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1351 - Du 5 au 11 juin 2020 Prix : 15 Dhs LE ROI VEILLE AU GRAIN LE MAROC PLÉBISCITÉ À L’INTERNATIONAL Même des médias généralement peu amènes à son endroit n’ont pas manqué de saluer la façon dont le Royaume, et surtout son chef d’Etat, ont géré la pandémie de Covid-19. De quoi, surtout, renforcer davantage son image. L’ÉTAT D’URGENCE SANITAIRE ENCORE PROLONGÉ VA-T-ON CONTINUER D’ALIMENTER LA CRISE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE ?

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Prix : 15 Dhs

LE ROI VEILLEAU GRAIN

LE MAROC PLÉBISCITÉ À L’INTERNATIONAL

Même des médias généralement peuamènes à son endroit n’ont pas manqué

de saluer la façon dont le Royaume, etsurtout son chef d’Etat, ont géré

la pandémie de Covid-19.De quoi, surtout, renforcer

davantage son image.

L’ÉTAT D’URGENCE SANITAIRE ENCORE PROLONGÉVA-T-ON CONTINUER D’ALIMENTER LA CRISE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE ?

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L’université Mohammed VI Polytechnique vient d’annoncer, le jeudi 4 juin 2020, dans un communiqué, le lancement de la

UM6P «School of Hospitality Business and Management» (SHBM), à l’issue d’un accord récemment conclu avec l’École hôtelière de Lausanne (EHL Group). Ce partenariat permettra à SHBM de devenir la première école certifiée EHL au Maroc. La SHBM prévoit d’accueillir sa première promotion à la rentrée universitaire 2020-2021 pour les études de premier cycle. L’école proposera un programme de licence et un programme de master ainsi qu’un programme “Vocational Training’’ dans le cadre de la formation continue.L’objectif de l’UM6P n’est ni plus ni moins que de développer une nouvelle génération de leaders de l’industrie du tourisme. Pour former ces futurs professionnels en business et management hôtelier, l’école s’appuiera sur l’expérimentation “Le Learning by Doing’’, une vision commune de l’enseignement partagée par EHL Group et l’UM6P.Ainsi, l’UM6P veut créer un écosystème hôtelier global au sein de son campus moderne, doté d’une infrastructure de pointe. “Cet écosystème contribuera à cultiver l’essence de cette discipline tout en encourageant l’innovation, la recherche appliquée ainsi que l’entrepreneuriat’’, indique l’UM6P dans un communiqué.“Nous sommes heureux de collaborer avec EHL Group, une institution qui forme des professionnels de premier plan depuis plus de 125 ans. En 2019, près de 71.2 millions de touristes internationaux ont voyagé en Afrique. Le tourisme se développe très rapidement sur le continent. Par le biais de cette formation académique exclusive, l’UM6P entend renforcer sa pluridisciplinarité et doter le Maroc et le continent d’une relève qui place l’innovation au cœur de son approche”, a déclaré Hicham El Habti, secrétaire général de l’UM6P.“Nos deux institutions partagent les mêmes valeurs d’excellence et le Maroc a une longue tradition d’hospitalité et d’ouverture. Nous sommes très heureux de contribuer aux efforts de l’UM6P pour améliorer les normes nationales en matière d’hôtellerie et de tourisme par le biais de la formation” , n’a pas manqué de déclarer de son côté Olivier Roux, directeur général d’EHL Advisory Services. Bon vent l

Une école de classe mondialeL’Université Polytechnique Mohammed VI lance une école de management hôtelier

Le tribunal de première instance de Rabat donne raison à Abdellatif Ouahbi

Le tribunal de première instance de Rabat a «rejeté la requête» de Moha-

med Aboudrar, ancien président du groupe parlementaire PAM à la Chambre des représentants contre le secrétaire général du son parti, Abdellatif Ouahbi. La décision de la cour, rendue mercredi 3 juin 2020, «réaf-firme l’autorité» de M. Ouahbi à la tête du Parti Authenticité et Modernité (PAM) et met fin, une fois pour toutes, aux rêves de ses détracteurs, a déclaré à Maroc Hebdo, Samir Goudar, dirigeant du parti et président de la commission préparatoire du 4è congrès du parti, tenu en février dernier à El Jadida et qui a été sanctionné par l’élection d’un nouveau secrétaire général et d’un nouveau conseil national. Suite à ce congrès, une restructura-tion du parti a été lancée et, dans ce cadre, M. Ouahbi avait mis fin, le 9 avril 2020, à la mission de Mohamed Aboudrar en tant que chef du groupe parlementaire PAM. Mécon-tent, ce dernier a intenté un procès contre le nouveau leader du parti du Tracteur. Selon Mohamed Aboudrar, le secrétaire général du PAM «n’a pas la qualité» pour prendre des décisions alors que les structures adéquates du parti n’ont toujours pas été mises en place. Le tribunal n’a pas pris en compte les arguments de la défense de M. Aboudrar. D’aucuns ont vu dans sa démarche beau-coup plus une tentative du clan de l’ancien secrétaire général Hakim Benchemmas en vue de déstabiliser la nouvelle direction du PAM l

Guerre interne au PAM

La reprise du contrôle des compteurs est menée «en accord avec l’autorité de tutelle» précise Lydec dans un communiqué, insistant sur le maintien du respect des

consignes sanitaires en vigueur. En raison du contexte sanitaire lié à la pandémie du Covid-19, Lydec rappelle qu’elle avait mis en place plusieurs dispositions pour limiter ses activités à domicile et assurer la relation avec sa clientèle à distance, via des canaux de communication diversifiés, notamment la téléphonie et Internet.La Lydec tient à rappeler que les clients qui le souhaitent peuvent toujours procéder eux-mêmes à la lecture de leurs index de consommation directement sur leurs compteurs, et les communiquer à Lydec via l’adresse électronique «[email protected]», l’application mobile Lydec 7/24 et le centre de relation clientèle (05 22 31 20 20)l

La Lydec a repris la lecturedes compteurs depuis lundi 1er juin

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Va-t-on continuer d’alimenter la crise économique et sociale?

Eclairage sur la mortd’un MRE aux Philippines

J amais deux sans trois, dit l’adage. Ou plutôt, dorénavant: jamais trois sans quatre. Et qui sait encore,

quatre sans cinq, cinq sans six, six sans sept,... en fait tout dépendra des autorités marocaines, qui comme chacun le sait s’apprêtent à prolonger, pour la troisième fois consécutive depuis le 20 mars, l’état d’urgence sanitaire. En effet, Saâd Eddine El Othmani devrait en faire l’annonce officielle ce 10 juin, date initiale de la fin de la troisième période de l’état d’urgence sanitaire, avant d’en donner l’explication le lendemain à la Chambre des représentants, puis cinq jours plus tard à la Chambre des conseillers. On peut imaginer que le Chef du gouvernement excipera du souci “de préserver les acquis sanitaires”, comme le rapportent diverses sources médiatiques, mais, dans les faits, on peut se demander si eu égard à la situation épidémiologique actuelle cela se légitime vraiment. Ainsi, tous les indicateurs sont au vert, y compris le fameux

taux de reproduction, qui équivaut au nombre de personnes contaminées en moyenne par un porteur du Covid-19 et qui se stabilise désormais à 0,7, soit ce que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) préconise elle-même pour procéder au déconfinement. Pis, ou mieux, la pandémie a perdu beaucoup de terrain, et on ne signale plus depuis belle lurette de cas dans de nombreuses régions du Royaume. Certes, des sources citées par le journal électronique Le360 parlent d’“un assouplissement progressif”, mais comment y croire alors qu’en même temps les mêmes sources tiennent à ce que la liberté de déplacement, la liberté de réunion et la liberté de rassemblement demeurent aussi limitées qu’elles l’ont été au cours des dix dernières semaines, sans parler du maintien de la fermeture des cafés, des restaurants et des plages? N’y a-t-il vraiment pas possibilité de lâcher quelque peu du lest, tout en veillant, bien entendu, à ce que tout le monde continue de porter des masques, que les règles de distanciation sociale demeurent de rigueur aussi bien dans les espaces publics que, surtout, dans les entreprises -pour éviter notamment les fameux clusters industriels-, avec à la clé une multiplication des tests, comme vient d’ailleurs de l’entamer la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) en partenariat avec le secteur privé? La France et l’Espagne, avec qui le parallèle est fait eu égard au maintien de l’état d’urgence sanitaire sur leurs territoires respectifs, ne sont pas ou plus aussi radicales dans leur gestion de la pandémie. Il faudra, en tout état de cause, y réfléchir peut-être davantage, au risque d’alimenter une crise économique et sociale dont le Maroc n’a absolument pas besoin en ce moment, et ce de l’aveu même des responsables publics.... l

L’ÉTAT D’URGENCE SANITAIRE ENCORE PROLONGÉ

La situation difficile des Marocains bloqués à l’étranger ne cesse de susciter émoi

et inquiétude. Parmi ces derniers, le cas d’un Marocain résidant à l’étranger, Younès Zebdi, mort aux Philippines, dans la nuit du mercredi 3 et jeudi 4 juin 2020. Le défunt n’était pas considéré à proprement parler comme un Marocain bloqué à l’étranger puisqu’il était installé avec sa femme philippine et il faisait des aller-retours fréquents entre Dubaï et Manille, depuis 2018. Le défunt qui était asthmatique avait posté, quelques semaines avant sa mort, une vidéo qui a fait fureur sur les réseaux sociaux où il avait dénoncé le manque d’attention de la part de l’ambassade marocaine à Manille. Chose que dément une source autorisée au ministère des Affaires étrangères à Rabat qui nous a envoyé un document attestant que le défunt avait reçu une aide financière d’un montant de 200 dollars pour subvenir à ses besoins notamment médicaux. Et ce même s’il n’est pas recensé parmi les Marocains bloqués à l’étranger. Selon la même source, le défunt sera inhumé aux Philippines dans un cimetière réservé aux musulmans, aux frais du ministère des affaires étrangères. Une procédure actuellement en vigueur pour tous les Marocains décédés à l’étranger pendant cette période de crise du Covid-19 pendant laquelle les frontières sont fermées l

Saâd Eddine El Othmani.

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Le Roi veille au grainLE MAROC PLÉBISCITÉ À L’INTERNATIONAL

Même des médias généralement peu amènes à son endroit n’ont pas manqué de saluer la façon dont le Royaume, et surtout son chef d’Etat, ont géré la pandémie de Covid-19. De quoi, surtout, renforcer davantage son image.

Depuis quelques se-maines, elles ont été nombreuses les parties à demander de dissoudre, pour diverses raisons

et motivations, l’actuel gouvernement Saâd Eddine El Othmani et de le rem-placer, comme cela a souvent été le cas dans l’Histoire du Maroc indépen-dant, par une équipe de technocrates.Au point de faire réagir très officielle-ment le parti dont il est issu, à savoir le Parti de la justice et du développement (PJD), pour s’y opposer. Mais c’est ou-blier que, dans les faits, c’est bien des “technos” qui sont, depuis la désigna-tion de ce gouvernement en avril 2017, à la barre, et ce à la tête des principaux ministères de souveraineté (Intérieur, Affaires étrangères, Habous, Santé), en sus de ceux qui n’ont été étiquetés qu’au moment d’hériter de leurs maro-quins (Économie, Éducation nationale,

PAR WISSAM EL BOUZDAINI

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mars-, mais comme le disait l’ancien président américain Théodore Roose-velt, “le seul homme à ne jamais faire d’erreur est celui qui ne fait jamais rien”. Ainsi, lors de son passage sur Al-Aoula, M. El Othmani se cachait délibérément derrière le ministère de l’Intérieur et celui de la Santé en décla-rant que c’est eux et seulement eux qui travaillaient sur les scénarii de décon-finement, comme si, en tant que Chef du gouvernement, il ne pouvait en être comptable -ce qui, bien évidemment, ne peut être entendu. Et surtout, à la première occasion venue, il renvoyait aux “instructions royales”: on le sait, le roi Mohammed VI a joué un rôle clé, tout au long des derniers mois, dans la gestion de la pandémie au plan na-

tional, et cela s’était notamment mani-festé, le 17 mars, avec la séance de travail qu’il avait présidée au palais royal de Casablanca pour suivre cette gestion -M. El Othmani y était d’ail-leurs présent, au même titre que son ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, et celui de la Santé, Khalid Aït Taleb, et de l’inspecteur général des Forces armées royales (FAR), Abdelfattah El Ouarak, le commandant de la Gendar-merie royale, Mohamed Haramou, et le directeur général de la Sûreté natio-nale (DGSN) et de la Surveillance du territoire national (DGST), Abdellatif Hammouchi.Sauf que ce que le Chef du gouverne-ment n’ajoutait pas et se tiendra sans doute toujours d’ajouter, c’est que l’en-

trée en scène du roi Mohammed VI est d’abord intervenue pour combler ses lacunes et son atonie totale dans les deux semaines ayant directement suivi le recensement du premier cas de Covid-19 à Casablanca le 2 mars. C’est ainsi sur décision royale que les frontières ont été fermées, le Roi pre-nant par exemple personnellement le téléphone, le 13 mars, pour prévenir le président français Emmanuel Macron de la suspension des vols et des liai-sons maritimes de transport de passa-gers en provenance ou à destination de la France.

Qualité et ingéniositéEt c’est, aussi, le Souverain qui fut der-rière le plan de confinement progressif

ayant sous-tendu l’état d’urgence sani-taire déclaré le 20 mars. Surtout, il en avait posé les jalons économiques en ordonnant de mettre en place, le 14 mars, le Fonds spécial de gestion de la pandémie de Covid-19, sans lequel l’impact social sur les familles maro-caines auraient pu s’avérer autrement catastrophique.Bien entendu, d’aucuns exciperont, sans avoir tort, que de telles initiatives ne font pas partie du périmètre d’action de M. El Othmani, mais aux dernières nouvelles le Chef du gouvernement n’a jamais pris sur lui d’élaborer, dans les premiers jours de la pandémie, la moindre feuille de route et, éventuel-lement, de la soumettre. Résultat des courses, le Maroc peut s’enorgueillir

LE ROI MOHAMMED VI A JOUÉ UN RÔLE CLÉ, TOUT AU LONG DES DERNIERS

MOIS, DANS LA GESTION DE LA PANDÉMIEAU PLAN NATIONAL.

Industrie, Tourisme, Culture). Soit neuf départements sur seize, en ne comp-tant même pas le secrétariat général du gouvernement et quatre des cinq ministères délégués. Est-ce une bonne chose? Peut-être pas eu égard au choix démocratique entériné par le Ma-roc le 1er juillet 2011, au titre de sa vota-tion pour la présente Constitution, mais si l’on en juge à partir du bilan d’étape qu’on pourrait à ce jour dresser, la ré-ponse est autre, et ce en particulier par les temps de Covid-19 qui courent.Ainsi, si le Royaume a autant droit, en ce moment, aux louanges des médias internationaux quant à sa gestion ju-gée, sans doute à très juste raison, gé-néralement efficace et exemplaire de la pandémie, ce n’est certainement pas grâce au PJD, qui en plus d’avoir som-bré dans l’attentisme, à commencer par M. El Othmani lui-même qui n’a “pas de vision” -comme il le reconnaissait de son propre chef le 7 mai dans l’inter-view accordée à la chaîne de télévision Al-Aoula-, n’a même pas voulu assu-mer la politique qu’il mettait en oeuvre: le Chef du gouvernement prenait ainsi bien soin au parlement, le 18 mai, de préciser au préalable que la stratégie de déconfinement qu’il était venu pré-senter sous la coupole de l’institution législative était “une oeuvre collective”, c’est-à-dire pas seulement la sienne, sans oublier que le secrétariat général de la formation islamiste s’inscrivait en faux le 16 mai, par anticipation, contre cette “oeuvre”; soufflant là, de façon flagrante, le chaud et le froid.

Sombré dans l’attentismeEt pendant ce temps, les “technos” se retrouvaient en première ligne: sûr que leurs décisions n’ont pas été toutes heureuses et que même, en diverses occasions, elles ont été malencon-treuses et lourdes de conséquences -on peut, à ce titre, citer la gestion à tout le moins catastrophique du sort des Marocains bloqués à l’étranger de-puis la fermeture des frontières le 15

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aujourd’hui d’avoir à sa tête un chef d’Etat de l’acabit du roi Mohammed VI, et sans doute moins des tenants de son Exécutif. Ainsi, s’il a beaucoup perdu au change, comme pratiquement tout le monde, de-puis le début de la pandémie et devrait encore perdre davantage au cours des prochains mois que ce soit aux plans économique ou social, le Royaume n’en sort pas moins grandi. Désormais, d’aucuns le considèrent comme un partenaire encore plus crédible, no-tamment en Europe qui pourrait bien, à l’avenir, y relocaliser une partie de son appareil productif chinois -au cours de ses entretiens du 27 avril avec le ministre de l’Industrie, du Commerce et de l’Économie verte et numérique, Moulay Hafid Elalamy, la vice-prési-dente exécutive de la commission eu-ropéenne et commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager,

LE ROYAUME A EU DROIT AUX LOUANGES DES MÉDIAS INTERNATIONAUX QUANT À SA GESTION JUGÉE EFFICACE ET EXEMPLAIRE.

sans le dire ouvertement, s’y était mon-trée plutôt favorable-, et ce d’autant plus que les capacités de production marocaines se sont montrées au grand jour: masques surtout, à raison de 10 millions d’unités par jour, et peut-être bientôt des respirateurs et des kits de tests, puisque les compétences natio-nales ont également profité de la pan-démie pour faire montre de leur qualité et de leur ingéniosité.

Monarchie parlementaireEt c’est, dans le même sillage, que des institutions internationales telles la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI), le Fonds monétaire arabe (FMA) et la Banque africaine de développement (BAD) ont accep-té, au cours des dernières semaines, de l’aider financièrement, ceci étant la preuve la meilleure que la confiance à son endroit demeure à son comble. De

quoi surtout, au passage, davantage faire jouer le “soft power” marocain notamment au niveau de l’Afrique en tant que modèle à proprement par-ler endémique, sachant que le Maroc s’était par ailleurs illustré le 13 avril par l’initiative lancée conjointement avec la Côte d’Ivoire et le Sénégal d’établir un cadre opérationnel pour accompa-gner les pays du continent à faire face au Covid-19 -à noter également, dans le même sens, la mise à disposition du Mali, le 11 avril, de la clinique pé-rinatale inaugurée par le Royaume fin février 2017 dans ce pays. En juillet 2019, deux conseillers du Roi, à savoir Omar Azziman et Abdeltif Mennouni, avaient transmis dans une interview qu’ils avaient accordée à l’Agence France-Presse (AFP) le voeu royal de poursuivre “dans le trajet d’une mo-narchie parlementaire”, avec, comme on peut le deviner, des partis forts qui jouent un rôle effectif dans la gestion de la chose publique. Mais il faudra à l’évidence que ces derniers, du moins ceux sont qui sont présents à l’heure actuelle dans le gouvernement, se mettent au diapason... l

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PAR MAROUANE KABBAJ

Le Maroc relève le défi de la pandémie du Covid-19

C’EST L’HEURE DU BILAN !Somme toute, le Maroc a relevé haut la main le défi de faire face, sans y être préparé à l’avance et avec le peu de moyens humains et matériels médicaux dont il disposait, à cette pandémie dévastatrice. Une épidémie qui a permis de comprendre que l’investissement dans la santé, l’enseigne-ment et la recherche scientifique doit être le pilier de notre nouveau modèle de développement.

À quelques jours du déconfine-ment, et au vu des indicateurs sanitaires positifs, notamment le taux de reproduction, qui a atteint 0,7%, et le taux de mortalité, qui ne dépasse point

2,6%, l’on peut avancer que tous les ingré-dients sont réunis pour dire que la pandémie est derrière nous. Pas plus que 600 ou 650 malades suivent encore actuellement le pro-tocole thérapeutique de traitement basé sur l’hydroxycholoroquine et l’azytromicyne, qui donne des résultats incroyables: entre 250 et 400 guérisons au quotidien ces derniers jours. La courbe des contaminations reste volatile mais nettement en deçà de la moyenne des chiffres terrifiants des premières semaines suivant le décrétement de l’état d’urgence sa-nitaire.

Somme toute, le Maroc a relevé haut la main le défi de faire face, sans y être préparé à l’avance et avec le peu de moyens humains et matériels médicaux dont il dispose, à cette pandémie dé-vastatrice qui a fait près de 400.000 morts de par le monde.

Un diagnostic sans fardLe Maroc figure même parmi les pays qui ont compté le moins de victimes dans le monde. Et peut-être même le moins de cas de contami-nations. Quand bien même les débuts étaient timides et la vigilance relativement faible. L’on se rappelle le retard pris par le ministère de la santé et le gouvernement en général à prendre les signaux de la propagation de ce nouveau coronavirus au sérieux. Saâd Eddine El Othmani, Chef du gouvernement, avait fait une sortie trois jours avant l’annonce officielle

de l’état d’urgence sanitaire pour dire que le Maroc est encore au premier stade alors qu’il ignorait que la maladie avait fait sa métastase dans la société tel un cancer. D’ailleurs, Maroc Hebdo a été le premier journal et média à avoir alerté sur le risque de transmission du virus via les frontières ouvertes avec des pays comme la Chine ou encore des pays européens où la pandémie se propageait sournoisement comme la France et l’Italie, quatre semaines avant l’annonce de l’état d’urgence sanitaire, au travers deux numéros: Alerte maximale (21 février) et Un gouvernement déconnecté (6 mars). Mais lorsque le Roi Mohammed VI a pris les choses en main, la donne a changé. Une stratégie en bonne et due forme basée sur un diagnostic sans fard a été établie avec des axes et tactiques clairement définies. La colonne vertébrale de cette stratégie était

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indiscutablement la décision royale de la créa-tion, le 20 mars 2020, du Fonds spécial pour la gestion de la pandémie du Covid-19. La créa-tion de ce Fonds avait un double objectif: sup-porter sur le plan financier les répercussions de la pandémie sur l’économie nationale et les catégories sociales vulnérables d’office ou qui le sont devenues de ce fait et baliser le terrain à un élan de solidarité qui a dépassé toutes les attentes. Pour rappel, Maroc Hebdo a encore une fois été au rendez-vous (n°1340: Un élan de solidarité royal).

Déclarations contradictoiresLe groupe, ou plutôt la holding royale, Al Mada, a été parmi les premiers grands comptes à ouvrir le bal en injectant dans ce fonds de soli-darité 2 milliards de dirhams. Cela a créé bien des émules. Au final, la caisse a été dotée de plus de 33 milliards de dirhams. Un record et un exemple qui n’a pas manqué de susciter l’admiration de par le monde. Toujours est-il que la gestion des fonds collec-tés n’était pas très transparente. Personne n’a pu savoir qui a donné et combien il a donné, ni le montant des sommes allouées à telle ou telle destination... La communication a été le

faible du cabinet El Othmani. Des déclarations contradictoires du Chef du gouvernement et du département de la Santé basées sur les communiqués «intéressés» de l’OMS tour-naient parfois à la dérision. Puis, tout le monde se rappelle encore l’interview de M. El Othmani sur les chaînes de télévision publiques où il a déclaré, alors que tous les regards étaient rivés sur lui, qu’il n’a pas de vision au sujet déconfi-nement. Même en s’adressant aux représen-tants des deux chambres du Parlement, le 18 mai 2020, M. El Othmani n’avait pas donné de visibilité ni aux opérateurs économiques ni aux citoyens. Il décidera alors de prolonger, pour la troisième fois, le confinement. Le lendemain, son ministre des Finances le désavoue au Parlement en invitant les opérateurs à relan-cer la machine économique juste après l’Aïd El Fitr et dix jours avant la fin de la période du confinement. De son côté, le ministre de

la Santé a brillé par son silence et son mépris de la presse marocaine. Depuis le début, il a donné ses instructions à son équipe de com-munication pour «se la boucler». Que des communiqués de presse «froids» ont ponctué cette période de confinement. Il fut sauvé par un médecin, du nom de Mohamed Youbi, di-recteur de la direction de l’épidémiologie, et qui a pu enrichir les articles de presse par ses chiffres et statistiques.

Une bravoure inégaléeD’autres ministres étaient aux abonnés ab-sents alors qu’ils sont les premiers concer-nés et censés être au premier front contre la pandémie: Nezha El Ouafi, ministre déléguée chargée des Marocains résidant à l’étranger, Mohamed Amkraz, ministre du Travail, et Ja-mila El Mossalli, ministre de la Solidarité, du Développement social, de l'Egalité…

QUEL ENSEIGNEMENTS DOIT-ON TIRER D’UNE TELLE EXPÉRIENCE, GLOBALEMENT TRÈS

RÉUSSIE ET INÉDITE?

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Mais, à part ces failles communicationnelles et l’inactivité de certains ministres, parlementaires et des partis politiques, tout va bien. Les méde-cins et les infirmiers ont fait montre d’une bra-voure inégalée et d’une abnégation sans limites, sachant qu’ils ont travaillé dans des conditions difficiles, au-delà des heures de travail réglemen-taires, parfois avec des moyens limités. Ils ont risqué leurs vies pour sauver celles des autres. Certains d’entre eux nous ont quittés. Une recon-naissance nationale post-Covid-19 doit leur être rendue. Quant aux forces de l’ordre (policiers, gendarmes, militaires, forces auxiliaires, agents d’autorités), rien ne peut décrire leur patience. Ils ont dû traiter avec des récalcitrants, des «insou-mis», des «révoltés» intraitables.

Les conséquences d'une catastropheParfois, ils ont joué le rôle de pédagogues avec des personnes âgées ou illettrées. Par moments, ils devaient fait preuve de fermeté et devenir intangibles pour faire respecter le décret-loi portant sur l’état d’urgence sanitaire et les mesures y afférentes. Dans son édition du 3 avril, Maroc Hebdo avait titré Chapeau bas, MM. Laftit et Hammouchi (respectivement ministre de l’Intérieur et directeur géné-ral de la direction générale de la Sûreté nationale).La presse, aussi, a donné l’exemple en matière de patriotisme en endossant l’habit d’un encadreur, d’un sensibili-sateur mais aussi d’un lanceur d’alerte en cas de dépassements et de déra-pages. Tout bien pensé, quels enseignements doit-on tirer d’une telle expérience, glo-balement très réussie et inédite? C’est que la gestion des crises ne s’impro-vise pas. Que les stratégies déployées servent à détecter des failles et dys-fonctionnements auxquels il va falloir remédier au sortir de cette pandémie. Et, au vu des découvertes, des innovations et des créations mises au point par des jeunes chercheurs marocains et par des médecins et des scientifiques, que la santé, l’enseignement et la recherche scientifique doivent être les piliers de notre nouveau modèle de développement et de notre volonté de faire partie des clubs des pays émergentsl

L’air sérieux, décontracté, il inspirait confiance aux télés-pectateurs qui se sont habi-tués à son rendez-vous sur

les deux chaînes Tv publiques tous les jours à 18h (16h pendant le Ramadan). Accessible, didactique et méthodique, c’est ce que les journalistes retenaient de lui. Lui, c’est Mohamed Youbi, direc-teur de la direction de l’épidémiologie au sein du ministère de la Santé. Il maîtri-sait ce qu’il disait. Avec lui, nous avons vécu les pires moments de terreur en-gendrés par le pic de contamination au

coronavirus comme les moments où l’on entendait les soupirs et les «ouf» de soulagement à l’annonce de la baisse conséquente et continue du nombre de contaminations, de décès et de hausse des cas de guérisons ou de rémissions. Lorsqu’il a fait sa première apparition,

son ministre était fortement critiqué pour son dénigrement de l’utilité de la communication. On surnommait Khalid Aït Taleb «le radin» en termes de com-munication publique. Sachant que ce dernier porte la cas-quette d’homme politique et que son directeur central est médecin, les deux étaient comptables au point de vue communicationnel. Là où Aït Taleb a failli, Youbi a excellé, quand bien même il n’était pas prédisposé à jouer ce rôle capital durant cette crise sanitaire inha-bituelle. Puis, à l’improviste, sans préavis, sans préparer des millions de Marocains qui se rassuraient et se rassérénaient à travers cette unique communica-tion gouvernementale quotidienne, Aït Taleb sort l’artillerie lourde, les griffes du pouvoir que lui confère son poste de ministre pour mettre fin à la belle aven-ture de M. Youbi. Par jalousie, dans ce sens où Youbi lui a volé la vedette par les temps qui courent? Ou bien s’agit-il d’une sanction, dans ce sens où Youbi aurait été mécontent de constater des abus ou des dysfonctionnements ou même des marchés non transparents? Dans les deux cas, cette décision est non seulement maladroite, mais elle est irréfléchie et à haut risque. Car comme pour un directeur financier d’une société cotée en Bourse limogé en catimini, où les investisseurs ont la puce à l’oreille et commencent à douter de la bonne gestion de leurs fonds, les Marocains et les responsables doivent se demander pourquoi Youbi a été mis à l’écart. La réponse à cette question ouvrira certes la boîte de Pandore des choses ina-vouées et «tues» pendant cette crise sanitaire l

Qui a fait taire Mohamed Youbi?

LE DIRECTEUR DE L'ÉPIDÉMIOLOGIE À L'ECART

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Protéger autant que possible

Développement du système na-tional de sécurité et de santé au travail, développement de la formation en matière de sé-

curité et santé de travail, promotion de la culture de prévention et le renforcement de la gouvernance, dialogue social et di-mension territoriale, tels sont les quatre objectifs stratégiques qui font partie, dé-sormais, de la politique nationale de santé et de sécurité au travail (SST) présentée par le ministre du Travail et de l’Insertion professionnelle, Mohamed Amkraz, lors du Conseil de gouvernement réuni jeudi 4 juin 2020, par visioconférence, sous la pré-sidence du Chef de gouvernement, Saâd Eddine El Othmani.S’exprimant à l’ouverture de cette réunion, El Othmani s’est dit fier des réalisations collectives du Royaume face à la pandé-mie, sous la conduite éclairée de S.M. le Roi Mohammed VI, tout en rappelant que la dernière initiative en date est l’appel du Souverain au patronat à déployer une opé-ration de dépistage massif pour limiter le risque de propagation du virus. Il n’a pas manqué, aussi, de souligner que S.M. le Roi a donné ses instructions au ministère de la Santé de mettre à la disposition de la CGEM ses moyens matériels et humains. Cette action est de nature à accélérer la re-prise de l’activité économique au Royaume, à alléger l’impact sur les caisses de l’État et à préserver la santé des travailleurs et celle de leurs proches.

Objectifs opérationnelsRappelons qu’un sous-comité tripartite, re-levant du Conseil de médecine du travail et de prévention des risques professionnels, a été chargé, en effet, de suivre le projet de d’élaboration de la politique et du pro-

gramme national de santé et de sécurité au travail pour la période 2020-2024. Politique qui sera déclinée à travers 22 objectifs opérationnels et 70 mesures. Soit autant de mesures générales qui, pour être effi-caces, doivent s’adapter aux spécificités particulières de chaque secteur écono-mique. L’agriculture n’est pas l’industrie et encore moins le tourisme, le transport ou le commerce en général. Le secteur des services est, en effet, celui qui risque de poser le plus de problèmes vu les difficultés éprouvées durant le confine-ment par une grande partie des entreprises du secteur. Quant au secteur industriel, il a beaucoup souffert de la multiplication des cas de contamination enregistrés. À part les mesures de distanciation sociale et autres mesures de prévention (masques, gel hydro-alcoolique, appareils de mesure de la température, etc.) à prendre, le dépis-tage des salariés et ouvriers s’avère être une charge de plus que certaines entre-prises auront du mal à digérer. Seddik MOUAFFAK

Le ministre Amkraz ne peut rester insen-sible à ces difficultés et ce, d’autant plus qu’il s’est préalablement concerté avec l’ensemble des secteurs gouvernementaux concernés ainsi qu’avec les organisations professionnelles des employeurs et em-ployés, lors de l’élaboration des projets de la politique et du programme national de santé et de sécurité au travail. Élabo-ration qui s’est réalisée conformément aux engagements internationaux du Royaume. «Engagements résultant, notamment, de la ratification de la Convention internationale du travail n°187 sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, adop-tée par l’Organisation internationale du Tra-vail en 2006». L’objectif n’étant autre que d’améliorer de façon continue le domaine de la santé et de la sécurité au travail, de prévenir les dangers au travail et d’initier des mesures effectives pour l’instauration d’un environnement de travail sain l

Il est nécessaire de préserver la santé des travailleurs en tenant compte de particularitéset contraintes sanitaires inhérentes aux différents lieux de travail.

PRÉSENTATION EN CONSEIL DE GOUVERNEMENT DE LA POLITIQUE NATIONALEDE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ AU TRAVAIL PAR LE MINISTRE DE L’EMPLOI

Mohamed Amkraz

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Il était seul contre tous, il devient ra-pidement le centre du monde. Icône planétaire de la lutte contre le Co-vid-19, le célèbre infectiologue fran-çais, Professeur Didier Raoult, a vu

sa popularité grimper en flèche après la décision de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de reprendre les essais cli-niques sur la chloroquine, quelques jours seulement après les avoir suspendus sur la base d’une étude foireuse et bidonnée publiée, le 22 mai 2020, par le magazine médical The Lancet. Ce dernier, pourtant réputé prestigieux dans le monde de la médecine, a annoncé officiellement, jeudi 4 juin, le retrait de son étude qui suggé-rait que l’hydroxychloroquine, associée à un antibiotique comme l’azithromycine, augmentait la mortalité et les arythmies cardiaques chez les patients atteints du Covid-19. Un scandale scientifique qui s’est transformé en scandale politique après que l’OMS et de nombreux pays européens comme la France aient suivi, d’une manière aveugle, les recommanda-

tions de cette étude sans avoir vérifié son contenu et procédé aux contre-analyses pour authentifier les informations qui y sont rapportées.

Un scandale scientifiqueLe Professeur Didier Raoult a été le seul médecin à s’opposer à cette étude, qu’il a qualifié de «foireuse». Invité vedette des plateaux télé en France, il n’hésite pas à montrer sa suprématie scientifique, no-tamment dans le domaine des maladies infectieuses où il est devenu, incontesta-blement, le plus grand spécialiste. Sur la chaîne d’information française BFM TV, à laquelle il accordé une longue inter-view de près d’une heure, mercredi 3 juin 2020, M. Raoult s’est montré particulière-ment offensif et sûr de lui face aux deux journalistes, Ruth Elkrief et Margaux de Frouville, qui l’interviewaient. Plus que le fond, c’est la forme qui a un peu surpris et entraîné de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. En témoigne une séquence durant laquelle il demande aux

Professeur Didier Raoult persiste et signeSur la chaine d’information française BFM TV, à laquelleil accordé une longue interview de près d’une heure, mercredi 3 juin 2020, Professeur Didier Raoult s’est montré particulièrement offensif etsûr de lui face aux deux journalistes, Ruth Elkrief et Margaux de Frouville,qui l’interviewaient. Un véritable show duquel le célèbre médecinest sorti largement vainqueur.

STAR PLANÉTAIRE DE LA LUTTECONTRE LE COVID-19

deux journalistes de se taire pour le lais-ser terminer son argumentation: «Chut! Taisez-vous! Vous avez posé une ques-tion, je vous réponds.» Pour certains, il a fait preuve d’humour et de confiance en soi. Pour d’autres, Didier Raoult s’est montré prétentieux, refusant ainsi la contradiction. Mais, dans le fond, il af-fiche une grande carrure d’un chercheur hors norme. «Je relis cinq à six papiers par jour, c’est mon métier, je suis éditeur de la plupart des revues sur les maladies infectieuses. On ne peut pas me leurrer comme ça. Que les gens du Lancet se soient fait leurrer comme ça, c’est inima-ginable.» Avant d’ajouter: «J’ai honte, on est dans une situation atroce. Des revues

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les dix meilleurs chercheurs français les gens ne le savent pas.» Avant d’ajouter: «C’est comme si vous compariez Kylian Mbappé (célèbre attaquant du Paris Saint Germain et de l’équipe de France de Football) à un gardien de but de troisième division. Au bout d’un moment, vous sa-vez que Mbappé n’est pas pareil, mais que vous ne sachiez pas que moi, je ne suis pas pareil…». Reconnu désormais comme une sommité mondiale de la recherche médicale, le di-recteur de l’institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée infection de Marseille apparait actuellement comme le médecin à qui la communauté scientifique interna-tionale accorde une crédibilité inébran-lable par rapport à sa gestion juste et efficace de la crise du coronavirus sur la base de son célèbre traitement à la chlo-roquine, adopté par de nombreux pays comme protocole thérapeutique contre le Covid-19. Le Maroc a été un des pre-miers pays qui l’ont très tôt adoptée et les résultats sont là pour justifier l’efficacité de la chloroquine. Le taux de guérison dans notre pays atteint actuellement plus de 90%. Un pourcentage remarquable qui prouve les grandes vertus thérapeu-tiques de ce traitement initialement des-tiné à traiter le paludisme notamment en Afrique.

Une crédibilité inébranlableMais, au-delà du sujet de la chloroquine, les avis tranchés et peu consensuels de Didier Raoult sont entrés dans l’histoire de la médecine. Depuis plusieurs se-maines, le chercheur assure que l’épi-démie du coronavirus est en train de se terminer. Il a récemment réaffirmé avec assurance son positionnement. Le Pro-fesseur a expliqué que la majorité des maladies saisonnières ont une courbe en «U» et que le Covid-19 n’y fait pas ex-

ception. D’après Didier Raoult, «il n’y aura pas de seconde vague pour des raisons très complexes et extrêmement difficiles à comprendre». Toutefois, interrogé sur une résurgence de l’épidémie à l’autonome, le virologue s’est montré prudent: «l’avenir est toujours imprévisible». Ce fils de médecin militaire, natif de Da-kar en mars 1952, a toujours des attaches importantes en Afrique, dont il prédit par ailleurs qu’elle ne connaitra pas une vague considérable du Covid-19 comme celle qu’ont connue les pays européens et américains. Didier Raoult estime, en effet, que la crise du coronavirus dispa-raîtra rapidement de l’Afrique. Une pré-monition qui lui a attiré de nombreuses critiques dans la communauté scienti-fique en Europe. Combattu en France et ailleurs, notamment par les politiques, qui n’hésitent pas à l’accabler, notamment l’actuel ministre français de la santé, Oli-vier Véran, qui le traite d’«irresponsable», Didier Raoult est néanmoins soutenu par plusieurs groupes français dont le célèbre groupe de l’industrie de luxe, LVMH, de son richissime propriétaire, Bernard Ar-nault. Ce dernier contribue financière-ment par plusieurs centaines de millions d’euros aux travaux de recherche réalisés par Professeur Raoult et ses équipes de 800 chercheurs. Un soutien précieux qui l’a accompagné pendant de nombreuses années et sans lequel le célèbre infectio-logue n’aurait probablement pas pu cu-muler les succès médicaux. Fier de son étoile dans le monde de la re-cherche et la médecine, Professeur Didier Raoult affirme se consacrer exclusive-ment à ses recherches et à ses malades et écarte ainsi toute ambition politique malgré toute la popularité dont il jouit en France et désormais dans le monde en-tier l

LE PROFESSEUR RAOULT AFFIRMESE CONSACRER EXCLUSIVEMENT

À SES RECHERCHES ET ÉCARTE TOUTEAMBITION POLITIQUE.

Aissa AMOURAG

scientifiques publient des articles biaisés, tout est au service de leurs opinions.» Didier Raoult s’attaque frontalement aux journalistes en leur reprochant leur profonde méconnaissance des problé-matiques scientifiques, qui les empêche d’avoir une lecture pertinente du travail de ses équipes. Il s’est servi d’une mé-taphore footballistique pour vulgariser son propos: «Je trouve que la capacité à analyser la place des uns et des autres en science dans ce pays est mauvaise. Je pense que vous êtes plus compétents pour regarder les joueurs de foot. Donc si on vous demande qui sont les meilleurs joueurs de foot, tout le monde le sait par-tout mais si on vous demande quels sont

Professeur Didier Raoult.

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En ballottage pour six moisLe nouveau modèle de développement doit prendreen charge de manière audacieuse tout ce qu’il y aà entreprendre et à mettre en œuvre dans la régionalisationet la déconcentration.

UN DÉLAI SUPPLÉMENTAIREPOUR LA COMMISSION BENMOUSSA C’était prévisible; c’était

attendu... La Com-mission Benmoussa, dédiée à l’élaboration d’un nouveau modèle

de développement (CSMD), s’est vu ac-corder par S.M. le Roi un délai supplé-mentaire de six mois pour remettre donc son rapport en 2021. Pourtant, voici une quinzaine de jours seulement, elle avait fait savoir de manière indirecte que son travail respecterait le délai initial, à savoir la fin juin 2020. Elle avait expliqué à cette occasion que la méthodologie avait été adaptée à la situation de confinement créé par la pandémie du virus Covid-19; que les consultations se poursuivait sans relâche par visioconférence; et que, au final, tout allait pour le mieux. Las, le sentiment général qui prévalait était largement dubitatif. Pour plusieurs

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question de la santé, l’ordre des priori-tés de départ était bouleversé alors que ce secteur n’avait point le même rang. Une autre raison a pesé sur le travail de la CSMD durant les premiers mois de cette année. De l’écoute, oui, bien sûr; la proximité, aussi; des dizaines de rencontres avec des partenaires sociaux et économiques, des associations, des ONG et d’autres, enfin. Un tour de table élargi à des personnalités extérieures de renom dans leurs domaines respec-tifs qui n’a pas été sans intérêt. Mais la difficulté qui est apparue finalement était pratiquement la surabondance des infor-mations et des documentations -ce que l’on pourrait appeler le «trop plein»... Comment dès lors en extraire la substan-tifique moelle, autrement dit un corpus, un cap, des axes et, si possible, des dé-clinaisons en politiques publiques? Plus encore: suivant quelles séquences? La pandémie du Covid-I9 a retoqué les textes en préparation et en cours de délibération. Si bien des modélisations, sophistications ont été arrêtées, il leur manquait toute une irrigation d’ordre éminemment politique. Ce nouveau mo-dèle est -et doit être- une production na-tionale pouvant être «marketée» auprès des acteurs et des citoyens. Il doit pou-voir entraîner l’adhésion; il doit offrir les conditions optimales d’un portage par les décideurs: il doit contribuer fortement à redonner et à restaurer la confiance sur cette problématique: celle de l’espoir d’un Maroc différent, plus démocratique, plus solidaire.Dans cette perspective, le chantier est vaste. L’attente est désormais pour un Etat social privilégiant la politique de protection (santé, assurance mala-die, indemnités de perte d’emploi et de chômage,…). Dans cette même ligne,

se pose la question de l’équité avec de l’assiette fiscale et une réforme de l’IR pesant lourdement sur les classes moyennes. Il faut y ajouter une profonde réarticulation institutionnelle. Le nouveau modèle de développement doit prendre en charge, de manière au-dacieuse même, tout ce qu’il y a à en-treprendre et à mettre en œuvre dans la régionalisation et la déconcentration. Priorité donc aux territoires, à leurs ha-bitants, à l’inclusion du monde rural! L’intelligence artificielle, c’est bien! Mais à condition qu’elle ne soit pas limitée à quelques «îlots» à Casablanca ou à Rabat et qu’elle s’inscrive dans une po-litique de basculement de tous et partout dans le monde de connaissance et du savoir. Avec cette pandémie, une grande avancée s’est faite avec la digitalisation d’une majorité de citoyens. Preuve que les conditions socioéconomiques ne sont pas rétives au changement et leur inclu-sion dans le monde numérique.Reste cette dernière interrogation: quels doivent être le statut et la place du poli-tique dans cette perspective pour 2021 et au-delà, à moyen et long termes? Idéale-ment, le rapport de la Commission doit dégager les pré-requis pour un renforce-ment de la cohésion sociale. Celle-ci gé-nèrera-t-elle en même temps un consen-sus alors que le système partisan est fragmenté et écartelé entre pas moins de 34 partis et surtout entre deux groupes de formations, l’une conservatrice à réfé-rentiel religieux, et l’autre prônant un pro-jet démocratique, social-démocrate, arri-mé à un autre référentiel? En tout cas, d’ici ce rendu de rapport de la CSMD, il y aura encore sept mois avec un état des lieux et bien des indicateurs au rouge... l

L’ATTENTE EST DÉSORMAIS POUR UN ETAT SOCIAL PRIVILÉGIANT LA POLITIQUE DE

PROTECTION (SANTÉ, ASSURANCE MALADIE, INDEMNITÉS DE PERTE D’EMPLOI,…)

Mustapha SEHIMI

raisons. La première a trait précisément aux nouvelles conditions de l’impact de la crise sanitaire, sociale et économique liée la déclaration de l’état d’urgence le 20 mars. De l’imprévu, de l’inédit, de l’inconnu aussi. Les hypothèses et les pistes alors exploitables ne tenaient pratiquement plus la route. La somme de rapports, de documents et de contri-butions alors disponibles était ainsi for-tement décalée par rapport à la nouvelle situation.

Restaurer la confianceSi tous ces travaux, d’inégale valeur d’ailleurs, pouvaient être un matériau utile, tel n’allait plus être cas. Ils tablaient en effet sur des données existantes et, partant, sur des prévisions qui y étaient liées. Or, voilà que tout ce stock perdait rapidement de sa pertinence. Avec la

ChakibBenmoussa,L’attente est désormais pour un Etat social.

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Grande purge dans l’arméeALGERIE

Le régime du voisin de l’est s’inscrit encore dans la continuité: celle de la construction et de

l’instrumentalisation d’une conflictualité avec le Maroc

Loin de se stabiliser, la situa-tion en Algérie se complique. C’est d’autant plus vrai au sein de l’institution militaire, qui accuse une grande purge

depuis plusieurs semaines. Le 13 avril 2020, le général Ouassini Bouazza, qui dirigeait depuis avril 2019 la Direc-tion générale de la sécurité intérieure (DGSI), a été arrêté par des éléments de la Direction centrale de sécurité de l’armée (DGSA). Une fusillade a même marqué cette arrestation. Il lui est repro-ché officiellement son implication dans l’affaire des documents secrets volés dans le bureau de l’ex-patron décédé, le général Ahmed Gaïd Salah. Ce serait l’ancien secrétaire particulier de ce res-ponsable, Gharnit Benouira, qui aurait emporté avec lui ces documents ultra secrets en se réfugiant avec sa famille à l’étranger.

Système d’écoutesVéritable boîte noire de la haute hié-rarchie militaire, cet homme, qui n’était pourtant qu’adjudant chef, avait des pouvoirs importance, filtrant les dos-siers et gérant l’agenda de l’ancien chef d’état-major. Parmi les cibles de cette répression, figure également en bonne place le système d’écoutes contre des hauts responsables civils et militaires, dont le président Tebboune lui-même... Autre limogeage: celui du général Mo-hamed Bachar, remplacé par le géné-

ral-major Mohamed Kaidi comme chef du département Emploi-préparation chargé de toutes les actions et opéra-tions des forces aériennes et maritimes de l’ANP. Dans ce même chapitre, il faut encore noter la fin de fonctions du gé-néral Mohamed Boussis, président au tribunal militaire de Blida, et du colonel Mohammedi, procureur général près de cette même juridiction. Tous deux s’étaient distingués dans le procès des proches de l’ancien président, notam-ment son frère Saïd Bouteflika, les gé-néraux mohamed Médiène (dit Toufik) et Athmane Tartag ainsi que Louisa Ha-noun, responsable du parti des travail-leurs. Si celle-ci a été relâchée, cela n’a pas été les cas des autres accusés, qui ont été condamnés à de lourdes peines de 15 ans, de même que le général Khalid Nezzar et son fils à 20 ans de

prison par contumace. Tous ces spasmes tiennent sans doute à deux paramètres. Le premier a trait à la déconstruction du «système» Ahmed

LE PRÉSIDENT TEBBOUNE N’A PAS LA HAUTE MAIN SUR

L’ANP NI SUR LA COHORTE DES GÉNÉRAUX.

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vaut de noter qu’il a dirigé la 2ème région militaire (Oran) puis la 3ème (Béchar) avec cette mission: surveiller «les fron-tières dans le sud-ouest du pays, sécu-riser la région de Tindouf et lutter contre le trafic et la contrebande ainsi que les mouvements de troupes terroristes aux frontières ouest-algériennes». Depuis août 2018, il était le commandant des forces terrestres, succédant au général Lahcen Tafer, suite à la purge par Gaïd Salah de plusieurs régions militaires ainsi que des directions centrales au ministère de la Défense nationale.

Problèmes de sécurité Le général Chengriha est connu pour son hostilité à l’endroit du Maroc. Ainsi, à l’occasion de manouvres militaires dans la 3ème région de Béchar, il avait qualifié le Maroc d’«ennemi des Sahraouis et de l’Algérie»... C’est ce même responsable qui, en plein Ramadan, le mois dernier, a dirigé un exercice tactique avec des munitions réelles dans le secteur opé-rationnel sud Tindouf, près du mur de défense marocain (tirs de missiles, camions équipés d’orgues de Staline, chars, mitrailleuses montées sur des véhicules tout terrain, ...). Une provocation grossière! Qui menace qui? L’Algérie connaît des zones de ten-sion avec d’autres voisins tels que la Libye et le Mali où de gros problèmes de sécurité de ses frontières existent, pas avec le Maroc. Mais le régime du voisin de l’est s’inscrit encore dans la continuité: celle de la construction et de l’instrumentalisation d’une conflictualité avec le Maroc, Vieille recette de Ben Bella durant la Guerre des Sables (oc-tobre 1963, puis de Boumédiène et de ses successeurs, notamment Bouteflika (1999- 2019) l

CES SPASMES TIENNENT SANS DOUTE À LA DÉCONSTRUCTION

DU «SYSTÈME» AHMED GAÏD SALAH.

Gaïd Salah, qui avait mis sur pied une hiérarchie bâtie sur une structuration verticale de plus en plus marquée de-puis le départ du général Médiène de la direction du Département renseigne-ment et sécurité (DRS) en septembre 2015. Un acte qui avait conduit au dé-membrement de cet organe, entre plu-sieurs directions.

Trafic et contrebandeL’autre facteur n’est pas moins intéres-sant. Il regarde les nouveaux équilibres à trouver au sein de l’institution militaire par suite du décès du général Gaïd Salah et de l’élection du nouveau pré-sident. Abdelmajid Tebboune, élu le 19 décembre 2019, n’a pas la haute main sur l’ANP ni sur la cohorte des généraux ni sur ceux dirigeants des six régions

militaires (Blida, Oran, Béchar, Ouargla, Constantine, Tamanrasset). Il multiplie d’ailleurs les signes dans cette direction et la revue El-Djeich, organe de l’ANP, a cru devoir souligner dernièrement qu’il y avait une cohérence entre cette institu-tion et le nouveau chef d’Etat.Rien d’étonnant que dès le lendemain du décès du chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah, le 23 décembre 2019, le président Tebboune ait désigné son successeur en la personne du général Saïd Chengriha, pour assurer l’intérim de cette fonction. Dans son parcours, il

Le généralSaïd Chengriha.

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“La mesure de la gravité de la pandémie a été rapidement

prise par le gouvernement”

ENTRETIEN AVEC NOUREDDINE KOMIHA,acteur de la société civile et architecte

Deux mois et demi après l’an-nonce de l’état d’urgence sani-taire, quelle est votre appréciation de la gestion de la pandémie du Covid-19 au Maroc?Premièrement, je pense que le gou-vernement a réagi assez rapidement. Il a pris les dispositions nécessaires au bon moment. Il a pris le problème très au sérieux dès le début. C’est le sentiment que les Marocains ont eu. Moi, personnellement, j’ai été agréa-blement surpris par la discipline de mes concitoyens.Les consignes de confinement ont été généralement bien respectées, en dépit, bien évidemment, de cer-tains dépassements dans des quar-tiers où la densité urbaine est telle que le non-respect du confinement aurait pu provoquer un mal plus

Architecte diplômé de l’Ecole spéciale d’architecture de Paris et ancien enseignant à l’Ecole Nationale d’architecture de Rabat, membre fondateur de l’association des élèves des lycées français du Monde, membre fondateur de l’association Cobaty Maroc, Noureddine Komiha livre dans cet entretien un regard objectif de la gestion de la pandémie du Covid-19 depuis le début à ce jour.

important que le virus lui-même. Je pense particulièrement à des quartiers périphériques où des lo-gements sociaux étaient conçus beaucoup plus dans une optique de densité extrême. Pour nous archi-tectes, cela a fait surgir ce problème des quartiers à très haute densité qui autorise des promoteurs immo-biliers à construire des logements à densité extra-humaine. Dans ce cas de figure comme dans le cas des catastrophes naturelles, ce sont ces quartiers qui sont les plus touchés. Les gens dans ces quartiers sont confinés depuis toujours parce que la surface vivable est très réduite.Ceci dit, j’ai eu le sentiment de fier-té de voir des citoyens qui ont bien réagi. Je crois que le Marocain est très frileux dès qu’il s’agit de sa san-té. C’est l’instinct de survie. C’est ce qui a permis d’atteindre ce résultat très positif.

Quelle est votre appréciation par rapport à la réactivité du gouver-nement?La mesure de la gravité de la situa-tion a été rapidement prise par le gouvernement. C’est un point non négligeable. Les dispositions ont été

“ LES LOGEMENTS SONT GÉRÉS COMME S’IL ÉTAIT QUESTION D’UNE ÉQUATION MATHÉMATIQUE, ALORS QU’IL S’AGIT D’UNE ÉQUATION HUMAINE.”

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Propos recueillis par Marouane KABBAJ

bien suivies par les autorités locales et les forces de l’ordre. Je pense qu’il y a eu une prise de conscience assez rapide et une mobilisation générale autour de la stratégie de lutte contre le Covid-19. En sus de cela, on a eu des réactions conviviales. Il n’y a pas eu réellement de gestes d’autorité abusive. Même les autorités locales ont été très polies, voire parfois pé-dagogues en expliquant aux citoyens les consignes de confinement. Tout bien réfléchi, je trouve que c’est un bilan très positif. Je trouve aussi que le gouvernement a bien communi-qué.

Justement, par rapport à cette question de communication, beau-coup reprochent au gouvernement d’avoir failli. Qu’en pensez-vous?Il y avait des émissions quotidiennes à la télévision qui sensibilisaient les Marocains et leur expliquaient leurs droits et obligations et comment faire pour profiter des aides. Aussi, il y avait le rendez-vous quotidien du di-recteur de l’épidémiologie au minis-tère de la Santé qui communiquait sur l’évolution quotidienne de la si-tuation. Il y avait en plus une commu-nication sur les pages de certains dé-partements comme celui de la santé sur les réseaux sociaux.

On reproche à certains départe-ments de communiquer via les ré-seaux sociaux plutôt qu’à travers les canaux classiques…C’est vrai. Mais nous sommes en état d’urgence. A la limite, nous avons reproduit ce qui se fait à l’étranger, notamment en France. On a réagi à peu près de la même manière. Il y a le Chef du gouvernement qui a fait deux ou trois déclarations. Il y avait le ministère de la santé qui faisait deux communications par jour.

Sans se comparer à la France, était-ce suffisant?

Franchement, je trouve que c’était suffisant, avec toutes les informa-tions complémentaires auxquelles on avait accès sur les réseaux sociaux.

Quel appréciation faites-vous du bilan de la gestion de la pandémie Covid-19?Au regard des chiffres officiels rela-tifs au nombre des morts et des per-sonnes guéries et des cas de conta-mination, je trouve qu’on est mieux lotis que beaucoup d’autres pays. Je trouve le résultat excellent.

En tant qu’architecte et urba-niste, comment voyez-vous au-jourd’hui l’utilité et l’importance des balcons et des espaces verts dans les complexes résidentiels pour les personnes qui devraient faire face à une longue période de confinement?

C’est fondamental. Les logements, en général, sont gérés comme s’il était question d’une équation ma-thématique alors qu’il s’agit d’une équation humaine. C’est une erreur d’attitude.Et on va toujours droit dans le mur tant que cette équation du logement, qu’il soit résidentiel ou social, de-meure une équation mathématique, c’est-à-dire un calcul entre le prix du terrain, le prix de revient du logement et le prix de vente. Tant qu’on n’in-troduira pas cette notion d’humanité, il manquera toujours quelque chose à ce logement. Et des crises comme celle qu’on vient de vivre exacerbent le côté inhumain de nos logements de luxe comme ceux sociaux l

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Casa-Settat, la principale région économique du Royaume, a été très lourdement impactée par la crise du covid-19. Pour dépasser

cette situation et aller de l’avant, toute une série de mesures et de mécanismes secto-riels pour la relance dont été présentées lors de la première réunion du Comité de veille économique régional. Réunion présidée par le wali Saïd Ahmidouch. «Il s’agit là de la première réunion du CVE régional pour élaborer des mécanismes, dresser le bilan et établir un diagnostic détaillé de la situation économique de la Région Casa-Settat», a confié le wali.Situation le moins qu’on puisse dire est qu’elle est très inquiétante vu l’impact né-

gatif du Covid-19 sur l’ensemble des activi-tés économiques, notamment industrielles, puisque le chiffre d’affaires des industries installées dans la région Casablanca-Set-tat a chuté de 25% à 55% selon les filières. Sans parler de la baisse de l’emploi, qui a varié entre 30% et 85%.La rencontre s’est tenue au siège de la wi-laya de Casablanca, mercredi 3 juin 2020, en présence de Mustapha Bakkouri, pré-sident de la Région Casa-Settat, de Chakib Alj, président de la Confédération générale des entreprises (CGEM), du président du Conseil de la ville, Abdelaziz El Omari, des gouverneurs de provinces et préfectures, du représentant du GPBM, ainsi que des direc-teurs régionaux et délégués des ministères

La relance sera régionale ou ne le sera pasLE WALI AHMIDOUCH PRÉSIDE LE COMITÉ DE VEILLE DE CASABLANCA-SETTAT

Le wali Ahmidouch a tenu à rendre hommage à l’ensemble des médecins, infirmiers et autres assistants médicaux, qui ont fait preuve d’une forte mobilisation à tous les niveaux, souvent au péril de leur vie.

Seddik MOUAFFAK

de la Santé, du Tourisme, du Commerce et Industrie, de l’Agriculture, de l’Artisanat, du patron du Centre régional d’investissement (CRI), des Chambres professionnelles...

De multiples opportunitésL’enjeu n’était autre que d’évaluer les effets de la crise Covid-19 secteur par secteur et de mettre en place un plan d’actions décliné en mesures censées atténuer l’impact de la pandémie et surtout faciliter la relance de l’activité économique. «Il va falloir rester vigilants pour faire face aux retombées de la pandémie et surtout saisir les opportunités multiples qui peuvent en découler sur les plans économique et industriel», insiste Mustapha Bakkouri, pré-

sident de la Région. Pour repartir sur de bonnes bases, Chakib Alj, président de la Confédération patronale (CGEM), insiste sur l’adoption d’une approche «intégrée et inclusive» entre le privé et le public. Dans le même esprit, le patron des patrons a annon-cé le démarrage d’un «dépistage massif» dans les entreprises afin de protéger les sa-lariés et limiter la propagation du virus. À l’instar des autres intervenants qui ont fait le point sur leurs secteurs d’activités respec-tifs (agriculture, industrie et commerce, arti-sanat, etc.), Saïd Mouhid, directeur général du CRT de la région, a, notamment, indiqué que «les professionnels de la première desti-nation d’affaires du Maroc, qui ont su se mo-biliser de manière spontanée et citoyenne aux côtés de l’autorité et de la population pour contribuer gracieusement par leurs établissements et moyens à la lutte contre la pandémie, ne ménageront aucun effort et sacrifice et sauront affronter les difficultés qui s’annoncent» l

L’ENJEU EST DE METTRE EN PLACE UN PLAN D’ACTIONS DÉCLINÉ EN MESURES CENSÉES

ATTÉNUER L’IMPACT DE LA PANDÉMIE.

Saïd Ahmidouch, wali de la région Casa-Settat.

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Akram El Youssi, Monsieur fintech

Estimer la valeur réelle d’une entre-prise, voilà bien ce que cherchent quotidiennement tous les investis-seurs qui se respectent, et beau-

coup de ces investisseurs vont jusqu’à re-courir, pour leurs opérations, à des firmes spécialisées, moyennant souvent, au pas-sage, une rétribution conséquente. Dans ce sens, l’arrivée sur le marché marocain de la plateforme de banque d’affaires digi-tale “InstaVal”, basée à l’origine à Dubaï, aux Emirats, ne peut que représenter une opportunité pour les investisseurs na-tionaux, dans la mesure où l’algorithme qu’elle offre peut justement aider à déter-

miner cette “fair market value”, ou juste valeur de marché, et ce en quelques clics seulement.

Principal centre d’opérationsDans le détail, les investisseurs qui choi-sissent d’être présents sur la plateforme doivent répondre à une trentaine de ques-tions, représentant exactement 40 points de données, sur la base desquelles l’algo-rithme d’“InstaVal” va effectuer ses calculs et générer un document PDF donnant sa valorisation finale. Et à en croire son fonda-teur et président-directeur général, Akram El Youssi, “InstaVal” jouit aujourd’hui de la

Wissam EL BOUZDAINI

confiance des investisseurs: à ce jour, ce sont plus de 10.000 entreprises qui ont été valorisées par le biais de son algorithme, représentant une quarantaine d’industries et une cinquantaine de pays. “Cela nous a pris plusieurs années de dé-veloppement,” nous confie M. El Youssi, qui tient par ailleurs à souligner que l’al-gorithme d’“InstaVal” prend désormais en compte également l’impact de la pandémie de Covid-19. En se lançant au Maroc deux ans après la mise en place de sa compa-gnie au Golfe, M. El Youssi ne veut pas seulement aider à créer de la valeur ajou-tée dans son pays, puisqu’il est d’abord Marocain -il a vu le jour à Casablanca en 1976-, mais aussi faire du Royaume son futur hub de développement dans le reste de l’Afrique, car aujourd’hui les ambitions d’“Instaval” ne bornent plus au seul versant septentrional du continent en plus bien sûr du Moyen-Orient. “Si je me trouve à Dubaï, c’est d’abord pour des raisons pratiques car ici le climat des affaires est plus favorable, mais si j’en ai l’opportunité je ne manquerai bien sûr pas l’occasion de faire du Maroc mon principal centre d’opérations et de rentrer définitivement,” souligne M. El Youssi. Ce dernier a d’ailleurs, déjà, plusieurs années durant travaillé au Maroc, en ayant no-tamment été cadre de Procter & Gamble, Upline Group et CDG Capital et en fondant surtout, en 2010, son propre cabinet de conseil, Upside Capital, qu’il a finalement fait fermer en 2019. “InstaVal” n’est, pour ainsi dire, pas la première aventure en-trepreneuriale de M. El Youssi, mais c’est sans doute, celle-ci, à qui il donne le plus de valeur. Ce qui irait de soi... l

Le Maroc compte désormais un nouvel acteur de la fintech,à savoir la plateforme de banque d’affaires digitale “InstaVal” de son

fondateur Akram El Youssi, Marocain expatrié à Dubaï.

LA PLATEFORME DE BANQUE D’AFFAIRES DIGITALE “INSTAVAL” DÉBARQUE AU MAROC

Akram El Youssi,“InstaVal” jouitaujourd’huide la confiancedes investisseurs.

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La diversité marocaine ne trompe jamais

Le site web «Travel Daily News» spécialiste des voyages internatio-naux a désigné le Maroc comme l’une des destinations les plus pri-

sées par les touristes une fois que la pan-démie de la covid-19 aura diminué et que les restrictions sur les voyages internatio-naux seront facilitées. «Le pays est béni par la nature», a écrit le journal, soulignant le «merveilleux» littoral, les montagnes et la position du Maroc en tant que passerelle vers le désert du Sahara. La sortie a mis en évidence les ruines romaines de Volubilis, un site du patrimoine mondial de l’UNES-CO près de Meknès qui est généralement considéré comme l’ancienne capitale du royaume berbère de Maurétanie. Les mon-tagnes du Haut Atlas ou du Rif sont égale-ment un excellent lieu touristique où les vi-siteurs «peuvent faire de la randonnée dans la nature». Les touristes qui préfèrent des vacances à la plage peuvent surfer ou na-ger à Essaouira, «une ville côtière tranquille et relaxante».

Diversité exceptionnelle«Ou vous pouvez surfer dans les dunes de sable, faire de la randonnée à dos de chameau, ou tout simplement profiter d’une soirée dans le désert du Sahara dans des camps», poursuit l’article. Alors que Mar-rakech se mobilise pour attirer les touristes

nationaux dans sa médina tentaculaire et ses déserts adjacents, les visiteurs étran-gers devraient également se tourner vers la ville ocre. Travel Daily News recommande la chasse aux souvenirs dans la médina de Marrakech, où «vous pouvez réellement négocier et les commerçants ne le renon-ceront pas». Les touristes devraient également considé-rer le centre économique de Casablanca, «qui a figuré dans de nombreux films hol-lywoodiens». La meilleure destination dans la ville animée est l’emblématique mosquée Hassan II, selon le journal: «Si ce n’est pour prier, il suffit de regarder la merveilleuse ar-chitecture, qui a nécessité plus de 10.000 artisans.»Les rues labyrinthiques de Fès qui ser-pentent à travers la plus grande médina du Maroc sont idéales pour les touristes plus aventureux qui n’ont pas peur de se perdre. Fès est généreusement dotée d’une ma-gnifique architecture marocaine, a noté l’article, mettant en évidence les portes fi-nement sculptées qui peuvent faire de su-perbes séances de photos sur les réseaux sociaux.Outre les sites touristiques incontournables, Travel News Daily suggère aux visiteurs de considérer les chutes d’Ouzoud près de Beni Mellal et les grottes d’Hercule à Tanger. Les chutes d’Ouzoud à Azilal contiennent la Reda BENADADA

deuxième plus haute cascade d’Afrique, ce qui fait de ces cascades «l’un des endroits les plus célèbres du Maroc».Au nord, les grottes d’Hercule au Cap Spar-tel sont populaires parmi les touristes car elles invoquent le mystère et l’excitation de la mythologie romaine.Le secteur du tourisme au Maroc a été dure-ment touché par la pandémie de Covid-19, mais le ministère du Tourisme, les villes et les différents acteurs du secteur touristique élaborent des plans pour relancer les éco-nomies locales et redonner vie à l’industrie. Des offres touristiques compétitives pour l’été ont fait l’objet de la convention de coo-pération signée le 3 juin 2020, entre l’Asso-ciation régionale des agences de voyages, l’Association régionale des transporteurs touristiques terrestres, l’Association régio-nale de l’industrie hôtelière et l’Association des propriétaires et gérants de location de voitures à Tanger, et ce pour lancer l’opé-ration «Ntlakaw Fe Chamal» dans le but de proposer des offres communes à même d’attirer les touristes. De même, pour Mar-rakech, le conseil municipal de la ville et les professionnels du tourisme se sont focalisés sur une relance purement locale suite à la réunion tenue le 28 mai à la ville ocre. L’es-poir du secteur repose sur nous aujourd’hui, redécouvrons notre pays l

«Le pays est béni par la nature», a écrit le journal, soulignant le «merveilleux» littoral, les montagnes et la position du Maroc en tant que passerelle vers le désert du Sahara.

LE “TRAVEL DAILY NEWS” QUALIFIE LE MAROC COMME MEILLEURE DESTINATION POST-PANDÉMIE

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Sérieuses menaces sur le régime de la sécurité

sociale

La Caisse nationale de la sécuri-té sociale n’a jamais été aussi exposée qu’aujourd’hui. Grâce à tout le travail de restructuration et

de refondation du système de la sécurité sociale, mené d’ores et déjà par l’ancien patron de la caisse, Saïd Ahmidouch, ac-tuel wali de la région de Casablanca, la CNSS se retrouve actuellement au cœur de la grosse machine d’indemnisation mise en place par le gouvernement pour compenser financièrement les salariés du

secteur privé ayant perdu leurs emplois à cause du Covid-19. Mais malgré cette armada et cette solidité financière à toute épreuve, tout n’est pas rose pour cette institution devenue le symbole public de la sécurité sociale dans notre pays. Avec cette crise du Covid-19, les finances de la CNSS sentent malheureusement le vent tourner. En effet, Abdellatif Morta-ki, successeur de Saïd Ahmidouch, lors de sa prestation devant la commission de contrôle des finances publiques à la Aissa AMOURAG

Chambre des représentants, mercredi 3 juin 2020, a mis en garde contre l’as-sèchement des réserves de cette caisse dans les 18 prochaines années. L’actuel directeur général par intérim a indiqué que la CNSS pourrait enregistrer son premier déficit dès 2024, avant de perdre toutes ses réserves en 2038. «Ces prévi-sions sont basées sur une étude établie en 2018 visant l’évaluation du régime actuel des pensions et la proposition de scénarios de réforme, qui sont toujours en cours d’études par le Conseil d’admi-nistration de la CNSS», précise, ainsi, M. Mortaki.

Une situation délicateDes prévisions qui menacent sérieuse-ment l’équilibre financier de la caisse et, par-delà, c’est tout le système de la sécuri-té sociale qui pourrait s’effondrer. Mais de telles menaces ne semblent pas inquiéter outre-mesure le gouvernement, qui est en train de mettre en œuvre une couver-ture médicale et un régime de retraite au profit des travailleurs indépendants. Lors de son exposé devant la commission de contrôle des finances publiques à la Chambre des représentants, mercredi 3 juin 2020, au sujet de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), le ministre de l’emploi, Mohamed Amekraz, a affirmé que le projet vise plus de 5 millions de tra-vailleurs indépendants, en plus de leurs ayant-droits, ce qui permettra de faire bé-néficier un total de près de 11 millions de Marocains. Après la mise en œuvre des lois 98.15 et 99.15 relatives à la couver-ture sociale et au régime de retraite pour les catégories des professionnels libé-raux, des travailleurs indépendants et des personnes non salariées exerçant une activité libérale, sur laquelle le ministère travaille à grande cadence, plus de 90% des Marocains bénéficieront de la couver-ture sociale. Il est vrai que le projet est socialement am-bitieux, mais, pour beaucoup d’experts, il intervient à moment délicat où la caisse affronte une situation difficile qui pourrait être aggravée par la crise sanitaire l

La CNSS affronte dans 18 années un risque d’assèchement de toutes ses réserves financières. C’est ce qu’a révélé le directeur général par intérim

de la caisse, Abdellatif Mortaki, lors d’une réunion au Parlement. Mais de telles menaces ne semblent pas inquiéter outre-mesure le gouvernement

qui est en train de mettre en œuvre une couverture médicale et un régime de retraite au profit des travailleurs indépendants.

LA CNSS CONNAÎTRA SON PREMIER DÉFICIT FINANCIER EN 2024

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PAR DRISS AFILAL*

LE NEW DEAL MAROCAIN, QUEL FINANCEMENT ?

La particularité de cette crise est qu’elle nécessite d’agir à la fois sur l’offre et sur la demande. Pour la reprise de l’offre, il est urgent de soutenir les entreprises les plus impactées, notamment les PME (cellules de base de l’économie marocaine): subventions d’équipement et d’exploitation, allègement des prélèvements obligatoires, prescription fiscales pour les entreprises vulnérables, ré-duction du coût de l’argent par des bonifica-tions d’intérêt accompagnée d’un important rééchelonnement des crédits, diversifica-tion des sources de financement, création d’activité pour les entreprises à travers des projets de travaux publics, priorisation des entreprises nationales pour les commandes publiques, renforcement des fonds propres par des prises de participations, ... Quant à la demande, pour sa composante «consom-mation», l’épaulement des ménages est dé-terminant: aide aux ménages nécessiteux, exonération fiscale au profit des bas revenus, baisse de la TVA, indemnisation du chômage, développement et généralisation du système de protection sociale, hausse du volume et de la qualité des services publics. La réduc-tion des inégalités de revenus est primordiale lorsqu’on veut promouvoir l’activité par le gonflement de la consommation des mé-nages. Ce sont les ménages et les individus à revenus faibles qui ont une forte propension marginale à consommer.Ces mesures doivent être accompagnées par un vaste programme d’investissements dans les infrastructures. Il est évident qu’on a réalisé une avancée considérable dans ce domaine, mais on est loin d’une saturation des possibilités d’investissement public. Ce dernier a l’avantage de doter le pays en équi-pements de base, de contribuer à la baisse du chômage et de générer des effets multi-plicateurs.

La dette publique comme levier de croissance

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La pandémie qui frappe le monde actuellement et l’arrêt brutal de l’économie qu’elle a provoqué, conduisent les États, jusque-là soucieux de préserver les équi-

libres macroéconomiques et de contenir le déficit budgétaire, à réviser à la hausse leur degré d’intervention dans la sphère écono-mique et sociale. Le virus est en train d’être vaincu, et la bataille contre la pandémie va céder la place à la bataille contre la récession économique et les déséquilibres sociaux.Le redémarrage de la machine économique et la relance de l’activité qui devra lui suc-céder ne peuvent, cette fois, être laissés au bon vouloir des mécanismes spontanés du marché. Comme au lendemain de la grande dépression de 1929 et suite à la Seconde Guerre mondiale, l’Etat se révèle de nouveau comme le principal sauveur, celui qui tient les rênes pour piloter la rude remontée de la pente.Au Maroc, à l’exception de quelques libéraux fanatiques, le recours à l’Etat Providence au sens large est admis et même plébiscité par les observateurs/opérateurs politiques et éco-nomiques. La tâche est énorme vu la paralysie de nom-breux secteurs et le risque d’explosion du chômage.

On a ici quelques aspects de ce qu’on peut appeler le new deal marocain, faisant allu-sion, toutes proportions gardées, à la poli-tique de redressement de l’économie amé-ricaine diligentée par le président Franklin Roosevelt au début des années 1930.Ces efforts requièrent des moyens de finan-cement colossaux, des dizaines de milliards de dirhams. Le Fonds spécial de soutien covid-19 n’est pas inépuisable. Le recours à d’autres sources de capitaux est indispen-sable.À ce niveau, les spéculations vont bon train: augmentation des impôts, emprunt public à l’international, appel public à l’épargne in-terne, recours à la planche à billets, ...Précisons que cette analyse ne concerne pas la panoplie des possibilités de financement qu’on peut mettre à la disposition des agents économiques. Elle se limite au financement de l’Etat en tant qu’administration centrale.Peut-on relancer la machine économique en augmentant les impôts? Doit-on financer les dépenses publiques additionnelles par l’accroissement des recettes fiscales? Toute personne dotée d’un minimum de bon sens répondrait non. En effet la relance écono-mique exige le maintien des revenus des consommateurs et des marges bénéficiaires des entreprises à un niveau qui assure la montée de l’offre et de la demande, condition fondamentale pour la reprise.Il est cependant possible de pratiquer une fiscalité différenciée. Certaines activités n’ont pas souffert de la crise sanitaire, d’autres en ont même bénéficié puisqu’elles n’ont pas été affectées par le confinement: les opérateurs de téléphonie mobile, la grande distribution, les géants du web (Google, Facebook, ...), les laboratoires pharmaceutiques. L’Etat doit les mettre à contribution en les soumettant à des prélèvements plus soutenus.Quant aux autres entreprises, les allège-ments fiscaux et les subventions devront être conditionnés par l’obligation de s’approvi-sionner en biens intermédiaires (et éventuel-lement en équipements) auprès de fournis-seurs locaux.Dans ce contexte de crise, il est normal de prendre notre destin en main, de nous retrancher provisoirement derrière nos

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frontières, au moins pour les domaines où la substitution locale existe. La plupart des pays, et pas des moindres, sont en train de céder à la tentation protectionniste, appellent à la pré-férence nationale ou communautaire, incitent leurs entreprises à la relocalisation. Il est lé-gitime de mette en stand-by nos accords de libre-échange pour protéger nos entreprises et nos emplois, de revoir notre positionne-ment stratégique en renforçant nos relations Sud-Sud, où il est possible que la coopération et la complémentarité supplantent la dépen-dance et l’exploitation.Le recours à l’endettement public est incon-tournable. Le déficit budgétaire se creuse et se creusera encore plus à court et moyen termes sous l’effet de la baisse des recettes fiscales en raison du tassement de l’activité et de l’envol des dépenses publiques (mesures ci-dessus de soutien et de relance).La dette publique est décriée par les parti-sans de l’orthodoxie budgétaire. Ils consi-dèrent que c’est un fardeau pour les géné-rations futures. Ils ajoutent, en se basant sur «l’équivalence ricardienne», que la dette pu-blique d’aujourd’hui se traduira demain par un accroissement des impôts et que, dans ces conditions, les agents économiques, antici-pant cette hausse, auront tendance à épar-gner au lieu de consommer. Cet effet existe (études du Trésor français et de l’OCDE) mais reste limité.Il faut distinguer la dette et l’ampleur de la dette. Tant qu’elle est maintenue à un niveau soutenable (jusqu’à 60% du PIB, d’après le FMI), la dette publique constitue un levier de croissance. La rentabilité économique et sociale des investissements publics qu’elle permet de financer contribue à l’amélioration du bien-être de la population et de l’environ-nement des affaires (écoles, hôpitaux, équi-pements sportifs, infrastructures, ...).Il est opportun d’augmenter la part de l’en-dettement public extérieur en cette période de taux d’intérêt bas et parfois négatifs. La note de la dette souveraine du Maroc est relativement satisfaisante (qualité moyenne inférieure), Un atout pour lever des fonds à long terme. La quasi stabilité du dirham par rapport aux devises fortes, dans lesquelles

la dette est généralement libellée, plaide aussi en faveur de cette voie. Le risque de voir la contre-valeur en dirham de la dette pu-blique extérieure se renchérir est donc faible. C’est aussi un avantage dans la mesure où cela écarte la pression sur les taux d’intérêt qu’engendrerait un emprunt interne par appel public à l’épargne. Une hausse des taux d’in-térêt serait très pénalisante pour la demande de crédits et pour les institutionnels (dont les caisses de retraite) qui avaient acquis des obligations publiques à un taux d’intérêt bas. Dans un contexte où on espère que l’inves-tissement et la consommation jouent pleine-ment leur rôle de moteurs de l’activité écono-mique, il ne faut pas désavantager le secteur privé. On doit faire en sorte que l’élargisse-

ment de l’action de l’Etat ne confisque pas l’épargne disponible (éviter l’effet d’éviction).Le financement monétaire (création de mon-naie) n’est pas à proscrire. La tendance pri-vilégiée ces dernières années est de bannir les concours directs de la banque centrale à l’Etat (planche à billets). Elle peut cepen-dant lui procurer une aide indirecte en ra-chetant les effets publics que lui présentent les banques (opérations de refinancement). Certains économistes estiment qu’une fois la dette publique rachetée par la banque centrale, son remboursement peut être in-définiment reporté, ce qui équivaut à son annulation: «si les banques centrales ne réduisent jamais la taille de leurs bilans, la dette publique qu’elles détiennent est de fait annulée», estime Patrick Artus, directeur de la recherche de Natixis.Dans ces conditions, l’acquisition d’obliga-tions souveraines sur le marché primaire de la dette par les banques constitue un moyen de financement peu coûteux et peu contrai-

gnant pour l’Etat. Cela requiert la mise en place d’une politique monétaire expansion-niste (coût de refinancement faible ou nul) pour inciter les banques à aller dans cette voie. La création monétaire qui en résultera n’est pas inflationniste dans la mesure où l’offre est élastique. Les capacités produc-tives inutilisées permettront à la production de répondre rapidement à la hausse de la demande générée par la création monétaire et par l’action de l’Etat. Il s’agit là d’un arbi-trage entre les formes classiques de finan-cement du déficit public. Il est possible de mobiliser des fonds sup-plémentaires, notamment par la réduction du train de vie de l’Etat et par la privatisation totale ou partielle des entreprise et établis-

sements publics qui coûtent au budget plus qu’ils ne lui rapportent. Le renforcement du rôle de l’Etat est pri-mordial pour surmonter les difficultés éco-nomiques et sociales issues de la crise sanitaire. L’histoire récente nous révèle que même dans les pays champions du libéra-lisme, le recours à l’Etat s’avère incontour-nable pour sortir de la récession: Suède et Japon dans les années 1990, l’Union eu-ropéenne actuellement et en 2009/10, les USA en 2009, ... Les libéraux s’opposent farouchement à la hausse des dépenses publiques et du déficit budgétaire. Mais à situation exceptionnelle, mesures excep-tionnelles. Les temps difficiles qui se pro-filent à l’horizon exigent de passer outre les clivages politiques et les croyances idéolo-giques pour faire prévaloir le pragmatisme et le bon sensl

*Professeur à la faculté dessciences juridiques, économiques

et sociales de casablanca.

LES TEMPS DIFFICILES QUISE PROFILENT À L’HORIZON EXIGENT

DE PASSER OUTRE LES CLIVAGES POLITIQUES.

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Les kiosquiers boycottent la reprise EDITION PAPIER DES JOURNAUX

Les vendeurs de journaux et de magazines refusent de reprendre leur activité pour le 10 juin. Les kiosquiers dressent la liste de leurs conditions dans une lettre envoyée au groupe Edito Ventures, détendeur de Sapress et Sochepress, pour appeler à la nécessité d’un dialogue pouvant améliorer la situation des professionnels.

L’interdiction de l’impression des journaux par le gouvernement a fortement impacté l’activité des kiosquiers. Cette décision, imposée dans le cadre de l’état

d’urgence sanitaire décrété au Maroc pour limiter la propagation du Covid-19, a poussé plusieurs entreprises de presse à revoir leur mode de diffusion avec la création de journaux édités en support PDF sur les sites électro-niques des rédactions. Le ministère de la culture a donné son feu vert, le 26 mai 2020, pour la reprise de l’impression de la presse papier et des magazines, une autorisation étouffée par le boycott des kios-quiers, qui veulent faire entendre leur voix.

Une lente reprise de la demandeDistribution, moyens logistiques, ou mesures sanitaires… les kiosquiers refusent de re-prendre avant de s’entretenir avec les autori-tés concernées. L’Association casablancaise des vendeurs de journaux et de magazines a en effet adressé une lettre au groupe Edito Ventures, détendeur de Sapress et Soche-press pour aborder quatre points essentiels à discuter avant toute reprise. “Pour le moment, nous n’avons reçu aucune réponse, tout est

suspendu en attendant un retour favorable à nos demandes légitimes”, nous déclare Mohamed Chahid, du Syndicat national des commerçants et professionnels. Dans cette lettre envoyée à Amine Benchekri, directeur général de Sapress, les kiosquiers ont émis une demande d’échelonnement de

paiement pouvant leur permettre de régler leurs dettes, en respectant les pertes enre-gistrées en cette période et la difficulté d’une reprise rentable tout de suite. Les dettes évoquées concernent les factures impayées de la fourniture des marchandises, déjà ré-cupérées par les kiosquiers auprès de ladite

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Les kiosquiers boycottent la reprise

Lamiae BELHAJ SOULAMI

L’AMO, une préoccupation primaire Mis à part les problèmes liés à la reprise de l’activité, les commerçants et vendeurs des journaux et des magazines mènent une autre bataille, celle de la couverture sociale et médicale. En marge de plusieurs réunions avec le ministère du Commerce, les profes-sionnels du secteur sont toujours en phase de dialoguer pour la mise en place d’une formule convenable de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO). Le Syndicat national des commerçants et professionnels du secteur souhaitent mettre en place à travers des négociations organisées avec le ministère de tutelle, une formule qui soit équitable à travers une co-tisation fixée par zoning, par quartiers ou villes. “Nous ne pouvons pas comparer un kiosquier d’un grand boulevard à Rabat ou à Casablanca, à un kiosquier dans un petit quartier à Ouarzazate. Le gain n’est pas le

même et l’intensité de l’activité est très diffé-rente, c’est pour cela que nous insistons sur l’élaboration d’un projet qui contient quatre tranches et qui tient compte de la position et des revenus de nos professionnels, exac-tement comme pour la stratégie d’échelle dans la fonction publique”, détaille Moha-med Chahid. La Taxe professionnelle unique (TPU) reste la solution que proposent et soutiennent les kiosquiers. Cette taxe devra désormais en-glober la patente, l’IGR et l’AMO, et permet-tra donc aux vendeurs de bénéficier d’une assurance maladie équitable. Les discus-sions continuent entre les professionnels et leur ministère de tutelle dans l’attente d’une solution concrète et satisfaisante pour les deux côtés l

société. Selon Mohamed Chahid, membre de la commission administrative du syndicat cité, certains bureaux de vente spécialisés uniquement dans la vente de la presse ont enregistré une perte totale de leurs revenus. “Des commerçants ont fermé boutique et se sont retrouvés du jour au lendemain en

chômage technique et économique. Notre chiffre d’affaires repose à 70% sur la vente de revues nationales et internationales, et à 30% sur la vente des journaux quotidiens. Comment pourrions-nous maintenir notre ac-tivité dans le cadre d’une suspension totale de cette dernière avec l’interdiction du papier au Maroc, et la fermeture des frontières qui empêche le passage des revues internatio-nales”, s’interroge le responsable du Syndi-cat, ajoutant que les bureaux tabac-presse ont également vu leur chiffre d’affaires chuter de 70% pendant le Ramadan. “Pas de re-prise”, dit et redit le responsable du syndicat pour répondre à la décision de la relance du secteur, prévue le 10 juin 2020. Il ne s’agit pas de tenir tête tout court, mais cette action doit être précédée d’un protocole de travail détail-lé. “Les conditions actuelles sont différentes et très complexes. La reprise ne peut pas se faire si les mesures de confinement de crise

sanitaire sont toujours en place. Nous tra-vaillons en grande partie avec les cafés, les administrations publiques et les salariés des entreprises… Aujourd’hui l’activité est réduite, voire absente, au niveau de ces secteurs, donc nos clients principaux sont absents pour le moment”, explique Mohamed Chahid. À cette problématique d’une baisse ou d’une absence de la demande s’ajoute la carence enregistrée en terme de mesures sanitaires détaillées pouvant protéger les kiosquiers et leurs clients. “Le papier est manipulé par beaucoup de personnes avant d’arriver aux kiosques. Il est important de comprendre ce circuit complexe, pour poser des règles d’hy-giène qui nous protégeront ainsi que tout le monde du Coronavirus”, nous déclare Cha-hid, insistant sur l’importance de fournir des gels et des masques à tous les commerçants du domaine.

“ TOUT EST SUSPENDU EN ATTENDANT UN RETOUR FAVORABLE À NOS DEMANDES LÉGITIMES”Mohamed Chahid, du Syndicat national des commerçants et professionnels.

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L’élan de solidarité qui a marqué le déploiementde la stratégie nationale de lutte contre la propagation de la pandémie du Covid-19, étayée par la créationd’un Fonds dédié, a été exemplaire. A la bonne heure!

Mais pas au détriment de secteurs d’activité éco-nomique primordiaux comme la presse, la communication et

l’événementiel. Allons-y, step by step. Plusieurs grands comptes et entreprises de taille moyenne voire même petite ont puisé, en grande partie, dans leurs résul-tats nets, en d’autres termes leur profi-tabilité, pour injecter de l’argent dans le Fonds dédié à la gestion de la pandémie, en guise de solidarité. C’est ce qui a été annoncé et médiatisé. La caisse a donc été renflouée, ce qui a permis au Comi-té de veille économique, présidé par le ministre des Finances, Mohamed Ben-chaâboun, d’avoir de la visibilité et une grande marge de liberté pour allouer, selon l’urgence et la priorité, les aides aux entreprises et aux particuliers dans le besoin. Le pic de la pandémie est pratiquement derrière nous. Les dernières aides sont en train d’être acheminées à leurs desti-nataires. C’est l’heure des comptes. Mais la surprise, la grande et mauvaise sur-prise fut d’apprendre, par l’intermédiaire d’un ténor du secteur de la communi-cation, que les budgets injectés dans le Fonds spécial Covid-19 ont été pompés dans les budgets de fonctionnement des entreprises donatrices. De quels postes

budgétaires s’agit-il? D’après notre source, qui a requis l’anonymat, c’est principalement dans le budget de la com-munication et du marketing. Rien que ça! Tant pis alors! Pourquoi pas? Finalement, ce ne sont que des centaines de milliers d’emplois qui se retrouveront dans les prochains mois dans la rue.

C’est donc voulu. Autant donner bonne impression et donner d’une main ce qu’on a l’habitude de sortir de l’autre. Au final, on ne perd rien. Mieux, on gagne en termes d’exonération d’impôts. Et voilà le tour est joué. Ni vu ni connu. Mais c’est quoi, cette scène macabre? On tue un secteur ou deux pour en sau-ver d’autres. Et on passe pour des annon-ceurs philanthropes et des entreprises solidaires.

Dans le secteur de la presse, c’est un coup de massue. C’est l’épée de Damoclès qui achève un secteur maintenu en vie grâce à la respiration artificielle (des subven-tions étatiques s’entend). Un secteur dont le modèle économique est dual et repose ainsi sur les ventes et les recettes publi-citaires. Les ventes sont presque au point mort depuis des années déjà. Quant aux recettes publicitaires, avec le reste des 85% raflés par les GAFA (Google, Face-book…), ils vont faire leur deuil. En dépit des efforts de certains groupes qui conti-nuent malgré tout à communiquer, l’heure est grave. Les secteurs de la presse et de la communication vont vivre les pires époques de leur existence au Maroc. La presse marocaine s’est rendue à l’évi-dence, durant cette crise sanitaire, à quel point elle retenait l’attention du gouverne-ment. Hormis le geste de Othmane El Fer-daous, nouveau ministre de la Culture, de la jeunesse et des sports, qui a diligenté les subventions de 2020 tout en les condi-tionnant par la préservation des salaires des journalistes, M. Benchaâboun, pré-sident du Comité de veille économique, connu pour être un bon communicant, aurait pu s’enquérir et soutenir ce secteur qui ne se porte vraiment pas bien. Les sollicitations timides des acteurs du secteur ont peut-être donné cette impres-sion. Mais dans ce pays, tout se sait. Et la presse va très mal et risque de mettre, aux côtés des agences de communica-tion et de l’événementiel, la clé sous le paillasson. A bon entendeur cette fois! l

Les fonds de solidarité Covid-19 pompés des budgetsde communication et de marketing

NOUVEAU COUP DE MASSUE SUR LA PRESSE MAROCAINE

LA PRESSE ET LA COMMUNICATION

VONT VIVRE LES PIRES ÉPOQUES DE LEUR

EXISTENCE AU MAROC.

PAR MAROUANE KABBAJ

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L’Etat a laissé prospérer un lobby trop puissant

LE BRAS DE FER CONTINUE ENTRE LES PARENTS D’ÉLÈVES ET LES ÉCOLES PRIVÉES

L’ intervention du ministre de l’éducation nationale, Saïd Amzazi, dans le conflit qui op-pose les parents d’élèves aux

écoles privées, n’aura finalement rien donné. Bien qu’il soit encore un peu tôt pour en ju-ger, force est de constater, en revanche, que les écoles privées semblent toujours sourdes à l’appel du ministre. Le bras-de-fer entre les deux parties continue sur la voie publique avec des manifestations parentales quoti-diennes devant les écoles. Ce bras-de-fer s’est déplacé, récemment, devant la justice avec plusieurs plaintes déposées par les parents d’élèves contre les écoles de leurs enfants, qui refusent de réviser à la baisse les frais de scolarité. Il faut reconnaître que la crise du Coronavirus aura révélé le niveau impitoyable de cupidité et la course insatiable vers l’argent de ces écoles privées qui ont accumulé des fortunes considérables durant plusieurs années.

Exonérations fiscalesL’argent est devenu, sans le moindre doute, le seul objectif de ces écoles. Exit la pédago-gie et le savoir-faire. Ces établissements ont installé, au fil des années, une abominable stratégie de «marchandisation» de l’ensei-gnement, basée sur la collecte des fonds et le saignement systématique des familles, sans pouvoir offrir aux enfants une péda-gogique de qualité. Résultat des courses:

Plusieurs plaintes déposées par les parents d’élèves contre les écoles privées, qui refusent de réviser à la baisse les frais de scolarité.

Aissa AMOURAG

La réunion de Saïd Amzazi avec les associations des parents d’élèves.

si les parents s’orientent, malgré eux, vers les écoles privées pour scolariser leur pro-géniture, c’est parce que l’école publique a été totalement tuée par les pouvoirs publics. Une école publique qui avait pourtant gagné ses lettres de noblesses durant les années 70, 80 et 90 et d’où sont sorties des grandes sommités de l’ingénierie, de la médecine, de la recherche, de l’enseignement. Mais qui est devenue, depuis déjà quelques années, le parent pauvre et le talon d’Achille de des politiques publiques. On aimerait tous que l’école publique re-vienne à son niveau d’antan, c’est proba-blement le seul moyen pour démanteler le lobby des écoles privées. En attendant, ces dernières continuent de semer la misère, la médiocrité et le hors-la-loi dans la société marocaine l

un enrichissement monstrueux des patrons des écoles, un appauvrissement grave des familles et des enfants dont le niveau scolaire est catastrophique. Qui doit-on incriminer au premier degré? Les propriétaires des écoles privées ou l’Etat ? Il est évident que tout le monde accuse l’Etat d’avoir laissé prospérer ce lobby, devenu, progressivement, trop puissant. D’abord en leur accordant de nombreuses exonérations fiscales. Or, un Etat qui se respecte est celui qui exige l’impôt de toute personne morale qui gagne de l’argent. Pourquoi continuer à exonérer ces écoles privées alors qu’elles continuent à réaliser des bénéfices énormes? L’Etat a également failli à son obligation de contrôler ces écoles sur le plan financier, qui continuent à pratiquer des frais de scolarité exorbitants, qui, pour la plupart d’entre elles, ne reflètent pas le niveau scolaire prodigué. Autre faille importante et non des moindres:

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Maintien de distance, dites-vous? Quand il s’agit du mariage, l’attente peut s’avérer pesante et les Marocains ne veulent

rien entendre! Malgré la crise engendrée par le Coronavirus à tous les niveaux, les problèmes enregistrés entre les couples mariés en cette période de confinement, et l’absence de fêtes de mariage, les futurs mariés ne se laissent pas décourager. Au premier jour de la réouverture de leurs bu-reaux, les adouls de Casablanca ont reçu 90 demandes de mariage au bout de quelques heures. Une semaine après, les auxiliaires de justice marocains font état de 300 demandes de mariage reçus dans tout le Royaume. “Nous recevons 36.000 demandes de mariage chaque année. Cette saison est considérée comme la saison de mariages par excel-lence. Ces chiffres ne nous étonnent pas, puisque plusieurs couples avaient déjà pré-paré leur dossier avant le confinement, et ont été obligés de suspendre toute procédure à cause de l’état d’urgence sanitaire”, nous explique Bouchaïb El Fadlaoui, président de l’Instance nationale des adouls.

Procédures d’héritages, reconnaissance de dettes ou demandes de mariage, les auxiliaires de justice ont été quotidienne-ment sollicités par téléphone pour traiter les questions des citoyens. “Pendant la deu-xième tranche du confinement, les adouls ont veillé à rester joignables par téléphone pour répondre aux questions des citoyens. Dès la reprise de nos services au niveau des bureaux avec le respect de toutes les mesures requises, d’autres problématiques se présentent devant nous, nous empêchant ainsi de mener à bien nos services”, précise le patron des adouls.

Suppression du visa des juges Le contact avec les juges dérange plus que jamais les adouls. Souffrant d’un manque de légitimité, les auxiliaires de justice expriment leur ras-le-bol concernant les procédures qui requièrent la signature et le cachet des juges pour légitimer tout document rédigé par ces derniers. “Nos documents restent in-valides en l’absence de leur signature. Nous sommes également des représentants de la justice, nous avons fait de grandes études dans ce sens et nous avons prononcé un serment avant de commencer notre travail.

Les adouls doivent obligatoirement

soumettre tout acte au cadi at-tawthik.

Les demandesde mariages flambent,les adouls en colèreMis en stand-by pendant deux mois de confinement,les bureaux des adouls, qui ont repris le 27 mai 2020, enregistrentune flambée au niveau des demandes de mariage déposéespar les Marocains. Après une semaine de reprise, 300 couplesse sont déjà rendus chez les adouls pour établir leur acte d’union

REPRISE POST-COVID

Pourquoi attendre qu’un juge signe nos do-cuments pour qu’ils soient valides? D’autant plus qu’en cette période de confinement, certains jugent refusent de jouer le jeu se cachant derrière la fermeture des tribunaux. Ce sont des procédures administratives qui n’ont aucune relation avec l’ouverture ou la fermeture des tribunaux”, fustige Bouchaïb El Fadlaoui. Les adouls doivent obligatoirement sou-mettre tout acte au cadi at-tawthik, juge-no-taire ou authentificateur, un magistrat qui of-ficie dans les tribunaux de 1ére instance et les Cours d’appel. En cette période de crise, la reconnaissance de dette est également très demandée par les Marocains. La reconnais-sance de dette est un contrat rédigé chez les adouls pour préciser qu’un débiteur s’en-

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leurs examens d’accès à la profession. Ces dernières seront notifiées de la décision d’affectation le 15 juin, selon Bouchaïb El Fadlaoui. Les femmes adouls prêteront ser-ment au niveau des différents tribunaux du Royaume, avant de rejoindre leur poste. Dans le cadre de cette bonne nouvelle, les adouls rappellent “la discrimination” subie par le secteur. La loi marocaine exige qu’il y ait toujours deux adouls pour rédiger tout acte. La loi concernée est en cours de ré-

vision au ministère de tutelle depuis 2010. “Nous avons pu accueillir des femmes dans notre profession. Une nouvelle révolution-naire que nous saluons. Ceci dit, il existe des choses tout aussi importantes qui tombent dans les oubliettes, et qui doivent être re-vues au plus tôt pour faciliter notre travail et le travail de nos consoeurs qui viennent de rejoindre l’aventure”, précise de le porte-pa-role des adouls l

“EN CETTE PÉRIODE DE CONFINEMENT, CERTAINS JUGENT REFUSENT DE JOUER LE JEU SE CACHANT

DERRIÈRE LA FERMETURE DES TRIBUNAUX.”

Lamiae BELHAJ SOULAMI

gage à rembourser une somme d’argent qu’il doit à une autre personne, le créancier. Cela permet de protéger les créanciers, même dans le cas du décès du débiteur. Au Maroc, comme plusieurs autres documents rédigés par les adouls, la reconnaissance de dette reste invalide sans la signature d’un juge, une procédure qui retarde la récupération de ces papiers et plonge plusieurs créanciers dans le doute et la peur de ne pas récupérer leur argent. Les adouls insistent donc pour leur indépendance. L’administration centrale du ministère de la Justice a tranché au sujet des affectations des adouls qui ont réussi l’examen profes-sionnel du 5 janvier 2020. La nouvelle promotion compte pour la pre-mière fois 277 femmes adouls, qui ont réussi

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PAR KARIM BERDAI

NON, LE RCA N’A PAS ÉTÉ ÉLU CLUB DU XXE SIÈCLE AU MAROC

Mais quelle mouche a piqué le Raja de Casablanca? En date du 28 mai 2020, le Raja via sa page officielle annonçait avoir été élu club du XXe siècle d’après un article paru sur le blog de la FIFA.

Un article contenant une fausse information. L’article en question publié le 20 juil-let 2009 avec comme titre: Stade Mohammed V, the

Lions’ den revient sur l’histoire du stade de Casablanca. En fin de l’article, l’auteur notera que le RCA finit 3e du classement du club du siècle en l’an 2000 décerné par la CAF. Erreur, le Raja n’a pas fini à la 3e place, mais à la 14e comme le stipule la Rec. Sport Soccer Statistics Foundation. (source: rsssf.com/miscellaneous/caf-ranking.html ).La FIFA communique sur son site, que son blog «n’est pas censé constituer des conseils auxquels il faut se fier. (…) La Fifa décline toute responsabilité découlant de toute confiance mise dans ces éléments par tout visiteur des plateformes numériques de la FIFA» La FIFA ne cautionne aucunement ce contenu et il n’engage que son auteur. La CAF a élu 1 club du siècle et n’a pas élu 1 club du siècle par pays.Autre problème de taille, le titre continental de club du siècle ne signifie pas que les clubs dans ce classement sont les clubs du siècle dans leur pays. À aucun moment la CAF ou la FIFA n’ont décerné un titre avec une telle appellation. Seule la FRMF est ha-bilitée à décerner le titre de club du siècle au Maroc. Cela équivaut à un club, qui, à la suite d’une disqualification en 16e de finale de la Champions’ League afficherait le titre de club de l’année de son pays. Absurde. Une interprétation subjective et fallacieuse.Fait similaire en Égypte ? Il y a quelques jours, le Zamalek a affiché à tort à l’entrée son terrain d’entraînement un

panneau avec la mention «Club du siècle avec le logo de la CAF»; l’instance conti-nentale a très rapidement répliqué en som-mant le club cairote de retirer cette affiche sous peine de sanctions. Seul le Ahly peut afficher cette mention.A la suite de cette menace de la CAF, le Raja de Casablanca a fait marche arrière en retirant la mention FIFA de son affiche (photo de profil et photo de couverture) de peur de se voir infliger une sanction.Quel Club peut se prévaloir du titre du

club du siècle au Maroc ? Pour élire le Ahly club du siècle en Afrique, la CAF a retenu exclusivement des critères continentaux (Titre de Champions League, Coupe de la CAF, Super Coupe et partici-pation à la coupe du monde des clubs). Il semble évident que pour élire un club du siècle sur le plan national, le calcul ne peut considérer que les performances sur le plan national. Le contraire serait une aberration.À l’heure actuelle, aucun club de manière of-ficielle n’a reçu ce titre au Maroc : La FRMF n’a jamais décerné un tel prix en l’an 2000 ou au-delà. Mais si nous devions choisir un club du siècle au Maroc nous pourrions dé-

terminer 3 méthodes de calculs standards qui paraissent les plus objectives. La première serait une addition du nombre de points gagnés sur l’ensemble des sai-sons pendant le XXe siècle. La seconde méthode serait une addition des titres de Botola et Coupe du trône pen-dant le XXe siècle. La dernière serait une addition de tous les titres (nationaux et continentaux) Sur ces 3 méthodes de calcul, le Raja ne se classe jamais à la première position. Titre trompeur et exemplaritéÀ l’heure où le Maroc se prépare à mettre en place un projet de loi visant les auteurs de fausses informations, ou l’internet en Afrique est factchecké par des organismes comme AfrikaCheck, les Fake News pu-bliées par le Raja de Casablanca pourraient être punies prochainement par la loi et par Facebook, et cela sans parler des répercus-sions auprès de l’opinion publique sportive. Les acteurs du sport au Maroc sont por-teurs de valeurs pour la jeunesse et ont la responsabilité d’être exemplaires. Le président du Raja Jawad Ziat, qui a republié cette Fake News sur son compte Twitter donne le contre-exemple de ce que devrait être un club de sport et les valeurs qu’il se doit de promouvoir: respect, cou-rage, esprit d’équipe, solidarité, intégrité intellectuelle… Le Raja de Casablanca a fait un premier aveu en éliminant la mention FIFA de son affiche, il devra continuer sur le chemin de la vérité en retirant la mention trompeuse de club du siècle sur ses visuels.L’histoire ne doit pas être inventée, elle doit être écrite à la sueur et à la douleur des équipes l

LES ACTEURS DU SPORT SONT

PORTEURS DE VALEURS ET ONT LA

RESPONSABILITÉ D’ÊTRE

EXEMPLAIRES.

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Des bavettes transparentes spécialement conçus pour

lire sur les lèvres

Non Mesdames et Messieurs, les masques transparents n’ont pas été conçus pour permettre aux femmes de

joindre l’utile à l’agréable en exposant leur rouge à lèvres flashy. Ces masques transparents sont créés pour faciliter la communication et l’interaction avec les personnes sourdes ou malentendantes. Sachant que ce problème peut toucher les jeunes et les personnes âgées souf-frant d’une vieillesse avancée.Nous avons tous eu du mal à com-prendre ce que dit une personne dans un supermarché ou au travail lorsqu’elle porte un masque facial. Cette situation occasionnelle et très désagréable, de-vient le quotidien des malentendants et sourds marocains qui ne peuvent plus comprendre ou être compris derrière les masque, devenus pourtant obligatoires pour se protéger contre le Coronavirus. L’association tangéroise “les sourdoués” a justement trouvé la solution pour promouvoir l’inclusion sociale de cette minorité en cette période de crise sani-taire. Un masque transparent permettra aux sourds et malentendants de suivre comme d’habitude les conversations sur les lèvres de leurs interlocuteurs, puisque la partie de la bouche reste-ra visible. Pour ce faire, ces masques ne sont pas uniquement destinés aux personnes en besoin, mais également

aux différents professionnels, tel que policiers, banquiers, caissiers… ou tout autre métier où la communication ver-bale reste nécessaire. Comment être compris sans comprendre? Nadia El Alami, présidente de l’Association “les sourdoués” nous détaille le pourquoi du comment.

Faciliter la communication“Intitulé «Maski’ri», ce masque permet à toute la communauté sourde et ma-lentendante de communiquer grâce à Lamiae BELHAJ SOULAMI

une fenêtre transparente, au niveau de la bouche, sachant que ces personnes lisent sur les lèvres. Tous les essais ont été réalisés sur des sourds pour arriver à un prototype convenable et qui soit validé par les laboratoires ayant fait tous les tests nécessaires pour réaliser un accessoire qui respecte les normes sa-nitaires”, nous déclare la présidente de “les sourdoués”. La production des masques transpa-rents commencera cette semaine, 23 associations de sourds sur tout le terri-toire marocain en bénéficieront gratuite-ment. “La seconde production sera en faveur des personnes susceptibles de faciliter la communication avec cette communauté, à savoir les médecins, orthophonistes, pharmaciens, parents, administrations, institutions ou autre…”, ajoute Nadia El Alami.L’association fait un appel au soutien pour gérer au mieux cette opération, et être dans la capacité d’offrir gratuitement les masques à tous les professionnels des secteurs clés. Les masques “Maski’ri” sont réutilisables et supportent jusqu’à 7 lavages l

Les masques deviennent indispensables pour se protéger contrela Covid-19. Cachant une bonne partie du visage, les masques classiques

portés par tout le monde, ont plongé les sourds et malentendants dans une solitude inouïe. Comment extraire cette minorité de son isolement ?

MASQUES POUR MALENTENDANTS

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Nous avions déjà évoqué la mort de George Floyd dans un précé-dent article: le pro-

blème est que depuis des jours, la situation aux Etats-Unis ne fait qu’empirer tant les manifestations, les marches de protestations, les débordements et par la foule et par la police, les pillages, les dommages sur les biens des par-ticuliers, les émeutiers, les antifa, (antifascistes), les «sans-dents» comme dirait François Hollande, ancien président de la République française, tout cela et toutes ces personnes se retrouvent dans la rue, en un mouvement conjoint. Parce que c’est un pays démocra-tique. Parce que, actuellement, et surtout, ce pays vit une crise très profonde, révélée et exaspérée par la mort injuste d’un Noir. La mort le 25 mai 2020 à Minneapolis de George Floyd, causée par un policier blanc, a ravivé la fracture raciale aux Etats-Unis, secoués depuis par des manifestations pa-cifiques et des émeutes violentes. Aux Etats-Unis beaucoup disent que ça ne peut plus s’arrêter, que c’est trop tard, que c’est partout. C’est tout un symbole: la domina-tion de l’Amérique blanche sur le

PR RITA EL KHAYAT*

GEORGE FLOYD, UN NOIR MORT SOUS LE GENOU D’UN BLANC

George Floyd a perdu la vie pour que nous nous souvenions que toute vie humaine est importante, que le racisme doit cesser au 21ème siècle et que l’injustice, toute

injustice quelle qu’elle soit, est le pire fléau qui ravage l’humanité…

reste du monde, telle qu’elle ap-paraît sous le mandat de Donald Trump, semble vaciller et l’image de sa force contestée puisqu’elle est inégalitaire et injuste à une partie de sa population. A force de chercher à profiter de la si-tuation véritablement explosive du pays pour mobiliser sa base à cinq mois des élections, le pré-

sident américain cristallise les protestations, jusque dans son propre camp. Certains diplomates et politolo-gues évoquent même une évolu-tion vers «une tiers-mondisation» du pays en raison des 100.000 décès dus au coronavirus! la crise sanitaire révèle surtout un pays miné par les inégalités, pro-fondément ségrégué où le rêve américain ne semble plus qu’un lointain souvenir.En effet, George Packer dans L’Amérique défaite (2015) écrit: «we are living in a failed state», nous vivons dans un pays en faillite (ou qui a failli), un pays à la dérive, son système écono-mique et social est en faillite, son leadership est gravement altéré dans le monde… Jusqu’à maintenant, Trump, un président très contesté (il a pas-sé son temps à limoger ceux qui n’allaient pas dans son sens) n’était qu’une cible secondaire et en arrière-plan pour les millions de manifestants mobilisés depuis la mort de George Floyd. Dorénavant et à partir de mainte-nant, et probablement jusqu’aux élections de novembre, il semble devenir le point de mire natio-nal des protestations et un fac-

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teur de divisions et de chaos au sein de son gouvernement. Tout se passe comme si on le dési-gnait, personnellement, comme responsable de ce qui se passe actuellement, par le biais de la contestation générale dans tout le pays.Après la requalification, mercredi 3 juin, de la mort de George Floyd en «meurtre» et l’inculpation des quatre policiers, le mécontente-ment a changé de direction pour se tourner vers Donald Trump en personne. Dans l’entourage du président américain, on cherche à tempérer les choses en préten-dant que ce n’est pas la panique mais seulement un mauvais mo-ment à passer. Trump se fait photographier de-vant une église bible à la main. La Maison Blanche évoque Churchill et défend vigoureuse-ment la sortie controversée de Donald Trump, bible à la main, devant une église proche de la Maison Blanche après la disper-sion brutale des manifestants à coups de gaz lacrymogènes. Le président voulait faire passer un message fort, a expliqué sa porte-parole Kayleigh McEnany, assurant qu’il marchait dans les pas de grandes figures telles que l’ancien Premier ministre britan-nique Winston Churchill. «A travers les âges, nous avons vu des présidents et des dirigeants qui ont connu des moments de leadership et de symboles très forts qui étaient importants pour un pays», a-t-elle ajouté. Comme Churchill, qui était allé consta-ter les dégâts causés par les bombes à Londres durant la Se-conde Guerre mondiale, on peut considérer que ce fut un puissant message de leadership adressé au peuple britannique; on a aussi

évoqué le moment où George W. Bush avait symboliquement ef-fectué le premier lancer lors d’un match de baseball au Yankee Sta-dium à New York peu après les attentats du 11 septembre 2001. Mais rien n’est moins sûr que ces moments qui se veulent forts… Aux protestations des épiscopaliens de St. John, qui ont peu goûté l’opéra-tion de «com», s’ajoutent les divi-sions de la mouvance protestante évangélique et conservatrice, à qui la photo de Lafayette Park était destinée. Si le pasteur Robert Jeffress, l’un des plus fanatiques soutiens de Trump, admire la «démonstra-tion de force et de calme dans le

chaos», Pat Robertson, figure lé-gendaire et médiatique de la droite religieuse, critique vertement ce recours politique à la Bible. Au Congrès, l’affaire suscite gêne et silence dans les rangs du Sénat majoritairement républicain, inquiet des conséquences électorales. Au vu des dernières enquêtes, le coup de Lafayette Park n’a visiblement pas ébranlé la base mais pour-rait provoquer la débandade des électeurs indépendants dans plu-sieurs Etats clés, dont l’Ohio et le

Wisconsin, qui avaient assuré la victoire en 2016. Au Texas, que Donald Trump avait emporté avec 9 points d’avance, il est à égalité avec le démocrate Joe Biden. En Arizona, fief trumpiste jusqu’alors, Biden a pris l’avantage. L’entou-rage de Donald Trump mise tou-jours sur un possible regain du candidat sortant s’il réussit à se vendre comme le représentant de la loi et de l’ordre et repro-duit la formule victorieuse de Ri-chard Nixon, élu en réponse aux grandes insurrections de 1968.La décision de Donald Trump de se rendre lundi, à pied, devant l’église Saint John, bâtiment em-blématique situé tout près de la Maison Blanche qui avait été dégradé la veille lors de mani-festations, -il faut le souligner- a donc fait l’objet de vives critiques. Nombre de responsables poli-tiques et religieux ont dénoncé la façon dont les manifestants avaient été violemment dispersés pour permettre au président de se faire photographier devant le bâ-timent. Ils ont aussi déploré la fa-çon dont le locataire de la Maison Blanche avait brandi une bible de-vant les photographes. L’évêque épiscopalienne de Washington, Madame Mariann Budde, est al-lée jusqu’à dénoncer une initiative «profondément insultante», le dé-tournement de «quelque chose de sacré pour une posture politique». Cornel West, professeur de phi-losophie à Harvard, parlait dans une interview (France 24 du ven-dredi 5 juin 2020) de Constantin, cet empereur romain qui fit, (sym-boliquement pour Trump, sa Bible à la main), jouer la religion comme un moteur essentiel à ses projets. Depuis son entrée en lice dans les primaires du Parti républicain en 2015, le milliardaire, populiste

LA CRISE SANITAIRE RÉVÈLE UN PAYS

MINÉ PAR LES INÉGALITÉS, OÙ LE

RÊVE AMÉRICAIN NE SEMBLE PLUS

QU’UN LOINTAIN SOUVENIR.

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roué et expert du bombardement émotionnel, a réussi à boule-verser les règles de la commu-nication politique en misant sur l’outrance et l’écrasement des tabous pour galvaniser ses élec-teurs les plus fidèles. Cette fois, il semble avoir dépassé les bornes, au point de mettre en danger sa réélection en étant allé peut-être trop loin. Lundi 1er juin, il exigeait des gouverneurs, en vain, qu’ils fassent appel à la garde natio-nale fédérale face aux centaines de milliers d’Américains dénon-çant les bavures répétées des polices locales, l’iniquité du sys-tème judiciaire envers les minori-tés et la persistance du racisme dans la société américaine. Le

lendemain, le Président répétait son projet de recourir à la loi sur l’insurrection de 1807 (!) pour déployer l’armée dans les villes touchées par la contestation. Au cours de la même conférence de presse, il lançait l’armée et la po-lice fédérale, compétente à Was-hington, pour disperser à coups de matraques et de gaz lacrymo-gènes une manifestation autori-sée et pacifique dans Lafayette Park, à quelques mètres de la Maison Blanche, dans le seul but d’aller prendre la pose, une Bible à la main, devant l’église qui, par ailleurs, a été endommagée par des casseurs. Mercredi, le secrétaire à la Dé-

fense, en personne, Mark Esper, a pris, sans ambages et sans détours, le contre-pied des po-sitions et propositions de Donald Trump. Dans un texte lu devant la presse, vu dans le monde entier, il est allé jusqu’à désavouer for-mellement l’appel du Président à recourir à la loi sur l’insurrec-tion pour déployer l’armée amé-ricaine, disant: «L’utilisation des forces armées comme forces de l’ordre intérieures n’est qu’une option de dernier recours, va-lable dans les cas d’extrême ur-gence et de situation périlleuse. Nous ne sommes pas dans cette situation.». Beaucoup d’analystes et de po-litologues ont vu dans ce désa-

vouement une grave crise au sommet de l’Etat mais surtout une sorte de rejet pur et simple de ce qui émane de la personne même de Trump. Il n’a pas congédié instantanément le dis-sident, on peut l’appeler ainsi, de crainte d’accentuer l’impression chaotique et remplie de dysfonc-tionnements qui émane de son gouvernement. Le sort d’Esper est et paraît, réellement, en sus-pens, Trump prend ainsi la me-sure de la rébellion des militaires; en avril, déjà, le Président avait installé au Pentagone l’un de ses plus loyaux conseillers pour jauger la loyauté des gradés et préparer des purges éventuelles.

Et ce n’est pas fini: Trump a subi une autre offensive galon-née jeudi. Son ex-secrétaire à la Défense, James Mattis, général adulé de l’offensive américaine de Falloujah en Irak (ce qui est un autre scandale intolérable, totalement oblitéré par le temps et par le désintérêt des analystes et des historiens arabes) a rom-pu dix-huit mois de silence, de-puis sa démission, pour s’ériger contre l’abus de pouvoir de Do-nald Trump. Le mot a été lâché: l’abus de pouvoir! Notoirement discret sur les affaires politiques, le fleuron des Marines, incarna-tion du service public américain, conspua un président «qui ne cherche qu’à nous diviser» et «ri-diculise la Constitution». Mattis s’insurge contre un recours aux militaires qui ne ferait que créer un faux conflit entre les forces armées et les civils. L’ex-ministre avait créé un choc pour les observateurs, les journa-listes et les politologues, car sa démission, certes spectaculaire, en 2018 ne portait alors que sur un désaccord sur le traitement des alliances internationales par Trump et l’ordre de retrait brutal des troupes de Syrie. Des sujets qui n’intéressent que secondairement l’opinion publique et celle des masses. Pour l’instant, Donald Trump ne répond à tout problème que par un de ses sempiternels tweets. Le personnage de ce président est une énigme, l’objet de fasci-nation pour certains, un homme d’affaires sans scrupules pour d’autres. Tout à son obsession électorale, il a, lors d’une inter-view télévisée, assuré que les leaders religieux avaient bien aimé sa photo devant l’église St. John. Contre leurs critiques

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LA VIE DES NOIRS EST IMPORTANTE, TOUT COMME CELLE DES ANALPHABÈTES, DES

DÉNUTRIS, DES ENFANTS EXPLOITÉS, DES FEMMES, DES MINORITÉS…

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et déjà cibles de prédilection de Donald Trump, dont les mouve-ments d’humeur les conspuent régulièrment, les médias sont également dans le viseur des forces de l’ordre depuis le début des manifestations. Aux Etats-Unis, la liberté de la presse semble réellement malmenée car elle dénonce le tournant économique et la situation extrê-mement tendue, culturellement, politiquement et socialement. Parallèlement, la rhétorique du président Trump contre les jour-nalistes exacerbe les tensions. Comme des départs de feu dans tout le pays, des dizaines de villes ont emboîté le pas à Min-neapolis, avec des rassemble-ments de New York à Atlanta, de Washington à Los Angeles. L’état actuel du pays et le drame de la mort d’un homme sous le genou d’un autre homme a ca-talysé la colère et l’exaspération face à des décennies de bruta-lités policières contre les Noirs aux Etats-Unis, largement res-tées impunies. Les rassemble-ments pacifiques ont été rapide-ment éclipsés par les images de la violence et de la destruction. C’était le mort de trop. Le décès de George Floyd s’inscrit dans la droite ligne du sort réservé aux Afro-Américains lors de l’épidé-mie: surreprésentés dans les métiers du soin ou du commerce, ils sont plus victimes du Covid que les Blancs.Les protestations se sont expor-tées dans nombre de pays, ne craignant plus le Covid-19 parmi les manifestants; à Paris, il y a eu une manifestation massive en mémoire d’Adama Traoré et George Floyd. Alors que les Etats-Unis se déchirent une se-maine après la mort de George

Floyd, au moins 20.000 per-sonnes ont bravé l’interdiction de manifester et répondu à l’appel du collectif «Vérité pour Adama Traoré».La fondation Mandela, du nom du premier président noir sud-afri-cain, a estimé jeudi 4 juin que les manifestations dans le monde contre la mort de George Floyd, un Noir, entre les mains de la po-lice américaine traduisent «une colère croissante contre la su-prématie blanche continue. Les manifestants aux Etats-Unis si-gnalent que trop, c’est trop».

La fondation Mandela dénonce un système qui crée les condi-tions de la violence contre les Noirs et la légitime dans de nom-breux pays. On retrouve une telle violence même dans les pays où les Noirs tiennent les le-viers du gouvernement, comme en Afrique du Sud. Les vingt-six années qui se sont écoulées depuis la fin officielle du régime de l’apartheid en Afrique du Sud n’ont pas permis d’assurer que les vies des Noirs importent au-tant que celles des Blancs. La Fondation Mandela estime qu’il est temps de faire une éva-

luation de la suprématie blanche résiliente en Afrique du sud, aux Etats-Unis et dans le monde en-tier. Rappelons que Nelson Man-dela, héros de la lutte contre le régime de l’apartheid en Afrique du Sud, système de domination de la minorité blanche, fut le pre-mier président noir de ce pays d’Afrique australe (1994 à 1999).Les manifestations ont lieu dans le monde entier. Les anciens présidents américains ont tous parlé, chacun y allant de sa dia-tribe; Michelle Obama a saisi l’occasion (trop belle) pour s’ex-primer, elle aussi. Mais personne n’a posé la question essentielle: «Pourquoi la vie d’un Noir n’im-porte pas»?C’est là la clef du problème et de tous ceux qui en découlent, le racisme, l’exploitation, l’es-clavage moderne, l’injustice, le trop grand pouvoir des puissants et de leurs affidés, les énormes écarts de fortunes entre riches et pauvres, etc.; on a trop vite oublié qu’avant la crise sanitaire du coronavirus qui a paralysé le monde entier, les manifestations se faisaient dans le monde entier pour toutes les raisons évoquées plus haut. La vie des Noirs est importante, tout comme celle des analpha-bètes, des dénutris, des en-fants exploités, des femmes, des minorités, des peuples en voie d’extinction (Les peuples d’Amazonie que Jair Bolsona-ro veut exterminer, sans trop le dire, en ravageant leur territoire, la forêt et leur habitat, ils vont en mourir comme ils vont mourir du Covid-19 car leur immunité est particulière) l

*MEDECINPSYCHIATRE-PSYCHANALYSTE

LA RHÉTORIQUE DU PRÉSIDENT

TRUMP CONTRE LES JOURNALISTES

EXACERBE LES TENSIONS.

Page 38: 1351 - Du 5 au 11 juin 2020 Prix : 15 Dhs

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29ANSENSEMBLE

Par Seddik MOUAFFAK

UNE MONDIALISATION QUI PASSE, DÉSORMAIS, PAR CES SUPPORTS

NUMÉRIQUES QUI ENVAHISSENT NOTRE QUOTIDIEN

LA MONDIALISATION AMBIGUË, UNE SOUPAPE DE SÉCURITÉ

Le coronavirus, en brisant les chaînes de production et d’approvisionnement mondiales, a remis au goût du jour le débat sur la mondialisation, notamment dans ses aspects délocalisation-relocalisation des métiers dits «mondiaux».Certains observateurs avertis n’ont pas manqué, d’ailleurs, de souligner que

le choc économique provoqué par la pandémie a révélé l’extrême vulnérabilité de la mondialisation, présentée jusque-là comme triomphante. Pour d’autres, la crise du co-ronavirus a mis en relief l’absence de souveraineté nationale en matière de produits dits stratégiques ou vitaux. Et c’est essentiellement dans ce domaine, disent-ils, qu’il y aura un «avant» et un «après» corona.Ce qui prédominait avant, et plus particulièrement dans toutes les sphères de décision publiques ou privées nationales ou internationales, n’était-il pas le discours autour de la mondialisation dite «heureuse». Certains diront «naïve» puisqu’elle faisait croire que ce n’est qu’à travers l’extension de ce processus à l’échelle mondiale que tous les pays connaitront la paix et la prospérité. Ceux qui ont critiqué cette approche, notamment à cause du caractère inégalitaire et excluant du phénomène, n’ont pas trouvé beau-coup de difficultés pour faire passer un autre message, celui de la «dé-mondialisation» comme seule et unique arme pour combattre le système économique dominant.Or, la réalité de la globalisation n’est pas aussi simple à expliquer, notamment si on se limite à cette dichotomie d’interprétations. En effet, et surtout par ces temps de fermeture des frontières physiques et de confinement presque généralisé au niveau planétaire, cette mondialisation n’a jamais été aussi prégnante. Car si la mondialisation est à l’arrêt en matière de circulation des personnes, et ce, depuis le déclenchement de la pandémie en Chine et sa dissémination à travers le monde, elle n’en est pas moins restée présente à travers la circulation des idées et des informations, grâce, notamment, à ces supports numériques qui ont fini par envahir notre quotidien. Et ce, d’une manière beaucoup plus rapide qu’auparavant. Constituant ainsi une sorte de soupape de sécurité qui a permis à la vie de continuer et ce, malgré la propagation mortifère du Covid-19. Ce qui a poussé certains analystes à lui coller le qualificatif de «mondialisation ambiguë». Ouvrant, ainsi, la voie à une nouvelle étape dans le processus de mondialisation, désormais, en construction. D’autres n’ont pas manqué de considérer aussi que «la crise du coronavirus signale l’accélération d’un nouveau capitalisme, le capitalisme numérique». Ainsi en est-il de l’économiste français Daniel Cohen, qui considère «la crise sanitaire comme un moment de basculement de l’éco-nomie dans un nouveau régime de croissance et du rôle de l’Etat dans un nouveau mode d’intervention sociale». Un mode de développement qui reste, d’ailleurs, plus que jamais, à inventer l