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Guide pour animer des ateliers de discussion pour le secondaire
« La leçon de discrimination – 10 ans plus tard – »
Nicole Carignan Département d’éducation et formation spécialisées
Université du Québec à Montréal (UQAM) Centre des études ethniques des universités montréalaises (CEETUM)
Richard Y. Bourhis Département de psychologie
Université de Québec à Montréal (UQAM) Directeur du Centre des études ethniques des universités montréalaises (CEETUM) (2006-2009)
Alhassane Balde Département d’éducation et formation spécialisées
Université du Québec à Montréal (UQAM) Centre des études ethniques des universités montréalaises (CEETUM)
Table des matières
PRÉFACE 2 Activité 1 : La catégorisation sociale « Eux-Nous » 6 Activité 2 : Les préjugés 11 Activité 3 : La discrimination, un phénomène persistant 17 Activité 4 : Contrer l’intimidation et la violence 22 Activité 5 : Les méfaits de la discrimination 28
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PRÉFACE1
En 2006, Pascale Turbide et Lucie Payeur de l’équipe d’Enjeux de Radio-Canada ont
produit le reportage « La leçon de discrimination ». Avec le consentement de sa directrice
d’école et de tous les parents, l’enseignante, Annie Leblanc, a fait vivre à ses élèves de troisième
année du primaire la dure réalité des personnes qui subissent la discrimination en divisant sa
classe en deux groupes selon la taille de chacun des élèves : le groupe des petits étant valorisé par
l’enseignante le premier jour et, à l’inverse, le groupe des grands, valorisé le lendemain. Dans les
deux cas, les élèves du groupe valorisé ont discriminé les élèves du groupe dévalorisé. C’est
ainsi qu’un climat de discrimination « Eux-Nous » s’est installé entre les élèves francophones de
l’école Saint-Pierre de Saint-Valérien-de-Milton, village situé à 50 kilomètres de Montréal.
L’enseignante, Annie Leblanc, qui connaissait bien ses élèves, avait réussi à leur faire vivre cette
expérience difficile parce qu’elle avait tissé un lien de confiance avec eux. L’expérience avait pu
être réalisée dans les circonstances les plus favorables.
De 2006 à 2016, La leçon de discrimination a fait le tour du monde, ce qui démontre que
la discrimination est une problématique pertinente que l’on retrouve dans tous les pays. « La
leçon de discrimination » est devenue un outil privilégié pour aider les enseignants et les
formateurs à promouvoir une société plus ouverte et inclusive envers la diversité.
Durant ces 10 ans, que sont devenus ces jeunes? En 2016, Pascale Turbide de l’équipe
d’Enquête de Radio-Canada est partie à leur rencontre. Ces élèves devenus jeunes adultes sont
revenus dans leur classe de troisième année avec leur enseignante pour partager leurs impressions
et leurs souvenirs. Que pouvons-nous retenir de cette expérience et de la réaction des jeunes dix
ans plus tard? Que pouvons-nous apprendre d’eux? Est-ce que cette leçon de discrimination a
porté ses fruits? Le documentaire « La leçon de discrimination –10 ans plus tard –» nous apporte
des réponses et suscite de nouveaux questionnements.
1 Le masculin est utilisé pour représenter les deux sexes sans discrimination à l’égard des hommes et des femmes dans le seul but d’alléger le texte.
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Ce guide vous invite à animer des discussions, à échanger des idées et à partager des
expériences avec vos groupes à la suite du visionnement du documentaire de 2006 et de celui de
2016. Avant de proposer l’animation autour de ces documentaires, il est essentiel de créer un
climat propice et sécuritaire pour favoriser l’échange et le dialogue ainsi que de valoriser le
partage des bonnes ou mauvaises expériences vécues par les participants. Étant donné l’ensemble
des recherches sur les méfaits psychologiques et physiques de la discrimination, il faut être
sensible aux réactions des individus qui visionnent « La leçon de discrimination ». Les personnes
ayant déjà subi de la stigmatisation ou de la discrimination dans leur quotidien seront peut-être
plus susceptibles de réagir fortement au documentaire. Par ailleurs, les adultes grands habitués de
l’exclusion seront peut-être moins émus que les élèves et les jeunes adultes ayant « un vécu »
moins intense et prémunis à cet égard. Il s’agit de se préparer à bien gérer les émotions et les
réactions de l’auditoire durant et après le visionnement des documentaires de 2006 et de 2016.
Il est important également de vous demander : qui va participer à l’atelier de discussion?
Certains ont-ils déjà été victimes de discrimination ou de rejet en raison d’un stigmate personnel
ou de l’appartenance à une catégorie sociale dévalorisée? Y a-t-il des jeunes ou des adultes qui
sont susceptibles de ressentir des émotions plus vives lors du visionnement? Nous vous invitons à
être particulièrement attentifs à leurs réactions affectives, cognitives et comportementales. Vous
devez prévoir un soutien affectif, accueillir leurs réactions, être empathique à leur égard en
expliquant aux jeunes ou aux adultes que personne n’est à l’abri de la discrimination.
Par ailleurs, les personnes « racialisées » ou « stigmatisées » sont aussi celles qui sont les
plus susceptibles de fournir des témoignages touchants et révélateurs sur leurs expériences
personnelles de victimes de préjugés et de discrimination. Créer un climat où chacun se sent en
confiance et en sécurité permet de faire valoir la richesse de leur expérience personnelle tout en
respectant leurs témoignages parfois bouleversants.
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Nous vous proposons CINQ ACTIVITÉS d’animation que vous adapterez aux
caractéristiques de vos groupes selon les buts que vous visez, les caractéristiques personnelles des
participants ou les événements de l’actualité qui rendent certains thèmes plus pertinents que
d’autres.
Pour chaque activité, nous proposons TROIS PARTIES :
1) Une réflexion avant le visionnement;
2) Une animation/discussion après le visionnement;
3) Des activités multidisciplinaires à proposer par l’enseignant. Ces activités peuvent être
adaptées aux exigences des programmes officiels de toutes les matières scolaires tout au
long de l’année.
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ACTIVITÉ 1
LA CATÉGORISATION SOCIALE « EUX-NOUS »
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ACTIVITÉ 1 : LA CATÉGORISATION SOCIALE « EUX-NOUS »
Partie 1 : Une réflexion avant le visionnement
Nous faisons tous partie de plusieurs groupes fondés sur l’âge, le genre, l’ethnie, la langue
maternelle ou la nationalité. Ces catégories sociales sont imposées par les hasards de la naissance
et les individus qui en sont membres peuvent difficilement nier cette appartenance et ne peuvent
pas facilement la changer. Par contre, nous pouvons nous joindre à un groupe, choisir de faire
partie d’une équipe sportive ou de suivre une formation pour devenir informaticiens, soudeurs,
enseignants, historiens ou pharmaciens.
Que notre appartenance à une catégorie sociale soit imposée ou choisie, nous avons
tendance à dire « Nous » 2 pour parler des membres de notre propre groupe, soit notre
endogroupe3. Par ailleurs, les membres d’un groupe d’appartenance autre que le nôtre et auquel
on ne s’identifie pas sont considérés comme les membres du groupe des « Eux », soit les
exogroupes. La catégorisation « Eux-Nous » est le produit d’un des processus cognitifs des plus
fondamentaux. Nous découpons, classifions et organisons notre environnement physique et social
en regroupant les objets et les types d’individus qui se ressemblent ou qui diffèrent ce qui
2 Pour en savoir plus, consultez le Petit guide pédagogique pour La leçon de discrimination, sur le site curio.ca, p. 9-10; p. 13-15. 3 Pour en savoir plus, consultez le Petit guide pédagogique pour La leçon de discrimination, sur le site curio.ca, Glossaire, p. 27-36.
« Habituellement, quand les enfants prennent le rang, les premiers arrivent et ainsi de suite. Je n’ai mentionné aucune consigne par rapport à ça. Quand je me suis placée en avant, il y avait deux groupes : les petits d’un côté, les grands de l’autre. » (Annie Leblanc, 2006)
« Ce que tu dis, c’est un petit peu faux, parce que les
petits sont pas tous créatifs, ils sont pas très, très
vite. » (David, qui réagit à la catégorisation
« petits/rands » d’Annie Leblanc, 2006)
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simplifie notre perception d’un environnement souvent complexe et changeant.
Lorsque le processus de catégorisation s’applique à des personnes, nous parlons de
catégorisation sociale. Les résultats des études sur la catégorisation « Eux-Nous » amènent à
observer deux phénomènes :
1) celui d’accentuer les ressemblances perçues entre les membres d’une même catégorie; et
2) celui d’accentuer les différences perçues entre des membres appartenant à des catégories
différentes.
Ainsi, nous aurons tendance à dire « ils » sont tous pareils ceux-là, et « nous » ne sommes
vraiment pas comme « eux ».
Catégoriser des individus comme membres d’un groupe, c’est leur attribuer la propriété
d’être un groupe cohérent et homogène, unifié par ses croyances et actions, d’être semblable et
d’avoir un destin commun : c’est le phénomène de l’entativité. Cette perception peut s’appliquer
autant à l’endogroupe qu’à l’exogroupe, selon le degré d’identification à l’endogroupe et le
sentiment de méfiance ou de menace suscité par la présence d’exogroupes.
Partie 2 : Une animation/discussion après le visionnement
Des questions auxquelles répondre en groupe :
Pouvez-vous nommer les catégories sociales auxquelles vous vous identifiez
aujourd’hui?
Sont-elles les mêmes que celles auxquelles vous vous identifiez dans le passé?
Ont-elles changé avec le temps?
Est-il possible pour vous d’appartenir à plus d’une catégorie sociale en même temps?
Pouvez-vous vous identifier à des catégories multiples selon les circonstances?
Nommez les catégories sociales que vous considérez comme les plus valorisées dans
votre ville, dans votre province et au Canada. À quelle(s) catégorie(s) sociale(s)
aimeriez-vous appartenir?
Nommez les catégories sociales qui, selon vous, sont les moins valorisées dans votre
ville, dans votre province et au Canada. Nommez les catégories sociales qui, selon
vous, sont les plus valorisées dans votre ville, dans votre province et au Canada. Que
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pouvons-nous faire pour changer de catégories sociales?
D’après vous, quelles sont les caractéristiques essentielles à considérer pour être un
vrai Acadien? Un vrai Autochtone? Un vrai Canadien? Un vrai Franco-Manitobain?
Un vrai Franco-Ontarien? Un vrai Fransaskois? Un vrai Métis? Un vrai Québécois?
Partie 3 : Des activités multidisciplinaires à proposer par l’enseignant
Toutes les disciplines scolaires peuvent contribuer à la reconnaissance de la diversité
culturelle, ethnique et linguistique dans votre classe. Cette reconnaissance de la diversité peut
accentuer les ressemblances perçues et partagées par les membres d’une même catégorie ou d’un
groupe. Toutes les disciplines scolaires peuvent aussi contribuer à sensibiliser les jeunes au fait
que nous avons tendance à accentuer les différences entre les membres qui appartiennent à des
catégories différentes.
Les interactions :
• Avez-vous déjà pris le temps d’observer les interactions entre les gens, y compris
des personnes d’origine différentes, que vous côtoyez dans la classe, à l’école,
dans les transports publics, lors d’activités sportives, dans les restaurants, dans la
rue?
Les regroupements :
• De quelle façon, les gens se regroupent-ils? Selon quelles caractéristiques? Quels
intérêts? Comment se regroupent-ils? À qui vous identifiez-vous? Avec quel(s)
groupe(s) sentez-vous le plus d’affinités? Avec quel(s) groupe(s) sentez-vous le
plus de différences?
Les catégories sociales :
• Quelles sont les catégories sociales les plus valorisées? Quelles sont les catégories
sociales les moins valorisées? À quelle(s) catégorie(s) sociale(s) aimeriez-vous
appartenir? Est-ce possible de changer de catégories sociales? Que pouvez-vous
faire pour changer de catégories sociales?
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Nous vous invitons à faire un travail d’équipe qui pourrait se dérouler comme suit :
1) Vous formez une équipe de trois personnes;
2) Vous choisissez des personnes avec qui vous n’avez jamais fait de travail d’équipe;
3) En vous inspirant des questions proposées ci-haut, vous partez à la rencontre de cinq à
dix personnes de votre entourage et vous leur demandez de réagir à vos questions;
4) Vous compilez les réponses;
5) Vous préparez un exposé à présenter en classe. Cette activité peut être adaptée aux
exigences des programmes officiels de toutes les matières scolaires.
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ACTIVITÉ 2
LES PRÉJUGÉS
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ACTIVITÉ 2 : LES PRÉJUGÉS
Partie 1 : Une réflexion avant le visionnement
Les préjugés4 demeurent une réalité pour un bon nombre d’individus d’ici ou d’ailleurs.
Dans « La leçon de discrimination », Annie Leblanc note que les préjugés sont appris très jeunes
dans la famille et à l’école. Ils sont inculqués par la télévision et par ce qu’entendent les enfants.
Lors d’un échange en classe, une élève dit : « Les noirs sont pauvres… pauvres, pauvres,
pauvres. » Alexandra ajoute que « Les noirs avaient tendance à voler des choses, avaient plus
tendance à être méchants avec nous, plus brusques. » Les préjugés ne sont pas toujours
consensuels. Sabrina dit : « Autant un noir qu’un blanc peut être intelligent, il n’y a pas de
différence » et David enchaîne en disant : « Ma matante, c’est une noire. Elle est vraiment
intelligente et c’est une noire en plus. »
Le préjugé est un jugement a priori, un parti pris, une opinion préconçue qui concerne un
groupe de personnes ou un individu appartenant à une catégorie sociale. Les préjugés reflètent un
processus psychologique fondamental qui est le biais proendogroupe. Ce biais est la tendance à
évaluer et à traiter plus favorablement les membres de notre endogroupe que ceux de
l’exogroupe. Ainsi, le préjugé est une attitude négative ou une prédisposition à adopter un
comportement négatif envers les membres d’un groupe dévalorisé. Les préjugés sont des attitudes
négatives envers tous les membres d’un groupe sans égard aux différences individuelles.
Les membres d’un même groupe d’appartenance partagent souvent les préjugés qu’ils 4 Pour en savoir plus, consultez le Petit guide pédagogique pour La leçon de discrimination, sur le site curio.ca, p. 11-12.
« Pourquoi on se ferait différencier? À quoi ça sert de différencier les autres, si
on sait qu’ils ont tous quelque chose de bon? Nous on a des défauts, eux aussi.
À quoi ça sert? » (Sabrina, 2006)
« Des patrons insensibles à la discrimination, il y en a,
animés de préjugés ou avoir au fond de soi des
préjugés. C’est compréhensible, ils n’ont pas été formés
pour cela. » (Pascal Tisserant, France, 2016)
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entretiennent à l’égard des exogroupes de leur région ou de leur pays. À titre d’exemple, une
majorité de Canadiens pourrait croire que « tous les Autochtones ont des problèmes de
dépendance à l’alcool ou à la drogue ». Une majorité de femmes pourrait partager la croyance
que « tous les hommes sont machos » ou que « tous les musulmans oppriment les femmes ». Les
personnes, qui partagent ces préconceptions, qui préjugent ou qui jugent avant de connaître,
s’appuient sur des généralisations erronées et rigides. Ces personnes ne tiennent pas compte des
différences individuelles. Les sentiments les plus souvent associés aux préjugés peuvent aller du
simple inconfort en présence d’un membre de l’exogroupe jusqu’à la méfiance, la peur, le dégoût,
le rejet et l’hostilité.
Nous pouvons avoir des préjugés envers les membres d’une classe socioéconomique (par
exemple, les pauvres), d’une affiliation religieuse (les juifs), d’un groupe ethnique (les
Autochtones), d’une communauté culturelle (les Haïtiens). Les préjugés sont parfois identifiés
par une étiquette particulière précisant la catégorie sociale visée. Ainsi, le sexisme désigne le
préjugé basé sur le sexe, l’âgisme fondé sur l’âge, le racisme envers les individus d’un autre
groupe ethnique, l’islamophobie à l’égard des musulmans, le linguicisme en raison de la langue
et de l’accent et l’homophobie envers les homosexuels.
L’essentialisme est un jugement qui porte surtout sur l’essence des membres d’un groupe,
c’est-à-dire à ce qui fait qu’un groupe est ce qu'il est, ce qui en détermine la « vraie nature ».
L’essentialisme biologique5, qui a servi de fondement idéologique pour marquer les différences
« naturelles » entre les humains (racisme), a servi à justifier la supériorité des uns et l’infériorité
des « autres », menant au fil de l’histoire, à la ségrégation, à l’esclavage et à d’autres formes
d’exploitation. L’essentialisme psychologique6 est la croyance que les catégories comme le sexe
et l’ethnicité reflètent des « essences naturelles » révélant la vraie identité, inaltérable et
immuable du groupe. L’essentialisme psychologique est souvent utilisé par ceux qui adhèrent à
des idéologies racistes, sexistes et nationalistes pour légitimer la supériorité de l’endogroupe et
pour amplifier négativement les traits des exogroupes qui sont dévalorisés à cause de leur
différence « fondamentale ».
5 Pour en savoir plus, consultez le Petit guide pédagogique pour La leçon de discrimination, sur le site curio.ca, p. 16-17. 6 Pour en savoir plus, consultez le Petit guide pédagogique pour La leçon de discrimination, sur le site curio.ca, p.10.
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Par ailleurs, le stigmate7 est une caractéristique associée à des traits négatifs qui font en
sorte que ceux qui le possèdent subiront une perte de statut et seront discriminés au point de faire
partie d’un groupe particulier des « eux » qui ont une mauvaise réputation et les « nous », les
normaux. Pierre-Luc a vécu la stigmatisation depuis la maternelle. Il déclare en 2006 : « Il me traite de
gros et je trouve ça fatiguant-là, c’est comme de la discrimination ». Le préjugé est véhiculé contre les
individus stigmatisés socialement à cause de leurs caractéristiques personnelles perçues comme
étant immuables : un physique ingrat (être laid), les traits physiques distinctifs (avoir les cheveux
roux, être gros), les troubles du comportement (déficit d’attention), la déficience intellectuelle
(être trisomique).
Les préjugés sont tenaces parce qu’ils sont souvent véhiculés par des personnes en
autorité. Dans « La leçon de discrimination », Annie Leblanc a déclenché les préjugés en
déclarant : « Je vois les grands qui sont très indisciplinés, qui font du bruit, ça ne me surprend
pas, c’est un fait, ils sont plus dérangeants. » Et elle enchaîne : « Comme les petits sont
supérieurs, ils vont avoir des privilèges particuliers aujourd’hui. » Benjamin, du groupe des
petits, endosse ces préjugés en disant que l’écriture d’un grand, qui écrit au tableau, est moins
propre.
Partie 2 : Une animation/discussion après le visionnement
Est-ce que vous-même ou un de vos proches avez été victime de préjugé? Si oui, c’était à
cause de quelles caractéristiques physique ou psychologique? Dans quelles circonstances?
Pour quelles raisons?
Si vous avez été victime de préjugé, quelles émotions avez-vous ressenties? Pouvez-vous
donner des exemples de préjugés?
Est-ce qu’un enseignant doit tout arrêter lorsque se manifeste une situation de préjugés
dans sa classe? Est-ce que l’enseignant doit sévir? Dans quelles conditions?
Qu’auriez-vous à suggérer pour débusquer les préjugés au quotidien?
En 2006, est-ce que Pierre-Luc a subi des préjugés à cause de son appartenance à un
groupe ou à cause de la stigmatisation en tant que gros? Expliquez pourquoi. Dans le
7 Pour en savoir plus, consultez le Petit guide pédagogique pour La leçon de discrimination, sur le site curio.ca, p. 10.
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documentaire de 2016, croyez-vous que Pierre-Luc continue de subir les méfaits de ce
qu’il a vécu en 2006?
Partie 3 : Des activités multidisciplinaires à proposer par l’enseignant
Avez-vous déjà eu l’occasion de débusquer les préjugés qui se cachent dans vos
manuels scolaires?
Dans les manuels de français ou d’anglais, quelles sont les origines culturelles ou de genre
des auteurs, des romanciers, des artistes, des inventeurs?
Dans les manuels de mathématique ou de sciences, quelles sont les origines ethniques des
personnages présentés : mathématiciens, chimistes, physiciens ou autres?
De quelles régions du monde viennent les personnages présentés? Dans quels contextes
sont-ils présentés? Dans quelles périodes historiques sont-ils présentés?
Quelle est la proportion de femmes par rapport aux hommes? Est-ce que des minorités
ethniques ou religieuses sont représentées? Vous identifiez-vous à ces personnages?
Sinon, quelles seraient les suggestions que vous pourriez faire à votre enseignant pour
bonifier et mettre à jour les contenus de manuels scolaires dans différentes disciplines?
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Nous vous invitons à former une équipe de discussion qui pourrait se dérouler comme
suit :
1) Vous vous regroupez en équipes de trois ou quatre personnes;
2) Vous choisissez des personnes qui n’ont pas nécessairement les mêmes points de vue
ou opinions que vous;
3) Vous choisissez un manuel scolaire dans la discipline de votre cours;
4) En vous inspirant des questions proposées ci-haut, vous partez à la recherche des
préjugés que les auteurs auraient laissé s’échapper dans le manuel;
5) Vous pouvez analyser les illustrations, les personnages, les exemples ou les thématiques
proposés par les auteurs;
6) Pour chaque préjugé que vous avez débusqué, vous pouvez proposer des correctifs pour
sortir les préjugés des manuels scolaires;
7) Vous partagez vos trouvailles avec les autres équipes de la classe. Cette activité peut
être adaptée aux exigences des programmes officiels de toutes les matières scolaires.
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ACTIVITÉ 3
LA DISCRIMINATION, UN PHÉNOMÈNE PERSISTANT
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ACTIVITÉ 3 : LA DISCRIMINATION, UN PHÉNOMÈNE PERSISTANT
Partie 1 : Une réflexion avant le visionnement
La discrimination est un comportement négatif dirigé contre une personne qui reflète une
attitude défavorable uniquement fondée sur l’appartenance à un groupe différent. Aux États-Unis,
en 1970, Jane Elliott, dans le documentaire « The eye of the storm », a divisé sa classe d’élèves
blancs de troisième année du primaire en deux groupes : les élèves aux yeux bleus et les élèves
aux yeux bruns. Le premier jour, les élèves aux yeux bleus étaient valorisés, mais le lendemain,
c’était au tour des élèves aux yeux bruns d’être valorisés. Les résultats de l’expérience
démontrent que le groupe valorisé a discriminé le groupe dévalorisé.
En 2006, « La leçon de discrimination » a démontré que les élèves du groupe valorisé ont
aussi discriminé les élèves dévalorisés. Au Québec comme aux États-Unis, les élèves, qui avaient
subi la discrimination au premier jour, ont fait subir de la discrimination, au deuxième jour, aux
élèves de l’exogroupe dévalorisé. En d’autres mots, les élèves québécois francophones blancs de
2006 se sont comportés comme les élèves anglophones blancs des États-Unis de 1970. Ces
résultats obtenus dans deux contextes culturels différents et à des époques différentes illustrent
l’universalité et l’intemporalité de la discrimination. Ainsi, les individus stigmatisés 8 ou les
groupes dévalorisés le sont souvent par le hasard de l’appartenance à une catégorie « mal aimée »
à une époque ou dans un contexte culturel donné. « La leçon de discrimination » est efficace
comme outil pédagogique parce qu’elle permet à l’auditoire d’aujourd’hui de comprendre qu’une
8 Pour en savoir plus, consultez le Petit guide pédagogique pour La leçon de discrimination, sur le site curio.ca, p. 10.
« Avant, on écœurait les personnes, mais on a arrêté depuis qu’on a vécu l’expérience
… Avant, tout le monde le discriminait [Pierre-Luc]. Mais maintenant, quand il y a
quelqu’un qui le discrimine, on est avec lui, on leur dit de pas faire ça. » (Jimmy, 2006)
« À Sherbrooke, j’ai rencontré d’autres formes de préjugés. L’ambiance était différente. Il a beaucoup,
beaucoup de discrimination. J’avais l’impression qu’on faisait un reset. J’essaie de l’arrêter, mais pas
toujours de la bonne façon … J’ai encore les mêmes valeurs de respect et de justice. [Le plus petit de la
classe (David) protégeait le plus grand (Pierre-Luc)] (David, 2016)
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catégorisation absurde « grand/petit » et la valorisation des uns par rapport aux autres sans raison
objective sont suffisantes pour déclencher les préjugés et la discrimination entre les deux groupes
d’élèves.
Dans le documentaire « La leçon de discrimination – 10 ans plus tard –», certains jeunes
ont révélé qu’ils ont subi des situations discriminatoires entre la troisième année du primaire et la
fin du secondaire ou en ont été témoins, ce qui nous amène à comprendre trois types de
discrimination : l’individuelle, l’institutionnelle et la systémique.
La discrimination individuelle est un comportement négatif contre une personne
particulière fondé sur son appartenance à un exogroupe dévalorisé, souvent minoritaire. La
discrimination individuelle peut avoir lieu dans des situations privées comme une discussion lors
d’un repas, dans une soirée entre amis, dans une rencontre de famille. Cette discrimination peut
aussi avoir lieu entre des élèves en classe ou dans la cour d’école, entre des employés au bureau,
dans les commerces, dans les restaurants et dans la rue.
La discrimination institutionnelle renvoie au système de lois et de règlements d’un
gouvernement, d’une entreprise ou d’une organisation publique qui institutionnalise le traitement
inégal de certains groupes dévalorisés par rapport au traitement dont jouissent des groupes
avantagés (refuser d’embaucher des minorités visibles à certains postes).
La discrimination systémique révèle que, même si les pratiques institutionnelles d’un
gouvernement ou d’une entreprise touchent également tous les individus, le système engendre des
conséquences involontaires qui peuvent nuire à certaines personnes, en raison de leur
appartenance à des groupes défavorisés (femmes, minorités visibles), ou des possibilités
d’emplois (test d’embauche biaisé culturellement). Il n’y a pas si longtemps, les employeurs
autorisaient le même nombre de jours de congé à tous leurs employés, hommes comme femmes.
Les femmes employées qui étaient enceintes devaient prendre plus de jours de congé avant et
après l’accouchement, et ce à leurs frais. Souvent, au retour, ces femmes avaient perdu des
occasions de formation professionnelle ou des promotions, réduisant d’autant leur rémunération
par rapport à celles des hommes, qui eux n’avaient pas eu à prendre de tels congés sans solde.
Bien que le traitement des hommes et des femmes soit égal, le résultat était inéquitable, puisqu’il
désavantageait toujours les femmes.
De nombreux pays ont adopté des constitutions ou des chartes de droits et de libertés,
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ainsi que des lois afin de prohiber les discriminations institutionnelle, systémique et individuelle.
Cependant, à l’usage, les mesures légales contre les discriminations institutionnelle et systémique
s’avèrent plus efficaces que celle contre la discrimination individuelle, plus difficile à prouver
dans le système juridique.
En divisant sa classe en deux groupes, en valorisant un groupe comme supérieur à l’autre
et en donnant des privilèges à un groupe, Annie Leblanc a créé une discrimination institutionnelle
dans sa classe. Comme prévu, les élèves du groupe valorisé ont discriminé les élèves du groupe
dévalorisé. Par contre, certains élèves ont contesté la structure de discrimination institutionnelle
établie par Annie.
Le documentaire de 2016 révèle que trois élèves avaient pris position pour défendre
l’égalité et pour contester la situation de discrimination qu’avait imposée Annie Leblanc à ses
élèves en 2006.
Pour preuve, Sabrina qui a dit : « J’en ai pas besoin de ces privilèges, c’est correct comme ça. »
Aussi, Jérémie projette de dénoncer son enseignante à la directrice de l’école pour avoir
instauré la discrimination institutionnelle entre les grands et les petits de sa classe. Enfin, David,
qui depuis 2006 a déménagé à Sherbrooke, constate que, dans son nouvel établissement scolaire,
toutes les raisons sont bonnes pour discriminer, que ce soit l’accent ou la religion. Il continue à
promouvoir des valeurs d’égalité, de respect et de justice en évitant les jugements trop hâtifs.
QUESTION : Selon vous, Sabrina, Jérémie et David sont-ils des champions de la
contestation d’une structure discriminatoire injuste?
Partie 2 : Une animation/discussion après le visionnement
Est-ce que vous-même ou un de vos proches avez été victime de discrimination? Si oui,
quelles en sont les raisons? Dans quelles circonstances : individuelle, institutionnelle ou
systémique?
Si vous avez été victime de discrimination, quelles émotions avez-vous ressenties?
Pouvez-vous donner des exemples de discrimination?
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Est-ce qu’un enseignant doit tout arrêter lorsque se manifeste la discrimination dans sa
classe? Est-ce que l’enseignant doit sévir? Dans quelles conditions?
Donner des exemples de discrimination individuelle, institutionnelle et systémique que
vous, vos proches ou vos parents ont vécus.
Y a-t-il des groupes qui manifestent plus de discrimination que d’autres?
Avez-vous déjà fait de la discrimination comme membre de votre équipe sportive?
Comme élève dans un travail d’équipe en classe à l’école, au cégep ou à l’université?
Comme employé dans votre équipe de travail? Comme sympathisant de votre parti
politique? Comme Québécois à l’égard des immigrants ou des autres groupes
linguistiques au Canada?
Partie 3 : Des activités multidisciplinaires à proposer par l’enseignant
Nous vous invitons à faire une recherche sur Internet seul ou avec un de vos amis. Recherchez des
études de cas qui décrivent des situations de discrimination individuelle. Expliquez-en les
circonstances. Recherchez des études de cas qui décrivent des situations de discrimination
institutionnelle et systémique ici ou ailleurs dans le monde. Êtes-vous en mesure d’expliquer les
méfaits de ces pratiques pour les employés dévalorisés? Recherchez des études de cas qui
décrivent des situations de discrimination systémique. Pouvez-vous expliquer les effets pervers
que pourraient subir les victimes ou les minorités vulnérables?
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ACTIVITÉ 4
CONTRER L’INTIMIDATION ET LA VIOLENCE
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ACTIVITÉ 4 : CONTRER L’INTIMIDATION ET LA VIOLENCE
Partie 1 : Une réflexion avant le visionnement
Des recherches démontrent que les interactions sociales jouent un rôle stabilisateur ou
destructeur pour les jeunes, en particulier s’ils vivent du stress sur le plan émotionnel. Elles
démontrent également que les élèves tendent à se dépasser lorsqu’ils considèrent que les
enseignants se soucient d’eux, ont des attentes concernant leurs apprentissages et fournissent le
soutien essentiel à leur réussite. Pourtant, l’intimidation et le harcèlement, qui sont très fréquents
dans les écoles, peuvent affecter la réussite scolaire des victimes. L’intimidation suppose un
déséquilibre des forces : une situation où un agresseur s’en prend à une victime visiblement plus
faible que lui.
La présence de l’agressivité ne suffit pas pour parler de la violence. L’agressivité n’est ni
bonne ni mauvaise parce qu’elle a permis à l’être humain de s’adapter, d’évoluer et de survivre.
La violence devient problématique lorsqu’elle compromet l’intégrité physique, morale,
psychologique et matérielle des autres. La violence est le résultat d’un conflit qui met en cause
non seulement deux individus, mais aussi d’autres éléments contextuels qui peuvent contribuer à
exacerber la violence vécue par les jeunes. Ces contextes sont la famille, l’école, les pairs, la
« Maintenant, quand je vois la discrimination, je ne la laisse pas passer. » (Sarah, 2006)
Les blagues sexistes, les sous-entendus racistes, Pascal Tisserant ne les tolère plus, même chez ses propres
collègues à l’Université de Lorraine. Il en paie le prix. « Alors, effectivement, vous passez pour le
castrateur. Vous passez pour celui qui n’a pas d’humour. Tant pis, je m’assume. »
(Pascal Tisserant, 2016)
« On reproche beaucoup la passivité des gens. Ils ne disent rien. On ne réagit pas à une insulte, donc, finalement, on la valide ... C’est à ce moment critique du développement des élèves qu’il faut leur ouvrir les esprits et La Leçon de discrimination a permis ça. La conséquence de leurs actes peut engendrer quelque chose de plus grave, importante. Je ne laisse pas passer une insulte que j’entends dans la classe. Je préfère arrêter ma classe et on va en parler. » (Valérie Metz, enseignante à Metz, France, 2016)
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fratrie, les conditions de vie, la pratique des adultes, les gangs de rue. Il y a trois types de
violence : physique, psychologique et instrumentale.
La violence physique est perceptible lors de bagarre entre élèves à l’école. Elle peut se
produire sur le chemin entre l’école et la maison, avoir lieu dans l’intimité des relations entre
élèves et dans les relations plus intimes des couples. La gravité de l’agression physique varie en
fonction des moyens utilisés par l’agresseur, soit l’intensité de la force physique ou l’utilisation
d’armes ou d’objets dans le but de compromettre l’intégrité de l’autre. La violence sexuelle est à
la fois physique et psychologique.
De plus, la violence psychologique se manifeste par l’usage d’insultes, de menaces, de
tromperies ou de tentatives de contrôle visant à bouleverser et à compromettre le bien-être de
l’autre. Elle s’exprime par la raillerie, le mensonge, les taquineries, les moqueries, mais aussi
dans toute communication d’une personne ou d’un groupe qui cherche à faire savoir à un tiers
qu’il est mauvais ou qu’il est dévalorisé. La violence psychologique n’est pas seulement verbale.
Elle peut être communiquée par des comportements visant à ignorer, à éviter, à exclure, à rejeter
ou à bannir une personne d’un groupe ou d’un espace social donné : ostracisme physique, social,
défensif et inconscient. Le commérage et la médisance sont aussi des formes de violence
psychologique.
Enfin, la violence instrumentale est une action volontaire par laquelle l’agresseur brise et
détruit l’œuvre ou l’objet d’un autre ou encore s’approprie ou tente de s’approprier cet objet,
l’œuvre ou l’espace occupé par un autre individu, sans qu’il y ait contact physique entre
l’agresseur et la victime. À l’école, toute forme de vol est de la violence instrumentale, mais elle
correspond aussi à toute forme d’acte visant l’appropriation et le contrôle des ressources
physiques, humaines ou liées au savoir.
Quel est le lien entre ces formes de violence et l’intimidation? L’intimidation est une
forme de violence spécifique. C’est une violence proactive, car elle est un acte non provoqué par
autrui et amorcé par l’agresseur, un acte intentionnel par lequel un ou plusieurs individus
exposent, de manière répétée et sur une longue période, une même personne à des actions
négatives. L’acte d’intimidation peut être physique, instrumental et plus souvent psychologique.
Dans les écoles, on associe grandement l’intimidation au taxage ou au racket, soit l’extorsion de
biens ou de droit par l’utilisation de la force ou de la menace. Sur le plan juridique, le taxage est
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un vol qualifié : agressivité instrumentale. Les méfaits de l’intimidation sont de mieux en mieux
connus et, récemment, une progression de l’intimidation par les réseaux sociaux a été observée.
Les analyses récentes révèlent que les intimidateurs, les victimes et les témoins doivent
tous être considérés pour contrer la discrimination. Dans le cas de « La leçon de discrimination –
10 ans plus tard – », le rôle joué par les intimidateurs est mis en évidence. Du côté des
intimidateurs, Benjamin dit en 2016 que « c’est la première fois que je me faisais écœurer. Je ne
suis jamais fait écœurer […] Aujourd’hui, je me trouve cave. Je ne voulais pas faire mal ».
Jimmy ajoute « c’est pas pour être méchant … Les trois, on était la petite clique. On écœurait
tout le monde … c’était un peu l’effet de gang ». Michaël dit : « en plus au secondaire, je suis
tombé plus baveux ... C’est trop facile. C’est un réflexe … des jeunes finissent par te dire que tu
es trop gossant et qui te font réaliser que tu es allée trop loin. » Selon Alexandra, « les gars
[Benjamin, Michael et Jimmy] ont toujours été baveux, ils étaient bons en sport, les tops dans la
classe, ça toujours été comme ça ».
Du côté des victimes, Pierre-Luc révèle, en 2016, qu’il ne se rappelle que des moments
négatifs. Même s’il aimait l’école et qu’il aimait apprendre, il ne voulait « pas aller à l’école,
entrer dans l’autobus ». L’expérience a été un soulagement pour lui, car il dit : « il y avait enfin
dans la classe quelqu’un qui vivait la même sensation que moi, ils avaient enfin compris ». Pour
Pierre-Luc, les mois qui ont suivi l’expérience ont été une période de grâce, une pause, parce que
les élèves de la classe avaient arrêté de l’insulter. Sabrina ajoute, en 2016, qu’il était normal que
Pierre-Luc ait le goût de profiter des privilèges lors de l’expérience de 2006, car pour les élèves
de la classe, la discrimination avait été subie durant une journée, mais pour Pierre-Luc, c’était son
quotidien.
Du côté des témoins, une petite rébellion avait émergé en 2006. Naomie avait écrit une
lettre de protestation qui s’était presque rendue à la direction. Jérémie se remémore en 2016 que
les élèves adoraient leur enseignante et qu’un matin « ils arrivent en classe et ce n’est plus du
tout ça. Tu peux pas laisser aller ça et dire c’est pas grave ça va aller. Il faut que ça arrête ». Il
se demande si leur lettre aurait eu un impact s’il avait poussé leur démarche jusqu’au bout. De
son côté, David n’acceptait pas que Pierre-Luc, son meilleur ami, se fasse « écœurer ». Il allait
souvent voir ceux qui « écœuraient » Pierre-Luc, il se battait pour lui et il leur demandait
d’arrêter. Pierre-Luc en témoigne : « c’est David qui m’a permis de passer au travers de ça ».
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Toujours en 2016, Benjamin finit par avouer que « si tout le reste de la classe avait dit : c’est
épais quand tu fais ça, là ç’aurait été différent, car je me serais senti tout seul ».
Annie Leblanc constate : « Ils se sont retrouvés dix ans après et les rôles étaient
pratiquement les mêmes. Chacun a repris sa place d’il y a dix ans … Les discriminateurs, d’une
part, sont honnêtes, même un peu durs envers eux-mêmes à certains moments, ils ne se sont pas
rendu compte de l’impact à long terme, ils ont un peu banalisé ce qui était arrivé. » Selon elle, ils
ont exprimé une « certaine déresponsabilisation comme s’ils ne s’étaient pas mis à la place de
Pierre-Luc ». Elle croit que Pierre-Luc aurait eu besoin « d’excuses sincères ». Benjamin avoue
avoir réalisé et avoir été marqué par le fait que 10 ans plus tard, Pierre-Luc en était encore
affecté.
Ce qui amène Annie Leblanc à dire : « Il faut intervenir auprès des victimes, des
intimidateurs, mais aussi des témoins… Comme éducateur, il faut essayer de prendre tous les
moyens possibles pour faire changer les situations dans lesquelles un enfant est diminué,
fragilisé, pas bien dans sa peau. Un geste pour faire une différence dans la vie des enfants. »
(Annie Leblanc, 2016)
Partie 2 : Une animation/discussion après le visionnement
Est-ce que vous-même ou un de vos proches avez été victime de violence physique?
Instrumentale? Psychologique? Si oui, c’était à cause de quelles caractéristiques? Dans
quelles circonstances? Pour quelles raisons?
Quel est le lien entre ces formes de violence et l’intimidation? Est-ce que vous-même ou
un de vos proches avez été victime d’intimidation? Actes d’intimidation physique?
Instrumental? Psychologique?
Quelles suggestions proposeriez-vous pour aider les intimidateurs à réaliser l’impact de
leurs gestes?
Quelles suggestions proposeriez-vous pour aider les victimes à regagner leur estime de soi
et apprendre à se défendre?
Quelles suggestions feriez-vous pour aider les témoins à intervenir pour défendre les
victimes et ainsi contribuer à la cohésion sociale dans les classes, dans les familles et dans
les milieux de travail?
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Partie 3 : Des activités multidisciplinaires à proposer par l’enseignant
Nous vous invitons à faire un travail écrit ou à rédiger un journal de bord relatant vos
observations quotidiennes sur les situations d’intimidation et de violence dont vous êtes témoin à
l’école ou ailleurs sur une période de 5 à 6 jours. Vous pouvez aussi enregistrer vos observations,
vos commentaires ou vos réflexions avant de les compiler par écrit. Vous pouvez les proposer au
comité de diffusion de la radio étudiante. Vous pouvez aussi les présenter à un enseignant
responsable d’une activité de discussion ou au comité de lecture du journal étudiant de votre
école
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ACTIVITÉ 5
LES MÉFAITS DE LA DISCRIMINATION
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ACTIVITÉ 5 : LES MÉFAITS DE LA DISCRIMINATION
Partie 1 : Une réflexion avant le visionnement
Les recherches en Amérique et en Europe révèlent que les individus régulièrement
victimes de stigmatisation et de discrimination subissent une perte de bien-être significative. Ils
souffrent de détresse psychologique incluant la dépression, l’anxiété et les émotions négatives
récurrentes. Ces victimes ont le sentiment d’être en perte de contrôle de leur vie, développent une
estime de soi négative et ressentent que leur vie est de moins en moins satisfaisante. Cette
détresse psychologique est ressentie plus intensément par les enfants que par les adultes, ces
derniers ayant appris par expérience à mieux se prémunir contre les torts causés par la
stigmatisation et la discrimination. En général, les effets néfastes de la discrimination sont plus
intenses pour les membres des minorités défavorisés que pour les membres des groupes
avantagés qui peuvent mieux se protéger, car ils ont les ressources financières nécessaires pour
s’offrir les services de soutien psychologique et physique pour contrer ces méfaits.
Bien que les pertes de bien-être attribuables à la discrimination soient mal vécues par les
minorités ethniques, les effets néfastes d’être personnellement stigmatisé sont plus intenses pour
les personnes souffrant de maladie mentale, les individus ayant un handicap physique, les
personnes obèses et les homosexuels. Les victimes de ce genre de stigmatisation se sentent
souvent isolées et fragiles en tant qu’individus sans le soutien d’un réseau de solidarité constitué
d’un groupe minoritaire partageant la même identité ethnique, linguistique, raciale ou religieuse.
Les recherches démontrent que les effets néfastes de la discrimination et de la stigmatisation sont
plus soutenus pour les membres de minorités qui sont systématiquement victimes de
discrimination que pour les individus qui ne subissent que rarement la discrimination.
Les recherches épidémiologiques révèlent que les conséquences néfastes de la
discrimination vont même jusqu’à entraîner une détérioration de la santé physique. Les
recherches récentes démontrent que les victimes de stigmatisation et de discrimination
développent un sentiment d’impuissance et de stress chronique qui les rendent plus susceptibles
« La discrimination, ça sert à rien, ça sert seulement à faire pleurer les gens et les rendre en colère…
J’ai vécu ça, alors… c’est pas une blague… ça fait vraiment mal dans le cœur. » (Pierre-Luc, 2006)
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de souffrir d’hypertension, de taux de cholestérol élevé, de maladie cardiaque et d’obésité. Entre
autres, ces résultats ont été obtenus chez les Afro-Américains aux États-Unis et chez les
immigrants pakistanais musulmans en Grande-Bretagne ayant subi l’islamophobie et la
discrimination depuis plus de cinq années, à la suite des attentats terroristes à New York et à
Londres.
Au début du documentaire de 2006, Annie Leblanc observe : « Chaque année, ou
presque, dans chaque groupe, ou presque, il y a un enfant qui est discriminé dans une classe ...
Parfois c’est des raisons physiques, mais il y a d’autres fois ce n’est pas des raisons physiques.
Ça peut être la pauvreté, ça peut être un enfant qui est efféminé, mais c’est rare qu’il n’y ait pas
un enfant dans un groupe qui est pris comme bouc émissaire. »
Annie Leblanc est évidemment consciente des inconforts qu’ont subis ses élèves durant
l’expérience en 2006. Idéalement, on considère que les inconforts et les inconvénients subis par
les élèves doivent être compensés soit par le potentiel des connaissances scientifiques acquis, soit
par l’apprentissage obtenu grâce au visionnement de l’expérience par les milliers d’élèves et
d’adultes qui ont visionné le documentaire à travers le monde depuis dix ans. Elle souhaite
ardemment que ses élèves apprennent quelque chose de significatif et elle veut les outiller pour la
vie. L’amour qu’elle prodigue à ses élèves pourrait être qualifié de « tough love ».
Les témoignages des élèves en 2016 suggèrent que finalement les inconforts subis par les
élèves lors de l’expérience étaient relatifs. Maude déclare : « Ça dure deux jours, ç’a été très
court, la fin de semaine d’après, on l’avait oublié. » Sarah affirme que : « Si je n’avais pas la
vidéo pour me rappeler [l’expérience], ça m’aurait pas marqué » et Alexandra avoue que :
« Personnellement, je ne me rappelle pas du reportage. » Naomie, qui avait beaucoup pleuré
durant l’expérience, considère qu’elle est : « une richesse, moi ça m’a marqué de la bonne façon.
D’habitude discrimination et intimidation, ça se fait dans l’ombre parce que c’est tabou, mais là
on a montré cela au grand jour. Pour les personnes que ça choque, c’est dommage, mais c’est ça
la vie. Il n’y avait pas de meilleures façons pour apprendre ça. Ça me donne une envie de
changer le monde ».
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Partie 2 : Une animation/discussion après le visionnement
Qui sont mes élèves ou participants à l’atelier?
Quelles sont leurs caractéristiques personnelles?
Y a-t-il des élèves issus de l’immigration? D’où viennent-ils?
Y a-t-il des participants ou élèves de minorités ethniques?
Y a-t-il des élèves qui ont un handicap physique ou mental?
Quel âge ont-ils? Où vivent-ils? Quelle(s) langue(s) parlent-ils? Quelle religion
pratiquent-ils?
Avez-vous cherché à savoir qui a déjà vécu de la discrimination?
Sentez-vous des tensions dans votre classe? Sentez-vous des tensions entre des groupes
d’élèves ou entre des individus? Avez-vous remarqué s’il y a un ou des boucs émissaires
dans la classe? Y a-t-il des jeunes qui se sentent dévalorisés ou rejetés par l’ensemble de
la classe ou par des factions rivales de la classe?
Partie 3 : Des activités multidisciplinaires à proposer par l’enseignant
Nous vous invitons à trouver des pistes de solution pour débusquer, réduire et contrer les
méfaits de la discrimination, et ce, dans toutes les disciplines scolaires. Quelles pistes de solution
proposeriez-vous pour débusquer, réduire et contrer les méfaits de la discrimination dans le cours
d’éducation physique, de musique? D’arts visuels? De sciences humaines? De sciences? De
mathématiques? De langue? Et autres? Puisque les interactions entre jeunes influencent autant
leur vie personnelle que leur vie scolaire, cette activité permet de comprendre que l’établissement
d’un climat de classe et d’école sécuritaire, chaleureux et exigeant contribue à l’harmonie et à la
cohésion sociale des élèves tout en favorisant la réussite scolaire.
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