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Dossier documentaire à l’usage des professeurs Spécialité économie approfondie Partie 3 : Instabilité financière et régulation 3.2 Comment expliquer les crises financières et réguler le système financier ? Document 1 : quelques extraits de : Macroéconomie financière, Michel Aglietta et Natacha Valla, La Découverte, coll. Grands Repères, 2017, 6 ème édition (entièrement refondue, mise à jour et augmentée). Document 2 : quelques extraits de : Problèmes économiques, HS n° 10, Comprendre la finance, La Documentation française, septembre 2016 Document 3 : quelques extraits de : Problèmes économiques, n° 3110, deuxième quinzaine d’avril 2015 : Quelle régulation pour le système financier ? La Documentation française. Document 4 : Comment fonctionnent les banques. Site : la finance pour tous. http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Dossiers/Banque/ La-banque-comment-ca-marche/Depots-credits-et-creation- monetaire Document 5 : extraits de Jézabel Couppey-Soubeyran, « Comment (dys)fonctionnent les banques ? », in Problèmes économiques, HS 7, Comprendre l’économie, concepts et mécanismes, La Documentation française, Février 2015. Document 6 : Extraits du glossaire établi par la Banque de France, La crise financière, Documents et débats n° 2, février 2009. Document 7 : « La notation financière a-t-elle toujours raison ? » Pierre Pénet, Sciences Humaines, HS Les essentiels, Les grands enjeux du monde contemporain, mars-avril 2017. document.docx Page 1 sur 80 Aix-Marseille, décembre 2017, L. Auffant

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Dossier documentaire à l’usage des professeurs

Spécialité économie approfondie

Partie 3 : Instabilité financière et régulation

3.2 Comment expliquer les crises financières et réguler le système financier ?

Document 1 : quelques extraits de : Macroéconomie financière, Michel Aglietta et Natacha Valla, La Découverte, coll. Grands Repères, 2017, 6ème édition (entièrement refondue, mise à jour et augmentée).

Document 2 : quelques extraits de : Problèmes économiques, HS n° 10, Comprendre la finance, La Documentation française, septembre 2016

Document 3 : quelques extraits de : Problèmes économiques, n° 3110, deuxième quinzaine d’avril 2015 : Quelle régulation pour le système financier ? La Documentation française.

Document 4 : Comment fonctionnent les banques. Site : la finance pour tous.http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Dossiers/Banque/La-banque-comment-ca-marche/Depots-credits-et-creation-monetaire

Document 5 : extraits de Jézabel Couppey-Soubeyran, « Comment (dys)fonctionnent les banques ? », in Problèmes économiques, HS 7, Comprendre l’économie, concepts et mécanismes, La Documentation française, Février 2015.

Document 6 : Extraits du glossaire établi par la Banque de France, La crise financière, Documents et débats n° 2, février 2009.

Document 7 : « La notation financière a-t-elle toujours raison ? » Pierre Pénet, Sciences Humaines, HS Les essentiels, Les grands enjeux du monde contemporain, mars-avril 2017.

Document 1 : extraits de Macroéconomie financière, Michel Aglietta et Natacha Valla, La Découverte, coll. Grands Repères, 2017, 6ème édition (entièrement refondue, mise à jour et augmentée).

Cette édition contient 10 chapitres (contre 7 pour la précédente qui datait de 2008) et tient compte de la grande crise financière et des transformations consécutives à cette crise (notamment régulation prudentielle et politique monétaire).

Sommaire du livre : http://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Macro__conomie_financi__re-9782707192509.html

Introduction / la globalisation financière en perspective

I) Finance, croissance et cycles

La stagnation séculaire dans une perspective de longue période

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Croissance et inégalités de développement au XXe siècle - Quels sont les obstacles au rattrapage et quels sont les ingrédients du succès ? - Le débat sur la stagnation séculaireLes ménages : liberté financière et accumulation patrimonialeDémographie, épargne et croissance - Incidences financières de l'accumulation patrimoniale : lame de fond et instabilité de surface - L'accumulation patrimoniale des ménages et le financement de la croissance Les entreprises : investissement, gouvernance et innovationInnovation et productivité - Le principe de la valeur actionnariale et ses conséquences sur la gestion des entreprises - Gouvernance partenariale et intérêt général - Gouvernance partenariale et actionnaires responsables - L’enjeu de l’intangible

II) Marchés financiers : rationalité et instabilité

L’efficience en questionDynamique des prix dans les marchés efficients - Efficience et valeur fondamentale - Évaluation des actions : détermination ou indétermination de la valeur fondamentale ?Une conception élargie de la rationalitéLimites de l’hypothèse d’efficience allocative (efficience forte) : monnaie et incertitude radicaleDépasser l’hypothèse de l’agent représentatif pour mieux comprendre le lien entre la finance et la macroéconomie - Monnaie et liquidité -La volatilité des cours boursiers et l'interdépendance des marchés - La liquidité des marchés - Diversité des opérateurs - Contagion et instabilité des marchésInvestisseurs institutionnels, investisseurs de long termeInvestisseurs à long terme et marchés financiers - Les stratégies des investisseurs à long terme -Allocation stratégique, allocation tactique et délégation de gestion - La gestion actif-passif pour redonner le sens du long terme aux investisseurs institutionnels

III) Banques et systèmes de paiement

Banque, monnaie et macroéconomieBanques et paiements : la logique de la monnaieDettes et monnayage bancaire - Le système de paiement et la réalisation de la valeur : règlement des soldes et finalité des paiementsLes banques, la gestion du risque et le financement de l’économieLa banque commerciale dans la macroéconomieLes banques et l'évaluation du risque créditLes banques au défi de l'essor des crypto-monnaiesDes moyens de paiement électroniques au bitcoin - Le bitcoin : ordre spontané ?

IV) Les intermédiaires financiers à l’épreuve de la libéralisation financière : le retour timide de la réglementation financière

Évolution du rôle et du business model des banques dans les économies avancées

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La déréglementation bancaire - Mutations des bilans bancaires - Mutation des performances - Produits titrisés et couverture contre le risque : du portage au transfert du risque par les banques - Les atouts et les risques de la titrisationLa finance parallèle : caractéristiques, risques et enjeuxLa (ré)émergence de nouveaux acteurs financiers - Définition et fonctions de la finance parallèle : complément ou substitut au système bancaire ? - Une taille globale encore difficile à évaluer - Retour sur le lien entre les banques et le shadow bankingConclusion : un enjeu de stabilité financière

V) Le retour des cycles financiers

Expansion des dettes et cycles financiersDettes publiques et crédit bancaire sur longue période - Les leçons de l’histoire : Grande Déflation de l’âge classique (1873-1896) et Grande Dépression de l’entre-deux-guerres (1929-1938) - Les cycles financiers depuis les années 1980Expliquer les liens du cycle financier et de l’économieLe désendettement contrarié détériore la rentabilité marginale du capital - Baisse du rendement du capital et affaiblissement de la croissance potentielleConclusion

VI) Les grandes phases de l’intégration financière internationale

Les enseignements de Braudel et les temps du capitalisme préclassique (XIIIe-XVIIIe siècle)La représentation du capitalisme préindustriel comme économie monde - Interaction des souverains et de la finance : le dualisme monétaire - Interaction des souverains et de la finance : la lettre de change - La crise structurelle du système dualiste et les transformations du capitalisme jusqu’à l’établissement de la convertibilité or - De l’économie monde à l’économie mondialeCroissance, investissements et mouvements internationaux de capitaux dans la première globalisationL’articulation de l’accumulation du capital au Royaume-Uni et de l’investissement à l’étranger - Intégration financière internationale et stabilité des taux d’intérêt longs sous l’étalon orLes dysfonctionnements de la seconde globalisationPolarisation des positions financières jusqu’à la crise financière

VII) Les crises de la globalisation financière

L’hypothèse d’instabilité financière : de l’euphorie du levier à la déflation de bilanLes dangers de la déflation de bilanCrises monétaires, crises financières, crises de confianceLes formes de confiance et leurs crises - Formes de la confiance et rivalités entre créanciers et débiteursLes crises financières dans les pays développésLes crises sur les marchés d'actions - Les crises sur les marchés de dettes - Le rôle critique des banques dans l'instabilité financière - La fragilité des banques dans la transition à la finance de marchés - Crises bancaires au Japon et en France - La grande crise financière américaine du crédit titrisé - Le désendettement en

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pratique - De la crise du crédit à la crise de liquidité : l'enchaînement de la crise systémique et les spécificités monétaires du shadow bankingLes crises financières dans les pays émergentsDe la crise de la dette à l'ajustement structurel : l'origine de la libéralisation financière dans les pays émergents - La crise mexicaine de 1994-1995 - La crise asiatique de 1997 - La crise russe et l'ébranlement financier au cœur (août-octobre 1998) - La crise argentine (octobre-décembre 2002) - Les pays émergents : de la position de débiteurs à celle de créanciers

VIII) Le risque de système et les moyens de le prévenir

Risque de système et crises financièresLa définition du risque de système - Les sources du risque de système La gestion de crise : les multiples visages du prêteur en dernier ressortL'art du prêteur en dernier ressort selon Bagehot - La place du prêteur en dernier ressort dans la finance contemporaineL’élargissement de l’envergure du prêteur en dernier ressort et le sauvetage du système financier américainLa prise en charge progressive du marché monétaire par la Réserve fédérale et la coopération internationale des banques centrales - Le sauvetage des banques et autres institutions financières aux États-UnisLes gestions de la double crise financière en EuropeL’aveuglement initial des pays de la zone euro et la lucidité britannique - La seconde crise européenne et les initiatives de la BCE sous le feu de l’adversitéLa régulation prudentielle dans la prévention du risque systémiqueLa régulation prudentielle des banques - La régulation des marchés - La régulation et le shadow banking

IX) L'évolution de la politique monétaire

L’importance négligée des systèmes de paiementPanorama des régimes d’ancrage et des doctrines de politique monétaireL’ancrage de la convertibilité externe : l’étalon or - La régulation monétaire nationale de la monnaie fiduciaireMonnaie exogène : le régime de la règle quantitative ou monétarismeFondements théoriques de la politique monétariste - L’ancrage monétaire : une quête du Graal par la Bundesbank - La quantité de monnaie : cible opératoire de la Bundesbank -La politique monétaire aux prises avec l’instabilité financièreMonnaie endogène : approche wicksellienne et ciblage de l’inflationLe ciblage de l’inflation et la méthode Greenspan - La méthode Greenspan : règle de Taylor et risk managementLa politique monétaire face à la fragilité financière post-crise : politique macro prudentielleUne politique monétaire élargie - Nouveaux enjeux de la politique monétaire dans l’après-crise - De l’orthodoxie monétaire à la généralisation des politiques monétaires non conventionnelles - Barrière à taux zéro et guidage des anticipations en temps de crise - Repousser la barrière à taux zéro par le passage en territoire négatif - Développer la politique de bilan - Politique monétaire, politique budgétaire et soutenabilité de la dette publiqueSortir des politiques monétaires non conventionnelles ?

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Quid de l’après ? De l’impossibilité d’un retour à la « normale »- Implications de la liquidité excédentaire pour le système financier - Quelle nouvelle normalité de politique monétaire serait compatible avec l’hypothèse de cycle financier ?Conclusion : l’indépendance des banques centrales dans la politique économique

X) Le système monétaire international

Les conditions d’un système monétaire international efficaceL’incomplétude de la monnaie internationale : la devise clé - Conditions d’efficacité du SMI - Le théorème d’impossibilité de Mundell et les formes possibles du SMILe capitalisme à l’âge classique : l’étalon orLa stabilisation à long terme des balances des paiements - L’agonie de l’étalon or internationalLe système de Bretton WoodsL’expansion monétaire mondiale et le dilemme Triffin - L’effondrement du système de Bretton Woods - De la création des DTS aux accords de la Jamaïque : l’impuissance de la tentative de réforme du SMI Le semi-étalon dollar dans la seconde globalisation financière : la lente dégénérescence de la devise cléCycles du dollar et vulnérabilités financières - Pourquoi le dollar est-il resté la monnaie dominante depuis la crise financière ? - Dettes élevées, taux bas et tensions sur les changes des marchés émergents : interrogations sur le système dollar - Les dysfonctionnements du système dollar se sont fortement intensifiésVers une mutation du système monétaire internationalQu’est-ce qu’un régime monétaire international de coopération institutionnalisée ? - Une politique macroprudentielle globale - Un SMI à ajustements plus symétriques - Le cadre institutionnel du système - Réformer la gouvernance du FMI

Conclusion / Mutation du régime de croissance : redéfinir le rôle de la puissance publiqueRepères bibliographiques.

Page 81 : tableau 7 : Investisseurs de long terme et investisseurs institutionnels

Fonds perpétuels :-fonds souverains-fonds de réserve-fonds de dotation

Fonds de pensionCompagnies d’assurance vie

Fonds communs de placement (mutual funds)

Investisseurs de long terme

Investisseurs institutionnels

Page 98Les banques sont des hybrides. D’un côté, elles forment un réseau collectif dans la

gestion du système de paiement qui est un bien public. De l’autre, ce sont des agents privés sur des marchés en concurrence.

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Pages 106-107 : Les banques, la gestion du risque et le financement de l’économieLes banques sont des hybrides. Comme on vient de le voir, à leur passif, elles créent

de la monnaie en contrepartie de crédits qu’elles fournissent. Elles sont donc partie intégrante du système de paiement, comme on l’a montré dans la première section. Comme telles, elles font collectivement partie d’un bien public qui est ladite contrainte de paiement. Parce que le système de paiement est hiérarchisé sous l’égide de la forme ultime de liquidité d’acceptation unanime qui est émise par la banque centrale, les banques bénéficient d’un accès privilégié à la banque centrale. Cet accès donne aux banques une franchise qui les distingue des autres intermédiaires financiers. Les modalités de garantie dont les banques bénéficient sont routinières dans la sécurité quotidienne fournie par la banque centrale aux systèmes de règlement interbancaire. Elles sont contingentes aux accidents financiers dans les interventions du prêteur en dernier ressort exercées par la banque centrale. Cette franchise procure une sécurité des dépôts qui bénéficie à toute la société. En contrepartie de cette franchise, les banques subissent une réglementation spécifique. Cette réglementation consiste en des réserves obligatoires, le plus souvent définies et gérées par la banque centrale, un niveau de capital minimum, d’autres dispositifs prudentiels que l’on étudiera au chapitre VIII. […]

À leur actif, les banques sont des entités qui doivent engendrer une rentabilité à travers les crédits qu’elles accordent, les conseils qu’elles procurent aux entreprises non financières, les titres financiers qu’elles achètent et vendent, les opérations complexes de fusions-acquisitions qu’elles réalisent pour le compte des entreprises, les transformations de crédits en titres financiers (titrisation) et, plus généralement les arbitrages de teneurs de marchés à l’aide des produits dérivés. Toutes ces activités de ce qu’on appelle la banque d’investissement et de financement, ou encore la banque d’affaires, seront étudiées au chapitre IV. […]

Page 107 : La banque commerciale dans la macroéconomieDans cette section, nous allons nous intéresser à l’activité bancaire en relation avec

l’activité standard de banque commerciale qui fait du crédit à des entreprises et des ménages. Cette activité implique de recueillir et fournir de l’information, d’évaluer les risques, de sélectionner les emprunteurs potentiels et de faire le suivi des prêts accordés. Cette activité de prêts n’est pas indépendante de la gestion du système de paiement, non seulement d’un point de vue fonctionnel parce que les dépôts sont créés en contrepartie des crédits, mais aussi parce que la tenue des comptes des clients donne aux banques une information privilégiée sur la situation de trésorerie des emprunteurs.

Pages 119-120 : La déréglementation bancaireLes banques ont depuis longtemps une place centrale et un rôle unique dans le système

de financement des économies avancées parce qu’elles gèrent collectivement le système de paiement sous l’autorité de la banque centrale. Leur métier est la création de monnaie dans l’acte de crédit pour la production courante et l’investissement, monnaie qui va se retrouver dans l’épargne des agents économiques dans le pays d’origine du crédit ou à l’étranger. Dans leur métier d’offreur de crédit, les banques avaient une connaissance directe des candidats à l’emprunt dont elles étaient les évaluateurs. Avec plus ou moins de succès, elles se sont affirmées comme des institutions expertes de gestion du risque de crédit, grâce notamment à la réduction de l’asymétrie d’information par le screening des emprunteurs et par l’expertise de leur gestion de bilan, caractérisé par un passif liquide de court terme (dépôts bancaires) et des actifs illiquides et à plus long terme (crédits).

Les systèmes bancaires dans nos économies avancées ont cependant connu de profondes transformations avec les réformes de la libéralisation financière à partir des années 1980. Les réformes se sont orientées autour de trois axes majeurs. Tout d’abord, la

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déréglementation, comprenant pour les banques l’allègement des règles de fixation du prix des services bancaires ainsi que des taux d’intérêt et à plus grande échelle, la suppression d’un nombre important de régulations des marchés financiers afin de garantir une plus grande fluidité des capitaux. Ensuite, la désintermédiation permet à certaines entreprises, généralement de grande taille, de se financer directement sur les marchés financiers sans recourir aux banques grâce à l’émission de titres. Les épargnants, par l’intermédiaire de fonds d’investissement, peuvent également directement investir sur les marchés financiers et bénéficier de rendements plus importants que ceux de leurs dépôts bancaires. Enfin, de nombreuses barrières entre les différents métiers de la banque ont été supprimées. C’est ainsi que le Congrès des États-Unis a abrogé en 1999 le Glass Steagall Act, qui avait été instauré à la suite de la crise de 1929 et qui cloisonnait de façon stricte les activités de banque de dépôt et celles de banque d’investissement.

Les innovations financières ont placé les banques dans une situation inconfortable. Leur métier traditionnel d’intermédiaire, faire des crédits et collecter des dépôts, a été attaqué par les deux bouts. Des financements de marché moins coûteux leur ont fait perdre de bons clients parmi les grandes entreprises. Des instruments de placement plus rentables ont détourné l’épargne des ménages qui a partiellement délaissé les dépôts. Pour résister à cette pression concurrentielle, les banques ont dû comprimer leurs marges et redéployer leur activité dans les nouveaux domaines ouverts par l’innovation financière. Mais elles n’ont pas toujours connu le succès parce qu’elles n’ont pas su évaluer les risques considérables et nouveaux, qui sont étrangers à leur métier traditionnel.

Page 136 : Les atouts et les risques de la titrisationLa titrisation a beaucoup été décriée. Il s’agit pourtant d’une innovation qui a ajouté

des compartiments supplémentaires aux marchés d’actifs financiers. C’est donc moins la titrisation en tant que telle qui fait problème que l’utilisation qui en a été faite lorsqu’elle a été dévoyée.

La titrisation permet la transformation d’un portefeuille d’actifs illiquides en des titres liquides échangeables sur un marché. Elle induit un transfert de risques de la banque « vendeuse » sur le bilan des investisseurs en produits titrisés, ce qui implique que, si le portefeuille se révèle de mauvaise qualité, ce sont les investisseurs qui subiront, le cas échéant, une bonne partie des pertes.

Page 137 : tableau 14 : Deux modèles de créditInitier les crédits et porter le risqueLend and hold

Initier et vendre les crédits (ou garder les crédits, mais vendre le risque)Originate and distribute

- Le profit du prêteur est fonction croissante du risque pris.

- Incitation à évaluer la solvabilité de l’emprunteur.

- Asymétrie d’information réduite par la proximité de l’emprunteur et du prêteur qui fait le monitoring pendant la vie du prêt.

- Offre de crédit par des banques munies d’une capacité à évaluer des crédits.

- Contrôle prudentiel : provision en capital en face du crédit.

- Le profit du prêteur est fonction croissante du volume des crédits vendus.

- Incitation à anticiper la valeur du collatéral quelle que soit la solvabilité de l’emprunteur.

- Asymétrie d’information accrue par la faible incitation à considérer le profil de risque du débiteur

- Offre de crédit par les banques et une variété d’officines non bancaires

- Aucun contrôle prudentiel, aucune provision en capital.

Aléa moral contenu Aléa moral maximisé

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Page 141 : La finance parallèle : caractéristiques, risques et enjeuxPages 141-142 La (ré)émergence de nouveaux acteurs financiers

Nous avons jusqu’ici évoqué le panorama complexe de l’intermédiation bancaire. Il s’agit à présent d’insérer l’évolution du modèle bancaire dans le paysage plus large des intermédiaires financiers au sens large, univers qui inclut les « non-banques », ou « finance parallèle », ou, pour certains, le shadow banking.

[…] la déréglementation bancaire des années 1980, qui avait favorisé l’essor de l’industrie bancaire, est aujourd’hui remise en question. Les modes de financement de l’économie réelle évoluent. La distribution du crédit s’ouvre à de nouveaux acteurs : les assureurs, le plus souvent via des fonds de prêts à l’économie ; les fonds de pension, riches en liquidités ; les fonds souverains, les banques de développement et autres institutions financières publiques, les particuliers par le biais du financement participatif (crowdfunding), voire les entreprises non financières. Les financements auxquels ils contribuent et qui engagent du capital à long terme doivent être strictement distingués du shadow banking au sens strict (fonds monétaires, hedge funds, gestionnaire d’actifs et fonds d’investissement), qui est formé d’acteurs permettant aux banques d’accroître leur levier d’endettement, sans créer de monnaie en apparence, par les opérations du marché de gros de la liquidité : swaps tripartites, repos et repos inverses, prêts sur titres.

Les investisseurs institutionnels proposent des débouchés plus directs à l’épargne et permettent de trouver des emplois plus immédiatement productifs, aux rémunérations plus adaptées que celles des dépôts bancaires standard. En effet, les investisseurs institutionnels, par leurs allocations de portefeuille, sont censés répondre à la diversité des besoins de financement et des goûts pour le risque existant dans l’économie. Elle permet en théorie une meilleure allocation du risque existant et rend le système financier plus résilient par adéquation des durations entre actifs et passifs. Contrairement à l’industrie bancaire, contrôlée depuis longtemps par une régulation spécifique dont l’objet principal est de juguler le risque systémique et de limiter les risques de défaut (notamment par des charges obligatoires en capital), le monde financier non bancaire est moins régulé, et ses risques et ses enjeux macroéconomiques sont moins connus. Pourtant, les chaînes d’intermédiation du shadow banking sont imbriquées au levier d’endettement bancaire. Ses interconnexions en font des acteurs qui ne peuvent pas être exclus du risque systémique.

Page 143 : Définition et fonctions de la finance parallèle : complément ou substitut au système financier ?[…] Nous résumerons de façon imparfaite la finance parallèle comme un système d’intermédiation de crédit englobant des entités et des activités qui ne font pas partie du secteur bancaire conventionnel. […]

La définition du shadow banking par le Conseil de stabilité financière (CSF) est utile car complémentaire de la précédente : « Un système d’intermédiation de crédit auquel concourent des entités et des activités extérieures au système bancaire régulé. »

Page 149 : Une taille globale encore difficile à évaluerHors banque et hors shadow banking se trouve la finance des investisseurs

institutionnels. Ce sont des investisseurs de long terme qui ont été étudiés au chapitre II. Le CSF distingue correctement les banques, le shadow banking et les autres institutions financières. Cependant, les activités du shadow banking pris dans son ensemble sont encore difficilement quantifiables.

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Page 219 : Les crises financières dans les pays développésOn étudiera successivement les crises sur les marchés boursiers, les crises sur les

marchés de titres représentatifs de dettes, les crises bancaires. On insistera sur le rôle crucial des banques dans la propagation de tous les types de crises, même si elles ne sont pas à l’origine des perturbations.Page 219 à 221 : Les crises sur les marchés d’actions Page 221 à 223 : Les crises sur les marchés de dettesPage 223 -224 : Le rôle critique des banques dans l’instabilité financière

Les paniques bancaires peuvent provenir essentiellement de trois sources : la demande contagieuse de conversion des dépôts en espèces, les défauts de règlement dans les paiements interbancaires, la détérioration de la qualité des créances bancaires par défaillance de leurs débiteurs. L’incertitude macroéconomique joue un rôle aussi important que dans les crises de liquidité des marchés lorsqu’elle agit sur des structures de bilan déjà fragiles. La valeur nette des banques devient alors dépendante de variables qu’elles ne contrôlent pas (taux d’intérêt du marché monétaire, prix des actifs), en sorte que les créanciers des banques deviennent incapables de distinguer les banques saines des banques virtuellement insolvables. […]

Page 252 : La définition du risque de systèmeS’il concerne un grand nombre, voire l’ensemble des agents économiques, le risque de

système n’est pas une juxtaposition de risques individuels et indépendants. C’est une relation particulière entre des comportements microéconomiques et des états macroéconomiques qui résultent de l’interaction de ces comportements. Aussi définirons-nous le risque de système comme suit : c’est l’éventualité qu’apparaissent des états économiques dans lesquelles les réponses rationnelles des agents individuels aux risques qu’ils perçoivent, loin de conduire à une meilleure répartition des risques par diversification, amènent à élever l’insécurité générale. […]

Les états macroéconomiques dans lesquels se trouve le risque de système est présent peuvent être déclarés anormaux pour trois raisons :- par les graves dysfonctionnements dans l’allocation des ressources qui rendent ces états

économiques très inefficients ;- par les logiques économiques qui y conduisent Ces états sont les résultats involontaires de

comportements individuels de gestion des risques, compte tenu des informations qui sont fournies par les marchés. De manière générale, le risque de système ne provient pas de l’irrationalité des agents mais des défauts de coordination des marchés ;

- par la perpétuation des situations anormales. Bien que tous subissent des pertes de bien-être, les défauts de coordination empêchent les agents individuels de reconnaître l’effet de leurs actions sur les autres. Il s’ensuit qu’ils n’ont pas intérêt à adopter les comportements qui permettraient, s’ils étaient le fait de tous, de revenir dans le domaine des équilibres normaux.

Page 275 : La régulation prudentielle dans la prévention du risque systémiqueDepuis 2009, des réformes de grande ampleur ont été faites en réponse à la sévérité de

la crise. Les réformes concernent la réglementation bancaire (Bâle III) et assurantielle (Solvabilité II), mais aussi la réglementation comptable (IFRS). Le shadow banking fait l’objet d’une cartographie de plus en plus détaillée par le CSF, l’agence internationale de régulation financière sise à Bâle.Les marchés financiers peuvent produire des innovations efficaces et utiles. Car les innovations permettent de dissocier les risques en facteurs élémentaires. Ceux-ci peuvent être formalisés dans des contrats dérivés et donc quantifiés. Ils peuvent être répartis si les processus de transfert sont convenablement réglementés et supervisés. Mais les innovations

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entraînent des interactions nouvelles entre les intermédiaires bancaires et non bancaires qui sont porteuses de nouvelles sources de risque systémique. […]Page 276 à 280 : La régulation prudentielle des banques

La globalisation financière requiert des normes prudentielles à caractère universel. La première régulation de ce type a été la régulation dite Bâle I, résultant d’un accord international en 1988. Cette régulation fut fondée sur un ratio de fonds propres rapporté à la valeur des actifs au bilan pondérée des risques. Initiée par un accord anglo-américain, cette réglementation s’étendit aux pays du G10. Le ratio fut ensuite progressivement adopté par plus de cent pays. Conçu pour les banques ayant une activité internationale, ce ratio fut adopté par l’Union européenne pour toutes les banques. Il s’est imposé comme un outil central de la réglementation bancaire.

Le ratio Bâle I imposait aux banques qui y étaient soumises de détenir des fonds propres représentant au minimum 8 % de la valeur pondérée de leurs actifs. […]

Ce ratio a dû être réévalué avec le développement de l’activité des banques sur les marchés. […] C’est pourquoi le comité des gouverneurs des banques centrales (comité de Bâle) a décidé de réformer l’accord Bâle I pour parvenir à Bâle II en 2004. Les accords de Bâle II comprennent trois piliers relatifs aux ratios de solvabilité, à la supervision et à la discipline de marché. […]La prise en charge de la stabilité financière implique une approche globale des risques qui intègre les volets micro- et macroprudentiels. C’est l’enjeu des accords de Bâle III conclus en décembre 2012 et devant entrer en application progressivement de 2013 à 2018.

Bâle III introduit trois axes de réforme : la modification de la définition et de la décomposition des fonds propres exigés ; l’ajout de nouveaux critères et de nouveaux paramètres dans l’évaluation du risque ; l’annonce de la mise en place de nouvelles normes de contrôle prudentiel, en sus du ratio de solvabilité. […]

La régulation financière est un processus sans fin. De nouvelles réformes sont en débat. Certains parlent de compléter Bâle III, d’autres d’une évolution vers Bâle IV. C’est la pondération des risques qui est en jeu. Jusqu’ici elle obéit toujours aux principes de Bâle II. […]

Page 280 à 283 : La régulation des marchés[…]Un principe de base universel pour les règles prudentielles est de faire en sorte que l’information transmise à ceux qui prennent effectivement les risques leur permette d’en faire une évaluation autonome et contradictoire. […]

Avec la crise, le modèle « initier le crédit et vendre le risque » a montré ses faiblesses. À l’origine, il n’incite pas à investir dans la connaissance des emprunteurs. […] la notation des agences fut longtemps considérée comme une source suffisante d’information au moment de la structuration des titres.

La remise en ordre de la titrisation des crédits semble incontournable pour faire en sorte qu’elle ne déresponsabilise plus les acteurs des marchés du crédit. Pour cela, les investisseurs finaux qui portent les risques peuvent utilement complémenter par leur expertise les agences de notation. Une évaluation contradictoire et autonome des investisseurs peut lui donner sens. Les notes des agences resteront insuffisantes si les investisseurs n’ont pas les moyens d’exercer une contre-expertise. La discipline de marché est fortement liée à la qualité de l’information dont disposent les investisseurs finaux qui portent les risques. […] Il s’agit de promouvoir une titrisation standardisée et traitée sur des marchés organisés.

Page 283 à 286 : La régulation et le shadow banking

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Document 2 : extraits de : Problèmes économiques, HS n° 10, Comprendre la finance, La Documentation française, septembre 2016.

Sommaire de ce numéro :La finance au service de l'économie ?Un siècle de finance : de la première mondialisation à la globalisation des marchésComprendre les marchés financiers en 2016Investisseurs, assureurs et banques face à la politique des taux d’intérêt zéroFinance d’entreprise et finances de marché : un influence par ricochetGlossaire : les mots de la finance -1-Les principales places financièresUn secteur controversé Inégalités et finance : quelles relations de causalité ?Les banques centrales à la peineLa finance chinoise : quelle ampleur, quels risques ?Shadow banking, trading haute fréquence : l’innovationLes liens finance-États : entre nécessité et abusÉtudier à Paris, travailler à Londres : fuite des cerveaux et allocation des talentsGlossaire : les mots de la finance -2-La finance de demainFinTech : l’innovation financière au service de qui ?Comment réguler demain la banque-finance ?L’avenir de la monnaieQue devient la globalisation financière ? Avons-nous besoin d’un Bretton Woods 2.0 ?Glossaire : les mots de la finance- 3-De la finance aux FinTech

Page 31 : zoom le private equity ou l’arbitrage hors des marchésLe private equity ou capital-investissement est une activité financière dans laquelle opèrent des fonds spécialisés tels Apollo, KKR ou BlackRock aux États-Unis ou Ardian (ex-Axa Private Equity) en France. Ces fonds collectent des liquidités auprès d’investisseurs institutionnels (fonds de pension, sociétés d’assurance, fonds souverains, dotations des universités…) ou de riches particuliers (family office) et les investissent comme capitaux propres dans des sociétés non cotées. Cette activité pèse aujourd’hui près de 3 000 milliards de dollars dans le monde avec une collecte qui a dépassé les 500 milliards de dollars en 2015.Le private equity consiste à se passer des marchés pour créer davantage de valeurs pour les actionnaires. Cela est rendu possible par une ingénierie financière sophistiquée, qui recourt à la dette pour jouer sur le levier et discipliner les dirigeants. Finalement, par ces opérations de LBO (leveraged buy-out, rachat par effet de levier) ces fonds semblent pratiquer l’arbitrage qui manque quelquefois au couple marchés-entreprises. En ajoutant de la dette via des structures ad hoc, elles exploitant d’une certaine manière l’« anomalie du risque » en permettant aux investisseurs de profiter de la sous-valorisation des entreprises peu risquées à faible « bêta ». On observe ainsi que le private equity sait parfaitement exploiter les cycles de moyen terme des marchés financiers. Les fonds « chassent » les cibles dans la configuration inhabituelle de cours boursiers et de taux d’intérêt simultanément bas, et les revendent dans la situation inverse.

Page 57 à page 63 : article écrit par Dominique Namur : « Shadow banking, trading haute fréquence : l’innovation financière hors de contrôle ? » Quelques extraits :

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La crise des subprimes de 2007, avec l’absorption de Bear Stearns, la faillite de Lehman Brothers et les déboires d’AIG, ou l’effondrement pendant moins d’une heure de trois indices majeurs aux États-Unis (flash crashes des 6 mai 2010, 15 octobre 2014 et 24 août 2015) ont questionné l’utilité sociale des activités financières. Parmi elles, le shadow banking et le trading haute fréquence ont rapidement été désignés comme l’un des épicentres des tourments de l’économie mondiale. Un examen approfondi nuance cette lecture : si ces activités ont connu un développement fulgurant, leurs racines sont anciennes et sans lien avec une spéculation prédatrice. La focalisation sur leurs limites conduit à minorer à l’excès les apports, comme les avancées faites pour en améliorer le fonctionnement. Une appréciation objective demande plus de recul.

Le shadow banking et le trading haute fréquence s’inscrivent dans une longue évolution des marchés financiers, en réponse à des besoins exprimés par des agents économiques et sous l’impulsion du progrès des technologies de traitement et de diffusion de l’information. Des produits symboliques, comme les dérivés, doivent leur succès initial aux demandes de couverture des risques de change et de taux d’intérêt consécutifs à une décennie de chocs macroéconomiques (fin des changes fixes en 1971, chocs pétroliers de 1973 et 1980, retournement de politique monétaire aux États-Unis en 1979). Pour abolir des monopoles professionnels et financer les déséquilibres croissants des balances de paiements, les États ont facilité le développement et l’émergence de nouveaux intermédiaires financiers, notamment par la libéralisation des années 1980.

Soumises à ne nouvelle concurrence, les places boursières ont affiné leurs systèmes de cotations (décimalisation), développé la cotation électronique en temps réel, favorisé l’interconnexion des places financières mondiales jusqu’à l’apparition de plates-formes totalement automatisées. Les banques traditionnelles, doublement contraintes par un actionnariat exigeant une rentabilité élevée et par l’avancée des normes prudentielles du Comité de Bâle (notamment la limitation de leur exposition au risque de défaut et les exigences en fonds propres), se sont partiellement désengagées de la transformation de dépôts à court terme en prêts de long terme à l’économie pour développer des activités moins consommatrices de fonds propres et plus rentables.

Le shadow banking, concurrence sans borne du financementSimultanément à la réorientation du métier bancaire, un ensemble d’acteurs financiers désignés sous le terme générique de shadow banking (SB), système financier « de l’ombre » ou parallèle, a développé ses activités en une quinzaine d’années. En 2011, le Financial Stability Board (FSB, ou Conseil de la stabilité financière) , repais par la Commission européenne en 2012, a défini le SB comme « un système d’intermédiation de crédit impliquant des entités et des activités extérieures au système bancaire régulé ». Comme le secteur bancaire traditionnel, le SB assure la collecte de fonds, ainsi que la transformation de crédits, de maturité et de liquidité. Inversement, le SB n’est pas soumis aux règlements prudentiels des acteurs bancaires nationaux ou du Comité de Bâle, et ne bénéficie ni du refinancement par les banques centrales ni de la garantie publique sur les dépôts.

Les shadow banks se financent auprès des fonds monétaires, par émission de titres de court terme sur le marché, par le prêt ou la vente de titres au comptant couplée à un rachat à terme (repos ou mise en pension) ce qui augmente le rapport de la dette aux fonds propres (effet de levier). Elles exercent des opérations de titrisation (émission de titres négociables adossés à des actifs sous-jacents, ou à des regroupements de crédits, tels que les asset-backed commercial papers, ou les collaterized debt obligations), le prêt de titres et les opérations de

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Dépôts de court terme des ménages

Intermédiation bancaire traditionnelle

Crédits de long terme à l’économie

Organismes de placements collectifs

Groupes bancaires traditionnels

Fonds de placement monétaires Shadow

banks

Titres négociables et

produits structurés

adossés aux collatéraux

Crédits de long terme à

l’économie

pension, le transfert de risque de crédit et l’émission de produits dérivés ou hybrides. Fréquemment, le SB décompose l’intermédiation de crédit entre prêteurs et emprunteurs en une succession d’opérations discontinues. En pratique, l’imbrication des entités et des produits brouille la séparation entre banques traditionnelles et shadow banks. Ainsi, les groupes bancaires qui avaient titrisé une partie de leurs créances risquées ont participé à l’émergence du SB par la création de filiales, propres ou communes, dédiées à la gestion de produits titrisés, des délégations de gestion ou encore l’achat des parts les plus risquées de produits structurés.

Financement bancaire traditionnel versus financement bancaire par shadow banking

Acteurs, ampleur et atouts du SB[…] Au sens étroit, le FSB restreint le SB aux activités d’intermédiation de crédits non bancaires d’où peuvent émerger des risques systémiques et d’arbitrage réglementaire. […]Des risques avérés du SB à son encadrement[…] Comment réglementer le SB ? La première approche limite les interconnexions entre SB et secteur bancaire traditionnel. Le Dodd-Frank Act promulgué aux États-Unis en 2010 interdit aux banques les activités de négociation pour compte propre (sauf pour couvrir des transactions pour le compte de leurs clients ou les opérations en tant que teneurs de marché), plafonne leurs investissements dans les hedge funds et les private equity funds à 3% du capital de ces fonds et à 3 % du capital Tier One (fonds propres permanents, subordonnés aux seuls droits des déposants et autres créanciers) des banques, impose la filialisation des activités sur dérivé de gré à gré (négociés sur des marchés non réglementés par une autorité de contrôle) et la conservation d’une partie des risques liés aux crédits immobiliers. Plus nuancé, le rapport Vickers publié en 2011 au Royaume-Uni préconise le cantonnement (ring-fencing) des activités de banques de détail, sans proscrire le modèle de banque universelle. La seconde approche considère au contraire que l’encadrement excessif des activités bancaires et des contraintes en capital stimulent le transfert d’activités risquées vers le SB (risque d’arbitrage réglementaire). Elle préconise d’étendre le périmètre de la supervision financière, en consolidant les shadow banks dans les groupes bancaires dans lesquels existent des relations économiques ou de contrôle. Un volet additionnel serait de coupler une réglementation par produits et opérations à la limitation de certaines activités.

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Le trading à haute fréquence, levier majeur de la liquiditéPlus récent, le trading à haute fréquence (high frequency trading ou HFT) est une forme de trading automatisé où la détection, la transmission et l’exécution d’une décision sont déclenchées par des algorithmes informatiques (trading algorithmique). Le HFT se singularise par des opportunités d’investissement très brèves, provenant de décalages ponctuels des prix (opportunités d’arbitrage), et qui engendrent de faibles profits unitaires. Fortement dépendantes des conditions de marché et des réactions de la concurrence, les stratégies sont révisées ou annulées en continu, avec de nombreux ordres qui peuvent avoir une durée de vie de l’ordre de la microseconde. Le succès du HFT repose sur la rapidité d’accès aux données issues des différentes places de cotations, de leur traitement, d’exécution des stratégies, et sur la multiplication des opérations. Les intervenants du HFT investissent donc massivement dans la qualité des infrastructures informatiques et des connexions à haute vitesse (fibre optique), installent leurs systèmes de trading à proximité des serveurs des bourses (services de colocalisation et de proximité), et privilégient les stratégies sur les actifs les plus liquides (blue chips).

Acteurs et ampleur du HFTAu sens strict, les intervenants du HFT interviennent pour leur compte propre, et non pour le compte d’un tiers. Il s’agit de grandes banques et fonds d’investissement, largement dotés en capitaux et infrastructures, et présents sur un large éventail de produits, de fonds spécialisés (souvent des hedge funds) sur le HFT, ou enfin d’acteurs qui interviennent plus ponctuellement pour étoffer leurs gammes de services. […]Conséquences du HFT sur le fonctionnement et l’organisation des marchés financiers[…]Une réglementation en cours d’ébaucheLe HFT est fréquemment soupçonné d’engendrer des manipulations ou des aberrations de prix de marché, provoquées par des traders peu scrupuleux ou des ordinateurs peu contrôlables, voire de déclencher à dessein d’amples et brutales fluctuations de marché au seul profit des intervenants. Indéniablement, certaines stratégies de trading augmentent la sélection adverse et/ou nuisent à la liquidité. Il en est ainsi des tentatives de « déclencher une tendance » pour solder avec profit une position préexistante, éventuellement en affichant des ordres rapidement annulés avant leur exécution (spoofing), ou des stratégies directionnelles qui consistent à prendre une position sur un titre conformément à l’évolution anticipée de son cours, ou encore de la multiplication délibérée des ordres de façon à saturer les plates-formes de négociation et à ralentir les autres traders (quote stuffing). Par ailleurs, la compétition effrénée en termes de vitesse peut inciter à court-circuiter des contrôles automatisés dans les algorithmes de trading et conduire à un risque opérationnel. Enfin, si des erreurs de conception d’algorithme ou des défaillances dans l’acheminement des données aux plates-formes de trading se sont révélées, elles aussi ont pénalisé les intervenants du HFT, ce qui correspond plus à des malfaçons qu’à une intention délibérée.Ces différents cas, assez bien répertoriés, font l’objet d’un encadrement réglementaire croissant aux États-Unis par la Securities and Exchange Commission (SEC) sur les marchés des valeurs mobilières et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) sur les produits dérivés dans le cadre du Dodd-Franck act, et en Europe par la directive Mi-FID II (Markets in Financial Instruments Directive, applicable en janvier 2018). Une régulation avisée se concentrerait sur ces quelques stratégies, algorithmes et comportements litigieux, sans pénaliser l’ensemble du HFT, en particulier l’activité des teneurs de marché du HFT qui contribuent à la réduction du coût des transactions effectives. De plus, la responsabilité du HFT dans les trois flash crashes aux États-Unis n’est pas démontrée ; tout au plus les rapports aux régulateurs suggèrent d’accorder une attention particulière au trading algorithmique. De

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même, une contribution du HFT au risque systémique est contradictoire avec les transactions en direction inverse des fortes variations de prix (stratégies de market making) effectuées par les teneurs de marché du HFT. Enfin, l’exploitation systématique des opportunités d’investissement, l’augmentation du coût de l’infrastructure HFT et l’émergence des dark pools (plates-formes électroniques de négociation qui assurent l’anonymat prénégociation, en particulier des carnets d’ordres) semblent rendre inéluctable la baisse de l’activité et des profits du HFT.

Une mise en perspective plus nuancéePour conclure, il est impossible de faire un bilan objectif du shadow banking et du trading haute fréquence sans considérer l’ensemble des objectifs assignés au système économique. Comment concilier soutien des banques centrales à la baisse du chômage, maintien des activités de financement sous contrôle du risque systémique, prix de marché « à leur juste valeur » en faveur des consommateurs et faible volatilité des prix ? Sous la pression des règles prudentielles, les acteurs bancaires traditionnels réduisent leurs contributions au financement de l’innovation et des PME, ou aux activités de teneurs de marché. L’apparition de taux d’intérêt durablement négatifs pour des maturités de plusieurs années fragilise un peu plus leur rentabilité. Désigner hâtivement le SB et le HFT, appelés à remplacer partiellement ces acteurs traditionnels bien que moins expérimentés et fréquemment moins capitalisés, comme responsables de ces difficultés ne facilitera en rien la tâche des régulateurs.

NB : les notes n’ont pas été reproduites. L’auteur signale que son article ne traite pas des paradis fiscaux, également mis en cause.

Blue chips = sociétés cotées en Bourse avec une grande capitalisation et une liquidité importante. (source : glossaire de ce numéro de Problèmes économiques)

Référence complémentaire : l’émission 28 minutes de France 5 du 28/07/2017 « Avons-nous tiré les leçons de la crise financière ? », avec Nicolas Baverez, Christian Chavagneux, et Jézabel Couppey-Soubeyran : https://www.youtube.com/watch?v=47sHzTJGDw4 (à partir de 12’38, jusqu’à 35’06)

Page 87 à page 95 : article écrit par Laurent Clerc « Comment réguler demain la banque finance ? »Présentation par Problèmes économiques :La crise financière de 2007-2008 a montré un nombre impressionnant de dysfonctionnements parmi les acteurs du monde de la finance, tant du côté des marchés eux-mêmes que du coté des instances de régulation. Très vite, un large consensus s’est formé en faveur d’une nouvelle réglementation. Depuis, des progrès considérables ont été obtenus, en particulier dans le secteur bancaire. Mais l’impératif de croissance et l’incertitude réglementaire, qui semblent peser aujourd’hui sur le financement de l’économie, ont ralenti le processus de réglementation. Après avoir dressé un tableau des grandes lignes des réformes réglementaires entamées, Laurent Clerc revient sur certaines conséquences inattendues ou non désirées des réformes, avant de conclure sur quelques enjeux et défis de ce qui constituera demain la régulation du système financier.

Quelques extraits de l’article :Ce que l’on désigne aujourd’hui sous le vocable de « Grande crise financière » rassemble en réalité une série de crises successives (crise des subprimes, crise de liquidité, crise de la dette souveraine en Europe, défaut de la Grèce et du système bancaire chypriote, crise économique,

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etc.) illustrant à la fois les dérives de la finance globalisée, la fragilité intrinsèque, mais aussi l’importance des banques dans le financement de l’économie. Elle fait également apparaître les problèmes de gouvernance et l’insuffisance d’une approche prudentielle, trop souvent limitée à un seul secteur d’activité, sans considération des interactions avec les autres intermédiaires financiers. La réponse réglementaire à ces dysfonctionnements a été de grande ampleur, de nature globale et évolutive au gré des circonstances. Néanmoins, près de dix ans après le déclenchement de la Grande crise financière, elle demeure en grande partie inachevée.

Les grandes lignes des réformes réglementaires depuis 2008La réponse à la crise financière a été globale, à la fois au sens géographique et sectoriel du terme, en visant à renforcer toutes les composantes du système financier. Cette réponse a été très rapidement coordonnée et supervisée par le Conseil de stabilité financière (CSF) (Financial Stability Board) à partir de 2009, sous l’égide du G20.Elle a été structurée autour de quatre objectifs principaux : rendre les institutions financières plus résilientes ; mettre fin au problème du « too big to fail » ; rendre les marchés de produits dérivés plus sûrs ; transformer le système financier parallèle (shadow banking) en système de financement sain et robuste.

Rendre les institutions financières plus résilientesCe premier axe vise principalement le secteur bancaire et a été développé par le comité de Bâle pour la supervision bancaire. Cette réforme, aussi appelée « Bâle III », avait pour objectif de renforcer le capital des banques, à la fois en termes de qualité et de quantité, de limiter la capacité d’endettement du secteur bancaire par l’introduction d’un ratio de levier, dépendant des expositions totales des banques, y compris hors bilan, et non des seuls actifs pondérés par les risques. Elle s’attelle aussi à renforcer la capacité de résistance des banques à des chocs durables de liquidité.Bâle III n’est cependant pas encore complètement finalisé et d’importants éléments restent à fixer d’ici à la fin de l’année 2018. Il s’agit en particulier : de terminer les approches standards –c’est-à-dire les exigences qui s’appliquent à la plupart des banques- pour le risque de crédit et le risque opérationnel ; de réduire la variance observée dans le calcul des actifs pondérés par les risques issus des modèles internes des banques, par l’intégration d’éventuelles contraintes supplémentaires sur les facteurs entrant dans le calcul de ces risques (ex. : probabilités de défaut ou pertes attendues en cas de défaut d’une contrepartie) ou sur les résultats de ces modèles internes ; de finaliser le calibrage du ratio de levier. Les premières évaluations disponibles font apparaître des besoins supplémentaires considérables pour les banques dans un contexte où, par ailleurs, la reprise économique demeure fragile et incertaine. Par conséquent, les dirigeants du G20 ont souhaité que cette finalisation de Bâle III s’opère sans hausse significative du niveau global des exigences réglementaires. Il faut également signaler que le Comité de Bâle doit publier ses préconisations sur le traitement prudentiel des expositions des banques au risque souverain en juin 2017.

Mettre fin au problème du « too big to fail »La faillite de la banque d’investissement Lehman Brohers ainsi que le coût des crises bancaires ont incité le régulateur à mettre fin au problème du « too big to fail » (« trop gros pour faire faillite »). Ce problème trouve son origine dans le fait que certaines banques sont devenues systémiques, du fait de leur taille ou de leur importance, dans le financement de l’économie, et que l’État est forcé d’intervenir et de les recapitaliser avec de l’argent public en cas de crise systémique. Il en résulte une forme de subvention implicite qui, d’une part,

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fournit à ces banques un avantage compétitif vis-à-vis de leurs concurrents et les incite à prendre plus de risques, d’autre part.Après la crise, le soutien aux banques considérées « too big to fail » avec de l’argent public est devenu de plus en plus intenable politiquement. La réponse des régulateurs a été double.Le CSF a tout d’abord souhaité combler une lacune de la réglementation bancaire édictée par le Comité de Bâle, qui définit des exigences réglementaires minimales au niveau international sans prise en compte du caractère systémique des institutions. Le CSF a donc confié au Comité de Bâle la mission de développer une méthodologie d’identification des établissements systémiques au niveau mondial.Sur cette base, le CSF a établi, en novembre 2015, une liste de vingt-neuf institutions systémiques mondiales et les a réparties en cinq sous-ensembles en fonction de leur degré de « systémicité ». Chaque sous-ensemble correspond à une surcharge en capital que la banque devra constituer, en complément donc des exigences fixées par le Comité de Bâle. À noter que le premier sous-ensemble, qui correspond à une surcharge de 3,5 %, est vide et vise à inciter les banques à contrôler leur importance systémique. Ces surcharges s’échelonnent en pratique entre 2,5 % et 1%. La France compte ainsi quatre établissements de taille systémique mondiale ; BNP Paribas, Groupe BPCE, Groupe Crédit Agricole et Société Générale.Au-delà des banques, le CSF a développé une méthodologie similaire sur le secteur des assurances et devrait prochainement publier une liste des assureurs systémiques mondiaux. Des réflexions sont également engagées dans le domaine de la gestion d’actifs dans le but d’identifier des gestionnaires ou des activités systémiques à l’aune notamment des risques de levier et de liquidité qui sont les principales sources de risque systémique relatives à cette industrie.Le deuxième axe de travail a porté sur la mise en place d’un cadre de résolution pour les institutions systémiques en cas de faillite. L’objectif est de limiter, autant que possible, le recours au renflouement public et vise à s’assurer que la banque dispose en interne des montants nécessaires pour éponger ses pertes. Cette mesure cherche donc à éliminer la subvention implicite dont bénéficiaient jusqu’à présent ces institutions et à fournir de bonnes incitations aux acteurs, en particulier les actionnaires et une bonne partie des détenteurs de la dette obligataire non sécurisée des banques, désormais responsables sur leurs deniers personnels des pertes de la banque. Cet effort réglementaire vise également à corriger les nombreuses limites des outils à la disposition des autorités en charge de la résolution des banques défaillantes, en particulier s’agissant des institutions transfrontalières.Le deuxième axe recouvre deux dimensions : l’une est la supervision renforcée des institutions systémiques, via la création de groupes de gestion de crise rassemblant les principaux superviseurs de ces institutions. La seconde est de s’assurer que les banques disposent d’un niveau suffisant de passif pour absorber des pertes en cas de résolution sans soutien public. Un accord international a été obtenu en novembre 2015 lors de la réunion du G20 d’Antalia pour la définition d’une exigence de TLAC (total loss absorbing capacity) qui s’appliquera dès 2019 aux banques systémiques mondiales. Il s’agit en pratique d’un quasi-doublement des exigences réglementaires pour les banques systémiques.

Rendre les marchés de produits dérivés plus sûrsSi le défaut de Lehmann Brothers a eu un tel impact sur les marchés financiers, c’est que ni les autorités américaines ni les principales contreparties ne connaissaient précisément les positions et les expositions des banques à cet acteur clé du marché des dérivés de gré à gré (ou marchés OTC en anglais), agissant plus particulièrement en tant que vendeur de protection sur le marché des dérivés de crédit (les CDS –credit default swaps).La réponse réglementaire a consisté à imposer aux institutions financières l’obligation d’enregistrer leurs transactions auprès de registres de données (trade repositories) et, pour les

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dérivés standards, l’obligation de passer par une chambre de compensation centrale pour effectuer les transactions.La chambre de compensation, par le principe de novation des contrats, s’intercale en effet entre les contreparties bilatérales, devenant vendeur de protection pour tous les acheteurs et acheteur de protection pour tous les vendeurs concernés.L’obligation de compensation centrale permet ainsi de réduire à la fois de façon significative les interconnexions entre institutions financières ainsi que le montant total des expositions, car, du fait de la compensation multilatérale effectuée par la chambre, seules les expositions nettes demeurent.Enfin, à l’instar des banques systémiques, le CSF a également souhaité mettre en place un régime de résolution pour les chambres de compensation centrale dont les grands principes ont été publiés en octobre 2014, mais dont les modalités pratiques restent à mettre en œuvre.

Transformer le système financier parallèle (shadow banking)Le dernier volet de la réforme réglementaire vise à transformer le système financier parallèle (shadow banking) en système de financement sain et robuste. Le shadow banking représente, selon la définition du CSF, « l’intermédiation du crédit, impliquant des entités ou des activités effectuées en dehors du système bancaire traditionnel ». Ces activités peuvent être régulées ou non, et lorsqu’une réglementation est appliquée aux entités ou aux activités du shadow banking, celle-ci diffère en nature ou en intensité de la réglementation bancaire. Le shadow banking, en particulier en raison de son rôle dans la titrisation des créances hypothécaires et de sa fragilité liée à son mode de financement sur les marchés financiers à très court terme via des fonds monétaires, a été considéré comme l’une des raisons de la grande crise financière. Le Conseil de stabilité financière a cherché à y répondre en combinant une approche visant à réguler directement les entités ou les activités du système financier parallèle et une approche indirecte visant à limiter les expositions du secteur bancaire avec les entités du shadow banking.S’agissant tout d’abord de la régulation directe des entités du shadow banking, elle comprend deux éléments. Le premier vise à réguler les fonds monétaires. L’objet de la réforme est de s’attaquer en particulier aux fonds monétaires à valeur liquidative constante qui sont vulnérables au risque de fuite. Ces fonds promettent, en effet, une valeur liquidative constante (par exemple un euro la part) aux investisseurs. Or, dans des périodes de tension sur les marchés, il est vraisemblable que le fonds ne sera en mesure d’honorer que les premières demandes de retrait, d’où le risque de fuite, les investisseurs se précipitant en effet afin d’être ces premiers servis. Ce phénomène a ainsi été observé aux États-Unis avec la faillite du Reserve Primary fund qui fut suivi du défaut d’une trentaine de « prime brokers » dans le sillage de la chute de Lehman Brothers. L’une des principales options proposées par les régulateurs est le passage obligatoire des fonds monétaires à une valeur liquidative variable. Le 23 juillet 2014, la SEC, l’autorité de marché américaine, a ainsi adopté une réglementation allant dans ce sens. La SEC autorise, en outre, la possibilité pur les sociétés de gestion d’imposer des frais de sortie (jusqu’à 2%) et/ou des restrictions de retrait (pour une période limitée à dix jours) pour tous les fonds monétaires non gouvernementaux. Le projet de règlement européen, en cours de discussion, achoppe quant à lui sur cette question de la valorisation des fonds, devant l’opposition de l’Irlande ou du Luxembourg, dont les fonds restent majoritairement à valeur liquidative constante. Peu de progrès ont en revanche été accomplis en ce qui concerne les entités du shadow banking, en particulier sur la question de la dimension systémique de la gestion d’actifs. Le second élément vise à durcir la réglementation de la titrisation tout en essayant de promouvoir une titrisation simple, transparente et comparable. Le CSF a publié à cet égard des recommandations réglementaires en octobre 2014 qui visent à limiter l’accumulation d’un

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endettement excessif en dehors du système bancaire et à réduire la procyclicité de cet endettement.L’approche directe cherche, quant à elle, à limiter et à encadrer les interactions des banques avec les entités du shadow banking. Elle a été principalement développée par le Comité de Bâle et comprend : 1 / des exigences en fonds propres supplémentaires pour la participation des banques dans les entités du shadow banking (publiées en décembre 2013) ; 2 / des limites sur la taille et la nature de l’exposition des entités bancaires couvrant par exemple le soutien implicite aux fonds monétaires et aux conduits de titrisation (règles adoptées en avril 2014) ; 3/ un examen en cours des règles de consolidation prudentielle (par exemple, vis-à-vis des conduits ou des véhicules spéciaux d’investissements).

Les effets des réformes et les points d’attentionLes réformes financières ont conduit à un renforcement considérable du système bancaire. Les exigences en capital sont à présent environ sept fois plus importantes qu’avant la crise pour la plupart des banques et près de dix fois plus importantes pour les banques systémiques mondiales. Les banques ont également accru fortement la liquidité de leur actif, satisfaisant d’ores et déjà pour la plupart des exigences réglementaires dont la mise en œuvre totale et effective n’est prévue qu’à partir de 2019. Elles ont également fortement réduit leur risque de marché et de transformation. Elles ont enfin diminué leur endettement, satisfaisant également pour la plupart les exigences minimales de ratio de levier à 3 % arrêtées en 2016 et dont la mise en œuvre effective est également prévue en 2019. […]Les marchés de dérivés de gré à gré sont également devenus plus sûrs. […]La hausse du coût de l’intermédiation bancaire, qui était l’un des objectifs de Bâle III, s’est accompagnée d’une augmentation concomitante de la finance de marché. […] En effet, on observe que la part du financement réalisée par le système financier parallèle s’est accrue continûment depuis la crise et que son développement s’est accentué dans les économies émergentes comme la Chine. […]En dépit des efforts visant à relancer la titrisation, le marché est resté complètement inactif, en particulier en Europe. Le durcissement réglementaire de cette activité rend ce type d’opération très couteux et les investisseurs n’ont pas retrouvé la confiance dans ces produits financiers jugés trop complexes et opaques. Les difficultés à retrouver un cadre réglementaire international visant à promouvoir une titrisation simple, transparente et comparable expliquent aussi l’atonie de ce marché.Enfin, l’un des points principaux de vigilance sur l’effet des réformes porte sur la raréfaction de la liquidité de certains segments du marché financier. […]

Réguler demain la banque-financeLa profonde transformation en cours du monde financier est la résultante d’une conjonction de plusieurs facteurs : un durcissement global du cadre réglementaire ; une image dégradée des banques à l’issue de la crise ; un formidable essor des nouvelles technologies digitales.Dans ce contexte, la dégradation de la profitabilité des banques les conduit à externaliser une part croissante de leurs opérations, en particulier les fonctions informatiques et les paiements. Il en résulte une forte montée du risque opérationnel, liée notamment à la robustesse des systèmes d’information, qui consistent souvent en une multiplication des applications informatiques créées pour répondre à des besoins nouveaux ou issus d’opérations de croissance externes, et qui se traduisent par des infrastructures informatique complexes, coûteuses à maintenir et exposées de façon croissante au risque de cyberattaques. On estime aujourd’hui que le système bancaire et financier représente à lui seul plus de 40 % des attaques ciblées au niveau mondial. Les nouvelles applications (banque en ligne ; coffre-fort

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électronique) requièrent donc un effort accru de protection des données et des procédures de validation des opérations (signature électronique).[…] Au total, il s’agit donc de trouver un nouvel équilibre dans la réglementation et la supervision de ces nouveaux acteurs afin de ne pas étouffer des innovations, souvent porteuses de gains directs ou indirects pour le consommateur et la société, tout en les soumettant à une régulation garante de la protection du consommateurs et de l’investisseur, sans sacrifier non plus aux exigences de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Page 104 à 110 article écrit par Christophe Boucher : « Que devient la globalisation financière ? Avons-nous besoins d’un Bretton Woods 2.0 ? »Présentation par Problèmes économiques :Le système monétaire international (SMI) est entré dans une nouvelle phase. L’intégration financière rendue possible depuis environ 1980 grâce aux quatre « D » -déréglementation, désintermédiation, dématérialisation et décloisonnement- a montré ses avantages, mais a également manifesté d’importants dysfonctionnements. Accroissement de la transmission des risques et accumulation des déséquilibres figurent parmi les reproches les plus souvent formulés à l’encontre de l’organisation actuelle. Aujourd’hui, le SMI a entamé une transition vers un système plus multipolaire, notamment suite à l’essor de la Chine et de sa monnaie. Christophe Boucher se penche sur la question de la réforme du SMI qui découle de ces évolutions : faudrait-il revenir à un système organisé autour d’une monnaie de référence, tel le système de Bretton Woods, ou organiser pour le mieux la transition en cous vers un système multipolaire ?

Extraits de l’article écrit par Christophe Boucher :[…] Le processus d’intégration financière portait deux promesses : une allocation du capital plus efficace dans le temps et l’espace ainsi qu’un meilleur partage des risques entre les pays. L’intégration financière permet en effet à l’économie mondiale d’être plus productive car l’épargne peut se déplacer vers les actifs aux rendements les plus élevés et/ou les moins risqués. Ces promesses ont poussé les décideurs publics à faire de l’intégration du système financier à l’échelle mondiale, mais aussi à l’échelle de la zone euro, une priorité (et une composante essentielle de la politique économique européenne). Cependant, quelques années après la crise financière globale de 2007-2008, le bilan de l’intégration financière paraît contrasté.Cette intégration financière a aussi, dans les faits accru la transmission des risques et facilité l’accumulation de déséquilibres de balance des paiements qui exposent certains pays à des emballements et à des crises. Ces déséquilibres révèlent ainsi un système monétaire et financier non coordonné et asymétrique organisé sous la forme d’un centre représenté par les pays les plus développés et d’une périphérie. D’une part, le centre –les États-Unis – qui absorbe une large partie des flux de capitaux. D’autre part, la périphérie subit la volatilité des flux de capitaux au gré des décisions d politique monétaire au centre.

Document 3 : extraits de Problèmes économiques, n° 3110, deuxième quinzaine d’avril 2015 : Quelle régulation pour le système financier ? La Documentation française

ÉditoLa « re-régulation » du secteur financierDepuis la crise financière et économique de 2008, beaucoup a été accompli aux États-Unis et en Europe en matière de régulation financière. Le choc qu’a constitué la faillite retentissante de la banque américaine Lehman Brothers a en effet mis un terme au mouvement de

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dérégulation de l’industrie des services financiers qui avait été engagé au cours des années 1980. Aux États-Unis, le Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Act a été la principale loi adoptée pour promouvoir la stabilité financière. Au niveau international, le Comité de Bâle sur la supervision bancaire a édicté en 2010 de nouvelles normes dites « Bâle III » d’encadrement du secteur. En novembre 2014, l’Union bancaire est entrée en vigueur dans la zone euro faisant notamment de la Banque centrale européenne (BCE) le superviseur unique de cent-vingt-trois groupes européens. En France, la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013 a renforcé la supervision macroprudentielle et a institué la filialisation des activités spéculatives.

Les risques ont-ils disparu ?La « re-régulation » mise en œuvre au cours des dernières années a indéniablement créé les conditions d’un renforcement de la stabilité financière mais le secteur financier mondial reste néanmoins vulnérable. Les liquidités abondantes injectées dans l’économie par les banques centrales pour favoriser la sortie de crise sont aujourd’hui un nouveau facteur de risques. De même, l’introduction de nouvelles règles plus contraignantes ont incité une partie des activités du secteur financier à migrer vers le secteur non régulé que constitue le « système bancaire parallèle » actuellement en plein essor (banking shadow).

Pour des réformes plus ambitieusesD’aucuns estiment que, dans ces conditions, les réformes mises en place sont d’ores et déjà insuffisantes pour garantir qu’une crise de la gravité de celle de 2007-2008 ne se reproduira pas. Il est vrai, en outre, que les mesures très importantes qui ont été prises concernaient exclusivement des faiblesses et des insuffisances du système déjà connues. L’identification de facteurs nouveaux susceptibles de déclencher des crises, comme par exemple les risques technologiques, qui pourraient avoir une dimension systémique, n’a pas, semble-t-il, bénéficié de la même attention. La régulation financière mondiale montre encore de multiples lacunes. Le chantier n’est pas achevé.

Pages 8 et 9 : l’éclairage de Problèmes économiques, les chiffres clés du système financierShadow banking, l’ombre s’étend à grande vitesse : 75 000 milliards de dollars soit 12 % du PIB des grandes économies du globaleLe poids du Shadow banking qui désigne les activités de financement qui ne sont pas menées par les banques –et qui échappe par nature à la régulation bancaire- mais par les hedge funds, les fonds de private equity et des trusts ne cesse d’augmenter : 26 000 milliards de dollars à Paris en 2002, 62 000 en 2007, 71 000 en 2012, 75 000 en 2014. (Source : Conseil de stabilité financière)

Pages 16 et 17 : l’éclairage de Problèmes économiques, quelques dates clés de la régulation du système financier

1933 : adoption de la loi bancaire Glass-Steagall, qui porte le nom des deux coprésidents (les sénateurs Carter Glass et Henry Steagall) de la commission d’enquête mise en place par le Congrès pour faire la lumière sur les Grande Dépression qui s’ensuivit. Le Glass-Steagall Act prohibe l’accès des banques de dépôt aux marchés financiers.

1974 : création du Comité de Bâle (Suisse) à l’initiative des banques centrales du G10, suite à deux faillites retentissantes, l’une en Allemagne (banque Herstatt), l’autre aux États-Unis (Franklin National Bank). Les bonnes pratiques et les standards que le comité promeut pour améliorer la stabilité financière prennent la forme d’accords signés qui ont valeur de

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recommandation. Ils ne deviennent des réglementations qu’une fois transposés dans le droit de chaque État signataire. Le comité, qui compte vingt-sept pays membres, est installé au sein de la Banque des Règlements Internationaux (BRI), la plus ancienne organisation financière internationale ; créée en 1930, elle œuvre à la coopération monétaire et financière internationale et fait office de banque centrale des banques centrales. Les accords de Bâle I (1988) recommandent aux banques de respecter un ratio d’au moins 8 % entre les fonds propres et les actifs exposés au risque de crédit. Les accords de Bâle II (2004) ont élargi la couverture aux risques de marché opérationnel sans changer l’exigence globale de 8 %. Les accords de Bâle III (2010) rehaussent en quantité et en qualité l’exigence de fonds propres : le ratio atteindra au total 10,5 % de fonds propres en 2019, dont 7 % de fonds propres « durs » (de grande qualité : actions et réserves) ; un autre ratio de fonds propres plus simple, non pondéré par les risques, le ratio de levier, est fixé à 3 % du total des actifs ; et deux ratios de liquidité devraient mettre les banques à l’abri d’une crise de liquidité. Selon l’état du cycle financier, les fonds propres peuvent être augmentés dans une fourchette allant de 0 à 2,5 %. Des surcharges en fonds propres sont également prévues pour les banques « systémiques ».

1999 : à partir des années 1980, l’intense compétition à laquelle se livrent les places financières à l’échelle internationale résultant de la dérégulation des marchés financiers va jouer un rôle décisif dans la surenchère dérégulatrice exercée par le lobby bancaire aux États-Unis. Les dispositions prohibitives instituées par le Glass-Steagall Act depuis les années 1930 vont dès lors être progressivement abandonnées jusqu’à l’abrogation définitive de la loi en 1999.

2009 : création du Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board), groupement économique international créé lors de la réunion du G20 à Londres en avril 2009. Il succède au Forum de stabilité financière (Financial Stability Forum) institué en 1999 à l’initiative du G7. Il regroupe vingt-six autorités financières nationales (banques centrales, ministères des finances…), plusieurs organisations internationales et groupements élaborant des normes dans le domaine de la stabilité financière. Ses objectifs relèvent de la coopération dans le domaine de la supervision et de la surveillance des institutions financières.

2010 : le Dodd-Franck Wall Street Reform and Consumer Protection Act est la principale loi de la réforme du marché financier engagée par l’administration Obama à la suite de la crise des subprimes et la crise financière et économique de 2008. L’objectif de cette loi est en particulier de promouvoir la stabilité financière des États-Unis en améliorant la responsabilisation et la transparence dans le système financier, de mettre fin au « too big to fail », de protéger le contribuable américain en ne recourant plus aux sauvetages financiers sur des fonds publics, de préserver le consommateur des pratiques de services financiers abusifs.

2013 : en France, promulgation de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires qui transforme l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) en Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), étend et renforce les pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers (AMF), crée un fonds de résolution entièrement financé par les établissements bancaires à hauteur de 10 milliards d’euros et instaure un Haut Conseil de stabilité financière.

2014 : mise en place progressive en Europe de l’Union bancaire qui modifie l’architecture bancaire de la zone euro et consacre la logique en cas de crise de renflouement interne (bail-in) des banques. Ce dispositif s’organise autour de trois piliers : le Mécanisme de supervision unique (MSU) qui instaure la prise en charge par la Banque centrale européenne (BCE) à partir de novembre de la supervision directe de cent-vingt-trois groupes bancaires de la zone

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euro, représentant près de 85 % des actifs bancaires européens, l’objectif étant d’éviter de nouvelles crises et d’améliorer la financement de l’économie ; le Mécanisme de résolution unique (MRU), qui doit permettre la résolution des défaillances bancaires et qui institue le Fonds de résolution unique (FRU) d’un montant de 55 milliards abondé par les banques sur une période de huit ans (2016-2023) ; un système unique de garantie des dépôts (jusqu’à 100 000 euros).(Référence complémentaire : http://www.europarl.europa.eu/atyourservice/fr/displayFtu.html?ftuId=FTU_4.2.4.html )

2015 : finalisation du projet TLAC (Total Loss Absorbing Capacity) initié par le Conseil de stabilité financière (FSB). Cette mesure imposerait dès 2019 aux trente banques mondiales d’importance systémique (parmi lesquelles figurent BNP-Paribas, la Société générale, le crédit agricole et BPCE), de se doter d’un montant de dette subordonnée ou de quasi-fonds propres « durs » exigés par Bâle III. Le TLAC aboutirait à un doublement du ratio de solvabilité des banques déjà exigé par Bâle III, ratio qui serait alors compris entre 16 % et 20 % de leurs actifs pondérés des risques.

Pages 39 et 40 : l’éclairage de Problèmes économiques, la loi de séparation et de régulation des activités bancairesLa loi de séparation et de régulation des activités bancaires a été adoptée par le Parlement le 18 juillet 2013 et promulguée le 26 juillet. Ce texte qui comprend cent mesures cherche à tirer les enseignements de la crise financière de 2008 et à réformer le système bancaire en renforçant la régulation des acteurs bancaires et les pouvoirs des autorités de supervision en matière bancaire et financière.

Limiter la spéculation et recentrer les banques sur le financement de l’économiePrésentée comme une des principales mesures de la réforme bancaire, la loi prévoit la séparation des opérations spéculatives des banques réalisées pour leur compte propre et de leurs activités utiles à l’économie. L’objectif est de protéger les déposants, de limiter la spéculation et de recentrer les établissements bancaires sur le financement de l’économie. Les activités spéculatives devront dorénavant être cantonnées dans une filiale séparée. Cette dernière devra respecter un certain nombre de mesures destinées à prévenir toute transmission de risques à l’ensemble du groupe bancaire. La loi impose aux établissements de nouvelles obligations pour lutter contre la spéculation et accorde aux autorités de supervision des pouvoirs étendus afin de contrôler efficacement les opérations sur les marchés financiers. Le ministère de l’Économie et des Finances peut également limiter la taille de ces activités spéculatives.

Des pouvoirs renforcés pour les autorités de contrôle et de supervisionLa loi prévoir la création d’une autorité en charge de prévenir et de gérer les crises bancaires. L’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) devient l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Cette dernière se voit dotée d’un collège de résolution à une entreprise d’investissement ou à un établissement de crédit en cas de crise (réorganisation de la structure, filialisation, révocation des dirigeants, interdiction ou suspension du paiement des dividendes, mise en place de plans préventifs de résolution par les établissements, etc.). La création d’un fonds de résolution est également prévue. Il sera approvisionné par le secteur bancaire et financé à hauteur de 10 milliards d’euros d’ici 2020. L’ACPR se voit dotée du pouvoir de suspendre ou d’interdire la commercialisation de produits financiers « toxiques » et de certaines activités jugées « dangereuses » pour garantir la stabilité du système financier. L’Autorité des marchés financiers (AMF) est chargée de son côté d’imposer la filialisation

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des participations dans les hedge funds des banques. Le principe qui préside à cet ensemble de mesures est de limiter au maximum en cas de crise le recours au soutien financier public. Afin d’améliorer la lutte contre les pratiques spéculatives, l’AMF voit son pouvoir de sanctions étendu à celui des tentatives de manipulation de marché et ses pouvoirs de surveillance, de contrôle et d’enquête renforcés. Parmi les autres mesures visant à limiter la spéculation figure l’interdiction des opérations de trading à haute fréquence taxables aux banques françaises. De même, les établissements pratiquant le passage d’ordres boursiers automatisés doivent en informer l’AMF et détailler leurs opérations. Un Haut Conseil de stabilité financière doté de « pouvoirs juridiquement contraignants pour limiter les risques de nature systémique ou prévenir la formation de bulles spéculatives » est créé.Enfin, la loi prévoit l’encadrement des rémunérations des dirigeants et des traders dont la part variable (bonus, stock-options, etc.) de leurs émoluments ne devra pas dépasser le niveau de leur rémunération fixe (salaire). Cette part variable pourra toutefois atteindre deux fois au maximum la rémunération fixe avec l’accord des actionnaires.

Lutter contre les paradis fiscauxLa loi vise également à renforcer les moyens de lutte contre l’évasion fiscale en imposant aux banques et aux grandes entreprises de diffuser un certain nombre d’informations relatives à leurs activités (places off shore, nom des entités, nature de leurs activités, chiffre d’affaires, résultat net, etc.).

Références complémentaires   : « Les 100 mesures de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires. » http://www.tresor.economie.gouv.fr/7742_la-loi-de-separation-et-de-regulation-des-activites-bancaires« Loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires. » http://www.vie-publique.fr/actualite/panorama/texte-discussion/projet-loi-separation-regulation-activites-bancaires.html« Régulation : ce qu’il faut retenir de la loi bancaire » http://www.lafinancepourtous.com/Actualites/Regulation-ce-qu-il-faut-retenir-de-la-loi-bancaireJ Couppey-Soubeyran, C Nijdam, Parlons banque en 30 questions, collection Doc’en poche, La Documentation française, 2014.

Pages 12 à 21 : Article écrit par Christian Stoffaës « Le Glass-Steagall act : mère de toutes les régulations »Introduction (Problèmes économiques) : En 1933, une commission d’enquête du Congrès des États-Unis chargée de faire la lumière sur les raisons du krach de 1929 conclut que c’était la confusion des genres entre banque de dépôt et banque d’investissement qui avait encouragé la spéculation boursière. Celle-ci recommanda d’interdire aux banques commerciales l’accès aux marchés financiers. Le Glass-Steagall Act, la loi bancaire définissant le nouveau cadre réglementaire, fut adoptée quelque temps après la fin des travaux de la commission d’enquête. Les établissements bancaires durent dorénavant choisir entre le métier de banque commerciale et celui de banque d’investissement. La compétition exacerbée entre les marchés financiers, à partir des années 1980, entraîna un affaiblissement de Wall Street, au profit de la City de Londres, de plus en plus dérégulée, et finalement à l’abrogation au seuil des années 2000 du Glass-Steagall Act.

Début 1933, dans une atmosphère de chasse aux sorcières, alors que le chômage touche un tiers de la population et que les banques ont fermé leurs guichets aux déposants affolés, le

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Congrès (récemment élu) du New Deal détermine que la cause du krach est la spéculation boursière, avec des fonds exorbitants prêtés par les banques à leurs clients entraînés par l’atmosphère euphorique des années folles dans l’illusion de l’enrichissement facile. En résulta la législation Glass-Steagall prohibant l’accès aux marchés financiers aux banques de dépôt.

Insuffisance des normes prudentielles et risque systémiqueOn a joué au casino avec l’argent des déposants : comment expliquer autrement qu’un

défaut sur un segment limité des marchés financiers, celui des subprimes, ait pu engendrer un séisme d’une telle ampleur.

L’irruption sur les marchés financiers des immenses ressources de la masse monétaire a eu trois conséquences : a) l’abondance des financements a engendré la hausse du prix des actifs, notamment immobiliers ; b) l’insolvabilité au premier retournement des prix d’emprunteurs dépourvus de fonds de garantie, car ils se croyaient assurés contre les risques par les instruments financiers (en l’occurrence les Credits Default Swaps [CDS]) ; et, enfin, c) la nécessité pour les gouvernements de voler au secours des banques pour éviter un enchaînement des défauts de paiement et des paniques financières (too big to fail).

Prendre des risques spéculatifs en s’endettant de manière excessive (ou en ayant souscrit une assurance contre le risque sans couverture sérieuse), c’est mettre sa solvabilité à la merci du moindre retournement des marchés.

Ainsi, en 1929, les appels de marge adressés aux boursicoteurs après le Jeudi noir les obligèrent à vendre en catastrophe des actions acquises à crédit.

Aujourd’hui, il en va de même du provisionnement en catastrophe à la suite du défaut de créances hypothécaires subprimes sorties du bilan par le jeu de leur titrisation au moyen de « véhicules » (les Structured Vehicles [SIV]) et autres « conduits ».

Comment expliquer qu’un défaut sur un segment somme toute limité des crédits hypothécaires ait pu déboucher sur une crise financière d’une telle ampleur ?

Le krach du véhicule Bear Stearns, en juillet 2007, révèle un ratio prudentiel (de 1 à 35) insuffisant à garantir des titres sans valeur dissimulés dans des véhicules structurés.

La faillite de la banque Lehman Brothers et le sauvetage de l’«assureur » AIG, en septembre 2008, ont révélé des ratios tout aussi stupéfiants, de 1 à 50. En réalité, les « véhicules d’investissements structurés » n’étaient pas hors bilan et ils n’étaient pas assurés contre le défaut, puisque les banques qui les avaient créés ont dû finalement les rapatrier et les provisionner.

Une petite explication opératoire s’impose, parce que ce bon diagnostic inspirera la solution qui devrait permettre que « plus jamais ça ne se reproduise » : il faut imposer aux banques des normes prudentielles garantissant celles-ci contre le risque systémique. Les débats officiels se sont –enfin !- centrés sur la source de la crise.

1933 : la commission PecoraAdoptée par le Congrès démocrate quelques semaines après l’inauguration de

l’administration Roosevelt, la loi bancaire Glass-Steagall porte le nom des deux coprésidents de la commission d’enquête mise en place pour faire la lumière sur les causes du krach boursier et de la Grande Dépression qui s’ensuivit.

Ancien secrétaire au Trésor, Carter Glass, le sénateur libéral (c’est-à-dire de gauche) de l’État de Virginie était la bête noire de Wall Street. Il avait en 1913 fait instituer la Réserve fédérale, dont la nécessité était apparue à la suite de la « panique du cuivre » de 1907.

Le sénateur Henry Steagall représentait, quant à lui, le Sud profond (l’État de l’Alabama) : cet ami des fermiers avait fait adopter l’assurance fédérale des dépôts bancaires

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(FDIC) qui était destinée à éviter les paniques des déposants affolés vidant leurs comptes : autre manifestation intolérable de dirigisme pour Wall Street…

Le flamboyant « Sunshine » Charlie Mitchell, président de la City Bank, démonte devant la commission d’enquête le mécanisme de la spéculation sans fonds propres. Son audition lors du procès de 1933, qui a été rapportée dans les mémoires du procureur Ferdinand Pecora publiés sous le titre Wall Street sous serment fait penser aux procès contemporains à Washington, là où comparurent, entre autres suspects, Richard Fuld, le président failli de la banque Lehman Brothers (surnommé le « Poison » ou le « Gorille » par Wall Street [jamais avare d’affectueux sobriquets]).

Les banques des années folles avaient encouragé leurs déposants à spéculer à la Bourse en leur prêtant des fonds pour leur permettre d’acheter des actions, et en s’enrichissant grâce aux commissions qu’elles prélevaient sur les ventes de ces titres. L’indice des cours de bourse fut multiplié par quatre entre 1925 et 1929. Lorsque le marché boursier se retourna, après le Jeudi noir (le 24 octobre 1929), les appels de marge rendirent insolvables les spéculateurs endettés, ce qui enclencha l’écroulement du château de cartes de l’insolvabilité : de 1929 à 1932, l’indice avait décroché de 90 %. En 1933, toutes les banques étaient en dépôt de bilan et Roosevelt les fit fermer.

À la lumière des conclusions de la commission d’enquête du New Deal, le Congrès américain trancha : c’était la confusion des genres entre les banques de dépôt et les maisons de titres qui avait encouragé la spéculation boursière ; il fallait désormais interdire aux banques commerciales l’accès aux marchés financiers.

Le mécanisme des spéculations est toujours le même, des oignons de tulipes d’Amsterdam (au XVIIe siècle) aux actions de la compagnie du Mississippi.

La différence entre les spéculations contemporaines et celles du passé, c’est la spéculation à crédit : lorsque l’on joue avec de l’argent emprunté, c’est l’argent des autres qui est perdu.

Aujourd’hui, il suffit de mettre dans la colonne « actifs » : « immobilier » à la place d’ «actions » ; dans la colonne appelée « appels de marge » : « rapatriement dans les comptes des ‘créances toxiques titrisées’ », « provisionnement (des engagements soi-disant hors bilan) » et « recapitalisations » et, enfin, dans la colonne « commissions « : « bonus et stock-options ».

Et c’est ainsi que l’on retrouve, écrit entre 2007 et 2009, le script du funeste scénario de 1929-32.

L’abrogation du Glass-Stegall ActCe qui a conféré aux éclatements de la bulle de 1929 et de celle d’aujourd’hui leur

force inouïe et au vertigineux krach contemporain sa puissance déferlante, c’est la destruction, il y a de cela une décennie, de la « muraille de Chine » qui séparait les banques des marchés financiers.

Lorsque l’on gère la monnaie, on ne peut pas être autorisé à prendre des risques avec l’argent des déposants. C’est en mettant les dépôts monétaires à la disposition de la spéculation boursière que les banquiers de Wall Street avaient, en 1929, fait monter vertigineusement les cours et provoqué l’explosion de la bulle boursière. La conclusion du New Deal était simple. L’adoption du Glass-Steagall Act entraîna une vague de démantèlements des empires financiers. Ceux-ci durent désormais choisir entre le métier de « banque commerciale » (cest-à-dire des placements à court terme et sans risque, limités aux Bons du Trésor ou aux créances commerciales-le bon vieil escompte) et celui de « maison de

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titres » (merchant bank, c’est-à-dire de banque d’investissement, d’acteur des marchés financiers). Entre financer le haut du bilan ou le bas du bilan, il faudra désormais choisir.

Les géants de Wall Street se scindèrent : ainsi, par exemple, les héritiers du célèbre Pierpont Morgan fondèrent la banque commerciale devenue aujourd’hui JP Morgan Chase et la banque d’investissement Morgan Stanley.

Puis, progressivement, on oublia les motivations de la loi bancaire de 1933, qui avait été rénovée en 1956, pour n’en voir que les défauts.

Les maisons de titres lorgnaient avec envie sur la gestion des immenses masses financières des dépôts à vue. Les banquiers de détail aspiraient aux généreuses commissions d’intermédiation des banquiers d’affaires et des traders de titres. Avant, les banques conservaient leurs créances dans leur bilan lorsqu’elles faisaient des prêts. « Il n’a pas vraiment vécu, celui qui n’a pas connu la douceur de vivre avant la Révolution », disait le Talleyrand de 1815. Que dire alors de l’ennui profond du métier de banquier, avant la dérégulation ?

La compétition exacerbée entre places financières à l’échelle internationale résultant de la dérégulation des marchés financiers joua un rôle décisif dans la surenchère dérégulatrice. Le commerce de l’argent désertait les rives de l’Hudson pour celles de la Tamise : la course au moins-disant réglementaire entre les deux grandes places financières anglo-saxonnes joua un rôle déterminant dans l’abrogation du Glass-Steagall Act, la City dérégulée attirant le commerce financier au détriment d’un Wall Street ‘sur-régulé ».

Dans le courant de la décennie 1980, la prohibition instituée par le Glass-Steagall Act se trouva peu à peu érodée par une série d’exemptions obtenues au Capitole par l’intense lobbying de K Street, pour aboutir à son abrogation définitive en 1999. Les maisons de titres étaient dès lors autorisées à ouvrir des comptes à vue et les banques commerciales pouvaient placer une part de leur actif sur les marchés de titres.

L’événement déclencheur du coup de grâce fut le désir qu’avait le président de la Citibank, Sandi Weil, de fusionner son établissement avec l’assureur Travelers. Inspiré par le sénateur démocrate texan (ami de Wall Street) Phil Gramm, soutenu par le gourou Alan Greenspan, et voté sous l’impulsion du secrétaire du Trésor démocrate Robert Rubin (lequel pantoufla peu après comme numéro deux de la Citibank), le Gramm-Leach-Bliley Act effaça ce « vestige vermoulu du New Deal ». Car c’est bien l’administration Clinton qui démantela cet achèvement majeur de l’administration Roosevelt.

S’ensuivit la révolution financière : celle de la désintermédiation et de l’externalisation ; des banques de dépôt intégrées à des holdings financiers diversifiés ; de la fusion des métiers de la finance autrefois segrégués ; de la banque universalisée et globalisée ; de la titrisation échevelée qui, à partir de 2000, permit de transformer en titres négociables sur les marchés financiers les créances que les banques conservaient autrefois dans leurs bilans et d’une concurrence sans frein entre les institutions financières pour placer des titres, séduire les investisseurs, inventer des produits financiers de plus en plus sophistiqués et de moins en moins transparents, et des commissions de transaction de plus en plus plantureuses.

L’économie en tira certes profit, tout au moins un certain temps. La titrisation, en créant l’illusion du risque zéro, permit de financer des entrepreneurs dynamiques, des fusions-restructurations, des innovations technologiques et des projets qui n’auraient pas vu le jour sans cela. L’innovation financière fut un des ressorts de la brillante période et de plein emploi de la décennie écoulée.

L’industrie bancaire fut profondément restructurée par le nouveau cadre réglementaire. La dérégulation accrut dans une proportion considérable le volume d’activités et la rentabilité du secteur financier : les services financiers représentaient 40 % des profits des entreprises en 2007, contre 10 % en 1980. La part des banques dans la valeur boursière totale atteignait 23%

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(contre 6 %), leur part du produit intérieur brut (PIB) 14 % (mais seulement 5 % de l’emploi). Avec comme premiers bénéficiaires les places financières anglo-saxonnes de Londres et de New York, ainsi que les grandes banques universelles et internationales : les actifs des banques suisses représentent neuf fois le PIB du pays (au Royaume-Uni, quatre fois ; en France et en Allemagne, trois fois).

Dans ce décor propice à l’incendie planté par la libéralisation des marchés financiers, la politique monétaire laxiste et volatile de la banque centrale américaine fut l’étincelle. L’ouvrage fondamental de la révolution anti-keynésienne, l’Histoire monétaire des États-Unis de Milton Friedman, a démontré que la cause de la Grande Dépression avait été une politique de crédits faciles suivie d’une politique restrictive, une politique déflationniste corrigeant à contretemps une politique inflationniste.

Le fine tuning monétaire et l’idéologie euphorique de l’époque firent oublier les sains principes. Réduit à 1 % après le krach de la bulle internet et l’attentat du 11 septembre 2001, le taux de Réserve fédérale (Fed) fut remonté à 5 % en 2005 pour calmer l’inflation immobilière. Le laxisme de la politique monétaire engendra le crédit facile et le surendettement des particuliers. La dette des ménages a explosé : en 1974, elle représentait 50 % de leur revenu disponible ; en 2008, elle s’établissait à 150 % dudit revenu.

L’effet sur la liquidité de l’abondance des crédits faciles dû à la politique monétaire fut renforcé par les déséquilibres des paiements internationaux, les pays émergents et les exportateurs de matières premières (dont la Chine et les producteurs de pétrole) accumulant leurs excédents commerciaux et leurs réserves de change, et les prêtant à des États-Unis assoiffés d’endettement.

Les normes complexes du Forum de stabilité financière (le Forum de Bâle) –l’instance où les financiers négocient et fixent les codes de la profession au mieux de leurs intérêts commerciaux- allaient autoriser la prolifération des hors-bilans et un contournement massif des ratios prudentiels. L’’expansion de l’activité financière des paradis fiscaux (qui sont en réalité des quasi-filiales des banques internationales) contribuèrent à un excès de recours au leverage.

Ainsi se trouvaient plantés les germes de l’amplification spéculative du cycle naturel des marchés financiers grâce aux masses considérables des dépôts liquides mises à disposition de placements à risque élevé.

Une spéculation à créditAinsi naquit et proliféra le contournement systématique des règles prudentielles

imposées aux acteurs financiers régulés, c’es-à-dire une spéculation sans couverture, exactement comme dans les années 1925-1929.

Le krach Bear Stearns de juillet 2007 a révélé un ratio prudentiel de 35. La faillite de Lehman Brothers et le sauvetage d’AIG, en septembre 2008, ont révélé un ratio encore plus étonnant de 50. En réalité, les SIVs n’étaient pas dans la rubrique hors bilan, mais étaient inscrits dans le bilan. Et ils n’étaient pas assurés contre le défaut, puisque les banques qui les avaient créés ont dû finalement les rapatrier et les provisionner. Comment a-t-on pu être autorisé à spéculer ou à assurer contre le risque de défaut avec des fonds propres aussi faibles ?

La titrisation est, sur le papier, parée d’avantages : le problème a tenu à sa dérive. L’abrogation du Glass-Steagall Act fut la cause permissive de la prise de risques inconsidérée par surendettement en autorisant l’essor échevelé de la titrisation au cours de la décennie écoulée. Les banques prêtaient et se débarrassaient immédiatement du risque en titrisant les créances, en vendant aux investisseurs (y compris à leurs propres filiales créées pour la circonstance) les CDOs, SIVs et autres « conduits ». La titrisation permit aux prêteurs de premier rang de se débarrasser de l’appréciation prudente du risque (qui est, comme on le sait,

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l’obsession des banquiers traditionnels) et de contourner systématiquement les règles prudentielles qui imposent aux institutions financières de maintenir un ratio minimum de fonds propres pour garantir leur prise de risques. Les acquéreurs de titres (investisseurs et fonds de pension) optimisaient l’arbitrage risque/rentabilité de leur portefeuille de placements et se satisfaisaient quelque peu complaisamment de s’assurer contre le risque de défaut par des « produits dérivés » et de faire confiance aux évaluations des agences de notation.

Deux inventions remarquables découlèrent de la déspécialisation des métiers financiers :

- Les « véhicules d’investissement structurés » (les SIVs), c’est-à-dire des filiales hors bilan de banques de marché, des banques filiales financées par de la dette n’ayant quasiment aucun fonds propres ;

- Les « contrats d’assurance contre le risque de défaut (CDS, Credit Default Swaps) écoulés par des assureurs monolines eux-mêmes quasi dépourvus de fonds propres (par exemple AIG).

En réalité, ces véhicules n’étaient pas hors bilan, puisqu’il fallut les provisionner dans les comptes des banques dès le retournement du marché. Et les risques n’étaient pas assurés, puisque les assureurs dépourvus de fonds propres ne purent tenir leurs engagements après que les défauts se furent multipliés.

Par quel miracle les SIVs, ABS et autres CDOs pouvaient-ils se trouver simultanément dans les engagements des banques et hors bilan ? Comment a-t-on pu être autorisé à spéculer, ou à assurer contre le risque de défaut, avec des fonds propres aussi faibles ? Comment qualifier la vente de polices d’assurance contre le défaut sans posséder de couverture pour permettre le remboursement lorsque le risque se matérialise ?

C’est ce mécanisme de commerce des titres qui a fait de l’industrie financière conquérante de notre époque. Des apprentis sorciers auraient-ils négligé le fait que, si des limites et des ratios de fonds propres ne leur sont pas imposés, les banques prêtent sans relâche et les assureurs assurent contre les risques sans se préoccuper le moins du monde d’un possible retournement du marché et de devoir dès lors faire face à leurs engagements ?

Les acquéreurs de produits financiers innovants (fonds de pension et autres investisseurs inconscients, eux aussi rémunérés en fonction du volume des transactions, fermaient complaisamment les yeux sur la capacité réelle des agences de notation à qualifier les risques, sur la garantie réelle apportée par les assureurs de défaut de paiement et même sur la fiabilité des audits comptables et des cabinets d’avocats chargés des due diligences (comme en témoigne, jusqu’à la caricature, la fraude Madoff, demeurée si longtemps non détectée) ?

Dès lors que le risque est transféré à d’autres, pourquoi se limiter en veillant à la prudence et aux ratios de fonds propres ? Dès lors que le contrôle le plus élémentaire est considéré comme bureaucratique, la sagesse prudentielle comme un archaïsme, et même le respect élémentaire des lois comme une atteinte à la liberté des marchés, comment s’étonner de ces dérives, dont on se scandalise aujourd’hui ?

Les banquiers, les assureurs contre le risque de défaut, les notateurs avaient tout simplement oublié (ou fait semblant d’oublier ?) le « risque systémique ». Quand les crédits à risque prolifèrent sans limite, comment faire semblant de s’étonner a posteriori que les cours des valeurs explosent ? Et comment oublier que la suite inéluctable d’un gonflement vertigineux d’une bulle spéculative, c’est son explosion ?

On croyait les risques en les dispersant sur les marchés, alors qu’en réalité on répandait partout la contagion des créances empoisonnées, qui propulsèrent, dans un premier temps, la hausse spéculative de l’immobilier, des actions et des fusions-acquisitions grâce à l’abondance des crédits, puis semèrent, dans un deuxième temps, la défiance générale lorsque

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le marché se retourna, les risques disséminés –cause immédiate à partir de laquelle s’enclencha la crise de liquidité interbancaire- étant devenus impossibles à identifier.

Ce qui devait arriver arriva : le marché se retourna, les spéculateurs endettés se révélèrent insolvables. C’est ainsi que le krach Bear Stearn répandit la défiance généralisée dans le crédit interbancaire. C’est ainsi que des incidents de remboursement d’une fraction modeste des créances hypothécaires enclenchèrent un enchaînement fatal. C’est la dure loi du marché. Mais, cette fois-ci, la différence fut la faillite des banques, et la nécessité de les secourir.

La science économique au service de la financeQuand les banquiers sautent par la fenêtre, les économistes entrent par la porte,

pourrait-on être tenté de conclure. Mais la crédibilité de la science économique a elle-même subi de son côté un krach de grande ampleur.

La « faille » évoquée par Greenspan est l’effondrement brutal de tout l’édifice intellectuel érigé pour faire croire que l’assurance contre les défauts de crédit pouvait se substituer aux fonds propres pour se garantir contre le risque systémique inhérent à toute fièvre spéculative.

On aurait pu s’en apercevoir plus tôt. Mais ceux qui le savaient avaient-ils intérêt à troubler le consensus moutonnier et rémunérateur des années folles ? Il fallait bien de bonnes raisons pour justifier une spéculation rémunératrice sans fonds propres. Pour nier le risque spéculatif, les marchés financiers avaient besoin de ces arguments pour se rassurer (ou de prétextes, pour faire semblant de se rassurer).

Ceux qui comprenaient très bien la réalité touchaient des commissions et ne demandaient qu’à se persuader eux-mêmes et à persuader les autres des vertus de la dérégulation et des innovations financières. Quant aux autres, c’est-à-dire le public, ils ignoraient que leurs banquiers et leurs fonds de pension jouaient au casino avec leur argent.

En réalité, la spéculation à crédit avait besoin d’arguments pour s’autojustifier. La théorie de la finance moderne est la construction intellectuelle la plus imposante de la science économique moderne, les économistes s’étant détournés de la macroéconomie keynésienne décrédibilisée par la révolution monétariste pour s’illustrer désormais dans la microéconomie des marchés.

À la propagande tenant à « justifier » la spéculation sans fonds propres et de plantureuses commissions d’intermédiation sources des superprofits de Wall Street et des superbonus des traders, la caution de la science économique donnait l’apparence de vérité. Les théoriciens de la finance ont fourni les arguments et ont cautionné un leverage insensé qui a permis une spéculation sans limites.

La quasi-absence de fonds propres et le contournement systématique des règles prudentielles en recourant à des produits dérivés hors du champ des marchés régulés relevaient, comme on s’en est tardivement rendu compte, de la quasi-escroquerie déguisée sous les atours de la créativité et de l’optimisation mathématique. Tout comme la garantie du défaut de remboursement des créances douteuses, soi-disant apportée par des assureurs eux-mêmes quasi dépourvus de fonds propres par la grâce de la dissociation systématique du risque d’avec la créance, l’assurance contre le défaut a été transformée en créance négociable, et 60 000 milliards de Credit Defaut Swaps ont ainsi été introduits sur le marché.

Les banques et les agences de notation recrutèrent massivement des ingénieurs et des scientifiques. Les modèles mathématiques se firent de plus en plus sophistiqués pour fournir les arguments de vente aux vendeurs d’options, de futures, de produits dérivés…

Les « prix Nobel » bonimenteurs et les modèles mathématiques sophistiqués d’optimisation des risques n’auraient-ils dès lors servi qu’à fournir une justification parée de vertus scientifiques à de plantureuses commissions d’intermédiation et à des métiers parasites de la finance dérégulée abondamment alimentés par l’épargne liquide ?

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À finance globalisée, il faut des règles du jeu globales. Il faut bien plus que le Bretton Woods Act, qui ne concernait que les paiements intergouvernementaux et la coopération entre les banques centrales. Il s’agit désormais de protéger les marchés financiers dans leur globalité en les régulant.

Au contrôle par soi-même tant célébré par les professions financières si promptes à dénoncer un « socialisme » rampant derrière chaque initiative des pouvoirs publics, comme au contrôle des « bureaucrates » et des « politiciens », il faut substituer une « règle » publique, simple, visible, internationale, mais légère. L’autorégulation défendue bec et ongles par les professions financières est aujourd’hui condamnée à un silence contrit par la démonstration de son échec. Mais la régulation (même si elle est aujourd’hui à la mode, après avoir été tant décriée, par l’effet d’un retournement hystérique des idéologies, familier des grandes crises) aura du mal à trouver sa forme efficace et consensuelle. Mais il existe déjà de multiples autorités pour contrôler et superviser. Or une surabondance des contrôleurs déresponsabilise gravement les acteurs.

Abus de position dominanteEn réalité, la régulation bancaire est une question sémantique. N’est-il pas plus simple

de revenir à la distinction entre les métiers, tout simplement, en rétablissant le sens des mots ?Revenons à des fondamentaux quelque peu oubliés, c’est-à-dire à la définition de la

mission d’une banque : gérer les moyens de paiement institués par la loi. Depuis bien longtemps, les États ont délégué leur antique privilège de battre monnaie : dans tous les pays, on ne peut exercer le métier de la banque que dans le cadre d’une licence, d’une concession de service public. Mais l’épargne publique liquide a besoin d’être protégée par la loi.

Les professionnels de la finance sont initiés à la prise de risques, c’est leur métier. Le sexe entre adultes se pratique aux risques et périls des intéressés. Mais les mineurs inconscients doivent être protégés. Il est temps pour les banques de se comporter comme des banques. Pour sauvegarder les titulaires des dépôts liquides (c’est-à-dire de fonds immédiatement mobilisables), une banque ne doit être autorisée à procéder qu’à des placements sans risque et à court terme. En contrepartie de son privilège, la banque est soumise à une régulation, à des règles de prudence, à des réserves obligatoires, à des ratios de fonds propres.

Le rétablissement de la spécialisation bancaire et du cloisonnement entre métiers de la banque et métiers financiers constituera certes une distorsion de concurrence. Mais n’est-ce pas l’excès de concurrence –un cas classique d’«échec du marché » pour les économistes- qui a engendré la course à la prise de risques responsable de la situation de crise que nous connaissons ?

Too big to fail : la certitude d’être secouru par la banque centrale ou par l’État soucieux d’éviter des mouvements de panique des déposants a joué un rôle central dans les certitudes arrogantes des banques spéculatives. Si les États ont dû se porter massivement au secours des banques, c’est pour prévenir le risque de panique des clients. A contrario, la décision du Trésor américain de laisser Lehman Brothers faire faillite s’explique par le souci de faire un exemple : une « pédagogie » au prix exorbitant… Dès lors, il est légitime d’imposer aux banques une contrainte de spécialisation et de prohiber la prise de risques.

Le démantèlement des abus de position dominante constitue l’outil classique d’une politique antitrust. N’est-ce pas grâce aux subventions croisées créées par leurs activités de banque de détail que les banques de marché ont pu prendre autant de risques en mobilisant de telles sommes ? Et qu’elles ont engendré une vague spéculative d’aussi grande ampleur ?

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La nécessité d’un Glass-Steagall Act globalÀ une finance globalisée, il faut une règle globale s’appliquant partout avec la même

force. La coordination internationale est essentielle afin de garantir les conditions de compétition équitables entre les places financières et de prévenir la course au moins-disant réglementaire.

La réponse alternative aux maux symétriques de la régulation et de l’autorégulation, c’est la ségrégation (la « muraille de Chine » dans le langage de l’antitrust) entre, d’un côté, la finance de marché, domaine de la libre transaction des titres et de la prise de risque, réservée aux professionnels et, de l’autre, la gestion déléguée du service public de la monnaie –en veillant à empêcher que l’on ne joue au casino avec l’épargne publique des dépôts à vue.

La loi bancaire globale prendra la forme d’un traité international souscrit par l’ensemble des nations souveraines. Dans tous les pays, les banques sont des entreprises régulées étroitement surveillées par leurs banques centrales garantes de la monnaie. La régulation bancaire est donc déjà installée. Il n’est nul besoin d’institution nouvelle : la régulation bancaire n’a besoin que d’être coordonnée au niveau international.

Il est vrai que les restructurations imposées par la crise vont actuellement en sens inverse de cette préconisation. Pour sauver le système, on adosse les banques d’investissement et les maisons de titres en faillite à la garantie offerte par les immenses ressources monétaires des grandes banques commerciales. On entend les banques européennes se targuer d’être mieux garanties du fait de leur adossement aux ressources des dépôts monétaires. Comme le défunt Crédit lyonnais ? Mais ne risque-t-on pas dès lors de faire couler tout le monde ? Attention à la panique de clients déjà pressurés de commissions en tout genre pour rétablir les profits bancaires.

Peut-être faut-il agir ainsi pour pallier le risque des faillites et des paniques en chaîne. Mais, demain, comment reconstruire la finance mondiale sur des bases saines ?

Il faut distinguer les solutions d’urgence (comme l’adossement des acteurs financiers pour passer la crise) des réformes de structure (la déconsolidation et la séparation entre activités de dépôt et activités de placement des banques) qui visent la stabilité sur le long terme. Les professions financières de leur côté multiplient les avertissements : les propositions révolutionnaires risqueraient de susciter la défiance des marchés c’est-à-dire la leur- et d’handicaper la relance…

Déjà, d’ailleurs, le démantèlement des holdings multimétiers s’est amorcé de manière naturelle. Sous l’impact du deleveraging en catastrophe auquel elles sont contraintes, de grandes banques universelles parmi les plus touchées se séparent de leurs filiales banques, ou de leurs assurances, ou bien encore de leurs maisons de titres. Comme après 1929, au lendemain de l’adoption du Glass-Steagall Act. La profession ne saurait dès lors trop s’émouvoir d’une déconsolidation imposée par une loi mondiale qui assurera à toutes les places l’égalité des conditions de la concurrence.

Le régime Glass-Steagall qui a régi Wall Street de 1933 à 1999 fut-il vraiment un handicap pour la croissance et la globalisation ? On peut faire confiance aux marchés financiers pour rétablir les mécanismes de financement du risque sous le nouveau régime de spécialisation bancaire, mais, cette fois, dans la transparence et sans les excès.

L’opportunité est là pour engager une réforme, alors que la crise financière a décrédibilisé Wall Street et l’élection américaine annoncée fait bouger les lignes politico-idéologiques. Une alliance se dessine entre la gauche américaine (l’administration Obama) et l’Europe organisée autour de l’axe franco-allemand.

La France qui lors du Sommet de l’Élysée (en octobre 2008), a conçu et fait adopter dans l’urgence le schéma de sauvetage des banques européennes auquel les États-Unis ont fini par se rallier est en bonne place pour parler avec autorité lors du prochain G20, et au-delà. L’Amérique, qui demeure la puissance de référence, n’est plus en position de dicter ses

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conditions et doit composer avec le multilatéralisme. La City et Wall Street sont en rivalité pour continuer d’attirer la commerce financier. Enfin, les nations productives, championnes de l’économie réelle et des exportations industrielles que sont l’Allemagne, la Chine et les grands émergents veulent occuper pleinement la place qui leur revient dans le système financier mondial.

Pages 33 à 42 article de Céline Antonin et Vincent Touzé, « Europe bancaire : l’union faut-elle la force ? », l’OFCE Les Notes N°46, 18 novembre 2014.Introduction de Problèmes économiques :La crise bancaire de 2008 a constitué un choc considérable pour le système bancaire européen. Celle-ci en a en effet révélé toutes les fragilités. À la suite du sommet européen de juin 2012 est né le projet d’Union bancaire. Cette dernière, qui est mise en place progressivement à partir de l’autonome 2014, s’inscrit dans un processus d’intégration financière dont les prémices figuraient déjà dans le Traité de Rome en 1957. L’objectif de l’Union est de rompre le lien entre crise bancaire et dette souveraine en permettant une recapitalisation directe des banques en difficulté par le Mécanisme européen de stabilité, de prévenir les paniques bancaires et d’éviter la fragmentation des marchés bancaires dans la zone euro. Elle s’organise autour de trois piliers : le Mécanisme de supervision unique (MSU) –nouvelle mission assurée par la Banque centrale européenne (BCE)-, le Mécanisme de résolution unique (MRU), qui doit permettre la résolution des défaillances bancaires, et le Système unique de garantie des dépôts, dispositif qui réaffirme la protection des dépôts jusqu’à 100 000 euros.

Article téléchargeable : https://www.ofce.fr/pdf/notes/2014/note46.pdf

Références complémentaires sur Bâle III :https://acpr.banque-france.fr/international/les-grands-enjeux/les-accords-de-bale/bale-iii.html

Document 4 : Comment fonctionnent les banques. Site : la finance pour tous.http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Dossiers/Banque/La-banque-comment-ca-marche/Depots-credits-et-creation-monetaire

Dépôts, crédits et création monétaireLes banques collectent les dépôts, notamment les dépôts à vue, gèrent les moyens de paiement du public et accordent des crédits aux entreprises et aux particuliers.Mais au fait comment ça marche ?

La banque recueille des dépôts et sert de caissier à la clientèleExaminons ses ressourcesSoit la banque lafinancepourtous. Comme n’importe quelle entreprise elle dispose d’un capital permanent constitué par des actions qu'elle a émises et des bénéfices qu’elle met en réserve. Elle dispose également des ressources correspondant aux obligations et autres titres financiers souscrits par les investisseurs.Mais une bonne partie des ressources courantes de la banque est constituée par les dépôts de la clientèle. Ces dépôts collectés par les banques constituent pour ceux qui déposent un avoir, une créance, et pour les banques une dette à l’égard des déposants. Les dépôts sont liquides ou quasi liquides (à vue ou à terme). Ils sont effectués par des particuliers, des entreprises, des associations, des collectivités publiques.

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Les dépôts comment ça marche ?La banque est le caissier de ses clients. La collecte des dépôts implique que la banque exécute les ordres de paiement et d’encaissement de ses clients. Les paiements effectués par les clients de la banque lafinancepourtous réduisent les dépôts auprès de cette banque et donc ses ressources. Ils augmentent les dépôts de clients d’autres banques à qui sont versés ces paiements et donc également les ressources courantes de ces banques.Ils peuvent aussi ne pas avoir d’influence sur les ressources de la banque lafinancepourtous si le paiement est effectué à un client de cette même banque. Et inversement en cas d’encaissement de clients de la banque lafinancepourtous.Chaque jour, chaque banque fait le bilan des paiements effectués par ses clients. Et les banques échangent les paiements qui correspondent à des mouvements de fonds de l’une vers l’autre. Elles n’ont plus à payer entre elles que le solde net des mouvements qui peut être selon les cas dû ou à recevoir.C’est ce qu’on appelle la « compensation » (clearing en anglais) organisée sous l’égide de la banque centrale dans une chambre de compensation (société qui intervient comme contrepartie centrale unique s'interposant entre le vendeur et l'acheteur, garantissant le bon déroulement des transactions.) dont sont membres les banques et les institutions financières autorisées.Au total, ce qui caractérise ces ressources constituées par les dépôts de ses clients, c’est qu'elles sont toujours disponibles ou presque pour les clients. Ce sont des actifs liquides  

Et en même temps, ce sont en moyenne et en principe des ressources relativement stables, une fois les compensations entre paiements et encaissements effectuées.

La banque fait des créditsExaminons maintenant les actifs (les emplois) de la banque et plus particulièrement les crédits qu'elle fait.Elle prête de l’argent à qui en a besoin pour financer sa trésorerie ou ses projets. (Pour ses autres activités, voir article " Intermédiaire dans le financement du marché ")

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Ce qui caractérise ces crédits, c’est que : En prêtant, la banque prend toujours un risque : celui de ne pas être remboursé. Cela dépend

des revenus futurs de l’emprunteur. Il y a donc un pari sur l’avenir. Les prêts sur lesquels les emprunteurs paient un intérêt sont remboursés parfois en une fois

(découverts). Ou bien ils sont remboursés petit à petit en fonction de la longueur du prêt et de son montant (par amortissements successifs).

Pour se protéger contre les risques, la banque prend des garanties : elle exige, en cas de non remboursement, qui constituerait pour elle une dévalorisation de son actif et une perte sèche, de pouvoir vendre un bien qui est mis en garantie ou d'avoir l’assurance que quelqu’un d’autre remboursera à la place de l’emprunteur (notion d’hypothèque et de caution).

D’un côté, en collectant les dépôts, les banques drainent une partie des ressources de ceux qui ont une capacité de financement c'est-à-dire ceux dont l’épargne est supérieure à leurs dépenses d’investissements matériels. Inversement, en faisant crédit, les banques mettent des ressources à disposition de ceux qui ont un besoin de financement. La banque joue alors un rôle d’intermédiaire entre les agents qui ont des capacités de financement et les agents qui ont des besoins de financement. On dit que « les dépôts font les crédits ».Les dépôts collectés par les banques sont liquides à court terme, alors que les prêts qu'elles accordent sont à plus long terme. Ce qui répond au besoin des emprunteurs et a une grande utilité économique. Cette asymétrie place les banques dans une situation très particulière (Voir article "les banques ne sont pas des entreprises tout à fait comme les autres" ). On dit que les banques font de la transformation.

Un déposant peut-il savoir à quels crédits sont utilisés les dépôts qu’il a effectués à la banque lafinancepourtous ?Parfois ouiDans certains cas, oui on peut savoir à quoi servent les dépôts que l’on a effectués.L'argent collecté sur le livret A sert à financer le logement social.La plus grande partie de l'argent collecté sur les livrets A est transférée à la Caisse des dépôts et consignations. Celle-ci paie aux banques le montant des intérêts servis aux épargnants plus une commission pour couvrir leurs frais (0,6 %). La Caisse des dépôts utilise une partie de cet argent à des prêts à long terme, voire à très long terme destinés au logement social et place le reste sur les marchés financiers (dans des placements principalement sans risque et avec une liquidité suffisante pour garantir que les sommes nécessaires seront toujours disponibles pour les retraits des épargnants).Un mécanisme similaire existe avec le livret de développement durable dont les ressources servent à financer le développement industriel et le développement durable.Souvent nonMais en règle générale, on ne peut pas savoir à quels financements servent ses dépôts bancaires personnels. Ce que l’on peut savoir, c’est globalement ce que la banque a effectué

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comme prêts à partir de l’ensemble de ses ressources, dont vos dépôts constituent une composante.Un peu comme pour l’électricité que vous consommez : sauf si vous la produisez vous-même, impossible de savoir si celle que vous consommez à un instant T a été produite dans une centrale à gaz, une centrale nucléaire ou un champ d’éoliennes.De plus, la banque ne fait pas simplement des crédits en utilisant les dépôts déjà existants.

La création monétaireUne banque peut aussi créer de la monnaie. Elle accorde un crédit et crédite du même montant le compte de dépôt de l’emprunteur. Celui-ci pourra l’utiliser pour payer ses fournisseurs ou le bien qu’il souhaite acheter grâce au crédit. On dit alors que « les crédits font les dépôts ».Le remboursement du crédit aboutira de façon symétrique à une destruction de la monnaie créée.

Tous les crédits ne donnent pas lieu à de la création monétaire. Lorsque des établissements financiers spécialisés (par exemple spécialisé dans le crédit à la consommation), qui ne sont pas habilités à recevoir des dépôts accordent un crédit, ils ne peuvent le faire que parce qu’ils sont préalablement financés et non pas en créant de la monnaie. Seules les banques qui gèrent les dépôts ont le pouvoir de création monétaire. Mais tous les crédits attribués ne donnent pas lieu à création monétaire.

Les banques peuvent-elles prêter sans limites ?Non, et ceci pour plusieurs raisons :Une banque doit faire face à ses engagementsElle doit avoir continuellement les ressources suffisantes pour faire face aux décaissements sur les dépôts de ses clients.En outre, la partie "crédits" de ses actifs n'est pas liquide. La banque ne peut espérer être remboursée avant le terme du crédit. Et si elle doit faire face à des déposants, elle pourra se retrouver en difficulté.S’ajoutent les risques pris sur les crédits qui peuvent se traduire en perte sèche correspondant au montant du capital non remboursé beaucoup plus importantes que les bénéfices obtenus d’un emprunt remboursé.En cas de situation financière difficile du débiteurLorsque la situation financière du débiteur est irrémédiablement compromise ou si le prêt sert à financer un projet trop ambitieux ou à rentabilité future insuffisante, voilà qui peut mettre en difficulté la banque concernée mais aussi l’économie en général (inflation, bulle, risque de difficultés en chaine pour les banques). C’est pourquoi la réglementation et la politique monétaire  limitent la capacité de prêts des banques.

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Or, les crédits génèrent eux-mêmes des décaissements (le crédit a pour but un achat qui donne lieu à un paiement). Chaque banque doit donc veiller à garder un équilibre satisfaisant entre ses crédits et ses dépôts.Quand ses ressources sont insuffisantes elle doit en trouverElle emprunte aux autres banques. Et quand elle a du « disponible », elle peut en prêter.C’est ce qu’on appelle le marché interbancaire réservé aux établissements de crédit qui échangent entre eux des actifs financiers et empruntent ou prêtent à court terme. La Banque Centrale y intervient également pour apporter ou reprendre des liquidités.Les taux d’intérêts pratiqués sur ce marché pour la zone euro sont connus sous le nom d’Eonia pour les prêts au jour le jour et d’Euribor pour les prêts allant de 1 mois à 1 an.Mais cela a des limites du fait du coût de ces emprunts et de la capacité de prêt des autres banques. Dans ces conditions, les prêts que la banque effectue finissent par devenir de moins en moins rentables.

EN SAVOIR PLUSNotre dossier sur la création monétaire

Créé le 12 février 2010 - Dernière mise à jour le 06 juillet 2017http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Dossiers/Banque/La-banque-a-quoi-ca-sert

La banque à quoi ça sert ?La banque remplit une multitude de fonctions, depuis la gestion des moyens de paiement, jusqu’à l’octroi de crédits immobiliers.La première des fonctions de la banque, la plus concrète, c’est celle de gérer les moyens de paiement . A ce jour, seules les banques peuvent rendre ce service.Autre fonction, celle d’assurer la sécurité des transactions financières malgré la dématérialisation des titres. Il faut que le vendeur soit bien payé pour le titre vendu, l’acheteur débité pour l’achat et les titres en sécurité.Troisième grande fonction, celle d'accorder des crédits. En France, l’activité de crédit est très encadrée et ne peut être exercée que par quelques établissements habilités et selon des modalités elles aussi contrôlées.Quatrième rôle des banques : drainer l’épargne. Une partie de l’épargne sert à consentir des crédits. Une autre partie est placée pour votre compte dans des produits financiers. Les banques n’ont pas le monopole de cette fonction mais elles sont de plus en plus présentes dans ce secteur, à la fois parce qu’elles distribuent des produits de plus en plus nombreux et variés et parce qu’elles sont organisées en groupes qui intègrent toutes les fonctions.Cinquième rôle très important, lié au précédent : pour gérer votre épargne, la banque sert d’ intermédiaire sur les marchés financiers .Enfin, dernière grande fonction assumée par les banques : le conseil . Il faut distinguer le conseil aux particuliers et le conseil aux entreprises . Le premier est rarement payant (sauf s’agissant de très grosses fortunes) et a été  imposé progressivement aux banques par les tribunaux et la loi. Mais le conseil aux entreprises est une activité bien plus importante et lucrative ; il existe même des banques qui ne vivent que de ça...Créé le 15 février 2010 - Dernière mise à jour le 12 janvier 2017© IEFP – la finance pour tous

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http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Dossiers/Banque/Fiche-d-identite-du-secteurFiche d’identité du secteurCommençons par quelques chiffres : avec environ 472 établissements de crédit, le secteur bancaire emploie environ 372 000 personnes dans l’hexagone. C’est le troisième employeur privé français. Il représente un peu moins de 3 % du PIB. (source FBF).Partout les systèmes bancaires et financiers ont connu en quelques décennies une véritable mutation.La banque universelle a notamment émergé dans plusieurs pays et elle est au cœur du système français. La structure des systèmes bancaires reste cependant marquée par des différences importantes, notamment entre les Etats-Unis où le recours au financement par les marchés l’emporte très largement et l’Europe continentale où le recours au financement par les crédits bancaires est resté prédominant.Créé le 15 février 2010 - Dernière mise à jour le 12 janvier 2017Un secteur très contrôlé : pourquoi et comment ?Le secteur bancaire a toujours été contrôlé. Mais la crise financière de 2008 a révélé les failles du système de régulation à l’échelle nationale comme à l’échelle internationale.Créé le 12 février 2010 - Dernière mise à jour le 12 janvier 2017© IEFP – la finance pour tous

http://www.lafinancepourtous.com/Decryptages/Mots-de-la-finance/Banque-d-investissementBanque d’investissementOn lit dans la presse que la crise financière actuelle marque la fin du modèle des banques d’investissement indépendantes. Mais qu’est-ce qu’une banque d’investissement, que fait-elle de si singulier ? Mon chargé de clientèle appartient-il à une banque d’investissement ? Est-il menacé par la mort programmée des banques d’investissement ?Pour comprendre ce qu’est une banque d’investissement, il faut d’abord savoir ce qu’elle ne fait pas. Elle ne reçoit pas les dépôts des particuliers. Avant sa faillite, vous n’auriez pas pu ouvrir un compte chez Lehman Brothers ; vous ne le pouvez pas davantage chez Goldman Sachs ou JP Morgan, ni en France chez Natixis ou Calyon, filiales de grands groupes connus. La banque a bien des clients, mais il s’agit essentiellement d’entreprises et d’investisseurs qui recherchent, soit à se financer soit à placer leurs liquidités. Ne recevant pas de dépôts des particuliers, les banques d’investissement indépendantes recherchent la liquidité auprès des autres banques, ou de la Banque centrale, ce qui explique en partie qu’en cas de crise de liquidité, elles soient les premières touchées.Les banques d’investissement ont essentiellement trois types d’activités.Le premier est hérité des banques dites d’affaires DÉFINITION Initialement spécialisées dans l’accompagnement des entreprises (activités de conseil, et notamment en fusion-acquisition), les banques dites d’affaires sont aujourd’hui la plupart du temps également engagées dans des activités de marché (augmentation de capital, placement d’obligations, titrisation), qui étaient auparavant l’apanage des banques dites d’investissement . La distinction entre banque d’affaires et banque d’investissement n’est dès lors plus guère opérationnelle.DÉFINITION Initialement spécialisées dans l’accompagnement des entreprises (activités de conseil, et notamment en fusion-acquisition), les banques dites d’affaires sont aujourd’hui la plupart du temps également engagées dans des activités de marché (augmentation de capital,

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placement d’obligations, titrisation), qui étaient auparavant l’apanage des banques dites d’investissement . La distinction entre banque d’affaires et banque d’investissement n’est dès lors plus guère opérationnelle.et consiste à faire du conseil, notamment en fusion-acquisition.L’autre ensemble d’activités est lié au financement des entreprises. Les banques d’investissement organisent les augmentations de capital, les introductions en bourse, le lancement d’emprunts obligataires.Enfin, le troisième type d’activités vise à trouver les placements financiers ou les couvertures les plus rentables. La banque sert d’intermédiaire à ses clients sur les marchés financiers et sur les marchés des changes. Un fonds d’investissement recherche une rentabilité maximum avec un fort effet de levier ? La banque l’accompagne dans un LBO, ou conçoit des produits complexes utilisant notamment des dérivésDÉFINITION Produits financiers complexes qui sont liés à (ou « dérivent de ») d'autres actifs (actions, obligations, matières premières, indice,...) qualifiés de sous-jacents. Ils donnent le droit, ou dans certains cas l’obligation, d’acheter ou de vendre le sous-jacent à un prix défini à l’avance. Les principaux dérivés sont les options, les contrats à terme, les swaps et les dérivés de crédit.DÉFINITION Produits financiers complexes qui sont liés à (ou « dérivent de ») d'autres actifs (actions, obligations, matières premières, indice,...) qualifiés de sous-jacents. Ils donnent le droit, ou dans certains cas l’obligation, d’acheter ou de vendre le sous-jacent à un prix défini à l’avance. Les principaux dérivés sont les options, les contrats à terme, les swaps et les dérivés de crédit parfois intégrés dans des véhicules de titrisation .Ces activités ont été extrêmement rentables ces dernières années, ce qui explique qu’en France, même les banques traditionnellement de détail s’y soient mises, au travers de filiales parfois distinctes, mais toujours rattachées à leur maison-mère.Pourquoi une telle rentabilité ? Sans doute parce que tout le monde y croyait, la confiance étant un élément clé dans ces matières. Et certainement aussi parce que l’activité était risquée, et, comme on le sait, le rendement est lié au risque. Mais tout le monde avait oublié ou minimisé les risques liés à l’utilisation d’outils complexes comme les dérivés de crédit. DÉFINITION Il s’agit de produits financiers dérivés, dont le « sous-jacent » est un actif de type crédit, c'est-à-dire une créance ou une obligation. Ce produit permet aux banques de transférer le risque (et tout ou partie des revenus !) relatifs au crédit, sans transférer l'actif lui-même.L'utilisation des dérivés de crédit a d’abord permis aux banques de diversifier leurs portefeuilles de crédit. Ainsi deux banques, l'une spécialisée dans le crédit au secteur internet, l'autre dans le crédit à l'industrie, peuvent acheter chacune une part des revenus liés au portefeuille de l'autre. Chacune diversifie ainsi les risques encourus, en bénéficiant de plus de l'expertise de sa contrepartie dans son domaine de compétences. Ces instruments sont devenus de plus en plus sophistiqués. On trouve aujourd’hui toutes sortes de dérivés de crédit, qui portent des noms anglo-saxons, à commencer par les swaps (« credit defaut swap », CDS, CDO…) Ils sont au cœur de la crise des subprimes , qu’ils aient ou non été logés dans des véhicules ad hoc de titrisation, qu’ils aient été utilisés que par les prêteurs (qui veulent sortir leurs risques de crédit) ou les emprunteurs (qui veulent se couvrir contre d'éventuelles fluctuations des conditions de marché qui pourraient amener une dégradation de leurs conditions de financement). Ces dérivés de crédit ont eux-mêmes été garantis par des rehausseurs de crédit et la titrisation , dont l’objet même était de sortir les risques du bilan des banques. Sortis de leurs bilans, mais revenus en boomerang affecter le bilan des banques d’investissement jusqu’à provoquer la faillite ou la disparition des plus connues d’entre elles.

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Document 5 : extraits de Jézabel Couppey-Soubeyran, « Comment (dys)fonctionnent les banques ? », in Problèmes économiques, HS 7, Comprendre l’économie, concepts et mécanismes, La Documentation française, Février 2015.

Comment (dys)fonctionnent les banques ?À quoi servent les banques ? Comment ont-elles fait évoluer leurs activités au cours des dernières décennies ? Sont-elles responsables de la crise ? Les réformes parviendront-elles à renforcer la sécurité du secteur et à le remettre au service de l’économie réelle ? Autant de questions déterminantes pour l’avenir des banques européennes et pour la croissance de nos économies.

À quoi sert une banque ?En théorie, la banque remplit trois fonctions essentielles. Elle collecte, gère les dépôts des clients et leur fournit des moyens de paiement (chéquier, carte bancaire, ordre de virement…). Elle gère aussi leur épargne et réduit les risques qui s’y rapportent en les mutualisant. Enfin, elle finance leurs projets d’investissement ainsi que ceux des entreprises.Ces trois fonctions sont absolument indispensables pour le bon fonctionnement de l’économie. Si les moyens de paiement venaient à manquer ou si les dépôts ne pouvaient plus circuler, les échanges seraient rapidement empêchés. Et si les épargnants n’avaient pas d’intermédiaire à qui confier leur épargne, leur épargne financière s’en trouverait sans doute réduite et moins bien orientée vers le financement des entreprises. Sans les banques, il serait aussi beaucoup plus difficile pour les ménages et de nombreuses entreprises de financer leurs projets qu’en s’autofinançant.Les crédits bancaires sont également vitaux pour les petites et moyennes entreprises (PME), en raison d’un accès aux marchés financiers limité ou inadapté. Et même pour les grandes entreprises qui se financent sur les marchés des titres, ce sont souvent les banques, qui, en bout de chaîne, détiennent une partie des titres émis. Au total, les financements bancaires au sens large (qu’il s’agisse des crédits octroyés ou des titres que les banques détiennent sur les entreprises émettrices) représentent encore 70 % du financement externe des entreprises en Europe.En pratique, les banques exercent plusieurs types de métiers plus ou moins orientés vers les particuliers et les entreprises.Les services de banque de détail (ou banque commerciale) s’adressent à une clientèle de particuliers et de PME et consistent à gérer des dépôts, fournir des moyens de paiement –chéquier, carte bancaire, virement…- et octroyer des crédits.Les services de banque de financement et d’investissement (BFI) s’adressent à une clientèle de très grandes entreprises et leur permettent de réaliser des transactions sur les marchés financiers.Au-delà, les banques ont élargi leurs services à la gestion d’actifs consistant à gérer des portefeuilles de titres et d’OPCVM pour le compte de clients épargnants ou d’entreprises. La plupart des groupes bancaires français offrent aussi des services d’assurance : c’est la bancassurance.Depuis la fin des années 1990, en France tout particulièrement, mais plus largement aussi dans la plupart des autres pays d’Europe, ces métiers sont le plus souvent logés sous un même toit, celui de la banque dite « universelle ». Ses mérites sont débattus. Certains y voient une structure productive plus efficace, permettant de réaliser des économies d’échelle (un coût moyen plus faible grâce à une échelle d’activité plus grande) et d’envergure (un moindre coût global en produisant plusieurs services ensemble plutôt que séparément). Les études empiriques sont toutefois loin d’être unanimes sur le sujet. Et pour d’autres, au contraire, la banque universelle additionne les risques de la banque de détail et de la banque

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d’investissement, met en danger les dépôts en les exposant aux risques de turbulence des marchés financiers et crée des conflits d’intérêt entre les deux métiers.

Comment les banques ont-elles fait évoluer leur activité depuis les années 1980-1990 ?Les banques ont considérablement fait évoluer leur activité depuis la fin des années 1980. Les années 1990-2000 ont vu ces changements s’accélérer. La principale transformation réside dans un adossement de plus en plus important aux marchés de capitaux. Cela a profondément modifié tant la taille que la structure des bilans des banques.Jetons un coup d’œil pour commencer sur la structure, c’est-à-dire la composition des bilans bancaires. Au passif, la part des ressources de marché s’est accrue au cours des dernières décennies, tandis que celle des dépôts s’est réduite (sur ce terrain, les banques françaises ont subi la concurrence des assurances-vie et des SICAV monétaires, ainsi que celle de leurs propres filiales). À l’actif, les activités de marché ont gagné du terrain sur les activités plus traditionnelles de prêts. Dans les grandes banques universelles cotées en bourse, les prêts à la clientèle de proximité ne représentent plus qu’un gros tiers de l’activité, amplement déployée à l’étranger sur les marchés de titres et de produits dérivés. Les banques mutualistes ont, en revanche, maintenu leurs activités de détail, ce qui les complexait avant la crise, et au contraire aujourd’hui rassure leur clientèle.Ce faisant, c’est aussi la structure des revenus des banques qui a changé. Les métiers exercés par les banques engendrent deux principaux types de revenus : des intérêts et des commissions. Quand la banque octroie un crédit, elle fait payer à l’emprunteur un taux débiteur. La banque paie elle-même des intérêts quand elle se procure des ressources monétaires nécessaires à son refinancement et rémunère l’épargne de ses clients. Ces services de banque de détail sont très rémunérateurs en commissions : la banque facture ainsi notamment ses services de gestion de compte et de mise à disposition des moyens de paiement. Dans ses activités d’investissement et de financement, la banque perçoit aussi des commissions (conseils aux entreprises pour s’introduire en bourse, réaliser des fusions-acquisitions…) et des intérêts (crédits, achat de titres…). Le produit net bancaire (PNB) mesure l’ensemble de ces revenus, nets des charges de financement associés aux activités de la banque : c’est le chiffre d’affaires de la banque.Le PNB se répartit ainsi entre une marge d’intérêts et des commissions. Que sait-on de cette répartition ? Comparés aux autres grandes banques européennes, les revenus des grandes banques françaises proviennent relativement moins de la marge d’intérêt (environ 50 % du PNB des banques françaises contre 60 à 65 % pour près de la moitié des grandes banques européennes), et relativement plus de commissions (environ 30 % du PNB des banques françaises contre 20 à 25 % pour la moitié des grandes banques européennes). Au sein des activités de détail, qui représentent elles-mêmes environ 70 % du PNB total de l’ensemble des banques françaises, les commissions clients représentent entre 40 % et 50 % du PNB.Si l’essor des activités de marché a largement contribué à l’essor des commissions, il faut souligner que les activités de détail ne sont pas en reste en la matière. Les services facturés à la clientèle de détail concernent principalement la gestion de compte (mise à disposition de moyens de paiement : chéquier, carte bancaire, virement…) et l’octroi de crédits. La part des commissions dans les revenus d’activité des banques a fortement augmenté depuis les années 1990, en particulier celles qui se rapportent à la gestion de comptes et aux moyens de paiement. Alors même que l’activité de détail a vu sa part diminuer dans les bilans bancaires jusqu’à la crise, les revenus qui en sont issus ont continué de croître, du fait de l’augmentation des frais bancaires. Cette hausse ne s’est sensiblement ralentie que depuis la crise.Toutes ces activités et les revenus qui s’y rapportent sont, pour une part qui a significativement augmenté, réalisés à l’étranger. En ce qui concerne les banques françaises,

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par exemple, BNP réalise 68 % de son chiffre d’affaires en dehors de la France, Société générale 57 %, Crédit agricole 34 % et Natixis 47 %.Enfin, outre la structure, c’est la taille des bilans bancaires qui a radicalement changé. Les banques universelles européennes sont devenues extraordinairement grosses. Cela a été parfaitement bien illustré par le rapport Liikanen en 2012, et plus récemment par le rapport du comité européen du risque systémique (ESRB), en juin 2014 : les grands groupes bancaires européens pèsent chacun, en total de bilan, à peu près l’équivalent du PIB de leur pays d’origine. Plus généralement, la taille des bilans bancaires a triplé, voire quadruplé dans les principaux pays de l’OCDE entre le début des années 1990 et la veille de la crise.

Les raisons d’un tel essorL’expansion de l’activité des banques doit beaucoup à la capacité décuplée qu’elles ont eu de prendre des risques au tournant des années 1990-2000. D’abord, elles ont profité des marchés et des intermédiaires non bancaires pour leur transférer les risques qu’auparavant elles conservaient, soit par la titrisation, soit en achetant des protections (les dérivés de crédit permettent de transférer le risque de défaut des emprunteurs). Or, quand on n’a plus besoin d’assumer les risques pris, on en prend davantage ! Ce n’est pas seulement dans les activités de marché que les banques ont pris plus de risque, c’est aussi dans leur traditionnelle activité de crédit. Et ce n’est pas qu’aux États-Unis, la patrie du crédit subprime, que le crédit s’est emballé.Tout cela s’est opéré dans un contexte très permissif. D’abord au niveau de la politique monétaire, très accommodante à partir du début des années 2000 (suite au krach Internet de 2000, puis aux attentats du 11 septembre 2001) : les banques ont bénéficié du niveau bas des taux d’intérêt. Ensuite, au niveau de la régulation financière. Les activités de marché des banques ont été jusqu’à la crise trop peu exigeantes en fonds propres (et sans aucun garde-fou en matière de liquidité). Les activités de crédit l’étaient davantage mais la titrisation d’un côté, les modèles internes de l’autre ont permis aux banques de desserrer la contrainte, tout en nourrissant un formidable excès de confiance. Cette prise de risque accrue est bien entendu l’un des facteurs de la crise actuelle. En prenant du poids, de nombreux groupes bancaires sont devenus systémiques. L’Europe compte à peu près la moitié des 29 banques systémiques listées par le conseil de stabilité financière (Financial Stability Board). Concrètement, même si la taille n’est pas l’unique critère de systémicité, plus le bilan d’une banque pèse lourd, plus les dommages collatéraux en cas de faillite sont importants : beaucoup d’entreprises se retrouveront à court de financement, beaucoup de déposants à court de moyens de paiement, d’autres banques seront touchées à leur tour sur le marché interbancaire, etc. C’est pourquoi les pouvoirs publics se refusent à laisser tomber une banque si elle est trop importante. Le principe « too big to fail » (TBTF) part d’une bonne intention : éviter le risque systémique que la faillite d’un grand établissement ferait courir. Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions ! Comme les investisseurs et les agences de notation accordent de la valeur à cette garantie de sauvetage, les banques TBTF sont mieux notées et s’endettent à moindre taux. C’est comme si elles recevaient une subvention des pouvoirs publics. Le FMI a estimé le montant pour celles des pays de la zone euro : entre 90 et 300 milliards de dollars en 2011-2012.Et grâce à cette subvention implicite, une banque TBTF peut encore se développer. Plus elle croît, plus les pouvoirs publics veulent éviter qu’elle ne tombe, plus elle est donc subventionnée. Un formidable cercle vicieux dont nos gouvernements peinent à sortir d’autant plus qu’ils ont eux-mêmes encouragé la formation de grands établissements qu’ils voient (et défendent) comme leurs champions nationaux.

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Un secteur bancaire plus gros contribue-t-il davantage à l’économie réelle ?Le secteur bancaire a grossi, au point que le total des actifs qu’il gère représente près de quatre fois la création de richesse annuelle d’un pays comme la France, six fois au Royaume-Uni, trois fois en Allemagne. Sans même parler de ce qu’il est dans les paradis fiscaux européens : 24 fois le PIB au Luxembourg, huit fois en Irlande et à Malte, près de sept fois à Chypre. Dans les années 1990, de nombreuses études empiriques montraient un lien positif fort entre finance et croissance. Depuis la crise, elles parviennent à un résultat bien plus mitigé : la finance profite à la croissance jusqu’à un certain seuil seulement, au-delà duquel la relation devient négative. Ce seuil, souvent mesuré en rapportant le crédit au PIB (qui mesure le flux de richesses créée en un an dans un pays), serait de l’ordre de 110 % dans les pays avancés. Le fait est qu’il est dépassé à peu près partout dans ces pays.Le crédit s’est emballé, c’est un fait, et il n’a pas contribué comme il aurait dû à l’économie réelle. Cela peut sembler paradoxal. Cela l’est moins dès que l’on essaie d’identifier la destination des crédits avant la crise. Quand le crédit coulait à flot avant la crise que finançait-il ? L’immobilier pour une grande part, la consommation également, mais l’investissement des entreprises… fort peu. C’est là un point à souligner, d’autant que la crise n’a guère changé les choses en la matière. Les crédits aux entreprises représentent ainsi à peine 10 % du bilan agrégé du secteur bancaire français, ceux aux PME à peine 5 %.En se développant, les banques n’ont donc pas forcément contribué davantage à l’économie réelle. Elles sont aussi devenues plus fragiles car elles ont financé leur croissance par la dette, contractée à des échéances de plus en plus courtes. De quoi se retrouver subitement à cours de liquidité et dans l’incapacité d’éponger par elles-mêmes des pertes éventuelles. Les exigences de fonds propres que les régulateurs ont imposées aux banques à partir de la fin des années 1980 (accords de Bâle 1 puis Bâle 2 avant ceux plus conséquents de Bâle 3), sous la forme d’un ratio pondéré par les risques, ne les a pas empêchées d’accroître considérablement leur levier d’actif. Tout en satisfaisant l’exigence réglementaire de fonds propres, les banques européennes ont fonctionné avec en moyenne 97 % de dette à leur bilan (soit une part de fonds propres en pourcentage de leur actif total –sans les pondérations- de l’ordre de 3 %). Cet écart constaté au niveau des grands groupes entre ratio de solvabilité standard et ratio de levier (fonds propres sur actif total) ou, ce qui revient au même, entre actif total et actifs pondérés par les risques (risk weignted assets- RWA) est vérifiable dans les résultats de l’évaluation globale des bilans à laquelle a procédé la Banque centrale européenne. Ce n’est toutefois pas sur cet aspect que la BCE a choisi d’axer sa communication le 26 octobre 2014… Elle a de loin préféré rassurer les marchés en insistant sur le grand nombre de banques ayant réussi le stress test. On constatera néanmoins que la solidité du secteur bancaire européen s’apprécie en des termes très différents selon la mesure que l’on retient de la solvabilité.

Aujourd’hui, en Europe, pratiquement plus aucun État n’a les moyens de sauver individuellement ses banques en cas de problème. Les superviseurs nationaux sont comme des nains face aux géants que sont devenues les banques transfrontières. L’Union bancaire arrive à point nommé ! D’une part, elle transfère la supervision des grands groupes bancaires à la bonne échelle, celle de l’Europe, du moins celle de la zone euro, en confiant la tâche à la BCE. D’autre part, elle va permettre de réintroduire progressivement l’idée même qu’une faillite, du moins un démantèlement, est possible en cas de problème.La crise bancaire et financière a coûté très cher à l’Europe : entre octobre 2008 et octobre 2012, la Commission européenne a approuvé environ 5 050 milliards d’euros d’aides d’État (aides directes et garanties de toutes sortes) en faveur des banques, ce qui représente environ 40 % du PIB de l’Union européenne. La réglementation des banques a été « un peu »

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renforcée, les marchés « un peu » réorganisés, la supervision « un peu » réagencée : « un peu » signifie que nous ne sommes pas à l’abri d’une prochaine crise.

Source : Jézabel Couppey-Soubeyran, « Comment (dys)fonctionnent les banques ? », in Problèmes économiques, HS 7, Comprendre l’économie, concepts et mécanismes, La Documentation française, Février 2015.

Complément : L’esprit des accords de BâlePourquoi réglementer les banques ?Une banque n’est pas une entreprise comme les autres. D’une part, elle investit l’argent de ses clients qui ne sont guère en capacité de lui imposer qu’elle le gère dans leur intérêt plus que dans le sien. D’autre part, la faillite d’une banque entraîne pour la collectivité des coûts bien supérieurs à ceux de n’importe quelle autre faillite d’entreprise. La difficulté d’une banque a vite fait de s’étendre à d’autres risque toutes sont liées financièrement sur le marché interbancaire. Par contagion, une faillite bancaire peut ainsi s’étendre à l’ensemble du secteur et devenir une crise systémique. De plus, le dérèglement ou pire l’interruption des services bancaires sont très paralysants pour l’économie : sans moyen de paiement et sans financement, les échanges ne peuvent se dérouler normalement. Le régulateur doit autant veiller à la protection des déposants qu’aux problèmes d’externalités qui viennent d’être mentionnés. La réglementation des banques répond à ces deux objectifs et les exigences de fonds propres en sont devenues l’instrument principal.

Risque de crédit, risques de marché et risque opérationnelLe comité de Bâle s’est en tout premier lieu préoccupé du risque de crédit. C’est le risque auquel la banque s’expose quand elle octroie un crédit. Si l’emprunteur fait défaut, la banque subit une perte. Pour absorber cette perte sans risquer elle-même de faire défaut vis-à-vis de ses créanciers, la banque doit disposer d’un capital suffisant. Exiger des banques qu’elles détiennent un montant de fonds propres proportionnel aux risques qu’elles prennent est une mesure qui permet donc de réduire le risque d’insolvabilité de la banque. La réglementation des fonds propres oblige les banques à détenir plus de fonds propres qu’elles ne s’y contraindraient par elles-mêmes.Les premiers accords de Bâle en 1988 ont recommandé l’adoption du ratio Cooke : un rapport d’au moins 8 % entre les fonds propres et les actifs exposés au risque de crédit (en pondérant ces actifs par le risque).L’activité risquée des banques ne se réduit cependant pas aux crédits accordés. De plus en plus actives sur les marchés de titres et de produits dérivés depuis le début des années 1990, les banques sont aussi exposées aux risques de marché (risque de variations du cours des titres détenus, risque de taux, risque de change…). Quant à l’incorporation des avancées technologiques dans les services bancaires, elle a renforcé le risque opérationnel (risque de panne informatique, de défaut de procédure, d’erreur humaine, de fraude, etc.). L’exigence de fonds propres a donc dû être étendue, d’abord aux risques de marché, puis au risque opérationnel avec les accords de Bâle 2.

Une organisation en trois « piliers »Trois piliers ont dès lors été définis : un pilier « exigences minimales de fonds propres » (maintenue à 8 % pour couvrir les trois catégories de risques –risque de crédit, risque de marché et risque opérationnel), un pilier « surveillance prudentielle » permettant aux superviseurs, s’ils le jugent nécessaire d’exiger plus que la norme, d’un pilier « discipline de marché » exigeant de la transparence et de la communication d’informations. Les accords de Bâle 2 ont aussi donné aux banques le choix entre une approche réglementaire standard et une

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approche dite avancée les autorisant, sous certaines conditions, à utiliser leurs modèles internes d’évaluation des risques, ce qui a permis à certaines d’entre elles de réduire sensiblement la charge en fonds propres. Les accords de Bâle 3 ont toutefois rapidement emboîté le pas du fait de la crise. Ils rehaussent en quantité et en qualité l’exigence de fonds propres non pondéré par les risques (ratio de levier) et deux ratios de liquidité pour éviter aux banques de succomber à une rupture subite de liquidité.

Source : Jézabel Couppey-Soubeyran, « Comment (dys)fonctionnent les banques ? », in Problèmes économiques, HS 7, Comprendre l’économie, concepts et mécanismes, La Documentation française, Février 2015.

Document 6 : Extraits du glossaire établi par la Banque de France, La crise financière, Documents et débats n° 2, février 2009

BRI : créée en 1930, la BRI est une organisation internationale chargée de promouvoir la coopération monétaire et financière internationale. Elle joue également le rôle de banque des banques centrales. Son mandat s’articule autour de plusieurs axes : forum de discussion et d’analyse des politiques monétaires des banques centrales, centre de recherche économique et monétaire, première contrepartie des banques centrales dans leurs transactions internationales et agent financier. Elle associe 55 banques centrales dont celles du G10. Plusieurs comités et organisations voués à la stabilité monétaire et financière ou au système financier international ont été institués en son sein comme le Comité de Bâle et le CGFS (Committee on the Global Financial System) ou y disposent de leur secrétariat.

Le Comité de Bâle se réunit quatre fois par an et a quatre missions : Le renforcement de la sécurité de la fiabilité du système financier L’établissement de standards minimaux en matière de contrôle prudentiel La diffusion et la promotion des meilleures pratiques bancaires et de surveillance La promotion de la coopération internationale en matière de contrôle prudentiel.

Accords de Bâle I : dispositif établi en 1988 visant à assurer la stabilité du système bancaire international en fixant une limite minimale au montant de fonds propres des banques. Il instaure un ratio minimal fonds propres sur total des expositions portées par la banque qui doit être supérieur à 8 %. (Fonds propres : capital social d’une société augmenté des bénéfices mis en réserve. Les fonds propres sont égaux à la différence entre la valeur totale de l’actif et celle des dettes financière et d’exploitation.)Accords de Bâle II : dispositif prudentiel visant à mieux appréhender et limiter les risques des établissements de crédit. Il vise principalement le risque de crédit, les risques de marché et le risque opérationnel des banques. Agence de notation : organisme spécialisé dans l’évaluation de la solvabilité d’émetteurs de titres de dettes, soit de leur capacité à répondre à leurs engagements (remboursement du capital et intérêts).Hedge funds : fonds d’investissement non cotés à vocation spéculative qui visent un objectif de rendement absolu et qui disposent pour ce faire d’une grande liberté de gestion.

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Document 7 : « La notation financière a-t-elle toujours raison ? » Pierre Pénet, Sciences Humaines, HS Les essentiels, Les grands enjeux du monde contemporain, mars-avril 2017.

La notation du crédit est une évaluation publiée par une agence reconnue qui consiste à classer les entités financières (les banques, les États) et les instruments de dette (un prêt, une obligation) en fonction de leur degré de risque. Chaque notation contient une probabilité de défaut à court ou long terme exprimée au moyen de caractères alphanumériques : les échelles de notation utilisées par les principales agences procèdent par ordre croissant de risque de défaut, allant du plus bas (AAA) au plus haut (C ou D, selon les agences). C’est en 1909 que John Moody publie ses premiers classements. Après un développement rapide dans les années 1920-1930, la notation perd de son importance entre 1944 et 1971, une période marquée par des contrôles stricts des capitaux qui découragent les investissements risqués et rendent les transactions financières plus prévisibles. Mais, dans les années 1990, la notation du crédit redevient un intermédiaire réputationnel incontournable. La dérégulation, la titrisation, le progrès technologique et la globalisation des échanges marquent en effet le retour de l’instabilité financière, que la notation est censée prévenir. En 2015, trois grandes agences, Moody’s, Fitch et Standard & Poor’s (S&P) notent des centaines de milliers de produits financiers circulant dans plus de 100 pays et représentant 30 000 milliards de dette.La notation de la dette des États –dite « souveraine »- est un développement récent dans la longue histoire de l’endettement public. Jusqu’au début du 20ème siècle, les États s’endettaient par l’intermédiaire de grands emprunts levés auprès de la population. Lorsque les États allaient sur les marchés, les grandes banques internationales certifiaient ces émissions de dette et servaient d’intermédiaire réputationnel entre pays et investisseurs. Aujourd’hui, ce sont les agences de notation qui font ce travail en donnant une mesure du risque.

Quand la note déçoitMoody’s, Fitch et S&P ont récemment été critiquées pour avoir noté AAA des milliers d’obligations adossées à des actifs immobiliers pour le moins fragiles. Leur brutale dégradation à partir de 2007 signale le début de la crise des subprimes. Cet épisode a révélé de nombreuses défaillances dans les modèles mathématiques que les agences utilisent pour prédire les risques associés à des instruments financiers complexes. Ce défaut d’anticipation est aussi apparu dans la notation souveraine, celle des États. Ces mêmes agences n’ont pas su anticiper la crise de la dette grecque qui a débuté en octobre 2009. Cette fois, c’est l’opinion des agences concernant le « risque pays » qui est dénoncée. En effet, les agences incorporent à l’examen des données économiques d’un pays une opinion sur sa stabilité politique et sur la volonté de son gouvernement de rembourser ses dettes. Or, de nombreux analystes ont dénoncé des biais idéologiques, accusant les agences de noter plus favorablement les États mettant en œuvre des politiques publiques néolibérales. On pourrait leur objecter que les agences ne favorisent pas le néolibéralisme en tant que tel, mais simplement des politiques publiques produisant des effets mesurables à court terme. Inversement, les agences sont généralement sceptiques vis-à-vis des politiques dont les conséquences sont difficilement mesurables, portent sur le plus long terme ou dont les effets attendus ne sont pas économiques. Les États ont d’ailleurs intériorisé cette préférence car ils présentent et justifient désormais leurs choix budgétaires au moyen d’objectifs quantifiés et vérifiables à court terme.

Intérêt et politique s’emmêlentUn autre enjeu concerne les conflits d’intérêts entre les agences er les emprunteurs. Dans le cas de la notation de la dette privée, celle des entreprises par exemple, ce sont très souvent les emprunteurs qui sollicitent et rémunèrent les agences pour qu’elles attribuent une notation à leurs émissions de dette. Cela pose inévitablement un problème de conflit d’intérêts, alors

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même que les agences sont censées produire des jugements indépendants. La notation souveraine est moins soumise à la collusion, car elle est la plupart du temps non sollicitée : les États ne rémunèrent pas les agences pour la notation de leur dette. La dette souveraine non sollicitée génère des critiques différentes. Par exemple, la décision prise unilatéralement par une agence de noter un pays peut être vécue par ce pays comme un moyen de pression sur ses affaires intérieures. C’est le cas du gouvernement japonais qui, au début des années 2000, critique les agences de notation pour avoir noté sans son consentement, puis dégradé, sa dette nationale ainsi que celle de nombreuses firmes japonaises. Même refus d’ingérence en octobre 2015, lorsque la ville de Madrid justifie sa décision de rompre ses contrats avec les agences Fitch et S&P pour conduire un audit interne et indépendant de sa dette. Inversement, une agence de notation peut, pour des raisons politiques et diplomatiques, se voir empêchée de noter la dette d’un État. Ainsi, en 2002, le Trésor américain a-t-il sommé l’agence Moody’s de retirer sa note à l’Iran au titre des sanctions financières décrétées par le gouvernement américain.

Quand le moins vaut le plusLa modification des notes soulève d’autres enjeux. Quels sont les effets d’une hausse ou d’une dégradation de la notation sur le cours d’une dette ? Le changement ne produit souvent que des effets négligeables sur le cours de la dette lorsqu’il se situe très en haut ou très en bas des échelles de notation. En 2011, la dégradation à quelques semaines d’intervalle des dettes américaine puis française de AAA à AA+ est suivie d’une diminution des rendements des bons du Trésor américain et français. Or une dégradation de la note signifiant une hausse du risque aurait dû produire une baisse de la demande pour ces titres et donc une augmentation des rendements. Cela s’explique par le fait que les dettes américaine et française servent alors de valeur refuge dans le contexte de la crise des dettes souveraines européennes, une tendance que la dégradation ne vient pas altérer. Les effets de la notation sont en revanche beaucoup plus prononcés lorsqu’une dette souveraine bascule du statut « investment grade » au statut « junk », c’est-à-dire lorsqu’une notation est dégradée en dessous de Baa3/BBB-, un seuil fatidique que l’on retrouve dans le langage de nombreuses régulations prudentielles s’appliquant à certaines institutions (fonds de pension, entités publiques, investisseurs institutionnels). Ces effets ont pu être observés en 2010 pour la Grèce et en 2011 pour le Portugal et l’Irlande.L’usage généralisé de la notation comme mesure quantitative de la réputation des États n’est donc pas sans ambigüité, et si informer c’est prédire, prédire revient souvent à décevoir. Les régulateurs européens ont récemment lancé plusieurs initiatives visant à réformer l’industrie de la notation financière. Ces tentatives, notamment la création d’une agence publique de notation, ont pour l’instant échoué, si bien échoué, si bien que Moody’s, Fitch et S&P restent incontournables malgré les nombreuses défaillances que la crise de 2008 a contribué à révéler.

Source : Pierre Pénet, « La notation financière a-t-elle toujours raison ? », Sciences Humaines, HS Les essentiels, Les grands enjeux du monde contemporain, mars-avril 2017.

NB : P Pénet est sociologue, ses travaux portent sur les agences de notation et les programmes d’austérité.

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