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Institut de Formation Centre Psychothérapique
Des Cadres de Santé de NANCY – LAXOU
Mémoire
Diplôme Cadre de Santé
Sous la direction de
Pascale STERDYNIAK
Partenariat entre secteurs sanitaire et
médico-social
Rôle de coordination du cadre de santé
Promotion 2008/2009 CESAR Denise
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Je tiens à remercier Mme Pascale STERDYNIAK pour sa guidance tout au long de
ce travail, son implication et son aide précieuse à la réalisation
de ce mémoire
Jean Luc et Guillaume pour leur compréhension, leur soutien et
leur patience
Nathalie qui m’a poussée puis aidée à vivre cette aventure
professionnelle et humaine
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SOMMAIRE
INTRODUCTION p 7
PROBLEMATIQUE p 10
1 – Expression de la problématique p 11
1.1 Problématique p 14
1.2 Hypothèses p 15
ELEMENTS CONTEXTUELS p 16
1 – Bref rappel de l’histoire de la psychiatrie p 17
2 – Le secteur médico-social p 25
3 – Cadre règlementaire – Une volonté politique p 27
3.1 Le secteur sanitaire p 27
3.2 Le secteur médico-social p 29
CADRE CONCEPTUEL p 31
1 – Partenariat p 32
2 – Collaboration p 34
2.1 La notion de collaboration p 34
2.2 Les objectifs du travail en collaboration p 35
2.3 Les conditions du travail de collaboration p 35
2.4 La place de la communication dans la collaboration p 37
2.5 Le rôle du cadre dans la collaboration p 38
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3 – La prise en charge globale ou holistique du patient p 39
METHODOLOGIE p 42
1 – La recherche-action p 43
1.1 La méthode p 43
1.2 La méthodologie p 43
1.3 La recherche-action p 44
2 – Le recueil d’informations p 45
2.1 Le choix de l’outil p 45
2.2 Le choix de la population p 46
2.3 Les modalités du recueil d’informations p 46
3 – Avantages et inconvénients de l’outil p 47
3.1 Les points forts p 47
3.2 Les points faibles p 47
ANALYSE DES ENTRETIENS p 48
1 – Tableaux d’analyse p 50
2 – Tableau récapitulatif p 64
3 – Analyse commentée des entretiens p 65
3.1 La représentation du partenariat pour les professionnels p 65
3.2 Les éléments facilitateurs du partenariat p 67
3.3 Les difficultés liées au partenariat p 68
3.4 Les bénéfices pour l’usager p 70
3.5 Le rôle du cadre de santé p 72
RETOUR SUR HYPOTHESES p 75
PISTES D’ACTIONS p 78
1 – Permettre à chaque acteur de prendre sa place p 79
5
2 – Mise en place d’outils de communication p 80
3 – Proposition de permutations des personnels p 82
4 – La formation des professionnels p 82
CONCLUSION p 84
BIBLIOGRAPHIE p 86
ANNEXES p 89
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« Faire bien son travail ne suffit pas.
Encore faut-il être capable de faire bien
ensemble,
être mobilisé sur un développement
commun.»
Renaud SAINSAULIEU
« Se réunir est un début,
rester ensemble est un progrès,
travailler ensemble est la réussite. »
Henry FORD
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INTRODUCTION
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Les deux entités « sanitaire » et « médico-social » sont le produit d’une
histoire qui constitue le socle identitaire de ces deux secteurs :
- Lieu pour la maladie ou l’on soigne les personnes pour le sanitaire,
- Lieu du handicap où l’on éduque et où l’on réinsère socialement pour le
social et le médico-social.
Les malades et les handicapés ont légitimé les identités sanitaire et médico-
sociales.
Bien souvent, on constate que les personnes atteintes de troubles mentaux
présentent à la fois des souffrances psychiques, plus ou moins graves, qui
demandent des soins et elles présentent également des limitations dans leur
possibilité de vivre dans notre monde, d’y être acteur à leur manière. Les
établissements publics de santé mentale sont confrontés à une augmentation
constante des « séjours longs », considérés pour beaucoup comme des
« inadéquations » d’hospitalisation liés au manque ou à l’absence de réponses
sociales et/ou médico-sociales adaptées.
Maladie et handicap se conjuguent fréquemment chez nombre d’usagers
des établissements, qu’ils soient classés comme « sanitaire » ou « médico-
social ».
Alors bien sûr, on va se demander si « en sanitaire » les patients sont
« adéquats », en « médico-social » si leurs troubles sont stabilisés.
L’hôpital est investi du pouvoir de soigner, de rétablir un usager dans un
comportement acceptable. Outre ses missions de prévention, de concourir à la
qualité des soins, d’enseignement, de recherche et de sécurité, il peut aussi avoir
la mission de garder « ceux qui ne sont pas ou plus » pour le secteur médico-
social. S’agit-il de prendre conscience de ses limites et de passer le relais ?
Inversement, l’hôpital pourrait être tenté de « placer » les malades dans les
établissements médico-sociaux, peut-être moins par choix que par nécessité, il
faut fermer des lits.
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Des représentations clivées se dégagent donc. Le secteur médico-social
éduque et socialise, le secteur sanitaire soigne ?...
Toutefois, au-delà de ces différences, il me semble que ces deux secteurs
se doivent d’améliorer leur partenariat pour accompagner, chacun avec sa
spécificité, les personnes en grande difficulté de vie.
Il me paraît essentiel de revenir sur ma propre expérience. Ainsi, une
déconstruction de mes représentations est à ce jour indispensable pour m’inscrire
dans une démarche d’apprentissage, c’est-à-dire dans un renoncement aux
savoirs construits au fil de mon vécu.
Un effort de distanciation et de décentration doit me permettre d’avancer
dans ce cheminement intellectuel et aboutir à une objectivation. Celle-ci passera,
au regard d’hypothèses de travail, par une construction abstraite qui vise à rendre
compte du réel et à préciser l’essentiel de mon point de vue.
Puis, dans l’analyse des enquêtes réalisées auprès des professionnels du
secteur sanitaire et du secteur médico-social, je tenterai d’apporter des éclairages
me permettant de sensibiliser les acteurs de santé au travail de partenariat.
En effet, au regard de sa mission, le cadre de santé est garant du parcours
de soins. Il relève de sa responsabilité de tout mettre en œuvre afin de fédérer les
différents acteurs autour d’un projet commun et garantir ainsi à l’usager une prise
en charge globale de qualité.
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PROBLEMATIQUE
« Les hommes construisent trop de
murs et pas assez de ponts »
Isaac Newton
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1 – Expression de la problématique
Au cours de mon expérience en qualité de faisant fonction de cadre de
santé au service intersectoriel pour patients psychotiques déficitaires (SIPPD) du
Centre Psychothérapique de NANCY, j’ai pu appréhender la complexité de
concourir au développement de la compétence collective à prendre en charge ces
patients par l’adéquation des projets et des ressources existantes.
Quelles que soient les réponses apportées par les établissements publics
de santé mentale au problème des hospitalisations au long cours en psychiatrie,
elles nécessitent toujours un important travail de diagnostic, d’évaluation des
besoins et d’actions durables et cohérentes pour l’usager.
Ce service accueille des patients hospitalisés en psychiatrie depuis de
nombreuses années et leur évolution est très restreinte. Ma première action fut
d’accompagner le personnel afin de donner un sens au soin en favorisant
l’implication des soignants pour penser, questionner et évaluer les soins. Cette
démarche a pu s’accomplir par le biais du projet individuel de chaque patient.
Par ailleurs, il s’est avéré qu’un tiers des patients hospitalisés dans ce
service bénéficie d’une orientation en secteur médico-social tel que MAS1, FAM2
ou FAS3.
Les contraintes économiques actuelles du système de santé ont fait
émerger la nécessité de la réduction des lits utilisés par ces patients. En effet, à
l’heure où l’offre de soins est en pleine mutation, l’activité médico-sociale est
amenée à occuper une place majeure dans le champ de la santé mentale. De plus,
l’adaptation territoriale et organisationnelle du système de santé mentale aux
besoins de la population, face à une demande sociale grandissante vis-à-vis de la
psychiatrie, semble être actuellement un enjeu politique majeur. La question des
1 MAS : Maison d’Accueil Spécialisée
2 FAM : Foyer d’Accueil Médicalisé
3 FAS : Foyer d’Accueil Socialisé
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« inadéquations » d’hospitalisation semble étroitement liée aux enjeux du
développement d’’une politique de santé mentale territorialisée.
Cette situation m’a amenée à engager des relations avec le secteur médico-
social et plus particulièrement les MAS.
Plusieurs constats et obstacles se sont alors dressés devant cette
collaboration :
- Au niveau du secteur sanitaire
Les établissements publics de santé mentale sont confrontés à un enjeu
sanitaire d’importance qui consiste à optimiser l’offre de soins hospitalière dans un
contexte de sectorisation psychiatrique très liée au déploiement des politiques
sanitaires à l’échelle des territoires de santé.
Cette optimisation passe inéluctablement par la réduction des
hospitalisations « inadéquates » tant pour répondre aux enjeux financiers,
politiques et juridiques que pour s’inscrire durablement dans une amélioration de la
qualité des prises en charge des personnes atteintes d’un handicap psychique.
Les places disponibles en MAS sont très limitées et ne permettent pas la
réalisation effective des orientations préconisées.
Le service intersectoriel pour patients psychotiques déficitaires est
« embolisé » et ne permet pas d’accueil temporaire des résidents des MAS.
- Au niveau du secteur médico-social
Les résidents des MAS peuvent présenter des troubles du comportement
nécessitant une hospitalisation en psychiatrie. Malheureusement, le secteur
médico-social fait état de difficultés majeures afin d’hospitaliser les résidents pour
équilibrer un traitement ou stabiliser les troubles du comportement.
En raison du manque de lits disponibles au SIPPD, les résidents sont admis
dans les services d’entrée où leur prise en charge s’avère difficile en raison de la
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diversité des pathologies présentées par les patients hospitalisés dans ces
services.
Une collaboration étroite s’est alors engagée avec la MAS de Jean-Baptiste
THIERY. Nous avons organisé des rencontres régulières afin d’échanger sur nos
pratiques respectives, nos points forts et nos points faibles ainsi que nos limites et
nos ressources.
Des possibilités ont pu ainsi être exploitées pour l’accueil d’un de nos
patients en MAS et pour l’admission d’un résident en hospitalisation. Un séjour
d’essai d’une autre patiente a été organisé à l’institution J-B. THIERY et a permis
son intégration en secteur médico-social ensuite.
Force est de constater que les besoins des personnes en difficultés sont
divers, complexes, fluctuants. La recherche de continuité entre les dispositifs et le
milieu médico-social passe par une fluidité plus grande obéissant à deux logiques
complémentaires :
- Des logiques verticales, en filières, à l’intérieur de chaque dispositif pour
assurer la continuité des actions autour de besoins semblables,
- Des liaisons horizontales en réseau, en structurant des partenariats
avec des services aux compétences différentes, par exemple entre un
service de soins et une institution médico-sociale.
La loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la
qualité du système de santé a fourni une base légale pour le fonctionnement et la
mise en place de réseaux en clarifiant la situation et en les redéfinissant en ces
termes :
« Les réseaux de santé… sont constitués entre les professionnels de santé
libéraux, les médecins du travail, des établissements de santé, des centres de
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santé, des institutions sociales et médico-sociales et des organisations à vocations
sanitaire ou sociale, ainsi qu’avec des représentants des usagers » 4
Je souhaite aborder le lien entre secteurs sanitaire et médico-social. Je
m’intéresse au rôle du cadre de santé dans l’organisation d’un partenariat entre
ces deux secteurs s’inscrivant dans une dynamique interactive afin de favoriser
l’adéquation des prises en charge des patients et des résidents.
1-1 Problématique
Les fonctionnements séparés des secteurs sanitaire et médico-social, le
cloisonnement entre leurs institutions et leurs professionnels nuisent à la prise en
charge globale des usagers .
La maîtrise des problèmes (le handicap mental, la souffrance psychique)
par un seul type de professionnels est illusoire. Il est essentiel que les dispositifs
psychiatriques et médico-sociaux avancent vers des modes de coopération qui
tiennent compte de la réalité complexe et instable des besoins des personnes.
Les secteurs sanitaire et médico-social éprouvent des difficultés à travailler
en partenariat. L’objectif est de dépasser le cloisonnement de ces deux secteurs
en ajustant au mieux les réponses à des besoins individuels complexes.
Suite à ce constat, je me suis interrogée sur la collaboration entre service de
psychiatrie générale et institution médico-sociale. Que connaissent-ils l’un de
l’autre ? Quelles relations professionnelles existe-t-il réellement ?
4 chap. V « Réseaux », article 84 devenu l’article L6321-1 du Code de la Santé Publique
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1-2 Hypothèses
1 - Le décloisonnement entre les secteurs sanitaire et médico-social est
nécessaire ; il permet de proposer des réponses croisées aux besoins et attentes
variées des personnes et une complémentarité des interventions.
2 – Le partenariat correspond au processus de collaboration des deux
secteurs afin d’assurer la prise en charge globale du patient.
3 - Il importe que soit pensée la coordination des actions, que les niveaux
de travail en commun soient parlés et sans cesse interrogés et que la rencontre
soit aussi celle de cultures différentes. Le rôle du cadre est essentiel dans cette
perspective.
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ELEMENTS CONTEXTUELS
« La grandeur d’un métier est peut-être, avant tout,
d’unir les hommes : il n’est qu’un luxe véritable, et
c’est celui des relations humaines »
Antoine De Saint Exupéry
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Pendant deux siècles, les médecins des âmes se sont enfermés avec leurs
« fous » dans les asiles d’aliénés. Pour les protéger bien sûr et pour « protéger »
la société aussi. Mais l’enfer était pavé, ici comme ailleurs, des meilleures
intentions. Il s’agit maintenant de rendre possible le dernier acte de la fin de cet
exil des « fous » et de l’enfermement, de permettre l’aboutissement de la politique
de sectorisation et son ouverture à la population, à la société. Les systèmes
d’exclusion dont « les fous » puis les malades mentaux ont été victimes dans notre
société sont une permanence contre laquelle il nous faut continuer de lutter.
1 - Bref rappel de l’histoire de la psychiatrie
Le terme « psychiatrie » est d’apparition récente au début du 19ème siècle.
Auparavant on utilisait volontiers « Aliénisme ». Etymologiquement psychiatrie veut
dire « médecine de l’âme ».
Quatre grandes périodes de l’histoire seront déterminantes :
- Du moyen âge à la renaissance où l’on passe de la démonologie à la
maladie mentale
- La fin du siècle des lumières entre 1780 et 1802 ou l’on observe une
réforme radicale des institutions et ou commence à s’élaborer une
nosologie simple et de nouvelles techniques de soins.
- L’invention de la psychanalyse en 1895 avec Freud
- La découverte de traitements efficaces
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• Au moyen âge
L’idée prévalente à cette époque est que la folie est la manifestation du
péché. Le fou subit une punition divine ou est victime. Il n’existe aucun lieu pour
accueillir les fous ; ils sont regroupés dans les léproseries.
Les hôtels dieu, institutions chargées de la charité et de l’assistance n’ont
pas non plus de locaux adaptés.
• La Renaissance
Cette époque vit une psychose collective de la sorcellerie qui atteint son
apogée au 14ème et 15ème siècle. Le guide des Inquisiteurs utilisé à partir de
1486 affirme l’identité de l’hérésie de la sorcellerie et de la folie. En 1682 Le
concept de possession diabolique cède la place au monde médical et lettré avec «
l’idée délirante d’être possédé ».
• Les 17ème et 18ème siècles
Ces deux siècles sont marqués en France par la naissance de grandes
institutions et l’instauration d’un traitement médical spécial dans les hôtels dieu.
- L’hôpital général est créé en avril 1656 par un édit royal, il est destiné aux
mendiants valides et invalides. Rapidement des espaces sont réservés aux fous
qui sont mal supportés par leurs compagnons d’infortune. A cette époque le terme
hôpital n’a pas le même sens qu’aujourd’hui, il représente un lieu d’hébergement
forcé pour les indigents et les miséreux en leur assurant le gîte et le couvert.
- Les hôtels dieu, et particulièrement celui de Paris au 18ème siècle propose
2 salles (une pour chaque sexe) permettant l’accueil de 30 hommes et 100
femmes.
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- Les maisons religieuses de santé telle celle de Charenton fondée en 1640
ne recevra des fous (insensés) qu’à partir de 1670.
Les soins médicaux s’exercent selon un double postulat : La folie est
médicalement curable ; le but du traitement est la guérison.
Pour les médecins, les patients doivent être traités par des moyens
physiques ; cela consiste en quelques mesures énergiques : saignées, bains,
purges, et spécifiquement les douches. C’est la théorie des humeurs et les
thérapeutiques qui en découlent.
En 1780 il n’existe seulement que 6 établissements publics permettant de
soigner les fous.
• A la révolution de 1789
La rupture avec les symboles de l’ancien régime apparaît. Se pose alors la
question de la condition des fous : quelle institution va pouvoir les accueillir ?
(prison, hôpital ou assistance familiale. Progressivement, la folie va devenir une
pathologie. L’hôpital devient un établissement de soins et non plus un lieu
d’enfermement. La séparation entre le médical et le social s’opère
progressivement.
En 1793 Philipe PINEL est nommé médecin des infirmeries de Bicêtre ;
c’est le début de sa collaboration avec Jean Baptiste PUSSIN gouverneur de
l’emploi des fous. En 1801, PINEL fait paraître un traité médico-philosophique sur
« l’aliénation mentale ou la manie » dans lequel se dessine une réforme importante
: la spécialisation de la médecine mentale au sein de la médecine. Il décrit
l’aliénation mentale, trouble unique, maladie différente de toutes les autres
maladies avec quatre symptômes principaux : La manie ; la mélancolie ; la
démence ; l’idiotisme. Le traitement est alors basé sur l’isolement.
PINEL associe une description thérapeutique de la prise en charge des
malades : c’est le traitement moral qui s’appuie sur l’attitude du médecin face au
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malade. Il s’agit d’une parole douce et rassurante qui lui donne espoir tout en
compatissant de sa souffrance. Il est important que se réalise la condition de
confiance et d’alliance avec le patient pour la suite des soins à apporter. Il s’agit
d’une écoute empathique dans laquelle le patient retrouve sa dignité de personne
à nouveau reconnue et l’estime de lui-même. A ce traitement moral PINEL
préconise d’adjoindre des actions éducatives qui s’appuient sur des valeurs
bourgeoises c'est-à-dire le travail.
• 19ème siècle ; le siècle de l’asile et des aliénés
Les asiles (terme proposé par ESQUIROL en 1819) s’ouvrent
progressivement et en 1937 l’asile prend la dénomination d’hôpital psychiatrique,
Suite à l’abolition des lettres de cachets en 1790 par l’assemblée nationale
les fous (insensés) sont pris en compte de façons très diverses selon les lieux et
un dilemme reste présent comment obliger un malade à se soigner. Le fou a
retrouvé un statut de citoyen.
Nombre de médecins dont ESQUIROL sont favorable au principe de
l’isolement pour traiter le malade. En excluant le malade du milieu familial les
médecins pensent que l’enfermement permet de le discipliner par des moyens
coercitifs. C’est de cette conception que naîtra la loi de 1838 ; en effet le seul
endroit ou cela est possible est l’asile. Ce travail va être le pivot du traitement
moral tout en étant un moyen économique de rentabiliser l’établissement.
En 1818 ESQUIROL rédige un mémoire pour le ministre de l’intérieur dans
lequel il décrit les conditions misérables dans lesquelles vivent les aliénés en
province. ESQUIROL propose alors la construction de huit à dix asiles régionaux
dépendants l’état
Le 30 juin 1838 le roi Louis Philippe promulgue une loi qui répond à ce
problème ; chaque département peut construire un asile s’il souhaite le faire ; et la
loi va aussi encadrer l’hospitalisation : Pour éviter les abus et la séquestration la
21
demande d’hospitalisation doit s’accompagner d’un certificat médical décrivant les
symptômes sans pour autant nommer le diagnostic.
En 1874 les dépenses consacrées aux aliénés ne sont plus obligatoires
dans le budget départemental ; aussi dans certains hôpitaux la survie des malades
ne sera due qu’à leur travail.
- La psychanalyse
Freud est l’initiateur de la psychanalyse en 1895.
L’introduction de la psychanalyse sera assez lente dans les asiles, mais elle
permettra une compréhension du fonctionnement psychique normal et
pathologique. En France Jacques LACAN fera école. Après cette période naîtront
des thérapies individuelles et de groupes : le psychodrame ; la thérapie familiale.
Enfin naissent plus récemment d’autres modalités thérapeutiques avec les
thérapies cognitives et comportementales.
• Le 20ème Siècle
C’est en 1937 que l’asile sera transformé en hôpital, par la circulaire du 13
octobre de cette même année.
- 1942 Naissance de la psychothérapie institutionnelle
deux grands acteurs de la psychiatrie François Tosquelles et Lucien Bonnafé vont
introduire de nouveaux rapports entre médecins, infirmiers, malades : les valeurs
bourgeoises vont laisser la place aux rencontres et la relation soignants soignés ;
le travail prend alors la seconde place les infirmiers sont formés et ne jouent plus
le rôle de gardien. L’organisation asilaire est remise en cause dans sa totalité.
Bonnafé va militer pour une réforme générale du système de soins et il proposera
l’abrogation de la loi de 1838 et l’ouverture de la psychiatrie vers la cité. La loi sur
la sectorisation aboutira en 1960 alors qu’il faudra attendre 1990 pour voir
réformée la loi de 1838.
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- Les Traitements médicaux efficaces
La première maladie à bénéficier d’un traitement efficace est la PG
Paralysie Générale (forme tertiaire de la syphilis) en 1917 considérée à l’époque
comme un trouble psychiatrique
La deuxième découverte est la méthode dite des chocs entre 1932 et 1938.
Elle consiste dès 1932 et jusque 1952 dans la cure insulinique (cure de Sakel)
En 1938 Ugo Cerletti invente l’électrochoc ou la convulsivothérapie
électrique qui s’est successivement appelée Sismothérapie ; électronarcose ; ECT
(électroconvulsivothérapie) et ESC (électrostimulation corticale). Cette thérapie a
gardé comme indication la mélancolie résistante faisant courir un risque vital au
patient
1952 : La chimiothérapie : Un tournant essentiel dans la prise en charge
des malades mentaux vient de voir le jour la découverte du premier neuroleptique
par Laborit: le Largactil
Le lithium quand à lui commencera à être utilisé pour traiter les troubles de
l’humeur en 1954 par un suédois : Morgan SCHOU.
La circulaire du 15 mars 1960 donne une nouvelle orientation dans les
prises en charge en psychiatrie puisqu’elles seront systématiquement le fruit d’une
réflexion pluridisciplinaire. Les conditions de vie s’améliorent pour les malades. Les
durées moyennes de séjour tendent à diminuer et de nombreux patients sont
progressivement réinsérés dans leur milieu familial et social. C’est également à
cette période que la psychiatrie ouvre son action sanitaire hors de ses murs.
Durant ces quelques années d’histoire, les acteurs de la psychiatrie
inventeront et instaureront de nouveaux outils ainsi que de nouveaux métiers.
C’est ainsi que le cadre unique d’infirmier en psychiatrie partagera
progressivement son activité avec d’autres professionnels : les Psychologues, les
aides soignants, les ASH, les AMP, les ergothérapeutes, les psychomotriciens, les
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kinésithérapeutes, travailleurs sociaux… Il est indispensable de comprendre que le
travail en psychiatrie est un travail d’équipe, et qu’une personne ne peut être prise
en charge que dans sa globalité. Progressivement d’autres structures que l’hôpital
verront le jour : CMP, CAT, Appartements thérapeutiques ou associatifs,
Placements Familiaux Thérapeutiques
Des conventions seront établies également entre les services de psychiatrie
et d’autres structures de soins comme les hôpitaux généraux, les maisons de
retraite, et la mise en place de la psychiatrie de liaison sera progressivement
instituée. Tout sera mis en œuvre pour maintenir ce patient au plus près de chez
lui et éviter sa désocialisation. Ainsi donc le secteur facilitera les soins de
proximité. Ce nouveau système de soins qui va s’opposer à celui du soin asilaire
en place jusque là, permettra la précocité des soins et de la prise en charge. Le
suivi des patients sera facilité, et la continuité des soins sera réalisée par la même
équipe.
• De la psychiatrie à la santé mentale
La psychiatrie, qui étudie et traite les maladies mentales et les troubles
pathologiques de la vie psychique, relève du champ médical. C’est l’une des
composantes de la santé mentale qui n’a pas vocation à être médicalisée et dont
la thématique est transversale.
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (O.M.S.), la santé mentale est le
résultat d’une interaction entre l’environnement, la société et les individus qui la
composent.
La santé mentale ne consiste pas seulement en une absence de troubles
mentaux. Il s'agit d'un état de bien-être dans lequel la personne peut se réaliser,
surmonter les tensions normales de la vie, accomplir un travail productif et
fructueux et contribuer à la vie de sa communauté.
24
Une personne en bonne santé mentale est une personne capable de
s'adapter aux diverses situations de la vie, faites de frustrations et de joies, de
moments difficiles à traverser ou de problèmes à résoudre. Une personne en
bonne santé mentale est donc quelqu'un qui se sent suffisamment en confiance
pour s'adapter à une situation à laquelle elle ne peut rien changer ou pour travailler
à la modifier si c'est possible. Cette personne vit son quotidien libre des peurs ou
des blessures anciennes qui pourraient contaminer son présent et perturber sa
vision du monde. De plus, quelqu'un en bonne santé mentale est capable
d'éprouver du plaisir dans ses relations avec les autres.
Ainsi, si les pratiques en psychiatrie relèvent d’un travail spécialisé en milieu
strictement sanitaire, celles du champ de la santé mentale renvoient à un travail de
prévention, de soins et de réinsertion, à la fois en milieu sanitaire et dans la
communauté par une pratique en réseau. La santé mentale implique donc trois
dimensions : biologique, psychologique et sociale.
La psychiatrie, confrontée à des évolutions nouvelles, ne s’est donc plus
limitée aux traitement des seules maladies répertoriées mais s’est ouverte plus
largement à des souffrances psychologiques et sociales pour s’inscrire dans le
champ plus vaste de la santé mentale. Celle-ci est définie par François CLOUTIER
comme « un processus dynamique résultant de facteurs biologiques,
psychologiques et sociaux en interaction constante, déterminé sur le plan culturel
dans le temps et dans l’espace, dépendant de conditions plus ou moins favorables,
personnelles et collectives, et reconnaissant certains critères fondés sur
l’intégration de la personnalité ainsi que sur les capacités d’affronter les difficultés
et de résoudre les problèmes de l’existence »5.
La psychiatrie publique a évolué vers la fin d’un modèle dominé par les
grands hôpitaux psychiatriques et un passage à une psychiatrie où l’hospitalisation
libre domine. Elle n’a plus vocation à être un lieu de chronicité mais a, au
contraire, l’obligation de s’inscrire dans une démarche pluridisciplinaire de travail
en réseau et de coopérations sanitaires, sociales et médico-sociales.
5 CLOUTIER François – 1994 – La notion de santé mentale : explicitation et critique. Editions Eres
25
2. Le secteur médico-social
« L’aide à autrui » peuple notre histoire culturelle et identitaire et le profil des
hospices où s’entassaient pêle-mêle les estropiés, vieillards, infirmes, fous et
vagabonds est encore présent dans nos représentations.
C’est en 1652, que Louis XIV crée l’hôpital général, qui accueille malades,
fous mendiants et autres défavorisés, dans une structure fermée qui restaure
« l’ordre public » et rassure les « honnêtes gens ».
La charité était alors le moteur de l’aide « aux miséreux ».
L’industrialisation du début du XXème siècle et ses retombées sociales sont
extraordinaires dans un monde de tradition presque exclusivement rural. Elle a
favorisé de nouvelles formes d’assistance pour apporter réponse à de nouveaux
fléaux (tuberculose, alcoolisme, familles disloquées, misère etc.).
L’issue victorieuse du conflit de 1914-18 conduit la nation à se préoccuper
des invalides (comme Napoléon l’avait fait également au retour de grandes
campagnes).
Des associations, encore actives aujourd’hui, naissent dans les années 1920/1930
(ex LADAPT-ligue pour l’adaptation des diminués physiques au travail- et l’APF-
association des paralysés de France-).
Après la dernière guerre mondiale, et les tragiques constats des
abominations commises par les nazis, la société évolue vers la recherche d’un
monde moins cruel. Les esprits sont restés marqués par cette folie d’extermination
du « différent ».
La bienfaisance, alors majoritairement privée, d’origine confessionnelle, et
liée à des initiatives locales, se professionnalise, se fédère en associations,
abandonnant peu à peu la prédominance confessionnelle.
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La Sécurité sociale, instituée en 1945, marque un virage important dans le
développement du secteur médico-social, puisque sa création a permis la
généralisation des soins et le développement des institutions chargées de les
administrer.
27
3. Cadre règlementaire – Une volonté politique
Le législateur, par une succession de textes règlementaires, réaffirme
périodiquement sa volonté de mettre en place des organisations efficientes, de
maîtriser les coûts et de développer la responsabilité des acteurs.
La logique des « blocs » juridiques et structurels a été fondée par les textes
régissant d’une part le secteur sanitaire à travers la loi hospitalière du 31/12/1970,
et d’autre part le secteur social et médico-social à travers les lois du 30/06/1975
(75-534 – loi d’orientation en faveur des personnes handicapées et 75-535 – sur
les institutions sociales et médico-sociales). L’état ayant constaté l’absence de
savoir faire de l’établissement hospitalier en matière d’accueil social des enfants
de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) et des enfants handicapés, des personnes
âgées et des adultes handicapés, lui demande de se limiter aux soins et
externalise ce qui deviendra les structures médico-sociales et sociales en 1975. La
coupure entre le sanitaire, développé surtout dans le public, et le champ social
ouvert au privé, s’en trouvera marquée. (G. Baillon, Quelles réponses aux besoins
des personnes en souffrance psychique ? – Vie sociale n°3/2003)6
3.1 Le secteur sanitaire
Le champ hospitalier a dû s’imprégner d’une culture de coopération dans un
contexte de territorialisation des politiques de santé et d’action sociale.
� La circulaire du 15 mars 1960
Elle définit la politique de sectorisation et ouvre la voie au développement
des soins ambulatoires comme alternative à l’hospitalisation au long cours et
comme possibilité d’accès aux soins pour les personnes non hospitalisées.
Cette politique de secteur, qui travaille sur des bassins de population
d’environ 70000 habitants, a entraîné l’externalisation des soins psychiatriques. 6 G. Baillon, Quelles réponses aux besoins des personnes en souffrance psychique ? – Vie sociale
n°3/2003
28
� La loi n°91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière
Elle affirme la nécessaire articulation du système de soins et des structures
médico-sociales, incluant la psychiatrie intégrée au dispositif sanitaire général.
Elle traite des actions de coopération inter-hospitalière et de la collaboration
avec les services sociaux et médico-sociaux et inscrit la possibilité, pour les
établissements publics de santé, de signer des conventions avec des personnes
de droit public ou privé.
Quelques mois avant la publication de la loi, Bernard HONORE soulignait
dans son ouvrage « L’hôpital et son projet d’entreprise » que les établissements de
santé devraient s’inscrire dans une recherche de rationalisation de leur
fonctionnement ainsi que dans une démarche d’optimisation du processus global
de prise en charge du patient.
En effet, pour relever les enjeux de compétitivité tout en assurant une
qualité optimale des soins, il devenait nécessaire de repenser les modes de
fonctionnement des hôpitaux. Ainsi, l’auteur soutient que « Le projet
d’établissement ouvre une voie au décloisonnement et une nouvelle politique des
ressources humaines. Il pourrait être la mise en forme, à un moment donné de son
histoire, de la démarche d’entreprise pour faire partager son destin par l’ensemble
du personnel, avec le développement du sentiment d’appartenance à une
communauté pour laquelle chacun, dans sa différence personnelle et sa spécificité
de métier, est solidaire des autres »7
� L’ordonnance n°96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de
l’hospitalisation privée et publique
Elle avait pour objectif de permettre au système de santé de faire de
nouveaux progrès, de s’inscrire dans une démarche continue de la qualité et de
tendre vers la satisfaction de l’usager.
Par ailleurs, elle a ouvert la possibilité pour les établissements publics de
santé de créer et de gérer des structures médico-sociales.
7 HONORE Bernard. L’hôpital et son projet d’entreprise. P 141
29
Cette ordonnance introduit également la procédure d’accréditation qui a
pour objet de porter une appréciation indépendante sur la qualité de
l’établissement à l’aide d’indicateurs de critères et de référentiels portant sur les
procédures, les bonnes pratiques et les résultats des différents services et activités
des établissements.
L’ensemble des références est centré sur l’appréciation du suivi
individualisé du patient tout au long de son parcours dans l’établissement et du lien
avec les prestations complémentaires offertes dans le territoire de santé.
� La loi du 4 mars 20028
Cette loi a pour ambition d’adapter notre système de santé aux attentes des
malades et aux possibilités de la médecine moderne en privilégiant les relations
contractuelles.
Elle réaffirme le principe de continuité des soins et de prise en charge
globale des personnes en passant par la mutualisation des compétences des
professionnels.
3.2 Le secteur médico-social
� La loi du 30 juin 19759
Elle abandonne le concept d’assistance au profit de celui de solidarité.
La loi n°75-735, éditée le même jour, est quant à elle tournée vers les
institutions sociales et médico-sociales. Elle balise le fonctionnement des
établissements. Malgré ces deux textes fondamentaux, les personnes
handicapées mentales ne sont toujours pas libres de leur choix : la famille et
surtout les professionnels décident à leur place « pour leur bien ».
8 Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé
9 Loi n°75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées
30
� La loi du 2 janvier 200210
Depuis la loi du 2 janvier 2002, le social est redéfini nouvellement par
rapport aux besoins et à l’ensemble des acteurs sociaux .
« L’action sociale et médico-sociale tend à promouvoir, dans un contexte
interministériel, l’autonomie et la protection des personnes, la cohésion sociale,
l’exercice de la citoyenneté, à prévenir les exclusions et à en corriger les effets.
Elle repose sur une évaluation continue des besoins et des attentes des membres
de tous les groupes sociaux, en particulier des personnes handicapées et des
personnes âgées, des personnes et des familles vulnérables, en situation de
précarité ou de pauvreté, et sur la mise à disposition de prestations en espèces ou
en nature. Elle est mise en œuvre par l’état, les collectivités territoriales et leurs
établissements publics, les organismes de sécurité sociale, les associations ainsi
que par les institutions sociales et médico-sociales.
L’action sociale et médico-sociale est conduite dans le respect de l’égale
dignité de tous les êtres humains avec l’objectif de répondre de façon adaptée aux
besoins de chacun d’entre eux et en leur garantissant un accès équitable sur
l’ensemble du territoire. »
La loi du 2/01/2002 rénove l’action sociale et médico-sociale. Elle développe
les droits des usagers, diversifie la palette des établissements, services et
interventions, améliore les procédures techniques de pilotage du secteur et
instaure enfin une meilleure coordination entre les divers protagonistes.
Les modalités de collaboration, même prévues par le contexte législatif, se
heurtent à la réalité lorsqu’il s’agit de leur mise en œuvre. Je vais donc retenir un
certain nombre de concepts pour me conduire au réel et m’y confronter.
10
Loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale
31
CADRE CONCEPTUEL
32
1 – Partenariat
Le travail en partenariat est une excellente école de la modestie pour tous.
Le partage de ses pratiques, sa culture, ses interrogations, ses doutes, ses projets,
ses solutions conduite à écouter l’autre, à le considérer et à chercher ensemble les
meilleures voies possibles. Cette nécessaire modestie conduit naturellement à une
efficacité accrue. L’intérêt du partenariat réside en ce que ce dispositif ne tient pas
seulement aux personnes mais bien à une force institutionnelle.
PARTENAIRE : (Définition dictionnaire le Petit Larousse)
� Personne avec qui on est associé contre d’autres dans un jeu,
� Personne avec qui on pratique certaines activités (danse, sport…),
Personne, groupes auxquels on s’associe pour la réalisation d’un projet,
chercher des partenaires,
Personne avec qui on a une relation sexuelle,
� Pays qui entretient avec un ou plusieurs autres des relations politiques,
économiques Etc.., les partenaires européens,
� Partenaires sociaux : représentants du patronat et des syndicats d’une
branche professionnelle, de la direction et du personnel d’une entreprise,
considérés en tant que parties dans des accords, des négociations
PARTENARIAT : terme plus mystérieux, il apparaît dans les dictionnaires
vers les années 1980
Le partenariat peut se définir comme une interaction durable entre
partenaires pour une visée partagée.
Cette interaction est double et s’articule autour d’une notion d’association (alliance)
et d’antagonisme (opposition) car il y a obligatoirement une différence avec l’autre.
Nous sommes obligés de travailler ensemble pour un objectif commun. Les
organismes vont se réunir, définir des objectifs et modifier leur mode de
33
fonctionnement en étant en ouverture. Il faut travailler autrement, entrer dans une
construction d’identité partenariale et vivre différemment son identité
professionnelle. Nous sommes dans un processus pluri-professionnel et cet « être
ensemble » n’a rien de spontané, ni d’ évident.
Le rôle et la place de l’autre passent par le respect mutuel de règles
communes, de la marge de manœuvre de chacun (stratégie) et d’un souci de
bénéfice « gagnant/gagnant ».
Corinne MERINI11 analyse les principes de fonctionnement des partenariats
et définit 5 principes :
� 1 - Principe d’association : ce qui fonde un partenariat, c’est l’association
autour d’un projet commun, que ce soit un problème à traiter ou une réalité
à partager. Nous ne sommes pas dans un partenariat décidé par un
ministère mais dans un partenariat qui n’a de sens que par rapport à un
objectif commun.
� 2 - Principe de besoin : qui amène les partenaires à faire l’hypothèse que
travailler en collaboration aura un effet positif sur le traitement du problème
visé. Je n’adhère au partenariat que si je pense, j’ai conscience que l’on
n’arrive plus à travailler seuls.
� 3 - Principe d’identification : chaque acteur accepte de se reconnaître dans
des références communes même réduites. Ne peut fonctionner que si les
acteurs se reconnaissent un point commun. Avec des logiques, des
rapports différents, ils se reconnaissent dans une identité différente car
malgré tout, ils ont des choses en commun.
� 4 – Principe de rupture : chaque acteur qui fonctionne de façon authentique
dans ce partenariat éprouve le besoin de rompre avec un mode de
fonctionnement antérieur.
� 5 - Principe de risque : chaque acteur peut être confronté aux effets de la
perte de repères habituels. Un coordonateur risque de devenir périphérique
11
MERINI C. chargée de mission au département Partenariat et communication, faculté Jean Monet , Paris XI – le partenariat, notion et pratiques nouvelles en formation – Education permanente n°118/1994-1
34
à sa fonction. La personne risque de trop s’ouvrir aux autres (à leurs
logiques). Ce principe installe parfois des confusions identitaires
2 - Collaboration
2.1 La notion de collaboration
La collaboration fait partie des mots clés de la littérature moderne du
management.
Collaborer vient d’une locution latine « cum labore » qui signifie « travailler
avec ».
Selon la définition du dictionnaire de la langue française Le petit Larousse, il s’agit
de « travailler à une œuvre commune ».
Cette définition n’étant pas suffisante à mon sens, elle m’invite à poursuivre mes
investigations pour mieux préciser ce concept.
La collaboration n’est pas une fin en soi, ni un objectif à atteindre. C’est un
mode de fonctionnement et d’organisation des relations entre des individus
d’appartenances différentes.
En tant que telle, son orientation et le sens qu’elle prend restent tributaires des
objectifs poursuivis par les acteurs et des dynamiques d’ensemble dans lesquelles
elle se trouve inscrite.
C’est pourquoi, cette façon d’envisager les rapports professionnels peut se heurter
aux clivages institutionnels ainsi qu’aux habitudes professionnelles de séparation
des corps de métiers.
Pourtant, les objectifs de travail en collaboration sont multiples et devraient
rallier l’ensemble du personnel œuvrant pour le bénéfice du patient.
35
2.2 Les objectifs du travail en collaboration
La collaboration est un mécanisme qui permet l’optimisation des ressources,
qui peut faire face aux pénuries en créant une synergie et un renforcement des
capacités internes.
Afin d’assurer la continuité des soins et dans une logique d’articulation de
travail du personnel, il semble essentiel que les différentes catégories
professionnelles utilisent un mode de communication interne basé sur la
collaboration.
Cette dernière ne se décrète pas, ne peut être imposée mais apparaît à l’hôpital
comme un moyen de favoriser la participation, la responsabilisation du personnel
ainsi que l’amélioration de la qualité des soins.
En effet, dans une réalité de travail où plusieurs professionnels agissent
autour d’un même patient, quelle logique trouver aux soins si ceux-ci ne sont pas
coordonnés ? Que penser d’actes de soins isolés les uns des autres, alignés ou
juxtaposés sans cohésion d’ensemble ? Comment le patient peut-il être en
confiance s’il sent des disparités dans le fonctionnement du personnel de l’hôpital
ou des incohérences dans l’organisation de la prise en charge ?
2.3 Les conditions du travail de collaboration
Si la spécialisation des connaissances et la complexité des cas réels à
traiter poussent vers le travail de collaboration, R. MUCCHIELLI12 souligne
cependant que « travailler ensemble est autre chose pour chacun que de savoir
faire sa propre part de travail »
12
MUCHIELLI R. – le travail en équipe
36
En effet, la collaboration va demander à tous les acteurs impliqués dans la
prise en charge du patient de développer :
- Un sentiment d’appartenance à un groupe élargi
- Une meilleure transmission de l’information
- Une bonne organisation des soins autour du patient
- Une cohérence dans les prises en charge
- Une reconnaissance et une valorisation du travail de chacun
Le nombre de communications et d’articles consacrés à la collaboration
entre les individus semble prouver qu’elle n’acquiert pas facilement l’harmonie et
l’efficacité nécessaires.
Nombreux sont les blocages individuels, les obstacles institutionnels et les
entraves organisationnelles que nous regrouperons sous le terme de « freins » et
qui rendent difficile la réalisation d’un travail en commun.
Chaque chercheur, chaque auteur présente alors une perception différente
de la contingence et de la fragilité des arrangements organisationnels construits
par les acteurs .
Cependant, « malgré leurs différences, on trouvera chez les uns et chez les autres,
la même tentative d’analyser les modalités par lesquelles les acteurs trouvent des
moyens de coopérer, malgré les intérêts divergents » 13.
13
AMBLARD, BERNOUX, HERREROS - Les nouvelles approches sociologiques des organisations - Ed. du Seuil
-2005 -p. 8
37
2.4 La place de la communication dans la collaboration
Une des particularités de la collaboration concerne les liens que cette
formule exige entre ces membres de manière à rendre possible une convergence
des efforts de chacun et un partage de responsabilités.
Dans une équipe, les acteurs doivent s’écouter et se comprendre et, pour ce
faire, chacun doit s’exprimer librement. L’expression des idées et des points de
vue de chacun permet une bonne circulation des informations intrinsèques à la
tâche à réaliser. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que la communication
concerne aussi les informations extrinsèques, c’est-à-dire l’expression des
sentiments qui animent les membres de l’équipe.
Sans cette circulation d’informations, intrinsèques et extrinsèques à la tâche à
accomplir, des malentendus et des insatisfactions peuvent naître et provoquer
chez certains des membres le sentiment d’être isolés et de ne pas participer aux
cibles et tâches communes.
Bref, dans une équipe de travail, la communication est essentielle. Elle doit
englober autant les informations liées au sujet dont traite le travail que celles liées
aux sentiments qui animent les membres de l’équipe qui participent à la tâche.
Pour B. HONORE, travailler, c’est communiquer, chaque fois qu’il le faut,
non seulement pour échanger des informations, mais pour essayer de comprendre
ce que l’autre attend de soi, dans la réalisation d’un travail personnel. « Il faut donc
mener une forme ou une autre de communication, si l’on entend par
communication, dans une acceptation inspirée de Harbemas, précisément, un
processus d’intercompréhension, de compréhension réciproque, mené à partir de
la recherche d’un succès commun »14.
14
ZARIFIAN P. in KADDOURI M, ZAY D. Le partenariat – Définitions, enjeux, pratiques. Education
permanente, 1997, n°131, p.86
38
Néanmoins, il y a des conditions à réunir pour que cette intercompréhension
puisse aboutir, et ces conditions sont plus éthiques que cognitives. Se
comprendre, ce n’est pas seulement connaître le métier de l’autre, ni s’entendre
sur des questions techniques. Se comprendre, c’est assurer un égal aspect à
l’expressivité. Il y a donc nécessité de tenir compte de l’avis de l’autre pour le
comprendre et accepter de se placer dans une logique de collaboration.
On peut donc douter, au regard de cette approche, que les techniques de
communication, dont le développement est une orientation du projet Hôpital 2012
présenté par X. BERTRAND, puissent suffire à résoudre les difficultés qu’ont
parfois les individus à travailler ensemble. L’abondance et la transparence du
système d’information ne constitue nullement la garantie que les acteurs jouent le
jeu attendu par les dirigeants.
En effet, il me semble que la reconnaissance des principes communs ainsi
que les processus de recherche de solutions en cas de litiges, ne passent pas
seulement par l’amélioration de l’expression et de la communication entre
individus.
2.5 Le rôle du cadre dans la collaboration
Le cadre de santé, en qualité d’acteur du système hospitalier, est amené à
se pencher sur la problématique du cloisonnement et de la collaboration entre les
équipes soignantes.
En effet, la circulaire du 20 février 199015 portant sur les missions et rôles des
surveillants et surveillants-chefs hospitaliers, précise qu’il est garant de la qualité et
de la coordination des acteurs chargés des activités de soins. La réalisation de
l’articulation des diverses prestations est donc à la base de sa mission.
15
Circulaire n°00030 du 20 février 1990 portant mission et rôle des surveillants et surveillants chefs
hospitaliers.
39
Le cadre est l’interlocuteur privilégié qui crée et entretient des liens entre le
service et son environnement, en ajustant les contraintes et les exigences des uns
et des autres. Cette fonction d’intégrateur est essentielle pour le décloisonnement
de la structure.
3 - La prise en charge globale ou holistique du patient
Le mot « holistique » est l’adjectif du nom « holisme » ; d’après le
dictionnaire Le Petit Robert, il se définit comme suit: « Théorie selon laquelle
l'homme est un tout indivisible qui ne peut être expliqué par ses différentes
composantes (physique, physiologique, psychique) considérées séparément. ».
Holisme vient du mot grec holos qui signifie « entier ».
La santé holistique est simplement une approche globale à la santé (ou à la
maladie) qui prend soin de l’être humain sous toutes ses facettes. Ainsi, la prise en
charge de la personne dans toutes ses dimensions : biologique, psychologique,
socioculturelle et spirituelle, doit être une préoccupation constante de tous les
intervenants.
Par ailleurs, la santé n’est pas acquise définitivement mais n’est que le
résultat d’une constante recherche d’équilibre. C’est à ce titre que les principes de
prise en charge globale et de continuité des soins prennent tout leur sens et
s’inscrivent dans une démarche d’amélioration de la qualité. Les acteurs de santé
doivent de ce fait répondre aux exigences du présent et se préparer à celles du
futur.
De ce constat, apparaît clairement la nécessité d’une collaboration entre les
professionnels responsables des soins d’une personne, afin d’assurer une prise en
charge constante et cohérente dont la conception, la réalisation et l’adéquation
avec les besoins de l’usager détermineront le niveau de qualité des soins ?
40
Aussi, nous pouvons ajouter en citant B. HONORE que : « La notion de
santé est aujourd’hui une des plus difficiles à définir. Elle s’inscrit quotidiennement
dans notre discours pour dire une qualité fondamentale de notre existence sans
toutefois être comprise par tous de la même manière. Notre plus grande certitude
est que la santé désigne un domaine des préoccupations humaines où le collectif
et l’individuel se rencontrent étroitement »16.
La pensé holistique, avec l’approche globale du patient, permet d’aborder la
richesse d’un ensemble. Comme la démarche anthropologique prônée par Marie-
Françoise COLLIERE, l’approche globale restitue la personne dans son contexte
de vie en essayant de la comprendre par rapport à ses croyances, ses valeurs et
ses habitudes de vies. L’approche globale, c’est comprendre « que le fil
conducteur n’est pas fait d’un seul brin, mais que plusieurs fils tissent l’écheveau
de la vie »17.
Une conception globale de la santé sous-tend que l’homme est un être bio-
psycho-social devant s’adapter à son environnement . Il s’agit d’aider la personne
à gérer son adaptation au milieu par des comportements favorables à la santé.
Dans ce sens, la définition de l’O.M.S. de la santé en 1948 se veut complète
car elle ne résume pas la santé comme une absence uniquement de maladie mais
qu’il s’agit « d’un état de complet bien-être physique, mental et social ».
Le concept de soins est polysémique. Il tente d’intégrer une multiplicité
d’axes auxquels il s’agit de trouver une cohérence, une complémentarité en les
inscrivant dans un processus dynamique. En effet, pour chaque situation de soin
qui est par essence unique, il est nécessaire de trouver l’adéquation entre les
différents besoins de la personne.
Ainsi, si les techniques de soins sont plus ou moins compliquées à mettre
en place, le soin à proprement parler relève de la complexité. Comme le précise
M-F. COLLIERE : « le soin représente un sujet vaste et d’une grande complexité
16
HONORE B. – L’hôpital et son projet d’entreprise – Paris – Edition Privat – 1990 – p 71 17
COLLIERE M-F. – Promouvoir la vie – Paris – Masson Interéditions – 1982 - 305 p
41
(…) C’est un sujet difficile parce que facilement réductible à l’application d’une
technique, d’un système stéréotypé ou au contraire insaisissable en raison des
multiples aspects qu’il soulève ».
Aujourd’hui, il est indispensable que les soins prodigués à l’usager par
différents professionnels et dans différentes structures fassent l’objet d’une
coordination par les différents acteurs, en accord avec la personne, dans un projet
individualisé construit. Ainsi, la notion de continuité des soins et de prise en charge
globale prennent toutes leurs dimensions au travers de l’organisation des moyens
matériels et humains déployés, qu’ils soient dédiés à la prévention, au soin ou à la
post-cure.
42
METHODOLOGIE
43
1 - La recherche action
La recherche action est une méthode qui trouve son origine entre la
rencontre d’une demande de changement et d’un projet de recherche.
1.1 La méthode
« La méthode est un chemin vers l’inconnu où l’on apprend à reconnaître
des éléments connus »18
Elle est la voie, le chemin emprunté par toute recherche pour nous faire
connaître, c’est-à-dire nous permettre de « naître avec ». Ce chemin, jalonné
d’interrogations, d’autres expériences, d’autres modes de pensées, de
confrontations passe par des phases de transformation et de structuration. Il nous
permet de franchir d’autres dimensions d’inconnu.
1.2 La méthodologie
L’élaboration du mémoire de fin d’études et sa soutenance contribuent à la
validation des modules « analyse des pratiques et initiation à la recherche » du
programme d’études de l’I.F.C.S. La méthodologie utilisée pour l’élaboration de ce
mémoire est celle qui est préconisée par l’Institut de Formation des Cadres de
Santé de Laxou : la recherche-action.
Au sens étymologique, le terme de méthodologie signifie : « le discours qui
accompagne le chemin ». Dans ce sens, le discours est représenté par les jalons,
les questionnements qui guident la recherche.
18
Monsieur EDBAIECH. Psychosociologue. Intervenant à l’I.F.C.S. de LAXOU
44
1.3 La recherche-action
Cette méthode a été mise au point par Kurt LEWIN, psychosociologue
américain, dans les années 40.
A cette époque, il a été chargé par les américains de tenter une modification
des habitudes alimentaires aux Etats-Unis. Il a obtenu des résultats grâce à des
réunions-discussions, permettant aux américains de faire part de leurs expériences
et de leurs opinions. Ce travail a permis à Kurt LEWIN d’émettre ces conclusions :
� Pour obtenir un changement, il faut se centrer sur les forces qui agissent sur
le comportement de chaque membre du groupe »
� « la discussion permet de modifier l’équilibre de l’individu au niveau de
l’équilibre groupal. Il suffit d’un léger mouvement d’un des membres du
groupe pour que les autres perçoivent les prémices d’un
changement ».
C’est une manière spécifique d’intervenir dans un groupe, une entreprise
pour changer les représentations et les attitudes des acteurs.
Ainsi, Kurt LEWIN fonde la « dynamique des groupes » qui est définie
comme l’étude des phénomènes d’influence de changement et de communication
au sein des groupes.
L’originalité majeure de cette démarche réside sur sa prise directe sur le
terrain. Les grandes études sociologiques s’orientent dans deux directions qui sont
indissociables :
• La recherche répond à une démarche précise qui va entraîner une
prospection sur le terrain.
• La recherche demande de poser des bases conceptuelles et par
conséquent rend nécessaire l’examen de documents se rapportant au sujet
sous différents éclairages (philosophique, sociologique, psychologique,
historique…). Cette démarche de recherche-action consiste donc à mettre
la recherche au service de l’action.
45
Cette méthode servira, aussi, de trame à ce travail. Elle va nous amener à
effectuer des recherches bibliographiques en rapport avec le sujet qui nous anime,
des recherches sur le réel par le biais d’une enquête. Après analyse de cette
dernière, nous obtiendrons des propositions d’actions, ce qui nous permettra
d’utiliser ce travail comme support, ressource, outil dans les projets futurs de notre
nouvelle fonction.
2 - Le recueil d’informations
Le recueil d’informations peut se faire de deux façons :
- Le questionnaire qui vise à collecter des données en grand nombre et
ensuite à les analyser sous forme statistique. Il occupe une position
intermédiaire entre l’expérimentation et l’observation.
- L’entretien (directif ou semi-directif) où le chercheur connaît d’avance les
différents thèmes qu’il souhaite aborder. La chronologie et la manière
dont le chercheur va introduire ces thèmes sont laissés à son initiative.
Seule est fixée la consigne de départ.
2.1 Le choix de l’outil
La méthode de recueil d’informations par entretiens semi-directifs permet au
chercheur de retirer des informations et des éléments de réflexion riches et
nuancés lors d’un échange spontané avec les interlocuteurs.
Mon choix s’est donc porté sur cette forme d’entretien qui, n’étant pas
totalement ouverte ni directive m’a permis de tester mes hypothèses de travail,
sans exclure pour autant le développement susceptible de les nuancer ou des les
corriger.
Les entretiens semi-directifs, dans leur approche qualitative, sont avant tout
caractérisés par une rencontre interpersonnelle. Aussi, en m’appuyant sur une
46
série de questions ouvertes, j’ai tenté de faciliter l’expression de mes interlocuteurs
an adoptant une attitude bienveillante.
Tout en les recentrant sur l’objet de mon étude, j’ai porté une attention
particulière pour leur permettre de s’exprimer naturellement et dans un ordre qui
leur convenait.
2.2 Le choix de la population
Mon cadre de recherche a été volontairement orienté vers la psychiatrie et
le secteur médico-social en raison de mon investissement professionnel et à mon
désir d’approfondir mes réflexions et mes connaissances.
La psychiatrie, de par son approche globale de la personne, a pris
conscience depuis longtemps de la nécessité d’intégrer le partenariat et la
collaboration dans ses pratiques.
Puis, au regard de mon objet d’étude, le choix des personnes à interviewer
s’est naturellement porté vers un chef de service du secteur médico-social
(entretien n°1), un cadre supérieur de santé et un cadre de santé (entretiens 2 et
3), une infirmière et un cadre de santé (entretiens 4 et 5) ainsi qu’un médecin.
L’ensemble de ces professionnels a une solide expérience du travail de
partenariat. Leur diversité professionnelle permet d’enrichir ma réflexion par une
mise en évidence de points communs et de divergences liés à leur positionnement
institutionnel.
2.3 Les modalités du recueil d’informations
J’ai établi un premier contact avec chaque professionnel durant lequel le
thème de ma recherche a été succinctement exposé.
Afin de réaliser mes entretiens, je me suis appuyée sur un canevas préétabli
(annexe 1) comprenant 5 questions.
Les rencontres qui ont duré entre 30 minutes et une heure quinze se sont
déroulées dans des lieux respectant toute confidentialité. Pour recueillir l’ensemble
47
des informations, j’ai utilisé un dictaphone dans le souci de ne négliger aucun des
éléments exposés et après autorisation des professionnels concernés.
3 – Avantages et inconvénients de l’outil
3.1 Les points forts
L’investigation par entretien m’a permis d’établir avec mes interlocuteurs
une véritable relation où la confiance, l’intérêt du point de vue de l’interviewé et la
reformulation de ses idées ont été autant d’éléments nécessaires à une approche
qualitative de ma démarche de recherche.
Le canevas d’entretien a été un outil primordial afin d’affiner l’analyse des
situations de partenariat dans lesquelles se trouvent engagés les professionnels.
Les propos recueillis ont enrichi mes connaissances et me permettront sans
aucun doute d’adapter, en qualité de futur cadre, mon style de management.
3.2 Les points faibles
La méthode de l’entretien, couramment pratiquée au cours de mon exercice
professionnel, me semblait réalisable sans trop de difficultés.
Cependant, réaliser les entretiens, les retranscrire et les analyser demande
une rigueur de travail et une distanciation vis-à-vis de mes connaissances.
De plus, l’étude n’est pas exhaustive et l’échantillon de population enquêtée
est faible. Par conséquent, le nombre restreint d’entretiens ne permet pas
d’affirmer une généralité mais uniquement une réalité de situation à une période
donnée.
Par ailleurs, la méthode recherche-action implique la neutralité du chercheur
qu’il m’a été difficile à trouver en raison de mon expérience professionnelle.
48
ANALYSE DES ENTRETIENS
49
Cette étape de mon travail qui consiste à analyser les entretiens réalisés
auprès des professionnels va me permettre de percevoir le positionnement et
l’implication de chacun au regard du travail en partenariat.
Elle confirmera ou, au contraire, infirmera mon postulat de départ par
l’évaluation de la pertinence des hypothèses émises en début de recherche.
J’analyserai chaque entretien à l’aide de tableaux. Ceux-ci comporteront
deux rubriques : les propos recueillis et les mots clés repérés à chaque question.
Ensuite, je présenterai un tableau récapitulatif des mots clés communs à tous les
entretiens pour chaque question.
Enfin, je proposerai une analyse commentée de l’ensemble des entretiens.
50
Entretien n°1 – Chef de service éducatif – Secteur médico-social
Propos recueillis Mots clés
Que représente le
travail en partenariat
pour vous ?
� Champs de
compétences
différents
� Travailler ensemble
� Objectifs communs
� Prises en charge
conjointes centrées
sur le résident
� Travailler en bonne
intelligence
� Partage de moyens
� Formations continues
ensemble
Compétences
Collaboration
Objectifs communs
Prises en charge centrées sur la personne
Formations communes
Quels sont les
éléments facilitateurs
de ce partenariat ?
� Echange qui
s’enrichit de la
présence d’autres
� On voit vite
l’avantage pour le
résident
� Convention
� En une réunion, çà
nous paraît évident. Il
y a des structures
adaptées
� Faire connaissance
� Les gens ont
vraiment fait un bout
de chemin
� Si on laissait plus de
liberté
Richesse des
expériences
Partage des
compétences
Convention
adéquation
Amélioration de la qualité
des prises en charge
Prise de conscience des champs d’intervention
Autonomie d’organisation
51
Quelles sont les
sources de difficultés
du partenariat ?
� Magma institutionnel
� Chacun restait sur ses positions
� Le partenariat a été
long parce que les
gens avaient peur de
perdre quelque chose
� Les autres savent
mieux faire
� Les gens n’étaient
pas prêts à faire ce
genre de réflexion
� Les personnels
vivaient le partenariat
comme un échec
� Image de l’hôpital
psychiatrique
� Méconnaissance de
l’autre structure
� Culpabilité, douleur
de ne pas pouvoir
faire
� Quand on vient d’une
MAS, difficulté
d’accès aux soins
psychiatriques
� Personnel pas formé
pour faire face à une
crise
� Rôle de l’I.D.E. en
MAS
Lourdeur administrative
Inadéquation des prises
en charge
Méfiance
Crainte par rapport aux compétences
Réflexion Manque de confiance
Lieu de traitement
chimiothérapique
Méconnaissance
Dimension affective
Accès aux soins
Compétences
Investissement
Quels sont les
bénéfices pour le
résident ?
� Bien-être � Système de visite à
domicile, pas de rupture
� Choix pensés par deux équipes avec des objectifs conjoints
� Prise en charge globale
Bien-être Continuité
Concertation
Dimension holistique
52
Quel est le rôle du
cadre dans le travail
en partenariat ?
� Donner les moyens
de rencontrer les autres acteurs
� Ouverture d’esprit � Conseils � Organisation de
réunions � On essaye de donner
l’orientation � Faciliter le travail sur
le terrain � Faire vivre le
partenariat pour des retombées positives sur le résident
Rencontre
Ouverture d’esprit
Conseils
Organisation
Communication
Concertation
Coordination
Positionnement
53
Entretien n°2 – Cadre supérieur de Santé
Propos recueillis Mots clés
Que représente le
travail en partenariat
pour vous ?
� Il faut que les gens
se connaissent
� Il faut travailler
ensemble
� Instaurer une
communication
� Eviter les isolats, ne
jamais s’auto-
satisfaire
Connaissance
Collaboration
Communication
Décloisonnement
Quels sont les
éléments facilitateurs
de ce partenariat ?
� Deux équipes partie
prenante
� C’est pas possible
tout seul
� Respect de l’individu
� Il faut être capable
d’entendre que
l’autre travaille
différemment � On travaille sur nos
compétences
Implication
Collaboration
Respect
Collaboration
Compétences
Quelles sont les
sources de difficultés
du partenariat ?
� On envoie quelqu’un
travailler ailleurs
avec des règles
hospitalières dans la
tête
� Les personnels du
médico-social, ils ont
pas la même culture
que nous
� Les infirmiers ont
Champs d’intervention
différents
Culture
54
peur de perdre leur
identité
Identité
professionnelle
Quels sont les
bénéfices pour le
résident ?
� Il a immédiatement le
statut de citoyen � Le patient a une
liberté
� La personne reprend
son rôle de sujet de
son projet � Si besoin d’être ré
hospitalisé, ce n’est
pas une rupture de
son parcours
Citoyen
Liberté
Sujet
rupture
Quel est le rôle du
cadre dans le travail en
partenariat ?
� le cadre
coordonateur
� On a à mener des
actions conjointes
� Le cadre doit
analyser
� Il faut interroger les
pratiques
� Le cadre doit être
régulateur
Coordination
Cohérence
Analyse des pratiques
régulation
55
Entretien n°3 – Cadre de Santé
Propos recueillis Mots clés
Que représente le
travail en partenariat
pour vous ?
� travailler en
partenariat représente
une ouverture d’esprit
et des échanges
enrichissants � c’est avoir un autre
regard sur les
pratiques � comment on compose
ensemble pour mener
des projets communs
décloisonnement
analyse des pratiques
Projets coordonnés
Quels sont les
éléments facilitateurs
de ce partenariat ?
� On a la chance de
pouvoir se voir
� Rediscuter des
pratiques
� Les équipes savent
qu’elles peuvent
compter sur lui et
vice-versa
� C’est Mme L. qui
coordonne les deux
structures
Rencontre
Analyse des pratiques
Collaboration
Coordination
Quelles sont les
sources de difficultés
du partenariat ?
� Confrontation des
prises en charge
sanitaires et médico-
sociales � Ce sont deux
domaines qu’on ne
connaissait pas � Les deux secteurs
n’ont pas l’habitude
de travailler ensemble � On se sentait
Champs d’intervention
différents
Méconnaissance
Cloisonnement
56
dépossédés de
certaines choses. On
peut pas avoir la main
prise sur le projet du
patient � L’éducateur se
positionnait comme
chef des infirmiers
Identité
professionnelle
Rôles et missions de
chacun
Quels sont les
bénéfices pour le
résident ?
� C’est de pouvoir lui
proposer une
structure
� Le patient va avoir
une période
d’évaluation
� Sortir de la chronicité
à l’hôpital
Adéquation
Evaluation
Projet de vie
Quel est le rôle du
cadre dans le travail
en partenariat ?
� Ca va être de
coordonner tous les
projets � Le cadre est le pivot
de la coordination et
de la collaboration � Remettre en place les
missions � Nouvelle dynamique
de projets
57
Entretien n°4 – I.D.E.
Propos recueillis Mots clés
Que représente le
travail en partenariat
pour vous ?
� C’est l’ouverture sur
un autre type de
structure
� Cà nous donne un
complément de
compétences
� Cà nous a permis
d’aller visiter leur
structure, de voir ce
qu’ils pouvaient faire
� Envisager justement
un projet de vie
� Cà nous permet de
travailler autrement
avec les patients
� Echanges, chacun
avec sa spécificité
Ouverture
Compétences
Découverte
Projet de vie
Analyse des pratiques
Regards croisés
Quels sont les
éléments facilitateurs
de ce partenariat ?
� Ils voient les patients
d’une autre manière
� Lier connaissance
� On avait des patients
qui relevaient de leur
structure
� Ils ont proposé de
prendre des patients
pour valider
l’orientation
� Il faut beaucoup de
motivation
� Ils ont été invités à
des rencontres
� On leur dit qu’il suffit
d’aborder les
personnes autrement
Regards différents
Connaissance
Constat
d’inadéquations
Evaluation
Motivation
Rencontre
Echanges de
pratiques
58
Quelles sont les
sources de difficultés
du partenariat ?
� Etiquette CPN
� Il y a agressivité
� Difficultés
d’organisation en
terme de disponibilité
du personnel
� Personnel chronicisé
� Convention
Etiquette Comportement
Organisation
Convention
Quels sont les
bénéfices pour le
résident ?
� Cà permet à l’équipe
de voir le patient
différemment
� Projets de sortie
� On leur donne la
possibilité d’évoluer
� Ces patients sont
partis et on les a vus
changer
Regards différents
Projet
Evolution
Quel est le rôle du
cadre dans le travail en
partenariat ?
� Le cadre est la
référence qui établit
le lien
� Il a un rôle de
coordination
� Il est le pivot de
l’organisation
� Il doit être présent,
tenu au courant
Lien
Coordination
Organisation
Proximité -
information
59
Entretien n°5 – Cadre de Santé
Propos recueillis Mots clés
Que représente le
travail en partenariat
pour vous ?
� Complémentarité
� Compétences de
chaque service qu’on
identifie
� Qu’on réponde au
mieux à la prise en
charge du patient
� C’est savoir travailler
avec les autres pour
répondre au projet
Complémentarité
Compétences
Qualité
Travailler ensemble
Quels sont les
éléments facilitateurs
de ce partenariat ?
� Convention
� ARS
� Les agents et
l’encadrement
comprennent qu’on
n’a pas toute la
compétence pour
répondre à toutes les
difficultés des prises
en charge
� Les professionnels
comprennent que les
patients puissent aller
dans les structures les
plus adaptées
� Prendre en compte et
prendre soin des
autres
� Mélanger les
compétences
� Cohérence dans l’offre
de soins
� Les regards croisés
Convention
ARS
Collaboration
Adéquation
Respect
Compétence
60
amènent une
compétence commune
Quelles sont les
sources de difficultés
du partenariat ?
� Priorités différentes
� Cloisonnement des
compétences
� Méconnaissance
� Cultures différentes
� On leur enlève une
partie de leur
spécificité du niveau
de leurs compétences
� Une dimension
affective est souvent
présente
Priorités
Cloisonnement
Méconnaissance
Culture différente
Identité
professionnelle
Dimension affective
Quels sont les
bénéfices pour le
résident ?
� On aura des portes
d’ouverture sur des
structures plus
accueillantes
� Le patient est
considéré comme un
sujet qui le ramène à
une citoyenneté
� C’est de prendre
l’individu dans un
projet
� Continuation de prise
en charge
Adéquation
Sujet-citoyenneté
Projet
Continuité
Quel est le rôle du
cadre dans le travail
en partenariat ?
� Coordination entre les
deux secteurs
� Veille au bon
fonctionnement
� Répondre à nos
missions
� Le trait d’union entre
les deux logiques – le
lien ou le relais peut
être fait par le cadre
de santé
Coordination
Organisation
Mettre du sens
Lien
61
Entretien n°6 – Médecin
Propos recueillis Mots clés
Que représente le
travail en partenariat
pour vous
� Besoin de réinsertion
dans la cité � Cà suppose un
partage de la prise en
charge, des
compétences
complémentaires � Il faut aussi apprendre
à se connaître � Il y a une façon de
considérer la
personne qui est
différente � Il y a un
enrichissement
mutuel � On s’oriente vers de la
collaboration où
chacun amène sa
spécificité
Réinsertion
Décloisonnement Compétences Complémentarité
Faire connaissance
Culture différente
Enrichissement
Collaboration
Quels sont les
éléments facilitateurs
de ce partenariat ?
� On est arrivés à une
collaboration � Ensemble on réussit
à trouver des
solutions � Il y a une vie
commune avec des
complémentarités et
une entraide mutuelle � Il y a eu des
rencontres avec les
cadres � On a une certaine
disponibilité � On a toujours ré
Collaboration
Complémentarité Entraide Echanges
Rencontres
Disponibilité
62
hospitalisé quand il y
a eu des problèmes
� La proximité de
chaque catégorie de
personnel est
facilitante � Il faut une certaine
souplesse pour
passer du travail à
l’hôpital au travail
dans une structure
médico-sociale
Adéquation
Proximité
Souplesse
Quelles sont les
sources de difficultés
du partenariat ?
� Nous on avait une
attitude très
protectrice et leur
équipe sont plus en
mesure d’oser
proposer des choses
� Les infirmiers ont à
travailler au sein
d’une autre équipe et
çà a été difficile
Cultures différentes
Cloisonnement
Quels sont les
bénéfices pour le
résident ?
� C’est de pouvoir
sortir de l’hôpital.
C’est vraiment une
transition
� Le patient retrouve
son statut de sujet,
citoyen � La personne est plus
actrice de projet, de
sa vie
Sortie
Transition
Citoyenneté – sujet
Acteur de son projet
de vie
63
Quel est le rôle du
cadre dans le travail en
partenariat ?
� C’est d’essayer de
coordonner l’équipe
infirmière
� C’est de faire des
rencontres, de
favoriser les liens
� De soutenir aussi les
projets
� Il permet la
collaboration, la
communication
Coordination
Rencontres
Liens
Soutien
Collaboration
communication
64
Récapitulatif des mots communs à chaque entretien et chaque question
Mots clés communs aux 6 entretiens
Définir le partenariat
� collaboration
� formations communes
� décloisonnement
� faire connaissance
Eléments facilitateurs du partenariat
� Richesse des expériences
� Convention
� Collaboration
� Motivation
� Rencontres
� Adéquation
Difficultés du partenariat
� méconnaissance
� perte d’identité
professionnelle
� Cloisonnement
� Méfiance
Bénéfice pour le patient/résident
� Continuité des prise en charge
� Sujet citoyen
� Projet de vie
Rôle du cadre de santé
� Coordination
� Collaboration
� Organisation
� Analyse des pratiques
� Communication
� Lien
65
3 – Analyse commentée des entretiens
Cette étape de mon travail va me permettre de percevoir l’articulation entre
les secteurs sanitaire et médico-social ainsi que le rôle du cadre de santé au
regard du travail de collaboration.
3.1 La représentation du partenariat pour les professionnels
sanitaires et médico-sociaux
Si je me réfère à mon cadre conceptuel, le partenariat peut se définir
comme une interaction durable pour la réalisation d’un projet.
Le partenariat naît de la complexification des trajectoires des usagers et les
pathologies présentées demandent une prise en charge globale.
Cependant, le partenariat est traversé par une prise de conscience
générale : il est difficile d’assurer une prise en charge efficace en se limitant à la
spécificité seule de chaque secteur évoqué. De ce fait, le travail interdisciplinaire,
mais aussi l’échange entre structures est de plus en plus important.
La diversité d’écoute de la demande de l’usager, de regards sur une même
situation représente un avantage indéniable pour la qualité des prises en charge.
La coordination des actions de tous devient une volonté générale. Par conséquent,
l’importance de la connaissance réciproque entre intervenants est soulignée.
Corinne MERINI définit le premier principe de partenariat comme étant
Le principe d’association :
Ce qui fonde un partenariat, c’est l’association autour d’un projet commun, que ce
soit un problème à traiter ou une réalité à partager. Nous ne sommes pas dans un
partenariat décidé par un ministère mais dans un partenariat qui n’a de sens que
par rapport à un objectif commun.
66
L’ensemble des personnels interviewés s’accorde à dire que le partenariat
repose sur le fait de travailler ensemble afin d’optimiser la qualité et la continuité
des prises en charge des patients/résidents. De ce fait, la coordination, la
continuité et l’interdisciplinarité sont autant de notions qui s’inscrivent dans une
logique de décloisonnement entre les secteurs sanitaire et médico-social.
Entretien n°1 : « Le partenariat, c’est des champs de compétences différents qui
arrivent à travailler ensemble avec des objectifs en commun… »
Entretien n°3 : « Cà représente des regards croisés tout en étant
complémentaires… C’est vraiment comment on compose ensemble pour pouvoir
réussir à mener ensemble des projets coordonnés… »
Entretien n°5 : « Je le définirais comme de la complémentarité, c’est-à-dire qu’on
se base sur les compétences de chaque service et qu’on réponde au mieux à la
prise en charge du patient en lui apportant une qualité… »
Il s’agit ici de favoriser ce qui peut permettre des approches, un langage et
des projets partagés en mobilisant ainsi différentes compétences. D’ailleurs,
l’ensemble des personnes interviewées convient de la nécessité de collaboration,
de communication et de partage afin d’optimiser la qualité des prises en charge.
Dans cette représentation du partenariat, les personnes interrogées
soulignent l’importance des compétences différentes mises au service de l’usager.
De ce fait, le décloisonnement entre secteur sanitaire et médico-social est mis en
valeur comme levier de la collaboration et de la complémentarité. L’ouverture
d’esprit représente également un facteur essentiel du partenariat.
L’action de partenariat représente donc une démarche réunissant des
ressources qui émanent de champs d’activité divers. Les compétences de chacun
sont complémentaires et les fonctionnements sont différents. L’objectif reste la
mise en œuvre d’une action globale afin de résoudre un problème complexe.
67
3.2 Les éléments facilitateurs du partenariat
Pour travailler ensemble, il est nécessaire de connaître les ressources
disponibles. L’ensemble des entretiens réalisés évoque la connaissance des
autres professionnels comme élément facilitateur du partenariat. Cette
connaissance passe par les échanges, les rencontres, termes utilisés très
régulièrement dans les entretiens.
Entretien n°1 : « c’est une question de savoir qu’il y a des structures qui sont
adaptées pour certains cas… »
Entretien n°4 : « Cà nous a permis de lier connaissance… Ils ont été invités à des
rencontres, voir comment on s’y prenait… »
Le principe d’identification, décrit par Corinne MERINI précise que chaque
acteur accepte de se reconnaître dans des références communes, même réduites.
Avec des logiques, des rapports différents, ils se reconnaissent dans une identité
différente car ils ont des choses en commun.
Il est donc important de découvrir qui est qui, quelles sont les missions et
les manières de procéder propres à chacun. Ainsi, une interconnaissance et des
relations de confiance sont mises en avant et représentent la base du travail en
collaboration efficace.
Plusieurs acteurs interviewés font état de l’intérêt d’une meilleure
connaissance des équipes, de la richesse des échanges et du respect de l’autre.
Une des étapes du travail en partenariat est celle de la connaissance de la
logique de fonctionnement des différents services ou institutions. Il s’agit
essentiellement de prendre conscience des places, des rôles et des
responsabilités respectives.
A mon sens, travailler avec d’autres professionnels suppose d’aller à la
rencontre de l’autre et d’entrer dans sa logique. Les professionnels sont alors
68
amenés à développer une culture de la concertation au sens de la capacité à
échanger avec des acteurs d’horizons différents, de confronter les approches et
les opinions dans le respect de l’autre. En même temps, apprendre à se connaître
implique aussi d’élaborer des langages communs, créer des liens et réfléchir aux
complémentarités possibles entre secteurs.
La notion de collaboration est très largement citée pour faciliter le
partenariat.
Entretien n°2 : « On a ré-insisté sur les espaces de collaboration… »
Entretien n°3 : « On a remis les choses à plat sur le travail en collaboration et là
aussi çà tourne très bien … »
Entretien n°5 : « La prise de conscience des professionnels que tout ne peut se
faire ni au niveau du sanitaire, ni au niveau du médico-social… ».
La collaboration prend une signification assez proche pour l’ensemble des
personnes rencontrées et ce travail est reconnu comme une nécessité.
Entretien n°2 : « Il faut beaucoup de souplesse… Etre capable d’entendre que
l’autre travaille différemment mais que amener son histoire, sa compétence, sans
bousculer l’autre… C’est vraiment de la collaboration… »
En somme, la diversité professionnelle face à la demande d’une prise en
charge globale rend nécessaire la collaboration. Chacun doit alors apprendre à
découvrir l’autre et à travailler ensemble.
3.3 Les difficultés liées au travail en partenariat
La collaboration interprofessionnelle ne va pas de soi. Il est intéressant de
relever les freins identifiés par les personnels. Ces freins m’ont été présentés
comme responsables des difficultés à travailler ensemble.
69
Corinne MERINI, lorsqu’elle présente le principe de rupture, précise que
chaque acteur qui fonctionne de façon authentique dans le partenariat, éprouve le
besoin de rompre avec un mode de fonctionnement antérieur.
L’intensification de la collaboration avec des intervenants d’autres secteurs
questionne les rôles, les manières de fonctionner et même les identités
professionnelles de chacun. Le partenariat bouscule le cadre de travail et force à
une remise en question. Ainsi, motivation et investissement sont repérés afin de
favoriser les relations entre les acteurs.
Entretien n°2 : « …On travaille à l’hôpital et on envoie quelqu’un de l’hôpital avec
des règles hospitalières dans la tête travailler ailleurs. Donc çà a été difficile avec
deux champs d’intervention complètement différents… ».
Entretien n°4 : « Ce qui était quand même très difficile, c’est d’avoir cette
confrontation des prises en charge entre d’un côté le soin et de l’autre côté
quelque chose de plus social… »
Entretien n°5 : « On n’a pas forcément les mêmes logiques, les mêmes
contraintes… ».
La collaboration entre les secteurs sanitaire et médico-social expose chacun
des acteurs qui s’y investit au questionnement de son efficacité professionnelle, au
doute, au sentiment d’échec et à la nécessité d’un deuil de sa capacité à guérir ou
à rendre autonome. Cependant, cette collaboration induit des changements dans
les pratiques des professionnels qui voient là une source d’instabilité. La crainte
des professionnels est de voir remis en question des modes de fonctionnement qui
tirent leur légitimité de leur pérennité
Entretien n°1 : « Au départ, les gens vivaient le partenariat comme un échec.
Pour eux, on garde au maximum les résidents, même si la structure n’est pas
adaptée parce qu’on ne fait pas confiance à l’autre… A l’hôpital psychiatrique, on
ne fait rien avec les gens, on ne fait que donner des traitements…»
70
Le cloisonnement est donc une valeur négative. Il produit les effets inverses
de la collaboration sur la qualité des prises en charge. Il me semble donc
nécessaire de sortir de l’isolement de chaque spécificité. En effet, le risque est de
focaliser l’effort de qualité sur le soin ou l’intervention ; chaque intervenant n’est
alors soucieux que de la qualité de son intervention et s’adresse ainsi à une seule
« facette » du patient ou du résident.
Entretien n°4 : « Difficulté de se rencontrer spontanément… Il y a très peu
d’échanges… »
Ainsi, les professionnels, de quelque secteur qu’ils soient, développent
souvent un sentiment d’appartenance à une équipe ou à un groupe professionnel
dont le risque est d’ignorer les besoins de l’usager. On retrouve alors le désir de
vouloir affirmer son identité professionnelle et à la faire reconnaître par les autres
professionnels en construisant « sa conception » de la prise en charge, en
développant « son jargon » et en se donnant de la personne prise en charge « sa
vision », une vision correspondant à son mode d’intervention et en cohérence avec
sa propre identité.
Entretien n°5 : « …On leur enlève une partie de leur spécificité au niveau de leurs
compétences… » .
3.4 Les bénéfices pour l’usager
Le principe de besoin, selon Corinne MERINI, amène les partenaires à faire
l’hypothèse que travailler en collaboration aura un effet positif sur le traitement du
problème visé. En ce qui nous concerne, le problème visé correspond à la qualité
de la prise en charge de la personne en difficulté.
La continuité de la prise en charge est mise en valeur par l’ensemble des
personnels, qu’ils soient du secteur sanitaire ou du secteur médico-social.
L’idée de prendre en considération l’amont et l’aval de la prise en charge est
cité dans l’entretien n°2. En effet, il semble important de créer un lien et favoriser
71
les passages d’une institution à une autre sans que cette situation soit synonyme
de rupture dans le projet de l’usager : «… Le retour à l’hôpital doit être un moment
de crise… Quand çà pêche avec quelqu’un qu’on a inséré dans un autre milieu…
c’est garantir qu’on puisse travailler l’hospitalisation, qu’elle soit un moment dans
son chemin, dans la continuité de son projet et pas un moment de rupture… ».
De ce fait, l’intervention simultanée ou successive de plusieurs acteurs est parfois
nécessaire. L’importance du lien est donc centrale. Il est indispensable, à mon
sens, de construire et consolider les liens entre les structures afin d’éviter une
rupture pour l’usager lors d’un éventuel passage d’une institution à une autre.
Cette continuité implique un changement de culture, d’habitudes de travail.
Il s’agit donc d’accorder une attention particulière aux passages et transitions entre
deux lieux.
Trois entretiens font intervenir la notion de citoyenneté retrouvée lors du
passage du patient du secteur sanitaire au secteur médico-social. Il est alors
nécessaire d’inscrire l’individu dans sa trajectoire de vie en tenant compte de son
environnement familial et social, passé et actuel. La construction, avec lui, d’un
avenir respectueux de son projet de vie s’opère au regard de sa singularité et de
son altérité. L’individu et ses potentiels présents ou en devenir représentent la
priorité de sa prise en charge.
Entretien n°5 : « Pour le patient, l’avantage de ce partenariat, c’est aussi le fait
d’être non plus considéré uniquement comme un patient mais plutôt comme un
sujet qui le ramène à une citoyenneté que jusque-là il n’avait plus. A un moment
donné, c’est de prendre l’individu dans un projet…qui répond à ses besoins… »
Il convient donc de rechercher l’ouverture et de construire sans cesse de
nouveaux partenariats pour conforter la place du sujet dans la cité.
Nous nous trouvons alors dans la vision holistique du sujet. En effet, le soin
passe par une vision élargie des actions à développer afin de saisir la
72
problématique du patient dans son intégralité. Néanmoins, le patient n’a été cité
que deux fois comme acteur de sa prise en charge ; les troubles psychiatriques ne
permettent pas que le patient soit systématiquement consulté par les
professionnels sur son projet de vie. Le risque est de penser que le soignant ou
l’équipe de soins détient « la » solution.
Entretien n°1 : « Le but du jeu, c’est d’arriver à une prise en charge globale… ».
Cependant, l’approche multidimensionnelle de l’individu permet d’envisager
sa problématique de façon globale.
3.5 Le rôle du cadre de santé
D’après l’ensemble des témoignages, nous pouvons constater que le cadre
de santé répond à certaines missions spécifiques pour améliorer le travail en
partenariat entre secteurs sanitaire et médico-social.
Certains termes précis sont utilisés par les personnes interrogées tels que
coordination, collaboration, communication.
J’aborderai très succinctement la notion de collaboration puisqu’elle a été traitée
dans la partie des éléments facilitateurs du partenariat.
� La coordination
Il est difficile d’avoir des situations claires à partir du moment où ce sont des
êtres humains qui travaillent ensemble, qui parlent et qui sont en interaction, dans
toute leur différence et leur singularité. C’est pourquoi, il est nécessaire que cette
hétérogénéité puisse être coordonnée afin de trouver un sens.
Roger MUCCHIELLI disait : « Le chef est moins celui qui commande ou
impose que celui qui, incarnant le groupe et sa communauté d’objectifs, fait
converger et coordonne les « influences » de tous les membres ».
Le cadre de santé se trouve à la jonction de la coordination des actions afin
de préserver la complémentarité, la richesse et l’efficacité des prises en charge
dans l’objectif d’une meilleure qualité des soins.
73
Entretien n°5 : « Le cadre doit toujours être en arrière plan pour conseiller,
orienter, rassurer le personnel. Il assure un rôle de coordination entre les deux
secteurs… »
Ainsi, la sphère dynamique et en mouvement de la coordination permet aux
personnels de fonctionner ensemble, dans l’inter professionnalité, afin que le
patient puisse bénéficier d’un lien continu dans sa prise en charge.
� La communication
Elle est le vecteur essentiel de la cohésion. La communication a pour but
l’échange et le partage, l’articulation du travail des différents acteurs et le maintien
de la motivation en la recentrant sur un objectif commun. Si l’importance de la
communication est mise en avant par quatre personnes, c’est que sans elle, tout
se sclérose, se replie et meurt.
Si je me réfère à mon cadre conceptuel, les acteurs d’une prise en charge
doivent « s’écouter et se comprendre et pour ce faire, chacun doit s’exprimer
librement ».
Entretien n°4 : « A notre niveau, nos échanges entre service d’hospitalisation et
structure médico-sociale ne peuvent avoir lieu si le lien n’est pas établi… »
Entretien n°5 : « Il est très difficile de se rencontrer spontanément car il y a très
peu d’échanges de professionnels et je crois que c’est l’encadrement…qui peut
déjà être la connexion entre les deux mondes… »
� La collaboration
Elle est citée par tous les professionnels interviewés comme levier du travail
en partenariat. La réussite ou l’échec de la collaboration dépend de la capacité du
cadre de santé à créer du lien par les rencontres qui doivent avoir lieu de façon
constante.
« L’ouverture vers l’extérieur » impose au cadre de santé la capacité de
favoriser la rencontre entre deux cultures professionnelles afin de permettre
l’émergence d’une compétence collective. Cependant, ce « travailler ensemble »
n’a rien de spontané. Ainsi, la collaboration peut prêter une certaine confusion sur
74
les missions et les rôles de chacun. Ce flou identitaire peut représenter un frein au
travail de collaboration.
Entretien n°2 : « Depuis qu’on a réinterrogé nos pratiques, qu’on a remis du sens
dans notre collaboration et qu’on a montré une réelle envie de travailler
ensemble… Mais je pense que çà doit partir du cadre… ».
Le cadre conserve une marge d’autonomie qu’il peut mettre au service d’un
effort de rassemblement et de compromis – toujours provisoires – entre intérêts
divergents.
75
RETOUR SUR HYPOTHESES
76
Cette étude, incomplète et perfectible, a confirmé la nécessité du partenariat
entre secteurs sanitaire et médico-social. Elle m’a permis de mettre en évidence
les positionnements des professionnels interrogés pour maintenant les confronter
à mes hypothèses de départ qui étaient :
Le décloisonnement entre les secteurs sanitaire et médico-social est
nécessaire ; il permet de proposer des réponses croisées aux besoins et
attentes variées des personnes et une complémentarité des interventions.
Il a été mis en valeur que les compétences différentes optimisent le fait de
travailler ensemble et l’usager n’est pas « écartelé » entre les différents
intervenants. L’intérêt de la diversité des points de vue est mis en exergue et
renvoie à des notions d’enrichissement au travers des différences des cultures
professionnelles et des pratiques de chaque acteur. L’articulation des
compétences est indispensable pour accomplir la mission de répondre à des
objectifs communs de prise en charge du patient/résident. La convergence des
efforts favorise la réalisation d’une tâche commune.
Le partenariat correspond au processus de collaboration des deux
secteurs afin d’assurer la prise en charge globale des patients.
Nous entrons dans le registre du sens et dans le processus de
collaboration. Il existe une prise de conscience du rôle de chacun et des objectifs
communs. La continuité et le lien entre les interventions implique un changement
des habitudes de travail. Une relation existe entre la prise en charge holistique et
le travail en collaboration. Il apparaît que l’expertise développée par les différentes
catégories de professionnels permet de cibler les besoins et les ressources des
patients/résidents dans une approche multidimensionnelle.
Cependant, le partenariat n’est pas spontané entre les acteurs des secteurs
sanitaire et médico-social. Se connaître, s’accepter est le premier passage vers la
compréhension d’autrui. Si nous considérons la prise de conscience des
compétences de chacun comme préliminaire de la constitution du partenariat, nous
77
pouvons reconnaître les ressources des autres professionnels et œuvrer ensemble
pour le bénéfice constant du patient/résident.
Il importe que soit pensée la coordination des actions, que les niveaux
de travail en commun soient parlés et sans cesse interrogés et que la
rencontre soit aussi celle de cultures différentes. Le rôle du cadre est
essentiel dans cette perspective.
Le travail du cadre de santé se caractérise par des activités multiples de
mise en cohérence, d’intermédiaire entre les différentes logiques, les personnes et
les groupes. Il s’agit d’un travail d’articulation. Le respect de la communication, de
la parole, de la décision commune mais aussi l’écoute sont des préalables
nécessaire à atteindre au quotidien.
La rencontre entre tous les acteurs des prises en charge représente une
nouvelle forme de relation qui favorise les échanges de points de vue, la
confrontation et l’émergence d’une réflexion commune. Ainsi, les personnels
s’engagent dans une nouvelle forme de travail favorisant la richesse et la créativité
des interventions. Cette attitude nous place dans le concept d’humilité par rapport
à l’action des professionnels et implique le décloisonnement entre les deux
secteurs. Le cadre de santé incite donc à la recherche de complémentarité et de
rapprochement de cultures professionnelles en contribuant à l’enrichissement
réciproque et à une plus grande efficacité.
Nous venons de voir que les hypothèses proposées au début de ce travail
de recherche se vérifient en regard des différentes analyses. L’objectif est donc de
répondre au mieux aux besoins de la personne prise en charge en organisant
l’articulation des professionnels des secteurs sanitaire et médico-social.
78
PISTES D’ACTIONS
79
Cette dernière partie de mon travail correspond à situer le rôle du cadre de
santé à partir de préconisation d’actions concrètes en lien avec l’analyse des
entretiens réalisés.
Ainsi, partant d’une approche de management, je propose plusieurs niveaux
de réponses :
1 - Permettre à chaque acteur de prendre sa place
Dans un fonctionnement en partenariat, la question du « qui fait quoi et
comment » est primordiale pour optimiser les compétences propres à chaque
catégorie professionnelle. Les compétences spécifiques ne doivent pas être un
frein mais une richesse. Il s’agit de permettre à chaque équipe d’avoir une vision
claire de son utilité pour d’autres professionnels.
Cela implique de préciser le travail de chacun, son champ d’action et ses
particularités, partant du principe que l’on doit se connaître soi-même avant
d’entrer en collaboration.
� L’utilisation des profils de postes facilitera l’émergence de la
reconnaissance mutuelle des compétences. La pertinence de cet
outil repose sur sa clarté et sa précision. Sa déclinaison doit s’inscrire
au plus près de la réalité du travail attendu. Le cadre de santé aura à
consulter les différents personnels afin qu’ils recensent leurs activités
au quotidien. De ce fait, il s’efforce de mobiliser et impliquer les
personnels.
� La confrontation des différentes attentes et représentations des
pratiques est essentielle. Elle permet d’affiner les zones
professionnelles partagées et de mettre à plat les éventuelles
dissensions. Cet échange favorise l’analyse des pratiques, démarche
d’amélioration, qui consiste à comparer les pratiques effectuées et
les résultats obtenus. Cette réflexion sur les points forts et les limites
80
nécessite l’accompagnement du cadre de santé. Il incite à la
recherche de complémentarité et de rapprochement de cultures
professionnelles en contribuant à l’enrichissement réciproque et à
une plus grande efficacité.
2 - Mise en place d’outils de communication entre les
différents professionnels
Pour collaborer, il faut pouvoir dialoguer, échanger et s’écouter. Une
communication efficace doit aboutir à un échange d’informations pertinent,
essentiel à tous et déboucher sur l’élaboration d’un langage commun. Elle permet
de favoriser un partage transversal des informations.
L’exercice de la communication demande à chaque professionnel un esprit
d’ouverture à l’autre, du respect, un intérêt et une certaine disponibilité. De ce fait,
le cadre de santé devra favoriser les échanges entre les différents acteurs d’une
même prise en charge. Il doit faciliter la circulation des informations et envisager
des supports à la communication qui permettront de créer du lien entre les
professionnels.
Les actions de communication assurent la continuité et la qualité des prises
en charge du patient/résident. Elles doivent avoir lieu au sein de l’équipe soignante
mais également être dirigée vers les partenaires extérieurs.
� La communication au sein de l’équipe
Les personnels éprouvent des difficultés à évoquer leurs points forts, leur
spécificité et donc à les véhiculer. Pour faciliter ce processus, il est
important, en premier lieu, de valoriser les actions entreprises. Reconnaître
le potentiel des membres de l’équipe, c’est aussi renforcer et valoriser les
acquis avant de se focaliser sur ce qui ne se fait pas. La reconnaissance est
un moteur pour aller de l’avant ; plus les personnes sont valorisées et
reconnues dans leur travail, plus elles seront prêtes à s’engager avec des
partenaires et à transmettre leur savoir clinique.
81
Les réunions cliniques et les transmissions inter-équipes sont des moments
privilégiés afin de souligner les réussites des actions entreprises ou aborder
les difficultés rencontrées.
La mise en place de réunions régulières favorise la coopération, encourage
l’équipe à progresser dans la qualité des interactions entre ses membres et
valorise la mise en commun des compétences.
Ainsi, le cadre de santé mène, guide et développe au mieux la qualité de
chacun pour aboutir à l’objectif collectif fixé.
� La communication vers les partenaires
Les regards croisés des professionnels des secteurs sanitaire et médico-
social sur les êtres humains est une notion intéressante dans ce qu’elle
vient enrichir le lien entre chaque profession, les unissant dans un objectif
commun à atteindre ensemble. Elle permet de ne pas réduire le
patient/résident à des prises en charge successives.
Il est donc souhaitable que l’encadrement organise des possibilités de
rencontres mais qu’il laisse le libre choix aux acteurs de se porter
volontaires pour les constituer. En effet, la libre participation à la discussion
entraîne une plus grande implication et diminue les résistances.
Cependant, pour travailler ensemble, il faut que chacun dispose de lieux et
de temps pour rencontrer les autres. Le cadre de santé doit développer une
organisation de travail qui le positionnera en auteur actif d’une construction
qui n’est pas écrite d’avance. Cette organisation deviendra le liant entre le
projet institutionnel, le projet de soin individualisé et le projet de vie de
l’individu pris en charge.
Dans un souci de cohérence institutionnelle, il est essentiel que la mise en
place de cette démarche de liaison se fasse en accord et avec le soutien de
la hiérarchie.
Des réunions inter-cadres des secteurs sanitaire et médico-social me
semblent nécessaires. Elles seraient l’occasion de déterminer les modalités
d’interventions en complémentarité des personnels. Les
82
dysfonctionnements éventuels pourraient être explorés et exploités
ensemble de sorte à amorcer une réflexion sur les pistes d’amélioration
possibles avec l’ensemble des interlocuteurs des patients/résidents.
3 - Proposition de permutations des personnels entre
secteurs sanitaire et médico-social
Cette proposition d’action ne peut se réaliser qu’après présentation et
validation du projet par les instances hiérarchiques.
Les personnels pourraient ainsi apprendre à se connaître et découvrir les
pratiques appliquées suivant les différents champs d’intervention de chaque
secteur. L’immersion dans le milieu professionnel de l’autre permettrait de
dépasser sa profession pour entrer dans le domaine plus large d’une compétence
partagée. En effet, cette organisation permettrait d’instituer des articulations
étroites entre les personnes tout en assumant, pour chaque professionnel, ses
fonctions spécifiques. Ainsi, lorsque les personnels s’ouvrent à ces échanges, les
compétences de chacun pourraient être mises en lumière par leur
complémentarité.
Cette piste d’action suppose « l’ouverture des portes » des structures
susceptibles de placer les professionnels dans une perspective de découverte et
de compréhension du travail de l’autre. Elle permettrait l’amélioration et la
continuité des prises en charge.
4 - La formation des professionnels
La formation des professionnels contribue à l’amélioration de la qualité des
prestations. Le plan de formation continue des professionnels doit être élaboré en
tenant compte des profils et des besoins de la population accueillie dans le
service. Il me semble nécessaire d’envisager un axe de formation concernant la
problématique de la prise en charge multidimensionnelle des personnes
83
présentant un handicap psychique. Cette formation pourrait s’ouvrir aux
personnels hospitaliers et aux personnels médico-sociaux.
Le rôle du cadre de santé peut alors se décliner en trois verbes : organiser,
piloter, adapter. Il devient alors un « facilitateur » qui coordonne, coopère et
collabore. Cette approche managériale fait appel à la formation et à l’expérience
afin d’appréhender la situation particulière du partenariat entre acteurs du secteur
sanitaire et du secteur médico-social.
84
CONCLUSION
85
Le clivage existant entre les secteurs sanitaire et médico-social dans la
prise en charge des personnes dont le handicap résulte d’une affection psychique
invalidante ne peut perdurer. Une démarche globale doit faire appel à une palette
d’approches diversifiées et complémentaires.
Le partenariat peut permettre l’amélioration des prises en charge
multidimensionnelles en favorisant les relations de coopération entre les différents
professionnels. Ainsi, les concepts de coordination, de continuité, de collaboration
et de globalité des prises en charge devraient permettre l’optimisation de la
communication entre tous les intervenants.
Le décloisonnement rassemble les acteurs des secteurs sanitaire et
médico-social autour de la personne plutôt que de la pathologie. Ainsi, ils pourront
œuvrer à l’amélioration de la qualité des prises en charge et rendre l’usager
citoyen.
Les attentes des patients/résidents, les aspirations des professionnels, les
contraintes institutionnelles sont des éléments dont doit tenir compte le cadre de
santé dans son management. Ainsi, son positionnement entre différentes logiques
telles que soignantes, éducatives, administratives lui permet de faire des liens en
réalisant un travail de coordination. De cette place particulière, le cadre de santé
peut insuffler une dynamique d’équipe et le travail de collaboration lui permettra
une meilleure prise en compte tant des patients que des professionnels.
86
BIBLIOGRAPHIE
87
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sociologiques des organisations. 3ème éd. Paris. Seuil, 2005. 291 p.
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Articles
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pratiques. Education permanente, 1997, n°131, p 86
Textes législatifs
Code de la Santé Publique – Chap. V « réseaux », article 84 devenu l’article
L6321-1 du CSP
Loi n°75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées
Circulaire n°00030 du 20 février 1990 portant mission et rôle des surveillant(e)s et
surveillant(e)s
Loi n°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale
Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du
système de santé
Rapport Ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité. Conseil
Supérieur du Travail Social. Décloisonnement et articulation du sanitaire et du
social. Editions ENSP, 2007, 116 p
89
ANNEXES
90
TRAME DES ENTRETIENS
Que représente pour vous la notion de partenariat ? Quels sont les éléments facilitateurs du partenariat ? Quels sont les difficultés liées au partenariat ? Quels en sont les bénéfices pour le patient/résident ? Comment envisagez-vous le rôle du cadre dans le partenariat entre secteurs sanitaire et médico-social ?
91
Entretien n°1 – Chef de Service en secteur médico-
social
Qu’est-ce qu’un partenariat pour toi ?
C’est des champs de compétences différents, pour moi, le partenariat, qui arrivent
à travailler ensemble avec des objectifs en commun … de façon à permettre ben
voilà… des prises en charge conjointes mais également on a des prises en charge
médicales ou socio-médicales, enfin je sais pas comment on pourrait les
déterminer. C’est réussir à avoir… enfin à travailler en bonne intelligence avec le
patient au centre du projet commun. Cà c’est un partenariat, premier type de
partenariat avec le patient après il y a des partenariats entre professionnels où çà
peut être des échanges de compétences parce que là où certains ne savent pas
faire d’autres savent faire et inversement. Le partenariat, çà peut être aussi un
partage de moyens matériels, on peut, nous, vous prêter la balnéo… Vous pouvez,
vous, nous prêter votre espace multi-sensoriel… On peut y intégrer cette dernière
dimension pour le bénéfice du patient/résident.
Donc finalement çà correspond à des compétences différentes mais qui se retrouvent à un moment pour la prise en charge d’un patient
Oui, d’un patient déterminé ou en vue d’un futur patient qui n’est peut-être pas
encore défini mais avec…et ben pourquoi pas… alors moi je le verrais peut-être
encore plus idéalisé… avec, avec… des…des… formations continues ensemble,
sur des thèmes bien précis… Je pense notamment on a mis en place une
formation sur l’accompagnement de fin de vie de la personne polyhandicapée,
déficiente mentale et c’est vrai que si on avait pu proposer à des gens d’autres
structures de se joindre à nous euh… c’aurait été bien. Des formations en interne
mais ouvertes également à l’extérieur pour les professionnels, qu’il y ait
véritablement un échange parce qu’au sein même de la formation, quand les gens
viennent d’un même établissement, çà peut s’enrichir de la présence d’autres avec
92
euh…des publics différents, des histoires différentes et de sortir de cet espèce de
euh… magma institutionnel qui parfois est lourd… on est dans une dimension
vraiment au niveau du professionnel
Est-ce que c’est facile d’engager un partenariat entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social ? Alors… dans la pratique, çà pourrait être très très simple mais après il y a toute la
lourdeur administrative des structures qui fait, ben que çà patine et que il faut
énormément de temps entre les signatures des conventions, entre euh… les
rencontres entre euh… les différents corps professionnels, qui doit rencontrer qui,
comment, selon quelles modalités euh… techniquement çà devrait être très
simple. C’est très simple pour les gens qui sont sur le terrain parce qu’on voit vite
l’avantage pour le résident ou le patient chez vous, de savoir qu’on recentre plus
notre prise en charge sur l’intérêt du patient. Vous avez des patients qui n’avaient
rien à faire à l’hôpital et qui sont venus chez nous… Nous on a des résidents qui
sont difficiles à prendre en charge ici et qu’on pouvait pas mettre chez vous parce
que chacun restait sur ses positions : mais euh… si on en accepte un ils vont nous
euh… y a quand même toujours ce truc là qui était dangereux euh… de savoir si
on va pas vider les hôpitaux psychiatriques en les mettant dans le médico-social
parce que les prix de journées sont quand même moins élevés. Donc il y a toute
cette notion là qui nous échappe quand on est près du… ben…quand on est sur le
terrain… aussi des évidences style ben… regarde le cas où on s’est rapprochés à
la convention… on s’est mis en contact par rapport à Manu (ancien résident) et par
rapport à Chantal (ancienne patiente) quoi… Et où euh… en une réunion çà nous
paraissait complètement évident euh… ben voilà quoi… Après c’est vrai que toute
la lourdeur euh… administrative… il faut que le médecin… que ce soit validé par
tout le monde alors que si on laissait un peu plus de liberté aux gens, je crois que
le partenariat, y en aurait plus…Je pense que le partenariat a été long parce que
euh… les gens avaient euh… peut-être peur de perdre quelque chose euh…
quelque chose qu’on a mis en avant justement par rapport au partenariat où il y a
une euh… une crainte d’être remis en cause dans sa pratique professionnelle en
93
admettant que les autres sachent faire çà…faire mieux, ne serait-ce que cette
dimension là où euh…où c’est pas acceptable qu’un patient ou un résident soit
mieux ailleurs. Alors peut-être que çà euh… çà a freiné euh… parce que les gens
étaient peut-être pas prêts à ce moment-là à faire ce type de réflexion et
d’admettre que c’est pas qu’ils sont moins bons ou qu’ils sont meilleurs mais que le
résident ou que le patient a peut-être plus sa place ailleurs. Et puis voilà, c’est une
question de savoir qu’il y a des structures qui sont adaptées pour certains cas et
pas pour d’autres ; quand on va à hôpital général, si on a mal aux yeux, on va pas
en gynéco et pareil pour les polyhandicapés, quand il y a des problèmes qui liés
après plus euh… type psychiatrique avec agitation, agression, des choses comme
çà, dans nos structures on ne peut pas le gérer quelle que soit l’énergie qu’on y
mette, la structure n’est pas adaptée pour ce type de patients… Donc je pense
que là-dessus les gens ont vraiment fait un bon bout de chemin.
Quelles sont les sources de difficultés liées au partenariat ?
Au départ, les personnels vivaient le partenariat comme un échec. Pour eux,
on garde au maximum les résidents, même si la structure n’est pas adaptée parce
que déjà on ne fait pas confiance à l’autre alors l’image de l’HP (hôpital
psychiatrique) que moi j’ai retrouvé ici en ayant bossé 16 ans en HP euh…peut
amener quelques petits trucs quoi… Mais c’est vrai que çà reste euh… de la part
du personnel et de la part des familles. C’est… des familles qui ont un enfant
polyhandicapé, à l’HP on fait rien avec les gens, on ne fait que donner des
traitements… Dans la tête des gens c’est çà alors qu’ici on met en place avec des
éducateurs, des ergo… on essaye d’avancer, on a des moyens
supplémentaires…Alors c’est vrai çà pour les enfants alors que dans le monde
adulte dans le médico-social, les budgets se réduisent et on reste quand même à
deux aides soignants pour 10 résidents, ce qui est quand même une prise en
charge qui est pas mal. Tout en sachant qu’ici il y a une histoire, je crois, assez
particulière à savoir que les résidents sont connus d’un bon tiers maintenant par
les professionnels, qu’ils ont grandi avec et que de les laisser partir soit vers la
94
psychiatrie ou une autre structure, c’est très très douloureux. On a ouvert… J-B.
Thiery a ouvert une 2ème MAS (Maison d’Accueil Spécialisée) sur COMMERCY ;
une dizaine de résidents qu’on avait ici sont partis, çà ne s’est pas fait sans
douleur et sans… sans angoisse sur les compétences mêmes des gens qu’elles
avaient formé en interne, qui partaient là-bas… en disant elles ne sauront pas faire
aussi bien que nous. Même sur une structure identique, laisser partir euh. Voilà…
je crois que c’est peut-être assez spécifique à cette structure là où il y a vraiment
un attachement affectif aux résidents euh…au regard de l’histoire…
Le frein au partenariat est lié à une méconnaissance de l’autre structure. Mais il
faut que les personnels arrivent à accepté que le résident s’est peut-être dégradé
et arrive à un stade où quelle que soit l’énergie qu’on va déployer, et même la
spécificité et ben… ces troubles qui se sont accentués et qu’on y peut rien quoi…
Tu vois, c’est l’acceptation des choses comme elles sont quoi… Je pense pas
qu’on soit dans un manque de confiance de l’autre structure mais d’avantage dans
quelque chose de l’ordre de la culpabilité : le résident ne va pas bien, c’est de leur
faute, c’est parce qu’elles n’ont pas su faire…Et donc elles vont essayer de faire,
de faire, de faire, essayer de pallier une évolution inéluctable de la dégradation du
résident. Mais je pense que le fait d’avoir des résultats positifs du partenariat pour
certains résidents qu’elles ont vu partir à contre cœur et maintenant de les voir
mieux vivre à l’hôpital que chez nous… parce que comme notre structure n’était
plus adaptée et qu’ils finissaient par vivre enfermés dans leur chambre et à ne plus
participer à la vie de la collectivité alors que là-bas, c’est … Ils ont retrouvé une
certaine liberté… çà fait avancer les choses parce que c’est là l’intérêt qu’elles
puissent retourner voir que ben voilà… même à l’hôpital psychiatrique on peut
mieux vivre que chez nous quand on a certains troubles. Donc c’est sur ces
réussites là que se base maintenant davantage l’instauration d’un nouveau type de
partenariat. C’est parce que çà a marché une fois au moins… Au même titre que
quand les personnels de chez vous sont venus et on vu la résidente qui vit
maintenant chez nous, ils étaient contents pour elle de la voir sereine euh…
détendue euh… par rapport à ce qu’elle pouvait vivre dans sa journée chez vous.
Donc je pense qu’à partir du moment où les gens réalisent çà, ils seront moins,
95
après, réticents à aider ou à dire là vraiment on n’en peut plus et à se rendre
compte d’eux-mêmes qu’il faut ben… changer de structure. Après, ce qui serait
bien d’envisager pour des structures comme nous ben, c’est un système de VAD
(visites à domicile), d’accompagnement d’un personnel euh… psychiatrique…
ben… qui viendrait de l’hôpital prendre le relais et apprendre peut-être des
techniques de prise en charge ou tout simplement être là pour entendre…
Quels sont les bénéfices de ce partenariat pour les résidents ?
A partir du moment où les choix ont été pensés par deux équipes avec des
objectifs différents mais qui se retrouvent à un moment donné conjoints parce que
c’est pour le bien-être du patient/résident. Et après, au niveau des professionnels,
je crois qu’ouvrir la connaissance d’autres corps de métiers, d’un autre type de
pratiques ouvrent aussi à la confiance et à l’amélioration de la qualité des prises en
charge. On sait qu’on peut continuer à interpeler ou à suivre un résident pour
lequel on avait de l’affection… Il n’y a pas de rupture… Les professionnels de chez
nous sont ravis d’avoir des nouvelles ; ils étaient tellement avec une mauvaise
image de l’hôpital qu’ils avaient envie d’y aller, de se rendre compte par eux-
mêmes et en même temps, ils rentraient dans un milieu qu’ils ne connaissaient pas
et c’est choquant de rentrer dans un « pavillon » pour la première fois et d’être en
observation comme çà. Moi je trouve que çà a vraiment fait son chemin parce que
on est venus 2 ou 3 fois, on a eu des réunions, ils ont vu l’évolution du résident
qu’ils connaissaient bien, maintenant ils ont des nouvelles donc ils nous
demandent plus trop à aller voir comment çà se passe… Y a une espèce de
confiance qui s’est un peu établie. Et en cas d’urgence psy, c’est vrai que
euh…avec un partenariat idéal, je pense qu’on éviterait les urgences psy où on
nous les renvoie au bout de 2 heures alors qu’on y a rien fait quoi… Quand on est
dans une grande difficulté et qu’on a besoin d’une hospitalisation comme toute
personne résidente du secteur, quand on vient d’une maison d’accueil spécialisée
on n’a pas droit à cette prestation…Et çà c’est inadmissible. Parce qu’ils vivent ici
mais si ils ont un trouble qui survient à un moment donné et qu’ils doivent avoir un
96
suivi psy, pourquoi est-ce qu’ils ne peuvent pas, comme toutes les personnes qui
vivent dans le bloc en face être reçus à l’urgence et orientés ? Non ! À partir du
moment où ils viennent d’une MAS, ils sont réexpédiés en MAS, point ! C’était un
peu le problème qu’on rencontrait avec d’autres résidents qu’on avait, nous en
accueil temporaire, qu’on ne connaissait pas plus que çà et qu’on n’avait pas la
possibilité de prendre en charge ; on l’a emmené aux urgences et qu’on a ramené
sans avoir rien fait parce qu’ils ont peur aussi de se retrouver avec cette résidente
et un lit occupé…Voilà quoi…
Moi j’ai été surprise de euh… découvrir aussi inversement le monde du
polyhandicapé en venant de psychiatrie où euh…au départ, j’avais franchement…
je voyais pas trop la différence et où finalement c’est en rencontrant des difficultés
ici que je me rends compte que le personnel est formé dans les soins de nursing,
dans euh… l’acquisition de certaines choses et tout mais pas du tout formé pour
une crise euh…dès que le résident émet une quelconque volonté, çà les
déstabilise alors que leur métier premier c’est de les rendre autonomes mais ils
sont désemparés dès qu’ils sont un peu trop autonomes, dès qu’ils ont des
revendications personnelles, dès qu’ils veulent pas venir à table à telle heure, c’est
tout de suite étiqueté troubles du comportement, elle va pas bien, il faut en parler
au psychiatre euh… c’est pas normal de dire non d’un coup euh… c’est pas
normal qu’elle se fâche et qu’elle se fasse pipi dessus parce que nous on lui a pas
donné son fauteuil roulant électrique suffisamment rapidement…Les personnels
sont très axés sur le bien-être physique : qu’elles soient bien installées, qu’elles
soient belles, parfumées… euh… l’apparence mais tout ce qui est du domaine
psychologique, c’est laissé de côté… C’est terrible, elles sont pas du tout sensibles
à çà… C’est le point de rencontre qu’on cherche avec le personnel soignant et
montrer au personnel du secteur médico-social que le résident n’est pas qu’un
corps. Au-delà du corps, il y a un esprit, il y a une personne désirante euh… et en
même temps, comme elles connaissent pas et comme toute personne, l’inconnu
fait peur et comme elles ne connaissent pas et qu’elles se sentent désemparées,
elles n’osent pas.
97
Le but du jeu c’est d’arriver à une prise en charge globale avec de bons soins de
nursing mais avec quand même un aspect psychologique qui les déstabilise moins
quand il y a des petits problèmes, des gens qui sont un peu plus évolués et qui ont
besoin de quelque chose. On a une résidente qui crie mais parce qu’elle
s’ennuie…tout simplement… comme elle est pas dans un état aussi végétatif que
certains, et ben, elle va pas rester 2 heures à regarder le plafond quoi…donc il faut
l’occuper… il faut euh…et eux euh… ils ont du mal à comprendre çà…
L’infirmier est trop…enfin à mon sens… trop euh… dans le rôle médical et il a du
mal à donner des conseils dans le quotidien du résident. Il est appelé parce que la
résidente pleure, elle doit avoir mal au ventre donc donne lui euh… son cachet
euh…
Il est limité dans son rôle d’avoir le pouvoir euh… de donner euh… un médicament
du protocole du médecin quoi… Prendre des rendez-vous chez le dentiste… Pour
moi qui vient d’un milieu psy je trouve qu’il s’investit pas assez dans la prise en
charge, dans les objectifs, dans les synthèses qu’on fait, euh… là où on veut aller
avec les résidents et pourquoi on le fait quoi… On reste à nouveau basé sur le
corporel, on reste sur l’infirmier euh… l’I.D.E. quoi… dans toute sa splendeur… Le
partenariat pourrait s’inscrire aussi dans la collaboration des personnels : un
infirmier du CPN qui viendrait en VAD sera entendu et ouvrira sur un nouveau
champ de réflexion parce que on saura ses compétences différentes… parce
qu’on saura qu’il ne s’occupe pas que du corps… Mais cependant, je comprends la
difficulté de l’infirmier en MAS qui se retrouve seul face à 8 aides-soignants ou
AMP qui n’ont pas non plus envie, quand on fait des réunions, ils peuvent pas se
mettre 8 personnes à dos, il faut que çà se passe euh… doucement… et par
l’intermédiaire de petits trucs quoi… petit à petit on avance un peu mais c’est vrai
qu’on peut pas changer du jour au lendemain ce qui est ancré dans la tête des
gens depuis 25 ans : l’infirmier il est là pour donner des médicaments, faire les
injections et prendre les rendez-vous en consult… Après l’infirmier ne connaît pas
du tout la prise en charge des polyhandicapés parce que eux ils sont pas avec les
résidents depuis 25 ans….
98
Les familles aussi pensent que le bien-être de leur enfant est lié à l’équipe. C’est
sûr qu’y a une relation de confiance qui s’établit, en même temps, moi je trouve çà
très pénible pour nos résidents d’être depuis 35 ans avec les mêmes « tronches »
en face, je veux dire… tu vois… la diversité des rencontres que tu peux faire dans
une vie ils y ont droit aussi quoi… Alors moi je les ai pas connus enfants, j’ai pas le
même lien affectif et des fois je dis mais… écoutez… il en a peut-être marre… de
voir les mêmes têtes… Tu vois, çà peut apporter un plus et puis un regard différent
peut aussi faire évoluer différemment… sans dire qu’il y a un mauvais et un bon…
mais vivre autre chose quoi… Une fois que tout le monde a trouvé son petit
équilibre… tu vois… sa petite routine au niveau du personnel parce qu’on connaît
le résident, on sait comment le prendre, on sait ce qu’il faut… on connaît l’aide-
soignante, on a une bonne relation, tout va bien… au milieu y a le résident qui est
un peu comme un pot de fleur quoi… Même si on peut bien comprendre la raison
de la famille, la raison de l’aide soignante, moi j’ai l’impression qu’on est un peu là
pour bousculer çà et puis euh… parce que c’est comme çà qu’on évolue quoi…
Quel est le rôle du cadre/chef de service dans cette organisation ?
Ben. Donner les moyens aux gens euh… de pouvoir rencontrer d’autres
professionnels et puis d’avoir l’ouverture d’esprit. Leur donner le moyen de le faire,
sortir un peu de leur rôle de soins de nursing et découvrir d’autres champs
d’action… De monter de temps en temps quand il y a une crise et de leur montrer
que… quand même, certaines fois où ils avaient peur d’un résident et où il y avait
pas à avoir peur quoi… Simplement de faire attention de ne pas se trouver sur la
trajectoire enfin pas… y a des attitudes à avoir… c’est sûr que si un résident est
très énervé, on se met pas à 30 centimètres devant lui euh… tu vois des… des
attitudes qui sont innées quand on travaille dans ce milieu-là depuis longtemps, on
le fait sans faire attention… On ne tourne pas le dos à quelqu’un qui est
complètement agité dans tous les sens parce que oui, on risque de se prendre un
coup de savate… Je pense que j’ai essayé de leur apporter un petit peu çà. En
même temps, je suis bien cantonnée à mes plannings, à mes problèmes
99
administratifs et j’ai pas assez le temps d’être dans les étages… A mon grand
désespoir… j’aimerais bien…
Mais en même temps, quand tu parles des problèmes
administratifs, j’imagine que tout ce qui est de lien à créer avec le
secteur sanitaire, çà occasionne du travail administratif, alors
qu’est-ce que tu peux m’en dire ? Qu’est-ce que tu peux me dire
de ton rôle ?
Cà c’est pas administratif parce que jusqu’à maintenant, tout le partenariat
çà a été des réunions avec des gens d’ici, des gens de là-bas. Cà a été que des
échanges et des rencontres. Après, la rédaction de la convention qui doit être faite,
nous on a donné un petit peu sur le terrain ce qu’on en attend, les échanges du
personnel une meilleure euh…ne serait-ce que le résident qui vit la nuit chez nous
et le jour chez vous, que les infirmiers prennent l’habitude de se téléphoner plutôt
que de s’écrire des mots parce que tu vois bien les problèmes de communication
ce que çà peut être… A partir du moment où on se connaît déjà parce que l’on
s’est vus en réunion… le coup de téléphone c’est déjà mieux… C’est pas une
rivalité entre personnes, c’est voilà… des difficultés, on a les mêmes à droite et à
gauche, sans jugement, sans… en reconnaissant les difficultés de chacun
quoi…Après les trucs administratifs, j’te dis au niveau de la rédaction, les
paperasses et tout çà, moi je n’ai rien fait…Euh… à mon sens c’est pas mon rôle
et de toute façon çà va être au niveau du siège de J-B. Thiery et de la direction de
l’hôpital. Nous on essaye de donner euh…l’orientation… ce qu’on a déjà mis en
place et ce qu’on aimerait… après c’est à eux de trouver les textes, les choses
pour qu’on puisse le faire… Mais l’organisation des rencontres, le début du
partenariat n’est parti que de nous, cadre à l’hôpital et chef de service à la MAS.
Mais c’est çà quand je disais de donner les moyens, donc moi j’ai essayé de gérer
une situation sur le terrain et qui paraissait évidente qu’on devait se rapprocher,
essayer de se connaître et essayer de bosser ensemble… après
malheureusement y a toute la lourdeur administrative qui est là au-dessus et qui
100
nous freine un peu mais si çà nous empêche pas de travailler sur le terrain…
l’objectif c’est celui-là mais c’est vrai que pour avoir de réels moyens, ce qu’on
voulait faire d’échanges de personnels, là il faut des textes, il faut qu’il y ait des
conventions de signées mais, en attendant, on est quand même arrivés à travailler
et à faire évoluer les choses pour un certain nombre de patients et de résidents.
Le cadre/chef de service est coordinateur sur le terrain parce que finalement on n’a
besoin de personne pour travailler ensemble. Simplement, il nous faut un cadre
administratif, législatif pour qu’on soit euh… dans les clous des deux côtés. Il faut
de l’oral mais il faut de l’écrit aussi…parce que je pense que quand on écrit, on
s’astreint quand même à préciser les choses. Notre rôle c’est de faciliter le travail
sur le terrain de faire vivre le partenariat et que çà ait des retombées positives sur
le résident, le patient et que le personnel se sente moins désemparés en situation
difficile.
101
Entretien n°2 – Cadre supérieur de santé
Qu’est-ce qu’un partenariat pour toi ?
Il faut que les gens se connaissent. Il faut travailler ensemble. Eviter les
cloisonnements, les isolats… Si il n’y a pas d’ouverture, rien n’est possible. Il est
nécessaire d’instaurer une communication très importante, ne jamais s’auto-
satisfaire.
Donc Le travail en partenariat avec le foyer intermédiaire a commencé il y a à peu
près 3 ans je dirais maintenant euh… avec au départ une équipe infirmière qui
était censée, à raison d’un poste par jour 365 jours par an de se rendre sur le foyer
intermédiaire et de travailler en collaboration avec des AMP et des éducateurs.
Premièrement y a une équipe de volontaires qui y sont allés, c’étaient des jeunes
diplômés et euh… qui sont arrivés là-bas avec un peu la maison hôpital sur le dos
alors qu’ils étaient dans un contexte complètement différent où euh… on n’était
plus dans le protectionnisme hospitalier d’une part cette notion là et parce qu’on
était tout simplement dans une application de loi citoyenne c'est-à-dire l’accès à la
liberté de chacun etc.… et qu’on pouvait peut être conseiller mais qu’il y a des
choses qu’on pouvait pas imposer, c’est-à-dire qu’on était dans un espace plus lié.
Est-ce que c’est facile d’engager un partenariat entre le secteur
sanitaire et le secteur médico-social ?
Le partenariat que nous avons établi est un enjeu institutionnel donc c’est le CAPS
de Rosières en lien avec le CPN. Donc y a une convention… voilà… qui dit que le
CPN donne. Dans tous les cas, le travail partenarial avec un montage de ce type
là, où il y a vraiment deux équipes partie prenante, çà fonctionne. Le travail
partenarial chacun chez soi, on se parle, on se rencontre et y a pas d’acte comme
çà transverse, çà marche pas. Il faut vraiment être au cœur du problème et du
quotidien ensemble. Les soins basiques, techniques et de psychiatrie sont
prodigués par les infirmiers et puis, euh…c’est pareil, on a mis en place par
exemple un groupe de parole où c’est la psychologue de chez eux qui bosse avec
102
l’infirmier de chez nous. On a vraiment essayé de mixer euh. les professionnels en
fait. On a ré insisté sur les missions, on les a redéfinies sur le travail qui se faisait
en lien, les horaires, les espaces de collaboration. On a tout revu. Donc au niveau
de l’organisation, c’est nickel, çà marche, on n’a plus de problèmes et on est
vraiment à un stade où on travaille maintenant de manière… on va dire…
naturelle. On dit pas qu’on travaille en partenariat, on dit qu’on travaille
naturellement. On n’a plus à réfléchir sur le fond.
Ce qui a été facilitateur, je sais pas comment le dire… Y a pas grand-chose de
facilitateur puisque en général c’est politiquement que les choses se décrètent et
ensuite c’est la base qui se débrouille avec çà. C’est après, comment la base
s’approprie ce projet là et qui devient le sien, hein ... Alors, ce qui est facilitateur,
ce qui a été facilitateur pour moi et ce qui m‘a permis d’amener quand même un
discours différent, c’est que moi je viens de pédo-psy et qu’on travaille qu’en
partenariat ; c’est pas possible tout seul… soit avec le juge, soit avec l’ASE et du
coup, moi j’ai connecté un petit peu avec une culture comme çà avec le chef de
service du FI qui a bossé aussi en pédo-psy donc voilà… Et puis voilà, qu’est-ce
qu’on a fait aussi, c’est qu’on a fait un petit peu carpette… hein… au lieu de
prendre les choses en frontal, on a été prêts à collaborer ; on s’est mis d’abord en
position basse et en respectant à chaque fois l’individu et en signifiant toujours que
c’est ensemble qu’on arrivera à faire quelque chose et pas autrement. Et ensuite,
ce qu’on a fait aussi c’est…euh… on a panaché encore un peu plus le…le système
parce que maintenant du FI pour permettre un passage sur le FAS de jour et on en
a souvent, tu le sais, on a des problèmes c’est qu’on n’a pas l’hébergement ; donc
on a dit nous on bosse sur l’hôpital avec l’association « ensemble », on peut peut-
être travailler l’orientation vers les appartements associatifs, de transition, ce qui
permet de glisser beaucoup plus vite les gens du FI vers le FAS puisqu’il y a
l’hébergement et de ré activer une liste. Cà les arrange eux et çà nous arrange
nous. Il faut qu’il y ait du bénéfice de part et d’autre, il faut donnant/donnant. Tu
peux pas tout phagocyter si tu donnes rien. Et çà leur a ouvert des portes et çà fait
deux fois maintenant qu’ils passent au D.R.A.T.E. (dispositif de réinsertion par
103
l’accompagnement thérapeutique et éducatif) des personnes pour un appartement
en panachage avec un FAS de jour.
Je trouve que l’aspect convention est un plus parce que l’aspect convention
« cadre » les interventions, légitimise, oblige euh…c’est-à-dire qu’à un moment, y
a des choses qui veulent dire « ouais, euh… çà nous saoule le travail partenarial ».
Là, je veux dire, il est… On a deux postes sur envol qui sont dédiés à çà. On est
obligés de le faire. Donc après c’est comment là dedans, nous on s’y retrouve.
C’est bien en même temps qu’il y ait un cadrage, une obligation euh… mais le
cadrage est rassurant pour tout le monde. Et quand on a réévalué, on a
réaménagé la convention.
Il a fallu aussi, à un moment très précis qu’on écrive exactement ce pourquoi les
infirmiers allaient au FI. Mais il faut pas en mettre trop non plus, quelques lignes,
tirets, quelle place on donne à l’un et à l’autre. Donc on fait des évaluations
communes aussi.
Quelles sont les sources de difficultés liées au partenariat ?
Première difficulté, donc on travaille à l’hôpital et on envoie quelqu’un de l’hôpital
avec des règles hospitalières dans la tête travailler ailleurs. Donc, çà a été assez
difficile avec effectivement deux champs d’intervention complètement différents :
des gens qui protègent et qui soignent et d’autres qui essayent d’accompagner à la
liberté, comment on gère sa liberté, donc c’est pas simple. Alors on a fait des
réunions très très régulières et bon, moi…quand j’ai repris un petit peu le
flambeau, je m’apercevais que toutes les semaines il y avait des plaintes et des
plaintes des infirmiers en disant çà va pas. On faisait des réunions nous, hein au
niveau des infirmiers… çà va pas, ya des problèmes au niveau du foyer
intermédiaire, ils comprennent rien, ils laissent les gens boire le café, etc.… Puis à
un moment écoutez je leur ai dit, je pense qu’il y a peut être autre chose que tous
ces problèmes là. Peut-être que c’est le moment de réfléchir. Est-ce que vous êtes
prêts à travailler ou non en partenariat ? Alors, je pense que effectivement dans
leur fonctionnement y a peut-être des choses qui doivent changer mais pour
autant, est-ce que vous êtes prêts à quitter la maison mère et à vous appliquer
104
dans d’autres modalités de prise en charge ? Et là en fait, on a revu un peu les
gens individuellement en disant mais y a pas de sanction simplement c’est peut-
être pas votre truc et le travail en partenariat, c’est pas simple. Il faut un petit peu
être « profilé », il faut beaucoup de souplesse euh…faut être capable d’entendre
que l’autre travaille différemment mais que çà peut être bien, amener son histoire,
sa compétence sans bousculer l’autre, en respectant fin…c’est vraiment de la
collaboration, c’est pas de la superposition, c’est pas euh… je phagocyte l’espace
de l’autre c’est-à-dire moi je suis psy, vous allez tous devenir psy ou moi je suis
AMP et vous allez tous devenir AMP. Donc, on s’est aperçu qu’il était temps
d’évaluer et on s’est aperçu alors qu’il y avait effectivement des choses à revoir au
niveau du foyer intermédiaire même mais çà se ferait au niveau des cadres. Donc,
il y a eu euh…2 temps d’évaluation il y a eu des évaluations individuelles… de
chaque agent et euh… pour leur demander un peu où il en était, quelles étaient
vraiment les difficultés et au finish s’ils avaient envie de travailler ou pas ou si ils se
sentaient de travailler en partenariat. Les uns ont dit ben non, c’est trop difficile,
c’est vrai euh…et enfin on s’est aperçu que c’était pas forcément les… plus jeunes
qui avaient moins de difficultés alors que nous on pensait que çà serait plus facile
pour les jeunes diplômés. C’était l’inverse. Et puis on a fait aussi une réunion un
petit peu de…, moi j’ai souhaité qu’il y ait une réunion d’évaluation institutionnelle
avec le directeur des soins pour signifier parce qu’en plus on l’avait conventionné ;
c’est très politique le FI (foyer intermédiaire) donc il fallait que çà marche quoi,
pour signifier à quel point c’était sensible et que en partenariat, on pouvait pas
arriver chez les gens en disant euh… comme si moi je viens chez toi et que je
commence à dire ben tu changeras tes meubles de place etc.… Donc on va chez
les autres, on amène sa compétence, on essaye de faire sa place et de se
comprendre. On peut pas arriver en disant…Certains sont arrivés vraiment d’une
manière très très autoritaire sur ce lieu quoi…Voilà…D’autant qu’à un moment on
avait dit, bon…ce que nous ferons, nous rencontrerons les cadres et nous allons
revoir un petit peu plus… viser où il y a pas de projet individuel… Ya les façons de
travailler qui sont très différentes hein…C’est pas structuré de la même manière
donc on avait dit aussi euh…on reverra aussi sur les méthodes sauf que moi je
105
vois par exemple une infirmière qui y est allée et qui… qui… a créé un peu un
incident diplomatique quoi… genre ; nos cadres ont dit… et vous verrez… sauf
que, tu penses, l’autre cadre a dit mais c’est pas vos cadres qui décident chez
nous et donc on a du faire, un petit peu euh…remettre du velours un petit peu
dans tout çà… donc j’ai demandé au directeur des soins de remettre du sens, de la
sensibilité et tout çà… C’est-à-dire politiquement qu’est-ce qu’on attend et ensuite
nous localement, on a revu et on a mis en place différentes choses. On a
réaménagé un peu les horaires pour moins les rigidifier et pour qu’il y ait plus
d’espace un petit peu de rencontre avec les AMP mais… moins sur un mode
euh… travail euh…, espace temps par exemple 13 h – 21 h mais aussi qu’ils
puissent participer à des moments de vie du foyer de l’ordre du loisir. Donc on a
laissé beaucoup de souplesse pour qu’il y ait d’autres connexions, tu vois… Qu’on
soit plus dans… chacun sa sauce mais aussi on organise ensemble des sorties
loisirs au foot, au cinéma, des soirées, des choses comme çà. On a aussi dégagé
les gens euh…de…d’une rigueur qui disait il faut venir ici (à l’hôpital) euh…avant
d’aller là-bas pour renseigner les trucs… Enfin c’était un binz incroyable et puis
euh… on a demandé un petit peu aux gens ce qu’ils attendaient. Alors par
exemple la réunion de fonctionnement qu’ils faisaient sur le FI bizarrement, les
AMP y participaient et l’infirmier s’il avait le temps ou s’il faisait pas par exemple un
accompagnement dentaire, il y allait. Sinon il y avait personne du CPN. Donc on a
demandé à ce que les gens du CPN soient systématiquement conviés aux
réunions et maintenant on a le cadre aussi du CPN qui va à toutes réunions avec,
en même temps que le cadre éducatif. Voilà donc tout ce qu’on a euh… et on a
reconstruit nous maintenant à notre niveau, on fait des réunions de cadres à
cadres, où on établit ensemble. On est passé à autre chose. On travaille sur nos
compétences et on travaille aussi sur les listes éventuelles de passage au FI.
Quels sont les bénéfices de ce partenariat pour les
patients/résidents ?
Le patient il a immédiatement le statut citoyen et çà c’est super. C’est
maintenant, la difficulté le plus, c’est j’ai une liberté ; le moins c’est qu’est-ce que
106
j’en fais et comment je travaille avec cette liberté là que je n’ai quasiment jamais
eue, voilà.
Alors, le plus c’est qu’on s’aperçoit que l’institution quand même pourrit les
habitudes, phagocyte l’autonomie, rend dépendants des gens qui auraient pu avoir
quand même quelques velléités d’indépendance et là, en fait, l’intérêt c’est la
réévaluation complète des zones d’autonomie du patient… qu’est-ce qu’il sait
faire ?
Alors parfois... ho là… il sait rien faire çà veut dire qu’en fait dans l’hôpital on
soigne et en même temps on « avilise » puisque on rend la personne objet
davantage que sujet et là moi, c’est çà qui me gêne et là c’est là où c’est
intéressant car la personne reprend son rôle de sujet… Sujet de son projet,
davantage qu’il ne l’est dans l’hôpital Euh… j’ai une liberté, je dois organiser cette
liberté et j’avance puisque j’ai un projet... hein…Temps intermédiaire, foyer
intermédiaire c’est bien un temps intermédiaire de 2 à 3 ans pour s’orienter vers
autre chose. Cà c’est vraiment ce droit à la citoyenneté et c’est bizarre, c’est là-
dessus que çà a beaucoup heurté les infirmiers. Ils ont l’habitude de faire à la
place du patient. Au foyer intermédiaire, on sait ce qu’il sait faire. Donc il y a toutes
ces données là. Par exemple, les infirmiers étaient outrés de voir que les patients
ou plutôt résidents on leur laissait boire autant de café qu’ils voulaient. Et moi je
leur disais : et alors ?... Parce que certains allaient au bar à côté boire une ou deux
bières… Et alors ?... Dire il faut aussi les laisser accéder à cette liberté et à un
moment comment ils vont la réguler… C’est-à-dire que la personne devient sujet…
sujet de sa vie, tout simplement. Et çà, il faut être prêt à lâcher prise, être moins
dans la maîtrise, parce que la maîtrise, moi j’en peux plus d’entendre ce mot-là
hein… Les cadres, je maîtrise, je maîtrise pas, …c’est un mot insupportable la
maîtrise… Les infirmiers sont dans la maîtrise aussi…çà rassure. Donc c’est sûr
que… imagine… les… comment on peu dire… c’est vraiment deux histoires très
différentes, deux comportements différents…De toute façon, la projection hôpital,
territoire de santé, c’est le travail en collaboration hein…euh… Sur la filière
réhabilitation, dans tous les axes, on travaille en collaboration. Soit c’est la filière
qui travaille avec tout le monde déjà… ensuite, au niveau des apparts de
107
transition, on travaille avec « ensemble » donc là on a un gros partenariat qui est
très sensible aussi…. On a mis en place les S.A.A.D. c’est des maîtresses de
maison, cumul de PCH (prestation compensation handicap) redonné à
« ensemble » qui achète en clair, des personnels. Pareil, hein…çà c’est un autre
partenariat. Alors c’est pas du médico-social au sens noble mais c’est la
mutualisation de la PCH qu’on demande à la MDPH hein…en fonction du taux de
dépendance du patient qui est mutualisée, qui a été confiée à l’association
« ensemble » et qui eux ont embauché des maîtres et des maitresses de maison
pour développer ce qu’on appelle les services d’accompagnement et d’aide à
domicile. Cà c’est un autre travail, si on veut y arriver en psychiatrie, on ne fera
jamais tout seul… Cà c’est inéluctable… Mais pour travailler en collaboration, il
faut pas être dans le jugement des gens, il faut être « open », il faut accepter que
les gens soient différents, il faut prendre le temps. On travaille avec eux, on n’a
pas de conseil à leur donner… Il faut être humble… C’est pas facile, il faut de la
souplesse.
Les personnels du médico-social, ils ont pas la même culture que nous… Ils
proposent des choses… T’es scotchée des fois hein… Et puis des choses qui
fonctionnent… Il est important de mettre une bafouille sur le savoir infirmier parce
que quand tu te rends compte quand tu sors de l’hôpital un infirmier de secteur
psychiatrique, il sait pas quoi faire. Quand tu lui enlèves toute cette contingence du
lever… tout çà… du machin… il sait pas quoi faire. Qu’est-ce qu’on fait sur le foyer
intermédiaire, y a des gens qui se sont trouvés en difficulté. Alors je leur dis mais
dans votre décret sur les compétences infirmières, il y a quand même des choses
telles que l’éducation à la santé, au FI il faut absolument travailler le passage d’un
endroit à un autre…faire le deuil de la psychiatrie… y a des entretiens formalisés,
mais on a dû quasiment leur lister le travail qu’ils ont à faire dans le cadre du rôle
propre… Et oui, grosse difficulté… parce que c’est très rassurant l’hospitalisation, y
a un plan de travail pour toute la journée… Tu te retrouves entre pairs dans un
service de soins, tu travailles ensemble… Alors quand tu leur dit qu’est-ce que
c’est que d’être infirmier psy hors champs des soins ? Ben là y a une panne de son
et d’image tu vois quand même hein… Le travail partenarial questionne
108
énormément sur l’identité infirmière dont les gens se gaussent mais savent pas
ce qu’on met dedans. Cà a été la difficulté : qu’est-ce qu’on fait par rapport au
personnel médico-social ? Puis en même temps, on doit respecter leur champ de
compétences à tout prix parce que, alors de façon paradoxale, leur champ de
compétences était devenu exclusivement le soin parce que, soins de base quoi
hein… Et puis après quand ils interviennent sur un terrain différents, ils ont peur de
perdre cette identité qu’ils n’étaient même pas capables de développer, si tu veux,
à contrario…
Quel est le rôle du cadre/chef de service dans cette organisation ?
Le cadre, coordonateur. Il doit faire le politique. A plusieurs niveaux hein… Moi je
fais ma politique en tant que cadre sup, Sandrine fait sa politique en tant que cadre
et ben, on a à mener des actions conjointes. Si nous on est cohérents déjà, entre
cadres, en-dessous, çà va suivre. On doit porter, on doit arrondir… c’est à notre
niveau que çà se fait. Et plus en-dessous on verra qu’on bosse ensemble, plus çà
va. Et je vais te dire,… de manière étrange, depuis qu’on a changé d’équipe, qu’on
a réinterrogé les pratiques, qu’on a remis du sens dans notre collaboration, qu’on a
fait tous notre mea-culpa, parce que eux aussi l’ont fait hein…oui… oui, oui… eux
aussi il l’ont fait. Et qu’on a montré en tout les cas une réelle envie de travailler
ensemble, nickel… Mais je pense que çà doit partir du cadre. L’attention elle part
du cadre mais le cadre doit aussi analyser et pas se faire embarquer et je pense
que trop longtemps on s’est fait embarquer… c’est que çà n’allait jamais… et à un
moment quand çà va jamais et que c’est toujours la faute des autres… il faut
interroger les pratiques quoi… Et c’est çà qu’il faut faire, il faut être garant des
pratiques. Si on travaille en lien, il faut être sûr de ce que doit faire l’infirmier et
c’est là où je pense que c’était pas clair… çà n’a pas été suffisamment précisé. On
pensait que les gens s’approprieraient le rôle propre et ils ne se le sont pas
approprié… Cà a beaucoup rassuré quand on a commencé à mettre du sens sur
ce qu’il y avait à faire, quelle projection… Les jeunes infirmiers ne savaient pas ce
qu’il fallait faire. Certains plus anciens étaient plus à l’aise…mais je continue à dire
qu’il faut être très vigilant à la personnalité des personnels qui vont travailler sur
109
ces axes là. Il faut de la souplesse, il faut des gens « open », il faut des gens prêts
au partage, il faut pas des gens qui soient trop dans le jugement, qui soient trop
avec leur carte « je suis infirmier, moi je suis pas AMP »… il faut vraiment de
l’ouverture quoi…
Le cadre doit être vigilant, coordonateur, régulateur. Il doit être très, très… attentif
à la personnalité pour le travail en partenariat, c’est pas donné à tout le monde.
Les personnalités rigides, qui sont souvent dans le conflit, c’est pas la peine. Il faut
des gens souples, il faut des gens qui aient vraiment envie euh…de partager
quelque chose quoi. C’est un petit peu les nouveaux aventuriers quoi… moi je
veux défendre absolument une psychiatrie dans la cité et pas dans l’hôpital et je…
je…c’est le travail en collaboration. Si on n’arrive pas à le faire, il faut aller bosser
en soins généraux… je sais pas moi…
Il faut que les équipes soient partie prenante, il faut qu’ils y croient et pas qu’ils
s’approprient le patient mais qu’il le projette sur son espace sujet et sur son
espace liberté. Le retour à l’hôpital doit être un moment de crise et puis voilà…
Alors, ce qu’il faut avoir c’est cette souplesse et çà c’est les cadres qui doivent le
garantir c’est que quand çà pêche, avec quelqu’un qu’on a inséré dans un autre
milieu, comme çà, en partenariat…c’est garantir que le patient il revient d’où il vient
et qu’on puisse travailler l’hospitalisation, qu’elle soit un moment dans son chemin,
dans la continuité de son projet et pas un moment de rupture.
Et nous, ce qu’on a aussi, c’est cette aisance… qu’on fait avec le FI, qu’on fait
avec l’accueil familial thérapeutique…c’est qu’on a mis en place 2 lits un petit
peu…comment on peut dire… un volant de sécurité… comme çà, où on ré-
accueille à un moment donné le patient dans sa trajectoire de soins mais pas pour
le réinsérer quoi…dans l’hôpital… vraiment…pour ce moment un petit peu fécond
qui fait qu’il peut plus être dehors. Donc, on le fait avec les S.A.A.D. Il y a 2 ou 3
patients qui ont refait des petits réajustements, ils reviennent 2 jours où 3
jours…On l’a fait en AFT… des séquences…et il faut avoir cette souplesse
là…mais pas comme euh… on se débarrasse d’un patient… non, non, non… on
reste présent, on reste impliqué… Il faut que l’autre en face, il sache qu’on est
toujours là et pas qu’on se déleste. Il faut adapter, il faut assouplir de manière à ce
110
que le patient à un moment donné… il se retrouve dans quelque chose. Et si il y a
quelque chose qui ne fonctionne pas, il faut qu’on ait le souci de faire une pause,
de réévaluer la situation et de re-proposer quelque chose. Mais quand quelque
chose ne fonctionne pas, c’est pas un échec pour l’équipe, c’est la pathologie du
patient qui nous met en échec. Il faut redonner du sens aux réunions cliniques,
remettre un espace de réflexion, retravailler sur les grilles d’autonomie. Il faut
qu’on ait un peu plus d’outils d’évaluation.
Donc, on redonne à l’hôpital son espace soin… point… et pas autre chose.
111
Entretien n°3 – Cadre de santé
Que représente pour toi le partenariat ?
Travailler en partenariat représente principalement une ouverture un petit peu
d’esprit et surtout des échanges enrichissants autant d’un domaine vers l’autre que
ce soit du médico-social vers le sanitaire et vice-versa. C’est aussi avoir un autre
regard sur les pratiques telles qu’on peut les avoir nous dans le sanitaire qui sont
totalement différentes dans le médico-social. Ca permet d’avoir des choses un peu
plus constructives et peut-être d’avoir des des des nouvelles pistes pour des
projets éventuels.
Donc, pour toi, est-ce que çà représente des regards croisés pratiquement sur une
situation d’un patient avec chacun sa spécificité ?
Oui, voilà, tout en étant complémentaire hein…Tout en étant complémentaire.
C’est pas le médico-social d’un côté et le sanitaire de l’autre. C’est vraiment
comment est-ce qu’on compose ensemble pour pouvoir réussir à mener ensemble
des projets coordonnés
Qu’est-ce que tu as pu rencontrer comme difficultés dans ce travail en
partenariat ?
Alors, pour avoir connu un petit peu la mise en place du foyer intermédiaire hein
qui est la structure en commun avec le médico-social, ce qui était quand même
très difficile c’est justement au début d’avoir cette confrontation des prises en
charge entre d’un coté le soin et de l’autre coté quelque chose de plus social, on a
vraiment des priorités qui sont pas forcément les mêmes. C’est vrai qu’on a eu
quand même quelques heurts alors notamment avec toute l’équipe composée
d’AMP et d’éducateurs
Donc, effectivement, on a eu des soucis alors vraiment plus de regard et peut-être
aussi d’incompréhension puisque ce sont vraiment deux domaines qu’on ne
112
connaissait pas hein, enfin, deux domaines le sanitaire et le médico-social n’ont
pas forcément l’habitude de travailler ensemble. Donc c’est vrai que la mise en
route a été difficile parce que on se sentait aussi du coté sanitaire dépossédés de
certaines choses hein à savoir qu’ils n’étaient pas là non plus par exemple pour
distribuer les traitements, par rapport aux toilettes, au lever, çà avait été des
choses pas mal soulevées dans le sens où effectivement nous on voit pas ce qui
se passe le matin, donc on peut pas avoir la main prise sur le projet du patient.
Donc çà a été travaillé avec les équipe, travaillé aussi avec les médico-social.
C’est vrai qu’on a la possibilité, on a la chance de pouvoir se voir au moins une fois
par mois pour pouvoir rediscuter des pratiques ; donc c’est vrai que là çà fait
quand même 1 an ½, presque 2 que çà tourne donc c’est vrai que là on a quand
même connu une nette amélioration, on a mis pas mal de choses en place, on a
remis des choses à plat aussi sur le travail en collaboration entre uns et des autres
et c’est vrai que là aussi çà tourne très très bien .
Y avait aussi le positionnement de l’éducateur qui lui chapeaute un petit peu
l’équipe d’AMP sur le site qui était plus ou moins perçu heu….mal perçu on va dire
par l’équipe infirmière dans le sens où il se positionnait un peu en chef et ils le
ressentaient un peu pour eux aussi donc ils étaient un petit peu mis en porte à
faux par rapport à çà. On a réexpliqué et finalement, là çà se passe
merveilleusement bien heu, même avec l’éduc au contraire on se téléphone
souvent. Les équipes savent qu’on peut compter sur lui et vice-versa
L’éduc dont tu parles, est-ce qu’il a le rôle de Chef de service comme on les
appelle dans le médico-social ?
Il a le rôle de chef de service en tout cas, pour l’équipe d’AMP qu’il va encadrer. Il
a ses missions également d’éducateur en parallèle. C’est vrai que çà avait été mal
perçu au début par l’équipe mais bon c’est vrai que maintenant çà roule ; au
contraire, ils le voient plus maintenant comme un collaborateur sur qui on peut
compter, avec qui on peut faire des choses, travailler ensemble, aller de l’avant.
113
Quels sont les éléments facilitateurs du partenariat ?
Ben… les éléments facilitateurs effectivement, c’est que pour le …le coup, on a les
réunions régulières, on s’appelle très …très régulièrement. On se voit au niveau de
l’encadrement à savoir CSS, médecin puisque c’est Mme L. qui coordonne les 2
structures, moi-même et puis le directeur de la structure et l’éducateur qui fait
office de chef d’équipe. On se voit régulièrement aussi pour pouvoir parler des
projets, des perspectives d’avancées, de départ et aussi nos listes d’attente pour
pouvoir intégrer les gens au fur et à mesure sur le foyer.
En fait c’est très facilitant parce qu’on n’est pas non plus chacun de notre coté. On
a des contacts très très réguliers et c’est vrai que c’est plutôt agréable.
C’est un partenariat qui roule… Avec un peu de recul je me dis qu’on a réussit un
très beau partenariat.
Quel est le bénéfice pour le patient ?
C’est de pouvoir lui proposer une structure comme son nom l’indique intermédiaire
de sorte à pouvoir par la suite étoffer vers le médico-social. Pas seulement,
sachant que maintenant on leur propose aussi nos outils de la réhab, que ce soit le
SAAD, les appartements. Donc c’est aussi un petit peu aussi une sorte d’échange.
Donc le patient va arriver sur le foyer intermédiaire, va avoir une période
d’évaluation et après, une possibilité d’effectuer des stages dans diverses
structures appartenant au CAPs – carrefour d’aide publique sociale. Donc çà va
être sur un FAS, quel qu’il soit, çà peut Thiaucourt, çà peut être Essey parce qu’il y
a une structure aussi, çà peut être Luneville.
Donc, le patient avant qu’il soit hébergé dans une structure, il passe par les
différents lieux possibles d’accueil pour qu’il trouve sa place la plus adaptée
possible…
Alors il va pouvoir faire un stage, pas forcément dans toutes les structures mais au
moins sur une qui sera « pilote » mais qui va permettre de voir au niveau de ses
compétences et de ses capacités ce qu’il est possible de faire pour lui et après lui
114
proposer par la suite un hébergement si une place est disponible. Et je dis bien si
une place est disponible car c’est quand même un de nos freins à l’heure actuelle
c’est que on a très peu de place sur l’hébergement. Par contre, ce qui est…moi je
trouve aussi heu… un élément plutôt positif, c’est que l’éducateur qui travaille sur
le foyer intermédiaire s’occupe de trouver des stages donc soit sur le caps soit des
possibilités d’hébergement ailleurs. Donc qui est là aussi pour pouvoir trouver des
solutions au même titre que nous on pourrait trouver des solutions par exemple sur
les outils tels que Mi les Vignes, Villebois Mareuil , même le SAAD. Donc c’est
vraiment un travail en lien et qui se fait au niveau des va et vient entre nous, vers
eux et ainsi de suite.
Par rapport aux patients, pour évaluer les capacités, est-ce que à partir d’ici,
l’envol, vous avez tout un travail de grilles d’autonomies qui sont faites de façon à
pouvoir monter le projet et en parler avec le médico-social ou est-ce que tout se
fait au niveau du FI ?
Alors, pour l’heure actuelle, on n’a toujours pas de grille d’autonomie. On devrait y
travailler. On a un infirmier qui est détaché de journée par rapport à des activités
plus de réhabilitation quelle qu’elle soit : donc il va s’occuper notamment de tout ce
qui est sport, vraiment des choses très ponctuelles et il a prévu dans son planning
d’activité une journée de ce qu’il appelle atelier d’autonomisation. L’atelier
d’autonomisation va consister à prendre une personne à charge en individuel sur
la journée, de lui faire prendre le bus, d’aller avec lui faire les courses, voir
comment il se débrouille en terme de gestion d’argent et qu’il se fasse par la suite
son repas tout seul. Donc il va vraiment être sur de l’évaluation, certes ponctuelle,
mais qui va déjà nous donner une première base en tout cas pour éventuellement
une orientation sur le médico-social.
115
Dans le cadre des patients qui présentent des psychoses
déficitaires, est-ce que çà peut être un biais pour sortir de la
chronicité à l’hôpital puisqu’on sait bien que des patients sont là
depuis plus de 30 ans, des patients pour lesquels on imaginait
qu’ils n’étaient pas capables de s’en sortir ailleurs qu’à l’hôpital.
Alors est-ce que vous vous occupez de ce type de réorientation,
est-ce que c’est possible ?
Alors c’est possible puisqu’à l’heure actuelle on va… on a mis sur la liste d’attente
des patients qui viennent de l’unité pour patients psychotiques déficitaires. Que tu
connais très bien et donc là pareil, il va y avoir une évaluation qui sera fait au
niveau de la MDPH qui va effectivement voir en fonction du dossier qui va leur être
présenté si l’orientation est favorable ou pas. Et à partir de là il y a possibilité
d’avoir un accueil de jour sur le FAS qui est juste à côté du FI pour dans un
premier temps leur permettre d’avoir une certaine prise sur les activités du
quotidien, à savoir que ce sont des ateliers alors il y a théâtre, des petites choses
comme çà et ils ont une première évaluation de la personne en question. Bon,
c’est pas systématique hein… Ils peuvent directement aller sur le FI et à ce
moment là ils évaluent aussi au fur et à mesure.
Donc pour le patient, c’est une ouverture qu’on ne pouvait même pas imaginer il y
a quelques années.
Quel est le rôle du cadre dans ce partenariat ?
C’est très vaste et en même temps, c’est assez spécifique parce que c’est vrai que
nous on a très peu d’emprise sur le foyer parce qu’on n’y va quasiment qu’une fois
par mois. Moi je suis détachée de l’ordre d’une demi-journée par semaine. Euh…
Bon déjà la première chose c’est d’assurer la continuité des soins au niveau de la
structure hein… puisqu’on a en tout 2 ETP qui sont rattachés sur le foyer à
hauteur par jour d’un inf tous les après-midis, ce qui représente sur mon équipe 4
infirmiers qui font des mi-temps là-bas. Donc c’est déjà çà en priorité, c’est le côté
116
gestion personnel. Après, les horaires sont variables, on négocie, on se débrouille
entre nous, il n’y a pas de problème, si jamais il faut décaler pour des raisons X ou
Y, par exemple pour une consultation les infirmiers peuvent très bien venir le matin
plutôt que l’après-midi. Cà c’est vraiment quelque chose de très tacite et ce sont
des adaptations d’horaires qui sont tout-à-fait facilitantes. Ca a été aussi une
grande avancée parce qu’au début, les horaires c’était vraiment les après-midi, de
13 h à 20 h où ils allaient en fait sur le FI et c’était comme çà. Donc là on a eu
vraiment beaucoup d’assouplissement par rapport à cette contrainte là. On peut
même envisager, en cas de besoin, qu’ils ne viennent que quelques heures parce
que c’est vraiment très très calme, parce que y a absolument rien de prévu et que
toute l’équipe s’est mise d’accord là-dessus. Il y a une très grande souplesse en
termes de gestion de planning, ce qui est très facilitant.
Par contre, tout ce qui est, ce que j’appellerai la logistique, çà va être de notre
point de vue, en tout cas cadres, çà va être de coordonner tous les projets. Alors
on va parler déjà de la liste d’attente, c’est de voir par rapport aux projets patients
qui puissent exister sur tout l’hôpital, quels sont les patients qui pourraient être
inscrits sur la liste du foyer intermédiaire.
D’accord, alors çà c’est en lien avec le DRATE ?
Alors, le DRATE entre autres et aussi la commission des séjours prolongés. Donc
c’est vrai qu’on recueille tout çà et après c’est la constitution des dossiers. Puisqu’il
nous faut une orientation MDPH euh… orientation établissements divers pour
pouvoir prétendre à l’admission sur le FI. Donc il faut que ce soit valide. Il faut
vraiment qu’il y ait une coordination parfaite de tous les projets et un suivi très
scrupuleux puisque s’il te manque des pièces, tu ne peux pas faire admettre ton
patient.
C’est le cadre qui veille à ce que ce soit fait. Actuellement, on a un souci sur la
structure, c’est qu’on a très peu de présence éducateur. Alors pour expliquer un
peu tout çà c’est que l’éducateur qui est affecté sur l’envol est aussi affecté sur le
4ème secteur et sur l’AFT. Donc le souci c’est qu’il a très peu de disponibilité du fait
117
de son planning et des tâches qu’il a à réaliser. Ce qui fait que nous, on pêche
aussi par rapport à çà. On a énormément de difficultés à regrouper tous les
éléments et d’avoir une meilleure lisibilité des projets. Alors çà va être la durée de
validité des décisions MDPH, çà va être les contacts avec les tuteurs quand il y a
constitution des trousseaux, toutes des choses comme çà auxquelles on pense
pas forcément et qui du coup nous plombent les projets… Et c’est vrai que le fait
de ne pas avoir un partenaire social dans la mise en place de ces projets, çà
ralentit pas mal les choses même si notre éducateur qu’on a à l’heure actuelle est
très performant hein… je veux dire là-dessus, il n’est pas irréprochable mais
presque… il connaît tous les rouages des procédures à mettre en place…
Oui, mais il doit s’occuper de 3 lieux, ce qui le rend très peu disponible.
A l’heure actuelle, les inf et les AS s’occupent des appels aux tuteurs, des
accompagnements pour diverses choses. C’est vrai que c’est aussi des questions
d’organisation qui pèsent sur le coup sur le travail d’équipe…
Le cadre est le pivot de la coordination et de la collaboration. De ce fait, il induit de
renforcer l’importance du référent du patient. Remettre en place les missions,
coordonner les projets à la hauteur du patient bien sûr et de dire voilà, il y a telle
ou telle chose à faire, où on en est ? Moi je veux savoir ce qui a été fait, ce qui
n’est pas fait et ce qui reste à faire. C’est vraiment avoir cette nouvelle dynamique
là de projet qui va permettre de clarifier les rôles et missions de chacun sur des
projets à venir. Donc la place de l’éducateur est tout aussi importante.
118
Entretien n°4 – I.D.E.
Qu’est-ce que le partenariat pour vous ?
Pour moi, le partenariat, c’est surtout l’ouverture sur un autre type de
structure que la psychiatrie et voir si on peut mettre le patient ailleurs. Ca c’est sûr.
Ca nous a permis d’aller visiter leurs structures, de voir ce qu’ils pouvaient faire et
euh… surtout de voir qui on pouvait introduire dans ce genre de structure parce
que nos patients évoluent aussi et le fait d’avoir un regard sur d’autres structures
entre autres médico-sociales aussi c’est bien…
Quels sont les éléments facilitateurs du partenariat ?
Moi je trouve que ce qui est bien c’est qu’ils voient les patients d’une autre
manière que nous déjà… J’ai trouvé hyper intéressant parce que nous nous
sommes des hospitaliers donc c’est vrai qu’on n’est pas dans le registre vous
savez maison d’accueil, on est peut être plus dans le soin, la priorité c’est le soin
peut-être que dans l’accueil un peu familial. Ca nous donne un complément de
compétences. En plus, le partenariat c’est bien parce que là haut ils ont beaucoup
d’activités, tout est beaucoup axé sur les activités alors que nous on va beaucoup
parler soins. Je trouve que le fait de faire un partenariat, çà permet aussi de nous
dire que nos patients, on peut faire autre chose avec eux. Moi j’ai trouvé çà hyper
intéressant.
Comment s‘organise le partenariat ?
Et bien c’est parti tout simplement. Au début on a pris contact par
l’intermédiaire de ce patient que nous avons « partagé » puisqu’en hospitalisation
partagée, pour nous, c’est hospit de jour, hospit de nuit…Donc on les avait
régulièrement au niveau euh du téléphone, je pense que çà nous a permis de lier
connaissance. Ensuite, on leur a soumis que nous avions dans notre structure des
patients qui relevaient peut-être de la leur. Donc on leur a présenté les dossiers. Ils
nous ont dit nous on est OK pendant les vacances pour les prendre 15 jours pour
valider éventuellement votre demande parce que pendant les vacances ils ont des
119
trous pendant que les enfants partent à droite ou à gauche. Donc ils ont des
périodes de creux et ils ont proposé de prendre donc les patients qu’on a proposés
pour valider éventuellement notre orientation. Voilà comment çà s’est fait. Voir si
nos patients pouvaient quitter l’hôpital pour aller vers le médico-social où c’est une
autre manière de prendre en charge les patients avec beaucoup d’activités. C’est
un lieu de vie permanent alors que nous nous sommes sensés…Moi je trouve que
là-bas c’est un lieu de vie et c’est vrai que quelque part c’était bien qu’on les
intègre dans un lieu de vie pour envisager justement un projet de vie. Ca reste pas
un projet de soins, c’est un projet au long cours de vie. Je trouve que c’était bien
parce que les expériences ont été très intéressantes. C’est vrai qu’on a choisi
quand même des patients qui avaient peut-être – le fait d’avoir été visiter chez eux
– qui avaient l’orientation, voilà.
Est-ce qu’on peut dire que c’est un échange, chacun avec sa spécificité et
voir quel projet de vie correspond à ce patient.
On a dépassé le projet de vie puisque maintenant on a un échange
d’activités thérapeutiques pour essayer de canaliser son agressivité. Donc on a
dépassé le contexte du projet de vie. Maintenant on en est dans le projet
thérapeutique par l’intermédiaire des activités. Donc ils sont venus chez nous, ils
sont en train de nous former à leurs activités pour qu’on puisse gérer, tout du
moins diminuer l’agressivité de certains patients. On a dépassé même le cadre du
projet de vie. On a un super projet de partenariat avec eux. Enfin moi je suis assez
contente qu’on ait ce partenariat parce que çà nous permet de travailler autrement
avec les patients.
Déjà çà a démarré sur ce patient que nous avons en commun et quelque part
maintenant on est en train de mettre en application pour d’autres patients. Ca nous
a permis aussi qu’ils prennent d’autres patients en essai, qu’ils valident comme
quoi ils avaient vraiment une orientation en MAS. Parce que quand on va les
présenter aussi dans d’autres MAS, dans la mesure où on a une validation d’une
autre MAS comme quoi c’est d’accord, c’est plus facile … Parce que le fait,
souvent quand on dit que nous sommes CPN, quand on va proposer un patient
120
quelque part, d’office on a les portes fermées parce qu’on part du principe que si
ils sont CPN, voilà quoi, ils sont en hospitalisation et le fait d’avoir fait un essai
ailleurs qui est validé mais qui ne débouche parce qu’il y a un problème de place,
çà a permis, çà a favorisé le départ de nos patients vers des lieux de vie.
Quelles sont difficultés rencontrées pour le partenariat.
Comme je le disais, l’étiquette CPN ferme des portes. D’autant plus que
quelque part, dans nos dossiers, il y a agressivité des choses comme çà. Même si
on dit que nos patients se sont stabilisés, dans nos dossiers, on ne peut pas ne
pas noter le comportement avec agressivité hétéro auto-agressivité. D’emblée,
dans les MAS, il y a d’autres patients que des psychiatriques, il y a des patients qui
ont des problèmes somatiques importants qui font qu’ils sont dans la grande
dépendance. Ca nous ferme des portes. Et moi je pense que le partenariat,
d’ailleurs on va continuer, dès qu’ils ont des places l’été, ils nous prennent des
patients en essai et çà va nous valider l’orientation et faciliter la prise en charge
complète.
Je pense que le fait d’avoir validé la possibilité qu’ils soient dans une structure qui
est hors de chez nous, en plus, c’est çà aussi qu’il faut se dire et je pense que çà
nous fait un point supplémentaire pour pouvoir mettre des patients dans des lieux
de vie et sortir de l’hôpital.
Il faut beaucoup de motivation, donner de son temps parce que tout çà au
départ, çà s’est fait sur notre temps. Le fait d’aller là-bas, d’y repasser pour
ramener le linge, les patients qui sont là-bas pendant 15 jours, çà demande quand
même un peu d’investissement. Je veux dire qu’on est de moins en moins et que
pour tout çà, çà demande de l’investissement. Donc certaines difficultés sont liées
à l’organisation en termes de disponibilité du personnel et mettent un frein à
organiser le partenariat.
Je pense qu’ils ont les mêmes difficultés que nous parce qu’ils ont été invités à des
rencontres régulièrement voir comment on s’y prenait avec nos patients parce
qu’ils ont aussi des patients difficiles, ils aimeraient les introduire chez nous et de
temps en temps on leur dit qu’il suffit d’aborder les personnes autrement et que
121
des fois, on pourrait garder des patients. Donc, moi je pense que c’est un beau
partenariat dans les deux sens ? Nous on prend de temps en temps leurs
résidents pour évaluer les difficultés et du coup, c’est un partenariat qui marche
dans les deux sens.
Quels sont les bénéfices pour les patients/résidents
Alors moi, je vois surtout le bénéfice pour nos patients, çà permet à l’équipe
de voir les patients autrement. Quelque part, que nos patients puissent aller
ailleurs, çà a changé complètement le regard. Je trouve que c’est un excellent
euh… peut-être justement parce qu’ici nos patients le personnel était peut-être
chronicisé, voyait les patients comme dans leur lieu de vie. Elles avaient oublié
qu’ici c’est un hôpital et qu’on était normalement sensés n’être que dans le soin et
qu’on devait avoir des projets de sortie pour nos patients. Et je pense que le fait
d’avoir fait çà, d’en avoir fait partir, le fait d’avoir des échanges avec des lieux de
vie, des vrais lieux de vie pour nos patients, je pense que çà a tout changé. Et on
travaille différemment maintenant parce que justement on se met çà quelque part
en perspective.
Qu’est-ce qui a changé dans votre travail ?
Je pense que dès qu’on change le regard sur le patient et qu’on se dit qu’il
peut aller ailleurs, çà veut dire qu’on ne doit pas éternellement institutionnalisé,
qu’on peut donc les guérir. Et je pense que çà change tout leur regard ? On leur
donne la possibilité d’évoluer alors que quand on est un peu bloqués, je trouve
qu’on leur donne pas trop la possibilité d’évoluer.
Je me suis aperçue que certaines pensaient qu’on allait à l’échec. Elles
étaient persuadées que les patients allaient partir et que çà n’aboutirait pas parce
qu’elles ne les voyaient que ici. Et le fait que ces patients soient partis de façon
temporaire et qu’en plus on les ait vus complètement changer, qu’ils ont manifesté
leur mécontentement d’être revenus dans notre institution, en ne mangeant pas ou
on a même dû mettre sous antidépresseurs après son retour dans le service après
15 jours en MAS, on s’est aperçus que quelque part on était complètement à côté
122
de la plaque et qu’il fallait revoir tout. Et le fait que la patiente soit partie, en plus on
a rendu des visites à notre patiente, elle était en train de faire de la moto…Donc le
fait d’avoir vu nos patients dans un autre cadre de vie, çà change complètement
notre regard : une personne qui était toujours dans un fauteuil… Ca change tout le
regard que l’on puisse avoir. Enfin, moi c’est ce que je ressens et puis même au
niveau d’une équipe, çà a complètement changé. Alors après derrière un travail
parce que quelque part, il faut inciter les professionnels à garder çà dans la tête,
nos patients peuvent partir de la psychiatrie…
C’est sûr que certains patients ont plus de capacités que d’autres mais d’une
manière générale je pense que tous peuvent évoluer… En ce qui concerne les
activités thérapeutiques, tous les patients y participent. Cà permet de changer la
prise en charge et le regard toujours au bénéfice du patient.
Quel est le rôle du cadre ?
Le cadre est la référence qui établit le lien parce que pour faire çà il faut que
des liens médicaux et administratifs existent entre les institutions. A notre niveau,
nos échanges entre service d’hospitalisation et structure médico-sociale ne
peuvent avoir lieu si le lien n’est pas établi. Actuellement le partenariat est
important, il a fallu faire une convention donc obligatoirement c’est le boulot du
cadre.
Il a un rôle de coordination. Certains personnels ont dû aller à la MAS en
formation pour les activités thérapeutiques. D’autre part, le personnel de J-B vient
ici pour participer aux activités thérapeutiques dont les cadres sont obligés de le
prendre en compte au niveau du planning… On ne peut pas travailler sans que le
cadre participe à çà. C’est pas possible. On en est au partenariat des équipes, ils
nous prêtent leur balnéothérapie, les personnels doivent aller voir comment çà
fonctionne… Donc le cadre entre dans la gestion de l’organisation. De la même
manière, on a beaucoup de réunions entre unité d’hospitalisation et MAS de J-B.
Thierry donc le cadre doit être présent. Quelque part, euh… moi je… j’imagine pas
de faire çà sans cadre. Au départ de toute façon, çà a été par l’intermédiaire des
cadres, la demande de partenariat. Ils se sont rencontrés, ont discutés de certains
123
problèmes au niveau des patients/résidents. Ca a commencé comme çà. Et puis,
je vous dis, on ne peut rien faire sans les cadres.
Pour la présentation des synthèses, ils doivent être tenus au courant de ce qu’on
fait. Par exemple, même ce que nous mettons en place dans l’unité en vue
d’améliorer l’état des patients, obligatoirement nous sommes obligés d’en référer
au cadre. On ne peut pas changer même notre travail sans en référer au cadre.
Moi je, enfin… moi j’ai toujours dit normalement on est sensés mettre au courant
les cadres de ce que nous faisons pour la simple et bonne raison, même si çà fait
partie de notre travail, nous sommes toujours obligés d’avoir l’aval de nos cadres.
Ils sont le pivot de l’organisation. Ce sont eux qui cautionnent, là on a remis en
route les repas thérapeutiques, obligatoirement les informations sont transmises
au cadre qui donne son aval ou non… C’est leur boulot, l’organisation. Quand on
met en route des choses dans un but de faire partir des patients ou d’humaniser le
service afin d’introduire les patients dans des structures médico-sociales (MAS,
FAM, FAS), il est bien évident qu’on a besoin de l’aval du cadre.
Dès qu’on met en route des choses qui changent, on est obligés d’en référer au
cadre. Déjà parce que çà suppose qu’on nous donne des moyens, qu’ils soient
matériels ou humains, çà suppose aussi une organisation du travail de l’équipe.
C’est donc bien de la coordination.
124
Entretien n°5 – Cadre de santé
Que représente le partenariat pour toi ?
Pour moi, le partenariat, je le définirais comme de la complémentarité, c’est-
à-dire qu’effectivement on se base sur les compétences de chaque service, qu’on
les identifie et qu’effectivement on réponde au mieux à la prise en charge du
patient en lui apportant une qualité. Pour moi, c’est la complémentarité qui
représente le partenariat. Compétences diverses qui sont réunies au service du
patient qui apportent une plus-value pour la prise en charge.
Quelles sont les difficultés du partenariat ?
Je pense que les difficultés pour mettre en place un partenariat sont déjà
aussi des fois au niveau du statut parce que souvent, le médico-social a un statut
privé alors que nous, nous avons le statut de la fonction publique. Donc des fois,
effectivement, çà peut être une source de difficultés. On a des priorités des fois
différentes. Dans le médico-social, on privilégie le partenariat avec les familles.
Dans le sanitaire, vu que les patients ont le gîte et le couvert, on pourrait dire, on
est moins de priorités. On pourrait dire aussi que la volonté de l’institution c’est de
répondre par des prises en charge partagées alors que le médico-social
souhaiterait qu’on accueille leurs résidents de manière complète. Donc des fois, je
pense qu’on n’a pas forcément les mêmes logiques, les mêmes contraintes.
Difficultés privé/public ? Peux-tu préciser ?
Je pense que les intérêts sont pas les mêmes. Des fois, au niveau des
statuts, là au niveau des conventions que nous souhaiterions mettre en place, qui
sont pratiquement finalisées, il faut qu’elles soient validées par les instances. On
se rend compte que par rapport au statut, on voit une difficulté de mise en place de
cette convention alors qu’elle est validée par euh… je dirais… les agents, les
cadres du terrain et on se rend compte qu’à un échelon supérieur cette convention
a du mal à âtre mise en place, validée. Et souvent on nous met en place
125
effectivement cette logique que ce serait une convention entre deux
établissements privés elle serait beaucoup plus facile à mettre en place alors que
là, au niveau des directions, il y a beaucoup plus de contraintes.
Difficultés financières ?
Oui, des aspects financiers et puis les priorités de chaque établissement ne
sont pas forcément les mêmes et cette complémentarité du partenariat est un peu
mise à mal par rapport à des logiques qui sont différentes. Je pense que le
médico-social a vraiment un partenariat fort au niveau des familles parce que les
familles sont souvent gérants ou cogérants des structures médico-sociales alors
que nous on a une autre tutelle qui est l’ARH pour le moment. Donc je pense que
le partenariat sera plus facile à mettre en place quand l’ARS va se développer et
qu’elle sera vraiment créée et qu’elle sera vraiment partie prenante ; le partenariat
sera plus facile à mettre en route.
Dans le cadre de notre convention, je pense que l’encadrement de proximité
avec les agents sur les fondamentaux euh… c’est-à-dire des prises en charge
partagées euh...sur euh… par exemple des stages des personnels, je pense que
sur l’ensemble des points on est plutôt d’accord. Donc je ne pense pas qu’au
niveau de la proximité il y ait des difficultés majeures. Je pense qu’il n’y a rien qui
freine, la complémentarité des agents comme l’encadrement comprennent la
nécessité effectivement que dans les services on n’a pas toute la compétence pour
répondre à toute la difficulté des prises en charge et que effectivement euh… les
professionnels comprennent que les patients puissent éventuellement aller dans
les structures les plus adaptées en fonction des prises en charge
Quels sont les éléments facilitateurs du partenariat ?
La prise de conscience des professionnels que tout ne peut se faire ni au
niveau du médico-social, ni au niveau du sanitaire ; il faut vraiment un échange
des deux spécialités pour arriver à une prise en charge adaptée de la personne. Je
pense que les professionnels se rendent compte de la compétence de chacun, se
rendent compte que les structures et infrastructures ne sont pas les mêmes, les
moyens sont différents. Donc, dans le médico-social qui est un milieu plus ouvert
126
que l’hôpital psychiatrique, on se rend bien compte que la prise en charge peut
être source effectivement de socialisation donc des objectifs plus d’ouverture vers
l’extérieur alors que quand un patient peut être angoissé, décompense,
effectivement un milieu fermé, plus rassurant comme l’hôpital psychiatrique a son
rôle à jouer. Je pense qu’effectivement l’hôpital psychiatrique ne peut pas tout
faire, les structures médico-sociales ne peuvent pas tout gérer, ne peuvent pas
gérer forcément les crises, ils ne sont pas outillés pour le faire au niveau de leur
infrastructure entre autre donc effectivement les personnels sont les premiers à
reconnaître que tel patient doit éventuellement continuer sa prise en charge dans
un milieu ouvert ou effectivement s’il décompense, doit venir à l’hôpital
psychiatrique. Donc, effectivement, je pense qu’il y a vraiment une prise de
conscience des professionnels avec maintenant des professionnels qui
reconnaissent euh… la compétence des autres donc on est beaucoup moins dans
un cloisonnement des compétences.
Quels sont les bénéfices pour le patient/résident ?
Moi je parlerai plus de mon domaine sanitaire que du domaine médico-
social, ce qui est normal puisque je méconnais un peu le médico-social. J’y touche
mais je connais pas leur finalité mais je considère que nous, sur notre prise en
charge sanitaire, euh… on a effectivement des contraintes de sécurité avec les
agents donc sur tous les projets de socialisation, d’ouverture sur l’extérieur, je
considère que le médico-social peut mieux répondre. Donc, nous, nos patients,
dans ce partenariat auront des portes d’ouverture sur des structures plus
accueillantes où le personnel a une compétence éducative donc pourra
accompagner les patients sur l’extérieur. Alors que nous, nos contraintes euh… je
dirais de sécurité, nos contraintes de répondre aussi à des prises en charge
difficiles où il faut être présent en permanence, nous euh… on peut mettre des
patients à la marge. Donc je trouve que partenariat là ne peut être que bénéfique
pour le patient. Je ne vois vraiment aucune contrainte à travailler avec le médico-
social.
127
Pour le patient, l’avantage de ce partenariat c’est aussi le fait d’être non plus
considéré uniquement comme un patient mais plutôt comme un sujet qui le
ramène à une citoyenneté que jusque là il n’avait plus. A un moment donné, c’est
de prendre l’individu dans un projet, ne plus être à dire que cette personne est
hospitalisée en psychiatrie et par contre, c’est vrai que dans l’histoire de nos
patients, on voit des hospitalisations très longues de 10,20,30 ans
d’hospitalisation, voire plus et là on prend vraiment l’individu comme un sujet sur
un projet qui répond à ses besoins et plus simplement de dire ce patient a une
histoire lourde et est voué à rester en hôpital psychiatrique. Donc maintenant, c’est
de prendre en compte dans une juste évaluation l’autonomie du patient, son je
dirais, ses troubles et si ces troubles sont adaptés à une vie sociale et
effectivement répondre à tout ce projet et aller éventuellement vers le médico-
social, les maisons de retraite ou éventuellement l’accueil thérapeutique. Donc
c’est sortir le patient des structures hospitalières pour avoir une prise en charge la
plus humaine pour l’individu. On sait que nos patients on vraiment une histoire très
très lourde et très très longue et je crois que maintenant, pour leur bien-être, il faut
qu’ils soient le plus dans la société.
Donc on aborde un projet de vie au-delà du projet de soins malgré nos objectifs
sanitaires. On doit travailler sur la sortie qui signifie travailler sur un projet de vie
donc savoir où le patient sera le plus adapté à l’extérieur en sachant que nous, on
doit toujours avoir cette capacité d’accueil au cas où la prise en charge à l’extérieur
peut être source de décompensation. On doit être en mesure de la canaliser. C’est
çà le travail en partenariat, c’est savoir travailler avec les autres pour répondre au
projet de vie mais nous avoir une réactivité suffisante pour être en capacité
d’accueil en cas de besoin. On est dans la continuité de la prise en charge en
acceptant que le patient puisse revenir et qu’on soit là pour répondre à un moment
de décompensation et ensuite que la personne retourne dans son lieu de vie. On
doit être dans quelque chose de plus réactif, plus mouvant entre les partenaires au
travers des échanges entre le milieu ouvert et le milieu fermé. Donc, c’est une
interactivité, une dynamique de la prise en charge qu’elle soit sanitaire ou médico-
sociale. Ca ne peut être que dans un sens, c’est vraiment chacun répond au projet
128
du patient et en cas de difficulté nous on doit être très réactifs et jouer notre rôle
des fois de soupape pour le médico-social où les prises en charge peuvent être
difficiles et le personnel en difficulté parce qu’il n’a pas forcément une qualification
trop « psy », il faut qu’ils puissent nous dire, sur un temps donné de 15 jours ou 3
semaines qu’ils ont besoin qu’on réponde pour stabiliser un patient. C’est prendre
en compte et prendre soin des autres.
Quel est le rôle du cadre ?
Il est essentiel, c'est-à-dire qu’au départ, effectivement, les professionnels je
dirais dans le sanitaire ont une culture soignante c'est-à-dire que les personnels
qui travaillent chez nous, on pourrait dire sont souvent du personnel soignant.
Dans les structures médico-sociales, on a beaucoup d’éducateurs, d’AMP, des
aides soignants et chacun est dans une culture différente d’un coté éducatif, de
l’autre soignant et je pense que le lien peut être fait ou le relais par le cadre. C’est
lui qui peut échanger avec des collègues et créer cette osmose entre les deux
mondes. Nos deux cultures sont très différentes et il est très difficile de se
rencontrer spontanément. Parce qu’il y a très peu d’échanges de professionnels et
je crois que c’est l’encadrement - parce qu’on nous demande de plus en plus une
ouverture vers l’extérieur - qui peut déjà être la connexion entre les deux mondes
et être effectivement après montrer la plus-value qu’on peut avoir avec l’autre. Le
cadre est le trait d’union entre les deux logiques, les deux cultures.
Le cadre rassure aussi car les personnels peuvent avoir l’impression qu’on leur
enlève une partie de leur spécificité au niveau de leurs compétences ; Il faut leur
démontrer que les regards croisés amène une compétence commune et
complémentaire. On a souvent une inquiétude à travailler ensemble quand on ne
connaît pas l’autre. On peut s’imaginer que derrière il y a toujours une dimension
« méfiante » qui peut faire croire qu’on veut se débarrasser du patient ou du
résident.
On est là aussi pour évoquer les missions du service parce que le but c’est de
répondre à un projet de soins et il faut réexpliquer le cœur du métier, atténuer les
inquiétudes et répondre à ce pourquoi on est là, répondre à nos missions. Des fois,
129
on aurait tendance à vouloir garder certains patients sur les structures parce qu’on
a une longue histoire avec le patient mais ce n’est plus notre rôle. Notre rôle est de
répondre au projet de soins. Une dimension affective est souvent présente avec
les patients au long cours et les personnels peuvent avoir des difficultés à voir
partir le patient dans des structures médico-sociales où généralement on est
vraiment dans une continuation de prise en charge donc on est aussi là pour
rassurer les personnels et leur rappeler sans cesse qu’on est là pour répondre au
projet du patient, et répondre à nos missions de service public.
Le cadre doit toujours être en arrière plan pour conseiller, orienter, rassurer
le personnel. Il assure un rôle de coordination entre les deux secteurs, veille au
bon fonctionnement pour l’aboutissement du projet du patient.
On a trop travaillé dans le cloisonnement qu’il soit hospitalier ou avec le
médico-social où on avait deux cultures qui souvent nous opposaient et je trouve
maintenant que de mélanger les compétences et à terme intégrer au niveau
sanitaire des professionnels du médico-social et inversement, on va aller dans le
bon sens et on va de plus en plus travailler ensemble ce qui est nécessaire pour la
qualité de la prise en charge du patient. Donc je pense que tout doucement, le
cloisonnement qui existait entre les différentes structures va disparaître et je pense
que la mise en place d’une ARS malgré qu’elle soit décriée actuellement, pourra
apporter plus de cohérence dans l’offre de soins, dans la prise en charge et je
pense que c’est tout bénéfice pour les patients et leurs familles.
130
Entretien n°6 - Médecin
Que représente le partenariat pour vous ?
Difficile de répondre à cette question… Moi çà me paraît quelque chose d’essentiel
par rapport à nos patients qui ont des troubles psychiques mais qui ont quand
même besoin à la fois de garder un contact avec l’extérieur et qui ont besoin aussi
de se réinsérer progressivement dans la cité. Et voilà ce que çà représente, moi çà
me paraît indispensable par rapport à une certaine catégorie de personnes bien
sûr qui relèvent plus du secteur médico-social.
Cà suppose un partage de la prise en charge, des compétences complémentaires,
alors au départ une formation différente, au départ il faut aussi apprendre à se
connaître entre l’équipe sanitaire et l’équipe médico-sociale. Ces différences sont
très enrichissantes quand on travaille ensemble. Cà vraiment, particulièrement
l’expérience du foyer intermédiaire l’a vraiment été enrichissante . On s’est
aperçu que pour certaines personnes nous on avait une position très protectrice et
que leur équipe a une autre pratique et qu’ils sont plus en mesure parfois d’oser
proposer des choses et que finalement çà peut bien se passer. J’ai l’exemple, peu
de temps après l’ouverture du foyer intermédiaire , d’un patient psychotique qui
était potomane du temps de son hospitalisation, je dis du temps de son
hospitalisation parce que progressivement cette potomanie s’est guérie une fois
qu’il était sorti, avait prévu de partir 15 jours en vacances. Il est arrivé au foyer
intermédiaire en juin, il voulait partir en vacances en août tout seul. Alors il avait
organisé un voyage de 15 jours dans le Sud de la France. Alors nous, quand on a
vu çà on a dit mais vous ne vous rendez pas compte, donc eux l’équipe éducative
était prête à organiser çà. C’est pas possible, si il fait une crise de potomanie…
Finalement ils ont organisé quelque chose, ils ont maintenu le projet, malgré ce
qu’on leur disait et ils ont quand même organisé la possibilité… Il était un peu
encadré sur place enfin, je sais pas trop comment ils ont fait çà mais il y avait une
présence que quelqu’un sur place et çà s’est très bien passé. Ce patient-là, il a
très bien évolué.
Il y a une façon aussi de considérer la personne qui est quand même différente
parce malgré tout nous on est quand même, à force d’être beaucoup dans la
131
protection, on les considère moins comme des citoyens je dirais. C’est pas
délibéré mais eux ils sont très attentifs à cette notion de citoyenneté. Quand les
hospitalisations sont longues, ils perdent leur statut de sujet. Dans un autre sens,
ce qu’on constate au foyer intermédiaire, c’est que ils se sont fait eux leur
expérience des troubles psychiques et que ils sont déjà beaucoup plus assurés,
maintenant quand ils ont des nouvelles personnes, çà peut être des patients qui
sortent de l’hôpital et qui présentent encore des difficultés… Stabilisation çà veut
pas dire grand-chose mais il y en a quand même qui sont stabilisés sur un mode
où il y a persistance de certains troubles donc ils ont moins peur que si on les
adressait … Je trouve qu’il y a un enrichissement mutuel et je suis très contente de
travailler avec le foyer intermédiaire et je pense que c’est réciproque. Je pense que
c’est pareil, l’équipe d’infirmiers au départ a eu un peu de mal à s’y faire puis après
çà a changé et maintenant il y a un travailler ensemble et alors même dans leur
façon d’être là-bas sur place, ils ont leur identité de soignants mais ils participent à
des choses éducatives. Au départ, c’était l’idée, çà c’est le rôle des infirmiers, çà
c’est le rôle des AMP mais finalement ils gèrent le quotidien en s’entraidant.
Quelles sont les difficultés du partenariat ?
Au départ, c’est chacun dans sa spécificité et puis on est arrivés à une
collaboration où les limites sont plus floues entre les tâches de chacun. Les
infirmiers tiennent compte du fonctionnement du nombre de personnes
nécessaires, je crois que çà arrive que les AMP fassent des accompagnements
chez les médecins alors que c’est le rôle des infirmiers. Cà fonctionne bien comme
çà, ils discutent de ce qu’ils ont à faire, parfois les infirmiers vont faire les courses
ou accompagnent pour faire les courses. Il y a une vie commune avec des
complémentarités et une entraide mutuelle.
Il y a eu des difficultés au niveau des cadres du foyer intermédiaire au départ et
l’équipe infirmière aussi. C’était difficile pour l’équipe infirmière au départ de suivre
les directives des cadres du foyer intermédiaires qui sont éducateurs. Leur
situation est quand même assez complexe. C’est une convention qui régit çà et
donc c’est la mise à disposition par le CPN d’une personne par jour pendant 8
132
heures tous les jours de l’année, week-end et jours fériés donc ils dépendent
quand même de leur hiérarchie du CPN mais ils ont à travailler au sein d’une autre
équipe et çà a été difficile. Alors il faut dire que ce qui a été fait aussi… bon… il y a
eu un remaniement de l’équipe d’infirmière parce parmi ceux qui s’étaient
proposés au départ il y en a qui manifestement ne se sentaient pas à l’aise donc ils
ont arrêté, d’autres sont venus et maintenant j’ai l’impression que ceux qui y sont,
sont à l’aise et au clair dans cette structure et donc il y a eu des rencontres avec
les cadres aussi entre les cadres d’ici, moi et le directeur du foyer intermédiaire et
l’éducateur chef de service. Donc on a l’habitude de se contacter facilement, de se
dire les choses quand çà va pas et çà simplifie. En cas de difficulté, cet espace
d’échanges nous met à l’aise. Et puis qu’est-ce qu’on a fait d’autre, il y eu ces
rencontres régulières et puis le fait aussi que çà avance, que les projets des
résidents avancent, il y en a qui sortent et d’autres qui rentrent donc on peut avoir
une certaine satisfaction de cette collaboration. Donc çà fonctionne bien.
Quels sont les éléments facilitateurs de ce partenariat ?
Donc il y a ces rencontres, on a une certaine disponibilité. Quand il y a eu des
problèmes, on a pas eu beaucoup de ré hospitalisation mais on a toujours ré
hospitalisé quand il y a eu des problèmes. On n’a jamais fait trainé les situations
difficiles. On s’oriente vers de la collaboration où chacun amène sa spécificité et où
ensemble on réussit à trouver des solutions quand il s’agit de ré hospitaliser
pendant un temps donné et c’est vraiment un temps donné. On n’est plus dans le
systématique où c’est soit une structure ou soit une autre. C’est le bénéfice de la
présence de l’équipe du sanitaire assez importante. C’est quand même rare d’avoir
tous les jours une présence pendant 8 heures. En général quand on fait un travail
de partenariat c’est rare que ce soit aussi important. C’est assez innovant comme
fonctionnement. La proximité de chaque catégorie de personnel est facilitante. Je
pense que c’est le fait de travailler ensemble au quotidien qui amène çà.
133
Quels sont les bénéfices pour le patient
C’est de pouvoir sortir de l’hôpital, ce qui est pas gagné au départ quand on fait
une sortie sur l’extérieur et d’avoir ensuite accès à d’autres projets. C’est vraiment
une transition. Ceux qui sortent, ils sortent pour aller en FAS alors qu’ils pourraient
pas aller directement d’hospitalisation en FAS, enfin pour certains, parce que il y a
quand même nécessité de s’adapter à l’extérieur. Le foyer intermédiaire est ouvert
sur l’extérieur et avec un fonctionnement qui ressemble déjà à celui d’un FAS, qui
ressemble et donc çà les prépare à être dans un FAS où il y a un encadrement
moins important. Donc çà permet çà. C’est facilitateur de sortie.
Et puis, le patient retrouve son statut de sujet, citoyen, c’est un bénéfice. On a
beau faire en milieu hospitalier, même quand on est très attentif, l’hospitalisation,
au niveau du statut c’est pas la même chose que d’être hospitalisé et être accueilli
dans une structure éducative. La personne est plus actrice de son projet, de sa vie
que ce qu’il peut être dans un service de soins. Certains patients sont orientés vers
le SAAD mais çà permet de faire cette transition.
Comment envisagez-vous le rôle du cadre dans ce travail de partenariat ?
C’est d’essayer de coordonner l’équipe infirmière. Cà a pas été facile au départ
parce que c’était tout neuf. Il faut une certaine souplesse pour passer du travail
d’infirmier à l’hôpital et infirmier dans une structure médico-sociale tout en
dépendant encore de l’établissement hospitalier. Donc le rôle du cadre c’est de
faire des rencontres avec l’équipe infirmière, de favoriser les liens entre les
infirmiers, les cadres du médico-social. De soutenir aussi les projets. Quoique
normalement le projet des patients/résident du foyer intermédiaire, il se fait en
collaboration avec l’équipe éducative donc le cadre vient à toutes les réunions où il
est question des résidents. Moi aussi. Donc au courant aussi des projets. Cà
permet la collaboration, la communication. Le cadre est aussi le relais quand le
médecin n’est pas présent. On a aussi des réunions avec l’équipe dirigeante, je ne
sais pas si c’est le mot, du CAPS de Rosières. Tous les 6 mois, il y a une réunion
avec Mr B. et une directrice adjointe qui s’occupe du foyer intermédiaire plus
134
spécialement, le directeur des soins puisqu’il y a une convention avec le CPN et la
directrice qualité du CPN. Ca permet de faire le lien avec tout le monde.
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Institut de Formation des Cadres de Santé
Centre Psychothérapique de NANCY
B.P. 11010
54521 LAXOU CEDEX
Promotion 2008-2009 CESAR Denise
Titre : Partenariat entre secteurs sanitaire et médico-social
Rôle de coordination du cadre de santé
________________________________________________________Mots clés :
Partenariat – Collaboration – Rapprochement - Cloisonnement – Prise en charge globale -
Continuité - Cadre de Santé – Réalité complexe – Coordination
Résumé du mémoire :
Le partenariat entre les secteurs sanitaire et médico-social apparaît comme une évidence et une nécessité. La maîtrise des problèmes liés au handicap psychique par un seul type de professionnels est illusoire et il est essentiel que les dispositifs psychiatriques et médico-sociaux avancent vers des modes de collaboration qui tiennent compte de la réalité complexe des besoins des personnes. Ainsi, des rapprochements sont nécessaires puisque le cloisonnement entre les institutions et les professionnels nuisent à la prise en charge globale de l’usager et à la continuité des interventions. Dans ce contexte, le cadre de santé, par ses missions, doit promouvoir le travail de collaboration entre les professionnels et mettre en œuvre une coordination efficace au bénéfice du patient/résident. Ce travail de recherche propose une réflexion sur ce sujet en s’appuyant sur des concepts concernant les notions de partenariat et de collaboration et sur l’analyse d’entretiens menés auprès de professionnels des deux secteurs concernés. Nombre de pages : 134
Je soussignée Nom : CESAR Prénom : Denise Accepte : □ N’accepte pas : □ Que cette 4ème de couverture apparaisse sur le site internet de l’I.F.C.S. Fait à : Signature
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