8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
1/48
Mal CORMIER
Programme Master 2 Mdias
Management des mdias
MONOGRAPHIE DE RECHERCHE
Rseaux sociaux politiques
Comment les partis politiques franais utilisent le mdia
Internet pour rinventer la communication politique laide
des rseaux sociaux ?
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
2/48
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
3/48
1
Remerciements
Je souhaite adresser mes plus vifs remerciements Delphine Saurier, ma tutrice, qui
ma suivie et conseille durant toute lanne dans la prparation, llaboration et
lcriture de cette monographie.
Un remerciement particulier galement Jean-Philippe Raffard et Eric Warin,
responsables des Masters mdias ainsi qu lensemble du corps enseignant de
Sciencescom.
Jexprime toute ma gratitude tous les professionnels qui mont fait confiance, qui
mont aid mieux comprendre les enjeux actuels du secteur et toutes les personnes
qui ont particip mon enqute en ligne.
Merci pour tout le temps que vous avez su maccorder.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
4/48
2
Sommaire
Introduction p. 3
Premire partie : usage et influence dInternet dans la politique p. 6
Deuxime partie : les rseaux sociaux politiques en France p. 18
travers deux exemples, CooPol et Crateurs de Possibles.
Conclusion p. 33
Bibliographie p. 36
Annexes p. 38
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
5/48
3
Introduction
Lhistoire des rseaux sociaux politiques commence le 4 janvier 2007. Le jour o Barack
Obama parvient convaincre Chris Hugues, lun des fondateurs de Facebook1, de le rejoindre
dans sa campagne en lui confiant une mission : mettre en place un rseau social pour
rassembler et coordonner les supporters du candidat dmocrate.
Du haut de ses 25 ans, Chris Hugues est lorigine de la cration dun site web,
mybarackobama.com, qui a rvolutionn la communication politique. Vritable moteur de la
campagne, cette plateforme virtuelle a permis aux supporters dObama de se rassembler en
dizaines de milliers de groupes, de lever des fonds pour un montant total de 30 millions de
dollars et de grer quelques 200 000 vnements et rassemblements rels2. Il a galement
offert la possibilit, pour chaque militant, de sinvestir et de jouer un rle dans cette campagne.
Cest la premire fois, dans lhistoire de la communication politique, quun candidat a
autant utilis les nouvelles technologies, et notamment Internet, dans le cadre dune campagne
lectorale.
Une stratgie innovante et couronne de succs qui a donn des ides aux politiques
franais dans loptique des lections prsidentielles de 2012.
Un secteur dans lequel, certains partis politiques, staient dj aventurs. La France fait
mme, avec les Etats-Unis, figure de pionnire dans lutilisation dInternet des fins politiques.
Dj, pour les lections municipales de 2001, des candidats avaient mis en place des sites web
pour appuyer leur campagne. Mais cest surtout Sgolne Royal, en 2007, qui ouvrira la voie
des rseaux sociaux politiques avec la mise en place du site Dsirs davenirs3 pour les
lections prsidentielles. Un site bas sur la dmocratie participative, rassemblant des militants
de gauche et offrant la possibilit dtre force de proposition pour son programme prsidentiel.
Mme si dans la ralit, le site a souffert de nombreux dfauts et na pas t exploit
son maximum par la candidate, il aura marqu un tournant dans lhistoire de la communication
politique franaise.
Dun point de vue plus gnral, les rseaux sociaux sont actuellement un vritable
phnomne de mode mondial4. Du ct de la Toile franaise, environ 15 millions de franais
seraient actuellement inscrits sur Facebook5. Ce qui signifie que 23% des internautes franais
seraient prsents sur le rseau social amricain. Certains spcialistes estiment mme que
Facebookdevrait rassembler prs de 20 millions de franais dici fin 20106.
1Avec Mark Zuckerberg et Dustin Moskovitz.
2Source ReadWriteWeb US.
3http://www.desirsdavenir.org La structure du site a volu depuis 2001.
4 Du moins dans les pays dvelopps o lon recense 67% des inter nautes du monde inscrits sur au moins un
rseau social soit plus dun milliard dutilisateurs. Source : Strategy Analytics.5
http://www.displayit.fr/2010/01/facebook-80-des-15-24-ans-francais-sont-inscrits/6
http://fr.mashable.com/2010/01/11/facebook-france-15-millions-de-membres
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
6/48
4
Les partis politiques franais ont donc bien compris que, dsormais, pour tre visible sur
la Toile, il est impratif dtre prsent sur ces nouveaux outils numriques. Les internautes
franais ont ainsi vu natre en janvier 2010, les rseaux sociaux politiques du PS, La CooPol7,
et de lUMP, Les Crateurs de Possibles8. Avec pour objectif, long terme, dans les deux
camps : les lections prsidentielles de 2012.
Lutilisation des rseaux sociaux est un enjeu important pour la classe politiquefranaise. Ainsi, ils esprent redonner got la politique aux franais comme la pu faire Barack
Obama lors des lections prsidentielles amricaines. Selon une tude de l'American
University9, 153 millions de citoyens amricains, soit 75 % de la population totale ligible, se
sont inscrits sur les listes pour ces lections. Cest le plus grand pourcentage dinscrits depuis
que les femmes ont acquis le droit de vote en 1920. Daprs cette mme tude, les Dmocrates
ont gagn prs de trois millions de nouveaux lecteurs, tandis que l'enregistrement du ct
rpublicain a diminu de 1,5 millions de personnes10. Bien quil faille relativiser le lien de cause
effet entre la cration dun rseau social et lengouement populaire autour de cette
campagne lectoral, Internet a jou un rle cl, notamment auprs des jeunes amricains.
Ct franais, la cte de la classe politique auprs des lecteurs est au plus bas. Une
enqute TNS Sofres de Juillet 201011 montre que les deux figures politiques les plus
importantes du gouvernement, Nicolas Sarkozy et Franois Fillon, atteignent tous les deux des
records dimpopularit : 28 % de confiance pour le Prsident de la Rpublique contre 35 % pour
le Premier Ministre. Plus grave encore, un sondage effectu par Sciences Po et le CEVIPOF 12
en dbut danne 2010 (Centre de Recherches Politiques de Sciences PO) montre que 67%
des franais nont confiance dans aucun parti politique pour gouverner le pays. Il y a 10 ans,
cette crise de confiance touchait moins de 45% des franais. Preuve de ce dsintrt croissant
des franais envers la politique, le taux dabstention record de quasiment 50 %13 lors du
second tour des lections rgionales de mars dernier. Tous les moyens sont bons, donc, pour
tenter de reconqurir et sduire llectorat franais.
Le phnomne des rseaux sociaux politiques en France est tout rcent. Il ny a pas
encore eu dtudes sur le sujet contrairement aux Etats-Unis o la plateforme mis en place par
Barack Obama a t lobjet de nombreuses analyses et ouvrages.
Il existe nanmoins de nombreux chercheurs qui se sont penchs sur les rseaux
sociaux gnralistes de type Facebook ou Twitter. La plupart de ces tudes consistent en
diffrentes approches pour mieux comprendre lengouement autour de ces sites web, les
pratiques et les usages qui en sont fait et toutes les questions qui en dcoulent autour des
limites entre vie prive et vie publique. Plusieurs avis et visions se sont penchs sur la
question : philosophes, sociologues, experts du web, conomistes, politiques
7http://www.lacoopol.fr/
8http://www.lescreateursdepossibles.com/
9Universit prive situe Washington aux Etats-Unis.
10http://www.ipsnouvelles.be/news.php?idnews=10029
11http://www.tns-sofres.com/points-de-vue/E5DD9104BCB14F59AA304F1B8DE62D9D.aspx
12http://www.cevipof.com/fr/barconf2/result/
13http://www.lefigaro.fr/politique/2010/03/21/01002-20100321ARTFIG00024-regionales-les-francais-aux-urnes-
pour-le-2e-tour-.php
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
7/48
5
Pour mes recherches, je me suis appuy sur des ouvrages sur la communication et sur
la politique. Notamment les travaux de Pierre Merckle, Thierry Crouzet, Jean-Philippe Maarek,
Arnaud Mercier, Dominique Wolton et Philippe Riutort.
Jai galement pu nourrir ma rflexion avec les nombreux changes de courriels avec
des blogueurs spcialiss sur ce sujet.
Dans le cadre de cette monographie, nous reviendrons tout dabord sur les dates
marquantes de lusage dinternet dans la communication politique. De lutilisation simpliste et
accessoires des sites web lors des municipales de 2001 la campagne rvolutionnaire et
innovante de Barack Obama. Nous analyserons comment le candidat dmocrate a brillamment
russi placer internet au curde sa campagne et comment il a ainsi pu redonner un second
souffle la politique amricaine.
Nous nous concentrerons ensuite sur la cration de deux rseaux sociaux politiques
franais : CooPolet Crateurs de Possibles. Nous essayerons de comprendre ce qui a pouss
les partis politiques franais se lancer dans cette aventure, nous analyserons la manire dont
sont construits les deux sites web, ce qui les rapproche et les spare, quels usages en font lesinternautes et ce qui les diffrencie des rseaux sociaux gnralistes.
Pour mieux comprendre le fonctionnement de ces deux rseaux sociaux je me suis
inscrit sur les deux sites, jai test les diffrentes fonctionnalits et je suis entr contact direct
avec dautres utilisateurs.
Le but de cette tude est de mettre plat et danalyser toutes donnes et faits
concernant les rseaux sociaux politiques. Doublier les ides reues, les prjugs et de
pouvoir au final se faire une opinion bien prcise sur le sujet. Les grandes pistes vous seront
donc donnes pour essayer de percer ce nouveau phnomne et den comprendre les
diffrents enjeux.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
8/48
6
Premire partie : usage et influence dInternet dans la politique
En revenant sur quatre moments cls de lutilisation du web des fins politiques, nous
verrons comment la technique et les usages ont volu. Quatre dates pour mieux comprendre
le poids qua pris Internet dans la communication politique.
1. 2001 : la dmocratisation dInternet et les premires campagnes politiquesweb
Les premires offres Internet en France auprs du grand public dbutent en 1994. Mais
lquipement ncessaire et le cot lev des abonnements limitent le nombre dinternautes
franais 100 000 en 199614.
Cest partir des annes 2000, avec larrive du haut dbit et de nouveaux fournisseurs
daccs internet, qui proposeront des tarifs trs attractifs, que le nombre dabonns franais va
vraiment exploser. En janvier 2001, 17% des foyers taient connects Internet15.
Actuellement, on en recense 20 millions abonns au rseau, dont 288 000 lignes la fibre
optiques16.
Ds le dbut des annes 2000, Internet apparait comme un outil potentiellement puissant
dans nimporte quelle stratgie de communication. Cest donc tout logiquement que les
politiques sy intressent, en y voyant un nouveau terrain de conqute lectorale.
Mais dj avant 2000, la majorit des partis politiques franais avaient cr leur propre site
web officiel. Des sites que lon peut qualifier de vitrines17 car sans aucune interactions
possibles, rarement mis jour et proposant uniquement des informations institutionnelles et
pratiques.
Les premiers balbutiements dune campagne politique sur le web vont avoir lieu en mai2000 avec le rfrendum sur le quinquennat et le lancement du site quinquennat.net18 par
Valery Giscard dEstaing. Le site web proposait aux internautes de dialoguer et de dbattre via
un forum et un tchat, de les informer avec des vidos et de les sonder. Des fonctionnalits trs
innovantes si lon se replace dans le contexte de lpoque.
Mais cest vritablement avec la campagne des lections municipales de 2001 que les
premires exprimentations vont dbuter sur le web. Nous sommes des pionniers de
lInternet politique 19 expliquait Alain Madelin au lancement de son propre site web pour les
municipales, demlib.com. Un site qui innovait en matire de communication politique en prenant
la forme dun journal en ligne, un peu limage dun blog, avec la publication rgulire
dactualits et de billets dhumeur signs Alain Madelin et la possibilit pour chaque internaute
de ragir et de les commenter. Un site innovant en termes dinteractivit et de proximit avec
linternaute.
14Donnes IPSOS
15Enqute publie le 24 janvier 2001 par le mensuel informatique SVM
16Christophe Lagane, La France franchit les 20 millions d'abonns Internet sur www.silicon.fr, 5 mai 2010.
17Site informatif, sans aucune interactivit.
18Ce site web nest plus accessible.
19http://www.liberation.fr/politiques/0101358443-les-partis-surfent-dans-la-semoule
http://www.senat.fr/questions/base/2001/qSEQ010230844.htmlhttp://www.senat.fr/questions/base/2001/qSEQ010230844.html8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
9/48
7
A linverse, le parti socialiste na pas su (ou pas voulu) faire voluer son site internet
loccasion de ces campagnes municipales. Une mise en page classique prsentant les activits
du mouvement et noffrant aucune possibilit dinteractivit avec linternaute.
Une frilosit qui sexplique par la peur de lInternet, commente Jacqueline Costa-
Lascoux20, Le PS a toujours voulu maitriser son message idologique, or, pour eux, Internet
reprsente le capitalisme.
Si Internet reprsente une exposition mdiatique sans prcdent et une formidable
opportunit pour tout communiquant, au dbut des annes 2000, ce nouveau mdia fait peur.
Simposant peu peu dans la vie quotidienne des franais, Internet donne limage dun espace
public ou linformation est non maitrisable et circule trs rapidement. Une bonne raison de ne
pas y aller pour certains politiques qui veulent avant tout contrler le message diffus auprs
dun lectorat.
Dailleurs, il est amusant de constater quencore aujourdhui, dix annes plus tard, certains
politiques tiennent le mme discours vis--vis dInternet. Pour preuve, la dernire campagne de
sensibilisation lance par la CNIL sur les usages dInternet que certains journalistes ontdnonc comme une diabolisation du web21. Pour Jrmie Zimmermann, porte-parole de la
Quadrature du net22, "Les politiques instrumentalisentune peur irrationnelle de l'Internet car ilest vu comme un contre-pouvoir et cette sphre publique en rseau est impossible policer
comme un mdia traditionnel.
Au final, pour les municipales de 2001, 400 sites de campagne ont t crs, ce qui
reprsente environ 1% des listes prsentes en France.23Un chiffre peu lev qui sexplique
par le flou lgislatif autour de ces sites internet dans une priode lectorale. En effet, le cadre
lgislatif navait prvu aucune mention sur les sites web des candidats, les dates de mise enligne ou sur laccs pendant la priode de vote Un manque de clart qui a refroidi bon
nombre de candidats qui redoutaient des sanctions par la suite.
Parmi les sites web crs, une minorit ont fait preuve dinnovation en mettant en place des
outils dinteractivit entre internautes et candidats : tchat, forum, sondages en ligne, journal de
campagne, vidos, photos, documents tlcharger, mails, espace presse, liensNotamment
Bertand Delano, candidat socialiste la mairie de Paris, qui sest beaucoup investit
communiquer sur son site de campagne.
Au final, Internet naura jou quun rle trs mineur dans ces lections municipales. Avec 8
millions dinternautes en 2001, le web ne pouvait pas avoirsuffisamment de poids pour jouer unrle mobilisateur. Dautant que lapparition de nouveaux outils tels que les tchats et les forums
ntaient pas la porte de tous les novices de la Toile.
20Idem que 19.
21http://geekcestchic.blogs.nouvelobs.com/archive/2010/03/11/en-sarkozie-internet-fait-peur.html
22Organisme de dfense des droits et liberts des citoyens sur Internet.
23ETHUIN Nathalie et LEFEBVRE Rmi, Les balbutiements de la cyberdmocratie lectorale, Presses universitaires
de Strasbourg, p. 155-177
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
10/48
8
Les sites web mis en place ont surtout t considrs comme des gadgets, rarement mis
jour et peu en lien avec le reste de la campagne. Dailleurs, il suffit de regarder les budgets
allous aux sites pendant cette campagne pour comprendre le peu dintrt port par les
politiques. Par exemple, le site de campagne de Martine Aubry a cout 6 000 euros24, soit 10
jours de travail selon les tarifs actuellement pratiqus sur le march.
2. 2005 : Le pouvoir aux internautes, le fabuleux destin dEtienne Chouard.
Depuis 2004, le phnomne des blogs prend de lampleur en France. Ces pages web
personnels et personnalisables permettent de publier des billets ou des rflexions
chronologiquement sur nimporte quel sujet. Certains internautes anonymes, comme Loc
Lemeur, via son blog25, produisent du contenu trs pertinent de qualit professionnelle.
Rapidement, ces blogueurs prennent de limportance, sont cits par certains experts et
deviennent de vritables leaders dopinion et rfrences dans leur domaine.
Concernant la politique, lexemple le plus marquant a t celui dEtienne Chouard.Internaute anonyme, il a t propuls sur le devant de la scne mdiatique en quelques mois
grce des publications trs pertinentes depuis son site web personnel. Retour sur cette
histoire incroyable.
Le 29 mai 2005, rsultats du rfrendum sur le trait constitutionnel europen : 54,68 % des
franais26 votent NON la ratification. LEurope regarde la France avec svrit, le non est
arriv en tte alors que, aprs la ratification espagnole, tout le monde attendait un oui franc et
massif de lautre ct des Pyrnes.
Que sest donc til pass durant cette campagne lectorale alors que les sondages
annonaient ds 2004 le camp du OUI large vainqueur ? Comment lopinion publique,initialement favorable au TCE27 a fini par voter contre ? Un sondage datant de dcembre 2004
auprs de la population franaise28 annonce 70 % des franais en faveur de la ratification du
trait europen. Ce renversement de situation a permis de mettre en avant le rle cl et
linfluence dinternet dans le choix du vote final29.
Tout commence en dcembre 2004, Nice. Les chefs dEtat et de gouvernements
saccordent sur la ncessit de simplifier les textes europens. Ils se retrouvent un an plus tard
lors du conseil europen de Laeken et voquent la possibilit dune Constitution pour les
citoyens europens. Une convention prside par Valery Giscard dEstaing se met alors au
travail. Le 13 juin 2003, elle aboutit une premire version du trait, qui fut ensuite rvise pour
devenir le TCE. Adopt le 18 juin 2004 Bruxelles, ce texte doit encore passer une preuve :
tre approuv, soit par rfrendum, soit par voie parlementaire, dans chaque pays.
24LInternet en politique des Etats-Unis lEurope, Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg
25http://loiclemeur.com
26Source : site web du gouvernement franais.
27Trait Constitutionnel Europen
28Sondage ralise par Europa, http://ec.europa.eu
29Voire graphique annexe 1
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
11/48
9
Ds cette annonce, lassociation Democracy Watch International30 exige une ratification par
rfrendum pour que les citoyens puissent participer la dcision. Une demande soutenue par
97 membres de la convention prside par Valry Giscard dEstaing et par 300 ONG
europennes. Les chefs dEtat et de gouvernement ne les entendent pas vraiment : seuls dix
pays optent pour une ratification populaire. Du ct de la France, Jacque Chirac annonce le 14
juillet 2004 que les franais seront consults par rfrendum au deuxime trimestre 2005. La
campagne lectorale peut commencer.
Cest ce moment l quentre en scne Etienne Chouard. Originaire de Marseille, ce
professeur dco-gestion dans un lyce dAix-en-Provence se prpare comme 70 % des
franais voter en faveur de la ratification du trait europen sans avoir lu le texte en question.
Au mme moment, les partis politiques affichent leur position. UMP, UDF, Socialistes et
Verts se dclarent pour le TCE. A linverse, les partis des extrmes, gauche comme droite,
saffichent contre. Mais rapidement, les affaires se compliquent chez les partisans du oui et les
avis divergent. Laurent Fabius devient le chevalier du non chez les socialistes, sopposant
Dominique Strauss-Kahn.
Etienne Chouard coute attentivement les arguments de chaque camp mais ce nest
quaprs avoir lu les livres de Laurent Fabius, Une certaine ide de lEurope31, et de Raoul
Marc Jennar, Europe, la trahison des lites32 quil se dcide dtudier le texte europen de plus
prs.
Le 25 mars 2004, sur son site perso33, Etienne Chouard publie un texte dune trentaine de
pages34 dans lequel il dcortique le TCE et expose ses arguments en faveur du non. Pour plus
de visibilits, il envoie galement le document en pice jointe par mail la liste EcoGest qui
rassemble 3 000 professeurs dco-gestion, sa famille, ses amis et quelques journalistes. Ds
le lendemain, Etienne reoit de nombreuses rponses et ractions positives vis--vis de son
texte. La machine est lance, le texte se transmet de mail en mail. Au bout de quelques jours, il
reoit une centaine de mails de remerciements, dinsultes, de questionsLe texte fait ragir et
va prendre une autre dimension. Le phnomne de bouche oreille est en marche. Le 3 avril,
un membre de lassemble du parti communiste reprend le texte dEtienne Chouard dans son
discours et le cite en exemple. Le 4 avril, cest le site dinfos alternatives Rezo.netqui repre le
texte et le diffuse sur sa page daccueil. Sur son blog35, le romancier Martin Winckler insre les
arguments de Mr Chouard en complment dun article.
Le 6 avril, Daniel Schneidermann, alors animateur dArrt sur Images, mission de France
5, consacre un billet sur son blog36 sur Etienne Chouard. Les ractions et commentaires sont
nombreux, larticle est repris par de nombreux internautes.
Le 9 avril, le journal extrme gauche LHumanit publie dans son hebdo un article intitul
Et si Etienne Chouard faisait gagner le non 37. Deux jours plus tard, publius.fr, un site ddi
30Organisme humanitaire charg de vrifier sur les Droits de lHomme sont respects dans le monde.
31FABIUS Laurent, Un certaine ide de lEurope, Plon, 2004
32JENNAR Raoul Marc, Europe, la trahison des lites, Fayard, 2004
33http://etienne.chouard.free.fr
34http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Constitution_revelateur_du_cancer_de_la_democratie.pdf
35http://martinwinckler.com
36http://www.bigbangblog.net
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
12/48
10
lEurope, plutt favorable au oui, expose la dmonstration dEtienne. Le mme jour,
Schneidermann rcidive sur son blog, faisant du prof deco-gestion un hros : a devait
arriver, Etienne Chouard est une star !38.
Pendant ce temps, Jacques Chirac prpare la contre attaque. Il organise le 14 avril, sur
TF1, et sous la supervision de PPDA, une discussion autour de lEurope avec une cinquantaine
de jeunes. Largement en faveur du oui, le dbat ne laisse aucune place pour limprovisation. Lesoir mme, de nombreux internautes ragissent vivement sur leurs blogs ou sur des forums.
Le lendemain matin, dans Libration, un journaliste revient sur lvnement en se montrant
un inconditionnel dEtienne. Dans son article, Chirac-Chouard le vrai dbat39, il crit :
Etienne Chouard na pas t invit, tant pis pour Chirac. Et tant pis pour le oui. Et pour le
spectacle. Car Etienne Chouard est aujourdhui, en France, le principal champion du non .
Etienne Chouard, professeur dco-gestion Marseille, encore anonyme il y a quelques
mois, est devenu le symbole du camp du non. Le 18 avril, sur France Inter, Bernard Guetta
consacre une mission au texte de Mr Chouard. Le 21 avril, la presse marseillaise encense sa
nouvelle clbrit. Trois jours plus tard, cest carrment une quipe de LCI qui vient le filmerchez lui. Le reportage passera galement au 20 heures de TF1, juste avant lintervention de
Lionel Jospin, qui faisait son retour en politique pour soutenir le oui.
Le journal Le Mondedresse le portrait de ce Don Quichotte du non et son site devient
l'un des plus frquents de France avec plus de 30 000 connexions par jour40.
La fin de lhistoire, on la connait, le 29 mai, 55% des franais se prononcent en faveur du
non. Etienne Chouard est ainsi considr comme lun des blogueurs les plus influents de
France et comme la vritable vedette de la campagne rfrendaire41.
Alors quel bilan tirer de cette campagne politique ? Dornavant, pour les politiques, ledanger peut venir de nimporte o, nimporte quand, de nimporte qui. Auparavant, les hommes
politiques connaissaient leurs allis et leurs adversaires. Une poque rvolue. Nous entrons
dans une priode dincertitude politique. Penser la dmocratie devient de plus en plus
complexe explique Pierre Rosanvallon, professeur au Collge de France au lendemain du
rfrendum. Un nouveau paramtre est prendre en compte : lunivers dInternet et ses
internautes anonymes qui ont leur mot dire via des blogs ou des sites persos et qui peuvent
faire basculer une lection.
Il faut tout de mme relativiser le rle dEtienne Chouard. Pour beaucoup danalystes, cest
lui qui aurait fait pencher la balance en faveur du non. En se basant sur un graphique 42, le
journaliste Thierry Crouzet montre que le rle dEtienne est moins vident.
Etienne Chouard a post son article le 25 mars 2005, au moment o le non est au plus haut
dans les sondages. Il nest donc pas responsable de cette situation. En revanche, on voit que
37Et si tienne Chouard faisait gagner le non , L'Humanit, dition du 9 avril 2005
38http://www.bigbangblog.net/article.php3?id_article=457
39http://www.referendum2005.fr/article592.html - Page web qui reprend larticle issu de Libration
40Le Monde, 12 Mai 2005
41 15 blogueurs leaders d'opinion sur la toile Le Monde, dition interactive, 6 avril 2006
42Voire annexe 2
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
13/48
11
laffaire Bolkestein43a t dcisive. Cest lcrivain Raoul Marc Jennar qui a fait ressortir cette
affaire avec un mail diffus lchelle nationale dbut fvrier 2005.
Leffet Chouard doit tre considr comme un cho ce retournement de situation. Le texte
dEtienne est venu confirmer la prise de position des partisans du non. Son action citoyenne a
sans doute autant pes que celles des politiques. Les journalistes comme le public se sont
intresss Etienne car lui seul il symbolisait la possibilit dagir pour tout un chacun.
Dans cette affaire, Internet a jou un rle cl, seul vritable contrepoids mdiatique la
campagne du oui. Le 25 fvrier 2005, de nombreuses associations ont dnonc lostracisme
dont le non faisait lobjet dans les mdias. Par exemple, entre septembre 2004 et fvrier 2005,
lmission Question directesur France Inter a reu 34 personnalits favorables au oui contre 6
favorables au non44. A la fin de la campagne, le CSA rvla que le oui avait bnfici de 59%
du temps de parole. LObservatoire franais des mdias rvalua ce chiffre, annonant 73%.
En cette anne 2005, Internet apparait comme un nouveau champ dexprimentation
politique mais surtout comme un espace dopposition. Sa vritable force cest surtout sa libert
dexpression et dchanges. Que lon soit anonyme ou non, si les arguments que lon apportesont pertinents, le message peut toucher un public trs large et peut tre relay par les mdias
traditionnels. Dsormais, le web offre une tribune politique au grand public.
3. 2007 : les prmices du web social, Internet devient incontournable.
3.1 Dsirs davenir: lentre des rseaux sociaux en politique
2006 marque une tape importante dans lvolution du web avec lmergence des rseaux
sociaux en France. En juillet 2006, Twitterlance une version grand public de son site web suivide MySpace qui lance officiellement une version franaise de son site en aot. Puis, en
septembre, cest au tour de Facebookde lancer sa plateforme sur le territoire franais.
Sgolne Royal aura finalement t la premire politique franaise utiliser les rseaux
sociaux loccasion des primaires socialistes de 2006 avec la cration de Dsirs davenir. Une
association cre en dcembre 2005 qui prne la dmocratie participative et qui se compose
de diffrents comits locaux qui grent laction politique sur le terrain. Lassociation d ispose
galement dun site web45, lanc en fvrier 2006, utilis comme un espace de dbat public
des niveaux relativement important pour la France. Cest galement le site web officiel de
Sgolne Royal.
Le site web a ainsi mis disposition des militants, des forums et une carte interactive qui
localisait les diffrents comits locaux. Les militants devenaient donc autonomes et ils
disposaient de leurs propres outils dcentraliss pour se runir, sorganiser et monter leurs
propres vnements.
43Ancien commissaire europen lorigine du TCE qui avait propos une directive sur la libralisation des services
en Union Europenne. La directive a t trs impopulaire en France, cf la fameuse expression du plombierpolonais .44
Source CSA45
www.desirsdavenir.org
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
14/48
12
Cette dmocratie participative via le site internet a t un lment cl de sa stratgie de
campagne pour les prsidentielles de 2007 : elle sest inspire dans son programme dune
grande partie des ides qui sont ressorties de ces dbats. En quelques mois, la candidate a
recueilli prs de 130 000 contributions via son site web. Mais cette utilisation pousse des
remontes terrain a galement t mal interprte par certains journalistes qui expliquait que si
Sgolne Royal construisait son programme partir des citoyens, cest uniquement parce
quelle navait pasdides.
Un concept innovant qui a permis de pousser les dbats dans la sphre numrique. Plus
besoin uniquement de se rendre un meeting de la candidate pour proposer ses ides, un
ordinateur et une connexion web permettent galement de le faire.
Malheureusement, lexprience na pas t aboutie. Mme si lensemble des dbats et des
vnements ports par le site ont eu une influence lors des primaires, ils nont pas t le
support majeur de la campagne prsidentielle sur le terrain.
3.2 Campagne prsidentielle de 2007 : la guerre des vidos web
La campagne prsidentielle de 2007 aura surtout t innovante dans la place et le rle
de la vido politique. En 2007, les gants de la diffusion vido sur Internet comme Youtubeet
Dailymotiontaient en pleine expansion. La mme anne, Youtubea t rachet par Google46.
Des centaines de vidos ont t produites par les quipes PS et UMP, ainsi que par
leurs militants, qui se sont livrs une vritable bataille avec des attaques et des ripostes en
fonction de lactualit. Durant cette priode lectorale, Internet est devenu, grce ces vidos,
le deuxime systme dinformation, par rapport aux autres mdias traditionnels47.
La majorit des candidats ont dailleurs lanc leur propre Web TV comme Nicolas
Sarkozy avec sa NS TV48
. Une chane cre sur la plateforme Dailymotionqui rassemblait surla mme page tous les passages tlviss du candidat, des explications de son programme
ainsi que des interviews.
Comme la dmontr le chercheur en histoire visuelle, Andr Gunthert, les discours les
plus importants des candidats ont surtout t visionns sur des plateformes vidos de type
Youtubeou Dailymotionqu la tlvision49. La naissance avant lheure dune forme de catch up
TV50 politique qui a offert tous les citoyens la possibilit dcouter la carte les discours des
candidats.
Ces lections prsidentielles auront galement permis de se rendre compte du rle de
plus en plus important de la communaut des blogueurs, notamment les blogs tenus par lesmilitants. Vritables leader dopinion, limage dEtienne Chouard au moment du rfrendum
europen, ils deviennent incontournables dans la promotion du candidat.
46http://www.journaldunet.com/0610/061010-google.shtml - Google s'offre Youtube pour 1,65 milliard de dollars
47Enqute TNS-Sofres mai 2007
48http://www.dailymotion.com/NS-TV
49http://www.videolab.lhivic.org
50Tlvision de rattrapage
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
15/48
13
Lquipe de campagne de Nicolas Sarkozy a dailleurs parfaitement su utiliser ce
nouveau phnomne bon escient en mettant en place la blogosphre UMP. Un rseau de
blogueurs plus ou moins connus et en lien avec lUMP qui ont t invit dbattre, changer et
faire remonter des ides. En donnant ainsi une vritable importance ces blogueurs, lUMP a
considr ces militants comme de vritables relais dopinion tout en leur donnant un cadre de
dbat.
Les lections de 2007 ont dmontr le vritable pouvoir dInternet dans le domaine
politique. Vritable arme contre ses adversaires, les quipes de campagne nont pas hsit
crer le buzz51 sur le web en mettant en ligne des vidos pour discrditer les adversaires.
4. 2008 : la rvolution Obama
2008 aura t une anne charnire et rvolutionnaire dans lutilisation dInternet des fins
politiques avec la victoire de Barack Obama aux prsidentielles amricaines.
Le succs de la campagne de Barack Obama a repos sur trois principaux piliers : un
message ( le changement) fond sur lmotion et, faisant des lecteurs, les acteurs de ce
changement. Une organisation de la campagne efficace sur le terrain et une utilisation
optimale et innovante des nouvelles technologies. Un cocktail qui a revitalis la dmocratie
des Etats-Unis et permis aux amricains de se rconcilier avec la politique : le vote a atteint le
record de 131 millions de participants soit 63% contre 55% en 200452.
En lien avec le sujet de cette monographie, nous allons nous concentrer uniquement sur ce
dernier point, c'est--dire lutilisation des nouvelles technologies. Notamment lutilisation des
rseaux sociaux sur internet o Obama a t omniprsent durant sa campagne :
5 millions de fans Obama sur les rseaux sociaux en dehors de son propre rseau
social (mybarackobama.com).
Animation de plus de 15 profils Barack Obama dans des rseaux sociaux de type
Facebook, Twitter, MySpace
3,2 millions de fans dObama uniquement sur Facebook. Juste avant les lections
prsidentielles, une application permettait aux utilisateurs de cliquer sur un bouton Jai
vot afin de faire savoir leurs amis quils avaient accomplit leur devoir civique et pour
les inciter en faire autant. 5,4 millions de personnes ont cliqu sur ce bouton.
En ce qui concerne le site de campagne de Barack Obama, le clbre
mybarackobama.com, on recense des chiffres tout aussi impressionnants :
2 millions de profils crs.
200 000 vnements organiss.
400 000 billets crits sur la plateforme de blog.
51Technique marketing consistant faire du bruit autour d'un nouveau produit ou d'une offre.
52Le Monde, dition du 4 novembre 2008, Vers une participation record.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
16/48
14
A lorigine du succs de cette stratgie web, Chris Hugues, 25 ans, cofondateur et porte
parole de Facebook. I l a rejoint lquipe de campagne dObama et a beaucoup agi en tant que
coordinateur et architecte de la structure de mybarackobama.com.
4.1 Prsentation de la plateforme mybarackobama.com
La plateforme mybarackobama, ou MyBo, permet ses utilisateurs de rejoindre desgroupes (sur le mme principe que Facebook), dentrer en contact et de dialoguer avec les
autres membres, dorganiser des vnements et den informer ses amis, de collecter de largent
pour financer la campagne (30 millions de dollars rcolts via la plateforme53), de crer son
propre blogDes outils de base qui ont permis dorganiser et de centraliser la campagne via
une plateforme facile dutilisation et ouverte tous.
Mybarackobama a galement permis nimporte quel membre inscrit sur le site de
devenir bnvole et de militer pour la campagne dObama. Par exemple une rubrique du site
permet nimporte qui de devenir un tlprospecteur avec un guide dentretien suivre et une
liste de numros appeler. Une ide porteuse qui a mobilis plus de 10 millions de personnes
cette campagne.
Les dveloppeurs du site ont galement eu la bonne inspiration de mettre en place une
rubrique visant combattre les rumeurs et autres buzz ngatifs circulant sur la Toile au sujet de
Barack Obama et ses proches. Un peu limage du site internet hoaxbuster.com, premire
ressource francophone concernant les rumeurs circulant sur le web. Toutes informations
fausses ou sorties de leur contexte circulant sur des forums de discussion ou par chaine de
mail sont dmenties avec preuves et sources fiables lappui. Gnralement lorigine de la
cration et de la diffusion de ces fausses rumeurs, le camp adverse et ses partisans qui savent
trs bien quel impact peut avoir ce genre de fausses infos auprs du grand public.
Lors des lections prsidentielles en France, nous avons pu constater limpact ngatifque pouvait avoir des rumeurs visant dnigrer un candidat. Comme par exemple le fait que
Nicolas Sarkozy naurait pas pay ses impts sur la fortune lors de lanne 200654 ou que
Sgolne Royal aurait bnfici dune oreillette lors du dbat tlvis du 2 mai 200755.
Rapidement dmenties par les candidats, ces rumeurs ont nanmoins eu un impact dans les
sondages sur les intentions de votes.
Comme lexplique le sociologue Jean-Nol Kapferer56, la psychologie cognitive nous
enseigne que lhomme ne soustrait jamais dinformations, il ne peut quen ajouter. Lanti-rumeur
doit sinspirer de ce constat essentiel. On attaque mieux une rumeur en lanant une contre-
rumeur. Il faut modifier le statut de la rumeur, la rendre de porteuse de rvlations porteusede honte. Ainsi, les parleurs seront rduits au silence. Lquipe de campagne de Barack
Obama a bien compris ce raisonnement. La source de chaque rumeur touchant le candidat
dmocrate a t identifie et discrdite sur le site web minimisant ainsi le risque que cela
influe sur les lecteurs.
53KNETING Alexandre, Obama et la stratgie des petits dons, Tlrama , dition du 23 au 30 septembre 2008
54Nicolas Sarkozy ne paierait pas lISF?, LExpansion, dition du 10 au 17 janvier 2007
55http://moisegolene.blogspot.com/2007/05/loreillette-de-sgolne-royal.html
56KAPFERER Jean-Nol, Le contrle des rumeurs, Perse, 1990, N52, p.105-115
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
17/48
15
Le site regorge galement de nombreuses applications gratuites comme par exemple
trouver le bureau de vote le plus proche de chez soi.
Mais au-del du site internet mybarackobama.com, cest toute la stratgie web du
candidat dmocrate qui a connu un vrai succs auprs des amricains. Une vision globale,
oprationnelle et innovante par rapport ce qua pu propos lquipe de campagne du candidat
rpublicain, John McCain.
4.2 La stratgie web Obama, les raisons du succs
Plusieurs campagnes lectorales rcentes ont montr la puissance dInternet dans la
mobilisation des sympathisants. On peut par exemple citer le cas dHoward Dean en 2004,
candidat dmocrate aux primaires prsidentielles de 2004, qui a russi mobiliser des dizaines
de milliers de sympathisants via la plateforme communautaire MeetUp57. Une campagne on-line
russie qui a malheureusement eu du mal trouver le mme rpondant dans la ralit. Sur le
terrain, le lien entre le candidat et son quipe est rest sommaire et artisanal. A linverse deBarack Obama qui a russi l o Howard Dean a chou : recruter et organiser massivement
les sympathisants grce internet pour ensuite les envoyer, de faon coordonne, militer sur le
terrain. Le cas Obama est exceptionnel car cest la premire campagne avoir russi
fusionner internet et terrain.
Dans le dtail, la stratgie web de la campagne Obama a t globale et russi dans des
domaines cls :
Rseaux sociaux : le terrain de recrutement N1
Au fur et mesure des volutions technologiques, le site internet en lui-mme nest plusau centre des stratgies web. Il faut dsormais avoir une vision plus globale et maitriser de
nouveaux outils pour russir sa campagne internet comme les rseaux sociaux gnralistes de
type Facebookou Twitter.
Comme lexplique Loc Lemeur, rfrence dans le domaine du webmarketing, sur son
blog58, les rseaux sociaux sont, depuis 2008, au centre des stratgies web.
Au dbut des annes 90, alors quInternet se dmocratise et que le haut dbit fait son
apparition, cest le site Internet qui est au centre et qui a le plus dimportance. Les internautes
se connectent directement aux sites en tapant lURL correspondante.
Puis, viennent les moteurs de recherche qui font leur apparition et prennent de plus en
plus de poids. Jusquau dbut des annes 2000 o Google devient la rfrence incontournable.
Pour avoir une audience importante sur son site il faut dornavant prendre en compte Google et
mettre en place une stratgie adapte (mots cls, rfrencement, changes de liens).
Depuis 2008 et lapparition de Facebook, Twitterou Youtube, il faut dornavant aller
chercher laudience sur ces plateformes sociales.
57Rseau social en ligne cr en 2001 qui permet de rassembler gographiquement des internautes autour dun
mme intrt. Cest lun des plus importants rseaux sociaux dans les pays anglophones. http://www.meetup.com 58
http://www.loiclemeur.com/france/
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
18/48
16
Ce qua bien compris lquipe de campagne dObama. Il faut aller chercher les gens l
o ils sont, c'est--dire sur les rseaux sociaux. Une nouvelle donne qui bouleverse les
schmas traditionnels. Habituellement, pour participer une campagne politique, les partisans
devaient se rendre dans un bureau de campagne ou prendre contact avec le sige politique.
Un effort et une dmarche volontaire qui en dcourage plus dun. Mme linscription via
le site internet du parti ou de la campagne ncessite une dmarche active.
A linverse, la stratgie de campagne dObama renverse ce schma : il ne faut pas
attendre que les partisans viennent la campagne, il faut aller vers eux. Or cest sur les
rseaux sociaux du web que lon va trouver le plus de candidats potentiels et la campagne
peut ainsi toucher rapidement des millions dinternautes. Les barrires dentres sont baisses
au maximum : un simple click suffit pour participer.
Ainsi, une quinzaine de profils et de pages spciales Obama ont t crs sur
Facebook, Twitter et autres grands rseaux. Rgulirement mis jour et proposant des
contenus trs interactifs, ces espaces ont rapidement su toucher et rassembler des internautes.
Ainsi, lquipe de campagne a pu constituer une base importante de militants qui ont ensuitet renvoy vers MyBo.com.
Le don en ligne : premier niveau dimplication dans la campagne
La campagne prsidentielle de 2008 aux USA a t caractrise par une explosion des
financements et des dons : 1,6 milliards de $ au total pour tous les candidats contre 880
millions de $ en 200459. Barack Obama arrive largement en tte avec 750 millions de $ contre
350 millions pour le candidat rpublicain John McCain60. A la base de cette rvolution, un
financement populaire. Les deux tiers des financements rcolts par Obama proviennent de
petits dons de mois de 200 $, un peu limage des dons pour le Tlthon mais cette fois ci
dans le domaine de la politique. Une innovation qui permet de saffranchir des lobbies et desgrands donateurs.
Ce type de financement permet galement de crer du lien et de la proximit avec les
partisans : faire un don est un signe dappartenance la communaut. Cest en donnant au
Tlthon que lon devient acteur de la lutte contre la myopathie et cest en donnant la
campagne Obama que lon devient acteur du changement.
Au cur de cette rcolte de dons, Internet et le site de campagne de Barack Obama,
mybarackobama.com. Une interface simplifie et accessible pour tous qui permet en quelques
clicks de faire un don.
mybarackobama.com au cur de la stratgie
Au cur de la campagne mene par lquipe de Barack Obama on trouve le site officiel
du candidat : mybarackobama.com MyBo. Un site conu comme un rseau social de type
Facebook. Il permet de faire circuler les informations et lactualit de la campagne (meetings,
vnements) au sein de la communaut Obama. Cest galement un outil de coordination : il
donne loccasion aux militants de se runir et de sorganiser en quipe pour entrer en action.
59FERRAND Olivier, Obama : une campagne rvolutionnaire, Libration, dition du 21 janvier 2009
60Source idem que 59.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
19/48
17
Structurs en groupes gographiques (Miami for Obama)parfois trs locaux (Prince William
County for Obama)ou thmatiques (Students for Obama, Lawyers for Obama) le site web
met leur disposition des moyens daction : des kits de formation, de la documentation de
campagne, des programmes de porte--porte, des listes tlphoniques avec guides dentretien
pour faire du phoning
Par ce procd, chaque militant a le sentiment davoir un rle jouer au sein de cette
campagne, avec un tableau de bord qui recense les actions menes et celles de son quipe : le
montant rcolt, le nombre de personnes dmarches, les militants recruts Un reporting qui
donne une impression dautonomie pour les partisans pour organiser leurs actions mais qui
permet galement un contrle serr par le staff de campagne.
Tout au long de la campagne prsidentielle, les responsables du site internet MyBOont
entretenu la mobilisation des militants par une importante communication interne pour former et
informer : vidos posts rgulirement sur Youtube par le directeur de campagne, David
Plouffe, sadressant directement aux militants et expliquant la stratgie de la campagne. Via cesvidos, les militants ont eu limpression davoir un rle important dans la campagne, dtre mis
en valeur. Dailleurs, pour les plus engags dentre eux, ils ont eu le droit de dialoguer
directement avec Barack Obama.
Une mobilisation importante qui a permis de recruter 1,2 millions de militants en faveur
dObamaet dtablir un contact direct avec 68 millions damricains.
Les quipes de campagne de Barack Obama ont parfaitement su utiliser les nouvelles
technologies pour promouvoir le candidat dmocrate. En plus dinformer et de communiquer,
Internet a t utilis comme un outil de mobilisation et dorganisation. Une utilisation nouvelle
du web, intgre de manire horizontale et non verticale la campagne.
Dautre part, les sites de rseaux sociaux sont devenus des outils fondamentaux
dorganisation. A la fois dans le recrutement mais aussi dans lorganisation et la conduite des
oprations de terrain.
Comme nous venons de le voir, Internet a pris une place importante au sein des
stratgies lectorales. Passant du rle de simple gadget technologique lors des campagnes
municipales de 2001 un rle moteur et centralisateur comme pour la victoire de Barack
Obama en 2008.
Toujours plus interactif et plus proche des lecteurs, les plateformes proposes par lespolitiques voluent en fonction des nouveauts et des nouvelles tendances du web.
Le dbut danne 2010 en France aura t marqu par larrive des rseaux sociaux
politiques.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
20/48
18
Deuxime partie : les rseaux sociaux politiques en France travers
deux exemples, CooPol et Crateurs de Possibles.
1. Quest ce quun rseau social ?
Selon la dfinition du sociologue John A. Barnes61, un rseau social est un ensembled'entits sociales tel que des individus ou des organisations sociales relis entre eux par desliens crs lors des interactions sociales.
Concrtement, on peut le reprsenter par une structure ou une forme dynamique d'ungroupement social. Des rseaux sociaux peuvent tre crs stratgiquement pour agrandir ourendre plus efficient son propre rseau social (professionnel, amical,). Il existe des applicationsinternet aidant se crer un cercle d'amis, trouver des partenaires commerciaux, un emploiou autres. Il s'agit de services de rseautage social
Un rseau social reprsente une structure sociale dynamique se modlisant par dessommets et des artes. Les sommets dsignent gnralement des gens et/ou des
organisations et sont relies entre elles par des interactions sociales.
A lheure de lre Internet, le terme de rseau social dsigne gnralement un site web quipermet aux internautes de sinscrire et dy crer une carte didentit virtuelle62. Ces sites sontappels rseaux sociaux dans le sens o ils permettent dchanger et de communiquer avecdautres membres inscrits sur le mme rseau (par le biais de messages, de liens, de vidos,de photos). Au centre de ces rseaux, la possibilit dajouter des amis et de grer une listede contacts.
Reposant sur le besoin naturel de communiquer, les rseaux sociaux ont fait leur apparitionsur la Toile en 2002 avec Friendsterqui proposait via une interface trs simple, de se crer unprofil et dy ajouter ses amis pour pouvoir changer avec eux. Mais cest surtout avec larrive
des gants comme MySpaceou Facebookque les rseaux sociaux sur Internet ont vraimentpris de limportance et sont devenus aujourdhui omniprsents.
Par extension, on appelle un rseau social politique, un site web reposant sur les principesdes rseaux sociaux classiques mais dvelopp avec lobjectif de promouvoir un parti ou uneactivit politique.
61Dfinition issue de Class and Committees in a Norwegian Island Parish , Human Relations
62Que lon appelle communment profil .
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
21/48
19
2. Les franais et les rseaux sociaux
2.1 Les rseaux sociaux gnralistes
Comme nous lavons vu prcdemment, nous pouvons situer lavnement des rseauxsociaux sur le web en France partir de la fin de lanne 2006 avec les incontournables commeFacebook, MySpace ou Twitter. Mme si Copains davant, plateforme de rseautage socialefranaise existe depuis 2001, cest vraiment partir de 2006 que le phnomne des rseauxsociaux sest impos dans lunivers web.
Une rcente tude mene par lIFOP63, datant de janvier 2010, dresse un portrait delutilisation des rseaux sociaux en France64. Une enqute auprs de 1 002 personnes,reprsentatifs de la population internaute franaise ge de 18 ans et plus.
Ltude montre que depuis 2007, on constate une volution constante, en termes denotorit, de lensemble des rseaux sociaux. Par exemple, sur lchantillon interview, 97 %des personnes ont rpondu connatre de nom le site Facebook alors quils taient 38% enautomne 2007. Lanne 2009 a galement t celle de lexplosion de Twitter avec 62% de
personnes qui connaissent le rseau social de nom, contre 2% en 2007. Un rsultat relativisercar la plateforme peine dcoller en France en termes de membres. Mais le score devraitsamliorer dici la fin de lanne 2010 avec la mise en place dune version intgralement enfranais du site.
Cependant, lanalyse des rsultats par sous-catgories dinternautes montre quil existedimportantes disparits selon lge des personnes interroges. Gnralement, on retrouve lesscores les plus hauts auprs des plus jeunes et les plus bas au fur et mesure que lgeaugmente.
En ce qui concerne le nombre de membres, en France, Copains davantarrive en tteavec 49% des personnes interviewes inscrites sur le site. Suivi des amricains Windows Live
(46%) et Facebook(37%). Des rsultats qui sont difficile confirmer car il ny a pas de chiffresofficiels sur le nombre dinternautes franais inscrits sur chaque plateforme de rseau social.
Au dbut de lanne 2010, 77% des internautes ont dclar tre membre dau moins unrseau social. Un rsultat qui varie trs fortement selon la classe dge : 96% des jeunes gsde 18 24 ans dclarent tre membre dau moins un rseau social contre 76% pour ceux gsde 35 49 ans et 52% pour ceux gs de plus de 65 ans.
En moyenne, un internaute est membre de 1,9 rseau social avec encore une fois unclivage gnrationnel. Chez les internautes gs de plus de 65 ans le score est de 0,9 contre2,9 chez les 18/24 ans. 35% des internautes gs de 18 24 ans seraient membres de quatrerseaux sociaux ou plus. En revanche, le critre social est dans ce cas trs peu discriminant :
en moyenne, un employ ou un ouvrier est membre de 1,9 rseau social contre 2,0 pour lescadres et professions librales.
En complment de cette tude, un article issu du Monde du 22 juin 2010 montrequInternet est devenu le mdia le plus souvent utilis en France pour sinformer en matire depolitique. Ce qui prouve limportance, en France, pour nimporte quel homme politique franais,dassurer une prsence forte sur cet espace.
63Institut franais dopinion publique
64http://www.ifop.fr/media/poll/1032-1-study_file.pdf
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
22/48
20
2.2 Les rseaux sociaux politiques
Le phnomne des rseaux sociaux politiques est tout rcent en France (janvier 2010)et il nexiste actuellement pas dtudes ou danalyses sur le sujet. Dans le cadre de cettemonographie, jai mis en place une enqute en ligne en utilisant le formulaire de sondage deloutil Google Documents. Lenqute est reste en ligne du 1er juin au 15 juillet 2010 et a tralise auprs dun chantillon de 100 internautes franais reprsentatifs de lensemble de lapopulation. Les formulaires ont t administrs en face--face, envoys par mail, en plaantdes liens renvoyant vers le formulaire sur des forums de thmatiques trs diffrentes (sports,informatique, sant, politique, actualits, dcoration).
Globalement le panel interrog est plutt jeune : 60% a entre 17 et 24 ans et 39% aentre 25 et 39 ans. 73% des personnes interviewes habitent dans une grande agglomration.
Ce sont gnralement des gros consommateurs dInternet : 51% passent plus de 16hsur la Toile et 34% reconnaissent avoir une consommation importante dinformations et decontenus et utilisent les nouvelles fonctionnalits du web.
Concernant la politique, 87% des sonds sont inscrits sur les listes lectorales, 10% nele sont pas par choix personnel et 3% ne le sont pas galement car mineurs. Ensuite,concernant leur intrt vis--vis de la politique, 24% se dclarent trs intresss, 46%moyennement intresss, 21% assez peu intresss et 9% pas du tout intresss. Ils sontgalement 4% adhrer actuellement un parti politique.
Par rapport leur usage et leur connaissance des rseaux sociaux gnralistes, lesondage confirme la tendance actuelle : cest un phnomne en pleine croissance en France.91% des sonds sont actuellement inscrits sur un ou plusieurs rseaux sociaux sur Internet et54% dentre eux reconnaissent sy connecter tous les jours. Parmi les 9% ayant rpondu Non la question, 8% dentre eux ont plus de 40 ans.
Dans le trio de tte, on retrouve Facebook la premire place avec 87% du panel inscritdessus. Viennent ensuite Viadeoavec 46% puis Copains davantavec 35%. Etonnement, onretrouve Twitter la quatrime place avec 31%. Ce qui confirme une tendance lchellenationale : Twitter a du mal simposer en France alors que son utilisation est en pleineexplosion dans le reste du monde65.
Par rapport au comportement gnral sur ces rseaux sociaux on pourra remarquer uneimportante activit. Linternaute nest plus spectateur, il est dsormais acteur et produit ducontenus : 77% des sonds publient des informations sur ces rseaux sociaux.
Pour les rseaux sociaux politiques, ils ne sont que 41% en avoir entendu parler. 22%
du panel concern tait au courant que le site Les Crateurs de Possiblesest dit par lUMP.Ils sont dailleurs 3% y tre inscrit. Beaucoup plus confidentiel et discret, ils sont seulement11% savoir que le rseau social La Coopol est dit par le PS et 2% dentre eux y sontinscrits.
Ils sont galement 9% se dclarer tre prt sinscrire sur le rseau social dun partipolitique, 4% le sont dj et 87% nenvisagent pas de le faire. Pour expliquer ce choix, de nepas vouloir sy inscrire, on peut retient plusieurs arguments :
65http://www.logiciel.net/twitter-tres-peu-utilise-en-france-4887.htm
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
23/48
21
- La peur de simpliquer. Plusieurs personnes sondes refusent de sinscrire sur unrseau social politique car selon eux cela quivaudrait franchir une tape de plus danslengagement politique alors quils ne sont membres daucun parti. Dailleurs, certainsdes sonds ont ajout quils ne faisaient que rarement le mme choix politique lorsdlections.
- La peur dafficher ses convictions. Le refus de montrer publiquement son appartenance
des ides et un courant politique. Ces personnes considrent que ces informationsrelvent de la vie prive et doivent restes confidentielles.
- Le manque de confiance envers les partis politiques. Pour certains des sonds, il nestpas question de sinscrire sur ce genre de plateforme car elles sont perues comme desmachines de communication avec la peur quand lutilisation de leurs informationsconfidentielles.
- Le manque dintrt envers la politique.
A linverse, pour les personnes qui souhaitent sy inscrire, le but recherch estessentiellement de dbattre, dchanger des ides, dappartenir une mme communaut etde pouvoir tre au courant rapidement de lactualit dun parti politique.
3. mybarackobama.com : les amricains peuvent-il inspirer les politiquesfranais ?
La dernire campagne prsidentielle amricaine a montr la ncessit de moderniser les
pratiques politiques franaises. Les rsultats obtenus auprs de la population amricaine de la
campagne dObama tonnent et questionnent sur le systme politique franais.
La France sest longtemps considre comme un pays politique. Mais actuellement nous en
semble loin tant la politique mobilise si peu de militants et de sympathisants. Le dernier sujet
qui a passionn les franais a t celui sur le trait constitutionnel europen. Une exception si
lon considre que le dbat surle TCE sest largement construit la marge et contre le systme
politique. Cest dailleurs Internet qui a jou le rle despace public dchange et de dbats
alternatifs.
On retrouve le mme phnomne du ct des syndicats franais66 . Ils peinent largir leur
base militante, en rosion continue. Nanmoins, ce dsintrt vis--vis de lengagement
politique en France nest pas une fatalit. Il suffit de regarder du ct de lengagement
associatif et caritatif qui bat des records67. Les ONG et les associations envoient des messages
clairs, oprationnels, concrets qui parlent aux franais. Ils savent galement offrir des formes
modernes dengagement ou de contributions.
66LECLERE Thierry, Les syndicats franais sauront-ils se rnover ?, Tlrama, dition du 7 au 14 octobre 2009
67Source France Bnvolat.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
24/48
22
La fondation Terra Nova68 a list des recommandations69 destination des politiques
franais pour sinspirer de la campagne dObama. Leur objectif : revitaliser la dmocratie
franaise. Publi peu aprs la victoire du candidat dmocrate, ce rapport a t la base de la
mise en place de rseaux sociaux politiques en France70.
Le rapport ne propose pas une importation directe du modle amricain, ce qui serait
impossible cause des diffrences structurelles et culturelles entre les deux pays. Mais il estnanmoins possible de proposer une volution des techniques de campagnes utilises en
France la lumire de lexprience amricaine.
La campagne de Barack Obama doit beaucoup au personnage en lui-mme mais aussi aux
innovations apportes par son quipe avec notamment lutilisation des nouvelles technologies.
Le rapport recense au total une douzaine de recommandations. Dans le cadre de mon
mmoire, nous nous attarderons uniquement sur les recommandations en lien avec Internet et
lutilisation des rseaux sociaux.
A limage de leur utilisation par lquipe de Barack Obama, les nouvelles technologiesconstituent un levier de modernisation essentiel des campagnes, tant au niveau de la
communication que de lorganisation. Avec lobjectif de mobiliser les militants, ces nouveaux
outils doivent tre pleinement intgrs dans les stratgies des partis politiques franais.
Pour linstant, aucun de ces derniers na russi, en termes dorganisation et de mobilisation,
rassembler sur une plateforme unique des dizaines de milliers de militants actifs. Il y a
pourtant eu des expriences plutt encourageantes et innovantes comme le lancement de
Dsirsdavenir par Sgolne Royal pour les primaires socialistes de 2006 ou encore les
supporters de Sarkozy71 lanc par Arnaud Dassier. Mais dans les deux cas, le nombre
dinscrits a t trs faible.
Le rapport de Terra Nova recommande avant tout dlargir et de professionnaliser la base
militante en utilisant Internet comme levier dorganisation et dadministration des partis et des
quipes de campagnes au moment des lections. Il sagit donc de rorganiser les partis en y
mettant au cur, leur systme dinformation, essentiellement par la cration dapplications web.
Ce qui permettrait dabord de crer des outils dadministration et de gestion disposition
des cadres des partis politique : gestion de listings mail, recollement lectronique des votes (qui
a cruellement fait dfaut aprs le congrs de Reims du PS en 2008), gestion des cotisations,
forums, blogs, sous-sections des partis (fdrations locales). Les responsables des partis
auraient ainsi leur disposition un tableau de bord qui centraliserait toutes les infos internes
leur organisme.
68Think Tank progressiste indpendant ayant pour but de produire et diffuser des solutions politiques innovantes
en France et en Europe.69
Rapport consultable ladresse http://www.tnova.fr/images/stories/groupes-de-travail/006-mission-
us/terranova-rapportmissionus.pdf70
http://info.france2.fr/elections/regionales-2010/Coopol,-pour-se-faire-plein-de-coopains-au-PS-60193201.html71
Site web lanc en amont de la campagne prsidentielle de 2007 par Nicolas Sarkozy. Le site avait pour objectif
de rassembler le maximum de sympathisants en faveur du candidat au sein dune mme plateforme pour ensuite
les coordonner sous forme dactions militantes locales. Malheureusement le site na jamais russi rassembler
plus de 1 000 membres. Ladresse http://www.supportersdesarkozy.com/ renvoie directement la page Facebook
de Nicolas Sarkozy.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
25/48
23
Une organisation centralise autour dune plate-forme web offre galement lavantage de
mieux mobiliser sur le terrain en signalant lavance les vnements venir: manifestations,
dbats, runions, meetings, tractage, porte--porte et ventuellement phoning comme la pu
faire avec succs lquipe de campagne dObama. De mme, chaque militant dispose dun
rsum de son activit militante : largent quil a rcolt, les coups de tlphones quil a pass,
tout y est consign pour valoriser les plus actifs.
Un rseau social virtuel permet galement de saffranchir de toute limite gographique. Une
organisation numrique permet des regroupements par affinit et thmatiques transversaux
sans forcment avoir lobligation de rejoindre son organisation territoriale. Une libralisation des
changes dun mme parti qui peut tre porteur de nouvelles ides.
Comme la montr lexprience de Barack Obama avec son MyBo, lorganisation numrique
permet de saffranchir dune organisation hirarchique classique, pyramidale, en offrant
davantage dautonomie aux militants et aux volontaires pour sauto-organiser sur le terrain avec
toute une palette doutils dcentraliss leur disposition depuis le site web.
Les partis politiques franais sont rarement lavant-garde en matire dinnovationstechnologiques. Des exemples amricains ont montr quil tait pourtant possible dadapter trs
simplement les usages les plus innovants afin de les dcliner dans le champ politique. Cela a
par exemple t le cas pour Howard Dean en 2004 avec lusage du rseau social MeetUpou
de la cration de MyBo par lquipe de Barack Obama qui sest normment inspir de
Facebook.
En synthse, on peut dire quil est important pour les partis politiques franais de penser
internet comme un outil dorganisation de campagne. Mais plus que le dveloppement dune
plate-forme de rseau social, il faut penser sa prsence web dans son ensemble et tre prsentsur des rseaux sociaux externes. Dexcellent terrains de recrutement, comme la montr la
campagne de Barack Obama.
4. Les rseaux politiques franais : Coopol et Crateurs de Possibles.
LUMP et le PS ont t les premiers partis politiques franais ouvrir leurs propres sites de
rseaux sociaux politiques. Depuis le dbut de mes recherches pour ma monographie, dautres
partis se sont galement lancs dans laventure comme par exemple le Modem aveclesdemocrates.fret le Nouveau Centre avec epicentres.fr. Pour des raisons de contraintes de
temps et de limitations de pages, je me suis focalis uniquement sur les deux principaux sites
internet de ce type, Coopolet Crateurs de Possibles.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
26/48
24
4.1 Prsentation de ces deux rseaux sociaux politiques.
Prsentation de Coopol
Rseau social du PS ouvert au public depuis le 12 janvier 2010 et dirig par Benoit
Thieulin, PDG de la Netscouade72.
Avec la cration de la Coopol, nous avons voulutransposer la campagne dObama. A la
base, lide est den faire un outil dorganisation pour chaque section socialiste avec un
engagement la carte.
Benoit Thieulin, responsable du projet Coopol
La Coopol a t mise en place dans le but de regrouper les militants sur un nouvel
espace en leur proposant tout un panel doutils pour les aider dans leurs actions. La similitude
avec la plateforme mise en place par Obama, MyBo.com, est clairement assume et mme
revendique. Points communs avec le site amricain, le militant est invit ds la page daccueil
sinscrire diffrentes missions, runions ou meetings sur des thmatiques dfinies.
Le militant a galement a sa disposition de nombreux outils pour mener bien des
actions de campagne : flyers et posters imprimer, ptitions, sondages. Il y a galement la
possibilit de crer des vnements en renseignant le lieu et la date et dy inviter ses contacts.
En revanche, le site mis en place par le PS se distingue de son cousin amricain en
offrant la possibilit aux militants de dbattre sur des sujets de socit. Action qui ntait pas
possible sur mybarackobama.compendant la campagne prsidentielle.
Niveau graphique, le site reprend globalement les couleurs du PS avec des dominantes rouges.
Il est important de signaler que le PS possde une longueur davance en termesdexprience avec cet outil. En 2007, au moment des prsidentielles, Sgolne Royal avait fait
confiance Benot Thieulin dans la cration dune sorte de rseau social politique avec Dsirs
davenir.
Prsentation de Crateurs de Possibles
Rseau social de lUMP ouvert au public depuis le 8 janvier 2010 et dirig par Benoist
Apparu, secrtaire dEtat au logement et lurbanisme.
Crateur de Possibles est une rvolution dans la manire de faire de la politique. Le site est
un rseau d'actions citoyen. Il est ouvert aux militants du parti mais aussi tout internaute
soucieuxde crer des initiatives et de mettre en place des actions concrtes.
Benoist Apparu, responsable du projet Crateurs de Possibles
Le rseau social cr par lUMP est volontairement dissoci du site officiel du parti alors
que les deux ne faisaient quun au lancement de la plateforme Crateurs de Possibles. Une
distance par rapport au site officiel comme signe douverture au-del des militants de droite.
72Agence internet.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
27/48
25
Slogan de Crateurs de Possibles, les citoyens en action, qui se traduit concrtement
par la possibilit pour chaque militant de crer son initiative comme par exemple Accentuer la
traque des fraudeurs aux prestations sociales73 avec la possibilit dinviter les gens y
adhrer, de proposer des moyens dactions et de donner son avis. Un peu limage de
Facebooko chaque utilisateur peut crer son propre groupe. Le site invite chaque membre
tre un acteur de dbat.
Au final, on se rend compte que les deux sites proposent deux visions trs diffrentes et
opposes. Du ct du PS, on offre aux militants un outil dorganisation et de coordination
militante, un peu limage dun Intranet74. Et du ct de lUMP, on retrouve un site qui se veut
neutre (aucunes rfrences au parti politique) et ouvert tous les franais et qui permet tous
les membres dtre force de proposition dides ou dactions.
4.2 Pourquoi avoir lanc ces rseaux sociaux politiques ?
Coopol et Crateurs de Possibles ont t lanc en janvier 2010 et cette date na pas t
choisie au hasard. Les deux partis politiques avaient pour objectif, en lanant ces deux sites
web, de gagner les lections rgionales de mars dernier.
Surfant sur lmergence des rseaux sociaux, les partis politiques franais ont senti
quils devaient prendre un virage technologique. Etre prsent sur Internet et, de plus, avec les
bons outils est devenu indispensable. Ces lections rgionales taient donc un bon moyen
dexprimenter ces nouveaux sites en prvision des prsidentielles de 2012.
Le succs de la campagne de Barack Obama et son site web, mybarackobama.com, y
sont galement pour beaucoup dans le lancement des deux plateformes franaises. Les
socialistes avaient dailleurs envoy une mission dtude aux Etats Unis pendant la campagne
prsidentielle pour tudier au plus prs loutil mis en place par lquipe dObama. Les dlgus
socialistes ont notamment t reus par Howard Dean, prsident du parti Dmocrate. Uneexprience qui a t riche et porteuses dides selon Benoit Thieulin, actuel responsable de La
Coopol: On en a eu marre de perdre les lections. On a voulu savoir pourquoi. Aprs cette
visite aux Etats-Unis, on sest rendu compte quon sorganisait mal, que le militantisme tait mal
fait75.
Mais pourtant, bien avant le lancement de ces deux rseaux sociaux, les militants
avaient commenc investir la Toile travers des forums internes aux partis politiques ou sur
des pages et groupes Facebook. Les politiques franais y sont galement prsents mais de
faon trs ingales. Ils ont t nombreux sy intresser car cest une vritable opportunit de
crer du lien et de la proximit avec les militants et les futurs lecteurs. Cest galement unformidable outil de communication qui touche des publics diffrents. En octobre 2009, Nathalie
Kosciusko-Morizet avait dailleurs invit les snateurs et les dputs franais assister des
73http://www.lescreateursdepossibles.com/initiatives/Accentuer-la-traque-des-fraudeurs-aux-prestations-
sociales-6297.html74
L'intranet permet, l'image d'Internet de mettre en commun les ressources d'une mme entit pour un usage
restreint et priv rserv la seule entit.75
Le Figaro du 11/12/2009 : LUMP et le PS se mettent lheure des rseaux .
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
28/48
26
cours sur le web 2.0 pour les inciter communiquer sur le web via des rseaux sociaux ou des
blogs76.
Le lancement de Coopolet Crateurs de Possibles rpond donc plusieurs logiques.
Tout dabord, lapproche des lections rgionales, ctait une formidable opportunit pour les
partis politiques de mettre lessai ces nouveaux rseaux sociaux. Il sagissait galement de
sinspirer du modle de russite de Barack Obama et de redonner une image plus moderne auxpartis tout en essayant de se rapprocher de llectorat. Dsormais, chaque citoyen peut tre
force de proposition et faire remonter ses ides et ses opinions la classe politique.
4.3 Coopol VS Crateurs de Possibles
Afin de mieux cerner ces deux raisons sociaux, nous allons les comparer selon
diffrents critres.
Les origines fondatrices
Dans les deux cas, les crateurs ont revendiqu leur inspiration de MyBo.com. Les
partis politiques franais ont galement voulu surfer sur la vague de russite de Facebook,
MySpace, Twitter ... Il est important pour les politiques de rester en contact avec la ralit, de
savoir utiliser les outils actuellement en vogue afin dattirer de nouveaux lecteurs.
Internet est un nouveau terrain de conqute lectoral, un nouvel espace stratgique. Les
politiques lont bien compris et tentent de plus en plus dassurer une prsence sur les rseaux
sociaux les plus importants : cration dune page officielle, dun groupe ou dun profil. Leur
objectif est ainsi de donner un sentiment de proximit, dtre prsent l o sont les gens.
Les deux sites politiques veulent galement surfer sur le succs du web participatif, lun
des principes du web 2.0. Avec Dsirs davenir, Sgolne Royal avait t la premire en France lancer un site participatif. Le web participatif consiste faire participer linternaute dans le
contenu dun site avec la possibilit de commenter des articles, de rdiger, de crer des liens,
de sintgrer dans des rseaux virtuels, de voter en ligne Dsormais linternaute est la fois
acteur, auteur et lecteur.
Ce modle participatif repris dans un objectif politique peut tre un formidable moteur
dans lmergence de dbats, dides ou dopinions sur des thmatiques prcises. Cest
galement un moyen dimpliquer llectorat au dbat politique. Les rles ont chang, le citoyen
prend plus dimportance. Ce nest plus le politique qui demande ses lecteurs dadhrer ses
ides mais le citoyen qui propose des solutions et le politique qui va les intgrer dans son
programme.
Sur ce point, Coopolet Crateurs de Possiblessont sur la mme longueur donde.
76http://www.gouvernement.fr/gouvernement/nathalie-kosciusko-morizet-emmene-les-elus-sur-le-web-20
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
29/48
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
30/48
28
rejoindre cette initiative, inviter des amis en faire de mme, dbattre et enrichir avec des
commentaires.
Pour chaque initiative cre, il est galement possible de la concrtiser avec diffrents
moyens daction : cration de tracts, organisation de runions, ptitions Une rubrique du site
propose galement toute une srie de conseils pour la personne en charge de lorganisation :
explications sur la manire de diriger une runion, de communiquer .
Une page fait ensuite le bilan sur chaque initiative mise en place avec un classement
selon diffrents critres (gographiques, nombre de membres). Lobjectif est de pousser les
membres participer en crant une comptition entre eux.
En revanche, les moyens de communication entre membres sont limits.
Coopol PS
Le site a avant tout t cr pour les militants et sympathisants de gauche. Plus complet
et difficile apprhender que son concurrent de droite, il se compose de deux grandes parties :
les groupes et les vnements.
Ds linscription faite, on propose linternaute de rejoindre un groupe pour pouvoir
participer. Le site reprend en fait la structure du parti politique avec des divisions et des
sections locales. Linternaute peut galement rejoindre des groupes selon ses intrts (sport,
conomie, international). Au sein de chaque groupe on retrouve un espace de discussion et
dbat entre les membres et dune page daccueil o chacun peut laisser un commentaire.
Aprs avoir rejoint un groupe, linternaute peut ensuite proposer un vnement en
dfinissant son type (runion, meeting, dbat) ainsi que lobjectif (discussion, action
militante). Il peut ensuite le publier sur la page daccueil du site pour le rendre visible tout le
rseau. Ce modle a t calqu sur lorganisation dvnement propos par Facebook, un peu
comme lensemble du site. Seuls les couleurs et les noms des sections diffrent mais
globalement les utilisateurs de Facebook ne sont pas dpayss.
Beaucoup plus conviviale et interactif que son concurrent UMP, jai prfr utilis la
plateforme du PS. Les contacts avec les autres membres ont t beaucoup plus faciles et
chaleureux sur la Coopol.
Nous venons donc de voir deux modes de fonctionnement diffrent. Crateurs de
Possible tente avant tout de rassembler ses utilisateurs autour dinitiatives alors que CooPol
propose ds le dpart linternaute de rejoindre des groupes et des sous-sections. Enproposant un modle trs proche de celui de Facebook, le site du PS a voulu utiliser un
exemple qui connait un grand succs auprs de la population jeune.
Modration
Les rgles de modration sont aussi trs diffrentes entre les deux sites. Beaucoup plus
strictes, les modrateurs de Coopol ont par exemple supprim au bout de quelques minutes un
group nomm Changez le nom du PS car ilnest pas socialiste alors que sur Crateurs de
Possible, un groupe intitul Pour que Frdric Lefebvre soit nomm lAcadmie Franaise
est rest en ligne trois semaines.
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
31/48
29
Fonctionnalits proposes
Crateurs de Possibles
Sur le site du parti de droite, lutilisateur nest pas au centre, cest surtout les
contributions quil va crer qui auront de limportance. Linternaute peut devenir ami avec
dautres membres mais la fonctionnalit na pas t trs dveloppe. Il est difficile de
rechercher dautres membres et les moyens de communiquer en priv sont limits.
Les fonctionnalits proposes permettent avant tout de contribuer publiquement et non
dagrandir son cercle damis et dinteragir avec eux.
Coopol
Le site du PS offre la possibilit de rejoindre des groupes, dajouter des amis (des
coopains ). Ces fonctionnalits sont aussi pousses et dveloppes que sur Facebook. Les
interactions entre les membres sont la base du site Coopol. Lutilisateur est vraiment au
centre du projet.
Les membres peuvent galement publier un statut partir de leur profil public que ses
amis peuvent commenter. Chaque profil est rendu public et lon peut voir les groupes et le
nombre damis de chaque membre ainsi que toutes les actions effectues depuis son
inscription.
Globalement, Coopolpropose des fonctionnalits beaucoup plus compltes.
4.4 Coopol et Crateurs de Possibles lpreuve des lections rgionales
Comme nous lavons vu prcdemment, les lections rgionales de mars dernier auront t
une formidable opportunit pour les politiques de franais de tester ces nouveaux outilsnumriques auprs du grand public. Lobjectif est bien sur de les mettre profit et den tirer une
exprience pour les lections prsidentielles de 2012.
Mais au final, lutilisation faite de rseaux sociaux pendant cette campagne aura t
dcevante. Pour de nombreux spcialistes, il y a encore beaucoup de chemin faire avant
datteindre le niveau de campagne de Barack Obama78. La mobilisation autour de ces deux
sites aura t trs faible.Au lieu dtre considr comme des outils pour associer les militants
la campagne les rseaux sociaux ont t utiliss comme des simples forums ou botes aux
lettres pour dposer des ides.
Avec du recul, on peut en conclure que lutilisation de ces rseaux sociaux na pas tadapt aux lections rgionales :
Pour quun rseau social prenne du poids dans une campagne, il est ncessaire
dobtenir une masse critique dinternautes, ce qui na pas t le cas. Notamment dans le
cadre dune lection rgionale o les enjeux sont locaux. Et il est important de souligner
une certaine disparit en France dans laccs Internet, certaines rgions se sont
retrouves dsavantages dun point de vue technique. Laccs internet nest pas le
78http://www.la-croix.com/Regionales--Les-reseaux-sociaux-politiques-n-ont-pas mobilis/article/2418053/25041
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
32/48
30
mme pour tous79. Il a t impossible de rassembler des communauts importantes
dinternautes dans certaines rgions franaises
Les lections rgionales ont une envergure locale. Le web se devait donc dtre le
mdia idal car il offrait la possibilit dtre au plus prs des lecteurs. Cela sest par
exemple traduit par la mise en place de cartes interactives sur les sites officiels de
candidats qui permettaient de localiser les militants connects dans les rgions. Leproblme est quil ny a pas eu de fusion ou de liens entre les dispositifs web rgionaux
et nationaux. Les sites nationaux comme Coopolou les Crateurs de Possiblesauraient
pu tre des rampes de lancement pour les diffrents sites rgionaux. Il y a eu une
dilution de laudience ce qui a empch de faire remonter linformation.
Pendant ces lections rgionales nous avons galement constat lmergence de blogs
de militants80 qui ont permis dentamer le dialogue et les dbats. Ils ont finalement
occup la place des rseaux sociaux qui nont pas su adapter leur stratgie aux enjeux
lectoraux. Le dbat na pas eu lieu sur ces plateformes mises spcialement en place
mais en dehors.
Le contexte de lenjeu local de ces lections rgionales na pas t porteur pour rassembler
des internautes sur ces rseaux sociaux, plutt perus comme des dispositifs nationaux. Le PS
et lUMP nont galement pas pris en compte la blogosphre politique franaise qui a finalement
concentr la majorit de laudience des sympathisants et militants durant la campagne
lectorale. Il ny a pas eu de stratgie transversale entre ces blogs, les sites des candidats et
les rseaux sociaux politiques.
4.5 Comparaison entre mybarackobama et les rseaux sociaux politiques franais
En ce qui concerne le site lanc par lUMP, il est difficile de le comparer avec le rseausocial amricain. Dans le sens o Crateurs de Possibles nest pas un rseau social proprement parler. Les individus ne sont pas mis en valeur et nont pas un rle central: il ny apas de fiche profil, pas de photos des utilisateurs, pas de mises en valeur des actions menes,les interactions avec les autres membres sont limites. Un seul moyen dexpression : lescauses que lon souhaite porter.
Le site lanc par lquipe dObama avait pour atout de mobiliser en mettant en avant lesmembres de la plateforme : rencontres, interactions entre membres, valorisation des actionsmenes par chacun
Du ct de La CooPol, le modle est beaucoup plus proche de celui de Barack Obama. Lepoint ngatif rside dans sa fermeture dans son contenu des membres qui ne sont pas affilisau PS. Il est plutt un outil dorganisation interne et manque douverture vers des internautesqui ne seraient pas des militants du parti de gauche. Ainsi, il ne devient pas un lieu derencontre, de discussion, dchanges et de circulation des ides entre citoyens.
79Rapport de lARCEP (Autorit de Rgulation des Communications Electroniques et des Postes) de Janvier 2010.
80Par exemple, le blog du Chevalier Orange : http://chevallierorange.wordpress.com
8/4/2019 CORMIER Mael - Reseaux Sociaux Politiques
33/48
31
Le ton de modration assez svre appliqu par lquipe de la CooPol est galementreproch par de nombreux internautes81. En ce sens, il sloigne de MyBoo la libert de ton etdexpression tait revendique.
En synthse, les points forts de CooPolsont les dfauts de Crateurs de Possibleset vice
et versa. Les deux sites ne sont pas encore au niveau de leur cousin amricain dans leur forme
et dans leur contenu. La place que devrait prendre ces rseaux sociaux politiques franais estpour linstant occupe par les blogs, les forums de discussion et les rseaux sociaux
gnralistes.
Pour linstant, le principal dfaut pour ces deux plateformes est de ne pas avoir russi
proposer la cause qui pourra toucher, motiver et rassembler les internautes militants et
sympathisants sur un mme site. MyBo a russi fdrer une communaut autour dun
message, le changement et de la personnalit de Barack Obama.
Pour mener efficacement une campagne sur le web, les partis politiques franais vont
devoir de plus en plus donner de lautonomie leurs sympathisants et donc remettre en cause
leur fonction et leur organisation. Pour gagner le pouvoir, les partis politiques devront daborden perdre un peu.
Actuellement, nous pouvons dresser un bilan plutt ngatif de ces deux plateformes. Elles
nont pas pass avec succs lexamen des lections rgionales et nont pas su rebondir par la
suite.
Pourtant, peu avant ces lections, certains signes mettaient en perspective les faiblesses de
ces deux plateformes. Aucune des deux navait russi rassembler un nombre important de
membres. Ds leur lancement, les deux concurrent staient livrs une vritable guerre des
chiffres82. Des chiffres parfois errons : mi- janvier, lUMP revendiquait 60 000 inscrits sur
Createurs des Possibles alors que le site web nen recensait que 1 50083. Un mois et demiaprs leur lancement, lUMP comptait 7 000 membres contre 20 000 inscrits pour le site du PS.
Mybarackobamaen a rassembl 100 000 en un mois84.
Mme si actuellement aucun des deux sites ne communiquent sur les chiffres officiels
concernant ses membres, il suffit de surfer sur ces deux plateformes pour se rendre compte
que Coopol rassemble une communaut beaucoup plus importante que son concurrent. Une
tendance qui tait constate ds le dpart85. Devant cet chec, lUMP aurait mme song
arrter lactivit de son rseau social86. A lheure o jcris ce texte, aucune information officielle
na t confirme.
81http://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/12/ump-ps-deux-reseaux-sociaux-deux-philosophies-
differentes_1290846_651865.html82
http://www.rue89.com/regions-en-campagne/2010/02/20/parlons-net-le-match-createurs-de-possibles-versus-
coopol-13956783
http://www.lepost.fr/article/2010/01/08/1876500_l-ump-annonce-60-000-membres-sur-les-createurs-du-
possible-qui-en-comprend-moins-de-1500.html84
Source mybarackobama.com85
http://cbwebletter.fr/2010/01/18/la-coopol-met-la-piquette-aux-createurs-de-poss
Top Related