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Objectifs nationaux rédigés par les membres de la collégiale des universitaires en Hépato-Gastroentérologie - Version 2006 8. Urgences 8.1. Hémorragies digestives 8.1.1. Connaître les modes de révélation clinique dune hémorragie digestive Une hématémèse est une hémorragie extériorisée par vomissement. Elle est le signe d’une hémorragie d’origine haute, c'est à dire en amont de l'angle duodéno-jéjunal. Elle est presque toujours suivie de méléna. Une hémorragie haute peut ne s’extérioriser que par un méléna. Un méléna est l’émission par l’anus de sang digéré noir et fétide. L’origine de l’hémorragie est généralement située en amont de l’angle colique droit. Une rectorragie est l’émission par l’anus de sang rouge non digéré. Elle est le signe d’une hémorragie basse. Cependant, en cas d’hémorragie haute très abondante, le sang émis par l’anus peut être rouge. Les hémorragies «occultes» (sans extériorisation visible) qui ne se traduisent que par une anémie ferriprive ne sont pas envisagées dans ce chapitre. Elles résultent très souvent d’une hémorragie digestive de faible abondance et au long cours, gastro-duodénale ou colique, dont la seule urgence est celle du diagnostic causal. 8.1.2. Connaître les causes les plus fréquentes des hémorragies digestives Les causes les plus fréquentes des hémorragies digestives hautes sont les ulcères gastro-duodénaux, la rupture de varices œsophagiennes dues à l’hypertension portale d’origine cirrhotique et les érosions gastriques aiguës, en général médicamenteuses. Les causes les plus fréquentes des hémorragies digestives basses sont les hémorroïdes et les tumeurs rectocoliques. La responsabilité des hémorroïdes ne peut être retenue qu'après avoir éliminé une autre cause d'hémorragie. Dans le détail, les causes des hémorragies digestives peuvent être énumérées de haut en bas du tube digestif. En fonction de l’organe les causes sont les suivantes: – œsophage: rupture de varices œsophagiennes, syndrome de Mallory-Weiss, œsophagites et, très rarement cancer ; – estomac: ulcère, érosions ou ulcérations gastriques médicamenteuses (aspirine, antiinflammatoires non stéroïdiens), cancer, érosions gastriques aiguës sans cause apparente, varices gastriques et gastropathie de l’hypertension portale, ulcère du collet des hernies hiatales ; – duodénum: ulcère, hémobilie et wirsungorragie (très rares) ; – grêle: diverticule de Meckel, diverticules du grêle (très rare), tumeurs (très rares) , angiodysplasie , ulcérations (AINS) et maladie de Rendu-Osler (très rare sauf dans un contexte familial évocateur) ; – côlon, rectum et anus: hémorroïde, diverticulose colique, angiodysplasie colique, tumeurs colorectales bénignes ou malignes, ulcération rectale thermométrique, rectocolite hémorragique, colite ischémique, rectite radique. 8.1.3. Connaître les mesures à prendre en urgence pour assurer la sécurité vitale du malade En dehors du cas des rectorragies de petite abondance, tout sujet ayant une hémorragie digestive, si minime soit elle, doit être hospitalisé. La mesure du pouls et de la tension artérielle doit être faite immédiatement et répétée, accompagnée de la recherche de signes de choc hémorragique. La mise en place d’une bonne voie d’abord doit également être faite en urgence, dès l’arrivée du malade. Une sonde naso-gastrique doit être mise en place. Le contenu gastrique qu’elle permet d’aspirer peut avoir trois aspects: sang pur, liquide contenant des débris marrons de «vieux» sang (marc de café), liquide gastrique clair. Si c’est du sang pur, il s’agit bien d’une hémorragie digestive haute et elle est encore active. S’il s’agit de «vieux» sang, il y a bien eu une hémorragie digestive haute, mais celle-ci est arrêtée depuis quelques temps, le malade ne saigne plus. La sonde gastrique peut alors être utilisée pour évacuer l’estomac et préparer l’endoscopie haute. Cette sonde n’est pas destinée à rester en place. Si le liquide est clair, soit il ne s’agissait pas d’une hémorragie digestive haute, soit l’hémorragie s’est arrêtée et le sang est passé dans l’intestin. Le méléna qui suivra authentifiera l’hémorragie digestive. Cependant, l'absence de sang lors de la mise en place de la sonde gastrique ne permet pas d'éliminer complètement une hémorragie active d'origine duodénale. On doit demander en urgence une numération formule sanguine, la détermination du groupe sanguin en même temps que l’on recherche la cause en tenant compte du contexte: antécédents pathologiques digestifs, prises d’antiinflammatoires non stéroïdiens ou d’anticoagulants. La compensation de l’hémorragie n’est indiquée qu’en cas de retentissement hémodynamique. Elle se fait avec des culots globulaires si besoin précédés par des macromolécules. La quantité et la durée de cette compensation sont fonction des signes cliniques de surveillance: il faut obtenir une fréquence cardiaque inférieure à 100 battements par minute, une pression artérielle systolique supérieure à 100 mmHg, une diurèse supérieure à 30 ml/h et une hémoglobine supérieure à 8 g/dl. La compensation est fonction de la persistance ou de l’arrêt des signes d’hémorragie et de l’âge du malade. Plus le malade est âgé, plus précoce et lente (prudente) doit être la compensation. Une endoscopie haute et/ou basse doit être réalisée en urgence devant toute hémorragie digestive extériorisée, dés que l’état hémodynamique du malade est stabilisé. L’endoscopie permet le diagnostic lésionnel précis et, la plupart du temps, de réaliser un geste d’hémostase (sclérose, pose de clip). En cas d’hémorragie incontrôlable, il peut être nécessaire d’opérer en urgence le malade. Cette éventualité est de plus en plus rare. La poursuite ou la récidive de l'hémorragie malgré les traitements médicaux ou endoscopiques entrepris peut également conduire à l'intervention chirurgicale. De manière générale la décision est fonction du débit de sang transfusé (la limite supérieure tolérable peut être chiffrée entre six et

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Objectifs nationaux rédigés par les membres de la collégiale des universitaires en Hépato-Gastroentérologie - Version 2006

8. Urgences

8.1. Hémorragies digestives

8.1.1. Connaître les modes de révélation clinique d’une hémorragie digestive

Une hématémèse est une hémorragie extériorisée par  vomissement. Elle est le signe d’une hémorragie d’origine haute, c'est à dire en amont de l'angle duodéno-jéjunal. Elle est presque toujours suivie de méléna. Une hémorragie haute peut ne s’extérioriser que par un méléna. Un méléna est l’émission par l’anus de sang digéré noir et fétide. L’origine de l’hémorragie est généralement située en amont de l’angle colique droit. Une rectorragie est l’émission par l’anus de sang rouge non digéré. Elle est le signe d’une hémorragie basse. Cependant, en cas d’hémorragie haute très abondante, le sang émis par l’anus peut être rouge. Les hémorragies «occultes» (sans extériorisation visible) qui ne se traduisent que par une anémie ferriprive ne sont pas envisagées dans ce chapitre. Elles résultent très souvent d’une hémorragie digestive de faible abondance et au long cours, gastro-duodénale ou colique, dont la seule urgence est celle du diagnostic causal.

8.1.2. Connaître les causes les plus fréquentes des hémorragies digestives

Les causes les plus fréquentes des hémorragies digestives hautes sont les ulcères gastro-duodénaux, la rupture de varices œsophagiennes dues à l’hypertension portale d’origine cirrhotique et les érosions gastriques aiguës, en général médicamenteuses. Les causes les plus fréquentes des hémorragies digestives basses sont les hémorroïdes et les tumeurs rectocoliques. La responsabilité des  hémorroïdes ne peut être retenue qu'après avoir éliminé une autre cause d'hémorragie. Dans le détail, les causes des hémorragies digestives peuvent être énumérées de haut en bas du tube digestif. En fonction de l’organe les causes sont les suivantes: – œsophage: rupture de varices œsophagiennes, syndrome de Mallory-Weiss, œsophagites et, très rarement cancer ; – estomac: ulcère, érosions ou ulcérations gastriques médicamenteuses (aspirine, antiinflammatoires non stéroïdiens), cancer, érosions gastriques aiguës sans cause apparente, varices gastriques et gastropathie de l’hypertension portale, ulcère du collet des hernies hiatales ; – duodénum: ulcère, hémobilie et wirsungorragie (très rares) ; – grêle: diverticule de Meckel, diverticules du grêle (très rare), tumeurs (très rares) , angiodysplasie , ulcérations (AINS) et maladie de Rendu-Osler (très rare sauf dans un contexte familial évocateur) ; – côlon, rectum et anus: hémorroïde, diverticulose colique, angiodysplasie colique, tumeurs colorectales bénignes ou malignes, ulcération rectale thermométrique, rectocolite hémorragique, colite ischémique, rectite radique.

8.1.3. Connaître les mesures à prendre en urgence pour assurer la sécurité vitale du malade

En dehors du cas des rectorragies de petite abondance, tout sujet ayant une hémorragie digestive, si minime soit elle, doit être hospitalisé. La mesure du pouls et de la tension artérielle doit être faite immédiatement et répétée, accompagnée de la recherche de signes de choc hémorragique. La mise en place d’une bonne voie d’abord doit également être faite en urgence, dès l’arrivée du malade. Une sonde naso-gastrique doit être mise en place. Le contenu gastrique qu’elle permet d’aspirer peut avoir trois aspects: sang pur, liquide contenant des débris marrons de «vieux» sang (marc de café), liquide gastrique clair.  Si c’est du sang pur, il s’agit bien d’une hémorragie digestive haute et elle est encore active. S’il s’agit de «vieux» sang, il y a bien eu une hémorragie digestive haute, mais celle-ci est arrêtée depuis quelques temps, le malade ne saigne plus. La sonde gastrique peut alors être utilisée pour évacuer l’estomac et préparer l’endoscopie haute. Cette sonde n’est pas destinée à rester en place. Si le liquide est clair, soit il ne s’agissait pas d’une hémorragie digestive haute, soit l’hémorragie s’est arrêtée et le sang est passé dans l’intestin. Le méléna qui suivra authentifiera l’hémorragie digestive. Cependant, l'absence de sang lors de la mise en place de la sonde gastrique ne permet pas d'éliminer complètement une hémorragie active d'origine duodénale. On doit demander en urgence une numération formule sanguine, la détermination du groupe sanguin en même temps que l’on recherche la cause en tenant compte du contexte: antécédents pathologiques digestifs, prises d’antiinflammatoires non stéroïdiens ou d’anticoagulants.   La compensation de l’hémorragie n’est indiquée qu’en cas de retentissement hémodynamique. Elle se fait avec des culots globulaires si besoin précédés par des macromolécules. La quantité et la durée de cette compensation sont fonction des signes cliniques de surveillance: il faut obtenir une fréquence cardiaque inférieure à 100 battements par minute, une pression artérielle systolique supérieure à 100 mmHg, une diurèse supérieure à 30 ml/h et une hémoglobine supérieure à 8 g/dl. La compensation est fonction de la persistance ou de l’arrêt des signes d’hémorragie et de l’âge du malade. Plus le malade est âgé, plus précoce et lente (prudente) doit être la compensation. Une endoscopie haute et/ou basse doit être réalisée en urgence devant toute hémorragie digestive extériorisée, dés que l’état hémodynamique du malade est stabilisé. L’endoscopie permet le diagnostic lésionnel précis et, la plupart du temps, de réaliser un geste d’hémostase (sclérose, pose de clip). En cas d’hémorragie incontrôlable, il peut être nécessaire d’opérer en urgence le malade. Cette éventualité est de plus en plus rare. La poursuite ou la récidive de l'hémorragie malgré les traitements médicaux ou endoscopiques entrepris peut également conduire à l'intervention chirurgicale. De manière générale la décision est fonction du débit de sang transfusé (la limite supérieure tolérable peut être chiffrée entre six et

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huit culots globulaire en 24 heures) et des facteurs de risque. L’âge est un facteur de risque clairement identifié.  

8.1.4. Connaître les principaux critères cliniques utiles et les explorations à mettre en œuvre en urgence pour préciser la lésion responsable

Si l’on connaît ou évoque le diagnostic de cirrhose (alcoolisme, ascite, ictère, astérixis), la rupture de varices œsophagiennes est la plus probable. En cas d’antécédents de douleurs épigastriques il faut penser à une hémorragie due à un ulcère. La prise d’antiinflammatoires non stéroïdiens doit être systématiquement cherchée. Des vomissements précédant l’hématémèse évoquent un syndrome de Mallory-Weiss (déchirure de la muqueuse du bas œsophage et du cardia, consécutive aux vomissements). La maladie de Rendu-Osler est très rare et s’accompagne d’angiomes buccaux. Des explorations en urgence sont nécessaires pour préciser la lésion responsable de l’hémorragie digestive. En cas d’hématémèse ou de méléna, c’est l’endoscopie digestive œso-gastro-duodénale, à condition qu’elle soit faite rapidement chez un malade dont l’équilibre hémodynamique est assuré. En cas de rectorragie abondante, il faut commencer par un toucher rectal et une anuscopie pour éliminer une cause proctologique ou rectale basse. En leur absence, il faut faire une endoscopie haute en urgence et, si elle est normale, une coloscopie après lavage colique. Si ces examens ne sont pas contributifs et que l'hémorragie persiste avec un débit supérieur à 0,5 ou 1ml/min, il faut discuter l’indication d’une artériographie digestive avec cathétérisme global puis sélectif des artères mésentériques supérieure et inférieure, qui peut être complétée par un geste d'embolisation. En cas de rectorragie peu abondante, une coloscopie peut être faite dans les jours qui suivent après une préparation correcte. En l’absence de cause trouvée dans le tractus digestif haut (œsophage, estomac, duodénum) et bas (côlon, rectum), une exploration de l’intestin grêle doit être réalisée par enteroscanner. L’intérêt de l’examen par la capsule vidéo-endoscopique reste à évaluer. Certaines hémorragies digestives restent sans explication, même après les explorations habituelles.

8.1.5. Connaître les principales mesures thérapeutiques utiles au traitement du saignement et de la lésion causale

Les mesures non spécifiques sont la prise d’une voie veineuse, le remplissage adapté à l’hémodynamique, la transfusion si nécessaire. Selon le contexte, une hospitalisation en réanimation peut être nécessaire. Il existe des mesures spécifiques.   1) Erosions gastriques aiguës: inhibiteur de la pompe à protons par voie orale ou intraveineuse selon le contexte. Il faut surtout s’efforcer de trouver et traiter la cause. 2) Ulcère gastro-duodénal: en cas d’hémorragie active, un geste d’hémostase endoscopique doit être fait (injection d’adrénaline, coagulation, pose de clip). La chirurgie n’est indiquée qu’en cas d’hémorragie digestive aiguë persistante ou récidivante, particulièrement en cas d’ulcère duodénal, dont celui de la face postérieure qui peut s’ouvrir dans l’artère gastro-duodénale. 3) Hypertension portale: le traitement des varices œsophagiennes est endoscopique (sclérothérapie ou ligature). On utilise aussi les agents vasoactifs par voie veineuse et, beaucoup plus rarement, le tamponnement par sonde hémostatique laissée en place au maximum 24 heures. La mise en place d’un shunt porto-systémique par voie transjugulaire ou une intervention peuvent être indiquées, en cas d’échec du traitement précédent ou en cas de récidive précoce.

8.2. Occlusions intestinales aiguës

8.2.1. Savoir définir une occlusion intestinale aiguë

On appelle occlusion intestinale aiguë toute interruption du transit intestinal normal.  Quel que soit son niveau, l’occlusion intestinale aiguë associe de façon variée des douleurs abdominales, des vomissements, un arrêt des matières et des gaz et un météorisme abdominal.

8.2.2. Savoir différencier les causes mécaniques et fonctionnelles des occlusions et appliquer cette connaissance à la période postopératoire

La cause de l’occlusion peut être mécanique, par obstacle sur le grêle ou le côlon. Cet obstacle peut être pariétal (par exemple un cancer colique), intraluminal (par exemple un fécalome ou, beaucoup plus rarement, un iléus biliaire) ou extraluminal (par exemple une bride postopératoire). La cause de l’occlusion peut être fonctionnelle, sans obstacle matérialisé. C’est l’iléus «paralytique». Le péristaltisme intestinal s’arrête au contact d’un foyer infectieux (par exemple, une appendicite ou une péritonite) ou inflammatoire (par exemple, une pancréatite aiguë). La cause peut aussi être un épanchement de sang intrapéritonéal ou rétro-péritonéal (par exemple, après une fracture du bassin) ou un épisode douloureux intrapéritonéal ou rétropéritonéal (par exemple, une colique hépatique ou une colique néphrétique). Certaines occlusions peuvent être iatrogènes (morphiniques, hypokaliémie induite par les diurétiques, neuroleptiques) ou métaboliques (calcium, potassium). Toute intervention chirurgicale avec ouverture de la cavité péritonéale peut se compliquer secondairement d' une occlusion. Précoce, dans les premiers jours postopératoires, elle peut être due à une infection intrapéritonéale, un épanchement sanguin intrapéritonéal ou rétropéritonéal ou à des adhérences intestinales. Tardive, dans les mois ou les années qui suivent l’intervention, elle est essentiellement liée à des adhérences intestinales,ou  des brides intrapéritonéales. C’est la circonstance d’occlusion intestinale aiguë la plus fréquente. Après une intervention pour cancer digestif, l'occlusion peut aussi être causée par une carcinose péritonéale.

8.2.3. Connaître les différences physiopathologiques entre l’obstacle simple et l’étranglement

En cas d’obstacle simple, l’intestin d’amont se remplit: – de liquides de sécrétions digestives non résorbées: salive, suc gastrique, bile, suc pancréatique et sécrétion intestinale ;

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– de gaz. Cette zone de stagnation constitue un troisième secteur et elle est le siège d’une pullulation microbienne. En cas d'occlusion colique, si la valvule  de Bauhin est continente et empêche le reflux du contenu colique dans l'iléon, il y a un risque de  perforation diastatique du côlon d'amont et plus particulièrement du cæcum. Dans certains cas, l’occlusion est due à l’étranglement d’une anse par volvulus ou par incarcération dans un orifice étroit (hernie). La vascularisation de l’anse est immédiatement entravée et l’anse risque de se nécroser, d’où l’urgence du diagnostic et de l’intervention.

8.2.4. Connaître les aspects cliniques, radiologiques et biologiques des occlusions et leur type habituel aux différents niveaux du tube digestif

8.2.4.1. Occlusion du grêle par obstruction Type: l’occlusion sur bride (Fig. 1, 2 , 3) Les signes fonctionnels sont des douleurs rapidement progressives à type de coliques (douleur de lutte), vomissements plus ou moins abondants (et souvent précoces). L’arrêt des matières et des gaz est parfois retardé.

l Les signes généraux sont soit peu marqués, soit en rapport avec la déshydratation (pouls accéléré, pression artérielle basse, faciès altéré).

l Les signes physiques sont: à l’inspection, un ventre plat ou un ballonnement médian, des ondulations péristaltiques, et très souvent la présence d’une cicatrice de laparotomie traduisant une intervention ancienne. Il existe parfois, à la palpation, un point douloureux électif en regard de l’obstacle et, à la percussion, un tympanisme médian. On peut entendre, à l’auscultation, des bruits de lutte intestinale. Le toucher rectal est normal.

l Les signes biologiques peuvent témoigner d’une déshydratation (hémoconcentration, insuffisance rénale).

l L'ASP de face, debout et couché, objective un estomac plein avec un grand niveau liquide, un grêle distendu, des niveaux hydroaériques centraux, et l'absence de gaz dans le côlon qui n’est pas visible. Si le diagnostic n’est pas évident, on peut répéter les clichés au bout de quelques heures, ou surtout s'aider d'un scanner qui est le meilleur examen. Il montre la distension du grêle d'amont et souvent la jonction entre le grêle plat et le grêle dilaté qui signe le niveau de l'obstacle. Dans les cas d'occlusion incomplète ou sans signe de souffrance intestinale, on peut s'aider aider d’un transit opaque aux hydrosolubles qui objective la distension du grêle, indique le siège de l’arrêt, et peut aussi participer à la levée de l'occlusion.

Figure 1 : Occlusions intestinales aiguës

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Cas particulier, l’iléus biliaire C ’est une occlusion due au passage dans l’intestin grêle, rarement dans le côlon, d’un calcul vésiculaire à travers une fistule cholécysto-duodénale ou cholécysto-colique. Survenant habituellement chez une femme âgée, cette occlusion évolue par poussées dues au déplacement du calcul. L’examen radiologique de l’abdomen sans préparation peut découvrir le calcul biliaire radio-opaque siégeant en dehors de l’aire de projection des voies biliaires. Le signe le plus caractéristique est la présence d’air dans les voies biliaires sur le cliché debout (aérobilie).

8.2.4.2. Occlusion du grêle par strangulation Type: volvulus partiel du grêle due à une bride

l Les signes fonctionnels sont une douleur abdominale brutale et violente, fixe dans son siège et son intensité (douleur d’ischémie), des vomissements abondants et un arrêt des matières et des gaz.

l Les signes généraux sont un état général rapidement altéré et une fièvre possible. l Les signes physiques dépendent de la longueur de l’anse volvulée et de la durée de l’ischémie. On

trouve à la palpation un ballonnement localisé avec un point douloureux précis au pied de l’anse et parfois une défense et, à l’auscultation, un silence localisé au siège de l’anse. Il peut aussi exister des bruits en rapport avec la lutte du péristaltisme intestinal. Le toucher rectal est normal.

l On cherche des signes biologiques de déshydratation. l Le cliché d’abdomen sans préparation révèle l’anse intestinale, plus ou moins distendue et un ou deux

niveaux hydroaériques. En amont de celle-ci, le grêle et l’estomac sont plus ou moins distendus. Le côlon n’est pas visible. Si un scanner peut être réalisé en urgence, il montre la distension du  grêle d'amont , le grêle d'aval et le côlon qui sont plats, et la jonction grêle distendu grêle plat.

Autres exemples Hernie (crurale, inguinale, ombilicale) ou éventration étranglée: la hernie ou l’éventration se modifie,

Figure 2 : Sémiologie et explorations gastroduodénales

Figure 3 : Occlusions intestinales aiguës

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devient irréductible, non impulsive à la toux, douloureuse surtout au collet. La hernie peut ne pas être douloureuse, c’est pourquoi il faut toujours examiner les orifices herniaires chez un sujet en occlusion.

8.2.4.3. Occlusion colique par obstruction (Fig.4-5-6-7)

Type: cancer du côlon gauche (Fig. 6 - 7)

Figure 4 : Occlusions intestinales aiguës

Figure 5 : Occlusions intestinales aiguës

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l Les signes fonctionnels sont une douleur progressive à type de colique. Les vomissemnts, quand ils existent, sont retardés, et peuvent être fécaloïdes si l’occlusion se prolonge. L’arrêt des gaz est précoce.

l L’état général est peu altéré. l Les signes physiques sont caractéristiques. On trouve, à l’inspection, un météorisme initialement

périphérique, puis global. La palpation, une masse dans la fosse iliaque gauche, due au cancer et aux matières fécales impactées sur l’obstacle, est exceptionnelle. Il existe, à l’auscultation, des bruits de lutte. Le toucher rectal est normal ou permet (rarement) la perception d’un cancer du sigmoïde prolabé dans le cul-de-sac de Douglas.

l La biologie est initialement peu perturbée. l Le cliché d’abdomen sans préparation montre une dilatation colique périphérique avec des niveaux

hydroaériques dans les flancs. Le grêle est modérément dilaté au début. l Le lavement opaque met en évidence un arrêt du produit de contraste sur la tumeur. Ce lavement doit

être fait sous faible pression, préférentiellement avec un produit de contraste hydrosoluble, à cause du risque de perforation. Le scanner  avec opacification colique (coloscanner) remplace avantageusement le lavement opaque lorsqu'il  est disponible en urgence. Il montre l'obstacle et permet un bilan d'extension, à la recherche notamment de métastases hépatiques.

l La coloscopie est contre indiquée à ce stade.

La sigmoïdite diverticulaire (figure 8 ci-dessous)(Voir 4.6.) peut aussi mais de manière beaucoup plus rare, se compliquer d'une occlusion colique, qui est le plus souvent incomplète.  

Figure 6 : Occlusions intestinales aiguës

Figure 7 : Occlusions intestinales aiguës

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8.2.4.4. Occlusion colique par strangulation Type: volvulus du côlon sigmoïde

l Les signes fonctionnels sont une douleur de la fosse iliaque gauche qui se différencie d’éventuelles crises antérieures par son intensité et sa durée. Il y a peu de vomissements. L’arrêt des matières et des gaz est immédiat.

l Les signes généraux sont modérés chez ce sujet en général âgé. l A l’examen physique, on trouve un ballonnement rapidement monstrueux, asymétrique, en diagonale

oblique en haut et à gauche. L’anse colique distendue est inerte, tympanique et silencieuse. Au toucher rectal, l’ampoule rectale est vide.

l Il n’y a pas d’anomalie biologique. l Le cliché d’abdomen sans préparation montre  l’anse colique volvulée, monstrueuse et dilatée, avec un

ou deux grands niveaux liquides , et la distension colique d'amont. l Au lavement opaque, l'arrêt se situe à la charnière recto sigmoïdienne avec une image d'arrêt en cône

ou en bec d'oiseau. Parfois, un peu de liquide filtre à travers l’obstacle, se diluant dans le liquide de stase dans l’anse volvulée. Il peut même arriver que le lavement détorde le volvulus, entraînant une  débacle de selles liquides et de gaz. Ce lavement doit être fait sous faible pression avec un produit de contraste hydrosoluble, lorsqu’on craint une perforation.

8.2.4.5. Iléus paralytique Type: l’iléus généralisé

l Les signes fonctionnels sont une douleur abdominale diffuse (en général moins intense que celle des occlusions mécaniques), continue ou par crampes, des vomissements et un arrêt des matières et des gaz.

l Les signes généraux sont ceux de l’affection causale, par exemple, graves en cas de pancréatite aiguë nécrotique et minimes en cas de colique néphrétique.

l Les signes physiques sont un ballonnement diffus avec un silence à l’auscultation. l Les signes biologiques sont ceux de l’affection causale. l Sur l'ASP, il existe une distension diffuse à la fois du grêle et du côlon, avec beaucoup d’air et peu de

liquide.

Cas particulier: le syndrome d’Ogilvie Il s’agit d’une pseudo-obstruction colique. C’est une distension gazeuse aiguë du côlon. Il peut survenir après un traumatisme de l’abdomen ou du rachis ou en cas d’insuffisance respiratoire. Il peut être favorisé par la prise de neuroleptiques. L'ASP et le scanner montrent un côlon distendu sur toute sa longueur, sans obstacle.

8.2.5. Connaître les mesures médicales, chirurgicales ou instrumentales à mettre en œuvre dans une occlusion intestinale aiguë

Traitement médical Il comporte la mise au repos du tube digestif, la pose d’une sonde d’aspiration gastrique et  la correction des troubles hydroélectrolytiques. Ce traitement peut suffire en cas d’iléus paralytique.   Traitement chirurgical S’il y a strangulation, il faut lever l’obstacle en urgence et traiter l’anse étranglée en fonction de sa vitalité.  S’il y a obstruction, il faut lever l’obstacle.  En cas d'occlusion colique par cancer, la préparation du côlon avant l'intervention n'est pas possible et plusieurs options sont possibles :  -  stratégie en plusieurs temps, avec d'abord une colostomie de proche amont puis la résection de la tumeur

Figure 8 : Péritonites

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10 à 15 jours plus tard, une fois l'occlusion levée. -  stratégie en un temps, avec soit une colectomie totale avec d'une anastomose iléo-rectale qui a l'avantage de traiter d'éventuelles lésions synchrones du côlon d'amont, soit colectomie segementaire avec lavage du côlon en per opératoire pour  le vider de son contenu avant de faire l'anastomose. Ces deux techniques ne sont réalisables que chez des patients encore en bon état général.  - Il est également possible de lever l'occlusion en mettant en place par voie endoscopique ou radiologique une prothèse colique à travers la tumeur. Cette option est très intéressante en situation palliative car elle permet d'éviter un geste lourd ou une colostomie à ces patients dont l'espérance de vie est courte.   Traitement instrumental Il a quelques indications. Il s’agit, par exemple, de la détorsion d'un volvulus du côlon  sigmoïde par montée d'une sonde rectale sous contrôle endoscopique, d’un lavement désinvaginant en cas d’invagination intestinale aiguë du nourrisson, ou de coloscopies itératives de décompression dans le syndrome d’Ogilvie pour éviter la perforation diastatique du côlon droit.

8.2.6. Connaître les principales complications aiguës de l’occlusion intestinale

Les facteurs qui menacent la vie au cours d’une occlusion intestinale aiguë sont: le choc hypovolémique et ses conséquences, la perforation intestinale, les hémorragies digestives (stress ou syndrome de Mallory-Weiss) et les pneumopathies par inhalation de vomissements. Il existe de plus un risque local, celui de nécrose ou de perforation intestinale résultant d’ulcérations mécaniques (iléus biliaire) ou d’une ischémie pariétale, soit sur l’obstacle (bride, étranglement, volvulus) soit en amont de l’obstacle (perforation diastatique due à la distension gazeuse).

8.2.7. Connaître les raisons d’une indication chirurgicale d’urgence dans l’occlusion intestinale aiguë

Ce sont la menace de nécrose d’une anse intestinale ou un diagnostic étiologique incertain. Ce dernier cas est de plus en plus rare depuis l’utilisation large du scanner.

8.3. Péritonites

8.3.1. Définir une péritonite, généralisée et localisée, un plastron, une défense et une contracture de l’abdomen

Une péritonite est une inflammation ou une infection aiguë du péritoine (ce qui la différencie de l’infection du liquide d’ascite). On parle de péritonite primitive lorsqu’il n’y a pas de lésion intraabdominale responsable: exemple péritonite à pneumocoques, péritonite tuberculeuse. On parle de péritonite secondaire lorsqu’il existe un foyer intra abdominal responsable de l’infection. Elle peut être due à la perforation du tube digestif, en particulier d’un ulcère gastro-duodénal (Figure 9 ci-dessous) ou d’un diverticule sigmoïdien (Figure 8), à une infection de l’appendice ou de la vésicule biliaire. Elle peut être de cause gynécologique. Elle peut aussi être consécutive à un acte opératoire abdominal.

L’irritation péritonéale peut être causée par un liquide purulent, mais aussi par un liquide aseptique (tout au moins au début de l’évolution), en particulier en cas de perforation d’un ulcère gastro-duodénal. Une péritonite peut être généralisée ou localisée. Si le liquide baigne l’ensemble de la cavité péritonéale il s’agit d’une péritonite généralisée. Si seulement une partie de la cavité de l’abdomen est intéressée, il s’agit d’une péritonite localisée. Certaines péritonites localisées peuvent se manifester cliniquement sous la forme d’une péritonite «plastique», on dit plus communément un «plastron», en raison d’une réaction inflammatoire des organes de voisinage (la graisse épiploïque en particulier). A la palpation, le plastron réalise une masse résistante, comme un «blindage» de la paroi abdominale. La péritonite se manifeste cliniquement par une réaction réflexe de la paroi abdominale. Cette manifestation réflexe est mise en évidence par la palpation de l’abdomen, à la recherche d’une défense ou d’une contracture. La défense est une contraction involontaire des muscles de l’abdomen que l’on obtient en réaction à la pression de la paroi abdominale. Au début de la pression la paroi se laisse déprimer. A partir d’une certaine

Figure 8 : Péritonite

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profondeur, la dépression de la paroi par la main de l’examinateur devient impossible en raison de la tension musculaire. Il faut distinguer la défense, qui est involontaire, de la simple réaction de défense qui est au contraire volontaire et qui résulte naturellement de la douleur déclenchée par la palpation. La contracture est le stade ultime de la défense. Toute dépression de la paroi abdominale est impossible. Il s’agit d’un «ventre de bois» qui ne peut plus être déprimé quelle que soit la pression exercée par la main de l’examinateur.

8.3.2. Définir la péritonite par perforation gastro-duodénale

(Fig.9 : Péritonites) Il s’agit d’une solution de continuité de la paroi digestive en regard d’un ulcère gastro-duodénal, mettant en communication la lumière digestive et la cavité péritonéale.

8.3.3. Connaître les modalités anatomiques et évolutives de la perforation ulcéreuse gastro-duodénale

Les perforations ulcéreuses ont pour origine un ulcère duodénal quatre fois plus souvent qu’un ulcère gastrique. L’ulcère peut être ancien ou récent. Il peut être médicamenteux. Il peut être néoplasique s’il est gastrique. Le péritoine intéressé est celui de l’étage sus-mésocolique ou de l’arrière-cavité des épiploons. Plus tard, l’atteinte péritonéale peut diffuser à la fosse iliaque droite (FID) ou à la grande cavité, ou elle peut se cloisonner. Au début, il s’agit d’une péritonite chimique (liquide gastrique acide, peu septique ou aseptique), au bout de quelques heures, la péritonite devient septique à cause de la pullulation des germes digestifs. Dans certains cas, la perforation est couverte et bouchée par le grand épiploon ou par un viscère adjacent (foie, vésicule), spontanément ou sous l’effet de l’aspiration digestive mise en œuvre. Ces formes peuvent guérir ou évoluer vers une péritonite en deux temps, généralisée ou localisée (abcès sous-phrénique).

8.3.4. Connaître les principales caractéristiques cliniques de la perforation ulcéreuse gastro-duodénale

Le malade est fréquemment un homme entre 20 et 50 ans. On retrouve des antécédents ulcéreux dans la moitié des cas, parfois une prise récente de médicaments gastrotoxiques (principalement d'AINS, très rarement de corticoïdes). Le principal signe fonctionnel est une douleur brutale en coup de poignard. Elle est épigastrique une fois sur deux, ou siège dans l’hypocondre ou le flanc droit. Elle diffuse secondairement à tout l’abdomen une fois sur deux. Son intensité est forte, exacerbée par la mobilisation. Rien ne la calme. Elle est continue et progressivement aggravée. L’inhibition respiratoire est quasi constante. Les autres signes sont l’anxiété, la pâleur, des nausées et vomissements. Il peut exister un état de choc. La température est normale. A l’examen de l’abdomen, on trouve au minimum une défense épigastrique , mais plus souvent une  contracture généralisée à point de départ et à maximum épigastrique. On peut observer une disparition de la matité pré-hépatique. Le toucher rectal est douloureux une fois sur deux.

8.3.5. Connaître l’anomalie radiologique à rechercher

(Voir Fig.9 ci-dessus) L’ASP, avec un cliché centré sur les coupoles diaphragmatiques, le patient étant debout ou assis, met en évidence un pneumopéritoine (croissant clair sous-diaphragmatique) dans la moitié des cas. Si le malade ne peut se tenir debout, on peut demander des clichés de profil avec rayon horizontal. Le scanner abdominal peut montrer un pneumopéritoine non vu sur les clichés d'ASP.

8.3.6. Connaître les deux méthodes essentielles du traitement de la perforation ulcéreuse gastro-duodénale

Le traitement peut être médical et chirurgical. Si la perforation n’est pas trop ancienne (<6 heures), on peut proposer un traitement médical: il comprend l’aspiration gastrique, des antisécrétoires injectables, des antibiotiques et des antalgiques non opiacés. Il est parfois suffisant. Ce traitement est désigné sous le nom de méthode de Taylor. Dans ce cas, l’évolution clinique, en particulier de la douleur, est un élément important de la surveillance de ces malades. Les conditions d’application de la méthode non opératoire pour le traitement d’une perforation duodénale sont

Figure 9 : Péritonites

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la certitude du diagnostic, un délai de moins de 6 heures depuis le début de la perforation, la survenue de la perforation à distance d’un repas (estomac vide) et la possibilité d’une surveillance médico-chirurgicale des signes et symptômes, sous traitement. Le traitement chirurgical consiste à suturer l’ulcère et traiter la péritonite par un lavage de la cavité péritonéale. Cette intervention peut être fait par laparotomie ou surtout cœlioscopie qui permet de réaliser le lavage de la cavité péritonéale dans de bonnes condtions, sans incision délabrante. Les interventions de vagotomie ne sont plus pratiquées. Une gastrectomie peut être envisagée pour l’ulcère gastrique ou l’ulcère duodénal insuturable, à la condition que la péritonite soit prise au tout début. Les facteurs pronostiques de la péritonite par perforation d’ulcère sont un délai de 24 h ou plus depuis la perforation, l’existence d’un état de choc à l’admission et la sévérité des pathologies associées. La mortalité est inférieure à 1 % lorsque ces facteurs sont absents.

8.4. Péritonites infectieuses généralisées

8.4.1. Connaître le retentissement physiopathologique et les conséquences anatomiques locales qui accompagnent l’évolution d’une péritonite infectieuse généralisée

Biologiquement, la péritonite infectieuse généralisée est caractérisée par une exsudation intrapéritonéale et péripéritonéale, ouvrant un troisième secteur liquidien, une résorption toxique ou toxinique et une diffusion septicémique. La conséquence anatomique est une production abondante de fibrine, avec production de fausses membranes, aboutissant au maximum au «gâteau» péritonéal, agglutination d’anses entre elles, à l’épiploon, à la paroi abdominale et au mésentère. Cette production fibrineuse est un processus normal de cicatrisation de l’infection, mais elle peut avoir une influence néfaste sur la maladie en morcelant l’infection, aboutissant ainsi à la formation d’abcès dans le cul-de-sac de Douglas, les gouttières pariéto-coliques, les loges sous-phréniques et à la formation de logettes suppurées intermésentériques. L’infection s’accompagne d’un œdème qui fragilise les tissus, avec risque de désunion des sutures et d’éviscération.

8.4.2. Connaître les causes les plus fréquentes des péritonites infectieuses généralisées

La cause la plus fréquente des péritonites infectieuses généralisées est l’appendicite compliquée, puis viennent les perforations d’ulcères gastro-duodénaux vues tardivement, les perforations de diverticules du côlon et les autres infections digestives ou gynécologiques (Figure 8 et 9).

Figure 8 : Péritonite

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8.4.3. Connaître les signes cliniques, hématologiques et radiologiques d’une péritonite infectieuse généralisée

La péritonite infectieuse généralisée débute en général par une douleur en un point précis de l’abdomen et qui diffuse secondairement. Les signes fonctionnels sont les vomissements et l’arrêt des matières, éventuellement remplacés par une diarrhée fécale ou afécale. Les signes généraux sont ceux d’une infection qui devient rapidement grave. A l’examen, on trouve toujours une défense pariétale, parfois une contracture, souvent un météorisme abdominal. Le cul-de-sac de Douglas est douloureux au toucher rectal. Les signes biologiques sont une hyperleucocytose avec polynucléose, rarement remplacée par une leucopénie. Souvent les clichés d’ASP ne sont pas contributifs, en dehors de la présence d’un pneumopéritoine (Figure 9 ci-dessus). Celui-ci est habituellement géant lorsque l’effraction est colique. Il peut exister des signes d’occlusion (distension hydroaérique de plusieurs anses), souvent prédominants autour du foyer primitif. Le scanner abdominal est souvent très contributif en montrant la cause de la péritonite. Il est devenu l'examen de référence.

8.4.4. Connaître, à côté de la forme typique, les variations symptomatiques de la péritonite infectieuse généralisée

– Les péritonites asthéniques surviennent chez les malades traités par corticoïdes ou immunodépresseurs, en état de dénutrition, cirrhotiques ou cancéreux avancés. Elles sont marquées par des signes généraux graves: hypothermie, tachycardie, plaques cyanosées sur les membres. La contracture est absente. L’évolution est très sévère. La péritonite stercorale est le plus souvent due à la perforation d’un diverticule colique ; elle peut aussi compliquer un lavement opaque, le côlon toxique d’une recto-colite hémorragique ou un mégacôlon d’autre cause. – La péritonite après perforation méconnue causée par une coloscopie diagnostique ou une polypectomie. Elle peut être peu symptomatique au début. – La péritonite postopératoire est le plus souvent la conséquence d’une fuite sur une anastomose digestive. Elle peut se traduire par une diarrhée, une hémorragie digestive, une pneumopathie, une oligo-anurie et des troubles psychiques. Son diagnostic est souvent retardé car les signes comme la douleur, les troubles du transit ou les vomissements sont mis au début sur le compte de l'intervention. – L’infection d’ascite chez le cirrhotique est presque toujours spontanée, ou peut survenir après ponction d’ascite ou après fissuration cutanée d’une hernie ombilicale par ischémie cutanée. Elle réalise un tableau clinique différent (voir 6.5.7.).

8.4.5. Connaître les modalités cliniques évolutives

En l'absence de traitement, l’évolution peut être rapidement mortelle par état septique sévère, ou syndrome de défaillance polyviscérale. Il peut se produire des complications septiques locales avec formation d’abcès intrapéritonéaux (voir 8.4.2.) ou d’abcès métastatiques hépatiques dus à une pyléphlébite. Des complications septiques peuvent avoir lieu à distance: abcès métastatiques extra-abdominaux (rein, poumon, cerveau) et thrombophlébites périphériques. Au décours du tratement des  séquelles sont possibles: éventrations ou occlusions répétées par brides intrapéritonéales. Dans l’ensemble, le pronostic est plus grave si le malade est âgé, s’il est atteint de tares viscérales, en cas de péritonite stercorale et en cas de traitement chirurgical tardif.

8.4.6. Connaître les principes du traitement de la péritonite infectieuse généralisée

Le traitement médical préopératoire et postopératoire comprend des antibiotiques et une réanimation pouvant s’associer à une alimentation parentérale. Le traitement chirurgical a plusieurs objectifs: supprimer la cause (exérèse appendiculaire, sigmoïdienne, etc.) ou la neutraliser (drainage, extériorisation d’un ou de plusieurs segment sdigestifs pour éviter de faire une anastomose digestive contre-indiquée dans ces conditions) et traiter la conséquence de l’infection par un lavage péritonéal abondant de plusieurs litres. La paroi abdominale est fermée avec ou sans drainage.

8.5. Péritonites infectieuses localisées

8.5.1. Connaître les facteurs de localisation d’une péritonite infectieuse

Figure 9 : Péritonites

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Les facteurs de localisation d’une infection péritonéale peuvent être anatomiques, physiologiques ou physiopathologiques. Les cloisonnements peuvent être anatomiques, par exemple, dans l’arrière-cavité des épiploons ou postopératoires. Les cloisonnements physiologiques peuvent être dus par exemple à la déclivité qui entraîne les collections suppurées basses vers le cul-de-sac de Douglas et aux mouvements respiratoires qui attirent les collections hautes sous les coupoles diaphragmatiques. Les cloisonnements physiopathologiques peuvent être dus à la destruction de la séreuse péritonéale et à la formation d’adhérences fibrineuses puis fibreuses, qui est le processus de cicatrisation normal.

8.5.2. Connaître le siège des péritonites infectieuses localisées et leurs causes habituelles

Il s’agit de collections sus-mésocoliques (ou abcès sous-phréniques): abcès droit sus-hépatique ou sous-hépatique (dont l’origine peut être la vésicule, l’estomac ou le duodénum), abcès gauche (après splénectomie) et abcès médian (estomac, pancréas ou côlon). Il peut s’agir de collections sous-mésocoliques: mésocœliaques (grêle), fosses iliaques (appendice, sigmoïde) ou cul-de-sac de Douglas (de mêmes causes, avec en plus les organes génitaux). Toute péritonite aiguë généralisée peut secondairement se collecter dans n’importe quel point de la cavité péritonéale. Les abcès postopératoires peuvent être dus à une fuite anastomotique, à un corps étranger ou à la surinfection d’un drainage ouvert. Ce sont les plus fréquents de tous.

8.5.3. Connaître les signes cliniques et paracliniques des péritonites infectieuses localisées

Il existe des signes communs qui sont la fièvre élevée, parfois oscillante, des signes d’iléus (occlusion fonctionnelle) et une douleur spontanée ou à l’ébranlement au siège de la collection. Il existe des signes de localisation. En cas d’abcès hauts: hoquet, dyspnée et épanchement pleural aseptique. En cas d’abcès bas: dysurie, ténesme vésical et rectal, douleur et empâtement local au toucher rectal et voussure douloureuse du cul-de-sac de Douglas. Les anomalies des examens paracliniques peuvent être des anomalies biologiques (hyperleucocytose, parfois hémocultures positives), des anomalies d’examens morphologiques. L’examen radiologique, simple ou après opacification, peut montrer une ombre anormale qui déplace les viscères voisins, parfois, un niveau liquide. L’échotomographie est souvent gênée par les gaz intestinaux. Le meilleur examen morphologique est le scanner abdominal. Ces deux derniers examens permettent de réaliser une ponction ± drainage de l'abcès ou, en cas d’impossibilité ou d’échec, de  décider d'une intervention.

8.5.4. Connaître les modalités évolutives locales et à distance des péritonites infectieuses localisées

Ce sont l’ouverture spontanée de l’abcès, dans le péritoine  (péritonite en deux temps) ou  dans un viscère de voisinage(plèvre, poumon, vessie, vagin, côlon),. Lorsque l'abcès était la conséquence d'une perforation digestive, comme par exemple un diverticule sigmoïdien, son drainage dans un organe de voisinage comme la vessie ou le vagin crée une fistule sigmoïdo-vaginale ou vésicale. L'évolution peut aussi se faire vers des complications septiques à distance par septico-pyohémie.

8.5.5. Connaître les principes du traitement des péritonites infectieuses localisées

C'est  l'évacuation par ponction radio-guidée (échographie ou scanner) éventuellement suivie d'un drainage,  ou par une intervention chirurgicale en cas d'impossibilité technique ou d'échec de la précédente. Il faut également traiter la cause, soit dans le même temps, soit  ultérieurement  (par exemple appendicectomie).  Un traitement antibiotique  est selon les cas associé.

8.6. Appendicites aiguës

8.6.1. Connaître les différents aspects anatomopathologiques des appendicites aiguës

Nous ne considérons que les états comportant une atteinte macroscopiquement évidente de l’appendice. On distingue plusieurs stades de gravité croissante: la lésion inflammatoire de la muqueuse, la suppuration endoluminale, la nécrose pariétale partielle (pointe ou base) ou totale et des complications (péritonite plastique – correspondant à l’ancien «plastron» –, abcès péri-appendiculaire ou péritonite généralisée).

8.6.2. Connaître les aspects cliniques et évolutifs de l’appendicite aiguë iliaque droite

La forme typique est celle de l’appendicite aiguë iliaque droite. Les signes fonctionnels sont dominés par l'apparition soudaine d'une douleur abdominale iliaque droite, dont le siège peut être épigastrique au tout début avant de se localiser à la fosse ilaque droite. Elle est associée à des nausées ou des vomissements, et parfois des troubles du transit, plutôt constipation que  diarrhée. Les signes généraux sont une température aux alentours de 38 °C, sans retentissement général. A la palpation, la fosse ilaque droite est le siège d'une douleur provoquée voire d' une défense. Il existe au toucher rectal une douleur à droite dans la moitié des cas. La langue est saburrhale. Il existe très souvent une hyperleucocytose à polynucléaires S’il n’y a ni fièvre supérieure à 38 °, ni défense localisée  de la fosse iliaque, ni  leucocytose supérieure à

10 000 GB/mm3 ,  le diagnostic d’appendicite grave est très improbable. Cependant la symptomatologie d'une appendicite aiguë n'est pas toujours typique, et devant un syndrome douloureux de la fosse ilaque droite un peu atypique,  le scanner "appendiculaire" est l'examen le plus performant pour lever le doute. Couplé à une opacification colique par un lavement opaque, cet examen permet de faire le diagnostic d'appendicite aiguë en montrant un appendice épaissi, non opacifié, ou au contraire de l'infimer en montrant un appendice normal et éventuellement la cause  des douleurs et donc d'éviter des appendicectomies inutiles. Les variantes  peuvent être: – la péritonite généralisée d’emblée ou secondaire à la rupture d’un abcès péri-appendiculaire (voir 8.4.). – le plastron appendiculaire qui associe un état infectieux persistant  à une masse mal limitée de la fosse iliaque droite avec un aspect inflammatoire de la paroi abdominale jusqu'y compris la peau qui peut être rouge et chaude en regard.  (voir 8.5.) ;  

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8.6.3. Connaître les variantes topographiques et cliniques des appendicites aiguës de siège ectopique

– L’appendicite rétro-cæcale où les signes sont postérieurs, lombaires, alors qu’il n’y a pas de signe fonctionnel urinaire et que l’examen des urines est négatif – L’appendicite sous-hépatique qui peut simuler une cholécystite aiguë, mais où l’échographie montre une vésicule dont la paroi est fine et normale. – L’appendicite pelvienne peut simuler une salpingite aiguë, mais les signes fonctionnels et physiques sont unilatéraux. Au besoin, une échographie pelvienne peut rendre service en montrant des annexes normales. Il peut exister des signes fonctionnels urinaires (pollakiurie) trompeurs. – L’appendicite méso-cœliaque, où l’appendice est situé au milieu des anses grêles et qui se manifeste par une occlusion avec fièvre.

8.6.4. Connaître les variantes symptomatiques des appendicites aiguës

 Les formes sous antibiotiques et antalgiques, à symptomatologie incomplète ou atypique, ont une gravité accrue en raison du retard diagnostique. – L’influence du terrain:

• chez l’enfant de moins de quinze ans, l’appendicite aiguë peut être plus grave que chez l’adulte, en raison de symptômes trompeurs, expliquant le retard au diagnostic qui rend compte d’un taux de perforation et/ou de péritonite appendiculaire plus important. Ceci est particulièrement vrai chez le nourrisson et l’enfant de moins de trois ans ; cette difficulté diagnostique est accentuée par le fait que cette affection est peu fréquente à cet âge. Le tableau peut être celui d’un «embarras gastrique avec fièvre» voire d’une entérocolite. La fièvre est souvent plus élevée que chez l’adulte et l’examen clinique plus difficile. • chez la femme enceinte, le diagnostic est difficile au début de la grossesse, à cause du caractère banal des vomissements et de la fréquence des pyélonéphrites. Le diagnostic est en général facile en fin de grossesse ; • chez les personnes âgées, la présence de fièvre et d’hyperleucocytose sont de bons signes d’orientation, mais il faut également  évoquer la possibilité d'une tumeur plus ou moins surinfectée du cœcum ou du côlon droit et ne pas hésiter à demander un scanner. 

8.6.5. Connaître le traitement des appendicites aiguës

Le traitement de l' appendicite aiguë est chirurgical. L'indication opératoire est portée  sur des arguments cliniques et biologiques, telle qu’une douleur provoquée de la fosse iliaque droite associée à une fièvre et une hyperleucocytose. Dans les cas douteux, le scanner "appendiculaire" peut aider au diagnostic. L’intervention consiste en une appendicectomie qui peut être faite par une incision de Mac Burney dans  la fosse iliaque droite, ou par une voie d'abord laparoscopique. Cette dernière technique a l'avantage de permettre une exploration de toute la cavité abdominale qui permet parfois de redresser le diagnostic d'appendicite en montrant une  autre cause du syndrome douloureux , telle qu'une pathologie annexielle chez la femme. Une antibioprophylaxie par métronidazole doit précéder l’acte opératoire. Dans certaines situations, et en particulier en cas d’abcès , une antibiothérapie post-opératoire de courte durée peut être justifiée. Un «plastron» peut nécessiter un drainage premier de la paroi abdominale, l'appendicectomie étant reportée quelques semaines plus tard, à distance des phénomènes inflammatoires pariétaux. 

8.7. Infection des voies biliaires

8.7.1. Connaître la définition d’une angiocholite aiguë et ses principaux mécanismes

L’angiocholite aiguë est une infection de la voie biliaire principale survenant dans un contexte d'obstacle à l’écoulement de la bile. L’infection est due à des germes digestifs aérobies (E. coli, Streptococcus faecalis) ou anaérobies (B. fragilis). L'obstacle  mécanique est un calcul de la voie biliaire principale dans 90 % des cas. D'autres causes peuvent être à l'origine de l'angiocholite, comme les obstacles d'origine tumorale (cancer des voies biliaires, du pancréas, ampullome, malformation biliaire) ou plus rarement parasitaires sous nos contrées (ascaris, douve, vésicule hydatique). Une angiocholite peut se voir après une intervention sur les voies biliaires, notamment après anastomose bilio-digestive, sphinctérotomie chirurgicale ou endoscopique, plaie ou une sténose cicatricielle de la voie biliaire principale. Elle peut compliquer un cathétérisme des voies biliaires.

8.7.2. Connaître les conséquences anatomiques de l’angiocholite aiguë

L’angiocholite est caractérisée par un épaississement inflammatoire des parois de la voie biliaire principale. La muqueuse est rouge et desquame par lambeaux. La bile peut être trouble ou remplacée par du pus franc. L’angiocholite prolongée provoque une infiltration inflammatoire et fibreuse des tissus du pédicule hépatique et une thrombose portale peut en résulter.

8.7.3. Connaître les signes cliniques, radiologiques et biologiques d’une angiocholite aiguë lithiasique

Le diagnostic repose sur la triade douleur-fièvre-ictère dans cet ordre d’apparition et dans un délai de 24 à 72 heures. La douleur est à type de colique hépatique ; la fièvre suit de peu la douleur ; elle est élevée, entre 39 °C et 41 °C, brutale avec frissons, et ne dure que quelques heures ou quelques jours. L’ictère apparaît 1 à 2 jours après ; il peut être de courte durée et variable en intensité. Cette triade peut être incomplète. L’examen physique révèle parfois une hépatomégalie. Les signes biologiques sont ceux d’une infection sévère: leucocytose supérieure à 12 000 éléments, hémoculture positive au moment des frissons. On trouve en outre des signes de cholestase: augmentation nette des phosphatases alcalines et de la bilirubinémie conjuguée, souvent une augmentation des transaminases, rapidement régressive. L’hyperlipasémie est possible. A l’échographie, la voie biliaire principale extra-hépatique et les voies biliaires intrahépatiques sont souvent dilatées. Cependant, ce signe n’est pas constant. Les calculs de la voie biliaire principale ne sont vus que dans

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40 % des cas. La lithiase vésiculaire est presque constante mais ce signe n’a pas une grande spécificité pour le diagnostic de migration calculeuse. La cholangio-IRM permet de voir les calculs de plus de 3 mm de diamètre. L'échoendoscopie est le meilleur examen si le doute diagnostique persiste, ce qui est rare, le diagnostic étant principalement clinique.

8.7.4. Connaître les principaux aspects évolutifs de l’angiocholite aiguë

L’évolution de l’angiocholite est variée. En général, la crise ne dure que quelques jours sous traitement adapté comportant les antibiotiques et surtout la levée de l’obstacle. Il est cependant des formes graves d’emblée soit par formation d’abcès miliaires du foie, soit par des manifestations générales de la septicémie, avec collapsus et surtout insuffisance rénale aiguë. Les critères de gravité d’une angiocholite aiguë sont l’augmentation de l’urée et/ou de la créatinine et de la kaliémie, l’âge supérieur à 60 ans, l’acidose, la thrombopénie < 150 000 /

mm3 et les troubles de la conscience (syndrome confusionnel).

8.7.5. Connaître le traitement de l’angiocholite aiguë lithiasique

Il faut traiter l’infection et lever l’obstacle à l’écoulement de la bile. L’antibiothérapie est administrée par voie intraveineuse et adaptée aux résultats de l’hémoculture. Elle peut être non spécifique, avec des antibiotiques à élimination biliaire préférentielle, associée au métronidazole pour les germes anaérobies. Une rééquilibration hydroélectrolytique est nécessaire pour prévenir le collapsus et l’insuffisance rénale. La levée de l’obstacle, c’est-à-dire du ou des calculs peut se faire par une intervention chirurgicale ou endoscopique. L’une ou l’autre doit être faite en urgence dans les formes graves, sous couvert de l'antibiothérapie. Dans l’angiocholite grave avec insuffisance rénale, la sphinctérotomie endoscopique en urgence est le traitement de choix. Elle permet le drainage de la rétention biliaire infectée ce qui ne préjuge pas du traitement ultérieur.  L'intervention endoscopique comprend une section  du sphincter d’Oddi et l'ablation des calculs de la voie biliaire principale; elle permet  d’éviter une laparotomie chez les sujets âgés, souffrant de tares viscérales associées et fragilisés par l’angiocholite. Elle a l’inconvénient de laisser la vésicule en place, vis-à-vis de laquelle une cholécystectomie à froid peut être décidée. La lithiase « résiduelle » après cholécystectomie est une indication d’intervention endoscopique. Le traitement chirurgical comprend une cholécystectomie, le nettoyage de la voie biliaire principale et l’ablation du ou des calculs. On termine par le drainage de la voie biliaire principale, soit vers l’extérieur par un drain de Kehr, soit vers le tube digestif par une anastomose bilio-digestive. L’intervention chirurgicale a l’avantage de traiter dans le même temps la lithiase du cholédoque et la lithiase vésiculaire.  

8.7.6. Connaître les circonstances étiologiques habituelles de la cholécystite aiguë

La cholécystite aiguë est une infection de la vésicule biliaire. C’est le plus souvent une complication de la lithiase vésiculaire.  Elle peut survenir dans les suites d'une sphinctérotomie endoscopiqe. Enfin, une cholécystite sans calcul (alithiasique) peut être rencontrée au cours d’états de choc ou d’infections bactériennes (salmonellose, spirochétose et tous germes à Gram négatif), virales (VIH), ou après un acte chirurgical  tel que par exemple une œsophagectomie, une gastrectomie, mais aussi après des actes de chirurgie cardiaqe ou tout autre geste .

8.7.7. Connaître les principales manifestations cliniques d’une cholécystite aiguë

Une cholécystite aiguë est caractérisée par l'appartion soudaine d'une douleur vive et sans rémission du creux épigastrique et surtout de l’hypocondre droit, augmentée par les mouvements et la respiration, un ou deux vomissements, et une poussée fébrile entre 38 °C et 39 °C. La douleur a souvent des irradiations postérieures ou vers l'épaule droite. La grosse vésicule est souvent palpable sous la forme  d'une masse douloureuse de l’hypocondre droit. L'hypochondre droit est au minimum le siège d'une douleur à la palpation augmentant à l'inspiration profonde qui est inhibée (manœuvre de Murphy positive), et plus souvent  d'une défense. Un subictère est possible mais inconstant.

8.7.8. Connaître les principales modifications biologiques notées au cours des cholécystites aiguës

Il peut exister une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, parfois une discrète élévation de la bilirubinémie et des phosphatases alcalines. La lipasémie peut être discrètement élevée.

8.7.9. Connaître l’intérêt diagnostique des explorations morphologiques au cours de la cholécystite aiguë

L’échographie est l'examen de référence. Elle montre que la  la vésicule est augmentée de taille, qu'elle contient des calculs donnant un cône d’ombre postérieur, et que surtout ses parois sont épaissies ( >4 mm). Il existe le plus souvent une douleur au  passage de la sonde en regard de la vésicule (Murphy échographique). La voie biliaire principale intrahépatique et extra-hépatique n’est pas dilatée.

8.7.10. Savoir qu’il existe des diagnostics différentiels de la cholécystite aiguë

L’examen physique et les examens complémentaires permettent en général de distinguer la cholécystite aiguë d’autres affections douloureuses abdominales: pancréatite aiguë, appendicite aiguë sous-hépatique, périhépatite, le plus souvent à Chlamydia trachomatis, ainsi que des affections douloureuses extra-abdominales comme une pyélonéphrite aiguë, une embolie pulmonaire, un foie cardiaque aigu, une pneumonie lobaire inférieure droite ou une pleurésie droite.

8.7.11. Connaître les modes évolutifs des cholécystites aiguës

L’évolution d’une cholécystite aiguë traitée médicalement pourrait se faire vers la résolution de la crise en 48 heures à 15 jours. Cependant, des complications peuvent survenir: péritonite aiguë biliaire secondaire à la perforation de la vésicule biliaire, abcès sous-phrénique, fistule cholécysto-cholédocienne, cholécysto-

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duodénale ou cholécysto-colique.

8.7.12. Connaître les principes du traitement des cholécystites aiguës

Le traitement d'une cholécystite nécessite une hospitalisation, l'administration  d'antalgiques et d'antibiotiques par voie veineuse . Le traitement chirurgical est la cholécystectomie avec, si les conditions locales le permettent,  la vérification de la voie biliaire principale par une cholangiographie per-opératoire. Il doit être envisagé dans les 48 premières heures. On a en effet montré qu’attendre le « refroidissement » de la cholécystite aiguë conduisait à une morbidité accrue par rapport à une intervention au moment de la poussée aiguë. La cholécystectomie peut être faite par laparotomie ou par cœlioscopie. Dans ce dernier cas, le chirurgien ne doit pas hésiter à convertir la cœlioscopie en laparotomie si les lésions de cholécystite ne lui permettent un bon contrôle des lésions par cette voie d'abord.

8.8. Ischémie intestinale aiguë

8.8.1. Connaître les aspects anatomiques usuels de l’ischémie intestinale aiguë

L'ischémie ou la nécrose  intestinale peut être segmentaire et n'intéresser qu’une ou plusieurs anses, ou étendue à la totalité du grêle, voire même se prolonger sur le côlon droit, plus rarement  le côlon gauche. L’ischémie peut être totale, c’est-à-dire intéresser les trois tuniques, elle peut aussi être partielle et se limiter à la muqueuse, la musculeuse et la séreuse étant soit respectées, soit le siège de lésions réversibles. Quant au mésentère, il peut être soit intact, soit en état de nécrose.

8.8.2. Connaître les principales causes d’ischémie intestinale aiguë

L'ischémie intestinale  peut être d'origine artérielle, veineuse ou non occlusive. L’obstacle artériel peut être une sténose athéromateuse des gros troncs artériels cœliaque et mésentériques (supérieur et inférieur) due à une plaque d’athérome aortique ou à un thrombus des premiers centimètres du tronc artériel. Pour que se produise un accident, il faut qu’au moins deux des trois troncs soient bouchés.  L'obstacle artériel peut être aussi d'origine embolique (40% des cas). L'embole  est parti le plus souvent du cœur     ( valvulopathies, arythmies, foyer d'infarctus) ou de l'aorte et se trouve bloqué dans les premiers centimètres de l'artère mésentérique supérieure. L'étendue de l'ischémie intestinale dépend du niveau d'arrêt de l'embole dans l'artère mésentérique et de la conservation ou non de collatérales en amont. Une ischémie intestinale aiguë  peut aussi survenir au décours d’une intervention sur l’aorte abdominale. L'ischémie intestinale d'origine veineuse  peut être secondaire à une thrombose veineuse primitive survenant dans le cadre d'une anomalie de la coagulation ou d'un syndrome myéloprolifératif. Il peut s'agir aussi d'une pyléphlébite aiguë septique (provoquée par une appendicite ou sigmoïdite aiguës) ou toxinique, ou d'une thrombose veineuse compliquant une hypertension portale . L'ischémie intestinale aiguë peut être non occlusive, conséquence d'une insuffisance circulatoire et d'un bas débit intestinal.  Il peut s’agir d’une baisse brutale du débit artériel (infarctus du myocarde, choc, traitement antihypertenseur), d’une augmentation des résistances par hyperpression dans la lumière digestive (distension colique par exemple), ou d’une nécrose infectieuse primitive.  

8.8.3. Connaître les principaux signes cliniques de l’ischémie intestinale aiguë

Les signes fonctionnels sont principalement la douleur abdominale, à type de crampes, de siège médian, de début brutal et d’intensité rapidement croissante, d’évolution continue et parfois accompagnée au tout début de l'émission d'une selle impérieuse ou d'unténesme , témoins de l'hyperpéristaltisme intestinal au début . L’intensité de la douleur est  violente en cas d’embolie artérielle.  Elle a pu être précédée de crises analogues résolutives (angor abdominal) dans le cas d'une sténose athéromateuse. Il peut exister une diarrhée parfois sanglante ou un arrêt des gaz. Les signes généraux sont pauvres au début, puis marqués par un état de choc progressif, accompagné  d’un état subfébrile et d'une agitation. A l’examen physique, l’abdomen est mat et il n'y a aucun bruit à l’auscultation ("silence sépulcral").

8.8.4. Connaître les principales informations fournies par les explorations complémentaires au cours de l’ischémie intestinale aiguë

Il existe une hyperleucocytose parfois très importante et rapidement une insuffisance rénale, une acidose, une élévation des LDH. L’ASP  peut montrer une grisaille uniforme en damier sans pneumopéritoine. Les anses intestinales sont figées, leur paroi est épaissie, et elles sont le siège d'une distension gazeuse. Il peut y avoir un petit épanchement entre les anses, exceptionnellement une présence d’air dans le système porte (aéroportie). Tous ces signes  sont tardifs et témoignent de la nécrose intestinale le plus souvent irréversible. Une aortographie de profil en urgence peut être demandée, éventuellement complétée par une artériographie sélective mésentérique. Une embolie se manifeste par un arrêt cupuliforme sur l’artère et un spasme du système collatéral. Une thrombose est en général initiale et l'atteinte athéromateuse est multivasculaire (au moins deux troncs sur trois sont nécessaires). Ces examens sont  en fait remplacés par l’examen de référence qui est le scanner avec reconstruction vasculaire ou l’angio-IRM, qui peuvent apporter des informations sur la morphologie des obstacles artériels. Demandés précocement face à un syndrome abdominal aigu chez des patients à risque d'ischémie intestinale (athérome connu, arythmie cardiaque ou toute autre maladie emboligène), ils peuvent permettre un diagnostic et un traitement au stade où les lésions sont encore réversibles.

8.8.5. Connaître les principes du traitement de l’ischémie intestinale aiguë

  Le traitement est chirurgical.

A la laparotomie, on évalue d’abord l’étendue et la sévérité des lésions intestinales. La vitalité des anses est appréciée sur leur aspect et leur couleur, la conservation du péristaltisme, la perception d'un pouls dans les

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vaisseaux du mésentère . En cas de nécrose définitive, on réalise une  exérèse sans rétablissement de la continuité digestive.  Ces résections peuvent être étendues et conduire à un grêle court. Elles doivent donc être guidées par un principe d'économie, quitte à laisser en place des zones de vitalité douteuse  et réintervenir de parti pris 24  heures plus tard pour juger de la récupération ou au contraire de l'extension de la nécrose. Dans le même temps, on traite la cause. S’il s’agit d’une embolie, on fait une embolectomie. S’il s’agit d’une thrombose veineuse, les thrombolytiques sont à discuter. Enfin, s’il s’agit d’une plaque d’athérome ou d’un bas débit, les anticoagulants doivent être utilisés (les tentatives de revascularisation artérielle sont très décevantes). Le pronostic reste encore d’une très haute gravité. De tous les mécanismes d’ischémie intestinale, c’est la thrombose veineuse qui a le moins mauvais pronostic lorsque le diagnostic en est porté de façon non opératoire (par le scanner par exemple), et en l’absence de signes cliniques de souffrance intestinale.  

8.9. Accidents digestifs des anticoagulants

8.9.1. Connaître les circonstances habituelles de survenue des accidents digestifs dus aux anticoagulants

Tous les traitements anticoagulants, qu’ils soient préventifs ou curatifs, peuvent être responsables d’accidents digestifs. Il s’agit essentiellement des antivitamines K, le plus souvent en raison d’une erreur de posologie ou d’interférence médicamenteuse. Le diagnostic de complication du traitement par antivitamines K est évoqué si le taux de prothrombine à l’admission est inférieur à 10 %. Plus rarement il s’agit d’héparine ou héparinate, ou des héparines de bas poids moléculaires. Les malades les plus exposés sont les sujets âgés, dénutris, les malades qui ont une HTA, une insuffisance hépatique. Les lésions digestives susceptibles de saigner (ulcère duodénal, ulcère du collet d’une hernie hiatale, œsophagite, cancers...) et l’association à des dérivés salicylés ou aux AINS accentuent le risque hémorragique.

8.9.2. Connaître les aspects cliniques des accidents digestifs dus aux anticoagulants

Les accidents des anticoagulants comprennent les hémorragies digestives (voir 8.1), l’hématome intramural et l’hématome de la paroi abdominale. L’hématome intramural est une infiltration hématique segmentaire de l’intestin sur 10 à 40 cm de long, pouvant faire disparaître la lumière intestinale. La localisation la plus fréquente est le duodénum et le jéjunum, puis l’iléon et le côlon. Il est accompagné de façon quasi constante d’un hémopéritoine. Les signes cliniques sont ceux d’un iléus intestinal. Dans quelques cas, une anémie aiguë peut s’y associer. L’hématome de la paroi abdominale peut se manifester sous la forme d’hématomes rétropéritonéaux, d’hématomes de la gaine du psoas ou d’hématomes de la gaine des droits de l’abdomen.

8.9.3. Réunir les arguments diagnostiques cliniques, biologiques et radiologiques en présence d’un accident digestif des anticoagulants

Le diagnostic repose sur des arguments cliniques: l’anamnèse retrouve l’utilisation d’anticoagulants et recherche d’autres hémorragies (hématurie, épistaxis). Les arguments biologiques sont une anémie et une hyperleucocytose et, pour les antivitamines K, un taux de prothrombine en dessous de 10 % (INR supérieur à 4). L'ASP est de peu d’intérêt. Le diagnostic est porté sur le scanner abdominal.

8.9.4. Connaître les principes du traitement des accidents digestifs des anticoagulants

Le traitement médical est suffisant plus de deux fois sur trois. Il s’agit de corriger l’hypocoagulabilité en arrêtant le traitement anticoagulant et, au besoin, d’administrer un antidote; de corriger l’hypovolémie et l’anémie; dans certains cas de traiter l’occlusion intestinale par aspiration gastrique. Le traitement chirurgical est rarement indiqué. S’il s’agit d’une hémorragie digestive incoercible, on peut être amené à l’exérèse ou à la suture de la lésion. En cas d’hématome digestif persistant ou s’aggravant, on peut devoir faire une résection. Le traitement de ces complications est d’autant plus complexe que l’indication des anti-coagulants est impérative.

8.10. Traumatismes de l’abdomen

8.10.1. Connaître les éléments de diagnostic de pénétration abdominale, abdomino-thoracique ou abdomino-pelvienne

Ce diagnostic repose sur plusieurs arguments: la nature de l’agent vulnérant, la reconstitution du trajet de celui-ci (au besoin l’opacification du trajet peut conduire le liquide de contraste dans la grande cavité abdominale), l’extériorisation pathologique à travers la plaie de l’épiploon, d’un viscère, de liquides digestifs, une hématémèse ou hémorragie intestinale, et le résultat des examens radiologiques de l’abdomen  et en particulier du scanner abdominal complété si besoin d'un scanner thoracique. En cas de doute, une cœlioscopie   vérifie le caractère pénétrant de la plaie  et permet  l’exploration  de la cavité abdominale et en particulier  du grêle qui est l’organe le plus souvent atteint dans les plaies de l’abdomen. Le traitement comporte l’exploration-parage des orifices d’entrée et de sortie et, en cas de signes cliniques hémodynamiques ou péritonéaux, une laparotomie exploratrice.

8.10.2. Connaître les aspects anatomopathologiques des lésions traumatiques viscérales: foie, rate, duodéno-pancréas, mésentère et intestin

Pour les organes pleins : Les lésions vont de la décapsulation aux «fractures» parfois complexes de l’organe, s’accompagnant de plaies vasculaires. Elles peuvent être fatales à court terme. Le traumatisme du foie est grave, en particulier s’il existe une plaie des veines sus-hépatiques, de la veine cave inférieure rétro-hépatique ou du pédicule hépatique. Le traumatisme de la rate est grave, en particulier s’il existe une désinsertion du pédicule.

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Pour les organes creux : Elles vont de la simple contusion à la rupture digestive et/ou à la désinsertion des lames porte-vaisseaux (mésocôlon ou mésentère). Le traumatisme du duodéno-pancréas est grave en cas de rupture canalaire du pancréas, ou d’éclatement intrapéritonéal ou rétropéritonéal du duodénum avec possibilité de désinsertion de la papille duodénale. Le traumatisme de l’intestin et de ses mésos peut réaliser une déchirure ou un éclatement de l’intestin, une déchirure du mésentère, une désinsertion du mésentère, une ischémie intestinale. La gravité est liée à l’étendue des lésions et à l’importance des vaisseaux concernés.

8.10.3. Connaître les éléments du diagnostic d’un hémopéritoine traumatique libre

Il peut survenir immédiatement après l’accident, ou après un intervalle libre (rupture en deux temps). Les signes cliniques sont essentiellement d’un syndrome d’hypovolémie et d’anémie aiguë. Si le malade est réanimé, l’hémodynamique est instable c’est-à-dire qu’il nécessite l’apport de solutés de remplissage et du sang en permanence. A l’échographie, il existe un épanchement abondant (plusieurs quadrants de l’abdomen). Le scanner montre également l'épanchement et sa cause, mais il  ne doit pas être réalisé si l’état hémodynamique est jugé très instable.

8.10.4. Connaître les éléments du diagnostic qui permettent d’orienter vers l’atteinte d’un viscère plein, ou d’un viscère creux

L’examen à demander en urgence est un scanner abdominal  éventuellement sans injection si l’état du malade est précaire. Pour la rate ou le foie, le siège du traumatisme est en regard de l’hypocondre correspondant. La fracture des basses côtes gauches ou droites est évocatrice de plaie de la rate (20 %) ou du foie (10 %). En cas d’instabilité hémodynamique le bilan des lésions et le traitement se font lors de la laparotomie. Pour le pancréas et le duodénum, le traumatisme est volontiers épigastrique. Le scanner  abdominal peut montrer un épanchement  rétropéritonéal contenant parfois quelques bulles de gaz, ou un hématome voire une fracture du pancréas qui siège le plus souvent au niveau de l'isthme, en avant du billot rachidien.  A la laparotomie, on peut découvrir une ecchymose ou un hématome de la loge pancréatique avec ou sans tache de bougie (cytostéatonécrose). En cas de plaie du duodénum, il peut exister un épanchement rétroduodénal à la fois biliaire et gazeux (la tache «verte» rétropéritonéale) En cas de plaie d'un organe creux (grêle, côlon), il peut exister un pneumopéritoine.

8.10.5. Connaître les renseignements susceptibles d’être fournis par l’examen radiologique dans un traumatisme de l’abdomen

Aucune exploration radiologique ne doit être demandée si l’état hémodynamique est instable. Dans ce cas, seule une échographie  peut être faite pour confirmer la présence d’un épanchement intraabdominal. L’ASP n’est pas contributif à la décision thérapeutique et ne doit plus être demandé.  Lorsque l’état hémodynamique le permet, le scanner  abdominal en urgence est l’exploration de référence. Les opacifications digestives ou urinaires ne sont utiles que dans des cas très spécifiques. L’artériographie n’est demandée que dans un but éventuellement thérapeutique (embolisation).

8.10.6. Connaître les éléments de gravité d’un traumatisme de l’abdomen

Ce sont l’âge du blessé, la nature du traumatisme, une association à d’autres lésions, thoraciques, cranio-céphaliques, ou des membres, la nature du viscère atteint, le sepsis des lésions abdominales, la condition et la rapidité des soins (évacuation, décision chirurgicale), et les antécédents pathologiques et traitements suivis (anticoagulants ou antiagrégants). Les volumes nécessaires pour équilibrer l’état hémodynamique n’ont pas de valeur pronostique à proprement parler. C’est le temps passé en hypotension qui a une valeur pronostique.

8.10.7. Connaître les complications secondaires des traumatismes hépato-biliaires

Il peut s’agir de récidive hémorragique intrapéritonéale, de nécrose parenchymateuse secondaire, de fistules biliaires externes, de fistules artério-veineuses, de pseudo-anévrismes intrahépatiques ou d’hémobilie (fistule artério-biliaire).

8.10.8. Connaître les éléments de surveillance d’une contusion de l’abdomen non opérée en urgence

L'élément essentiel est d'apprécier de manière répétée le retentissement du traumatisme  sur les grandes fonctions  vitales (pouls, TA, diurèse horaire) et d'évaluer ainsi l’efficacité de la réanimation. Il faut aussi surveiller  la survenue d’une fièvre,  d’un ictère ou de troubles du tansit intestinal. Les signes locaux, relevés à intervalles rapprochés, sont l’état de la paroi abdominale, des fosses lombaires, et des hypocondres. Les examens complémentaires comportent l’échographie, et surtout le scanner. La ponction lavage du péritoine avec étude chimique, cytologique et bactériologique du liquide recueilli, a de moins en moins d'indications. Enfin, des examens biologiques peuvent être utiles: numération globulaire, amylasémie et amylasurie.

8.10.9. Connaître les indications chirurgicales d’urgence en cas de traumatisme de l’abdomen

Ces indications sont la plaie pénétrante,  les épanchements intrapéritonéaux avec instabilité hémodynamique, l'incertitude diagnostique, et l’inefficacité de la réanimation.

Objectifs nationaux rédigés par les membres de la collégiale des universitaires en Hépato-Gastroentérologie - Version 2006