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Fardad c. Corporation de l'École polytechnique de Montréal 2007 QCCS 5430 COUR SUPÉRIEURE CANADA PROVINCE DE QUÉBEC DISTRICT DE MONTRÉAL No: 500-17-018291-032 DATE: 22 novembre 2007 _________________________________________________________________ _____ SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE JEAN-PIERRE CHRÉTIEN, J.C.S. _________________________________________________________________ _____ MOHAMMED ALI (AMIR) FARDAD Demandeur c. CORPORATION DE L’ÉCOLE POLYTECHNIQUE DE MONTRÉAL Défenderesse _________________________________________________________________ _____ JUGEMENT _________________________________________________________________ _____ [1] Le demandeur («Dr Fardad») réclame la somme de 4 950 000 $ de la défenderesse («Poly»). JC2043

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Fardad c. Corporation de l'École polytechnique de Montréal 2007 QCCS 5430

COUR SUPÉRIEURE

CANADAPROVINCE DE QUÉBECDISTRICT DE MONTRÉAL

No: 500-17-018291-032

DATE: 22 novembre 2007______________________________________________________________________

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE JEAN-PIERRE CHRÉTIEN, J.C.S.______________________________________________________________________

MOHAMMED ALI (AMIR) FARDADDemandeur

c.CORPORATION DE L’ÉCOLE POLYTECHNIQUE DE MONTRÉAL

Défenderesse______________________________________________________________________

JUGEMENT______________________________________________________________________

[1] Le demandeur («Dr Fardad») réclame la somme de 4 950 000 $ de la défenderesse («Poly»).

[2] Il soutient que la politique relative à la propriété intellectuelle technologique adoptée le 28 septembre 1995 par Poly («Politique de Poly») s’applique à lui car il était, au moment du processus créateur ayant mené à l’invention décrite ci-après, un étudiant de Poly au sens de la Politique de Poly, tout en étant aussi un étudiant de l’Université McGill («McGill»), ces deux institutions ayant eu un projet conjoint de recherche selon lui dans le cadre duquel il travailla sous la direction de M. S. Iraj Najafi («Dr Najafi») de Poly et de M. Mark Andrews («Dr Andrews») de McGill.

[3] Les demandes adressées aux Bureaux des brevets canadien et américain le 10 octobre 1997, ainsi que le brevet américain émis le 25 avril 2000 décrivent l’invention visée comme étant un «Solvent-assisted Lithographic process using photo sensitive Sol-Gel derived glass for depositing ridge waveguides on silicon» («Invention»). Les

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trois inventeurs nommés dans ces documents sont le Dr Fardad, le Dr Najafi et le Dr Andrews.

[4] La technologie visée fit l’objet d’une licence au mois de décembre 1998 («Licen-ce») qui fut octroyée à la société Lumenon Innovative Light Wave Technology Inc. («Lumenon») dont le président-directeur général était le Dr Najafi et le vice-président le Dr Andrews, tous deux ayant obtenu des blocs d’actions importants de cette société, soit 10 275 000 actions dans le cas du Dr Najafi et 9 575 000 actions dans le cas du Dr Andrews.

[5] La valeur boursière de Lumenon monta rapidement à partir du mois d’avril 2000, pour ensuite diminuer et s’effondrer en 2003.

[6] Plus particulièrement, le Dr Fardad réclame de recevoir le tiers de la part réser-vée aux chercheurs, tel que prévu à la Politique de Poly.

[7] Dans cette affaire, la société en commandite PolyValor («PolyValor»), dont Poly détenait 50% des parts A, et McGill ont reçu, chacune, 750 000 actions de Lumenon lors de l’octroi de la Licence en décembre 1998, PolyValor et McGill ayant conjointe-ment octroyé la Licence à Lumenon.

[8] Le Dr Fardad, plaidant que l'existence de PolyValor ne peut lui être opposée, réclame donc de recevoir l’équivalent monétaire de 125 000 actions de Lumenon, lesquelles correspondent au tiers, de la moitié, des 750 000 actions que Poly aurait dû recevoir directement [1/3 x 50% x 750 000 actions].

[9] Le Dr Fardad retient comme valeur pour l’action de Lumenon la valeur qu'elle avait le 12 avril 2000 sur la bourse américaine NASDAQ («NASDAQ»), soit le premier jour où l’embargo sur les ventes fut levé par la Securities and Exchange Commission («SEC»), la valeur étant ce jour-là de 39,60 $ canadiens.

[10] Le résultat de la multiplication de 125 000 actions de Lumenon par la somme de 39,60 $ donne le montant de sa réclamation, soit 4 950 000 $.

[11] En défense, Poly plaide, premièrement, que l'action intentée par le Dr Fardad le 4 décembre 2003 est prescrite car, à la fin de l’année 1998 et au cours des premiers mois de l’année 1999, il a reçu une offre d'emploi de la part de Lumenon, formulée par le Dr Najafi, pour agir à titre de Development Engineer et s'est fait offrir un Stock option Plan pour 50 000 actions de Lumenon, au prix de 1,00 $ US chacune, de telle sorte qu'il avait la connaissance de la commercialisation de l’Invention plus de trois ans avant la date de l'institution de son action en justice.

[12] En second lieu, Poly plaide que le Dr Fardad n'était pas un chercheur de Poly au sens de la Politique de Poly et, de plus, qu'il ne lui a jamais divulgué par écrit l'Invention, divulgation qui constitue une étape essentielle permettant, d'abord, d'évaluer

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le potentiel d’une technologie et, ensuite, d'en assurer la commercialisation le cas échéant, de telle sorte que la Politique de Poly ne peut recevoir application.

[13] Troisièmement, Poly soutient, dans sa plaidoirie écrite du 22 mai 2007, qu'elle n'avait que 50% des parts A de PolyValor, de telle sorte que dans les faits elle ne détenait que l'équivalent de 50% des 750 000 actions de Lumenon attribuées à PolyValor, soit 375 000 actions. Dans ce cas, la part du Dr Fardad correspondrait à un tiers, de la moitié, de 375 000 actions [1/3 x 50% x 375 000 actions], soit à 62 500 actions de Lumenon, ce nombre d’actions devant être retenu dans le cas où la Politique de Poly doit recevoir application.

[14] Quatrièmement, quant au prix de l'action de Lumenon, Poly plaide que si le Dr Fardad avait détenu des actions au début de l'année 2000, il aurait agi comme tous les autres actionnaires (Poly, McGill, le Dr Najafi, le Dr Andrews et les investisseurs privés) et il aurait vendu ses actions de façon progressive afin de ne pas lancer de signal défavorable au titre, et qu'il n'aurait donc, jamais, vendu toutes ses actions en un seul bloc, le 12 avril 2000, ce qui aurait été catastrophique pour l’action de Lumenon.

[15] De plus, Poly ajoute que si sa Politique s'applique, ce qu’elle conteste, celle-ci indique clairement que ce qui est partagé par Poly et ses étudiants, ce sont les revenus nets perçus par elle, et non pas des revenus bruts théoriques, de telle sorte qu'il faut utiliser les recettes nettes réelles qu'elle a obtenues lors des ventes effectuées par PolyValor, à différentes époques, correspondant à sa part des actions de Lumenon détenues par PolyValor pour elle, soit 375 000 actions.

[16] Dans ce cas, la somme à laquelle a droit le Dr Fardad serait 715 540 $, corres-pondant à la multiplication de la fraction obtenue en divisant 62 500 actions, soit la part des actions du Dr Fardad, par 750 000 actions, soit le nombre total d'actions détenues par PolyValor, par le revenu net total obtenu par PolyValor, soit 8 586 480 $ [(62 500 ÷ 750 000) x 8 586 480 $ = 715 540 $]. Exprimé autrement, en tenant compte du fait que Poly détenait l’équivalent de 375 000 actions de Lumenon via PolyValor, le calcul serait le suivant [(62 500 ÷ 375 000) x (8 586 480 $ ÷ 2) = 715 540 $].

[17] En tout état de cause, Poly plaide de façon appuyée que, jamais, ni elle et ni son personnel ne furent de mauvaise foi et n'ont voulu de quelque façon que ce soit nuire au Dr Fardad qui, à l'époque visée, s'était comporté, quant à elle et ses employés, comme un étudiant de McGill.

[18] Poly réitère dans sa plaidoirie que le terme «disgrace» utilisé à maintes reprises en anglais contre elle n'a pas sa place, n’est nullement fondé dans les circonstances et doit être mis de côté, car elle est une institution sérieuse jouissant d'une très bonne réputation sur les plans provincial, national et international.

OBJECTIONS

[19] Poly s’est opposée à la production des pièces suivantes :

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- P-3 Lettre du 9 octobre 1997 du Dr Najafi au Case Processing Center-Visitor canadien;

- P-4 Article scientifique publié le 20 avril 1998 par les Drs Fardad, Andrews et Najafi, entre autres;

- P-5 Article scientifique publié le 23 janvier 1997 par les Drs Fardad, Andrews et Najafi;

- P-6 Article scientifique publié le 5 juin 1997 par les Drs Fardad, Andrews et Najafi, entre autres;

- P-7 Article scientifique publié le 9 septembre 1998 par les Drs Fardad, Andrews et Najafi, entre autres;

- P-21 Courriel du 4 septembre 2001 du Dr Najafi au Dr Fardad;

- P-23 Courriel du 27 novembre 2001 de M. Alex Navarre de McGill au Dr Fardad;

- P-24 Courriel du 29 décembre 2001 de M. Alex Navarre de McGill au Dr Fardad;

- P-31 Lettre du 31 mai 2001 de M. Alex Navarre de McGill envoyée aux Drs Andrews, Fardad, Najafi et Galina Milova.

[20] Poly s’oppose, plus particulièrement, en faisant valoir que ces documents ne peuvent pas être produits pour faire foi de leur contenu.

[21] Le Tribunal souscrit au principe que le contenu de ces documents ne peut pas être considéré comme étant la vérité, sur la seule base de leur dépôt.

[22] Cependant, le dépôt de ces documents permet d’établir qu’ils ont existé, ce qui n’est pas contesté par ailleurs.

[23] Ils font état de ce que les auteurs pensaient au moment où ils les ont écrits, et cela, que ce soit vrai ou pas.

[24] Leur production permet de comprendre la séquence des événements et la séquence des autres documents produits sans contestation.

[25] Par conséquent, afin d’avoir un éclairage complet dans le présent dossier, le Tribunal permet la production des pièces susmentionnées et précise que les documents visés n’auront de valeur sur le plan juridique que dans la mesure où tous les autres éléments de preuve analysés par ailleurs permettent de bien les circonscrire pour mieux les évaluer.

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CHRONOLOGIE DES FAITS

[26] En 1993, le Dr Najafi du groupe de génie-physique de Poly et le Dr Andrews de la faculté de chimie de McGill se rencontrent pour la première fois.

[27] Le 4 avril 1993, le Dr Najafi fait une demande de subvention auprès du Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada («CRSGC») pour une durée de trois ans. Le titre du projet de recherche soumis est «Rare Earth Activated Integrated Optics from Sol-Gel Glasses». Les membres du groupe de recherche nommés sont le Dr Najafi, le Dr Andrews et M.D. Simkin de la faculté de chimie de McGill. La subvention ne fut pas accordée (pièce P-28).

[28] À l'été 1994, première rencontre des Drs Najafi et Fardad lors d'un colloque scientifique tenu à San Diego, aux États-Unis. Tous les deux sont d'origine perse, venant de la même région d'Iran et échangent verbalement entre eux dans leur langue maternelle, soit le persan appelé farsi en Iran.

[29] Le 3 novembre 1994, la demande de subvention stratégique faite par le Dr Andrews en avril 1994 est approuvée par le CRSGC. Elle est d'un montant d'environ 300 000 $ et est d’une durée de trois ans, se terminant en octobre 1997. Le projet de recherche identifié est «Development of new Sol-Gel Glasses and Processes for optical amplifiers and Laser». Les chercheurs nommés à sa demande sont lui-même, le Dr Najafi et M.D. Simkin. Le numéro de dossier au CRSGC est STRO167298 et le numéro de compte de McGill est […]. Dans sa demande, le Dr Andrews indique que des travaux appliqués seront faits dans la Clean Room de Poly (p. 80) et que «This proposal truly reflects a multidisciplinary, inter-university team effort» (p. 81) (pièces D-14 et D-14-A).

[30] En juillet 1995, le Dr Fardad fait parvenir son curriculum vitae («c.v.») au Dr Najafi.

[31] À l’automne 1995, les Drs Najafi et Andrews offrent un poste, à Montréal, au Dr Fardad qui est alors assistant de recherche au Imperial College à Londres, Angleterre, où il a obtenu son Ph.D. «in Electrical and Electronic Engineering (Integrated Optical Devices)», son projet de recherche ayant été «Fabrication of sol-gel silica-on-silicon wave-guides doped with semiconductor quantum dots for all optical signal processing» (pièce D-4).

[32] Le 28 septembre 1995, le Conseil d'administration de Poly adopte la Politique de Poly, constituée de la politique elle-même, de principes généraux, d'une section traitant des inventions et brevets, d'une section traitant des logiciels et une dernière section traitant des procédures (pièce P-2).

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[33] Le 10 janvier 1996, le Dr Fardad arrive à Montréal. Il se rapporte au Dr Andrews de McGill et entre en communication avec le Dr Najafi de Poly. Le Dr Fardad est payé par McGill du mois de janvier 1996 jusqu'au 31 mars 1997, et par Poly du mois d'avril 1997 jusqu'à son départ du Canada, le 11 novembre 1997. À McGill, le salaire du Dr Fardad est imputé au compte […] relatif à la subvention STRO167298 du CRSGC (pièce D-27 en liasse) et, à Poly, son salaire est imputé au compte […] découlant d'un contrat intervenu entre Poly et la société américaine CoreTeck Inc. (pièces D-3, D-19, D-20, D-21 et D-22).

[34] Depuis son arrivée au Québec en janvier 1996, le Dr Fardad travaille avec le Dr Andrews quant aux aspects chimiques de la recherche et avec le Dr Najafi quant aux aspects relevant de la physique. Les deux professeurs supervisent les travaux du Dr Fardad, communiquent fréquemment entre eux, et des rencontres à trois ont lieu tant à McGill qu'à Poly. Les équipements de recherche de McGill sont utilisés par le Dr Fardad et ceux de Poly aussi, avec l'autorisation du Dr Najafi, dont la Clean Room permettant de faire certains travaux et la vérification de la qualité des produits, tout en assurant le contrôle de tous les paramètres requis. Sur le c.v. du Dr Fardad, rédigé au début de l'année 1997, il y a une adresse électronique à McGill et une à Poly. De plus, il y nomme les Drs Andrews et Najafi à titre de références (pièce D-4).

[35] Avril 1996, début annoncé des travaux indiqués par le Dr Najafi dans sa demande pour obtenir un Collaborative Project grant (Group) présentée au CRSGC le 11 décembre 1995. Le titre de la recherche est «Optoelectronic Sol-Gel glass waveguides with grating on silicon». La subvention est accordée. Le co-demandeur est le Dr Andrews. La page 4a fait état d'un «postdoctoral fellow who will work on waveguide and grating fabrication … and characterization under co-supervision of Professors Andrews and Najafi», mais ce fellow n'est pas nommé. La société QP Semiconductor Technology («QPS») apparaît comme Supporting organization (p. 6) (pièce P-29).

[36] Avril 1996, début annoncé des travaux indiqués par le Dr Najafi dans sa demande pour obtenir un NSERC-NRC-Industry Partnership grant présentée au CRSGC au mois de février 1996. Le titre de la recherche est «Commercial production of photonic devices and circuits by the sol-gel glass process». La subvention est accordée. Les co-demandeurs sont le Dr Andrews et M. Jason Hong du Conseil national de recherche à Ottawa. QPS apparaît comme Supporting organization (p. 6). La page 4a fait état d'un «postdoctoral researcher who will spend equal time at McGill, Polytechnique, NRC and QPS», mais cette personne n'est pas nommée. À la page 8 de ce document (pièce P-30), le Dr Najafi écrit ce qui suit:

«We have been pursuing the bright potential of sol-gel chemistry for integrated optic device applications for some time now. The research and publications to date have evolved from a tight collaboration between researchers headed by Najafi at the École Polytechnique and Andrews at McGill University. This collaboration has a proven track record of productivity in the areas relevant to the current proposal. Extensive cooperation between the two research groups has

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already established a working management structure for administering funds, supervising and deploying graduate student and postdoctoral researchers to meet research objectives. […]»

(Notre soulignement)

[37] Le 23 janvier 1997, première publication des résultats de recherche par les Drs Fardad, Andrews et Najafi faite dans une revue éditée par l’International Society for Optical Engineering («SPIE») qui se définit comme étant une «International Society advancing an interdisciplinary approach to the science and application of light». Le titre de l'article est «Novel Sol-Gel fabrication of integrated optical waveguides». Les Drs Fardad et Andrews se présentent comme faisant partie du département de chimie de McGill et le Dr Najafi comme faisant partie du groupe de recherche en physique photonique de Poly. Dans les remerciements, référence est faite aux subventions du CRSGC (pièces P-29 et P-30) et à l'appui financier de QPS (pièce P-5).

[38] Début 1997, le c.v. du Dr Fardad est refait par ce dernier (pièce D-4).

[39] Le 25 mars 1997, les Drs Fardad, Najafi et Andrews signent leur Report of an invention remis à McGill seulement. Le titre de l'Invention, tel qu’écrit dans ce document à cette époque, est «Ridge Waveguide lithoglass Photorelief Process». Les inventeurs nommés sont les Drs Fardad et Andrews de la faculté de chimie de McGill et le Dr Najafi de la section de génie-physique de Poly. Il est indiqué, à la page 4, que la recherche ayant mené à l'Invention fut faite à McGill et à Poly et qu'un NSERC Strategic grant fut obtenu. À la page 6, les trois inventeurs indiquent, et signent, que le partage du net annual income sera fait à raison de 33,33% pour chacun d'entre eux. À la page 7, il est indiqué «yes» en regard de la question 16 qui se lit comme suit: «Do you expect to continue work towards improving the apparatus, product or process ? » et, à la question 19, les inventeurs indiquent qu'ils sont en contact avec la société CoreTeck Inc. pour les fins d'application de l'Invention (pièce D-1-A).

[40] En avril 1997, le Dr Fardad commence à recevoir son salaire de Poly et ne travaille que partiellement sur le projet de la société CoreTeck Inc., dont les deuxième et troisième versements de son engagement monétaire initial ne sont pas versés à Poly, tel qu'indiqué dans son témoignage par Mme Carole Guérin, chef de section, Gestion Ententes et Administration générale de Poly, qui a passé en revue le compte […].

[41] Le 14 avril 1997, dépôt auprès de la revue Electronics Letters d'un deuxième article intitulé «UV-light imprinted Bragg grating in sol-gel ridge glass waveguide with almost 100% reflectivity», article qui fut publié le 5 juin 1997 (pièce P-6). Les auteurs se présentent de la façon suivante: M. A. Fardad, T. Touam, P. Meshkinfam, R. Sara, X.M. Du et S.I. Najafi du groupe de recherche photonique de Poly, M.P. Andrews de la faculté de chimie de McGill, et M. A. Fardad et X.M. Du comme étant également de la faculté de chimie de McGill. Dans les remerciements, référence est faite aux subven-tions stratégiques de recherche et développement du CRSGC (pièces D-14 et P-30).

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[42] Le 14 mai 1997, Mme Lise Gauthier de Poly écrit au Dr Fardad pour lui indiquer «à titre d’associé de recherche, vous vous joindrez à une équipe de recherche sous la responsabilité du professeur Iraj Najafi dans le domaine de l’optoélectronique» (pièce D-3).

[43] Le 29 juillet 1997, dépôt auprès de la revue Applied Optics d'un troisième article intitulé «Fabrication of ridge waveguides: a new solgel route», article qui fut publié le 20 avril 1998. Il est mentionné par les auteurs que lorsque la recherche fut réalisée, A. Fardad, M. Andrews et G. Milova étaient avec la faculté de chimie de McGill et que A. Malek-Tabrizi et I. Najafi étaient avec le groupe de recherche photonique de Poly. Des remerciements sont adressés au CRSGC pour ses Research and Equipment Grants and Strategic Grants Programs (pièce P-4).

[44] Le 17 septembre 1997, dépôt auprès du Journal of lightwave Technology d'un quatrième article intitulé «Sol-Gel Glass Waveguide and Grating on Silicon», article qui fut publié le 9 septembre 1998. Il est mentionné que S.I. Najafi, T. Touam, R. Sara et M.A. Fardad sont avec le groupe de recherche photonique de Poly et que M. P. Andrews est avec la faculté de chimie de McGill. Il est indiqué que la recherche fut appuyée par des subventions de recherche du CRSGC et du Conseil national de recherche du Canada (pièce P-7).

[45] Le 9 octobre 1997, le Dr Najafi écrit une lettre au Case Processing Center-Vi- sitor canadien afin d'appuyer le Dr Fardad dans sa démarche pour renouveler son visa. Il décrit le travail du Dr Fardad à Montréal sous sa supervision et celle du Dr Andrews, et ce, entre le mois de janvier 1996 et l’automne 1997 (pièce P-3).

[46] Le ou vers le 10 octobre 1997, le Dr Najafi cède à Poly tous ses droits dans l'Invention connue comme étant un «Solvent-assisted lithographic process using photo-sensitive sol-gel derived glass for depositing ridge waveguides on silicon» pour la somme de 1,00 $ (pièces P-32 et P-34).

[47] Le 10 octobre 1997, Poly cède à McGill tous ses droits dans l'Invention «for value received», faisant de McGill l'assignee (pièces P-33 et P-34).

[48] Le 10 octobre 1997, les Drs Fardad et Andrews cèdent à McGill tous leurs droits dans l'Invention pour la somme de 1,00 $ (pièces D-2 et P-34).

[49] Le 10 octobre 1997, la demande de brevet pour l'Invention est déposée auprès du Bureau américain des brevets. Les inventeurs nommés sont les Drs Fardad, Najafi et Andrews et l'assignee est McGill. Le brevet est accordé le 25 avril 2000 sous le numéro 6,054,253 (pièce P-8).

[50] Le 10 octobre 1997, une demande de brevet pour l'Invention est également déposée au Bureau canadien des brevets. Les inventeurs-propriétaires-demandeurs nommés sont les Drs Andrews, Fardad et Najafi (pièce P-9).

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[51] Le 10 octobre 1997, une lettre d'entente d'une page est signée par M. Jonathan Farber de McGill et M. Louis Taillefer de Poly, établissant que McGill sera concession-naire des brevets, que les coûts relatifs à l’obtention des brevets seront assumés par McGill et Poly dans les proportions de 2/3 et 1/3 respectivement, et que tous les revenus nets découlant de la commercialisation de la technologie seront partagés dans les mêmes proportions. Cette lettre indique que «The Work contained in the patents was jointly developed by Drs Fardad and Andrews at McGill and Dr Najafi at École Polytechnique» (pieces D-25 et D-28).

[52] Le 11 novembre 1997, le Dr Fardad quitte le Canada car son visa est expiré.

[53] Le 18 décembre 1997, constitution de PolyValor, société en commandite, dont les trois commanditaires sont Poly à hauteur de 50%, le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.) («Fonds de solidarité») à hauteur de 47% et le Fonds en transferts de technologies industrielles, société en commandite («Fonds en transferts») à hauteur de 3%. Poly acquiert 25,000 parts A de PolyValor, au prix de souscription de 100,00 $ la part, correspondant à un montant total de 2 500 000 $, qu'elle acquitte en cédant à PolyValor tous ses droits relatifs à trente-deux (32) technologies énumérées à l'annexe A du formulaire de souscription, la juste valeur marchande de ces droits étant établie à 2 500 000 $. Dans la liste des technologies transférées apparaît, à l'item 8, le Projet Optek Inc. (produits photoniques) correspon-dant aux deux demandes de brevet déposées respectivement aux États-Unis et au Canada relatives à l'Invention (pièces P-1, D-11, D-24 en liasse et D-33).

[54] Au début de l’année 1998, le Dr Fardad accepte un poste à l'Université d'Arizona au salaire annuel de 31 000 $ US, augmenté à 36 000 $ US quelques mois plus tard. Sa femme ne travaille pas hors du foyer.

[55] 1998, année de la mise sur pied de Lumenon par le Dr Najafi et le Dr Andrews, tel qu’indiqué à la page 13 du formulaire no 10 déposé auprès de la SEC le 5 novembre 1999, société dont ils deviennent des actionnaires importants (pièce P-12). Lumenon est en fait la continuation de la société W.W.V. Development, Inc. constituée, le 12 février 1996, dans l’état du Delaware (pièce P-10).

[56] Le 13 février 1998, une rencontre est tenue à Inno-Centre et un résumé en est fait (pièce P-35). Sont présents Jonathan Farber (McGill), le Dr Andrews (Lumenon), le Dr Najafi (Lumenon) et Martin Fara (Inno-Centre). M. Denis N. Beaudry de Poly partici-pe par téléphone. McGill se dit prête à licencier la technologie. Il est utile de rappeler les passages suivants de ce résumé qui abordent le sujet des redevances et de la partici-pation à l'équité à être convenues entre McGill, Poly et les inventeurs. Ils se lisent ainsi:

«[…]

It was noted that as far as royalty payments are concerned, McGill gives back to the inventors 65% of the proceeds. It is not known at this moment what would happen with the proceeds of an eventual disposition of the equity participation.

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Poly has a scheme of giving back 40% of proceeds to the inventors, increasing to 60% based on amounts. This item remains to be clarified, as well as its applicability to the equity participation.

Lumenon feels that whatever amounts are given back to the inventors by the universities should be reinvested in the company.

[…]»

[57] Le 4 mai 1998, une lettre offrant une entente à QPS est signée par M. Denis N. Beaudry de Poly et celle-ci est contresignée par Mme Marjorie Léon, directrice des finances de QPS, le 25 mai 1998. Les parties conviennent de résilier, rétroactivement au 31 décembre 1997, les ententes portant sur les projets de recherche suivants, soit le projet NSERC file 661-127/95 (Professor I. Najafi-Professor M. Andrews) Optoelectro-nic sol-gel glass waveguides with grating on silicon (pièce P-29), et le projet NSERC file 653-012/95 (Professor I. Najafi-Professor M. Andrews) Commercial production of photonic devices and circuits by sol-gel glass process (pièce P-30). M. Denis N. Beaudry joint à sa lettre copie de la demande de brevet pour l'Invention, rappelant qu'elle découle des travaux des professeurs Najafi et Andrews ainsi que du Dr Fardad. Poly consent une licence gratuite à QPS pour lui permettre d'utiliser la technologie. Une quittance mutuelle et réciproque est donnée par les deux parties (pièce P-37).

[58] Le 16 novembre 1998, une nouvelle lettre d'entente intervient entre McGill (M. Jonathan Farber) et PolyValor cette fois (M. Denis N. Beaudry à titre de P.D.G.) dans laquelle il est prévu (1) que Poly a cédé ses droits à PolyValor, (2) que McGill et PolyValor assumeront chacune 50% des coûts relatifs à l'obtention des brevets et, (3) que McGill et PolyValor recevront chacune 50% de tous les revenus, incluant toute équité, provenant de la commercialisation / licence de l'Invention (pièce D-26).

[59] En décembre 1998, signature de la Licence entre, d'une part, PolyValor et McGill à titre de Licensor et, d'autre part, Lumenon, à titre de Licensee. La Licence, à l'article 1.1.1, indique que l'invention visée est l'Invention de M. Amir Fardad, Mark P. Andrews et S. Iraj Najafi. Elle précise, à l'article 2.2, qu'aucune autre licence, que celle accordée à QPS, ne sera accordée. L'article 3.1.2 prévoit que McGill et PolyValor recevront, chacune, une redevance de 2,5% des ventes brutes de Lumenon, jusqu'à concurrence de 1 750 000 $ chacune. L'article 3.1.3 prévoit que McGill et PolyValor recevront, en contrepartie de leurs apports respectifs, 750 000 actions chacune de Lumenon, lesquelles seront sous écrou pendant une période d'un an. La Licence est signée, d'une part, par M. Denis N. Beaudry pour PolyValor et M. Alex Navarre pour McGill et, d'autre part, par le Dr Najafi, à titre de président, et par le Dr Andrews, à titre de vice-président, pour Lumenon. La Licence entrera en vigueur quelques mois plus tard (pièce P-13).

[60] Le 22 décembre 1998, lettre du Dr Najafi au Dr Fardad dans laquelle il lui offre le poste de Development Engineer au sein de Lumenon, au salaire annuel de 55 000 $ US, débutant le 1er mars 1999 et signature d'un contrat d'emploi dans lequel il est

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indiqué que le Dr Fardad travaillera sur le Development of sol-gel integrated optics circuits (article 3.1.1) et sur le Development of materials and processes for sol-gel integrated optics devices (article 3.1.2) (pièces D-5 et D-7).

[61] Le 23 mars 1999, la Licence prend effet conformément à ses dispositions.

[62] Le 26 mai 1999, le Dr Najafi, au nom de Lumenon, écrit au Dr Fardad pour lui dire que le gouvernement canadien a validé l'offre d'emploi que Lumenon lui avait faite et qu'il doit faire sa demande de visa. Il ajoute qu'en plus du contrat d'emploi proposé, il recevra 50 000 options d'achat d’actions, au prix de 1,00 $ US chacune, qu'il pourra exercer à raison de 10 000 options à la fin de chacune des années visées (pièce D-6).

[63] La période située entre le début de l’année 1999 et l’été 1999 est la plage de temps durant laquelle des discussions et des négociations eurent lieu entre les différents partenaires-investisseurs, à l’exclusion du Dr Fardad, pour décider, de façon finale, quelle portion du capital-actions de Lumenon sera attribuée à chacun d'entre eux, et ce, en contrepartie de leurs apports respectifs qu‘ils ont établis eux-mêmes.

[64] Il en est résulté des attributions qui furent indiquées au formulaire no 10 déposé auprès de la SEC le 5 novembre 1999 (pièce P-12). Ce document fait état (p. 25 et 26) que, le 30 septembre 1999, Lumenon a émis 22 012 000 actions votantes détenues, en partie, comme suit: le Dr Najafi: 5 237 500; Najafi Holdings Inc.: 5 037 500; le Dr Andrews: 4 887 500; Andrewma Holdings Inc.: 4 687 500; McGill et PolyValor: 1 500 000. Il y est précisé que le Dr Najafi est le seul actionnaire de Najafi Holdings Inc. et que le Dr Andrews est le seul actionnaire de Andrewma Holdings Inc. Le prix des actions (p. 2) est établi à «$.001 par value».

[65] Le 4 août 1999, signature par le Dr Najafi, pour Lumenon, et par le Dr Fardad d'une entente accordant au Dr Fardad un Stock option incentive Plan en vertu duquel il peut acheter 50 000 actions au prix de 1,00 $ US chacune, et ce, à raison de 10 000 actions par année, jusqu'aux dates d'expiration suivantes, soit les 21 mai 2002, 21 mai 2003, 21 mai 2004, 21 mai 2005 et 21 mai 2006 (pièce D-8).

[66] Le 13 septembre 1999, le Dr Najafi relance le Dr Fardad pour savoir s'il se joindra à Lumenon. Le Dr Fardad décline, finalement, l'offre formulée jusqu'à cette date en disant que sa femme connaît des problèmes sérieux reliés à ses grossesses et qu'elle ne peut voyager, de telle sorte qu'il n'acceptera pas l'offre et restera à Tucson (pièce D-9).

[67] Le 12 avril 2000, première journée au cours de laquelle les actions de Lumenon peuvent être transigées sur le NASDAQ, l'embargo étant levé ce jour-là. L'action se transige alors à 27,12 $ US, soit 39,60 $ canadiens, et PolyValor vendit 3 000 actions à ce prix-là.

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[68] Le 25 avril 2000, le brevet américain no 6,054,253 est émis et il est intitulé «Solvent-assisted lithographic process using photosensitive Sol-Gel derived glass for depositing ridge waveguides on silicon» (pièce P-8).

[69] Le 31 mai 2001, M. Alex Navarre de McGill écrit au Drs Marc Andrews, Galima Milova, Iraj Najafi et Amir Fardad car des questions ont été soulevées par le Dr Milova concernant la propriété intellectuelle relative à l'Invention, et il propose une rencontre à Montréal, le 12 juin 2001, avec Me Alain Leclerc afin de tirer le tout au clair. En fait, le Dr Milova revendique des droits et un partage (pièce P-31).

[70] À l'été 2001, les Drs Fardad et Najafi ont une communication et, d'après le témoignage du Dr Fardad, le Dr Najafi lui a dit «Why aren't you claiming your money?», le Dr Fardad de répondre «What money ?». Selon le Dr Fardad, le Dr Najafi lui envoie alors copie de la Licence.

[71] Le 4 septembre 2001, le Dr Najafi envoie un courriel au Dr Fardad lui donnant l'adresse du site internet où il pourra trouver l'information quant aux ventes d'actions faites par McGill et Poly et quant aux montants reçus. Il précise que ces ventes furent faites au nom de M. Denis N. Beaudry (pièce P-21).

[72] Le 26 octobre 2001, le Dr Fardad écrit une lettre à M. Denis N. Beaudry, président-directeur général de PolyValor inc., le commandité de PolyValor, «for the recovery of royalties, proceeds or payments owed to me by McGill University, École Plytechnique (sic) or any other person or entity, arising from the assignment or transfer of US patent 6,054,253 and/or Canadian patent 2,218,273» (pièce P-22).

[73] Le 21 novembre 2001, accusé-réception de M. Denis N. Beaudry, par courriel, de la lettre du 26 octobre du Dr Fardad que ce dernier lui a envoyée de nouveau, par courriel, cette journée-là (pièce P-26).

[74] Le 27 novembre 2001, courriel de M. Alex Navarre, Director, Office of Technolo-gy Transfer, McGill University and affiliated hospitals, envoyé au Dr Fardad (pièce P-23). M. Navarre écrit ce qui suit, soit:

«[…] After some due diligence, I have realized that you probably were not made aware of the details of the Lumenon transaction.

We are still collecting some information about your status at the time of the invention and will soon meet with our colleagues from Polytechnique to review the situation.

We should then be in a position to respond to your letter».

[75] Le 29 décembre 2001, courriel de M. Alex Navarre envoyé au Dr Fardad (pièce P-24). M. Navarre écrit ce qui suit dans ce document:

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«[…]

As I mentioned to you in my last message, it seems to me and Denis that, contrary to our presumption that the Founders had kept you well informed as the company and the deal were struck, you do not seem to have been apprised of the nature of the Lumenon agreement. It seems to me that a first step would be to meet and to explain to you how the deal was struck and our rationale as we proceeded. In order to do so, we would make ourselves available for a meeting, anytime convenient to you. […]»

[76] Le 7 janvier 2002, courriel du Dr Fardad à M. Alex Navarre (pièce D-10). Il écrit ce qui suit, soit:

«[…]

Second, I am puzzled with your saying regarding the deal and struck. There has been absolutely no communication between me and Lumenon Founders regarding the agreement. […]»

[77] Le 11 janvier 2002, courriel de M. Alex Navarre au Dr Fardad. Il lui confirme que les Founding parties et les Institutions ont vendu, l'année précédente, une partie de leurs portefeuilles respectifs des actions de Lumenon et lui indique, d'autre part, que les redevances découlant des ventes futures, le cas échéant, seront partagées «in conformity with the respective Institution policies» (pièce D-10).

[78] Le 20 mars 2002, Me Hélène Perron, directrice des affaires juridiques de Poly, à la demande de M. Denis N. Beaudry, répond aux lettres des 26 octobre 2001 et 8 mars 2002 du Dr Fardad. Elle nie toute responsabilité de Poly. Elle soumet que toute revendication d'un chercheur aux «royalties, proceeds or payments … lies with his own University». Elle ajoute que, selon les documents de Poly, «you never were an employee, or student at Ecole Polytechnique … at any relevant time». Elle poursuit en écrivant «It appears that you were employed for a short three-months period but only well after the invention was licensed and in connection with an unrelated project. Furthermore, PolyValor is not Ecole Polytechnique» (pièce P-27).

[79] Le 27 janvier 2003, les avocats du Dr Fardad font parvenir une lettre de mise en demeure à M. Bernard Lamarre, à titre de président de Poly, et à M. Denis N. Beaudry, à titre de président de PolyValor, dans laquelle il demande de recevoir (1) toute documentation pertinente, (2) le détail de toutes les ventes d'actions de Lumenon et (3) sa part des redevances et sa part du produit de la vente des actions de Lumenon (pièce P-16).

[80] Le 9 mai 2003, un règlement intervient entre le Dr Fardad et McGill, sans aucune admission de responsabilité de la part de cette dernière. […]. La convention est par ailleurs confidentielle (pièce D-13).

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[81] Au 30 juin 2003, PolyValor a reçu la somme totale brute de 9 138 479,64 $ suite à la vente de ses 750 000 actions de Lumenon, soit 5 340 159,51 $ cumulativement au 30 juin 2000 pour la vente de 218 000 actions, 3 767 268,33 $ cumulativement au 30 juin 2001 pour la vente de 103 600 actions et 31 051,80 $ cumulativement au 30 juin 2003 pour la vente de 428 400 actions.

[82] Le gain net de PolyValor fut de 8 586 480 $ composé d’une somme de 5 179 712 $ accumulée au 30 juin 2000, d’une somme de 3 691,019 $ accumulée au 30 juin 2001 et d’une perte nette de 284 251 $ accumulée au 30 juin 2003 (pièces P-17 à P-20 et D-24 en liasse).

[83] Année 2003, Lumenon cesse ses activités et fait faillite, sans avoir vendu quelque produit que ce soit.

[84] Le 4 décembre 2003, le Dr Fardad intente son action en justice contre Poly au montant de 5 883 753,12 $, laquelle fut amendée au cours du procès pour être réduite à 4 950 000,00 $. Le Dr Fardad a abandonné sa réclamation de 500 000 $ correspon-dant à des dommages punitifs et, de plus, il ne réclame plus l’équivalent de 187 500 actions de Lumenon, correspondant à la moitié de 375 000 actions, mais plutôt l’équivalent monétaire de 125 000 actions de Lumenon correspondant au tiers de 375 000 actions.

[85] Le Tribunal a estimé utile et nécessaire de faire une revue des documents et des faits importants de la cause afin que son analyse s'inscrive dans une perspective qui soit la plus complète possible.

DISCUSSION

PRESCRIPTION

[86] La première question que le Tribunal doit trancher est celle de la prescription car Poly fait valoir que les faits générateurs allégués comme étant sous-jacents au droit d’action du Dr Fardad se sont tous produits en 1999, ou au plus tard le 12 avril 2000, de telle sorte que la prescription extinctive de trois ans prévue à l’article 2925 du Code civil du Québec («C.c.Q.») doit être appliquée, entraînant le rejet de l’action en justice du Dr Fardad car celle-ci fut intentée le 4 décembre 2003, soit plus de trois ans après le 12 avril 2000.

[87] L’article 2925 du C.c.Q. se lit comme suit :

«2925.  L'action qui tend à faire valoir un droit personnel ou un droit réel mobilier et dont le délai de prescription n'est pas autrement fixé se prescrit par trois ans.»

[88] Succinctement exprimé, Poly plaide que le droit du Dr Fardad de recevoir quelque chose a pris naissance, et ce en retenant les meilleures hypothèses pour lui, quand Poly elle-même a eu le droit de recevoir quelque chose, soit le 23 mars 1999, date de l’entrée en vigueur de la Licence (pièce P-13) donnant droit à PolyValor de

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recevoir 750 000 actions de Lumenon, soit le 12 décembre 1999 quand PolyValor a effectivement reçu ses actions de Lumenon (pièce P-17), ou le 12 avril 2000 quand PolyValor a eu le droit, pour la première fois, de vendre ses actions de Lumenon sur le NASDAQ.

[89] Poly réitère que le Dr Fardad s’est fait offrir un poste au sein de Lumenon le 22 décembre 1998 (pièce D-7), et qu’il s’en est suivi des échanges et négociations avec le Dr Najafi qui se sont étalés jusqu’au mois de septembre 1999, de telle sorte que le Dr Fardad aurait dû savoir, alors, qu’il y avait commercialisation de l’Invention commune, que ses droits pouvaient être bafoués et que des gestes devaient donc être posés par lui pour les protéger, dont intenter une action en justice, le cas échéant.

[90] De son côté, le Dr Fardad allègue que jamais il n’a eu connaissance de la commercialisation de l’Invention avant le 31 mai 2001, journée où il a reçu la lettre de M. Alex Navarre (pièce P-31) qui soulevait des questions de nature commerciale concernant la propriété intellectuelle relative à l’Invention, laquelle lettre lui permit d’apprendre après, de la part des autres acteurs en cause, qu’il y avait eu une commer-cialisation de l’Invention à son insu et perception de sommes d’argent importantes.

[91] Le Dr Fardad soutient, qu’avant le 31 mai 2001, il était dans l’impossibilité en fait d’agir, étant ignorant de la commercialisation de l’Invention, de telle sorte qu’il y eût suspension du délai de la prescription de trois ans, laquelle ne commença à courir que le 31 mai 2001, pour n’expirer que le 31 mai 2004, son action en justice intentée le 4 décembre 2003 n’étant donc pas prescrite.

[92] La position du Dr Fardad s’appuie sur l’article 2904 du C.c.Q. qui se lit comme suit :

«2904.  La prescription ne court pas contre les personnes qui sont dans l'impossibilité en fait d'agir soit par elles-mêmes, soit en se faisant représenter par d'autres.»

[93] Il est reconnu par la jurisprudence que la détermination de l’impossibilité en fait d’agir d’une personne est une question laissée à l’appréciation des tribunaux qui, dans chaque cas d’espèce, doivent analyser la preuve qui leur est soumise.

[94] Avant d’aborder la preuve, revoyons quelques extraits pertinents d’arrêts de la Cour Suprême.

[95] Premièrement, référons-nous à l’arrêt Oznaga1 dans lequel le juge Lamer écrit, en 1981, le passage cité ci-après alors que le Code civil du Bas-Canada en vigueur à l’époque parlait, à son article 2232, d’une impossibilité absolue en fait d’agir, et non pas simplement d’une impossibilité en fait d’agir, tel que cela est maintenant prévu à l’article 2904 du C.c.Q. :

1 Ion Oznaga, appelant, c. La Société d’exploitation des loteries et courses du Québec, intimée, [1981] 2 R.C.S., p. 126

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«Ainsi suis-je d’avis que c’est à bon droit que de façon générale les auteurs refusent de considérer l’ignorance, par le créancier, des faits juridiques générateurs de son droit, comme étant une impossibilité absolue en fait d’agir (voir Pierre Martineau, La prescription, P.U.M., 1977, aux pp. 353 et ss.). Par ailleurs, on semble tout autant d’accord, et j’y souscris, pour reconnaître que l’ignorance des faits juridiques générateurs de son droit, lorsque cette ignorance résulte d’une faute du débiteur, est une impossibilité en fait d’agir prévue à l’art. 2232 et que le point de départ de la computation des délais sera suspendu jusqu’à ce que le créancier ait eu connaissance de l’existence de son droit, en autant, ajouterais-je, qu’il se soit comporté avec la vigilance du bon père de famille.»

(Notre soulignement)

[96] Par ailleurs, voyons ce qu’écrit la Cour Suprême en 1998, sous la plume du juge Gonthier, qui traitait de nouveau de l’article 2232 du Code civil du Bas-Canada. Il s’exprime ainsi dans l’arrêt Gauthier c. Beaumont2 :

«Au Québec, la doctrine et la jurisprudence soutiennent que la prescription est suspendue lorsque l’impossibilité d’agir résulte de la faute du débiteur de l’obligation (Martineau, op. cit., à la p. 354; J. W. Durnford, «Some Aspects of the Suspension and of the Starting Point of Prescription» (1963), 13 Thémis 245, à la p. 273; L. Langevin, «Suspension de la rescription extinctive : à l’impossible nul n’est tenu» (1996), 56 R. du B.265, à la p. 273; Oznaga c. Société d’exploitation des loteries et courses du Québec, précité, à la p. 127; Banque de Montréal c. Bail Ltée, [1992] 2 R.C.S. 554, à la p. 603) Ceci n’est qu’une expression de la règle contra non valentem agere qui reflète un principe de justice fondamentale exprimé aussi par la théorie de l’abus de droit, la maxime fraus omnia corrumpit, et le précepte moral voulant que l’on ne doive pas tirer profit de sa mauvaise foi ou de ses mauvaises actions (Banque Nationale du Canada c. Soucisse, [1981] 2 R.C.S. 339; Banque de Montréal c. Kuet Leong Ng, [1989] 2 R.C.S. 429; Houle c. Banque canadienne nationale, [1990] 3 R.C.S. 122).»

(Notre soulignement)

[97] Le Tribunal retient de ces deux extraits, entre autres, qu’il est bien établi que lorsque l’impossibilité d’agir, qu’elle soit absolue ou a fortiori relative, résulte de la faute du débiteur d’une obligation, il y a alors suspension de la prescription extinctive.

[98] Dans la section suivante du présent jugement, le Tribunal explique les raisons pour lesquelles la Politique de Poly s’applique au Dr Fardad, ce qui fait en sorte que Poly était débiteur du Dr Fardad en regard de l’application de cette Politique dans le contexte, d’une part, des travaux faits par le Dr Fardad à Poly et, d’autre part, de la commercialisation de l’Invention.

2 David Allen Gauthier, appelant, c. Corporation municipale de ville du Lac Brôme, intimée, et Mario Beaumont et Alyre Thireault, intimés, [1998] 2 R.C.S., p.47

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[99] Poly fait valoir que le Dr Fardad aurait dû savoir que Poly, McGill, le Dr Andrews et le Dr Najafi avaient tout mis en œuvre à la fin de l’année 1997, et au cours des années 1998 et 1999, pour commercialiser l’Invention car, dès le 22 décembre 1998, le Dr Najafi lui a offert un poste de Development Engineer au sein de Lumenon, au salaire annuel de 55 000 $ US, pour faire le development of sol-gel integrated optics circuits (article 3.1.1) et le development of materials and processes for sol-gel integrated optics devices (article 3.1.2), (pièces D-5 et D-7).

[100] Poly ajoute que, le 26 mai 1999, le Dr Najafi lui a offert, au nom de Lumenon, 50 000 options d’achat d’actions à 1,00 $ chacune, pouvant être exercées à raison de 10 000 options par année (pièce D-6), et que, par ailleurs, le 4 août 1999, le Dr Najafi pour Lumenon et le Dr Fardad ont signé une entente accordant effectivement un Stock option incentive Plan au Dr Fardad précisant qu’il pourra acheter 10 000 actions par année en 2002, 2003, 2004, 2005 et 2006 (pièce D-8).

[101] Poly conclut qu’il est impensable que le Dr Fardad n’ait pas allumé et compris à cette époque que l’offre du Dr Najafi, même limitée et circonscrite, était reliée à la commercialisation de l’Invention, et ajoute qu’il aurait dû poser les gestes nécessaires pour en savoir plus, ce qui l’a placé dans une situation où il lui était possible d’agir, et non l’inverse.

[102] Il s’agit d’un petit monde, selon Poly, et le Dr Fardad aurait dû faire le lien obligatoirement avec l’Invention et sa commercialisation.

[103] Petit monde il est vrai ! Alors pourquoi le Dr Najafi, qui fit l’offre d’emploi à son co-inventeur le Dr Fardad, n’a-t-il pas tout simplement fait référence à l’Invention dans le cadre du contrat proposé ?

[104] Cela aurait été si simple de la part du Dr Najafi de faire un rappel du titre de l’Invention, soit dans la description de tâche du Dr Fardad ou soit dans le préambule du contrat d’emploi offert au Dr Fardad, ainsi que dans l’entente lui accordant un Stock option incentive Plan, à savoir que Lumenon avait été mise sur pied exclusivement pour commercialiser l’Invention.

[105] Or, cela ne fut pas fait. Nulle part dans ces documents il n’est fait mention de la commercialisation de l’Invention commune et aucune mention n’est faite, non plus, que Lumenon a obtenu, en décembre 1998, la Licence exclusive de commercialisation de l’Invention de la part de PolyValor et de McGill.

[106] De plus, Poly soutient que le Dr Fardad aurait dû faire des recherches sur internet afin d’en savoir davantage sur Lumenon, ce qui lui aurait permis d’acquérir une certaine connaissance de cette société, lui permettant ainsi de réagir et de poser des gestes.

[107] Or, il faut rappeler que la communication, qui était limitée entre le Dr Fardad et le Dr Najafi, s’est arrêtée le 13 septembre 1999, le Dr Fardad ayant décliné alors le poste

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qui lui était offert pour des raisons personnelles, le tout compte tenu par ailleurs de l’information qu’il avait en main à ce moment-là.

[108] L’offre étant déclinée, le Dr Fardad ne pouvait pas trouver d’information au sujet de Lumenon sur internet, même s’il avait voulu le faire, car le dossier de Lumenon ne fut disponible sur le site de la SEC que le 5 novembre 1999 (pièce P-12).

[109] L’approche de Poly repose en grande partie sur la présomption que le Dr Fardad devait douter de tout, ne faire confiance à personne et agir comme un fin limier qui n’a rien d’autre à faire dans la vie que de tout mettre en doute et chercher continuellement ce qui ne va pas, au détriment de la vie qui passe et du travail qui doit être fait tous les jours pour assurer la subsistance de sa famille qui vit, il faut le rappeler, en Arizona où il travaille comme professeur.

[110] Dans le présent dossier, la perspective découlant des faits est tout autre.

[111] D’abord, qui est le Dr Fardad? Le Tribunal a pu observer qu’il est le prototype même du chercheur. Il est sobre dans sa présentation. Il parle peu mais sincèrement, rappelant ce qu’il a vécu, sans exagération verbale ou gestuelle, et témoigne d’une connaissance approfondie du monde de la recherche qu’il fait avec passion, tout cela faisant de lui un homme aux antipodes du monde des affaires.

[112] Le Dr Fardad est venu à Montréal d’Angleterre, pendant 22 mois seulement, afin de travailler avec les Drs Andrews et Najafi, et cela, à leur demande expresse. Il n’avait aucune autre attache avec le Canada que ces deux personnes-là.

[113] Les Drs Andrews et Najafi étaient des professeurs chevronnés qui étaient hautement considérés au sein des facultés de chimie et de génie électrique (photonique) de deux grandes institutions à ses yeux, soit McGill et Poly. Tous les deux étaient plus âgés que le Dr Fardad de plusieurs années.

[114] De surcroît, le Dr Najafi et le Dr Fardad partageaient quelque chose de très précieux. Tous deux venaient du nord de l’Iran, avaient émigré, et pouvaient échanger entre eux dans leur langue maternelle, le farsi.

[115] Les acteurs d’origine oeuvraient donc dans le contexte suivant.

[116] D’une part, il y avait les Drs Andrews et Najafi, professeurs émérites de grandes écoles, chargés de l’administration de budgets et dirigeant la recherche d’étudiants au doctorat ou au post-doctorat, tous les deux étant donc très bien ancrés dans leurs communautés respectives.

[117] D’autre part, il y avait le Dr Fardad, venu au Canada à la demande des Drs Andrews et Najafi, et dont toutes les activités de recherche étaient dirigées par ces derniers, ne faisant que de la recherche, sans faire quelque activité d’administration que ce soit qui aurait pu aiguiser ses sens quelque peu.

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[118] Dans un tel contexte, le Dr Fardad faisait entièrement confiance à ses mentors qui le traitaient avec respect, ayant accepté de le désigner comme co-inventeur avec eux quant à l’Invention dont les demandes de brevet furent déposées le 10 octobre 1997, soit un mois avant son départ pour l’Angleterre qui a eu lieu le 11 novembre 1997.

[119] Telle était donc la relation qui existait entre le Dr Fardad et les Drs Andrews et Najafi avant que les activités de commercialisation de l’Invention ne débutent à l’au-tomne 1997.

[120] Que se passa-t-il à l’automne 1997 et après ?

[121] Le Dr Andrews a témoigné et indiqué au Tribunal que le Dr Fardad a signé la cession faite à McGill le 10 octobre 1997 (pièce D-2), et ce, dans le contexte où il lui fut mentionné qu’il devait la signer et qu’il n’avait pas le choix. Le Dr Fardad a confirmé que tel avait été le cas.

[122] Le Dr Andrews a indiqué au Tribunal, qu’à l’automne 1997, le Dr Najafi l’a invité à dîner chez lui afin de discuter de la commercialisation de l’Invention et de la mise sur pied d’une société pour le faire. Il s’agit du début de l’aventure, et donc, d’une rencontre charnière et déterminante. Le Dr Najafi n’a pas invité le Dr Fardad, son étudiant, qui fut donc absent du lancement du projet, qui en constitue la phase capitale. Le Dr Fardad indique n’avoir jamais été invité par le Dr Najafi, et le Dr Andrews confirme son absence lors de ce dîner.

[123] Tous les partenaires présents alors désirent la commercialisation de l’Invention, à l’automne 1997, et tous s’activent selon leurs rôles respectifs à partir de ce moment-là et pour les mois à venir.

[124] Premièrement, les Drs Andrews et Najafi visent la mise sur pied d’une société dont ils seront actionnaires, qui sera Lumenon, et l’obtention d’une licence de Poly et de McGill pour commercialiser l’Invention. Il ne s’agit pas d’une abstraction, et le but commercial poursuivi par les Drs Andrews et Najafi nécessitera, dans les faits, de nombreuses rencontres entre eux et avec des investisseurs, des téléphones, des séances de négociation, la confection de contrats et documents longuement revus et corrigés, la cueillette d’informations et beaucoup d’autres actions. Le Tribunal désigne ce groupe et ses multiples activités s’étant déroulées sur un grand nombre de mois, en l’appelant Table de négociation Najafi-Andrews.

[125] Deuxièmement, McGill et Poly doivent négocier entre elles leurs intérêts respectifs, leur participation dans Lumenon et le contenu de la licence à être octroyée à Lumenon. Il s’agit également de la poursuite d’un objectif commercial amenant aussi son lot de rencontres, d’échanges, de projets de documents et de contrats, ainsi que des séances de négociation. Le Tribunal désigne ce groupe et ses multiples activités s’étant déroulées sur un grand nombre de mois, en l’appelant Table de négociation Poly-McGill.

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[126] Troisièmement, Poly, à cette époque, selon le témoignage de M. Beaudry, a procédé à une réflexion stratégique visant la commercialisation de sa propriété intellec-tuelle et elle a décidé de mettre sur pied une société en commandite afin d’y verser ses technologies, à titre d’apport, et d’y amener des investisseurs privés afin de financer le tout et, surtout, pour pouvoir se payer l’expertise requise pour optimiser sa commerciali-sation, expertise qu’elle n’avait pas nécessairement à l’interne, faute de budgets.

[127] Il en résultera PolyValor. Mais pour y arriver, M. Beaudry de Poly, entre autres, dut travailler d’arrache-pied. Il rencontra de potentiels investisseurs, des avocats, négo-cia les termes de multiples conventions, et ce, tant avec les investisseurs, qu’avec McGill, le Dr Andrews et le Dr Najafi. Le Tribunal désigne ce groupe et ses nombreu-ses activités s’étant déroulées sur un grand nombre de mois, en l’appelant Table de négociation Poly-Investisseurs-PolyValor.

[128] Ces trois Tables de négociation se sont articulées les unes par rapport aux autres dans une démarche dans le cadre de laquelle il y eut des négociations intensives pour parvenir à des résultats, d’abord au sein de chacune d’entre elles et, par ailleurs, les unes par rapport aux autres, le tout s’étant déroulé de l’automne 1997 jusqu’à l’automne 1999, soit pendant près de deux ans.

[129] Le Tribunal insiste sur ce point car il s’agit, dans la réalité des choses, d’un travail énorme impliquant de nombreux contacts entre les intervenants qui y partici-paient.

[130] Quels furent les principaux jalons de ce grand exercice, et qu’en ont retiré ses acteurs ?

[131] McGill et Poly ont eu des rencontres, elles ont signé des ententes les 10 octobre 1997 et 16 novembre 1998 pour, finalement, convenir de leurs intérêts respectifs (pièces D-26 et D-28).

[132] Le 18 décembre 1997, Poly met sur pied PolyValor avec des investisseurs privés (pièces P-1, D-11 et D-33).

[133] Début 1998, les Drs Najafi et Andrews fondent Lumenon (pièce P-12, p. 13).

[134] Le 13 février 1998, une rencontre documentée se tient à laquelle participent M. Farber pour McGill, M. Martin Fara pour Inno-Centre, M. Denis N. Beaudry pour Poly et les Drs Andrews et Najafi pour Lumenon (pièce P-35).

[135] En décembre 1998, la Licence est octroyée par PolyValor et McGill d’une part, à Lumenon d’autre part (pièce P-13).

[136] C’est à la fin de l’année 1998 et au cours des premiers mois de l’année 1999, que McGill, PolyValor, le Dr Najafi, le Dr Andrews et les autres investisseurs négocient et déterminent de façon définitive les parts du capital-actions de Lumenon qui seront

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attribuées à chacun d’eux, en contrepartie de leurs apports respectifs qu’ils établissent entre eux par ailleurs.

[137] Le résultat, selon le formulaire no 10 déposé auprès de la SEC, le 5 novembre 1999 (pièce P-12, p. 25 et 26), fut qu’en date du 30 septembre 1999, Lumenon a émis 22 012 000 actions votantes détenues, pour une partie, comme suit :

Dr Najafi : 5 237 500Najafi Holdings Inc. : 5 037 500Dr Andrews : 4 887 500Andrewma Holdings Inc. : 4 687 500PolyValor et McGill : 1 500 000

[138] Le Tribunal constate, qu’au terme de près de deux ans de travail intensif, le Dr Fardad, co-inventeur de l’Invention, n’a reçu aucune action de Lumenon.

[139] Pourquoi ? Tout simplement parce que personne ne l’a jamais invité à venir aux différentes Tables de négociation à titre de partenaire, et ce, en aucun temps entre son départ de Montréal, en novembre 1997, et le 30 septembre 1999 («Période visée»).

[140] Quant à McGill, le Dr Fardad est formel que personne de son service de commercialisation n’a communiqué avec lui durant la Période visée et aucun témoigna-ge n’est venu contredire cette affirmation.

[141] Quant à Poly, M. Denis N. Beaudry en avait plein les bras avec les différentes Tables de négociation qui étaient très importantes pour lui et Poly, et il croyait que le Dr Fardad relevait exclusivement de McGill. M. Beaudry a confirmé n’avoir jamais com-muniqué avec le Dr Fardad durant la Période visée et le Dr Fardad affirme la même chose.

[142] Quant au Dr Andrews, il a affirmé au Tribunal n’avoir jamais communiqué avec le Dr Fardad durant la Période visée pour lui parler de la commercialisation de l’Invention et des Tables de négociation qui oeuvraient pour y parvenir. Le Dr Fardad affirme la même chose, tout en précisant qu’il y eût une seule communication entre eux, et ce, au sujet d’une lettre de recommandation demandée par le Dr Fardad. Quelle belle occa-sion … ratée par le Dr Andrews, pour informer le Dr Fardad, son co-inventeur et étu-diant, de la commercialisation en cours de réalisation de l’Invention !

[143] Quant au Dr Najafi, compatriote du Dr Fardad, son co-inventeur et son professeur, il rencontra ce dernier lors d’une conférence en Arizona en 1998. Pour des raisons ignorées du Tribunal, puisque le Dr Najafi n’a pas témoigné, ce dernier a alors fait une offre, fort limitée, au Dr Fardad pour des raisons qui lui appartiennent. Il lui a offert de devenir Development Engineer au sein de Lumenon, au salaire annuel de 55 000 $ US, et de recevoir un plan d’options d’achat de 50 000 actions, qu’il devait payer 1,00 $ US chacune, et ce, à raison de 10 000 actions par année au cours des années 2002, 2003, 2004, 2005 et 2006.

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[144] Rien dans cette offre, limitée et circonscrite, ne se rapproche un tant soit peu du capital-actions reçu par les Drs Andrews et Najafi.

[145] En effet, la comparaison des 50 000 actions de Luminon que le Dr Fardad aurait pu acheter à 1,00 $ US chacune par rapport aux 10 275 000 actions de Lumenon dévolues à «$ .001 par value» au Dr Najafi et à son Holdings signifie que le Dr Fardad aurait reçu, à titre de co-inventeur de l’Invention, 205,5 fois moins d’actions de Lume-non que le Dr Najafi et que, de plus, il aurait payé, pour chacune des actions de Lume-non, 1 000 fois plus cher que ce dernier.

[146] Cette disproportion, colossale et hors du commun, indique clairement au Tribu-nal que le Dr Najafi n’a jamais rien dit au Dr Fardad quant à la commercialisation de l’Invention et, surtout, quant aux Tables de négociation qui étaient alors à l’œuvre à Montréal pour y parvenir, et ce, durant la Période visée, pour la simple et bonne raison que, jamais, le Dr Fardad n’aurait accepté une telle disproportion.

[147] S’il avait connu ce que les Drs Andrews et Najafi se négociaient durant la Période visée, le Dr Fardad aurait voulu être aux Tables de négociation appropriées pour faire valoir ses droits et obtenir ce qu’une négociation franche lui aurait permis d’obtenir compte tenu des apports de chacun et, surtout, compte tenu du fait qu’ils avaient convenu entre eux, le 25 mars 1997, qu’il y aurait un partage égal établi à 33,33% pour chacun.

[148] Le Dr Fardad a indiqué au Tribunal que jamais le Dr Najafi ne l’a informé de la commercialisation de l’Invention, ni des droits que McGill, Poly, le Dr Andrews et lui-même s’étaient mutuellement consentis, à son insu.

[149] Il faut réitérer que le Dr Fardad a quitté le Canada le 11 novembre 1997 pour aller vivre en Angleterre, puis en Arizona, et qu’il n’était donc pas présent à Montréal durant la Période visée alors que toutes les Tables de négociation y étaient à l’œuvre.

[150] Le Tribunal conclut que le Dr Fardad ignorait tout des négociations qui se déroulaient à Montréal aux différentes Tables de négociation durant la Période visée et des résultats qui en ont découlé, dont la commercialisation de l’Invention, de telle sorte qu’il lui était impossible d’agir.

[151] En effet, une personne qui ne sait pas que quelque chose se passe, qui en est ignorante, ne peut certes pas penser à la questionner, car cette chose est absente de son esprit.

[152] Dans le présent cas, le Dr Fardad n’avait aucune raison de douter des Drs Najafi et Andrews qui étaient ses mentors, ainsi que de McGill et de Poly, deux grandes institutions, car toutes ces personnes lui inspiraient une très grande confiance.

[153] Enfin, le Tribunal termine sur ce sujet en rappelant que le Dr Fardad est la personnification même du chercheur, dont toutes les énergies vont à la recherche, et il

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n’a rien du wheeler-dealer cherchant constamment à faire une bonne affaire, de telle sorte que, dans le cours de sa vie de chercheur honnête, jamais il n’a pu penser que deux professeurs chevronnés et deux grandes institutions l’avaient laissé croupir sur le quai de la gare … pendant qu’eux prenaient le train des négociations menant à la richesse.

[154] Prétendre que le Dr Fardad aurait été négligent est déplacé, compte tenu des faits de la cause et des acteurs en présence, et ne mérite aucun autre commentaire.

[155] Pour toutes ces raisons, le Tribunal conclut que le Dr Fardad fut dans l’impossi-bilité en fait d’agir contre Poly avant le 31 mai 2001, de telle sorte qu’il y eût suspension du délai de la prescription extinctive de trois ans, laquelle ne commença à courir que le 31 mai 2001 pour n’expirer que le 31 mai 2004.

[156] L’action en justice intentée le 4 décembre 2003 contre Poly n’est donc pas pres-crite.

POLITIQUE DE POLY

[157] La deuxième question qui se pose est de savoir si le Dr Fardad était, au moment du processus créateur ayant mené à l’Invention, un chercheur de Poly au sens de sa Politique qui établit les droits et obligations de Poly et des chercheurs de Poly en regard de la commercialisation d’une innovation technologique, d’une invention ou, beaucoup plus rarement, d’une découverte.

[158] La Politique que Poly a adoptée lui crée des obligations qui entrent dans le cadre des articles 1371 et 1373 du C.c.Q. qui se lisent comme suit :

«1371. Il est de l’essence de l’obligation qu’il y ait des personnes entre qui elle existe, une prestation qui en soit l’objet et, s’agissant d’une obligation découlant d’un acte juridique, une cause qui en justifie l’existence.

1373. L’objet de l’obligation est la prestation à laquelle le débiteur est tenu envers le créancier et qui consiste à faire ou à ne pas faire quelque chose.

La prestation doit être possible et déterminée ou déterminable; elle ne doit être ni prohibée par la loi ni contraire à l’ordre public.»

[159] Dans un premier temps, Poly a accordé beaucoup d’importance au fait que les différentes étapes prévues à sa Politique doivent être respectées par tous pour en permettre une bonne application, et ce, pour assurer le respect des droits de tous, soit ceux de Poly et ceux de ses chercheurs.

[160] Le Tribunal est tout à fait d’accord avec cette affirmation générale, car tel est le but d’une politique interne d’une entreprise, ou d’une institution, qui vise précisément à ce que les choses soient faites de façon ordonnée et organisée.

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[161] Mais rien n’est parfait cependant. En 1996, selon le témoignage de M. Denis N. Beaudry, Poly n’avait pas l’habitude d’avoir beaucoup de partenariats avec d’autres universités et sa Politique venait tout juste d’être adoptée.

[162] Pour illustrer la flexibilité avec laquelle Poly appliqua sa Politique dans le présent cas, le Tribunal mentionne que, selon la preuve, jamais le Dr Najafi n’a divulgué par écrit l’Invention à Poly, conformément à l’article 2.12 de la Politique de Poly, alors qu’il s’agit de la première étape à franchir lorsqu’un chercheur envisage la valorisation d’une technologie.

[163] Le Dr Najafi n’a jamais fait de divulgation écrite à Poly et, pourtant, il fut impliqué, sans réserve, dans tout le processus de commercialisation de l’Invention qui eut lieu à la fin de l’année 1997 et au cours des années 1998 et 1999, et dont il fut l’un des grands bénéficiaires.

[164] Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il était professeur à Poly, qu’il habitait Montréal et qu’il était reconnu comme l’un des inventeurs, alors que le Dr Fardad dut quitter Montréal, pour s’établir finalement aux Etats-Unis, et devint donc, ainsi, invisible.

[165] Le Tribunal juge utile de rappeler ce fait significatif afin de donner une perspec-tive qui soit ultimement juste pour tous les acteurs en cause, sans rien enlever à l’analyse rigoureuse des textes.

[166] La Politique de Poly, composée de différentes sections, compte 32 pages.

[167] Les sections que le Tribunal estime utiles, pour la présente analyse, sont les suivantes :

«Politique-définitions, article 1.4, p. 2 et 3

1.4 Chercheur ou chercheur de Polytechnique1 : Personne qui, dans le cadre d’une relation avec Polytechnique (emploi, études ou lien légal quelconque), contribue personnellement au processus créateur du développement d’une technologie.

Cette personne pourra être, par exemple : professeur régulier, associé ou invité, à temps plein ou à temps partiel, chercheur (au sens statutaire), associé de recherche, boursier postdoctoral, technicien ou étudiant.

Dans certains cas, cette personne pourra être un employé ou un étudiant d’un autre établissement.

[…]1 La définition de chercheur aux fins de cette Politique a donc un sens différent de cette définition statutaire qui désigne une fonction d’employé à Polytechnique et avec laquelle elle ne doit pas être confondue.

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Politique-préambule, article 2.1, p. 4

2.1 Considérant la mission que se donne Polytechnique de servir la société et de contribuer à son progrès,

Considérant, par ailleurs, que Polytechnique entend veiller à ses intérêts et à ceux des membres de sa communauté en matière de propriété intellectuelle,

Les objectifs de cette Politique sont :

a) de favoriser le transfert technologique de la communauté de Polytech-nique à l’industrie,

b) d’encourager les chercheurs de Polytechnique à participer à la mise en pratique des résultats de leurs travaux de R-D,

c) de sauvegarder les intérêts financiers de Polytechnique et de ses chercheurs dans l’exploitation commerciale des technologies issues de travaux de la communauté de Polytechnique.

Politique – article 2.4, p. 4

2.4 Polytechnique a des droits sur toute propriété intellectuelle technologique créée par des chercheurs de Polytechnique. […]

Politique – article 2.6, p. 4

2.6 Cette Politique concerne toute propriété intellectuelle technologique sur laquelle Polytechnique peut avoir des droits.

Politique – article 2.7, p. 5

2.7 Polytechnique entend promouvoir les technologies développées dans sa communauté et éventuellement, participer à leur exploitation commerciale en collaboration avec les chercheurs et toute tierce partie intéressée à la technologie ou ayant des droits sur la propriété intellectuelle.

[…]

Politique – article 2.8, p. 5

2.8 Le travail d’équipe est une réalité de la R-D. Il arrivera donc souvent que plusieurs personnes apportent des contributions personnelles au processus créateur d’une même technologie et soient, à ce titre, chercheurs de Polytechnique au sens de cette Politique. C’est au sein du groupe de travail et sous la responsabilité du chef de ce groupe que doivent se faire la reconnaissance et la désignation des personnes qui peuvent prétendre avoir eu un rôle de chercheur dans le développement d’une technologie. Polytechnique n’a pas compétence pour désigner les membres du groupe qui ont participé au

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processus créateur d’une technologie et n’assumera aucune responsabilité en la matière.

Politique, article 2.9, p. 5

2.9 D’autre part, il est possible que des membres d’un groupe de travail soient rattachés à d’autres établissements dont ils sont, par exemple, employés ou étudiants. Ces personnes peuvent aussi participer au processus créateur du développement d’une technologie. Lorsque la direction scientifique du projet auquel ces personnes participent réside à Polytechnique, ces personnes sont des chercheurs de Polytechnique au sens de cette Politique. Les établissements auxquels ces chercheurs sont rattachés peuvent avoir des droits sur la propriété intellectuelle technologique créée au cours du projet.

[…]

Principes généraux et applications de la Politique – article 1.2, Le Chercheur, p. 8 et 9

[…]

La Politique concerne les droits, que peuvent avoir certaines des personnes ayant participé à des travaux, sur les résultats et sur leur utilisation ultérieure. On reconnaît généralement de tels droits aux personnes qui ont participé au processus de création : ce sont ces personnes que l’on retrouve désignées comme inventeurs d’un brevet, auteurs d’un rapport, d’un logiciel, d’une publica-tion.

[…]

La qualité de chercheur n’est donc pas liée à un titre ou à une fonction mais à la nature de la contribution au développement de la technologie; un chercheur peut être professeur, technicien, étudiant, stagiaire post-doctoral ou même une personne rattachée à un autre établissement universitaire ou employée d’une compagnie.

[…]

Qui désigne les chercheurs ?

Les personnes les mieux placées pour s’acquitter de cette tâche, sont les membres de l’équipe de travail eux-mêmes, agissant sous la responsabilité du chef d’équipe. Polytechnique n’a pas compétence en cette matière et ne devrait pas avoir à intervenir.

[…]

Principes généraux et applications de la Politique – article 1.4, Intérêt et engagement de Polytechnique, p. 10

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[…]

Polytechnique s’engage à promouvoir et à protéger les droits de ses chercheurs, aussi bien que ses droits propres, dans toute démarche de valorisation de résultats de travaux de ses chercheurs qu’elle a accepté d’entreprendre et qu’elle effectue avec leur accord.

[…]

Principes généraux et applications de la Politique – article 1.10, Principe fondamental concernant les droits de propriété intellectuelle, p. 14

On n’a pas cherché à définir, dans la Politique, les droits respectifs de Polytechnique et de ces chercheurs pour toutes les situations possibles. Cette approche se heurterait à de grandes difficultés pratiques; elle pourrait être l’occasion de conflits improductifs et surtout elle irait à l’encontre de l’esprit dans lequel la Politique a été élaborée. En effet, on a voulu que la Politique établisse les bases d’une collaboration entre les chercheurs et Polytechnique dans une volonté commune d’effectuer efficacement le transfert des technologies d’intérêt pratique, du laboratoire de recherche à l’industrie, en respectant les droits de chacun et en protégeant leurs intérêts.

[…]

Principes généraux et applications de la Politique – article 1.12, Ressources et services de Polytechnique, p. 15 et 16

Il est mentionné dans l’article précédent que l’utilisation de ressources ou services de Polytechnique pour l’exécution de travaux de R-D donne des droits sur les résultats de ces travaux à Polytechnique. En effet, une personne ne peut utiliser ces ressources ou services que dans le cadre d’une relation fonctionnelle ou contractuelle avec Polytechnique.

Afin d’éviter les malentendus ultérieurs, on a jugé bon de définir ici ce qui constitue ces ressources et services.

Les ressources peuvent être de nature matérielle, organisationnelle, information-nelle, financière ou humaine :

Ressources matérielles : locaux dont Polytechnique est propriétaire ou locataire; mobilier, équipements et appareillages de laboratoire fixes ou mobiles, ordinateurs, etc., dont Polytechnique est propriétaire ou qui ont été acquis grâce à des fonds placés en fidéicommis à Polytechnique ou dont Polytechnique a la gérance.

[…]

Les services de Polytechnique qui ne peuvent être utilisés que dans le cadre d’un lien fonctionnel ou contractuel sont ceux qui sont offerts par Polytechnique à

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ses employés ou chercheurs, et qui ne sont généralement pas disponibles au public. Les principaux services sont, par exemple :

le service informatique, les ateliers, les laboratoires d’analyses et de caractérisation diverses, les réseaux de communication électronique.»

[168] Le Tribunal retient les éléments suivants permettant d’établir le statut de chercheur de Poly :

a) la personne doit avoir contribué personnellement au processus créateur ayant mené au développement d’une technologie, Politique – article 1.4;

b) cette personne doit l’avoir fait dans le cadre d’une relation avec Poly, Politique – article 1.4;

c) cette relation pourra être, à titre d’exemples, un emploi, des études ou un lien légal quelconque, Politique – article 1.4;

d) la personne pourra être un étudiant d’un autre établissement, Politique –article 1.4;

e) le chercheur aux fins de la Politique n’est pas nécessairement un employé de Poly, Politique – article 1.4;

f) c’est sous la responsabilité du chef d’un groupe que se font la reconnaissan-ce et la désignation d’une personne pouvant prétendre avoir eu un rôle de chercheur dans le développement d’une technologie, Poly n’ayant pas cette compétence, Politique – article 2.8;

g) lorsqu’un membre d’un groupe de travail est rattaché à un autre établissement et que cette personne participe au processus créateur, elle est un chercheur de Poly au sens de la Politique lorsque la direction scientifique du projet réside à Poly, Politique – article 2.9;

h) la Politique reconnaît généralement des droits aux résultats et à leur utilisation ultérieure aux personnes désignées comme inventeurs de brevets, Principes généraux – article 1.2;

i) la qualité de chercheur n’est pas liée à un titre ou à une fonction, mais à la nature de la contribution au développement d’une technologie et cette personne peut même être rattachée à un autre établissement, Principes généraux – article 1.2;

j) une personne ne peut utiliser les ressources ou services de Poly que dans le cadre d’une relation fonctionnelle ou contractuelle avec Poly, étant précisé que les services de Poly qui ne peuvent être utilisés que dans le cadre d’un

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lien fonctionnel ou contractuel sont ceux qui sont offerts par Poly à ses employés ou chercheurs, et qui ne sont généralement pas disponibles au public, Principes généraux – article 1.12;

[169] La revue de la preuve faite ci-après permet au Tribunal de conclure que le Dr Fardad était, du mois de janvier 1996 jusqu’au mois de novembre 1997, un chercheur de Poly pour les raisons qui suivent.

[170] En premier lieu, la Politique de Poly est écrite de façon à ratisser très large pour assurer à Poly que toute propriété intellectuelle technologique développée chez elle lui donne, ultimement, des retombées économiques. C’est ce qui ressort de l’objectif c) du préambule et des articles 2.4, 2.6 et 2.7 de la Politique de Poly déjà cités.

[171] Il s’agit certainement d’une approche responsable qui permet à une institution publique d’obtenir plus d’argent pour rencontrer ses besoins de fonctionnement toujours croissants.

[172] L’effet de cette approche de Poly, qui vise à ratisser tout ce qui se passe entre ses murs, a pour effet de couvrir beaucoup plus de personnes, que l’inverse, de telle sorte que Poly elle-même a fait en sorte que sa Politique doit être interprétée de façon large, plutôt que restrictivement.

[173] Pour être sûre de ne rien échapper, Poly a pris soin d’indiquer, à plusieurs endroits, qu’une personne extérieure à Poly peut être un chercheur de Poly, ce qui permet à Poly d’avoir des droits sur une technologie développée chez elle, pour ensuite partager les fruits de la commercialisation avec les chercheurs impliqués. Ceci ressort des articles 1.4 et 2.9 de la Politique de Poly et de l’article 1.2 de ses principes généraux.

[174] Une telle approche adoptée par Poly, qui lui est favorable, a forcément comme corollaire, pour elle, d’élargir son cercle obligationnel à l’endroit de toute personne qui est chercheur chez elle.

[175] Le fait que le Dr Fardad soit rattaché à McGill du mois de janvier 1996 jusqu’au mois de mars 1997 et, par la suite, à Poly jusqu’au mois de novembre 1997, ne fait donc pas obstacle au fait qu’il puisse bénéficier de la Politique de Poly, s’il rencontre les autres critères par ailleurs. La notion proprement dite d’employé de Poly n’a donc aucune importance, et cela, selon la Politique de Poly elle-même, articles 1.4 et 2.9.

[176] Dans la présente affaire, le fait que le Dr Fardad soit co-inventeur de l’Invention n’est pas contesté. Ce qui est contesté est le fait qu’il ait été un chercheur de Poly durant le processus créateur ayant mené à l’Invention.

[177] Or, ce processus créateur, dans les grandes lignes, s’est déroulé au cours de l’année 1996, a culminé à la fin de l’année 1996-début 1997, et a diminué en importan-ce par la suite jusqu’au départ du Dr Fardad, le 11 novembre 1997.

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[178] Poly prétend que tout le processus créateur déterminant s’est produit au cours de l’année 1996 jusqu’au début de l’année 1997, alors que le Dr Fardad était rattaché à McGill.

[179] Le Dr Fardad soutient que le processus créateur eût lieu tant à McGill qu’à Poly, et ce, depuis le mois de janvier 1996, qu’il a culminé à la fin de l’année 1996-début 1997, et que des travaux d’optimisation se sont déroulés de façon décroissante jusqu’à son départ du Canada, en novembre 1997.

[180] Compte tenu de cette toile de fond, la question essentielle à laquelle doit répondre le Tribunal est de savoir si le Dr Fardad répondait, dans les faits, aux critères établis par la Politique de Poly pour faire de lui un chercheur de Poly, et ce, du début de l’année 1996 jusqu’au début du mois d’avril 1997, alors qu’il était rattaché à McGill.

[181] À l’été 1994, le Dr Najafi de Poly rencontre le Dr Fardad lors d’un colloque scientifique aux Etats-Unis, découvre l’expertise pointue de ce dernier en chimie et en physique et se montre intéressé à ses services.

[182] Le 3 novembre 1994 (pièces D-14 et D-14-A), le Dr Andrews obtient une subvention stratégique du CRSGC d’un montant d’environ 300 000 $ pour faire des recherches directement reliées à l’Invention à venir. Cette subvention se termine en octobre 1997. Déjà, la demande de fonds indique que des travaux appliqués seront faits dans la Clean Room de Poly et que «This proposal truly reflects a multidisciplinary inter-university team effort».

[183] Après avoir fait parvenir son c.v. au Dr Najafi de Poly en juillet 1995, ce dernier et le Dr Andrews font l’offre au Dr Fardad de venir à Montréal pour travailler avec eux compte tenu de son expertise acquise au Imperial College de Londres.

[184] Le 10 janvier 1996, le Dr Fardad arrive à Montréal. Le Dr Andrews et le Dr Fardad ont témoigné devant le Tribunal et Poly n’a offert aucune preuve testimoniale pour contredire leurs témoignages. Elle a plutôt fait appel à une preuve documentaire.

[185] À la fois le Dr Andrews et le Dr Fardad ont indiqué au Tribunal que ce dernier travaillait tant pour le Dr Andrews que pour le Dr Najafi, que son temps était divisé grosso modo également entre les deux institutions, que tous deux supervisaient ses travaux et que de nombreuses rencontres, à trois, eurent lieu tant à McGill qu’à Poly, et ce, du début de l’année 1996 jusqu’à la fin de l’année 1997.

[186] Les deux professeurs avaient des expertises différentes. En chimie dans le cas du Dr Andrews, et en physique dans le cas du Dr Najafi. D’où, leur complémentarité, et leur association dans la recherche ayant mené à l’Invention, laquelle faisait appel aux deux champs d’expertise.

[187] Tout ne pouvait pas être fait à McGill. Les travaux relevant de la chimie surtout s’y déroulaient, auxquels participaient davantage le Dr Andrews et le Dr Fardad.

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[188] Tout ne pouvait pas être fait à Poly. Les travaux relevant du génie-physique surtout s’y déroulaient, auxquels participaient davantage le Dr Najafi et le Dr Fardad.

[189] En gros, le Dr Fardad, dans les laboratoires de McGill, faisait toutes les opérations nécessaires à la synthèse du Sol-gel glass dans lequel deux métaux rares étaient introduits permettant la création de canaux. Le Dr Fardad produisait plusieurs exemplaires de ce type, tous étant légèrement différents les uns des autres, le tout prenant environ une demi-journée à une journée.

[190] Ensuite, le Dr Fardad se rendait à Poly afin d’utiliser un appareil (Automatic deep cotter machine) pour obtenir des faisceaux lumineux guidés passant à travers les canaux. Ensuite, le Dr Fardad faisait une caractérisation des Waveguides, puis procé-dait à la vérification de la qualité de chacun des exemplaires produits dans la Clean Room qu’il préparait en conséquence, le tout prenant environ une demi-journée à une journée.

[191] Un grand nombre d’exemplaires (samples) fut ainsi produit, avec de légères variations dans chaque cas, le tout afin d’identifier la meilleure façon de faire pour arriver à un produit opérationnel, lequel fit l’objet, ultimement, du brevet américain.

[192] Toute cette opération impliquant le Dr Fardad, le Dr Andrews de McGill et le Dr Najafi de Poly se déroula principalement du mois de janvier de l’année 1996 jusqu’à la fin de l’année 1996-début 1997, période que les trois inventeurs reconnaissent comme étant celle au cours de laquelle ils ont constaté avoir fait une percée (breakthrough) technologique, laquelle fut améliorée et optimisée au cours des mois qui suivirent.

[193] Les témoignages des Drs Andrews et Fardad sont corroborés par écrit par le Dr Najafi. En effet, le 9 octobre 1997, le Dr Najafi voulut s’assurer que le Dr Fardad obtiendrait un prolongement de son autorisation de travail au Canada au-delà du mois de novembre 1997.

[194] Pour ce faire, il écrivit, dans le cours normal des choses, à Immigration Canada et, dans sa lettre (pièce P-3), il décrivit qui était le Dr Fardad, la raison essentielle de sa venue au Canada, la nature de ses travaux dans les deux universités, laquelle rejoint la description verbale faite par les Drs Andrews et Fardad, et le fait qu’il a fait une percée technologique ayant débouché sur un brevet. Il s’exprime ainsi :

«Case Processing Center-VisitorVegreville ABT9C 1W1Fax : [...]

Dear Sir/Madam,

I was advised by my employee: Dr M.A. Fardad of […] Montreal PQ […], that his recent application for an extension was temporarily denied due to late submission. It appears to me he has submitted a fresh application with

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appropriate fee and documents. Il would like to highlight here some points of Dr fardad’s significant part for our current project at Ecole Polytechnique.

Dr M.A. (Amir) Fardad was invited to come to Canada to do a postdoctoral research on a ENSERC funded joint project between McGill university and Ecole Polytechnique in the field of Sol-gel integrated optics under supervision of Professor Mark Andrews and me in January 1996. Dr Fardad his unique expertise in novel sol-gel field, which was entire idea of his PhD project, was our prime motivation in hiring him. While at McGill university, until April 1997, he made a significant contribution to the fabrication of sol-gel Laser/Amplifier waveguides. In continuation of his work he was then moved to Ecole Polytechnique in April 1997 as a Research Associate. At Ecole Polytechnique he has been involved with fabrication and characterization of sol-gel integrated optic devices. His major breakthrough, invention of novel fabrication technique, has been filed for a patent. Dr Fardad his essential experience and role for the project made us extend his employment till November 1997. It is worth to add that ENSERC allows a maximum of two years employment only, his request for an extension of employment authorization is therefore his last application before leaving Canada. We deeply hope for the approval of his last application.»

(Notre soulignement)

[195] Cette lettre est importante, d’autant plus qu’elle confirme plusieurs faits qui furent mis en preuve par ailleurs.

[196] Cette lettre fait cependant une nuance en identifiant deux périodes de temps et semble laisser croire que le travail du Dr Fardad fut fait en deux temps différents. Or, la preuve testimoniale du Dr Andrews et du Dr Fardad indique clairement que le proces-sus créateur fut réalisé en continu, et ce, aux deux universités.

[197] Sur ce sujet toujours, il est par ailleurs nécessaire de revoir d’autres documents qui permettent de mieux cerner ce qui s’est réellement passé.

[198] D’abord, lors de la percée technologique, un premier article est publié le 23 janvier 1997 (pièce P-5) dont le titre est «Novel sol-gel fabrication of integrated optical waveguides». À la page 73, toutes les étapes techniques détaillées du procédé sont décrites, en séquence, et celles-ci correspondent, dans les grandes lignes, à celles décrites par le Dr Fardad dans son témoignage. À la fin de l’introduction, les auteurs, les Drs Fardad, Andrews et Najafi, écrivent ce qui suit :

«[…]

A key objective in our work therefore, was to develop a few-step sol-gel glass deposition process that would yield single or multi-mode channel waveguide devices by photoinscription without cracking or, delamination, through a simple solvent wash development step – a process that would allow us to eliminate the lengthiness of photolithographic process and reactive ion etching as being conventionally used in the integrated optical device fabrication. This objective has now been achieved and the process is well established so that various

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optical components with reproductible characteristics are routinely made in our laboratory on a daily basis.»

(Notre soulignement)

[199] Il s’ensuivit trois autres articles scientifiques. Un deuxième article (pièce P-6) fut déposé le 14 avril 1997 et publié le 5 juin 1997.

[200] Un troisième article (pièce P-4) fut déposé le 29 juillet 1997 et publié le 20 avril 1998. Cet article fait état qu’il y a une progression dans les travaux de recherche. En effet, à la page 2434, dans la conclusion, les cinq auteurs, dont font partie les Drs Fardad, Andrews et Najafi, écrivent ce qui suit :

«[…] The circularity of mode profiles in the ridge guides makes them attractive for high coupling efficiency in optical fiber communications systems. Current efforts focus on improving the process parameters to produce more complicated integrated optical components, such as wavelength-division multiplexers and dis-tributed Bragg gratings, and to incorporate active devices.»

(Notre soulignement)

[201] Un quatrième article (pièce P-7) fut déposé le 17 septembre 1997 et publié le 9 septembre 1998. Cet article indique que les travaux de recherche, pour l’essentiel, sont rendus à leur terme. En effet, à la page 1645, dans la conclusion, les cinq auteurs, dont font partie les Drs Fardad, Andrews et Najafi, écrivent ce qui suit :

«[…]

The simplicity of the process and the possibility of controlling accurately the devi-ce parameters suggest that the materials described in this paper are promising for low-cost and large scale production of integrated photonic circuits.»

(Notre soulignement)

[202] Peu de temps après, soit le 10 octobre 1997, une demande de brevet pour l’Invention fut déposée auprès du Bureau américain des brevets (pièce P-8) et une demande fut déposée au Bureau canadien des brevets (pièce P-9), le tout menant à l’émission, le 25 avril 2000, du brevet américain no 6,054,253 (pièce P-8), résultat qui démontre le sérieux et la rigueur de la démarche scientifique menée conjointement par les Drs Fardad, Najafi et Andrews.

[203] Pour le Tribunal, tout est cohérent et permet de conclure que le Dr Fardad participa au processus créateur ayant mené à l’Invention, et ce, sous la supervision des Drs Andrews et Najafi, tant à McGill qu’à Poly, du début de l’année 1996 jusqu’au mois de novembre 1997.

[204] Mais il y a plus. Revoyons les demandes de subventions.

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[205] La demande de subvention stratégique du Dr Andrews faite en avril 1994 fut approuvée en novembre 1994. Elle avait une durée de trois ans, se terminant à l’automne 1997 (pièces D-14 et D-14-A). Déjà le Dr Andrews annonce (p. 80) que des travaux appliqués seront faits dans la Clean Room de Poly et que (p. 81) «This proposal truly reflects a multidisciplinary inter-university team effort».

[206] Le 11 décembre 1995, le Dr Najafi fait une demande de subvention qui fut accordée (pièce P-29). Or, on sait que, à l’automne 1995, le Dr Najafi et le Dr Andrews viennent d’inviter le Dr Fardad à se joindre à leur équipe. Dans cette foulée, le Dr Najafi indique, à la page 4 a), qu’un «postdoctoral fellow who will work on waveguide and grating fabrication … and characterization under co-supervision of Professors Andrews and Najafi».

[207] Selon le Tribunal, il ne fait aucun doute que ce postdoctoral fellow est le Dr Fardad dont l’expertise unique en sol-gel et optic devices était attendue par le Dr Najafi. D’ailleurs, Poly n’a présenté aucune preuve à l’effet contraire ou, à tout le moins, qu’il y avait d’autres postdoctoral fellows ayant une expertise aussi pointue que celle du Dr Fardad, ce qui aurait pu jeter un doute, mais il n’en fut rien.

[208] En février 1996, le Dr Najafi fait une autre demande de subvention qui fut accordée (pièce P-30). Encore là, quelques mois plus tard à peine, il indique de nouveau, à la page 4 a), qu’un «postdoctoral researcher who will spend equal time at McGill, Polytechnique, NRC and OPS». Cette nouvelle référence vient appuyer le fait qu’il s’agit toujours du Dr Fardad.

[209] Ces textes furent écrits dans le cours normal des choses et ils prennent toute leur importance dans le cadre du présent dossier, permettant de conclure que le Dr Fardad partageait tout son temps et son savoir entre McGill, quant aux aspects relevant de la chimie, et Poly quant aux travaux relevant de la physique, et ce, du début de l’année 1996 jusqu’au mois de novembre 1997.

[210] Il reste à revoir quelques éléments, plus prosaïques, mais fort révélateurs par ailleurs.

[211] En effet, le Dr Fardad avait, depuis son arrivée au Canada, les clés donnant accès aux laboratoires du Dr Najafi à Poly où il utilisait à volonté la Clean Room et tous les appareils dont il avait besoin. Il détenait une carte lui permettant d’utiliser les photo-copieurs et il avait une adresse internet à Poly, soit [...], tel qu’indiqué sur son c.v. refait au début de l’année 1997 (pièce D-4).

[212] Donc, avec l’autorisation du Dr Najafi, le Dr Fardad pouvait utiliser toutes les ressources de Poly requises et nécessaires pour mener à bien les recherches qu’il faisait pour lui dans le domaine de la physique photonique appliquée.

[213] En dernier lieu, soulignons que deux centres de gravité faisaient en sorte que le Dr Fardad oscillait entre McGill et Poly. Ce sont les directions scientifiques clairement

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établies jusqu’à maintenant, soit celle de McGill quant aux aspects relevant de la chimie supervisée par le Dr Andrews et celle de Poly quant aux aspects relevant de la physique photonique supervisée par le Dr Najafi.

[214] Pour terminer sur ce sujet, et en appliquant les critères retenus aux sous-para-graphes 168 a), b), c), d), e), f), g), h), i) et j) du présent jugement, et plus particulière-ment mais non restrictivement, le critère du sous-paragraphe g), le Tribunal conclut que le Dr Fardad était un chercheur de Poly, du mois de janvier 1996 jusqu’à l’automne 1997, car il a alors contribué au processus créateur ayant mené à l’Invention, et ce, alors qu’il était un étudiant détenant un post-doctorat travaillant pour le Dr Najafi qui assurait, à Poly, la direction scientifique du projet de recherche du point de vue de la physique photonique, utilisant pour ce faire toutes les ressources et services de Poly dont il avait besoin, avec l’autorisation du Dr Najafi, établissant ainsi, et confirmant, que le Dr Fardad avait une relation fonctionnelle avec Poly, le tout dans le cadre d’un projet conjoint de recherche entre Poly et McGill.

[215] La conclusion que le Dr Fardad était un chercheur de Poly fait en sorte qu’il pouvait bénéficier des droits prévus à la Politique de Poly et qu’il devait, par ailleurs, en respecter les obligation afférentes.

[216] À ce sujet, Poly insiste pour plaider que le Dr Fardad ne lui a jamais fait de divulgation par écrit de la technologie développée, et ce, contrairement à l’article 2.12 de sa Politique qui stipule clairement que cela doit être fait afin de faire, d’abord, l’éva-luation de la technologie et de son potentiel de valorisation pour, ensuite, conclure les ententes appropriées, le cas échéant.

[217] Pour bien comprendre l’importance de cette étape pour Poly qui est une institution de savoir reconnue comptant plusieurs milliers de personnes oeuvrant chez elle, il est important de rappeler les termes des articles 2.12 et 2.13 de la Politique de Poly. Ils se lisent comme suit :

«2.12 Lorsqu’un chercheur de Polytechnique envisage la valorisation d’une technologie qu’il a développée mais dont les conditions d’exploitation ne sont pas déjà stipulées par entente contractuelle, il doit en faire divulgation confidentielle et exclusive à Polytechnique. Cette divulgation doit être faite dans les délais les plus brefs et, dans la mesure du possible, avant que la technologie ne soit rendue publique. Elle doit aussi identifier toute personne ayant participé au développement de la technologie en qualité de chercheur. Sur réception d’une divulgation, Polytechnique procédera, dans des délais raisonnables et à ses frais, à une évaluation de la technologie divulguée.

2.13 Sur la base de cette évaluation, Polytechnique peut se déclarer intéressée à participer à la valorisation d’une technologie qui lui a été divulguée. Une entente est alors conclue entre le chercheur, Polytechnique, et toute tierce partie ayant un intérêt dans cette technologie. Par cette entente, les partenaires con-fient à l’un d’eux la responsabilité de l’exécution et du financement des démar-ches de valorisation. Cette entente établit aussi les termes et modalités d’utilisa-

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tion et d’exploitation commerciale de la propriété intellectuelle ainsi que les mo-dalités de partage des revenus nets éventuels qui pourraient résulter de cette ex-ploitation, selon les usages en vigueur à Polytechnique.»

(Notre soulignement)

[218] Le Tribunal d’emblée reconnaît, en principe, l’importance de l’étape de la divul-gation, car elle permet à Poly de gérer des centaines de projets de recherche qui se déroulent chez elle, et d’en assurer la commercialisation par la suite le cas échéant, et ce, à l’avantage de tous, c’est-à-dire que Poly peut ainsi accumuler des fonds pour ses programmes de recherche et d’enseignement et les chercheurs peuvent réaliser des profits découlant de leur inventivité.

[219] Poly a ainsi plaidé, avec insistance, que le Dr Fardad fut en défaut quant à l’obli-gation de divulgation et qu’il doit, par conséquent, en subir les conséquences, et être totalement déchu de tout droit de partage des revenus perçus par Poly, puisqu’elle n’a jamais su de la part du Dr Fardad, selon elle, qu’il aurait réalisé une percée technolo-gique à Poly.

[220] Le Tribunal, considérant les faits propres du présent dossier, accorde à l’obliga-tion de divulgation du Dr Fardad la même importance que celle que Poly lui a accordée en 1997, soit aucune, et ce, compte tenu du comportement de Poly à cette époque.

[221] En effet, jamais le Dr Najafi n’a fait de divulgation écrite à Poly conformément à la Politique de Poly. La seule qu’il n’ait jamais faite fut celle qu’il a faite, conjointement avec les Drs Andrews et Fardad, à McGill, le 25 mars 1997 (pièces D-1 et D-1-A).

[222] Le Tribunal doit rappeler, qu’à la question no 8 de cette divulgation (Report of an Invention) déposée à McGill, les trois co-inventeurs affirment que la recherche ayant mené à l’Invention fut faite à McGill et Poly. De plus, les trois co-inventeurs acceptent, dans ce document, de partager en parts égales (33.33%, 33.33%, 33.33%) le «net annual income for this invention», et cette acceptation est confirmée par leur signature respective qu’ils apposent tous les trois à côté de ces pourcentages (p. 4).

[223] Jamais, donc, le Dr Najafi n’a fait de divulgation écrite à Poly, Poly n’ayant jamais par ailleurs produit de preuve à l’effet contraire relative à toute divulgation de sa part, ne serait-ce qu’une divulgation verbale.

[224] Et pourtant ! Elle a ouvert une voie royale au Dr Najafi à la fin de l’année 1997 lorsque les premières démarches de commercialisation furent amorcées, négociant avec lui, le Dr Andrews et McGill, rebrassant tous les papiers, comme il le fallait, pour que les quatre parties impliquées trouvent leur compte.

[225] Si, en l’espèce, le Dr Najafi n’a pas eu à faire de divulgation à Poly pour avoir le droit de participer au processus multi-facettes de la commercialisation de l’Invention qui

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engloba par ailleurs McGill, Poly et le Dr Andrews pour, ultimement, en cueillir les fruits, il ne saurait en être autrement pour le Dr Fardad.

[226] Par conséquent, le comportement d’une partie étant révélateur de la valeur qu’elle accorde à l’existence, ou non, d’un document (la divulgation écrite), le Tribunal conclut que l’argument de Poly basé sur la non-divulgation par le Dr Fardad n’a aucun fondement en droit, ni en justice naturelle car, n’eût été de l’absence du Dr Fardad du processus de commercialisation, alors que le Dr Najafi y était, jamais ses droits n’auraient été ignorés, pour ne pas dire bafoués, car il aurait pu les faire valoir avec succès, sans aucun doute, étant co-inventeur, ce qu’il n’a jamais été en position de faire, puisqu’il ne fut jamais informé de toutes les négociations qui se déroulaient, à Montréal, aux différentes Tables de négociation, alors que lui habitait Londres, puis en Arizona par la suite.

DÉDOMMAGEMENT

[227] Nous en sommes rendus à la question du dédommagement devant être accordé au Dr Fardad.

[228] Cette question se divise en deux volets. Premièrement, quel aurait été le nom-bre d’actions de Lumenon auquel aurait eu droit le Dr Fardad et, deuxièmement, quelle valeur doit être retenue pour ces actions.

[229] Il est important de rappeler, à ce stade-ci, que le Dr Fardad exige avec insistance, dans son action en justice, que la Politique de Poly doit s’appliquer à lui pour déterminer le nombre d’actions de Lumenon auquel il aurait eu droit mais, quant à la valeur de ces actions, il se détache de cette Politique en bout de course et réclame, plutôt, le prix offert par les acheteurs le premier jour de transaction du titre sur le NASDAQ, le 12 avril 2000, soit 27,12 $ US (39,60 $ CAN) par action, et non le prix reçu par PolyValor aux différents moments où elle a vendu des blocs d’actions au cours des années 2000, 2001 et 2003.

[230] La présente affaire a ceci de très particulier qu’elle amène le Tribunal à évaluer ce qui se serait passé au cours des années 1997 à 2003, et ce, de la façon la plus probable possible afin d’établir, premièrement, le nombre d’actions de Lumenon auquel aurait eu droit le Dr Fardad mais, surtout, la somme d’argent due au Dr Fardad, et ce, alors que le Dr Fardad n’a jamais, dans la réalité des faits et de la vie qui se déroulait alors, ni détenu des actions de Lumenon et ni vendu celles-ci à quelque moment que ce soit.

[231] Le Dr Fardad a décidé de faire appel à la Politique de Poly pour faire établir ses droits et, ce faisant, il a voulu, très certainement, placer le débat sur le terrain qui était le plus sûr et le plus favorable pour lui.

[232] Compte tenu de cette décision prise par le Dr Fardad pour faire reconnaître ses droits, le Tribunal doit rappeler que la cohérence des choses et, surtout, que la

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cohérence de la Politique de Poly doit être un guide impératif permettant la résolution du problème posé, à moins d’une preuve importante, cohérente et crédible à l’effet contraire.

NOMBRE D’ACTIONS

[233] Compte tenu de l’importance de la Politique de Poly, le Tribunal en rappelle les articles suivants traitant, d’une part, des revenus d’exploitation d’une technologie et, d’autre part, du partage de ces revenus entre Poly et ses chercheurs. Ils se lisent comme suit :

«Politique – définitions, article 1.8, p. 3

1.8 Revenus d’exploitation d’une technologie :

Revenus bruts : Revenus perçus par Polytechnique, un chercheur ou une tierce partie mandatée en vertu d’un accord préalable, et provenant de l’exploitation d’une technologie.

Coûts directs : Les coûts encourus par Polytechnique, un chercheur ou une tierce partie mandatée en vertu d’un accord préalable, et reliés directement à l’évaluation, à la promotion, à la protection et à l’exploitation d’une technologie. Ces coûts comprennent en particulier les redevances payées à des tierces parties ainsi que les dépenses relatives à l’obtention et au maintien en vigueur de brevets, les dépenses administratives ou juridiques relatives à la défense de brevets et les dépenses relatives à la négociation ou à l’octroi d’accords de licences.

Revenus nets : Revenus bruts diminués des coûts directs.

Politique, article 2.7, p.5

[…]

Polytechnique s’engage à ce que l’ensemble des chercheurs ayant un intérêt dans une technologie reçoivent toujours un montant global au moins égal à 50% des revenus nets d’exploitation de cette technologie reçus par Polytechnique, après paiement de tout engagement et de toute redevance due à toute tierce partie. Les modalités de partage sont négociées entre les parties.

Politique, article 2.8, p.5

[…]

Polytechnique recommande aux chefs de groupes de travail que les personnes qui sont potentiellement des chercheurs soient identifiées en début de projet si possible et que leur identité soit consignée dans un document ayant leur approbation. Dans tous les cas, tous les chercheurs devront être identifiés de façon définitive avant que des démarches de valorisation ne soient entreprises

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par Polytechnique. Les chercheurs devront aussi avoir conclu, entre eux, une entente sur le partage de la part des revenus nets d’exploitation de la technologie qui leur reviendrait en groupe, avant que ces démarches ne soient entreprises, faute de quoi la part des revenus nets d’exploitation de la technologie revenant au groupe sera divisée à part égale entre les chercheurs par Polytechnique. Par ailleurs, les chercheurs consentent à ce que Polytechni-que publie, à l’intérieur de la communauté polytechnicienne, le titre de la technologie visée et son ou ses auteur(s) afin qu’elle s’acquitte de son obligation à cet égard.»

(Notre soulignement)

[234] Dans la présente affaire, le Dr Fardad réclamait, aux paragraphes 24, 37 et 39 de son action originale du 4 décembre 2003, qu’il aurait dû recevoir l’équivalent de 187 500 actions de Lumenon, soit la moitié des 50% d’actions de Lumenon revenant aux chercheurs, calculé à partir des 750 000 actions reçues par PolyValor, les deux chercheurs dans ce scénario étant lui et le Dr Najafi [1/2 x 50% x 750 000 = 187 500 actions].

[235] Dans son action amendée du 11 mai 2007, le Dr Fardad réclame plutôt qu’il aurait dû recevoir l’équivalent de 125 000 actions de Lumenon, soit le tiers des 50% d’actions de Lumenon revenant aux chercheurs calculé à partir des 750 000 actions reçues par PolyValor, les trois chercheurs dans ce scénario étant lui et les Drs Andrews et Najafi [1/3 x 50% x 750 000 = 125 000 actions].

[236] Poly, dans sa défense du 4 mars 2004, non-amendée, a admis aux paragraphes 17 et 27 iii) que, si la Politique de Poly s’appliquait en l’espèce, ce qu’elle niait alors, le Dr Fardad aurait eu droit à 33% de la part des 50% dévolue aux trois inventeurs, soit à l’équivalent de 125 000 actions de Lumenon.

[237] Il y a lieu de reproduire les paragraphes 17 et 27 iii) de cette défense qui se lisent comme suit :

«17. Elle nie le paragraphe 24 de la requête du demandeur comme étant manifestement mal fondé en faits et en droit puisque, si la politique relative à la propriété intellectuelle de la défenderesse (Exhibit P-2) était applicable en l’espèce (ce qui n’est pas admis mais nié) au mieux, le demandeur aurait eu droit à 33% de la part de 50% dévolue aux trois (3) inventeurs, puisque la politique prévoit spécifiquement le partage de la part de l’ensemble des chercheurs (soit 50% des revenus nets d’exploitation d’une technologie, art. 2.7), en parts égales à défaut d’une entente à l’effet contraire conclue par ceux-ci, avant que quelque démarche de valorisation ne soit entreprise (articles 2.7 et 2.8, Exhibit P-2).

27 iii) Si la politique relative à la propriété intellectuelle technologique de la défenderesse était applicable en l’instance, ce qui n’est pas admis mais nié, le demandeur, ANDREWS et NAJAFI auraient eu droit à 50% des revenus nets d’exploitation de la technologie reçus par la défenderesse, à être divisé en parts égales entre eux. Le demandeur n’aurait eu droit, en aucun cas, à un

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pourcentage de la part des revenus nets d’exploitation de la technologie reçue par la défenderesse ou reçue par d’autres établissements.»

(Soulignement dans le texte d’origine)

[238] Le Tribunal ne peut que conclure, dans les circonstances, que le Dr Fardad aurait eu droit à l’équivalent de 125 000 actions de Lumenon.

[239] Cependant, lors des plaidoiries verbales et écrites, Poly a plaidé que le Dr Fardad n’aurait eu droit, finalement, qu’à l’équivalent de 62 500 actions de Lumenon compte tenu du fait que Poly elle-même n’a eu droit qu’à l’équivalent de 375 000 actions, soit la moitié des 750 000 actions de Lumenon reçues par PolyValor, car Poly ne détenait que 50% des parts A de PolyValor [(750 000 actions ÷ 2) x 50% x 1/3 = 62 500 actions].

[240] Le Tribunal se doit donc de disposer de cet argument, arrivé tardivement, afin que le dossier soit traité complètement.

[241] Le Tribunal ne peut retenir cet argument pour plusieurs raisons.

[242] D’abord, d’entrée de jeu, le Tribunal reconnaît que PolyValor n’est pas l’alter ego de Poly.

[243] Cependant, Polyvalor, du point de vue du Dr Fardad, est un agent de dilution de ses intérêts économiques, et ce, pour des considérations qui sont à l’avantage de Poly, mais qui lui sont complètement étrangères.

[244] En effet, lors des négociations entre McGill et Poly, il fut convenu que chacune d’entre elles recevrait 750 000 actions de Lumenon en contrepartie de la Licence qu’elles lui accorderaient pour la commercialisation de l’Invention.

[245] McGill, elle, donna directement une Licence à Lumenon (pièce P-13) et reçut 750 000 de ses actions.

[246] Poly, elle aussi aurait pu donner directement la Licence à Lumenon et recevoir 750 000 actions et, dans ce cas, le Dr Fardad aurait eu droit à l’équivalent de 125 000 actions de Lumenon.

[247] Cependant, pour de nombreuses raisons tout à fait valables pour elle et à son avantage, Poly voulut optimiser sa façon de commercialiser l’ensemble de ses techno-logies et, pour ce faire, elle décida de mettre sur pied une société en commandite, PolyValor, dans laquelle elle versa, à titre de contribution, trente-deux (32) technologies lui permettant d’obtenir 25 000 parts A de PolyValor, valant 100 $ chacune. L’une de ces technologies était celle correspondant à l’Invention, soit l’item no 8 de l’annexe A du formulaire de souscription et de procuration (pièces D-11 et D-33).

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[248] Cette contribution de Poly correspondant à 32 technologies transférées à PolyValor lui donna droit à 50% des parts A de PolyValor et les deux autres investis-seurs eurent droit à 50% des parts A, soit 47% dans le cas du Fonds de Solidarité et 3% dans le cas du Fonds en transferts (pièce D-24, États financiers de PolyValor au 30 juin 2000, p. 7).

[249] Cette nouvelle approche d’affaires est tout à fait valable pour Poly mais, dans le cas du Dr Fardad, elle vient diminuer et diluer de beaucoup ses intérêts au sein d’un bouillon comptant trente et une (31) autres technologies, aux potentiels de commerciali-sation différents et, surtout, il faut souligner que pour parvenir au résultat que fut la convention de société en commandite, il y eut transaction sur de nombreuses considé-rations économiques et d’affaires auxquelles le Dr Fardad fut complètement étranger.

[250] En fait, la création de PolyValor par Poly et ses associés est une transaction juridique et commerciale qui se superpose à la première transaction que pouvait faire Poly, directement, soit d’octroyer la Licence à Lumenon, sans passer par PolyValor.

[251] En mettant sur pied PolyValor pour fins de commercialisation de l’ensemble de ses technologies, Poly fait deux opérations en une au sein de celle-ci quant à la technologie visée par la présente cause, c’est-à-dire qu’elle perçoit, premièrement, 100% du revenu de commercialisation relatif à la Licence et, deuxièmement, elle en laisse 50% à PolyValor à titre de contribution pour le fonctionnement de cette entre-prise, ceci correspondant à une deuxième transaction, laquelle n’a pas à nuire aux intérêts économiques du Dr Fardad car elle aurait pu être faite autrement.

[252] Voilà la raison pour laquelle le Tribunal est d’avis que la présence de PolyValor, dans le présent cas, ne doit pas avoir pour effet de diminuer la valeur économique des droits du Dr Fardad qui n’a jamais, par ailleurs, d’aucune façon, directement ou indirectement, participé aux Tables de négociation où tous les scénarios étaient discutés, dont le scénario de la mise sur pied de PolyValor par Poly.

[253] S’il avait été présent aux Tables de négociation en 1997, 1998 et 1999, les scénarios auraient été faits pour avantager tous les acteurs (le Dr Andrews, le Dr Najafi, le Dr Fardad, Poly et McGill) et aucun n’aurait été fait spécifiquement pour désavan-tager encore plus le Dr Fardad comme le voudrait, ultimement, Poly dans sa plaidoirie écrite.

[254] En dernier lieu, à ce sujet, il faut remettre les choses dans la juste perspective de l’époque.

[255] En effet, la Politique de Poly, approuvée en septembre 1995, fut écrite sans jamais faire référence spécifiquement à la mise en place de sociétés en commandite et, donc, l’économie générale du texte en découle, c’est-à-dire qu’à ce moment-là, la commercialisation se faisait principalement par l’attribution de licences.

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[256] M. Denis N. Beaudry rendit un témoignage clair à ce sujet. C’est à la fin de l’année 1997 que Poly, après analyses et consultations, voulut améliorer sa façon de faire en matière de commercialisation de ses technologies pour la rendre plus optimale, et qu’elle décida alors, pour ce faire, de mettre sur pied une société en commandite, PolyValor.

[257] Par conséquent, cette façon de faire n’était pas d’actualité chez Poly, en 1995 lors de la rédaction de sa Politique, et c’est ce qui explique que la notion de société en commandite en est absente. Si cette notion en est absente, et ce avant que le Dr Fardad ne devienne un co-inventeur de l’Invention au début de l’année 1997, elle ne doit certainement pas lui nuire, postérieurement, au moment du partage des fruits de la commercialisation.

[258] En terminant sur ce thème, le Tribunal conclut que le Dr Fardad avait droit à l’équivalent de 125 000 actions de Lumenon, correspondant à un tiers, de la moitié, des 750 000 actions de PolyValor, que Poly aurait pu détenir directement.

MONTANT À RECEVOIR

[259] Il est important de rappeler la position de chacune des parties à ce sujet.

[260] Le Dr Fardad réclame la valeur qu’avait l’action de Lumenon le 12 avril 2000, soit le premier jour de transaction du titre de Lumenon sur le NASDAQ, après que l’embar-go eût été levé par la SEC. La valeur était, ce jour-là, de 39,60 $ par action, ce qui donne une valeur totale, pour 125 000 actions, de 4 950 000 $.

[261] Le Dr Fardad, dans son témoignage, a indiqué, en substance, qu’il n’avait aucune connaissance de la bourse, qu’il n’avait jamais détenu d’actions de sociétés publiques de sa vie et qu’il avait des besoins pressants d’argent à cette époque-là dus au fait qu’il était nouvellement marié, que son épouse ne travaillait pas à l’extérieur du foyer, s’occupant de leur enfant, et que son petit salaire de chercheur à l’université d’Arizona faisait en sorte que «I was living pay cheque to pay cheque to support the family».

[262] Le Dr Fardad a indiqué que ce sont ces raisons-là qui l’auraient amené à vendre, dès le premier jour possible, soit le 12 avril 2000, l’ensemble de ses actions de Lumenon, de telle sorte que le montant de son dédommagement doit être établi en tenant compte uniquement de la valeur de l’action de Lumenon, le 12 avril 2000, que la valeur de l’action ait augmenté ou diminué par la suite, cela n’a aucune importance.

[263] Il appuie grandement sa position sur l’arrêt Biotech Electronics Ltd et als c. Thomas J. Baxter3 («arrêt Baxter») qui sera discuté plus loin.

3 Biotech Electronics Ltd et als, appelants et Rival Company of Canada Ltd, appelante en reprise d’instance et Dietrich Puetter et als, défendeurs et Marie-Louise Parent Johnson, défenderesse c. Thomas J. Baxter et als, intimés, C.A., 23 janvier 1998, no 500-09-000344-903

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[264] De son côté, Poly plaide la cohérence, c’est-à-dire qu’elle soutient que si la Politique de Poly est retenue par le Tribunal et qu’elle s’applique au Dr Fardad, il faut regarder la réalité des choses sur le plan économique et, dans le cas présent, cette réalité est que PolyValor a vendu ses 750 000 actions au fil du temps, dans le cours normal des choses, et que ses ventes ont rapporté un revenu net réel de 8 586 480 $ (pièces P-17 à P-20 et D-24).

[265] Poly rappelle que le Dr Fardad doit, donc, suivre sa propre logique (soit l’application de la Politique de Poly) jusqu’au bout, et non pas introduire un élément variable, à la toute fin, pour obtenir un montant de dédommagement beaucoup plus important, cet élément étant qu’il puisse choisir, après coup, de dire qu’il aurait vendu toutes ses actions le 12 avril 2000, alors que la personne qu’il poursuit, soit Poly, a vendu ses actions de façon progressive, via PolyValor, au fil du temps de 2000 à 2003, et ce, à une époque où ces ventes étaient faites de bonne foi, en tenant compte de tous les paramètres concrets dont tenaient compte aussi tous les autres vendeurs qu’étaient McGill, PolyValor, le Dr Andrews, le Dr Najafi et les investisseurs privés.

[266] L’article 2.7 de la Politique de Poly indique «que l’ensemble des chercheurs … reçoivent (sic) toujours un montant global au moins égal à 50% des revenus nets d’ex-ploitation de cette technologie reçus par Polytechnique …», les revenus nets étant définis, à l’article 1.8 des définitions, comme étant les «Revenus bruts diminués des coûts directs».

[267] Poly conclut, à toutes fins utiles, que l’application de sa Politique, recherchée par le Dr Fardad, donne comme résultat qu’il aurait droit, si le Tribunal lui donne raison quant aux 125 000 actions de Lumenon, à un montant égal à un tiers, de la moitié, de ses revenus nets réellement reçus (8 586 480 $), ce qui donne un montant de 1 431 080 $, le tout correspondant à l’équation suivante [1/3 x 50% x 8 586 480 $ = 1 431 080 $].

[268] Accorder au Dr Fardad la somme de 4 950 000 $ pour l’équivalent de 125 000 actions signifierait qu’il recevrait 57,65% des revenus nets totaux perçus par Poly pour 750 000 actions de Lumenon [4 950 000 $ ÷ 8 586 480 $ x 100 = 57,65%], alors que la part du Dr Fardad, retenue dans la présente affaire, est de 16,66%, laquelle correspond au tiers, de la moitié, de 100% des actions de Lumenon revenant à Poly [1/3 x 1/2 x 100% = 16,66%].

[269] Cette approche, plaidée par le Dr Fardad, mène à un non-sens selon Poly et ne doit pas être retenue.

[270] Le Tribunal est d’avis que les critères que sont, d’une part, la cohérence des choses et des documents impliqués et, d’autre part, le comportement probable des gens compte tenu des faits particuliers d’une affaire, sont les meilleurs guides pour per-mettre de dégager une conclusion juridique valable, et ce, comme en l’espèce, quand vient le temps de retenir le scénario le plus probable dans une situation hypothétique

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découlant du fait que le Dr Fardad n’a, jamais, détenu des actions de Lumenon en 2000, et qu’il ne fut donc jamais mis dans une situation réelle de vente.

[271] Il faut faire un bref rappel des faits qui se sont déroulés à la fin de l’année 1997 et au cours des années 1998 et 1999 pour avoir un bon éclairage.

[272] Le Dr Fardad reproche à Poly de ne pas l’avoir informé de ce qui se passait alors et de l’avoir, à toutes fins utiles, privé de participer à tout le processus de commercialisation de l’Invention qui se déroulait alors à Montréal.

[273] Or, que se passait-il à Montréal ?

[274] Tous les acteurs présents, soit le Dr Najafi, le Dr Andrews, McGill et Poly négociaient entre eux et avec d’autres partenaires afin d’établir les meilleurs scénarios pour faire la commercialisation de l’Invention et pour mettre en place les véhicules et conventions pour y parvenir.

[275] Il s’agit des trois Tables de négociation dont le Tribunal a parlé antérieurement, soit la Table Najafi-Andrews, la Table Poly-McGill et la Table Poly-Investisseurs- PolyValor.

[276] Ces trois Tables de négociation ne furent pas des abstractions mentales et elles correspondirent, factuellement, à un ensemble de rencontres, de lunchs, de téléphones, de courriels, de projets de documents et contrats échangés, puis abondamment commentés et négociés, créant ainsi un lien entre tous les intervenants qui allait les suivre par la suite et guider leurs décisions.

[277] Toute cette activité amena la création de Lumenon dont tous les acteurs présents voulaient le succès, car son succès créait leur richesse.

[278] Qu’aurait fait le Dr Fardad s’il avait été présent et avait été un acteur agissant au sein de ce processus ?

[279] Serait-il resté assis dans un coin, attendant de recevoir quelque chose qui soit indéfinie ?

[280] Le Tribunal croit que non. Toutes les probabilités indiquent qu’il aurait été un acteur à toutes les Tables de négociation où il devait être, qu’il aurait travaillé avec les autres acteurs et qu’il aurait cherché, lui aussi, le succès de Lumenon, et cela, au sein du groupe composé de McGill, de Poly, du Dr Andrews, du Dr Najafi, de lui-même et des investisseurs externes.

[281] Il aurait été au sein d’une action concertée, d’une mouvance de groupe et, justement, compte tenu de sa personnalité timide et de son manque d’expérience du monde des affaires, par ailleurs et surtout, il aurait suivi les tendances du groupe qui

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étaient de permettre à Lumenon de devenir une société prospère et attrayante pour les investisseurs transigeant sur le NASDAQ.

[282] Le Tribunal va directement au cœur de sa réflexion et est d’avis que, dans le cadre d’une telle action concertée et organisée par un groupe de gens hautement intelligents, jamais le Dr Fardad, co-inventeur de l’Invention, n’aurait vendu toutes ses actions de Lumenon le premier jour où elles étaient disponibles sur le NASDAQ, car cela aurait équivalu à un sauve-qui-peut de celui qui a réussi l’Invention, ce qui aurait été un signal négatif dramatique envoyé aux investisseurs du marché, dont les effets sur la survie ou la prospérité de Lumenon auraient pu être désastreux.

[283] Le Tribunal conclut donc, qu’au sein de ce groupe constitué de PolyValor, de McGill, du Dr Andrews, du Dr Najafi et des investisseurs privés, personne n’aurait permis, le premier jour où les ventes étaient possibles, qu’il y ait une vente de feu indiquant la peur et, dit positivement, tous auraient travaillé pour que les ventes se fassent progressivement, au gré du marché, espérant que la valeur de l’action monte toujours et baisse peu, ce qui est habituellement le souhait des investisseurs.

[284] Le Dr Fardad aurait été au sein de ce groupe et, en toute probabilité pour les raisons exposées ci-haut, il aurait lui aussi cherché le bien de Lumenon et, pour ce faire, lui aussi n’aurait pas voulu la chute du cours de l’action de Lumenon et, ne voulant pas cette chute ou un autre effet grave qui aurait compromis la commercialisa-tion de l’Invention, il n’aurait pas vendu toutes ses actions le premier jour où c’était possible de le faire et, par ailleurs, il n’aurait certainement pas voulu, non plus, que quelqu’un d’autre le fasse.

[285] Compte tenu des faits particuliers du présent dossier, le Tribunal considère que la façon la plus cohérente de voir les choses est de s’arrimer à ce qui est connu, et à retenir comme scénario ce qui est le plus probable, le tout pour en arriver à un résultat qui soit crédible et aligné sur la Politique de Poly.

[286] Poly est la partie défenderesse dans la présente cause et a reçu un revenu réel net de 8 586 480 $, en faisant abstraction de PolyValor, et ce, suite à des ventes d’actions de Lumenon faites en 2000, 2001 et 2003.

[287] Le Dr Fardad poursuit Poly et réclame de celle-ci l’application de la Politique de Poly.

[288] Or, cette Politique lui accorde le tiers, de la moitié, des revenus nets perçus par Poly [1/3 x 1/2 x 8 586 480 $].

[289] Donc, le Dr Fardad a droit de recevoir la somme de 1 431 080 $.

[290] Par ailleurs, quant au Dr Fardad, le Tribunal a cru percevoir qu’il s’est positionné en présentant une histoire simple et sympathique, dans le but de se rapprocher le plus possible de l’arrêt Baxter afin d’obtenir la somme de 4 950 000 $.

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[291] D’emblée, le Tribunal indique que s’il avait eu à rendre jugement dans l’affaire Baxter, compte tenu des faits propres de cette cause, il en serait probablement venu aux mêmes conclusions que la Cour d’appel.

[292] Rappelons brièvement les faits de cette affaire.

[293] Le 19 avril 1984, les actionnaires minoritaires de Biotech Electronics Ltd («Biotech»), à qui les actionnaire majoritaires avaient fait une offre pour acheter toutes leurs actions, acceptèrent un prix de 25,00 $ par action, alors que les actionnaires majoritaires avaient alors en leur possession une offre, datée du 12 avril 1984, du courtier Midland Doherty proposant de vendre les actions de Biotech sur le marché public l’automne suivant, à un prix se situant entre 100,00 $ et 180,00 $ l’action.

[294] Cette vente eut effectivement lieu à l’automne 1984, et le prix obtenu fut de 150,00 $ l’action, de telle sorte que les actionnaires majoritaires firent, à toutes fins utiles, un bénéfice de 125,00 $ l’action sur les actions achetées quelques mois plus tôt des actionnaires minoritaires.

[295] La Cour d’appel a rappelé dans sa décision qu’il y avait eu réticence, également, quant à deux autres faits importants qui avaient été retenus par le juge de première instance.

[296] Le premier est que Biotech avait obtenu, le 28 février 1984, un engagement portant ses ventes d’humidificateurs de 108 000 à 239 500 unités. Le deuxième était que M. Cloetta, un actionnaire de Biotech, a caché aux actionnaires minoritaires le fait qu’il avait l’intention d’acheter leurs actions, alors qu’il leur laissait croire que lui aussi voulait vendre les siennes, induisant ainsi les actionnaires minoritaires, qui suivaient son comportement, en erreur.

[297] La Cour d’appel, tenant compte de toutes ces réticences, qu’elle estima détermi-nantes, a conclu que les actionnaires minoritaires avaient le droit de recevoir, à titre de dédommagement, la différence entre 150,00 $ et 25,00 $, soit 125,00 $ par action.

[298] Il s’agit donc de faits n’ayant aucune relation avec les faits de la présente cause.

[299] Le seul intérêt de cette cause pour le Dr Fardad est que la Cour d’appel et la Cour supérieure ont retenu le témoignage des demandeurs qui, tous, ont déclaré qu’ils n’auraient pas vendu leurs actions, le 19 avril 1984, si les faits ayant fait l’objet de réticences cette journée-là leur avaient été révélés, et qu’ils auraient plutôt attendu à l’automne 1984.

[300] Le Dr Fardad fait donc valoir au Tribunal que si la Cour d’appel a accepté, dans l’arrêt Baxter, le témoignage des actionnaires minoritaires indiquant quelles auraient été leurs intentions le 19 avril 1984 s’ils avaient connu l’existence des faits cachés, le Tribunal doit donc forcément accepter son témoignage selon lequel il aurait vendu toutes ses actions de Lumenon, s’il les avait détenues, le 12 avril 2000.

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[301] Sans vouloir tout répéter ce que le Tribunal a écrit dans d’autres sections du présent jugement, il est essentiel de distinguer plusieurs éléments.

[302] D’abord, la Cour d’appel, dans l’arrêt Baxter, retient, et cela est très important, qu’il s’agissait d’une affaire de la nature d’une fraude de la part des actionnaires majoritaires, alors que le Tribunal, en l’espèce, ne conclut à rien qui se rapprocherait un tant soit peu d’une fraude, mais il conclut, tout au plus, à une erreur commise, de bonne foi, par Poly qui croyait au cours de la Période visée que McGill et/ou les Drs Andrews et Najafi s’occupaient du Dr Fardad.

[303] Deuxièmement, aucune offre ou proposition ne fut cachée au Dr Fardad quant à la valeur des actions de Lumenon au 12 avril 2000, ou à tout autre moment, car aucun tel document n’a jamais existé, le Tribunal ajoutant, par ailleurs, que le Dr Fardad n’était pas actionnaire de Lumenon à cette date, dans la réalité des choses, et que le prix des actions de Lumenon fut établi au jour le jour sur un marché libre et public.

[304] Le Dr Fardad soumet au Tribunal qu’il aurait vendu toutes ses actions de Lumenon le 12 avril 2000 car, en substance, il n’avait aucune connaissance de la bourse et qu’il avait des besoins d’argent compte tenu de sa situation familiale.

[305] Le Tribunal est d’avis que le Dr Fardad évoque une situation qui relève plus de la stratégie judiciaire que toute autre chose.

[306] Le Tribunal réitère que le scénario le plus probable est celui selon lequel le Dr Fardad aurait eu un comportement semblable à celui du Dr Najafi, du Dr Andrews, de Poly, de McGill et des investisseurs externes s’il avait été impliqué dans le processus de commercialisation de l’Invention, c’est-à-dire qu’étant partie prenante de ce proces-sus et actionnaire de Lumenon, son comportement probable aurait été que jamais il n’aurait vendu toutes ses actions le 12 avril 2000, surtout à titre de co-inventeur, et qu’il les aurait plutôt vendues au fil du temps comme les autres, le tout afin d’éviter d’en-voyer un signal hautement négatif à la communauté des investisseurs à l’endroit de Lumenon.

[307] Dans le cadre d’un groupe sophistiqué comme celui impliqué à l’époque, il est hautement probable que ses collègues-investisseurs l’auraient empêché de tout vendre la même journée et, lui aussi, aurait probablement fait la même chose qu’eux à l’endroit d’un autre investisseur mal avisé.

[308] Ce scénario, estimé le plus probable par le Tribunal, a le mérite de se rattacher à la réalité vécue par tous les autres acteurs de l’époque qui ont réellement détenu des actions de Lumenon et qui ont ainsi, au quotidien, pris un grand nombre de décisions basées sur ce qu’ils observaient, dont celle de vendre leurs actions à différents moments étalés dans le temps.

[309] Le scénario proposé par le Dr Fardad est l’un des moins probables, car il n’inclut aucune référence au processus de commercialisation de l’Invention tel qu’il s’est

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réellement passé, aucune analyse de l’impact économique de la décision unilatérale qu’il propose sur les autres acteurs et sur le cours du titre dans la réalité de l’époque, se contentant de dire, à toutes fins utiles, qu’il aurait été un acteur passif pendant tout le processus de commercialisation … dont la seule décision aurait été de tout jeter par terre, sans que les autres ne s’opposent à ce geste.

[310] En réponse au Dr Fardad qui évoque son ignorance du marché des actions et ses besoins d’argent reliés à sa famille, le Tribunal estime qu’il est plus probable que le Dr Fardad, s’il avait vraiment eu des besoins d’argent en avril 2000, aurait vendu un certain nombre d’actions de Lumenon, le 12 avril 2000, pour améliorer rapidement sa situation financière, et d’autres actions par la suite dans le cours normal des choses, mais qu’il n’aurait certainement pas vendu toutes ses actions le même jour.

[311] En terminant sur ce sujet, le Tribunal souligne de nouveau que le comportement probable des acteurs en cause, incluant le Dr Fardad, au cours du processus de com-mercialisation de l’Invention, et la cohérence imposée par l’approche prise par le Dr Fardad dans son action en justice qui demande l’application de la Politique de Poly font en sorte que l’application de cette Politique au Dr Fardad a comme résultat qu’il a droit à un tiers, de la moitié, des revenus nets (8 586 480 $) réellement perçus par Poly, en ne tenant pas compte de la présence de PolyValor, soit à la somme de 1 431 080 $.

[312] Ce montant correspond à l’équivalent de 125 000 actions de Lumenon par rapport à 750 000 actions.

CALCUL DES INTÉRÊTS

[313] Dans la présente affaire, il faut établir à partir de quel moment le Dr Fardad a droit à des intérêts.

[314] L’article 1617 du C.c.Q. prévoit, entre autres, que l’intérêt légal court, dans le cas du retard dans l’exécution d’une obligation de payer une somme d’argent, depuis la date de mise en demeure.

[315] Les articles 1594 et 1595 du C.c.Q., applicables en l’espèce car le Dr Fardad n’a pas cherché à prouver la survenance d’un cas où il y a demeure de plein droit selon l’article 1598 du C.c.Q., indiquent que la mise en demeure extrajudiciaire doit être adressée par le créancier d’une obligation à son débiteur, et qu’elle doit être faite par écrit.

[316] Les articles 1594 et 1595 du C.c.Q. se lisent comme suit :

«1594. Le débiteur peut être constitué en demeure d’exécuter l’obligation par les termes mêmes du contrat, lorsqu’il y est stipulé que le seul écoulement du temps pour l’exécuter aura cet effet.

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Il peut être aussi constitué en demeure par la demande extrajudiciaire que lui adresse son créancier d’exécuter l’obligation, par la demande en justice formée contre lui ou, encore, par le seul effet de la loi.

1595. La demande extrajudiciaire par laquelle le créancier met son débiteur en demeure doit être faite par écrit.

Elle doit accorder au débiteur un délai d’exécution suffisant, eu égard à la nature de l’obligation et aux circonstances; autrement, le débiteur peut toujours l’exécu-ter dans un délai raisonnable à compter de la demande.»

[317] Or, dans le présent cas, le Dr Fardad a écrit, le 26 octobre 2001, non pas à sa débitrice Poly, mais à M. Denis N. Beaudry, President and General Manager de PolyValor Inc., qui est le commandité de PolyValor, afin d’obtenir le recouvrement de ce qu’il estimait lui être dû (pièce P-22).

[318] À première vue, la mise en demeure est envoyée à la mauvaise personne et Poly pourrait soutenir qu’elle n’eût jamais connaissance de cette lettre et, qu’ainsi, elle ne fut jamais mise dans la position où elle aurait pu exécuter son obligation, le cas échéant, tel étant le but visé par l’article 1595, 2e al., du C.c.Q. en regard de la mise en demeure.

[319] Le Tribunal rappelle que les faits de cette cause sont particuliers et qu’ils opposent d’une certaine façon David contre Goliath.

[320] Le Dr Fardad n’eut peut-être pas la main heureuse en adressant sa mise en demeure à PolyValor Inc., mais ce qui est essentiel de savoir est quelle en fut la con-naissance de Poly et quelle fut sa réaction.

[321] Pour éviter toute confusion, rappelons l’objet de la lettre du Dr Fardad du 26 octobre 2001 dans laquelle il écrit, à la page 2, ce qui suit :

«[…]

I am hirby(sic) writing this letter for the recovery of royalties, proceeds or payments owed to me by … Ecole Plytechnique(sic) or any other person or entity, arising from the assignment or transfer of US patent 6,054,253 and / or Canadian patent 2,218,273.

I deeply hope that this matter will be conveniently clarified and resolved through just-our communication. I am looking forward to hearing from you.»

[322] L’objet ne saurait être plus clair. Le Dr Fardad veut obtenir compensation de Poly.

[323] Sa lettre est limpide et le ton hautement poli, ce qui est révélateur de la person-nalité du Dr Fardad, et ne saurait lui être défavorable par rapport aux personnes témoignant, trop rapidement, d’une attitude agressive dans une affaire.

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[324] Le 21 novembre 2001, M. Denis N. Beaudry accuse réception de la lettre du Dr Fardad que ce dernier lui a envoyée de nouveau cette journée-là (pièce P-26). M. Beaudry écrit ce qui suit au Dr Fardad :

«We indeed have received on November 6, 2001 your letter dated October 26, 2001 and we have initiated necessary verifications. We shall be in a position to get back to you soon.»

(Notre soulignement)

[325] Quatre mois plus tard, soit le 20 mars 2002, Me Hélène Perron, directrice des Affaires juridiques de Poly, répond au Dr Fardad. Son adresse internet est […] (pièce P-27).

[326] De toute évidence, Me Perron prend position pour Poly et, si elle prend position pour Poly, c’est donc que Poly fut mise au courant de la mise en demeure du 26 octobre 2001 du Dr Fardad. Poly ne peut donc pas nier l’existence de la lettre du Dr Fardad et, par ailleurs, s’être sentie directement interpellée par celle-ci.

[327] M. Denis N. Beaudry avait promis au Dr Fardad que des vérifications seraient faites et qu’une réponse viendrait.

[328] Or, cette réponse est venue de Me Hélène Perron.

[329] Qu’est-ce qu’écrit Me Perron à ce sujet ? Le Tribunal estime nécessaire de reproduire sa lettre au complet :

«BY FAX

Mr Amir Fardad March 20, 2002[…]Tucson, Arizona[…]. USA

Subject : Letters of October 26, 2001 and March 8, 2002

Dear Mr Fardad,

I have been asked by Mr Denis N. Beaudry to reply to your letters of October 26, 2001 and March, 8, 2002

I have carefully reviewed the situation and I am of the view that you are not entitled to claim anything from us, with respect to the Invention referred to in your letters. The circumstances of this case, and the legal framework in place dictate that each inventor’s entitlement (if any) to “ royalties, proceeds or payments ” as you write, lies with his own University.

You wrote that you were “a post-doctoral employee at McGill University and Ecole Polytechnique in 1996-1997”. The records show however that you never were an employee, or student, at Ecole Polytechnique of Montreal at any relevant time. It appears that you were employed for a short three-months period

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but only well after the invention was licensed and in connection with an unrelated project. Furthermore, Polyvalor is not Ecole Polytechnique.

Do not hesitate to contact the undersigned if you wish to discuss this matter any further.

Yours sincerely,

(Signature)

Hélène PerronDirector, legal affairs

c.c.: Mr Denis N. Beaudry»

(Notre soulignement)

[330] Cette lettre reflète parfaitement la position de Poly soutenue tout au long du procès, de telle sorte qu’elle ne peut être écrite qu’au nom de Poly, laquelle, selon son analyse, n’est pas redevable au Dr Fardad.

[331] Un lien direct, et sans équivoque sur le plan juridique, fut donc établi entre le Dr Fardad et Poly par la mise en demeure du Dr Fardad adressée à PolyValor inc. seulement le 26 octobre 2001, de telle sorte que Poly ne saurait s’appuyer sur une telle technicalité pour se soustraire à l’obligation de payer des intérêts depuis cette date.

[332] Par conséquent, le Tribunal retient la date du 26 octobre 2001 comme date de départ du calcul de l’intérêt légal.

[333] De plus, le Tribunal ajoute à l’intérêt légal, l’indemnité additionnelle discrétionnai-re prévue à l’article 1619 du C.c.Q. afin que le Dr Fardad obtienne un dédommagement adéquat sur le plan financier.

CONCLUSION

[334] En terminant, après avoir statué quant à la demande du Dr Fardad, le Tribunal estime nécessaire de faire le commentaire suivant relatif à l’attitude de Poly, le tout afin de remettre les choses dans leur juste perspective.

[335] Poly a certes commis une faute devant être sanctionnée sur le plan civil, mais le Tribunal, au terme de l’analyse de toute la preuve, peut conclure avec certitude que jamais Poly ou ses employés ne furent de mauvaise foi à l’endroit du Dr Fardad, ou n’ont eu l’intention de lui nuire, de telle sorte que leur comportement au cours des années 1997, 1998, 1999 et par la suite ne peut d’aucune façon être qualifié de disgra-ce, laissant ainsi intacte la réputation que Poly a acquise au fil des ans.

[336] En dernier lieu, le Tribunal libère le cautionnement pour frais au montant de 60 000 $ accordé par jugement rendu de consentement, le 15 janvier 2004.

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[337] POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[338] CONDAMNE la Corporation de l’École Polytechnique de Montréal à payer à M. Mohammed Ali (Amir) Fardad la somme de un million quatre cent trente et un mille et quatre-vingts dollars (1 431 080 $), ainsi qu’à payer l’intérêt légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du C.c.Q. calculé sur cette somme, et ce, depuis le 26 octobre 2001;

[339] LIBÈRE le cautionnement pour frais au montant de soixante mille dollars (60 000 $) déposé suite au jugement du 15 janvier 2004;

[340] LE TOUT, avec dépens.

__________________________________JEAN-PIERRE CHRÉTIEN, J.C.S.

Me Robert KuglerMe Alexandre Brosseau-WeryKUGLER KANDESTINAvocats du demandeur

Me François M. GrenierLÉGER ROBIC RICHARDAvocat de la défenderesse