe sèche, manière-noire). il les déploie en séries
pour penser des sujets aussi divers que les mythes de la pein-
ture occidentale, la dévastation des œuvres architecturales par
le temps, la ville ou la condition humaine (la peine de mort,
la torture, l’exploitation des femmes, etc.). Toutefois, il n’y a
pas de hiérarchies spatio-temporelles, de périodes strictement
délimitées : la série reste ouverte et l’artiste peut librement
l’interrompre pour y revenir dès qu’il le souhaite. la datation
des œuvres n’est donc pas déterminante. Seule compte leur ré-
sonance avec ce qu’il souhaite exprimer : « la vocation d’une
œuvre d’art n’est pas de produire du sens, mais de faire sens,
car il s’agit de transformer la sensibilité d’une époque, c’est-
à-dire notre rapport au réel. C’est le fond de l’œuvre d’art, qui
est, par essence même, révolutionnaire *». les changements
de techniques déconcertants vont de pair avec l’absence de ré-
pétition d’un style formel clairement identifiable, adaptés à la
prolifération des thèmes abordés. Entre photographie, collage
et peinture, la représentation se fait reconstruction, le signe
peut revenir pour justifier l’image, lui donner à nouveau sens
en même temps que sens nouveau. « Je ne suis pas un peintre
abstrait, pas plus que figuratif ou conceptuel. Je suis tout cela
à la fois – absolument. Ces notions s’abolissent dans un « trai-
tement » - dans le sens de retraitement – pensé du réel (ou de
ce que nous croyons en percevoir* ». la seule série close dans
l’œuvre de Maccheroni est son Archéologie du signe, réalisée
en 1976 : 21 toiles découpées, cousues, oeilletées, lacées, com-
portant trois signes (x, +, o) et sept couleurs symboliques (écru,
jean, rouge, noir, métallisé, blanc, tenue léopard). Cette œuvre
va constituer la genèse et la base essentielle de son travail
pictural. Entre 1972 et 1974, il réalise des œuvres conceptuel-
les et dénonciatrices, ses « Attitudes socio-critiques », comme
l’Armoire aux bocaux et le Cadeau pour les partisans de la pei-
ne de mort, qui relèvent d’un engagement politique et social.
expérimentation
Admirateur du mouvement surréaliste, Michel Butor fait la ren-
contre d’André Breton à la fin des années 40. il commence
son métier de professeur qui l’emmène, en 1950, en Egypte,
séjour qui aura pour lui une influence majeure. En 1957, il
obtient le Prix Renaudot avec la Modification qui attire l’at-
tention du grand public sur son œuvre. il est alors l’écrivain
du nouveau Roman qui a la plus large audience. Son roman
Henri Maccheroni / Michel ButorArt et écriture : plus de 30 ans de création
Depuis le 21 mai, et jusqu’au 28 novembre, le Musée de Paléontologie humaine de Terra Amata, à nice, accueille l’exposition « En continuité, Henri Maccheroni à Terra Amata », en collaboration avec Michel Butor. les deux artistes, l’un plasticien, l’autre écrivain, travaillent ensemble depuis près de 35 ans. Portraits croisés.
Henri Maccheroni © H lagarde
21n i c e E n V i l l E
Degrés est publié en 1960, ainsi que son premier recueil d’articles
critiques, Répertoire. il part une première fois aux États-Unis et, à
son retour, inaugure une nouvelle période de son activité littéraire,
marquée par des ouvrages d’une grande originalité formelle. Mo-
bile, notamment, grand ouvrage fait de collages divers (encyclo-
pédies américaines, descriptions d’automobiles, articles de jour-
naux, etc.) essaie de rendre compte de la réalité étonnante des
États-Unis contemporains. Réseau aérien, puis Description de San
Marco et illustrations. Cette volonté d’expérimentation pour repré-
senter le monde se retrouve dans toute son œuvre, qu’il s’agisse
de récits de voyages (série Génie du lieu), de récits de rêves (Ma-
tière de rêves) ou de ses très nombreuses collaborations avec des
peintres et artistes contemporains, pour réaliser des livres-objets.
le voyage joue un rôle essentiel dans la vie et les livres de Michel
Butor. le livre lui-même devient un espace d’invention et d’aven-
ture, où l’écriture se fait « nomade »... « Souvent, à propos de
l’œuvre de Michel Butor, on parle d’une sorte de galaxie, indique
Henri Maccheroni**. l’image est assez juste si elle se réfère entre
autres aux voyages et rencontres de cet insatiable « fouisseur »
d’horizons et, de cette galaxie, nous ne sommes pas prêts d’en
explorer toutes les étendues et le voyage sera sans doute infini ».
La rencontre
« D’une rencontre, Michel Butor fait un voyage. il ne peut se pas-
ser du voyage comme il ne peut se passer de voyager avec l’autre
et de le faire voyager », selon Henri Maccheroni. En 1972, cela
faisait quelques mois déjà que Jean Petithory, qui exposait le tra-
vail d’Henri Maccheroni dans sa librairie-galerie les Mains libres à
Paris, incitait ce dernier à prendre contact avec Michel Butor, ayant
appris de Pierre Bourgeade que l’auteur de la Modification s’était
installé à nice. Une lettre plus tard, Michel Butor rendait visite au
plasticien, qui lui présenta ses séries post-surréalistes, Mondes
inachevés et nocturnes, quelques Bleus et Rouges de 1968, des
peintures sur papier et des dessins et lavis abstraits de périodes
antérieures. Tandis que l’écrivain marchait entre toiles et cartons,
l’inquiétude de Maccheroni grandissait. Puis Michel Butor s’arrêta
et parla : « Ah ! C’est égal, c’est égal, les choses n’en resteront pas
là… Je vois arriver une grande explosion, de grandes transforma-
tions… ». Puis ce fut le silence. Michel Butor partit enseigner aux
États-Unis et ne revint qu’en 1975. Maccheroni lui écrit à nouveau,
Butor retourne le voir. le plasticien lui demande de préfacer le ca-
talogue de son exposition des Archéologies et Archéologies blan-
ches prévue pour l’été suivant au Musée d’art moderne de Céret.
Quelques jours après, il reçoit de Michel Butor la première version
du Rêve des Archéologies blanches pour Henri Maccheroni. leur
rencontre venait de prendre corps. « Depuis 1975, que de voyages
n’avons-nous pas
entrepris ensemble !
Je les commence, il
les poursuit, parfois
nous allons dans
la direction que
j’indique, d’autres
fois, tout à fait
ailleurs**». Car Mi-
chel Butor et Henri
Maccheroni ont peu
à peu mis en place
un processus de tra-
vail. Ce dernier commence le livre, le prépare, avec ses aquarelles
ou ses gravures originales, et l’écrivain les poursuit, en apposant
ses poèmes ou ses textes en écriture manuscrite. « J’ai parfois
essayé de le piéger, en lui laissant moins de place pour écrire,
s’amuse Henri Maccheroni. Mais il ne s’est jamais laissé faire ! ».
« Henri Maccheroni est malin, ajoute Michel Butor. il me connaît
bien, il me propose toujours des choses dont il sait qu’elles m’ins-
pireront ». la confiance a tout de suite été réciproque. « Je tiens
de Roger Borderie, de la revue Obliques, qu’une rencontre sans
amitié est un voyage sans souvenir, commente le plasticien. Avec
Butor, l’amitié s’est établie au fur et à mesure du travail, pour en
devenir indissociable, jusqu’au point de dire : « demande-moi tout
ce que tu veux, je le ferai ». « Cela n’est jamais arrivé qu’il fasse
quelque chose que je n’aime pas ». « C’est à cause du travail qu’il
y a l’amitié, puis parce qu’il y a l’amitié que le travail est possible,
renchérit Michel Butor. À chaque nouvelle œuvre, c’est un aspect
nouveau de l’artiste et de l’écrivain qui se dévoile. Je n’aime pas
travailler avec des gens qui font toujours la même chose. Henri
Maccheroni, lui, invente ».
archéologues du temps présent
Un processus de création différent des autres collaborations
d’Henri Maccheroni avec des écrivains. « Jean-Claude Renard me
passait les textes, alors que Pierre Bourgeade me demandait plutôt
des illustrations. Mais je suis davantage pour tenter de trouver des
équivalences aux textes qui me sont donnés ». Une œuvre croisée,
terme inventé par Henri Maccheroni et que Butor a tout de suite
adopté, ce n’est ni un livre illustré, ni un moment où l’artiste vient
se soumettre à l’écrivain. Peut-être quand l’œuvre d’art devient la
pré-histoire du texte… « Une œuvre croisée, c’est quand il y a mou-
vement, précise ce dernier. Quand l’un commence, puis l’autre.
C’est un lent dialogue qui s’instaure entre les deux auteurs ».
En 1976, la première pièce réalisée en commun, Provision, est pro-
Vue de l'exposition à Terra Amata © H lagarde
Henri Maccheroni et Michel Butor © Terra Amata
E n V i l l E n i c e22
duite en 15 exemplaires. il s’agit d’un peu de sable
et d’un poème de Michel Butor sur une aquarelle
pliée d'Henri Maccheroni, enfermés dans un bocal
à conserve. « Je voulais lier le sable archéologique
avec mes signes dits archéologiques, explique Henri
Maccheroni. Butor parle de moi en disant l’« ar-
chéologue du temps présent ». Je crois d’ailleurs
que je l’ai amené sur la voie archéologique. le bo-
cal a une histoire : quand j’étais petit, nous n’avi-
ons plus de nouvelles de mon père, qui avait été
fait prisonnier à Dunkerque. Ma mère faisait alors
une neuvaine. J’ai rêvé d’un mur de clinique avec
une étagère comportant un bocal plein du sang de
mon père. Au réveil, ma mère m’a dit : « ton père
est vivant ». Vinrent ensuite les Archéologies blan-
ches ii, en 1978, où l’idée prédominait que ce qu’il
resterait de nos villes serait de vastes cimetières, à
une époque où la peur d’une guerre atomique pla-
nait. la même année, Michel Butor appose un texte
sur une série de cinq aquarelles de Maccheroni, les
seules bleues, les autres étant rouge pompéien, en
hommage à son ami Georges Perros, à qui l’écrivain
envoyait tous ses manuscrits à relire avant de les faire publier :
c’est in memoriam Georges Perros. les termes « figure » et « dan-
ger » sont inscrits au pochoir, termes que l’on retrouve dans toute
la série. « Maccheroni a le sens des titres », estime Michel Butor.
Un compliment que le plasticien lui renvoie volontiers. En 1979,
un site comportant une dépression géologique, à Saint-Barnabé,
inspire à Michel Butor le titre le parlement des idoles, « un mini-
canyon du Colorado, gris au lieu d’être rouge ». Avec des photos
de Robert Geslin et une aquarelle de tête d’Henri Maccheroni naî-
tra un livre manuscrit édité en onze exemplaires. Avec Tarot, en
1980, Michel Butor travaille sur les 21 sérigraphies de l’Archéo-
logie du signe de Maccheroni, comme Jean-François lyotard le
fait avec la partie de peinture. Pour la vallée des dépossédés, en
1979, et Métro, en 1981, où des textes de Butor entrent en réso-
nance avec des photos et des collages de Maccheroni, c’est new
York et Manhattan qui fascinent les deux artistes. Dans Trêves
et rêves-Jérusalem (1996), préfacé par Shimon Peres, c’est la ville
sainte qui les inspire.
Fascination réciproque
invités par l’ambassadeur d’israël en France, Yehuda lancry, c’est
de leurs contacts avec la partie juive francophone que naît l’idée
d’un livre conçu en trois parties, avec trois couleurs : juive (sa-
ble archéologique), chrétienne (rouge pompéien) et musulmane
(vert). Mais dans son texte, Butor ajoute une huitième porte à la
ville qui en compte sept. Heureux hasard, on découvre peu de
temps après une huitième porte, qui deviendra, dans le livre, la
porte de l’espoir. « les poètes ont toujours un temps d’avance »,
dira Henri Maccheroni. En 2000, Michel Butor estime qu’il faut
tourner la page sur un siècle qu’il juge épouvantable. Exception
à la règle, Récapitulation 2000 est conçu à partir des textes de
l’écrivain, 20 poèmes au découpage syllabique subtil, pour en
compter 2 000 au total. Très marqués par les événements du 11
septembre 2001, les deux artistes poursuivent leur travail sur
new York et sur un de leurs thèmes de prédilection communs,
Thanatos, avec Tocsin, en 2002.
Michel Butor et Henri Maccheroni ont aussi œuvré pour les autres
et pour le rayonnement de la ville de nice. En 1982, leur engage-
ment les amène à fonder le Centre national d’Art Contemporain
de la Villa Arson. Maccheroni le dirige tandis que Butor est le Pré-
sident du conseil d’orientation. leur première exposition, Écritu-
res dans la peinture, rassemble pas moins de 5 000 personnes
lors du vernissage. Suivront italia Oggi ou encore Georges Ribe-
mont-Dessaigne. Mais trois ans plus tard, les deux amis quittent
ensemble l’institution…
Outre l’amitié, c’est une fascination réciproque qui lie les deux
hommes. « Ce qui m’a tout de suite plu chez Maccheroni, c’est
cette sorte d’acharnement qu’il a à faire les choses, indique Mi-
chel Butor. J’ai trouvé l’homme intéressant, tout comme son
œuvre, pleine d’audace et d’une grande variété, tout en sachant
rester cohérente ». Maccheroni, lui, a toujours été fasciné par la
culture et la mémoire phénoménales du poète. « Ce qui me trou-
ble également, c’est son immense possibilité d’écriture dans tous
les domaines et sa capacité à ramener la substance des choses.
C’est un écrivain qui aura marqué le XXème siècle, un génie ! Ma
fréquentation de cet homme m’a ouvert un horizon de mobilité
dans mon œuvre. Si je ne l’avais pas rencontré, je ne serais pas
ce que je suis ».
Après l’exposition au Musée de Terra Amata, leur prochain travail
commun sera un ouvrage à paraître en novembre aux Éditions
Mémoires Millénaires, regroupant les textes de Butor et les œu-
vres de Maccheroni sur les sites de Saint-Barnabé (le parlement
des idoles), Terra Amata (Jusqu’au site) et la Vallée des Merveilles
(le val des merveilles).
*Cité dans Tessa Tristan, Proximités Saint-John Perse, 2003. **Dans Rémanences n° 6, avril 1996.
Fs
© H
lag
arde
Henri Maccheroni : Plusieurs œuvres Raku créées spécialement pour l'exposition au Musée Terra Amata
n i c e E n V i l l E 23
Jusqu’à Terra amata
Dans l’exposition « En continuité, Henri Maccheroni à Terra Amata », en collaboration avec Michel Butor, l’artiste se propose de présenter son regard sur la Préhistoire, sur le temps, la mort et la trace au travers d’œuvres préexistantes (photogra-phies) ou créées spécialement pour l’occasion (photographies, collages, lavis et rakus) et accompagnées de textes de son complice et ami, Michel Butor. « Toute mon œuvre indique combien je me suis attaché au « temps », inséparable de toute manifestation humaine, précise-t-il. Or le temps, dans son lent écoulement – lent mais irrémédia-ble – a maintenu une continuité d’évolution dont il nous faut peu à peu retrouver, aligner, classer les divers fragments épars. M’attacher, m’investir dans la Préhistoire, inter-venir de manière contemporaine sur des éléments mis au jour de ce qui a pu se passer 400 000 ans avant notre propre espace-temps est un acte « poétique » sans visée scien-tifique ». Pour Michel Butor, cette exposition représente beaucoup : il s’intéresse depuis longtemps à la Préhistoire et, surtout, il a vécu près de 15 ans dans la Villa Mira Monti, surnommée « Aux antipodes », qui jouxte le musée. D’où un fort atta-chement pour cet établissement… À visiter au Musée de Paléontologie humaine de Terra Amata jusqu’au 28 novembre25 boulevard Carnot – Nice. Tél. : 04 93 55 59 93.
Ballade du pugiliste niçois de Michel Butorpour Henri Maccheroni
Je t’ai rencontré pour la première fois lors d’une exposition du groupe Phases À ma rentrée en France après avoir failli me fixer au nouveau-Mexique nous avons jeté notre ancre d’abord sur la Corniche fleurie puis à Saint-laurent-du-Var Avant de découvrir cette maison que nous espérions celle de toujours chemin de Terra Amata Vendeur d’automobiles chez Peugeot tu te battais depuis des années comme un forcené avec la peinture T’efforçant de regarder le sexe en face mais inguérissablement éberlué devant l’amour Cherchant toujours le point sensible pour frayer un peu ton chemin de traverse parmi les coups Tu m’as fait pénétrer dans ton repaire pour me promener depuis tes mondes inachevés jusqu’à tes archéologies C’est alors que nous avons commencé un chant à deux voix en perpétuelle modulation Que nous avons réussi à poursuivre depuis plus de vingt ans en dépit de tous et de tout
Principaux ouvrages réalisés en commun :
Michel Butor et Henri Maccheroni (1980) Tarot, éd. Maryse Candela, Cannes (livre d’artiste).
Michel Butor et Henri Maccheroni (1981) Métro (livre d’artiste).
Michel Butor et Henri Maccheroni (1981) la vallée des dépossédés (livre d’artiste).
Michel Butor et Henri Maccheroni (1986)Œuvres croisées, 1975-1985 / Michel Butor,
Henri Maccheroni, la Casa Usher, Florence.
Michel Butor et Henri Maccheroni (1995)in ictu oculi : in memoriam Gustave Flaubert et Juan Valdes leal, liliane Mantoux-Gignac, Paris.
Michel Butor, Yehuda Lancry [poèmes],Henri Maccheroni [eaux-fortes] et shimon Peres [préface] (1996) Trêves et rêves : Jérusalem, liliane Mantoux-Gignac, Paris (livre d’artiste).
Michel Butor et Henri Maccheroni (2000) Tombes titubantes, Editions ides et calendes, collection Photogalerie 7, neuchâtel.
Michel Butor et Henri Maccheroni (2000)Récapitulation 2000, éditions la Sétérée, Crest (livre d’artiste).
Michel Butor et Henri Maccheroni (2001)Paris ville-ténèbres, l. Scheer / Maison euro-péenne de la photographie, Paris.
Michel Butor et Henri Maccheroni (2002)Tocsin, livre manuscrit sur le thème de l'Apo-calypse, réalisé à partir de 7 collages originaux de la série des Crânes-vanitésd'Henri Macche-
roni sur les attentats du 11 septembre 2001 (CBn). Tiré à 6 exemplaires (livre d’artiste).
Michel Butor et Henri Maccheroni (2002)nymphéas, Hendaye, Paris (livre d’artiste).
Principaux textes de Michel Butor sur l’œu-
vre d’Henri Maccheroni :
Michel Butor et Michel sicard (1983) Problèmes de l'art contemporain à partir des travaux d'Henri Maccheroni, Christian Bour-gois, Paris.
Michel Butor (1991) le génie du lieu. 6, Henri Maccheroni, A. Vivas, Paris.
Michel Butor (1991) "Avant le dialogue des vifs", pour Henri Mac-cheroni, in : À la frontière : poèmes, Éd. de la Différence, Paris.
Michel Butor, Jean-François Lyotard, Raphaël Monticelli et al. (2008)Essais sur "l'archéologie du signe" d'Henri Maccheroni, éditions de l’Harmattan, Paris.
Œuvres croisées
Le fonds Butor à nice
le 11 mars 2004 a eu lieu la signature de l’acte de dona-tion Butor à la Bibliothèque louis nucéra. Cette généreuse donation est composée de 91 ouvrages de bibliophilie, ouvrages précieux réalisés en collaboration avec des artistes ; 82 volumes manuscrits qui témoignent du processus créatif de l’écrivain romancier ; 292 éditions courantes et traduc-tions ; 92 ouvrages critiques, thèses, correspondances ; 336 brochures, tirés-à-part, préfaces et 5 545 ouvrages d’auteurs contemporains reçus en hom-mage. Ces dons, complétés par des acquisitions réalisées par la Ville de nice, permettent à la Bibliothèque de nice d’abriter aujourd’hui le fonds Butor le plus important du monde.
© H
lag
arde
Tocsin (2002), texte de Michel Butor et collages d'Henri Maccheroni, 6 exemplaires. photo : Henri Maccheroni.
© H. lagarde
l a v i e d e s a r t s é v é n e m e n t24
« si le terme technique pour désigner ce rattachement est « annexion », je lui préfère le terme d’union, moins péjora-tif, explique Jean-Marc Giau-me, historien et conseiller mu-nicipal délégué au Patrimoine historique, langue et Culture
niçoises. il s’agit en effet de l’union de deux parties et, pour la ville, c’est important de profiter de l’anniversaire de cet événement pour faire connaître et transmettre la culture du Comté de Nice ». Un territoire, très original, au développement particulier. « il s’agit avant tout d’une opportunité culturelle pour découvrir ou redécou-vrir une identité forte et dynamique, avec la langue comme pivot de cette culture régionale ». et pour preuve : l’existence d’une cin-quantaine d’associations, des cours de langue niçoise dispensés dans les écoles et les lycées…etalés sur toute l’année, les événements commémorant cet anni-versaire sont de divers ordres. Outre une série de conférences or-ganisées au Centre universitaire méditerranéen, le théâtre de la Photographie et de l’image a accueilli un premier cycle de confé-rences qui, devant le succès rencontré, a été prolongé. de grands spécialistes de l’histoire du Comté de Nice se sont ainsi donné ren-dez-vous, sous la présidence d’Olivier vernier, Professeur à l’Uni-versité de Nice-sophia-antipolis, directeur du laboratoire des etats de savoie et membre du Conseil National des Universités. ainsi, le 10 avril, le public a pu assister à la conférence d’ adolphe viani, vice-président de la Fédération des associations du Comté de Nice, sur le thème « les variations des limites du Comté de Nice, de 1388 à nos jours » ; le 17 avril à celle de Jean-Paul Potron, biblio-thécaire, responsable du Pôle numérique et Conservation Musique à la bibliothèque municipale à vocation régionale de Nice sur le
thème « voyage pittoresque dans le Comté de Nice à la veille de l’annexion, par le peintre paysagiste Jacques Guiaud » ; ou encore, entre autres, le 19 juin, à celle de Jean-Marc Giaume sur le thème « le Comté de Nice, de la réalité culturelle au défi de la mise en valeur de son patrimoine historique ». Un sujet d’autant plus im-portant pour l’historien que la création d’une délégation au Patri-moine historique est quelque chose d’unique dans une grande ville de France.
Le Château livre ses secretsUn patrimoine historique à la richesse multiséculaire qu’il est impor-tant de mettre en valeur, pour les futures générations, mais aussi afin de donner une nouvelle image à ce territoire. C’est pourquoi la ville de Nice invite les habitants et les touristes à un voyage au cœur de ce patrimoine, autour notamment des différents chantiers de fouilles en cours. Nice est en effet un exemple unique en France, avec deux chan-tiers de fouilles ouverts, sur deux périodes historiques où subsistaient encore beaucoup d’éléments méconnus : le Haut Moyen age et l’an-tiquité. la colline du Château est le site de l’ancienne fortification des ducs de savoie. Mais avant d’être totalement militarisée, elle était sur-tout le siège de la ville médiévale avant son extension sur les pentes du vieux-Nice. Parmi les édifices majeurs qui prenaient place sur la partie supérieure se trouvait la Cathédrale. avant son transfert à sain-te-réparate (dans le courant du Xvie s.), la Cathédrale se trouvait face au château, sur la zone la plus élevée du plateau. Fouillée à plusieurs reprises au XiXe mais surtout au XXe s. (entre 1950 et 1964), elle était pourtant loin d’avoir livré tous ses secrets. la recherche, conduite sous l’égide du service archéologie de la ville de Nice, avait déjà porté sur des centaines de documents anciens conservés dans les archi-ves de la ville et du département. les chercheurs sont allés jusqu’à turin pour trouver des documents inédits (en particulier des plans de la fortification). Mais seules les fouilles archéologiques sont à même
en cette année 2010, Nice célèbre le 150e anniversaire de son rattachement à la France. le territoire de Nice a en effet quitté officiellement le royaume du Piémont-sardaigne pour rejoindre la France de Napoléon iii le 14 juin 1860. toute l’année, la ville propose des actions dont l’objectif est de faire connaître la richesse de la culture du Comté de Nice.
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© H. lagarde
25é v é n e m e n t l a v i e d e s a r t s
de faire revivre le passé lointain de Nice et de le por-ter à la connaissance de tous. C’est pourquoi cette année a eu lieu une première campagne de fouilles. et là, première surprise : un édifice plus ancien que la cathédrale médiévale est apparu. il s’agit de la première cathédrale de Nice, que des céramiques, retrouvées dans la préparation de son sol, permet-tent de dater du ve s. de notre ère. aux abords de la cathédrale, les fouilles retrouvent les vestiges du cimetière qui bordait l’édifice (peut-être dès la fin de l’antiquité ?). Un des enjeux de la fouille porte éga-lement sur le bâtiment adjacent, qui pourrait cor-respondre au Palais Épiscopal. enfin, plus au sud, ce sont les quartiers d’habitation qui reverront le jour.
Un édifice caractéristique de niceautre site à livrer ses secrets : l’amphithéâtre de Cimiez. le service archéologie de la ville de Nice a découvert le niveau primitif de l’amphithéâtre du ier siècle, plus bas que celui qui existait avant les travaux de restauration du bâtiment. aujourd’hui, grâce à cette découverte, presque un mètre d’élé-vation a été gagné pour cet édifice si caractéris-tique de la ville. les fouilles ne s’arrêtent pas là. le travail des archéologues a aussi permis la dé-couverte de la route du XiXe siècle, qui passait au centre des arènes, ainsi qu’un dallage antique per-mettant de sortir de l’amphithéâtre. avec le quar-tier thermal des iie-iiie siècles de notre ère, situé à proximité, l’amphithéâtre de Cimiez témoigne de l’activité publique et urbaine de la cité antique de Cemenelum, créée à la fin du ier siècle avant notre ère, par l’empereur auguste (Chef-lieu de la pro-vince romaine des alpes Maritimae, au ier siècle de notre ère). si les sources anciennes mettent en évidence l’intérêt de l’amphithéâtre par les érudits dès le Xive siècle, c’est à partir de l’union du Com-té de Nice à la France, que l’édifice va être classé aux Monuments Historiques, en 1865. enfin, c’est dans la crypte archéologique de Gari-baldi que les vestiges retrouvés sont sans doute les plus remarquables par leur intérêt historique et par leur degré de conservation : la tour Parolière, large de plus de 8 m de diamètre, bordée par un fossé (avec pont-levis) ; le « ravelin », mur de fortification placé au-delà du fossé pour protéger l’accès à la porte ; le mur du Bastion Pairolière de plus de 4 m de largeur ; le bastion de saint-sébastien et le fossé, avec le pont permettant son franchissement. l’ob-jectif pour la ville de Nice est maintenant que les visiteurs puissent admirer rapidement cette crypte sous forme de visites guidées et de cheminements avec des panneaux explicatifs. les lieux seront mis en lumière, avec des ambiances sonores différentes en fonction des espaces et un espace d’exposition
sur les fouilles et leurs interprétations historiques (colline du Château et vieux-Nice).
150 projets de proximitési les deux précédentes commémorations de l’Union du Comté de Nice à la France ont eu un caractère exclusivement festif et officiel, pour ce 150e anniversaire, Christian estrosi a souhaité faire preuve de plus d’originalité en offrant aux Niçois des réalisations durables qui concernent leur vie quotidienne : 150 projets de proximité pour les 150 ans. le but est de rapprocher les habitants de leur ville en créant, dans chaque quartier, les condi-tions d’une véritable proximité. Ce programme se décline autour de quatre thèmes : > Une ville préservée et embelliel’embellissement de l’avenue Jean Médecin, le rava-lement de la façade de la basilique Notre-dame, res-tauration de l’amphithéâtre des arènes de Cimiez, engagement de la restauration et ouverture au public du fort du Mont-alban, rénovation et mise en lumière d’églises, chapelles et bâtiments communaux, amé-lioration de l’éclairage public avenue Malausséna, place Garibaldi…> Une ville vertel’extension du jardin thiole, la création du parc des liserons, création d’un jar-din d’enfants dans le quartier Pasteur, aménagement d’espaces verts au 149 route de turin, réaménagement des jardins durandy, Plateau fleuri et la Pastorelle, création d’une jardinerie à saint-roman-de-Bellet…> Une ville plus proche et plus humaineCréation de crèches à l’ariane, boule-vard victor Hugo, création d’un Centre d’animation et de loisirs à saint-Pan-crace, réaménagement du club hippi-que, création d’un parcours sportif au parc de la Clua, aménagement d’aires de jeux, ouverture d’un poste de police municipale avenue Cernuschi, nom-breux aménagements pour personnes à mobilité réduite… > Une ville où l’on circule bienelargissement de voies : avenue sain-te-Colette, route de saint-antoine-de-Ginestières, réaménagement de carre-fours, réouverture de chemins : riba Moula à Cimiez, Croix de la sérénat à Gairaut, création d’emplacements pour les deux roues en centre ville, réalisa-tion d’un revêtement antibruit boule-vard de Cimiez…
dans le cadre de l’événement 150e anniversaire, la création, “le rattachement ” sera jouée du 12 au 20 juin.
22h Pièce de théâtre “le rattaCHeMeNt”
Place Pierre Gauthier - Cours saleyaen plein air, devant le Palais des rois sardes, alexandra lamy, Mélanie doutey et samuel labarthe parcourent l'histoire du Comté de Nice dans une pièce originale et inédite imaginée par raoul Mille, écrite par didier van Cauwelaert et mise en scène par daniel Benoin.
représentations en soirée les 12, 15, 16, 17, 18, 19 et 20 juin.
réservation des places au 36 09 et sur nice.fr
FS
Photochrome anonyme - restaurant de la réserve, ca 1890 - Collection théâtre de la Photographie et de l'image
Jean Gilletta - Place Masséna et Casino municipal, ca 1898 - Collection théâtre de la Photographie et de l'image
Joseph lucarelli - Cathédrale, place rossetti, ca 1930 - Collection théâtre de la Photographie et de l'image
© H. lagarde
26 l a v i e d e s a r t s f i g u r e d e l ' a r t
30 mètres de haut, 55 tonnes, un socle de 40 tonnes, tel-
les sont les mensurations de l’impressionnante sculpture
inaugurée début juin à Nice. Œuvre monumentale offerte
par Bernar venet, elle commémore le rattachement de Nice à la Fran-
ce, dont c’est le 150e anniversaire cette année, en symbolisant les
neuf vallées qui forgent le comté de Nice. d’où son nom « Neuf lignes
obliques ». Une œuvre qui a nécessité plus de deux mois de travail
et plus d’un kilomètre de soudures, d’une valeur marchande de deux
millions d’euros et réalisée par le cabinet Greisch, concepteur du via-
duc de Millau… Ce qui en fait la plus grande d’europe. Pourtant, Ber-
nar venet considère que c’est à lui que l’on fait un « magnifique ca-
deau », en lui permettant d’installer cette œuvre sur le toit du parking
sulzer, dans un environnement paysager de 1 500 m2 donnant sur
la mer. l’artiste ne compte d’ailleurs pas s’arrêter là. Outre l’arc du
Jardin albert ier, il souhaite déplacer les lignes indéterminées situées
non loin de la Galerie des Ponchettes dans le parc du MaMaC et les
remplacer par une pièce plus imposante encore, avant de terminer
le parcours par une autre pièce monumentale, celle-ci consacrée à
l’angle. droits, courbes, angles… tout ou presque, dans l’œuvre de
Bernar venet, est histoire de lignes et de mesures. Ou d’absence de,
dans le cas des lignes indéterminées. Pourquoi la ligne ? « Parce que
c’est un élément minimal, essentiel, simplifié au maximum ».
un parcours non linéaireQuand, en 1958, Bernar venet arrive à Nice, à l’âge de dix-sept ans,
il échoue au concours d’entrée de l’École des arts décoratifs, « une
chance ! », et intègre la villa thiole où, en un an, il fera le programme
prévu en quatre ans. engagé comme décorateur à l’Opéra de Nice, il
part ensuite à l’armée pour 22 mois. « On me confie alors un atelier
de 1 000 m2 et je commence à faire des choses… ». À son retour à
Nice, il développe ses peintures au goudron, « parce que le noir, c’est
le rejet de la communication facile ». il commence la série des reliefs
en carton (peintures industrielles) et, surtout, réalise sa première
sculpture, tas de charbon, sans forme spécifique, posée à même le
sol. « il peut y avoir dix tas de charbon en même temps, explique-t-
il. l’œuvre d’origine n’existe pas. C’est le concept qui existe ». Une
pièce historique, novatrice, une proposition radicale qui l’amène à
Bernar VenetLignes de conduite
Bernar venet compte parmi les artistes qui, par leur vivacité de chercheurs, ont amené quelque chose de nouveau à l’art. sa faculté d’abstraction intellectuelle et son goût pour le raisonnement mathé-matique et l’expérimentation l’ont conduit à inventer l’art conceptuel.
27f i g u r e d e l ' a r t l a v i e d e s a r t s
développer l’art conceptuel, où plus rien n’a à voir avec le forma-
lisme, la couleur ou la composition. « On est dans le langage ». Mais
cela viendra plus tard car, à cette époque-là, personne ne s’intéres-
sait à son travail. « C’était une époque héroïque, où j’étais obligé de
faire la fin des marchés ou d’aller à la soupe populaire pour pouvoir
manger ». Jusqu’à sa rencontre avec arman, en 1963, et d’autres
représentants du Nouveau réalisme, comme César, Hains ou ville-
glé, qui lui proposent de partager des expositions avec eux. et puis,
en 1966, c’est le grand départ pour New York, sur un coup de tête.
depuis, l’artiste y habite, quand il n’est pas dans son moulin du Muy
à agrandir son champ de sculptures ou à nourrir ses cygnes. C’est
à New York qu’il commence à travailler sur des dessins industriels
et des sculptures de tubes et à découvrir l’intérêt des plans. « C’est
aussi en 1966 que j’ai commencé à utiliser les mathématiques dans
mon travail, ce qui a constitué la base de tout ce qui allait suivre, en
peinture comme en sculpture ». il réalise ainsi ses premières œu-
vres à caractère monosémique et est exposé chez léo Castelli, Paula
Cooper ou virginia dwan. « Jusqu’à Kandinsky, on était dans le figu-
ratif, avec une interprétation polysémique. depuis, l’abstrait offrait
une lecture pansémique, avec toutes les interprétations possibles.
Moi j’ai introduit la monosémie, qui apporte un seul niveau d’in-
terprétation, sans aucune ambiguïté, une seule information à partir
du moment où l’on sait la lire ». les tableaux d’équations, voire les
séries de saturations, où plusieurs équations se superposent jusqu’à
en brouiller totalement l’information, ne ressemblent pas à quelque
chose d’abstrait. « et pourtant, les mathématiques sont le plus haut
degré d’abstraction qui existe au monde », déclare Bernar venet.
C’est aussi un champ de connaissances que l’artiste ne comprend
la dernière œuvre de Bernar venet sur le parking sulzer à Nice © toutes photos H lagarde
l a v i e d e s a r t s M O N a C O28
pas. « Mais Cézanne n’était pas botaniste, Malévitch pas géomè-
tre ni Courbet minéralogiste ! ». sa démarche a simplement été
de prendre un champ de connaissances pour élargir le champ de
l’art. Une démarche que personne, au départ, ne pouvait accepter
comme étant œuvre d’art… « Or il s’agit d’un champ visuel colos-
sal jamais exploré auparavant ! ».
entre ordre et désordreentre 1969 et 1975, Bernar venet arrête sa production artistique
pour des raisons théoriques, avant de revenir en force à son tra-
vail sur la ligne, sous toutes ses variantes et ses manifestations
physiques. il réalise à cette période les premières toiles de la
série angle et arcs et des reliefs en bois : angles,
arcs, diagonales, avant de concevoir, en
1983, les premières maquettes
de ses lignes indéterminées.
en acier, elles sont installées
dans de nombreux
espaces urbains
et collections
p u b l i q u e s ,
notamment à
Nice, Paris, Berlin,
tokyo, strasbourg,
Pékin, austin, san Fran-
cisco… « On se sent petit à côté des sculptures, mais si mon tra-
vail s’adapte bien à la monumentalité, il n’est pas conçu pour cela
au départ. Je prends plus de plaisir à réaliser une sculpture de 20
centimètres de haut si elle est vraiment nouvelle. Ce qui m’inté-
resse, ce n’est pas de m’exprimer mais de faire quelque chose qui
n’a jamais été pensé avant ». les accidents, ses performances sur
des barres d’acier tombant les unes sur les autres, sont, pour lui,
mille fois plus créatifs. « Qui a dit qu’on ne pouvait pas mélanger
ordre et désordre ? ils sont complémentaires ». en ce moment,
Bernar venet travaille beaucoup sur la peinture et notamment sur
le doré, une couleur culturelle, en hommage à Giovanni Cimabue,
peintre italien de la pré-renaissance. Pourquoi ? « Parce que c’est
à l’opposé de ce que l'on attend de moi ! ».
ses œuvres, Bernar venet aime les concevoir, par ordinateur, et
les voir une fois finies. les faire, c’est un travail d’artisan dont il
se passe bien. « de jeunes peintres qui ont besoin de travailler le
font bien mieux que moi ».
aujourd’hui, 25 sculptures monumentales sont installées à travers
le monde. le 10 juin, une de 38 mètres a été inaugurée à séoul.
et l’artiste travaille à une sculpture de 90 mètres pour la ville de
salzbourg, qui devrait être inaugurée à la fin de l’année. en 2011,
il exposera à versailles. et après ? « J’étais déjà là pour le 100ème
anniversaire du rattachement de Nice à la France, je suis là pour le
150ème, alors dans cinquante ans, je ne sais pas ce que je ferai ! ». fS
© toutes photos H lagarde
29f i g u r e d e l ' a r t l a v i e d e s a r t s
Photos © H lagarde
© toutes photos H lagarde
30 l a v i e d e s a r t s d e S S i N
essai transforméil tente alors de conci-
lier ces deux aspects en
utilisant des techniques
surréalistes d’écriture et
de dessins spontanés.
« des automatismes
psychiques, comme di-
sait andré Breton. si les
toiles sont surréalistes
dans leur conception,
elles donnent une place
plus importante au verbe
qu’au symbole ». Jusque
sur la tranche, où Jérémy
laisse s’exprimer son hu-
meur du moment. Éco-
logie, crise financière,
les grands thèmes qui font les titres des journaux
d’aujourd’hui, il les exploite déjà. Jusqu’aux insul-
tes. « Cela défoule ! avec ce style, je ne triche pas, je
n’ai pas d’impératif, je suis authentique dans ce que
j’écris. sans compromis. J’étais sans doute plus libre à
l’époque de ces toiles, car je n’envisageais pas qu’une
carrière artistique puisse être possible. Même si j’ai
eu envie de réaliser une série, histoire de voir ce que
donnait l‘ensemble, dans une certaine homogénéité
graphique ».
des essais, toujours.avec le chat, l’essai est transformé. acide, corrosive,
sadique, manipulatrice, égoïste, la sale bête n’en est
pas moins touchante : elle dénonce sans relâche les
injustices dans lesquelles la société la plonge. C’est
le cas dans la bande dessinée sortie en 2009 aux Édi-
tions Baie des anges, « le chat qui dérape ». en atten-
dant celle qui sera publiée en octobre prochain, avec
Nice comme toile de fond du scénario, « une matière
Jérémy Taburchiliberté & spontanéitéÀ 36 ans, Jérémy taburchi est le créateur du personnage du chat rose, incisif et méchant, qu’il pose sur des toiles ou dans certains titres de presse. Né d’un essai graphique, le chat sera bientôt le héros du scéna-rio d’une bande dessinée qui se déroulera à Nice. Portrait d’un artiste qui a su imposer sa griffe.
À douze ans, il tenait son premier ordina-
teur entre les mains. Un univers visuel
qui l’a forcément marqué. Plus tard vien-
nent les premiers essais de celui qui allait devenir son
personnage star : le chat rose. « Je m’essayais alors à
l’utilisation de la tablette et c’est plus compliqué que
de tenir un crayon ! Même si le gros avantage, c’est de
pouvoir faire contrôle Z quand tu n’es pas content de
ce que tu as fait ». déjà coutumier des encres de Chine
et de la peinture à l’huile, Jérémy taburchi s’amuse en-
suite à peindre son chat méchant, en 2004. d’abord
à l’acrylique sur des grandes toiles, le personnage est
ensuite invité à paraître dans un magazine tous les
quinze jours sous la forme de petites bandes dessi-
nées de deux à trois cases, des strips. le chat en train
de faire une overdose, c’était un essai. Graphiquement
amusant, et novateur. et c’est de là que tout est parti.
Mais pour sa « vraie » première toile, l’artiste était
pourtant loin de cet univers. Passionné par l’esprit et
la sobriété du pop-art, il peint son premier portrait en
2004, celui de Gandhi. « J’ai eu des premières com-
mandes mais cet argent facile ne me satisfaisait pas
car ce n’était pas très créatif ». rapidement, le monde
de l’infographie oriente ses créations, dans un style
coloré et vivant, inspiré tant par l’actualité que par son
monde intérieur.
Photos © H lagarde
Cat of liberty (Sky Color)2010résine et peinture acrylique et coffrage bois.exposé à la galerie Ferrero
31d e S S i N l a v i e d e s a r t s
comestible que l’on peut tordre à merci », indique l’ar-
tiste. Pour autant, le chat rose ne délivre pas de mes-
sage général. « le message ? il existe toile par toile.
les petits formats naissent d’une bonne idée graphi-
que, d’un concept ou d’une émotion ». en toute sim-
plicité. Comme lorsqu’on voit le chat baver devant un
petit oiseau dans une assiette. « Je devais avoir un peu
la dalle à ce moment-là ! ». les formats plus grands,
quant à eux, sont plus méditatifs. « il me faut plus de
place quand j’ai plus de choses à dire. » là encore,
avec une petite phrase qui court sur la tranche, his-
toire de rehausser le graphisme. « le chat rose, c’est
moi. Nous évoluons de la même façon. et ces derniers
temps, il s’est un peu assagi… ».
remuer le milieuau total, le chat rose compte une soixantaine de pro-
ductions. Même si certaines sont parfois détruites pour
donner naissance à d’autres. Car Jérémy taburchi est
un adepte du recyclage. et des moyens du bord. il n’a
plus de toile ? il peint sur un tapis ! Pas de pinceau ? il
peint son autoportrait à l’aide d’une carte de visite…
silicone, plâtre, Jérémy taburchi s’adonne aussi aux
essais de matières. en témoignent les créations hé-
téroclites et les taches de peinture qui jalonnent les
murs et le sol de son pe-
tit atelier situé non loin
de Monaco…
Créatif et novateur, Jé-
rémy l’est tout autant
dans son approche du
milieu de l’art, qu’il veut rationnelle et commerciale.
« Je voudrais remuer ce milieu et le débarrasser de
ses tendances conceptuelles qui ne m’intéressent pas.
Je ne comprends pas les artistes maudits, dépressifs,
qui s’enterrent au fond de leur atelier et qui se plai-
gnent. Pour moi, la création doit être solaire, elle est
synonyme de joie et de bonheur ». tout comme sa
conception de la communication, pour laquelle il ex-
ploite les réseaux sociaux, comme les réseaux tout
court. « il faut être créatif dans sa relation aux médias,
assure-t-il. et la bande dessinée est un bon outil pour
ça ». Ce jeune artiste qui a découvert l’art au MaMaC,
« pour moi c’est ça l’art contemporain, ce goût de la
liberté, cette évasion vis-à-vis de la technique », est de-
puis quelques mois exposé à la Galerie Ferrero, à Nice.
Pour le gamin qui ouvrait grand les yeux en passant
devant cette institution, c’est une véritable preuve de
confiance et de reconnaissance. « du bonheur, tout
simplement ».
Abu Graïb acrylique sur toile 80x80cm. Critique politique du scandale des tortures par les soldats américains en iraq.
Planches et dessins à l'atelier de l'artiste
fS
Photos © H lagarde
Je ne triche pas, je n'ai pas d'impératif,je suis authentiquedans ce que j'écris. sans compromis.
« «
32 l a v i e d e s a r t s a r t i S t e
Il a l’humilité de ces artisans qui œuvrent dans l’ombre des
arrière-cours. son atelier est justement dans l’une d’elles sur
le boulevard de Cessole non loin de la maison de l’environne-
ment. Un comble, car c’est au milieu des années 90 que Christo-
phe deviendra l’un des pionniers de ce que l’on appellera plus tard
le récup’art. Une tendance verte qui fait rage aujourd’hui mais
qui à l’époque fit de notre homme un bricoleur inspiré à la sauce
lépine. il est vrai que depuis que ce produit dérivé du papier fut
inventé au Xviiième siècle pour des usages variés dans l’édition,
le carton s’est contenté de jouer dans la cour des manufactures.
seuls dans les années 70 quelques designers comme Frank O.
Gehry s’y intéresseront un temps.
itinéraire d’un « cartoniste »« Quand j’ai eu cette idée j’avais vu des petits meubles en carton
plié mais c’est l’accumulation d’emballages dans la rue qui m’a
décidé. Je déteste jeter ». On le croit volontiers car le deuxième
niveau de son atelier est un grenier mansardé où la présence
humaine semble à peine tolérée par une foule d’objets et maté-
riaux qui attendent patiemment leur heure. Christophe, d’origine
corse, est né en région parisienne en 1966. À 16 ans il gagne
le sud. la Corse d’abord où ses parents tiennent un hôtel puis
Nice où il intègre l’école hôtelière en 1988. il rentre au service de
la restauration du Palais Maeterlinck où il restera jusqu’en 1994.
Époque où il commence à façonner avec du carton ses premiers
sièges. Christophe est autodidacte mais a des prédispositions. de
son père, il a hérité d’une main sûre de bricoleur : « tout petit je
m’amusais déjà à trafiquer mes voitures majorettes, j’aimais bâtir
des cabanes dans les arbres. ensuite j’ai appris la gravure sur bois,
la soudure mais aussi la couture sur la machine à coudre de ma
mère dont je me sers encore aujourd’hui ». Un coup d’essai, un
coup de grâce ! dans son atelier du vieux Nice Christophe accou-
che d’une gamme unique exposée en galerie dès 1996 : « Je sen-
tais que les frontières devenaient de plus en plus poreuses entre
Christophe LorenzoniÀ la découverte des contenants perdus.
il a donné ses lettres de noblesse à une matière qui après avoir rendu bien des services à l’homme finit au bord de la route, lorenzoni sculpte le carton pour en faire des meubles d’art. depuis deux ans des barriques ont droit au même traitement. Qui est cet artiste qui donne une seconde chance aux matériaux abandonnés ?
Photos © H lagarde
33a r t i S t e l a v i e d e s a r t s
OM
l’art plastique en perte de repères et le design. Mon travail évolue
d’ailleurs aux confins du design, de l’artisanat, du recyclage et
de la sculpture contemporaine ». Mais cette tendance « fusion-
nante » est encore balbutiante. alors ses « sculptures-meubles »
étonnent, mais peu de ventes à la clé. À partir de cartons ondulés
récupérés sur le pavé et encollés en plusieurs couches puis taillés
selon le gabarit, il ponce puis vitrifie pour obtenir un objet fini
résistant, Christophe accouche ainsi d’une gamme de fauteuils et
petit meubles dont les lignes n’ont rien à envier à celles des stars
du design danois (il sera même approché par des architectes pour
réaliser des meubles). ses sources d’inspirations sont multiples :
« J’ai essayé de donner au carton une deuxième vie plus grande
que la première. en fait j’ai commencé par reproduire du louis Xv
et des modèles d’après magazines puis est venue une phase plus
personnelle, où j’ai exploré la matière par plaisir en m’inspirant de
tout, comme ce fauteuil aux formes calquées sur un minutier cu-
bique de cuisine ou cet autre dont la courbe évoque la démarche
de Bugs Bunny ».
Comme Bacchus sur son tonneauMais cet engagement créatif lourd (une vingtaine d’heures pour un
seul modèle) n’est guère lucratif et le carton maudit fait toujours
hésiter les acheteurs potentiels. de plus ses œuvres sont impos-
sibles à reproduire. et progressivement la denrée abandonne le
pavé sous la poussée du tri sélectif. alors Christophe reprend du
service dans la restauration. de 1999 à 2008 il travaille dans le
restaurant le « 20 sur vin » qui ouvre à Nice, avec « la part des
anges », la brèche des bistrots « œno-gourmand ». C’est au
contact de cet univers où Bacchus passe les plats qu’il décide de
détourner un autre contenant : la barrique : « Je continuais pa-
rallèlement à mon job à travailler le carton à temps perdu ». Mais
dans son nouvel atelier de Cessole acquis en 1998 Christophe
grâce aux contacts noués avec les vignerons commence à inviter
la barrique bordelaise. des fûts d’une capacité de 225 litres que
des viticulteurs rhodaniens et bourguignons lui cèdent, le bois
perdant au bout de 15 ans ses facultés d’échange avec le vin.
ainsi grâce à deux modèles de chaises qui se vendent rapidement
(certaines décorent aujourd’hui le « 20 sur vin » et « la part des
anges ») Christophe quitte le zinc pour revenir à l’établi. C’est
à partir des lamelles bombées (les douelles) qu’il imagine « la
mémé » du nom d’une cuvée vinifiée dans les premières barriques
récupérées. depuis deux ans, cette collection signée « 225 litres »
s’est élargie trouvant son public : « les douelles pour les assises
c’est facile pour les tables basses j’ai du me servir des fonds de
tonneaux ». en tout, c’est une vingtaine de créations qu’il pré-
sente désormais dans les foires et salons de vins de deauville
à saumur, du Beaujolais au Bordelais et qui séduisent tous les
acteurs de la filière comme les amateurs de grands crus. Car juste
brossées et vernies les douelles gardent la patine des cépages
qu’elles ont accompagnés : Gamay, Pinot noir, vosne romanée
etc. « sur un meuble je travaille avec le même fût pour avoir avec
une teinte unique ».
après avoir créé une bibliothèque en hommage à tinguely, Chris-
tophe travaille aujourd’hui sur une installation à système d’en-
grenages qui ouvre une vieille malle en carton faisant office de
meuble de rangement. « la ligne 225 litres me fait vivre, le carton
c’est mon expression libre, je n’ai pas fini mon histoire avec lui »
explique cet incorrigible aventurier des « contenants perdus ».
34
Passer de la caméra au bidon c’est le grand écart que Chris tiboise s’est offert pour parler de ses contemporains au travers de ses obsessions, peurs et doutes. aujourd’hui ses bidons hurlants côtoient les œuvres non moins affables de Ben à la Galerie Ferrero.
Chris Tiboise Bidonville
Enfant lorsqu’il façonnait des soldats de plomb, Christophe
montait-il une armée sans le savoir pour affronter sa future
vie d’adulte ? en tous cas sa seconde rencontre avec la matière
l’a conduit à tout laisser tomber à 30 ans pour apprendre un nou-
veau métier. et c’est en autodidacte qu’il est parti à l’assaut de l’art
contemporain, bille en tête. Car il est comme ça, Chris, fonceur mais
pas téméraire, crâneur mais pas tête brulée ! et des ambitions s’il en
a, il veut les réussir à sa manière. doux rêveur, utopiste ? Plutôt non,
lucide tendance dure. d’ailleurs ses bidons exposés chez Guillaume
aral cachent mal derrière leurs jolis motifs quelques blessures.
travis is Back« Be / the more / Her » peut-on lire en assemblant comme un ca-
davre exquis les mots peints sur chacun des fûts. Ce triptyque de
bidons sur lesquels on peut s’assoir est un de ses derniers exer-
cices d’exorcisme. le Petit Prince y dialogue avec d’autres figures
imposées aux moins de 18 ans, plus actuelles comme ces « ugly
hit » vendus aujourd’hui à la chaine. et les fillettes en mini jupe de
décoller, de perdre la tête, de flotter comme le cerf volant qui a cassé
son fil. Chris aime mêler dessins et mots « pour pointer les codes,
morale, religion tout ce qui peut enfermer l’humain ». le Pop art le
fit mais les temps changent et son langage tient plus du sOs que de
la revendication. Y a-t-il péril en la demeure ? de « virgin suicide » au
massacre de Columbus (« elephant ») : « ce travail est sur le thème
du suicide, de l’auto-destruction, où comment l’enfance peut s’abi-
mer en percutant le monde adulte » explique Chris qui se sert de ses
bidons comme d’un écran. Un de ses premiers sujets invité sur le
métal froid fut d’ailleurs un certain travis « J’ai fait mon mémoire
sur Martin scorcese. le personnage de travis joué par de Niro dans
« taxi driver » est l’exemple type de psychopathes que l’on peut
fabriquer au quotidien. travis c’est n’importe qui, tout un chacun ».
le cinéma, Chris s’en nourrit très librement. très librement car après
avoir fait ses armes derrière la caméra comme assistant il a pris ses
distances : « Je voulais sortir du système de respiration par procura-
tion. Porter un projet personnel. À 30 ans j’ai décidé d’arrêter et de
me lancer dans la sculpture ».
© H lagarde© Courtesy C. tiboise
35a r t i S t e l a v i e d e s a r t s
garagelanddepuis Christophe fait des tonneaux mais en
sort toujours indemne, a t-on envie de dire
tant cette sortie de route semble aujourd’hui
lui réussir. « les tonneaux c’est pratique, je
les récupère dans les garages. J’en ai pris un,
pour faire une table, puis le besoin de m’ex-
primer fut plus fort. J’ai décidé d’en faire un
siège, je n’avais pas la technique mais j’ai
trouvé quelqu’un pour m’aider. C’est pas
mal, on m’a dit ! J’ai appris à souder et me
suis lancé. Un copain me prête un atelier.
J’en sors une vingtaine d’un coup. À la mai-
son je passe comme un fantôme mais je sens
que je suis sur la bonne voie. Je me rends
compte que j’en ai besoin, c’est thérapeu-
tique ». « Ma vie elle ne va pas assez vite/
alors je l’accélère/ Je la redresse » chantait
daniel darc, Christophe à sa façon négocia un nouveau virage.
sous un faux air à la tarantino, mâchoire carré, front volontaire,
il cultive comme le réalisateur un penchant pour le trash : « Je ne
suis pas un rebelle, mais j’aime l’idée que je puisse déranger à
travers mon travail un système en place. et la récup c’est bien, tu
peux aller dans plein de directions différentes. J’assemble, pour
arriver à mes fins ». Ça tombe bien la société est elle aussi un work
in progress. Un chantier qui laisse pas mal de gens sur le bas coté.
son « Home less home » contamine ainsi le
« home sweet home » du rêve américain :
« Un sans abri à la maison, c’est un coup
de gueule. Quand j’ai fait ce bureau sur le
thème des sdF, il y avait ces tentes sur le
Canal saint martin. J’ai trouvé intéressant de
pouvoir faire rentrer un œuvre au noir dans
une maison claire. en fait j’aime l’idée du
loup dans la bergerie ». ainsi transformera-
t-il le parking de Mamadou Baya Yoko, une
star de l’OGC Nice : « Je l’ai rencontré par
hasard. et il accepté que je transforme son
garage à Fabron avec une installation ». Un
bureau sur des fûts « Home less home »,
un PC, un caddie et l’installation éphémère
voyait le jour. et s’il se défend de toutes
postures militantes, Chris avoue être en co-
lère « contre la désinformation, les discours
éhontés, l’abus de certains pouvoirs ». ainsi
armés de ses bidons l’artiste vidange à tour
de bras ! « Up and down » c’est une parabole
des dérives de la finance : « Une petite me-
tropolis soumise à l’indice Bull & Bear avec
ses tours empilables comme un jeu de mas-
sacre où l’on peut voir en ombre chinoise
aux fenêtres les bulls, les bears et parfois
un crocodile qui surfe sur la vague ». avec
« dont believe the hipe » il tord le cou à une
tendance du marché qui conduit certains
créateurs à confondre produits de consom-
mations courantes et œuvres d’art. « Pour
être belle » c’est la presse people, la presse
poubelle. et l’électron libre de délivrer son
message pas toujours où on l’attend. après
un passage à Opera Gallery, il investira l’ate-
lier-galerie-logis parisien de laurent Godard,
le créateur de « Flatteurville » qui a investi la
piscine Molitor pour y créer des expositions.
après une première série de bidons en noir et blanc, Chris est
passé à la couleur depuis 2008 : « J’arrive à créer quelque chose de
coloré qui reste très sombre. J’aime faire quelque chose de confor-
table sur des sujets qui ne le sont pas. la contrainte devient alors
un atout ». en surfant ainsi sur la mode du design, de l’objet culte,
de la customisation, Chris tiboise semble avoir trouvé la bonne
veine : plus « let it bleed » que « let it be » mais toujours avec une
bonne dose de sang froid !
travis Bickle, le personnage principal de taxi driver de Martin scorsese et palme d'or 1976 était de retour sur la Croisette 34 ans après à travers l'œuvre "travis is back" produite en 2008 par l'artiste Chris tiboise ! C'est avec la complicité de Jean Bernard a l'origine du salon art affair Cannes édi-tion 2010 que cela a été possible. suite a leur rencontre sur le salon art Monaco 2010, Jean Bernard accepte que Chris ti-boise rejoigne les exposants du salon qui aura lieu tous les ans pendant la période du festival international du film. Faire revivre le personnage mythique joué par robert de Niro dans l'ambiance de ce lieu d'exposition mêlant des artistes tels que Warhol, Ben et beaucoup d'autres est apparu comme une évidence à ces deux passionnés d'art contemporain.
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© H lagarde
© H lagarde © Courtesy C. tiboise © Courtesy C. tiboise
© Courtesy C. tiboise
© Courtesy C. tiboise
36 h o r s l e s m u r s v a r
Botero à Saint-Tropez : C’est énorme !on aura tout vu en matière de pin up à saint-Tropez
mais des femmes comme ça jamais ! Alors que le musée
de l’annonciade célèbre les filiformes égéries de modi-
gliani, Fernando Botero dévoile ses dames bien en chair
(et en bronze) dans toute la ville. C’est sur une proposition
de la Galerie marlborough - qui l’an dernier avait déjà en-
voyé les œuvres de manolo Valdès se faire voir de la place
des lices au port - que les sculptures du célèbre artiste co-
lombien prennent des vacances dans le village provençal
que le monde entier nous envie. Ainsi après Florence, New
York, Paris, Venise, Tokyo, madrid et Berlin, la Ville de saint-
Tropez accueille du 26 juin au 31 octobre les nouvelles œu-
vres monumentales de Botero. Cinq sculptures en bronze
qui animent les lieux clés (place Grammont, place de la Garon-
ne, quai suffren et quai Jaurès.). une étrange ambassade :
deux créatures féminines, l’une debout, l’autre allongée
qui s'impose dans leur nudité et leurs courbes voluptueu-
ses ; un Cheval, sculpture robuste et majestueuse montrée
pour la première fois ; l’homme à cheval, clin d’œil à la tra-
dition de la statue équestre et enfin un sphinx au regard bienveillant, interprétation
très libre de la mythologie. Fernando Botero qui vit et travaille entre Paris, New York,
monaco et Pietrasanta a dès 1958 trouvé ce style qui confère chaleur et intimité au
monumental. Il s’en explique : « un jour, après avoir énormément travaillé, j'ai pris
un crayon au hasard et j'ai dessiné une mandoline aux formes très amples comme
je le faisais toujours. mais au moment de dessiner le trou au milieu de l'instrument,
je l'ai fait beaucoup plus petit et, soudain la mandoline a pris des proportions d'une
monumentalité extraordinaire ». C’est donc sur un air de guitare que tout est de-
venu opulent dans l’univers fantasmagorique de Botero. ses personnages comme
les objets qui les accompagnent s’y expriment à travers la dilatation des formes et
la déformation des corps. mais ne lui dites jamais que ses personnages sont gros :
« Gros, mes personnages ? Non, ils ont du volume, c'est magique, c'est sensuel. et
c'est ça qui me passionne : retrouver le volume que la peinture contemporaine a
complètement oublié ». et pour cause, car l’œuvre de Botero repose sur une sen-
sualité héritée de l’art précolombien et d’emprunts à l’histoire de l’art notamment à
Ingres et à la mythologie grecque. la sculpture qu’il aborde à partir de 1973 affine
cette quête plastique. l’artiste ne retient que des formes et lignes pures qui lui per-
mettent de forcer le trait sans que les volumes ne perdent leur rythme vital. un style
qui lui a permis de son vivant d’être exposé de par le monde et d’intégrer les plus
grandes collections et, à New York, deux place fortes : le solomon r. Guggenheim
museum et The metropolitan museum of Art.
Attention : Sculptures en liberté !l’été est la saison préférée des sculpteurs car avec le re-tour des beaux jours leurs œuvres fleurissent dans les jar-dins, les sentiers, en ville comme à la campagne. Nos voi-sins varois semblent s’en être fait une spécialité. Petit guide pour bronzer artistiquement du rivage aux collines.
Sphynx, 1995 - Bronze 3/3 234x273 cm© Galerie malborough monaco
Man on a horse, 2008 - Bronze 33 325x250x175 cm© Galerie malborough monaco
37v a r h o r s l e s m u r s
C’est sur les hauteurs de st-Tropez, à Gassin que
l’on retrouve nos sculptures en cavale dans un
superbe haras plus habitué aux purs sangs. « les
sentiers de la sculpture » un concept initié par Co-
rinne schuler au Polo Club st-Tropez, c’est la bonne
surprise de la saison ! Présidente de ce club très pri-
sé, inscrit dans le circuit international de Polo mais
aussi grande amatrice d'Art Contemporain, Corinne
a souhaité ouvrir son espace privé aux visiteurs
de la presqu'île en leur proposant un événement
culturel autour de l'art contemporain. Confié au
Directeur du Polo Club, Jean Dominique Gontrand
et à Valérie Penven (Commissaire d'exposition), ce
parcours tracé sur les 24 hectares du domaine offre
du 18 juin au 30 septembre un véritable musée en
pleine nature. l'idée directrice : créer un itinéraire
de sculptures figuratives et abstraites évoluant du
minimal vers le monumental en invitant une dou-
zaine de créateurs confirmés dont la plupart ont
un atelier en riviera. Jacky Coville, Philippe Pastor,
Bernard reyboz, marion Burkle, Tassou, Alain Boul-
let, Nicolas lavarenne, Bruno lucchi, Florence Jac-
quesson, Jean-Yves le-
chevallier, manser, Ali
Ben messaoud et Célia
Gouveiac sont au géné-
rique de cette grande
première. Des artistes
d’origines, de généra-
tions et de pratiques
différentes qui forment
une pluralité de propo-
sitions, de l’installation
plastique aux sculptu-
res plus classiques. Des
regards croisés et des
matériaux très divers
mis en œuvre (Céramique, bois, marbre, bronze,
résine etc.) qui nourrissent le propos et permettront
à tous de flâner en laissant son esprit passer de la
rêverie à la réflexion. Invité d'honneur des « sentiers
de la sculpture » la Fondation Dali présentera en clin
d’œil au lieu qui l’accueille une œuvre muséale du
génie espagnol, « le cheval scellé avec le temps ».
Gassin : Purs sangs et sculptures
Standing woman, 2007Bronze PA 1/2 360x150x150 cm© Galerie malborough monaco
1. Jacky Coville - Tulipe
2./3. Céramique de michel muraour
Gallery garden
4. Tassou - B-Tree
5./6. Œuvres d'Alain Boullet
7. Célia Gouveiac - Yes to life !
8. Tassou - Installazione Corten
Page suivante :
9. etiye Dimma Poulsen
10. à 13./15. Œuvres d'e. Dimma Poulsen
14. Jean-Yves lechevallier - red love
16. marcel Pinas - Installation de cuillères
© Courtesy Galerie Beddington Fine Art
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38 h o r s l e s m u r s v a r
mais le Var est aussi la patrie des
collectionneurs privés. Bon nom-
bres d’entre eux (souvent d’origine
anglo-saxonne) ont élu domicile
dans sa belle campagne sauvage
pour y ouvrir leurs galeries et jar-
dins d’art. C’est le cas de Guy et
michèle Beddington qui perpétuent
ainsi une longue tradition familiale
qui fait que depuis le XIXème siècle
les Beddington sont peintres, gale-
ristes, mécènes, experts, ou mar-
chands d’art. Dès 1985 le couple
organise des expositions itinéran-
tes, en Angleterre, en europe, en
Provence et sur la riviera, toujours
dans des sites de caractère. C’est
ainsi qu’ils commencent par parta-
ger leur temps entre londres et le
haut Var, où ils restaurent un vieux
mas du XVIIIème siècle. en 1998
Guy et michèle, « las de leur vie ci-
tadine et de salons d’art trop mer-
cantiles » quittent définitivement le
brouillard de la City, pour s’installer
à Bargemon au cœur d’une oliveraie
non loin du village. et en l’an 2000
les deux étages de cette « maison
de maître » deviennent Beddington
Fine Art, une galerie où le couple
continue à assouvir sa passion
à raison de 5 à 6 expositions par
an. en 2008 toutes les restanques
sont défrichées, les murs en pierres
consolidés et sculptures, installations et céramiques commencent à
investir le lieu. Cet été Beddington Fine Art 2010 fête son 10ème an-
niversaire à Bargemon en lançant officiellement l’ouverture de ses
jardins sur rendez-vous. Depuis le 12 juin une série d'imposantes
sculptures d'ombres de stefan szczesny ont pris possession des jar-
dins mais la galerie vous offre tout cet été sur rV ou lors des deux
journées de vernissage les samedi 26 juin et 17 Juillet un florilège
d’œuvres autour de ses sculpteurs résidents ou fidèles. Parmi cette
trentaine d’artistes : Pierre Theunissen, invité l’an dernier à Cannes
par Frédéric Ballester (Directeur du Centre d'Art la malmaison et
fidèle de la galerie varoise), les étranges colonnes et monolithes de
céramique de michel muraour, ancien élève de Josep llorens Artigas
qui collabora aux céramiques murales de miró et à la création de
l'atelier de la Galerie maeght à st Paul ; les installations du brésilien
marcel Pinas, les empreintes fossilisées de Frédéric lange, entre vé-
gétal et minéral, bois et bronze et les dernières créations de etiyé
Dimma Poulsen. une artiste d’origine éthiopienne (vivant à Anvers)
qui réinvente les « archétypes » d’un « art primitif » où transparait la
nostalgie de sa terre natale (couleurs vives, craquelures).
Autre bastion vert de l’art contemporain qui rivalise dans la campa-
gne de Carcès avec les galeries citadines : le Jas de la rimade, créé
par Béatrice et marcel heinz en 1986, sur les fondations d’un ancien
domaine templier. Depuis plus de 20 ans ce vieux mas et sa bergerie
restaurés présentent les artistes de la galerie et toutes les facettes
de l'art contemporain international lors d’invitations temporaires.
entre vignobles et pinède, un important jardin de sculptures s’est
ouvert entre autres au travail monumental et statuaire de Nicolas
lavarenne, aux formes douces et énigmatiques, de Bernard reyboz,
(tous deux invités aux « sentiers de la sculpture ») mais aussi aux
sculptures de marie Vermuth ou, Jean marie Fondacaro qui expose
ici depuis plus de dix ans. Plus modeste en taille la Galerie « The
orange Tree » est nichée elle sur les collines de seillans, ce village
où vécut max ernst (et qui abrite une partie de sa collection). les
artistes permanents sont Tessa Peskett (peinture) qui avec son mari
Nigel Cox ont créé le lieu, et l’anglaise lisa lindqvist (sculpture).
Deux artistes à découvrir cet été lors d’une exposition de groupe
qui accueillera également à ciel ouvert les œuvres des sculpteurs
Jean-louis Corby et Peter van borssum waalkes (hollandais).
Haut var : Dans le jardin secret des collectionneurs
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40 l A V I e D e s A r T s a r T i S T e
Maurice maubert est né en 1960.
Très tôt le crayon le démange et
sur les bancs du lycée du Parc Im-
périal, qu’il avoue avoir fréquenté avec par-
cimonie, il commence à dessiner. Intégrer
ensuite la Villa Arson ? « Pourquoi pas, en
1978 il fallait juste le niveau BAC et passer
un entretien dans le réfectoire ». Alors qu’il
n’a amené avec lui que quelques dessins, le
voilà admis ! l’aventure tournera court, mau-
rice est surtout attiré par la BD un genre peu
gouté alors dans le cénacle de l’art contem-
porain. et puis par l’entremise d’un parent,
il monte à Paris voir raymond moretti qui le
guide vers le directeur du magazine « Pilo-
te », qui l’envoie vers un grand dessinateur.
et de fil en aiguille, maurice finit par se re-
trouver… à la case départ. À Nice, il fait ses
gammes en dessinant pour la pub, l’édition
* et des fanzines. C’est à cette époque qu’il
commencera à croquer pour la revue niçoise
« la ratapignata ».
Des indes à Saint roch« Jusqu’à 25 ans je ne fit que dessiner,
quand j’ai eu envie de peindre je suis allé
voir Pierrot la valise, un vieux peintre niçois
qui m’a appris les fondamentaux ». C’est au
retour d’un périple de plus d’un an en Asie
en 1987 où il sillonnera le Tibet, le Népal,
l’Inde et la Chine que maubert réalisera une
première série de douze toiles « figurati-
ves, réalistes avec une touche mystique ».
Des peintures exposées deux ans plus tard
à la vue de tous les niçois sur les fenêtres
de la Bourse du travail (place saint Fran-
çois). maubert se nourrit d’ailleurs aussi de
rencontres au pays : « richard Cairaschi du
temps où je travaillais au Bar des oiseaux ».
Puis vint louis Pastorelli, un complice qui
reste un ami cher : « Il rentrait du Brésil où il
Maurice MaubertUne Odyssée niçoise
Il fut de ceux qui fondèrent « Nux Vomica » et la pre-mière friche niçoise à saint roch. le parcours du plas-ticien maurice maubert est atypique comme son œu-vre, une invitation au voyage, une quête surréaliste à la sudiste ?
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Toutes photos © h. lagarde
41 l A V I e D e s A r T s
avait vécu deux ans. on est parti ensemble à
Prague où l’europe fêtait la fin du stalinisme.
Quand on est revenu on s’est mis à chercher
un lieu pour travailler, c’est comme ça qu’on
a pris possession de cet ancien dépôt de bus
à saint roch ». 3000 m2 qui entreront dans
la légende niçoise en accueillant de 1990 à
1993 tout ce que compte en créateurs la
région lors d’événements alternatifs, dont
le fameux carnaval indépendant. Autour de
« Nux Vomica » qu’il fonde avec louis Pas-
torelli, Vincent Calassi « et le regretté Jean-
luc migliore », la création locale se cristallise
« louis voulait agir sur le social, il voulait
faire du musical mais comme nous avions
tous d’autres cordes à nos arcs, on a vite dé-
bordé du cadre. serge Dotti est venu faire de
la scène, Thierry lagala chantait et réalisait
des performances. Quand on a commencé
à faire nos expos, Ben, Jean mas nous ont
rejoint, puis eusebi, moya etc. ». D’autres
encore passeront par là, liés par la musique
et la culture occitane tels les phocéens de
« massilia sound system » ou les « Fabulous
troubadors ». « Jean luc sauvaigo servait de
liant dans ce melting pot bouillonnant tout
en restant dans l’ombre » souligne maurice
qui après l’expérience « Nux Vomica » où il
fit des projections sur scène, se mit à s’inté-
resser aux installations et à élargir sa voilure
pour voguer vers d’autres rivages.
Santa Manza : et la nave va !Il a commencé à peindre des barques puis
la mer est venue. le grand bleu - via la mé-
diterranée et l’horizon - a peu à peu envahit
son travail. mais les barques de maubert sont
arrivées d’abord devenant progressivement
organiques, une barcasse mutant en carcas-
se, comme un squelette humain. Parce que
l’un n’avance pas sans l’autre, ne vit pas sans
l’autre. Parce que d’ulysse à Colomb via le pé-
cheur et son pointu, l’homme s’est toujours
nourri de la mer, biologiquement et spirituel-
lement. « la Barque, depuis Dante c’est une
métaphore qui permet de traverser le destin »
rajoute maurice qui avoue être fasciné par
cette invitation houleuse, cette respiration
naturelle. « la voile est née avant la roue. Je
ne suis pas passéiste mais j’aime le cargo,
c’est un voyage lent pour sortir de la rapidité
actuelle, c’est une lecture du temps diffé-
rente de celle que l’on connaît aujourd’hui ».
Alors en 2008, la santa manza accoste à la
Galerie de la marine. une toile de 2,50 mè-
tres, un embarquement pour d’autres sud :
« la santa manza c’est la sainte Génisse, un
nom de cargo inspiré du site corse éponyme
et d’un bateau qui resta longtemps à quai à
Nice, le Capo rosso ». sur ce géant rouillé,
usé par les flots acides, il embarque tel Noé
ou plutôt Fellini dans « et la nave va » son
genre humain, une cosmogonie à la dérive,
un casting à l’encre sur papier. Des sujets
dessinés d’après photos qui sont ensuite as-
semblés, comme un story-board mis en dia-
logue avec la toile. « J’ai des archives où je
puise tous ces personnages en errance issus
du quotidien comme ce colosse slave, vio-
loniste de rue, ou empruntés à la fiction tel
harry Dean stanton dans Paris Texas ». et
puis dans ce voyage « imaginaire en cinémas-
cope » il y a aussi « lo passatgin enigmatico »,
l’autre figure récurrente. on l’a vu en dessins,
sculptures, enfoui sous le sable à Cap d’ail,
à l’arboretum du roure dans les parcours
de « No made » puis face à un taureau/mi-
notaure au cœur d’installations. mais d’ou
vient-il et où va-t-il l’homo maubertus ? « J’ai
toujours été intéressé par la science-fiction.
Cet homme n’appartient pas à la mémoire
du passé mais déjà au futur ! » explique celui
qui peignit un immense olivier éclairé par des
balises d’aéroport. Des racines et des ailes ?
maubert qui exposa peu (par choix) mais sou-
vent dans des lieux liturgiques (monastère de
saorge, madonne d’utell, Chapelle des péni-
tents) serait-il derrière son allure débonnaire
un peintre mystique ? « D’une vie mystique où
l’humain prend le dessus, ce qui apporte un
peu de légèreté, de liberté ! » précise l’artiste
niçois qui depuis le 3 juin vous embarque
dans sa nouvelle odyssée à l’Atelier renato
soardi.
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*les Contes du Vieux-Nice de serge Dotti, - un serat fodrat de Jean-luc sauvaigo, (Z’éditions)
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Que pasa © Courtesy maubert santa manza © Courtesy maubert
l a v i e d e s a r t s l i t t é r a t u r e42
Une véritable immersion qui débu-te lorsqu’alain tombe par hasard sur la correspondance de vincent
et théo son frère : « Je recherchais van Gogh, j'ai rencontré vincent, devenu tout de suite plus proche, un frère, un ami... ». Pourtant au départ rien ne pouvait pré-disposer à une telle confrontation. alain amiel est né sous un soleil de plomb, vin-cent dans ce plat pays où la brume dévore l’horizon. « 120 ans nous séparent, je suis né au Maroc, lui en Hollande, rien ne nous lie, si ce n’est quelque chose de mystique et la passion de l’art et de la psychanalyse. Car van Gogh qui peignait en mode auto-matique avait bien avant Freud une hyper conscience de l’inconscient ».
alain, Vincent, théo et les autresil est d’autres points communs entre l’auteur et son sujet. tous deux ont eu plusieurs vies, plusieurs visages. vincent fut jeune galeriste heureux, apprenti avec Mauve, professeur suppléant, libraire et le peintre que l’on connaît. tous deux sont nés après la mort d’un enfant : « proba-blement j’ai du ressentir l’inquiétude de ma mère à ma naissance et peut-être même avant… Comme vincent, je suis, j’ai toujours été inquiet » avoue alain qui fit des études de psychologie et lança avec la Faculté de Nice la revue de psychana-lyse « alliage » avant d’entamer sa carrière d’éditeur. Un métier qu’il exerça de 1980 à 2000. dans tous les cas les artistes ont joué un rôle déterminant dans sa vie. C’est d’ailleurs au contact de l’avant-garde artis-tique niçoise (Jean Mas, sosno, Ben) qu’il créera avec le sénateur lafitte une asso-ciation afin de promouvoir l’art via le net puis qu’il créera les Éditions Z : 300 livres en 20 ans dont de nombreux catalogues d’artistes. et quand en 2001 il dépose le bilan il sera encore aux cotés du sculpteur sosno en tant qu’assistant. Mais c’est en
Alain Amiel : Dans la peau de Van Gogh !
alain amiel, écrivain, critique d’art et éditeur niçois vient de signer une biographie
aussi complète que singulièrement fouillée sur van Gogh. Un livre qui clôt près de 10 ans de recherche et trois autres ouvrages relatant
la trajectoire du peintre.
vincent van Gogh a débarqué dans ma vie sans préveniraime à dire celui qui depuis dix ans
vit dans la peau du génie hollandais. ©
H. la
gar
de
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concoctant un guide sur l’art qu’il aura le coup de foudre pour un autre créateur aux antipodes des bretteurs de l’École de Nice. « Je suis tombé sur van Gogh. Neuf ans, après j’y suis encore ». Car ce « vincent van Gogh revisité » qu’il vient de signer n’est rien moins que le quatrième ouvrage qu’il consacre au peintre. le pre-mier remonte à 2003 : « À la demande de la Fondation van Gogh en arles, j’ai ré-digé le catalogue publié chez actes sud à l’occasion des 150 ans de la naissance du peintre ». en découvrant que van Gogh avait également travaillé aux saintes Ma-ries de la mer il signe en 2005 un second opus relatant ce séjour. Puis un autre en 2009 sur sa période à auvers-sur-Oise. la dernière pour van Gogh mais pas pour alain amiel.
affaire classée ? Car pour l’auteur sous l’emprise de ce-lui qu’artaud nomma le « suicidé de la société », il reste une ultime étape et pas la moindre ! au printemps 2010 alain pu-blie la somme de ces neuf années d’inves-tigation. Une biographie inédite : « J’avais
déjà lu les lettres publiées dans les an-nées 50, mais récemment est sortie une nouvelle édition augmentée fruit de 15 années de recherche du Musée van Gogh d’amsterdam afin de réunir en 6 volu-mes l’intégralité de sa correspondance ». ainsi « vincent van Gogh revisité » est le premier portait du peintre hollandais ré-digé à la lumière de cette incroyable mine d’informations qu’alain croise avec celles qu’il accumule en suivant l’artiste à la trace « je me suis rendu plusieurs fois à amsterdam. la ville où il fit ses études est devenue une destination quasi annuelle. Je suis allé à Zundert où il est né, puis à Helvoirt, etten, Nuenen, à Cuesmes, dans le Borinage, en angleterre à ramsgate, le port du sud de londres, en Belgique, puis à Paris, arles, saint rémy et auvers… ».
Partout où le peintre est passé, partout où il posa son chevalet, alain enquête, pho-tographie, interroge, visite, observe tout en s’informant, compulsant les archives : « J’ai du lire une trentaine de bios qui lui sont consacrées, plusieurs histoire de l’art, des catalogues, des monographies, des articles, des ouvrages de psychana-lyse, de philosophie. J’ai aussi analysé toutes ses œuvres en les regardant à la loupe ou de visu dans les expositions à Paris, arles, vienne, Bale, amsterdam ». Fort de ce travail de titan et de fourmi, en associant les œuvres du peintre à ce qu’il en dit, en recoupant ensuite avec ce qu’il découvre sur le terrain l’auteur arrive à des déductions subtiles, des révélations inédites et cela malgré la somme considé-rable de publications déjà consacrées au maître. « van Gogh m’a mis au travail ! » dit en souriant alain amiel. On le croit car à la lecture de ce dernier ouvrage on respire avec van Gogh, comme on vit pas à pas avec l’auteur qui de son coté créa son propre journal : « J’ai eu idée de ce site www.vangoghaventure.com afin de compiler mes notes et de faire partager mon enquête jours après jours ». Un site qui affiche aujourd’hui plus d’un million de visites, car au-delà des informations dont l’amateur peut se repaitre on y vit la quête obsessionnelle d’un homme sur les traces d’un autre. Une trame reprise dans l’ouvrage de 230 pages rajoutant du plaisir et de l’intensité à sa lecture.
Car en dépit de son érudition « van Gogh revisité » se dévore comme un roman po-licier « depuis toujours les enquêtes me passionnent, celles que je trouvais dans mes lectures, d’enfants (le club des cinq) puis d’adolescent ; rouletabille, agatha Christie et surtout sherlock Holmes m’ont plus que marqué. » explique alain. Mais au fait qui cherche qui dans cette chasse à l’homme longue de 10 années et sous-titrée « biographie psychologique » ? alain amiel n’aurait-il pas trouvé en van Gogh un alter ego spirituel ? et com-ment ne pas imaginer que cette relation n’outrepasse le cadre littéraire ! alain n’avoue t-il pas lui même dans sa préface « les milliers d’heures passées en sa compagnie ont donné une nouvelle orientation à ma vie ».
Vincent Van Gogh revisité.Vangoghaventure.com
OMNuit étoilée - van Gogh
Ci-contre : rue aux saintes - van Gogh
Ci-dessous :sorrow - van Gogh
Ci-contre : les tournesols - van Gogh
l a v i e d e s a r t s c o n f é r e n c e s44
Permettre au public niçois de rencon-trer et d’écouter de grands noms des médias, tout comme cela peut
se faire si l’on habite à Paris, et amener un public d’actifs au CUM en programmant les conférences à 18 heures : tels étaient les objectifs du CUM avec son nouveau cycle « les rencontres Polémiques du CUM - démocratie et liberté : le rôle des médias ». Objectif atteint puisque cha-que rendez-vous a fait salle comble. À la fois réelle et fantasmée, la puissance du « quatrième pouvoir » dans nos sociétés de communication justifie une mise en demeure citoyenne. tel était le sens de l'initiative du CUM pour 2009 et 2010. l'écrivain denis tillinac, ancien journa-liste, ancien éditeur, chroniqueur et polé-miste dans plusieurs médias, a ainsi reçu chaque mois un journaliste de renom re-présentatif d'un secteur d'activité - presse écrite, radio, télévision, internet - pour un dialogue sans concession : Catherine Nay (le Figaro), Nicolas domenach (Marianne, Canal+), Jean-Jacques Guillebaud (le Monde, reporters sans Frontières), François d’Orcival (valeurs actuelles), alain duhamel (France2, europe1…) et Jean-Paul Kaufmann (France3, ancien otage au liban). Comme une suite logique, le CUM s’est interrogé : dans le tourbillon des événe-ments de l’actualité, comment prendre la distance nécessaire pour réfléchir sur les questions de fond que soulèvent les « ac-cidents » du temps ? au-delà des images télévisées, des journaux, des informations multimédia, le rendez-vous « actu Philo » a été l’occasion de penser, de s’interro-ger sur les grandes questions de société : l’identité, la violence, l’éthique, l’éduca-tion, l’évolution, les changements au sein de la société française, méditerranéenne et européenne. daniel lance, chercheur universitaire et auteur réalisateur, a reçu chaque mois au CUM un spécialis-te, comme Francis Jacques ou Monique Castillo, avec qui il a abordé, à partir de questions d’actualité, les grandes problé-matiques philosophiques qui sous-ten-dent les questions de notre temps.
Nice Saison 2009-2010 Un bon cru pour le CUM
le Centre Universitaire Méditerranéen accueille chaque année des cycles de conférences et diverses
manifestations pour tous les publics. en 2009-2010, des événements exceptionnels s’y sont déroulés, démontrant que Nice est devenue un rendez-
vous incontournable de ceux qui font l’actualité littéraire et culturelle d’une façon générale.
des rencontres inédites ont également été programmées, afin de donner un
sens nouveau à l’activité du CUM.
De gauche à droite et haut en bas : lors du colloque « Passion Kessel », le film « la passe
du diable » de Pierre schoendoerffer a été projeté. eric-emmanuel schmitt est venu présenter son ouvrage
« Concerto à la mémoire d’un ange ». Jean-Paul Kaufmann (France3, ancien otage au liban)
a été l’un des invités reçus par denis tillinac dans le cadre du cycle « les rencontres Polémiques du CUM - démocratie et liberté : le rôle des médias »
Jean-François Colosimo (le Monde des religions, Président du Centre national du livre), a animé une conférence sur le thème « Où va l’iran ? ».
le CUM a souhaité rendre hommage à Joseph Kessel pour le 30e anniversaire de sa mort.
Page de droite : Pendant le Printemps des poètes, les deux troubadours
de lei troubaire de Madelano sont venus présenter l’amour courtois du Moyen age.
(tous crédits photo : CUM)
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Tout en continuitéOutre ces nouveautés, le pro-gramme du CUM s’est inscrit dans la continuité avec, pour la deuxième année, au mois de jan-vier, un cycle consacré à la Préhistoire, sous la direction du Professeur Henry de lumley, sur le thème « les grandes expé-ditions des préhistoriens dans le monde - À la recherche des premiers hommes ».autre grand rendez-vous récurrent : le grand colloque littéraire de fin d’année. il était en 2009 intitulé « Passion Kessel » et organisé en collaboration avec la société civile des auteurs multimédia (scam), qui remet le Prix Joseph Kessel et le Prix albert londres. l’œuvre de Kessel, éteint à plus de 80 ans il y a presque 30 ans, a marqué des générations, tout comme la moder-nité de son parcours. témoin des conflits du XXe siècle, il a su s’engager avec une puissance charnelle qui en fait sa marque de fabrique. À l’aube du XXième siècle, le CUM a souhaité lui rendre hommage. la reconnaissance du talent de cet émigré russe et juif fut à son apogée avec son entrée, en 1964, à l’académie française. amoureux de la Méditerranée, il a souvent séjourné sur le Côte d’azur, avec ses amis niçois raymond Moretti et louis Nucéra. Parmi les manifestations qui ont jalonné ce colloque, deux expositions : « Joseph Kessel, l’éternel voyageur » (exposition du Cercle Bernard lazare retraçant les grandes étapes de sa vie avec notam-ment la présentation de documents iné-dits comme ses cahiers d’écolier du Parc impérial) et « Kessel, le Niçois » (exposi-tion de photographies de raph Gatti). la projection du film « la passe du diable » de Pierre schoendoerffer, présent au col-loque, a été suivie d’une table ronde sur le thème de « Kessel, le grand reporter » puis d’une autre, « Kessel, le Niçois », en présence notamment d’andrée Gatti et de suzanne Nucéra. la table ronde « Kessel, l’Homme » a démarré avec la projection du film « Jeff le lion » de Jacques rutman et fut suivie de deux autres thématiques « Kessel, l’œuvre », et « Kessel, l’homme engagé ». Pour clôturer ce colloque, le public a pu apprécier un concert de musi-que tzigane d’europe centrale des diables tziganes. russe, flamboyant, démesuré, cavalier et cavaleur, buveur de vodka plus joueur que dostoïevski, Joseph Kessel aimait les tziganes, avec qui « il n’était pas possible de rester so-bre », leurs musiques et leurs chansons à la fois poétiques et vio-
lentes. Kes-sel disait
d’eux que « d'étranges
et brûlants démons les ani-
ment ». leurs mélo-dies empruntent rythmes
et paroles aux terres qu'ils traversent en y ajoutant leur style, leur mémoire, et c'est de cette magique alchimie que nait la mu-sique tzigane. les diables tziganes, ou Gypsy devils, est un des groupes mon-tants d’europe centrale. Cet ensemble, formé de musiciens d'origine hongroise, propose un véritable voyage musical dans l’empire austro-hongrois, de Bratis-lava à Budapest en passant par vienne.autre colloque qui a remporté un vif succès : « tocqueville et l’individualisme contemporain : comparaisons intercultu-relles » (colloque de la société tocqueville).
nouvelles formes d’expressionÀ l’occasion de l’édition 2010 du Prin-temps des poètes, le CUM a décidé de jouer la carte de l’originalité en choisis-sant d’illustrer le thème national Couleur Femme lors de rendez-vous où les textes poétiques côtoyaient différents univers musicaux. Comme en 2009, le CUM a profité également de l’événement pour se tourner vers la Méditerranée (Kenzy dib) et vers d’autres cultures (la Perse). Pour la Journée de la Femme, le CUM a organisé un après-midi poétique dédié aux femmes (avec les élèves comédiens du Conser-vatoire Pierre Cochereau). Un spectacle (textes et musique) autour de « Cocteau, le confident des femmes » a également été proposé : un voyage jazzy au travers de l’univers de ce merveilleux aventurier touche-à-tout : sa conception de la poésie, le regard critique porté sur son œuvre et celle d’autrui, son hommage aux grandes dames de la chanson et son amour pour la Côte d’azur. autres voyages que celui de « shéhérazade et les mille et une nuits », avec une lecture de textes et un accom-pagnement musical de tradition persane, ou celui de lei troubaire de Madelano, deux troubadours au cœur de l’amour courtois du Moyen age. le CUM a fait le grand écart en s’intéressant ensuite à une nouvelle forme d’expression en proposant
un après-midi de découverte du slam. enfin, le prix alain le-
feuvre a été remis au poète algérien Kenzy dib pour
son recueil de poésies « au sud de nos nuits magnétiques ».
autres rendez-vous récurrents du CUM, les grandes conférences : cette institution suit en effet de près l’actualité littéraire, et de nombreux auteurs viennent y présenter leurs nouveaux ouvrages ou des théma-tiques faisant sens. Quelques exemples : « Zéro faute, l’orthographe une passion française » par François de Closets ; « so-crate, Jésus ou Bouddha ou l’humanisme spirituel » par Fréderic lenoir ; « Concerto à la mémoire d’un ange » par eric-emmanuel schmitt ; « de Wall street aux Quartiers Nord de Marseille, le trader devenu moine des cités » par Henry Quinson ; « les en-fants du miracle » par Odon vallet ou en-core « Nietzsche à Nice », table ronde avec Patrick Mauriès, renaud denuit et Yves séméria, animée par eric Bénier-Bürckel.
regards sur la Méditerranéela Méditerranée reste un des thèmes ma-jeurs autour desquels s’articulent les ren-dez-vous du CUM et sur lequel ce dernier porte un regard particulier. ainsi, de nom-breux intervenants ont abordé le sujet : « Où va l’iran ? » par Jean-François Colo-simo (le Monde des religions, Président du Centre national du livre) ; « Fouilles en lybie : apollonia de Cyrénaïque » par Jean-Marie Blas de roblès (Prix Médicis) ; « alexandrie, sous terre et sous mer » par Jean-Yves empereur, le découvreur du pha-re d’alexandrie, sans oublier les « rencon-tres Méditerranéennes du CUM », dont la 2e édition a eu lieu en 2009. Permettent à Nice de s'inscrire comme un lieu privilégié de la connaissance et du dialogue entre tous les peuples du bassin méditerranéen, ces rencontres ont proposé un débat sur le thème des « Fondements culturels du monde méditerranéen », mené par le phi-losophe Jean-François Mattéi, le géopoliti-cien Mezri Haddad et le démographe Gé-rard-François dumont.enfin, événement incontournable de cette année 2010, le 150e anniversaire du ratta-chement de Nice à la France, que le CUM a choisi de traiter par des conférences. Pour le CUM, il ne s’agit pas seulement d’évoquer les événements qui ont conduit le Comté de Nice à quitter le royaume du Piémont-sardaigne de victor-emmanuel ii pour rejoindre la France de Napoléon iii, mais surtout de rappeler l’ensemble des contributions de Nice au pays des droits de l’Homme. des conférences complétées par un colloque sur « 250 ans de présence britannique sur la riviera (1760-1960) et un cycle sur les peintres : Berthe Moristo, Matisse et l’École de Nice.
conTacT
CUM65, Promenade des Anglais
NiceTél. : 04 97 13 46 10
www.cum-nice.org
fs
11 RUE CLÉMENT BEL, 06220 VALLAURIS, FRANCE - Tél. 04 93 95 14 63 - E-mail : [email protected] - www.monsite.orange.fr/galcha
G a l e r i e d u C h â t e a u
Un emplacement exceptionnel au cœur de Vallauris, sur la place de l’Homme au Mouton.
Artistes exposés Yves Brayer,Roland Oudot,Maurice Brianchon,
Francis Gruber, Eugène Baboulène,François Eberl,Pinchus Kremegne,Eduard Wiiralt,Albert Decaris,
Erik Desmazieres,Gerard Trignac, Philippe Mohlitz.
Tableaux et livres anciens et modernesEcole de Paris.Le Réalisme poétique
La gravure française du XVIIIème à nos joursMobilier français du XVIIIème (Louis XV et Louis XVI)
Evènements culturelsExpositions
Jack
L’OFFICE DE TOURISME D’ANTIBES JUAN-LES-PINS & L’EDEN CASINOprésentent
MarcusDee Dee Manu
Keith Gary
14 juillet - 20h30JIM'S BandJazz à Juan SEXTETNJO - Nice Jazz Orchestra15 juillet - 20h30David SANBORNGeorge BENSON
16 juillet - 20h30SPOKFREVO OrquestraMonty ALEXANDER & Harlem Kingston ExpressChucho VALDES & the Afro Cuban Messengers
17 juillet - 20h30Dee Dee BRIDGEWATER - Melody GARDOT 18 juillet - 20h30Hommage à Django Reinhardt"Le Manoir de mes rêves" avec la fine fleur du Jazz Manouche
Angelo DEBARRE invite : Didier LOCKWOOD, David REINHARDT,Dorado SCHMITT, Rocky GRESSET, Stéphane SANSEVERINO...
19 juillet - 20h30 Avishai COHEN - Paco DE LUCIA
20 juillet - 20h30Roy HARGROVE QUINTETJoshua REDMAN DOUBLE TRIO
21 juillet - 21hKeith JARRETT,Gary PEACOCK & Jack DeJOHNETTE
22 juillet - 20h30Kyle EASTWOOD - Diana KRALL
23 juillet - 20h30BLACK DUB (Daniel LANOIS)BROOKLYN FUNK ESSENTIALS - Maceo PARKER
24 juillet - 21hManu KATCHEMarcus MILLER+ ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE MONTE CARLO+ GUESTS : Raul MIDON & Lalah HATHAWAY
25 juillet - 20h30OC BROTHERSSoirée Gospel : Liz MAC COMB Célébration Œcuménique
RÉSERVATIONS : www.jazzajuan.com - www.antibesjuanlespins.comRENSEIGNEMENTS : 04 97 23 11 11 / 04 97 23 11 10
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www.e
ditions-roula
nd.com
P A R T E N A I R E O F F I C I E L côted’azur
ENTRÉE
SUR INVITATION
ENTRÉE LIBRE
JAZZ-22X28:Mise en page 1 20/05/10 10:27 Page1
À NICEles musées s’exposent
Musée d’Art moderne
et d’Art contemporain
Musée Masséna
Palais Lascaris
Musée des Beaux-Arts
Théâtre de la Photographie
et de l'Image
Musée de Paléontologie Humaine
de Terra Amata
Musée et site archéologiques
Nice-Cemenelum
Musée Matisse
Musée international d'Art
Naïf Anatole Jakovsky
Muséum d'Histoire Naturelle
Vue de l’installation Reflection - A gift from Iwaki auMusée Guggenheim de Bilbao, 2009 photo de I-Hua Lee /Courtesy Cai Studio Cabanel, Madame Von Derwies Unerésidence impériale à Nice, élévation générale côté Sud -détail (Coll. ENSBA, Paris) Le Musée des Beaux-Arts faitpeau neuve, photo Ville de Nice Nancy Wilson-Pajic, de lasérie Falling Angels, 1997 Crâne, 162 (XII-95), techniquemixte, sur papier - Henri Maccheroni Préfiguration Memoriae Aeternae, offrande funéraire © Pierre-Yves Videlier, atelier scène de papier Lydia Delectorskaya vers1946 Coll. musée départemental Matisse, Le Cateau-Cambrésisphoto Rolando Ricci, DR Jean Joseph Sanfourche (détail) exposition Le Pluriel des Singuliers au Musée Jakovsky
Manifestation organisée dans le cadre de l’Année France-Russie 2010www.france-russie2010.fr
Avec le parrainage d'Artematica