Zohar Jean de Pauly Complet

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PRÉLIMINAIRES Zohar, I. -1a Rabbi Hizqiya (1)ouvrit une de ses conférences par l’exorde, suivant : Il est écrit (2) : « Telle que la rose entre les épines, telle est ma bien-aimée entre les filles. » Que désigne le mot rose ? Il désigne la « communauté d’Israël » (3). De même que la rose est rouge et blanche, de même la communauté d’Israël subit tantôt la rigueur et tantôt la clémence ; et de même que la rose est pourvue de treize pétales, de même la communauté d’Israël est environnée de treize voies (4) de miséricorde. Ainsi, au commencement de la Genèse (5), entre la première mention du nom divin « Élohim » (Myhla) et la seconde, il y a treize mots qui, comme les treize voies de Miséricorde, entourent la communauté d’Israël et la gardent. Puis, il est fait une autre mention du nom divin « Élohim ». Pourquoi cette autre mention ? Pour indiquer le mystère que symbolisent les cinq pétales forts qui entourent la rose. Ce nombre de cinq dési- gne les cinq voies du salut et correspond (6) aux cinq portes de la grâce. C’est à ce mystère que font allusion les paroles de l’Écriture (7) : « Je prendrai le « calice du salut » et j’invoquerai le nom du Seigneur. » Le « calice du salut» désigne la « coupe des bénédictions » qui doit reposer sur cinq doigts seulement, semblable à la rose qui est assise sur cinq pétales forts correspondant aux cinq doigts. Ainsi la rose symbolise la «coupe des bénédictions ». C’est pourquoi, entre le second « Élohim » et le troisième, il y a cinq mots. Après le troisième « Élohim », est écrit le mot « lumière ». Cette lumière a été créée et ensuite cachée et renfermée dans l’ « alliance» (tyrb)symbole du principe fécondateur qui pénètre dans la rose et la féconde. Et c’est cela qui est appelé dans l’Écriture « arbre fruitier qui renferme sa semence » ; et cette semence fécondante se trouve dans l’«alliance » même. Et de même que le symbole de l’« alliance» est formé de quarante-deux grains de matière fécondante, de même les parties constituantes du nom gravé et ineffable sont les quarante-deux lettres avec lesquelles s’opéra l’œuvre de la création. Il est écrit : « Au commencement. » Rabbi Siméon ouvrit une de ses conférences par l’exorde suivant : « Les « fleurs» paraissent sur la terre, l’époque de tailler est venue et la voix de la tourterelle s’est fait entendre dans notre pays. » « Les fleurs », c’est l’œuvre de la création. « Paraissent sur la terre », quand ? Au troisième jour de la création, comme il est dit : au troisième jour « la terre produi- sit » ; donc les fleurs parurent ce jour-là sur la terre. « L’époque de tailler est venue » désigne le quatrième jour de la création, dans lequel eut lieu la chute des démons. C’est en raison de cet événement que le mot « M’oroth » (= Lumières) est écrit sans vav tram et peut se traduire par « malédiction ». « Et la voix de la tourterelle » désigne le cinquième jour de la création ; car à propos de ce jour il est écrit : « Faisons l’homme», l’homme qui, plus tard, lors de la proclamation de la loi, dira : « Nous ferons » avant de dire : « Nous entendrons», c’est-à-dire qui prendra l’engagement d’observer la loi avant même d’avoir entendu sa proclamation [1b]. En effet, dans les deux textes se trouve l’expression identique : « Nous ferons. » « Dans notre pays » désigne le jour du Sabbat, symbole du « pays de la vie », qui est le monde futur, monde des âmes, monde des consolations. « Les fleurs», ce sont les âmes des Pa- triarches, qui préexistaient dans la pensée de Dieu avant la création, et entrèrent et furent cachées dans l’autre monde, d’où elles émigrent et vont habiter le corps d’un prophète véritable. Ainsi, lorsque Joseph naquit, elles vinrent se cacher en lui ; et quand il monta « en terre sainte», il les y fixa. Et c’est là la signification des mots : « Les fleurs paraissent dans le. pays » : les âmes des patriarches apparaissent en ce monde. Et quand apparaissent-elles ? L’Écriture répond : Au moment où l’arc-en-ciel apparaît en ce monde. Car c’est le moment appelé « l’époque de tailler », c’est-à-dire, le temps d’exterminer les coupables de ce monde. Mais pourquoi les coupables sont-ils sauvés ? Parce que « les fleurs paraissent sur la terre ». Si elles ne paraissaient point, les coupables ne pourraient pas subsister, et le monde ne subsisterait pas. Et qui soutient le monde et détermine l’apparition des patriarches ? C’est la voix des petits enfants (8) qui étudient la Tora ; et c’est grâce aux petits enfants que le monde est sauvé, comme il est écrit" : « Nous te ferons des tourterelles d’or », c’est-à-dire les tout jeunes enfants, ainsi qu’il est dit ailleurs : « Tu feras deux chérubins d’or. » Il est écrit : « Au commencement. » Rabbi Éléazar ouvrit une de ses conférences par l’exorde suivant : « Levez (Is., XL, 28) les yeux en haut et considérez qui a créé cela. » « Levez les yeux en haut », vers quel endroit ? Vers l’endroit où tous les regards sont tournés. Et quel est cet endroit, ? C’est l’ « ouverture des yeux » (Mynye xtp). Là vous apprendrez que le mystérieux Ancien, éternel objet des recherches, a créé cela. Et qui est-il ? - « Mi » (= Qui). C’est celui qui est appelé l’ « Extrémité du ciel », en haut, car tout est en son pouvoir. Et c’est parce qu’il est l’éternel objet des recherches, parce qu’il est dans une voie mystérieuse et parce qu’il ne se dévoile point qu’il est appelé « Mi » (= Qui) ; et au delà il ne faut point approfondir. Cette Extrémité supérieure 1 Le Zoharé Hammah, d’après un ms. de Palestine, lit « Rabbi Eléazar ». 2 Cant. II,2. Cf. Zohar, II, 189b. 3 Selon tous les commentateurs hnsws tyaw hnsws tyad Nynb est une glose ou note marginale expliquant l’expression Myxwxh Nyb. Aussi dans toutes les éditions, excepté M. , ces mots sont-ils placés entre parenthèses. 4 Cf. Z., III, 233b. 5 Gen., I, 1 et 2. Cf. Z., III, 131b et 147a. 6 M. et S. ont Nwrqaw au lieu de Nwnyaw. 7 Ps. CXV, 13. 8 Certains verront ici, sous cette dénomination de « petits enfants », les Initiés à la doctrine ésotérique. N.T.I : Bien que la règle générale veuille que rwt fasse Myrwt ou Myrt au pluriel, le Z. considère le mot yrwt comme un pluriel de rwt « tourterelle », et par extension « enfant ».

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  • PRLIMINAIRES

    Zohar, I. -1a

    Rabbi Hizqiya (1)ouvrit une de ses confrences par lexorde, suivant : Il est crit (2) : Telle que la rose entre les pines, telle est ma bien-aime entre les filles. Que dsigne le mot rose ? Il dsigne la communaut dIsral (3). De mme que la rose est rouge et blanche, de mme la communaut dIsral subit tantt la rigueur et tantt la clmence ; et de mme que la rose est pourvue de treize ptales, de mme la communaut dIsral est environne de treize voies (4) de misricorde. Ainsi, au commencement de la Gense (5), entre la premire mention du nom divin lohim (Myhla) et la seconde, il y a treize mots qui, comme les treize voies de Misricorde, entourent la communaut dIsral et la gardent. Puis, il est fait une autre mention du nom divin lohim . Pourquoi cette autre mention ? Pour indiquer le mystre que symbolisent les cinq ptales forts qui entourent la rose. Ce nombre de cinq dsi-gne les cinq voies du salut et correspond (6) aux cinq portes de la grce. Cest ce mystre que font allusion les paroles de lcriture (7) : Je prendrai le calice du salut et jinvoquerai le nom du Seigneur. Le calice du salut dsigne la coupe des bndictions qui doit reposer sur cinq doigts seulement, semblable la rose qui est assise sur cinq ptales forts correspondant aux cinq doigts. Ainsi la rose symbolise la coupe des bndictions . Cest pourquoi, entre le second lohim et le troisime, il y a cinq mots. Aprs le troisime lohim , est crit le mot lumire . Cette lumire a t cre et ensuite cache et renferme dans l alliance (tyrb)symbole du principe fcondateur qui pntre dans la rose et la fconde. Et cest cela qui est appel dans lcriture arbre fruitier qui renferme sa semence ; et cette semence fcondante se trouve dans lalliance mme. Et de mme que le symbole de l alliance est form de quarante-deux grains de matire fcondante, de mme les parties constituantes du nom grav et ineffable sont les quarante-deux lettres avec lesquelles sopra luvre de la cration.

    Il est crit : Au commencement. Rabbi Simon ouvrit une de ses confrences par lexorde suivant : Les fleurs paraissent sur la terre, lpoque de tailler est venue et la voix de la tourterelle sest fait entendre dans notre pays. Les fleurs , cest luvre de la cration. Paraissent sur la terre , quand ? Au troisime jour de la cration, comme il est dit : au troisime jour la terre produi-sit ; donc les fleurs parurent ce jour-l sur la terre. Lpoque de tailler est venue dsigne le quatrime jour de la cration, dans lequel eut lieu la chute des dmons. Cest en raison de cet vnement que le mot Moroth (= Lumires) est crit sans vav tram et peut se traduire par maldiction . Et la voix de la tourterelle dsigne le cinquime jour de la cration ; car propos de ce jour il est crit : Faisons lhomme, lhomme qui, plus tard, lors de la proclamation de la loi, dira : Nous ferons avant de dire : Nous entendrons, cest--dire qui prendra lengagement dobserver la loi avant mme davoir entendu sa proclamation [1b]. En effet, dans les deux textes se trouve lexpression identique : Nous ferons. Dans notre pays dsigne le jour du Sabbat, symbole du pays de la vie , qui est le monde futur, monde des mes, monde des consolations. Les fleurs, ce sont les mes des Pa-triarches, qui prexistaient dans la pense de Dieu avant la cration, et entrrent et furent caches dans lautre monde, do elles migrent et vont habiter le corps dun prophte vritable. Ainsi, lorsque Joseph naquit, elles vinrent se cacher en lui ; et quand il monta en terre sainte, il les y fixa. Et cest l la signification des mots : Les fleurs paraissent dans le. pays : les mes des patriarches apparaissent en ce monde. Et quand apparaissent-elles ? Lcriture rpond : Au moment o larc-en-ciel apparat en ce monde. Car cest le moment appel lpoque de tailler , cest--dire, le temps dexterminer les coupables de ce monde. Mais pourquoi les coupables sont-ils sauvs ? Parce que les fleurs paraissent sur la terre . Si elles ne paraissaient point, les coupables ne pourraient pas subsister, et le monde ne subsisterait pas. Et qui soutient le monde et dtermine lapparition des patriarches ? Cest la voix des petits enfants (8) qui tudient la Tora ; et cest grce aux petits enfants que le monde est sauv, comme il est crit" : Nous te ferons des tourterelles dor , cest--dire les tout jeunes enfants, ainsi quil est dit ailleurs : Tu feras deux chrubins dor.

    Il est crit : Au commencement. Rabbi lazar ouvrit une de ses confrences par lexorde suivant : Levez (Is., XL, 28) les yeux en haut et considrez qui a cr cela. Levez les yeux en haut , vers quel endroit ? Vers lendroit o tous les regards sont tourns. Et quel est cet endroit, ? Cest l ouverture des yeux (Mynye xtp). L vous apprendrez que le mystrieux Ancien, ternel objet des recherches, a cr cela. Et qui est-il ? - Mi (= Qui). Cest celui qui est appel l Extrmit du ciel , en haut, car tout est en son pouvoir. Et cest parce quil est lternel objet des recherches, parce quil est dans une voie mystrieuse et parce quil ne se dvoile point quil est appel Mi (= Qui) ; et au del il ne faut point approfondir. Cette Extrmit suprieure

    1 Le Zohar Hammah, daprs un ms. de Palestine, lit Rabbi Elazar . 2 Cant. II,2. Cf. Zohar, II, 189b. 3 Selon tous les commentateurs hnsws tyaw hnsws tyad Nynb est une glose ou note marginale expliquant lexpression Myxwxh

    Nyb. Aussi dans toutes les ditions, except M. , ces mots sont-ils placs entre parenthses. 4 Cf. Z., III, 233b. 5 Gen., I, 1 et 2. Cf. Z., III, 131b et 147a. 6 M. et S. ont Nwrqaw au lieu de Nwnyaw. 7 Ps. CXV, 13. 8 Certains verront ici, sous cette dnomination de petits enfants , les Initis la doctrine sotrique. N.T.I : Bien que la rgle gnrale veuille que rwt fasse Myrwt ou Myrt au pluriel, le Z. considre le mot yrwt comme un pluriel de

    rwt tourterelle , et par extension enfant .

  • du ciel est appele Mi (= Qui). Mais il y a une autre extrmit en bas, appele M (= Quoi)(9). Quelle diffrence y a-t-il entre lune et lautre ? La premire, mystrieuse, appele Mi est lternel objet des recherches ; et, aprs que lhomme a fait des recherches, aprs quil sest efforc de mditer et de remonter dchelon en chelon jusquau dernier, il finit par arriver M (= Quoi). Quest-ce que tu as appris ? quest-ce que tu as compris ? quest-ce que tu as cherch ? Car tout est aussi myst-rieux quauparavant. Cest ce mystre que font allusion les paroles de lcriture : M (= Quoi), je te prendrai tmoin, M (= Quoi), je te ressemblerai. Lorsque le Temple de Jrusalem fut dtruit, une voix cleste se fit entendre et dit : M (= Quoi) te donnera un tmoignage , car chaque jour, ds les premiers jours de la cration, jai tmoign, ainsi quil est crit : Je prends au-jourdhui tmoin le ciel et la terre. M te ressemblera , cest--dire te confrera des couronnes sacres, tout fait sembla-bles aux siennes, et te rendra matre du monde, ainsi quil est crit : Est-ce l la ville dune beaut si parfaite, etc. , et ailleurs : Jrusalem qui est btie comme une ville dont toutes les parties sont dans une parfaite harmonie entre elles. M (= Quoi) deviendra ton gal , cest--dire il prendra en haut la mme attitude que tu observeras en bas ; de mme que le peuple sacr nentre plus aujourdhui dans les murs saints, de mme je te promets de ne pas entrer dans ma rsidence en haut avant que toutes les troupes soient entres dans tes murs en bas. Que cela te serve de consolation, puisque sous cette forme de Quoi (M) je se-rai ton gal en toutes choses. Et sil en est ainsi, le dbordement de tes maux est semblable une mer (Lam., l; c.). Mais si tu penses que ton mal est sans gurison et sans fin, dtrompe-toi, Mi te gurira (Lam., l; c). Car (Mi), celui qui est lchelon sup-rieur du mystre et dont tout dpend, te gurira et te rtablira ; Mi, extrmit du ciel den haut, et M, extrmit du ciel den bas. Et cest l lhritage de Jacob qui forme le trait dunion entre lextrmit suprieure Mi et lextrmit infrieure M, car il se tient au milieu delles. Telle est la signification du verset : Mi (= Qui) a cr cela (Is., XI, 26).

    Sadressant son fils, Rabbi Simon dit : lazar, mon fils, continue expliquer le verset, afin que soit dvoil le mystre su-prme que les enfants de ce monde ne connaissent pas encore. Rabbi lazar garda le silence. Prenant alors la parole, Rabbi Si-mon dit : lazar, que signifie le mot lh (= Cela) ? Il ne peut pas dsigner les toiles et autres astres, puisquon les voit toujours et puisque les corps clestes sont crs par M , ainsi quil est crit (Ps., XXXIII, 6) : Par le Verbe de Dieu, les cieux ont t crs. Il ne peut pas non plus dsigner des objets secrets, attendu que le mot lh ne peut se rapporter qu des choses visibles. Ce mystre ne mavait pas encore t rvl avant le jour o, comme je me trouvais au bord de la mer, le pro-phte lie mapparut. Il me dit : Rabbi, sais-tu ce que signifient les mots : Qui (Mi) a cr cela (lh) ? Je lui rpondis : Le mot lh dsigne les cieux et les corps clestes ; lcriture recommande lhomme de contempler les uvres du Saint, bni soit-il, ainsi quil est crit (Ps., VIII, 4) : Quand je considre tes cieux, uvre de tes doigts, etc. [2a], et un peu plus loin (Ibid., 10) : Dieu, notre matre, que ton nom est admirable sur toute la terre. lie me rpliqua : Rabbi, ce mot renfermant un secret a t prononc devant le Saint, bni soit-il, et la signification en fut dvoile dans lcole cleste, la voici : Lorsque le Mystre de tous les Mystres voulut se manifester, il cra dabord un point (10), qui devint la Pense divine ; ensuite il y dessina toutes espces dimages, y grava toutes sortes de figures et y grava enfin la lampe sacre et mystrieuse, image reprsentant le mystre le plus sacr, uvre profonde sortie de la Pense divine. Mais cela ntait que le commencement de ldifice, existant sans toutefois exister encore, cach dans le Nom, et ne sappelant ce moment que Mi . Alors, voulant se manifester et tre appel par son nom, Dieu sest revtu dun vtement prcieux et resplendissant et cra lh (Cela), qui sajouta son nom. lh , ajout Mi renvers, a form Elohim . Ainsi le mot lohim nexistait pas avant que fut cr lh . Cest ce mystre que les coupables qui adorrent le veau dor firent allusion lorsquils scrirent (Ex., XXXII, 4) : lh est ton Dieu, Isral.

    Et de mme que dans la cration Mi reste toujours attach lh , de mme en Dieu ces deux noms sont insparables. Cest grce ce mystre que le monde existe. Aprs avoir ainsi parl, le prophte lie senvola et je ne lai plus revu. Et cest de lui que jai appris lexplication de ce mystre. Rabbi lazar et tous les compagnons s approchrent alors de Rabbi Simon et se pros-ternrent devant lui en pleurant. Si nous ntions venus en ce monde, disaient-ils, que pour entendre ces paroles, cela nous et suffi. Continuant son discours, Rabbi Simon dit : Ainsi le ciel et tous les corps clestes ont t crs laide de M , car il est crit (Ps., VIII, 4) : Quand je considre tes cieux, ouvrage de tes doigts, etc. , et un peu plus loin (Ibid., 2) : ternel notre Dieu M (= Que) ton nom est admirable sur toute la terre, toi qui donnes ta parure au ciel . Au ciel , pour sajouter son nom, car une lumire cre lautre ; lune revt lautre et elle sajoute au nom den haut. Telle est la signification des paroles : Au commencement, Dieu cra lohim. lh sajoutant Mi , qui est en haut, forma lohim ; car M, qui est en bas, nexistait pas encore et ne fut cr quau moment o les lettres manaient les unes des autres, lh den haut vers lh den bas ; et la mre prte la fille ses vtements et la pare de ses joyaux. Et quand est-ce quelle la parera de ses joyaux comme il convient ? Lorsque tous les mles se prsenteront devant le Seigneur tout-puissant ainsi quil est crit (Ex., XXIII, 17 et XXXIV, 23) : Tous les mles se prsenteront trois fois lanne devant le matre Dieu. Or, celui-ci est appel Matre , ainsi quil est crit (Josu, III, 11) :. Larche de lalliance, Matre de toute la terre. Ainsi si on remplace le h (h) de M (h), qui est limage du principe femelle, par la lettre i de Mi , qui est limage du principe mle, et si on y ajoute les lettres de lh , manes den haut, grce Isral, on forme lohim den bas. Telle est la signification des paroles de lcriture : Mes larmes mont servi de pain le jour et la nuit, lorsquon me dit tous les jours : Ou est ton lohim? (Ps., XLII, 4) Je me suis souvenu de Cela (lh) et jai r-pandu mon me au dedans de moi-mme. Je me suis souvenu de cela et jai vers des larmes , pour faire maner les lettres les unes des autres, pour faire maner leh et former , lohim, comme il est dit : Je les ferai descendre den haut jusqu la maison dlohim , en bas, pour former un lohim pareil lohim den haut. Par quel moyen ? Par des chants et par des actions de grces.

    9 N.T.I : Les Hbreux ont donn sotriquement leur M le sens courant du Ma gyptien (v. tome IV, p. 42, note 1).

    Moyen mnmonique de se rappeler le mystre dont ils donnent le sens cach leur M . 10 Cf. Z., I, 15a ; II, 105a, 226b et 228a.

  • A ces paroles, Rabbi Simon se mit pleurer et interrompit son discours. Profitant de cette courte pause, Rabbi lazar dit : Mon silence ma valu un discours de mon pre relatif ldification du Temple den haut et du Temple den bas ; et ainsi se vrifie le proverbe qui dit : La parole vaut un sl, mais le silence en vaut deux ; car les paroles que jai prononces prcdemment valent un sl ; mais le silence que jai gard ensuite en vaut deux, attendu que grce ce silence jai appris que Dieu a cr les deux mondes, celui den haut et celui den bas la fois.

    Rabbi Simon dit : Nous allons maintenant expliquer la seconde partie du verset prcite : Qui fait sortir. Lcriture parle des deux hypostases, dont lune, cest--dire Mi , fait sortir lautre, cest--dire M. Bien que lcriture se serve du mot sortir , le Mi den haut et le M den bas ne sont en ralit quune seule et mme chose ; et quand on dit que M sort de Mi , il ne faut pas prendre le mot sort la lettre. De mme on dit dans la bndiction quon prononce avant de manger le pain : Bni soit Dieu, notre Matre, le Roi de lUnivers, qui fait sortir le pain de la terre. Ici non plus le mot sortir ne doit pas tre pris la lettre. Leurs armes dans le nombre , cest--dire le nombre de six cent mille, qui se tiennent tous comme un seul homme, ce sont les armes de Mi et celles de M . On ne parle ici que des classes, car leurs subdivisions sont innom-brables. Il appela par le nom. Que signifient ces mots ? Diras-tu quil les appela par leurs noms ? Dans ce cas il faudrait : par son nom (chacun par son nom) ; mais voici ce que cela signifie : Lorsque ce degr ntait pas encore entr dans le nom, et quil sappelait seulement Mi , il (Dieu) nenfantait, ni produisait les choses caches, chacune selon son espce, bien que toutes fussent caches en lui. Mais ds quil eut cr lh, que lh se fut ajout son nom et quil fut appel lohim (hla + ym), alors, par la vertu de ce nom, il les produisit en totalit. Cest l le sens de : Il appela par le nom ; par son nom il appela et produi-sit toutes les espces destines exister. Cest de la mme faon quil est crit : Vois : jai appel par le nom (Bealel), cest--dire : jai prononc mon nom pour que Bealel ft tabli dans ses fonctions. De beaucoup la grandeur. Que signifient les mots : De beaucoup la grandeur ? Cela veut dire que la volont de Dieu, qui saccomplit la premire chelle, saccomplit ga-lement en bas [2b] par une voie mystrieuse. Et puissant en force. Cest le mystre du monde cleste, savoir quil (le mot lh) est entr dans le nom lohim, comme nous lavons dit. Aucun homme ne manque , cest--dire aucun ne manque de ces six cent mille quil a produits par la vertu du nom. De mme que les Isralites, alors mme quils taient dcims par suite de leurs pchs, ont toujours conserv le nombre de six cent mille, chaque dnombrement, sans quun seul homme manqut, de mme aucun des mondes ici-bas ne manquera jamais, parce quils correspondent aux armes clestes.

    Il est crit : Au commencement. Rab Hammenouna, le Vieillard, dit : Nous trouvons au commencement de la Gense un ren-versement dordre des lettres initiales. Ainsi les deux premiers mots de la Gense ont pour initiales la lettre Beth (b) : Bereschith (= au commencement), Bara (= cra), et les deux mots suivants ont pour initiales la lettre Aleph (a) : lohim (= Dieu), Eth (= Le). Voici la raison de cette interversion : Dj, deux mille ans avant la cration du monde, les lettres taient caches, et le Saint, bni soit-il, les contemplait et en faisait ses dlices. Lorsquil voulut crer le monde, toutes les lettres, mais dans lordre renvers, vinrent se prsenter devant lui. Ce fut la lettre Thav (t) qui se prsenta la premire. Matre des mondes, dit-elle, quil te plaise de te servir de moi pour oprer la cration du monde, attendu que je forme la lettre finale du mot meth (= Vrit) grav sur ton sceau ; et, comme toi-mme tu es appel meth, il convient au Roi de commencer par la lettre finale du mot meth et de sen servir pour oprer la cration du monde. Le Saint, bni soit-il, lui rpondit : Tu es, en effet, digne ; mais il ne convient pas que je me serve de toi pour oprer la cration du monde, parce que tu es destine tre marque sur le front des hommes fidles qui ont observ la loi depuis lAleph jusquau Thav, et tre ainsi mle la mort, et aussi parce que tu formes la lettre finale du mot Maveth (= Mort). Pour ces raisons, il ne me convient pas de me servir de toi pour oprer la cration du monde. La lettre Thav sortit immdiatement. La lettre Schin (s) entra alors, et, aprs avoir formul la mme demande, elle fit valoir linitiale du nom divin Schada, qui est un Schin ; il convient, dit-elle, que lon se serve de linitiale du nom sacr Schada, pour oprer la cration du monde. Dieu lui rpondit : En effet, tu es digne, tu es bonne et tu es vraie. Mais des faussaires se serviront de toi pour affirmer leurs mensonges, en tassociant les deux lettres Qoph (q) et Resch (r) pour former ainsi le mot Schqer (= Men-songe). De ces paroles, il rsulte, que pour faire accepter leurs mensonges, les menteurs sont obligs dy mler aussi un principe de vrai. Cest pourquoi le mot Schqer (= Mensonge) est lanagramme du mot Qscher (= Noeud, Faisceau), parce que, pour faire accepter les mensonges, le menteur est oblig de commencer par dire une vrit (Sch), laquelle il ajoute ensuite le men-songe (Q et R) , de faon lier ces deux ensemble. Aussi, bien que tu sois vraie, lettre Schin,. puisque les trois patriarches se-ront runis en toi , il ne convient pas de me servir de toi pour oprer la cration du monde, parce que tu seras souvent associe aux deux lettres Q et R qui sont du mauvais ct, du ct du dmon. Quand la lettre Schin eut entendu ces paroles, elle sortit. Ce que voyant, les lettres Q et R ( q et r) nosrent pas se prsenter. La lettre addi (u) entra ensuite et formula la mme demande, en se rclamant du fait que le mot juste (addiqim) appliqu aux hommes et Dieu commence par la lettre addi, ainsi quil est crit : Car le Seigneur est juste (addiq) et il aime la justice (edaqoth). Dieu lui rpondit : En effet, tu es juste, lettre ad-di ; mais il ne me convient pas de me servir de toi pour oprer la cration du monde, attendu que tu dois tre cache pour ne pas donner prise lerreur. Car ta forme primitive est un Noun ( )oblique, principe femelle, sur lequel vient sajouter un Yod (y), principe mle. Et tel est le mystre de la cration du premier homme, qui fut cr double face, deux figures tournes en sens in-verse (11), dos contre dos ; et cest pourquoi le Yod est prsent de dos (u), non de face ( ), soit quil regarde en haut, soit quil regarde en bas. Toi aussi, dit Dieu addi, tu seras un jour divise en deux, mais tu iras autre part. La lettre addi sortit et sen alla. La lettre P (p) entra ensuite et formula la mme demande, en faisant valoir ce fait que le mot Pedouth (= Dlivrance), que Dieu doit accomplir un jour dans le monde) commence par un P. Dieu lui rpondit : Tu es digne, en effet ; mais le mot

    11 N.T.I : De Pauly ajoute : ...Pour indiquer que les deux essences divines ne sunissent pas comme les hommes, et ce nest que

    spirituellement quelles ont engendr langle aigu sur lequel elles chevauchent. Par Nqrh yux, le Z. dsigne la base du ad-di qui daprs le Tiqoun Zohar lui-mme (74b), avait primitivement la forme dun angle aigu.

  • Pscha (= Pch) commence galement par un P. Tu as, en outre, la tte baisse (p) (12), symbole du pcheur qui, honteux, baisse la tte et tend les bras. A la lettre Ayin (e), Dieu rpondit quelle commence le mot Avon (= Crime) ; bien quelle fit valoir le fait quelle commence galement le mot Anava (= Modestie), le Saint, bni soit-il, lui dit : Je ne me servirai pas de toi pour oprer la cration du monde. Quand elle sortit,. la lettre Samekh (o) entra [3a] et formula la mme demande que les let-tres prcdentes en se rclamant de ce fait que le verset o il est dit : Le Seigneur soutient tous ceux qui chancellent , com-mence par un mot dont linitiale est un Samekh (Samekh = Soutien). Dieu lui rpondit : Cest prcisment cause de ta destina-tion que tu dois rester ta place ; car, si je tenlevais de ta place pour me servir de toi pour oprer la cration du monde, quadviendrait-il de ceux qui sont prs de tomber, puisquils sappuient sur toi ? La lettre sortit immdiatement. A la lettre Noun (n), qui fit valoir le fait que les mots Nora (= craint) et Nava (= Beau) commencent par cette lettre, Dieu rpondit : Retourne ta place, car cest cause de toi que le Samekh est retourn la sienne : et appuie-toi sur lui, (le Noun tant linitiale de Nophelim, ceux qui chancellent du verset prcit). Incontinent, retournant sa place, elle sortit. La lettre Mm(m) fit valoir le fait quelle est linitiale du mot Mlekh (= Roi). Cest vrai, lui rpondit Dieu ; mais je ne me servirai pas de toi pour oprer la cration du monde, attendu que le monde a besoin dun Roi ; reste donc ta place avec les autres lettres formant le mot M-lekh , cest--dire avec la lettre Lamed (l) et avec la lettre Caph (k), car il ne sied pas au monde de rester sans Roi. A ce mo-ment, la lettre Caph, vivement impressionne, descendit du trne glorieux et scria : Matre de lUnivers, quil te plaise de te servir de moi pour oprer la cration du monde, attendu que je suis linitiale du mot qui exprime ta gloire (Cabod = Gloire). Lors-que la lettre Caph quitta le trne, deux cent mille mondes, ainsi que le trne lui-mme, furent branls ; la secousse tait si vio-lente quelle menaait tous les mondes dcroulement. Le Saint, bni soit-il, dit alors cette lettre : O Caph, Caph, pourquoi per-sistes-tu rester ici ? Retourne ta place, car je ne me servirai pas de toi pour oprer la cration du monde, parce que tu es linitiale du mot exprimant lextermination (Cala = exterminer). Retourne donc ton trne et reste-l. Aussitt la lettre sortit et retourna sa place. La lettre Yod (y) entra ensuite et formula la mme demande en faisant valoir ce fait quelle forme linitiale du nom sacr (hwhy). Dieu lui rpondit : Cest assez pour toi dtre grave et marque en moi-mme et dtre le point de dpart de toute ma volont ; il ne convient pas de te retrancher de mon nom. La lettre Tth (j) entra son tour et formula la demande des lettres prcdentes, en faisant valoir ce fait quelle est linitiale du mot Tob (= Bon), qui est un des attributs de Dieu, appel le Bon et le Juste. Dieu lui rpondit : Tu ne serviras pas la cration du monde ; dabord parce que le bien que tu reprsentes est enferm et cach en toi, ainsi quil est crit : O combien est grande labondance de votre bont, que vous avez cache pour ceux qui vous craignent ; donc le bien est rserv pour le monde futur ; tu nas, par consquent, rien de commun avec le monde que je veux crer maintenant. Ensuite, parce que cest prcisment cause du bien que tu caches en toi que les portes du temple seront enfonces dans la terre, ainsi quil est crit : Ses portes sont enfonces dans la terre. Et enfin parce que tu as pour voisine la lettre Heth (x), avec laquelle tu constitues le mot qui dsigne le pch : Heth. Cest aussi pour cette raison que ces deux lettres (x et j) ne figureront dans aucun des noms des douze saintes tribus. La lettre Heth sortit alors immdiatement. Ensuite entra la lettre Zayin (z) qui formula la mme demande que les lettres prcdentes, en faisant valoir quelle est linitiale du mot qui commence le verset concernant lordonnance du repos sabbatique, ainsi quil est crit : Souviens-toi de sanctifier le jour du Sabbat. Dieu lui rpondit : Je ne me servirai pas de toi pour oprer la cration du monde, parce que tu es limage de la guerre, puisque tu as la forme dun sabre affil et dun poignard de guerre, semblable celle de la lettre finale Noun (N). La let-tre (z) sortit alors immdiatement. La lettre Vav (w) entra et formula la mme demande que les lettres prcdentes, en faisant valoir le fait de faire partie du nom sacr (hwhy). Dieu lui rpondit : Cest assez pour toi et pour ta voisine la lettre H (h) de fi-gurer dans mon nom, de constituer le mystre renferm dans mon nom et dtre graves et marques dans mon nom. Aussi ne me servirai-je pas de vous pour oprer la cration du monde. Les lettres Daleth (d) et Ghimmel (g) entrrent ensuite et formul-rent leur tour la demande des lettres prcdentes. Dieu leur rpondit : Cest assez pour vous galement de rester ensemble lune ct de lautre ; car il y aura toujours des pauvres dans le mondes auxquels on doit du secours ; or Daleth (= Pauvret) dsigne le pauvre, et Ghimmel (= secourir) dsigne le bienfaiteur qui assiste le premier. Donc restez lune ct de lautre pour que lune nourrisse lautre. La lettre Beth (b) entra ensuite en disant : Matre de lUnivers, quil te plaise de te servir de moi pour oprer. la cration du monde, attendu que je suis linitiale du mot dont on se sert pour te bnir (Baroukh = bni soit) en haut et en bas. Le Saint, bni soit-il, lui rpondit : Cest effectivement de toi que je me servirai pour oprer la cration du monde, et tu seras ainsi la base de luvre de la cration. La lettre Aleph (a) resta sa place, sans se prsenter. Le Saint, bni soit-il, lui dit : Aleph, Aleph, pourquoi ne tes-tu pas prsente devant moi, linstar de toutes les autres lettres ? Elle rpondit : Matre de lUnivers, voyant toutes les lettres se prsenter devant toi inutilement, pourquoi me serais-je prsente aussi ? Ensuite [3 b] comme jai vu que tu as dj accord la lettre Beth ce don prcieux, jai compris quil ne sied pas au Roi cleste de reprendre le don quil a fait un de ses serviteurs, pour le donner un autre. Le Saint, bni soit-il, lui rpondit : O Aleph, Aleph, bien que ce soit la lettre Beth dont je me servirai pour oprer la cration du monde, tu auras des compensations, car tu seras la premire de toutes les lettres, et je naurai dunit quen toi ; tu seras la base de tous les calculs et de tous les actes faits dans le monde, et on ne saurait trouver dunit nulle part, si ce nest dans la lettre Aleph. De ce qui prcde il rsulte que le Saint, bni soit-il, a cr les formes des grandes lettres clestes auxquelles correspondent les petites lettres dici-bas. Cest pourquoi les premiers deux mots de lcriture ont pour initiales deux Beth (Bereschith Bara) et les deux mots suivants deux Aleph (lohim Eth), afin dindiquer les let-tres clestes et celles de ce bas monde, lesquelles ne sont en ralit que les seules et mmes lettres, laide desquelles sopre tout dans le monde cleste et dans le monde dici-bas.

    Il est crit : Au commencement , Rabbi Yodda dit : Quelle est linterprtation anagogique du mot Bereschith ? Beres-chith, au sens anagogique, signifie Hocm (= la Sagesse), cest--dire, cest par le mystre sublime et impntrable de Hocm

    12 Selon le Mikdasch Melekh, a. I, il faut traduire anwwgk linstar aywyxd dun serpent , au lieu de abwxd coupable . N.T.I : Mais alors comment expliquer les mots : hypwg Nyb hysyr lyeaw Qui retire sa tte entre ses paules? (... En son ventre.)

  • que le monde existe. Lcriture dsigne le Verbe par le mot Bereschith, parce que pour oprer la cration, il fut grav sous la forme dun tourniquet reprsentant les six grandes directions clestes, dont mane tout ce qui existe aux six directions de ce monde, les quatre points cardinaux, le haut et le bas. Ces six directions clestes donnent naissance six sources, dont les eaux, bien quelles prennent des directions diffrentes, vont, la fois, se jeter toutes dans le grand ocan. La signification du mot Bereschith est donc celle-ci : Bara schith (= il a cr six) et cest l la signification de Bereschith. Et qui la cr ? Cest lineffable, le Mystrieux, linconnu.

    Rabbi Hiy et Rabbi Yoss voyageaient ensemble. Arriv une maison de campagne, Rabbi Hiy dit Rabbi Yoss : Linterprtation Bara schith est certainement bien fonde, puisque nous trouvons dans la Gense les uvres cres pendant six jours, pas plus ; il y a dautres uvres caches dont on parle dans un trait sur les mystres de la Gense. Le Saint mystrieux a grav un point ; et dans ce point il a renferm toutes les uvres de la cration, comme on renferme tout avec une clef ; et cette clef renferme le tout dans un palais. Bien que ce soit le palais qui renferme tout, cest la clef qui est lessentiel ; cest elle qui ou-vre et qui ferme. Ce palais renferme des mystres les uns plus grands que les autres. Le palais de la Cration est pourvu de cin-quante portes. Dix portes donnent chacun des quatre points cardinaux ce qui fait quarante portes. Neuf portes donnent au ciel et une porte, laquelle on ne sait pas si elle donne accs en haut ou en bas ; cest pourquoi elle est mystrieuse. Une seule serrure est toutes ces portes. Il y a un endroit pour recevoir la clef ; cet endroit porte lempreinte de la clef ; on ne peut le connatre que par la clef. Et voici quoi fait allusion le Bereschith bara lohim . Bereschith cest la clef qui renferme tout. Cest elle qui ou-vre et qui ferme les six portes qui donnent accs aux six directions et qui par consquent les contient en elle. Bereschith contient un mot ouvert, cest--dire fcond : schith, en mme temps quun mot ferm, cest--dire strile : bara. R. Yoss dit : Cest bien l lexplication du verset. Je lai entendu de la Lampe sacre, qui disait que Dieu avait cr un mot ferm. Tant que la cration tait ferme par le mot bara le monde ne pouvait pas encore exister, et le Tohou planait sur tout. Et, lorsque Tohou dominait, le monde nexistait pas. Tant que les cinquante portes du palais taient fermes, les uvres de la cration sont demeures striles et infructueuses. Et quand est-ce que cette clef a ouvert et rendu fcond le monde ? - Lorsque Abraham vint, comme dit le ver-set : Cela (lh) est les produits du ciel et de la terre, behibaram lorsquils furent crs) ; or nous avons appris que behiba-ram est lanagramme du mot : beabraham (= par Abraham). La cration, qui tait dabord ferme par le mot Bara, fut ouverte et fconde par la transposition des lettres du mot bara en Eber (rba, arb), principe sacr sur lequel repose le monde. Le nom de Dieu Elohim, ainsi que celui dAbraham se sont complts de la mme faon. Le premier aspect de Eber (commencement du nom dAbraham) est Bara, le premier aspect du Mystrieux cach (Dieu = lohim) est Mi ; Mi a cr lh ; M qui en dcoule est galement un des aspects du nom divin. Si, dtachant le M (m) de Mi et de M , nous ajoutons le Iod (y) et le H (h) qui restent, lun lh , lautre Eber , il ne manquera plus que la mme finale M (m) pour former les deux noms lohim et Abraham . [4 a] Dautres expliquent la composition de ces noms ainsi : Dieu prit Mi et lajoutant lh , forma lohim, puis il prit M et lajoutant Eber , en forma Abraham. Et voici lexplication du verset cit : lh (Cela) a produit les enfants du ciel et de la terre, behibaram, cest--dire lorsque le nom dAbraham fut cr. Et ce nest qu par-tir de ce jour que le nom saint fut complet comme il est dit : Du jour o lohim-Dieu cra le ciel et la terre.

    Rabbi Hiy se prosterna, et, baisant la terre, il scria en pleurant : O terre, terre, combien tu es opinitre et insolente, de r-duire en poussire ceux qui ont fait les charmes des yeux ; tu consumes et anantis toutes les colonnes magnifiques du monde ; combien tu es insolente ! La lampe sainte (Rabbi Simon) qui, jadis, clairait tout le monde, et grce au mrite de laquelle le monde existe, est rduite en poussire par toi. O Rabbi Simon ! Comment se peut-il que toi, qui es le phare clairant les mondes, toi qui soutiens et gouvernes le monde, tu sois rduit en poussire dans la terre ? Aprs un moment de silence et danantissement, Rabbi Hiy reprit : O terre, terre ! Ne tenorgueillis pas ; les colonnes du monde ne seront pas livres ta vo-racit, puisque Rabbi Simon nest pas rduit en poussire dans ton sein.

    Rabbi Hiy se leva et, continuant pleurer, il se remit en route en compagnie de Rabbi Yoss. A partir de ce jour il jena quarante jours, afin de voir Rabbi Simon. Il lui fut rpondu. Tu nes pas digne dune telle vision. Il se mit pleurer et jena quarante autres jours. Alors Rabbi Simon ainsi que son fils Rabbi lazar lui apparurent en vision. Ils taient occups inter-prter le verset biblique prcit ; plusieurs milliers dauditeurs taient attentifs leurs paroles. Pendant ce temps, il vit arriver de nombreux anges ails qui, prenant Rabbi Simon et son fils Rabbi lazar sur leurs ailes, slevrent dans les airs et se rendirent lcole cleste. Tous ces anges ails les attendaient la porte de lcole. Il vit aussi que les anges prenaient alors des couleurs de plus en plus brillantes et rpandaient autour deux une lumire plus clatante que la lumire du soleil. Rabbi Simon prit le premier la parole et dit : Que Rabbi Hiy entre ici et voie combien grandes sont les joies que le Saint, bni soit-il, a rserves pour rjouir les Justes dans le monde futur. Heureux celui qui entre ici sans honte, et heureux celui qui arrive ce monde ferme comme une colonne sans dfaillance. Voyant Rabbi lazar et les autres colonnes (Justes) se lever son entre, il se troubla et alla sasseoir aux pieds de Rabbi Simon. Une voix fit alors retentir ces paroles : Baisse les yeux, ne lve point la tte et ne re-garde pas. Il vit , ce moment une lumire clairant au loin. Et une voix cleste retentit de nouveau et fit entendre ces mots : tres clestes, bien que cachs et invisibles, qui avez les yeux ouverts et parcourez le monde entier, regardez et voyez. Vous, tres den bas, qui tes plongs dans le sommeil, rveillez-vous. Vous qui, avant de monter ici, aviez transform lobscurit en clart et lamer en doux ; vous tous qui, durant votre vie, aviez espr aprs la lumire qui se rpandra lpoque o le Roi visi-tera sa biche (13) par laquelle il sera glorifi et appel le Roi de tous les rois du monde. Mais ceux qui, durant leur passage sur la

    13 N.T.I :... biche : ayaltha... Z., II 9a (tome III, p. 38) : ... Le Roi-Messie appel chevreuil. Et fol 10a (III, p.44) : Cest

    cette biche du matin que David a chant son Psaume. Et qua-t-il chant ? Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi mas-tu abandon-ne ? La biche du matin se plaint davoir t spare de la lumire du jour. (Eli Eli lam schabaqthani.) Le mot biche dsigne bien ici le Messie. Cette dsignation du Rdempteur attendu, sous le nom de biche, agneau, chevreuil, tait com-

  • terre, nont pas espr aprs cette lumire, nont aucune part ici. En mme temps, il aperut plusieurs de ses collgues qui fai-saient cercle autour des (saints) colonnes du monde. Il en vit monter dans lcole cleste, les uns y montaient, les autres en des-cendaient. En tte de tous, il vit arriver le chef des anges ails (Metatron) qui disait avoir entendu derrire le trne (14) de Dieu, que le Roi a visit chaque jour sa biche et se souvient quelle est abaisse jusqu terre. Le Roi frappe les trois cent quatre-vingt-dix cieux qui sbranlent tous et tremblent deffroi. [4 b] L-dessus, le Roi des larmes brlantes comme le feu, qui tombent dans le grand ocan. Ce sont ces larmes qui ont fait natre lange prpos la mer et qui le font subsister. Il sanctifie le nom du Roi saint et sengage absorber toutes les eaux de la cration et les runir dans son intrieur lpoque o se runiront tous les peuples de la terre contre le peuple sacr. A cette poque, les eaux de la mer tariront et locan sera travers sec. Pendant le temps que le chef des anges ails parlait ainsi, Rabbi Hiy entendit une voix cleste prononcer les paroles suivantes : Faites place, faites place, car le Roi-Messie arrive lcole de Rabbi Simon. Tous les bienheureux prsents lcole de Rabbi Simon sont des chefs dcoles ; et ce nest quaprs avoir accompli leur mission comme chefs dcole, quils sont autoriss monter, en qua-lit dauditeurs, lcole suprieure de Rabbi Simon. Le Messie visite toutes les coles clestes et coute les explications des mystres par les docteurs de la loi. Au mme instant, le Messie entra, portant plusieurs couronnes clestes que les chefs dcoles lui avaient mises sur sa tte. Tous les docteurs de la loi prsents, ainsi que Rabbi Simon, se levrent, et la lumire que ce der-nier rpandait sleva jusquau faite des cieux. Sadressant Rabbi Simon, le Messie dit : Matre, tu es favoris par le ciel ; car les mystres que tu nonces montent vers Dieu sous la forme de trois cent et soixante-dix lumires ; et chacune de ces lumires se subdivise en six cent treize motifs qui se baignent dans des fleuves de baume pur. Le Saint, bni soit-il, ne visite que trois coles clestes, pour y couter les explication des mystres : la tienne, celle dzchias, roi de Juda, et celle dAhias de Silo. Aussi ne suis-je entr ici couter tes explications des mystres que parce que jy ai vu pntrer le chef des anges ails, car je sais que ce chef nentre dans aucune autre cole, sauf la tienne. Lorsque le Messie cessa de parler, Rabbi Simon lui rapporta le serment pro-nonc par le chef des anges ails. Le Messie trembla et leva la voix avec une telle force que les cieux, le grand ocan et le lvia-than en furent branls ; et il semblait un moment que le monde allait seffondrer. A ce moment, le Messie, apercevant Rabbi Hiy assis aux pieds de Rabbi Simon, scria : Qui est-ce qui a introduit dans ce monde cleste un homme habill dun vte-ment de ce monde (terrestre) ? Rabbi Simon rpondit : Cest Rabbi Hiy, le flambeau de la loi. Sil en est ainsi, dit le Messie, quil entre lui, ainsi que son fils, pour pouvoir faire partie de ton cole. Rabbi Simon rpliqua : Quon lui accorde un dlai. On lui accorda un dlai et il quitta le ciel en tremblant, les yeux pleins de larmes (15). Rabbi Hiy fut vivement mu, et il scria en pleurant : Heureux le sort des Justes dans le monde cleste, et heureux le sort du fils de Jocha qui a mrit tant de gloire. Cest lui que font allusion les paroles de lcriture : Je marche dans les voies de la justice et au milieu des sentiers de la prudence, pour en-richir ceux qui maiment et pour remplir leurs trsors. Sentant sa fin prochaine, Rabbi Hiy pronona ces paroles : O mon me, retourne ta demeure. Divine tincelle dune flamme cleste, quitte ce corps mortel et vil. Jouet de la crainte, de lesprance et de la douleur, il est temps que tu tlves vers les rgions de la vie. Jentends dj la voix harmonieuse des anges qui appelle mon me. Je me trouble, ma force me quitte, ma vue steint, je cesse de respirer. La terre disparat sous mes pieds et le ciel souvre mes yeux ; mes oreilles sont frappes du chant des anges ails. Que vois-je ? Quel est cet arbre magnifique,, resplendissant de lumire et embaumant la vote azure, et au sommet duquel vient de descendre la colombe cleste ? Je le reconnais ; cest le Messie-Roi, que jai dj vu lcole cleste de Rabbi Simon. O anges ails ! prtez-moi vos ailes, pour que je monte dun vol plus rapide vers le Messie-Roi. Quoi ! mon me, est-ce l mourir ? O quelle folie que de craindre un pareil ravissement ! O s-pulcre, ou est ta victoire ? O mort, o est ton aiguillon ? Rabbi Hiy cessa de parler, et son me senvola.

    Il est crit : Au commencement. Rabbi Simon ouvrit une de ses confrences par lexorde suivant : Jai mis mes paroles dans ta bouche et je tai mis couvert sous lombre de ma main afin dtablir des cieux et de fonder la terre. Ces paroles de lcriture nous font voir combien il importe lhomme de sappliquer jour et nuit ltude de la doctrine sotrique. Car le Saint, bni soit-il, coute la voix de ceux qui sappliquent ltude de la doctrine sotrique et cre un ciel nouveau laide de chaque mot comportant une ide nouvelle dans lexplication de cette doctrine. Nous avons appris quau moment o la parole, renfermant une ide nouvelle concernant la doctrine, sort de la bouche de lhomme, cette parole slve et comparait devant le Saint, bni soit-il ; et le Saint, bni soit-il, la saisit, la baise et la pare de soixante-dix couronnes composes de lettres graves dans le nom divin. Mais la parole renfermant une explication nouvelle de la Sagesse mystique (Hocm) va se placer sur la tte du Juste, vivant de toute ternit ; et, de l, elle senvole, parcourt soixante-dix mille mondes et monte auprs de lAncien des temps. Or, comme toutes les paroles de lAncien des temps sont de la Sagesse mystique et sont dans les trsors cachs, la parole prononce par lhomme et renfermant

    mune tous les peuples de races smitiques, mme aux Chinois. Le nom de biche est aussi donn Isral. Mais ce pas-sage ne parat pas dsigner Isral.

    14 N.T.I : Trne dsigne prcisment le trne de la Schekhina ou du Messie (dwgrp ou adwgrp ). 15 N.T.I : Ici, de Pauly continue ainsi : A partir de ce jour, Rabbi Hiy entendait tous les matins et tous les soirs ce cri

    dallgresse retentir aux quatre points cardinaux : Prparez le chemin ; le Messie-Roi vient (Isae, XL, 3, 4). O terre, cest du cleste sjour que tu reois ce don. Que les montagnes sabaissent, que les vallons soient combls et que les cdres sinclinent pour lui rendre hommage. Prosternez-vous tous devant le Messie-Roi et flchissez le genou devant celui qui est assis la droite du Saint, bni soit-il. coutez-le, vous, sourds ; voyez-le, vous qui tes aveugles (Is., XLII, 18). Cest lui qui ouvre la vote tincelante des cieux pour inonder le monde dun ocan de lumire (Is., LX, 19, 20) Cest lui qui lie de chanes dairain la mort, et dpouille de son empire le tyran de lenfer. Cest lui que font allusion ces paroles de lcriture (Ps., LXXI, 16) : Que son nom soit bni dans tous les sicles ; son nom subsistera autant que le soleil, et tous les peuples de la terre seront bnis en lui, toutes les nations rendront gloire sa grandeur. Se souvenant de toutes les merveilles quil avait vues au ciel, ainsi que du dlai qui lui avait t accord pour retourner lcole cleste de Rabbi Simon, Rabbi Hiy fut vivement mu.... ; etc

  • une ide nouvelle concernant la doctrine sotrique, va se runir aux paroles de lAncien des temps. Elle prend son vol ensuite et monte dans les dix-huit mondes mystrieux dont il est dit dans lcriture : Lil na point vu, hors vous seul, Dieu ! Elles sortent de l, volent et viennent pleines et compltes" devant lAncien des jours. Alors Celui-ci flaire cette parole qui lui plat plus. que tout le reste ; il la prend et la pare de trois cent et soixante-dix mille couronnes . La parole senvole alors hors de la prsence de lAncien des temps, et en redescendant, elle devient un ciel. Et ainsi, toutes les paroles renfermant des ides nouvelles concernant la doctrine sotrique et conues par lhomme, se mtamorphosent en autant de cieux nouveaux fermement tablis de-vant lAncien des temps, qui les nomme Cieux nouveaux, cest--dire cieux crs , laide dides nouvelles manant de la science sotrique . Quant aux paroles renfermant des ides nouvelles concernant la doctrine exotrique, aussitt sorties de la bouche de lhomme, elles paraissent [5a] devant lAncien des temps et, sortant de l, elles se mtamorphosent en autant de terres de vie ; mais, au lieu de former divers corps spars, elles sunissent en un seul corps au moment o elles quittent le sjour cleste du Saint, bni soit-il, et enveloppent notre terre unique, qui se trouve ainsi renouvele et recre, grce une parole renfermant une ide nouvelle concernant la doctrine exotrique. Cest ces cieux nouveaux que font allusion les paroles de lcriture : Car comme les cieux nouveaux et la terre nouvelle que je cre subsistent devant moi, dit le Seigneur, ainsi subsisteront vos descendants et votre nom. Lcriture ne dit point : que jai crs , au pass, mais que je cre , parce que la cration continue et le renou-vellement de la terre est ininterrompu, grce aux paroles prononces par l'homme, qui renferment des conceptions nouvelles tou-chant la doctrine. Tel est galement le sens du verset prcit de l'criture (Is. LI-16) : J'ai mis mes paroles dans ta bouche, et je t'ai mis couvert sous l'ombre de ma main, afin d'tablir des cieux et de fonder la terre. L'criture ne dit point : afin d'tablir les cieux , c'est--dire dj existants, mais des cieux , cest--dire nouveaux. Rabbi lazar demanda Rabbi Simon : Que signifient les paroles de l'criture : et je t'ai mis couvert sous l'ombre de ma main ? Rabbi Simon lui rpondit : Au moment o Mose reut, au mont Sina, la Loi, plusieurs centaines de mille d'anges clestes, jaloux de la faveur que Dieu daignait accorder Mose, s'ap-prtaient brler celui-ci au moyen de leur souffle brlant, lorsque Dieu le couvrit pour le protger. Chaque fois que la parole de l'homme monte vers le Saint, bni soit-il, celui-ci la couvre et protge celui qui l'a dite, pour que les anges ne soient pas jaloux de cet homme. Il la couvre ainsi jusqu ce qu'elle soit devenue ciel nouveau ou terre nouvelle ; voil pourquoi il est dit : Je t'ai abrit sous l'ombre de ma main pour tablir un ciel et fonder une terre. Il rsulte de l que toute parole qui est cache au re-gard a une utilit suprieure; c'est ce que disent les mots : Je t'ai abrit sous lombre de ma main. Et pourquoi est-elle ainsi couverte et soustraite aux regards ? Pour une utilit suprieure, comme il est crit : Pour tablir un ciel et fonder une terre. C'est d'ailleurs ce qu'on a dj dit. L'criture ajoute : et pour dire Sion : vous tes mon peuple. Ce n'est pas Ammi (yme = mon peuple) qu'il faut lire, mais 'Immi (yme = avec moi) : vous devenez mes associs; de mme que moi je cre des cieux par ma parole, ainsi quil est crit : C'est par la parole du Seigneur que les cieux ont t faits , de mme vous crez des cieux nouveaux. Heureux le sort de ceux qui se consacrent l'tude de la doctrine sotrique !

    Mais que l'on ne pense pas que toute parole renfermant une ide nouvelle relative la doctrine sotrique cre un ciel nou-veau, alors mme qu'elle mane d'un ignorant. Remarquez que toute parole qui sort de la bouche d'un homme non initi dans la doctrine, s'envole, si elle est inexacte. Alors le dmon appel le rus aux paroles mensongres va elle du fond de l'abme et s'avance de cinq cents lieues sa rencontre, s'en empare, redescend au fond de l'abme et y cre, l'aide de cette parole, un ciel de mensonges, appel Tohou . Le dmon parcourt ensuite ce ciel, dont l'tendue est de six mille parasanges, en un clin d'il. Lorsque ce ciel est affermi, il en sort la femelle des dmons, appele femme luxurieuse , laquelle il s'unit. Aprs cette union, la femelle quitte le fond de l'abme et tue des milliers et des centaines de milliers d'hommes; car tant que le ciel de men-songes existe, la femelle des dmons a le pouvoir de parcourir la terre en un instant. C'est pourquoi l'criture dit : Malheur vous qui tirez l'iniquit (Avon) l'aide des cordes du mensonge et qui tirez aprs vous le pch (Hataah) comme les traits em-portent le chariot. Avon (= Iniquit), qui est du genre masculin, dsigne le dmon qui attire lui la parole de l'ignorant l'aide du ciel des mensonges. Hataah (= Pch), qui est du genre fminin, dsigne la femelle du dmon, qui attire elle les hommes par le pch et les tue ensuite. Telle est aussi la signification des paroles de l'criture : Car elle a bless et renvers plu-sieurs, cest--dire la Hataah a bless plusieurs hommes, par le pch, et les a tus ensuite. Et qui est-ce qui cause tant de mal-heurs? C'est un disciple qui prononce des sentences sans tre arriv au grade de matre; que Dieu nous en prserve. S'adressant ses auditeurs, Rabbi Simon dit : Je vous prie de ne jamais prononcer une parole touchant la doctrine, sans tre tout fait cer-tains de son exactitude et sans l'avoir dj entendue d'un arbre puissant, c'est--dire d'un matre minent, afin de ne pas tre la cause que la Hataah tue, par le pch, tant de lgions d'hommes. Tous les auditeurs s'crirent alors l'unisson : Que Dieu nous en prserve, que Dieu nous en prserve ! Remarquez que cest par la doctrine que le Saint, bni soit-il, a cr le monde, ainsi quon la dj dduit du verset : Jtais avec lui et je rglais toute chose ; jtais chaque jour dans ses dlices. Le Saint, bni soit-il, examina dabord la doctrine, une fois, deux fois, trois fois et quatre fois ; ensuite il la pronona ; et enfin il sen servit pour crer ; Dieu agissait ainsi afin dapprendre aux hommes que lon doit examiner attentivement la doctrine sotrique avant de lenseigner, pour viter toute erreur, ainsi quil est crit : Cest alors quil la vue, quil la dcouverte, quil la prpare et quil en a sond la profondeur, et il dit lhomme, etc. . Dans ce verset, on trouve quatre termes : vue, dcouverte, prpare et sond, qui correspondent aux quatre mots du commencement de la Gense, prcdant les mots cieux et terre, cest--dire aux qua-tre mots : Au commencement cra Dieu les... Ce nombre de quatre correspond aux quatre examens auxquels le Saint, bni soit-il, a soumis la doctrine avant de sen servir pour oprer luvre de la cration.

    Rabbi lazar allait une fois rendre visite Rabbi Yoss, fils de Rabbi Simon, fils de Laqounya, son beau-pre,. [5 b] Il fit ce voyage accompagn de Rabbi Abba et suivi dun porteur. Sadressant Rabbi lazar, Rabbi Abba dit : Prenons la doctrine pour sujet de notre conversation, puisque le temps et le lieu sy prtent. Rabbi lazar commena ainsi : Il est crit : Observez mes Sabbats. Remarquez que le Saint, bni soit-il, a opr luvre de la cration en six jours, dont chacun constituait une priode distincte dans la cration. Mais quel tait le premier jour qui marqua la phase de la fcondit de cette cration ? Ctait le qua-trime jour. Car, tout ce qui a t, cr pendant les trois jours prcdents, ne formait quune uvre cache. Ce nest quau qua-

  • trime jour que la fcondit des crations prcdentes sest manifeste. Car, bien que le feu, leau et lair constituent les trois l-ments principaux de la cration, leur fcondit ne stait manifeste quau jour o la terre se couvrit de vgtations ; cest alors seulement que fut connue la fonction de chacun deux. Mais, dira-t-on, cest cependant au troisime jour de la cration que Dieu a dit : Que la terre produise de lherbe , et cest pendant ce mme jour que cela a t fait, ainsi quil est dit : La terre produi-sit de lherbe ! A cette objection on peut rpondre ceci : bien que lcriture assigne la cration de la vgtation au troisime jour, elle eut lieu, en ralit, au quatrime jour, symbole du quatrime pied du trne. Mais toutes les uvres de la cration, celles des premiers jours aussi bien que celles des derniers ne furent affermies quau jour du Sabbat, ainsi quil est crit : Dieu termina au septime jour louvrage quil avait fait. Comme le sabbat forme le quatrime jour de la manifestation de la fcondit dans luvre de la cration, il est galement le symbole du quatrime pied du trne cleste. Mais, dira-t-on, sil en est ainsi, pourquoi lcriture dit-elle : Observez mes Sabbats , comme sil y en avait deux ? Lcriture dsigne par ce terme au pluriel la veille du Sabbat et le jour du Sabbat mme, qui ne sont pas spars.

    Interrompant ce discours, le ngociant qui les suivait, mont dos dne, dit : Que signifient les paroles suivantes de lcriture" : et craignez mon sanctuaire ? Rabbi Elazar lui rpondit : Par le terme mon sanctuaire , lcriture dsigne la saintet du Sabbat. Linconnu reprit : Et quelle est cette saintet du Sabbat ? Rabbi lazar lui rpondit : Cest la saintet cleste qui, en ce jour, est attire sur la terre. Lautre reprit : Dans ce cas, le jour du Sabbat na en lui-mme aucune saintet, puisque ce qui le fait qualifier de saint, cest la saintet cleste. Intervenant dans la controverse, Rabbi Abba dit : La parole de Rabbi lazar est pourtant exacte, puisquil est crit : Et vous appellerez le jour du Sabbat jour de dlices, et le Saint de Dieu le glorieux ; donc, lcriture fait une distinction entre le jour du Sabbat et le Saint de Dieu . Linconnu demanda : Mais quest-ce que vous entendez par les termes le Saint de Dieu ? Rabbi Abba rpondit : Cest la saintet cleste qui descend et sattache ce jour. Sil en tait ainsi, rpliqua linconnu, il sen suivrait que, seule, la saintet cleste est glorieuse, mais non pas la journe du Sabbat ; et pourtant lcriture dit : Glorifiez le jour du Sabbat. Rabbi lazar dit alors Rabbi Abba : Laisse parler cet homme, car il est certain quil sait quelque chose concernant la doctrine sotrique que nous ignorons. Tous les deux, sadressant alors linconnu, lui dirent : Dis-nous ton opinion. Il commena ainsi : Il est crit : Observez mes Sabbats. La particule Eth vient ajouter lespace quil est dfendu doutrepasser le jour du Sabbat. Ltendue de cet espace est de deux milles dans toutes les directions. Le terme mes Sabbats dsigne les deux sabbats clestes, le suprieur et linfrieur, qui ne forment quun seul, tant leur union est troite. Mais il y a encore un troisime Sabbat que lcriture ne mentionne pas, et qui tait honteux. Ce Sabbat dit Dieu : Matre de lUnivers, depuis que tu mas, cr, je suis appel jour du Sabbat . Or, il ny a point de jour qui ne soit accompagn dune nuit ; que lon dise donc galement : la nuit du Sabbat. Dieu lui rpondit : Ma fille, tu es Sabbat, et je tappellerai toujours jour du Sabbat ; mais je te rserve une plus grande gloire. Alors Dieu proclama : Et craignez mon sanctuaire, cest--dire, craignez le Sabbat de la veille, sujet de crainte et sur lequel repose la crainte. Le nom du Saint, bni soit-il, se trouve ainsi renferm dans le mot Sabbat : Voici ce que jai entendu. ce sujet de mon pre : Que lon imagine un carr tra-c dans un cercle (16) ; telles sont les deux premires hypostases divines, auxquelles correspondent les deux sections de la liturgie sabbatique, dont chacune est compose de trente-cinq mots, correspondant aux soixante-dix noms du Saint, bni soit-il. La com-munaut dIsral en est pare. Cest ces deux hypostases que rpondent les deux termes diffrents employs par lcriture au sujet du Sabbat : Observez le jour du Sabbat , et souvenez-vous du jour du Sabbat . De mme que le carr est insparable du cer-cle, de mme, les deux hypostases sont insparables ; car il ny a point de sparation dans lessence divine. Pareille union existe ici-bas entre Jacob et Joseph. Cest pourquoi lcriture rpte deux fois le mot paix (schalom) dans le verset : Paix, paix celui qui est loign et celui qui est proche. Les paroles celui qui est loign dsignent Jacob [6 a] et celui qui est proche dsignent Joseph. Du premier il est dit : De loin, Dieu mest apparu , car le mot Mrahoq exprime lloignement, ainsi quil est crit : Et sa sur se tenait loin de l. Du second, il est dit : A de nouveaux arrivs de prs. Le mot de loin dsigne le point suprme qui se trouve dans son palais. Voil pourquoi il est crit. Vous observerez ; il est enferm dans schamor (observe). Les mots et vous craindrez mon sanctuaire dsignent le point qui est au milieu et quil faut crain-dre plus que tout le reste, parce que celui qui enfreint ce commandement est passible de mort, comme le dit le versets : Celui qui le violera sera mis mort. Qui le viole ? Celui qui entre dans le cercle et le carr, l o rside le point, et qui le souille. Ce-lui-l est passible de mort. Voil pourquoi il est dit : Vous craindrez. Ce point sappelle Ani (moi) ; cest sur lui que re-pose celui qui est cach en haut et nest pas dcouvert, savoir Dieu, et tout est un.

    Rabbi lazar et Rabbi Abba ayant entendu ces paroles, embrassrent linconnu en lui disant : Un homme vers dans la science sotrique, comme toi, ne doit pas marcher notre suite, mais devant nous. Dis nous qui tu es. Il leur rpondit : Ne me demandez pas qui je suis ; mais, vous et moi, allons et occupons-nous de la doctrine. Que chacun prononce des paroles de sa-gesse mystique pour illuminer le chemin. Ils lui dirent : Qui ta impos daller ainsi soir un ne. Il rpondit : Le Yod fit la guerre contre deux lettres, le Kaph et le Samekh, pour quils sattachassent moi. Le Kaph ne voulut pas sattacher l o il ne pouvait subsister un seul instant sans son assistance. Le Samekh ne voulut pas non plus quitter sa place afin de soutenir ceux qui chancellent, car sans le Samekh ils ne peuvent se maintenir. Le Yod vint donc prs de moi, tout seul ; il membrassa, me ca-ressa, pleura avec moi et me dit : Mon fils, que faire pour toi ? Voici : je vais aller me remplir de quantit de biens et de lettres caches, suprieures et prcieuses ; ensuite je reviendrai vers toi, et je tassisterai et te donnerai la possession de deux lettres su-prieures valant plus que celles qui sont parties, savoir Yesch (biens), form du Yod suprme et du Schin suprme, qui forme-ront pour toi des trsors remplis de tous biens. Voil pourquoi, mon fils, va et monte sur un ne. Cest pour cette raison que je marche ainsi.

    16 Les trois Sphiroth suprmes (hypostases) sont reprsentes par un carr dans un cercle pourvu dun point au centre ; le cer-

    cle est le symbole de (Kether) rtk (couronne) premire Sphira ; le carr, celui de (Hocm) hmkx (sagesse ternelle) et le point du milieu, celui de hnyb (Bina) (Esprit suprme). Voyez Sepher Yetzira, XI.

  • R. lazar et R. Abba se mirant rire et pleurer, puis dirent : Va, monte cheval, et nous irons ne derrire toi. Il leur rpondit : Ne vous ai-je pas avertis que cest un ordre du Roi que jagisse ainsi jusqu ce quarrive celui qui sera mont sur un ne ?

    Ils lui dirent Mais tu ne nous a toujours rvl ton nom, ni le lieu o tu rsides. Il rpondit : Mon lien dhabitation est beau et il entre chez moi (sic) ; cest une tour qui vole. dans lair, forte et imposante. Elle a pour habitants le Saint, bni soit-il, et un pauvre. Telle est ma rsidence ; mais je lai quitte et je vais ne. R. Abba et R. lazar le considrrent, et ses paroles leur parurent douces comme la manne et le ciel. Ils ajoutrent : Si tu nous dis le nom de ton pre, nous baiserons la poussire de tes pieds. - Pourquoi ? rpliqua-t-il. Telle nest pas mon habitude, de tirer gloire de ma science. Mon pre demeure dans la grande mer ; c tait un grand poisson qui embrassait la grande mer dun bout lautre. Il est grand et ancien de jours ; aussi avale-t-il tous les autres poissons de la mer, puis il les rend vivants, remplis de tous les biens du monde. Il parcourt la mer en un instant, grce sa puissance. Il ma fait sortir comme une flche dans la main du hros (Ps., CXXVII, 4), puissant, et ma cach dans lendroit que je vous ai dit. Quant lui, il est retourn chez lui et sest cach dans la mer.

    R. lazar rflchit sur ses paroles et lui dit : Tu es le fils de la lampe sainte, tu es le fils de Rab Hammenouna, le Vieux (17), tu es le fils de celui qui est la lumire de la loi, et cest nous qui marchons devant toi ! Ils pleurrent, lembrassrent et continu-rent leur chemin. Ils lui dirent : Quil te plaise de nous faire connatre ton nom. Il leur rpondit : Il est crit : Banaas, fils de Joada ; ce verset a dj t expliqu correctement ; mais il renferme aussi un sens anagogique des plus sublimes. En indiquant que Banaas tait le fils de Joada, lcriture veut nous apprendre que le nom influe sur la vie de lhomme. Ceci est motiv par le grand mystre de la (Hocm) Sagesse . Le verset continue : Fils dun homme vivant , ce qui veut dire : Fils du Juste qui vit de toute ternit. Ensuite il dit : Qui fit de trs grandes actions , cest--dire le Matre de toutes les uvres et de toutes les ar-mes clestes ; car toutes les armes clestes sont marques des lettres constituant le nom divin de Jhova ebaoth (twabu hwhy) Le Matre des grandes actions , veut dire : Le Matre de lange appel Miqabl . Cest larbre le plus puissant et ma-gnifique. Do sort il et de quel degr vient-il ? Le verset le dit ensuite : De Qabl, degr suprieur inaccessible que : [6b] lil na point vu, hors vous seul, Dieu , et o est concentre toute la lumire cleste. Cest dans ce palais quest enferme cette essence divine qui fait vivre et subsister tous les mondes et toutes les armes clestes. Il tua les deux lions de Moab. Ces paroles signifient quil a fait subsister le premier et le deuxime temple de Jrusalem ; mais, aprs quil se fut retir, la lumire c-leste qui les illuminait sest retire. Cest lui-mme, sil est permis de sexprimer ainsi, qui frappa et dtruisit les temples, et le trne sacr fut renvers, ainsi quil est crit : Et je suis dans la captivit, , cest--dire, cette essence divine qui est appele Je est dans la captivit. Pourquoi lcriture dit-elle : Prs du fleuve Cbar ? Cbar cest le fleuve cleste qui rpandait des lumires. Depuis que lessence divine appele Je est dans lexil, les eaux de ce fleuve ont tarie et ne rpandent plus de lumires comme prcdemment. Cest ce fleuve que font allusion les paroles de lcriture (Job, XIV, 11) : Le fleuve tarira et schera. Les deux expressions tarir et scher dsignent le premier et le second temples de Jrusalem. Dans les paroles prcites : Il tua les deux lions de Moab , au lieu de Moab il faut lire Mab , cest--dire du Pre cleste . A partir de ce moment toutes les lumires qui clairaient Isral steignirent (18). Lcriture dit ensuite : Il descendit dans une citerne et tua un lion, en un jour o il y avait de la neige. Jadis, lorsque ce fleuve, dont il a t parl ci-dessus, rpandait ses eaux en bas, les Isralites existaient grce aux sacrifices quils offraient sur lautel en expiation de leurs pchs. Alors un tre cleste ayant la fi-gure dun lion descendait, au moment des sacrifices, sur lautel ; on le voyait accroupi sur lautel, consommant la chair des sa-crifices avec lavidit dun homme affam ; tous les chiens (19) se cachaient et craignaient de paratre devant lui. Mais par suite des pchs, lessence divine quitta le temple. et Dieu lui-mme, sil est permis de sexprimer ainsi, tua le lion. Lcriture dit quil tua le lion (20) dans une citerne, cest--dire en prsence des dmons qui habitent dans les mondes infrieurs, afin de montrer ceux-ci que, le lion tant tu, ctait eux de semparer dornavant de tous les sacrifices que les hommes pourraient offrir. Dieu nen voulant plus, cest aux chiens de sen emparer. Le nom du lion susnomm est Ouriel , parce quil a la figure dun lion, et le nom du chien est Baladan , ce qui veut dire non homme , mais chien, car il a la figure dun chien. Lcriture ajoute ga-lement : En un jour o il y avait de la neige , cest--dire lorsquIsral eut pch et eut t condamn par la justice cleste . Telle est galement la signification des paroles de lcriture (Prov., XXXI, 21) : Elle ne craindra point pour sa maison la neige , cest--dire, elle ne craindra pas la justice cleste, parce que toute la maisonne est habille de pourpre , de faon pouvoir braver le feu puissant. Tel est le sens anagogique du verset prcit. Lcriture continue (II Rois, XXIII, 21) : Et il tua un gyptien qui avait laspect clair. Dans ce verset nous apprenons que chaque fois quIsral se rend coupable, Dieu le prive de tous les biens et de toutes les lumires qui lclairaient autrefois. Si lcriture dit : Il tua un gyptien , elle veut dire : Il ta Isral cette lumire cleste qui est Mose, car Mose est appel gyptien , ainsi quil est crit (Ex, II, 19) : Un gyptien nous a dlivrs , etc. Cest l, en gypte, quil est n, cest l quil a grandi, et cest l quil monta vers la lumire cleste. Un homme daspect clair , parce quil est crit (Nb, XII, 8) : Il voit le Seigneur clairement, et non sous des nigmes. Lcriture se sert en outre pour dsigner Mose du mot Isch (sya), qui signifie homme aussi bien que mari, ainsi quil est crite : Lhomme (Isch) de Dieu , parce que Mose tait le mari de la divinit et la conduisit selon sa volont, faveur dont jamais homme na joui. Lcriture dit : Lgyptien tenait en main une lance ; cest le sceptre de Dieu qui avait t confi Mose, ainsi quil est crit : Et le sceptre de Dieu est entre mes mains. Ce sceptre a t cr au moment du crpuscule du sixime jour de la cration, il tait orn de linscription du nom sacr, grav en lettres clestes. Mais au moment o Mose se rendit coupable par ce mme

    17 Parce que Hammenouna contient nouna, qui veut dire poisson . 18 Cest donc ce pass qui nexiste plus, qui a valu au fleuve cleste le nom de rbk (Cebar) qui, en hbreu, signifie autrefois . 19 Cest--dire les dmons. Daprs le Zohar, III, 32b, et III, 211a, les apparitions du lion et du chien alternaient suivant ltat

    moral des Isralites. 20 Le temple.

  • sceptre, ainsi quil est dit : Et il frappa deux fois la pierre avec son sceptre , le Saint, bni soit-il, lui dit : Mose ! ce nest pas pour agir de la sorte que je tai confi mon sceptre ; je jure par ta vie qu partir de ce moment tu ne lauras plus. Aussi lcriture dit : Il descendit avec sa verge. , Le mot verge (Schebet) fait allusion la rigueur de la justice ; cest pourquoi partir de ce moment le sceptre lui fut enlev. Et il ravit la lance de la main de lgyptien , cest--dire Mose a perdu le scep-tre en raison du pch commis laide du sceptre. Puis il est dit : Il le tua avec sa lance , cest--dire pour le pch commis avec cette lance, il fut empch darriver la Terre Sainte, et cette lumire fut enleve Isral. Lcriture dit ensuite : Il tait le plus honor des trente, mais il na pas atteint les trois. Il tait le plus honor des trente , ce sont les trente annes suprieu-res pendant lesquelles il tait dtach deux et quil tait en bas, et cest deux quil fut ravi ; ensuite il se rapprocha deux. Mais il na pas atteint les trois , les trois viennent chez lui et lui donnent tout ce que son cur dsire, mais lui ne va pas aux trois. Bien quil ne rentre pas dans le compte des trois David la pourtant pris son service . Il ne le dtacha pas de son cur et jamais il ne se sparera [7 a] de lui. David tourne son cur vers lui, non lui vers David, de mme que la lune adresse des louanges et des hymnes au Soleil, parce quil lattire lui et en forme le centre dattraction. Telle est la signification des paroles de lcriture : Et David le prit son service.

    Rabbi Elazar et Rabbi Abba se prosternrent devant leur interlocuteur, mais au mme instant celui-ci devint invisible. En vain regardrent-ils de tous cts, ils ne le virent plus. Ils sassirent, versrent des larmes, et il leur fut impossible de sentretenir. Au bout dun certain temps, Rabbi Abba rompit le silence en disant : Ainsi se vrifie la tradition qui nous apprend que, chaque fois que les justes voyagent ensemble et sentretiennent de sujets relatifs la doctrine, ils sont favoriss des visites des saints qui sjournent dans lautre monde ; car il est manifeste que notre interlocuteur nest autre que Rab Hammenouna, le Vieillard, qui, tant venu de lautre monde pour nous rvler ces paroles, se droba nos regards avant que nous eussions le temps de le reconnatre. Ils se levrent et voulurent charger leurs nes ; mais ils ne purent y parvenir. Ils lessayrent de nouveau, mais avec un gal insuccs. Ils prirent peur et abandonnrent leurs nes. Aujourdhui encore on appelle cet endroit : Lendroit des nes.

    Rabbi lazar commena : Il est crit : Combien est grande labondance de ta bont que tu as cache pour ceux qui te crai-gnent ! Combien cette bont cleste que le Saint, bni soit-il, a rserve aux hommes dignes du ciel, qui craignent le pch et qui se consacrent ltude de la doctrine, est immense lorsquon arrive lautre monde ! Lcriture ne dit pas : Combien est grande ta bont , mais combien est grande labondance de ta bont . Et quelle est cette abondance de la bont ? Cest celle dont lcriture dit : Ils proclameront labondance de ta bont. Cest elle qui constitue les dlices des Saints qui, dans lautre monde, paraissent devant lternel, appel l attestation de labondance de bont . Cest de lui que parle lcriture en disant : Et labondance de bont est la maison dIsral. De plus, les Paroles de lcriture : Combien (M) est grande labondance de votre bont renfermant le mystre de la Sagesse , dont dpendent tous les autres mystres. Ce mystre est dsign par M . Ainsi quil a t dit, M forme le plus grand et le plus puissant arbre cleste ; car il y a encore un autre arbre plus pe-tit quil a plac au fate des cieux. Le mot bont dsigne la lumire cre au premier jour de la cration. Les paroles que tu as caches pour ceux qui te craignent dsignent la lumire que Dieu a cache dans ce monde, pour en faire jouir les Justes. Les paroles : Tu las rendue parfaite pour ceux qui esprent en toi dsignent le paradis suprieur, ainsi quil est crit : Sur cette demeure ferme que tu tes prpare toi-mme ; or, on retrouve le mot paltha tu tes prpare, dans lun et lautre des versets prcits. Lcriture dit enfin : A la vue des enfants des hommes. Ces paroles dsignent le paradis infrieur, o tous les Justes accdent, leurs mes revtues denveloppes thres ayant la ressemblance avec les corps quils possdaient en ce bas monde. Cest pourquoi lcriture dit : A la vue des enfants des hommes , parce que dans le paradis infrieur les mes des Justes res-semblent aux hommes revtus de leurs corps. Dans ce paradis les Justes sarrtent quelque temps, ils planent dans les airs, de l ils slvent vers lcole cleste situe dans le paradis suprieur ; de l ils senvolent et se plongent dans des rivires parfumes, do ils sortent et descendent en bas ; parfois ils apparaissent aux hommes, en faveur desquels ils oprent des miracles, sembla-bles aux anges clestes. Tel est le cas qui vient de nous arriver maintenant. Nous venons de voir la lumire de la Lampe sacre ; mais, hlas ! il ne nous a pas t donn de contempler et dapprendre plus de choses de la Sagesse .

    Rabbi Abba a ainsi ouvert sa confrence : Il est crit (Juges, XIII, 22) : Et Manu dit sa femme : Nous mourrons certaine-ment parce que nous avons vu Dieu. Bien que Manu ignort lessence de ltre qui lui tait apparu, il pensait cependant avoir vu lessence divine appele Je . Or, dit-il, puisque lcriture dit (Ex., XXXIII, 20) : Nul homme ne me verra sans mourir , il est certain que nous mourrons, puisque nous avons vu lessence divine. Or, nous ajouta Rabbi Abba, nous avons t favoriss de la lumire cleste qui nous a accompagns et que le Saint, bni soit-il, nous a envoye pour nous dvoiler les mystres de la Sagesse (Hocm).

    Rabbi lazar et Rabbi Abba, poursuivant leur chemin. arrivrent prs dune montagne lheure du coucher du soleil. Les ar-bres plants au pied de cette montagne faisaient, lunisson, monter vers le ciel leurs hymnes quon pouvait entendre, grce au bruit que produisait le choc des branches, caus par la brise du soir. A ce moment, les deux voyageurs entendirent une voix puissante prononant les paroles suivantes : Enfants du Dieu Saint, vous qui descendez parfois parmi les mortels sur la terre, vous qui tes les lampes clestes de lcole cleste, assemblez-vous dans votre demeure habituelle pour jouir des paroles du matre relativement lexplication de la doctrine. Les voyageurs furent saisis de frayeur, sarrtrent et sassirent. En mme temps la voix cleste retentit de nouveau en disant : Rochers (21) puissants et haut placs,, sachez que le Matre, pareil une figure en couleurs qui tranche sur le fond dune tapisserie, vient de monter sur son trne. Montez donc au ciel et assemblez-vous. Au mme instant les voyageurs entendirent une voix forte et puissante produite par les branches des arbres qui fit enten-dre ces paroles de lcriture : La voix du Seigneur brise les cdres. Rabbi lazar et Rabbi Abba se prosternrent et furent sai-sis dune grande peur ; ils se levrent prcipitamment et sen allrent de l, sans rien entendre de plus. Aprs avoir quitt cette

    21 Cest ainsi que sont dsigns les saints au Paradis.

  • montagne, ils continurent leur chemin. Arrivs chez Rabbi Yoss, fils de Rabbi Simon, fils de Laqounya, ils y trouvrent Rab-bi Simon, fils de Jocha. Ils en prouvrent une grande joie, et [7b] Rabbi Simon, son tour, en fut charm. Rabbi Simon leur dit : Je suis sr que pendant votre voyage vous avez t tmoins de miracles, et que vous avez joui de la vue de merveilles c-lestes. Car, dans le moment o vous tiez en voyage, jai dormi et jai vu en songe Banaas, fils de Joada, en votre compagnie ; je lai vu vous envoyer, par lintermdiaire dun vieillard, deux couronnes pour vous en parer. Il est certain que le Saint, bni soit-il, se trouvait sur votre chemin. Dailleurs, quand mme je naurais pas eu ce songe, jaurais pu deviner ce qui vous est arriv par laltration de vos visages. Rabbi Yoss dit Rabbi Simon : Tes paroles sont justes, car un sage vaut mieux quun prophte. Rabbi lazar vint alors poser sa tte sur les genoux de son pre. Il lui raconta tout ce qui lui tait arriv. Rabbi Simon, saisi de crainte, se mit pleurer et scria : Il est crit (Habacuc, III, 2) : Seigneur, jai entendu ta parole et jai t saisi de crainte. Ce verset a t prononc par Habacuc au moment o, aprs avoir vu la mort, il fut ressuscit par lise. Pourquoi avait-il nom Ha-bacuc ? En raison des paroles dlise qui dit la Sunamite (IV Rois, IV, 16) : Dans un an, en ce mme temps, tu embrasseras un fils. Or, embrasser sexprime en hbreu par le mot Habac ; de l le nom du prophte Habacuc (22). Le prophte Habacuc tait donc le fils de la Sunamite, et sil porte le nom de Habacuc , qui est une forme du pluriel, cest parce quil, a t, embrass deux fois, dabord par sa mre et ensuite par lise, ainsi quil est crit : Il mit sa bouche sur sa bouche. Rabbi Simon continua : Jai trouv dans le livre du roi Salomon le passage suivant : Au moment de mourir, le fils de la Sunamite fut priv des soixante-douze noms sacrs de Dieu qui sont gravs pour chaque homme vivant et qui seffacent lheure de la mort. Ainsi les soixante-douze noms sacrs de Dieu, qui taient gravs sur lenfant ds le moment o son pre lavait procr, senvolrent linstant de sa mort. En embrassant lenfant mort, lise grava de nouveau sur son corps les soixante-douze noms sacrs de Dieu ; cest ce qui le fit ressusciter. Les lettres qui composent ces noms sacrs sont au nombre de deux cent seize, et toutes ces lettres furent graves par le souffle dlise. Cest pourquoi il lui donna le nom de Habaqouq , dont les lettres prsentent la va-leur numrique de deux cent seize. Cest pourquoi le prophte Habacuc scria (Hab., III, 2) : Seigneur, jai entendu ta parole et jai t saisi de ta crainte , cest--dire jai entendu ce que je dois goter dans ce monde et jai trembl. Voulant prier pour lui-mme, il dit : Seigneur, faites que luvre dont jai t tmoin saccomplisse par sa vie , cest--dire pendant la vie terrestre de celui qui est le principe de la vie de toutes les gnrations passes futures et sans lequel il ny a point de vie. Aprs avoir rcit ce passage du livre dit roi Salomon, Rabbi Simon se mit pleurer en disant : Aprs ce que je viens dentendre, moi aussi, je tremble devant le Saint, bni soit-il. Il leva les mains au-dessus de sa tte et scria : Combien est grande la faveur cleste, dont vous tiez lobjet, de regarder face face Rab Hammenouna, le Vieillard, ce flambeau de la doctrine sotrique, alors que le ciel ne ma pas jug digne de cette faveur. Rabbi Simon, se prosternant face contre terre, eut une vision. Il vit Rab Hammenouna, le Vieil-lard qui, dplaant des montagnes, accourait vers le palais du Roi Messie pour lclairer de ses lumires. Rab Hammenouna, le Vieillard dit Rabbi Simon : Matre, en ce monde, tu seras le voisin des matres de la doctrine, assis devant le Saint, bni soit-il. A partir de ce jour Rabbi Simon appela Rabbi lazar, son fils, et Rabbi Abba du nom de Peniel , en raison des paroles de lcriture (Gen., XXXII, 31) : Jacob donna ce lieu le nom de Peniel, en disant : Jai vu Dieu face face.

    Il est crit (Gen., I, 1) : Au commencement, Rabbi Hiy a ainsi ouvert une de ses confrences : Lcriture dit (Ps., CXI, 10) : Le commencement de la Sagesse est la crainte du Seigneur ; tous ceux qui agissent conformment la crainte du Seigneur et la Sagesse sont remplis de lesprit salutaire ; sa louange subsiste dans tous les sicles. Pourquoi lcriture dit-elle : Le commencement de la Sagesse , cest la crainte du Seigneur , alors quelle aurait d dire : La fin de la Sagesse , cest la crainte du Seigneur , attendu quon narrive la crainte de Dieu qu la fin de la Sagesse ? Lcriture parle ici de la Sa-gesse suprme quon atteint seulement aprs la crainte de Dieu, comme le dit le verset (Ps., CXVIII, 19) : Ouvrez-moi les portes de la Justice, . afin que jy entre et que je rende grces an Seigneur. Et lEcriture ajoute : Cest l la porte du Sei-gneur ; car quiconque ne passe pas par la porte narrivera jamais auprs du Roi cleste qui est cach et mystrieux. Pour y ar-river il faut passer par plusieurs palais, levs les uns au-dessus des autres, pourvus dun grand nombre de portes avec des ser-rures, de sorte que, pour arriver la Sagesse suprme , il faut passer par la crainte de Dieu, qui est la porte qui y donne accs. Et voici la signification de Be Reschith : Il y a deux (Beth = deux) Reschith, deux commencements unis ensemble. Ce sont deux points, lun cach, lautre visible et connu. Il ny a pas de sparation entre eux ; cest pourquoi on emploie le singulier Reschith . Et tout est un, la crainte de Dieu et la Sagesse suprme, comme le verset dit (Ps., LXXIII, 19) : Et ils sauront que ton nom Jhova est seul. Pourquoi lcriture appelle -t-elle la premire porte du nom de la crainte du Seigneur ? Parce quelle forme larbre du bien et du mal : Quand lhomme le mrite, larbre est bon, sinon il est mauvais. [8a] Cest pourquoi la porte de la crainte repose cet endroit, et cest la porte qui donne accs tous les biens de lautre monde. Par lexpression Esprit salu-taire , lcriture dsigne ces deux portes qui nen forment quune seule. Rabbi Yoss dit : cest larbre de la vie qui ne contient que le Bien, sans aucun alliage de mal. Et cest prcisment cause de labsence du mal que lcriture se sert du mot Tob, qui veut dire bon pour nous indiquer quil est exempt de tout mal. Lcriture dit : Tous ceux qui agissent conformment la crainte du Seigneur et la Sagesse. Elle fait allusion ceux qui ajoutent foi aux paroles du Seigneur, qui a dit (Is., LV, 3 : Je ferai une alliance ternelle, selon la misricorde promise David. Tous ceux qui soutiennent ltude de la Tora - sil est permis de sexprimer ainsi - agissent. Ceux qui se consacrent ltude nagissent pas, puisquils tudient. Cest de ceux seuls qui la soutiennent quil est dit quils agissent. Et cest pour cela que lcriture ajoute enfin : Sa louange subsiste dans tous les si-cles ; cest--dire que le trne de Dieu subsiste sur ses bases dans toute lternit. Rabbi Simon consacrait . ltude de la doc-trine sotrique toute la nuit dans laquelle lpouse cleste sunit son poux cleste (23) ; car, comme il a t enseign, tous les membres du palais de lpouse cleste doivent passer avec celle-ci toute la nuit et la conduire le lendemain sous le dais nuptial, auprs de son poux, et se rjouir avec elle. Ils doivent consacrer la veille de lunion cleste ltude du Pentateuque, des Pro-

    22 Cf. Zohar, II, 45. 23 Cest la veille de la fte de Pentecte, jour o la loi fut rvle aux Isralites et lalliance contracte entre Dieu et son peuple.

  • phtes, des Hagiographes, aux explications des versets et aux mystres ; car la science sotrique constitue en quelque sorte les joyaux de lpouse cleste. Elle et ses jeunes filles, qui se tiennent autour delle, se rjouissent toute la nuit ; et le lendemain, elle se rend sous le dais nuptial, entoure de celles-ci, justement appeles les invites de la noce . Au moment o lpouse se rend sous le dais nuptial, le Saint, bni soit-il, salue les compagnes de lpouse, les bnit et les pare de couronnes tresses par lpouse ; heureux le sort des compagnes de lpouse. Rabbi Simon et ses collgues chantrent des hymnes et prononcrent des paroles renfermant des ides nouvelles concernant la doctrine sotrique. Aussi, sadressant ses collgues, Rabbi Simon scria : Mes enfants, heureux votre sort, car demain lpouse cleste ne se rendra sous le dais nuptial quaccompagne de vous, parce que vous vous tes rjouis avec elle la veille de lunion. Tous, vous serez inscrits sur le livre cleste ; et le Saint, bni soit-il, vous comblera de soixante-dix bndictions et vous parera de couronnes du monde suprieur.

    Rabbi Simon ensuite commena : Il est crit (Ps., XIX, 2) : Les cieux racontent la gloire de Dieu, etc. Ce verset a dj t interprt par nous dune certaine faon ; mais il renferme encore un sens anagogique. Au moment o lpouse cleste se pr-pare pour se rendre le lendemain sous le dais nuptial, elle se pare de couronnes clestes blouissantes de lumire en compagnie des docteurs qui se rjouissent avec elle toute la nuit, de mme quelle se rjouit avec eux. Le lendemain, combien de lgions, darmes et de troupes se runissent prs delle ! Elle et eux attendent ceux qui lont prpare pendant la nuit. Ds quils sont tous runis et quelle aperoit son mari : Les cieux racontent la gloire de Dieu. Par les cieux , il faut entendre le fianc qui entre dans la chambre nuptiale ; le mot mesaperim (racontent) signifie : clairent comme un saphir brillant dun bout du monde , lautre ; la gloire de Dieu , cest la gloire de la fiance, qui sappelle El (Dieu), ainsi quil est crit (Ps., VII, 12) : Dieu juge le Juste et Dieu se met en colre tous les jours. Durant tous les jours de lanne, qui prcdent lunion cleste, lpouse ne portait que le nom de El (= Dieu), mais partir du jour de lunion cleste, lpouse porte celui de Cabod (= Gloire). Ces deux noms de lpouse cleste sont superposs lun sur lautre, tel un joyau sur lautre, une lumire sur lautre, un pou-voir sur lautre. A partir de cette union cleste, cest une re de grce et de misricorde qui commence, sans rigueur et sans colre. Aprs avoir dit quau moment de la cleste union lpoux fait briller la gloire de lpouse divine, lcriture ajoute : Et le fir-mament publie les ouvrages de ses mains. Par le terme les ouvrages de ses mains (Ps., XIX, 2), lcriture dsigne les hom-mes fidles lalliance que lpoux cleste a faite avec son pouse ; car les fidles lalliance sont appels les ouvrages de ses mains , ainsi quil est crit (Ps., XC, 17) : Que la lumire du Seigneur notre Dieu se rpande sur nous : conduis den haut les ouvrages de nos mains, et que les ouvrages de nos mains soient conduits par toi-mme. Par lexpression et que les ouvrages de nos mains soient conduits par toi-mme , lcriture dsigne luvre de la circoncision, qui est une marque grave dans la chair de lhomme. Rab Hammenouna, le Vieillard, a dit ce qui suit : Il est crit (Eccls., V, 5) : Que la lgret de votre bouche ne soit pas votre chair une occasion de tomber dans le pch. Lcriture nous exhorte ici ne jamais prononcer des paroles susceptibles de nous inspirer de mauvaises penses de nature souiller la chair sacre, marque du sceau de lalliance sacre ; car quiconque sen rend coupable sera jet dans lenfer (Gehinom). Toutes les mes montant aux runions clestes sont obliges de passer devant la porte de lenfer. Lange prpos lenfer a nom Douma ; il est toujours entour de plusieurs centaines de mille (24) danges exterminateurs. Douma se tient constamment la porte de lenfer (Gehinom) pour arrter les mes qui passent. Mais il lui est dfendu dapprocher dune me ayant appartenu un homme qui, durant sa vie, a conserv intact le sceau de lalliance sacre. Aprs avoir commis le crime dadultre, le roi David fut saisi de crainte. Alors Douma monta vers le Saint, bni soit-il, et lui dit : Matre de lunivers, [8b] il est crit dans le Pentateuque (Levit., XX, 10) : Si quelquun abuse de la femme dun autre et, commet un adultre avec la femme de son prochain, que lhomme adultre et la femme adultre meurent tous deux , et il est crit (Levit., XX, 18) en-outre : Vous ne vous approcherez point de la femme de votre prochain, et vous ne vous souillerez point par cette union honteuse et illgitime. Or David vient de commettre le crime dadultre ; comment dois-je me comporter son gard ? Le Saint, bni soit-il, lui rpondit : David nest pas coupable ; il na jamais dtruit le sceau de lalliance sacre, attendu quil est manifeste devant moi que Bethsabe lui tait destine ds la cration du monde. Douma re-prit : Si ce fait tait manifeste pour vous, il ne ltait pas pourtant aux yeux de David ; donc il est coupable. Dieu lui rpondit : Dailleurs lacte de David tait licite, attendu quaucun de ceux qui allaient la guerre ne partait de chez lui sans remettre pr-alablement un acte de divorce sa femme. Douma objecta : Il aurait d alors attendre trois mois avant de faire venir Bethsabe chez lui, dlai fix par la loi pour tous ceux qui veulent pouser une veuve ou une femme divorce. Dieu lui rpondit : Quel est donc le motif de cette prescription dattendre trois mois ? Nest-ce pas pour que dans le cas o la femme se trouve enceinte, lon puisse savoir si lenfant est du premier ou du second mari ? Or, je savais quUrie ne sest jamais approch de sa femme ; et cest pour cela que son nom scrit parfois Uriy (hyrwa) et parfois Uriyahou (whyrwa) mot o lon retrouve toutes les lettres formant mon nom (hwhy) afin dindiquer quil na jamais cohabit avec sa femme. Douma rpliqua : Matre de lUnivers, si le fait que vous me communiquez est manifeste pour vous, est-ce quil ltait aussi pour David ? Donc, il devait attendre trois mois. Du reste, si David et su quUrie navait jamais cohabit avec sa femme, il ne lui aurait pas dit (II Rois, XI, 8) : Va-ten chez toi et lave tes pieds. Dieu rpondit : Certes, David ignorait ce fait ; mais pour ce qui est du dlai de trois mois, David en fit passer un plus long entre le dpart dUrie et le jour o il fit venir Bethsabe chez lui ; il na pas seulement attendu trois mois, mais quatre. Il a t en-seign que le vingt-cinq Nissan David fit appeler tout Isral sous les armes. Et il se trouva le sept Sivan, avec Joab, au moment de la guerre avec les Ammonites. Il y resta les mois de Sivan, Tamouz, Ab, Eloul, et cest le 24 Eloul seulement quil connut Bethsabe. Et cest le jour de Kippour que Dieu lui pardonna. Dautres disent que cest le 7 Adar que David appela les Isralites sous les armes. Ils se runirent le 15 Iyar, et cest le 15 Eloul quil connut Bethsabe. Et cest le jour de Kippour que Nathan lui annona (II Rois, XII, 13) : Le Seigneur aussi a fait disparatre votre pch ; vous ne mourrez point. Que signifient les mots vous ne mourrez point ? Vous ne mourrez point par la main de Douma. Enfin Douma scria : un mot jai encore un mot dire au sujet de David. Na-t-il pas prononc sa propre condamnation en rpondant (II Rois, XII, 5) au prophte Nathan : Je jure

    24 Mot Mot : De nombreuses fois dix mille

  • au nom du Seigneur que celui qui a commis cette mauvaise action est digne de mort. Donc, jai maintenant un pouvoir sur lui. Dieu lui rpondit : Non, tu nas aucun droit sur lui, car il sest confess moi en disant : Jai pch contre le Seigneur , bien quen ralit il ne ft pas coupable. Son seul pch tait davoir fait exposer Urie , la mort ; mais en expiation de ce pch, je lai puni en le faisant passer, dans lcriture, comme coupable, punition quil a accepte avec rsignation. Aussitt que Dieu eut fini de parler, Douma retourna dsappoint son poste. Cest pourquoi David a dit (Ps., XCIV, 17) : Si le Seigneur ne met assist, peu sen serait fallu que mon me ne tombt Douma. Les mots Si le Seigneur ne met assist signifient : Si Dieu ne se ft institu mon dfenseur. Que signifient les mots peu sen serait fallu ? David voulait dire quil sen serait fallu, pour que son me tombt entre les mains de Douma, dun instant aussi court que celui pendant lequel lhomme le plus saint peut perdre son me. Cest pourquoi lhomme doit se garder de ne jamais prononcer sa propre condamnation, lexemple de David, pour que Douma ne puisse la faire valoir, comme preuve de la faute. Aussi lcriture dit-elle : Ne dites pas devant lange : cest ma faute , cest--dire ne dites rien dont lange Douma puisse conclure votre faute. Lcriture (Eccls., V, 5) ajoute : Pour-quoi irriter Dieu contre tes paroles et faire dtruire les ouvrages de tes mains , cest--dire pourquoi irriter Dieu par votre pro-pre condamnation, qui permettrait Douma de vous considrer comme des hommes qui, ayant souill leur corps, ont par ce fait, dtruit le sceau de lalliance sacre empreint sur une chair sainte. Les paroles les ouvrages de tes mains dsignent le sceau de lalliance sacre. Cest pourquoi lcriture (Ps., XIX, 2) dit : Et le firmament publie les ouvrages de ses mains. Les ouvrages de ses mains , ce sont les hommes qui forment la suite de lpouse clest