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- 1 - cataracte 58 - CATARACTE L a cataracte est l’opacification de tout ou par- tie du cristallin ; c’est une pathologie très fré- quente (plus de 500.000 interventions chirurgicales de cataracte sont pratiquées chaque année en France : c’est l’acte chirurgical le plus fréquemment réalisé en France toutes spécialités chirurgicales confondues); sa fréquence est en augmentation constante dans les pays industrialisés du fait de l’allongement de l’espérance de vie. C’est une réussite de la chirur- gie oculaire, pouvant restituer une fonction visuelle quasi-normale. I.DIAGNOSTIC 1° DIAGNOSTIC POSITIF a) il se pose devant divers signes subjectifs : • la baisse d’acuité visuelle est le signe essentiel. Elle est progressive et prédomine souvent en vision de loin, avec une acuité visuelle de près conservée, notamment dans les cataractes nucléaires. • les autres signes fonctionnels sont la photopho- bie, la survenue d’une myopie (liée à l’augmentation de l’indice de réfraction du cristallin qui provoque une myopie dite myopie d’indice), et la sensation de halos. Un signe plus rare est la diplopie monoculaire : diplopie par dédoublement de l’image au niveau de Ce qu’il faut savoir 1. Connaître les signes d’appel d’une cataracte 2. Connaître les étiologies et pouvoir orienter le bilan clinique et paraclinique. 3. Pouvoir expliquer au patient : - le mécanisme de la baisse d’acuité visuelle, - l’évolution de l’affection non traitée, - les grandes lignes du traitement chirurgical, - de quoi dépend la récupération d’une bonne vision, - les suites et le suivi postopératoires. l’œil atteint, ne disparaissant pas à l’occlusion de l’autre œil, contrairement à la diplopie binoculaire des paralysies oculo-motrices. b) il repose sur : • la mesure de l’acuité visuelle: on observe une diminution de l’acuité visuelle plus ou moins im- portante, aux dépens de la vision de loin et/ou de la vision de près. l’examen après dilatation pupillaire est l’exa- men essentiel : il retrouve l’opacification cristalli- nienne et la localise. Les quatre principaux types de cataracte ainsi identifiables sont : ◊ la cataracte nucléaire, où l’opacification inté- resse le noyau du cristallin ; c’est dans cette forme que l’on retrouve une baisse d’acuité visuelle prédo- minant en vision de loin et une myopie d’indice. ◊ la cataracte sous-capsulaire postérieure, où l’opacification est située en avant de la capsule pos- térieure. La baisse de vision de loin s’accompagne plus volontiers d’une baisse de vision de près. ◊ la cataracte corticale, où l’opacification siège au niveau du cortex cristallinien, habituellement à l’équateur, réalisant les classiques “cavaliers” à cheval sur l’équateur du cristallin. ◊ la cataracte totale : cette forme très évoluée est objectivable à l’œil nu, à l’éclairage direct de la pupille, le cristallin modifiant la lueur pupillaire qui prend un coloration blanchâtre ou grisâtre.

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cataracte

58 - CATARACTE

La cataracte est l’opacification de tout ou par- tie du cristallin ; c’est une pathologie très fré-

quente (plus de 500.000 interventions chirurgicales de cataracte sont pratiquées chaque année en France : c’est l’acte chirurgical le plus fréquemment réalisé en France toutes spécialités chirurgicales confondues); sa fréquence est en augmentation constante dans les pays industrialisés du fait de l’allongement de l’espérance de vie. C’est une réussite de la chirur-gie oculaire, pouvant restituer une fonction visuelle quasi-normale.

I.DIAGNOSTIC

1° DIAGNOSTIC POSITIF a) il se pose devant divers signes subjectifs :

• la baisse d’acuité visuelle est le signe essentiel. Elle est progressive et prédomine souvent en vision de loin, avec une acuité visuelle de près conservée, notamment dans les cataractes nucléaires.

• les autres signes fonctionnels sont la photopho-bie, la survenue d’une myopie (liée à l’augmentation de l’indice de réfraction du cristallin qui provoque une myopie dite myopie d’indice), et la sensation de halos. Un signe plus rare est la diplopie monoculaire : diplopie par dédoublement de l’image au niveau de

Ce qu’il faut savoir

1. Connaître les signes d’appel d’une cataracte

2. Connaître les étiologies et pouvoir orienter le bilan clinique et paraclinique.

3. Pouvoir expliquer au patient :

- le mécanisme de la baisse d’acuité visuelle,

- l’évolution de l’affection non traitée,

- les grandes lignes du traitement chirurgical,

- de quoi dépend la récupération d’une bonne vision,

- les suites et le suivi postopératoires.

l’œil atteint, ne disparaissant pas à l’occlusion de l’autre œil, contrairement à la diplopie binoculaire des paralysies oculo-motrices.

b) il repose sur :• la mesure de l’acuité visuelle: on observe une

diminution de l’acuité visuelle plus ou moins im-portante, aux dépens de la vision de loin et/ou de la vision de près.

• l’examen après dilatation pupillaire est l’exa-men essentiel : il retrouve l’opacification cristalli-nienne et la localise. Les quatre principaux types de cataracte ainsi identifiables sont :

◊ la cataracte nucléaire, où l’opacification inté-resse le noyau du cristallin ; c’est dans cette forme que l’on retrouve une baisse d’acuité visuelle prédo-minant en vision de loin et une myopie d’indice.

◊ la cataracte sous-capsulaire postérieure, où l’opacification est située en avant de la capsule pos-térieure. La baisse de vision de loin s’accompagne plus volontiers d’une baisse de vision de près.

◊ la cataracte corticale, où l’opacification siège au niveau du cortex cristallinien, habituellement à l’équateur, réalisant les classiques “cavaliers” à cheval sur l’équateur du cristallin.

◊ la cataracte totale : cette forme très évoluée est objectivable à l’œil nu, à l’éclairage direct de la pupille, le cristallin modifiant la lueur pupillaire qui prend un coloration blanchâtre ou grisâtre.

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Cataracte corticale : opacités cristalliniennes en «cavaliers» (flèches).

Catarate nucléaire („). Cataracte sous-capsulaire postérieure.

Cataracte sous-capsulaire postérieure. Cataracte corticale

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cataracte

c) il impose :

Le diagnostic de cataracte impose un bilan préo-pératoire dont le but est de faire la part de ce qui re-vient à la cataracte dans la baisse d’acuité visuelle.

Il est capital de prendre le tonus oculaire pour rechercher un éventuel glaucome associé et d’effec-tuer un examen du fond d’œil pour apprécier l’état de la rétine, en particulier au niveau maculaire. Il faut noter que l’opacification du cristallin crée une gêne à l’examen du segment postérieur ; dans certaines cata-ractes très évoluées, le fond d’œil est même invisible: il faut alors s’aider d’examens complémentaires tels que l’échographie (à la recherche d’un décollement de rétine méconnu) et l’électrorétinogramme (ERG) qui enregistre l’activité électrique de la rétine.

Au terme de cet examen, il doit être de possible de répondre à plusieurs ques-tions :

1. l’opacification du cristallin est-elle compatible avec la baisse d’acuité visuelle ?

2. la gêne ressentie par le patient fait-elle poser une indication chirurgicale ?

3. en dehors de la cataracte, le patient présente-t-il des pathologies oculaires qui risquent de compromettre le résultat chirurgical ?

Cataracte totale

2° DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIELIl ne se pose guère après un examen correct. Le

problème majeur est, rappelons le, d’apprécier le pronostic visuel postopératoire en recherchant une atteinte oculaire associée.

Le seul diagnostic différentiel qui peut se poser est celui, devant une leucocorie (pupille blanche) chez l’enfant, d’un rétinoblastome.

3° DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUEa) cataracte sénile :

C’est de loin la cause la plus fréquente.Liée à des troubles métaboliques encore incon-

nus, elle survient habituellement chez le sujet de plus de 65 ans, mais peut toucher également des individus plus jeunes (on parle alors de cataracte « présénile »).

La cataracte sénile est en général bilatérale, mais volontiers asymétrique. L’évolution est en général lente, sur plusieurs mois ou années, responsable d’une baisse d’acuité visuelle lentement progres-sive ; cette aggravation lente amène à envisager une intervention chirurgicale lorsque la baisse d’acuité visuelle devient invalidante en vision de loin et/ou en vision de près.

b) cataractes traumatiques :Assez fréquentes, survenant chez le sujet jeune

et chez l’enfant, le plus souvent unilatérales, elles peuvent être:

- soit contusives (classiquement sous-capsulaires postérieures),

- soit liées à un traumatisme perforant (secon-daires à l’imbibition du cortex cristallinien par l’humeur aqueuse après ouverture de la capsule cristallinienne).

Si leur diagnostic est le plus souvent évident lors de traumatismes, elles peuvent également passer initialement inaperçues. Il est donc très important, devant une cataracte unilatérale du sujet jeune, de suspecter cette cause et de la rechercher par l’interro-gatoire, la présence d’autres stigmates traumatiques oculaires et de faire pratiquer une radiographie de l’orbite à la recherche d’un corps étranger intrao-culaire passé inaperçu (+++).

c) cataractes «pathologiques» :Ce terme impropre regroupe des cataractes consé-

cutives à une pathologie oculaire ou à une pathologie générale métabolique.

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• cataractes consécutives à une pathologie ocu-laire, comme une uvéite chronique.

• cataractes liées à une pathologie générale :◊ cataractes métaboliques et endocriniennes :

Si certaines affections endocriniennes, comme l’hypoparathyroïdie ou l’avitaminose C, sont classi-quement reconnues comme cause de cataracte, la seu-le réellement rencontrée est la cataracte diabétique. Elle est classiquement sous-capsulaire postérieure et complique souvent un diabète insulinodépendant ; chez le sujet âgé, le diabète non insulinodépendant est une cause favorisante de cataracte sénile.

L’indication opératoire de la cataracte diabétique, qui dépend bien sûr avant tout de la gêne fonction-nelle, peut parfois cependant être élargie pour des raisons optiques afin de permettre la surveillance et le traitement par photocoagulation au laser d’une

rétinopathie diabétique associée.◊ autres causes :Certaines cataractes, beaucoup plus rares, peu-

vent être associées à d’autres pathologies, comme la trisomie 21, la maladie de Steinert et certaines affections cutanées («cataractes syndermatotiques»): sclérodermie, eczéma atopique.

• cataractes iatrogènes :◊ la principale est la cataracte secondaire à une

corticothérapie générale au long cours (cortico-thérapie supérieure ou égale à un an) ; elle peut nécessiter un traitement chirurgical, qui est de très bon pronostic.

◊ plus rare est la cataracte secondaire à une radiothérapie orbitaire (exemples : radiothérapie

pour tumeur de l’orbite ou pour mélanome de la choroïde).

d) cataractes congénitales :Il existe deux grandes causes de cataractes con-

génitales :• cataractes par embryopathie :Le plus souvent bilatérales, elles sont dominées

par la cataracte de la rubéole congénitale qui, de nos jours, tend à disparaître. La cataracte de la rubéole est le plus fréquemment associée à d’autres atteintes oculaires (microphtalmie, rétinopathie, glaucome) et/ou générales (cérébrales et cardiaques).

Ces cataractes génétiques, assez fréquentes, sont le plus souvent de transmission autosomale dominante .

Une cataracte totale uni- ou bilatérale, révélée par une leucocorie, doit faire éliminer le principal diagnostic différentiel chez l’enfant : le rétinoblas-tome.

II. TRAITEMENT

Il n’y a pas de traitement médical de la cataracte, les nombreuses recherches dans ce sens n’ayant pas à l’heure actuelle abouti. Le traitement est donc uniquement chirurgical. Il est actuellement réalisé le plus souvent sous anesthésie loco-régionale ou même sous simple anesthésie topique (anesthésie de contact par collyre), permettant ainsi une hospi-talisation de courte durée (de plus en plus souvent chirurgie ambulatoire).

1° BILAN PRÉOPÉRATOIRE :

C’est le bilan préopératoire habituel (consultation de pré-anesthésie).

Il comporte en outre en cas de correction par un implant intraoculaire, cas de très loin le plus fré-quent (voir plus loin), une biométrie : mesure de la longueur du globe oculaire par échographie et des mensurations cornéennes, permettant de calculer la puissance en dioptries de l’implant intraoculaire.

Un temps essentiel de l’examen préopératoire est l’information au patient (+++), qui doit être prévenu des modalités du traitement chirurgical, des résultats fonctionnels qu’il peut en attendre, et des complica-tions potentielles.

Cataracte congénitale, héréditaire.

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cataracte

2° MOYENS

a) ablation du cristallin cataracté :L’ablation du cristallin en totalité, ou extraction

intracapsulaire (EIC), qui est la technique la plus ancienne, est de nos jours de plus en plus abandonnée au profit de l’extraction extracapsulaire (EEC) qui consiste à ouvrir le cristallin et à le vider (noyau et cortex) tout en conservant la capsule postérieure, gardant ainsi une “frontière” entre la chambre an-térieure et le segment postérieur. L’EEC, qui était réalisée il y a quelques années de façon manuelle, est de nos jours pratiquée par phakoémulsification par ultra-sons. La pakoémulsification a l’énorme avantage de diminuer considérablement la taille de l’incision (3 mm environ) et ainsi d’augmenter la rapidité de la récupération visuelle, avec une acuité visuelle satisfaisante dès les premiers jours post-opératoires.

Elle est réalisée le plus souvent sous anesthésie loco-régionale ou sous anesthésie topique (anesthé-sie de contact par collyre) et de plus en plus souvent en ambulatoire.

Comme nous le verrons au chapitre suivant, l’ablation du cristallin est le plus souvent associée, dans le même temps opératoire, à la mise en place d’un cristallin artificiel (implant intraoculaire).

b) correction optique :

Le cristallin étant une lentille convergente de 20 dioptries, il est nécessaire d’associer à l’extraction du cristallin cataracté une correction optique.

• la correction par lunettes, qui est la plus an-cienne, est à l’heure actuelle abandonnée, sauf cas particulier. Ne pouvant être utilisée qu’en cas de

chirurgie bilatérale, du fait de l’agrandissement considérable de la taille des images provoquant une diplopie en cas de cataracte unilatérale, elle entraîne en outre des perturbations importantes de l’espace visuel, avec notamment une modification de l’appréciation des distances et des altérations de la périphérie du champ visuel.

• la correction par lentille de contact est le deuxième mode de correction possible. Elle restitue des fonctions visuelles correctes mais a ses inconvé-nients propres, comme la manipulation et l’intolé-rance à long terme, et n’est pas dénuée de risque de complications : ulcère cornéen traumatique, abcès cornéen infectieux.

• la mise en place d’un cristallin artificiel (im-plant intraoculaire) est le mode de correction utilisé de nos jours dans la quasi-totalité des cas. Posé à la fin de l’intervention chirurgicale après l’extraction du cristallin, il est placé le plus souvent à l’intérieur du sac cristallinien dans la chambre postérieure (implant de chambre postérieure).

Avec l’essor de la phakoémulsification, les im-plant souples se sont substitués aux implants clas-siques rigides ; ces implant souples sont pliés avant l’implantation, introduits à travers la petite incision réalisée lors de la phakoémulsification, puis se dé-plient une fois dans l’œil.

3° INDICATIONSL’indication opératoire qui, comme nous l’avons

vu, ne doit être posée qu’après un examen ophtalmo-logique complet, dépend de la gêne fonctionnelle. Il n’y a pas de chiffre d’acuité visuelle seuil, la gêne fonctionnelle étant très variable d’un sujet à l’autre. Ainsi, par exemple, on peut être amené à ne pas opérer une personne âgée dont l’acuité visuelle de

a b

Traitement chirurgical :- a : mise en place d’un implant souple par une incision de petite taille. - b : implant de chambre postérieure en place.

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loin est aux alentours de 4/10èmes, et à l’opposé opérer un sujet jeune, actif, tolérant mal une baisse d’acuité visuelle à 6/10èmes.

L’indication opératoire chez l’enfant pose des problèmes bien différents. Si l’indication opératoire est bien codifiée en cas de cataracte bilatérale, les modalités de l’intervention en cas de cataracte uni-latérale, souvent compliquée d’amblyopie, restent très discutées.

4° RÉSULTATSLe traitement chirurgical permet dans plus de 90%

des cas une récupération fonctionnelle excellente et rapide, dès le lendemain de l’intervention ou en quelques jours.

Le patient peut reprendre très rapidement une activité normale, sous couvert d’un traitement anti-inflammatoire local (collyre corticoïde ou collyre AINS) poursuivi pendant quelques semaines.

Les résultats fonctionnels peuvent cependant être compromis dans certains cas :

- a : soit du fait d’une pathologie oculaire pré-existante associée, notamment dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) ou glaucome. Une pathologie pré-existante doit être recherchée chaque fois que l’importance de la cataracte explique mal à elle seule la baisse d’acuité visuelle.

- b : soit du fait de la survenue d’une complica-tion, devenue néamoins de plus en plus rare avec les progrès de la microchirurgie oculaire ; les principales complications sont :

1) l’infection intraoculaire (« endophtalmie »), exceptionnelle (environ 1 cas sur 1000) mais de pronostic redoutable, pouvant aboutir dans les cas les plus sévères à la perte fonctionnelle ou même anatomique de l’œil.

2) l’œdème maculaire : dans environ 1% des cas survient un œdème maculaire chronique laissant une baisse d’acuité visuelle définitive.

3) le décollement de la rétine, survenant dans en-viron 2% des cas, nécessitant une réintervention per-mettant le plus souvent d’obtenir une réapplication rétinienne, mais pouvant compromettre le résultat fonctionnel si la macula a été décollée.

4) la “cataracte secondaire” par opacification de la capsule postérieure, volontairement laissée en place lors d’extraction extracapsulaire, n’est pas considérée comme une vraie complication : elle est aisément traitée par ouverture centrale de la capsule postérieure par photosection au laser YAG sans réou-verture chirurgicale de l’œil.

CATARACTES : ÉTIOLOGIE

a) cataracte sénile

b) cataractes traumatiques :• cataracte contusive• cataracte secondaire à un traumatisme perforant avec ou sans corps étranger intraoculaire (+++)

c) cataractes « pathologiques » :• cataractes consécutives à une pathologie oculaire (uvéite chronique).• cataractes liées à une pathologie générale :

◊ cataractes métaboliques et endocriniennes : diabète +++◊ autres causes (maladie de Steinert, trisomie 21, … … …)

• cataractes iatrogènes :◊ corticothérapie générale au long cours +++◊ radiothérapie

d) cataractes congénitales :• cataractes par embryopathie (rubéole congénitale)• cataractes héréditaires

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cataracte

LES POINTS FORTS

☞ La cataracte, opacification du cristallin, s’observe le plus souvent chez le sujet âgé (cataracte sénile).

☞ Elle se manifeste par une baisse d’acuité visuelle en général bilatérale, à peu près symétrique, d’évolution lente.

☞ L’examen après dilatation pupillaire permet d’observer l’opacification du cristallin et d’en préciser le type (cataracte nucléaire, …)

☞ L’évolution non traitée est lente, entraînant une baisse lentement progressive de la vision ; la baisse d’acuité visuelle devient petit à petit invalidante en vision de loin et/ou en vision de près, amenant à envisager un traitement chirugical.

☞ Le traitement est uniquement chirurgical, par extraction extracapsulaire du cristallin, le plus souvent par phakoémulsification, et mise en place d’un implant intra-oculaire. Il est pratiqué le plus souvent sous anesthésie loco-régionale ou anesthésie topique et de plus en plus en plus souvent en ambulatoire.

☞ La récupération fonctionnelle est le plus souvent excellente et rapide, sauf en cas de patho-logie oculaire associée ou en cas de survenue de complications (endophtalmie, œdème maculaire, décollement de la rétine).

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60 - DÉGÉNÉRESCENCE MACULAIRE LIÉE À L’ÂGE (DMLA)

I. INTRODUCTION

La dégénerescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une «maladie dégénérative

rétinienne chronique, évolutive et invalidante, qui débute après l’âge de 50 ans. Elle atteint de manière sélective la macula en provoquant une dégénéres-cence des cellules visuelles rétiniennes» (définition de l’ANAES, 2001).

On décrit trois formes de DMLA, une forme précoce et deux formes évolutives :

• forme précoce (environ 40% des cas), carac-térisée par la présence de drusen; on parle main-tenant plutôt de maculopathie liée à l’âge (MLA), pour éviter à ce stade de début le terme péjoratif de dégénérescence.

• forme atrophique (environ 40% des cas), carac-térisée par des altérations de l’épithélium pigmen-taire et un amincissement de la macula consécutif à l’évolution des drusen ; son évolution est lente sur des années.

• forme exsudative (environ 20% des cas), carac-térisée par le développement de néovaisseaux cho-roïdiens sous la macula ; l’évolution de cette forme peut être très rapide, faisant perdre la vision centrale (AV < 1/10) en quelques semaines ou mois.

Aux stades de formes atrophiques et exsudative, on parle de DMLA (ou encore DMLA évoluée ou DMLA symptomatique)

II. PRÉVALENCE

La DMLA est la première cause de malvoyance après 50 ans dans les pays industrialisés.

La prévalence globale de la maladie est de 8% après 50 ans, soit environ 1,5 million de personnes en France :

- 600.000 MLA,

- 900.000 DMLA.

Cette prévalence globale augmente progressive-ment avec l’âge :

- 1% entre 50 et 55 ans,

- 25% après 75 ans.

La DMLA (formes atrophiques et exsudatives symptomatiques) passerait :

- de moins de 1% de la population entre 5O et 55ans

- à environ 15 % de la population après 85 ans.

III. FACTEURS DE RISQUE

Hormis l’âge, certains facteurs de risque ont été incriminés. Parmi eux, deux jouent un rôle impor-tant :

1. hérédité :- on a isolé plusieurs facteurs de prédisposition

génétique.- un antécédent héréditaire multiplie le risque

par 3. 2. tabagisme +++ : il augmente également le

risque de DMLA par 3.

D’autres facteurs autrefois évoqués comme la coloration de l’iris, l’exposition à la lumiè-re, les facteurs de risque cardiovasculaires ne semblent pas jouer de rôle.

Ce qu’il faut savoir

1. Connaître l’épidémiologie de la DMLA.

2. Connaître les principales formes cliniques de la DMLA.

3. Reconnaître les situations d’urgence.

4. Connaître les différentes modalités thérapeutiques.

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dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA)

IV. DIAGNOSTIC

1. Circonstances de découverte- Baisse de l’acuité visuelle progressive de loin

et de près, correspondant à l’aggravation lente des lésions (drusens, forme atrophique),

- Baisse de l’acuité visuelle brutale, liée le plus souvent à l’apparition de néovaisseaux choroï-diens,

- Métamorphopsies (+++) = sensation de défor-mation des objets (le patient décrit souvent la vision ondulée des lignes droites), elles sont également le témoin de néovaisseaux choroïdiens,

- Scotome central, correspondant aux stades très évolués.

2. Examen cliniquea) mesure de l’acuité visuelle : elle est mesurée

séparément à chaque œil, avec correction optique si nécessaire, de loin et de près ; il existe souvent de façon précoce une baisse de l’acuité visuelle de près associée à la baisse de vision de loin, ce qui oriente vers une affection maculaire.

b) recherche d’un scotome central ou de méta-morphopsies qui peuvent être objectivés en présen-tant au patient une grille d’Amsler, constituée d’un quadrillage régulier.

c) examen du fond d’œil : pratiqué après dilata-tion pupillaire, il recherche (voir plus loin formes cliniques) :

1. la présence de drusen (MLA),2. des zones d’atrophie de l’épithélium pigmen-

taire (forme atrophique),3. des hémorragies, des exsudats profonds

(«exsudats secs») , un œdème maculaire et/ou un décollement exsudatif de la macula, témoins d’une forme exsudative.3. Angiographie du fond d’œil

C’est la prise de clichés du fond d’œil après in-jection intraveineuse d’un colorant fluorescent qui est le plus souvent la fluorescéine ; l’angiographie fluorescéinique est souvent complétée par une angio-graphie au vert d’indocyanine (cf. chapitre «Rappel anatomique, méthodes d’examen»).

• l’angiographie fluorescéinique est l’examen pratiqué en premier intention. Elle explore la vascularisation rétinienne, mais ne visualise pas correctement la choroïde ; elle permet de mettre en évidence et de localiser par rapport à la fovéola les néovaisseaux choroïdiens peu profonds, qui apparaissent bien définis.Elle est pratiquée après une préparation anti-allergique de trois jours en cas d’antécédents allergiques.

• l’angiographie en infrarouge au vert d’indo-cyanine permet par sa pénétration plus profonde une exploration de la choroïde : elle est pratiquée chaque fois qu’existent des néovaisseaux profonds, moins bien définis sur l’angiographie fluorescéinique.

4. Tomographie à cohérence optique: (Optical Coherence Tomography ou OCT ; voir le chapitre Rappel anatomique, méthodes d’examen).

L’OCT permet de visualiser les néovaisseaux choroïdiens mais surtout les signes associés, notamment œdème maculaire ou décollement de rétine maculaire et d’en apprécier l’évolu-tion.

V. FORMES CLINIQUES

Forme précoce (MLA) = drusen (40%)Le premier signe clinique est l’apparition de

précurseurs, les drusen ; les drusen sont dus à l’accumulation de résidus de la phagocytose des photorécepteurs par les cellules de l’épithélium pig-mentaire. Au fond d’œil ils apparaissent comme de petites lésions profondes, blanchâtres ou jaunâtres, de forme et de taille variables.

Forme atrophique (40%)La forme atrophique (souvent dénommée dans le

langage courant, notamment par les patients, «forme sèche»), est caractérisée histologiquement par la disparition progressive des cellules de l’épithélium pigmentaire. Cette perte s’accompagne d’une dispa-rition progressive des photorécepteurs sus-jacents et de la choriocapillaire sous-jacente.

Elle se traduit à l’examen du fond d’œil par des plages d’atrophie de l’épithélium pigmentaire au sein desquelles les gros vaisseaux choroïdiens deviennent anormalement visibles ; cet aspet est retrouvé à l’an-giographie du fond d’œil.

Elle évolue inexorablement, mais de façon très progressive, vers une extension des lésions qui vont englober la fovéola et entraîner une baisse d’acuité visuelle sévère avec scotome central.

Forme exsudative (20%)La forme exsudative (souvent dénommée dans le

langage courant, notamment par les patients, «forme humide»), est liée à l’apparition de néovaisseaux de

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Fig. 1 - Grille d’Amsler (à gauche, sujet normal, à droite, métamorphopsies)

Fig. 2- Angiographie fluorescéinique de néovaisseaux choroïdiens bien définis.

siège sous-rétinien ; il s’agit de néovaisseaux issus de la choroïde (on parle de néovaisseaux choroïdiens) qui se développent sous l’épithélium pigmentaire et/ou franchissent l’épithélium pigmentaire et se développent directement sous la rétine maculaire. Cette néovascularisation choroïdienne entraîne un œdème intrarétinien, des hémorragies et un décol-lement maculaire exsudatif, responsable de la baisse d’acuité visuelle et des métamorphopsies d’appari-tion brutale.

La forme exsudative de la DMLA est nettement moins fréquente que la forme atrophique mais en-traîne les complications fonctionnelles les plus sévè-

res : en absence de traitement, l’exsudation à travers les néovaisseaux choroïdiens entraîne rapidement une destruction des photorécepteurs, responsable d’une baisse d’acuité visuelle sévère et d’un scotome central définitifs.

La survenue brutale de métamorphosies et/ou d’une baisse d’acuité visuelle justifient ainsi un examen ophtalmologique en urgence (moins de 48 heures) afin de dépister d’éventuels néovais-seaux choroïdiens et de pouvoir les traiter le plus précocément possible.

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dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA)

Fig. 4- Néovaisseaux choroïdiens et OCT :- a : macula normale (voir chapitre «Rappel anatomi-que, méthodes d’examen»).

- b : néovaisseau choroïdien de siège rétrofovéolaire.

- c : névaisseau choroïdien rétrofovéolaire étendu.

Fig. 3- Néovaisseaux choroïdiens profonds, mal définis sur l’angiographie fluorescéinique (a), formant une plaque hyperfluorescente au temps tardif de l’an-giographie au vert d’indocyanine (c).

a : angiographie fluorescéiniqueb : temps précoce de l’angiographie au vert d’indocya-nine (c).c : temps tardif de l’angiographie au vert d’indocya-nine (c).

a

b c

néovaisseau choroïdien

a

b c

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Figure 4. Forme précoce (MLA) : drusens maculaires bilatéraux

Figure 7. Aspects du fond d’œil de néovaisseaux choroïdiens

Fig. 6 - Forme atrophique englobant la fovéola (flè-che) ; acuité visuelle < 1/20ème, < P14

Fig. 5 - Forme atrophique (angiographie fluorescéi-nique) : acuité visuelle encore bien conservée, cas les lésions respectent la fovéola .

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dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA)

Figure 8. Angiographie fluorescéinique de néovaisseaux extrafovéolaires (‡ = fovéola)

Figure 9. Angiographie fluorescéinique de néovaisseaux rétrofovéolaires étendues (à gau-che, cliché avant injection, à droite cliché après injection)

Figure 10. Aspect du fond d’œil immédia-tement après une photocoagulation au laser pour néovaisseaux choroïdiens

Figure 11. Autre cas, un mois après la photocoagulation

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Figure 12. Angiographie fluorescéinique de néovaisseaux extra-fovéolaires (à gauche, cliché sans préparation, à droite cliché après injection)‡ = fovéola

Figure 13. Même patient après photocoagulation au laser

Figure 14. Néovaisseaux choroïdiens étendus empiétant sur la macula ; angiographie fluo-rescéinique avant (à gauche) et après (à droite) thérapie photodynamique (Visudyne®)

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dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA)

VI. TRAITEMENT

Forme précoceAux stades précoces (drusen), une étude ran-

domisée menée sur un grand nombre de patients, l’étude AREDS (Age Related Eye Disease Study) a montré l’effet bénéfique sur l’évolution d’un trai-tement associant anti-oxydants et supplémentation vitaminique (association de vitamine E, vitamine C, zinc et bêta-carotène), commercialisé en France sous différentes préparations. Le bêta-carotène a par la suite été supprimé du fait du risque de cancer chez les fumeurs et anciens fumeurs.

De nombreuses spécialités reproduisent ce schéma et incluent également d’autres agents protecteur dont l’effet est attesté par les résultats de plusieurs études épidémiologiques ; il s’agit principalement :`

- des Omega 3,- des pigments maculaires.

Forme atrophique :Il n’existe actuellement aucun traitement médical

ayant démontré son efficacité dans la forme atrophi-que de la DMLA, dont l’évolution se fait inexorable-ment vers la constitution d’un scotome central.

Lorsque la baisse de l’acuité visuelle est sévère, doit être proposé au patient une rééducation orthop-tique et des aides visuelles (voir plus loin).

Forme exsudativeLe traitement de la forme exsudative de la DMLA

a pour but la destruction de la membrane néovascu-laire choroïdienne. Les possibilités thérapeutiques dépendent de la localisation des néovaisseaux cho-roïdiens:

1. destruction des néovaisseaux par photocoa-gulation au laser : elle ne peut être réalisable qu’en cas de néovaisseaux maculaires mais restant extra-fovéolaires (la photocoagulation entraînant sinon une destruction des cônes fovéolaires et un scotome central immédiat et définitif avec baisse d’acuité vi-suelle sévère) : dans ces cas favorables, le traitement, tout en respectant la fovéola, permet la réapplication du décollement de rétine maculaire, une disparition des métamorphopsies et une préservation de l’acuité visuelle. Les néovaisseaux extra-fovéolaires, acces-sibles à ce traitement, ne représentent malheureuse-ment qu’une minorité de cas.

2. dans le cas de néovaisseaux rétro-fovéolaires, inaccessibles à une destruction directe par photocoa-gulation au laser, différents traitements peuvent être proposés, notamment :

- thérapie photodynamique (PhotoDynamic Therapy = PDT) : son principe est l’injection d’une subsance photosensibilisante, la vertéporfine (Vi-sudyne®) qui se fixe électivement sur la paroi des néovaisseaux, suivie d’une photo-irradiation par un laser de faible intensité ; son but est d’obtenir l’obli-tération des néovaisseaux sans altérer les structures rétiniennes sus-jacentes.

Plusieurs séances à trois mois d’intervalle sont souvent nécessaires.

L’étude de patients suivis plusieurs années a dé-montré une stabilisation de l’acuité visuelle.

- injection intraoculaires d’anti-VEGF

Dans la famille du VEGF, le VEGF-A est un facteur majeur du développement de néovaisseaux choroïdiens. Ceci a amené à développer récemment différentes molécules anti-VEGF-A ; on dispose actuellement de deux anti-VEGF ayant obtenu l’A.M.M. dans le traitement de la DMLA exsudative :

- le Macugen®,- le Lucentis®.

Pour agir de façon efficace sur les néovaisseaux choroïdiens, ces deux anti-VEGF doivent être ad-ministrés par voie intraoculaire («injections intra-vitréennes»). Il s’agit d’un geste minime, réalisé en ambulatoire sous simple anesthésie topique, mais dans des conditions strictes d’aseptie ; il comporte un risque de complications minime (<1%).

Le traitement comporte avec l’un comme avec l’autre des deux anti-VEGF des injections intravi-tréennes répétées à plusieurs reprises à des intervalles d’environ un mois.

- traitement chirurgical, : différentes techniques chirurgicales ont été développées ces quinze der-nières années :

- l’exérèse chirurgicale des néovaisseaux choroï-diens donne des résultats décevants, ce qui a conduit à l’abandonner, notamment depuis l’introduction de la PDT et des injections intravitréennes d’anti-VEGF.

- les techniques de rotation maculaire que l’on pourrait comparer aux lambeaux de rotation en chi-rurgie réparatrice, donnent de meilleurs résultats mais restent réservés à des indications particulières.

Rééducation orthoptique et aides visuellesQuand les autres traitements n’ont pas permis

la conservation d’une acuité visuelle satisfaisante, notamment de près, il faut proposer aux patients une rééducation et des aides visuelles :

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LES POINTS FORTS

☞ La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est la première cause en France de malvoyance : elle voit sa fréquence augmenter régulièrement du fait de l’augmentation de l’espérance de vie.

☞ On distingue une forme précoce, la Maculopathie Liée à l’Âge (MLA), correspon-dant aux stades de début à l’apparition au fond d’œil de «précurseurs», les drusen, et une forme évolué (DMLA), regroupant deux formes cliniques : forme atrophique et forme exsudative.

☞ La forme exsudative correspond à l’apparition de néovaisseaux choroïdiens, respon-sables d’une baisse d’acuité visuelle et de métamorphopsies d’apparition brutale ; elle nécessite une consultation en urgence avec examen et angiographie du fond d’œil permet-tant de poser les indications thérapeutiques.

☞ La photocoagulation au laser et l’apparition de modalités thérapeutiques nouvelles, notamment la photothérapie dynamique ou PDT (Visudyne®) et les injections intravi-tréennes d’anti-VEGF, ont permis de diminuer la fréquence de la baisse d’acuité visuelle sévère.

☞ Dans les cas d’évolution sévère malgré le traitement, doit être proposé au patient une rééducation orthoptique associée à des aides visuelles.

- la rééducation orthoptique à pour objectif d’ap-pendre au patient à utiliser la rétine située en dehors de la lésion (névaisseaux choroïdiens étendus ou DMLA atrophique).

- les aides visuelles, systèmes grossissants opti-ques ou électroniques peuvent améliorer les résultats obtenus par la rééducation orthoptique.

Rééducation orthoptique et aides visuelles ont cependant des limites, et idéalement de nom-breux patients devraient être prise en charge par des équipes pluridisciplinaires associant ophtal-mologiste, orthoptiste, opticien, ergothérapeute, psychologue et personne chargée des activités de la vie quotidienne, mais il n’existe en France que très peu de tels centres.