FIGEMENT ET RENOUVELLEMENT DU LEXIQUE : QUAND LE
PROCESSUS DETERMINE LA DYNAMIQUE DU SYSTEME.
0. Introduction :
Ce ne sont certainement pas les études sur la dynamique lexicale qui manquent. Il
suffit de consulter les publications bibliographiques consacrées à la néologie et à la
terminologie pour s’en convaincre. Cela s’explique d’autant plus aisément que « la langue
bouge constamment, peu par les formes et la syntaxe, beaucoup plus pour le vocabulaire »
(M. Cohen 1972 : 252). Mais lorsqu’il s’agit de préciser les grandes tendances du
renouvellement du lexique, la tâche semble beaucoup plus délicate.
La raison en est le risque de tomber soit dans des considérations de nature idéologique
soit de privilégier des aspects au détriment d’autres qui ne sont pas moins importants ; la
difficulté étant que « quelle que soit l’étendue de l’enquête, il y aura toujours des recoins
inexplorés, des lacunes imprévisibles et, ce qui est pire, des régions inaccessibles par
définition : ces limbes indécis où naissent et flottent les mots qui attendent le baptême » (E.
Brunet 1995 : 1996). Or, le plus souvent, c’est dans ces limbes que se dessinent les traits de
l’évolution.
Cette difficulté étant précisée, il serait plus prudent de partir des travaux portant sur la
néologie pendant ce dernier quart de siècle en vue de scruter les éléments qui sont de nature à
fournir des indications sur les orientations générales du mouvement des vocabulaires. Il ne
s’agit évidemment pas de refaire un travail comme celui d’A.Goosse (1975) mais d’exploiter
les données fournies par ces études et de les intégrer dans une vision générale qui focalise
l’attention sur les procédés et les processus mis en œuvre et la part respective qui leur revient
dans le cadre de l’économie générale du système.
Ainsi serait-il possible de dresser une typologie des mécanismes de formation lexicale
permettant de préciser les rapports hiérarchiques qui existent entre eux, rapports fondés sur
des critères systémiques sans lesquels il ne serait pas possible d’avoir une vision globale
déterminant avec précision l’économie générale du système et évitant par là les projections
nécessairement déformantes et les conclusions reposant sur des faits épars. Les études
lexicologiques, étant orientées dans plusieurs directions, souffrent clairement d’une lecture
unifiée autorisant des conclusions qui, sans prétendre à la vérité, pourraient refléter assez
fidèlement les mouvements profonds en action dans le lexique du français.
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C’est grâce à cette vision générale qu’il serait possible de présenter le figement comme
processus déterminant la configuration générale du système linguistique en lui assurant, en
complémentarité avec les autres procédés (dérivation, composition, troncation, emprunt et
cryptonymie), les éléments de son fonctionnement interne (la formation des outils
syntaxiques), son adéquation avec les bouleversements du monde (fonction dénominative) et
son affinement culturel (idiosyncrasies de toutes sortes : lexicales, syntaxiques, etc.).
1. La dynamique lexicale en français contemporain :
Il serait préférable de parler de dynamique, au lieu de renouvellement, parce que cette
dernière notion implique une symétrie entre les créations nouvelles et les disparitions ; or,
comme l’a bien souligné E. Brunet, « beaucoup de mots naissent, beaucoup vieillissent aussi,
mais peu meurent ». Les mots vieillis, « délaissés, presque oubliés, on les retrouve pourtant
avec surprise, parfois avec plaisir » (1995 : 99). Quant à la notion de dynamique, elle
engendre l’idée de « mouvement considéré dans ses rapports avec les forces qui en sont les
causes » (Petit Robert, 1990) ; ce qui correspond parfaitement à l’objet de notre étude.
Pour ce faire, nous partons d’un certain nombre de travaux couvrant la néologie lexicale,
qu’elle soit de nature lexicographique ou autre, pour dégager quelques paramètres aidant à
cerner avec netteté les champs d’investigation, la portée des conclusions retenues, leur
validité systémique et les pistes d’investigation qu’ils offrent à l’analyse.
1.1. Les travaux sur la néologie lexicale :
Il n’est pas question que nous passions en revue l’ensemble des travaux sur la
néologie. Pour en avoir une idée relativement précise, il suffit de se reporter à titre d’exemple,
aux documents bibliographiques suivants :
- Bibliographie de la néologie : 300 apports nouveaux (1980-1987), office de la langue
française, Québec, juillet 1987 ;
- Inventaire des travaux en cours et des projets de terminologie, Québec 1987.
- Bibliographie de la néologie. Nouveaux fragments (1980-1989), RINT Office de la langue
française, Québec, 1990.
Nous y ajouterons volontiers les travaux de L. Guilbert et de J. Dubois, sans oublier
les ouvrages lexicographiques renfermant des relevés systématiques comme :
- Datations et documents lexicographiques, n°24, Néologismes du français actuel. INALF,
CNRS, Klincksieck, 1984.
- Néologie lexicale .2. Français, Gril, université Paris VII, 1987.
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On peut regrouper les travaux menés en matière de création lexicale en quatre
ensembles :
- ceux dont l’objet privilégie des questions en rapport avec la terminologie comme la
dénomination (le numéro 4. Vol. 41 de Méta) ou d’implantation terminologique ;
- ceux qui se servent des outils statistiques pour mesurer la dynamique lexicale (Brunet
1995, Dubois 1960, etc.) ;
- ceux qui portent sur la variation lexicale (G. Petit, S. Mejri, Walter) ;
- ceux qui s’inscrivent dans une perspective plus globale visant à dégager les grandes
tendances du mouvement des vocabulaires français (L. Guilbert, A. Goosse, S. Mejri).
Avant de présenter certaines des conclusions auxquelles ces travaux ont abouti, il
faudrait mentionner l’importance du dictionnaire dans les descriptions effectuées, celle des
banques des mots et celle des bases textuelles (Frantext par exemple). Que les dictionnaires
soient de la langue générale ou des langues de spécialité, force nous est de constater qu’ils
demeurent des outils très précieux. Des ouvrages comme :
Les mots dans le vent, Larousse 1971.
Les nouveaux mots dans le vent, Larousse 1974.
Le dictionnaire des mots nouveaux, 1971.
Le dictionnaire des mots contemporains ,
fourmillent de données essentielles pour l’étude du mouvement des vocabulaires.
Parmi les conclusions présentées dans ces travaux, nous retenons les éléments
suivants :
- « La dérivation française ne se porte pas mal », avec cette précision que plus des
deux tiers des bases sont des unités françaises autonomes et que l’accroissement des dérivés
de substantifs se fait « au détriment des dérivés de verbes ou au détriment des verbes
existants » (Goosse 1975 : 11, 14, 15). Toutefois, l’auteur attire l’attention sur les limites de la
dérivation et exprime le souhait « que l’on freine l’allongement démesuré des mots, défaut qui
gêne sûrement la communication, et notamment la communication orale » (Goosse 1975 :
18) ;
- la dérivation est « la source principale du renouvellement lexical » ; ce qui
n’empêche pas de faire la distinction « entre créativité d’un suffixe [par exemple], qu’on
mesure en nombre de vocables mis en circulation, et le destin, indépendant des mots
suffixés » (Brunet 1995 : 101) ;
- « la suffixation est le processus de formation lexicale le plus productif » ; par ailleurs
« la préfixation se distingue surtout par sa productivité à partir du stock de la langue », c’est-
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à-dire en exploitant les bases autonomes, alors que « les acronymes sont employés surtout
dans les domaines scientifiques et techniques » ; « les sigles relèvent plutôt de l’usage
courant ». Quant aux emprunts, ils subissent toutes les modifications » imposées par le
système (phonétique, morphologique, graphique et sémantique). « Rares sont les unités
[empruntées] qui restent intactes » (Mejri 1995 : 154, 163, 177, 180) ;
- « les vocabulaires spécialisés […] privilégient la composition, les formations
syntagmatiques et les acronymes ; les abréviations sont plutôt employées dans un cadre
familier » (Mejri 1995 : 184) ;
- sur le plan terminologique, « un terme simple [a] plus de chances de s’installer qu’un
terme compliqué ». Ainsi « simplicité et […] transparence des formes retenues vont
généralement dans le sens d’une plus grande diffusion » (Depecker 1997 : XXIV – XXV) ;
- « le recours à l’emprunt représente une autre source de néologismes mais l’aspect
néologique réside moins dans le passage de l’unité d’une langue à une autre que dans
l’adaptation du nouveau terme par la langue cible » (Mejri 1995 : 183)
De telles remarques demeurent parcellaires et ne recouvrent leur validité réelle que si
elles sont insérées dans une vision d’ensemble.
Parmi les investigations les plus intéressantes dans ces études, nous retenons la
dimension sémantique de la dynamique lexicale qui met en lumière à la fois l’importance des
mécanismes sémantiques impliqués dans le processus néologique (Mejri 1995 : 301-330),
mécanismes qui trouvent leur expression au niveau de l’unité lexicale ou au niveau des
formants lexicaux (affixes ou composants savants). C’est cette dernière catégorie qui ouvre
des perspectives importantes devant les recherches en matière de sémantique lexicale
morphématique. Les travaux de J. Peytard ont beaucoup contribué à l’élaboration de cette
perspective. Cela signifie concrètement que des affixes comme sur- ou -ique connaissent dans
la production néologique qui leur est propre une importante extension catégorielle (les parties
du discours touchées) et sémantique (la polysémie du formant) comme le montrent ces deux
représentations empruntées à Mejri (1995 : 240 et 251) :
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-ique
Adj. Nom
N Adj N N V N
Relatif à Emploi de l’informatique -Science Science,
- Ensemble de connaissances, Ensemble de
de techniques connaissances,
. de techniques.
Acronymique productique bureautique détonique
Sur
Dépassement Localisation
Excessivité Supériorité Additivité Superlativité
Adj. Nom Verbe Adj. Nom Adj et n. Verbe Nom Adj. Nom
Nom
Sur- surden- surpro- surdimen- sur- surrégé- surcom- surcoût surencombré surverse
dirigé sité téger sionné régime nérateur penser
Cet enrichissement catégoriel et sémantique se trouve renforcé par un autre type
d’extension, celle qui concerne les domaines d’emploi, et ceci aussi bien au niveau des mots
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(cf. par exemple le fameux exemple des termes d’informatique empruntés à d’autres
domaines : menu, souris, virus, etc.) que des formants (cf. les champs lexicaux touchés par le
suffixe –ique, une trentaine ; Mejri 1995 : 234 ).
1.2. Nécessité d’une vision globale :
Ce qui est frappant dans toutes les études consacrées à la dynamique lexicale, c’est
l’absence d’une vision globale intégrant tous les mécanismes mis en place dans la production
lexicale ; ce qui conduit inéluctablement à l’ignorance de certains processus fondamentaux
sans lesquels il ne serait pas possible de comprendre l’économie générale du système, et par
conséquent, de dégager les tendances réelles du mouvement des vocabulaires. Sans cette
vision, il ne serait pas possible non plus de donner à certaines conclusions toute leur
signification parce qu’en matière de lexique, contrairement à des croyances qui ont la vie
dure, c’est la régularité qui fonde l’irrégularité apparente.
Dans les descriptions lexicales, on se contente le plus souvent de la dérivation et de la
composition, rarement de procédés comme la troncation, la cryptonymie et la polysémie.
Quant au figement, il est ignoré presque systématiquement. Nous en avons fait le constat dans
Mejri 1995.
Trois raisons essentielles semblent être derrière cette marginalisation : les pratiques
lexicographiques qui privilégient les unités graphiquement soudées au détriment des unités
polylexicales autonomes, la croyance que le figement ne peut pas, de par les connotations que
son sémantisme véhicule, participer au mouvement néologique, et le flou théorique qui règne
en matière de classement des procédés (cf. par exemple préfixation / composition par
particules).
C’est sur ce dernier aspect que nous voudrions nous attarder parce que nous le
considérons comme déterminant dans toute appréciation des faits lexicaux.
S’agissant des moyens mis en œuvre pour obtenir de nouvelles unités lexicales à partir
d’éléments préexistants dans la langue, il y a lieu de distinguer deux processus : la dérivation
et le figement. Entre les deux s’interpose la composition qui relève des deux tout en assurant
le passage de l’un à l’autre des deux processus.
Le lexique assure son renouvellement grâce au réemploi des matériaux lexicaux
disponibles principalement selon ce qu’on pourrait considérer comme la syntaxe lexicale
(celle du mot) et la syntaxe syntagmatique (celle des phrases, des syntagmes, etc.)
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1.2.1. La syntaxe interne du mot simple1
C’est celle qui se réalise dans le cadre du mot construit selon le schéma suivant :
base (autonome ou non) + affixe,
l’élément affixal étant antéposé (préfixé), postposé (suffixé), inséré entre la base et l’affixe
(infixé)2 ; si les éléments affixaux sont discontinus, leur adjonction est concomitante
(parasynthèse) : insatisfait, satisfaction, pleurnicher, embellir. La base de la nouvelle unité est
soit autonome (chiméral) soit non autonome (fractale). Il est de tradition de voir dans ces
subdivisions une organisation paradigmatique du lexique dont les contours sont nets, dont le
statut des formants est bien défini et dont le champ d’action est bien cerné. En fait ces
certitudes ne sont qu’apparentes :
- Plusieurs travaux ont remis en question l’opposition suffixation / composition et
préfixation / composition (cf. Mejri 1995 et 1997) montrant par là la nécessité de critères
fiables et constants, justifiant de telles oppositions. Pour J. Dubois (1962 : 22-23), des
éléments comme – thérapie, - morphe et –mètre ont le statut de suffixes ; pour Peytard, tout
« élément premier, figurant sur la gauche du mot connecté » est un « préfixal » (1971 : 50),
donnant ainsi à anti-tabac et téléenseignement le même statut de préfixés. Ne parlons pas des
analyses réservées aux parasynthétiques (cf. à titre d’exemple Bonnard 1987 et Thiele 1987).
Avec les travaux de L. Guilbert (cf. en particulier 1975), un pas était franchi dans la
clarification de l’opposition préfixation / composition : est préfixal tout élément antéposé,
autonome ou non, exprimant une catégorie générale similaire à celles exprimées par les
prépositions ou les adverbes ; est formant de composition tout élément jouissant d’une
plénitude sémantique. Les premiers éléments assurent une fonction plutôt catégorielle alors
que les seconds une fonction plutôt dénominative ; ce qui se traduit par le cantonnement de la
composition dans la catégorie nominale, contrairement à la préfixation dont l’extension
catégorielle est de loin beaucoup plus importante. Le même raisonnement peut être tenu pour
l’opposition composition / suffixation. Ainsi aurions-nous le classement suivant des unités
analysées :
- préfixés : surdoué, hypertendu, etc.
- suffixés : satisfaction, fractal, etc.
- composés : thalassothérapie, chronomètre, etc.
1 Nous employons le terme syntaxe dans le sens générique d’ensemble de règles régissant l’arrangement des unités linguistiques quels qu’en soit le niveau dans l’analyse linguistique et l’unité d’intégration (mot, syntagme, phrase …)2 cf. Thiele, 1987.
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Reste la précision de la nature du contenu catégoriel véhiculé par les affixes : il s’agit
de catégories sémantiques générales situées dans une zone intermédiaire entre les catégories
syntaxiques (comme le nombre, le genre, etc.) et les dénominations particulières (celles
exprimées par les unités lexicales à valeur référentielle). Pour la préfixation, ce sont des
catégories comme la négation (in-, non- dé- etc.), la localisation spatiale ou temporelle (post-,
anté-, avant-, etc.), l’intensité (sur-, hyper-, hypo-, etc.), etc. Quant à la suffixation, elle
couvre des catégories comme l’agent, l’action, le résultat, le collectif, etc. en plus des parties
du discours dont les suffixes assurent les marques. De telles catégories servent à structurer le
lexique à l’intérieur des parties du discours.
Ainsi la dérivation serait-elle conçue comme un outil dénominatif et prédicatif
assurant la formation des unités appartenant aux catégories suivantes présentées dans un ordre
décroissant en fonction de l’importance de la productivité et du nombre d’affixes impliqués :
nom, adjectif, verbe et adverbe.
Par ailleurs, la dérivation envisagée sous forme d’un système fermé, ne résiste pas à
l’analyse. Toutes le contradictions relevées dans les classements cités proviennent de cette
vision cloisonnée des choses. C’est pourquoi nous sommes convaincu que seule l’analyse qui
y voit un système ouvert sur d’autres processus rend compte du fonctionnement réel du
lexique.
Vu les liens privilégiés que la suffixation noue avec la grammaire de la langue, c’est-à-
dire la partie de la syntaxe qui concerne le découpage en parties du discours et les catégories
adjacentes, le suffixe étant l’élément qui détermine l’appartenance catégorielle tout en
véhiculant sa propre charge sémantique, la dérivation ne peut être perçue que sous la forme
d’un continuum dont l’ouverture se situerait du côté de la préfixation. Deux arguments
militent en faveur d’une telle vision :
- l’absence systématique de toute séparation entre base et suffixe et son corollaire le
caractère relativement autonome, même non systématique, des préfixes (allant de l’accent
comme dans asexualité [1970] jusqu’à l’existence autonome du préfixe comme dans non-dit
[1980]) ;
- la proximité catégorielle qui existe entre les préfixes et les prépositions ou les
adverbes ; comparez par exemple sous-verre et sous le verre.
Dans cette optique, la suffixation serait adossée à la grammaire puisqu’elle y puise les
catégories grammaticales qu’elle exprime morphologiquement par les suffixes alors que la
préfixation, dégagée en tant que procédé de cette fonction grammaticale, ramène plutôt les
outils de la syntaxe syntagmatique (préposition et adverbe) à la synthèse lexicale ; ce qui lui
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donne une position dans la dérivation permettant, grâce à son retrait catégoriel, de puiser dans
les unités lexicales autonomes ses outils de formation (exemples : contre -, sur-, non-, en-,
etc.).
C’est cette dernière caractéristique qui rapproche la préfixation de la composition
française1 et du figement sans toutefois en faire l’une des expressions différentes du même
processus. Avec la préfixation, on est à la limite de la dérivation et de la composition ; ce qui
justifie l’analyse selon laquelle la préfixation serait un type particulier de composition
(composition à particules).
La syntaxe du mot trouve aussi son expression dans l’exploitation des unités
autonomes dans le lexique mais selon des règles non-conformes à la syntaxe syntagmatique
(R. Martin, 1994). Ainsi les structures du type N + N (porte-fenêtre, montre-bracelet, etc.)
constituent-elles des moules dont la productivité n’a pas de limites parce qu’elle est
susceptible théoriquement d’exploiter tout le matériau lexical disponible ou potentiel. Si nous
multiplions le nombre de noms avec le nombre de structures actuellement en vigueur dans la
composition et le nombre de combinaisons possibles des unités dans le cadre de ces
structures, nous réalisons l’importance d’un tel procédé pour la dynamique lexicale ; ce qui
est confirmé par les relevés lexicographiques : 27,5 % des unités datant de 1970 et plus
figurant dans le Grand Robert relèvent de la composition (Mejri 1995 : 175).
On peut dire autant de la dérivation puisque la suffixation, à elle seule, couvre 38,22%
de néologismes de forme du même corpus étudié ; les parts respectives de la suffixation et de
la préfixation dans les formes dérivées est de 75,85% et 20,12%, le reste étant formé de
parasynthétiques (Mejri 1995 : 154-162).
Si on essayait de représenter le continuum qui prend naissance dans la suffixation et qu’on dégage les
caractéristiques qui déterminent la position de chaque procédé dans les espaces de la syntaxe du mot, on aurait le
tableau suivant :
Parties du discours
Caractéristiques
procédés
Autonomie du
formant
spécifique*
Marquage de
l’appartenance
cartégorielle
N Adj. Verbe Adv.
Suffixation - + + + + +
Préfixation + - + + + +(-)
Composition + +(-) + +(-)
1 en opposition avec la composition dite savante.
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. * le formant spécifique est l’élément déterminant dans l’identification du procédé (le suffixe
pour la suffixation, le préfixe pour la préfixation et le composant pour la composition.
. + (-) signifie que l’action du procédé est limitée.
Ainsi l’économie du système apparaît-elle clairement.
Dès que les règles de la syntaxe courante interviennent, on sort du cadre du mot pour
aborder la syntaxe syntagmatique.
2.2.2. La syntaxe syntagmatique :
Ce qui caractérise les séquences figées (= SF), c’est la polylexicalité définie comme la
concaténation des mots conformément à la syntaxe courante dans le cadre d’une séquence à
laquelle sont attribués un fonctionnement syntaxique et une signification globale propres ; ce
qui dote la langue d’un très puissant système de renouvellement puisque, théoriquement, toute
séquence libre est candidate au figement : à l’infinité des réalisations discursives correspond
l’infinitude du possible lexical. Le figement est par définition englobant : il ne se limite pas à
un seul aspect du lexique, n’exclut aucune partie du discours, prend toutes les dimensions
syntagmatiques, couvre tous les lectes et sert, par conséquent, toutes les exigences du
système.
a. A l’exclusion de tous les procédés de formation de mots, le figement est le seul
processus qui permet à la langue de forger ses outils syntaxiques : toutes sortes d’adverbes, de
connecteurs, de joncteurs, etc.
Même si le renouvellement de ces outils, appartenant en principe à des paradigmes
fermés, est considéré comme très limité, il est aisé de constater qu’aucune liste des locutions
prépositives figurant dans les grammaires ne se présente comme exhaustive ou finie. Même
les dictionnaires hésitent à en enregistrer un certain nombre (cf. Gaâtone 1976 et 1981,
Grevisse 1986, etc.). Cette hésitation traduit en fait le mouvement réel qui sous-tend cette
catégorie réputée être à l’abri du changement. Un seul exemple suffit à montrer comment le
renouvellement est en action même dans ce domaine : sur le plan (de) + nom ou adjectif est
une locution qui s’est propagée au milieu du XXe siècle (G.L.L.F.) et qui connaît un emploi
très fréquent, même s’il est critiqué ; Grevisse en relève même une nouvelle forme qui
« cherche à s’introduire » (1986 : 1526) : au plan de, mais ne fait pas figurer les deux
locutions dans la liste des locutions prépositives1 .
Il en est de même des autres outils syntaxiques :
1 Histoire de en est un autre exemple qui date du XIX siècle et qui, malgré sa fréquence, n’est pas retenu par les manuels – Grévisse (1986) ne mentionne même pas cette locution.
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- les déterminants (quantificateurs ou autres) : une kyrielle de, une poignée de…
- les adverbes connecteurs : en fait, de fait, au fait, pour ce faire, etc.
- les locutions conjonctives : malgré que (emploi critiqué), etc.
Les adverbes, dont la dérivation en -ment se heurte au nombre réduit de suffixes
disponibles (seulement un seul), jouissent d’une production en SF très importante (M. Gross,
1986) ; le nombre de séquences en SP est impressionnant. M. Gross en fait une typologie
formelle relativement exhaustive.
b. Il est un autre type de séquences dont la fonction est plutôt dénominative, la
dénomination étant entendue dans un sens large qui englobe à la fois la dénomination
référentielle et la dénomination prédicative.
S’agissant des dénominations référentielles, le figement est privilégié par rapport aux
autres procédés parce que les premières désignations se font nécessairement dans le discours :
toute référence, avant de recevoir une dénomination définitive, est désignée au moyen de
séquences discursives diverses. Les autres procédés sont seconds parce qu’ils fonctionnent à
partir d’unités non discursives (les affixes, les formants savants…), c’est-à-dire hors de la
spontanéité de la parole directe, disponible et toujours adaptable aux réalités les plus diverses.
Ce que nous avançons là ne concerne pas uniquement la langue courante ; il la dépasse
pour englober tous les lectes : socio-lectes, techno-lectes, lectes dominants, lectes dominés,
etc.
Il arrive que les premières désignations soient retenues comme dénominations
courantes et / ou scientifiques, comme il peut s’y ajouter d’autres dénominations puisées dans
les autres procédés ; d’où l’opposition dénominations courantes / dénominations savantes /
argotiques / spécialisées / non spécialisées, etc.
L’exemple des dénominations ayant la configuration d’un SN dont le noyau est le nom
eau suivi d’un adjectif ou d’un syntagme prépositionnel illustre cette grande variation :
eau minérale, termale (courant) ;
eau lustrale, baptismale, bénite (religion) ;
eau lourde, dure (chimie) ;
eau à pédale, à ressort ; eau d’affe, eau de moule (argot).
Cette variation a donné lieu dans les dénominations de la faune et de la flore les séries
populaires et les séries savantes : queue-de-renard (variété d’amarante), souci d’eau
(populage ou lysimaque), etc.
Dans les ouvrages spécialisés, c’est la dénomination syntagmatique qui prévaut, et ce
pour des raisons strictement fonctionnelles : la simple énumération de ces dénominations nous
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fournit des indications utiles sur les oiseaux dénommés : sterne arctique, sterne à joues
blanches, grue blanche de Sibérie, faucon pèlerin, etc. (cf. Oiseaux d’Europe, d’Afrique du
Nord et du Moyen Orient 1985)
Quant aux dénominations prédicatives (verbe et adjectif), il est fort probable qu’elles
dépassent en nombre les dénominations dérivées1. Les même contraintes morphologiques
évoquées pour l’adverbe sont valables pour le verbe – il n’y a pratiquement qu’un seul suffixe
verbal réellement productif : -er-. On peut y ajouter le grand potentiel expressif offert par les
locutions verbales, que le simple verbe ou adjectif formés d’une base et d’un suffixe ne sont
capables de rendre compte que par le biais de la polysémie. Le prédicat [PARESSE], exprimé
verbalement avec paresser et adjectivalement avec être paresseux se trouve traduit, d’après
le dictionnaire de l’argot par un grand nombre de locutions :
paresser : coincer, deraser la bulle ; faire la vache ; s’endormir sur le rôti, le bifteck,
le mastic ; se les branler, se branler les couilles ; tirer au flanc, au cul, au renard ;
tirer sa loupe.
Etre paresseux : avoir la peau trop courte ; avoir les bras retournés, à la retourne ;
avoir les côtes en long ; avoir les pieds en cosses de melon ; avoir les pieds
retournés ; avoir un poil dans la main ; les avoir à la phoque ; les avoir palmées.
C’est cette dimension expressive, mise à profit d’une manière systématique par les
lectes collatéraux, en particulier l’argot, qui représente une autre particularité du figement.
c. Elle traverse tout le système, en détermine la configuration en en figeant les
particularités, et en fait un réceptacle des croyances de la communauté linguistique (R.
Martin, 1987).
La dimension expressive répond à une fonction essentielle du langage par laquelle les
locuteurs cherchent à rendre leur message plus expressif, c’est-à-dire dont l’impact sur
l’interlocuteur est plus important (H. Frei 1929). Elle est le corollaire systématique de ce
qu’on pourrait considérer comme l’usure expressive du code, usure résultant de la très grande
fréquence des unités lexicales dans le discours : le plus souvent, pour dénommer un référent,
on abandonne les dénominations directes disponibles au profit de dénominations indirectes,
nécessitant un détour par lequel la dénomination expressive emprunte à un autre domaine
(classe l’objets) ses dénominations directes. Il faut préciser qu’on n’est pas dans le domaine
1 M. Gross affirme que les SF sont aussi importantes que les séquences dites libres (M. Gross 1986) ; il est précisé par ailleurs que les SF représentent 20% des textes traités (Fiala et ali 1978). Quant à Gaston Gross, il attire l’attention sur l’importance de la démarche qui met sur le même plan les deux principes opposés dans les langues liberté combinatoire et figement (G. Gross 1996).
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des désignations, obliques, certes évocatrices tout en étant éphémères, mais dans celui des
dénominations obliques, où le spontané et l’immédiat de la désignation se transforment en
données culturelles fixes conditionnant la représentation que la communauté linguistique a du
monde.
Les études sur les mécanismes tropiques ont bien mis en exergue leur fonctionnement
complexe (N. Charbonnel et G. Kleiber, 1999) ; celles qui se sont intéressées à leur figement
ont surtout souligné le rôle de réceptacle qu’ils jouent pour la mémoire des communautés
linguistiques (R. Martin 1987 ; A. Clas, S. Mejri et T. Baccouche 1997).
Nous nous intéressons ici au rôle que peut jouer le figement dans la détermination des
particularismes qui n’existent que dans la langue étudiée, en l’occurrence le français, et la
manière dont cela est perçu par les locuteurs natifs et étrangers.
Les particularismes, ou les idiosyncrasies partagées, parce que lexicalisées, trahissent
une vision élaborée par la langue, dans la langue et avec langue : par le langue parce qu’on se
sert des dénominations directes forgées dans sa langue pour exprimer ses états d’âme et ses
manières d’être : « un Français peut « se ronger les sangs », être victime d’un « coup de
sang », le sang peut « se glacer » ou « se figer » dans ses veines. Dans l’adversité, il se fait du
« mauvais sang ». Ses « liens du sang » l’unissent aux autres membres de sa famille. Que
d’aperçus, vu sur la conception des choses que la langue recèle ! » (R. Martin, 1987 : 9) ; dans
la langue parce qu’on s’en sert comme lieu privilégié pour tisser les croyances partagées dont
la trame assure au langage une fonction identitaire, dont le poids est déterminant dans les
relations avec l’autre linguistique (les non français par exemple) ou l’autre social dont
l’identité est appréhendée à travers ses usages linguistiques (les niveaux de langue : cf. les
marqueurs socio-lectaux phonétiques, syntaxiques ou lexicaux) ; avec la langue parce qu’elle
assure à ces particularismes, tout en étant un outil d’expression, une existence autonome
permettant une réflexion métalinguistique ou autre ; perçue sous cet angle, la langue n’est plus
considérée comme un simple outil de communication mais surtout comme une réalité
réflexive participant à l’élaboration de la conscience qu’on a de soi et des autres en tant
qu’entité collective homo- / hétérogène.
En quoi ces trois dernières fonctions du figement – formation d’outils syntaxiques,
dénomination des nouvelles réalités et expression de l’imaginaire collectif – participent-elles à
la dynamique du système linguistique ?
Toutes les trois ne se réalisent qu’à travers le renouvellement lexical : dans tous les cas
des figure, on réemploie le lexique disponible à des fins multiples ; ce qui traduit une
dynamique interne qui fait que la langue s’auto-structure (Meillet 1965), enrichit son lexique
13
et renforce la mémoire collective. Les nouveaux manuels relèvent clairement le rôle du
figement dans ce domaine (M. Riegel et ali 1994 : 369- 370).
L’auto-structuration est fondée sur le mécanisme sémantique bien connu de la
subduction (en termes guillaumiens) selon lequel des unités du lexique dont la plénitude
sémantique initiale cède la place à un sémantisme plutôt catégoriel exprimant soit les rapports
logiques fondamentaux du raisonnement soit les catégories générales : les locutions
prépositives, les déterminants complexes, les périphrases verbales, les locutions conjonctives,
les divers connecteurs sont autant d’exemples exprimant ces contenus catégoriels (cf. les
exemples en annexe avec côté). Une telle restructuration, contrairement aux apparences, n’est
jamais définitivement établie : la preuve, c’est qu’on assiste à un renouvellement des outils
syntaxiques, certes très lent mais bien réel, qui introduit de nouvelles nuances et un
réarrangement dans l’économie de ces outils puisque l’introduction de nouveaux éléments agit
sur les valeurs respectives des autres éléments déjà en place : le fait d’ajouter par exemple
histoire de aux locutions finales crée nécessairement un nouvel équilibre dans les valeurs dont
sont investis les autres éléments du système1. Cette fonction privilégie le rapport langue /
langue.
La dénomination qui repose sur la fonction référentielle agit dans l’axe langue /
univers (cf. en annexe les néologismes relevés dans les publications spécialisées), axe dont la
prédominance fait qu’on a tendance à réduire le renouvellement du lexique à cette dimension
au point d’en exclure les deux autres axes, ce qui donne le plus souvent lieu à des descriptions
qui ne voient dans le mouvement néologique que les unités lexicales dénominatives, le plus
souvent monolexicales (dérivées et composées) et exclut donc le figement ou le marginalise.
La dimension mémorielle n’est pas à isoler des deux premières fonctions puisque tout
est mémoire dans la langue. La manière dont on perçoit par exemple l’espace dans une langue
est aussi bien exprimée par des prépositions, des déterminants que des noms, adjectifs ou
verbes, qu’ils soient monolexicaux ou polylexicaux. La différence entre ces deux modes de
formation réside dans le fait que la polylexicalité avec des transferts de domaines à d’autres,
vérifiables surtout lors du passage d’une langue à une autre : à faire demi-tour, se trouner les
pouces et tel arbre tel fruit correspondent littéralement en arabe tunisien à « attraper le tour »,
« vendre du vent aux barques » et « le petit de la souris est de nature cresseur de terriers ».
Plus on s’éloigne de la syntaxe, plus les particularismes dénotatifs et connotatifs sont
1 Le G.L.LF. ce passage dans lequel l’auteur substitue historie de à pour ; ce qui met en relief la nuance sémantique apportée par histoire de, qu’il est facile de délimiter en faisant la substitution : inverse : « ces francs-tireurs […] le fusilleraient pour s’amuser, pour passer une heure, histoire de rire en voyant sa tête » [c’est nous qui soulignons].
14
importants ; cela commence avec le syntagme et finit par occuper l’espace de toute la phrase,
avec les proverbes par exemple.
Ainsi avec le figement pourrait-on avoir une vision globale des procédés ou processus
endogènes du renouvellement lexical, vision nous permettant de voir dans la dynamique
lexicale, non de simples formations lexicales s’ajoutant à d’autres au hasard des contraintes de
l’emploi du lexique et aux exigences de la dénomination, mais un processus général qui
engage tout le système parce qu’il traduit une dynamique générale qui en détermine
l’évolution.
Pour mesurer la vitalité d’un système, les études statistiques demeurent certes très
précieuses, (mesure de la fréquence par exemple), mais il y a lieu d’y ajouter des sondages
permettant de mesurer le champ d’action polylexical des constituants des SF. Pour ce faire, il
suffit de prendre une SF quelconque et de relever les autres SF formées à partir de chacun des
constituants. L’exemple de prendre la vie du bon côté (cf. annexe), séquence formée du verbe
prendre, de deux noms, vie et côté et d’un adjectif, bon, nous sert d’indicateurs sur la
productivité des plus de 160 locutions verbales avec prendre, plus de 50 SF avec vie, une
vingtaine avec côté et plus d’une vingtaine avec bon ; soit un total de plus de 250 SF parmi
lesquelles figurent des séquences nominales, verbales, adjectivales, adverbiales,,
prépositionnelles et phrastiques. L’avantage de tels sondages, c’est de mettre en relief
l’extrême enchevêtrement des données lexicales, leur configuration à la fois ramifiée et
stratifiée, l’interdépendance des divers domaines linguistiques (syntaxe, prédication,
dénomination), cognitifs et extralinguistiques. C’est aussi un moyen, bien que strictement
empirique, qui est de nature à nous donner une idée sur le plan de l’auto-structuration de la
langue (la formation des outils syntaxiques) que sur celui de la dénomination et de l’ancrage
mémoriel. Une telle démarche, généralisée à tout le lexique, permettait de dégager entre
autres les croisements et les couvertures partielles ou totales des domaines de l’expérience,
aspect étudié seulement du point de vue de la polysémie des unités unilexicales.
2.2.3. Les procédés collatéraux et allogènes :
Après avoir tenté de dresser ce tableau général des procédés et processus de formation
lexicale endogènes, il devient aisé de voir l’apport des procédés endogènes collatéraux et des
procédés allogènes.
Est dit procédé collatéral tout procédé qui n’est pas premier, c’est-à-dire qui s’ajoute à
un principe premier qui en justifie l’existence. Ainsi en est-il de la troncation, de l’acronymie
et de la cryptonymie : la troncation doit son existence aux procédés endogènes décrits plus
15
haut puisqu’elle répond au besoin de l’économie dans l’expression qui s’exprime à travers les
diverses formes d’amputation touchant les formations lexicales.
Les ouvrages consacrés à ce phénomène sont relativement nombreux, nous en
mentionnons le dernier, Regards sur la troncation en français contemporain de Cl. Groud et
N. Serna (1996) très riche en données sur ce phénomène qui « déborde le cadre du jargon et
de la langue familière pour s’étendre à tous les milieux socio-professionnels ainsi qu’à la
langue générale » (G. Gross 1996 : V)
A l’exception des verbes, protégés de l’apocope par la conjugaison, toutes les parties
du discours sont touchées par ce phénomène, dont l’étude fournit un certain nombre
d’indications (Groud et Serna 1996 : XIII-XVI) :
- l’essentiel des relevés néologiques est le fruit de l’apocope, l’aphérèse étant presque
absente : 8 aphérèses sur 500 unités tronquées ;
- 50,7 des formes abrégées sont des apocopées dissyllabiques ;
- une tendance à la « surtroncation » se fait sentir :
toxicomane toxico tox ou toxe ;
- « Le prototype d’une abréviation française est une abréviation disyllabique à finale
consonantique forte » (Kilani – Schoch et Dressler 1992 : 66, cité par Groud et Serna 1996 :
XVI).
La comparaison du corpus fourni par Regards sur la troncation en français
contemporain avec celui du N° 23 de Datations et documents lexicographiques (1983) portant
sur les abréviations du français familier, populaire et argotique (K.E.M, George 1983)
confirme la grande dynamique de ce procédé de formation dont l’économie de forme qui le
justifie est un peu compromise par l’absence de changement de sens par rapport à la forme
complète du mot tronqué. Certains y voient une source d’ambiguïté parce que la réduction du
nombre de syllabes « augmente celui des homonymes» (Groud et Serna 1996 : X).
Cette faiblesse inhérente à ce procédé régressif donne, dans certains cas, des formants
homonymes qui entrent dans la formation de nouvelles unités : télé(vision) et auto(mobile)
sont des troncations qui s’ajoutent aux formants savants télé- et auto – et créent des
paradigmes propres parallèles aux paradigmes initiaux : télébenne, télécinéma, télédiffuser,
télédiffussion, télé-enseignement, téléspectaleur, etc.. ; auto-couchettes, autodrome, auto-
école, auto-radio, autoroute, auto-stop, etc. (Mejri 1995).
Les autres formes le troncation que sont l’acronymie et la siglaison répondent aux
mêmes caractéristiques générales dégagées plus haut avec cette différence que l’acronymie
relève de l’assemblage lexical conçu dans le cadre strict du mot, ce qui l’apparente à la
16
composition savante, alors que la siglaison est un phénomène, d’origine graphique, qui puise
ses sources dans les formations syntagmatiques (Mejri 1995 : 276 – 288) :
hélicoptère + port héliport ; logique + matériel logiciel
Interruption Volontaire de Grossesse I.V.G.
Nous préférons terminer cette présentation par les remarques complémentaires suivantes :
a- La conversion ou la dérivation impropre est un procédé qui n’est pas très productif
en français contemporain au niveau de unités simples qui changent de catégorie grammaticale,
mais fonctionne comme un mécanisme fondamental au niveau des transferts catégoriels
opérés dans le cadre du figement ;
b- Les néologismes de sens sont aussi importants que les néologismes de forme ; leur
étude se situe au niveau des emplois des unités lexicales dans le discours et à celui des
mécanismes sémantiques (R. Martin 1983 et 1992, G. Kleiber, 1999 G. Gross, 1996 S. Mejri
1995)
c- La cryptonymie, quelle qu’en soit l’expression, demeure un transcodage dont
l’usage est bien marqué (bandes, milieux divers banlieues, etc.) malgré la généralisation dans
l’usage de certaines formations (cf. l’exemple de beur enregistré par le P.R. comme
argotique).
d- L’emprunt, en tant que processus allogène, demeure une source importante
d’enrichissement lexical, surtout dans les vocabulaires spécialisés. D’après l’étude effectuée
sur un corpus lexicographique, nous retenons les points suivants (Mejri 1995 ; 180, 291-300).
- 11,70% des néologismes de forme, à l’exception des SF, sont des emprunts faits à 25
langues différentes, dont 65,10% d’anglicismes ;
3. Conclusion
Les réflexions portant sur le figement, en tant que processus déterminant la dynamique
du système, s’intègrent dans une vision globale cherchant à :
- attirer l’attention sur le caractère incomplet, lacunaire et parfois même déformant des
descriptions du lexique limitées aux seules dérivation et composition ; incomplet parce que de
telles descriptions excluent nécessairement certaines parties du discours et ne portent que sur
le nom, le verbe, l’adjectif et l’adverbe ; lacunaire parce qu’aucune vision générale ne s’en
dégage et aucune continuité entre les différents procédés n’est ainsi envisageable ; déformant
parce que la réalité lexicale est irréductible aux schémas classiques de description ;
17
- montrer le caractère heuristique du figement lexical dans ce sens que son étude favorise
la construction d’une vision où tous les procédés et processus s’intègrent, en s’opposant et en
se complétant : dans l’étude du figement, il serait impossible de comprendre l’économie
générale du système, économie qui fait :
que le champ d’action de la dérivation couvre le nom, l’adjectif, le verbe et
l’adverbe d’une manière décroissante,
que la composition soit exclusivement nominale,
que le figement couvre la totalité du spectre catégoriel tout en ayant l’exclusive des
locutions prépositives et conjonctives, des déterminants complexes, des
interjections et des unités phrastiques.
Avec le figement, il n’y a pas de rupture entre le lexique et la syntaxe, entre les formations
unilexicales et les formations polylexicales, entre la fonction référentielle, la fonction
autonymique et la fonction mémorielle.
Avec le figement, la langue produit de quoi dénommer, de quoi structurer les espaces
linguistiques créés dans le cadre du discours et de quoi renforcer les références culturelles qui
ne sont rien d’autre que la cristallisation de l’imaginaire collectif dans les SF.
Le français, comme toutes les langues, met à profit le figement lexical pour répondre à
toutes les fonctions mentionnées plus haut et pour renforcer ses capacités d’assimilation face
aux vagues d’emprunt, emprunt cantonné presque exclusivement dans les parties du discours
dites principales, particulièrement le nom.
Nous n’avons là qu’un exposé général ; pour mieux comprendre les mécanismes
profonds qui sous-tendent cette organisation, il faudrait dégager :
- les raisons pour lesquelles certaines parties du discours sont couvertes par tous les
procédés : vu les spécificités de chaque procédé, il devrait y avoir des apports propres
couvrant des besoins précis et faisant que les uns et les autres se complètent dans le même
espace catégoriel. Pour dégager un tel partage, il faudrait par exemple étudier toutes les
locutions verbales, isoler celles qui n’ont pas de correspondants unilexicaux des autres et
effectuer des descriptions précises. La méthodologie élaborée servirait aux autres parties du
discours.
- la carte des transferts de domaines lors du figement des séquences ; ce qui fournirait
des indications sur la structuration générale cognitive du lexique et ce qui constituerait un
précieux outil dénominatif.
18
La première tâche comme l’autre ne pourraient être abordées efficacement sans l’outil
informatique.
Salah Mejri
Université de Tunis I
19
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22
Annexe 1
I- G.L.LF. : A. prendre
1. prendre une chose de mains de qqn2. prendre la balle au bond 3. prendre la cinquième rêne 4. prendre en main qqch5. prendre son courage à deux mains6. n’être pas à prendre avec des pincettes7. prendre qqn au collet, à la gorge8. prendre ses jambes à son cou9. prendre le taureau par les cornes 10. prendre qqn dans ses bras11. prendre le mors aux dents 12. prendre les armes13. prendre la (la) droite14. prendre le chemin de 15. prendre un air de feu, prendre l’air16. prendre le frais 17. prendre cour18. prendre qqn 19. prendre des notes ; en note, prendre bonne note 20. prendre le trait21. prendre au voile22. prendre le vent23. prendre ses cliques et ses claques24. c’est à prendre ou à laisser25. prendre des cartes26. prendre qqn à l’écart, en privé27. prendre femme28. prendre d’assaut 29. c’est autant de pris sur l’ennemi30. prendre la place de qqn31. prendre cher32. prendre la mouche33. on ne m’y prendra plus34. prendre sur le fait / la main dans le sac35. prendre en flagrant délit36. je t’y (vous y ) prends !37. prendre qqn au dépourvu 38. prendre qqn au mot39. prendre qqn de vitesse40. prendre qqn de court41. ça l’a pris comme une envie de pisser 42. prendre du temps43. prendre qqn sous ses ordres / sous sa protection 44. prendre qqn à sa charge45. prendre qqch sur son compte / à son compte46. prendre sur soi de + inf. 47. prendre la décision de 48. prendre la résolution de49. prendre l’initiative de 50. prendre la défense de qqn ou de qqch51. prendre fait et cause pour qqn52. prendre les intérêts de qqn53. prendre l’intérêt de / prendre intérêt dans / en
54. prendre parti (vx) prendre le parti de / prendre parti / prendre son parti
55. prendre soin de qqch ou de qqn56. prendre (le) soin de + inf.57. prendre la peine de 58. prendre des risques59. prendre le risque de + inf.60. prendre la tête de / la direction de + nom61. prendre exemple sur qqn62. prendre bien / mal63. prendre pour son grade / pour son rhume (pop.)64. qu’est-ce que tu vas (qu’il va) prendre ! (pop.)65. en prendre un bon coup (fam.)66. prendre la / une piquette67. prendre les armures d’un bord68. prendre la lame debout 69. à bien le prendre / à tout prendre70. prendre la vie du bon côté71. le prendre sur un certain ton72. le prendre de haut73. prendre à cœur 74. prendre ombrage de75. prendre à la lettre un ordre / un texte76. prendre qqn ou qqch en (+ noms de sentiment)77. prendre en grippe qqn / qqch78. prendre son mal en patience79. prendre pour / comme / en 80. prendre pour femme / pour mari 81. prendre à témoin 82. prendre à partir83. prendre qqn pour exemple84. prendre qqn ou qqch pour85. prendre une personne pour une autre86. prendre ses désirs pour des réalités87. prendre le Pirée pour un homme (vx)88. prendre des vessies pour des lanternes 89. prendre une attitude90. prendre ses aises91. prendre les dimensions de qqch92. prendre la dimension de qqch93. prendre ses distances94. prendre langue avec qqn95. prendre plaisir / du plaisir à 96. prendre la porte97. prendre position98. prendre des (ses) précautions99. prendre sa source100.prendre la température de qqn101.prendre ses vacances102.prendre appui sur 103.prendre un bain / une douche104.prendre contact105.prendre connaissance 106.prendre date
23
107.prendre le (les) devant (s)108.prendre des (ses) dispositions109.prendre fin110.prendre garde111.prendre la mesure de qqn / de qqch. / prendre
ses mesures112.prendre naissance113.prendre patience114.prendre place / la place de115.prendre rang116.prendre la relève de 117.prendre rendez-vous118.prendre la résolution de119.prendre la succession de qqn120.prendre la fuite121.prendre le départ122.prendre son élan / de l’élan123.prendre son essor / de l’essor124.prendre le large125.prendre la mer126.prendre du recul127.prendre de l’avance / du retard128.prendre la route129.prendre terre130.prendre motte 131.prendre un tournant / un virage 132.prendre son vol133.prendre de l’assurance 134.prendre de l’audace135.prendre courage 136.prendre intérêt à qqch137.prendre l’avantage / le dessus sur qqn138.prendre de la valeur / un ton de provocation /
de l’embonpoint / l’habitude de / un air de…139.prendre chair140.prendre de l’âge141.prendre tel âge 142.prendre des dents143.prendre le voile144.prendre le deuil145.prendre la parole146.prendre feu et flamme147.prendre consistance 148.l’envie (le besoin) lui prend de +inf.149.il me prend150.qu’est-ce qui (me, te, lui, nous, nous, leur)
prend ?151.qu’est-ce qu’il lui (leur) prend de ( + inf.) / (+
que ind.)152.bien / mal te (lui, nous, vous, leur) prend (a
pris) de faire (d’être) telle chose153.ça prend / ça ne prend pas (fam.)154.prendre par155.prendre au plus court / par le plus court156.se prendre au jeu 157.se prendre par la main (fam.)158.se prendre au sérieux159.s’en prendre à (class.) / se prendre à 160.se prendre de161.se prendre de boisson / de vin
162.se prendre à qqch. (class.)163.s’y prendre
B. Vie :
164.vie latente165.en vie166.entre la vie et la mort167.être / demeurer sans vie 168.ne pas donner signe de vie169.passer de vie à trépas170.revenir à la vie171.demander la vie 172.devoir la vie à qqn173.donner la vie à qqn174.donner / laisser la vie à qqn / lui faire grâce de
la vie175.redonner / rendre la vie à qqn176.sauver la vie à qqn 177.avoir la vie dure178.n’avoir qu’un filet / qu’un souffle de vie179.sa vie ne tient qu’à un fil180.la bourse ou la vie ! (fam.)181.sur la vie182.assurance sur la vie183.certificat de vie184.tout en vie (class.)185.vie de l’âme186.la vie éternelle / ou simplement : la vie187.le vie future / l’autre vie188.parole de vie189.pain de vie190.élixir de longue vie 191.espérance de vie 192.vie moyenne / durée de vie moyenne193.de la vie / de ma vie / de sa vie 194.jamais de la vie 195.à vie196.pour la vie 197.à la vie et à la mort / à la vie, à la mort198.refaire sa vie199.ce n’est pas une vie (fam.)200.la belle / la bonne vie201.la bonne vie 202.vie d’artiste203.vie de bohème 204.vie de chien 205.vie de garçon 206.femme de mauvaise vie (vieilli)207. mener une vie de bâton de chaise / de
patachou / de polichinelle208.mener la vie à grands guides209.tendre la vie dure / la vie impossible à qqn210.vie publique 211.c’est la vie212.chercher sa vie213.trouver sa vie (fam.)214.faire la vie (fam.)215.vie d’un produit216.vie moyenne d’un élément radioactif
24
C. Côté :217.point de côté218.le côté du cœur / (vx) le côté de l’épée 219.coucher / mettre une bouteille sur le côté (fam.
et vx)220.les côtés d’une médaille221.voir le beau côté de la médaille222.côté d’un navire223.côté cour, côté jardin224.ne savoir de quel côté se tourner225.voir de quel côté vient le vent226.prendre la vie du bon côté (fam.)227.voir le petit côté des choses228.le côté faible de qqn229.mettre les rieurs de son côté230.à côté, loc. adv.231.de côté, loc. adv.
230.1. un regard de côté230.2. avoir / mettre de l’argent de
côté / mettre de côté 230. 3. laisser de côté
232.de tout côté / de tous côtés, loc. adv.233.de côté et d’autre, loc. adv.234.d’un côté … d’un autre côté, loc. adv.235.à côté de, loc. prép.236.du côté de, loc. prép.
235.1. du côté de chez…235.1. de mon (ton, etc.) côté
D. bon : 237.un bon vivant238.la bailler bonne à qqn. (litt.)239.tout lui est bon240.trouver / croire/ juger bon 241.comme bon me semble / vous semble242.bon pour / bon en
243.bon pour le service 244.être bon pour (+ nom désignant une chose
fâcheuse) 245.être bon246.bon pour247.bon pour (+ inf.) 248.bon contre 249.bon à (+ inf.)250.bon à tirer 251.bon à (+ nom ou pron.)252.à quoi cela est-il bon ? / à quoi bon ? (+
complément)253.à quoi bon ?254.bon à (rien) un bon à rien 255.il est bon de (+ inf.) / (que + subj.)256.bon Dieu ! (class.)257.être bon /trop bon / bien bon (ironiq.)258.bon ami / bonne amie 259.c’est bon / bon !260.une bonne fois.
II- Dictionnaire de l’argot :
261.en prendre : s’enrichir 262.la prendre (vx) : être battue263.en prendre pour son grade : être violemment
réprimandé, maltraité 264.en prendre pour : être condamné à 265.prendre le chinois par la natte : ennuyer un ami
par des diatribes oiseuses. 266.Prendre son lit en marche : être ivre et avoir
l’impression de voir son lit se dérober devant soi.
267.être bon, ne pas être bon pour : être, ne pas être disposé, d’accord pour faire qqch
268.bon comme la romaine : reconnu coupable d’un détit et arrêté ou condamné comme tel.
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Annexe II(Datation lexicographiques n°24)
1. absence contextuelle 1977 (ling.)2. articulation directionnelle 1969. (trav. Publ.)3. faire le barrage 1971 (sport)4. système branchu 1978 (math)5. bronze-cul, fam. 19716. capitaine de route 1966 (cyclisme ) 7. captation thermique 1974 (chim. Phys). 8. casse-pattes adj. Fam. 1973.9. centre directionnel 1967 (écon.)10. centre sous-régional11. cercle pathologique 1970 (géom.)12. connotation obligée 1977 (ling.)13. à contre-ciel 197314. dimension anormale 1975 (math.)15. dimension capacitaire 1975 (math.)16. dimension continue 1975 (math.)17. dimension fractale 1975 (math.) 18. dimension fractionnaire 1975 (math.)19. dîner de travail 1996 (polit.) 20. ensemble de catastrophe 1970 (math.)21. en tenue n.m. 1973 (pop.)22. en étranger 1973 (parler en étranger) 23. faisceau d’un objet 1974 (ling.)24. foncteur contravariant 1973 (math.)25. foncteur d’abélisation 1973 (math.)26. foncteur d’oubli 1976 (math.)
27. fonction typante 1976 (math.) 28. grammaire dépendancielle 1978 (ling.) 29. grammaire textuelle 1977 (ling.)30. grammaire valencielle 1978 (ling.)31. haut-médiocrate 1979. (plais.)32. hors-cadre 197433. lecture symptomale 1972 34. linguistique appliquée35. logique naturelle 1974 (ling.)36. maison monofamiliale 197237. mangeur de 1972. 38. objet fractal 1975 (math.)39. porteur d’eau 1973 (cycl.)40. le prêt-à-porter (par ext.) 197041. psychothérapie corsée 197142. psychothérapie armée 197143. riz prétraité 196744. sémantique formelle 1976 (ling.)45. sémantique vériconditionnelle 1977 (ling.)46. sens pluriel 1977 (ling.)47. société câblée48. structure syntactico-anaphorique 1978 (ling.)49. structure syntactico-communicative 1978
(ling.)50. tarte tropézienne 1976
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Annexe III(Néologie lexicale, GRIC – Paris VII)
1. abeille africanisée 19862. abri fiscal 19853. à deux vitesses 19854. antibicyclette de course 1985 5. antibritannisme primaire 19856. après-mars 1986, 1985.7. aspire-feuilles, 19818. aspirine psychologique, 19859. ayatollah du nucléaire, 1986. 10. carte à puce 198511. certificat d’assurance 198512. complexe multijeux 198613. contre-choc pétrolier 198614. déçu(s), de / du (catholicisme, l’Elysée,
syndicalisme)15. degré zéro de la polémique 198516. désespérer Chamalières 198517. drague télématique 198618. droite droitisée 198519. éléphant rose, 198620. empêcheur de + inf. + en rond 198521. empilage de voiles 198522. état zéro de la critique littéraire 198523. génie urbain 198624. grève de la peur 198525. hiver démographique 198526. hold-up électronique 198627. jus d’éléphant (argot) 198628. licenciement sec 1986 29. littérature industrielle 198630. livre parlant 198631. livre sonore, 198632. loi de l’autobus 198633. marée blanche 198534. médecines alternatives 198535. médecines parallèles 198536. messageries de 23 heures 1986
37. mort corticale 198538. mule aveugle 198639. niche technologique 198640. nouveau terrorisme 198541. nouveau terroriste 198542. nouveau village 198643. oasis hydrothermale 198044. or blanc 198645. ordinateur optique 198646. or gris 198547. or mou 198648. panneautage tronconique 198649. pavé curseur 198550. pavé numérique 198551. perte de figure 198552. pétrole gris, 198653. pirate de la mer 198554. piraterie de la route 198655. platine laser 198556. plus + adj. que x (animé ou non animé), tu
mens 1985 57. punaises cocaïniques 198558. rédaction électronique 198559. relation publique 198560. resserrer les boulons 1986 61. salle blanche 198662. sept d’or 198563. super-ange gardien 198564. syndrome de Stockholm 198665. touche pas à mon x ( = pote)66. touche pas à mon dimanche 198567. tour extérieur 197868. transistor optique 69. trois-roues 198570. enclencher le turbo 198671. il y a du turbo dans 198572. mettre le turbo sur 1985.
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