1 SOURCE Digithèque de matériaux juridiques et … · 1946, 1950, 1957, 1964, 1983, 1987. Ils ont...

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1 1 1 SOURCE Digithèque de matériaux juridiques et politiques: http://mjp.univ-perp.fr/

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    1 SOURCE Digithque de matriaux juridiques et politiques: http://mjp.univ-perp.fr/

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    L'ordre constitutionnel hatien est remarquablement instable. Les Hatiens ont su rdiger et appliquer, souvent brivement, 23 constitutions, soit plus que les Franais : 1801, 1805, 1806, 1807, 1811, 1816, 1843, 1846, 1849, 1867, 1874, 1879, 1888, 1889, 1918, 1932, 1935, 1946, 1950, 1957, 1964, 1983, 1987. Ils ont aussi connu une monarchie (1811), deux empires (1805 et 1849) et ils ne comptent pas leurs rpubliques. Toutefois, il convient de remarquer que la plupart des articles sont recopis d'une Constitution l'autre, le changement de Constitution, gnralement opr par la violence, s'apparente ainsi, le plus souvent une rvision de la Constitution prcdente.

    L'le de la Navase (ou Navasse en franais de France, ou Navassa en anglais), mentionne comme partie intgrante du territoire hatien dans la plupart des constitutions, est en fait occupe par les tats-Unis depuis le 19 septembre 1857, au nom du Guano Act.

    Documents

    Proclamation d'mancipation des esclaves du 29 aot 1793p. 4

    Acte d'indpendance du 1er janvier 1804...p. 11

    Constitution du 8 juillet 1801.p. 15

    Constitution impriale du 20 mai 1805..p. 27

    Constitution du 27 dcembre 1806.p. 36

    Constitution du 17 fvrier 1807..p. 57

    Constitution royale du 28 mars 1811..p. 63

    Constitution du 2 juin 1816... p. 69

    Constitution du 30 dcembre 1843.p. 94

    Constitution du 15 novembre 1846, version amende en 1859 et 1860p.121

    Constitution du Second Empire, 20 septembre 1849...p. 169

    Constitution du 14 juin 1867p. 194

    Constitution du 6 aot 1874.p. 222

    Constitution du 18 dcembre 1879...p. 248

    Constitution du 16 dcembre 1888...p. 278

    Constitution du 9 octobre 1889p. 289

    Constitution du 19 juin 1918, version de 1928.p. 317

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    Constitution du 15 juillet 1932.p. 361

    Constitution du 2 juin 1935, version initiale, version de 1939, version de 1944.p. 383

    Constitution du 22 novembre 1946..p. 426

    Constitution du 25 novembre 1950..p. 452

    Constitution du 19 dcembre 1957...p. 482

    Constitution du 25 mai 1964, version amende le 14 janvier 1971.p. 518

    Constitution du 27 aot 1983...p. 589

    Constitution du 29 mars 1987, texte initial..p. 624

    ANNEXE

    Ordonnance du roi de France, 17 avril 1825, concernant l'indpendance de l'le de St. Dominguep. 681

    Trait de paix et d'amiti entre Hati et la France, 12 fvrier 1838..p. 683

    Convention de 1915 entre Hati et les tats-Unis, relative l'Occupation amricainep. 685

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    Hati

    mancipation des esclaves.

    Proclamation du 29 aot 1793. La premire mancipation des esclaves a eu lieu dans la colonie franaise de Saint-Domingue, le 29 aot 1793, plusieurs mois avant que la Convention dcidt l'abolition gnrale de l'esclavage dans les colonies franaises. A Paris, le dcret du 28 mars 1792 nonce que les hommes de couleur et ngres libres doivent jouir, ainsi que les colons blancs de l'galit des droits politiques . Des commissaires civils, Sonthonax et Polverel, sont aussitt envoys Saint Domingue pour faire appliquer ce dcret. Mais la situation dans l'le est complexe : les colons blancs sont opposs la Rvolution ; les multres et les noirs libres, principaux bnficiaires du dcret, sont souvent opposs la suppression de l'esclavage ; depuis le 23 aot 1791, des esclaves noirs sont en rvolte ; enfin la colonie franaise est attaque par les forces britanniques et espagnoles. Sonthonax proclame l'mancipation des esclaves de la partie Nord de Saint-Domingue, le 29 aot 1793, puis, le 31 octobre, il libre les esclaves de toute l'le. On notera avec quel soin minutieux les mesures sont prises pour viter le dsordre conomique, le respect de la hirarchie dans le travail et aussi les mesures sociales comme le cong maternit. Cette mesure permit d'obtenir le ralliement de plusieurs chefs insurgs, dont Toussaint Louverture, et de ramener l'ordre dans l'le, qui semble alors s'acheminer vers l'autonomie. Lorsque Bonaparte, la suite de la paix d'Amiens, dcide de rtablir l'esclavagedans les possessions franaises (loi du 20 mai 1802), une guerre particulirement meurtrire clate, qui conduit l'indpendance du pays. Source : le texte de la Proclamation est reproduit d'aprs un exemplaire dtenu et numris par la bibliothque de la Brown University, Providence (Rhode Island), et accessible par The Internet Archive. L'orthographe et la ponctuation d'origine ont t respectes.

    PROCLAMATION.

    AU NOM DE LA RPUBLIQUE. Nous LGER-FLICIT SONTHONAX, Commissaire Civil de la Rpublique, dlgu aux les Franaises de l'Amrique sous le vent, pour y rtablir l'ordre & la tranquillit publique. LES HOMMES NAISSENT ET DEMEURENT LIBRES ET GAUX EN DROIT :

    Voil, citoyens, l'vangile de la France ; il est plus que temps qu'il soit proclam dans tous les dpartemens de la Rpublique.

    Envoys par la Nation, en qualit de Commissaires civils Saint-Domingue, notre mission tait d'y faire excuter la loi du 4 avril, de la faire rgner dans toute sa force, & d'y prparer graduellement, sans dchirement et sans secousse, l'affranchissement gnral des esclaves.

    A notre arrive, nous trouvmes un schisme pouvantable entre les blancs qui, tous diviss d'intrt & d'opinion, ne s'accordaient qu'en un seul point, celui de perptuer jamais la servitude des ngres, & de proscrire galement tout systme de libert et mme d'amlioration de leur sort. Pour djouer les mal-intentionns et pour rassurer les esprits, tous prvenus par la crainte d'un mouvement subit, nous dclarmes que nous pensions que l'esclavage tait ncessaire la culture.

    Nous disions vrai, citoyens, l'esclavage tait alors essentiel, autant la continuation des travaux qu' la conservation des colons. Saint-Domingue tait encore au pouvoir d'une horde de tyrans froces

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    qui prchaient publiquement que la couleur de la peau devait tre le signe de la puissance ou de la rprobation ; les juges du malheureux Og, les cratures et les membres de ces infmes commissions prvtales qui avaient rempli les villes de gibets et de roues, pour sacrifier leurs prtentions atroces les africains et les hommes de couleur ; tous ces hommes de sang peuplaient encore la colonie. Si, par la plus grande des imprudences, nous eussions, cette poque, rompu les liens qui enchanaient les esclaves leurs matres, sans doute que leur premier mouvement et t de se jeter sur leurs bourreaux, et dans leur trop juste fureur, ils eussent aisment confondu l'innocent avec le coupable ; nos pouvoirs, d'ailleurs, ne s'tendaient pas jusqu' pouvoir prononcer sur le sort des Africains, & nous eussions t parjures et criminels si la loi et t viole par nous.

    Aujourd'hui les circonstances sont bien changes ; les ngriers & les anthropophages ne sont plus. Les uns ont pri victimes de leur rage impuissante, les autres ont cherch leur salut dans la fuite et l'migration. Ce qui reste des blancs est ami de la loi et des principes franais. La majeure partie de la population est forme des hommes du 4 avril, de ces hommes qui vous devez votre libert, qui, les premiers, vous ont donn l'exemple du courage dfendre les droits de la nature et de l'humanit ; de ces hommes qui, fiers de leur indpendance, ont prfr la perte de leurs proprits la honte de reprendre leurs anciens fers. N'oubliez jamais, citoyens, que vous tenez d'eux les armes qui vous ont conquis la libert ; n'oubliez jamais que c'est pour la Rpublique Franaise que vous avez combattu ; que de tous les blancs de l'Univers, les seuls qui soient vos amis, sont les Franais d'Europe.

    La Rpublique Franaise veut la libert et l'galit entre tous les hommes, sans distinction de couleur ; les rois ne se plaisent qu'au milieu des esclaves : ce sont eux qui, sur les ctes d'Afrique vous ont vendus aux blancs ; ce sont les tyrans d'Europe qui voudraient perptuer cet infme trafic. La RPUBLIQUE vous adopte au nombre de ses enfants ; les rois n'aspirent qu' vous couvrir de chanes ou vous anantir.

    Ce sont les reprsentans de cette mme Rpublique qui, pour venir votre secours, ont dli les mains des Commissaires civils, en leur donnant le pouvoir de changer provisoirement la police & la discipline des ateliers. Cette police et cette discipline vont tre changes : un nouvel ordre de choses va renatre, & l'ancienne servitude disparatra.

    Devenus citoyens par la volont de la Nation Franaise , vous devez tre aussi les zls observateurs de ses dcrets ; vous dfendrez, sans doute, les intrts de la Rpublique contre les rois, moins encore par le sentiment de votre indpendance, que par reconnaissance pour les bienfaits dont elle vous a combls. La libert vous fait passer du nant l'existence, montrez-vous dignes d'elle : abjurez jamais l'indolence comme le brigandage : ayez le courage de vouloir tre un peuple, & bientt vous galerez les nations europennes.

    Vos calomniateurs & vos tyrans soutiennent que l'Africain devenu libre ne travaillera plus ; dmontrez qu'ils ont tort ; redoublez d'mulation la vue du prix qui vous attend ; prouvez la France, par votre activit, qu'en vous associant ses intrts elle a vritablement accru ses ressources & ses moyens.

    Et vous, citoyens gars par d'infmes royalistes ; vous qui, sous les drapeaux & les livres du lche espagnol, combattez aveuglment contre vos propres intrts, contre la libert de vos femmes & de vos enfants, ouvrez donc enfin les yeux sur les avantages immenses que vous offre la Rpublique. Les rois vous promettent la libert : mais voyez-vous qu'ils la donnent leur sujets ? L'espagnol affranchit-il ses esclaves ? Non sans doute ; il se promet bien, au contraire, de vous charger de fers sitt que vos services lui seront inutiles. N'est-ce pas lui qui a livr Og ses assassins ?

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    Malheureux que vous tes ! si la France reprenait un roi, vous deviendriez bientt la proie des migrs ; ils vous caressent aujourd'hui ; ils deviendraient vos premiers bourreaux.

    Dans ces circonstances, le commissaire civil dlibrant sur la ptition individuelle, signe en assemble de commune.

    Exerant les pouvoirs qui lui ont t dlgus par l'art. III du dcret rendu par la convention nationale le 5 mars dernier ;

    A ordonn & ordonne ce qui suit pour tre excut dans la province du Nord.

    Article premier. La dclaration des droits de l'homme & du citoyen sera imprime, publie & affiche partout o besoin sera, la diligence des municipalits, dans les villes & bourgs, & des commandants militaires dans les camps et postes.

    Article II. Tous les ngres & sang-mls, actuellement dans l'esclavage, sont dclars libres pour jouir de tous les droits attachs la qualit de citoyens franais ; ils seront cependant assujettis un rgime dont les dispositions sont contenues dans les articles suivants.

    Article III. Tous les ci-devant esclaves iront se faire inscrire, eux, leurs femmes & leurs enfans la municipalit du lieu de leur domicile, o ils recevront leur billet de citoyens franais sign du commissaire civil.

    Article IV. La formule de ces billets sera dtermine par nous ; ils seront imprims & envoys aux municipalits, la diligence de l'ordonnateur civil.

    Article V. Les domestiques des deux sexes ne pourront tre engags au service de leurs matres ou matresses que pour trois mois, & ce, moyennant le salaire qui sera fix entr'eux de gr gr.

    Article VI. Les ci-devant esclaves domestiques, attachs aux vieillards au-dessus de soixante ans, aux infirmes, aux nourrissons et aux enfans au-dessous de dix ans, ne seront point libres de les quitter. Leur salaire demeure fix une portugaise par mois pour les nourrices, & six portugaises par an pour les autres, sans distinction de sexe.

    Article VII. Les salaires des domestiques feront exigibles tous les trois mois.

    Article VIII. Ceux des ouvriers, dans quelque genre que ce soit, seront fixs de gr gr avec les entrepreneurs qui les emploieront.

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    Article IX. Les ngres actuellement attachs aux habitations de leurs anciens matres, seront tenus d'y rester ; ils seront employs la culture de la terre.

    Article X. Les guerriers enrls, qui servent dans les camps ou dans les garnisons pourront se fixer sur les habitations en s'adonnant la culture, & obtenant pralablement un cong de leur chef ou un ordre de nous, qui ne pourront leur tre dlivr qu'en se faisant remplacer par un homme de bonne volont.

    Article XI. Les ci-devant esclaves cultivateurs seront engags pour un an, pendant lequel temps ils ne pourront changer d'habitation que sur une permission des juges de paix, dont il sera parl ci-aprs, & dans les cas qui seront par nous dtermins.

    Article XII. Les revenus de chaque habitation seront partags en trois portions gales, dduction faite des impositions, lesquelles sont prleves sur la totalit.

    Un tiers demeure la proprit de la terre & appartiendra au propritaire. Il aura la jouissance de l'autre tiers pour les frais de fesance-valoir ; le tiers restant sera partag entre les cultivateurs de la manire qui va tre fixe.

    Article XIII. Dans les frais de fesance-valoir sont compris tous les frais quelconques d'exploitation, les outils, les animaux ncessaires la culture & au transport des denres, la construction & l'entretien des btiments, les frais de l'hpital, des chirurgiens & grans.

    Article XIV. Dans le tiers du revenu appartenant aux cultivateurs, les commandeurs, qui seront dsormais appels conducteurs de travaux, auront trois parts.

    Article XV. Les sous-conducteurs recevront deux parts, de mme que ceux qui seront employs la fabrication du sucre & de l'indigo.

    Article XVI. Les autres cultivateurs, quinze ans & au-dessus, auront chacun une part.

    Article XVII. Les femmes quinze ans & au-dessus auront deux tiers de part.

    Article XVIII. Depuis dix ans jusqu' quinze, les enfans des deux sexes auront demi-part.

    Article XIX. Les cultivateurs auront en outre leurs places vivres ; elles seront rparties quitablement entre chaque famille, eu gard la qualit de la terre & la quantit qu'il convient d'accorder.

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    Article XX. Les mres de familles qui auront un ou plusieurs enfans au-dessous de dix ans, recevront part entire. Jusqu'au dit ge les enfans resteront la charge de leurs parens pour la nourriture & l'habillement.

    Article XXI. Depuis l'ge de dix ans celui de quinze, les enfans ne pourront tre employs qu' la garde des animaux ou ramasser & trier du caf & du coton.

    Article XXII. Les vieillards & les infirmes seront nourris par leurs parens. Les vtemens & les mdicamens seront la charge du propritaire.

    Article XXIII. Les denres seront partages chaque livraison entre le propritaire & le cultivateur, en nature ou en argent au prix du cours, au choix du propritaire : en cas de partage en nature, celui-ci sera tenu de faire conduire l'embarcadaire le plus voisin la portion des cultivateurs.

    Article XXIV. Il sera tabli dans chaque commune un juge de paix & deux assesseurs, dont les fonctions seront de prononcer sur les diffrends entre les propritaires & les cultivateurs, et de ces derniers entr'eux, relativement la division de leurs portions dans le revenu : ils veilleront ce que les cultivateurs soient bien soigns dans leurs maladies, ce que tous travaillent galement ; & ils maintiendront l'ordre dans les ateliers.

    Article XXV. Les propritaires, fermiers ou grans seront tenus d'avoir un registre paraph par la municipalit du lieu, sur lequel sera inscrit la quantit de chaque livraison de denres, & de rgler la rpartition du tiers revenant aux cultivateurs ; cette rpartition sera vrifie par l'inspecteur de la paroisse & arrte par lui dfinitivement.

    Le juge de paix sera tenu d'avoir un double du registre tenu par chaque grant ou propritaire & de le reprsenter l'inspecteur gnral toutes les fois qu'il en sera requis : il en sera de mme des propritaires & grans l'gard des juges de paix & de l'inspecteur gnral.

    Article XXVI. L'inspecteur gnral de la province du Nord sera charg d'inspecter toutes les habitations, de prendre auprs des juges de paix tous les renseignemens possibles sur la police & la discipline des atteliers & de nous en rendre compte ainsi qu'au gouverneur gnral & l'ordonnateur civil. Il sera en tourne au moins vingt jours du mois.

    Article XXVII. La correction du fouet est absolument supprime ; elle sera remplace, pour les fautes contre la discipline, par la barre pour un, deux ou trois jours, suivant l'exigence des cas. La plus forte peine sera la perte d'une partie ou de la totalit des salaires ; elle sera prononce par le juge de paix et ses assesseurs ; la portion de celui ou de ceux qui en seront privs accrotra au profit de l'attelier.

    Article XXVIII. A l'gard des dlits civils, les ci-devant esclaves seront jugs comme les autres citoyens franais.

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    Article XXIX. Les cultivateurs ne pourront tre contraints de travailler le dimanche : il leur sera laiss deux heures par jour pour la culture de leur place. Les juges de paix rgleront, suivant les circonstances, l'heure laquelle les travaux devront commencer et finir.

    Article XXX.

    Il sera libre au propritaire ou grant d'avoir tel nombre que bon lui semblera de conducteurs ou sous-conducteurs de travaux ; ils seront choisis par lui & pourront tre destitus galement par lui, la charge d'en rendre compte au juge de paix qui, assist de ses assesseurs, prononcera sur la validit de la destitution.

    Les conducteurs & sous-conducteurs pourront aussi tre destitus par le juge de paix assist de ses assesseurs, sur les plaintes portes contre eux par les cultivateurs.

    Article XXXI. Les femmes enceintes de sept mois ne travailleront point au jardin, & n'y retourneront que deux mois aprs leurs couches ; elles n'en jouiront pas moins, pendant ce temps, des deux tiers de part qui leur sont allous.

    Article XXXII. Les cultivateurs pourront changer d'habitation pour raison de sret ou d'incompatibilit de caractre reconnue, ou sur la demande de l'atelier o ils sont employs. Le tout sera soumis la dcision du juge de paix, assist de ses assesseurs.

    Article XXXIII. Dans la quinzaine du jour de la promulgation de la prsente proclamation, tous les hommes qui n'ont pas de proprits, & qui ne seront ni enrls, ni attachs la culture, ni employs au service domestique & qui seraient trouvs errants, seront arrts & mis en prison.

    Article XXXIV.

    Les femmes qui n'auront pas de moyens d'existence connus, qui ne seront pas attaches la culture ou employes au service domestique, dans le dlai ci-dessus fix, ou qui feraient trouves errantes seront galement arrtes & mises en prison.

    Article XXXV. Les hommes & femmes mis en prison dans les cas noncs aux deux articles prcdens, seront dtenus pendant un mois, pour la premire fois ; pendant trois mois, pour la seconde ; & la troisime fois, condamns aux travaux publics pendant un an.

    Article XXXVI. Les personnes attaches la culture, & les domestiques ne pourront, sous aucun prtexte, quitter, sans une permission de la municipalit, la commune o ils rsident ; ceux qui contreviendront cette disposition seront punis de la manire dtermine dans l'article XXVII.

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    Article XXXVII. Le juge de paix sera tenu de visiter, toutes les semaines, les habitations de sa dpendance. Le procs-verbal de visite sera envoy l'inspecteur gnral, qui en fera passer des expditions aux Commissaires Civils, au Gouverneur Gnral & l'Ordonnateur Civil.

    Article XXXVIII.

    Les dispositions du Code Noir demeurent provisoirement abroges.

    La prsente proclamation sera imprime & affiche partout o besoin sera.

    Elle sera proclame dans les carrefours & places publiques des villes et bourgs de la province du Nord, par les officiers municipaux en charpe, prcds du bonnet de la Libert, port au haut d'une pique.

    Ordonnons la commission intermdiaire, aux corps administratifs & judiciaires de la faire transcrire dans leurs registres, publier & afficher.

    Ordonnons tout commandant militaire de prter main-forte pour son excution.

    Requrons le Gouverneur Gnral par intrim de tenir la main l'excution.

    Au Cap, le 29 aot 1793, l'an deux de la Rpublique Franaise. SONTHONAX. Par le Commissaire civil de la Rpublique. GAULT , Secrtaire adjoint de la Commission Civile. AU CAP-FRANAIS, de l'Imprimerie de P. Gatineau au Carnage, prs de la Commission Intermdiaire. Note : Vincent Og tait un propritaire multre favorable l'octroi de l'galit aux libres ou affranchis. Il conduisit une rbellion arme des multres en octobre 1790. Rfugi dans la partie espagnole, il fut livr aux autorits franaises. Il fut condamn la roue et excut en fvrier 1791.

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    Hati

    Acte d'indpendance.

    L'mancipation des esclaves de Saint-Domingue, insurgs depuis 1791, est proclame le 29 aot 1793, par le commissaire de la Rpublique Sonthonax, quelques mois avant que la Convention dcrte l'abolition gnrale de l'esclavage dans les colonies franaises. Toussaint Louverture, l'un des chefs de l'insurrection, qui a t nomm gnral de brigade par la Convention, puis commandant en chef de la colonie le 15 mai 1797, chasse les Britanniques, rtablit l'ordre, puis se rend matre de la totalit de l'le par la conqute de la partie espagnole (janvier 1801). Il proclame alors une Constitution (8 juillet 1801), qui tablit l'autonomie de Saint-Domingue au sein de la Rpublique franaise et le dsigne gouverneur vie. Bonaparte, la suite de la paix d'Amiens, dcide de rtablir l'esclavage dans les possessions franaises (loi du 20 mai 1802). Il confie son beau-frre, le gnral Leclerc, un corps expditionnaire de 25.000 hommes, qui doit rtablir l'autorit de la France sur l'le. Cette expdition tourne rapidement au dsastre. Le corps expditionnaire est dcim par les maladies. Leclerc mort, Toussaint Louverture est captur, mais les troupes franaises, commandes par Rochambeau, sont battues Vertires, le 18 novembre 1803, par son successeur Jean-Jacques Dessalines. Elles doivent capituler et vacuer l'le en quelques jours. Dessalines et les chefs de l'Arme indigne peuvent proclamer, le 1er janvier 1804, l'indpendance de l'le, dsigne dsormais sous le nom d'Hati. Les pleins pouvoirs sont aussitt attribus Dessalines, qui est bientt proclam empereur.

    Source : The National Archives Website, http://nationalarchives.gov.uk/ Catalogue Reference:co/137/111.

    Libert ou la mort.

    Arme indigne.

    Gonaves, le premier janvier 1804, An I de l'Indpendance

    Aujourd'hui premier janvier dix huit cent quatre, le Gnral en chef de l'Arme indigne, accompagn des gnraux, chefs de l'arme, convoqus l'effet de prendre les mesures qui doivent tendre au bonheur du pays :

    Aprs avoir fait connatre aux gnraux assembls ses vritables intentions d'assurer jamais aux indignes d'Hati un gouvernement stable, objet de sa plus vive sollicitude : ce qu'il a fait un discours qui tend faire connatre aux puissances trangres la rsolution de rendre le pays indpendant, et de jouir d'une libert consacre par le sang du peuple de cette le ; et, aprs avoir recueilli les avis, a demand que chacun des gnraux assembls pronont le serment de renoncer jamais la France, de mourir plutt que de vivre sous sa domination, et de combattre jusqu'au dernier soupir pour l'indpendance.

    Les gnraux, pntrs de ces principes sacrs, aprs avoir donn d'une voix unanime leur adhsion au projet bien manifest d'indpendance, ont tous jur la postrit, l'univers entier, de renoncer jamais la France, et de mourir plutt que de vivre sous sa domination.

    Dessalines, gnral en chef ;

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    Christophe, Ption, Clerveaux, Geffrard, Vernet, Gabart, gnraux de division ; P . Romain, E. Grin, F. Capois, Daut, Jean-Louis Franois, Frou, Cang, L. Bazelais, Magloire Ambroise, J. J. Herne, Toussaint Brave, Yayou, gnraux de brigade ; Bonnet, F. Papalier, Morelly, Chevalier, Marion, adjudants-gnraux ; Magny, Roux chefs de brigade ; Chareron, B. Loret, Quen, Macajoux, Dupuy, Carbonne, Diaquoi an, Raphal, Malet, Derenoncourt, officiers de l'arme ; Et Boisrond Tonnerre, secrtaire.

    Proclamation.

    Le gnral en Chef,

    Au Peuple d'Hayti. Citoyens, Ce n'est pas assez d'avoir expuls de votre pays les barbares qui l'ont ensanglant depuis deux sicles ; ce n'est pas assez d'avoir mis un frein aux factions toujours renaissantes qui se jouaient tour tour du fantme de libert que la France exposait vos yeux ; il faut, par un dernier acte d'autorit nationale, assurer jamais l'empire de la libert dans le pays qui nous a vu natre ; il faut ravir au gouvernement inhumain, qui tient depuis long-tems nos esprits dans la torpeur la plus humiliante, tout espoir de nous rasservir ; il faut enfin vivre indpendans ou mourir. Indpendance ou la mort... Que ces mots sacrs nous rallient, et qu'ils soient le signal des combats et de notre runion. Citoyens, mes compatriotes, j'ai rassembl en ce jour solennel ces militaires courageux, qui, la veille de recueillir les derniers soupirs de la libert, ont prodigu leur sang pour la sauver ; ces gnraux qui ont guid vos efforts contre la tyrannie, n'ont point encore assez fait pour votre bonheur... Le nom franais lugubre encore nos contres. Tout y retrace le souvenir des cruauts de ce peuple barbare ; nos lois, nos murs, nos villes, tout porte encore l'empreinte franaise ; que dis-je, il existe des Franais dans notre le, et vous vous croyez libres et indpendans de cette rpublique qui a combattu toutes les nations, il est vrai, mais qui n'a jamais vaincu celles qui ont voulu tre libres. Eh quoi ! victimes pendant quatorze ans de notre crdulit et de notre indulgence ; vaincus, non par des armes franaises, mais par la piteuse loquence des proclamations de leurs agens ; quand nous lasserons-nous de respirer le mme air qu'eux ? Qu'avons-nous de commun avec ce peuple bourreau ? Sa cruaut compare a notre patiente modration ; sa couleur la ntre ; l'tendue des mers qui nous sparent, notre climat vengeur, nous disent assez qu'ils ne sont pas nos frres, qu'ils ne le deviendront jamais et que, s'ils trouvent un asile parmi nous, ils seront encore les machinateurs de nos troubles et de nos divisions.

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    Citoyens indignes, hommes, femmes, filles et enfans, portez les regards sur toutes les parties de cette le ; cherchez-y, vous vos pouses, vous vos maris, vous vos frres, vous vos surs ; que dis-je, cherchez-y vos enfans, vos enfants la mamelle ! Que sont-ils devenus... Je frmis de le dire... la proie de ces vautours. Au lieu de ces victimes intressantes, votre il constern n'aperoit que leurs assassins ; que les tigres dgouttant encore de leur sang, et dont l'affreuse prsence vous reproche votre insensibilit et votre lenteur les venger. Qu'attendez-vous pour apaiser leurs mnes, songez que vous avez voulu que vos restes reposassent auprs de ceux de vos pres, quand vous avez chass la tyrannie ; descendrez-vous dans leurs tombes sans les avoir vengs ? Non, leurs ossements repousseraient les vtres. Et vous, hommes prcieux, gnraux intrpides, qui insensibles vos propres malheurs, avez ressuscit la libert en lui prodiguant tout votre sang ; sachez que vous n'avez rien fait, si vous ne donnez aux nations un exemple terrible, mais juste, de la vengeance que doit exercer un peuple fier d'avoir recouvr sa libert, et jaloux de la maintenir ; effrayons tous ceux qui oseraient tenter de nous la ravir encore : commenons par les Franais... Qu'ils frmissent en abordant nos ctes, sinon par le souvenir des cruauts qu'ils y ont exerces, au moins par la rsolution terrible que nous allons prendre de dvouer la mort quiconque, n franais, souillerait de son pied sacrilge le territoire de la libert. Nous avons os tre libres, osons l'tre par nous-mmes et pour nous-mmes ; imitons l'enfant qui grandit : son propre poids brise la lisire qui lui devient inutile et l'entrave dans sa marche. Quel peuple a combattu pour nous ! Quel peuple voudrait recueillir les fruits de nos travaux ? Et quelle dshonorante absurdit que de vaincre pour tre esclaves. Esclaves !... Laissons aux Franais cette pithte qualificative ; ils ont vaincu pour cesser d'tre libres. Marchons sur d'autres traces ; imitons ces peuples qui, portant leur sollicitude jusques sur l'avenir, et apprhendant de laisser la postrit l'exemple de la lchet, ont prfr tre extermins que rays du nombre des peuples libres. Gardons-nous cependant que l'esprit de proslytisme ne dtruise notre ouvrage ; laissons en paix respirer nos voisins, qu'ils vivent paisiblement sous l'empire des lois qu'ils se sont faites, et n'allons pas, boutes-feu rvolutionnaires, nous rigeant en lgislateurs des Antilles, faire consister notre gloire troubler le repos des Isles qui nous avoisinent ; elles n'ont point, comme celles que nous habitons, t arroses du sang innocent de leurs habitans ; elles n'ont point de vengeance exercer contre l'autorit qui les protge. Heureuses de n'avoir jamais connu les flaux qui nous ont dtruit, elles ne peuvent que faire des vux pour notre prosprit.

    Paix nos voisins ! mais anathme au nom franais ! haine ternelle la France ! voil notre cri.

    Indignes d'Hati ! mon heureuse destine me rservait tre un jour la sentinelle qui dt veiller la garde de l'idole laquelle vous sacrifiez : j'ai veill, combattu, quelquefois seul ; et, si j'ai t assez heureux pour remettre en vos mains le dpt sacr que vous m'avez confi, songez que c'est vous maintenant le conserver. En combattant pour votre libert, j'ai travaill mon propre bonheur. Avant de la consolider par des lois qui assurent votre libre individualit, vos chefs, que j'assemble ici, et moi-mme, nous vous devons la dernire preuve de notre dvouement. Gnraux, et vous chefs, runis ici prs de moi pour le bonheur de notre pays, le jour est arriv, ce jour qui doit terniser notre gloire, notre indpendance.

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    S'il pouvait exister parmi vous un cur tide, qu'il s'loigne et tremble de prononcer le serment qui doit nous unir. Jurons l'univers entier, la postrit, nous-mmes, de renoncer jamais la France, et de mourir plutt que de vivre sous sa domination.

    De combattre jusqu'au dernier soupir pour l'indpendance de notre pays !

    Et toi, peuple trop long-tems infortun, tmoin du serment que nous prononons, souviens-toi que c'est sur ta constance et ton courage que j'ai compt quand je me suis lanc dans la carrire de la libert pour y combattre le despotisme et la tyrannie contre lesquels tu luttais depuis quatorze ans. Rappelle-toi que j'ai tout sacrifi pour voler ta dfense, parens, enfans, fortune, et que maintenant je ne suis riche que de ta libert ; que mon nom est devenu en horreur tous les peuples qui veulent l'esclavage, et que les despotes et les tyrans ne le prononcent qu'en maudissant le jour qui m'a vu natre ; et si jamais tu refusais ou recevais en murmurant les lois que le gnie qui veille a tes destines me dictera pour ton bonheur, tu mriterais le sort des peuples ingrats. Mais loin de moi cette affreuse ide. Tu seras le soutien de la libert que tu chris, l'appui du chef qui te commande. Prte donc entre ses mains le serment de vivre libre et indpendant, et de prfrer la mort tout ce qui tendrait te remettre sous le joug. Jure enfin de poursuivre jamais les tratres et les ennemis de ton indpendance. Fait au quartier gnral des Gonaves, le 1er janvier mil huit cent quatre, l'An premier de l'indpendance. Sign : J. J. Dessalines

    Au nom du peuple d'Hati. Nous, gnraux et chefs des armes de l'le d'Hayti, pntrs de reconnaissance des bienfaits que nous avons prouvs du gnral en chef Jean -Jacques Dessalines, le protecteur de la libert dont jouit le peuple. Au nom de la Libert, au nom de l'Indpendance, au nom du Peuple qu'il a rendu heureux, nous le proclamons Gouverneur gnral, vie, d'Hayti. Nous jurons d'obir aveuglment aux lois manes de son autorit, la seule que nous reconnatrons. Nous lui donnons le droit de faire la paix, la guerre et de nommer son successeur.

    Fait au quartier-gnral des Gonaves, ce premier jour de janvier mil huit cent quatre et le premier jour de l'Indpendance.

    Sign : Gabart, Paul Romain, P.-J. Herne, Capois, Christophe, Geffrard, E. Grin, Vernet, Ption, Clerveaux, Jean-Louis Franois, Cang, Frou, Yayou, Toussaint Brave , Magloire Ambroise, Louis Bazelais.

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    Hati

    Constitution du 3 juillet 1801.

    Titre premier. Du territoire. Titre II. De ses habitants. Titre III. De la religion. Titre IV. Des moeurs. Titre V. Des hommes en socit. Titre VI. Des cultures et du commerce. Titre VII. De la lgislation et de l'autorit lgislative. Titre VIII. Du Gouvernement. Titre IX. Des tribunaux. Titre X. Des administrations municipales. Titre XI. De la force arme. Titre XII. Des finances, des biens domaniaux squestrs et vacants. Titre XIII. Dispositions gnrales. L'mancipation des esclaves de Saint-Domingue, proclame par Sonthonax le 19 aot 1793, a permis de mettre fin la rvolte des esclaves et entran le ralliement de plusieurs des chefs de l'insurrection, notamment Toussaint Louverture. Celui-ci, nomm gnral de brigade par la Convention, puis commandant en chef de la colonie le 15 mai 1797, chasse les Britanniques, rtablit l'ordre, puis se rend matre de la totalit de l'le par la conqute de la partie espagnole (janvier 1801). Il proclame alors le 14 messidor/3 juillet 1801 une Constitution propose par les dputs le 19 floral/9 mai, qui tablit l'autonomie de Saint-Domingue au sein de la Rpublique franaise et lui accorde de grands pouvoirs en tant que gouverneur vie. Cependant Bonaparte refuse de sanctionner cette Constitution, et pour rtablir l'autorit de la France sur l'le, il confie son beau-frre, le gnral Leclerc, un corps expditionnaire de 25.000 hommes. Cette expdition tourne rapidement au dsastre. Mais Toussaint Louverture est captur par traitrise, et il meurt le 27 avril 1803, trop tt pour assister la victoire de son successeur Dessalines, qui proclame l'indpendance le 1er janvier 1804, et fonde l'Empire d'Hati.

    Sources : Nous avons consult une brochure : Constitution franaise des colonies de Saint-Domingue, en soixante-dix-sept articles, Abolition de la loi du divorce, qui assure la prosprit des familles. La garantie des proprits individuels

    des personnes et la libert des ngres, des gens de couleurs, et de tous genres, prsent au premier consul de France,

    par le citoyen Toussaint-Louverture, gnral en chef et gouverneur des colonies franaises de Saint-Domingue. Imprime chez la veuve Leroux, n 20, rue de la Vieille-Bouclerie, slnd. Le texte ci-dessous, qui en diffre lgrement sans que le sens soit dform, est tir de l'ouvrage de Louis-Joseph Janvier, Les Constitutions d'Hati, Paris, Marpon et Flammarion, 1886. Toutefois l'orthographe et la ponctuation ont t modernises et la date de la signature est diffrente : 14 messidor au lieu de 13 dans la brochure. Voir galement Thomas Madiou, Histoire d'Hati, Port-au-Prince, 1848, tome III, p. 459 et s.

    Les dputs des dpartements de la colonie de Saint-Domingue, runis en Assemble centrale, ont arrt et pos les bases constitutionnelles du rgime de la colonie franaise de Saint-Domingue, ainsi qu'il suit :

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    Titre premier.

    Du territoire.

    Article premier. Saint-Domingue dans toute son tendue, et Samana, la Tortue, la Gonve, les Cayemites, l'Ile--Vaches, la Sane et autres les adjacentes, forment le territoire d'une seule colonie, qui fait partie de l'Empire franais, mais qui est soumis des lois particulires.

    Article 2. Le territoire de cette colonie se divise en dpartements, arrondissements et paroisses.

    Titre II.

    De ses habitants.

    Article 3. Il ne peut exister d'esclaves sur ce territoire, la servitude y est jamais abolie. Tous les hommes y naissent, vivent et meurent libres et Franais.

    Article 4. Tout homme, quelle que soit sa couleur, y est admissible tous les emplois.

    Article 5. Il n'y existe d'autre distinction que celle des vertus et des talents, et d'autre supriorit que celle que la loi donne dans l'exercice d'une fonction publique.

    La loi est la mme pour tous, soit qu'elle punisse, soit qu'elle protge.

    Titre III.

    De la religion.

    Article 6. La religion catholique, apostolique et romaine y est la seule publiquement professe.

    Article 7. Chaque paroisse pourvoit l'entretien du culte religieux et de ses ministres. Les biens de fabrique sont spcialement affects cette dpense, et les maisons presbytrales au logement des ministres.

    Article 8. Le gouverneur de la colonie assigne chaque ministre de la religion l'tendue de son administration spirituelle, et ces ministres ne peuvent jamais, sous aucun prtexte, former un corps dans la colonie.

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    Titre IV. Des moeurs.

    Article 9. Le mariage, par son institution civile et religieuse, tendant la puret des moeurs, les poux qui pratiqueront les vertus qu'exige leur tat seront toujours distingus et spcialement protgs par le gouvernement.

    Article 10. Le divorce n'aura pas lieu dans la colonie.

    Article 11. L'tat et le droit des enfants ns par mariage seront fixs par des lois qui tendront rpandre et entretenir les vertus sociales, encourager et cimenter les liens de famille.

    Titre V. Des hommes en socit.

    Article 12. La Constitution garantit la libert et la sret individuelle. Nul ne peut tre arrt qu'en vertu d'ordre formellement exprim, man d'un fonctionnaire auquel la loi donne droit de faire arrter, dtenir dans un lieu publiquement dsign.

    Article 13. La proprit est sacre et inviolable. Toute personne, soit par elle-mme, soit par ses reprsentants, a la libre disposition et administration de ce qui est reconnu lui appartenir. Quiconque porte atteinte ce droit se rend criminel envers la socit et responsable envers la personne trouble dans sa proprit.

    Titre VI. Des cultures et du commerce.

    Article 14. La colonie tant essentiellement agricole, ne peut souffrir la moindre interruption dans les travaux de ses cultures.

    Article 15. Chaque habitation est une manufacture qui exige une runion de cultivateurs et ouvriers ; c'est l'asile tranquille d'une active et constante famille, dont le propritaire du sol ou son reprsentant est ncessairement le pre.

    Article 16. Chaque cultivateur et ouvrier est membre de la famille et portionnaire dans les revenus.

    Tout changement de domicile de la part des cultivateurs entrane la ruine des cultures.

    Pour rprimer un vice aussi funeste la colonie que contraire l'ordre public, le gouverneur fait tous rglements de police que les circonstances ncessitent et conformes aux bases du rglement de

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    police du 20 vendmiaire an IX, et de la proclamation du 19 pluvise suivant du gnral en chef Toussaint-Louverture

    Article 17. L'introduction des cultivateurs indispensables au rtablissement et l'accroissement des cultures aura lieu Saint-Domingue ; la Constitution charge le gouverneur de prendre les mesures convenables pour encourager et favoriser cette augmentation de bras, stipuler et balancer les divers intrts, assurer et garantir l'excution des engagements respectifs rsultant de cette introduction.

    Article 18. Le commerce de la colonie ne consistant uniquement que dans l'change des denres et productions de son territoire, en consquence, l'introduction de celles de mme nature que les siennes est et demeure prohibe.

    Titre VII. De la lgislation et de l'autorit lgislative.

    Article 19. Le rgime de la colonie est dtermin par des lois proposes par le gouverneur et rendues par une assemble d'habitants, qui se runissent des poques fixes au centre de cette colonie, sous le titre d'Assemble centrale de Saint-Domingue.

    Article 20. Aucune loi relative l'administration intrieure de la colonie ne pourra y tre promulgue si elle n'est revtue de cette formule : L'Assemble centrale de Saint-Domingue, sur la proposition du gouverneur, rend la loi suivante :

    Article 21. Aucune loi ne sera obligatoire pour les citoyens que du jour de la promulgation aux chefs-lieux des dpartements. La promulgation de la loi a lieu ainsi qu'il suit : Au nom de la colonie franaise de Saint-Domingue, le gouverneur ordonne que la loi ci-dessus soit scelle, promulgue et excute dans toute la

    colonie.

    Article 22. L'Assemble centrale de Saint-Domingue est compose de deux dputs par dpartement, lesquels, pour tre ligibles, devront tre gs de 30 ans au moins et avoir rsid cinq ans dans la colonie.

    Article 23. L'Assemble est renouvele tous les deux ans par moiti ; nul ne peut tre membre pendant six annes conscutives. L'lection a lieu ainsi : les administrations municipales nomment, tous les deux ans, au 10 ventse (1er mars), chacune un dput, lesquels se runissent, dix jours aprs, aux chefs-lieux de leurs dpartements respectifs, o ils forment autant d'assembles lectorales dpartementales qui nomment chacune un dput l'Assemble centrale.

    La prochaine lection aura lieu au 10 ventse de la onzime anne de la Rpublique franaise (1er mars 1803). En cas de dcs, dmission ou autrement d'un ou de plusieurs membres de l'Assemble, le gouverneur pourvoit leur remplacement.

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    Il dsigne galement les membres de l'Assemble centrale actuelle qui, l'poque du premier renouvellement, devront rester membres de l'Assemble pour deux autres annes.

    Article 24. L'Assemble centrale vote l'adoption ou le rejet des lois qui lui sont proposes par le gouverneur ; elle exprime son vote sur les rglements faits et sur l'application des lois dj faites, sur les abus corriger, sur les amliorations entreprendre dans toutes les parties du service de la colonie.

    Article 25. La session commence chaque anne le 1er germinal (22 mars) et ne peut excder la dure de trois mois. Le gouverneur peut la convoquer extraordinairement ; les sances ne sont pas publiques.

    Article 26. Sur les tats de recettes et de dpenses qui lui sont prsents par le gouverneur, l'Assemble centrale dtermine, s'il y a lieu, l'assiette, la quotit, la dure et le mode de perception de l'impt, son accroissement ou sa diminution ; ces tats seront sommairement imprims.

    Titre VIII. Du Gouvernement.

    Article 27. Les rnes administratives de la colonie sont confies un gouverneur qui correspond directement avec le gouvernement de la mtropole, pour tout ce qui est relatif aux intrts de la colonie.

    Article 28. La Constitution nomme gouverneur le citoyen Toussaint-Louverture, gnral en chef de l'arme de Saint-Domingue, et, en considration des importants services qu'il a rendus la colonie, dans les circonstances les plus critiques de la rvolution, et sur le voeu des habitants reconnaissants, les rnes lui en sont confies pendant le reste de sa glorieuse vie.

    Article 29. A l'avenir, chaque gouverneur sera nomm pour cinq ans, et pourra tre continu tous les cinq ans en raison de sa bonne administration.

    Article 30. Pour affermir la tranquillit que la colonie doit la fermet, l'activit, au zle infatigable et aux vertus rares du gnral Toussaint-Louverture, et en signe de la confiance illimite des habitants de Saint-Domingue, la Constitution attribue exclusivement ce gnral le droit de choisir le citoyen qui, au malheureux vnement de sa mort, devra immdiatement le remplacer. Ce choix sera secret ; il sera consign dans un paquet cachet qui ne pourra tre ouvert que par l'Assemble centrale, en prsence de tous les gnraux de l'arme de Saint-Domingue en activit de service et des commandants en chef des dpartements.

    Le gnral Toussaint-Louverture prendra toutes les mesures de prcaution ncessaires pour faire connatre l'Assemble centrale le lieu du dpt de cet important paquet.

    Article 31. Le citoyen qui aura t choisi par le gnral Toussaint-Louverture pour prendre sa mort les rnes du gouvernement, prtera, entre les mains de l'Assemble centrale, le serment d'excuter la

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    Constitution de Saint-Domingue et de rester attach au gouvernement franais, et sera immdiatement install dans ses fonctions ; le tout en prsence des gnraux de l'arme en activit de service et des commandants en chef de dpartements, qui tous, individuellement et sans dsemparer, prteront entre les mains du nouveau gouverneur le serment d'obissance ses ordres.

    Article 32. Un mois au plus tard avant l'expiration des cinq ans fixs pour l'administration de chaque gouverneur, celui qui sera en fonctions convoquera l'Assemble centrale et la runion des gnraux de l'arme en activit et des commandants en chef des dpartements, au lieu ordinaire des sances de l'Assemble centrale, l'effet de nommer, concurremment avec les membres de cette Assemble, le nouveau gouverneur ou continuer celui qui est en fonctions.

    Article 33. Le dfaut de convocation de la part du gouverneur en fonctions est une infraction manifeste la Constitution. Dans ce cas, le gnral le plus lev en grade, ou le plus ancien grade gal, qui se trouve en activit de service dans la colonie, prend, de droit, et provisoirement, les rnes du gouvernement.

    Ce gnral convoque immdiatement les autres gnraux en activit, les commandants en chef de dpartements et les membres de l'Assemble centrale, qui tous sont tenus d'obir la convocation, l'effet de procder concurremment la nomination d'un nouveau gouverneur.

    En cas de dcs, dmission ou autrement d'un gouverneur avant l'expiration de ses fonctions, le gouvernement passe de mme provisoirement entre les mains du gnral le plus lev en grade, ou le plus ancien grade gal, lequel convoque, aux mmes fins que ci-dessus, les membres de l'Assemble centrale, les gnraux en activit de service et les commandants en chef de dpartements.

    Article 34. Le gouverneur scelle et promulgue les lois ; il nomme tous les emplois civils et militaires. Il commande en chef la force arme et est charg de son organisation ; les btiments de l'tat en station dans les ports de la colonie reoivent ses ordres.

    Il dtermine la division du territoire de la manire la plus conforme aux relations intrieures. Il veille et pourvoit, d'aprs les lois, la sret intrieure et extrieure de la colonie, et, attendu que l'tat de guerre est un tat d'abandon et de malaise et de nullit pour la colonie, le gouverneur est charg de prendre dans ces circonstances les mesures qu'il croit ncessaires pour assurer la colonie les subsistances et approvisionnements de toute espce.

    Article 35. Il exerce la police gnrale des habitants et des manufactures, et fait observer les obligations des propritaires, fermiers, de leurs reprsentants envers les cultivateurs et ouvriers, et les devoirs des cultivateurs envers les propritaires, fermiers ou leurs reprsentants.

    Article 36. Il fait l'Assemble centrale la proposition de la loi, de mme que tel changement la Constitution que l'exprience pourra ncessiter.

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    Article 37. Il dirige, surveille la perception, le versement et l'emploi des finances de la colonie, et donne, cet effet, tous les ordres quelconques.

    Article 38. Il prsente, tous les deux ans, l'Assemble centrale les tats des recettes et des dpenses de chaque dpartement, anne par anne.

    Article 39. Il surveille et censure, par la voie de ses commissaires, tout crit destin l'impression dans l'le ; il fait supprimer tous ceux venant de l'tranger qui tendraient corrompre les moeurs ou troubler de nouveau la colonie, il en fait punir les auteurs ou colporteurs, suivant la gravit du cas.

    Article 40. Si le gouverneur est inform qu'il se trame quelque conspiration contre la tranquillit de la colonie, il fait aussitt arrter les personnes qui en sont prsumes les auteurs, fauteurs ou complices ; aprs leur avoir fait subir un interrogatoire extra-judiciaire, il les fait traduire, s'il y a lieu, devant un tribunal comptent.

    Article 41. Le traitement du gouverneur est fix, quant prsent, 300.000 francs. Sa garde d'honneur est aux frais de la colonie.

    Titre IX. Des tribunaux.

    Article 42. Il ne peut tre port atteinte au droit qu'ont les citoyens de se faire juger l'amiable par des arbitres leur choix.

    Article 43. Aucune autorit ne peut suspendre ni empcher l'excution des jugements rendus par les tribunaux.

    Article 44. La justice est administre dans la colonie par des tribunaux de premire instance et des tribunaux d'appel. La loi dtermine l'organisation des uns et des autres, leur nombre, leur comptence et le territoire formant le ressort de chacun. Ces tribunaux, suivant leur degr de juridiction, connaissent toutes les affaires civiles et criminelles.

    Article 45. Il y a pour la colonie un tribunal de cassation, qui prononce sur les demandes en cassation contre les jugements rendus par les tribunaux d'appel, et sur les prises partie contre un tribunal entier. Ce tribunal ne connat point du fond des affaires, mais il casse les jugements rendus sur des procdures dans lesquelles les formes ont t violes, ou qui contiennent quelque contravention expresse la loi, et il renvoie le fond du procs au tribunal qui doit en connatre.

    Article 46. Les juges de ces divers tribunaux conservent leurs fonctions toute leur vie, moins qu'ils ne soient condamns pour forfaiture. Les commissaires du gouvernement peuvent tre rvoqus

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    Article 47. Les dlits des militaires sont soumis des tribunaux spciaux, et des formes particulires de jugement. Ces tribunaux spciaux connaissent aussi des vols et enlvements quelconques, de la violation d'asile, des assassinats, des meurtres, des incendies, du viol, des conspirations et rvoltes.

    Leur organisation appartient au gouverneur de la colonie.

    Titre X. Des administrations municipales.

    Article 48. Dans chaque paroisse de la colonie, il y a une administration municipale ; dans celle o est plac un tribunal de premire instance, l'administration municipale est compose d'un maire et de quatre administrateurs.

    Le commissaire du gouvernement prs le tribunal remplit gratuitement les fonctions de commissaire prs l'administration municipale.

    Dans les autres paroisses, les administrations municipales sont composes d'un maire et de deux administrateurs, et les fonctions de commissaire prs elles sont remplies gratuitement par les substituts du commissaire prs le tribunal d'o relvent ces paroisses.

    Article 49. Les membres des administrations municipales sont nomms pour deux ans ; ils peuvent tre toujours continus. Leur nomination est dvolue au gouvernement qui, sur une liste de seize personnes au moins, qui lui est prsente par chaque administration municipale, choisit les personnes les plus propres grer les affaires de chaque paroisse.

    Article 50. Les fonctions des administrations municipales consistent dans l'exercice de la simple police des villes et bourgs, dans l'administration des deniers provenant des revenus des biens de fabrique et des impositions additionnelles des paroisses. Elles sont, en outre, spcialement charges de la tenue des registres des naissances, mariages et dcs.

    Article 51. Les maires exercent des fonctions particulires que la loi dtermine.

    Titre XI. De la force arme.

    Article 52. La force arme est essentiellement obissante, elle ne peut jamais dlibrer ; elle est la disposition du gouverneur, qui ne peut la mettre en mouvement que pour le maintien de l'ordre public, la protection due tous les citoyens et la dfense de la colonie.

    Article 53. Elle se divise en garde coloniale solde et en garde coloniale non solde.

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    Article 54. La garde coloniale non solde ne sort des limites de sa paroisse que dans le cas d'un danger imminent, et sur l'ordre et sous la responsabilit personnelle du commandant militaire ou de place. Hors des limites de la paroisse elle devient solde, et soumise, dans ce cas, la discipline militaire, et dans tout autre, elle n'est soumise qu' la loi.

    Article 55. La gendarmerie coloniale fait partie de la force arme ; elle se divise en gendarmerie cheval et en gendarmerie pied. La gendarmerie cheval est institue pour la haute police et la sret des campagnes ; elle est la charge du trsor de la colonie. La gendarmerie pied est institue pour la police des villes

    Article 56. L'arme se recrute sur la proposition qu'en fait le gouverneur l'Assemble centrale, et suivant le mode tabli par la loi.

    Titre XII. Des finances, des biens domaniaux squestrs et vacants.

    Article 57. Les finances de la colonie se composent : 1 des droits d'importation, de pesage et de jaugeage ; 2 des droits sur la valeur locative des maisons des villes et bourgs, et ceux sur les produits des manufactures, autres que celles de culture, et sur celui des salines ; 3 du revenu des bacs et postes ; 4 des amendes, confiscations et paves ; 5 du droit de sauvetage sur btiments naufrags ; 6 du revenu des domaines coloniaux.

    Article 58. Le produit des fermages des biens squestrs sur les propritaires absents et non reprsents fait partie provisoirement du revenu public de la colonie et est appliqu aux dpenses d'administration. Les circonstances dtermineront les lois qui pourront tre faites relativement la dette publique arrire, et aux fermages des biens squestrs perus par l'administration dans un temps antrieur la promulgation de la prsente constitution, et l'gard de ceux qui auront t perus, dans un temps postrieur, ils seront exigibles et rembourss dans l'anne qui suivra la leve du squestre du bien.

    Article 59. Les fonds provenant de la vente du mobilier et du prix des fermages des successions vacantes, ouvertes dans la colonie sous le gouvernement franais, depuis 1789, seront verss dans une caisse particulire, et ne seront disponibles, et les immeubles runis aux domaines coloniaux que deux ans aprs la publication de la paix dans l'le, entre la France et les puissances maritimes ; bien entendu que ce dlai n'est relatif qu'aux successions dont le dlai de cinq ans fix par l'dit de 1781 serait expir ; et l'gard de celles ouvertes des poques rapproches de la paix, elles ne pourront tre disponibles et runies qu' l'expiration de sept annes.

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    Article 60. Les trangers succdant en France leurs parents trangers ou franais leur succderont galement Saint-Domingue ; ils pourront contracter, acqurir et recevoir des biens situs dans la colonie, et en disposer de mme que les Franais par tous les moyens autoriss par les lois.

    Article 61. Le mode de perception et administration des finances des biens domaniaux squestrs et vacants sera dtermin par les lois.

    Article 62. Une commission temporaire de comptabilit rgle et vrifie les comptes de recettes et de dpenses de la colonie ; cette commission est compose de trois membres, choisis et nomms par le gouverneur.

    Titre XIII. Dispositions gnrales.

    Article 63. La maison de toute personne est un asile inviolable. Pendant la nuit, nul n'a le droit d'y entrer que dans le cas d'incendie, d'inondation ou de rclamation de l'intrieur. Pendant le jour, on peut y entrer pour un objet spcial dtermin ou, par une loi, ou par un ordre man de l'autorit publique.

    Article 64. Pour que l'acte qui ordonne l'arrestation d'une personne puisse tre excut, il faut : 1 qu'il exprime formellement le motif de l'arrestation et la loi en vertu de laquelle elle est ordonne ; 2 qu'il mane d'un fonctionnaire qui la loi ait formellement donn le pouvoir de le faire ; 3 qu'il soit donn copie de l'ordre la personne arrte.

    Article 65. Tous ceux qui, n'ayant point reu de la loi le pouvoir de faire arrter, donneront, signeront, excuteront ou feront excuter l'arrestation d'une personne, seront coupables du crime de dtention arbitraire.

    Article 66. Toute personne a le droit d'adresser des ptitions individuelles toute autorit constitue, et spcialement au gouverneur.

    Article 67. Il ne peut tre form, dans la colonie, de corporations ni d'associations contraires l'ordre public. Aucune assemble de citoyens ne peut se qualifier de socit populaire. Tout rassemblement sditieux doit tre sur le champ dissip, d'abord par voie de commandement verbal et, s'il est ncessaire, par le dveloppement de la force arme.

    Article 68. Toute personne a la facult de former des tablissements particuliers d'ducation et d'instruction pour la jeunesse sous l'autorisation et la surveillance des administrations municipales.

  • 25

    Article 69. La loi surveille particulirement les professions qui intressent les moeurs publiques, la sret, la sant et la fortune des citoyens.

    Article 70. La loi pourvoit la rcompense des inventeurs de machines rurales, ou au maintien de la proprit exclusive de leurs dcouvertes.

    Article 71. Il y a dans toute la colonie uniformit de poids et de mesures.

    Article 72. Il sera, par le gouverneur, dcern, au nom de la colonie, des rcompenses aux guerriers qui auront rendu des services clatants en combattant pour la dfense commune.

    Article 73. Les propritaires absents, pour quelque cause que ce soit, conservent tous leurs droits sur les biens eux appartenant et situs dans la colonie ; il leur suffira, pour obtenir la main-leve du squestre qui y aurait t pos, de reprsenter leurs titres de proprit et, dfaut de titres, des actes suppltifs dont la loi dtermine la formule. Sont nanmoins excepts de cette disposition ceux qui auraient t inscrits et maintenus sur la liste gnrale des migrs de France ; leurs biens, dans ce cas, continueront d'tre administrs comme domaines coloniaux jusqu' leur radiation.

    Article 74. La colonie proclame, comme garantie de la loi publique, que tous les baux des biens afferms lgalement par l'administration auront leur entier effet, si les adjudicataires n'aiment mieux transiger avec les propritaires ou leurs reprsentants qui auraient obtenu la main-leve de leur squestre.

    Article 75. Elle proclame que c'est sur le respect des personnes et des proprits que reposent la culture des terres, toutes les productions, tout moyen de travail et tout ordre social.

    Article 76. Elle proclame que tout citoyen doit ses services au sol qui le nourrit ou qui l'a vu natre, au maintien de la libert, de l'galit, de la proprit, toutes les fois que la loi l'appelle les dfendre.

    Article 77. Le gnral en chef Toussaint-Louverture est et demeure charg d'envoyer la prsente Constitution la sanction du gouvernement franais ; nanmoins, et vu l'absence des lois, l'urgence de sortir de cet tat de pril, la ncessit de rtablir promptement les cultures et le voeu unanime bien prononc des habitants de Saint-Domingue, le gnral en chef est et demeure invit, au nom du bien public, la faire mettre excution dans toute l'tendue du territoire de la colonie.

    Fait au Port-Rpublicain, le 19 floral an IX de la Rpublique franaise une et indivisible.

    Sign : Borgella, prsident, Raymond, Collet, Gaston Nogre, Lacour, Roxas, Muoz, Mancebo, E. Viart, secrtaire.

  • 26

    ***

    Aprs avoir pris connaissance de la Constitution, je lui donne mon approbation. L'invitation de l'Assemble centrale est un ordre pour moi ; en consquence, je la ferai passer au gouvernement franais pour obtenir sa sanction ; quant ce qui regarde son excution dans la colonie, le voeu exprim par l'Assemble centrale sera galement rempli et excut.

    Donn au Cap-Franais, le 14 messidor an IX de la Rpublique franaise une et indivisible.

    Le gnral en chef : Sign : Toussaint-Louverture.

  • 27

    Hati

    Constitution du 20 mai 1805.

    Dclaration prliminaire. De l'Empire. Du Gouvernement. Du Conseil d'tat. Des ministres. Des tribunaux. Du culte. De l'administration. Dispositions gnrales. L'indpendance d'Hati est proclame le 1er janvier 1804. Jean-Jacques Dessalines, ancien esclave, devenu chef des troupes insurges aprs la capture de Toussaint Louverture, et qui avait vaincu les troupes franaises, commandes par Rochambeau, Vertires, le 18 novembre 1803, est aussitt proclam gouverneur gnral vie, avec les pleins pouvoirs. Ds le 15 fvrier suivant, il demande le titre d'empereur, qui lui est dcern par les autres gnraux de l'arme hatienne. Une Constitution impriale est promulgue le 20 mai 1805. Le rgne de Jacques 1er sera bref. Il est assassin le 17 octobre 1806. L'Empire ne lui survit pas. Ses principaux lieutenants se disputent la succession, sur fond d'opposition entre Noirs et Multres, les premiers reprochant aux seconds de s'tre appropris les biens de leurs parents blancs. Henri Christophe devient prsident, puis roi au Nord, tandis que Ption est prsident au Sud.

    Sources : Louis-Joseph Janvier, Les Constitutions d'Hati, Paris, Marpon et Flammarion, 1886. Thomas Madiou, Histoire d'Hati, Port-au-Prince, 1848, tome III, p. 489 et s.

    Nous, Henry Christophe, Clervaux, Vernet, Gabart, Ption, Geffrard, Toussaint Brave, Raphal, Lalondrie, Romain, Capoix, Magny, Cang, Daut, Magloire Ambroise, Yayou, Jean-Louis Franois, Grin, Moreau, Frou, Bazelais, Martial Besse,

    Tant en notre nom particulier, qu'en celui du peuple d'Hati qui nous a lgalement constitus les organes fidles et les interprtes de sa volont,

    En prsence de l'tre Suprme, devant qui les mortels sont gaux, et qui n'a rpandu tant d'espces de cratures diffrentes sur la surface du globe, qu'aux fins de manifester sa gloire et sa puissance, par la diversit de ses oeuvres,

    En face de la nature entire dont nous avons t si injustement et depuis si longtemps considrs comme les enfants rprouvs,

    Dclarons que la teneur de la prsente Constitution est l'expression libre, spontane et invariable de nos curs et de la volont gnrale de nos constituants,

    La soumettons la sanction de Sa Majest l'empereur Jacques Dessalines, notre librateur, pour recevoir sa prompte et entire excution.

  • 28

    Dclaration prliminaire.

    Article premier. Le peuple habitant l'le ci-devant appele Saint-Domingue, convient ici de se former en tat libre, souverain et indpendant de toute autre puissance de l'univers, sous le nom d'Empire d'Hati.

    Article 2. L'esclavage est jamais aboli.

    Article 3. Les citoyens hatiens sont frres entre eux ; l'galit aux yeux de la loi est incontestablement reconnue, et il ne peut exister d'autre titre, avantages ou privilges, que ceux qui rsultent ncessairement de la considration et en rcompense des services rendus la libert et l'indpendance.

    Article 4. La loi est une pour tous, soit qu'elle punisse, soit qu'elle protge.

    Article 5. La loi n'a point d'effet rtroactif.

    Article 6. La proprit est sacre, sa violation sera rigoureusement poursuivie.

    Article 7. La qualit de citoyen d'Hati se perd par l'migration et par la naturalisation en pays tranger, et par la condamnation des peines afflictives et infamantes. Le premier cas emporte la peine de mort et la confiscation des proprits.

    Article 8. La qualit de citoyen hatien est suspendue par l'effet des banqueroutes et faillites.

    Article 9. Nul n'est digne d'tre Hatien, s'il n'est bon pre, bon fils, bon poux, et surtout bon soldat

    Article 10. La facult n'est point accorde aux pres et mres de dshriter leurs enfants.

    Article 11. Tout citoyen doit possder un art mcanique

    Article 12. Aucun blanc, quelle que soit sa nation, ne mettra le pied sur ce territoire, titre de matre ou de propritaire et ne pourra l'avenir y acqurir aucune proprit.

    Article 13. L'article prcdent ne pourra produire aucun effet tant l'gard des femmes blanches qui sont naturalises hatiennes par le gouvernement, qu' l'gard des enfants ns ou natre d'elles. Sont

  • 29

    compris dans les dispositions du prsent article, les Allemands et Polonais naturaliss par le gouvernement.

    Article 14. Toute acception de couleur parmi les enfants d'une seule et mme famille, dont le chef de l'tat est le pre, devant ncessairement cesser, les Hatiens ne seront dsormais connus que sous la dnomination gnriques de Noirs.

    De l'Empire.

    Article 15. L'Empire d'Hati est un et indivisible ; son territoire est distribu en six divisions militaires.

    Article 16. Chaque division militaire sera commande par un gnral de division

    Article 17. Chacun de ces gnraux de division sera indpendant des autres, et correspondra directement avec l'empereur ou avec le gnral en chef nomm par Sa Majest.

    Article 18. Sont parties intgrantes de l'Empire les les ci-aprs dsignes : Samana, la Tortue, la Gonve, les Cayemites, l'le Vache, la Sane, et autres les adjacentes.

    Du Gouvernement.

    Article 19. Le gouvernement d'Hati est confi un premier magistrat qui prend le titre d'empereur et Chef suprme de l'arme.

    Article 20. Le peuple reconnait pour Empereur et Chef suprme de l'arme, Jacques Dessalines, le vengeur et le librateur de ses concitoyens ; on le qualifie de Majest ainsi que son auguste pouse l'impratrice.

    Article 21. La personne de Leurs Majests est sacre et inviolable.

    Article 22. L'tat accordera un traitement fixe Sa Majest l'impratrice dont elle jouira mme aprs le dcs de l'empereur, titre de princesse douairire.

    Article 23. La couronne est lective et non hrditaire.

    Article 24. Il sera affect, par l'tat, un traitement annuel aux enfants reconnus par Sa Majest l'empereur.

  • 30

    Article 25. Les enfants mles reconnus par l'empereur seront tenus, l'instar des autres citoyens, de passer successivement de grade en grade, avec cette seule diffrence que leur entre au service datera dans la quatrime demi-brigade de l'poque de leur naissance.

    Article 26. L'Empereur dsigne son successeur et de la manire qu'il le juge convenable, soit avant, soit aprs sa mort.

    Article 27. Un traitement convenable sera fix par l'tat ce successeur, au moment de son avnement au trne.

    Article 28. L'Empereur, ni aucun de ses successeurs, n'aura le droit, dans aucun cas, et sous quelque prtexte que ce soit, de s'entourer d'un corps particulier et privilgi titre de garde d'honneur, ou sous toute autre dnomination.

    Article 29. Tout successeur qui s'cartera des dispositions du prcdent article ou de la marche qui lui aura t trace par l'empereur rgnant, ou des principes consacrs par la prsente Constitution, sera considr et dclar en tat de guerre contre la socit. En consquence, les conseillers d'tat s'assembleront, l'effet de prononcer sa destitution, et de pourvoir son remplacement par celui d'entre eux qui en aura t jug le plus digne, et s'il arrivait que ledit successeur voult s'opposer l'excution de cette mesure, autorise par la loi, les gnraux conseillers d'tat feront un appel au peuple et l'arme, qui de suite leur prteront main-forte et assistance pour maintenir la libert.

    Article 30. L'Empereur fait, scelle et promulgue les lois, nomme et rvoque, sa volont, les ministres, le gnral en chef de l'arme, les conseillers d'tat, les gnraux et autres agents de l'Empire, les officiers de l'arme de terre et de mer, les membres des administrations locales, les commissaires du gouvernement prs les tribunaux, les juges et autres fonctionnaires publics.

    Article 31. L'Empereur dirige les recettes et dpenses de l'tat, surveille la fabrication des monnaies ; lui seul en ordonne l'mission, en fixe le poids et le type.

    Article 32. A lui seul est rserv le pouvoir de faire la paix ou la guerre, d'entretenir des relations politiques et de contracter au dehors.

    Article 33. Il pourvoit la sret intrieure et la dfense de l'tat, distribue les forces de terre et de mer suivant sa volont.

    Article 34. L'Empereur, dans le cas o il se tramerait quelque conspiration contre la sret de l'tat, contre la Constitution ou contre sa personne, fera de suite arrter les auteurs ou complices, qui seront jugs par un conseil spcial.

  • 31

    Article 35. Sa Majest seule a le droit d'absoudre un coupable ou de commuer sa peine.

    Article 36. L'Empereur ne formera jamais aucune entreprise dans la vue de faire des conqutes ni de troubler la paix et le rgime intrieur des colonies trangres.

    Article 37. Tout acte public sera fait en ces termes : L'Empereur d'Hati et le chef suprme de l'arme, par la grce de de Dieu et la loi constitutionnelle de l'tat.

    Du Conseil d'tat.

    Article 38. Les gnraux de division et de brigade sont membres-ns du conseil d'tat et le composent.

    Des ministres.

    Article 39. Il y aura dans l'Empire deux ministres et un secrtaire d'tat : Le ministre des finances ayant le dpartement de l'intrieur ; Le ministre de la guerre ayant le dpartement de la marine.

    Article 40. Du ministre des finances et de l'intrieur. Du ministre des finances et de l'intrieur : Les attributions de ce ministre comprennent l'administration gnrale du Trsor public, l'organisation des administrations particulires, la distribution des fonds mettre la disposition du ministre de la guerre et autres fonctionnaires, les dpenses publiques, les instructions qui rglent la comptabilit des administrations et des payeurs de division, l'agriculture, le commerce, l'instruction publique, les poids et mesures, la formation des tableaux de population, les produits territoriaux, les domaines nationaux, soit pour la conservation, soit pour la vente, les baux ferme, les prisons, les hpitaux, l'entretien des routes, les bacs, salines, manufactures, les douanes, enfin la surveillance et la fabrication des monnaies, l'excution des lois et arrts du gouvernement ce sujet.

    Article 41. Du ministre de la guerre et de la marine : Les fonctions de ce ministre embrassent la leve, l'organisation, l'inspection, la surveillance, la discipline, la police et le mouvement des armes de terre et de mer, le personnel et le matriel de l'artillerie et du gnie, les fortifications, les forteresses, les poudres et salptres, l'enregistrement des actes et arrts de l'empereur, leur renvoi aux armes et la surveillance de leur excution ; il veille spcialement ce que les dcisions de l'empereur parviennent promptement aux militaires ; il dnonce aux conseils spciaux les dlits militaires parvenus sa connaissance et surveille les commissaires de guerre et officiers de sant.

    Article 42. Les ministres sont responsables de tous les dlits par eux commis contre la sret publique et la Constitution, de tout attentat la proprit et la libert individuelle, de toute dissipation de deniers eux confis ; ils sont tenus de prsenter, tous les trois mois, l'empereur, l'aperu des dpenses faire, de rendre compte de l'emploi des sommes qui ont t mises leur disposition, et d'indiquer les abus qui auraient pu se glisser dans les diverses branches de l'administration.

  • 32

    Article 43. Aucun ministre en place ou hors de place ne peut tre poursuivi en matire criminelle, pour fait de son administration, sans l'adhsion personnelle de l'empereur.

    Article 44. Du secrtaire d'tat : Le secrtaire d'tat est charg de l'impression, de l'enregistrement et de l'envoi des lois, arrts, proclamations et instructions de l'empereur ; il travaille directement avec l'empereur pour les relations trangres, correspond avec les ministres, reoit de ceux-ci les requtes, ptitions et autres demandes qu'il soumet l'empereur, de mme que les questions qui lui sont proposes par les tribunaux ; il renvoie aux ministres les jugements et les pices sur lesquels l'empereur a statu.

    Des tribunaux.

    Article 45. Nul ne peut porter atteinte au droit qu'a chaque individu de se faire juger l'amiable par des arbitres son choix. Leurs dcisions seront reconnues lgales.

    Article 46. Il y aura un juge de paix dans chaque commune ; il ne pourra connatre d'une affaire s'levant au del de cent gourdes, et lorsque les parties ne pourront se concilier son tribunal, elles se pourvoiront par-devant les tribunaux de leur ressort respectif.

    Article 47. Il y aura six tribunaux sant dans les villes ci-aprs dsignes : A Saint-Marc, au Cap, au Port-au-Prince, aux Cayes, l'Anse--Veau et au Port-de-Paix. L'Empereur dtermine leur organisation, leur nombre, leur comptence et le territoire formant le ressort de chacun. Ces tribunaux connaissent de toutes les affaires purement civiles.

    Article 48. Les dlits militaires sont soumis des conseils spciaux et des formes particulires de jugement. L'organisation de ces conseils appartient l'empereur, qui prononcera sur les demandes en cassation contre les jugements rendus par lesdits conseils spciaux.

    Article 49. Des lois particulires seront faites pour le notariat et l'gard des officiers de l'tat civil.

    Du culte.

    Article 50. La loi n'admet pas de religion dominante.

    Article 51. La libert des cultes est tolre.

    Article 52. L'tat ne pourvoit l'entretien d'aucun culte ni d'aucun ministre.

  • 33

    De l'administration.

    Article 53. Il y aura, dans chaque division militaire, une administration principale, dont l'organisation, la surveillance appartiennent essentiellement au ministre des finances.

    Dispositions gnrales.

    Article premier. A l'empereur et l'impratrice appartiennent le choix, le traitement et l'entretien des personnes qui composent leur cour.

    Article 2. Aprs le dcs de l'empereur rgnant, lorsque la rvision de la Constitution aura t juge ncessaire, le Conseil d'tat s'assemblera cet effet et sera prsid par le doyen d'ge.

    Article 3. Les crimes de haute trahison, les dlits commis par les ministres et les gnraux, seront jugs par un conseil spcial nomm et prsid par l'empereur.

    Article 4. La force arme est essentiellement obissante, nul corps arm ne peut dlibrer.

    Article 5. Nul ne pourra tre jug sans avoir t lgalement entendu.

    Article 6. La maison de tout citoyen est un asile inviolable.

    Article 7. On peut y entrer en cas d'incendie, d'inondation, de rclamation partant de l'intrieur, ou en vertu d'un ordre man de l'empereur ou de toute autre autorit lgalement constitue.

    Article 8. Celui-l mrite la mort qui la donne son semblable.

    Article 9. Tout jugement portant peine de mort ou peine afflictive, ne pourra recevoir son excution, s'il n'a t confirm par l'empereur.

    Article 10. Le vol est puni en raison des circonstances qui l'auront prcd, accompagn ou suivi.

    Article 11. Tout tranger habitant le territoire d'Hati sera, ainsi que les Hatiens, soumis aux lois correctionnelles et criminelles du pays.

  • 34

    Article 12. Toute proprit qui aura ci-devant appartenu un blanc franais est incontestablement et de droit confisque au profit de l'tat.

    Article 13. Tout Hatien qui, ayant acquis une proprit d'un blanc franais, n'aura pay qu'une partie du prix stipul par l'acte de vente, sera responsable, envers les domaines de l'tat, du reliquat de la somme due.

    Article 14. Le mariage est un acte purement civil et autoris par le gouvernement.

    Article 15. La loi autorise le divorce dans les cas qu'elle a prvus et dtermins.

    Article 16. Une loi particulire sera rendue concernant les enfants ns hors mariage.

    Article 17. Le respect pour ses chefs, la subordination et la discipline sont rigoureusement ncessaires.

    Article 18. Un code pnal sera publi et svrement observ.

    Article 19. Dans chaque division militaire, une cole publique sera tablie pour l'instruction de la jeunesse.

    Article 20. Les couleurs nationales sont noires et rouges.

    Article 21. L'agriculture, comme le premier, le plus noble et le plus utile de tous les arts, sera honore et protge.

    Article 22. Le commerce, seconde source de la prosprit des tats, ne veut et ne connat point d'entraves. Il doit tre favoris et spcialement protg.

    Article 23. Dans chaque division militaire, un tribunal de commerce sera form, dont les membres seront choisis par l'empereur, et tirs de la classe des ngociants.

    Article 24. La bonne foi, la loyaut dans les oprations commerciales seront religieusement observes.

  • 35

    Article 25. Le gouvernement assure sret et protection aux nations neutres et amies qui viendront entretenir avec cette le des rapports commerciaux, la charge par elles de se conformer aux rglements, us et coutumes de ce pays.

    Article 26. Les comptoirs, les marchandises des trangers seront sous la sauvegarde et la garantie de l'tat.

    Article 27. Il y aura des ftes nationales pour clbrer l'Indpendance, la fte de l'empereur et de son auguste pouse, celle de l'Agriculture et de la Constitution.

    Article 28. Au premier coup de canon d'alarme, les villes disparaissent et la nation est debout.

    *** Nous, mandataires soussigns, mettons sous la sauvegarde des magistrats, des pres et mres de famille, des citoyens et de l'arme, le pacte explicite et solennel des droits sacrs de l'homme et des devoirs du citoyen ;

    La recommandons nos neveux, et en faisons hommage aux amis de la libert, aux philanthropes de tous les pays, comme un gage signal de la bont divine, qui, par suite de ses dcrets immortels, nous a procur l'occasion de briser nos fers et de nous constituer en peuple libre, civilis et indpendant.

    Et avons sign, tant en notre nom priv qu'en celui de nos commettants.

    Sign : H. Christophe, Clervaux, Vernet, Gabart, Ption, Geffrard, Toussaint-Brave, Raphal, Lalondrie, Romain, Capoix, Magny, Cang, Daut, Magloire Ambroise, Yayou, Jean-Louis Franois, Grin, Moreau, Frou, Bazelais, Martial Besse.

    Prsente la signature de l'Empereur, la Constitution de l'Empire fut sanctionne par lui.

    Vu la prsente Constitution,

    Nous, Jacques Dessalines, Empereur Ier d'Hati et chef suprme de l'arme, par la grce de Dieu et la loi constitutionnelle de l'tat,

    L'acceptons dans tout son contenu, et la sanctionnons, pour recevoir, sous le plus bref dlai, sa pleine et entire excution dans toute l'tendue de notre empire ;

    Et jurons de la maintenir et de la faire observer dans son intgrit jusqu'au dernier soupir de notre vie. Au Palais imprial de Dessalines, le 20 mai 1805, an II de l'Indpendance d'Hati, et de notre rgne le premier. Sign : Dessalines. Par l'Empereur : Le Secrtaire gnral, Sign : Juste Chanlatte.

  • 36

    Hati

    Constitution du 27 dcembre 1806.

    Titre I. Dispositions gnrales. Titre II. Du territoire. Titre III. tat politique des citoyens. Titre IV. De la religion et des moeurs. Titre V. Pouvoir lgislatif. Titre VI. Promulgation des lois. Titre VII. Pouvoir excutif. Titre VIII. Pouvoir judiciaire. Titre IX. De la force arme. Titre X. De la culture et du commerce. Titre XI. Du secrtaire d'tat. Titre XII. Rvision de la Constitution. Titre XIII. De la mise en activit de la Constitution. L'indpendance d'Hati est proclame le 1er janvier 1804. Jean-Jacques Dessalines, ancien esclave, devenu chef des troupes insurges aprs la capture de Toussaint Louverture, et qui avait vaincu les troupes franaises, commandes par Rochambeau, Vertires, le 18 novembre 1803, est aussitt proclam gouverneur gnral vie, avec les pleins pouvoirs. Ds le 15 fvrier suivant, il demande le titre d'empereur, qui lui est dcern par les autres gnraux de l'arme hatienne. Une Constitution impriale est promulgue le 20 mai 1805. Le rgne de Jacques 1er sera bref : Il est assassin le 17 octobre 1806. L'Empire ne lui survit pas. Ses principaux lieutenants se disputent la succession, sur fond d'opposition entre Noirs et Multres, les premiers reprochant aux seconds de s'tre appropris les biens de leurs parents blancs. Le 21 octobre, le gnral Christophe est proclam chef du gouvernement provisoire. Il convoque aussitt une assemble constituante compose de 59 membres, mais 74 sont lus. La Constitution est approuve, le 27 dcembre, par 73 dputs, mais 24 d'entre eux adressent aussitt une protestation au gnral Christophe. La Constitution limite les pouvoirs du prsident de la Rpublique au profit du Snat. Le 28 dcembre, Christophe est lu prsident d'Hati, mais refuse de voir ses pouvoirs limits et marche avec ses troupes sur la capitale. L'Assemble charge le gnral Ption de dfendre la ville. Christophe est repouss, mais il fait approuver par son Conseil d'tat, le 17 fvrier 1807, une Constitution de l'tat d'Hati qui le dsigne comme prsident vie. Le 26 mars 1811, il sera proclam roi. La Constitution monarchique du 28 mars lui confie un pouvoir absolu et, la manire de Napolon, il s'entoure d'une noblesse laquelle il distribue titres et prbendes. Peu aprs l'indpendance, Hati est ainsi divis entre l'tat d'Hati dirig par Christophe qui gouverne le Nord et l'Artibonite ; une Rpublique limite aux dpartements du Sud et de l'Ouest, dirige par Ption, qui est lu Prsident le 9 mars 1807. Mais, celui-ci doit aussi faire face la rvolte qui a clat la Grande-Anse, le 6 janvier 1807, et ne sera rduite par le prsident Boyer qu'en 1819. Le dpartement du Sud fait mme scession le 3 novembre 1810, sous le commandement du gnral Rigaud et se constitue le 11 janvier 1811, jusqu' ce que son successeur, le gnral Borgella, en mars 1812, se rallie Ption. Ption, qui a profit des crises pour se dbarrasser du Snat, fait modifier la Constitution le 2 juin 1816, pour devenir son tour prsident vie. Mais il meurt le 29 mars 1918. Le gnral Boyer est aussitt lu et les circonstances lui permettent de runifier l'le en quelques annes : il liquide la rvolte de la Grande-Anse en juillet 1819 ; le suicide de Christophe lui permet d'tendre son autorit sur le Nord, avant de rcuprer, le 9 fvrier 1822, la partie orientale, qui s'est souleve contre les Espagnols.

    Sources : Louis-Joseph Janvier, Les Constitutions d'Hati, Paris, Marpon et Flammarion, 1886. Voir galement Thomas Madiou, Histoire d'Hati, Port-au-Prince, 1848, tome III, p. 478 et s.

  • 37

    Le peuple d'Hati proclame, en prsence de l'tre suprme, la prsente Constitution :

    Titre I. Dispositions gnrales.

    Article premier. Il ne peut exister d'esclaves sur le territoire de la Rpublique; l'esclavage y est jamais aboli.

    Article 2. La Rpublique d'Hati ne formera jamais aucune entreprise dans les vues de faire des conqutes, ni de troubler la paix et le rgime intrieur des les trangres.

    Article 3. Les droits de l'homme en socit sont : la libert, l'galit, la sret, la proprit.

    Article 4. La libert consiste pouvoir faire ce qui ne nuit pas aux droits d'autrui.

    Article 5. L'galit consiste en ce que la loi est la mme pour tous, soit qu'elle protge, soit qu'elle punisse. L'galit n'admet aucune distinction de naissance, aucune hrdit de pouvoirs.

    Article 6. La sret rsulte du concours de tous pour assurer les droits de chacun.

    Article 7. La proprit est le droit de jouir et de disposer de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie.

    Article 8. La proprit est inviolable et sacre ; toute personne, soit par elle-mme, soit par ses reprsentants, a la libre disposition de ce qui est reconnu lui appartenir. Quiconque porte atteinte ce doit se rend criminel envers la personne trouble dans sa proprit.

    Article 9. La loi est la volont gnrale exprime par la majorit ou des citoyens ou de leurs reprsentants.

    Article 10. Ce qui n'est pas dfendu par la loi ne peut tre empch ; nul ne peut tre contraint faire ce qu'elle n'ordonne pas.

    Article 11. Aucune loi, ni civile, ni criminelle, ne peut avoir d'effet rtroactif.

    Article 12. La souverainet rside essentiellement dans l'universalit des citoyens ; nul individu, nulle runion partielle de citoyens ne peut s'attribuer la souverainet.

  • 38

    Article 13. Nul ne peut, sans une dlgation lgale, exercer aucune autorit ni remplir aucune fonction publique.

    Article 14. Les fonctions publiques ne peuvent devenir la proprit de ceux qui les exercent.

    Article 15. La garantie sociale ne peut exister, si la division des pouvoirs n'est pas tablie, si leurs limites ne sont pas fixes, et si la responsabilit des fonctionnaires publics n'est pas assure.

    Article 16. Tous les devoirs de l'homme et du citoyen drivent de ces deux principes gravs par la nature dans les coeurs : Ne faites pas autrui ce que vous ne voudriez pas qu'on vous ft. Faites constamment aux autres tout le bien que vous en voudriez recevoir.

    Article 17. Les obligations de chacun envers la socit consistent la dfendre, la servir, vivre soumis aux lois et respecter ceux qui en sont les organes.

    Article 18. Nul n'est bon citoyen, s'il n'est bon fils, bon pre, bon frre, bon ami, bon poux.

    Article 19. Nul n'est homme de bien, s'il n'est franchement et religieusement observateur des lois.

    Article 20. Celui qui viole ouvertement les lois se dclare en tat de guerre avec la socit.

    Article 21. Celui qui, sans enfreindre ouvertement les lois les lude par ruse ou par adresse, blesse les intrts de tous ; il se rend indigne de leur bienveillance et de leur estime.

    Article 22. C'est sur le maintien des proprits que reposent la culture des terre, toutes les productions, tout moyen de travail et tout l'ordre social.

    Article 23. Tout citoyen doit ses services la patrie et au maintien de la libert, de l'galit et de la proprit, toutes les fois que la loi l'appelle les dfendre.

    Article 24. La maison de chaque citoyen est un asile inviolable. Pendant la nuit, nul n'a le droit d'y entrer que dans le cas d'incendie, d'inondation et de rclamation de l'intrieur de la maison. Pendant le jour, on peut y entrer pour un objet spcial, dtermin ou par une loi ou par un ordre man d'une autorit publique.

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    Article 25. Aucune visite domiciliaire ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une loi et pour la personne ou pour l'objet expressment dsign dans l'acte qui ordonne la visite.

    Article 26.

    Nul ne peut tre empch de dire, crire et publier sa pense.

    Les crits ne peuvent tre soumis aucune censure avant leur publication.

    Nul ne peut tre responsable de ce qu'il a crit ou publi que dans les cas prvus par la loi.

    Article 27. Aucun blanc, quelle que soit sa nation, ne pourra mettre le pied sur ce territoire titre de matre ou de propritaire.

    Article 28. Sont reconnus Hatiens les blancs qui font partie de l'arme, ceux qui exercent des fonctions civiles, et ceux qui sont admis dans la Rpublique la publication de la prsente constitution.

    Titre II. Du Territoire.

    Article 29. L'le d'Hati (ci-devant appele Saint-Domingue) avec les les adjacentes qui en dpendent forment le territoire de la Rpublique d'Hati.

    Article 30. Le territoire de la Rpublique est divis en quatre dpartement, savoir : Les dpartements du Sud, de l'Ouest, de l'Artibonite et du Nord. Les autres dpartement seront dsigns par le Snat, qui fixera leurs limites.

    Article 31. Les dpartements du Sud, de l'Ouest, de l'Artibonite (ci-devant Louverture) et du Nord conserveront leurs limites ainsi qu'elles sont fixes par la loi de l'Assemble Centrale de Saint Domingue, en date du 13 juillet 1801, sur la division du territoire.

    Article 32.

    Les dpartements seront diviss en arrondissements et en paroisses.

    Le Snat fixera le nombre d'arrondissements et de paroisses qu'il y aura dans chaque dpartement et dsignera leurs limites.

    Le Snat peut changer et rectifier les limites des dpartements, arrondissements et paroisses, lorsqu'il le juge convenable.

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    Titre III. tat politique des citoyens.

    Article 33. L'exercice des droits des citoyens se perd par la condamnation des peines afflictives et infamantes.

    Article 34. L'exercice des droits de citoyen est suspendu : 1 par l'interdiction judiciaire, pour cause de fureur, de dmence ou d'imbcillit ; 2 par l'tat de dbiteur failli ou d'hritier immdiat dtenteur titre gratuit de tout ou partie de la succession d'un failli ; 3 par l'tat de domestique gages ; 4 par l'tat d'accusation ; 5 par un jugement de contumace, tant que le jugement n'est pas ananti.

    Titre IV. De la religion et des moeurs.

    Article 35. La religion catholique, apostolique et romaine tant celle de tous les Hatiens, est la religion de l'tat. Elle sera spcialement protge ainsi que ses ministres.

    Article 36. La loi assigne chaque ministre de la religion l'tendue de son administration spirituelle.

    Ces ministres ne peuvent, sous aucun prtexte, former un corps dans l'tat.

    Article