Post on 17-Jun-2022
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LI KUNWU
LA FORMIDABLE ÉPOPÉE DU
YUNNAN
Du 20janvier au 4 mars 2018
Pistes pédagogiques
Cet artiste est un autodidacte qui a voué son art tout d’abord à servir l’armée populaire, qu’il a intégré très jeune, puis le dessin de presse au quotidien du Yunnan (Yunnan Ribao). Son style s’inspire directement du dessin de propagande chinois, puisque sa vie durant c’est ce qu’il a fait : mais attention, lui a enseigné son maître, « à chaque période de la vie du président Mao correspond un style de dessin spécifique ! ». Cette exposition conçue par Geneviève Clastres et Philippe Pataud Célérier, présente pour la première fois des œuvres monumentales inédites, réalisées spécifiquement pour cet événement. Aux confins du documentaire et du récit graphique, le dessinateur chinois nous fait découvrir une aventure hors norme celle de la construction d’une voie de chemin de fer dans une région particulièrement escarpée, le Yunnan. Mais l’intérêt de cette exposition réside aussi dans la liberté avec laquelle l’artiste aborde la figuration. C’est avec verve et invention qu’il aborde des problématiques plus contemporaines, comme celle de l’échelle et de la place du spectateur.
Le dessinateur Li Kunwu
Né en 1955, Li Kunwu a vécu toutes les transformations de son pays
survenues depuis la Révolution. Talentueux dessinateur de presse, il
aurait pu se contenter de faire des caricatures et des dessins de
propagande toute sa vie, s’il n’avait rencontré le Français Philippe
Otié, alors conseiller commercial à Wuhan et passionné de bande
dessinée. Une rencontre qui lui fait découvrir le concept des grands
récits en BD et lui permet de comprendre que le récit de son
existence banale dans un monde extraordinaire peut intéresser de
nombreuses personnes, notamment à l’étranger. D’où une
collaboration originale, où Li Kunwu dessine sa propre vie en
bénéficiant de l’appui scénaristique du Français pour structurer le
récit et donner les éléments de compréhension à un public
occidental. Ce récit autobiographique sera traduit en quinze
langues Planche Ma génération, celle d’une vie chinoise
p37
Le tunnel intemporel – 2015 – encre de chine sur papier de
mûrier – 136x136 – courtesy Li Kunwu
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Dès son plus jeune âge Li Kunwu est baigné dans l’univers communiste, à six mois son père tente de lui faire
dire « longue vie au président ». Il s’agit bien sûr du président Mao qui a
entamé sa « longue marche » vers le communisme en 1949. Le père de
l’artiste est lui-même membre du parti et ce sont les valeurs de cet idéal
politique qu’il transmettra à son fils. A l’école aussi ,les enfants sont mis à
contribution pour participer à l’élan national du « Grand Bond en Avant »,
en détruisant les moustiques et les moineaux qui menacent les récoltes, ou
en ramassant du bois pour faire fondre tout le métal disponible. Au bout de
quelques années : « nous étions parvenus à faire de la Chine une terre
stérile, sans arbres, sans insectes, sans rongeurs, sans oiseaux ». « Le Grand
Bond en Avant » prendra fin en 1962, remplacé pour les jeunes adolescents
par le culte de l’idéal révolutionnaire, incarné par Lei Feng cherchant
constamment, jusqu’à l’obsession, à aider ses camarades. Des épisodes
assez terribles suivent, notamment quand ce sont les élèves qui dénoncent
les déviances de toutes personnes et même de leurs professeurs accusés de
ne pas être assez révolutionnaires, ou détenteurs d’une parcelle de culture
du passé. Mais là, Li Kunwu se révèle incapable d’assumer les actes
auxquels il a participé : « ce qui suit s’est effacé de ma mémoire ». L’enfant
participe aux excès de cette révolution, mais il en est aussi une victime
quand son père est envoyé en camp de rééducation. Le temps du père se
termine avec la mort du Grand timonier, en 1976.
Le second tome Le temps du parti est consacré tout d’abord à l’épisode de l’arrestation de la « Bande des
Quatre », dirigeants parmi lesquels il y avait la femme de Mao Zetong. Ils sont désignés comme étant les
responsables des excès de la « Révolution Culturelle », qui avait fait de nombreuses victimes et conduit la chine
au chaos entre 1966 et 1976. Le père de l’artiste est alors réhabilité. Li Kunwu montre dans ces pages son
acharnement à vouloir rentrer dans le parti, tout comme sa sœur. Ces pages s’accompagnent aussi de
révélations : lors d’un cours pour adultes, en 1980, le professeur affirme à ses élèves totalement incrédules que
l’homme a marché sur la Lune onze ans plus tôt.
Avec Le temps de l’argent, dernière partie d’Une vie chinoise, le dessinateur chronique la transformation de
l’économie : explosion des entreprises privées et de l’entreprenariat, découverte de la spéculation immobilière
et boursière, et des joies de la consommation. La vision collective et collectiviste de la société fait place à
l’individualisme où chacun tente de tirer profit de ses initiatives et d’acquérir des biens de consommation,
comme le téléviseur Sony qui fait beaucoup rêver. C’est aussi le
moment de l’épisode de la place Tien an Men et Li Kunwu nous livre
un point de vue de l’intérieur, radicalement différent de la
perception occidentale que nous en avons.
A travers cet ouvrage, et les deux tomes de Ma génération où Li
Kunwu reste seul aux manettes, c’est une fresque remarquable qui
nous est livrée des soixante dernières années qui ont bouleversé la
chine. Mais c’est aussi un point de vue qui affiche une neutralité
revendiquée, s’abstenant, la plupart du temps, de commentaire. Il
nous fait percevoir ainsi peut-être mieux l’anéantissement de toute
pensée individuelle et les conditionnements qui opèrent dans les
mouvements de masse.
Planche Une vie chinoise tome 1 Le temps du
père détail d’une vignette
Planche Une vie chinoise tome 1 Le temps du
père p43
3
La construction de la ligne de chemin de fer
Dix-huit bizarreries du Yunnan, est l’ouvrage qui va le faire connaitre dans toute la
chine. Parmi celles-ci, il y a ce chemin de fer construit par les français au début du
siècle et qui va, paradoxalement, relier la province au pays voisin le Vietnam. Il
s’agit alors de désenclaver la Chine du sud via le Tonkin (nord du Vietnam),
protectorat français depuis 1883. L’adage alors défendu par la Troisième
République (1870-1940) sous l’influence de Paul Doumer, gouverneur général de
l’Indochine (1897-1902) étant que "la civilisation doit suivre la locomotive".
Le Yunnan est en effet une province du sud ouest de la Chine, à la frontière avec le
Vietnam, le Laos et la Birmanie. La BD la voie ferrée au dessus des nuages montre sa
recherche comme une enquête menée pour savoir dans quelles circonstances a été
réalisée cette prouesse technique.
Tout le matériel était produit en France (c’est assez drôle de voir ce que l’histoire
nous réserve, puisque désormais la Chine est « l’usine de l’occident »), il fallait trois
mois de navigation pour acheminer le matériel.
Ce seront plusieurs lignes de chemin de fer qui seront réalisées par les
français au début du XXème siècle, mais la plus remarquable est celle du
Yunnan. Longue de 465km dans sa partie chinoise, elle poursuit la ligne du
Tonkin (Haïphong – Hanoï – Loakai, à la frontière de la chine), soit 855km.
Cette opération visait à I’exploitation des richesses minières (on décrit le
Yunnan à l’époque comme étant doté « d’une incroyable richesse de
métaux ») et agricoles de la province du Yunnan et les transits commerciaux
vers Ie port de Haiphong. Toutefois, la guerre franco-chinoise retardera ce
projet jusqu'en 1910. Paradoxalement cette ligne construite pour assurer le
développement colonial de cette partie de la Chine est aussi celle qui
permettra, 50 ans plus tard, aux chinois d’aider les vietnamiens dans leur
guerre contre la France.
Réalisée dans un site très accidenté, cette ligne est la plus difficile construite
par une entreprise française (Compagnie Française des Chemins de Fer de I’
Indochine et du Yunnan) au début du XXème siècle, et ce dans son
intégralité (terrassement, ouvrages d’art, voies). Le tracé de la ligne est
particulièrement tortueux et monte à une altitude de 2026m au col de
Chouei-Tang. Il est composé de 155 tunnels, totalisant une longueur de près
de 18km, et 3422 ponts et aqueducs. 22 ouvrages sont métalliques avec
deux particulièrement remarquables : le pont à arbalétrier (67m de long et
surplombe la rivière d’une centaine de m), et le pont en « dentelle ». Ce
dernier est I ‘ouvrage emblématique de cette catégorie de viaduc.
Entièrement en courbe, au km 83,7, il présente 15 travées de 8 m, avec des
piles atteignant une hauteur maximale de 34 m. L'empattement transversal
des appuis a nécessité l'aménagement de fondations dans Ie lit et sur les
bords de la rivière. Ce viaduc a été détruit lors de la guerre sino-japonaise,
rem placé par un viaduc en béton.
Le pont à arbalétrier est situé au km 111 et permet à la ligne, par cette
boucle d’emprunter les deux flans de la vallée du Pei-Ho. Il est dû à l’ingénieur Paul Bodin de l’École Centrale
et membre de la Société de Construction de Batignolles. Il relie deux tunnels distants de 77m. Les deux
Vue du pont à dentelle au KM 83 – source IESF,
opus cité – vignette : vue actuelle
Construction du pont à arbalétrier au KM 111 –
source IESF, opus cité
Carte du tracé de la ligne de chemin de
fer du Yunnan dans sa partie chinoise -
source IESF, opus cité
Vue du pont à à arbalétrier au KM 111 – source
IESF, opus cité
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arbalétriers construits à la verticale sont lancés dans le vide avec un système
de câbles et calés sur une rotule centrale)
Les tunnels sont parfois très nombreux sur une courte distance jusqu’à 16
sur une distance de 5km
Ce sont 12.000 ouvriers et coolies qui périrent sur ce chantier (paludisme,
dysenterie, affections internes, accidents) dont 10.000 dans Ie seul Bas-
Namty. (Sources : http://home.iesf.fr/offres/doc_inline_src/752/CdF-Asie-
Chine-Indochine.pdf ) Société des Ingénieur et scientifiques de France IESF)
Les sources iconographiques utilisées par Li Kunwu :
Li Kunwu dans son ouvrage, La voie ferrée au dessus des nuages, mène une enquête pour
laquelle le témoignage de deux français sera une source importante. Il s’agit de Auguste François
(1857-1935), consul en Chine, et Georges-Auguste Marbotte (1861-1936), comptable de métier.
Ils vont laisser des témoignages photographiques très riches. Georges-Auguste Marbotte raconte
dans son ouvrage, au travers des lettres qu’il écrit à sa femme restée en France, et des
photographies qui les accompagnent comment se déroule le chantier. Ce sera l’une des sources
d’inspiration de Li Kunwu.
Des tirages modernes, d’après les plaques de verre réalisées par ces deux photographes
amateurs dans les années 1900-1910, ont été exposés par le Musée Guimet en mars 2015. Dans
la bande Dessinée les reprises photographiques sont
identifiables par les rehauts au lavis avec des variations de
valeurs de gris et des tonalités générales assez sombres, ne
laissant pas de blanc.
Auguste François raconte son quotidien dans son livre, “Le Mandarin blanc,
souvenirs d’un consul en Extrême-Orient 1886-1904”: «Délicieux chemin de
fer ! Il n’est pas possible de se moquer plus agréablement du monde, en
soutirant au bon contribuable cent millions pour la construction d’une
pareille voie ferrée. C’est ça la pénétration de la France au dehors ! » Sur une
des photos, des badauds indifférents fixent
des cages à barreaux dans lesquelles
pourrissent les têtes de bandits exécutés.
A plusieurs reprises ses personnages, dont Li
Kunwu , puisqu’il se met en scène dans cette
enquête, soulignent ce changement de statut
de l’Empire du milieu et les bouleversements qui ont marqué son histoire. Il
met en parallèle le monde passé et la Chine contemporaine, mais aussi le
monde occidental qui apparaît au travers de la présence de quelques
multinationales qui s’immiscent dans le paysage.
Pour la construction de la voix ferrée, ce sont 12000 bêtes de somme qui sont
recrutées avec leurs palefreniers pour l’acheminement des matériaux venus de
France pour certains. Entre 1903 et 1906, 60 000 hommes y travaillent. Il faut
8000 bêtes pour transporter le riz. Des troubles ont lieu, ce qui oblige le
gouvernement chinois à affecter 15 000 hommes à la sécurité. Il coûtera la vie à
12 000 chinois et une trentaine d’européens.
La voie ferrée au dessus des nuages – détail de
la page 85
La voie ferrée au dessus des nuages – détail de
la page 161, à gauche le pont de dentelle.
La voie ferrée au dessus des nuages Editions Kana, 216 pp 2013
La voie ferrée au dessus des nuages – page
145
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Les dessins exposés
C’est un ensemble de plus de 40 dessins et une image qui s’étire sur plus de 20m de long et qui révèle un aspect nouveau de cet artiste, dans la mesure où il était connu jusque là pour ses BD. Il est vrai que sa longue carrière l’a conduit à maîtriser un nombre de codes étonnants : peinture traditionnelle, dessin de propagande, de presse, caricature, ligne claire, encres, lavis, il s’adapte avec souplesse et facilité à tous les genres. Le trait acéré de Li Kunwu nous amène aussi sur le champ des opérations, à la rencontre des ouvriers du train mais aussi des contremaitres et autres ingénieurs européens, dans la campagne chinoise peuplée de personnages parfois surprenants. Son trait se fait aussi humoristique dans son
Autoportrait qui tient plus de la caricature.
La pratique de l’artiste transparait dans les œuvres exposées, ici « Tous les crayonnages sont là, marquant le papier de mûrier avec une désinvolture de graffiti. Li n’efface rien ; rien de ce qui mène aux étapes qui se suivent et s’enchaînent. Pas le temps et surtout pas la peine. Ses tâtonnements font partie intégrante de sa création » écrivent les deux commissaires de l’exposition. On peut le voir par exemple dans le dessin intitulé Tous unis dans le même objectif [le titre est à lui seul tout un programme !] on peut voir une superposition des lignes qui construisent la forme jusqu'à une dilution de la figuration. La forte plongée du premier plan montre les maçons au travail assemblant des pierres pour construire un mur de soutènement tandis qu’un ingénieur, vêtu du casque colonial regarde des papiers.
Geneviève Clastres & Philippe Pataud Célérier poursuivent leur commentaire : « Chez Li Kunwu, c’est d’abord le crayon qui s’exprime. Le geste est vif, les traits s’additionnent en une création multiple. À force de chevauchements une ligne se détache, le trait est là, emporte tous ceux qui le précèdent. L’encre de Chine peut faire son apparition. Par petites touches plus ou moins diluées, elle va progressivement habiller cette nerveuse ossature qui trahit avec cette légèreté d’épiderme tout ce qui fait sa structure. » Le travail de l’encre est en effet très subtil, outre les jeux d’ombre et de lumière qu’il traduit, il permet aussi d’évoquer la matière comme la pierre luisante d’humidité dans le tunnel en construction du Tunnel intemporel. Ce dessin fait partie de ceux directement inspirés des photographies réalisées par Le consul Auguste François et Georges-Auguste
Marbotte.
La modernité, du travail de Li kunwu réside dans cet affranchissement de la tradition classique qui veut que soit présenté au public un travail achevé ne portant pas les traces de sa gestation. Les ratages, tout au contraire donnent de la vie à ces dessins. « Rapiéçant même le papier labouré par ses pointes, Li rustine, rapetasse, réemploie jusqu’aux petits papiers collés avec une ingéniosité d’écolier, et le moindre accroc donne du relief à ses personnages. » rajoutent les deux commissaires de l’exposition. En effet, l’observation attentive des œuvres révèle toute l’ingéniosité de l’artiste redessinant le profil d’une jambe comme dans l’exemple ci-contre. C’est en collant des papiers qu’il peut apporter des repentirs dans son travail. C’est aussi le cas avec le chapeau du personnage à l’arrière plan dans ce même dessin.
Photographie réalisée par
Auguste François, consul du
Yunnan – un train pour le Yunnan
Autoportrait , 80 X 80 cm, encre de Chine sur
xuanzhi, papier à base de paille de riz, 2013
Tous unis dans un même objectif, cm,
encre de Chine sur xuan hi, papier base de paille
de riz, 2015
Le tunnel intemporel (détail)– 2015 – encre de
chine sur papier de mûrier – 136x136 – courtesy
Li Kunwu
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La contemporanéité de l’artiste réside aussi dans la monumentalité du dessin présenté dans la plus grande salle du FRAC. Les 21 mètres du dessin sont en effet très impressionnants et se déploient sous nos yeux dans une forme panoramique. L’espace y est creusé par des premiers plans presque déformants et des perspectives où l’on voit des masses de gens qui attendent.
Cette œuvre est la figuration d’une tradition ancestrale, unique au monde, la fête du printemps. Les migrations de populations sont à la démesure du pays, des millions de personnes rejoignent leur région natale pour fêter en famille cet évènement. Dans une moindre mesure, il nous est demandé à nous aussi, spectateur d’arpenter cette longue frise pour nous perdre dans l’immensité de la foule.
D’autres œuvres rappellent aussi des traditions, comme Le joueur d’erhu (viole
à deux cordes), un personnage particulièrement expressif saisi par un trait
incisif. Un commerce millénaire montre une femme pesant ce qui ressemble à
un régime de banane. Dans cette même salle du rez-de-chaussée on peut voir
aussi des femmes en costumes traditionnels : Costumes des femmes des hauts
plateaux ou encore Des fontaines de parures d’argent. Ces costumes sont
encore portés, ce dernier correspondant à l’ethnie des Jingpo Ils vivent de part
et d’autre de la frontière birmane. Les minorités reconnues sont au nombre de 56 dans toute la Chine, la seule
province du Yunnan en compte 25.
Un autre aspect du travail de cet artiste est celui qui concerne le paysage et la question de la représentation de
l’espace. Le paysage asiatique fonctionne plus par étagement qu’en ayant recours à la perspective conique qui
prévaut en occident. La comparaison des deux images page suivante, montrant la photographie de Marbotte et
le dessin qu’en fait Li Kunwu, permet d’en prendre la mesure.
On le retrouve aussi dans les effets de foule comme dans Retour sur terre des
ancêtres, où la représentation en frises permet de montrer les attitudes d’un
plus grand nombre de personnages. Une comparaison avec La musique aux
Tuileries de Manet permet de mesurer ce qui
sépare, pour ce qui est de cette question, le
recours aux codes de la perspective et la
représentation orientale de l’espace. Dans
l’œuvre d’Edouard Manet, seul le premier rang
des personnages est figuré dans sa globalité.
Ensuite on voit des têtes qui se réduisent peu à
peu à des taches de couleur. On a donc la
représentation d’un espace avec un point de
vue unique. Dans l’œuvre de Li Kunwu, on
retrouve cette suggestion des personnages
par la partie haute, mais pour le reste c’est un étagement de différents points
de vue qui s’articule dans l’espace du support. On retrouve cette combinaison des points de vue dans nombre
de ces dessins, dans une vision onirique de l’espace. David Hockney explique cette combinaison des points de
vue dans les estampes chinoises, dans une vidéo datant de 1982 dont un extrait est visible sur internet
(https://www.youtube.com/watch?v=mrFDGct4kH8).
Des fontaines de parures d’argent, 35 X 35 cm,
encre de Chine sur xuanzhi, papier à base de
paille de riz, 2015 (Copier)
Retour sur la terre des ancêtres, 2014, encre de
Chine sur papier à base de paille de riz, 136 x 136
cm. Courtesy Li Kunwu
Edouard MANET (1832-1883)
La musique aux Tuileries - 1862 - Huile sur toile -
76x118 - National Gallery, Londres.
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Mais l’essentiel des dessins raconte l’épopée de la construction de cette voie de chemin de fer du Yunnan et les conditions particulièrement difficiles dans lesquelles ce travail fut réalisé : l’acheminement des marchandises à dos le mulet, comme le montre cette photographie de Georges-Auguste Marbotte reprise par Li Kunwu, ou à dos d’homme par des systèmes de portage particulièrement ingénieux comme le montre l’Hommage aux travailleurs présenté dans la salle 2. Un assez long texte est écrit sur cette œuvre. Sa traduction donne le titre de l’œuvre comme sur les autres dessins. Ensuite la traduction de ce texte donne: Les
chemins de fer de l’Indochine et du Yunnan(Chine) constituent une ligne ferroviaire longue de 854 km environ, qui relie Haï Phong (Vietnam) à Kunming dans la province du Yunnan (Chine). Cette ligne fut construite à la fin de la dynastie des Qing pendant 7 années. À partir de l’océan, le chemin de fer traverse les plaines, les vallées, les rivières et les montagnes. Plus de 300000 ouvriers chinois venant de quatre coins de la Chine contribuèrent à sa construction. L’entreprise française qui est chargée de la construction a dit: “ Dès que cette ligne est inaugurée, la Chine se réveillera et se lèvera. ” Cependant, la réalité ne l’est pas. À gauche: le prénom du dessinateur et l’année: Kunwu, l’année de Yiwei (20 5)
Document réalisé par Patrice Leray professeur correspondant culturel auprès du FRAC, permanence le jeudi de 10h à 13h tel : 04 73 90 50 00 patrice.leray@ac-clermont.fr
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Transport de barres d’acier dos de mules, 2015,
35 X 35 cm, encre de Chine sur xuanzhi, papier à
base de paille de riz, Courtesy Li Kunwu
Transport dos de mulet – Photographie de
Georges-Auguste Marbotte
Hommage aux travailleurs, 2015 -, encre de Chine sur xuanzhi, papier à base de paille de riz, 136 X 136
cm – courtesy Li Kunwu