Lexique sociologique

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 Lexique sociologique [ partie 1 ] Avertissements ! Ce lexique a été constitué principalement à partir de lectures d’ouvrages sociologiques, mais aussi parfois de conférences, d’interventions radiophoniques, de notes de cours, de sites internet… Je l’ai élaboré tout au long de mes études (qui ne sont pas encore terminées) afin de m’aider à assimiler un certain nombre de théories et de concepts. · Il n’est pas du tout impossible qu’il contienne des erreurs. Si vous en trouvez, merci de me les signaler ! · Il n’est pas non plus impossible que certaines définitions manquent de clarté. Si vous disposez de citations plus claires sur un sujet donné, je suis preneur… · On trouvera principalement ici des définitions de concepts connus et/ou reconnus par la communauté des sociologues, mais également, parfois, des définitions de notions (élaborées par des auteurs parfois plus « marginaux ») n’ayant pas connu de succès particulier dans le champ sociologique.  Acteur et agent Selon Boudon. Raymond Boudon fait une distinction entre les « systèmes fonctionnels » (dans lesquels les individus occupent un « rôle social » : médecin délivrant une ordonnance, universitaire écrivant un article…) et les « systèmes d’interdépendance » (dans lesquels les individus n’occupent pas de rôle). Dans le premier cas, les individus sont appelés « acteurs » car ils jouent un rôle. Dans le second cas, ils sont appelés « agents ». Boudon l’explique en ces termes : « Pour la clarté du vocabulaire, il est utile de parler d’ acteur individuel dans le cas de systèmes fonctionnel s et d’ agent individuel dans le cas des systèmes d’interdépendance. La notion d’ acteur est, comme celle de rôle, empruntée au langage de la scène. [...] Le mot agent désigne clairement le porteur individuel de l’action sans renvoyer à la catégorie des rôles. » (Boudon, 1979, chapitre IV, introduction au chapitre, p. 118) Auto-analyse Voir « Auto-socioanalyse » Autoscopie (terme de Bouvier) Explication. Bouvier (2000) évoque « l’autoscopie de Soi et des Autres ». Il entend par là la manière dont « les individus et les populations s’auto-identifient. Ce « regard porté sur soi-même » doit abolir la distance ethnocentrique par laquelle l’observateur travestit souvent la culture de l’observé. C’est non seulement le journal du chercheur mais aussi toutes les productions par lesquelles l’agent s’exprime en l’absence de l’observateur : écrits (lettres, poèmes, manuscrits divers, etc.), objets construits, créations artistiques. L’autoscopie peut également être collective : tracts, journaux, productions diverses, ce que Bouvier nomme des « ensembles populationnels cohérents ». » (Juan, 2005, p. 63) Auto-socioanalyse ou Auto-analyse (terme de Bourdieu) Explication. L’« auto-socioanalyse » ou « auto-analyse » consiste à s’étudier soi-même, à analyser son parcours biographique « comme s’il s’agissait de n’importe quel autre objet » (Bourdieu, 2004, p. 12), à mettre au jour « les principes qui guid[ent] [sa] pratique » (ibid.). Pour le sociologue, cela implique d’examiner l’état du champ sociologique au moment où il y est entré et donc « avec lequel et contre lequel [il] s’est fait » (ibid., p. 15). Il s’agit aussi

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Lexique sociologique [ partie 1 ] Avertissements ! Ce lexique a t constitu principalement partir de lectures douvrages sociologiques, mais aussi parfois de confrences, dinterventions radiophoniques, de notes de cours, de sites internet Je lai labor tout au long de mes tudes (qui ne sont pas encore termines) afin de maider assimiler un certain nombre de thories et de concepts. Il nest pas du tout impossible quil contienne des erreurs. Si vous en trouvez, merci de me les signaler ! Il nest pas non plus impossible que certaines dfinitions manquent de clart. Si vous disposez de citations plus claires sur un sujet donn, je suis preneur On trouvera principalement ici des dfinitions de concepts connus et/ou reconnus par la communaut des sociologues, mais galement, parfois, des dfinitions de notions (labores par des auteurs parfois plus marginaux ) nayant pas connu de succs particulier dans le champ sociologique. Acteur et agent Selon Boudon. Raymond Boudon fait une distinction entre les systmes fonctionnels (dans lesquels les individus occupent un rle social : mdecin dlivrant une ordonnance, universitaire crivant un article) et les systmes dinterdpendance (dans lesquels les individus noccupent pas de rle). Dans le premier cas, les individus sont appels acteurs car ils jouent un rle. Dans le second cas, ils sont appels agents . Boudon lexplique en ces termes : Pour la clart du vocabulaire, il est utile de parler dacteur individuel dans le cas de systmes fonctionnels et dagent individuel dans le cas des systmes dinterdpendance. La notion dacteur est, comme celle de rle, emprunte au langage de la scne. [...] Le mot agent dsigne clairement le porteur individuel de laction sans renvoyer la catgorie des rles. (Boudon, 1979, chapitre IV, introduction au chapitre, p. 118) Auto-analyse Voir Auto-socioanalyse Autoscopie (terme de Bouvier) Explication. Bouvier (2000) voque lautoscopie de Soi et des Autres . Il entend par l la manire dont les individus et les populations sauto-identifient. Ce regard port sur soi-mme doit abolir la distance ethnocentrique par laquelle lobservateur travestit souvent la culture de lobserv. Cest non seulement le journal du chercheur mais aussi toutes les productions par lesquelles lagent sexprime en labsence de lobservateur : crits (lettres, pomes, manuscrits divers, etc.), objets construits, crations artistiques. Lautoscopie peut galement tre collective : tracts, journaux, productions diverses, ce que Bouvier nomme des ensembles populationnels cohrents . (Juan, 2005, p. 63) Auto-socioanalyse ou Auto-analyse (terme de Bourdieu) Explication. L auto-socioanalyse ou auto-analyse consiste studier soi-mme, analyser son parcours biographique comme sil sagissait de nimporte quel autre objet (Bourdieu, 2004, p. 12), mettre au jour les principes qui guid[ent] [sa] pratique (ibid.). Pour le sociologue, cela implique dexaminer ltat du champ sociologique au moment o il y est entr et donc avec lequel et contre lequel [il] sest fait (ibid., p. 15). Il sagit aussi

danalyser ltat du champ sociologique au moment prsent afin de se donner les moyens de comprendre les trajectoires individuelles et collectives (ibid., p. 78). Enfin, lauto-socioanalyse doit bien videmment prendre en considration son milieu social dorigine ainsi que les diffrents moments de son histoire. Pour Bourdieu, ce travail est indispensable au chercheur car cest en prenant acte de [sa] position et de son volution dans le temps que lon peut esprer matriser les effets quelles pourraient avoir sur [ses] prises de position scientifiques (ibid., p. 141). Benedict (Ruth) Ethnologue amricaine (New York, 1887 id., 1948). Elle sest consacre des tudes dethnologie compare sur les Indiens du S.-O. des Etats-Unis, cherchant mettre en vidence les relations entre les formes de culture propres chaque socit et les habitudes individuelles quelles dterminent. Elle opposa ainsi la culture des indiens Zui, caractrise par des instincts agressifs, individualistes (Patterns of Culture, 1934 ; Continuities and discontinuities in cultural conditioning, 1938 ; etc.). (Le petit Robert 2, 1984) Bourdieu (Pierre) Biographie. Pierre Bourdieu nat le 1er aot 1930 Denguin, dans les Pyrnes-Atlantiques, o son pre occupe un poste de petit fonctionnaire des P.T.T. Il se marie le 2 novembre 1962 avec Marie-Claire Brizard ; de cette union naissent trois fils (Jrme, Emmanuel, Laurent). Ses tudes se droulent successivement au lyce de Pau, au lyce Louis Le Grand, puis lEcole normale suprieure. Agrg de /p. 6/ philosophie, il sera professeur au lyce de Moulins en 1954-1955. LAlgrie, o il effectue son service militaire et o il sera assistant entre 1958 et 1960 (facult de lettres dAlger), lui fournit un terrain dtude privilgi : outre Sociologie de lAlgrie (d. PUF, Que sais-je , 1958), il publie, en collaboration avec Abdelmalek Sayad, Le dracinement. La crise de lagriculture traditionnelle en Algrie (d. de Minuit, 1964). Ltude anthropologique des paysans kabyles lui permettra de jeter les bases de sa thorie sociologique : on trouve dans lEsquisse dune thorie de la pratique, prcde de trois tudes dethnologie kabyle (d. Droz, 1972) une dmarche et des concepts qui constitueront le fil directeur de lensemble de luvre de P. Bourdieu. A la fin de la guerre dAlgrie, il sera nomm assistant la Facult des lettres de Paris (1960-1961) puis matre de confrences la facult de Lille de 1961 1964. En 1981, il occupe la chaire de sociologie au Collge de France. Il dirigeait la revue Actes de la recherche en sciences sociales (ARSS) depuis sa cration en 1975. Il obtient la Mdaille dor du CNRS en 1993. P. Bourdieu est dcd le 23 janvier 2002. (Bonnewitz, 2002, pp. 5-6) Capital culturel Dfinition. ensemble des qualifications intellectuelles, soit produites par le systme scolaire, soit transmises par la famille. Ce capital peut exister sous trois formes : ltat incorpor comme disposition durable du corps (par exemple laisance dexpression en public) ; ltat objectif comme bien culturel (la possession de tableaux, douvrages) ; ltat institutionnalis cest--dire socialement sanctionn par des institutions (comme les titres scolaires). (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , p. 93, soulign par moi)

Les trois formes du capital culturel. Dans les circonstances habituelles et les relations du quotidien, la culture fonctionne comme pouvoir, ou capital, susceptible dadmettre lune de trois formes distinctes (Bourdieu, 1986). Elle peut tre objective, pour ainsi dire, sous forme de machines, livres, uvres dart ou de science ; elle peut tre institutionnalise, comme cest le cas avec les diplmes, les certificats, les pices justificatives officielles ; enfin, elle peut tre incorpore dans les personnes, sous la forme de ce que Bourdieu appelle lhabitus. (Wacquant, 1993, p. 33, soulign par moi) Capital conomique Dfinition. ensemble des ressources patrimoniales (terres, biens immobiliers, portefeuille financier) et des revenus, quils soient lis au capital (loyers, intrts, dividendes) ou un exercice professionnel salari ou non salari (honoraires des professions librales, bnfices industriels et commerciaux pour les chefs dentreprise ou les artisans et commerants). (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , p. 93) Capital social Dfinition 1. ensemble des relations socialement utiles qui peuvent tre mobilises par les individus ou les groupes dans le cadre de leur trajectoire professionnelle et sociale. (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , p. 93) Dfinition 2. Le capital social dsigne une [...] forme de capital, li la possession durable dun rseau de relations sociales ou lappartenance un groupe stable que lindividu peut mobiliser dans ses stratgies. Ce capital est variable en volume et en potentialits selon les relations concernes : Le volume de capital social que possde un agent particulier dpend de ltendue des liaisons quil peut effectivement mobiliser et du volume de capital (conomique, culturel ou symbolique) possd en propre par chacun de ceux auxquels il est li. (Bourdieu Pierre, Le sens pratique, Minuit, 1980) (Akoun, Ansart, 1999) Attention ! Le capital social au sens de Bourdieu nest donc pas lensemble des relations dun individu, mais lensemble des relations dotes dun certain pouvoir. (daprs Catherine Delcroix, 25/10/2004) Capital symbolique Dfinition 1. magie sociale qui transforme en qualits de la personne ou de la ligne, les richesses socialement accumules. (Pinon, Pinon-Charlot, 2002, p. 141) Dfinition 2. ensemble des rituels (comme ltiquette ou le protocole) lis lhonneur et la reconnaissance. Il est le crdit et lautorit que confrent un agent la reconnaissance et la possession des trois autres formes de capital (conomique, culturel et social). (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , p. 93) Dfinition 3 (capital symbolique, charisme et magie). Un des effets de la violence symbolique est la transfiguration des relations de domination et de soumission en relations affectives, la transformation du pouvoir en charisme ou en charme propre susciter un enchantement affectif (par exemple dans les relations entre patrons et secrtaires). [...] Lalchimie symbolique, telle que je viens de la dcrire, produit, au profit de celui qui accomplit les actes

deuphmisation, de transfiguration, de mise en forme, un capital de reconnaissance qui lui permet dexercer des effets symboliques. Cest ce que jappelle le capital symbolique, confrant ainsi un sens rigoureux ce que Max Weber dsignait du mot de charisme, concept purement descriptif, quil donnait explicitement au dbut du chapitre sur la religion de Wirtschaft und Gesellschaft pour un quivalent de ce que lcole durkheimienne appelait la mana. Le capital symbolique est une proprit quelconque, force physique, richesse, valeur guerrire, qui, perue par des agents sociaux dots des catgories de perception et dapprciation permettent de la percevoir, de la connatre et de la reconnatre, devient efficiente symboliquement, telle une vritable force magique : une proprit qui, parce quelle rpond des attentes collectives , socialement constitues, des croyances, exerce une sorte daction distance, sans contact physique. On donne un ordre et il est obi : cest un acte quasi magique. (Bourdieu, 1994, p. 187) Exemples de capital symbolique. La place essentielle de lEtat. Comme le sorcier mobilise tout le capital de croyance accumul par le fonctionnement de lunivers magique, le prsident de la Rpublique qui signe un arrt de nomination ou le mdecin qui signe un certificat (de maladie, dinvalidit, etc.) mobilisent un capital symbolique accumul dans et par tout le rseau de relations de reconnaissance qui sont constitutives de lunivers bureaucratique. Qui certifie la validit du certificat ? Celui qui a sign le titre donnant licence de certifier. Mais qui certifie son tour ? On est entran dans une rgression linfini au terme de laquelle il faut sarrter et lon peut, la faon des thologiens, choisir de donner le nom dEtat au dernier (ou au premier) maillon de la longue chane des actes officiels de conscration. Cest lui qui, agissant la faon dune banque de capital symbolique, garantit tous les actes dautorit, actes, la fois arbitraires et mconnus comme tels, d imposture lgitime , comme dit Austin : le prsident de la Rpublique est quelquun qui se prend pour le prsident de la Rpublique, mais qui, la diffrence du fou qui se prend pour Napolon, est reconnu comme fond le faire. (Bourdieu, 1994, p. 122) Exemple de capital symbolique : celui de Louis XIV. Le capital symbolique qui fait quon sincline devant Louis XIV, quon lui fait la cour, quil peut donner des ordres et que ces ordres sont obis, quil peut dclasser, dgrader, consacrer, etc., nexiste que dans la mesure o toutes les petites diffrences, les marques de distinction subtiles dans ltiquette et les rangs, dans les pratiques et dans le vtement, qui font la vie de cour, sont perues par des gens qui connaissent et reconnaissent pratiquement (ils lont incorpor) un principe de diffrenciation qui leur permet de reconnatre toutes ces diffrences et de leur accorder valeur [...]. Le capital symbolique est un capital base cognitive, qui repose sur la connaissance et la reconnaissance. (Bourdieu, 1994, p. 161) Exemple de capital symbolique : dans le monde de lart. Le capital de lartiste est un capital symbolique [...]. Ce capital symbolique de reconnaissance [...] suppose la croyance des gens engags dans le champ. Cest ce qua bien montr Duchamp qui [...] a fait de vritables exprimentations sociologiques. En exposant un urinoir dans un muse, il a mis en vidence leffet de constitution quopre la conscration par un lieu consacr, et les conditions sociales de lapparition de cet effet. Toutes les conditions ne se rduisent pas celles-l, mais il fallait que cet acte soit accompli par lui, cest--dire par un peintre reconnu comme peintre par dautres peintres ou dautres agents du monde de lart ayant le pouvoir de dire qui est peintre, il fallait quil soit dans un muse qui le reconnaissait comme peintre et qui avait le pouvoir de reconnatre son acte comme un acte artistique, il fallait que le milieu artistique soit prt reconnatre

ce type de mise en question de sa reconnaissance. [...] Il faudrait encore redire propos du capital symbolique de lcrivain ou de lartiste, propos du ftichisme du nom de lauteur et de leffet magique de la signature, tout ce qui a t dit propos du capital symbolique tel quil fonctionne dans dautres univers : en tant que percipi, il repose sur la croyance, cest--dire sur les catgories de perception et dapprciation qui sont en vigueur dans le champ. (Bourdieu, 1994, pp. 198-199) Carrire Dfinition. Terme du langage courant utilis pour dsigner les diffrentes tapes de la vie professionnelle. La constitution de biographies, lanalyse longitudinale de trajectoires visent dpasser ltude synchronique des situations de travail pour saisir leur droulement temporel. Utilis par le courant interactionniste, le concept slargit au-del de sa sphre habituelle. Il sagit alors de construire des modles squentiels de passages dune position une autre, de considrer lhistoire des individus comme une srie dengagements envers les normes et les institutions, impliquant des changements de comportements et dopinions. On peut alors parler, comme le fait [Howard] Becker, de carrires de dviants ou de dlinquants. (Ferrol, 1995, article Carrire , p. 15) Champ Dfinition. Pour Bourdieu, une socit est constitue dune pluralit de champs (champ conomique, champ culturel, champ politique, etc.), cest--dire despaces autonomes structurs par des rapports de domination et des enjeux spcifiques, irrductibles par rapport ceux des autres champs (un P.D.G. ne court pas aprs les mmes enjeux quun homme politique ou quun artiste). (Colloque PB, 2003) Explication de Bourdieu. Les champs sont des microcosmes, des petits mondes sociaux qui existent lintrieur du macrocosme social. Un exemple, cest le champ scientifique. Cest un univers social qui a ses lois : il y a les dominants et les domins, il y a une distribution ingale de capital, etc. De mme, il y a le champ artistique, le champ juridique, le champ universitaire Chacun de ces champs a des proprits particulires. Et, en mme temps, il existe des proprits gnrales des champs. Disons que lon peut, propos de tout champ, poser la mme batterie de questions gnrales : A quoi joue-t-on dans ce champ ? Quel est lenjeu ? Quels sont les atouts quil faut avoir pour gagner dans ce jeu ? Quelle est la structure de la distribution des atouts ? Tout cela, on ne le sait pas a priori. Il faut, chaque fois, tudier, observer. Mais on nest pas non plus dsarm : puisque lon a des questions et que lon sait un peu comment cela se passe dans dautres champs, on peut comprendre trs vite. Par exemple, il marrive trs souvent, quand je commence une enqute, davoir trs vite un systme dinterrogations qui me permet dtre la hauteur des personnes que jinterroge, qui peuvent croire que je connais trs bien leur univers parce que, en mettant en jeu mon modle comme systme de questions, je peux poser des interrogations qui ne sont pas ridicules. (Bourdieu, 2001, citation orale mise sous une forme crite par mes soins) Explication de Philippe Corcuff. [ Il existe diffrents types de champs :] La socit est constitue chez Bourdieu par une varit de champs sociaux autonomes : champ conomique, mais aussi champ politique, champ

technocratique, champ journalistique, champ intellectuel, champ religieux, etc. [ Dfinition du champ :] Un champ, cest une sphre de la vie sociale qui sest progressivement autonomise travers lhistoire autour de relations sociales, denjeux, de ressources et de rythmes temporels propres, diffrents de ceux des autres champs. Les gens ne courent ainsi pas pour les mmes raisons dans le champ conomique, dans le champ politique, dans le champ artistique, dans le champ sportif ou dans le champ religieux. [ Les rapports de domination au sein des champs :] Chaque champ est structur par des rapports de domination, des luttes entre dominants et domins. [...] [ L'importance du champ conomique :] Tous les champs nont pas le mme poids dans une formation sociale, et Bourdieu rappelle souvent limportance du champ conomique. Par exemple, le poids actuel du champ conomique (la marchandisation du monde) a un effet asservissant sur les autres champs (par exemple le champ journalistique) : les progrs de la marchandisation peuvent rduire le degr dautonomie dun champ (ou de secteurs dun champ) par rapport au champ conomique (cest aujourdhui le cas dans le champ journalistique, avec la concentration conomique croissante des mdias) (Corcuff, 2004) Une mtaphore sportive. Bourdieu a beaucoup pris les mtaphores sportives dans certains de ses ouvrages pour illustrer le concept de champ. Un champ social, cest comme un champ de jeu. Cest--dire : il y a des agents qui sont dots de ressources spcifiques, qui saffrontent pied pied et prement pour sapproprier les positions favorables. [...] Les nouveaux venus, qui sont ncessairement domins par ceux qui sont les plus anciennement installs dans le champ de jeu, doivent absolument inventer un jeu en tout point dissemblable celui qui domine pour essayer de sy faire une place. De plus, le sens de lanticipation et du placement qui est videmment particulirement parlant dans laffrontement sportif est transposable dans un champ intellectuel, pictural, artistique ou politique. (Pociello, 2006) Chicago (cole de) Il existe une cole de Chicago des sociologues et une cole de Chicago des conomistes. Lcole de Chicago en sociologie Lcole de Chicago est une vaste entreprise de recherche assez diversifie, impliquant au moins quatre gnrations successives de chercheurs depuis le dbut du [XXe] sicle [Les thmes abords par cette cole :] dans des domaines comme lcologie urbaine, les relations interethniques, les problmes de la dlinquance et ultrieurement la sociologie du travail. Si cette tradition, [La mthodologie :] qui met entre autres laccent sur le travail de terrain et lobservation directe, sest perptue jusqu nos jours, elle a surtout fleuri entre les deux guerres mondiales, poque de grands bouleversements marque par les tensions ethniques cres par limmigration externe et interne dont celle des Noirs du Sud vers les villes du Nord-Est , par la vague dactivits illgales lie la prohibition entre 1919 et 1933, puis par la grande dpression de 1929 et la monte de linterventionnisme de lEtat fdral loccasion du New Deal. // [Le terrain dtudes :] Les sociologues de cette tradition ont en commun davoir travaill sur le territoire de la ville de Chicago, davoir tudi et pntr un milieu ou une communaut trangre ou familire, davoir souvent un point de vue proche de celui des travailleurs sociaux, davoir su mler des documents dj labors (rapports, cartographie) et leurs propres observations directes, et enfin davoir labor partir de ces donnes des comptes rendus trs organiss dont

un grand nombre furent publis par les presses de luniversit de Chicago. [Quelques grands auteurs :] Cette priode fut marque par le tutorat intellectuel et pratique de Robert Park (1864-1944) et par llaboration dune srie de monographies schelonnant de 1919 1945, depuis The Polish Peasant (1919), de W. I. Thomas (1863-1947) et F. Znaniecki, jusqu Black Metropolis (1945), de St. Clair Drake et H. R. Cayton. (Peretz, 1995, p. 16) Lcole de Chicago en conomie Lconomiste Milton Friedman est, avec Friedrich von Hayek, un des piliers de lcole de Chicago. A partir des annes 1960, les Chicago boys ont diffus les ides nolibrales travers le monde, des Etats-Unis de Ronald Reagan au Royaume-Uni de Mme Margaret Thatcher, en passant par le Chili de M. Augusto Pinochet. Le livre de rfrence du professeur Friedman est Capitalisme et libert (Robert Laffont, Paris, 1971). (note de la rdaction du Monde diplomatique larticle de Galbraith, 1985) Citoyennet diffrencie La citoyennet diffrencie est un concept qui a t introduit au dbut des annes 1990 par Iris Young, professeure de sciences politiques luniversit de Chicago. Cest une notion qui soppose celle duniversalisme. Luniversalisme est lide, formule par exemple dans larticle 6 de la Dclaration des Droits de lHomme et du Citoyen de 1789, selon laquelle il ny a pas de distinction faire entre les citoyens : Tous les Citoyens [sont] gaux [aux yeux de la Loi] selon leur capacit, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents . Puisque tous les citoyens sont supposs gaux sans distinction , il est impossible de lgifrer de manire favoriser un groupe plutt quun autre. (Cest ainsi que, en 1982, une proposition de loi visant instaurer un quota de femmes dans les conseils municipaux avait t rejete par le Conseil Constitutionnel.) La sociologue belge Brengre Marques-Pereira explique que, pour Iris Young, cet universalisme est une idologie hypocrite puisquelle empche de remdier aux ingalits existantes ; elle ne fait que perptuer les discriminations de fait (Marques-Pereira, 2002). Young se prononce donc, linverse, pour ce quelle appelle une citoyennet diffrencie , cest--dire le droit pour chaque groupe de proposer des politiques fondes sur ses intrts propres. Elle prconise par exemple de disposer dun droit de veto lorsque des politiques risquent de discriminer le groupe. Dune certaine manire, le concept de citoyennet diffrencie recouvre celui de discrimination positive tout en llargissant. Mais, pour certains fministes, mettre en place des quotas serait la porte ouverte une vision essentialiste : cela reviendrait admettre lide que lingalit entre hommes et femmes est naturelle puisquil faudrait avoir recours la loi pour la compenser. (daprs Marques-Pereira, 2002, pp. 4-5 ; Siim, 1997, pp. 48-49) Classe sociale Selon Marx et selon Weber. [...] il est possible de caricaturer les positions en opposant deux courants de la sociologie. Dun ct, nous avons une tradition marxiste, selon laquelle les classes sociales sont des collectifs structurs par une position spcifique dans le systme conomique dfinie par la proprit des moyens de production (ou son absence), marqus par un conflit central (lexploitation, ou la rpartition conflictuelle de la plus-value), anims par la conscience collective de leur tre et de leur intrt. Cette tradition est parfois

qualifie de holiste (holon = tout) parce quici, la totalit est plus que la somme des individus qui la forment, la classe existant indpendamment et au-dessus de ses membres, en leur dictant leur rle, par del la capacit de cration des individus, qui pourrait bien dans cette approche ntre quun leurre. Cette tradition est qualifie aussi de raliste, parce que les classes sont supposes former des entits vritables et tangibles, et non pas des constructions intellectuelles. // Dun autre ct, la tradition weberienne suppose que les classes sociales sont des groupes dindividus semblables partageant une dynamique probable similaire (Max Weber parle de Lebenschancen ou chances de vie ), sans quils en soient ncessairement conscients. La dmarche est qualifie dindividualiste et de nominaliste : la classe sociale est avant tout lensemble des individus que le chercheur dcide de nommer ainsi selon ses critres propres. (Chauvel, 2002, pp. 117-118) Codage Dfinition (dans le cas dune analyse de texte). Le codage correspond une transformation effectue selon des rgles prcises des donnes brutes du texte. Transformation qui, par dcoupage, agrgation et dnombrement, permet daboutir une reprsentation du contenu, ou de son expression, susceptible dclairer lanalyste sur des caractristiques du texte qui peuvent servir dindice [...]. /p. 135/ Lorganisation du codage comprend trois choix (dans le cas dune analyse quantitative et catgorielle) : le dcoupage : choix des units ; lnumration : choix des rgles de comptage ; la classification et lagrgation : choix des catgories. (Bardin, 1989, pp. 134-135) Communalisation (concept de Weber)Dfinition. La communalisation est le type de relation sociale que lon trouve dans une communaut : Nous appelons communalisation [vergemeinschaftung] une relation sociale lorsque, et tant que, la disposition de lactivit se fonde [...] sur le sentiment subjectif (traditionnel ou affectif) des participants dappartenir une mme communaut (Weber, 1922, p. 41). Conatus Dfinition. Selon Pierre Bourdieu, lagent est m par un conatus, une tendance persvrer dans son tre, qui lincline poser des choix. Lagent actualise en permanence, par sa pratique, un tre qui fluctue au fil de laction et de lexprience et vers lequel il tend. (Hilgers, 2006, n. 20) Explication. Le conatus, quest-ce que cest ? Le conatus, dit Spinoza dans LEthique (proposition 6 de la partie III), cest leffort que chaque chose dploie pour persvrer dans son tre ce qui est une dfinition assez abstraite. Mais, si vous voulez, dun point de vue un petit peu plus concret, le conatus, cest un lan de puissance, cest une activit indfinie, cest un momentum, cest un effort pour effectuer au maximum cette puissance, et cela peut prendre la forme dune pulsion dexpansion. (Lordon, 2006) Par exemple, il y a le conatus de luniversitaire qui persvre dans ltre en tant que chercheur, en tant que professeur ; le conatus de lhomme politique qui persvre dans ltre en tant que futur lu, futur dirigeant, etc. (ibid.) Dans un exemple (reproduit plus bas), Frdric Lordon voque le conatus pronateur de lhomme daffaires qui lance des OPA afin de prendre le contrle dautres entreprises.

Le conatus essentiel et le conatus actuel (selon Frdric Lordon). Le concept de conatus tel quil est dfini dans LEthique (je le rappelle : cet effort que dploie chaque chose en vue de persvrer dans son tre ) est un concept qui fait minemment sens du point de vue de lontologie de lactivit de Spinoza (telle quelle est expose dans la premire partie de LEthique), mais cest un concept qui parlerait avec peine des chercheurs en sciences sociales. Parce que, persvrer dans ltre , quest-ce que a veut dire, en fin de compte ? L, on est dans la mtaphysique. Persvrer dans ltre, du point de vue des sciences sociales, a ne veut rien dire. Ce que les chercheurs en sciences sociales connaissent, en revanche, ce sont les efforts de persvrer dans ltre, en particulier sous telle ou telle forme, de persvrer dans telle ou telle forme de ltre social, dans telle ou telle raison sociale, cest--dire de persvrer dans ltre en tant que ceci ou cela. Alors, pour marquer cette diffrence, jai choisi de qualifier le conatus des philosophes (le conatus de Spinoza) de conatus essentiel . Le conatus essentiel, cest un effort gnrique et intransitif, cest une force dsirante qui ne sest pas encore connue de point dapplication, qui ne sait pas encore vers quoi elle va sorienter et qui se trouve donc ltat sous-dtermin. Ce complment de dtermination de conatus essentiel, il va le trouver dans le monde social, par des dterminations sociales et historiques qui vont, dun conatus intransitif, en faire un conatus transitiv, cest--dire orient, dirig, muni de ses points dapplication, dsirant ceci plutt que cela, tchant de persvrer de cette faon plutt que de telle autre. Par exemple, si on considre des actualisations je dirais vocationnelles du conatus (mais il pourrait y en avoir plein dautres : il y a le conatus de luniversitaire qui persvre dans ltre en tant que chercheur, en tant que professeur ; le conatus de lhomme politique qui persvre dans ltre en tant que futur lu, futur dirigeant, etc.), ce conatus-l, je lappelle le conatus actuel . Et, finalement, dune certaine manire, il mest apparu que ce conatus actualis (ou conatus actuel) en tout cas sous des formes de lactualisation vocationnelle dont je viens de parler il avait beaucoup voir avec ce que Pierre Bourdieu appelle lillusio. (Lordon, 2006) Exemple : le conatus pronateur de lhomme daffaires. Me semble-til (en tout cas cest lhypothse que ce livre [Frdric Lordon, L'intrt souverain. Essai d'anthropologie conomique, La Dcouverte, avril 2006] soumet la discussion), le conatus, en tant quil est foncirement lintressement soi, son geste premier, son geste le plus brut, le plus sauvage, cest de prendre pour lui, cest de capter, cest de saisir. Le conatus, il est spontanment prdateur et pronateur. [...] LOPA constitue un cas typique. Je me souviens dune phrase qui, l aussi, avait fait tilt, dun proche qui dcrivait Claude Bbar expert en OPA et en saisies capitalistiques de toutes sortes et qui faisait des mtaphores cyngtiques base de gibiers, de chasseurs, etc., et qui disait : Quand il a pris quelque chose, il dit : jai mis la main dessus ! La pronation, physiquement, cest a : cest la torsion interne de lavant-bras pour mettre la main sur un objet. Donc, si vous voulez, dans ces conditions, il nest pas difficile de faire entendre que si le prendre est lune des expressions les plus sauvages du conatus, alors cest l le pril social par excellence. La violence va natre dune pronation de choses disputes. La violence sociale primordiale cest celle du choc de conatus pronateurs antagonistes. Et alors, toute la question, partir de l, cest de savoir comment les communauts humaines vont se dbrouiller pour rsister la dcomposition violente que les conatus pronateurs portent en germe. Cest--dire : comment vont-elles parvenir accommoder la violence pronatrice. Et, cette violence, il faut quelles laccommodent. Parce que,

lextirper, il nen est pas question. Spinoza nous le dit bien : Le conatus, cest lessence de lhomme (LEthique, proposition III-7). Si vous ajoutez cela que le geste spontan du conatus cest mon hypothse est pronateur alors, effectivement, les pulsions pronatrices conatives sont la donne de base de ce que jappellerais schmatiquement le problme du social. (Lordon, 2006) Concept Quel est lintrt des concepts (pour le militant) ? Ce que jessaie de faire [...] cest de trouver une resubstantialisation de concepts qui semblent avoir du mal tre oprationnels. Revisiter les concepts de lengagement implique son tour un engagement car les grilles avec lesquelles nous pensons et percevons le monde dterminent nos possibilits dactions dans le monde. (Miguel Benasayag, forum Nouvel Observateur, 14/10/2004) Constance (cole de) (sociologie de la lecture) Explications. Pendant longtemps, les chercheurs en sciences sociales nont considr la littrature que comme une simple succession des auteurs et des uvres . Ils ne se proccupaient pas du regard port par le lecteur sur le livre. Lcole de Constance est venue remdier cette lacune en mettant laccent sur lactivit de rception : Ainsi, dans une entreprise dlibre de rupture avec lhistoire de la littrature et de lart [...], les chercheurs de lcole de Constance travaillent promouvoir lacte de lecture (Iser, 1985) et uvrent pour une esthtique de la rception (Jauss, 1978). Luvre est alors dfinie comme une structure dynamique qui ne peut tre saisie que dans ses concrtisations historiques successives et cette dfinition permet de cerner leffet de luvre qui prsuppose un appel ou un rayonnement venu du texte, mais aussi une rceptivit du destinataire qui se lapproprie (Jauss, 1978, 246). Il sagit de prendre au srieux lide selon laquelle un texte littraire ne peut agir que lorsquil est lu [...] et donc reformuler la question de leffet, en abandonnant la seule signification pour analyser le processus de la lecture. (Le Grignou, 2003, pp. 25-26) Constructivisme Explications. Le constructivisme est une synthse entre deux mouvements opposs : le structuralisme et lindividualisme mthodologique. Il remet en cause cette opposition radicale entre lide dun acteur qui serait entirement libre en socit (individualisme mthodologique) et lide dun agent qui serait prisonnier par les structures (structuralisme). Le constructivisme allie les dimensions de contraintes et de libert . Cest un courant qui sest fond sur un travail de recherches empiriques trs fournies. Cest aussi un courant qui insiste sur la prudence conceptuelle. On y trouve des sociologues comme Georg Simmel, Michel de Certeau, Michel Crozier, Jean-Paul Sartre ou Franois Dubet. (daprs Catherine Delcroix, 11/10/2004) Ouvrage fondateur. Comme ouvrage fondateur du courant constructiviste, on peut citer : Peter Berger, Thomas Luckmann, La construction sociale de la ralit, 1966, Paris, Mridiens Klincksieck, 1986. (daprs Pascal Dauvin, 22/02/2005) Corpus (analyse de contenu) Dfinition. Le corpus est lensemble des documents pris en compte pour tre soumis aux procdures analytiques. (Bardin, 1989, p. 127) Dans son livre sur Lanalyse de contenu, Laurence Bardin indique quatre rgles quun corpus doit

respecter : la rgle de lexhaustivit ( il ny a pas lieu de laisser un lment pour une raison quelconque (difficult daccs, impression de non-intrt) non justifiable sur le plan de la rigueur. p. 127), la rgle de la reprsentativit (lorsque lon dcide deffectuer une analyse sur un chantillon, celui-ci doit tre une partie reprsentative de lunivers de dpart ibid.), la rgle de lhomognit ( Par exemple, des entretiens denqute, effectus sur un thme donn, doivent : tre tous concerns par ce thme, avoir t obtenus par des techniques identiques, tre le fait dindividus comparables. p. 128), et la rgle de pertinence ( Les documents retenus doivent tre adquats comme source dinformation pour correspondre lobjectif qui suscite lanalyse. ibid.). Culturalisme Dfinition. Ecole nord-amricaine danthropologie dont les chefs de file ont t Ruth Benedict, Margaret Mead, Ralph Linton et Abram Kardiner. Elle met laccent sur la culture plus que sur la socit et postule lexistence de corrlations troites entre les modles culturels et les lments constitutifs de la personnalit. A son actif, un renouvellement des mthodes ethnographiques, un recours la psychanalyse, une prise en compte du relativisme culturel et un approfondissement de certaines notions (pattern, personnalit de base, institution, socialisation). & Clapier-Valladon Simone, Panorama du culturalisme, Paris, pi, 1976. (Ferrol, 2004, p. 38) Culture (sociologie des organisations) Explication. Toute organisation est productrice de culture et didentit. A partir du moment o on est plus de deux, on cre une culture. Le processus est le suivant : organisation produit culture produit socialisation produit identit Dfinition. La culture est lensemble des activits, des croyances et des pratiques communes une socit, un groupe social ou un groupe professionnel. On peut retenir trois indices dune culture : une reprsentation et une vision commune des choses, des valeurs communes et des normes (= des rgles).

Lexique sociologique [ partie 2] Dfinitions autour de la culture. Terme sous-culture Dfinition Croyances, valeurs et normes dun groupe particulier au sein dune socit complexe (ex. : les jeunes, les diffrents groupes professionnels, les institutions, les entreprises, les administrations). microculture Invention de savoir-faire et de conduite par les individus placs dans une structure donne avec des contraintes particulires. Voir Microculture contre-culture Culture qui soppose la culture dominante. Conditions pour quil y ait une culture. Conditions ncessaires Dfinition Exemples

ides et valeurs communes normes communes

Cest ce que le groupe voit et croit. Cest ce que le groupe doit (cest--dire ce que les membres du groupe doivent respecter).

ensemble de gestes et dattitudes communs

Cest ce que le groupe fait.

opinions croyances rles attribus normes de relations normes de comportement (ce que lon peut faire ou non, ce que lon peut dire ou non) systme de sanctions manires de faire manires de parler manires de shabiller

(Source : cours de Moufida Oughabi, 2004/2005) Darwinisme socialSelon John K. Galbraith. Au milieu du XIXe sicle, une autre forme de dni connut un grand succs, particulirement aux Etats-Unis : le darwinisme social , associ au nom de Herbert Spencer (1820-1903). Pour ce dernier, dans la vie conomique comme dans le dveloppement biologique, la rgle suprme tait la survie des plus aptes, expression que lon prte tort Charles Darwin (1809-1882). Llimination des pauvres est le moyen utilis par la nature pour amliorer la race. La qualit de la famille humaine sort renforce de la disparition des faibles et des dshrits. // Lun des plus notables porteparole amricains du darwinisme social fut John D. Rockefeller, le premier de la dynastie, qui dclara dans un discours clbre : La varit de rose American Beauty ne peut tre produite dans la splendeur et le parfum qui enthousiasment celui qui la contemple quen sacrifiant les premiers bourgeons poussant autour delle. Il en va de mme dans la vie conomique. Ce nest l que lapplication dune loi de la nature et dune loi de Dieu. // Au cours du XXe sicle, le darwinisme social en vint tre considr comme un peu trop cruel : sa popularit dclina et, quand on y fit rfrence, ce fut gnralement pour le condamner. Lui succda un dni plus amorphe de la pauvret, associ aux prsidents Calvin Coolidge (1923-1929) et Herbert Hoover (1929-1933). Pour eux, toute aide publique aux pauvres faisait obstacle au fonctionnement efficace de lconomie. Elle tait mme incompatible avec un projet conomique qui avait si bien servi la plupart des gens. Cette ide quil est conomiquement dommageable daider les pauvres reste prsente. (Galbraith, 1985)

Dterminisme Citations montrant un certain dterminisme chez Bourdieu. Il voque les structures de lespace des positions qui dterminent les prises de position (Bourdieu, 2000, p. 45). nos choix en apparence les plus personnels, les plus intimes, et, par l, les plus chers [...], trouvent leur principe dans des dispositions socialement constitues o sexpriment encore, sous une forme plus ou moins transfigure, des proprits banalement sociales, tristement impersonnelles. (Bourdieu, 2000, p. 47) Distinction

Dfinition. proprit relationnelle qui marque un cart, une diffrence par rapport autrui et qui fonde une hirarchie entre individus et groupes ; elle est le support de stratgies inscrites dans les pratiques sociales. (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , pp. 93-94) Domination symbolique Voir violence symbolique Doxa Etymologie. Du grec , () I opinion, do : 1 jugement, avis, sentiment [...] 2 ce quoi on sattend, ce que lon croit possible, croyance [...] 3 croyance philosophique, doctrine ; jugement, raison 4 opinion sans fondement, pure imagination, conjecture [...] ; au plur. , imaginations, rveries II bonne ou mauvaise opinion sur qqn, rputation [...] (Bailly, 1901) Dfinition. Ensemble des opinions communes, croyances tablies, ides reues, ce qui va de soi sans tre discut. On parle aussi de sens commun . (Colloque PB, 2003) DoxologieDfinition. (du gr. doxa, gloire). 1. Christ. Louange la Trinit. 2. Didact. Enonc dune opinion communment admise. (Le Petit Larousse Illustr 1998) DoxosopheDfinition. Personne implique dans le champ intellectuel et dont le fonds de commerce est la dfense de la doxa (lopinion commune et dominante). (Accardo, 2005)Le terme vient dun article de Bourdieu (1972b). Ecole de Chicago Voir Chicago (cole de) Ecole de Constance Voir Constance (cole de) Effet de troisime personne (concept de W. Phillips Davison) Dfinition. Phnomne mis en lumire par Davison (1983) selon lequel les individus exposs une communication potentiellement persuasive prdisent un effet plus grand sur les autres, eux , que sur eux-mmes ou leurs interlocuteurs, moi ou toi . (Le Grignou, 2003, p. 131) Exemple. Une enqute sur le Tlthon met en vidence une forte correspondance entre la nature des squences tlvisuelles et le volume des appels tlphoniques [...]. Il apparat ainsi que les plages musicales correspondent toutes une chute importante des appels ; linverse, [...] les squences de sollicitation par lanimateur correspondent de trs fortes pointes du trafic dans la minute qui suit. [...] Pourtant, [...] les donateurs, contacts par tlphone, refusent de lier leur geste une sollicitation tlvisuelle ; ils rendent compte de leur appel par des motivations antrieures au programme ( ma dcision est prise ds linstant o je sais que lmission va passer ), ou extrieures lui ( cest pas vraiment lmission qui mintresse, cest la cause quelle dfend ). Ils ne rcusent pas pour autant toute efficacit du programme, et ne nient pas le fait quil puisse exercer des effets forts mais ces effets sexercent sur les autres. (Le Grignou, 2003, p. 131, daprs une tude de Cardon et alii, 1999) Enqute sociale Explication. Au dbut du [XXe] sicle, les enquteurs sociaux travaillaient dans les quartiers dfavoriss des grandes villes dAngleterre et dAmrique du Nord afin dobserver les conditions de vie des nouveaux pauvres issus de lindustrialisation urbaine. Ils prsentaient leurs observations sous forme de

tableaux statistiques simples sur la consommation alimentaire, lhabillement, les salaires, le logement, la sant et la criminalit. Mais ils dcrivaient galement leurs observations intgralement, librement et crment , selon la formule de Robert Park, dans lespoir que la prise de conscience de lopinion publique pourrait changer les choses. [...]. Les dix-sept volumes de Charles Booth, La vie et le /p. 271/ travail du peuple de Londres, rendent compte de quelques annes dobservation du type de ce que lon appela pendant plusieurs annes enqute sociale . Parmi les collaborateurs de Booth figuraient des visiteurs dcoles, qui allaient de porte en porte pour observer les conditions de vie des gens et pour les interroger. Ils se rendaient galement dans les glises, les clubs, les bars, les jardins publics et les monts-de-pit. Ils devinrent familiers des usines, des docks et des autres lieux de travail frquents par les pauvres de Londres. [...] En France, Le Play avait recueilli auprs de familles des donnes concernant leurs revenus et leurs dpenses. Dans toutes ces enqutes, les chercheurs allaient chez les pauvres du monde industriel et urbain pour recueillir des donnes que lon ne pouvait pas, cette poque, trouver dans les recensements effectus par les pouvoirs publics. Dans de nombreux cas, les enquteurs ont cd un sentiment dhumanit et la curiosit, en notant dautres informations, et en devenant pratiquement les ethnologues de classes et de groupes sociaux qui ntaient pas les leurs. [... /p. 272/ ...] Bien que les enqutes sociales naient pas t associes en Europe au nom de sociologie, le mouvement denqute en Angleterre et en Amrique fut lun des ingrdients du mlange original que recouvrit ce label. (Hughes, 1960, 1996, pp. 270-272) Essentialisation/Essentialisme Lessentialisation est le fait de regrouper des individus diffrents dans une mme catgorie que lon suppose homogne. Par exemple, lorsque lon dit les femmes en leur assignant un ensemble de comportements intrinsques, on leur applique une essence . Tout racisme est un essentialisme , nous dit Bourdieu. (daprs Olivier Vaubourg, 18/05/2004) On peut parler d essentialisme biologique (Cassell, 2000, p. 78). Espace social Dfinition. reprsentation multidimensionnelle et relationnelle de la structure sociale selon le volume et la structure du capital (conomique/culturel) dtenu par les diffrentes classes sociales en conflit. (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , p. 94) Ethos ou thos Voir aussi Ethos de classe Etymologie. Du grec , - () coutume, usage [...] (Bailly, 1901) ; habitude ; coutume. (Georgin, 1961) Dfinition. ensemble des rgles et des croyances qui rgissent la conduite des membres dune socit, soppose thique [...] qui ne concerne que les rgles explicites. (Mendras, 1975, p. 252) Lutilisation du concept dethos par Bourdieu. Jai employ le mot dethos, aprs bien dautres, par opposition lthique, pour dsigner un ensemble objectivement systmatique de dispositions dimension thique, de principes pratiques (lthique tant un systme intentionnellement cohrent de principes explicites). Cette distinction est utile, surtout pour contrler des erreurs pratiques : par exemple, si lon oublie que nous pouvons avoir des principes ltat pratique, sans avoir une morale systmatique, une thique, on oublie que,

par le seul fait de poser des questions, dinterroger, on oblige les gens passer de lethos lthique ; par le fait de proposer leur apprciation des normes constitues, verbalises, on suppose ce passage rsolu. Ou, dans un autre sens, on oublie que les gens peuvent se montrer incapables de rpondre des problmes dthique tout en tant capables de rpondre en pratique aux situations posant les questions correspondantes. // La notion dhabitus englobe la notion dethos, cest pourquoi jemploie de moins en moins cette notion. [... En] compartimentant lhabitus en dimensions, ethos, eidos, hexis, on risque de renforcer la vision raliste qui porte penser en termes dinstances spares [...]. En outre, tous les principes de choix sont incorpors, devenus postures, dispositions du corps : les /p. 134/ valeurs sont des gestes, des manires de se tenir debout, de marcher, de parler. La force de lethos, cest que cest une morale devenue hexis, geste, posture. // On voit pourquoi jen suis venu peu peu ne plus utiliser que la notion dhabitus. (Bourdieu, 1978, pp. 133-134) Distinction entre eidos et ethos chez Bourdieu. Les principes pratiques de classement qui sont constitutifs de lhabitus sont indissociablement [...] thoriques et pratiques [...]. La logique pratique tant tourne vers la pratique, elle engage invitablement des valeurs. Cest pourquoi jai abandonn la distinction laquelle jai d recourir une fois ou deux, entre eidos comme systme de schmes logiques et ethos comme systme des schmes pratiques, axiologiques [...]. (Bourdieu, 1978, p. 134) Ethos de classe Voir aussi Ethos Explications (par Bourdieu). [...] Deuxime principe partir duquel les gens peuvent produire une opinion, ce que jappelle l ethos de classe [...], cest-dire un /p. 228/ systme de valeurs implicites que les gens ont intriorises depuis lenfance et partir duquel ils engendrent des rponses des problmes extrmement diffrents. Les opinions que les gens peuvent changer la sortie dun match de football entre Roubaix et Valenciennes doivent une grande partie de leur cohrence, de leur logique, lethos de classe. (Bourdieu, 1972a, pp. 227-228) tiquetage Dfinition. Terme utilis par le courant interactionniste. Processus par lequel un individu ou un comportement est dsign comme transgressant une norme sociale. Selon cette perspective, le pouvoir des groupes de statut suprieur est non seulement fond sur lusage des formes rudimentaires de coercition, mais aussi sur leurs capacits produire et faire appliquer de nouvelles rglementations, contrler les reprsentations existantes, dsigner et ventuellement punir les individus dviants. & Becker Howard, Outsiders. Etudes de sociologie de la dviance, trad. fr., Paris, Mtaili, 1985 (1re d. 1963). (Ferrol, 2004, article tiquetage ) Exemple 1 : Ltiquetage des individus comme dviants (et ses consquences). Howard Becker est connu pour avoir dvelopp une thorie de ltiquetage (1973). Son ouvrage de rfrence en la matire est Outsiders (1963). Il explique comment ltiquetage dune personne comme dviante peut la pousser devenir dlinquante : Traiter une personne qui est dviante sous un rapport comme si elle ltait sous tous les rapports, cest noncer une prophtie qui contribue sa propre ralisation. Ainsi se mettent en branle divers mcanismes qui concourent modeler la personne sur limage quen ont les autres. Dabord la participation des groupes plus respectueux des normes conventionnelles tend devenir impossible [...]. Par exemple, lhomosexualit ne

modifie pas laptitude dun individu accomplir un travail de bureau, mais la rputation dtre homosexuel dans un bureau peut empcher le maintien dans cet emploi. De mme, bien que leffet des drogues opiaces naltre pas ncessairement les capacits de travail, une rputation de toxicomane a toutes chances de vous faire perdre votre emploi. Dans de telles conditions, il est difficile pour un individu de se conformer aux autres normes, quil ne comptait ni ne souhaitait transgresser [...]. Lhomosexuel qui a t priv dun emploi respectable par la dcouverte de la dviance peut driver vers des activits professionnelles non conventionnelles, marginales, o sa dviance a moins de consquences. Le toxicomane se voit contraint dautres types dactivit illgitimes, telles que le vol, parce que les employeurs respectables refusent de lembaucher ou de lui conserver son emploi. [...] Communment considr comme un individu dpourvu de volont et incapable de renoncer aux plaisirs coupables de la drogue, le toxicomane est trait par la rpression. On lui interdit lusage de la drogue. Ne pouvant se procurer celle-ci lgalement, il doit se la procurer autrement. Ce processus cre un march clandestin et fait monter le prix des drogues bien au-del de ce que serait le prix courant sur le march lgal, un niveau auquel ne peuvent que rarement accder ceux qui nont quun salaire ordinaire. Le toxicomane se trouve ainsi plac, en raison mme du mode de traitement de sa dviance, dans une position telle quil lui faudra probablement recourir la fraude et au dlit pour se procurer sa dose habituelle. Sa conduite rsulte moins de proprits inhrentes laction dviante que des ractions dautrui sa dviance. (pp. 57-58) Exemple 2 : Ltiquetage des lves par les enseignants (et ses consquences). Le thme de ltiquetage lcole a t dvelopp, en France, par Jean-Pierre Terrail (2002). Le chercheur met en vidence que l tiquette attribue par les enseignants aux lves en dbut danne scolaire influe sur la russite de ces derniers : un lve qui aura t tiquet comme bon russira mieux quun lve qui aura t tiquet comme mauvais . Parmi les tudes sur le sujet, la plus notable est sans doute celle mene par deux chercheurs tats-uniens la fin des annes 1960 : Le phnomne a t mis en vidence aux Etats-Unis par la recherche de Rosenthal et Jacobson [1968], devenue un grand classique de la sociologie de lducation. Ces chercheurs ont soumis, en fin danne scolaire, cinq cents lves dune cole primaire aux preuves dun test dintelligence. A la rentre suivante, ils ont communiqu aux enseignants une liste de noms prsents comme ceux des 20% dlves ayant le mieux russi ces preuves, alors quen ralit ces noms avaient t tirs au hasard. Une seconde srie de tests la fin de lanne a permis alors dtablir ce rsultat frappant : les lves slectionns ont ralis de meilleures performances que les autres. Tout sest pass comme si la conviction quils taient meilleurs que les autres stait transmise aux intresss eux-mmes. (p. 86) Cet effet de ltiquetage des lves par les enseignants est nomm par Rosenthal et Jacobson l effet Pygmalion . Il est, selon Jean-Pierre Terrail, un des facteurs qui font de lcole une institution o le principe consistant donner moins ceux qui ont le moins sexerce [...] puissamment (p. 258). Existentialisme (philosophie) Explication. [...] Quest-ce que signifie ici que lexistence prcde lessence ? Cela signifie que lhomme existe dabord, se rencontre, surgit dans le monde, et quil se dfinit aprs. [...] Ainsi, il ny a pas de nature humaine, puisquil ny a pas de Dieu pour la concevoir. Lhomme est non seulement tel quil se conoit, mais tel quil se veut [...], lhomme nest rien dautre que ce quil se fait. Tel est le premier principe de lexistentialisme. (Sartre, 1945, pp. 29-30)

Quel intrt pour la sociologie ? De lide que lexistence prcde lessence dcoule lide que ltre humain est tel quil se conoit , quil est acteur de sa vie. Sartre formule donc une vision sans doute assez proche de ce que sera lindividualisme mthodologique et, par consquent, trs loigne de la vision structuraliste (selon laquelle ltre humain nest pas acteur puisquil dpend de structures sociales). Lexistentialisme prsente donc un intrt surtout pour les individualistes mthodologiques. Sartre affirme par exemple : Si vraiment lexistence prcde lessence, lhomme est responsable de ce quil est. Ainsi, la premire dmarche de lexistentialisme est de mettre tout homme en possession de ce quil est et de faire reposer sur lui la responsabilit totale de son existence. (idem, p. 31) ; il ny a pas de dterminisme, lhomme est libre, lhomme est libert. (idem, p. 39) ; quel que soit lhomme qui apparat, il y a un avenir faire, un avenir vierge qui lattend (idem, p. 40) ; il ny a de ralit que dans laction ; [...] lhomme nest rien dautre que son projet, il nexiste que dans la mesure o il se ralise, il nest donc rien dautre que lensemble de ses actes, rien dautre que sa vie. Daprs ceci, nous pouvons comprendre pourquoi notre doctrine fait horreur un certain nombres de gens. Car souvent ils nont quune seule manire de supporter leur misre, cest de penser : Les circonstances ont t contre moi, je valais beaucoup mieux que ce que jai t [...] (idem, pp. 51-52) ; si, comme Zola, nous dclarions [que les gens] sont [veules, faibles, lches ou mauvais] cause de lhrdit, cause de laction du milieu, de la socit, cause dun dterminisme organique ou psychologique, les gens seraient rassurs, ils diraient : voil, nous sommes comme a, personne ne peut rien y faire ; mais lexistentialiste, lorsquil dcrit un lche, dit que ce lche est responsable de sa lchet. [...] il est comme a parce quil sest construit comme lche par ses actes. (idem, p. 54). Fminisme pluraliste (ou pluralisme fministe ou citoyennet pluraliste ou projet pluraliste )Explications. Le fminisme pluraliste est une notion propose par la politologue danoise Birte Siim et la politologue tats-unienne Wendy Sarvasy (Sarvasy, Siim, 1994) pour dsigner un groupe htrogne duniversitaires dans lequel elles incluent notamment Anne Phillips (britannique, auteure en 1992 de Engendering democracy). Deux courants fministes ont prcd le fminisme pluraliste. Le premier consistait revendiquer lgalit au nom de la commune humanit avec les hommes, cest-dire au nom du fait que femmes et hommes font tous deux partie de lespce humaine. La seconde possibilit tait, non pas de revendiquer une galit totale, mais de revendiquer des droits au nom de leurs responsabilits en tant que femmes, cest--dire (notamment) en tant que mres. Dans le fminisme pluraliste, les fministes ne rclament pas lgalit en tant qutre humain ni en tant que femmes , mais elles cherchent se dbarrasser de lidentit (de ltiquette) du genre afin de recomposer de nouvelles identits plurielles incluant la fois le genre, la race, la classe, lethnicit, la nationalit et linclination sexuelle (Siim, 1997, p. 47). En quelque sorte, la citoyennet pluraliste consiste relie[r] laffirmation de la citoyennet fminine celle dautres groupes opprims (idem). Il sagirait que les diffrents groupes sociaux [interagissent] dans le but de transformer les identits de groupe existantes (idem, p. 49). Le fminisme pluraliste consiste donc en une sorte dunion des diffrentes minorits afin, dune part, de faire changer les choses dans la socit vers plus dgalit et, dautre part, de recomposer les identits (de ne plus tre vu seulement comme un groupe de femmes). On peut dire quil sagit dune sorte didologie queer mais plus gnrale encore. En effet, pour

les fministes pluralistes, il faudrait recomposer les identits en incluant non seulement le genre et la sexualit (comme le prconisent les queer), mais galement on la dit la race, la classe, lethnicit [et] la nationalit . Le fminisme pluralisme prne aussi la dmocratie participative. Il est dans la ligne du postmodernisme. Focus groupDfinition. A loppos du recueil de donnes en milieu naturel , la technique du focus group assume les artefacts dune situation exprimentale. La mthode consiste runir un ou, le plus souvent, une srie de groupes dont les membres sont convis engager une discussion sur un thme, en prsence dun modrateur . Elle est dabord mise en uvre, dans les annes cinquante, par les reprsentants du courant dominant de la sociologie amricaine, qui, tels Lazarsfeld ou Merton, y voient une technique complmentaire ou une tape pralable aux enqutes quantitatives sur les comportements et motivations des consommateurs (Merton, 1987). Puis la mthode est quasiment abandonne durant plusieurs dcennies, avant dtre rhabilite dans les annes quatre-vingt, dabord dans les tudes de march puis dans les tudes de publics. (Le Grignou, 2003, p. 80)Principe dhomognit du groupe. Rcusant les vises des tudes quantitatives, et notamment celle de la gnralisation des rsultats, les chercheurs rompent dlibrment avec la technique de lchantillon reprsentatif, pour constituer des groupes prsentant une certaine homognit (culturelle, sociale, gographique et/ou autre). (Le Grignou, 2003, p. 81) Par exemple, dans son enqute sur les souvenirs tlviss de la grve des mineurs de 1984-1985, le chercheur britannique Greg Philo (1990) slectionne des groupes qui existent antrieurement au projet de recherche, qui lui paraissent les plus naturellement aptes susciter une conversation sur la tlvision. (Le Grignou, 2003, p. 83)Utilisation du focus group dans les enqutes sur le public. Les recherches contemporaines sur le public [...] accordent [...] aux mthodes qualitatives et, au focus group en particulier, une place centrale. Dans ce contexte [crivent Livingstone et Lunt], le focus group est utilis [...] pour tudier les modalits quotidiennes de construction du sens par les tlspectateurs (1986, 85). Cest aussi que la mthode nest pas conue comme un simple instrument pratique de recueil de plusieurs opinions individuelles, mais comme un processus dynamique, un creuset de relations interpersonnelles, une simulation approximative des conversations et discussions quotidiennes (ibid.), qui sont les lments fondamentaux, routiniers et difficilement accessibles du processus de communication sociale. Cette conception du focus group comme une stimulation de divers aspects de la communication sociale est commune nombre de recherches sur le public. (Le Grignou, 2003, p. 80) Fonctionnalisme Selon le fonctionnalisme, un trait culturel ne peut pas tre tudi isolment. Cest la relation quil entretient avec les lments constitutifs de lensemble culturel qui est important, qui lui donne sens. Par exemple, on ne peut pas comprendre le pacs sans faire le lien avec tout le reste de nos traits culturels : lensemble de nos textes juridiques, le fait que lon soit monogames, etc. Cette dmarche est une forme de holisme : pour comprendre un individu, on doit passer par ltude de tous les champs sociologiques. Bronislaw Malinowski tait le principal thoricien du fonctionnalisme. (daprs Lamia Missaoui, 2002/2003) Guide dentretien (selon Jean-Pierre Olivier de Sardan) Le guide dentretien organise lavance les questions quon pose , et peut driver vers le questionnaire ou linterrogatoire. Le canevas dentretien, lui, relve du pense-bte personnel, qui permet, tout en respectant la dynamique

propre dune discussion, de ne pas oublier les thmes importants. Il en reste aux questions quon se pose , en laissant limprovisation et au mtier le soin de les transformer au fil de lentretien en questions quon pose . (Sardan, 1995, p. 84) Habitus Dfinition 1. Systme des dispositions percevoir le monde, sentir, penser, agir dune certaine faon, intriorises au cours des apprentissages successifs dun individu (famille, cole, travail, etc.), de manire le plus souvent non consciente. Chaque habitus individuel est singulier (car chacun fait un nombre dexpriences sociales, et dans un ordre, qui lui sont propres). Un habitus de classe, ce sont les dispositions tendanciellement communes une classe dindividus. (Colloque PB, 2003) Dfinition 2. systme de dispositions durables acquis par lindividu au cours du processus de socialisation qui gnre et organise les pratiques et les reprsentations des individus et des groupes. (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , p. 94) Dfinition 3. Terme ancien quon trouve chez Aristote. Actuellement utilis en sociologie dans le cadre du courant anim par Pierre Bourdieu. Dsigne le systme de dispositions durables acquis par lindividu au cours du processus de socialisation. Se prsente la fois comme le produit agissant de conditions sociales passes et comme principe gnrateur des pratiques et des reprsentations permettant lindividu de construire des stratgies anticipatrices. Selon Bourdieu, cette notion contribue au dpassement de lopposition entre les points de vue objectiviste et subjectiviste, entre les forces extrieures de la structure sociale et les forces intrieures issues des dcisions libres des individus. Intriorisation de lextriorit , lhabitus, produit dun travail dinculcation et dincorporation, sert de support la mise en correspondance des possibilits objectives et des stratgies subjectives, tout en assurant lindpendance relative des pratiques par rapport aux dterminations extrieures du prsent immdiat. Il y aurait alors compatibilit entre lhomognisation des pratiques et des reprsentations lintrieur de groupes ou de collectifs soumis des conditions dexistence semblables et la singularit des trajectoires sociales. (Ferrol, 1991, 2004, article habitus ) Les diffrentes dimensions de lhabitus (selon Bourdieu). Dans ses premiers dveloppements, Pierre Bourdieu distinguait trois dimensions majeures du concept : les dispositions corporelles (posturales et gestuelles), qualifies dhexis ; les dimensions morales (ou le systme de valeurs), qualifies dethos, les dimensions cognitives (ou le systme de reprsentations), qualifies deidos ; et lon retrouve encore mentionnes la comptence linguistique ainsi que laisthesis (dispositions esthtiques ou got) que Pierre Bourdieu intgre cependant rapidement lethos. Ce dimensionnement tend nanmoins disparatre au fil de luvre [...]. (Bronckart, Schurmans, 2001, pp. 163-164, soulign par moi, les italiques sont dorigine) Selon Bourdieu. Cette notion dhabitus a une longue tradition : la scolastique la employe pour traduire lhexis dAristote. (On la trouve chez Durkheim qui, dans LEvolution pdagogique en France, remarque que lducation chrtienne a d rsoudre les problmes poss par la ncessit de faonner des habitus chrtiens avec une culture paenne ; et aussi chez Mauss, dans le fameux texte sur les techniques du corps. Mais aucun de ces auteurs ne lui fait jouer un rle dcisif). // Pourquoi tre all chercher ce vieux mot ? Parce que cette notion

dhabitus permet dnoncer quelque chose qui sapparente ce quvoque la notion dhabitude, tout en sen distinguant sur un point essentiel. Lhabitus, comme le mot le dit, cest ce que lon a acquis, mais qui sest incarn de faon durable dans le corps sous forme de dispositions permanentes. [...L]habitus est un capital, mais qui, tant incorpor, se prsente sous les dehors de linnit. (Bourdieu, 1978, p. 134) Selon Marcel Mauss. [...] Jai donc eu pendant de nombreuses annes cette notion de la nature sociale de l habitus . Je vous prie de remarquer que je dis en bon latin, compris en France, habitus . Le mot traduit, infiniment mieux qu habitude , l exis , l acquis et la facult dAristote (qui tait un psychologue). Il ne dsigne pas ces habitudes mtaphysiques, cette mmoire mystrieuse, sujets de volumes ou de courtes et fameuses thses. Ces habitudes varient non pas simplement avec les individus et leurs imitations, elles varient surtout avec les socits, les ducations, les convenances et les modes, les prestiges. (Mauss, 1934, pp. 368-369) Quelques considrations sur la construction de lhabitus. Les premires expriences sont les plus dterminantes, elles laissent lempreinte la plus forte et la plus durable. Cela dit, lhabitus nest jamais fig. Il continue [se modifier] au fil des expriences qui le constituent, au fil des rencontres et des contacts . Mais il connat une certaine inertie : il a tendance assurer sa constance et sa dfense contre le changement et la remise en question. Sans compter que [l]individu volue dans un univers propre renforcer ses dispositions et les recevoir favorablement. En limitant son exposition des milieux trangers, sans forcment en avoir conscience, il vite le contact avec linformation susceptible de mettre en question linformation accumule qui faonne sa reprsentation du monde. (Hilgers, 2006) Hexis corporelle (nom fminin) Etymologie. , () manire dtre, tat, do : 1 bonne constitution du corps || 2 tat ou habitude de lesprit ou de lme || 3 facult, capacit rsultant de lexprience, exprience [] (Bailly, 1901) Explication. L hexis corporelle est une notion bourdieusienne. Pour Bourdieu, le corps est social. Suivant la profession quon a eue, on aura un rapport diffrent au corps dans la vie de tous les jours car notre corps a t model par notre profession. Par exemple, dans Le bal des clibataires, Bourdieu montre comment certains paysans ne trouvent pas de filles parce quils nont pas le bon rapport au corps ( savoir pas un rapport assez urbain au corps). (daprs Batrice de Gasquet, 25/10/2004) Dfinition 1. Postures, dispositions du corps, rapport au corps, intrioriss inconsciemment par lindividu au cours de son histoire ; lhexis est une dimension importante de lhabitus. (Colloque PB, 2003) Dfinition 2 (et exemple des hexis corporelles masculine et fminine). Lhexis corporelle est la mythologie politique ralise, incorpore, devenue disposition permanente, manire durable de se tenir, de parler, de marcher, et, par l, de sentir et de penser. (Bourdieu, 1980, p. 117) Bourdieu met en parallle lhexis corporelle de lhomme et celle de la femme dans la socit kabyle de la fin des annes 1950 : Lhomme viril qui va droit au but, sans dtours, est aussi celui qui, excluant les regards, les mots, les gestes, les coups tors et retors, fait front et regarde au visage celui quil veut accueillir ou vers qui il se dirige ; toujours en alerte, parce que toujours menac, il ne laisse rien chapper de ce qui se passe autour de lui, un regard perdu en lair ou riv au sol tant le fait dun homme irresponsable, qui na rien craindre parce quil est dpourvu de poids au sein de son groupe. Au contraire, on attend de la femme

bien leve, celle qui ne commet aucune inconvenance ni avec sa tte, ni avec ses mains, ni avec ses pieds , quelle aille lgrement courbe, les yeux baisss, se gardant de tout geste, de tout mouvement dplac du corps, de la tte ou des bras, vitant de regarder rien dautre que lendroit o elle posera le pied, surtout sil arrive quelle doive passer devant lassemble des hommes [...]. (id., pp. 118-119) Le processus dintriorisation de lhexis dans le monde professionnel. Pour tre en mesure dutiliser un outil (ou de tenir un poste), [...] il faut stre fait lui, par une longue utilisation, parfois par un entranement mthodique, avoir fait siennes les fins qui sont inscrites en lui comme un mode demploi tacite, bref, stre laiss utiliser, voire instrumentaliser, par linstrument. Cest cette condition que lon peut atteindre la dextrit [...] et qui fait que lon tombe juste sans avoir calculer, faisant exactement ce quil faut, comme il faut et propos, sans gestes inutiles, avec une conomie deffort et une ncessit la fois intimement ressenties et perceptibles du dehors. (Bourdieu, 1997, p. 171) Hexis corporelles masculine et fminine. Les injonctions sociales les plus srieuses sadressent non lintellect mais au corps, trait comme un pensebte. Lessentiel de lapprentissage de la masculinit et de la fminit tend inscrire la diffrence entre les sexes dans les corps ( travers le vtement notamment), sous la forme de manires de marcher, de parler, de se tenir, de porter le regard, de sasseoir, etc. Et les rites dinstitution ne sont que la limite de toutes les actions explicites par lesquelles les groupes travaillent inculquer [...] les classements sociaux (la division masculin/fminin, par exemple), les naturaliser dans les corps, les hexis corporelles, les dispositions, dont on entend quelles soient aussi durables que les inscriptions indlbiles du tatouage [...]. (Bourdieu, 1997, p. 169) Holisme Dfinition. Soppose lindividualisme mthodologique. Prdominance du tout sur les parties. Interprtation de nature globalisante. Importance des effets de systme ou des dterminations structurelles . (Ferrol, 1991, 2004, article Holisme ) Le holisme selon Bourdieu. Samir (lve de Terminale ES) : On vous prsente comme un sociologue holiste . Quen pensez-vous ? P. Bourdieu : Dabord ce mot holiste ne veut pas dire grand chose. Il vient du grec holos qui veut dire tout, totalit. Cest un mot quun certain nombre de gens parmi les conomistes et les sociologues opposent au concept individualiste . En gnral, holiste est un mauvais mot, une insulte. Cest au fond tout ce que les conomistes noclassiques naiment pas. Le holiste par excellence, pour eux, cest Marx, leur bte noire. Les gens quon met dans cette case expliqueraient les phnomnes sociaux comme une totalit par opposition ceux qui partent des individus. Cest une opposition qui na pour moi aucun sens comme lopposition entre individu et socit. Elle est partout, sert de sujet de dissertation mais elle ne veut strictement rien dire dans la mesure o chaque individu est une socit devenue individuelle, une socit qui est individualise par le fait quelle est porte par un corps, un corps qui est individuel. Mme un individu conomique est un tre, un sujet collectif : quil soit un citoyen quelconque qui va faire son march ou un entrepreneur, il a une tte collective, un langage collectif. Ce qui est embtant, cest que ce genre doppositions archi-

fausses existent, continuent circuler et retarder la recherche. (Bourdieu, 2002, p. 21) Homo conomicus Explication. Tout dabord, lindividu rationnel, ou homo conomicus, est goste : il tient compte uniquement de son propre intrt. Il constitue en outre une unit de dcision autonome : son comportement nest pas dtermin par les habitudes sociales consciemment ou inconsciemment assimiles. Son comportement est dfini indpendamment de toute contrainte macrosociale. La dfinition de la rationalit est donc ahistorique. Enfin, lindividu rationnel est maximisateur, il effectue des choix qui maximisent sa satisfaction. (Cahuc, 1993, p. 6) Homo sociologicus intentionnel Dfinition (selon Boudon). Lhomo sociologicus intentionnel est un acteur dot dun ensemble de prfrences, cherchant des moyens acceptables de raliser ses objectifs, plus ou moins conscient du degr de contrle dont il dispose sur les lments de la situation dans laquelle il se trouve (conscient en dautres termes des contraintes structurelles qui limitent ses possibilits daction), agissant en fonction dune information limite et dans une situation dincertitude [Il] peut tre caractris comme dot dune rationalit limite. (Boudon, 1989, p. 188) HomogamieDfinition. L homogamie est une tendance statistiquement tablie selon laquelle les individus choisissent des conjoints aux caractristiques sociales proches des leurs. Lhomogamie dont on parle le plus souvent est sociale. Mais on peut aussi parler dhomogamie religieuse, gographique, etc. (daprs Jrme Deauvieau, 2002/2003) Explication de lhomogamie. [...] les gens qui se situent en haut de lespace [social] ont peu de chances de se marier avec des gens qui sont situs vers le bas, dabord parce quils ont peu de chances de les rencontrer physiquement (sinon dans ce que lon appelle des mauvais lieux , cest--dire au prix dune transgression des limites sociales qui viennent redoubler les distances spatiales) ; ensuite, parce que sils les rencontrent en passant, loccasion et comme par accident, ils ne sentendront pas , ils ne se comprendront pas vraiment et ils ne se plairont pas mutuellement. Au contraire, la proximit dans lespace social prdispose au rapprochement : les gens inscrits dans un secteur restreint de lespace [social] seront la fois plus proches (par leur proprits et leurs dispositions, leurs gots) et plus enclins se rapprocher [...]. (Bourdieu, 1989, p. 26) Homophilie une relation [a] plus de chances dexister entre des personnes ayant des statuts biographiques et sociaux peu diffrents : la proximit sociale facilite souvent ces relations [...]. Ce principe trs gnral [s'appelle] homophilie [...] (Spencer, 1993, pp. 1461-1462) On peut parler par exemple d homophilie professionnelle (id., p. 1471)

Hughes (Everett) Quelques lments pars. 1930 marque un tournant dans lhistoire de lcole de Chicago avec de nouveaux sociologues comme Blumer et Hughes. Alors que lcole avait jusque l privilgi une approche souvent holiste, elle volue dsormais vers une vision plus individualiste. Il se dgage en fait deux courants principaux : lun se situe dans le prolongement de la premire priode de lcole cest--dire ltiquetage des populations tandis que lautre se tourne vers ce que lon nommera lethnomthodologie (Fisseau, Hupin, non dat). Ainsi, Hughes explique-t-il : A mon arrive lUniversit de Chicago, en 1938, mes collgues me confirent un cours dintroduction la sociologie. Ce cours tait principalement suivi par de jeunes tudiants qui avaient fait au moins deux ans de sciences sociales au college de lUniversit de Chicago. [...] la plupart dentre eux navaient pas encore atteint ce niveau de formation qui permet dtablir un lien entre les grandes et les petites choses. Ils aimaient que tout soit grand les vnements comme les ides. Ils avaient tendance prendre la lgre les petites observations qui cependant, accumules, constituent les preuves sur lesquelles sont construites les thories de la culture et de la socit. Pour la majorit dentre eux, lexistence ordinaire semblait banale, trivial, et souvent triste. (Hughes, 1960, pp. 268-269, soulign par moi) Hystrsis Dfinition. Hystrsis (de lhabitus). Du grec husterein : tre en retard. Ide de dcalage (lorsque, par exemple, les structures sociales changent et ne sont plus conformes celles qui ont t intriorises lors de la formation de lhabitus). (Bonnewitz, 2002, Glossaire spcifique , p. 94) Incidence (en sociologie de la dviance, dans les enqutes de victimation) Dfinition du taux dincidence. Le taux dincidence mesure le nombre de faits subis pour 100 rpondants au cours de la priode de rfrence ; il sobtient en multipliant le taux de prvalence par la multivictimation. (Robert et alii, 1999, p. 259, note 12) Dfinition du taux dincidence apparente. Quand le taux dincidence est multipli par le taux de plainte [proportion de victimes disant avoir dpos plainte], on obtient le taux dincidence apparente, celle dont les autorits peuvent avoir connaissance par leffet des plaintes que les victimes disent avoir dposes. (Robert et alii, 1999, p. 259, note 12) Indicateur Lorsque lon fait des recherches quantitatives (par exemple des enqutes par questionnaire), on utilise des indicateurs. Un indicateur est un instrument de mesure (donc quelque chose de quantifiable ) auquel le chercheur a recours pour essayer de comprendre un phnomne qui nest pas quantifiable en luimme. Par exemple, comme indicateur de la richesse (qui est un concept vague, non directement quantifiable), on peut prendre le revenu (mais on pourrait aussi en choisir dautres comme le patrimoine, ou bien une combinaison du revenu et du patrimoine). Dans le film La sociologie est un sport de combat (documentaire de Pierre Carles sur Pierre Bourdieu), on voit une squence au

cours de laquelle plusieurs sociologues cherchent dterminer les indicateurs de ltat davancement du libralisme dans un pays. Parmi ces indicateurs, ils citent le pourcentage dentreprises privatises, etc. Si je me souviens bien, ils plaisantent aussi en parlant dindicateurs du type Mc Do ou Mickey . Ils veulent dire par l que, plus un pays a dentreprises utilisant une main duvre prcaire, plus cela montre que le pays est dans un stade avanc de libralisme. Individualisme mthodologiqueLindividualisme mthodologique est un courant n dans le milieu des annes 1970, par opposition au structuralisme. Il est port notamment par Raymond Boudon. Larticle fondateur a t crit par Franois Bourricaud. Selon cette thorie, contrairement au structuralisme, lacteur individuel a la possibilit davoir une action indpendante par rapport aux structures. Selon Raymond Boudon ce sont les comportements individuels qui sagrgent pour crer des comportements que lon peut qualifier de collectifs. Par exemple, partir des annes 1970, il y a eu une augmentation du nombre de naissances hors mariage. Elles ont dabord t le fait dhommes et de femmes assez isols. Petit petit, ces cas isols se sont agrgs et cest devenu un phnomne collectif. Aujourdhui, en France, prs de 50% des naissances se font hors mariage. Le phnomne est entr dans les normes. (daprs Catherine Delcroix, 11/10/2004) Induction Linduction. Un sociologue a une dmarche inductive lorsquil part de lobservation pour aller vers la classification et labstraction. Linduction est donc le passage du concret labstrait. Max Weber, en construisant un idal-type partir de ses observations, procdait par induction. Marcel Mauss procdait galement par induction. La dduction. Un sociologue a une dmarche (hypothtico-)dductive lorsquil part dhypothses pour, ensuite, vrifier leur validit dans la ralit. La dduction est donc le passage de labstrait au concret. Durkheim procdait par dduction. Par exemple, aprs avoir suppos que le sexe influait sur le taux de suicide, il avait cherch le vrifier grce aux statistiques. (daprs Olivier Vaubourg, 09/03/2004) Induction analytique Explication. Cette mthode [de l'induction analytique] exige que chaque cas recueilli dans lenqute confirme lhypothse. Si le chercheur rencontre un cas qui ne la confirme pas, il doit reformuler lhypothse pour quelle concorde avec le cas qui a infirm lide initiale. (Becker, 1963, p. 67) Interaction Dfinition 1. processus interpersonnel fondamental o les sujets en contact modifient temporairement leur comportement les uns vis--vis des autres par une stimulation rciproque continue pour la dure du contact, quelle que soit la nature du comportement et les modifications quil prsente (Lempereur, Thines, 1975 ; cit in Debuyst, 2002, p. 139) Dfinition 2. interrelation (relationship) entre deux (ou plus de deux) systmes, personnes ou groupes dont rsulte une influence rciproque (Corsini, 1999 ; cit in Debuyst, 2002, p. 139)

Interactionnisme symbolique Dfinition. Courant de pense sociologique tats-unien faisant partie de la seconde Ecole de Chicago et stant dvelopp partir de la fin des annes 1960. Lide principale de linteractionnisme symbolique est que la ralit sociale ne simpose pas telle quelle aux individus ou aux groupes, mais quelle est en permanence modele et reconstruite par eux travers les processus dinteraction. Linspirateur du mouvement. Herbert Mead, la psychologie sociale et la notion de rles sociaux . Mme si ce nest pas lui qui lui donne son nom, on peut dire que le grand inspirateur de linteractionnisme symbolique est (George) Herbert Mead (1863-1931). Il institue les premiers liens entre la psychologie et la sociologie, donnant lieu la cration de la psychologie sociale de lcole de Chicago. Mead est lun des premiers faire la synthse entre les approches macrosociologique et microsociologique. Il est aussi le premier introduire la notion de rles sociaux ( role-taking ) comme concept central de son approche : Les types de relations que nous entretenons varient suivant les diffrents individus ; nous sommes une chose pour un homme, et une autre pour un autre. [...] Nous nous scindons ainsi en toutes sortes de diffrents soi suivant nos amis. Nous discutons politique avec lun et religion avec lautre. Il existe une grande diversit de soi correspondant aux diffrentes ractions sociales. (Mead Herbert, Mind, self and society, 1934, trad. fr. : Lesprit, le soi et la socit, Paris, PUF, 1963) Le fondateur du mouvement : Herbert Blumer. Herbert (George) Blumer (1901-1987) est celui qui, sinspirant de Mead, a vritablement fond linteractionnisme symbolique. Il est lauteur, en 1969, de Symbolic interactionism : perspective and method. Erving Goffman et la thorie des rles sociaux. Erving Goffman (19221982) avait suivi les cours de Herbert Blumer. Il a dvelopp une thorie des rles sociaux partir des travaux de Mead, notamment en publiant, The Presentation of self in everyday life (1959) et Relations in public (1971), traduits en franais en 1973, sous le titre La mise en scne de la vie quotidienne. Jeux (thorie des) ou thorie mathmatique de la dcision ou praxologie mathmatique Dfinition. Branche des mathmatiques qui tudie des situations de conflit en laborant des modles dans lesquels les rgles sont fixes, ce qui permet de prdire les consquences des choix des joueurs. On distingue les jeux somme nulle, dans lesquels ce quun des joueurs perd, lautre le gagne, des jeux pluriels, pour lesquels il peut y avoir une conciliation dintrts entre les joueurs. Von Neumann a dmontr quil existe, dans le cas dun jeu de deux joueurs somme nulle, une solution optimale pour les deux joueurs appele mini-max. La rigueur logique et llgance des dmonstrations faites partir de la thorie des jeux ont tent quelques sociologues mais les conomistes lutilisent plus volontiers. Bibl. compl. [Raymond] Boudon 1979 [La logique du social], [Kenneth E.] Boulding 1962 [Conflict and defense, a general theory], [Thomas C.] Schelling 1960 [The strategy of conflict]. (Gresle et alii, 1994) Qui est lorigine de la thorie des jeux ? La thorie des jeux utilise en sciences sociales sinspire de recherches en mathmatiques et, plus prcisment, en statistiques. Le Dictionnaire de sociologie (Akoun, Ansart, 1999) fait la

distinction entre les jeux de hasard (type loterie) et les jeux de dcision (checs, poker). La thorie des jeux de hasard pur nat avec linvention du calcul de probabilits aux XVIe et XVIIe sicles (Cardan, Pascal, Fermat, Huygens). A la fin du XVIIe sicle, Bernouilli met en vidence la loi des grands nombres . Les mthodes statistiques utilises au XXe sicle en sciences sociales drivent de ces recherches. Les jeux de dcision. Hormis les jeux de hasard, il y a aussi ceux o intervient [...] lhabilet des joueurs, leurs tactiques et leurs ruses pour parvenir leurs fins, et linteraction entre les dcisions prises par les uns et les autres. Ltude mathmatique de ces jeux est esquisse ds le dbut du XVIIIe sicle. [...] Mais ce nest quau XXe sicle que les mathmatiques de la dcision prennent vraiment corps. [...] Les travaux prcurseurs sont ceux dErnst Zermelo sur le jeu des checs (1911), dEmile Borel sur la catgorie tendue des jeux dits information parfaite [...] (1921), et ceux de Neumann ds 1928. Mais ce nest quen 1944 que ce dernier publie avec Morgenstern louvrage considr comme fondateur Theory of Games and Economic Behavior. La date de 1944 nest pas fortuite. Cest lpoque de la guerre mondiale, celle o il est vital pour les dirigeants civils et militaires [...] de rationaliser les dcisions de toute sorte prendre pour la logistique et la conduite des oprations [...]. Luvre de von Neumann et Morgenstern a eu une influence considrable : la thorie conomique (macroconomie) en a t renouvele [...] ; dans la gestion des entreprises (microconomie), ce fut lessor de la recherche oprationnelle [...]. (Akoun, Ansart, 1999) Quelle application dans les sciences sociales ? Dans les sciences sociales [...] (sociologie, anthropologie, psychologie sociale), les retombes de la thorie des jeux ont t bien plus modestes [qu'en conomie]. Il y eut, dans les annes 50 et au dbut des annes 60, de grands espoirs, en psychologie sociale notamment, mais fonds sur un malentendu [...]. La thorie, en effet, nest pas descriptive des comportements des joueurs, mais essentiellement normative. Elle sert rationaliser et clairer les choix de celui qui doit dcider. (Notons que larticle sur la thorie des jeux du Dictionnaire de sociologie ne mentionne pas la reprise de cette thorie par les individualistes mthodologiques. Cf. cidessous.) Selon les individualistes mthodologiques. En 1975, dans larticle fondateur de lindividualisme mthodologique, Franois Bourricaud critiquait le fait que, dans la thorie des jeux, lindividu est compltement inform, totalement cohrent dans ses prfrences, assur dans ses prvisions (Bourricaud, 1975, p. 596). Cela dit, par la suite, son collgue Raymond Boudon, chef de file des individualistes mthodologiques, a eu recours cette thorie, notamment dans La logique du social (1979, pp. 64-74), et a ainsi contribu la populariser en France. Il prcisait toutefois que la thorie des jeux ntait pas utilisable en toute circonstance. Kardiner (Abraham) Psychanalyste et ethnologue amricain (New York, 1891). Psychiatre, acquis la psychanalyse, il sorienta vers lethnologie. En collaboration avec R. Linton, il formula sa thorie de la personnalit de base , type moyen de personnalit, caractrisant les individus dune socit, dtermin par les institutions primaires (organisation familiale, systme de subsistance, dducation, etc.) et sexprimant dans les institutions secondaires [mythes, religion, etc.] (The Individual and his Society, 1939 ; The Psychological Frontiers of Society, 1945, avec R. Linton). [...] Luvre de Kardiner constitue un des principaux efforts de rapprochement

entre la psychanalyse et lanthropologie culturelle (Introduction lethnologie, 1961 ; trad. fr., 1966). (Le petit Robert 2, 1984) Lazarsfeld (Paul Flix) Lazarsfeld (Paul Flix). Sociologue et statisticien amricain dorigine autrichienne (Vienne, 1901). Il sest efforc de dfinir les concepts fondamentaux des sciences sociales, dont il a formul les principes mthodologiques et quil a orients dans le sens de la formalisation mathmatique. Il a notamment mis au point une technique mathmatique complexe pour ltude des composantes dune attitude (analyse de la structure latente, Latent Structure Analysis, 1959). Son principal ouvrage, The Language of social Research (avec Morris Rosenberg, 1955) a t traduit et adapt en franais par M. Boudon sous le titre Vocabulaire des sciences sociales, LAnalyse empirique de la causalit, LAnalyse des processus sociaux (3 vol.). (Robert 2, 1984) Lazarsfeld (Paul Flix), Vienne 1901 New York 1976, sociologue et statisticien amricain dorigine autrichienne. Il sest intress la mthodologie des sciences sociales, aux communications de masse et au comportement lectoral (Philosophie des sciences sociales, 1970). (Le petit Larousse Illustr, 1997) Lectant et lisant (selon le thoricien de la lecture Vincent Jouve) Le lisant est cette part du lecteur pige par lillusion rfrentielle qui considre, le temps de la lecture, le monde du texte comme un monde existant , il croit pour un moment ce quon lui raconte. Le lectant , quant lui, garde toujours lesprit que le texte est dabord une construction (Jouve, 1993, pp. 35-36 ; cit in Le Grignou, 2003, p. 91) Locus of control Il sagit de lauto-perception de la capacit individuelle matriser le cours des vnements (Spencer, 1993, pp. 1512) Linton (Ralph) Ethnologue amricain (Philadelphie, 1893 New Haven, Connecticut, 1953). Il a tudi le problme des relations entre lhomme et son milieu culturel, de la transmission culturelle et du mcanisme de lemprunt (phnomne dacculturation). En collaboration avec A. Kardiner, il formula et dveloppa la thorie de la personnalit de base (The Study of Man, 1936 ; Le Fondement culturel de la personnalit, 1945 trad. fr., 1959). (Le petit Robert 2, 1984) Lisant Voir Lectant Liu (Michel) (sociologie des organisations) Michel Liu (prononcer [liu]) est professeur des universits en sociologie lUniversit Paris 9 Dauphine. De 1991 2000, il a t directeur du Centre dEtude et de Recherche en Sociologie des Organisations (CERSO). Il explique sa perspective de recherche de la manire suivante : Les organisations ont t tudies jusqu maintenant de manire statique, travers leurs structures ou leurs tats, il est ncessaire de les tudier dans leur dynamique, cest--dire se poser la question des raisons de leur fonctionnement et de leurs volutions. La dynamique dune organisation se manifeste par les transformations de sa culture, quil faut donc pouvoir tudier. Ltude des cultures requiert une

mthodologie diffrente de celles qui sont actuellement en usage en sociologie. Il savre ncessaire de fonder cette mthodologie en clarifiant son pistmologie. Ce programme de recherche articule donc les trois axes prcits : la dynamique des organisations, ltude des cultures et lpistmologie des sciences sociales. Il a publi Approche sociotechnique de lorganisation (1983) et Fondements et pratiques de la recherche-action (1997). (Source : http://www.dauphine.fr/cerso/Membres/Liu.html, 2005) Malthusianisme Dfinition. Doctrine qui, lorigine (Thomas Malthus, 1798), prconisait la limitation des naissances par la contrainte morale, afin de remdier au danger de la surpopulation. Se rfre, de nos jours, aux pratiques anticonceptionnelles. Plus gnralement, synonym