W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy...

28
Mardi 27 mai 2014 - 70 e année - N˚21571 - 2¤- France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry I nutile de chipoter, d’invoquer le taux d’abstention très élevé ou de minimiser l’importance de ce scrutin défouloir : le Front national est le grand vainqueur, en France, des élections européennes. Après son score sans précédent à la présidentielle de 2012 et la percée du FN aux municipales de mars, Marine Le Pen a atteint son troisiè- me objectif. Avec plus du quart des suffrages exprimés le 25 mai, elle est à la tête du premier parti de France et devance nettement l’UMP comme premier parti de l’opposition. Plus que jamais, le parti d’extrême droite a donc su exploiter à son profit la tri- ple crise qui mine le pays depuis des années. Crise économique et sociale, mar- quée par six années de croissance quasi nulle et d’envolée inexorable du chômage. Crise d’une Europe qui a cessé d’offrir un giron protecteur et un horizon prometteur pour deve- nir le repoussoir de bien des inquié- tudes nationales. C’est ce sentiment, certes minoritaire mais très vif, que le Front national exprime. Crise politique, enfin. A force de macérer, le malaise démocratique, le discrédit des partis politiques tradi- tionnels et l’impuissance des gouver- nants à répondre aux craintes des Français ont fini par provoquer un séisme plus profond et plus grave que celui du 21 avril 2002. Alors, la qualification de Jean- Marie Le Pen au second tour de la pré- sidentielle avait été un coup de semonce. Aujourd’hui, le succès de sa fille est un coup de massue qui bouleverse tout le paysage politi- que. Avec moins de 14 % des suffra- ges, la déroute du Parti socialiste est sans précédent depuis près d’un demi-siècle dans une élection natio- nale. Elle n’est pas compensée par les autres listes de gauche : toutes les gauches réunies ont attiré les voix d’à peine plus d’un électeur sur trois. La claque est presque aussi cin- glante pour la droite. Fragilisée par ses divisions autant que par les récentes affaires financières met- tant en cause son président, l’UMP apparaît affaiblie, écartelée et incapa- ble d’incarner une opposition convaincante. Quant aux centristes, ils tirent leur épingle du jeu, mais res- tent une force d’appoint aléatoire. Pour le pouvoir exécutif, l’heure est donc « grave, très grave », comme l’a martelé le premier ministre, Manuel Valls. En dépit de la protec- tion des institutions, la sanction des européennes, deux mois après celle des municipales, oblige à poser la question : comment agir, gouverner – et plus encore réformer – quand le chef de l’Etat est aussi affaibli et sa base politique aussi étriquée ? C’est pourtant vital pour empêcher M me Le Pen de poursuivre sa marche en avant. En Europe, où elle faisait déjà figu- re de maillon faible, la France va iné- vitablement apparaître comme le « mouton noir », en proie aux délétè- res – et détestables – pulsions du national-populisme. Cela réduira d’autant la capacité d’influence de François Hollande et ses marges de manœuvre. Calamiteux. p POUR VOTRE SANTÉ, ÉVITEZ DE GRIGNOTER ENTRE LES REPAS. www.mangerbouger.fr Mamie, c’est toute l’année qu’elle enchaîne les services à la cuillère. Mamie Nova, il n’y a que toi qui me fais ça. PARLEMENT : LA DROITE BAT LES SOCIAUX-DÉMOCRATES LIRE PAGE 10 AU ROYAUME-UNI, LES EUROPHOBES EN TÊTE LIRE PAGE 11 Juncker revendique la présidence de la Commission Le Parti populaire euro- péen est le premier par- ti à Strasbourg, devant les sociaux-démocrates de Martin Schulz. PAGES 9 À 13 ÉDITORIAL Le triomphe du Front national dévaste le paysage politique français TOUR D’EUROPE... LE REGARD DE PLANTU UK price £ 1,80 Marine Le Pen, le 25 mai, au siège du Front national, à Nanterre. CYRIL BITTON/FRENCH POLITICS POUR LE MONDE t Avec 25 % des voix, Marine Le Pen remporte pour la première fois un scrutin national t Réunion de crise à l’Elysée après la déroute historique du PS t Manuel Valls annonce des baisses d’impôts t Le revers cinglant de l’UMP précipite sa crise interne LIRE PAGES 2 À 13 Le chaos du président Hollande Le nouveau Parlement européen 751 sièges 43 55 44 36 67 70 212 38 186 Gauche radicale Sociaux- démocrates Verts CRE (conservateurs) Souverainistes Autres Libéraux- démocrates Conservateurs Non-inscrits (dont FN) Résultat provisoire Algérie 180 DA, Allemagne 2,40 ¤, Andorre 2,20 ¤, Autriche 2,50 ¤, Belgique 2 ¤, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 ¤, Finlande 3,80 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,40 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,20 ¤, Guyane 2,50 ¤, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ¤, Italie 2,40 ¤, Liban 6500 LBP, Luxembourg 2 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,30 ¤, La Réunion 2,20 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Saint-Martin 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA

Transcript of W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy...

Page 1: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

Mardi 27 mai 2014 - 70e année - N˚21571 - 2 ¤ - Francemétropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur :Hubert Beuve-Méry

Inutiledechipoter,d’invoquer letaux d’abstention très élevé oude minimiser l’importance dece scrutin défouloir : le Front

national est le grand vainqueur, enFrance, des élections européennes.

Après son score sans précédent àla présidentielle de 2012 et la percéedu FN aux municipales de mars,Marine Le Pen a atteint son troisiè-me objectif. Avec plus du quart dessuffrages exprimés le 25mai, elle està latêtedupremierpartideFranceetdevance nettement l’UMP commepremier parti de l’opposition. Plusque jamais, le parti d’extrêmedroiteadoncsuexploiterà sonprofit la tri-ple crise quimine le paysdepuis desannées.

Crise économique et sociale,mar-quée par six années de croissancequasi nulle et d’envolée inexorabledu chômage. Crise d’une Europe qui

a cessé d’offrir un giron protecteuretunhorizonprometteurpourdeve-nir le repoussoir de bien des inquié-tudesnationales. C’est ce sentiment,certesminoritairemais très vif, quele Frontnational exprime.

Crise politique, enfin. A force demacérer, lemalaisedémocratique, lediscrédit des partis politiques tradi-tionnelsetl’impuissancedesgouver-nants à répondre aux craintes desFrançais ont fini par provoquer unséismeplus profond et plus graveque celui du 21avril 2002.

Alors, la qualification de Jean-MarieLePenausecondtourdelapré-sidentielle avait été un coup desemonce. Aujourd’hui, le succès desa fille est un coup de massue quibouleverse tout le paysage politi-que. Avec moins de 14% des suffra-ges, la déroute du Parti socialiste estsans précédent depuis près d’undemi-siècle dans une élection natio-nale.Ellen’estpascompenséeparlesautres listes de gauche : toutes lesgauches réunies ont attiré les voixd’àpeineplusd’unélecteursur trois.

La claque est presque aussi cin-glante pour la droite. Fragilisée parses divisions autant que par lesrécentes affaires financières met-tant en cause son président, l’UMPapparaîtaffaiblie,écarteléeetincapa-ble d’incarner une oppositionconvaincante. Quant aux centristes,ilstirentleurépingledujeu,maisres-tentune force d’appoint aléatoire.

Pour le pouvoir exécutif, l’heureestdonc«grave, trèsgrave», commel’a martelé le premier ministre,Manuel Valls. En dépit de la protec-tion des institutions, la sanction deseuropéennes, deuxmois après celledes municipales, oblige à poser laquestion: comment agir, gouverner– et plus encore réformer – quand lechef de l’Etat est aussi affaibli et sabase politique aussi étriquée? C’estpourtant vital pour empêcherMmeLePen de poursuivre sa marcheenavant.

EnEurope,oùelle faisaitdéjàfigu-re demaillon faible, la Franceva iné-vitablement apparaître comme le«moutonnoir», enproieauxdélétè-res – et détestables – pulsions dunational-populisme. Cela réduirad’autant la capacité d’influence deFrançois Hollande et ses marges demanœuvre.Calamiteux.p

POUR VOTRE SANTÉ, ÉVITEZ DE GRIGNOTER ENTRE LES REPAS. www.mangerbouger.fr

Mamie, c’est toute l’année qu’elleenchaîne les services à la cuillère.

Mamie Nova, il n’y a que toi qui me fais ça.

PARLEMENT : LA DROITE BATLES SOCIAUX-DÉMOCRATESLIRE PAGE 10

AU ROYAUME-UNI,LES EUROPHOBES EN TÊTELIRE PAGE 11

Junckerrevendiquela présidence delaCommissionLePartipopulaireeuro-péenest lepremierpar-ti àStrasbourg,devantlessociaux-démocratesdeMartinSchulz.PAGES 9 À 13

ÉDITORIAL

LetriompheduFrontnationaldévastelepaysagepolitiquefrançais

TOUR D’EUROPE...

LE REGARD DE PLANTU

UKprice£1,80

Marine Le Pen, le 25mai,au siège du Front national,àNanterre.CYRILBITTON/FRENCHPOLITICSPOUR LE MONDE

tAvec 25%desvoix,MarineLePenremportepourlapremière foisunscrutinnational

tRéuniondecrise à l’Elyséeaprès ladéroutehistoriqueduPS

tManuelVallsannoncedesbaissesd’impôts

tLe revers cinglantde l’UMPprécipitesa crise interneLIRE PAGES 2À 13

LechaosduprésidentHollande

Le nouveauParlementeuropéen751 sièges

43

55

44

36

67

70212

38

186

Gaucheradicale

Sociaux-démocrates

Verts

CRE(conservateurs)

Souverainistes

Autres

Libéraux-démocrates Conservateurs

Non-inscrits(dont FN)

Résultat provisoire

Algérie 180 DA,Allemagne 2,40 ¤, Andorre 2,20 ¤,Autriche 2,50 ¤, Belgique 2 ¤,Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 ¤, Finlande 3,80 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £,Grèce 2,40 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,20 ¤, Guyane 2,50 ¤,Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ¤,Italie 2,40 ¤, Liban 6500 LBP, Luxembourg 2 ¤,Malte 2,50 ¤,Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,30 ¤, La Réunion 2,20 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Saint-Martin 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA

Page 2: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

U ne page de la vie politiquefrançaise s’est définitive-ment tournée, dimanche

25mai, à l’occasion des électionseuropéennes.Pour lapremière foisenFrance, l’extrêmedroite est arri-vée en tête d’un scrutin d’ampleurnationale. Douze ans après sadeuxième place à la présidentiellede 2002, voilà le FN en pole posi-tion, loin devant les autres forma-tions politiques. Marine Le Pen adonc réussi un double pari : hisserle parti créé en 1972 par son père àsonplushautniveauhistorique,et,à travers cette victoire, provoquerun profond bouleversement de lascènepolitiquenationale.

LetriompheduFNDepuis deux ans, le même scé-

nario se répète : à chaque élection,leFNprogressenettementparrap-port au précédent scrutin équiva-lent. A la présidentielle de 2012,Mme Le Pen avait ainsi obtenu17,9% des voix, soit 7,5points deplusquesonpèrecinqansplus tôt.Aux législatives suivantes, le FNavait rassemblé 13,6% des suffra-ges, soit une progression de9,3points par rapport à 2007. Auxmunicipalesdemars, enfin, lepar-ti d’extrême droite a enregistréunepoussée inédite: onzemairiesconquises – il n’en avait jamaisdétenuplus de quatre.

Le scrutin de dimanche confir-mecettetendance,maisenl’accen-tuant.Avecprèsde25%desvoix, leFN quadruple son score par rap-portauxélectionseuropéennesde2009, arrivant en tête dans cinqdesseptcirconscriptionsmétropo-litaines. Ce résultat est d’autantplusremarquableque leniveaudel’abstention (57%) est élevé, ce quitend à montrer que les électeursduFNsesontfortementmobilisés.

C’est dans le Nord-Ouest, où saprésidente était elle-même tête deliste, que sapercée est la plus spec-taculaire : avec 33,6% des voix,Marine Le Pen distance de près de15points la liste de l’UMP (18,75%)etdeplusde20points la liste com-muneauParti socialisteet auPartiradical de gauche (11,78%).

Si les scores très élevés du FNdans l’Est (28,96%) et le Sud-Est(28,18%) ne sont guère surpre-nantsau regarddes scrutinsde cesdernières années, les résultatsqu’il obtient ailleurs sont beau-coup plus étonnants. Dans lesrégions traditionnellement réti-ves à l’extrême droite, les diguesont sauté. C’est le cas dans le Sud-Ouest, où le FN, avec 24,71% desvoix, a quadruplé son score de2009. C’est également le cas dansl’Ouest:encinqans,leFNyamulti-plié son score par six, passant de3% à 19,3% des suffrages. C’estenfin le cas en Ile-de-France, où ilarrive en deuxième position, avec17,3%des voix.

Tel est l’un des enseignementsmajeurs du scrutin : désormais,aucunepartiedu territoire, y com-pris les régions lesmoins touchéespar la crise et les plus réputées«europhiles»,n’échappeàlaflam-bée de l’extrême droite. Dans lastratégie de «banalisation» du FNvoulue par MmeLe Pen, un tel élar-gissementde l’ancrage géographi-queduparti estunacquisde taille.

LagaucheenmiettesLesrésultatsdesélectionsmuni-

cipales le laissaient présager, lessondages des dernières semainesaussi, il n’empêche : le résultatobtenu dimanche par le PS est unchoc. Jamais depuis 1979, date despremières élections européennes,son score n’a été aussi bas. Jus-qu’alors, l’étiageétaitceluide lalis-te conduite par Michel Rocard en1994: 14,5% des voix. Cette fois, lePSne fait enapparenceque légère-mentmoins bien, avec 13,98%dessuffrages.Mais en réalité, la baisseest nettement plus préoccupante.Il y a vingt ans, nombre de sympa-

thisants socialistes avaient votépour la liste conduite par BernardTapie (12%).

Deux ans après l’élection deFrançois Hollande, le PS se trouveen sommedansune situationpireque celle dans laquelle il était à lafin du second septennat de Fran-çoisMitterrand, ce qui en dit longsurlarapiditédesonusureaupou-voir. Les scores qu’il obtient danscertaines régions disent l’ampleurde la débâcle: 11,78%dans leNord-Ouest, soitunreculde6pointsparrapport à 2009; ou encore 13,23%dans l’Est, soit un recul de près de4pointsencinqans, et ce, bienquela liste du PS y fût conduite par lecharismatique Edouard Martin,l’ancien leader syndicaliste de Flo-range.

Pourlagauchedanssonensem-ble,lescrutinestdoncunecatastro-phe. En 2009, le faible score du PS(16,5%) avait pour corollaire l’ex-cellent résultat enregistré alorspar Europe Ecologie-Les Verts(16,3%),dûnotammentàlaperson-nalité de celui qui en conduisit lacampagne, Daniel Cohn-Bendit.Cette fois, EELV n’obtient que8,91% des voix. Avec un Front degaucheà6,34%etunelisteNouvel-le donne qui atteint 2,9%, le totalgauche s’avère donc famélique :moinsde 33%. Deuxans après sonélection, cette donnée est particu-lièrement inquiétante pour Fran-çois Hollande, déjà au plus basdans les sondagesdepopularité.

Uneclaquepourl’UMP

SilePS,etpluslargementlagau-che, sont un champ de ruines,l’UMPn’estguèreplus flamboyan-te.Lesrésultatsdesélectionsmuni-

cipales,enmars, luiavaientappor-téuneboufféed’air frais trompeu-se.

En dépit de la tragi-comédie desaguerredeschefsentreJean-Fran-çois Copé et François Fillon, fin2012, le parti était sorti finalementvainqueurdecescrutinlocal,profi-tant du vote sanction contre lamajorité pour repousser l’heuredes grandes explications. Cettefois, elle n’a plus d’échappatoire.L’UMPfinit 4pointsderrière le FN,à 20,79%. Elle est, aussi, près de7points derrière son score deseuropéennes de 2009 (27,88%).Unevraiedéfaite.

Ce mauvais score a plusieurscauses. La crise de leadership, avecun Jean-François Copé décrédibi-lisé, pris dans la toile de l’affaireBygmalion, qui le voit soupçonnéd’avoir utilisé des fonds du partiauprofit de ses amis, en est une.

Le grand flou idéologique duparti, censé lors de sa création, en2002, réunir la droite et le centre,en est une autre. Le centre, diman-che 25mai, avait choisi l’échappéeen solitaire: l’Alternative, qui réu-nit l’UDIet leMoDem,attelagepar-fois bancal,mais qui a aumoins leméritede parler d’unemêmevoixsur l’Europe, obtient 9,7% des suf-frages, soit un peu plus que leMoDemen2009 (8,5%).

Prise en tenaille entre le centreet le FN, l’UMP chemine sur unevoie de plus en plus étroite, dansun exercice impossible de funam-bulisme. Les jours à venir seront,pourelle,immanquablementmar-qués par des affrontements vio-lents, entre choc des ego et chocdes lignes. Le pire serait qu’ilssoient stériles.p

Pierre Jaxel-TrueretThomasWieder

LeséismequiébranlelaviepolitiquefrançaisePour lapremièrefoisdans l’histoirede laRépublique,unpartid’extrêmedroitearrive largemententêted’unscrutinnational

«Jamaisunprésidentn’aétéréduitàunebasePour lepolitologuePascalPerrineau, lepartideMarineLePenachangéde

PASCALPERRINEAUestprofesseuràSciencesPoet auteurdeLaFran-ceauFront. Essai sur l’avenirduFN(Fayard, 240pages, 18euros).Le Front national en tête du scru-tin européen en France, peut-onparler d’un séismepolitique?

YOui, incontestable-ment.Aupremiertourde l’élection

présidentiellede 2002, Jean-MarieLePenarrivait endeuxièmeposi-tionavec 16,9%des suffrages etl’onparlait déjàde séismeetderaz-de-marée.Avec 25%des suffra-ges, les listesduFNsont enpremiè-reposition.C’estdu jamais-vu: jus-qu’àmaintenant le FNoscillaitentre la troisièmeet lahuitièmeplaceauxeuropéenneset il ras-semblait enmoyenne9,2%desvoix sur les sixdernièresélectionseuropéennes.Onvoit bienque le25mai le FNa changédedimen-sion.Comment l’expliquez-vous?

Il y ades causesgénéralesetdesraisonsplusspécifiquement fran-çaises. Laprofondeurde la criseéconomiqueet sociale aentraînéuneréactionextrêmementvivedans les couches sociales lesplustouchéespar celle-ci. Il fautajouterun intensemalaisevis-à-visd’uneclassepolitiqueconsidéréecom-meimpuissanteet éloignéedespréoccupationsdes«gensd’enbas».Mais cettedéfiancepolitiqueestportée, enFrance, à sonpointd’orgue; l’actuellemajoritéaupou-

voir faisant l’objetd’unrejet incon-nudans sonampleur jusqu’alors.

Enfin, la Franceestparticulière-mentmal à l’aiseavec laglobalisa-tionet avec ladimensionsupra-nationalede l’Unioneuropéenne.Lenationalismede fermeturedont le FNestporteurest enphaseavec lamontéedecenationalismeinquiet. La récenteévolutionduFNqui l’aporté sur le terrainde laRépublique,de l’Etatprotecteur,de la laïcitéetde la réhabilitationde l’Etat commeacteuressentielauplanéconomique,a ouvert lesperspectives idéologiquesetélecto-ralesduparti.Quelles en sont les conséquen-ces pour la France et pour la pla-ce de la France enEurope?

Cettepoussée forteduFNquil’installeauxavant-gardesde laviepolitique française,va avoirunimpact suruneopinionpubliqueinternationalequidoutedéjàdescapacitésd’adaptationdupaysà lanouvelledonneéconomique.Auplaneuropéen, l’influence françai-sedans lesgroupesqui font lepré-sentet l’avenirde l’Unioneuro-péenne(PPE, PSEet libéraux)va setrouveramputéedu faitde l’arri-véed’unevingtainededéputésduFN.Lesquelsnesepréoccupentpasdeparticiperaucompromiseuro-péenmais seposent leproblèmed’unepureet simpledéconstruc-tionquine concernequ’unemino-ritédes751eurodéputés.Le FNest-il pour vous un parti

d’extrêmedroite ou un partipopuliste?

Certes, le FNcomprendaujour-d’huinombred’héritiersd’uneextrêmedroitequi l’aporté sur lesfontsbaptismaux.Mais,depuis2011, leparti s’est élargi, a fait évo-luer sondispositif idéologiqueafindes’émanciperde lamatriceextrémisteetde se transformerenpartiporteurà la foisd’unnationa-lismedont il n’estpas le seulvec-teuretd’unpopulismequi touchenombrede famillespolitiquespar-fois très éloignéesde lui.Le tripartismeest-il installé en

Franceou faut-il relativiser le sco-redecette électiondéfouloir?

Electionaprès élection, le systè-mebipolaire français est en traind’évoluerversunsystèmetripolai-reoùs’affrontent trois grandesfamillesséparéesdans leurs tropis-meséconomiques, sociauxetculturels: lagauche, ladroite classi-queet lenational-populismesansque l’onpuissevoir, àbrève

LeFNaattiré43%desouvriers,38%desemployéset37%deschômeurs.Contre8%desouvriers, 16%desemployéset14%deschômeurspourlePS

2 0123Mardi 27mai 2014

national

Page 3: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

européennes 2014

*JUSQU’À 80 HEURES DE RÉSERVE DE MARCHE**MONTRES SUISSES DE LÉGENDE DEPUIS 1853

**

BOUTIQUES TISSOT

76, AVENUE DES CHAMPS-ELYSÉES – 75 0 08 PARISGALERIE DES ARCADES, AVENUE DES CHAMPS-ELYSÉES – 75 0 08 PARIS

TISSOT LUXURY AUTOMATIQUE. MOUVEMENT POWERMATIC 80,O F F I C I E L L E M E N T C E R T I F I É C H R O N O M È T R E PA R L E C O S C(CONTRÔLE OFFICIEL SUISSE DES CHRONOMÈTRES) , OFFRANTJUSQU’À 80 HEURES DE RÉSERVE DE MARCHE AVEC UN BOÎTIEREN ACIER INOXYDABLE 316L. INNOVATEURS PAR TRADITION.

TISSOTSHOP.COM

national

Les clés du scrutin

Une abstention forteL’abstention atteint un niveau éle-vé avec 56,84%des électeurs quine se sont pas déplacés, diman-che25mai, pour les électionseuropéennes. En 2009, toutefois,l’abstention était légèrementplus élevée (59,37%).Comptabili-sé pour la première fois, le voteblanc a atteint 0,58%, soit110000bulletins.

LeFN en têteLe Front national obtient 24,95%des suffrages, devant l’UMP(20,79%) et le PS (13,98%). LeslistesUDI-MoDemobtiennent9,9%des suffrages exprimés,EELV8,91%, le Front de gauche6,34%,Debout la République3,82%.

La répartition des 74 députésLe Front national devrait rempor-ter 24 sièges, l’UMP20et le PS 13–dont un pour son allié PRG–surles 74 sièges d’eurodéputés attri-bués à la France. L’UDI devrait enobtenir 7, Europe Ecologie-LesVerts 6 et le Front de gauche3. Ledernier siège va àun élu diversgaucheen outre-mer.

électoraleaussiténue»dimensionavec le scrutineuropéendu25mai

Récit

C omment l’appeler, cemons-tre? Comment nommer cetévénementquiplacel’extrê-

me droite largement en tête,devant l’UMP et le PS ? UnSuper-21 avril européen ? Unecatastrophe nucléaire ? UnBlitzkrieg électoral? Un tsunamipolitique? Riende tout ça. Diman-che 25mai au soir, alors que danstoutes les permanences électora-les de France, on cherche lesmotspour décrire cette raclée aussiinquiétantequ’historique,lespoli-tiques, sur les plateaux de télévi-sion, se montrent étonnammentprudents. Comme si, malgré lacatastrophe annoncée, ilsn’avaient rien à dire.

Pas de cris, pas de larmes Qu’ilest loin ce21avril 2002, quandLio-nel Jospin avait parlé de «coup detonnerre» et que ses supporters–mais aussi des journalistes –s’étaientmis à pleurer. C’est pour-tantpire: cette fois, leFNse trouveentêted’uneélectionnationale.Lepatron de l’UMP (20,79%) Jean-François Copé, parle de «colère dupeuple français contre la politiqueconduite dans notre pays». Rue deSolférino, au siège duPS, précipitéà son plus bas niveau historique(13,98%), Jean-Christophe Camba-délis retient lui aussi ses mots,sans superlatif ni dramatisation:«Ce jour restera dans nos mémoi-res commeun jour sombre.»

Il ignoreque,quelquesminutesplus tard, le premierministre, cos-tume et cravate d’enterrement, vaparlerde«moment trèsgrave», de«choc», de«séisme». Un tournantdanslasoirée.Avantlui, surlespla-teaux, Jean-Luc Mélenchon, l’undes grands perdants de la bagarre,étaitseulàparlerde«crisedecivili-sation». «Le Front national en têtede ce scrutin est une informationsuffocante, juge l’eurodéputé duFrontdegaucheavantdequitter leplateau.Noussommeslesspécialis-tes en Europe des catastrophes etdes crises sociales qui tournentmal. Je suis très triste pour mapatrie.LaFranceestentréeenérup-tion volcanique et ça commencetoujours pardes pluies acides.»

«Front national, premier partide France» Manque d’imagina-tion?Politiquesetjournalistespui-senttoujoursdanslelexiquetecto-niquequandlesurnescréentlasur-prise. «Tremblement de terre», ditJean-MarieLe Pen tandisqu’à gau-che «séisme» tourne en boucle.Cette fois, pourtant, les sondagesne s’étaient pas trompés. Chacunavait eu le temps de se préparer.«C’est pas la peine de paraître sur-pris pour commenter des résultatsque tout le monde connaissaitd’avance!», s’agacel’ancienminis-tre socialiste des affaires étrangè-resHubertVédrine sur France 2.

Superstition ou prudence, ausiègeduFN, lesfrontistesontatten-du 20heures pour épingler aumur,derrière le pupitredeMarineLePen, leurs affichesvictorieuses:«Front national, premier parti deFrance».C’est la tristevérité.Pour-tant, ailleurs, on temporise, onminimise. «Il faut arrêter les illu-sions d’optique, dit Jean-FrançoisCopé. Il fautajouterlesscoresdel’U-DI puisque nous étions ensembleen2009. Et s’il y avait euunsecondtour…»

Sur La Chaîne Parlementaire, lesocialiste David Assouline expli-que que les 26% du FN n’en «fontpas lepremierpartideFrance, car ilfaudrait d’autres élections avecplusdevotantspour juger».Mêmediscours pour l’ancienneministreElisabeth Guigou: «Il est faux dedireque le Frontnational est lepre-mier parti de France, comme onl’entenddire iciou là.Unparti, çasemesure aux législatives, aux prési-dentielles et auxmunicipales.»

Un des rares ministres à mon-trer son nez ce soir, StéphaneLeFoll, juge aussi que «dire que leFront national est le premier parti

de France, ce n’est pas la vérité».L’élémentde langagecommenceàressembler àundéni de réalité.

«Les soirées électorales à latélé, c’est démodé» Le seulendroit où l’on parle cru, c’est surInternet.Dailymotionpour Franz-Olivier Giesbert (FOG), Mediapartpour Edwy Plenel, les européen-nes 2014 resteront celles des soi-rées télé alternatives. «Regarderles soirées électorales à la télé, c’estdémodé», explique dans un clipFOG, le patrondu Point.Autour desa table, Elisabeth Lévy, Jean-Fran-çoisKahnetPhilippeTessons’étri-pent comme au temps de «Droitde réponse», entre deux assiettesfroides.

Mediapart a réuni pour sa partun salon très CNRS et des invités–le Vert Julien Bayou, la socialisteMarie Noëlle Lienemann et PierreLarrouturou,fondateurdeNouvel-le Donne – auxquels Edwy Plenelfait la leçon de la division. Ici, onfait de François Hollande « le pre-mierresponsabledelasituationpré-sente», et on juge que l’arrivée deManuel Valls à Matignon a même«peut-êtreamplifié les choses».

Tous les correspondants àl’étranger le disent: l’événementdecesélectionseuropéennes,c’estlapremièreplaceacquise, enFran-ce, par un parti d’extrême droite.Edwy Plenel rappelle d’ailleursqueMarineLePen,cen’estpasune«nouvelle extrême droite, elle esthabile et neuve dans ses tactiquesmais son socle, c’est le même labo-ratoire intellectuel qu’il y a un siè-cle».Maiscen’estpas l’avisdetoutlemonde.

Mme LePenest-elle la fille de son

père? Moins dangereuse? Pluseffrayante au contraire? Le débat,né il y a quatre ans, est balancé.L’une des premières à apparaîtresur le plateau de TF1, SégolèneRoyalévite soigneusementdepar-ler d’extrêmedroite: «Un électeursurquatrea votépourunparti vio-lemment anti-européen», dit-elle.Et sur France 2, où il a fini parmigrer en fin de soirée, FOG lanceun mea culpa : «Je fais partie desconnardsquiontdiaboliséLePen.»

Le problème Hollande Pas deFrançoisHollande,ce soir, à la télé.Il est resté à l’Elysée. Seul un com-muniqué fait savoir qu’une réu-niondecriseestprévue lundiavecplusieurs ministres. «FrançoisHollande est un François Mit-terrand au petit pied », lâcheBruno Le Maire sur TF1. Sur les« télés libres», on ne mâche pasnon plus ses mots. «Crétin desAlpes», «Cresson du sexe mascu-lin», lance le polémiste PhilippeTesson. « Je ne suis pas d’accord,Cresson était pas mal », répondJean-FrançoisKahn.

C’est un député UDI, FrançoisSauvadet, qui, sur Tweeter, vientsiffler la fin de la récréation.«Démission de Hollande? Tout cequi excessif en devient insigni-fiant», écrit l’ancien ministre encitant Talleyrand.

«Il y a quandmême une bonnenouvelle, lâche Laurent Fabius surle plateau de France 2 pour tenterd’égayer la soirée et de prendre delahauteur,c’est l’électionprobableà Kiev de quelqu’un qui va favori-ser l’unité ukrainienne. » MaisRachida Dati, qui fulmine contretout le monde, leur oppose une

abrupte fin de non-recevoir :«L’Ukraine, je crois pas que ce soitla préoccupation des Français cesoir.»

Le nouveaumaire deKiev, l’ex-championdumondedeboxeVita-li Klitschko, undes chefs de file dela contestation pro-occidentale, aheureusement l’esprit plus large.«Vous êtes sûr que vous voulezvraiment aller vers l’Europe?», luidemandel’envoyéspécialdeFran-ce 2 après l’annonce de la victoiredu FN aux européennes. «Oui, luia-t-il répondu, parce qu’aumoins,en France, vous pouvez prendredes déculottées!»

Sarkozy, le grand absent Il avaitenvoyéune tribune au Point, troisjoursplus tôt.Mais ce soir,NicolasSarkozy est aux abonnés absents.Son ami Brice Hortefeux estdevancé dans la région Centre parun illustre inconnu du FN. Rachi-da Dati explique, elle, que les pri-maires réclamées par Alain Juppéen 2016 ne sont pas le problèmedu jour, NathalieKosciusko-Mori-zet réclame une alliance avec lecentre, le maire de Bordeaux etFrançois Fillon mettent en causela présidence de Jean-FrançoisCopé,unbureaunationalhouleuxde l’UMP est convoqué mardi,maisNicolas Sarkozy est ailleurs.

Il a suivi Carla Bruni à Tel-Aviv,oùelle donnait un concertdiman-che soir. Il est applaudi par la salleaux cris de «Nicolas ! Nicolas ! »quand il s’est avancé vers sa place,s’est prêté au jeu des selfies avecdes spectateurs, mais a refusé decommenterlaBerezinadesonpar-ti. p

ArianeChemin

Sur le plateau de France2 lorsde la soirée électorale dimanche25mai, plusieurs responsablespolitiques ont parlé de «choc».BRUNO LÉVY POUR «LE MONDE»

échéance, comment labipolarisa-tionpourrait faire retourparuneinclusionduFNdansunecoalitiondepouvoir.Qui de l’UMPou duPSest le plus vulnérable?

Lesdeuxpartisdegouverne-mentsontatteints.Cela fait long-tempsque leFNn’estplus seule-mentunequestionpolitiqueposéeà ladroite françaisemaisaussiunequestionsocialemajeureposéeà lagauche.Dimanche25mai, selonunsondageIpsos-Steria, les listesduFNontattiré43%desouvriersquisesontdéplacésauxurnes, 38%desemployéset 37%deschô-meurs.Les listesduPSontattiréàelles8%desouvriers, 16%desemployéset 14%deschômeurs.FrançoisHollande est-il directe-mentmenacé par cette nouvelledonne?

Jamaisunprésidentde laRépu-bliquen’aété réduitàunebaseélectoraleaussi ténue.Sa faiblessepolitiqueest extrême,et laperfor-manceduFNest aussi cellede sacapacitéàporter avec leplusdevéhémence le rejetduchefdel’Etat.69%desélecteursduFNontvotéavant toutpourmanifesterleuroppositionauprésidentet augouvernement (contre34%dansl’ensemblede l’électorat).

Au-delàduprésident, lamajori-té aupouvoirnepeutqu’appeleràunrassemblementautourdepro-jetsquinechercherontplus àcli-ver la société françaisequece soit

sur le terrain sociétalouéconomi-que.D’autrepart, le désarroidenombredecouchespopulairesexi-gededégagerunprojet fortoù leseffortsdemandésserontmisencohérencedansunprojetdesolida-rité socialeà l’horizon2020. L’am-pleurde la criseéconomique, socia-le etpolitiqueappelleunvéritable«newdeal» à la française.Resteàsavoirquipeut leporterdemaniè-re forteet crédibledans le disposi-tif affaiblide lagaucheaupouvoir.Pourquoi l’UMPn’est-ellepas parvenue à poursuivresur sa lancée desmunicipales?

Dans les électionsmunicipales,directementproductricesdepou-voirauplan local, l’expérienceges-tionnaireet la culturedegouverne-mentdugrandparti d’oppositionontemporté la conviction.Dansles européennes, les fonctionspurementexpressiveset tribuni-tiennesduvote l’ont emporté.La situation est-elle si gravequ’elle appelleune recomposition politique?

Cette implantationduFNaucœurde l’électorat,même si elleconnaîtrades reclassements,mar-queune rupture. La répliquede laprésidentiellede 2002 est tout àfait possible avec cette fois-ci unFNdésenclavé, situé au cœurdumalaisenational et capabled’atti-rer à lui des électeurs que le FNde2002était incapablede séduire.p

Proposrecueillis parFrançoise Fressoz

«LaFranceenéruptionvolcanique»Dimanchesoir, les responsablespolitiquesnetrouvaientpasdemots faceà l’ondedechoc

30123Mardi 27mai 2014

Page 4: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

Comment réussir en Chine ?Retrouvez le face à face avec

Éric KAYSEREntrepreneur artisan boulanger - Maison Kayser&Isabelle FERNANDEZDirectrice d’Ubifrance Chine

Pour en savoir plus, rendez-vous surplanetebusiness.lemonde.fr

En partenariat avec

Planète BusinessConnectez-vous à un monde d’opportunités

FNFlorian Philippot, le numéro deuxduFront national. Le parti frontiste est arrivé en tête du scrutinavec 24,95%des voix et obtient 24sièges auParlement européen. BRUNO LÉVY POUR «LE MONDE»

PSManuel Valls à sa sortie de RTL, lundimatin. Le premierministre a assuré à l’antenne qu’il ne fallaitpas changer de «feuille de route» et a demandé du «temps». JEAN-CLAUDE COUTAUSSE-FRENCH POLITICS POUR «LE MONDE»

M arine Le Pen a réussi sonpari : elle a placé son par-ti, le Front national, en

tête des élections européennes.Jusqu’alors, celles-ci n’avaientjamaisétédebonscruspourcepar-ti, mis à part en 1984 où, avec 11%des voix, le FN avait fait irruptionsur le devant de la scène politiquehexagonale.

Depuisdesmois,MmeLePenpro-nostiquait que le FN allait devenirle «premier parti de France». Unefaçondefixerunobjectifàsestrou-pes et de mobiliser son électoratpotentiel. La méthode a marché.Avec24,95%dessuffrages,elles’of-fre le scalpde l’UMP (20,79%) et duPS,loinderrière(13,98%).LeFNarri-ve en tête dans cinq circonscrip-tions sur huit, avec des pointesdans ses zones de forces du Nord-Ouest (33,61%), de l’Est (28,96%) etduSud-Est (28,18%).

«Avecce résultat,onvaconstrui-re les victoires de demain. C’est unsocle. Une nouvelle bipolarisationapparaît: le FN contre l’UMPS. C’estune recomposition de la vie politi-que, déclareMme Le Pen auMonde.Le clivage est désormais entre lesnationaux et les mondialistes.»Une phrase qu’elle répète depuisdes années, comme un mantra.Pour la présidente du FN, «un bar-rage a sauté. La diabolisation, c’estfini. On va parler politique, desgrandschoixpour la France».

«Quandondépasse20%dessuf-frages, on passe une étape. Surtoutquandcela se fait contre l’ensembledes partis», avance aussi FlorianPhilippot, numéro deux du FN.

MmeLe Pen veut pousser au maxi-mum son avantage et mettre lapression sans discontinuer sur lespartis de gouvernement. De l’exé-cutif, elle exige la dissolution etl’instauration de la proportionnel-le. De l’UMP, elle n’attend qu’unechose, sa dislocation, pour devenirhégémonique dans l’opposition.«Onassisteàun rejet globaldu sys-tème.C’estuneespècede révolutionpatriotique», estime-t-elleencore.

Entoutcas,MmeLePenabordelesprochaines échéances en positionde force. Les régionales, un scrutinplutôt favorable au FN, pourraientvoir se parachever une recomposi-tionde la droite avecuneUMPqui,sous la pression, pourrait multi-plier les accords avec le parti lepé-niste.Etnepassurvivreà sescoupsde boutoir. Mais le véritable objec-tif de Marine Le Pen, c’est 2017. Etl’arrivée au pouvoir. Les frontistesen sont persuadés: la conquête del’Elyséeest désormais«possible».

«Avec 25%, c’est un vote d’adhé-sion que l’on voit ce soir, affirmeMarine Le Pen. Surtout avec nospositions très tranchées sur lessujets européens. Pour faire un telscore, l’on a dû prendre à droitemais aussi à gauche.» Selon Ipsos-Steria, la formation de MarineLePen a su convaincre non seule-ment les jeunesdemoinsde 35 ans– 30% de ceux d’entre eux qui ontvoté ont donné leur voix au FN –mais,surtout,l’électoratpopulaire.Dimanche, 38% des employés et43% des ouvriers lui ont apportéleurs suffrages. La gauche, sur cequi constitue historiquement son

cœur de cible, est laminée: seule-ment 8% des ouvriers et 16% desemployésontvotéPS.

Cettevictoiresansappel,c’estengrande partie àMarine Le Pen queleparti d’extrêmedroite la doit. En2009, le FNréalisait àpeineunpeu

plus de 6% des voix. Certains ana-lystes le donnaient pour mort. EtMmeLePensemblaitbienseulelors-qu’elle nous assurait que ces résul-tatsmarquaient«le retourduFN».

Que s’est-il passé? Commentexpliquer qu’en cinq ans un partimoribond rassemble un quart des

suffrages? «Le contexte a changé.On avait raison trop tôt, et les faitsontrejointcequ’ondisait,ditMmeLePen.Surtout,noussommesdevenusun parti de gouvernement qui n’apas lesmêmesexigencesquequandil étaitunparti decontestation.»

Lastratégiedite«dedédiabolisa-tion» a joué un rôle de premierordredans lamontée électorale duFN. Car,mêmesi le programmeduparti n’a pratiquement pas bougédepuisl’accessiondeMarineLePenà la tête de celui-ci en 2011, l’accentmis sur les problématiques écono-miques et sociales, le verbemoinshaut,également,deMmeLePen,ontrassuréunepartiedesélecteurs.

Elle-mêmeasuchanger,d’abordphysiquement lorsqu’il s’est agi denaîtremédiatiquement,maisaussisur le fond. Elle a beaucoup tra-vaillé. «Elle a su prendre de la hau-teur par rapport au début. Elle agagné en sens politique. Elle s’est

rendu compte que, pour arriver aupouvoir, il fallait certes séduire,mais surtout convaincre», raconteun proche. Un autre dirigeant nelésinepas:«Ellevit sonrôle commeun sacerdoce. Elle est très exigeanteavecelle-même.»

Maislepointessentielpourcom-prendre les résultats de dimanchereste le discours économique duFN.Depuis2011,MmeLePennecessede marteler son message de luttecontre lamondialisationéconomi-queetsesinjustices, incarnéeselonelle par l’Union européenne. Elle aaussi fait de l’euro un épouvantail,responsable de tous les malheurséconomiquesde la France.

Derrière ces évolutions, on nepeut ignorer le rôle que tient Flo-rianPhilippot.«Ilest incontestable-mentefficaceet contribueà sanou-velle image. Sa stratégie axée surl’économie marche», souligne undirigeantFN,quipourtantn’estpas

un proche de l’énarque. Le princi-pal intéresséseborneàreconnaîtrequ’ils sont «très proches» et qu’ilspartagent«lamêmevision».

Il n’en demeure pas moins quece score historique ne règle pastous les problèmes pour Mme LePen. Quoi qu’en disent ses diri-geants, le FN manque encore decadres locaux qui sont autant derelais, sur le terrain, pour diffuserles idéesduparti.Mêmesi le retardcommence à être comblé grâce àl’élection de plusieurs centainesd’élus dans les conseils munici-paux enmars. Et, si la victoire auxeuropéennes est impressionnante–pourlapremièrefoisdansl’histoi-redelaVeRépublique,unpartid’ex-trême droite arrive en tête à uneélection–,ellerisqued’êtrepeuopé-rante. Le FN n’est pas sûr de pou-voir constituerungroupeauParle-ment, fautedepartenairesélus. p

AbelMestre

«Pourfaireuntelscore,onadûprendreàdroite

maisaussiàgauche»Marine Le Pen

présidente du Front national

MarineLePenfranchitunnouveaupalierLaprésidenteduFNvoit,dans lapremièreplacedesonparti, le signed’unerecompositionpolitique

«Sivousnegueulezquechezvous,çanesertàrien»Reportage

MarseilleCorrespondance

Dimanchesoir, le dépouillementdubureau 1333, àMarseille, n’apasduré longtemps. A 20heures,le président et ses assesseurs–deuxmilitantsUMPet un éluFrontnational – se sont assis pourcompter les 180bulletins conte-nusdans l’urne. Le tauxdepartici-

pationvient de s’arrêter à 12,90%.L’undespires scores deMarseillepour ce bureaudu 13earrondisse-ment où, aupremier tourde laprésidentiellede 2012, prèsde70%des inscrits étaient venusvoter, plaçant FrançoisHollandetrès largement en tête.

Deuxansplus tard, VincentPeillonet le PS arrivent toujourspremiers.Mais, dans ce scrutineuropéen, l’ancienministredel’éducation récolte 42 voix… sur1395 possibles. Guèreplus queJean-Marie Le Pen, tête de liste FNpour le Sud-Est, ou l’UMPRenaudMuselier, pourtant ancienpre-mier adjoint de la ville (respective-ment 34 et 33 voix). Un recul cin-glant et généralisé.

«Les européennes, ici, personnen’y comprend rien», s’excusepres-queAbderahmane, 70ans, dont«trente-sixpassés dans les hydro-carbures». Canne enmain, lunet-tesnoires, cet ouvrier retraité «à900euros parmois» est venuvoter «pour l’améliorationduquartier». «Ces arrondissementssont les rebutsdeMarseille, souf-fle-t-il, désabusé.Onnousa aban-donnés et les jeunes ne croient plusauxpolitiques.»

Le 1333 est installé dansunejolie école primaire, havre cernépar Les Lauriers et Les Cèdres,deuxcités déglinguéesdesquar-tiers norddeMarseille.Quelquespropriétairesde villas complètentl’électoratde cette zonepréca-risée. En ce dimanche, sur la ruequimèneaubureaude vote, un«chouf» fait le piedde grue tousles cinquantemètres.Quatre oucinqguetteurs, symboles immobi-les, signalent les points de ventededrogue et alertent le quartier à

l’approchedes «képis».Enmars, pour les élections

municipales, le scrutinétait électri-que.Auboutdedeux tours tendus,le 7esecteur, regroupant les 13e et14earrondissements, s’est donnéau frontisteStéphaneRavier. Le1333, lui, a résistéà lapousséeFN:l’ex-présidentde l’OMPapeDioufya réussiunde sesmeilleurs sco-reset lePSyest sorti en tête.

Ce jour-là, Ali, 41 ans, 3 enfants,avait voté Front de gauche. Com-meaujourd’hui.«Parce que je suisunouvrier et que ce parti est leseul qui prend en comptenotresituation.Moi, je travaille septjours sur sept et je n’ai pas de quoirefairemesdents», assure-t-il enmontrant son souriredévasté. En2012, Ali a cru enHollande.Main-tenant, il s’en «mange les doigts».

L’Europe? Il la voit «tous les jourssur les chantiers». «Je croise desgens qui ne parlentmêmepasfrançais…On les fait venir ici alorsquenos jeunes sont tous au chô-mage», lance-t-il, incrédule.

Ce dimanche, le tic-tacde l’hor-logemuralemeuble les longsmoments sans électeur. Entre lestrois bénévoles, l’ambiance restecordiale.«Et cette fois, les socialis-tes n’ont envoyépersonne», seréjouit, étonné,Dany Lamy,

adjointd’arrondissementFNà lasécurité.«Onne vapas sementir,nousn’avonspas fait campagne,concèdeStéphaneMari, le nou-veauprésidentdu groupePS auconseilmunicipal.Nous sommesencoreKOdebout et nosmilitants,pasplus que les élus, ne se sontinvestis.»

Au 1333, unpère, unemère etleur fils s’emportentdevant l’ali-gnement interminable desbulle-tins des 23 listes. Sur la table quidéborde, ils ne trouventpas celuidu Frontnational. Jonathan, lefils, 28 ans, porte le tee-shirt d’unjeuvidéo– Sniper Elite V2 –dontle logo ressemble à s’yméprendreàunaigle de laWehrmacht. Com-me sonpère, retraité, il vote FNpour sanctionner«le systèmeUMPS» et parce que «si vousnegueulez que chez vous, çane sert àrien». CommeMarine LePen, ilpenseque «sortir de l’euro relance-ra les exportations françaises». Enbacpro logistique, le jeunehom-meespèremêmeque « la fin de lamonnaieunique [l]’aideraà trou-ver un emploi».

«Les gens aiment l’Europe,mais ils n’aimentpas son fonction-nement», analyseMathieuDors-chener, le présidentdu bureau, ensepréparantun énième café.«Combien ils sont à Bruxelles etcombien ils gagnent?»,question-ne, en écho,Amar,mécanicienauchômage. Il a donné sa voix àMélenchonet tentéde convain-cre, en vain, sonbeau-frère et safemmede l’accompagner: «Maisils disent que voter ne leur rappor-te plus rien.» «C’est la conséquen-ce du clientélismeduPS local»,assène l’élu FNDanyLamy.p

Gilles Rof

«Cesarrondissementssontlesrebutsde

Marseille.Onnousaabandonnés,etles

jeunesnecroientplusauxpolitiques»Abderahmane, 70 ans

4 0123Mardi 27mai 2014

Page 5: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

européennes 2014

LeFNarriveentêtedans70%desdépartements

MetzEnvoyée spéciale

L esquelquescopainsdeFloran-ge (Moselle), réunis dans unesinistre petite salle de la ban-

lieue deMetz, se poussent du cou-de depuis un moment. «Tu croisqu’onpeuttoutdemêmeallerfélici-ter Edouard?», a demandé l’un.«Franchement, attends un peu…»,asoufflél’autre.Personnen’aenco-retouchéàlabièreetauxchips.Parla fenêtre, sur le parking, ils regar-dent tous Edouard Martin fumernerveusementsaénièmecigaretteet aucun n’ose aller congratuler lesyndicaliste d’Arcelor pour sonélectionauParlementeuropéen.

Depuis 19heures, les militantstéléphonentauQGde latêtedelis-tesocialistelesrésultatsdanslacir-conscription de l’Est, et ils sont sidésastreux pour la gauche qu’on

leur fait parfois répéter deux foispour être sûr.

EdouardMartin, lui, a vite com-pris : «C’est une déculottée sansnom!» Presque partout, dans les18départements de cette circons-criptionquiregroupeAlsace,Bour-gogne, Champagne-Ardenne, Lor-raine et Franche-Comté, le FNmenépar Florian Philippot a écra-sé ses adversaires avec 28,96%desvoix et quatre sièges au Parle-ment.L’UMP,conduiteparNadineMorano, sauve les meubles avec22,72% des suffrages et trois siè-ges,mais le PS, avec ses 13,23% desvoixn’auraqu’un seul élu.

Même à Florange, où l’ouvrier amené le combat pour la défensedes sidérurgistes lorrains, EdouardMartin n’arrive qu’en troisièmeposition (18,55%) derrière le FN(31,21%) et l’UMP (19,90%). A Gué-nange, l’ancienne cité-dortoir des

hauts fourneaux où il a grandi etoù lessocialistes tiennent lamairiedepuis trente-cinq ans, le FN l’em-porte de 13voix sur la gauche. Plusde 40% des ouvriers de l’Est ontvotéFN.«Lerésultatestcatastrophi-que», enrageEdouardMartin.

«Je leur ai pourtant dit, tout aulong dema campagne: ne confon-dez pas les votes. Quoi qu’il arrive,Hollande restera président», s’aga-ce-t-il, avant de constater : «Le FNs’est installé dans le paysage et cen’estplusseulementuncridecolère.J’aibienpeurque les idées frontistess’ancrent demanière radicale dansla têtedenos concitoyens.»

Maisilcombatencore:«Lesélec-teurs doivent prendre leur part deresponsabilité.Quandj’entendsFlo-rian Philippot dire qu’on peut fairecommelaGrande-Bretagneet vivresans l’euro, il faut que les gens com-prennentque lacroissanceanglaise

se paye sur le dos des ouvriers. Queceuxquisontallésàlapêchenepleu-rent pas quand le libéral Jean-Claude Juncker sera président de laCommission!»

Victoire «amère»Non loin de lui, Antoine Terrak,

unde ses ex-compagnonsde routed’Arcelor, résume son désespoir :«Les ouvriers qui ont voté Frontnational ont voté contre eux-mêmes…»Autour d’eux, on ne saitplus trop quoi dire pour expliquerla défaite cinglante. «La gauche nefait plus rêver, reconnaît le respon-sableCFDTdugroupe sidérurgiste,Patrick Auzanneau. On payed’avoir promis des choses qu’on nepouvaitpasteniretcesontnossym-pathisantsqui se sontabstenus.»

Jean-Pierre Masseret, le prési-dent(PS)duconseilrégionaldeLor-raine, écoute stoïquement une

vieille militante qui «ne com-prendplusce que fait là-hautFran-çois Hollande». Sur les tables, on aapporté du pain, du saucisson etdu fromage pour réconforter lesmaigres troupes qui regardent,assommées, les résultatss’égrenersur les écrans de télévision.

Quelques militants socialistes,qui avaient discrètement envisagéqu’Edouard Martin puisse laissersa place d’eurodéputé à CatherineTrautmann, la deuxièmede la listelaisséeautapismalgréquatreman-dats au Parlement européen, ontvite renoncé à leurs illusions: enAlsace, terre d’élection de l’ancien-nemaire de Strasbourg, le PS glanetout juste 10% des suffrages.MmeTrautmann, au téléphone, n’atentéaucunenégociation.Ladirec-tion nationale du PS non plus,laquelleavait choisi ce syndicalistecharismatiquecommetêtedeliste.

DeParis, oùelle suit les résultatsdanssarégionLorraine, laministrede la culture, Aurélie Filippetti, nedit pas autre chose : «On n’a paschoisi EdouardMartin pour le jetercomme un Kleenex après les résul-tats. Il a un parcours remarquableet aumoins, il y auraunouvrier auParlementeuropéen!»

En attendant, le nouvel eurodé-puté a la victoire «amère». Sur lesécransde télévision, il regardedis-traitement les anciens et les nou-veaux ministres de droite et degauche expliquer leur « choc»devant la pousséedu FNdans tou-te la France et celle des conserva-teurs dans toute l’Europe. Alors,l’ancienouvrier, lesyeuxrougisdefatigue, demande doucement: «Ilya27millionsdechômeursenEuro-pe. Que veulent-ils, ceux qui sontlà-haut? La guerre?»p

RaphaëlleBacqué

UMP François Fillon, au siège de sonmicroparti, à Paris, dimanche soir. Arrivé deuxième, avec 20,79%,l’UMP enverra 20 représentants au Parlement européen. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE/FRENCH-POLITICS POUR «LE MONDE»

PS Le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis. Le PS obtient sonplus faiblescore aux européennes (13,98%) et n’aura que 13sièges à Strasbourg. M. AWAAD/IP3 POUR «LE MONDE»

LE FRONTNATIONALest l’incon-testable vainqueurde ces élec-tions européennes. Signemanifes-te de cette spectaculairepercée, lenombrededépartementsoù ilarrive en tête: 71 sur 101. Le partid’extrêmedroite réalise sonmeilleur score dans l’Aisne, avec40,02%des suffrages. Viennentensuite le Pas-de-Calais (38,87%),l’Oise (38,22%), la Somme (37,15%),leVaucluse (36,42%), les Pyrénées-Orientales (35,23%) et le Var(34,96%). Autantde zones tradi-tionnellesoù il réalise habituelle-ment sesmeilleurs résultats.

Il franchit encore la barre des30%dans 18autres départe-ments: Eure,Haute-Saône,Meu-se, Ardennes, Alpes-Maritimes,Haute-Marne,Gard,Nord, Bou-ches-du-Rhône,Aube, Vosges, Yon-ne,Moselle, Aude, Tarn-et-Garon-ne,Orne, TerritoiredeBelfort,Haut-Rhin. Seuls 23départementslui accordentmoins de 20%dessuffrages: Landes, Puy-de-Dôme,Corrèze,Deux-Sèvres, Cantal,Mai-ne-et-Loire,Aveyron, Lot,Mayen-ne, Yvelines, Côtes-d’Armor, Pyré-nées-Atlantiques,Val-de-Marne,Loire-Atlantique, Ille-et-Vilaine,Finistère,Guyane, Réunion,Hauts-de-Seine, Paris, Guadeloupe,Mayotte,Martinique.

24 eurodéputés frontistesEn recueillant 24,95%des suf-

frages auniveaunational, ilmulti-pliepratiquementpar quatre sonscorede 2009 (6,34%). Il envoie24représentants auParlementeuropéen, soit huit plus que lorsde la précédente législature.Compte tenuduniveauélevéd’abstention (56,84%), il ne retrou-vepas, toutefois, le nombredevoixdeMarine LePen aupremier

tourde la présidentielle: 4701051voix contre6421426, soit unpeuplusde 1,7millionde voixd’écart.

Le FN arrive en tête dans cinqdes grandes circonscriptions:Nord-Ouest (33,61%, contre10,18% en 2009), Est (28,96%contre 7,57%), Sud-Est (28,18%,contre8,49%), Sud-Ouest (24,71%contre 5,94%),Massif central-Cen-tre (24,18%contre 5,12%). Il estdevancépar l’UMPdans l’Ouest(19,30%contre 3,06%) et en Ile-de-France (17,31% contre 4,40%), etrecueille 10,24%des suffrages enoutre-mer, où il se classe enqua-trièmeposition alors qu’il n’avaitpasprésentéde liste en 2009.

A l’occasionde ce scrutineuro-péen, le parti d’extrêmedroitedevient la première force électora-ledans 16régions administrativesdemétropole sur 22. Il dépasse labarredes 30%enPicardie(38,39%),Nord-Pas-de-Calais(35,15%), Provence-Alpes-Côte-d’Azur (33,21%), Languedoc-Rous-sillon (31,47%), Champagne-Arden-ne (31,32%),Haute-Normandie(31,24%), Lorraine (30,53%).

Leparti lepéniste obtient plusde 30%dans 40villes de plus de30000habitants. Dans cinqd’en-tre elles, il franchitmême le seuilde40%des suffrages exprimés:Marignane (49,33%), Liévin(43,30%),Wattrelos (42,71%), Fré-jus (41,96%), Vitrolles (40,38%).C’est à Paris qu’il réalise sonplusfaible score dansuneville de plusde 30000habitants enmétropo-le, avec9,31%des suffrages expri-més. Suivent Rennes (9,35%), Issy-les-Moulineaux (9,67%), Boulo-gne-Billancourt (9,83%), Nantes(10,09%), Neuilly-sur-Seine(10,26%).p

PatrickRoger

Pyrénées-Atlantiques

Pyrénées-Orientales

Landes

Gironde

Haute-Corse

Corse-du-Sud

Dordogne

Loire-Atlantique

Ille-et-Vilaine

Vendée

Charente-Maritime

Charente

Deux-Sèvres

Vienne

Corrèze

Haute-Vienne

Creuse

Maine-et-Loire

Côtes-d'Armor

Morbihan

Finistère

Manche Calvados

Orne

MayenneSarthe

Loiret

Cher

Indre

Indre-et-Loire

Loir-et-Cher

Yonne

Côte-d'Or

Nièvre

Jura

Doubs

Vosges

MeuseMoselle

Marne

Aube Haute-Marne

ArdennesAisne

Hauts-de-Seine

Paris

Seine-Saint-Denis

Val-de-Marne

Oise

Eure

SommeSeine-

Maritime

Pas-de-Calais

Nord

Meurthe-et-Moselle

Haut-Rhin

Bas-Rhin

Territoirede Belfort

Haute-Saône

Saône-et-Loire

Eure-et-Loir

Hautes-Pyrénées Ariège

Gers

Lot

Aveyron

TarnHérault

Gard

Var

Vaucluse

Hautes-Alpes

Alpes-de-Haute-Provence Alpes-

MaritimesBouches-du-Rhône

Lozère

CantalHaute-Loire

Puy-de-DômeLoire

Allier

AinRhône

Haute-Savoie

SavoieIsère

DrômeArdèche

Tarn-et-Garonne

Aude

Haute-Garonne

Lot-et-Garonne

1

1-Val-d'Oise2-Yvelines3-Essonne4-Seine-et-Marne

2

34

Guadeloupe

Guyane

Martinique

La Réunion

Mayotte

Le Front national arriveen première position

Le Front national n’arrive pasen première position

Le Front national arrive en première positionavec plus de 30% des suffrages exprimés

SOURCE : LE MONDE ; MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR

Ledésespoird’EdouardMartin:«Unedéculottéesansnom!»Dans lacirconscriptionEst, leFNarrivenettemententête, avec28,96%.LePSest reléguéentroisièmeposition

50123Mardi 27mai 2014

Page 6: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

L’échecdesécologistesrelancelesdébatssurleurlignepolitique

Unnouvel échec pour le Front de gauche

J e regarde les choses en face», arépété François Hollande à sesconseillers,aveclesquelsilapas-

sélasoiréedanssonbureau,àl’Ely-sée. Le président, qui avait effec-tué dimanche 25mai en voiturel’aller-retour à Tulle, comme à labelle époque où il était premiersecrétaire du PS, celle où il sentaitencore le pays, n’a pu que se ren-dreà l’évidence:«C’estunchoc,unséisme», a dû concéder le premierministre Manuel Valls, selon deséléments de langage calés un peuplus tôt, par téléphone, avec lechefde l'Etat.

Sur l’échelle de Richter desgifles électorales subies par le hol-landisme,cettedeuxièmecatastro-phe enmoins de deuxmois a toutde la réplique sismique. «C’est

durable», soupire un conseillerministériel atterré.

Si la déroute aux municipalesavaitfaitvacillersursesbasesloca-leslaformationmajoritaireattein-te dans ses fondations mêmes, ledésastreeuropéen,surleplansym-bolique,serévèleplusdévastateurencore. L’onnesait, au fond, cequiest pire : d’atterrir en troisièmeposition,plusdedixpointsderriè-re le Front national qui, fort de24,95%des voix, remportepour lapremière fois un scrutin nationalen France. De pointer à six lon-gueurs derrière l’UMP, quirecueille 20,79% des voix. Ou deplonger, avec 13,98% des suffra-ges, sous la ligne de flottaison deseuropéennes de 1994 qui avaitvalu à Michel Rocard, premier

secrétaire de l’époque, de coulercorps et biens.

Les socialistes sont donc parve-nus à faire encoremoins bien queleur score déplorable de 2009,quand ils avaient, quelques moisaprès leur sinistre congrès deReims, obtenu 16,48%. A l’époque,ilsavaientpâti,outredeleursguer-res intestines, de lapercéedeséco-logistes conduits par Dany Cohn-Bendit, qui les avaient talonnésdepeu avec 16,28%. Ils ne pourrontpas, cette fois, se camouflerderriè-recetteexplication,puisquelesco-re des listes EELV est presque divi-sé par deux, à 8,91%.

Finconnaisseurdesacarteélec-torale, le chef de l’Etat pourraapprécier à leur justevaleur l’indi-gence des scores obtenus par cer-

tainesfiguresduparti,commeVin-cent Peillon, qui plafonne dans leSud-Est. Ou dans des bastionssocialistes historiques, comme leNord-Ouest. Même l’emblémati-que syndicaliste Edouard Martin,dans l’Est, peine à s’extirper de cetétiage.

Pasde changement de capOù sont passés les électeurs de

gauche? Avec un Front de gaucheà 6,34% et une listeNouvelleDon-nequiatteintles2,9%, le totalde lagauche s’avère famélique, qui pla-fonne à 32,1%. Deux ans aprèsl’électiondeFrançoisHollande,cet-te donnée est particulièrementinquiétante, qui ne devrait pasmanquer de relancer le débatentre camarades sur le candidat

idoine pour 2017, et son mode dedésignation.

Plus fragilisé que jamais sur lascènenationale, leprésidentsepré-sente aussi en position d’extrêmefaiblesse sur le théâtre européen,alors qu’il est attendu à Bruxelles,mardi 27mai, pour y retrouverchefsd’Etatetdegouvernementdel’Unioneuropéenne.Pourseprépa-rer auxprochaines étapes qui s’an-noncentpolitiquementagitées, il aréuni à l’Elysée, lundi aux premiè-res heures du jour, outreManuelValls, Laurent Fabius, Sté-phane Le Foll, Bernard Cazeneuve,Michel Sapin et Harlem Désir afind’évoquer«ladimensioneuropéen-ne»dece cataclysmeélectoral.

Le message : « le phénomèneobservé en France n’est pas un cas

isolé, le populisme progresse danstous les Etats européens», indi-que-t-on à l’Elysée, où l’on affirmeque « le rôle du chef de l'Etat est defaire prendre conscience à l’EuropeetauxEuropéensqu’il faut changerles choses».

L’exécutif, donc, décline touteresponsabilité et s’est retranché, àl’image deM.Valls dimanche soir,derrière le «profond scepticisme»,la «crise de confiance» et la «colè-re» à l’égardde l’Europe.

Force est de constater que c’esttout autant son action qui se trou-ve ainsi sévèrement sanctionnée.Etque,malgrésesefforts, rienn’yafait. Ni l’activisme du premierministre, qui aura multiplié lesmeetingscesdeuxdernièressemai-nes. Ni la forte implication de sesministres, censée mobiliser « lecœurdel’électoratPS»,danslacam-pagne européenne, contrairementàcequis’étaitpratiquépendantcel-le des municipales. Ni même lesmesuresfiscalesenfaveurdesplusmodestes,annoncéesparlegouver-nementcesderniers jours.Commesi tout effort de l’exécutif se révé-lait, immanquablement,vain.

Que peut faire le président? Ilvient de préciser son inflexionsociale-libérale avec le «pacte deresponsabilité», de changer sonpremierministreetsongouverne-ment,deremanier leParti socialis-te et son équipe à l’Elysée. Il ne luireste plus grand-chose. «Il faut denouvellesbaissesd’impôts,notam-ment de l’impôt sur le revenu», apréconisé M.Valls, lundi matinsur RTL. De changement de cap, iln’y aurapas. «Je ne veuxpas chan-ger cette feuille de route», a campéM.Valls,quiprécisequ’«il fautquele quinquennat aille à son terme».Comme si la chose n’allait désor-mais plus de soi.p

DavidRevaultd’AllonnesetThomasWieder

AFORCEDESERÉPÉTERqu’ils ontfait un «bon score» auxeuropéen-nes, dimanche25mai, peut-êtreque les écologistes finirontpar lecroire. Ils ont eubeauapplaudirleurs résultats sur les plateauxtélé, leur enthousiasmea été rat-trapépar la réalité des chiffres etun scorede8,91%. EELV s’en sortcertesmieuxque le Front de gau-chemaisne terminequ’en cin-quièmeposition, derrière le FN,l’UMP, le PS et les centristes. Bienloindes 16,28%desvoixde 2009et desquatorzedéputésquiavaient alors décroché leur ticketpour le Parlement européen.

SansDanielCohn-Bendit com-mechefde file, ilsne sontplusquesixpourcettenouvellemandatu-re: PascalDuranden Ile-de-France,JoséBovédans leSud-Ouest, Yan-nick Jadotdans l’Ouest,Karima

Delli dans leNord-OuestetMichèleRivasidans leSud-Est. Ensecondeposition, en Ile-de-France,Eva Jolyest rééluede justesse.

Enrevanche, SandrineBélierneparvientpas à sauver sonsiègedans l’Est.«Si on fait entre8%et9%, ce seranotremeilleur scoreaprès2009», tentait d’expliquerM.Jadotavant l’annoncedes résul-

tats. L’ex-patronnedesVerts, Céci-leDuflot, a, elle, fait part d’unsen-timent«très partagéd’un 21avrileuropéen». «On fait unbon scoredansune situationdéprimante»,juge-t-elle. Eva Joly, elle, a évoqué,àunmomentoùellen’était passûred’être réélue,un résultat«excellent, surtoutdans l’effondre-mentde la gauche».

Conscientsqu’ils ne referaientpas le coupde 2009, les écologis-tesmisaient toutdemêmesurunscore à deuxchiffres. Jean-Vin-cent Placé était d’ailleursnette-mentmoinspositif que la plupartde ses camarades.«C’est unedéfai-te électorale,a jugé le présidentdugroupeécologiste auSénat.Noussouhaitions faireplus de 10%et onn’y est pas.»Unavis partagéparChristopheRossignol, conseillerrégional : «Evidemmentque cen’estpasunbon score: on estmêmeendessousdes résultatsdesmunicipales. La dynamiquequ’ona créée il y adeuxmois, on l’a tota-lementperdue.»

Dans la soirée, certainsn’hési-taientpas à critiquer la stratégiede campagne.«Onaurait dûêtrepluspositifs, soupire la sénatriceduVal-de-MarneEstherBenbassa.

Onn’a pas été très lisibles. Enpar-lantdu traité transatlatique, on anuià la clartédumessage.»Trèsactive sur laprocréationmédicale-mentassistée, la sénatricen’oubliepasunpetit tacle pourJoséBové à qui elle s’est récem-mentopposée. «Labase est pour,Bové est contre, il faudrait accor-dernos violons…», souligne-t-elle.

«Stratégiemortifère»PoursoncollègueRonanDan-

tec, les écologistesontaussi étéconcurrencéspar laprésencedeNouvelleDonne, le toutnouveaupartidePierreLarrouturou, quiobtient 2,9%desvoix.«Ce sont lesmêmesréseaux, juge le sénateurde la Loire-Atlantique.Si onagrègeleur scoreet le nôtre, il y aunespa-cedemêmeniveauque lePS.»

Une choseest sûre: EELVn’a

pas réussi à séduire les déçus deFrançoisHollande, comme ilsavaient su rallier des électeurssocialistes en 2009. «Quand le PSest faible, les gens votent pournousmais avecnotre stratégiemortifère, onn’a pas su êtreunealternative», critiqueChristopheRossignol.

Commelui, lespartisansdumaintienaugouvernementnemanquerontpasde rouvrir leshos-tilités.«Onsavait les électeurs éco-logistesmassivementpour la parti-cipationaugouvernement. La sor-tien’a crééaucunélanélectoral», aégalementdéploré surTwitterFrançoisdeRugy, coprésidentdugroupeécologisteà l’Assembléenationale.CécileDuflot, elle, restefermesur sespositions.«Çaaétécompris», assure l’ex-ministre.p

RaphaëlleBesseDesmoulières

Front de gauche Jean-LucMélenchon sur le plateau de France 2, dimanche soir. La formation a obtenu6,34%des suffrages, un score comparable à celui qu’il enregistrait en 2009 (6,05%). BRUNO LEVY POUR «LE MONDE»

EELV Yannick Jadot et Emmanuelle Cosse dans les locaux de France Télévisions.Avec 8,91%des voix, contre 16,28% en 2009, le parti perd huit eurodéputés. BRUNO LEVY POUR «LE MONDE»

LePartisocialistedenouveauconfrontéàsesdivisionsinternes

Grossedéception pour le Frontdegauchequi, avec 6,34%desvoix, ne progresse quasimentpas par rapport à 2009. Ils neseront plus que trois députéseuropéens (contre quatre aupa-ravant) : Jean-LucMélenchondans leSud-Ouest,Marie-Christi-neVergiat dans le Sud-Est etPatrick LeHyaric en Ile-de-Fran-

ce. Dans le Nord-Ouest, JackyHénin, lui, ne parvient pas à sau-ver son siège. Cinq ans après sacréation, la coalition de la gau-che radicale paie ses divisionsinternes héritées desmunicipa-les. Dans unebrève allocution,M.Mélenchon a reconnu«quel-ques erreurs»mais assuré que leFront de gauche resterait «uni».

FrançoisHollandeplusfragiliséquejamaisLechefde l’Etat, qui se rendàBruxellesmardipourunsommeteuropéen, aprésidéuneréuniondecrise lundimatinà l’Elysée

VENDREDI, ILS ESPÉRAIENTenco-re être la «surprise» du scrutin.Ils l’ont bel et bien été,mais pasau sens où ils l’entendaient.Deuxmois après la «gifle» desmunici-pales, les socialistes ont enregis-tré unenouvelle défaitehistori-que, dimanche25mai, aux euro-péennes.

Avec seulement 13,98%des suf-frages, les listes PS-PRG terminenttroisièmeet fontmoins bienqu’auxélections catastrophiquesde 1994 lorsqueMichel Rocardn’avait atteint que 14,49%.Grandperdantdu vote, le PS se fait dis-tancerde onze points par le Frontnational et n’envoieque treizeeurodéputés à Strasbourg, contrequatorzeen 2009, déjà unmau-vais cru.

«Un choc, un séisme», a com-mentédimanche soir le premierministreManuelValls. «Un joursombrepour la démocratie, l’Euro-

pe et la France», a ajouté le pre-mier secrétaireduPS, Jean-Chris-topheCambadélis.

Face à cettenouvelle déroute,les socialistes sont apparusdésem-parés au siège duPS, ruede Sol-férino.Même s’ils savaient que labataille serait âpre, ils espéraientque les changementsopérésdepuis les électionsmunicipalesauraientun effet.Mais rienn’y afait. «Une fois deplus, la gaucheest restée à lamaison», constate lesénateurde ParisDavidAssouli-ne.

Pour le députéChristianPaul(Nièvre),«onn’est plus dans ladéception,mais dans le désaveu».«La crise avecnotre électorat esttrès grave, peut-êtremême irréver-sible, se désoleunmembrede ladirection.Notrepays ne sait plusoù il en est ni où il va, et nous som-mes incapables de répondre à cesquestions.»

Après ce «21-avril» européenet faute d’électrochoc réel, lessocialistes redoutentdéjàd’autres défaites aux régionales etsurtout à la présidentielle de 2017.Mais une fois encore, ils s’apprê-tent à se diviser sur les questionsde l’après et du comment.Dèsdimanche soir, cette divisionacommencéà s’exprimer.

«Changer de politique»D’uncôté, 21parlementairesde

lamajoritéqui se disent«réforma-teurs»ontmis engarde contre latentationde vouloir«raviver ledébat sur la politique économi-que»menéepar le gouvernementet par FrançoisHollande.Cetteaile droite duPS entendaucontraire«accélérer» les réformesinstituéespar le pacte de respon-sabilité, etmêmeallerplus loin ets’attaquerau systèmede retraitesqualifié de «rigidité structurelle».

Face à elle, l’aile gauche socialis-te a somméaucontraire le chefdel’Etat de tout changer. «Il faut unnouvel accordavec tous les partisde gauche, unnouveauprogram-meéconomique et unnouveaupremierministre pour l’incarner»,a estimé la sénatrice parisienneMarie-Noëlle Lienemann.

Entre les deux, lemarais socia-liste à l’Assembléenationale seprépare à connaître de fortsremous. Les 41députés qui se sontabstenus fin avril lors duvote dupland’économiede 50milliardsd’euros fourbissent leurs armesenperspectivedes prochainsdébats budgétaires.«On va expri-mernotre souverainetédans lessemainesqui viennent, prévientM.Paul, unde leurs chefs de file.Unchangementd’équipen’apassuffi, la responsabilité duprési-dentmaintenant est doncde chan-ger de politique.»

Mêmelesmoins radicaux, com-me ledéputéMatthias Fekl (Lot-et-Garonne), donnentde la voix:«Faire des économies, c’est bien,mais cela ne fait pas unprojet desociété.Onne peut pas passer lestrois ans qui viennent en parlantuniquementdupacte de responsa-bilité», estime-t-il.

Pour l’instant, l’état-majorsocialiste reste intransigeant.«L’inflexion sociale est engagéedepuis lesmunicipales.Nousavons simplementbesoindetempspour obtenir des résultats»,évacue le député ChristopheBor-gel (Haute-Garonne).Dimanchesoir, Jean-ChristopheCambadélisa souhaité que l’ensemblede lagauche, écologistes et communis-tes compris,«retrouve le cheminde l’unité». Une véritable gageurealors que le PS seul n’est toujourspas au clair avec lui-même.p

BastienBonnefous

6 0123Mardi 27mai 2014

Page 7: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

RALPHLAUREN.COM/RICKYPARIS ST-BARTHÉLÉMY CANNES

Page 8: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

L ’UMP retombe dans un cli-mat de tension extrême. Leparti, qui espérait remporter

les élections européennes diman-che 25mai en devançant le Frontnational, amanqué son pari. Il n’apas réussi à tirer profit du rejet del’exécutif pour s’imposer, commecela avait été le cas auxmunicipa-les demars.

En obtenant seulement 20,8%des suffrages – loin de ses 27,88%de 2009–, il se retrouve distancéparl’extrêmedroitedeplusdequa-tre points. L’échec est cruel, puis-que l’UMP perd son statut de pre-mier parti d’opposition au profitdu FN. Les candidats frontistesdevancentceuxdedroitedanstou-tes les régions, excepté dansl’Ouest et en Ile-de-France.

Peuadeptedesremisesenques-tion personnelles, Jean-FrançoisCopé a tenté par tous les moyensderelativisersapropreresponsabi-lité dans la défaite de son parti.Appelantà«remettreenperspecti-ve» les résultats, le président del’UMP a voulu d’abord y voir une«exaspération très forte contre la

politique» conduite par FrançoisHollande. Cherchant à tout prix àfaire diversion, il a tenté de mas-quer l’échec de son camp endemandant aux observateursd’«additionner» le score de l’UMP«avec celui de l’UDI».

Mais les autres dirigeants duparti n’ont pas épargné M.Copé,misencausedans l’affaireBygma-lion, qui le voit soupçonnéd’avoirutilisé des fonds du parti au profitde ses amis. Le plus virulent resteFrançois Fillon, qui n’a toujours

pas digéré de s’être fait «voler» lavictoire lors de l’élection pour laprésidence du parti, fin 2012.Mâchoires serrées, l’ex-premierministre a réclamé la tête de sonmeilleur ennemi, en estimant quel’UMP a «maintenant besoin d’unchangementprofond».

«Cela n’est pas la première foisque je tire le signal d’alarme», ainsisté M.Fillon depuis le siègeparisien de sonmicro-parti, Forcerépublicaine. «L’UMP est atteintedans sa crédibilité et doit s’interro-ger sur les raisons de son échec.Son honneur est mis en cause»,a-t-il souligné, sévère.

D’autres responsables du partiont appelé à un changement dedirection. «L’UMP va avoir besoind’une profonde reconstruction», aaffirméLaurentWauquiez, regret-tant que « le climat des affaires»ait «pesé sur la mobilisation» del’électorat de droite, en allusion àl’affaireBygmalion.

Alain Juppé et Bruno Le Maireont égalementmis la pression surM.Copé, en réclamantune refontede l’UMP et une « transparence»

absolue sur les pratiques et la ges-tionduparti.

M.Copé sait qu’il est au pied dumur. Mais il défendra sa positionjusqu’au bout. Acculé, il se voitcontraint de faire des concessionsàsesrivaux.Cesderniersayantpré-vu de lancer une charge collective

contre lui mardi matin, lors d’unbureau politique qui s’annonceextrêmement tendu.

D’abord, ilestprêtà livrer latêtede son directeur de cabinet, Jérô-me Lavrilleux, honni par les fillo-nistes depuis la guerre fratricidede l’automne 2012 et particulière-ment visé dans l’affaire Bygma-lion. D’après plusieurs sources, cedernier doit profiter de son élec-

tion au Parlement européen,dimanche, pour interrompre sontravail auprès du numéro un duparti. «Copé a trouvé une bonneoccasion de couper la branchepourrie», observeun filloniste.

Pour sauver son poste, M.Copéa ensuite annoncé dimanche soirqu’il allait «proposer plusieurs ini-tiatives» lors du bureau politique.Selon nos informations, il va sug-gérer que l’ancien médiateur ducrédit, René Ricol, effectue unaudit sur le fonctionnement duparti pour «améliorer la gouver-nance enmatièrede procédures».

Sur l’affaire Bygmalion, le mai-re de Meaux (Seine-et-Marne) aprévu de porter plainte contreX.Déterminé à se faire passer pourune victime de ses collaborateurs,il souhaite aussi être entendu parles juges pour communiquer lesinformations dont il dispose danscedossier. Ces initiatives«visentàdesserrer l’étau autour de lui »,selonun copéiste.

Il n’est pas sûr que cela suffise àcalmer l’ardeur de ses opposants,déterminés à le déloger de la tête

du parti. «Copé ne peut pas resteren place, juge un filloniste. Soit iln’était pas au courant desmalver-sationsfinancièreset,danscecas, ilest incompétent. Soit il savait etdoitpayer.» « Il yaune telle cristal-lisation négative autour de Jean-François qu’il doit partir», trancheunex-ministre, fataliste.

En dehors du cas Copé, plu-sieurs ténors remettent en causela stratégie d’alliances du partigaulliste, en regrettant qu’il n’aitpas présenté des listes communesavec les centristes, comme en2009. «Si l’UMP avait fait une listecommune avec l’UDI, on seraitdevant le Front national», a ainsiobservé Roger Karoutchi. PourAlainJuppéetNathalieKosciusko-Morizet, la droite et le centre sontcondamnés à se rassembler pourcontrer l’émergence de l’extrêmedroite. «Recréons les bases d’unaccord entre droite et centre», aplaidé lemaire deBordeaux.

Ces différentes prises de posi-tionmettent en lumière les rivali-tés à droite, dans la perspective del’électionprésidentiellede2017.Leconstat est accablant pour lepartid’opposition,quisouffred’undéfi-citde leadership,peineàprésenterun projet d’alternance crédible, etse retrouve «balkanisé» avec plu-sieurs écuries présidentielles enson sein. «On est confronté à unrisque d’explosion ou d’implosionde l’UMP», résumeEricWoerth.

Dans ce contexte, les sarkozys-tes appellent au retour de leurchampion, qu’ils présentent enhommeprovidentiel.«Je souhaitele retourdeNicolas Sarkozyaupre-mier plan», a déclaré Brice Horte-feuxdimanchesoir, affirmantquel’ex-présidentétait«leseulrespon-sablepolitiqueenFranceàpouvoirfaire reculer le FN». Sa tribune surl’Europe, publiée trois jours avantlescrutin,n’apourtantpasréussiàfaire gagner l’UMP. Cela n’a paséchappé à ses rivaux. Un préten-dant à la primaire veut y voir lesigne que l’ex-président n’est pasle sauveur de la droite: «Si NicolasSarkozyétait la solution,sa tribuneaurait eu plus d’effet.»p

AlexandreLemarié

VOIX DE FEMMESUne série de rencontres, avec une lecture par une grande comédienne suivie d’un

entretien avec l’auteur mené par Jean Birnbaum, responsable du « Monde des livres »

Rendez-vous le lundi 2 juin à 20 heures à l’Odéon-Théâtre de l’Europeavec Chantal Thomas et Natalie Dessay autour de L’Echange des princesses

Diffusion sur France Culture le dimanche 8 juin à 21 heures dans « Théâtre & Cie »

0123

www.theâtre-odeon.eu

Avec10%desvoix, lescentristesveulentpesersurl’UMP

UMP Jean-François Copé a appelé à «remettre enperspective» les résultats, invitant les observateursà «additionner» le score de l’UMP «à celui de l’UDI». JEAN-CLAUDE COUTAUSSE/FRENCH-POLITICS POUR «LE MONDE»

UDI-MoDemMarielle de Sarnez, eurodéputéeMoDem, sur le plateau de France 2. En recueillant 9,90%des voix, le centre améliore ses résultats de façon significative par rapport à 2009. BRUNO LEVY POUR «LE MONDE»

Copéassure ne rien savoir«du tout» sur Bygmalion

LECENTRE a atteint sonobjectif.En flirtant avec les 10%des suffra-ges lors des élections européen-nesdimanche 25mai, l’Alternati-ve –nomde l’alliance entre l’UDIet leMoDem– améliorede façonsignificative ses résultats par rap-port à 2009. Il y a cinq ans, leMoDem,qui concourait seul,avait réalisé 8,5%des suffrages.Les centristes vont envoyer 7dépu-tés au Parlement européen.

«Nous sommes le quatrièmeparti de France», s’est ainsi félici-té Yves Jégo, le président par inté-rimde l’UDI, dimanche soir. «Pariréussi pour le centre! La décompo-sitionde l’UMP est enmarche et lePS, parti de gouvernement, fait unscore trèsmauvais. L’UDI-MoDemestune force centrale en émergen-ce, claire et sans arrière-pensée», aabondéMarielle de Sarnez, tête deliste en Ile-de-Franceet n˚2 du

MoDem.«L’objectif d’un score àdeux chiffres est atteint ce soir,moins dedix-huitmois après lacréationde l’UDI, alorsmêmequenous faisions face à l’europhobieambiante. C’est undébut, pas unefin», note pour sa part Jean-Chris-topheLagarde, députéde Seine-Saint-Denis.

Les deuxpartis du centre et ducentredroit se sont alliés àl’automne2013 dans la perspecti-vedes élections européennes. Ilsétaientpersuadésdepouvoirdéfendreunprojet profondé-mentpro-européen, face àun FNenpleine dynamique, unPS etuneUMPdivisés en interne surcettequestion.

Avec 10%des voix, ils estimentpouvoir compter ànouveaudanslepaysagepolitique. «Depuis cesoir, nous sommes cotés en bour-se», sourit ainsi undirigeant. Et

les appels dupiedde l’UMP, dèsdimanche semblent leurdonnerraison.Ainsi, Alain JuppémairedeBordeaux et fondateur del’UMPen 2002, a appelé à «recréerles bases d’unaccord entre droiteet centre».

«Leadership»Uneapprochequine laisse pas

insensible au centre,même sibeaucouppréfèrent temporiser.«Onva enparler entre nous. Ilfaut d’abord que l’UMPmette del’ordre entre ses dirigeants», esti-meM.Jégo. «L’UMPdoit analyserles raisonsde son échec.D’abord,l’incohérence sur la question euro-péenne. Ensuite, quandunepartiede l’UMP, commeLaurentWau-quiez, court après le FN, l’on voitque les Français préfèrent l’origi-nal à la copie», tacle encore ledéputédeSeine-et-Marne.

Certains à l’UMP, pourminimi-ser leur déconvenue, tentent d’ad-ditionner les scores de leurpartiavec ceuxdes centristes. Unemanœuvrequi agace Jean-Christo-pheLagarde: «Confondre l’UMPetl’UDIn’est ni souhaitableni accep-table.» «Nous souhaitonsunecoalitionentre le centre et la droiterépublicaine,mais nous refuse-rons la confusionqui nous a déjàconduits à la défaite. Dans cettecoalition, l’UDI-MoDemdoit sefixer pour ambitionde prendre leleadershipde l’opposition», avan-ce-t-il.

La questiondes rapports futursentreUMPet centre est évidem-ment celle de la présidentielle de2017. L’Alternative aura-t-elleuncandidat indépendantoupartici-pera-t-elle à unegrandeprimai-re? «Cela fait longtempsdéjà queje plaidepour uneprimaire large,

qui aille au-delà de l’UMP, unevraie compétitionpour choisir leleader de l’oppositionpour 2017. Etj’entends les appels d’Alain Juppéqui vont en ce sens», souligneYves Jégo. Et de conclure: «Il n’y apasde raisonque le championdeschampionsqui sortirait de cetteprimairene soit pas unmembrede l’UDI.»

Mariellede Sarnez, elle, veutcontinuerdans la voie de l’indé-pendancedu centre. «Le systèmepolitiquen’est pas satisfaisant, ilfaut reconstruire toutun systèmeet nous pouvons être unpivot decette reconstruction, juge la vice-présidenteduMoDem.Avec la cri-se duPS, des électeurs de gauchepeuvent être tentés par le centre.C’est pour cela qu’il faut rester surune ligne “centrale”.» p

AbelMestre(avecHélèneBekmezian)

LesrivauxdeM.Copéontprévudelancerunechargecollectivecontrelui,mardimatin, lorsd’unbureaupolitique

«Je demande que François Hol-lande prenne toutes les initiati-ves pour changer de politique»,a déclaré le président de l’UMPJean-François Copé, lundi26mai sur BFMTVet RMC.Interrogé sur les turbulencesinternes à l’UMPet sur l’affaireBygmalion,M.Copé a assuré nesavoir«rien du tout», n’avoir«jamais vu» de factures etn’avoir«pris aucune décision».

L’UMPdéfaite, lesortdeCopédevraitsedécidermardiEnobtenant20,8%dessuffrages, l’UMPperdsonstatutdepremierpartid’oppositionauprofitduFN

8 0123Mardi 27mai 2014

Page 9: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

90123Mardi 27mai 2014 européennes 2014

ESPACE GRAND LITIER SUR 500M2 (PARIS 15e)66 rue de la Convention, 01 40 59 02 10, ouvert 7j/7

M° Boucicaut, P. gratuit

ESPACE TOPPER TEMPUR (PARIS 12e)60 cours de Vincennes, 01 43 41 80 93, M° Nation

V O T R E B I E N - Ê T R E C O M M E N C E I C I

danS

lalim

itede

sstoc

ksdispon

ible.

www.topper.fr

Destockageavant changement de collection*

FRANCE*

ALLEMAGNE*

LUX.BELGIQUE

PAYS-BAS

DANEMARK

FINLANDESUÈDE

IRLANDE ROY.-UNI

ESTONIE

LITUANIE

LETTONIE

POLOGNE*

SLOVAQUIE*

R. TCHÈQUE

HONGRIE

ROUMANIE

BULGARIE*

GRÈCE*

CROATIESLOVÉNIE

ESPAGNE

ITALIE*PORTUGAL

AUTRICHE

MALTECHYPRE

500 km

Les principaux bataillons populistes

Score des partis d’extrême droiteet des partis europhobesen% des suffrages exprimés

SOURCE : PARLEMENT EUROPÉEN ;MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR

en nombre de sièges

* score en% obtenu en additionantles résultats de deux partis

Plus de 25%De 15% à 25%De 7% à 15%Moins de 7%

Parti d’extrême droiteou parti europhobearrivé en tête

Parti d’extrême droitesusceptible de formerun groupe parlementaireavec le FN

xx

Démocrates suédois

PVV

UKIP

Parti populaire danois

Front national

Ligue du Nord

Parti de la liberté (FPÖ)4

25dont 7 pour la Ligue du Nord

3

3

3

4

2

2

2

24

88

23

P aris-Londres-Copenhague.Tel est le trio gagnant de ladroiteextrêmeaprèslesélec-

tions européennes du 25mai. LeFront national, le UKIP et le Partipopulairedanois (DanskFolkepar-ti ; DF) arrivent en tête dans cha-cun de leur pays, provoquant unvéritable séisme. Marine Le Pendynamite le paysage politiquefrançais,toutcommeNigelFarage,le chef du UKIP, qui écrase lesconservateurs et devance les tra-vaillistes. AuDanemark, DF a cinqpoints d’avance sur les sociaux-démocrates au pouvoir. Ils sontl’image la plus visible de cettevague europhobe qui part à l’as-saut du Parlement européen pourle détruirede l’intérieur.

Quand ils ne sont pas premiers,les partis europhobes obtiennentdes scores importants en Autri-che,enHongrie,enSuèdeetenGrè-ce. En Italie, Beppe Grillo (21%) est

largement distancé par la liste duprésidentduconseildecentregau-che,MatteoRenzi(41%),quiatrem-pé sa légitimité démocratiquedanscescrutin.Maisl’anciencomi-que devrait envoyer une petitevingtaine de députés au Parle-ment européen.

L’extrême droite a cependantconnuquelquesdéceptionsélecto-rales qui empêchent la vague bru-ne de se transformer en tsunami.Aux Pays-Bas, l’allié privilégié deMarineLePen, lePartipourlaliber-

tédeGeertWilders,estenreculparrapportà2009.DemêmeàHelsin-ki, les Vrais Finlandais ne se clas-sent qu’en troisième position,alorsquecertainssondageslespla-çaient en tête. Enfin, à Bratislava,le Parti national slovaque n’a pasréussiàfaireélire lemoindreeuro-député,cequiposeraunproblèmeà Marine Le Pen pour constituersongrouped’extrêmedroite.

Cespartiseurophobesreprésen-teront plus de 140 députés, prèsd’un cinquième du Parlement.Mais ils auront bien dumal à s’en-tendre à Strasbourg et à Bruxelles.Ils représentent des tribus qui seméfient lesunes des autres.

A l’exception de Beppe Grillo,qui est inclassable, ils se ratta-chenttousàdestraditionsd’extrê-medroite,même s’ils veulent par-fois les faire oublier.

Les partis populistes scandina-vesessaientdegommer leurorigi-

ned’extrêmedroiteet récusent–àl’exception de la Suède, qui hésiteencore – une alliance avec le Frontnational. Ils ontdepuis longtempsopéré leur recentrage politiquequi les pousse à collaborer avecdes gouvernements dirigés pardes partis traditionnels, commeenFinlandeouauDanemark,dansla législatureprécédente.

Le Parti populaire danois n’ex-cluait pas, dimanche, de collabo-rer avec le gouvernement social-démocratedeHelleThorning-Sch-midt. Ils se sentent plus prochesdu UKIP de Nigel Farage que deMarine LePen.

LaprésidenteduFrontnationala tenté, elle aussi, de normaliserson parti pour le rendre plus pré-sentable. Elle a convaincu un plusgrand nombre d’électeurs.Mais laréputation sulfureuse du parti deJean-Marie Le Pen et ses proposantisémites continuent d’effrayerNigel Farage et les Scandinaves.

Ladernièretribuest jugéeinfré-quentable par les membres dugroupe de M.Farage comme parMme Le Pen. Elle regroupe des par-tisnéonazis,commeleJobbikhon-grois ou Aube dorée en Grèce, quienverront respectivement trois etdeux députés au Parlement euro-péen.

Un thème, en revanche, les ras-semble: la détestation de l’immi-gration. Leur cible première est laprésence d’étrangers extra-euro-péens. Geert Wilders a été jusqu’àpromettreà sespartisansde«s’oc-cuper» des «Marocains» présentsauxPays-Bas.LaLigueduNordita-lienne, le FPÖ autrichien, le Partipopulaire danois, les Vrais Finlan-dais, le Front national, sansmêmeparlerdu Jobbiketd’Aubedoréeserenvoient comme un écho cetteobsessionpartagée.

Seul le Mouvement 5 étoiles deBeppe Grillo semble pour l’heureépargné,mêmesi sonchefde fileasemblé être tenté de suivre cettepente. «Combien d’immigrés pou-vons-nous accueillir si un Italiensurhuitn’apaslesmoyensdeman-ger?», avait-il lancé aux sénateursde son parti qui voulaient suppri-mer le délit «d’immigration clan-destine» crééparunancienminis-tre de la Ligue duNord.Mais pourtous les autres partis europhobes,l’hostilité à l’islam est devenue levisage le plus visible de leur xéno-phobie.

La nouveauté de la campagnequi s’est achevée dimanche, c’estl’hostilité affichée envers l’immi-grationintra-européenneenprove-nance de nouveaux Etats mem-bres,commelesBulgaresetlesRou-mains.LeUKIPs’enestfaitunespé-cialité. «Vingt-six millions de per-sonnes enEurope cherchent du tra-vail. Et quels emplois veulent-ilsprendre?», interrogeaient ses affi-

chesdecampagne.Mais iln’estpasle seul à remettre en cause, d’unemanière ou d’une autre, la libertéde circulation dans le grand mar-ché européen, l’un des principauxacquisdelaconstructioneuropéen-ne.Avecd’autres, lePartipopulairedanoisa insisté,danssacampagne,sur les avantages sociaux accordésauxcitoyensde l’UE.

En période de vaches maigres,la tentation du repli sur soi et durejet de l’étranger est bien présen-te. Pourtant, la vague europhobeenregistrée le 25mai n’épouse pasles contoursde l’Europede lacrise.Elle frappe aussi bien des pays àl’économie compétitive et dyna-mique, comme le Danemark etl’Autriche, ou en pleine récupéra-

tion, comme le Royaume-Uni, quedesEtats frappésde langueuretenmal de réformes, comme la Fran-ce, ou éprouvés par la récession,comme laGrèce.

Inversement, des pays malme-nés par les politiques budgétairesrestrictivessont indemnesde toutpopulisme.C’est le casde l’Irlande,sortie il y a peu du plan d’aide, ouduPortugal.C’estaussivraide l’Es-pagne.Làaussi, lespartistradition-nellement dominants sont enrecul : le conservateur Parti popu-laire et le Parti socialiste ont attirémoins d’un électeur sur deuxquand, il yacinqans, ilsenavaientréuni huit sur dix. Mais la nou-veauté n’est pas venue d’unréflexe anti-européen ou anti-immigrés.Elleestvenuedesnatio-nalismes régionaux, exaspérésparlaquestiondustatutdelaCata-logne, de la gauche de la gauche etde la mouvance issue du mouve-mentdes «indignés».

La recomposition politiquen’est pas, fatalement, partout lefait de l’extrêmedroite.p

Cécile ChambraudetAlain Salles

Lespartiseurophobesreprésenteront

plusde140députés,soitprès

d’uncinquièmeduParlement

Lavagueeurophobeenregistrée

dimanche25main’épousepaslescontours

del’Europedelacrise

Dans les trois régions européen-nes travaillées par des tenta-tions indépendantistes, les élec-teurs ont profité du scrutin euro-péenpour s’exprimer. Dans laFlandre belge, où le scrutin étaitcouplé aux régionales et auxlégislatives, l’Alliance néo-fla-mande (NVA), le parti séparatis-te deBart DeWever, triomphe. Ilest en tête dans la quasi-totalitédes cantons flamands. Il auraitséduit de 30%à33%des élec-

teurs, ce quimarque une nouvel-le forte progression. En Catalo-gne, où le gouvernement localveut organiser un référendumd’autodétermination le 9novem-bre, le parti indépendantiste degauche Esquerra republicana deCatalunya (ERC) est arrivé entête. Avec 23,67%des voix, il amêmedevancé la coalition natio-nalisteCiU du président du gou-vernement régional ArturMas(21,86%). Plus radical, ERC ne

manquera pas de compliquer leprocessus très délicat enclen-ché parM.Mas, dans lamesureoù le gouvernement centralespagnol ne veut pas entendreparler d’un référendum.En Ecosse, enfin, où un référen-dumsur l’indépendance auralieu le 18septembre, le Partinational écossais a obtenu28,9%des voix, en dessous deses attentes et des 37%que luiprédisaient les sondages.

VagueeurophobesurleVieuxContinentUKIPauRoyaume-Uni, FrontnationalenFranceetPartipopulaireauDanemarkarrivententêtedans leurpays

Royaume-Uni Le Parti pour l’indépendance duRoyaume-Uni (UKIP) deNigel Farage est arrivé en tête avecplus de 27 %des voix. «Les gens ont enfin compris», s’est félicité le dirigeant antieuropéen. CARL COURT/AFP

DanemarkMortenMesserschmidt arrive au Parlement danois, à Copenhague, le 25mai.Sa formation, Le Parti populaire, est arrivé en tête du scrutin avec 26,6 %des suffrages. THOMAS LEKFELDT/AFP

Succès contrastés pour les partis indépendantistes

Page 10: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

Luxembourg Jean-Claude Juncker, tête de liste pour le Parti populaire européen, revendique«une certaine légitimité» pour le poste de président de la Commission européenne. JOHN THYS/AFP

Pays-Bas Avec 12,9%des voix, le Parti pour la liberté deGeertWilders (PVV) est en-decà des pronostics.HOLLANDSE HOOGTE/CORBIS

BruxellesBureau européen

U nParlementeuropéenplusfragmentéet souspressiond’une forte minorité euro-

sceptique. Les principales famillespolitiques européennes, cellesautour desquelles se bâtissent lesmajorités, sortent affaiblies desélectionsdu 25mai.

D’après des estimations encoreprovisoires, le Parti populaireeuropéen, principal groupe dedroite, arrive en tête avec 212élus,mais il perd plus de soixante siè-ges par rapport au scrutin de2009. Le Parti socialiste européen,principalgroupedegauche,nepar-vientpasàbénéficierdece reculetfait un peu moins bien qu’il y acinqans, avec 186sièges, contre196. Legroupedes libéraux-démo-crates pointe en troisième posi-tion,avec70élus,pour83dansl’hé-micycle sortant. Quant aux écolo-gistes, ils parviennent à ce stade àmaintenir leur quatrième place(55élus).

A elles quatre, les forces pro-européennes représentent désor-mais 523élus, contre 609 dans leParlement sortant. Elles vontdevoir faire de la place aux forma-

tions plus critiques à l’égard duprojet européen, voire carrémenteurophobes. A gauche, la gaucheradicale, emmenée par le GrecAlexis Tsipras obtient 43 élus,contre 35 dans le Parlement sor-tant. Mais c’est surtout la droiteeurosceptique qui sort renforcée,endépitdesdivisionsqui latraver-sent. A ce stade des décomptes, legroupe de souverainistes où siè-gent les conservateurs britanni-quesobtient44élus, contre36auxanti-européens de l’EFD, crééautour des élus du UKIP de NigelFarage.AprèssavictoireenFrance,le Front national n’est pas assuréde pouvoir former un groupepar-lementaired’extrêmedroite,maisil va tout faire pour yparvenir.

La pêche au ralliement devraitêtredesplusaniméesdans lespro-chains jours.Outreunequarantai-nedenon-inscrits,dont lesélusduFront national avant la constitu-tiond’unéventuel groupe, prèsde70élus étiquetés «divers» sontsusceptibles de venir renforcerl’une ou l’autre famille de l’hémi-cycle. Certains, comme la vingtai-ned’éluseurosceptiquesdeBeppeGrillo, en Italie, seront très courti-sés.«La compositionet la taille desgroupes ne seront pas forcément

connues avant une semaine», pré-vient Hannes Swoboda, le prési-dent sortantdu groupe socialiste.

Il n’empêche, les principalesfamilles politiques européennesvontdésormaistenterdepesersurle choix du président de la Com-mission européenne. PPE, PSE etlibéraux ont confirmé qu’ilscomptaientdiscuterencesensdèslundi 26mai. Ensemble, ils dispo-sent sur le papier d’une majorité

de 468sièges, soit largement lamajorité absolue requise(376voix) pour élire le successeurde José Manuel Barroso. Cepen-dant leur stratégie reste confuse,car les trois chefs de file en lice,Jean-Claude Juncker pour le PPE,Martin Schulz pour les socialistesetGuyVerhofstadtentendentcha-cun jouer un rôle central dans lacourse auxpostes.

Le premier s’est dit prêt à«accepter le mandat de présidentdelaCommission».«J’aiunecertai-ne légitimité pour pouvoir préten-dreque le PPE fassede sa tête de lis-te son candidat» pour ce poste, aaffirmé Jean-Claude Juncker, vété-ran de la construction européen-ne, lors d’une rapide interventionau Parlement. «Légitimité» queMartin Schulz s’est bien gardé dereconnaître: le candidat socialistea lui aussi promisde chercherunemajorité sur sonprojet et pose sesconditions–luttecontrelechôma-ge des jeunes et l’évasion fiscale –avant toute alliance. Dimanche, ilamisengardecontretouteconclu-sion précipitée sur la base d’esti-mations provisoires dont il «dou-te». Mais le social-démocrate alle-mandnedevraitpasêtre enmesu-redeconstituerunemajoritéalter-nativeà gauche.

Guy Verhofstadt, de son côté,devrait être en position de pivotentre la droite et la gauche dans laperspective d’une «grande coali-tion» PPE/socialistes/libéraux.Pour lui, comme pour l’ensembledesforcespro-européennes,lesuc-cesseur de José Manuel Barrosodoit être choisi parmi les chefs defile qui ont piloté la campagne au

niveau européen. Un point de vuequecontestentdéjà leseuroscepti-ques.

Lesperformancesdesunsetdesautres laissent cependant les cou-dées franches aux chefs d’Etat etde gouvernement. Ces derniersdoiventse retrouvermardidans lasoirée, à Bruxelles, afin demanda-terHermanVanRompuy, le prési-dent du Conseil européen, pourentamer les tractations avec leseurodéputés. A moins d’une sur-prise, aucune décision ne devraitêtreprisemardicarleConseileuro-péen aborde la discussion en rangdispersé lui aussi.

Sicertainschefsd’Etatetdegou-vernement pourraient, à l’instardeFrançoisHollande, se contenterde Jean-Claude Juncker, ou deMartin Schulz, d’autres, comme leBritannique David Cameron, nesont favorables ni à l’un ni àl’autre. AngelaMerkel, après avoirsoutenul’ancienpremierministreluxembourgeois pour mener lacampagnedeschrétiens-démocra-tes, attend avant de se prononcer.«Elle n’a pas renoncé à choisir endehors des chefs de file en lice»,croit savoir un responsable euro-péen.

Quelquesoit lepostulant,ladif-

ficulté est maintenant de rassem-bler une majorité absolue de376voix au Parlement européen,ainsi qu’unemajorité qualifiée ausein du Conseil européen. «Aufond, personnen’a envie de se faireimposer le futur patron de la Com-mission par le Parlement euro-péen», dit un proche d’HermanVan Rompuy, pour résumer l’étatd’esprit du Conseil. Toutefois,selon ce responsable, si un candi-datparvientà rassembler376voixparmi les eurodéputés, ce sera«unfaitpolitiquequ’il seradifficiled’ignorer».

«Après cette campagne inédite,il ne va pas être possible pour leConseil européen de considérer lesélections comme un fait divers quia amusé les partis», veut croireune autre source européenne.Dans l’idéal, le successeur deM.Barroso serait désigné fin juinpar le Conseil, puis élu en juilletpar le nouvel hémicycle. A moinsque le bras de fer annoncé entrechefs d’Etat et eurodéputés neretarde les échéances.AngelaMer-keldevait joindreFrançoisHollan-de dans la journée de lundi pourtenter de trouver une issue la plusrapidepossible.p

PhilippeRicard

Batailleencoulissepourungrouped’extrêmedroite LesEuropéensfaceauchocMarineLePen

Lepopulismeaffaiblit leParlementfaceauxgouvernementsPour laprésidencede laCommission, lesgroupespro-européenspourraientavoirdumalà imposer leurscandidatsauxchefsdesexécutifs

BruxellesBureau européen

Elle n’a jamais été aussi forte enFrancemaisn’est pas sûre depou-voir constituerun groupeauPar-lement européen.Avec 24élus surles 25nécessaires,Marine LePendisposedésormaisde troupes quilui permettent, presque à elle seu-le, de fonderune fractiond’extrê-medroite.Mais elle n’est pas toutà fait certainede rassemblerdesalliés dans septpays différents,comme l’exigent les règles du Par-lement européen.

Parmi ses alliés potentiels, leParti national slovaquen’est plusenmesure de siéger dans l’hémi-cycle. Par ailleurs, les démocratessuédois font bel et bien leurentréedans le Parlement euro-péen, avec 7%des voix,mais ilshésitent à rejoindre l’alliancequetentede forgerMarine LePen.Quant auVlaamsBelang, enBelgi-que, il est passé tout près de l’éli-mination,mais disposerait finale-mentd’un siège, selon les estima-tionsprovisoires.

LesautresalliésduFrontnatio-nalont confirméplus facilement

leurprésencedans l’hémicycle,mêmesi leur succèsest loindel’ampleurde lavictoireduFNenFrance. LeFPÖautrichien, enpro-grèsderrière les conservateursetsociaux-démocratesassociésaugouvernement,et lePartipour lalibertédeGeertWilders, endeçàdespronosticsdes sondagesnéer-landais, sontau rendez-vous, toutcommelesélusde la LigueduNord italienne.

Eviter l’éclatementLesprochains joursdevraient

êtredéterminantspour lesprojetseuropéensdeMarineLePen. LachefduFrontnationalest à la lutteavecdeuxBritanniquessoucieuxdepréserver leurspropresgrou-pes:NigelFarage, le chefdupartianti-européenUKIP,maisaussi,plus indirectement, lepremierministreDavidCameron.Arrivéen têteauRoyaume-Uni, lepre-miera fort à fairepouréviter l’écla-tementdesa formation (EFD,Euro-pede la libertéetde ladémocra-tie). Il devrait êtredélaissépar laLigueduNord, courtiséepar leFrontnational.Mais il va chercheràattirerunepartiedeséluseuro-sceptiquesdeBeppeGrillo, arrivéendeuxièmepositionen Italie. LepatronduUKIPcherchedepuisdesmoisà sedifférencierduFrontnational, dont il amisencauseendébutde campagne«l’antisémitis-me».Maisdenombreuxexperts

nevoientpascomment il pourraitmaintenir songroupesi le FNpar-venait à former le sien. Et récipro-quement.

Laconcurrenceentre les forceseurosceptiquesest d’autantplusvivequeDavidCameronentenddesoncôtééviter lamarginalisa-tiondes élus tories, associésauxeurosceptiquespolonais et tchè-quesauseinde la formationCRE(Conservateurset réformisteseuro-péens).Celle-cipourrait bénéficierdurenfortdesélusanti-eurodel’AFDetdusoutiende l’Alliancenéoflamandede laNVA,enBelgi-que.AudétrimentdeNigel Farage,elledevraitaussi attirer lesVraisFinlandaiset leParti dupeupledanois, arrivé en tête.

Cesdeux formationsontdécli-né lesavancesdeMmeLePen.Celle-cipourrait en revanche jeter sondévolusurunedes surprisesduscrutin: leCongrèsde lanouvelledroite, formationeurophobequiaobtenuplusde7%enPologne.Pour former songroupe, la chefduFNexclutenrevanchedes’asso-cier à l’extrêmedroitegrecqued’Aubedoréeainsiqu’au Jobbikhongrois.Ouvertediscrètementdepuisdes semaines, lapêcheauxralliementsdevrait seprolongeraprès les élections. Enprincipe, lesgroupesdoiventêtre formésavantle 24juin s’ils veulentobtenirdespostesd’influence.p

Ph.R.

LE «CHOC», LE «SÉISME»…La vic-toire deMarine Le Penen Francefaisait la «une» desmédias inter-nationaux,notammentenAutri-che et auRoyaume-Uni, où la chefduparti d’extrêmedroite partagel’affiche avecNigel Farage, le chefde file duUKIP, le parti europho-bequi a remporté les électionsoutre-Manche.«Le FNmèneuntremblementde terre populisteaux élections européennes», titrele Financial Times.

A Londres,WilliamHague, leministredes affaires étrangères,s’est dit «inquiet». Interrogéparla BBCpour savoir s’il s’agissait dela «montéed’unparti raciste», il arépondusans ambiguïté: «Oui».Ajoutant,«en France, la désillu-sion envers la politique et l’UE estsérieuse».

«Plus jamais commeavant»EnPologne, lepremierminis-

tre,DonaldTusk, s’est ému.«Cettejournée seragravéedans l’histoire.L’Europechangesousnos yeux.»

EnSuède, la première réactionfut entendueau siège desDémo-cratesde Suède, le parti d’extrêmedroite, qui a applaudi chaude-ment les résultats du FN. Interro-géplus tard, JimmieAkesson, leprésidentduparti, a pourtanthabilementesquivé le sujet de

MmeLePen. «Il est intéressant devoir comment leUKIP et le Partipopulairedanois [DF]progressent.Cela indiquebienqu’il y a uncontre-mouvementen Europequigrandit», a-t-il dit. Il a expliquéqu’il se sentait plus procheduDF,unparti d’extrêmedroite quineveutpas coopérer avec le FN.

Or, depuis Copenhague, ce der-nier a encorepris ses distancesavec le parti deMarine LePenaprès sa victoire. La tête de listeeuropéennedu Parti populairedanois,MortenMesserschmidt, adit regretter que «des partis com-me le Front national et Aubedoréegagnentdu terrain».

En Italie, le présidentde laLigueduNord,Matteo Salvini, quia signéunaccordavecMarineLePen, expliqueque «rienne seraplus jamais commeavant en Euro-pe».Pour IlvoDiamanti, profes-seur de sciencespolitiques à l’uni-versité d’Urbino (Marches), le sco-re du FNest le signede « la crise dela démocratie»qui attaque laFrance après avoir attaqué l’Italie.

Le présidentde la Commissioneuropéenne, JoséManuel Barroso,a, lui, appelé, lundi 26mai, les for-ces européennes à se «rassem-bler», face à la pousséedes euro-phobes et de l’extrêmedroite.p

Denos correspondants

Lapêcheauralliementdevraitêtre

desplusaniméesdanslesprochains

jours

10 0123Mardi 27mai 2014

Page 11: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

européennes 2014

Unevictoirehistoriquepourlesantieuropéens

SouthamptonEnvoyée spéciale

I l a le triomphe modeste : celafait partie du personnage qu’ils’est savamment construit.

«Well, I’m delighted» (« Je suisravi»), a dit Nigel Farage d’un airimpassible en contemplant lesrésultats des élections européen-nes, dimanche25mai, alorsmêmequ’ilvenaitdesusciterle«tremble-mentde terrepolitique»qu’il avaitlui-mêmedésiré et prédit.

Le chef du petit parti UnitedKingdom Independence Party(UKIP), député à Bruxelles depuis1999, n’a jamais été élu à la Cham-bre des communes et fédère35000membres autour de lui. Ilvientde réussir l’exploitde sa vie:faire duUKIP le premier parti bri-tannique au Parlement européen.Avec29%desvoix, il dame lepionaux trois partis de l’establish-ment : Conservateurs (24%),Labour (24%) et LibDems (Libé-raux-démocrates, 8%). Il estaujourd’hui, de fait, avec la prési-dente du Front national, Marine

Le Pen, un porte-voix puissantdans ce nouveau Parlement deStrasbourg, l’instigateur en chefde la vague populiste et europho-be qui laisse l’EuropeKOdebout.

Cette soirée du 25mai, NigelFarage l’a passée sans façons : àl’hôtel de ville de Southampton,parmi les candidats des différentspartisdanscetterégionduSud-Estde la Grande-Bretagne qui l’élitpour la quatrième fois consécuti-ve auParlement européen.

Victorieux, il n’a rien changéson image de gentleman populis-te:unbustetrèsdroitentoutescir-constances et une courtoisieappuyée que viennent interrom-predegros riresbruyants, sipossi-ble la pinte de bière à la main. Il acontemplé avec magnanimité lesuccès de ses efforts : l’énuméra-tion répétée des trois fléaux quiselon lui assaillent le peuple bri-tannique – l’immigration, l’Unioneuropéenneetlespartisgouverne-mentaux, aussi ineptes que l’est«l’UMPS»pourMmeLePen.

Il était aussi assez content de satrouvaille, formulée juste avant

l’élection : « Le renard UKIP estdans lepoulaillerdeWestminster.»Lerenard, c’est lui. Lepoulailler, cesont les députés de la coalitiongouvernementale conservatriceet LibDemcommede l’oppositionLabour. Nigel Farage est double-ment en position de force : avantlesélectionseuropéennes,ilarem-porté un succès relatif aux élec-tions locales qui ont eu lieu auRoyaume-Unijeudi22mai:150siè-ges de conseillers pour leUkip quin’en avait que 2. «Ce sont deuxavertissements»,menace-t-il.

Le leader du Ukip laisse planerle suspense sur sa propre candida-ture à la Chambre des communes,aux élections législatives demai2015. Personne n’est dupe : leUKIP n’obtiendra pas des scoressemblables lors d’un scrutin géné-ral, considéré comme plus vitalpourlesélecteursetoùlaquestioneuropéenneredeviendramargina-le.Maisilcompteenrevancheutili-ser cette double victoire commeun moyen de pression sur DavidCameron, Ed Miliband et NickClegg, les leaders conservateurs,

travaillistes et LibDems. « Je leurdonne ce conseil d’ami, dit-il. ilvautmieuxqu’ilschangentdepoli-tique, sinon les élections généralesserontundésastre pour eux.»

Changer de politique, pourNigel Farage, cela se réduit à orga-niserunréférendumsurl’indépen-danceduRoyaume-Uni.«Lavictoi-

re aujourd’hui des partis euroscep-tiques européens, de droite et degauche, prouve que ce processusest inévitable. La bulle européennea déjà explosé. Il est plus quetemps: je veux me débarrasser del’Union européenne. Je ne veuxplus de commission, plus de Courde justice, plus de parlement, plus

dedéputés, rien. C’est bien clair? Etvous verrez, je parie cher que leLabouraussipromettraunréféren-dumsur la sortie de l’Europe!»

Pour ce qui est du futur prési-dent de la Commission européen-ne, Nigel Farage a fait son choix: ilvotera pour l’Allemand MartinSchulz,dugroupesocialiste,actuelprésidentduParlementdeBruxel-les. Il l’affirme avec tout le sérieuxdont il est capable : «Schulz ! Jeveux Schulz, bien sûr ! Il est désa-gréable, agressif, déplaisant… Ilnous faut le pire, c’est pour lemieux ! Schulz sera bon pour enfinir avec l’Europe.»

Nigel Farage et Marine LePen,ont un point commun: les deuxgrands vainqueurs du 25mai ontréussi l’exploit de mobiliser despopulations désespérées et de leurtrouver, dans un contexte euro-péen en plein marasme, un boucémissaireidéal, l’establishment,lesélitesnationalesoubruxelloises, lazone euro et uneUnion européen-ne qui seraient la cause de l’immi-grationetduchômage.Ilsontpour-tant de gros points de divergence:

Nigel Farage, disciple de MargaretThatcher, est notammentunultra-libéralaffirmé. Il tientparailleursàménagersonimagede«partieuros-ceptique décent», seul garant deson pouvoir d’influence dans lapolitique britannique. Pour cela, ils’obstine à tenir tête à MarineLePen et répète son refus de siégeravec le Front national dans unmême groupe parlementaire.«Nous serons présents au Parle-ment, nous voterons contre toutesles directives et il n’y aura pas d’al-liance avec un parti qui traîne unlourdbagagederacismeetd’antisé-mitisme», clame-t-il.

Sur les dix députés européensreprésentant la région du Sud-Estde la Grande-Bretagne, Nigel Fara-geaétéréélunuméroun.Il futbrefpour une fois, il n’y avait pas defoule à convaincre dimanche soir,juste les candidats, la presse etquelques coéquipiers. En vieuxroutier des tribunes, il a regardédroit dans les caméras et averti :«Vous n’avez pas fini d’entendreparler denous.»p

MarionVanRenterghem

LondresCorrespondance

Le tremblementde terrequepro-mettaitNigel Farage a eu lieu. LedirigeantduParti pour l’indépen-danceduRoyaume-Uni (UKIP) aréussi sonpari de terminer entête des élections européennes auRoyaume-Uniavecplus de 27%desvoix. C’est la première foisdepuis 1910qu’un scrutinn’estremporténi par les travaillistesnipar les conservateurs.«C’est unrésultat extraordinaire», s’est féli-citéM.Farage. Avant d’ajouterqu’il s’étonneque cene soit pasarrivéplus tôt : «Les gensontenfin compris. Nous avonsperdule contrôle de notrepays, et de nosfrontières.»

Presque tout le pays a étéemportéparune vagueviolette,la couleurduUKIP. Seule l’Ecossefait de la résistance: le parti anti-européenn’y récolte que 10%desvoix. Londres reste également réti-cente.Mais, partout ailleurs, leUKIP s’est largement imposé.

Les travaillistes arrachentdejustesse la deuxièmeplace, justedevant les conservateurs. Les libé-raux-démocrates, les plus pro-européens, essuientune défaitecatastrophique, terminant à la cin-quièmeplace, derrière les Verts.

M.Farage, cofondateurduUKIPen 1993, réussit ainsi un tourde force politique. Il y a quelquesannées seulement,DavidCame-ronbalayait du revers de lamainceparti, qu’il disait composéde«cinglés, barjots et racistes quin’osent pas dire leur nom».Aujourd’hui, le voilà au centredujeupolitique.

LeUKIP a réussi à s’imposer enélargissant consciemmentsondis-courspolitique: au rejet de l’UE,qui est sa raisond’être, il a ajoutéuneoppositionà l’immigrationqui lui a valudes accusations répé-téesde racisme –une charge qui a,semble-t-il, été contre-productive.Deplus, sondirigeant,M.Farage,manieunhumourdécapant, ettravailleune attitudeanti-élites,qui tranche avec les discours asep-tisésde ses opposants.

Mêmesi le résultat était atten-du, la secousse aurades effets sen-siblesdans tout le paysagepoliti-quebritannique, à deuxniveaux.D’abord, d’unpoint de vue euro-péen, cette victoirenepeut quefaire avancer unpeuplus leRoyaume-Univers une sortie del’UE. «Tous les partis vont êtrepoussés à être plus euroscepti-ques», estimePeterKellner, prési-dentde l’institut de sondageYou-Gov.Du côté des conservateurs,

DavidCameronapromisun réfé-rendumsur lemaintiendansl’Uniond’ici à 2017.Mais, dansunpremier temps, il veut rapatrierdeBruxelles un certainnombredepouvoirs. «Il va devoir êtrebeaucoupplus dur dans ses négo-ciations», estimeM.Farage.

Les travaillistes aussi vont êtresouspression. Ils ont jusqu’àpré-sent excluun référendum, saufen cas denouveau traité euro-péen.«Ils vont devoir revoir leurposition», veut croireM.Farage.

Rienn’assureque cela sera lecas,mais tous les sondages indi-quentque lesBritanniques souhai-teraientun référendum.Alors quele Labour est à la peine àunandeslégislatives, son chef, EdMiliband,pourrait s’y résoudre, afin d’arra-cherdes voix supplémentaires.

Ententes localesAundeuxièmeniveau, les

répercussionsde la victoire duUKIP seront importantespour lapolitique intérieure. Le parti anti-européenn’a aucunespoir dedevenirdominant à la Chambredes communes, lemodede scru-tinmajoritaire àun tour rendantdifficileune véritablepercée.

MaisM.Farage seprenddésor-maisà rêver touthautde rempor-terunepoignéededéputés auxlégislatives, suffisammentpour seretrouverenpositionde faiseurderoi.«Tout est possible», lance-t-il.Sonparti pourraitd’ailleurs rem-porterunpremier siège le 5juin,lorsd’une législativepartielle àNewark,dans lenordde l’Angleter-re: leUKIPyadécroché lapremiè-replace lorsduscrutin européen.

Mêmesi le parti europhobenegagneaucun siège auParlement,il peut jouerun rôle décisif enpre-nantdes voix auxautres partis. Ace jeu-là, ce sont les conservateursqui ont le plus à perdre.M.Came-ron craint qu’unedéperditiondevoix,mêmeminime, vers leUKIPn’entrave sa réélection, offrant lavictoire aux travaillistes.

Inquiets, plusieurs conserva-teurs ont appelé àunpacte avec leUKIP. Si un accordnational sem-ble exclu, il n’est pas impossiblequedes ententes locales puissentêtrenouées,malgré l’oppositiondeM.Cameron.

Les partis politiques tradition-nels espéreront sansdoute que lephénomènene soit quepassager.En 2004 et en 2009, lors des deuxprécédents scrutins européens, leUKIPavait obtenu 16%des voix,avantde retomberdans l’oubli.Mais, cette fois, tourner la pageserabeaucoupplus difficile.p

EricAlbert

«Schulz! JeveuxSchulz,biensûr!Ilestdésagréable,

agressif,déplaisant…Ilnousfautlepire!»

Nigel Faragechef duUKIP

«LerenardUKIPestdanslepoulailler»duParlementArrivéentêteduscrutin,NigelFarages’engageà«débarrasser» leRoyaume-Unide l’Unioneuropéenne

110123Mardi 27mai 2014

Page 12: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

VienneCorrespondante

L es électionseuropéennesontnettementconsolidé,enHon-grie, la droite conservatrice

et l’extrême droite radicale, toutenrebattant les cartesauseinde lagauche.Danslafouléedeslégislati-ves du 6avril, la coalition Fidesz-

KDNP au pouvoir a remporté51,49%des voix et 12sièges sur 21 :c’estunnouveautriomphepourlepremier ministre, Viktor Orban,qui s’est distingué, depuis 2010,parsesattaquescontrela«dictatu-re»bruxelloise.

Pendant la campagne, il n’a pashésité à attaquer l’Union euro-péenne (UE). Après une décision

de la Cour européenne des droitsde l’homme – qui ne dépend pasde l’UE,mais du Conseil de l’Euro-pe – demandant à la Hongrie deréexaminer son régime de peinesà perpétuité, Viktor Orban a répli-qué, pendant un meeting, le20mai:«C’est l’ultimepreuvequ’àBruxelles et à Strasbourg, dansl’Union européenne, les droits descriminels passent avant ceux desvictimes et des innocents.»

Faible participationLa véritable surprise vient des

bons résultats obtenus par deuxlistes de la gauche libérale pro-européenne,laCoalitiondémocra-tique (DK) de l’ancien premierministre Ferenc Gyurcsany, qui aatteint 9,76% des suffrages, soit2sièges, et celle de son successeurlorsqu’il avait dû démissionnersous la pression de l’opposition,Gordon Bajnai, dont la formationEgyütt (Ensemble) a remporté7,22%desvoix etun siège.

Cettedoubleperformanceasur-tout affaibli le Parti socialiste(MSZP), héritier direct de l’ancienParti communiste, qui subit unrevers cinglant : il est relégué à latroisième place, avec seulement10,92% des voix et deux sièges. Lafaible participation (28,92%) sem-ble avoir nui à la gauche.

LepartiécologisteLMP(Fairedela politique autrement), qui veutseteniràégaledistancedesconser-vateursetde la gauche, réussit sonentrée au Parlement européen,avec 5% des suffrages et un dépu-té. Au total, la gauche et les écolo-gistes capitalisent plus de750000voix, alors que le partid’extrême droite, Jobbik, enobtientprès de 340000.

L’éparpillementduvotedegau-cheapourconséquencededonnerau Jobbik la deuxièmeplace – unevictoire symbolique, car il a peuprogresséenvoix(14,68%)parrap-portà2009etgardelemêmenom-brede députés (trois).

Mais la bonne tenue du Jobbik,malgrélesaccusationsd’espionna-ge au profit de Moscou lancéescontreundesescandidats,nepeutque conforter le cours euroscepti-que de M.Orban, décidé à faireentendre sa voix dans le groupedes conservateurs du Parti popu-laire européen (PPE).

LeFideszn’apasfailliàsaréputa-tion demembre turbulent du PPEen prenant position contre le chefde file de son parti, Jean-ClaudeJuncker : «Nous ne pensons pasqu’il doive diriger la Commission»,a déclaré le parti de M.Orban à laveilledu scrutindu25mai.p

Joëlle Stolz

RomeCorrespondant

L es Italiens ont une expres-sion très imagéepour tradui-re les efforts de ceux qui,

après avoir prédit les catastro-phes, tentent de rétablir la situa-tion quand les événements leurdonnent tort : «S’accrocher auxmiroirs». Et ils étaient nombreuxceux qui, dimanche 25mai, aprèsla fermeturedesbureauxdevoteà23heures, ont voulu «s’accrocheraux miroirs». Tous ceux qui, à lalecture des derniers sondages,avant qu’ils ne soient interdits depublication le 9mai, avaient pro-nostiqué la défaite du présidentdu conseil et secrétaire du Partidémocrate (PD, centre gauche),Matteo Renzi, devant le héraut dela lutte contre l’euro, BeppeGrillo.

La victoire du centre gauche(41%)estd’abordcelledunouveaupremier ministre. Désigné le22févrieraprèsavoir«misà la cas-se» les vieilles gloires du parti et«poignardé» son prédécesseur,Enrico Letta, le jeune (39 ans)Mat-teo Renzi n’avait à son crédit quesa victoire à la mairie de Florenceen 2009 et celle aux primaires duPD en décembre2013. Mais il lui

manquait l’onctiond’unvrai scru-tinnational.C’estaujourd’huicho-se faite, alors que l’Italie prendra,le 1er juillet, la présidence tournan-te de l’Union européenne poursixmois.

A peine nommé, il a multipliéles annonces de réformes dans lebut avoué «d’assécher» le vivierélectoral du Mouvement 5 étoilesdeBeppeGrillo. Enmultipliant les

meetings et les apparitions télévi-sées, il a convaincu qu’il avaitenvie,plusquelesautres,de«fairele job». Paradoxe : il est l’un desrares chefs de gouvernement àavoir ouvertement fait campagnepour l’Europe et à être sorti vain-queurde ce scrutin.

En théorie, M. Renzi devraitavoir un boulevard devant luipour mener à bien les réformesencoreenchantier.Plusieursd’en-tre elles (lamodification dumode

de scrutin, la fin du bicamérisme)ont étémises entre parenthèses letempsdelacampagne.Maislesfai-blesses de ses alliés, Forza Italia etle Nouveau Centre droit d’Angeli-no Alfano, peuvent faire craindrequeceux-cinerévisent leurstraté-gied’alliance.L’effetRenzineprofi-te qu’àMatteoRenzi lui-même.

Mais que pèsent-ils? Le scrutindu25mai,mêmes’il doit être tem-péré d’une forte abstention, signeladisparitiondeladroiteberlusco-nienne et postberlusconienne. Ilfaut remonter au temps de laDémocratie chrétienne dans lesannées 1970-1980 pour trouverune victoire comparable à celle deM.Renzi aujourd’hui.

Cet avantage numérique, surses alliés comme sur ses adversai-res, lui offre un atout majeur. Encas de mauvaise volonté d’un deses partenaires, il pourrait lesmenacer de retourner aux urnesavec l’assurance, du moins entenant compte du scrutin euro-péen, d’en sortir vainqueur.

Pour le Mouvement 5 étoiles,«presque vainqueur» des élec-tions de février2013, la défaite estamère (21%). M.Grillo, pendanttoute la campagne, a répétéque saformationétait largement en tête.

En semblant lui donner raison, lessondages ont accrédité l’idée quesa stratégied’oppositionàoutran-ce était payante.

Cette formation,qui s’apprêtaitàdemander ladémissionduprési-dent de la République, GiorgioNapolitano,etdesélectionsantici-pées, va devoir revoir sa stratégie.Son refus de tout «compromis»avec les partis au pouvoir l’a déjàpoussée à exclure une vingtainede parlementaires qui y étaientfavorables. Ce résultat devraitencourager les rapprochementsdecertainsd’entreeuxavec lePar-ti démocrate.

Enfin, ce 25mai marque peutêtre la fin – souvent annoncée,jamais vérifiée – du berlusconis-me.Condamnéàquatreansdepri-son (réduit à une année en raisonde diverses amnisties) pour frau-de fiscale, privé de ses droits civi-ques, humilié par sa participationquatre heures par semaines à destravaux d’intérêt général dans unhospice de la banlieue de Milan,l’ex-Cavaliere a fait campagne,commeBeppeGrillo, contre l’Alle-magneetcontrel’euro.LesItalienssemblent avoir jugé qu’il n’avaitplus l’énergie ni l’âge du rôle.p

PhilippeRidet

AthènesCorrespondance

C e n’est pas la foule desgrands jours mais quelquescentaines de militants ont

toutdemême fait l’effortdevenir,tard dans la nuit de dimanche25mai, applaudir Alexis Tsiprasdevant le quartier général de cam-pagnedupartide lagaucheradica-le Syriza, sur l’une des places prin-cipales d’Athènes. Le Syriza vientd’emporterlesélectionseuropéen-nes, avec 26,46% des voix, etdevient ainsi la première forcepolitique du pays. «Une grandepremièreetunevictoirepour toutela gauche européenne!», se félici-te,despaillettesdanslesyeux,Are-ti, une sympathisantede 26 ans.

Surlascène, leprésidentdeSyri-za, Alexis Tsipras, écoute très sou-riantRénaDourou,l’heureusecan-didate du parti, élue sur le fil avec50,41% des voix à la tête de larégion de l’Attique, qui concentreà elle seule 30% des électeursgrecs. Car les Grecs votaient aussice dimanche pour désigner leursmaireset leurspréfetsderégion.Sil’Attiqueabasculédans legirondeSyriza, la majorité des treizerégions grecques reste cependantauxmainsdes conservateurs.

«Le vrai symbole de la sanctiondu gouvernement de coalition,c’est la victoire de Réna Dourou enAttique, car l’Attique est la régionqui a le plus souffert de la crise, etelle vient de choisir Syriza. On a unpays à deux vitesses avec desrégions assez conservatrices et uncentre autour d’Athènes plutôtcontestataire», explique le polito-logue Elias Nikolakopoulou. Etc’est là tout le paradoxe de cettejournéed’élections.

D’un côté, les Grecs ont adressé

à l’Europe le message clair qu’ilsne voulaient plus de l’austérité enportant Syriza à la première place,mais ils se sont montrés moinsaventureux dans les scrutinslocaux en votant pour des candi-datsissusdelacoalitiongouverne-mentale. Cela prouve que de nom-breuxGrecsrestentsensiblesaudis-coursdestabilitépolitiquedévelop-péparleparticonservateurNouvel-le Démocratie (ND), qui a réussi àgagner23,17%des suffrages.

«C’est une défaite, mais pas sibrutale.Aux législativesde2012,NDavait remporté 29%des suffrages»,souligneM.Nikolakopoulou.

L’ancrage d’Aube doréeD’autant que si les socialistes

duPasoksonten reculnetpar rap-port aux européennes de 2009,avec8,1%souslescouleursdeL’Oli-vier (Elia), ils résistent mieux queprévu. L’Olivier devance notam-ment le nouveau parti To Potami(« la rivière»), créé par le journa-liste vedette Stavros Theodorakis,qui n’obtient que6,6%.

Al’annoncedesrésultatsdiman-che soir, Alexis Tsipras a réclamédes élections législatives «aussirapidement que possible». Maisavec trois petits points d’écartsseulement, les conservateurs de laNouvelle Démocratie ont exclutoute idée de scrutin anticipé.

L’autreenseignementdecescru-tin, c’est la montée en puissancedes néonazis d’Aube dorée qui, enobtenant 9,3% des suffrages,deviennent la troisième force dupays.«Ils sesontancrésdans lepay-sagegrecmalgréleursdéboiresjudi-ciaires. Au premier tour des élec-tions locales, le 18mai, ils avaientfait un bon score, autour de 11%»,rappelleM.Nikolakopoulou.p

AdéaGuillot

NouveautriomphepourlepartideM.OrbanenHongrieL’éclatementde lagaucheprofiteà l’extrêmedroiteduJobbik,deuxièmederrière leFidesz-KDNP

Cescrutinsigneladisparitiondeladroite

berlusconienneetpostberlusconienne

Grèce Alexis Tsipras, le président de Syriza (gauche radicale), vainqueur du scrutin (26,46%), à Athènes,devant le parti conservateur Nouvelle Démocratie (23,17%). ALKIS KONSTANTINIDIS/REUTERS

Italie Le cofondateur duMouvement 5étoiles, BeppeGrillo (au centre), dimanche 25mai, près deGênes.Sonparti a subi une défaite face au Parti démocrate en ne recueillant que 21% des voix. MARCO BERTORELLO/AFP

Lemessageanti-austéritédesGrecsàl’EuropeLagaucheradicale,menéeparAlexisTsipras,devient lapremière forcepolitiquedupays

EnItalie, lasurpriseMatteoRenziLePartidémocrateduprésidentduconseildistance leMouvement5étoilesdeBeppeGrillo

12 0123Mardi 27mai 2014

Page 13: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

européennes 2014

StockholmCorrespondance

C ommeenFrance,uneforma-tion d’extrême droite anti-immigrés et eurosceptique,

le Parti populairedanois (DF), arri-ve en tête des élections européen-nes au Danemark, avec 26,7% desvoix, soit plus du double de sonscore obtenu lors des élections de2009.

Cettevictoirespectaculaireper-met à DF d’envoyer deux députéseuropéens en plus des deuxactuels à Strasbourg et Bruxelles.Deux tiers des gains réalisés l’ontété au détriment du Parti libéral,affaibli par un scandale qui a tou-chésonprésident.L’autretierspro-vient des sociaux-démocrates, unparti à qui l’extrêmedroite n’hési-te pas à faire des appels dupied.

Lors de son discours du 1er-Mai,leprésidentdeDF,KristianThule-senDahl,avaitété jusqu’à leurlan-cer un appel direct : « Les tra-vailleurs danois ont beaucoup àgagner si DF et les sociaux-démo-crates se rapprochent les uns desautres.»Uncalculenpartieélecto-raliste, mais qui témoigne ausside lavolontédeDF–quiprendgar-dedesedémarquersystématique-ment du FN français – de lisserson image.

Dimanche soir, la tête de listeeuropéenne de DF, Morten Mes-serschmidt,aaffirméregretterque«des partis comme le Front natio-nal et Aube dorée gagnent du ter-rain.Mais ils le font,dit il, parcequelespartisétablis trahissentlesEuro-péens. Il n’y a pas d’autre alternati-ves si l’on veut donner une autredirectionà l’Europe». Selon lui, despartis comme DF et les conserva-teurs britanniques tentent deremettre l’Europesur les rails.DFaindiquéqu’il comptait rejoindre legroupe des conservateurs et réfor-mateurseuropéens (ECR).

ResponsabilitéDepuis six mois, au Danemark,

le débat a porté sur les avantagessociaux dont bénéficient lescitoyens de l’Union européennedanslepays.CedébataprofitéàDF,qui réclamenotammentunedéro-gation afin que le Parlementdanois, et non l’UE, décide qui adroit aux allocations familiales etchômage.

Pia Kjærsgaard, fondatrice deDF, a récemment critiqué le dum-pingsocialetlacriminalitéoriginai-rede l’Europede l’Est–DFestparti-san du rétablissement des contrô-les aux frontières. Quant à AndersVistisen, le numérodeux sur la lis-te,ilestd’avisdesupprimerleParle-ment européen et de stopper l’en-tréedesmusulmansauDanemark.

Revenant sur cette thématiquedes avantages consentis auxcitoyens européens, la premièreministre sociale-démocrate HelleThorning-Schmidt,aprèsavoir féli-cité l’extrêmedroitepoursavictoi-re, a rappelé à DF qu’il avait désor-mais une grande responsabilité :«Nous allons maintenant voir sivous utilisez ces voix pour luttercontre le dumping social. Parti dupeuple danois, nous vous avons àl’œil», a lancé lapremièreministre.

A la différence de la situationfrançaise, l’extrêmedroitea gagnéune certaine respectabilité démo-cratique auDanemark depuis unequinzaine d’années déjà. AndersFogh Rasmussen, premier minis-tre libéral d’un gouvernementminoritaire entre2001 et 2009,avait ouvert la voie en faisant duParti du peuple son allié au parle-ment, lui permettant ainsi de ren-trerdanslejeupolitique.Enéchan-gede son soutien,DF avait obtenuuntrèsnetdurcissementdelapoli-tiqued’immigrationdanoise.

Les sociaux-démocrates eux-mêmes ont souvent adopté lamême rhétorique, ce qui est l’unedes raisons de leur baisse régulièreauprofitde l’extrêmegauche.p

OlivierTruc

BerlinCorrespondant

U ne participation en hausse,des partis au pouvoir dont,globalement, les résultats

sontmeilleursqu’en2009, lespar-tisextrémistesmaintenusenmar-ge du système: dans une Europecritiquée de toutes parts, d’Athè-nes à Copenhague en passant parParis, l’Allemagne apparaît com-meunpôledestabilité,cequipour-rait – encore – renforcer son poidssur la scène européenne, d’autantplus que François Hollande, lui,sort affaibli de ce scrutin.

Sept électeurs allemands surdix ont en effet voté pour unpartifavorable à la construction euro-péenne,voireàsonapprofondisse-ment : la CDU, le SPD, les Verts(10,5%)oulePartilibéral(FDP).Grâ-ceàlaprogression(+6,3%)duPartisocial-démocrate depuis 2009, lacoalitionaupouvoir–quiestànou-veau la même qu’il y a cinq ans –réalise un meilleur score que lors

duprécédent scrutin européen.Si le message pro-européen

envoyéparlesélecteursallemandsestdonc incontestable, ceux-ci ontémisun autre signal, qui empêcheles partis porteurs du projet euro-péend’être totalement satisfaits.

Le premier est le succès d’Alter-native pour l’Allemagne (AfD).Crééeauprintemps2013parBerndLucke, un universitaire de Ham-bourg déçu par la CDU, dont il alongtemps été adhérent, l’AfD araté de peu son entrée au Bundes-tag en septembre2013. Mais, enhuitmois, ce parti a porté son sco-re de 4,7% à 7%. Peut-être parcequ’il insiste désormais moins surle retour audeutschemarkque surla limitation des pouvoirs accor-dés à la Commissioneuropéenne.

L’avenir de ce parti, qui se ditplusproche des conservateursbri-tanniques que du Front nationalfrançais, est l’une des inconnuesdesprochaineséchéancesélectora-les en Allemagne. En revanche, laCSU bavaroise, qui a mené une

campagne plutôt eurosceptique,notammentenraisondelaconcur-rencede l’AfD, aobtenulepire sco-redesonhistoireàunscrutineuro-péen (40% en Bavière, soit 8% demoinsqu’en2009).

Treize partisMêmesilescrutinnevapasbou-

leverser la coalition au pouvoir, laCSUvasetrouverlégèrementaffai-blie alors que le SPD, en progrèspar rapport aux scrutins précé-dents (27,4%), peut retrouverquel-quesraisonsd’espérer.AngelaMer-kel devait recevoir à la chancelle-rie, lundi26mai,HorstSeehofer, leprésident de la CSU, et SigmarGabriel, le président du SPD, pourfaire le bilan des élections avant ledînerdeschefsd’Etat etdegouver-nementeuropéensmardi soir.

Il devrait surtout être questionde la place qu’auront les Alle-mands dans la future Commis-sion.Rivauxavantlesélections, ilya fort à parier que Sigmar GabrieletAngelaMerkeltrouverontfacile-

ment un terrain d’entente. Mêmesi le SPD réclameune «autre Euro-pe»etvasansdouteprendreappuisur le succès des eurosceptiquesdansnombredepayspourréitérersonmessage,leSPDassumeparfai-tement la politique européennemenée par Angela Merkel. Frank-Walter Steinmeier, ministre (SPD)des affaires étrangères, la qualified’ailleursde «succès».

Etonnamment, malgré une«équipe allemande» très soudée,ce ne seront pas moins de treizepartis que l’Allemagne devraitenvoyer au Parlement européenen raison d’une récente décisionde la Cour constitutionnelle deKarlsruhedenepasmettredeseuilminimal pour entrer au Parle-ment. Parmi ces partis figurerontleParti libéral, excluduBundestagen2013etquicontinuesadescenteaux enfers avec un minuscule3,4% des voix, et le parti néonazi(NPD)quiobtient1%desvoixetundéputé.p

Frédéric Lemaître

L’AllemagneresteunpôledestabilitéélectoraleLeSPDgagneduterrain, tandisque laCSU,affaibliepar sacampagneantieuropéenne, recule

Arrivéeentête,l’extrêmedroitedanoiseestenquêtederespectabilitéLePartipopulaireasucapterlesvoixdesdéçusdeslibérauxetdessociaux-démocrates

RésultatmoyendesVrais Finlandais

VarsovieEnvoyée spéciale

E trange ambiance sur la placedes Trois-Croix, au cœur deVarsovie. Sorties il y apeudu

stade, des centaines de supportersdu LegiaVarsovie défilent, bière àla main, pour saluer la victoire deleur clubde football dans le cham-pionnat national. Au milieu, sansleur accorder un regard, un vieilhomme ému en interpelle unautre : « Jaruzelski est mort ! » Lamortdudernierdirigeantcommu-nistedupays,à90ans,vientd’êtreannoncée. Toujours sur la mêmeplace, dans le très chic restaurantAleGloria, lesmembresdelaPlate-formecivique (PO), parti de centredroitaupouvoir,attendentfébrile-ment les résultats des électionseuropéennes.

A 21heures, le premier sondageIpsos tombe: le PO arrive en têteavec 32,2% des suffrages, soit unpoint de plus que Droit et Justice(PiS), le deuxièmeparti dupays, dedroiteeurosceptique.«Jevousfélici-te, mais les résultats frôlent lematch nul et je pense qu’il fautattendredemainmatin», se réjouitprudemmentDonald Tusk, le frin-gant premier ministre PO. Il necroit pas si bien dire. Dans la nuit,lesrésultatspartielsdonnentlavic-toireauPiS, entêtede…5pointssurle PO, à 33,88%.Mais, à 5heures du

matin, nouveau retournement: lePiSn’estplusentêtequed’unpointà 32,35% contre 31,29% au parti aupouvoir. Lundi matin, 10% desbureauxdevoten’avaientpasenco-re été dépouillés. Et il n’est pasexcluque lePOreprenne lamain.

Danstous les cas, lesdeuxpartisau coude-à-coude devraient cha-cun envoyer 19élus au Parlementeuropéen. «C’est un score honora-ble : après tout, nous avons gagnétoutes les élections depuis 2007»,relativiseunmilitantduPO.

Ilestvraiqu’ilyaquelquesmoisencore, tous les sondages prédi-saient une large victoire du PiS,dirigé par Jaroslaw Kaczynski,ancien président du conseil et frè-re jumeau du président Lech Kac-zynski, mort dans un accidentd’avionen2010.

Tout jouait contre le PO. Aprèsavoir surfé sur la croissance qui aporté lepaysaprès sonentréedansl’Union européenne il y a dix ans,M.Tusk avait en effet dû faire face,début 2013, au mécontentementcroissant des Polonais. Notam-ment à propos de la précarité. «Il a

aidé les entreprises, mais nous, lesjeunes, n’avons que des contratspourris», s’agace ainsi AgnieszkaDornowska,graphisteindépendan-te de 29ans, évoquant les contratsd’unmoismal rémunérés.

Le PiS a donc battu campagnesurlesfaiblessesdugouvernementets’estprésentécommel’alternati-ve. Son slogan: «Servir la Pologne,écouter les Polonais.» «Seulement,lacriseukrainienneestvenueboule-verser la donne», explique LukaszMezyk,cofondateurdusited’analy-se politique 300polityka.pl. Dès ledébut des tensions, le premierministre Tusk s’est posé en défen-seur de l’Ukraine. Il a proposé uneunion énergétique afin de sécuri-ser lesapprovisionnementsengaz.Son slogan : «Une Pologne fortedans une Europe sûre.» «Cela lui adonné une stature internationalequiaremobiliséunepartiede l’élec-torat du PO», commente KonradPiasecki, journalisteàVarsovie.

Surtout,M.TuskrassurelesPolo-nais, inquiets des manœuvres deleur imposant voisin russe –selonunsondagede l’institutCBOS,47%estiment que la sécurité de leurpaysestmenacée.«Ilahabilementfait passer au second plan les pro-blèmes intérieurs», remarque ErykMistewicz, spécialiste en commu-nication politique. «Voilà pour-quoi lesdeuxgrandspartisarriventau coude-à-coude.»

Quel enseignement tirer, à prèsd’unandes législativesetdelapré-sidentielle polonaises? «Le PO n’apas trop de souci à se faire, car il aplusd’alliésquelePiSavecquimon-ter une coalition », expliqueM.Mezyk, qui s’inquièteplutôt dufaible taux de participation, esti-mé à 23% environ, soitmoins queles 25%des européennesde 2009.

Autre inquiétude: le score sur-prise des europhobes du Congrèsde la nouvelle droite (KNP), qui arécolté7,06%desvoix(4eurodépu-tés), selon les résultats partiels, cequienfait le sixièmepartiaprès lessociaux-démocrates du SLD(9,55%) et le parti paysan, le PSL7,21%.Sonchef,JanuszKorwin-Mik-ke, 72ans,mathématicien insolentetanciendissidentanticommunis-teultra-libéral, s’est fait remarquercesdernièressemainesparsespro-pos antidémocratiques. «Nousallons démanteler l’Union euro-péennede l’intérieur»,a-t-ildéclaréendécouvrant les résultats.

«C’est un personnage quelquepartentreJean-MarieLePenetColu-che, cultivant l’absurde et l’anti-establishment»,décrypteErykMis-tewicz.M.Korwin-Mikkeséduitunélectorat jeune et un peu perdu,selon les analystes. DonaldTuskutilisera probablement le KNPcommerepoussoirafinderemobi-liser sonélectorat.p

MarieCharrel

AllemagneAuQGduSPD,Martin Schulz, candidat duParti socialiste européen à laprésidence delaCommission, et le vice-chancelier SigmarGabriel. Leparti a recueilli 27,4%des suffrages. J. MACDOUGALL/AFP

Pologne Lespremiers résultats annonçaient la Plateforme civique (PO) dupremierministre Donald Tusk(au centre) en tête. Aumatin, le parti n’obtenait que la deuxièmeplace, avec 31,29 %des votes. J. SKARZYNSKI/AFP

La Finlande a échappé à la vaguepopuliste des élections euro-péennes. Depuis leur succès auxélections législatives de 2011, oùils avaient atteint 19%des suf-frages, les Vrais Finlandais (VF)avaient le vent enpoupe.Ils réalisent finalement une per-formancemoyenne, avec 13%des suffrages. Le parti populisteoccupe la troisièmeplace, derriè-re les conservateurs et les cen-tristes, juste devant les sociaux-démocrates.LesVrais Finlandais avaientreculédans les sondages cesder-nières semaines. Ils réalisenttoutefois un score supérieur àcelui qu’ils avaient obtenu lorsdes élections européennes de2009 et enverront deux députésauParlement européen.Ce parti souverainiste, hostile àl’immigration, a adouci depuislongtemps ses discours pourapparaître commecrédible, ets’est nettement dissocié duFront national français. Pour-tant, l’un des deux futurs dépu-tés VF auParlement sera un cer-tain Jussi Halla-aho, connu pourses propos racistes.

Letauxdeparticipationest

estiméà23%environ,moinsqu’en2009

DonaldTusklimitelamontéedel’euroscepticismeenPologneLepremierministrebénéficiedesastature internationale, acquisependant lacriseukrainienne

130123Mardi 27mai 2014

Page 14: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

14 0123Mardi 27mai 2014international

Petro Porochenko lors de sa conférence de presse, à Kiev, dimanche 25mai. MARIA TURCHENKOVA POUR «LE MONDE»

KievEnvoyé spécial

A circonstances exceptionnel-les, résultathorsnormes.Unpays meurtri n’a pas de

temps à perdre avec de longuesbatailles politiques. Petro Poro-chenko, 48 ans, a été élu présidentde l’Ukraine dès le premier tour,dimanche 25mai. Il était crédité,lundi matin, de 54,13% des voixaprès le dépouillementde 28%desbulletins, très loin devant l’ancien-ne premièreministre Ioulia Timo-chenko (13,5%). Depuis vingt ans,aucun autre président – LéonidKoutchma, Viktor Iouchtchenko,Viktor Ianoukovitch – n’avait reçuunmandatdecette force.

La perte de la Crimée (1,8mil-liond’électeurs),la trèsfaibleparti-cipation dans l’est du pays, en rai-son des violences séparatistes, etl’incapacité d’un Parti des régionsen crise à soutenir un seul candi-dat fort expliquent en partie ce

résultat exceptionnel. Le premierreprésentant dit «de l’Est», SerhyiTikhipko, n’arrive qu’en cinquiè-me position (5%). Mais un autrefacteur a également joué. Le scorede Petro Porochenko, que person-nen’avait anticipé, témoigned’uneffet paradoxal de l’entreprise dedéstabilisation lancée par la Rus-sie après la révolutiondeMaïdan:en portant atteinte à l’intégrité del’Ukraine, elle a consolidé l’unitédupays.

Pour la première fois depuis la«révolution orange» de 2004, lafracture de l’Ukraine en deux–ouest tourné vers l’Europe, estvers la Russie – ne se traduit pasdans les urnes. «Nous vivons dansun nouveau pays», a expliqué levainqueur, dimanche soir, auxcôtés du boxeur Vitali Klitschko,nouveau maire de Kiev. M.Poro-chenko a remercié «du fond ducœur» les électeurs. Il a promis deréaliser les aspirations européen-nes du pays, en signant le traité delibre-échange avec l’UE et en obte-nantla levéedesvisaspourl’espaceSchengen.Mais,enpriorité,ilcomp-te «mettre fin au chaos»dans l’Est.Sonpremierdéplacementauralieudans leDonbass.

Il lui faudra une bonne escorte,car la solidité des fils qui relient la

région au reste de l’Ukraine reste àl’épreuve. Certes, on a suffisam-ment voté, dimanche, pour queKiev puisse prétendre rétablir sonautorité dans l’Est, au nom d’unEtat unitaire. Mais à peine 13% desbureaux étaient ouverts dans larégion. Selon le Comité des élec-teursd’Ukraine,uneONGquiobser-ve l’élection, seuls 18,2% des élec-teursonteu lapossibilitédevoter.

Lesséparatistesnesontpasallésà l’affrontement contre l’arméeukrainienne. Ils se sont contentésde rendre désertes les rues deDonetsk. Pas un seul bureau devote n’y a ouvert. Ils avaient tor-pillélescrutinbienavantl’ouvertu-re enmultipliant les raids dans lescommissions électorales, intimi-dantlesvolontaires,enlevantbulle-tins, listes et tampons en touteimpunité. Preuve symbolique deleurdétermination: RinatAkhme-tov, lemaîtredeDonetsk, est doré-navant pris pour cible. Un rassem-

blement a eu lieu dimanchedevant sa résidence.

La surprise du score réalisé parPetroPorochenkovientnon seule-ment de son ampleur, mais aussidu contraste avec une campagneglobalement terne. Les principauxcandidatsonttousparlédelanéces-sité d’une Ukraine forte face à lamenaceextérieure,deladécentrali-sation, de la lutte contre la corrup-tion.PetroPorochenkoaprofitédetrois facteurs: son imagedemana-ger à succès, comme patron dugroupechocolatierRoshen; levoteutile; la faiblessede ses rivaux.

Le vote utile a été déterminant.En raison de l’annexion de la Cri-mée et des violences croissantesdans le Donbass, il fallait au plusvite doter l’Etat d’une têtepensan-te,agissanteetsurtoutlégitime.Lasouveraineté démocratiquedevait cautériser les atteintes à lasouveraineté territoriale. PetroPorochenko a évoqué dès ce

dimanche les futures négocia-tionsaveclaRussie.«Lepeuplerus-se, comme le peuple ukrainien, apayé un prix élevé pour l’aventureen Crimée», a-t-il rappelé. Le vain-queur réclame aussi des électionslégislatives anticipées, dès cetteannée. Elles se justifient, selon lui,

parce que le Parlement actuel por-te «une responsabilitépolitique, etnonpénale»dans la pente «totali-taire » de l’ancien régime, etnotammentlevotedes lois répres-sivesdu 16janvier.

Resteàsavoirquellestratégieva

adopter le président, pour fairefructifier son succès. Il ne disposepasd’unvéritableparti. Sa victoirespectaculaire traduit aussi, encreux, la faiblesse de ses adversai-res. Ioulia Timochenko n’a pas étécapable de renouveler son image,aprèssasortiedeprisonfinfévrier.

Elle a continué demiser sur unone-woman-show dont les élec-teurs sont lassés. Bien que victimed’une vendetta politico-judiciaire,emprisonnée pendant plus dedeuxans,Mme Timochenkoest vuecommeunefigurearchétypaledesélites compromises depuis la«révolution orange» de 2004. Sesattaques contre Petro Porochenkoau sujet de ses alliances oligarchi-ques, notamment avec l’intermé-diairedusecteurgazier,DmitroFir-tach, n’ont pas eu d’impact.Mêmeson changement de coiffure etl’abandonde la tresse, àdeux joursdu scrutin, ont provoqué de sim-pleshaussementsd’épaules.

Le troisième homme surprisedu scrutin est Oleh Liachko(8,48%). Le chef du Parti radical,une formationnationaliste, estunancien journaliste, devenu unpopuliste controversé. Il a fait par-ler de lui dans la dernière lignedroite de la campagne en revendi-quant l’organisation d’un groupeparamilitaire, destiné à défendrele Donbass contre les séparatisteset les criminels.

Anoter, enfin, le scoreextrême-ment faible des deux figures del’extrême droite, Dmitro Iaroch(PravyiSektor) etOlehTiakhnibok(Svoboda), qui plafonnent chacunà environ 1%. Contrairement auxfantasmes fabriquéspar les télévi-sions russes, l’Ukraine ne s’est paslivrée aux « fascistes » aprèsMaïdan.Elles’estaucontrairedon-née,sansillusions,àunhommeras-surantpar tempsdechaos.p

Piotr Smolar(avec Louis ImbertàDonetsk)

M.Porochenkoaprofitédetrois

facteurs:sonimagedemanageràsuccès,levoteutileet la

faiblessedesesrivaux

L’UkraineporteaupouvoirPetroPorochenkoLavictoirede l’hommed’affairesaupremiertourde laprésidentiellerenforce lecampdespartisansde l’unité

Unoligarqueruséetopportunisteàlatêted’unpaysauborddugouffre

Dansl’estdupays,àpeine13%

desbureauxétaientouverts,etseuls18,2%desélecteursonteulapossibilitédevoter

Portrait

KievEnvoyé spécial

«Uneviemeilleure»: tel a été leslogande campagnedePetroPoro-chenko. La sienne, en tout cas,vientde basculerdansunautremonde, grâce àunevictoire électo-rale sur laquelle personnen’auraitmisé il y a quelquesmois.Nonpas quePetroPorochenko,48ans,manquâtde qualités. Rom-puaux coulissesde la politiqueukrainienne, il a su fairepreuvede flair et d’opportunisme.Affa-ble, pragmatique, pro-européen,entrepreneurcomblé: sonprofilest rassurantpour les électeurs etles chancelleriesoccidentales.

Mais, derrière cetteprésenta-tion favorable, PetroPorochenko,le «roi du chocolat», personnifiedes traits typiquesde la politiqueukrainienne,où les intérêtspublics et privés sont indissocia-bles. Lenouveauprésident faitpartiede la caste des oligarques,cepetit groupedemilliardaires

qui utilisent leurs relaispoliti-ques etmédiatiquespour accroî-tre leur puissance.Difficile, dèslors, de l’imaginer ennettoyeurdesmœursdissoluesdes élites etde la corruption.

«Etre oligarque enUkrainenesignifiepas être impopulaire, sou-ligne le politologueVolodymyrFessenko,du centre Penta. Laplu-part des gens votent sans problè-mepour eux. Cela reflète uneempreintepaternaliste. Si l’Etat neprendpas en charge la vie desUkrainiens, quelqu’undoit le faire,pensent-ils.» Le candidat a jouésur ce sentiment, en répétant quele salairemoyendes employésdesa compagnieRoshenétait de7000hryvnia (438 euros), deuxfois plusqu’auniveaunational.

LaviedePetroPorochenkos’estaccéléréedepuis la fin juillet2013.C’est alorsquedébutent lespres-sionscommercialesde laRussiecontre l’Ukraine,pourqueKievnesignepas l’accordd’associationavec l’Unioneuropéenne.Premiè-recible: Roshen, l’entreprisechoco-latière.A cetteépoque, PetroPoro-

chenkoréfléchitdéjààunestraté-giepour les électionsprévuesen2015.Maïdanva toutbouleverser.

Avantmême l’établissementdesbarricades, il apparaît auxcôtésdes premiersmanifestants,débutdécembre2013,mais se faitmalmener. Il se tiendra ensuite enretrait, tout en apportantun sou-tien financier etmédiatiqueaumouvement.Après troismois deconflit sur la place centrale deKiev, et plus d’une centainedemorts, le présidentViktorIanoukovitchs’enfuit enRussie le22février.Unnouveaugouverne-ment transitoire est formé, uneélectionprésidentielle fixée au25mai.

Plutôt seul que dépendantPendant cettepériode révolu-

tionnaire, les leaders de l’opposi-tionn’ontpas réussi à s’imposerdevantuneopinionpubliquemuepar un rejet généralisédesélites. PetroPorochenkopasseentre les gouttesde cette colère.«Les étoiles lui ont souri, remar-queOlehRibatchouk, ancien chef

de l’administrationprésidentiellesousViktor Iouchtchenko. Il estressorti en contraste avec lesautres personnalités qui coulaientà la tribune car elles s’étaient enga-gées dans desnégociationsavecIanoukovitch.»

Sa chaîne, 5eCanal, a assuréunecouverture favorableauxprotesta-taires, commelors de la «révolu-tionorange», en 2004. Le soir deladestitutiondeViktor Ianouko-vitch, PetroPorochenkoétait surscène, le journal officiel à lamain,célébrant la victoire deMaïdan.Durant la campagne, il s’est enga-gé àvendre ses actifs en casdevic-toire, à l’exceptionde la chaîne.Outre le groupe chocolatier, fleu-ronde ses biens, PetroPorochen-kopossèdeUkrprominvest,unecorporationcontrôlantdifféren-tes sociétés automobiles (voitu-res, bus, tracteurs).

PetroPorochenkoestné en1965àBolgrad,dans la régiond’Odessa.Diplôméde l’universitéTaras-ChevtchenkodeKievenrela-tions internationales, il a débutédans les affairesen importantdes

fèvesde cacao. Il a ensuite rachetédesusinesde chocolat, qui forme-ront le socledugroupeRoshen.

Il a commencésa carrièrepoliti-queenétant éludéputé en1998.Lesannées suivantes leverrontchangerconstammentd’alliances.A cettepériode,onassiste àunerecompositiondupaysagepoliti-que. L’entrepreneurrejointd’abord le Parti social-démocrate,acquis auprésidentKoutchma.En2000,PetroPorochenko formesapropre structure, Solidarité, quiintègre le Parti des régionsen2000.

Maisdès 2001 il entredans lesrangsdeNotreUkraine, le blocdeViktor Iouchtchenko, futur leaderde la «révolutionorange», quisera leparrainde ses filles. Prési-dentduconseil de labanquenatio-nale, il est devenuministredesaffairesétrangèresenocto-bre2009 jusqu’à laprésidentielledébut2010. Il n’a pashésité àrejoindrepar la suiteungouverne-ment composépar le Parti desrégions, duprésidentViktorIanoukovitch. Il devint ainsi, pour

quelquesmois, sonministredudéveloppementéconomique.

La faiblesse et la forcedePetroPorochenko, c’est d’avoir toujourspréféréêtre seulquedépendant.Le voilà éluprésidentdansuncadrecontraignant, le retourà laConstitutionde2004. Les élec-tions législativesanticipées, qu’il aappeléesde ses vœuxdèsdiman-che soir, doivent lui offrir la basepolitique indispensablepourpeser sur le gouvernement.

«Sonparti Solidaritén’estmêmepas enregistré, souligne lejournalisteSerhyi Levtchenko,d’UkrainskaPravda. Ils n’ontpasde site, d’adresse, d’organisation.Onnepeutmêmepas s’y inscrire.»C’est la raisonpour laquelle, aucoursde la campagneélectorale, lecandidat s’est appuyésur les struc-tures régionalesd’Oudar, la forma-tionde sonallié,Vitali Klitschko.Recoudre lepays, le sauverde labanqueroute,prévenir toutnou-veaudébordementrévolutionnai-re: lesdéfis dunouveauprésidentsont à lahauteurde savictoire. p

P.Sm.

Page 15: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

international

LeCaireCorrespondance

A la veille d’un scrutin prési-dentiel sans suspense, quise déroule les lundi 26 et

mardi 27mai, un scrutin confon-dant d’ennui tant on en connaît lerésultat par avance, Wiki Thawra,banque de données en ligne ali-mentée par le Centre égyptienpour les droits économiques etsociaux (ECESR), a mis à jour sesderniers chiffres. Terrifiants, ilssontdignesdesplusduresdictatu-resmilitaires qui soient.

Depuis le coup d’Etat dejuillet2013, 41 163personnes ontété arrêtées – dont 926mineurs et4768étudiants – et transféréesdevant la justice ; 89% d’entreelles ont été interpelléespour leurparticipationàdesmanifestationspolitiques. Seuls 4%sont liés àdesactions terroristes. Et cela, sanscompter les dizaines de prison-niers détenus dans des prisonssecrètes, sans charge retenuecontre eux, soumis auxpires sévi-cesetdel’étatdesantédesquelsonignore tout, selon un communi-qué d’Amnesty Internationalpublié jeudi 22mai.

Enguise de réponse, leministrede la justice, Nayyer Abdelmo-neim Othmane, a annoncé enconférence de presse qu’il n’y

avaitaucundétenupolitiquedansles prisons égyptiennes. Quant auministère de l’intérieur, il refusetoujoursdecommuniquerleschif-fresofficiels,malgré lesdemandesdes journalistes.

Ces violations répétées desdroits de l’homme ne semblentpourtantpasécorner lapopularitédumaréchal Abdel Fattah Al-Sissi,toujoursetencoreprésentépar lesmédias égyptiens comme le «sau-veur de la nation» face aux Frères

musulmans. Les résultats desvotes des Egyptiens de l’étranger,organisés avant le vote en Egyptemême, sont sans ambiguïté. Selonla commissionélectorale, lemaré-chal a recueilli 94,5% des voix,avecuntauxdeparticipationsupé-rieur à celui du premier tour de laprésidentielle de 2012. Sans gran-de surprise, Abdel Fattah Al-Sissidevrait remporter haut lamain lescrutin.Maisbénéficiera-t-ild’uneparticipationélectoralemassive?

Ce sacre annoncé du maréchalentérine-t-il la fin du cycle révolu-tionnaire qui secoue l’Egyptedepuis janvier2011? Le coupd’Etatmilitaire pouvait le laisser penser.Lesrépressionsmassivesà l’œuvredepuis dixmois, cautionnées parles médias égyptiens et le silence,voire l’approbation de la popula-tion, semblent le confirmer. Pisencore qu’un retour en arrière,beaucoup d’observateurs s’accor-dent à dire que le régime est plusautoritairequesousHosniMouba-rak, ne laissant aucune place auxopinionsdivergentes,qu’ellespro-viennent de l’opposition libéraleoudes Frèresmusulmans.

«A la fin des années 2000, il yavait une présence informelle del’opposition, sur la scène politiquecomme dans les médias. Les Frèresétaient actifs dans les syndicats, lesuniversités.Aujourd’hui,ilssontsys-tématiquement réprimés, jetés enprison, exclus de la vie publique»,souligne Moustapha KamelAl-Sayyed, professeur de sciencespolitiquesà l’universitéduCaire.

Difficilededireoù se situe l’opi-nion publique, tant la liberté d’ex-pression estmince aujourd’hui enEgypte.Malgré les affiches, les tee-shirts,lesautocollantsàl’effigieducandidat qui abondent dans lesrues, les manifestations pro-Sissisuscitent peu d’enthousiasme et

ne rassemblent qu’un faible nom-bredeparticipants.

Selon une enquête menée finavril par le Pew Research Center,think tank indépendant basé auxEtats-Unis, 72% des Egyptiens sedisent mécontents des politiquesmenés par leurs dirigeants. Fati-gués après trois annéesd’instabili-tépolitiqueet confrontésàdesdif-ficultés économiques grandissan-tes, 54% des interrogés se pronon-centenfaveurd’ungouvernementstable, au détriment d’un gouver-nementdémocratique (45%).

C’est le cas d’Islam. Ce jeunehommede25ans, habitantdans lequartier populaire de ShubraauCaire, était serveur dans unhôtel de luxe àHurghada. Le coupd’Etatmilitaire,quiaaffectégrave-ment le secteur du tourisme, lui a

faitperdre sontravail. Il estdepuischauffeur de taxi, un travail bienplus pénible, assorti d’un salairebienmoins avantageux. Pourtant,il vote pour le maréchal Sissi.«Avant, j’étais pour la révolution.Maintenant, c’est le chaos. La liber-téestdangereuse. Il nous fautquel-qu’un de fort, d’expérimenté pourtenir le pays. Sissi, ce n’est pasl’idéal. Mais on n’a personned’autre!»

Les défis qui attendent le nou-veau président d’Egypte sontimmenses. Le pays a besoin, enurgence,d’uneréformeenprofon-deur de son systèmeéconomique.Bien qu’affichant une forte crois-sance sous les dernières annéesMoubarak, l’économieégyptienneaffiche de lourds déséquilibres,causés par les privatisations à

outrance et la collusionentre poli-tiques etmilieuxd’affaires.

Des empires privés se sontconstitués, sans souci de redistri-bution des richesses ou de luttecontre les inégalités.

Pendant des décennies, les sub-ventions alimentaires et énergéti-ques ont assuré un minimum deprotection sociale pour les pluspauvres. Mais leur coût, représen-tant 22% du budget de l’Etat, estdésormais ingérable pour un paysde 90millions d’habitants, avecune économie sous perfusion despaysduGolfe.

«“Dupain,de la liberté,de la jus-ticesociale”:aucunedesdemandesrévolutionnairesde2011n’aétéréa-lisée. Et,même avec la propagandedes médias, le charme d’Al-Sissi nedurera pas toujours, prévientMoustapha Kamel Al-Sayyed.Unenouvelle vague de protestationsn’est donc pas à exclure, d’autantqueseposetoujours laquestiondesFrèresmusulmans.Onneparle pasd’une centaine de dirigeants maisdes millions qui ont voté Morsi en2012. Il est nécessaire de les réinté-grer dans le processus politique.»Et le chercheurde conclure: «Il n’yaura pas de stabilité sans que lesproblèmessociauxsoient résolusetsans un minimum de garantiesdémocratiques.» p

MarionGuénard

Bethléem (territoirespalestiniens), JérusalemEnvoyée spéciale

I l y ad’abordeu l’image,diman-che 25mai, peu avant lamesse.Une image d’une redoutable

efficacité. Le pape François, lefront appuyé contre le béton froiddumur qui sépare Israël de la Cis-jordaniedepuisladeuxièmeIntifa-da au début des années 2000, levisage fermé, «priant en silence»,semblant porter la détresse desPalestiniens.Ungeste spectaculai-re, politique et perçu comme telpar les parties enprésence.

Quelques instants plus tard, àl’issue d’une messe joyeuse célé-bréeàBethléem,lepapealancéauxprésidents israélien et palestinienune invitation à venir «prier pourla paix dans [sa] maison au Vati-can». Comme un ultime recoursface à une situation «toujours plusinacceptable»,cetteinitiativeinédi-te, préparée depuis plusieurssemaines en toute discrétion, a étésaluée par les deux hommes etpourrait se teniràRomele6juin.

Après des années de négocia-tionsavortées, de «feuilles de rou-te» et de traités non respectés parles deux parties, rien ne garantitque cette rencontre débouche surd’éventuelles avancées politiques,d’autant que ShimonPérès, le pré-sident israélien achève son man-dat en juillet. Mais elle signe le

retour de la diplomatie vaticanedans les affaires du monde. Lanominationd’undiplomatedecar-rière à la secrétairerie d’Etat,MgrPietro Parolin, par le pape,n’est pas étrangère à cette nouvel-le tonalité.Mais la personnalité deFrançois,enclinàl’activismediplo-matique, compte aussi beaucoup.Contrairement à son prédéces-seur, il rencontre régulièrementlesambassadeursauprèsduSaint-Siège et entretient des contactsréguliers avec les nonces à traverslemonde. La rapiditéavec laquelleil s’est installé sur la scène interna-tionale l’autorise aussi à formulerdespropositionsdece type.«Dansles relations internationales ou surles questions d’environnement, il aacquisenquelquesmoisune formede leadership», analyse le vatica-niste Ignazio Ingrao.

Mais au-delà de ces paroles, leVatican a-t-il les moyens de sesambitions diplomatiques? « Lepape sait qu’il n’a pas de pouvoirpolitique, a précisé son porte-parole à Bethléem, dimanche.Mais il estuneautoritémoralequi,à sa manière, par la prière, peutinviter deux parties en conflit à serencontrer.»

L’histoire vaticane récente aretenu la contribution deJeanPaul II et de ses voyages répé-tés en Europe de l’Est à l’effondre-mentde l’empiresoviétique.L’his-toire plus ancienne évoque aussiFrançois d’Assise, qui, en 1219, serendit auprès du sultan Al-Kamilpour tenter de mettre fin à laguerre entre chrétiens et musul-mans – et le convertir! Mais, dansces affaires, le pape est rarementenpremière ligne.Despersonnali-tés ou des groupes reconnus parl’Eglisecatholique,commelemou-vementSant’Egidio,fontgénérale-mentoffice demédiateurs.

François a visiblement choisiune autre stratégie. Son premiermouvementsurceterraingéopoli-

tique fut la dénonciation forte etrépétée de l’éventuelle interven-tion militaire en Syrie, portée parles Français et les Américains, en2013.S’iln’estpasalléjusqu’àinter-peller directement les partiessyriennes en présence, le papeavait, en septembre, pris l’initiati-ve de s’adresser aux responsablesdu G20, réunis à Saint-Péters-bourg. Dans la missive, adresséeauprésidentrusse,VladimirPouti-ne, le pape François écrivait: «Auxleaders présents, à chacun, je lanceunappel sincèrepourpermettrede

trouver des moyens de surmonterces conflits et de mettre de côté lapoursuitefutiled’unesolutionmili-taire.» Il concluaitenespérantque« ces pensées puissent être unecontributionspirituellevalableà larencontre».

Son appel à la prière pour lapaix en Syrie début septembreavait,demanière inédite,mobilisédesdizainesdemilliers de person-nes à travers lemonde. Le Vaticans’était félicité du renoncementaux frappes militaires, laissantentendre que le message du pape

n’y était peut-être pas pour rien. Achaqueoccasion,devantlesambas-sadeurs ou sur Twitter, François acontinuéàappeleraudialogueetàune solution pacifique. Une posi-tionqu’il a ànouveaudéfendueenJordanie,samedi, lorsdesapremiè-re journéeenTerre sainte.

Car ce voyage annoncé «stricte-ment religieux», selon les termesmêmes du pape, s’est transformédès son arrivée en une successionde gestes et de paroles éminem-ment politiques. Dès ses premierspas à Amman, le pape a renouveléson «appel le plus pressant pour lapaix» en Syrie, pays «ravagé parune guerre qui a duré trop long-temps».«Lafinduconflit,a-t-ilrap-pelé,passeparledialogueet larete-nue, par la recherche d’une solu-tion politique. » Sur le conflitisraélo-palestinien, le pape a insis-té : « Il faut marcher résolumentvers la paix, même en renonçantchacunàquelque chose.»

Sur un terrain plus nouveau, lepape a aussi, devant les autoritésjordaniennes, exhorté la commu-nautéinternationaleà«nepaslais-ser le royaume hachémite seul »face à « l’urgence humanitaire»provoquée par l’afflux massif deréfugiés syriens dans le pays. C’est

aussi de Jordanie que le pape adénoncé le «commerce illégal desarmes» entretenu par des «crimi-nels» qui alimentent les conflits,notammenten Syrie.

Toutescespropositionsde«fai-seur de paix» lancées par le papeont éclipsé les rencontres religieu-ses. La prière du pape avec lepatriarchedeConstantinople,Bar-

tolomée Ier, au Saint-Sépulcre,entouré de représentants des Egli-seschrétiennes,pointd’orgueoffi-ciel du voyage, a débouché sur unengagement à poursuivre « le che-min vers l’unité» entre chrétiens,en dépit «des divisions tragiques»qui les traversent.Unautre terrainpourexercerdestalentsderéconci-liateur.p

Stéphanie Le Bars

Le groupe djihadiste Ansar BeitAl-Makdess, un groupe né en2011 dans le Sinaï et auteur d’at-tentatsmeurtriers en Egypte, adémenti, dimanche 25mai, lamort d’un de leurs leaders dontdes responsablesmilitairesavaient annoncé, vendredi,le décès dans le Sinaï.Ces insurgés, qui disent s’inspi-rer d’Al-Qaida, ont égalementdémenti sur un forumdjihadiste

sur Internet que cet homme,Sha-di Al-Menei, était leur«chef».AnsarBeit Al-Makdess a revendi-qué nombre d’attentats et atta-quesmeurtriers perpétréscontre les forces de sécurité, enreprésailles, selon lui, à la trèssanglante répression dont sontla cible les partisans duprési-dent islamisteMohamedMorsidestitué par l’arméeil y a onzemois.

EnEgypte, l’électionprogramméedumaréchalSissisurfondderépressionLaprésidentielle, lundi26etmardi27mai, intervientalorsque lesaspirationsdémocratiquesontétéérodéespar lescrisespolitiquesetsociales

Lepremiermouvementde

Françoissurleterraingéopolitique

futladénonciationdel’éventuelle

interventionmilitaireenSyrie

«Danslesrelationsinternationales

ousurlesquestionsd’environnement,ilaacquisuneforme

deleadership»Ignazio Ingrao

vaticaniste

Répondant à l’invitation dupapeFrançois, qui a convié, dimanche25mai, les dirigeants palesti-nien et israélien à prier avec luiauVatican pour la paix, le négo-ciateur palestinien Saëb Erakata indiqué queMahmoudAbbas,le président de l’Autorité palesti-nienne, avait «accepté et le lui adit», précisant que la visiteaurait«lieu le 6juin».Du côté israélien, le présidentShimonPérès a«salué l’invita-tion du pape», a indiqué son por-te-parole, sans confirmer qu’ils’y rendrait. «Demain, le pape

rencontrera le président Pérès.Ce sera l’occasion d’être plus pré-cis. Je ne pense pas que nous dis-posions aujourd’hui de tous leséléments», a déclaré le pèreFederico Lombardi, porte-paroledu pape.«C’est une invitation qui a étélancée ce dimanche. Il est bon delaisser au moins un ou deux jourspour qu’il [le président Pérès]prenne sa décision», a-t-il ajou-té. Le père Lombardi n’a niconfirmé ni démenti à ce stadela date du 6juin pourcette rencontre auVatican.

Lerégimeestplusautoritaire

quesousMoubarak,nelaissantaucuneplaceauxopinions

divergentesAnsarBeit Al-Makdess dément lamort de son«chef»

Lepape inviteM.Pérès etM.Abbas à venir prier auVatican

Le pape François devant lemur de séparation entre Israël et la Cisjordanie, dimanche 25mai, à Bethléem. «L’OSSERVATORE ROMANO»/AP

LevoyagedupapeauProche-OrientsigneleretourdeladiplomatievaticaneFrançoisamultiplié les initiativessymboliqueslorsdesonpèlerinageenTerresainte

150123Mardi 27mai 2014

Page 16: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

16 0123Mardi 27mai 2014

BruxellesCorrespondant

L a justice belge a diffusé,dimanche 25mai, un appel àtémoins ainsi que des photos

etdesvidéosde l’attaquemeurtriè-re commise, la veille, contre leMusée juif de la ville, afin de facili-ter l’arrestation de son auteur. Cetattentatdans lequartierduSablon,enplein cœurde la capitale belge afait quatre morts : deux touristesisraéliensetunefemmedenationa-lité française qui officiait commebénévole au Musée. Un jeuneemployé de celui-ci, hospitalisé enétat de mort cérébrale, est décédédans lanuitdedimancheà lundi.

Sur les extraitsmis en ligne parla police à partir d’images captéespar des caméras de surveillance,on distingue un homme vêtud’une casquette s’approchant,samedi dans l’après-midi, de celieu qui ne faisait l’objet d’aucunemesure de sécurité particulière,hormis des poteaux pour empê-cher l’entrée d’une voiture-bélier.Surlesimages, l’homme,apparem-ment de type européen, entredans le hall avec un sac duquel ilsortunearmeàfeuettire,unedou-zainedefois,surlespersonnespré-sentes. Il ressort calmement,moinsde deuxminutesplus tard.

La police croyait tenir une pistesérieuse samedi, un témoin ayantaffirmé que le tireur s’était sauvédans une berline dont il avait notéle numéro d’immatriculation. Enréalité, le tireur était parti à pied et

les camérasontperdusa trace.L’attaque, commise dans un

quartierdegrandeaffluence, a sus-cité un émoi considérable. Le chefde l’Etat, le roi Philippe, s’est dit«indigné». Le premier ministre,ElioDi Rupo, arrivé sur place aprèsses collègues des affaires étrangè-res et de l’intérieur, a évoqué «unpaysunietsolidairefaceàcetteatta-queodieuse». FrançoisHollande, lepape, leCongrèsjuifmondial, l’am-bassadeur des Etats-Unis ont aussiexprimé leur émotion. En Israël, le

premier ministre BenyaminNétanyahouaestiméquelafusilla-de était«le résultat de l’incitationàlahaine contre les juifs et Israël».

«Absolue priorité»Un argument repris par des

représentants de la communautéjuivedeBelgique,quicomptequel-que 40000 membres. Pour JoëlRubinfeld, le président de la Liguebelge contre l’antisémitisme, ils’agissaitd’unacteprévisiblecomp-tetenud’une«libérationdelaparo-

leantisémite». Il anotammentviséles propos de Dieudonné, relayésenBelgiqueparundéputé,LaurentLouis, fondateur du mouvementDebout lesBelges!

Maurice Sosnowski, présidentduCentredecoordinationdesorga-nisations juives, établissait, lui, unparallèle avec l’affaire Merah.Ronald Lauder, le président duCongrès juif mondial, a invité lesautorités européennes à traiter laquestion de la sécurité des juifs enEuropecomme«uneabsoluepriori-té». LesresponsablesduMuséejuifrefusaient des mesures de protec-tion trop importantes, voulant fai-re de leur institution un lieuouvert.

Le royaume n’a pas connu d’ac-tes antisémites violents depuis lafin des années 1980. En 1989, undirigeant de la communauté juiveétait abattu. Son assassin était liéau courant islamiste radical. En1980, un jeune Français était tué, àAnvers,paruncommandoterroris-te palestinien qui avait jeté deuxgrenadesversungrouped’enfants,membres d’une association cultu-relle juive. En 1981, une voitureexplosait devant une synagogued’Anvers et tuait deux personnes.Quelquesmoisplus tard, la grandesynagoguede Bruxelles était viséeetquatre fidèlesblessés.p

Jean-PierreStroobants

international& europe

DEUXFRÈRESâgésde 18et 23 ansont étéagressés, samedi24mai ausoir, àCréteil, alorsqu’ils se ren-daientà la synagogue.«Onétait entraindemarcherdans la rueavecnoskippot [plurielhébreudekippa], on était en costumedevillenormal. Il y adeuxMaghrébinsquisontarrivés et quinousont frap-pés. Ils ont commencéavecmonfrè-reavecunpoingaméricain. Ils luiontbalafré tout le visageet après,ilsm’ont rouéde coupsmoiet sontrepartisavec leurs vélos», a affirméle cadet surBFM-TVetRTL.«Ilsdisaient juste entre eux: “Frappeplus fort !” Il n’yapas eudedialo-gueentrenous.Ona réaliséque

c’étaitunacte antisémite.C’est (…)parcequ’onest juif et qu’onadeskippot», a-t-il ajouté.

Son frère aîné, frappéauniveaude l’œil, a étéhospitalisé. L’attaqueaeu lieuà500mètresdu lieudeculte.«L’agressionest à caractèreantisémite, c’est indiscutable», aassuré lemairePSdeCréteil, Lau-rentCathala. Le chefde l’Etat, Fran-çoisHollande, a affirmé«la volon-téde la Francepourque tous lesjuifsde France se sentent enparfai-te sécurité et tranquillité».

L’agressionaégalementétécondamnée«avecune trèsgrandesévérité»par leministrede l’inté-rieur.BernardCazeneuveaassuré

lesvictimes«dupleinengage-mentdes servicesdepolicepouridentifier et interpellerdans lesmeilleursdélais les auteursde cesactes intolérables».

A lapréfecturedepolice, onconfirmeque l’affaireestprise«trèsausérieux». Lespoliciers s’in-terrogent, toutefois, surplusieurscontradictionsdans lesdéclara-tionsdes témoins, etdans cellesdesdeux jeuneshommes,quiontnotammentaffirméauxenquê-teurs, samedi soir, avoir été frap-péspardes agresseursde type«européen», avantdedécriredes«Maghrébins»dans lesmédias.p

LaurentBorredon

BangkokCorrespondant

L esputschistesthaïlandaisres-ponsables du coup d’Etat du22mai renforcent leur régi-

me et durcissent le ton. Samedi24mai, ils ont dissous le Sénat,concentrant désormais tous lespouvoirs.Dimanche, ilsontpréve-nu qu’ils ne toléreraient plusaucundéfiaprèsuntroisièmejourdemanifestations condamnant lecoup de force de l’armée. «S’ilscontinuent à manifester, nousprendrons des mesures contreeux», aaverti l’undesporte-parolede la junte, le lieutenant généralApiratKongsompong.

Pour l’heure, la mobilisationresteaussimodestequepacifique,mais elle prend de l’ampleur :samedi soir et dimanche, unmillierd’opposantsaucoupd’Etatse sont réunis dans le centre-villede Bangkok avant de convergervers le Monument de la victoire,l’un des grands carrefours de lacapitale.Laprésencedecorrespon-dants de la presse internationaleexplique en partie la réactionmodérée de l’armée. Selon les ter-mes de la loi martiale en vigueur,tout rassemblement de plus decinq personnes pour «motifs poli-tiques» est interdit.

Sur la passerelle du métroaérien surplombant ce monu-ment, les manifestants brandis-saient des pancartes en thaï maisaussienanglais,auxslogansexpli-cites : «Fuck the coup d’Etat ! »,«Wewant to vote!». Certainsd’en-tre eux s’étaient collé du spara-drap noir sur la bouche pourdénoncerlaconfiscationdelaparo-le depuis que le général PrayuthChan-ocha, le chef de l’armée, aannoncé sa prisedepouvoir.

En fin d’après-midi, la foule agrossi.«Jen’ai paspeurde l’armée,jepenseque lenombredeprotesta-taires va augmenter dans les joursquiviennent»,espéraitVisarut,unhomme de 30ans qui se présentecommeunprofesseur de l’univer-sité de Chulalongkorn, située àBangkok.

L’ancienne première ministreYingluck Shinawatra, destituée le7mai, a été libérée dimanche,après deux jours de détention.Mais beaucoup de ses partisans etde ses anciens ministres restentdétenus dans des casernes de l’ar-mée. On est sans nouvelles decertains, dont Pansak Vinyaratin,l’unde ses conseillers. Professeursetintellectuelsprodémocratesontdevenus la cible du nouveaurégime.

Pravit Rojanaphruk, du quoti-dien anglophone TheNation, a étéle premier journaliste à se voirconvoquer par la junte. Avant derépondreàcetteinjonctiondiman-che, il s’est fait photographier labouchebâillonnée avec la légendesuivante: «Vous pouvezm’arrêtermaisvousnepourrezjamaisempri-sonnerma conscience!»

Dans la foule, Visarut remar-quaitaussique«l’arméeavaitpro-mis de ne pas faire de coup d’Etat.

Ils n’ontpas respecté leurparole. Etmême s’ils ont arrêté des gens desdeux camps opposés, des “jaunes”commedes “rouges”, cen’est qu’unleurre. Ils sont pour les “jaunes” ».Pour faire bonne mesure, lesmilitaires ont en effet arrêtéSuthepThaugsuban, le chef de filedu mouvement d’opposition augouvernement, ainsi que l’un deses alliés, Abhisit Vejjajiva, prédé-cesseur et adversaire acharné deYingluck.

Lesmilitants de cemouvement– qui défilent habillés en jaune, lacouleur de la monarchie – ontmanifesté durant des mois dansBangkokpour exiger la démissiondu gouvernement de Yingluck.Hostilesàl’organisationdenouvel-les élections, ils exigeaient quesoit forméun«conseildupeuple»,«neutre», chargé de «réformer»les institutions. Leputscha répon-du à leurs attentes.

Dans leur viseur, il y avait sur-tout l’ancien premier ministreThaksin Shinawatra, frère de Yin-gluck, lui aussi renversé par lesmilitaires en 2006. Depuis sonexil de Dubaï, il continuait à pilo-ter le gouvernement de sa sœur. Il

personnifie tout ce que détestentles élites traditionnelles prochesdu Palais et de l’armée. Son passa-geauxaffaires,entre2001et2006,avait vu l’émergence politique etl’amélioration du niveau de viedes Thaïlandais d’origine paysan-ne, de plus en plus critiques àl’égard des élites traditionnelles,vrais tenants dupouvoir.

«Il nous faut démontrer que ladémocratie est une priorité ainsique l’Etat de droit, affirmait Suda,une manifestante se présentantcommeune femme au foyer. Je nesuispaspartisane.Maissiêtre“rou-ge” signifie êtredémocrate, alors jele suis !»

Même si tous les Bangkokiens,loin s’en faut, ne sont pas hostilesaux putschistes après desmois detroubles, les perspectives deviolence à l’égard du nombrecroissant d’opposants ne sont pasàécarter.L’histoirede laThaïlandecontemporaine a vu l’armée selivrer à desmassacres ou à de san-glantes répressions en 1973, 1976,1992 et 2010.

«Ce coup d’Etat n’est pas uncoupdeforce,maisunactedésespé-ré, un lamentable chant du cygnepour cette armée qui n’a jamais eud’autre rôle que de réprimer lapopulation et s’essayer à gouver-ner le pays, estime la doctorantefrançaise en sciences politiquesEugénieMérieau. Degravesviolen-cessontaujourd’huiàredouter,carles deux camps sont organisés etentraînésà l’action collective.»p

BrunoPhilip

BruxellesCorrespondant

L es élections législatives etrégionales,quisedéroulaientenmêmetempsque leseuro-

péennes en Belgique, dimanche25mai, ont été marquées par uneforteprogressionduparti indépen-dantiste Alliance néoflamande(NVA). Le parti de Bart DeWever aséduit environ un tiers des élec-teurs flamands. Il décroche 43 siè-ges sur 124 au parlement régional(+27parrapportà2009)et34(+7)àla chambre fédérale des députés,ce qui conforte son statut de pre-mière force dupays.

Cette victoire a été acquise engrandepartieaudétrimentdel’ex-trême droite séparatiste et xéno-phobe.LeVlaamsBelangnepossè-de plus que 6 sièges (-15) au parle-mentrégionaldeFlandreet3dépu-tés fédéraux (-9).

Ducôtédespartisde lamajoritéfédérale sortante, on insistait dèsdimanche soir sur ce glissement,quipourraitentraîneruneradicali-sation de la NVA, laquelle défenddéjà un programme institution-nel et socio-économique très dur.

Parailleurs, lasanctionpromise

par M. De Wever à ceux quis’étaient alliés à son ennemi privi-légié, le premierministre socialis-te wallon Elio Di Rupo, n’est pasintervenue. Globalement, les par-tis néerlandophones (chrétiendémocrate, libéral et socialiste)qui ont gouverné avec celui-ci ontmaintenu leur position au niveaufédéral et possèdent même unemajorité régionale (64sièges sur124) leur permettant, en théorie,de gouverner sans laNVA.

Le feront-ils, quitte peut-être às’allier aux écologistes de Groen!,qui réalisent9%desvoix?Sont-ilsprêts, aussi, à reconduire la coali-tion fédérale sortante avec leurshomologues francophones? Ilspossèdent un nombre de siègessuffisantmais doivent bien consi-dérerque,dansunpremier temps,

le parti deM.DeWever s’est renduincontournable. Et qu’il ne serapasfaciledefairefid’unpartipourlequelavotéunFlamandsur trois.

C’estaussicequedevraitconsta-ter le chef de l’Etat, le roi Philippe,quin’intervientpasdans la consti-tution des majorités régionales,mais organise les procédures auniveau fédéral. Il doit procéder,dès lundi 26mai, à des consulta-tions.Et il luisera impossibledenepasconfierunemissionauchefdelaNVA.Celui-ci ahésitésur sa stra-tégie mais, aux dernières nouvel-les, il seraitprêtà«assumerses res-ponsabilités». C’est-à-dire devenirlepremierministred’unpaysqu’ilcroit voué à la disparition.

Les partis francophones neferont rien pour lui faciliter latâche,commeaprèslesélectionsde2010, qui avaient entraîné une cri-sedecinqcentquarantejours.LePSconnaît une légère érosiondueà lapousséedelagaucheradicale(10%)enWallonie et perd deux sièges dedéputés (il endétient24). Il demeu-retoutefoisledeuxièmepartinatio-nal. Avec sonhomologue flamand,le SpA, il forme la première«famille politique» du royaume,insistaient ses dirigeants, diman-

che.EtM.DiRupomise,dèslors,sursapossible reconduction.

Le Mouvement réformateur(libéral), qui avait indiqué durantla campagne qu’il refuserait uneallianceavec laNVA,aété confortépar les électeurs. Il gagnedeuxsiè-gesetpossèdedésormais20dépu-tés. Le troisième parti de la coali-tion sortante, les centristes duCDH, n’a perdu qu’un de ses 9 siè-ges. Ces résultats restaient toute-foisprovisoires:unepannedusys-tèmedevoteélectroniqueapertur-bé le dépouillementàBruxelles.

Au total, l’éclatante victoire delaNVAneserait-ellequ’untrompe-l’œil? M.De Wever n’était, en fait,pas assuré d’accéder au pouvoirlundi. Reste à savoir si ses rivauxflamands et, surtout, son ancienallié le parti chrétien-démocrateCD&Voseront l’en exclure.

M.De Wever estime que sa for-mation a «écrit une page d’histoi-re, celle d’une Flandre voulantdéterminer son destin». Et le chefnationalisteaindiquéqu’ilnevou-lait pas d’une crise de longuedurée, sans toutefois expliquercomment il comptait s’y prendrepour l’éviter.p

J.-P.S.

VictoiredesnationalistesflamandsauxélectionsbelgesLaNVA,partiduséparatisteBartDeWewer, est lapremière forcedupays,mais reste isolé

Capture d’écran de la vidéo de surveillance diffusée par la police belge, dimanche 25mai. BELGA/AFP

LaBelgiquesouslechocaprèsl’attaquemeurtrièreauMuséejuifdeBruxellesLapoliceadiffusé les imagesde l’hommeresponsablede lamortdequatrepersonnes

Deuxfrèresjuifs«rouésdecoups»àCréteil

AfghanistanVisite surprise deBarackObamaKABOUL.Leprésident BarackObamaa promisde dire rapide-ment combiende soldats américains seraient appelés à rester enAfghanistanaprès le départ de l’OTAN fin 2014, lors d’unevisitesurprise, dimanche25mai, sur la basedeBagram.BarackObaman’apas rencontré sonhomologueafghan,HamidKarzaï. – (AFP.)

ColombieDuel à droite à la présidentielleBOGOTA.Oscar IvanZuluaga (droite) est arrivé en tête dupre-mier tourde la présidentielle colombienne, dimanche25mai,avec 29%des voix, devançant le président sortant, JuanManuelSantos (centre-droit), qui a recueilli 25,7%des suffrages. – (AFP.)

AllemagneBerlin dit non auxpromoteursBERLIN. Les Berlinois ont rejeté, dimanche 25mai, le projet de lamairie de construiredes immeubles sur unepartie de l’ancienaéroportdeTempelhof. Ce terraindeplusde 300hectares en cen-tre-ville devrait donc rester inoccupé.

« S’ilscontinuentàmanifester,

nousprendronsdesmesurescontreeux»

Apirat Kongsompongporte-parole de la junte

Thaïlande: lesmilitairesrenforcentleurempriseaprèslecoupd’EtatLesmanifestationscontre lesputschistes,quiontdissous leSénat,demeurent limitées

L’éclatantsuccèsdelaNVAneserait-ilqu’untrompe-l’œil ?M.DeWevern’étaitpasassuré, lundi,

d’accéderaupouvoir

Page 17: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

économie

Pour contacternos chargés d’affaires :ALSACESTRASBOURG 03 88 56 88 56AQUITAINEBORDEAUX 05 56 48 46 46PAU 05 59 27 10 60AUVERGNECLERMONT-FERRAND 04 73 34 49 90BOURGOGNEDIJON 03 80 78 82 40BRETAGNERENNES 02 99 29 65 70BREST 02 98 46 43 42SAINT-BRIEUC 02 96 58 06 80LORIENT 02 97 21 25 29CENTREORLÉANS 02 38 22 84 66TOURS 02 47 31 77 00CHAMPAGNE-ARDENNEREIMS 03 26 79 82 30CORSEAJACCIO 04 95 10 60 90FRANCHE-COMTÉBESANÇON 03 81 47 08 30ÎLE-DE-FRANCEPARIS 01 53 89 78 78ÎLE-DE-FRANCE ESTNOISY-LE-GRAND 01 48 15 56 55ÎLE-DE-FRANCE OUESTPARIS-LA DÉFENSE 01 46 52 92 00LANGUEDOC-ROUSSILLONMONTPELLIER 04 67 69 76 00PERPIGNAN 04 68 35 74 44LIMOUSINLIMOGES 05 55 33 08 20LORRAINENANCY 03 83 67 46 74METZ 03 87 69 03 69MIDI-PYRÉNÉESTOULOUSE 05 61 11 52 00NORD-PAS DE CALAISLILLE 03 20 81 94 94BASSE-NORMANDIECAEN 02 31 46 76 76HAUTE-NORMANDIEROUEN 02 35 59 26 36PAYS DE LA LOIRENANTES 02 51 72 94 00LE MANS 02 43 39 26 00PICARDIEAMIENS 03 22 53 11 80POITOU-CHARENTESPOITIERS 05 49 49 08 40PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZURMARSEILLE 04 91 17 44 00NICE 04 92 29 42 80RHÔNE-ALPESLYON 04 72 60 57 60SAINT-ÉTIENNE 04 77 43 15 43VALENCE 04 75 41 81 30GRENOBLE 04 76 85 53 00ANNECY 04 50 23 50 26GUADELOUPE 05 90 89 65 58GUYANE 05 94 29 90 90LA RÉUNION 02 62 90 00 66MARTINIQUE 05 96 59 44 73MAYOTTE 02 69 64 35 02

90% DE NOS DÉCISIONSSONT PRISES EN RÉGION.

Entrepreneurs,Bpifrance accompagneet finance votre projet,en étroite collaboration avecses partenaires : Région,banques, investisseurs…Contactez votrechargé d’affaires sur

bpifrance.fr

RC

S50

752

367

8

L e choc est rude pour ThomasPiketty. L’économiste fran-çais, devenu la coqueluchede

la gauche américaineavec sonder-nier livre Le Capital au XXIe siècle(Seuil,2013), a fait la«une»de l’édi-tion du Financial Times (FT), dessamedi24 et dimanche25mai, nonpour l’encenser,mais pour contes-ter la solidité de ses travaux. Larevue Science lui avait ouvert sescolonnes, le 23mai, ainsi qu’àEmmanuel Saez, un économistefrançais professeur à l’universitéde Berkeley, avec lequel il a tra-vaillé sur les inégalités.

Le journal britannique porteune grave accusation contreM.Piketty, directeur à l’Ecole deshautes études en sciences socialeset professeur à l’Ecole d’économie

deParis: il l’accused’avoir fait«deserreurs de calcul» qui «faussent lesrésultats»deson travail.

Les journalistes du FT, ChristianGilesetFerdinandoGiugliano, fontétat notamment «d’erreurs detranscription, de calculs contesta-blesdemoyenne,denombreuxajus-tements inexpliqués de chiffres, dedonnées non sourcées, du recoursinexpliquéàdespériodes temporel-lesdifférentes…».Deserreurs«suffi-samment sérieuses», selon eux,pouraffaiblir la thèseprincipaledeM.Piketty, à savoir qu’une partcroissante de la richesse totale estdétenuepar lesplus riches (le cher-cheur propose d’instaurer unimpôtprogressif sur le capital).

On l’aura compris : l’écho ren-contrépar les travauxdeM.Piketty

sur l’accroissementpar le haut desinégalitésderevenusagacelequoti-dien, d’autant qu’ils ont été saluéspar de nombreux économistes etchercheurs. Parmi eux, les keyné-siens, Prix Nobel d’économie, PaulKrugman ou Joseph Stiglitz–auteur du Prix de l’inégalité (LLL,2012)–,dontlestravauxmettentenévidence lemêmephénomène.

Dans sa réponse, publiée par leFT,M.Pikettycommenceparseféli-citerdevoirlesjournalistesduquo-tidien se servir des tableaux Excelqu’il a lui-même mis en ligne. Ilreconnaît aussi qu’« il faut faireaujourd’hui avec ce que l’on a, àsavoir un ensemble de sources trèsdiversesethétérogènessurlariches-se». «Ainsi que je l’explique dansmon livre, dans l’annexe en ligne et

dans les nombreux articles techni-ques que j’ai publiés, il faut faire uncertain nombre d’ajustements surles données brutes pour les rendreplus homogènes dans le temps et

dans l’espace», ajoute-t-il. « Je nedoute pas du fait quemes séries dedonnées historiques seront amélio-réesàl’avenir,maisjeseraistrèssur-

pris que cela change en quoi que cesoitmesprincipalesconclusionssurl’évolutionà long termede la distri-butiondes richesses», précise-t-il.

Sur sonblogduNewYorkTimes,dansunpost du 24mai intitulé «IsPiketty All Wrong?», M.KrugmanvientausecoursduFrançais. Il sou-tientsesconclusionssurladynami-que des inégalités tout en relevantque l’universitaire devra répondreauxcritiquesqui lui sont faites.

Interrogé le 24mai par Le Mon-de, l’économiste, que ses rivaux enFrance voient dans leurs pires cau-chemars succéder en 2015 à EstherDuflo sur une des chaires annuel-les du Collège de France, a qualifiél’articleduFTd’«attaquepurementidéologique». «Tous les classe-ments de fortunes du monde indi-

quent que les plus hauts patrimoi-nes ont progressé beaucoup plusvite que la moyenne des patrimoi-nes.SileFTaunclassementdefortu-nes indiquantdesconclusionsdiffé-rentes, qu’il le publie ! Pour finir,c’est la façon la plus claire de poserle débat: le top croît-il plus vite quela moyenne, oui ou non? D’aprèsForbes, trois fois plus vite», rappel-le-t-il, tout en faisant état de «nou-veauxgraphiqueséloquents»surlaquestion d’Emmanuel Saez et deGabriel Zucman, professeur à laLondonSchoolofEconomics.

En affirmant que les erreursqu’il a repérées sont «semblables àcelles qui ont mis àmal, en 2013, letravail sur la dette publique et lacroissance des économistes améri-cains Carmen Reinhart et KennethRogoff», le FT va peut-être un peuvite en besogne. La thèse en ques-tion, publiée en 2010, a longtempsété invoquéepour justifier lespoli-tiques d’austérité. Mais des cher-cheurs de l’universitéAmherst quil’ontcorrigéedeseserreursfactuel-les, refaiteetrecalculée,ontobtenudes résultats radicalement inver-ses à ceux présentés par MmeRein-hart et M.Rogoff. Le travail minu-tieux des chercheurs d’Amherst aétéconfirmé,depuis,paruneétudedu Fondsmonétaire internationalde février2014 («Dette et croissan-ce: y a-t-il une limite magique?»).Alors que la croissance des inégali-tés de répartition des revenus adéjà fait l’objet de nombreusesautres mesures et constats noncontestéscesdernièresannées. p

ClaireGuélaudetAdriende Tricornot

«Sile“FT”aunclassement

defortunesindiquantdesconclusionsdifférentes,

qu’il lepublie!»ThomasPiketty

M.Pikettyjuge«idéologique»lachargedu«FT»Lequotidienbritanniquedesaffairesépingle les«erreursdecalcul»dudernierouvragede l’économistefrançais

Aujourd’hui, le«FT»n’estplusrétifaujournalismed’investigation

C hrisGiles, responsablede larubriqueéconomiqueauFinancialTimes (FT), estun

hommechanceux.A la suiteà lapublication, le 15mai, des chiffressur la richesseauRoyaume-Unipar l’Officebritanniquedes statis-tiques,unresponsablede l’éditionduquotidien luidemanded’ac-compagnersonarticled’unecom-paraisoninternationale.

L’«EconomicsEditor» consultealorsLeCapitalauXXIesiècle(Seuil, 2013), lebest-sellerde l’éco-nomiste françaisThomasPiketty.Lesprésuméeserreursqu’ildécou-vresur leRoyaume-Unisontàl’originede lapublicationdans le

journaldatédes samedi24etdimanche25maid’unarticleépin-glantunouvragequi, à lire laman-chette,«exploite le zeitgeist[l’espritdu temps]des inégalités».LescalculsdeChrisGilesontétévérifiéspar troisautres journalis-tesen interne,notammentpar lespécialistedes statistiques, etparunexpertextérieur.

Le samediestun jourspécialpour leFT. L’éditionduweek-endproposeenplusd’unseul cahiermacro-etmicroéconomique,deuxsuppléments, immobilieretculturel, etunmagazinequiconnaissentungrandsuccès. Lapublicationà la«une»des criti-

quescontreM.Piketty,phénomè-ned’éditiondans lemondeanglo-saxon,étaitdestinéeà leurdon-ner leplus largeéchopossible.

Manchettes accrocheusesDepuis la crisede 2008, leFT

s’est lancédans la courseauscoop.Jusque-là, lequotidiendesaffairesévitaitde seprécipiter suruneinformationsensibleparpeurderuinersa réputationd’excellenceprudemmentbâtiedepuis sa fon-dation,en 1888.Mieuxvalaitdonctardou jamaisque faux.Procheparessencede laCity, le titreavaittendanceàéviter certainssujets,commel’évasion fiscaleou l’origi-

nede la fortune.Aujourd’hui, leFTn’estplus rétif au journalismed’investigation.La créationd’unecellule«enquêtes» témoignedecettevolontédeneplus laisserdedossieren jachère. Lequotidienvientde réaliserquelquesbeaux«coups», à l’instardesdirecteursfantômesdecompagniesboîtesaux lettresaux îlesCaïmans,de labombeàretardementde l’écono-miede l’ombrechinoiseoudescoulissesdusauvetagede l’euro.

Plusieursfacteursexpliquentce revirement. LeFTa leventenpoupe, commel’indique lapro-gressiondesadiffusionpayantede 11%surunan (665000exem-

plairesquotidiens–papieretnumérique–aupremier trimes-tre).Un tiersdesabonnéssontauxEtats-Unis.Or l’éditionaméricai-neest confrontéeà la rudeconcur-renceduWall Street JournaletduNewYorkTimes, à lapointedesrévélationssur lesdérivesde lafinance.Par ailleurs, lenuméri-que,qui constituedésormaisdeuxtiersde sesabonnés, encou-rage le recoursauxmanchettesaccrocheuses.«SurFt.com, l’im-pactdesmots-clésest commerciale-mentmesurable», indiqueEndersAnalysis, spécialistedesmédias. p

MarcRoche(Londres, correspondant)

170123Mardi 27mai 2014

Page 18: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

Chez le concepteur de logiciels Adobe Systems, à San Francisco. DAVID PAUL MORRIS/BLOOMBERG/GETTY IMAGES

économie

San FranciscoCorrespondance

U beraffole les compteurs.Lasociété américaine de voi-tures de tourisme avec

chauffeur (VTC) serait, selon l’édi-tion du Wall Street Journal dusamedi 24mai, sur le point deconclure une nouvelle levée defonds, d’un montant de 500mil-lions de dollars (370millions d’eu-ros). Cette sommes’ajouterait aux307millions de dollars déjàrecueillis depuis sa création enmars2009. Elle permettrait definancer ledéveloppementde l’ac-tivité, notamment à l’étranger, etde poursuivre le processus dediversification.

Ce tour de table valoriseraitUber à 12milliards de dollars(8,8milliards d’euros). Un chiffrequi s’est envolé en neufmois : il aété multiplié par plus de troisdepuis l’investissement réalisé enaoût2013 par Google Ventures, labranche de capital-risque du célè-bremoteur de recherche.

La jeune entreprise deviendraitainsi la start-up lamieuxvaloriséedanslemonde,devançantsescom-patriotes Dropbox (stockage defichiers en ligne) et Airbnb (loca-tion de logements entre particu-liers), toutesdeuxvaloriséesàhau-teurde 10milliardsde dollars.

Lancé en 2010 dans les rues deSan Francisco (Californie), Uber arapidement révolutionné un sec-

teur en manque d’innovation etde concurrence. Avec son applica-tion mobile permettant de com-mander une voiture en quelquessecondes, la start-up a d’abordséduit une clientèle jeune et bran-chée.Sapopularitéestdepuisalléecrescendo. En 2013, le service, quine proposait jusque-là que deschauffeurs professionnels, s’estouvert aux particuliers, transfor-mantM.Tout-le-mondeen taxi.

La start-up ne publie aucunedonnée financière.Mais des docu-ments internes dévoilés fin 2013par le site Valleywag permettentde mesurer son succès. Entre lami-octobre et la fin novembre, leservice a généré 20,5millions dedollars de chiffre d’affaires parsemaine. En extrapolant, celareprésenteplusde1milliarddedol-lars par an.

Ubernefaitofficequed’intermé-diaire entre les clients et les chauf-feurs, qui doivent prendre à leurcharge l’achat et l’entretiende leurvoiture. La start-up ne conservegénéralement que 20% du prixpayépar lespassagers. Ses revenusnets s’élèveraient ainsi à environ200millions de dollars, sur unebaseannuelle.

«Novembre est notre mois leplus faiblede l’année», avait tenuàpréciser Travis Kalanick, son PDG.Autrement dit : ces estimationssont certainement déjà dépassées,d’autantplus que le dirigeantmet-tait en avant, fin novembre, une

croissance mensuelle à deux chif-fresde sonactivité.

Uberestdisponibledansplusde100villesdans lemonde,dontplusdelamoitiéauxEtats-Unis.EnFran-ce, le service a été lancé à Paris,Lyon et Cannes. La société est pré-sentedans36pays.Etellenecomp-tepas s’arrêter là.

Elle prévoit d’embaucher plusde 200000chauffeurs en deuxans pour accompagner son déve-loppement. Elle courtise notam-ment les chauffeursde taxis.A SanFrancisco, un tiers d’entre euxauraient déjà abandonné leurslicences au profit d’Uber et de sesconcurrents.

«Endeuxans, le revenumoyenaété divisé par deux», peste TrevorJohnson,directeurde l’Associationdes chauffeursde taxide SanFran-cisco. Dans d’autres pays, la colèremonte aussi. Plusieurs fédérationsdetaxisontainsiappeléàunejour-néedemanifestationle11juindansplusieurs capitales européennes.

Les achats en ligneEn France, la grogne s’est expri-

méepardes journéesdegrèvesquise sont soldées par des dizaines dekilomètres d’embouteillages. Pourtenter de désamorcer la crise, legouvernement avait alors tentéd’imposerundélaidequinzeminu-tes entre la réservation et la priseen charge du client. Mais cettemesure a été suspendue en févrierpar leConseild’Etat.

Dans plusieurs villes américai-nes, les taxis ont saisi la justicepour obtenir l’interdiction de cesservices.Uberdoitaussi faire faceàune concurrence de plus en plusintense. A l’étranger, il doit parfoislutter contre des acteurs locaux,comme Chauffeurs-privés.com,LeCabouAllocabenFrance.

Aux Etats-Unis, la start-up estengagée dans une véritable guerredes prix avec Lyft. Depuis le débutde l’année, les deux rivaux ontréduit leurs tarifs, au détriment deleurmarge.Etdoncde leurrentabi-lité.Mais ils disposentd’une tréso-rerie suffisamment importantepour se le permettre. A plus longterme, M.Kalanick voit beaucoupplusgrand. Il neveutpas se limiteraux transports de personnes. Ilveut étendre son activité, avec «denouvelles idées de logistique urbai-ne» utilisant sa plate-forme tech-nologique. Uber a multiplié lesexpériences ces derniers mois.Débutavril,elleaaussilancéunser-vicede coursiersàNewYork.

Toutcelanepourrait cependantn’être qu’une étape vers un mar-ché plus prometteur encore : lalivraison le même jour pour lesachats en ligne.Amazon,Google eteBay ont déjà ouvert les hostilités.Uber a également testé ce service,findécembre2013àBoston(Massa-chusetts).C’estcepotentieldecrois-sance que paient aujourd’hui lesinvestisseurs. p

JérômeMarin

NewYorkCorrespondant

L eursnomssont célèbresdansle monde entier. Apple, Goo-gle, Intel et Adobe Systems

ont accepté, samedi 24mai, de ver-ser 324,5millions de dollars(238millionsd’euros)pourrégleràl’amiable une affaire qui les oppo-sait à d’anciens salariés. Ces der-niers, environ 64000, avaientintenté une action en justice en2011, car ils accusaient ces grandsnoms de la Silicon Valley de s’êtreentendus pour former pendantdes années une entente illégaleafindenepasdébaucherleurssala-riés respectifs.

S’estimant floués sur le plan deleurrémunérationetdeleurévolu-tion de carrière, ils avaient lancéune action collective pour obtenirdes dédommagements évaluéspar leurs avocats à 3milliards dedollars.Apple,Google, InteletAdo-be,sansreconnaîtreleurstorts,ontpréféré transiger pour éviter unprocès.

De façon séparée, eBay a égale-menttrouvéunaccord le 1ermai. Legroupe de distribution est prêt àfaire un chèquede 3,75millions dedollars, dont 250000dollarsd’amendeet3,5millionsdestinésàun fonds d’indemnisation pourmettre fin auxpoursuites.

Mais ce règlement à l’amiablenesatisfaitpas touslesplaignants.MichaelDevinen’apas l’intentionde lâcher. Ce programmeur infor-matiquede 46ans, après avoir tra-vaillédeuxanschez le fabricantdelogiciels Adobe à la fin des années2000, est désormais travailleurindépendant à Seattle (Washing-ton). Il veut obtenir une « juste

réparation» de la part de cesgrands groupes de la high-techaméricaine.

De façon assez inédite, il a écritle 11mai une lettre à la juge LucyKohchargéede l’affaire, auseindutribunal dudistrict nord de la Cali-

fornie, à San Jose, lui demandantde rejeter l’accord trouvé par lesavocats de la class action. «Nousvoulons faire entendre notre voixdevant le tribunal», fait-il valoir,en faisant remarquer que les som-mesconsentiespar lesmultinatio-nales ne représentent que 10% deceque les plaignants réclamaient.

«Si un voleur était pris en trainde voler un iPad à 400dollars dansun Apple Store, est-ce que ce seraitune solution juste et équitable qu’ilpaye à Apple 40dollars, garde l’i-Pad, et reparte sans reconnaître sestorts?», interroge-t-ilpar analogie.

Il estvraiquelesentreprisesontété effectivement prises la maindans le sac. Depuis des mois, lespreuves s’accumulaient sur lebureau de la juge au traversd’échanges de courriels au plushaut niveaude ces groupes. Le butétait d’éviter une guerre desembauches, qui aurait été ruineu-sesur leplandes salaireset contre-productivepour les entreprises enaccélérant le turnover des talents.Sergey Brin, le fondateur de Goo-gle, relate ainsi, dans un courriel

daté de 2005, des échanges avecSteve Jobs, alors patron d’Apple, àpropos des démarches qu’il avaitentreprises pour débaucher desmembres de l’équipe qui tra-vaillait sur Safari, le navigateur dela firme à la pomme. « Si vousembauchezuneseuledecesperson-nes,c’estlaguerre», luiauraitdécla-ré Steve Jobs, décédé depuis. Quel-ques semaines plus tard, un pactede«non-agression» était scellé.

De la même façon, en jan-vier2013, l’ancien PDG de Palm,Edward Colligan, avait déclarésous serment que Steve Jobs «sug-gérait que, si Palm n’acceptait pasl’arrangement [sur lesembauches], Palm pourrait êtrepoursuivi en justice pour la viola-tion de nombreux brevets d’Ap-ple».EdwardColliganavaitécritenaoût2007: «Votre proposition denousmettred’accordpourqu’aucu-ne de nos entreprises n’embauche

les salariés de l’autre (…) n’est passeulementmauvaise,elleestproba-blement illégale» et lui assura quePalmn’étaitpas«intimidé»par lesmenaces d’Apple. Mais pour unrefusdemarcherdans la combine,combiend’accords tacites?

S’appuyant sur plusieurs dizai-nesdecasconcrets, laplaintedépo-sée en 2011 accusait les hauts diri-geants des entreprises concernées«d’avoir élaboré un réseau inter-connecté de pactes explicites pouréliminer toute concurrence entreeux sur les travailleurs qualifiés».La sophisticationétait telle que lessociétés ayant adhéré à ces «pac-tes » devaient ne pas tenter derecruter leursemployésrespectifs,seprévenir si jamaiselles faisaientune offre à un salarié d’un autregroupe et ne pas faire de contre-offre si un employénégociait avecl’uned’elles.

«L’effet espéré – et réel – de ces

accords a été de contrôler les salai-res des employés et d’imposer deslimites illégales à leur mobilité»,concluait laplainte.

Lorsque l’affaire éclate,M.Devi-nedécouvredanslapressequ’Ado-be, pour lequel il a travailléentre2006et2008,selivraitégale-

ment à de telles pratiques. «Indi-gné», il décide alors de se lancerdans la bataille juridique. En octo-bre2013, la justice reconnaissait lebien-fondéde l’action collective.

Face à l’embarras d’un grand

déballage de leurs pratiques aucours d’un procès initialementfixé le 27mai, les géantsde lahigh-techontacceptéd’ouvrir leurspor-tefeuilles. La saignéen’est pas tropimportante: lesbénéficescumulésd’Apple,Google, Intel etAdobeontdépassé les 60milliards de dollarsen2013.

De leurcôté, les avocatsdesplai-gnantsont préféré tenir que couriren privilégiant l’efficacité d’unenégociation, quitte à obtenir unmontant bien moins importantque lespremièresévaluations.Unesolution qui rend amer M.Devine,qui demande au tribunal de «reje-ter»unaccordqu’ilestime«inéqui-table» et «injuste». Mais à la veillede l’examen de sa requête, le pro-grammeur semble bien isolé pourque l’accord trouvé avec lesmulti-nationales puisse être remis enquestion. p

Stéphane Lauer

INFORMATIQUE

AtoslanceuneOPAsurBullLe groupe français de services informatiquesAtos va lanceruneoffrepubliqued’achat amicale sur le dernier constructeur infor-matique tricolore, Bull. Atos propose4,90euros par actionBull,ce qui valorise l’ensemblede la société à 620millions d’euros,selonun communiqué communpublié lundi 26maipar lesdeuxentreprises.Ceprix est supérieurde 22%audernier cours coté du titre(4,01euros vendredi soir). Il traduituneprimede 30% sur lecoursmoyendeBull durant les trois derniersmois.Le rapprochement entre Bull et Atos, l’undes grandsnomsdesservices informatiques, donneranaissanceaunuméroundu«cloud» en Europe, ont fait valoir les deux entreprises.Cette technologie, qui consiste à stockerdesdonnées surdes ordi-nateurs distants et à les gérerpar le biais d’Internet, connaît undéveloppementspectaculairemaisnécessitedes compétencesfortes enmatière deprotectiondes données. – (AFP.) p

Finance La réforme duLivretA pourraitne pas aller à son termeLe gouvernementdevrait renoncer à relever le plafondduLivretA à 30600euros, comme l’avait promis FrançoisHollandelors de sa campagneprésidentielle de 2012, a indiqué le Journaldudimanche (JDD) du 25mai. – (AFP.)

LuxeDes dirigeants deKering et LVMH font defortes plus-values après la vente de stock-optionsLes dirigeantsdes groupesde luxe français François Pinault(Kering) et AntonioBelloni (LVMH)ont empochéd’importantesplus-values après l’exercicede stock-options courantmai, selondesdéclarationsboursièrespubliées dimanche25mai. – (AFP.)

IndustrieLe directeur général de Ford jugele secteur automobile européen en surcapacitéAlanMulally, le directeurgénéral de Ford, a estimé, dansunentretienpublié dimanche 25maipar le Financial Times,que lesconstructeursautomobiles européens étaient en surcapacité etqu’ils devaient encore réduire leur production. – (AFP.)

IndustrieRosneft finalise son entrée dansPirelliLe groupepétrolier public russeRosneft a finalisé l’opérationd’entrée au capital du fabricant italiendepneusPirelli avec uninvestissementde 552,7millions d’euros, a annoncéPirelli, same-di 24mai, dansun communiqué.Rosneftpossédera 50%deCamfin, la holdingdétentricede26,19%du capital de Pirelli. – (AFP.)

Lebutétaitd’éviterunesurenchèresurlesembauches, ruineusesurleplandessalairesetcontre-productivepourlesentreprises

QuatregéantsdelaSiliconValleyvontindemniserdessalariés lésésApple,Google, InteletAdobesesontentenduspournepasdébaucher leursemployésrespectifs

Lastart-upcalifornienneUberseraitvaloriséeàplusde12milliardsdedollarsL’entreprisedevoituresde tourismeavecchauffeurveut lever500millionsdedollars

«Sivousrecrutezuneseule

decespersonnes,c’est laguerre»,auraitdéclaréSteveJobs

18 0123Mardi 27mai 2014

Page 19: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

C ’est l’heuredu checkout et desadieux sourcilleuxdu réceptionnis-te. Les festivaliersplient bagages, et

bientôt la Croisette sera aussi désemplieque l’HôtelOthello, qui offre sondécor tro-glodytiqueà la Palmed’or,Winter Sleep.

Nousavionsdéjà relevé, aumomentdela transcriptionboursoufléede l’affaireduSofitel parAbel Ferrara, qu’unmotifhôte-lier traversait cette 67eédition. La tendan-ce s’est confirmée,pourmieuxmonter engamme:de l’aubergeprovidentiellede

Mr.Tuner à celles, funestes et adultérines,d’Amour fou, Leviathanou LaChambrebleue, enpassantpar les chaînesdeBirdPeople, Foxcatcherou SilsMaria, la«mai-soncinéma», ainsi que l’appelait le criti-queSergeDaney, apris la formed’unhôtel. Au carrefourde l’intimeet dupoliti-que, lieuxde la réalisationde soi commede l’uniformisation la plus aliénante, lesétablissementsdesdiverses sectionsontaccueilli toute la richesse et lamisèredumonde, commeen témoignent les trois

heures, et autantd’étoiles, deWinter Sleep.Tout juste s’étonnera-t-onqu’une clien-

te aussi premiumqueSofia Coppola,membredu jury, n’ait pas été sensible àSaint Laurent. Reparti bredouille, le filmdeBertrandBonello aurapourtant offertauFestival la scène qui en résume lemieux la teneur: «Vous êtes ici pour affai-res?»,demande le concierge.«Non, pourdormir», répond le couturier. Grâcessoient rendues au grandhôtelierGillesJacob: nous avons fait de beaux rêves.p

culture

BILLETparAureliano Tonet

TheGrandCannesHotel

P eut-être, pour commencer,faut-il rappeler ici les nomsdeceuxquieurentà jugerles

films de cette cuvée 2014 du Festi-val de Cannes, clos dimanche25mai: JaneCampionétaitlaprési-dentedu jury, entouréedeWillemDafoe, Gael Garcia Bernal, CaroleBouquet, Jeon Do-yeon, NicolasWindingRefn, Sofia Coppola, LeilaHatami et Jia Zhang-ke. Cinq fem-mes et quatre hommes.Onne saitsi cette absence de parité – pourune fois inversée – eut son impor-tance, mais le résultat est là : avecWinter Sleep (3h 16), le cinéasteturcNuri BilgeCeylan remporte laPalmed’or.

On a dit ici tout le bien que l’onpensaitdecefilmplacésousledou-blesignedeCamusetdeShakespea-re. M. Ceylan mérite au moinsautant laPalmepour ce filmsplen-dide que pour l’ensemble de sonœuvre, l’une des plus accomplies

du cinéma contemporain. Pour lereste, que dire de ce palmarès,sinon qu’il oscille entre radicalité–il fallait oser décerner le Prix spé-cial du jury à Le Meraviglie d’AliceRohrwacher! – et sens politique«cannois».

Thierry Frémaux et Pierre Les-cure, celui-ci prochain présidentdu Festival, peuvent être rassurés,lesAnglo-Américainsnerepartentpasbredouilles: prixde lamise enscènepourBennettMiller, le réali-sateur de Foxcatcher ; meilleureinterprétation féminine pourJulianne Moore dans Maps to theStars de David Cronenberg ; et,enfin, meilleure interprétationmasculine pour Timothy Spalldans Mr.Turner de Mike Leigh. Sid’aventure Foxcatcher réussissaitune bonne carrière commercialeensalles, ilsepourraitquelesAmé-ricainsreviennentenforceen2015sur la Croisette.

On a bien sûr quelques regrets.Timbuktu d’Abderrahmane Sis-sako et Still the Water de NaomiKawase méritaient largement defigureraupalmarès.Le filmdecet-te dernière est si beau qu’on sedemandesi JaneCampionn’enten-

dait pas profiter encore un peu desonincroyablestatutdeseuleréali-satriceaumondeàavoir remportéunePalmed’or.

S’agissant de Timbuktu, l’inter-rogation estmoins badine: la pré-sence dans le jury de l’actrice ira-nienne Leila Hatami, en délicates-se avec les autorités de la Républi-queislamiquedepuisqu’ellea fait,publiquement, une bise à GillesJacob,a-t-ellepu jouerendéfaveurdu cinéastemauritanien et de sonmagnifique réquisitoire contrel’intégrismemusulman?

Dans l’ensemble, cette sélec-tion 2014 fut un bon crumême sil’on eût aimé, de la part du sélec-tionneur, davantage de prises derisque. «On fait avec ce qu’on a»,aime à dire Thierry Frémaux,manière de dire qu’on ne dénichepas des chefs-d’œuvre tous lesjours au coin d’une rue. S’agissanten particulier des films français,onpouvait à l’évidence trouver de

quoi pimenter la sélection. UnfilmcommeBandedefillesdeCéli-neSciamma,présentéàlaQuinzai-ne des réalisateurs, aurait avanta-geusement pu remplacer le lour-dingueTheSearchdeMichelHaza-navicius. Ce constat pourrait inci-teràmodifierleprocessusdesélec-tion, spécifique, des films françaisà Cannes, permettant ainsi au

sélectionneur d’échapper à certai-nes pesanteurs inhérentes à cegenred’exercice très politique.

Sinon, 2014 fut à l’évidence l’an-née des femmes. Quel n’aurait pasété notre embarras s’il nous avaitétédonné, cequ’àDieuneplaise, lesoin de décerner le prix de lameilleureactrice!

Commentchoisir,eneffet,entre

Toulou Kiki (Timbuktu), MelisaSözen (Winter Sleep), MarionCotillard (Deux jours, une nuit deJean-PierreetLucDardenne),AnneDorval (Mommy), Elena Lyadova(Leviathan) et Kristen Stewart (SilsMariad’OlivierAssayas)?Sanspar-ler de quelques autres actricesapplaudies dans des sélectionsparallèles:AngéliqueLitzenburger

dansPartyGirldeMarieAmachou-keli, Claire Burger et Samuel Theis,Anaïs Demoustier, dans Bird Peo-pledePascaleFerranouencoreCéli-ne SallettedansGeronimodeTonyGatlif…

Toutes ces comédiennes cam-pentmagnifiquementdesperson-nages de femmes libres et coura-geuses, désireusesdeprendre leurdestin en main. Le jury a décidéd’allerpiocherdansunautreregis-tre,plushollywoodien,plusnévro-sé aussi, en choisissant JulianneMoore, impressionnante dansMaps to the Stars.

Mais une actrice comme Tou-louKiki aurait sans doute été plusemblématiquede ce vent de liber-té féminine qui a soufflé cetteannée sur la Croisette.

Constatons, enfin, que 2014 futuneannéedetransmission.Symbo-liquement, le Prix du jury fut attri-bué conjointement à Xavier Dolan(Mommy) et à Jean-Luc Godard(Adieu au langage). Cinquante-huit ans d’écart séparent les deuxréalisateurs. Et un premier prixpour «JLG» à Cannes, il n’était quetemps!

Quant à la Caméra d’or, attri-buée à trois anciens élèves de laFémis (Ecole nationale supérieuredes métiers de l’image et du son)pour Party Girl, elle fut l’occasion,lors de l’annonce du palmarès,d’un instant très émouvant.

Gilles Jacob, dont c’était la der-nière apparition publique en tantque président, avait tenu à remet-tre ce prix qu’il avait lui-mêmecrééen1978.AccompagnédeNico-le Garcia, il reçut de la part des1800spectateurs du Grand Théâ-tre Lumièreune chaleureuse stan-ding ovation. Jane Campion seleva et, tendrement, alla lui pren-dre lamain.

D’un mot, le président Jacobrésuma alors ce que fut sonaction:«Célébrer lecinéma,prépa-rer son futur.» Présent dans la sal-le, Pierre Lescure reçut lemessagecinqsur cinq.A luimaintenant, enbonne entente avec Thierry Fré-maux, de s’en inspirer.p

FranckNouchi

PalmarèsradicalpourFestivalunpeutropbanalL’audacedujury,quiacouronné«WinterSleep»,duTurcNuriBilgeCeylan,répondàlatimiditédessélectionneurs

Dixjours, 120filmsetuneconstante: lerefusdelanorme

L’édition2014aétémarquée

parlatransmission

Palmed’orWinter Sleep,du TurcNuri BilgeCeylan.

GrandPrixLe Meraviglie (Les Merveilles),de l’ItalienneAlice Rohrwacher.

Prix d’interprétation féminineL’Américaine JulianneMoore,pour son rôle dansMaps to the Stars, duCanadienDavidCronenberg.

Prix d’interprétationmasculineLeBritanniqueTimothySpall,pour son rôle dansMr. Turner,deMike Leigh.

Prix de lamise en scèneL’AméricainBennettMillerpourFoxcatcher.

Prix du scénarioLesRussesAndreï ZviaguintsevetOlegNeginpourLeviathan.

Prix du jury, ex-aequoMommy, duCanadienXavierDolan, et Adieu au langage,de Jean-LucGodard

Camérad’orParty Girl, des FrançaisMarieAmachoukeli, ClaireBurgeret Samuel Theis.

Palmed’or du court-métrageLeidi, duColombienSimonMesaSoto.

Analyse

Que reste-t-il de Cannes 2014?Aprèsdix jours de Festival, closdimanche25mai, 35filmsvus surprèsde 120qui y furent révélés,enpremièremondiale, toutes sec-tions confondues, onquitte laCroisette avec le sentimentd’avoir découvert beaucoupdebelles choses, et quelquesnavets.

Pasde film chocqui auraitconcentré tous les débats, commel’ont faitUnProphète (2009),OncleBoonmee (2010), TheTree ofLife (2011),HolyMotors (2012) ouLaVie d’Adèle (2013)…MaisunchocmédiatiqueorchestréparWildBunchautourdeWelcome toNewYork, le filmd’Abel Ferrarasur l’affaireDSK.

Etune déflagrationplus secrè-

te, parcequ’enrouléedansune for-medocumentaireet cantonnéHors compétition,qui n’a laisséaucunde ses spectateurs indem-ne. Il s’agit d’Eauxargentées, Syrieautoportrait, essai terrassant surle longmartyrede la révolutionsyrienne réalisé parOssamaMohammedetWiamSimavBedi-rxan, qui ne s’étaient jamais ren-contrés avant d’arriver à Cannes.Conçue commeundialogue entreun exilé involontaire et une résis-tantehéroïque, leurmise en scè-ne traduit un fier refus de lanor-me, qui caractérisaitnombredefilmsde la sélection2014.

La programmationen compéti-tiond’Adieuau Langage, de Jean-LucGodard, filmessai tournéavecpasmoinsde six caméras dontune Flip Flop, uneGoPro et des

téléphonesportables, quatreansaprès que FilmSocialisme se soitretrouvéàUn certain regard, estle signe le plus éclatant de cettetendance, qui déborde la seulequestionde lamise en scène.

«LaMaman et la Putain»Elle s’illustrepar la présence

d’objetsnon reconnus officielle-ment commerelevant du«ciné-ma» (la série télé «P’tit Quin-quin»deBrunoDumont,Wel-come toNewYork, sorti en vidéo àla demande sanspasser par la sal-le, sans compter la lettre filméedeGodardà Thierry FrémauxetGilles Jacob, considéréepar cer-tains commeun film cannois àpart entière). Et elle résonnedansles sujets des films.

Refuser la norme, c’est refuser

l’assignationà son sexe, le vieuxchoix entre LaMamanet laPutain.C’est l’enjeudeBandedeFilles et de PartyGirl, les filmsquiont ouvert en fanfare laQuinzai-nedes réalisateurs et la sectionUncertain regard.

Dans Les Combattants, elle estdéjà réglée. Lepersonnage jouéparAdèleHaenel, qui se préparepour la findumonde, est une sol-date de l’arméeaméricaine, com-me l’est l’adolescent incontrôla-ble deMommy, le film torchedeXavierDolan, en guerre contreune sociétéqui s’acharneàasphyxier sonaspiration àne res-sembler à personned’autre qu’àlui-même.

Autrepersonnagehorsnorme,dont l’aura a flotté sur le festival,Yves Saint Laurent, génie solitaire

rongépar sa passionpour la dro-gue, son attirancepour le sexe leplus rugueux. Il n’en fallait pasmoinspour vaincre les réticencesde l’esthète BertrandBonello àl’égarddugenre biopic.

Lanorme, c’est aussi l’ordresocial imposépar le capitalismemondialisé, avec lequel rompentles personnagesdeBirdPeopledePascale Ferran.

C’est l’idéologienationalisteisraélienneà laquelle l’institutri-ce, dans le filmdeNadav Lapid,tentede soustraireun enfant poè-te qu’elle voit commeun sauveur.C’est la loimortifère desdjihadis-tes, face à laquelleAbderrahmaneSissako réaffirme, dansTimbuktu,les puissancesde l’art.

Les filmsn’ontpasmanqué cet-te annéequi s’inscrivait dans des

communautésautonomes, oùs’invententdesmodesde vie alter-natifs.

Les apiculteurspolyglottesdesLeMeraviglied’Alice Rohwacher,les Yéniches voyageursdeMangetesmorts, les RomsdeGeronimo,les chamansde l’île japonaised’A-mamioùNaomiKawase a tournéStill theWater, sont autant degroupeshumainsqui tournent ledos à l’ordre dominant.

La questionest aussi au cœurdeMaps to the Stars, satire d’Hol-lywood,machine àproduirede lanormequeDavidCronenbergdépeint commeune sociétémau-dite, croupissantdans l’inceste.En condamnant ses enfants às’auto-immoler, le cinéaste cana-dienopte, lui, pour la table rase.p

IsabelleRégnier

Unventdelibertéféminineasoufflé

cetteannéesurlaCroisette

Lepalmarès de la 67e édition du Festival deCannes

Le Turc Nuri Bilge Ceylan reçoit la Palme d’or pour «Winter Sleep», à Cannes, samedi 24mai. ANTONIN THUILLIER/AFP

190123Mardi 27mai 2014

Page 20: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

20 0123Mardi 27mai 2014

MISE EN SCÈNE CHRISTOPHE RAUCK | DU 4 AU 15 JUIN 2014

MARIVAUX

GRAND PRIX DU SYNDICAT DE LA CRITIQUE 2012-2013

www.theatregerardphilipe.com

www.tv5monde.com

Production Les films duWorso / Dune VisionCoproducteurs :ArchesFilms -ARTEFranceCinéma /OrangeStudio.

Avec la participationdeCanal+, Ciné +,ARTEFrance, LePacte,TV5MONDEetleCentreNationalduCinémaetde l’ImageAnimée. En association avec INDÉFILMS2.

Avec le soutien deDoha Film Institute.

La chaîne de tous les cinémas francophones

Unfilmd’AbderrahmaneSissako

TV5MONDEestheureused’avoirsoutenu la productionde

Récit

S eglisser, une journéedurant,dans l’ombre du présidentdu Festival de Cannes, Gilles

Jacob: c’est à cedestin aventureuxqu’on s’est voué, le vendredi23mai, durant les dernières heu-res du maître de céans. Car c’estdit, c’est fait, Gilles Jacob s’en va,dès la fin de cette édition, qui s’estterminéedimanche25mai. Ilcéde-ra sa place, le 2 juillet très exacte-ment, à Pierre Lescure.

A 84 printemps le 22 juin pro-chain, après trente-huit annéespassées aux commandes d’un fes-tival qui lui doit son excellence, ilaura pris le temps de la réflexionavant de raccrocher l’habit. A l’en-tretien d’adieu gravé dans le mar-bre, on a préféré cette chroniqueintime, avec l’idée que les actesexprimeraient,plussûrementquela parole, la vérité de ce moment.Voici donc le livre d’heures d’uneétrange liturgie cannoise.

8h45 Petit déjeuner au Carlton,où Gilles Jacob a ses quartiers. Onpourrait se croire dans unhôtel, siles réalisateurs John Boorman,Ken Loach et Luc Dardenne n’ybeurraient en même temps leurstartines. Gilles Jacob, quant à lui,confirme d’emblée notre intui-tion.D’uncôté,uneréponseenfor-me de parade à la question sensi-ble : «Non, aucune tristesse de cedépart, plutôt du soulagement.D’ailleurs, mes fonctions ne m’enlaissentpas le temps. C’estplutôt leregard des autres qui me rappelleque c’estmadernière année.»

De l’autre côté, le corps quiparle: Gilles Jacob souffre depuisseptmoisd’unecruralgie,unesor-te de sciatique extrêmement dou-loureuse, qui l’oblige à se déplaceravec une canne. Et le fait enrager:deneplusmarchercommeilaffec-tionne et de paraître, l’année

mêmedesasortie,plusaffaibliparl’âgequ’il ne l’est.

Osonsl’hypothèse:cettecrural-gieest lamanièredontGilles Jacobvitsondépart.Commeunarrache-ment, une douleur, une sépara-tion cruelle d’avec un enfant qu’ilaura porté au sommet. Commel’homme est d’un modèle ancienet rare, tout esprit et toute élégan-ce, de cela aussi il est aussi capablede sourire : «La cruralgie me faittropmal,ellemesauvede lanostal-gie.Et faitdemoiuncas:nonseule-ment je suis un président qui s’enva,maisquis’envaenplushandica-pé.»

Quantàsonbilanpersonnel, il alemérite de la clarté. Ce dont il estle plus fier, c’est «d’avoir travailléavec les plus grands auteurs etd’avoir conquis l’indépendanceartistique et économique du Festi-val de Cannes, d’en avoir fait unePMEqui se transformeunmoisparanenmultinationale».

Ce qu’il a le moins apprécié,c’est la périodede trois ans durantlaquelle il a partagé avec son suc-cesseur au poste de délégué géné-ral, Thierry Frémaux, la responsa-bilité de la sélection artistiqueavantde lui abandonner les rênes.Ce n’est un mystère pour person-ne que la relation entre les deuxhommes s’est alors rapidement–et durablement– dégradée.

9h30Sortie du Carlton. Il est pro-bablequeGilles Jacobsouffred’unamour passionnel, exclusif, fié-vreux, pour le Festival de Cannes.Sa femme, qu’il évoque avec ten-dresse, en fut la première victime.Les Cannois, comme les employésdu Festival, eux, sont pleins dereconnaissance pour cet hommequi, enfant caché à Nice durant laseconde guerre mondiale, faitpleuvoir la manne sur leur villedepuis quarante ans. Tandis qu’ilsort de l’hôtel, le «président» est

happépar unhommedans le hall,la larmeà l’œil, qui le«remerciedece qu’il a fait pourCannes».

Ce genrede scène se reproduiratoute la sainte journée sans qu’onpuisse formellement prouver queces hommes et ces femmes éper-dus soient des figurants payéspourlemaîtredescérémoniescan-nois. L’idée d’être dans un filmnous effleurera néanmoins l’es-pritaucoursdecevendredisiparti-culier.

En demandant à son chauffeurde suivre la promenade matinaleet quotidienne qu’il fait à pieddurant plus de trente ans, GillesJacobendirige d’ailleurs la grandescène sentimentale, se remémo-rant«le calmeet labeauté»decet-te balade secrète. Palm Beach etretour, le temps d’une rêverieproustienne.

10heures Arrivée au Palais parl’entrée des artistes. Accueil styléet chaleureux. «Bonjour, Prési-dent», «Bienvenue M. Jacob»,« Comment allez-vous Prési-dent?». Lui salue tout le monde.Arrivée à son bureau du troisièmeétage,bellevuesur lamerturquoi-se. Un ballet soutenu de visitescommence, attendues – les rap-portsadministratifs–etimpromp-tues – les amis qui passent.

André-Paul Ricci, un attaché depresse ému, vient lui remettre enmain propre une touchante lettred’au revoir. Me Gabrielle Odinot,l’avocatedufestival, letientaucou-rant du suivi des «affaires» : mar-ché noir des billets (3000euros laplace), usurpation de la signature

deGillesJacobsurunordredevire-ment, hôtel qui tapisse partout,sans autorisation, le logo du Festi-val sur sa décoration intérieure.

Paulette Blondin (quarante-quatre ans de maison), responsa-ble de l’hébergement, relaie uneplainte des hôteliers concernantl’absencedes Américains. «Le pro-blème est préoccupant, les studiosdésertent Cannes, il devrait être lapriorité de mon successeur», esti-me le président.

MartineOffroy, grande prêtres-seduprotocole,entreaveclesacro-saint plan de table du dîner offert,comme chaque soir, par le prési-dent à une centaine d’invités. Dusérieux. Crayon à lamain, on sup-pute et on soupèse la place de cha-cun à la table d’honneur. L’équipede Ken Loach sera là, ainsi que deséditeurs parisiens.«Les susceptibi-lités sont énormes», confied’unairgourmandGilles Jacob. «Mettez-laàcôtéde [l’éditeurBernard]Fixot»,conseille-t-il à Martine Offroy, quis’inquiète de savoir quoi faired’une«trèsbelle actrice».

12heures Pierre Lescure, succes-seur au poste, passe la tête, puisentre. Des projets pour Cannes?«Paspour l’instant.D’abord, jevaisessayerdegarderlafonction.Ensui-te, me mettre à l’écoute, et, enfin,tenter de rester à la hauteur. »L’homme, visé en effet par uneenquête préliminaire pour éva-sion fiscale, ne manque ni d’hu-mour, ni de finesse.

13 heures Déjeuner au Café desPalmes.Espaceorientalisantdédié

par Rosalie Varda, la fille d’Agnès,au confort des cinéastes et desjurys, l’endroit abrite un restau-rant où Gilles Jacob aime à rece-voir en toute intimité.

Cemidi,cesontlecinéastemau-ritanien Abderrahmane Sissako,découvert par Gilles Jacob, etauteur d’un des plus beaux filmsde la compétition avec Timbuktu,et Scott Foundas, rédacteur enchef francophone et francophiledumagazine corporatifVariety.

En deux heures de conversa-tiond’une totale liberté, le FestivaldeCannesvientd’être réformé. Enpartant,M.Sissako,querienn’obli-ge,nousglisseàl’oreille:«Cethom-me-làa changémavie.»

15h30 Retour au bureau. Arrivéede la directrice de la communica-tion, Marie-Pierre Hauville, flan-quée de Renaud Le VanKim, réali-sateur du «Grand Journal » deCanal+ et grandordonnateurde lacérémoniede clôture.

Les difficultés de déplacementde Gilles Jacob, qui veut faire sesadieux sans la canne, sont au cen-tredesdébats. Il esthorripilépar lecliquetis qui le précède, et le faitpenser«auboxeuraveugledeL’As-sassinhabiteau21».M. leVanKimle rassure : «On va dire à Jane[Campion, la présidente du jury]de vous soutenir au besoin. Elle estsolide, on peut compter sur elle,c’est uneAll Black.»

16heures Passages éclair d’amisen visite de courtoisie, dont celuidupuissant avocat d’affaires Jean-Michel Darrois. Manières douces,

penséetranchante.Entredeuxvisi-tes, Gilles Jacob lit ses mails outweete.Converti à 100%au réseaugazouilleur, il en fait un usagepédagogique, poétique, photogra-phiqueetstratégique(@jajacobbi,17858abonnés).

Dans la dernière ligne droited’une journée qui commence àpeser, Gilles Jacob gère les pas-sions féminines.

19heures Posté en haut du tapisrouge lors de la projectionofficiel-le du film d’Olivier Assayas, SilsMaria, Uma Thurman lui saisit latête à pleinesmains et l’embrassefougueusement.

21heuresDanslestudiodeFranceInter où Pascale Clark le cuisine àpetitfeu, JulietteBinocheluidécla-re, tout-à-trac: «Je vous aime.»

Là-dessus, départ en voiture auCarlton,pour le dîner officiel, où ilprésiderasansciller la tabled’hon-neur. Rompu de fatigue, on perdici sa trace, en admirant l’énergieet la tenue de cet homme dévouécorpsetâmeàladéfenseetà lapro-motion du Festival de Cannes.Pour ne rien dire de sa pudeur, luiqui aura systématiquement cou-pé court à toutes les propositionsd’attendrissementoffertesà lui ence jour. Il est vrai que Gilles Jacobdemeurera président d’honneurdu conseil d’administration de lamanifestation, et président de laCinéfondation, l’atelier de forma-tiondesjeunescinéastes.Ilestvrai-semblable qu’il ne se résolvejamais à quitter le Festival.p

JacquesMandelbaum

culture

1930Naissance à Paris, le 22juin.

De 1964à 1971Critiquepour la revue Cinémas, puispourLes Nouvelles littéraires.

1972Entre à L’Express.

1976Présente et coproduit surFR3«Lemasque et la plume».

1977Elu délégué généraldu Festival deCannes.

1978Crée le Prix de la camérad’or et la sectionUn certainregard.

1982Ouverture duPalaisdes Festivals.

1986Négocie la diffusiondes cérémonies avecCanal+.

1991 Il crée les «Leçons decinéma», puis la Cinéfondation,en 1998.

2001Elu président du Festival.

2004ThierryFrémaux lui succèdecommedéléguéartistique.

2014Cède la place à PierreLescure après le Festival.

Unevie consacrée au cinéma

Gilles Jacob, président du Festival de Cannes, vendredi 23mai. ARNOLD JEROCKI POUR «LE MONDE»

Unejournéeparticulière,dansl’ombredeM.JacobQuelquesheuresavec leprésidentduFestival,qui s’apprêteàpasser lamainàPierreLescure

Page 21: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

culture

XIMENAAYALA

LISAOWEN

SONIAFRANCÓ

WENDYGUILLÉN

ANDREABAEZA

ALEJANDRORAMÍREZ-MUÑOZ

UN FILM DE CLAUDIA SAINTE-LUCE

G O O D L A P P R O D U C T I O N e t P Y R A M I D E p r é s e n t e n t

Pho

tog

rap

hy b

y D

anie

la E

db

urg

- D

esig

n by

Sho

wb

east

AU CINÉMA LE 28 MAI

UN FILM SOLAIRED’UNE GRANDEUR D’ÂME BOULEVERSANTE

Illimité

UN FILM QUI TIENTDU MIRACLE

Trois Couleurs

SIMPLE, SUBTIL, ESPIÈGLE...LA BONNE HUMEUR MEXICAINE !

Proceso

SÉLECTION CDR.E.M.Unplugged 1991-2001TheComplete SessionsLe 10avril 1991, auréolé du récentsuccèsde sonalbumOut of Time,le groupeR.E.M. enregistre auChelsea Studios, àNewYork, uneémissionpour la série «MTVUnplugged», les concerts acousti-quesde la chaînemusicale.Le 21mai 2001, cette fois auMTVStudios, toujours àNewYork, lechanteurMichael Stipe, le guitaris-te Peter Bucket le bassiste et cla-viéristeMikeMills remettent ça.R.E.M. a conquis la planète rock,rempli des stades, et sonbatteur,Bill Berry, épuisé, a pris une retrai-te anticipée en 1997.Ces deux concerts filméspourMTVont été diffusés partielle-ment à l’époque. Leur bande-sona été publiée surdes enregistre-ments pirates, y compris les chan-sonsnondiffusées. Elle bénéficiedorénavantendeuxCDd’uneparutionofficielle sousunepochetteassez laide, avecunlivret anémique.Cela vaut surtoutpour le concertde 1991. R.E.M. est tout en acousti-que, avec apport discret d’unorgue, percussions à la place de labatterie, harmonies vocalesdansla lignéede sonmélangeaériendefolk et rock. En 2001, les orchestra-tions sont plus enveloppantes, il ya un effet de redite. Surtout, lerépertoiredes nouvelles chan-sonsd’alors estmoins détermi-nant. pSylvain Siclier1 double CD Rhino-Warner Music.

BrianBlade&The Fellowship BandLandmarksBatteur régulierdes saxophonis-tes JoshuaRedmanetWayneShor-ter, BrianBlade est aussi composi-teur etmeneurde sa propre for-

mation, The FellowshipBand, fon-dée en 1997. La stabilitéduperson-nel (JonCowherd aux claviers, lessaxophonistesMelvinButler auténor et au soprano etMyronWal-denà l’alto et la clarinettebasse,Chris Thomas à la basse, Jeff Par-ker à la guitare), le raffinementdel’écriture, enparticulier dans l’ac-

corddesdeuxvents, sontles pointsforts dugroupe.Cedonttémoigne

parfaitement Landmarks, recueilde compositions subtiles, avecunenotiond’espace, de respira-tionmusicale. Simplementbeau.p S.Si.1CDMid City Records-BlueNote/Universal Music.

ForabanditPortEn rapprochant occitanet turc,mandole, baglama (luth à longmanche) et percussionsperses,SamKarpienia,UlasOzdemir etBijanChemirani, qui forment letrio Forabandit, invententdans cesecondalbumune identitémusi-cale palpitanted’intensité. Tresséd’un lyrismeévitant l’emphase,leur vocabulairemusical est levaisseau flamboyantd’unepoésiede l’errancequi porte en elle lamémoiredes troubadours occi-tans et des bardes (asiks) turcsd’autrefois. Sur le savant tressagepercussif de BijanChemirani, lesvoix s’élèvent. Incantatoire etrêchepour SamKarpiena, rondeetplus intérieurepourUlasOzde-mir. Elles parlent de cœurs brûléset d’éternité, d’étoiles, de ports etd’exils. p Patrick Labesse1CD Budamusique/Socadisc.

LondresCorrespondant

R avagée par un incendie sur-venu le 23mai, la GlasgowSchool of Art symbolisait la

renaissance par la culture deGlas-gow, une ville ouvrière naguèreinsalubre et violente. «La destruc-tion de ce pavillon emblématiqueet du travail des élèves est horribleà voir.» Comme l’a déclaré le pre-mier ministre écossais, Alex Sal-mond, l’incendie qui a dévastél’édifice construit à la fin duXIXesiècle par l’architecte CharlesRennie Mackintosh (1868-1928), aprovoquéun émoi à la hauteurduprestige de l’institution de Ren-frewStreet.

Selonlespompiers,90%dubâti-ment Art nouveau a été sauvé et70% de son contenu préservé dufeu provoqué par l’explosion d’unprojecteur en sous-sol. Reste queles travauxde fin d’étudesdes étu-diantsontétédétruits.Or, l’exposi-tion des œuvres des diplômés del’une des plus célèbres Art Schooldu royaume est un événementartistique de premier plan quiaccueille la crème des profession-nels, londonienscommeétrangers,à larecherchedenouveauxtalents.

AGlasgow,lesdrapeauxsontenberne. Depuis la faillite des Glas-gow Rangers, le célèbre club del’équivalent de la première ligueécossaise, jamais la citéde la Clyden’avait connupareille déprime. Lechef-d’œuvre mondial à la façademajestueuse et austère inspiréedesconstructionsmédiévalesfigu-re en première place sur le par-cours fléché du touriste. En 2013,20000personnes ont visité lemusée auxbois teintésnoirs et lessalles en blanc laqué auxmeublesà angle droit. La chaise-échelleposéecontrelacourbured’unlongmurblanc en est l’attraction star.

Cette œuvre magistrale témoi-gne de l’ancienne prospérité d’unport qui, au début du XIXe siècle,était lepremier centrede construc-tionnavalede la fièreAlbion impé-

riale. La merveille de Mackintoshrappelle le passé industriel fabu-leux de cette pompe aspiranted’une richesse fondée sur le capita-lisme industriel et le colonialisme.A l’instar de ses rivaux, la BurrellCollection ou du HunterianMuseum and Art Gallery, la Glas-gowSchoolofArtavaitétéconstrui-te grâce auxmécènes du tabac, dutextile, de l’ingénierie.Uneprospé-ritéquiavaitsonverso,lespirestau-dis du royaume, l’exploitation desimmigrants irlandaiset lesméfaitsde l’alcoolismeetdutabagisme.

Retombées politiquesSaignéeàblancpar la désindus-

trialisation des années 1960-1970et par la purge thatchérienne quis’ensuivit,Glasgowaretrouvépro-gressivement le sourire grâce àsonformidabledynamismeartisti-que. Le statut de ville européennedelaculture,en1990,aété le trem-plinde cette renaissance.

Lesinistreadesretombéespoliti-

ques. Le 18septembre, les Ecossaissont appelés à voter sur l’indépen-dance. Pour les nationalistes écos-sais au pouvoir à Edimbourg quirêvent de couper le cordon ombili-cal avec le reste du pays, Mackin-tosh incarne, corps et âme, le paysdes poètes Walter Scott (1771-1832)etRobertBurns (1759-1796).

En revanche, pour les Anglais,cetteconstructionfaitd’abordpar-tie du patrimoine national, com-me l’indique le quotidien conser-vateur londonien, Daily Telegra-ph, «La Glasgow School of Art estavant toutunmonumentd’avant-garde en hommage à la créativitébritannique qui s’exporte dans lemonde entier.»

L’échodecedramesouligneaus-si la place importante des Schoolsof Arts dans le paysage culturel duRoyaume-Uni. D’origine victorien-ne, les écoles d’art sont le berceaudetoutecréativitéartistiqueoutre-Manche.Desgénérationsd’artistesont été formées dans ces établisse-

mentshorsnorme.L’élitedecesins-titutionsestàLondres,enraisondela proximité des musées natio-naux et des galeries d’art, du siègedugouvernementetde laprésencede la City. La réputation du RoyalCollege, de Slade, Goldsmiths ouCamberwelln’est plus à faire.Maisavec ses consœurs de Liverpool etde Manchester, la Glasgow Schoolof Art permettait à la province detoiser la capitaleavec fierté.p

MarcRoche

Au lendemain de l’incendie qui a ravagé la Glasgow School of Art, vendredi 23mai. ANDY BUCHANAN/AFP

L’Ecossetouchéeaucœurparl’incendiedévastateurdel’écoled’artdeGlasgowLebâtimentde la finduXIXesiècleétait le symbolede la renaissancede lavillepar la culture

Arts

L ’Organisation des Nationsunies(ONU)abritehabituelle-ment en ses murs new-yor-

kaisGuerreetPaix, l’œuvremajeu-re de celui qui est considéré com-me le plus grand peintre brésiliende la première moitié du XXesiè-cle, Candido Portinari (1903-1962).Le bâtiment des Nations uniesétant en travaux, elle a été excep-tionnellement démontée, et lesParisiens peuvent découvrir auGrand Palais les deux tableauxgigantesques (14 × 10mètres cha-cun) jusqu’au9juin.

Ils doivent mesurer leur chan-ce : Portinari lui-même a failli nejamais voir son monument enentier. Le hangar où Portinari lespeignit – au mitan des années1950, et en neufmois – avec deuxassistants, Enrico Bianco et Rosali-na Leao, ne permettait pas dedéployer complètement les pan-neaux de contreplaqué dont ilssontcomposés.EtPortinarinepou-vait pas participer à leur installa-tion et à l’inaugurationde son tra-vailà l’ONUen1957.L’époqueétaitaumaccarthysme, et les autoritésaméricaines refusaient d’accorderunvisa à l’artiste, communiste.

Si des artistes et des intellec-tuels n’avaient pas protesté pourque Guerre et Paix soit montré auBrésil avant son départ pour lesEtats-Unis, Portinari n’aurait donc

jamais apprécié complètement cequ’il estimait être «lemeilleur tra-vail qu’[il ait] jamais fait», et qu’ildestinait, tout simplement, «àl’humanité». L’affaire prit une tel-leproportionquel’expositiontem-poraire, qui se tint au Théâtremunicipal de Rio de Janeiro, futinauguréele27février1956parJus-celino Kubitschek, le président dela Républiqueenpersonne.

Musique grandiloquenteDans le salon d’honneur du

Grand Palais, le diptyque souffred’une présentation grand-guigno-lesque, avec musique grandilo-quente et coups de projecteurs.Passé l’agacement, on remarqueral’avantage– le seul–duprocédé: ilpermet, grâce à un système devidéo, d’agrandir au mur lesdétails soulignés par le projecteur(la vidéo est sur le site du GrandPalais). Pas inutile pour l’explora-tiondesœuvres,tantlespersonna-ges foisonnent,mais bien agaçantpourquivoudrait,commePortina-ri, contempler l’œuvre dans sonensemble. Cela n’est possible quedurant les quelquesminutes où lesystème se désactive. On s’enconsoleraenexaminant les 37étu-des préparatoires qui accompa-gnent lemonument.

Une petite partie sans doute decelles qu’il réalisa durant les qua-treannéesnécessairesà sonélabo-ration,maisunepartieessentielle.

Elle révèle,mieuxquene le fontles deux panneaux, un peintrecélèbre en son pays, mais aujour-d’hui méconnu en France. Ce nefut pas toujours le cas : les quel-ques expositions ou séjours pari-siens qu’effectua Portinari furentgénéralement très bien reçus parla critique – en 1929, où le chocculturel de l’Europe renforce sonattachement à son terroir natal ;en 1946, pour une exposition à lagalerie Charpentier, à Paris, unedes plus importantes d’alors ; en1957, où il expose à laMaisonde lapensée française, à Paris toujours ;et, enfin, en 1961, où son engage-mentcommunisteluivautdesdif-ficultés à obtenirunvisa.

Il avait le soutien de GermainBazin (1901-1990), conservateurau Louvre, et de Jean Cassou(1897-1986), qui fut directeur duMusée national d’art moderne deParis et écrivait de l’exposition de1946 qu’elle était un «voyage, nonpastantdansunpaysétrangerquedans l’âme de ce pays», le Brésil,dont mieux que quiconque il sutpeindre l’identité.p

HarryBellet

«Guerre et Paix de Portinari. Un chef-d’œuvre brésilien pour l’ONU.» Grand-Palais, avenue du Général-Eisenhower,entrée Champs-Elysées, Paris 8e. Tousles jours, saufmardi, de 10heures à20heures, le mercredi jusqu’à 22heures.Gratuit. Catalogue de 144p., 39¤.

LeBrésilienCandidoPortinarienlong,enlargeetentraversLeGrandPalais expose«GuerreetPaix», sondiptyquemonumental

210123Mardi 27mai 2014

Page 22: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

Tennis

T ouslesans,c’estlamêmeren-gaine : Roland-Garros n’enfinit plus d’attendre un suc-

cesseur à Yannick Noah, dernierFrançais à s’être imposé ported’Auteuil. L’espoir a été bruyam-ment ranimé en 2013 avec la célé-brationdu trentièmeanniversairede cet exploit et l’accession deJo-Wilfried Tsonga aux demi-fina-les. Il est retombé plutôt bas pourl’édition suivante, qui a débutédimanche 25mai : les performan-ces globales récentes n’autorisentpas un fol optimisme et l’avène-ment de l’héritier a été repousséaux calendes grecques.

Tsonga lui-même a passél’écueildupremier tourenfaisant,hélas, lemalheur d’unde ses com-patriotes,EdouardRoger-Vasselin,battu en trois manches(7-6/7-5/6-2), sans que leManceaune rassure sur ses capacités dumoment. Les deuxautres Françaisengagés ce jour ont connudes for-tunesdiverses : JérémyChardyn’apas failli devant l’Espagnol DanielGimeno-Traver (7-5/6-2/6-2) et, lejeune Strasbourgeois Pierre-Hugues Herbert non plus pour sapremière participation en tantque titulaire d’une wild card. Celan’a pourtantpas suffi à ébranler legéant américain John Isner(6-7/6-7/5-7).

La question d’une héritière àMary Pierce, victorieuse en 2000,n’a elle jamais été posée depuis laretraited’AmélieMauresmo.L’étatactuel du tennis féminin tricolorene risque pas de changer la donne.La seule à sembler pouvoir fairebonne figure est Alizé Cornet, têtedesérien˚20,quientreenpistelun-

di,opposéeàl’AustralienneAshlei-gh Barty. On n’attendait aucunmiraclede lapartd’AlizéLim(138e),autre bénéficiaire d’une wild card,depuis que le tirage au sort l’avaitdépêchée sur le Central afin d’af-fronter sa grande amie SerenaWilliams, qui se trouve surtoutêtre lapatronnedu circuit.

Cette opposition devait être uncrève-cœur pour les deux copinesqui ontmultiplié les selfies, jeudi,lors de la soirée des joueurs. «Il y a

cinq minutes de ça, j’étais dans levestiaire en train de parler avecSerena, a témoigné Alizé Lim sursoncompteTwitter. Jeluiaideman-dé: “C’estvrai quetuétaisautirageausort, tusais contrequi tu joues?”Ellem’arépondu:“Non, jeneregar-de jamais le tableau.”» Ce n’étaiteffectivementpasnécessaire,puis-que l’affaire fut expédiée (6-2/6-1).Quelques inconscients avaientauparavant rappelé l’exploit en2012deVirginieRazzano, qui avait

sorti Serena Williams dès le pre-miertour.Dans l’immédiat,Razza-no aura fort à faire, lundi 26mai,face à la Slovaque DominikaCibulkova.

Amandine Hesse n’ayant pasété plus chanceuse face à l’Autri-chienne Yvonne Meusburger(6-3/3-6/4-6), la seule à avoir don-né satisfaction dimanche est Clai-re Feuerstein, 124e mondiale, desurcroît face à une supérieurehié-rarchique classée 25 rangs au des-

susd’elle.Surlecourtn˚2, laGreno-bloise a pu compter sur le soutieninconditionnel d’un spectateur,vite repéré par la joueuse, et d’unarbitre rigolard pour scander sonprénom à chaque temps mort.«Claire ! Claire ! Tous ensembleavec Claire», répétait ce chauffeurde salle, installé derrière la chaisede Feuerstein et au bas de survête-ment orange, assorti à la tenue dela joueuse. Par chance, l’adversai-re, la Biélorusse Olga Govortsova

rappelle par sa silhouette et sesrâles Maria Sharapova, mais lacomparaisons’arrête là.

Cequidamflanquéd’unemous-tache, d’une casquette et d’un tee-shirtvintageavecleslogosdutour-noi dans les années 1980 est-il leprésident d’un fan-club? Non, ils’agit de «Vincent, de Lozère»,connudeshabitués.«Il est commeça à chaque match, explique l’und’eux. Il prend un joueur et il l’en-courage bruyamment. Au matchprécédent,c’étaitYouzhny.»L’inté-ressé n’ignore pas son statut demicro-célébrité. «Tennis Magazi-ne a parlé de moi», s’enorgueillit-il. Son critère de choix est le sui-vant : « J’encourage d’abord lesFrançais. S’il n’y en a pas, je prendsle plus connu. Mais s’il y a un tropgrand écart, je choisis le plus fai-ble.» Il se devait donc d’accompa-gner Claire Feuerstein, qui l’aemporté en deux manches(6-1/7-5) et a atteint, à 28 ans, pourla deuxième fois de sa carrière, ledeuxièmetour à Roland-Garros.

Lundi, les regards devraient setourner versNicolasMahut. S’il sedébarrasse du Kazakh MikhaïlKukushkin, des retrouvaillesémouvantes l’attendent avec sonvieil ami John Isner, qui partageavec lui le recordde la plus longuepartie de l’histoiredu tennis.p

BrunoLesprit

sport

Rugby

A umoment du «breafkfast»,dès8heuresdumatin,lepré-sident Mourad Boudjellal a

retrouvé en face de lui «une bonnevingtaine»de ses joueurs. Et «avecle teintplutôt frais, enplus», appré-cie-t-il. La veille, samedi 24mai, lesstars du Rugby club toulonnais(RCT) auraient pourtant pu fes-toyer jusqu’à des heures induesdans les rues de la capitale du PaysdeGalles. Intraitables faceauxLon-doniens des Saracens (23-6), lesVaroisontremportépourladeuxiè-me année consécutive la finale delaCouped’Europe, dansunMillen-niumdeCardiffautoitfermé,com-me il est d’usage pour les grandesoccasions.

En2013,aprèsleurpremiersacreeuropéen, la victoire obtenue àDublin face à Clermont avait don-né lieu à des festivités plus inten-ses. Ce que l’on appelle communé-mentla troisièmemi-tempss’était,pourcertains,étiréeenunequatriè-me, voire une cinquième période:«Il y avait des joueurs qu’on avaitperdus jusqu’au surlendemain.D’ailleurs, certains ne se souvien-nentmêmeplusoù ils étaientpréci-sément», confie le dirigeant auMonde. En 2014, rien de tout cela,même si le RCT a pourtant réussi àimiter Leicester (2001-2002) et leLeinster (2011-2012), seules forma-tions à avoir également conservéleurbiend’uneannéesur l’autre.

Car en réalité, pour les Toulon-nais, la bataille la plus importante

de la saison reste encore à livrer,samedi 31mai, avec la finale duchampionnatdeFrancede rugby,àSaint-Denis,faceàCastres.L’anpas-sé,latêteencoreàleurpremiertitrecontinental,lesToulonnaisavaientchuté en finale du Top 14 face auxmêmesCastrais (19-14).

Pour M.Boudjellal, aux com-mandesduRCTdepuis2006,l’heu-reestdoncàlamobilisation:«Enco-re plus que la Coupe d’Europe, lechampionnat reste notre objectifprincipal. Ce n’est qu’avec un titreenTop14queleclubrenaîtraitréelle-ment.Dansnotreimaginaire,àTou-

lon,onatousgrandiaveclebouclierdeBrennus.Onatousenviederajeu-nir et de revivre les moments fortsde1987 et 1992», ajoute l’entrepre-neur de 53ans. Peut-être les plusanciensse souviennent-ilsaussi del’édition 1931, au terme de laquellele RCT conquit le premier de sestrois sacresnationaux.

Vieux de plus d’un siècle, lechampionnat de France est unemadeleine que l’on déguste degénération en génération. Rien àvoiravec laCouped’Europede rug-by, née en 1995, dans le sillaged’unrugby professionnel encore à ses

balbutiements.Nomméjusqu’àcet-te annéeHCup – en référence à unbrasseur sponsor de la compéti-tion–, letrophéeeuropéenexisterala saison prochaine dans une nou-velle formule et sous une nouvelleappellation, l’European RugbyChampionsCup.

Pour l’heure, seul un club fran-çaisaréussiàempocherlaHCupetle Top 14 lamême année: en 1996,leStadetoulousainavaitreçulapre-mière de ses quatre couronnescontinentales,recordenlamatière.«Cette année, estimeM.Boudjellal,undoubléTop 14-HCup représente-rait l’accomplissement du travailentrepris depuis quelque temps àToulon.»

Avec30millionsd’eurosdebud-get annuel – environ le double desSaracens –, le RCT compte dans sesrangs nombre de stars. Commel’AustralienMattGiteau, auteurdupremier essai en finale contre lesLondoniens, auquel s’est ajoutéceluideJuanSmith,ceSud-Africainquel’ondisaitpourtantperdupourleballonovale à caused’un tendond’Achilledéfaillant.

Côtétoulonnais,toutlerestedespoints – transformations, drops etpénalités–futl’œuvredeJonnyWil-kinson. Monument du rugby, ledemid’ouvertureprendrasaretrai-te samedi 31mai contre Castres. Etce à l’âge de 35 ans, qu’il vient defêter dimanche 25mai, le plussobrement qui soit, au lendemaindusacreenHCupfaceàsescompa-triotesdes Saracens.p

AdrienPécout

Federer réussit son entrée

Roger Federer n’a pas traîné pourson entrée en lice porte d’Auteuil.Le no4mondial s’est défait facile-ment (6-2, 6-4, 6-2) duSlovaqueLukas Lacko, classé 88e. LeSuis-se égale ainsi le record de victoi-res à Roland-Garros (59), proprié-té deRafael Nadal.Mais le no1mondial aura l’occasion de le luireprendre dès son premiermatchdu tournoi, lundi 26mai. «Tout aété sous contrôle», a confié Fede-rer, enmanquede repères sur ter-re battue pour avoir peu joué cesderniers temps en raison de lanaissance de ses jumeaux.

Untrophéedeplus,etquelquesfrayeurs,pourl’EspagneàvingtjoursduMondialLesacreduReal enLiguedeschampionscomplique le travailde laRoja

«Cen’estqu’avecuntitreenTop14

queleclubrenaîtraitréellement»

MouradBoudjellalprésident du RCT

Toulonveuttransformerl’essaiVainqueurde laHCup, le clubvaroisviseaussi lebouclierdeBrennus

Jo-WilfriedTsongaapassél’écueildupremiertoursansrassurer

sursescapacitésdumoment

LesFrançaisfontprofilbassurterrebattueLesperformancesrécentesdesBleusn’autorisentpasdefolespoirautournoideRoland-Garros

Football

A ssisdans les tribunesdusta-de de la Luz à Lisbonne,Vicente del Bosque n’a guè-

re dû apprécier le scénario de lafinale de Ligue des champions,samedi24mai,quiopposait leRealMadrid et l’Atlético Madrid, sonrival historique, lors d’un derbyinédit à ce stadede l’épreuve.

Supervisant la rencontre auxcôtés de son adjoint Toni Grande,le sélectionneur espagnol auraitsansdoutepréféréque la partienes’étire pas jusqu’à la 120e minutede jeu. A vingt jours du coup d’en-voi de la Coupe du monde, du12 juin au 13 juillet au Brésil, lepatrondelaRojaaassistéàlavictoi-re (4-1) après prolongations desMerengue – qu’il a jadis entraînés(1999-2003) – face à des Colchone-rosperclusdecrampesetdéroutéspar l’égalisation(1-1) arrachéedansles arrêts de jeu par Sergio Ramos,infatigable défenseur du Real ettaulierde la sélection ibérique.

Douze ans après leur derniersacre européen, les Galactiquesont enfin fait main basse sur la«decima», leur dixième titre enLigue des champions. Alors qu’ilétait à moins de deuxminutes dela consécration, l’Atlético a vécuunesoiréecauchemardesque,qua-ranteansaprèsavoiréchouéàrem-porter l’épreuve (1-1, 4-0) face auxAllemandsduBayernMunich.

Sept joueurs présents sur lapelouse lisboète figurent dans lapré-liste des trente éléments rete-nus, le 13mai, par Vicente del Bos-que dans l’optique du tournoi pla-nétaire. «Nous sommes préoccu-pésparlesblessures», s’étaitinquié-té, avant la finale, le vainqueur duMondial 2010et de l’Euro 2012.

«Pas de joueurs diminués»Le technicien a dû s’alarmer en

voyantDiegoCosta, l’attaquant del’Atléticoetde laRoja,quitter l’airedejeudèsla9eminute.Endélicates-se avec sa cuisse depuis le 17mai,jouroùsa formationa remporté letitre enLiga, le buteur avait été ali-gnéd’entréeaprèsavoirsuivi,àBel-grade,un traitementàbase depla-centadejument.Al’originedupre-mier but de la rencontre, la sortiehasardeuse d’Iker Casillas, le gar-dienmerengue, a dû faire tousserVicente del Bosque. Ce dernier n’apas dû être rassuré par la condi-tion physique précaire des Roji-blancos David Villa et Juan Fran,incapables de courir dans les pro-longations.

Le sexagénaire devait annon-cer, dimanche 25mai, sa liste des23joueursconvoquéspourleMon-dial. Mais il a prudemment choisid’attendre lematch amical contrelaBolivie, vendredi 30mai, pour larendre officielle. Le patron de laRoja a préféré ne pas incorporerdans sa liste provisoire de

19joueurs les «Madrilènes» quiont disputé la finale de Ligue deschampions.«Hier, certainsont res-senti des problèmes physiques etnous devons nous assurer qu’ilssont en parfaite condition pour leMondial, a expliqué le sélection-neur.Nous ne pouvons pas emme-nerdes joueurs diminués.»

Basés à Curitiba, les Espagnolsespèrentréaliserunquadrupléhis-torique après les victoires lors desEuro 2008 et 2012 et du Mondial2010.Lasélectionibériquedébute-ra la compétition, le 13juin, contrelesPays-Bas lorsduchocde lapou-leB.Elle affronteraensuite leChili,le18 juin,puis l’Australie, le23juin.Si des interrogations planent surl’état de fraîcheur de plusieursacteurs de la Roja après cette sai-son harassante, l’Espagne semblepourtant enpositionde force.

Solidement installée à la pre-mière place à l’indice UEFA, elle ahissé cette saison deux clubs enfinale de la plus prestigieuse descompétitions continentales et undesesreprésentants, leFCSéville,aremporté (0-0) aux tirs au but laLigueEuropa,le14mai,faceauBen-fica Lisbonne. Ce retour au pre-mier plan du football ibériquecontraste avec l’échec de ses plusillustres ambassadeurs, le RealMadrid et le FC Barcelone, lors desdemi-finalesdel’éditionprécéden-te de la Liguedes champions.p

RémiDupré

Jo-Wilfried Tsonga s’est défait péniblement d’Edouard Roger-Vasselin (7-6/7-5/6-2), dimanche 25mai, à Roland-Garros. DARKO VOJINOVIC/AP

22 0123Mardi 27mai 2014

Page 23: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

disparitions

Agéde90ans, le généralWoj-ciech Jaruzelski est mort,dimanche25mai, à l’hôpitalmilitairedeVarsovie.Hospi-taliséà lami-décembre2012pour une hémorragie dans

les voies respiratoires, il connaissait desennuisde santédepuis plusieurs années.

Un homme se résume-t-il à un acte, sipolitique,sidramatiquesoit-il,accompliily a trente-deux ans? La réponse est oui,dans le cas du général Jaruzelski. Le13décembre 1981 est la date emblémati-que de sa vie, celle par laquelle il est entrédans l’Histoire, celle qui l’a hanté, aussi,jusqu’au seuil de samort. Ce 13décembre,à latêteduConseilmilitairedesalutnatio-nal (WRON), le général a proclamé l’«étatdeguerre»enPologne,quineserasuspen-duqu’en juillet1983.

«Notre terre natale est auborddugouf-fre», dit-il alors dans son adresse célèbreaux Polonais, lors d’une allocution à laradio et à la télévision. «Chaos», «déses-poir»,«démoralisation»,«terreur»,«ven-detta morale» figuraient parmi ses motschoisis, destinésà accuser le syndicat Soli-darnosc, quimontait enpuissance depuisprès de deux ans, de tous les maux dupays. «Combien de temps la main tenduedoit-elle rencontrer le poing serré ? »,demandait-il d’une voix terne, caché der-rièreses lunettesépaisses,pour justifier laloimartiale.

Une procédure pénale sommaire estmiseenplace.Leslibertésderéunion,d’as-sociation, de manifestation sont suspen-dues. Les liaisons téléphoniques sont cou-pées, les frontières fermées. La police a lespleinspouvoirs.Desmilliersd’opposants,parmi les ouvriers, les sympathisants deSolidarnosc et les intellectuels engagés,sont alors incarcérés.

Le général Jaruzelski a prétendu pen-dantplusde trente ansque le 13décembreavait été un «mal nécessaire». Il assuraitque les troupes soviétiques seraiententrées en Pologne s’il n’avait pas adoptéunemesureaussiradicale,faceàuneoppo-sition devenue, selon lui, déraisonnable.Malgré les avertissements réels et les rap-pelsà l’ordreformulésà l’époqueparMos-cou à l’égard de Varsovie, cette analyse atoujours été très contestée, que ce soit parles historiens ou les dirigeants de Solidar-nosc.

Wojciech Jaruzelski est né le 6 juillet1923 à Kurow, près de Lublin, dans l’est dela Pologne, au sein d’une famille d’originearistocratique, catholique et très antirus-se. L’adolescent fait ses études chez lesjésuites.Avec sesparents, il est déportéenSibériependantlasecondeguerremondia-

le. Ildoitcouperduboisdanslaneigeépais-se, sous une lumière aveuglante, qui abî-masesyeuxet le poussapar la suite àpor-ter ses fameuses lunettes fumées. Malgréces épreuves, il va servir la main qui l’aéreinté. «A l’époque, je détestais la Russie.Mais lorsque j’ai découvert le simpleRusse,leSibérien,quipartageaitavecnousunqui-gnondepain, lorsquejel’aivusouffrircom-me nous, combattant au front jusqu’ausacrifice, j’ai révisé mon attitude à leurégard», expliqualegénéraldansuneinter-viewfleuve,accordéeauquotidienGazetaWyborczaen 2004.

En 1942, Wojciech Jaruzelski s’engageaux côtés de l’Armée rouge, contre lesnazis. La carrièremilitaire de ce serviteurzéléde lacausecommunistevas’accéléreraprès la guerre. Apparatchik enuniforme,il s’élève à chaque crisemajeure subie parle régime, démontrant une loyauté sansfaille. Il devient le plus jeune général dupays à 33 ans, en 1956, alors que des dizai-nes de manifestants sont tués à Poznan.En1967 et 1968, il participe à l’offensiveantisémite du pouvoir, menée en raisonde l’hostilitédubloc soviétiqueà laguerrede Six-Jours. Des purgesdans l’armée lais-

sent des dizaines d’officiers de haut rangsur le carreau. Le général Jaruzelski expri-mera plus tard ses regrets, évoquant sondevoir d’obéissance envers WladyslawGomulka, lepremiersecrétaire.En1970, larépressioncontre lesgrévistesàGdansketSzczecinfait45mortsetunmillierdebles-sés, alors qu’il estministre de la défense.

Premiermilitaire de carrière à prendrela tête du Parti communiste de son pays,en 1981, le général Jaruzelski est alors unefigurepeuconnuedesPolonais,mêmes’ilétait déjà membre du bureau politiquedepuis1971.L’instaurationdelaloimartia-le va le ranger aux yeux des Polonais etdansl’opinion internationaledans lacaté-goriedesdictateurs.Ilserasouventcompa-ré à Pinochet, un parallèle qui l’irritera auplushautpointpar la suite.

Patriotisme en bandoulièreFigure paradoxale, Wojciech Jaruzelski

aétéà la fois l’incarnationdurégimecom-muniste–premiercomptabledesonappa-reil répressifetdesviolationsdesdroitsdel’homme – et l’un des principaux acteursdeladémocratisationpacifiquedelaPolo-gne. Dans lemiracle historique que fut la«table ronde», lancée au printemps 1989entre lepouvoiret l’opposition,autourdusyndicat Solidarnosc, le général ne fit pasobstacle. Au contraire, il initia le mouve-ment, dialoguant et trouvant un compro-misavecceux-làmêmesqu’ilavaitaupara-vantpourchassés et emprisonnés.

Preuve que rien n’est simple : l’un desprincipauxavocatsdugénéral Jaruzelskiaété par la suite l’ancien dissident AdamMichnik, patron du quotidien GazetaWyborcza, scandalisé par les poursuitesjudiciaires lancées contre lui.

Le général Jaruzelskin’apas été invité àla cérémonie d’investiture de son succes-seur,LechWalesa,endécembre1990.Mais

cette sortie par la petite porte n’étaitqu’un préambule. Comme dans tous lespays postcommunistes en transition, laquestion de la responsabilité morale etpénale des piliers de l’ancien régime s’estposée. Avec plus oumoins de vigueur, enfonctiondesmajorités aupouvoir.

Une première enquête parlementaire,conduiteentre1991et 1995,n’apasabouti.En1996,lamajoritédegauche,ex-commu-niste, a refusé de passer à la phase pénale,invoquant la «haute nécessité» danslaquelles’étaittrouvélegénéralendécem-bre1981.Mais en 2006, les frèresKaczyns-ki sontaupouvoir. Ils lancentune« lustra-tion» sévère contre les anciens collabora-teursdelapolicecommunisteet lescadresde l’ancien régime. C’est alors que l’Insti-tut de la mémoire nationale, organismetrès politisé qui gère toutes les archives etles dossiers individuels, accuse le généralJaruzelski d’avoir dirigé une associationcriminelle, responsablede la loimartiale.

Une humiliation juridique et politiqueinsupportable,pourcethommeayanttou-joursporté sonpatriotismeenbandouliè-re. Les fronts judiciaires se sont ensuitemultipliés contre le général Jaruzelski,l’obligeant à répéter ses excuses, sesregrets, sa visionde l’Histoire, au fil de seslivres et de mille entretiens à la presseinternationale. Pour raisons médicales, ilaétéexemptéduprocèssur la loimartiale.

Nous l’avions rencontrépour la derniè-re fois en octobre2011, dans une chambrede l’hôpital militaire de Varsovie. Malgrésagrandefaiblessegénérale,ilpoursuivaitsans relâche la plaidoirie de sa vie, poursonhonneur.LesPolonais,eux,enparticu-lier les nouvelles générations, ne saventplusousipeudequellespeineslecommu-nisme fut le nom. L’indifférence est uneformedouce de condamnation.p

Piotr Smolar

Le 10mars 1981, avec LechWalesa. WITOLD ROZMYSLOWICZ/EPA

6 juillet 1923Naissance à Kurow(Pologne)1981-1985Premierministre13 décembre 1981Proclamel’«état de guerre» en Pologne1985-1989Président du Conseil d’Etat1989-1990Président de la République25mai 2014Mort à Varsovie

Ancienprésidentpolonais

WojciechJaruzelski

L’indulgencedesanciensadversairesdugénéral«UNHOMMEtrès intelligent»queDieuseulva juger, adéclaré ledirigeanthistori-quedusyndicatSolidarnosc, LechWalesa,après l’annoncede lamort, dimanche25mai, dugénéral Jaruzelski.«Sagénéra-tiondevait fairedes choixdifficiles.Cer-tainsadhéraientà la trahisoncommunis-te, d’autres tentaientde s’yopposerde l’in-térieur»,a-t-il ajouté.«Il connaissaitproba-blement trèsbien lamentalité soviétique,avait connaissancede leurarsenaldemissi-les. Il était endroit depenser, commebeau-coupdans lemonde,qu’onn’avaitaucunechancede s’en sortir»,aajouté l’ex-prési-dentpolonaisetPrixNobelde lapaix.

SelonM.Walesa,qui fut l’adversaire lepluscoriacequ’ait euàaffronter legénéralJaruzelski, celui-ci était, enprivé,«unhom-metrès intelligent, pleind’humour».«J’aiperduquelquesbatailles contre lui,maisj’aigagné laguerrepourunePologne libre.J’ignore toutde sesmotivations, je laissedonc le jugementàDieu»,a-t-il conclu.

UnautreadversairedeM.Jaruzelski, ledissidentAdamMichnik, a estimé,diman-

che,queM.Jaruzelski avait choisi, faceà lamenaced’une interventionrusse,«lemoindremal».«Son rôleaétépositif, pen-dantetaprès la table ronde»,a jugéM.Michnik.

Unhomme«exceptionnel»L’ex-présidentsoviétiqueMikhaïlGor-

batchevasalué lamémoired’unhomme«exceptionnel»,quia«beaucoupfaitpourlaPologne».«C’étaitunsoldat, il avait com-battu le fascismeavecnouset était resté jus-qu’aubout fidèleà sonchoixdu socialis-me»,aajouté lepèrede laperestroïka, quifutà la têtede l’Unionsoviétiquede 1985jusqu’à sonéclatementen 1991.

Faceà la contestationdans sonpays,«iln’apaspermisque l’onenarriveàdes extré-mités»,a soulignéM.Gorbatchev.«Nousétionsamis,pouravoirpartagédes idées etparticipéàdes événements importants.Nousnous sommessouvent rencontrésquandil était président, et quand jel’étais»,a-t-il encoredéclaré.

En 1981, quand legénéral Jaruzelski a

imposé la loimartialeenPologne faceà lamontéede la contestation– selon luipouréviterune invasionsoviétique–,MikhaïlGorbatchevétaitmembreduPolitburoduComitécentralduParti communiste, l’or-ganedirigeantde l’URSSdont lenumérounétait alorsLeonidBrejnev.

Selon l’ancienprésidentpolonaisAlek-sanderKwasniewski (1995-2005),unex-communisteetunprochedeM.Jaru-zelski, celui-ci fut«l’unedes figures lesplusimportantesde l’histoirepolonaisedesder-nièresdécennies».

Leparti social-démocrateSLDaannon-cédimancheavoir adresséunedemandeauprésidentBronislawKomorowskideproclamerundeuilnational.Maisunepro-checollaboratriceduprésident, JoannaTrzaska-Wieczorek,a laisséentendrequecettedemandeneseraitpasacceptée.«Undeuilnational, commesonnoml’indique,doit toucher lepays tout entier. Il fautdoncéviterdes initiativesqui risquentd’appro-fondir lesdivisions»,a-t-elledéclaré.– (avecAgences) p

230123Mardi 27mai 2014

Page 24: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

24 0123Mardi 27mai 2014carnet

en venteactuellement

K En kiosque

Hors-série

Hors-série

7 matières pourréussir votre bac

Collections---------------------------------------------------------

Dès mercredi 28 mai, le volume n°5COMME UN CRABE, DE CÔTÉ

de M. Ledun, illustré par C. Berberian

Dès mercredi 28 mai,le volume n° 19 LES ROYAUMESCHRÉTIENS ET LES CROISADES

Actuellement en kiosquele CD-livret n° 21CHEZ LES YÉ-YÉ

7 matières pour

Hors-série

Hors-série

Nos services--------------------------------------------------------------LecteursKAbonnements

Tél. : 32-89 (0,34� TTC/min)www.lemonde.fr/abojournal

K Boutique du Monde80, boulevard Auguste-Blanqui,75013 ParisM° Glacière ou CorvisartTél. : 01-57-28-29-85www.lemonde.fr/boutique

K Le Carnet du MondeTél. : 01-57-28-28-28

ProfessionnelsK Service des ventes

Tél. : 0-805-05-01-47

Dès mercredi 28 mai,

0123

Dès mercredi 28 mai, le volume n° 5

Actuellement en kiosque

yȽ üÀJÊ%½ ?±?Ê#Ì#ʹ½�Jö½½JÊ'#½~ FJƹ;Ì#½~"öJÊAJöëë#½~ ÌJÀöJü#½~

JÊÊö±#À½JöÀ#½ %# ÊJö½½JÊ'#~JÊÊö±#À½JöÀ#½ %# ÌJÀöJü#

.±ö½ %# %?'=½~À#Ì#À'ö#Ì#ʹ½~ Ì#½½#½~

'ÈÊ%Èë?JÊ'#½~ùÈÌÌJü#½~

JÊÊö±#À½JöÀ#½ %# %?'=½~½Èµ±#ÊöÀ½

)ÈëëÈõ#½~ 'ÈÊ"?À#Ê'#½~½?ÌöÊJöÀ#½~ ¹JFë#½|ÀÈÊ%#½~

ÆÈÀ¹#½|ȵ±#À¹#½~ "ÈÀµÌ½~òȵÀÊ?#½ %J?¹µ%#½~ 'ÈÊüÀ=½~

ÆÀÈò#'¹öÈʽ|%?FJ¹½~ÊÈÌöÊJ¹öÈʽ~

J½½#ÌFë?#½ ü?Ê?ÀJë#½

�ȵ¹#ÊJÊ'#½ %# Ì?ÌÈöÀ#~¹ù=½#½~ ¨&�~

%ö½¹öÊ'¹öÈʽ~ "?ëö'ö¹J¹öÈʽ

¯�ÆȽö¹öÈʽ~ ±#ÀÊö½½Jü#½~½öüÊJ¹µÀ#½~ %?%ö'J'#½~

ë#'¹µÀ#½~'ÈÌ̵Êö'J¹öÈʽ %ö±#À½#½

¯.%) '.%'T N0R.)3x'N.0 R�e ]W bU bU bU�e ]W bU be `Z

Xx)0T',3,%vKNXN'T�R)

�# )JÀÊ#¹

GO'a!E! !%aEIa'# %/ ROP%# G- \ =+b *O/T#,-I% -/c/GE#\*T-PK/a \ U`+6L M-IaG \ _LL =86 =`+ I'G M)1[0 \ ')5[N)X CA 8_ S6+ L_=bU+!4 O;1A 1@0A1F@A )HD97HFA)HD )"799@0 AN F)X)"XA A9 e1)9fA W@N1757X[N)[9A ZH03H2)H L6Q6JQJ+6_4 #9 )55X[f)N[79 CA0 )1N[fXA0 L=b L8 AN _+ CA X) X7[ a9<71W)N[3HA AN T["A1N@0 CH S Z)9F[A168U=b F7H0 C[0570A. C2H9 C17[N C2)ff>0b CA 1AfN[:f)N[79 AN CA 1)C[)N[79 CA0 [9<71W)N[790 F7H0 f79fA19)9N A9 F7H0 )C1A00)9N ( 97N1A 0[>^A4 M)1 97N1A [9NA1W@C[)[1AbfA0 C799@A0 57H11)[A9N ?N1A0 f7WWH9[3H@A0 ( CA0 N[A10b 0)H< 0[ F7H0 f7f]A. X) f)0A f[\f79N1A4

$"BA14 B48B3B862::2%7726@:2'B+B=182 #5

'/,.9 =)2G :2 +"C8B24>"==62B:*!9F #5&A=":B2C #5

/2,.*("0( # &.(*4 -.'*0"+ +/&*3 !14% &.') ,"* ,.*(4'*$$

%492C,)142 ; 16B 414*1?92 "6H :299C2A ;#17B4"9B32 (1::2=9B32

'/,.9A,/=B-E62:2 022<D248

&M1[D CA FA9NA A9 Y[703HA4 &&G7H0 1@0A1FA CA X) 5700["[X[N@ 57H1 970 571NAH10 CA 0A1F[1 F7N1A )C1A00A4

*"&&($'# ),+*!##(%(#$* ;4<1?295C 59 @ C5:3405C @ d "% !#$&% \ GA1F[fA -"799AWA9N0 \ -66++ \ SJ+SS -11)0 'ACAD 8

6_J#RK-%',

ZA W2)"799A ( X) '4C<6?5 &:92+C!?5 CH *#!(' %5 F649D8D5: ;)!F65 B46C, 946A ?5A A611?2<5:9A , * $' ")&)+%!' (, *#!(' , ?E!;;/A @ ?E(8D9D4:!=4::2A 86 $4:85.-C 5A9C)9N L W7[0 57H1 >7 ! )H X[AH CA 6U8b_+ "&#"&

"( #'&%( $!# )']>3HA ")9f)[1A ( X271C1A CA X) G7f[@N@ @C[N1[fA CH !#$&%')1NA ")9f)[1A d ')1NA *XAHA ,[0) R)0NA1f)1C

PB d

#D5[1A <[9 dP7NA. XA0 L CA19[A10 f][;1A0:^H1)9N )H FA107 CA F7N1A f)1NA d

%)NA AN 0[^9)NH1A 7"X[^)N7[1A0

P7W d

M1@97W d

-C1A00A d

'7CA 570N)X d

T7f)X[N@ d

#\W)[X d

$

E@X4 d

V2)ffA5NA CA 1AfAF7[1 CA0 7;1A0 CH !#$&% O/a POP7H CA 0A0 5)1NA9)[1A0 O/a POP

!"!

*)&''(!#"&$%+- #%'- (' $"!)&,!*

53!.'&4*(4

AU CARNET DU «MONDE»

Décès

Mme Hugues Lawton,née Micheline Banzet,

Mme Gisèle Peugeot,leurs mères,

Philippine Cruse et Alexia Cruse,leurs filles,

M. et Mme Jean-Pierre Banzet,M. et Mme Frédéric Banzet,Julie Banzet, Claire Cruse,

Jean-Paul Cruse,M. et Mme Pierre Lawton

et leurs enfants,leurs frères, belle-sœur, sœurs,neveux et nièces,

ont la grande tristesse de faire partdes décès de

MmeMarie-Noëlle BANZETet de son mari,

M. Didier CRUSE,survenus le 15 mai 2014.

La cérémonie religieuse aura lieule mardi 27 mai, à 10 h 30, au Templeprotestant, 19, rue Cortambert, Paris 16e,suivie de l’inhumation, dans l’intimité,au cimetière d’Avernes.

Vescemont.

Mme Françoise Ricalens-Dardier,son épouse,

Philippe et Laure, Jean-Marcet Estelle, Anne,ses enfants,

Guillaume, Elise Zoé, Celia, Anthéa,Maxime, Diane, Thomas, Emmannuelleet Camille,ses petits-enfants,

Les familles Ricalens, Butzbach,Marchand, Leonard, Pourchot, Zucker,McDonald, Crellin,

ont la grande tristesse de faire partdu décès de

John Edward DARDIER,Wing Commander (RCAF), OMM,

survenu a Vescemont, le 22 mai 2014.

Réunion au Temple Saint-Jean.

Nous invitons les amis et les proches dela famille à se joindre à nous pour le culted’action de grâce, le mardi 27 mai,à 14 h 30, au Temple protestant, faubourgdes Ancêtres, à Belfort , suivi del’inhumation au cimetière de Giromagny.

Une corbeille sera déposée à l’église,dont le profit sera reversé à l’InstitutCurie.

Le présent avis tient lieu de faire-partet de remerciements.

Ni fleurs ni plaques.

15, quartier du Mont-Jean,90200 Vescemont.

Audrey-Charlotte Maillochaud,sa compagneet leur fille, Hortense,

Denise Debon,sa mère,

Catherine, Marie-Ange, Valérie,ses sœurs,

Ses beaux-frères et belles-sœurs, neveuxet nièces,

Ses beaux-parents,

ont la douleur de faire part du décès de

Henri-Jean DEBON,

survenu le 22 mai 2014,à l’âge de quarante-cinq ans.

Une célébration d’adieu aura lieule 27 mai, à10 h 30, en l’église Saint-François-de-Sales, rue Brémontier, Paris 17e.

Versailles.

Ses enfants,Ses petits-enfants,Sa famille,Ses amis et camarades,

ont la tristesse de faire part du décès de

M. Bernard DUPUTEL,survenu le 20 mai 2014.

18 bis, rue Champ Lagarde,78000 Versailles.

Ramon Fernandez,directeur général du Trésor,

Et l’ensemble des agentsde la direction générale,

ont la tristesse de faire part du décèsde leur jeune collègue,

Nicolas FERRARI,chef de bureau

à la direction générale du Trésor,

survenu le 21 mai 2014,à l’âge de trente-cinq ans.

Ils s’associent au deuil de sa familleet de ses proches.

Une cérémonie religieuse a eu lieuce lundi 26 mai, à 15 h 45, en l’égliseSainte-Thérèse de Rueil-Malmaison.

Mme Nicole Florescu, née Michel,son épouse,

Nick, John, Radu et Alexandra,ses enfants,

Elle, Alexander, Isabella, Nicholas,Ava, Peter, Théodore, Radu Jr., Matthew,Victor, Wiliam Jr., Ileana et Sophia,ses petits-enfants,

Yvonne, sœur bénédictine« sister John the baptist »,sa sœur,

ont la tristesse de faire part du décès de

M. Radu FLORESCU,académie de Roumanie

(Diploma Honoris),professeur Emeritus, Boston college,

USA.

La cérémonie religieuse a été célébréece lundi 26 mai 2014, à 14 h 30,en l’église Sainte-Philomène du Cannet,suivie de l’inhumation au cimetièreNotre-Dame-des-Anges.

Avignon. Digne-les-Bains.

Les fami l l es Gi res , Galeazz i ,Brouchon,

Parents et alliés,

font part du décès de

Françoise GIRES,écrivain,

agrégée de Lettres classiques.

La cérémonie a eu lieu le samedi24 mai 2014, à 15 heures, au cimetièrepaysagé Notre-Dame du Bourg, à Dignes-les-Bains.

Anne Sophie, Alexiset Grégoire Korganowainsi que leurs enfants,

ont la tristesse de faire part du décès de

Mme Françoise MarieGUINOISEAU,

professeur de Lettres,

survenu le 19 mai 2014,dans sa soixante-dix-neuvième année.

La cérémonie religieuse a eu lieusamedi 24 mai, à 9 heures, en l’églisede Puyricard (Bouches-du-Rhône).

Jacques,son époux,

Sophie et Nicolas,ses enfants,

François et Chantal,son beau-frère et sa belle-sœur,

Pauline et Vincent,leurs enfants,

ont la grande tristesse de faire partdu décès de

Claude ROBNARD,née THIRION,

survenu le 22 mai 2014, à Paris,dans sa quatre-vingtième année.

La cérémonie religieuse sera célébréele mercredi 28 mai, à 10 h 30, en l’égliseSaint-Martin de Meudon (Hauts-de-Seine),suivie de l’incinération.

Cet avis tient lieu de faire-part.

Michel, Jacques et Joël (†),ses fils,

Geneviève, Michèle et Régine,ses belles-filles,

Brigitte Hauser,sa belle-sœur,

Laurent, Julien, Charlotte, Cassia,Judith, Barbara et Benjamin,ses petits-enfants,

Diane, Axelle, Aurélien, Léo, Adrien,Mila, Fanny et Gabriel,ses arrière-petits-enfants,

Daniel, Miri, Claire et Marc,ses neveux et nièces

Et toute la famille,

ont la tristesse d’annoncer le décès de

Elisabeth SAKAROVITCH,née ROUKHOMOVSKY,

survenu le 23 mai 2014,dans sa centième année

et rappellent le souvenir de son mari,

Jean SAKAROVITCH,(1907-1979)

de son frère,

Benjamin TALMON,(1913-2013),

et de son petit-fils,

Mathias SAKAROVITCH,(1980-1994).

L’inhumation aura lieu au cimetièreparisien de Bagneux, le mardi 27 mai,à 10 h 45.

Paris.

Un juif parmis les hommes.Un soldat volontaire dans les Forces

françaises libres.

Mme Loubia Simon,son épouse,

Francine, Patricia, David et Raphaël,ses enfants,

Jacqueline Moncorge,sa sœur,

François Mouton,son frère,

font part du décès deM. André Victor SIMON,

survenu le 22 mai 2014,à l’âge de quatre-vingt-dix ans.

Les obsèques auront lieu le 28 mai,à 15 h 30, au cimetière parisien deBagneux, 45, avenue Marx Dormoy,Bagneux (Hauts-de-Seine).

Il ne sera pas envoyé de faire-part,cet avis en tenant lieu.

Irmine, Richard et Marina,ses enfants,

David, Jonathan, Ilan, Mickaëlet Abel,ses petits-fils et arrière-petit-fils,

Sa familleEt ses amis,

on t l a dou l eu r d ’annonce r que

Hélène WILF

nous a quittés, pour rejoindre son mari,

Max.

La cérémonie se déroulera le mardi27 mai 2014, à 11 heures, au cimetièrede Bagneux (Hauts-de-Seine).

Danielle,son épouse,

Sacha et Lise, Jérémie et Iman,ses fils et leurs compagnes,

Anna, Rachel et Nahla,ses petites-filles,

Sa famille,Ses amis,

ont la douleur de faire part du décès de

Vladimir ZILBERFARB,

survenu le 23 mai 2014.

Un hommage lui sera rendu le mercredi28 mai, à 16 h 45, au cimetièrede Villebon-sur-Yvette (Essonne), ruede la Plesse.

14, rue Leperdriel,91140 Villebon-sur-Yvette.

Anniversaire de décès

Il y a vingt ans, disparaissait

le docteurClaude FRANCFORT.

Nous n’oublions pas.

Souvenir

A l’occasion du second anniversaire dela disparition de

Jocelyne BEHREND,architecte D.P.L.G,

Hervé, Lucile et Hadrien Chneiweiss, vousinvitent à une pensée émue à sonsouvenir.

Sa lumière et son œuvre nousaccompagnent.

Communications diverses

Sous l’égide de la Fondationpour la recherche médicale,

Vaincre ensembleles maladies mentales

La Fondation pour la rechercheen psychiatrie et en santé mentale,

reconnue d’utilité publique,lance un 4e appel à projets 2013-2015

Thèmes de recherche• Émergence des troubles mentaux

et leur dépistage,• Insertion professionnelle

et santé mentale,• Violence et santé mentale,

• Handicap psychique.

Principes générauxL’objectif de la Fondation

est de promouvoir les recherchesfondamentales, épidémiologiqueset cliniques, sur la santé mentale.

Appel aux donsPour financer les projets sélectionnés,

la Fondation a besoin de recueillirdes dons et des legs des particuliers,des associations et des entreprises

partenaires,

Les dossiers et les donssont à adresser à :

Zoé Logak,secrétaire général,

Fondation pour la rechercheen psychiatrie et en santé mentale,

CH Sainte-Anne,1, rue Cabanis,

75674 Paris Cedex 14.

Date limite de dépôt des dossiersprolongée jusqu’au 14 juillet 2014

Informations et contactwww.psy-fondation.fr

ISF :Déduisez 75 % du montant de votre donà la Fondation du patrimoine juif

de France,pour préserver, construire et entretenirle patrimoine des communautés juives

de France (synagogues, Mikvé, ...).Tél. : 01 49 70 88 02,

[email protected] l’égide

de la Fondation du judaïsme français.

Page 25: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

0123 est édité par la Société éditrice du «Monde » SADurée de la société : 99 ans à compter du 15décembre 2000. Capital social : 94.610.348,70¤. Actionnaire principal : Le Monde Libre (SCS).Rédaction 80,boulevardAuguste-Blanqui, 75707Paris Cedex13 Tél. : 01-57-28-20-00Abonnements par téléphone: deFrance32-89 (0,34¤TTC/min) ; de l’étranger: (33) 1-76-26-32-89;par courrier électronique: [email protected] 1 an : Francemétropolitaine : 399¤Courrierdes lecteurs: blog:http://mediateur.blog.lemonde.fr/;Parcourrierélectronique:[email protected]édiateur:[email protected]: site d’information:www.lemonde.fr ; Finances : http://finance.lemonde.fr; Emploi :www.talents.fr/ Immobilier:http://immo.lemonde.frDocumentation: http ://archives.lemonde.frCollection: LeMonde surCD-ROM :CEDROM-SNI01-44-82-66-40LeMondesurmicrofilms: 03-88-04-28-60

J en’ai vuaucundes filmsrécom-pensésàCannes,mais, à consta-ter l’atmosphèreatonede la

cérémoniede clôtureduFestival,aucoursde laquelle lepalmarèsétait livré, samedi 24mai à 18h55surCanal+, j’ai eu l’impressionquele compten’yétaitpas. La salle,commeà l’ouverturede lamanifes-tation, le 14mai, étaitunpeuendormieet, àpart la longueova-tionsaluant leprésident sortantGilles Jacob (après trente-huitanspassésauxcommandesduFesti-valdeCannes, commedéléguégénéralde 1977à 2001et, depuis, àsaprésidence), ellene futguèrehabitéepar lapassion. Lointainessontces éditionscontroverséesoùl’onentendaitdesprotestationsoudes insultesdans lepublic etoùl’onvoyaitunMauricePialat adres-serunbrasd’honneurà ceuxqui lecontestaientdans les rangs…

LambertWilson,maîtrede céré-monie, a réendossé ce rôle deBri-tish stylé etpincéqui lui colle à lapeauetque cegenred’exercicerendplus caricatural encore.Maisil faut reconnaîtreque,dans legenre, il estparfait et saitpasserlesplats commelemeilleurdeshôtes. Il auraprononcé lesnomsavec l’accent idoine,donné lebrasàuneSophiaLorencommemomi-fiéeet feintdenepas remarquerl’absencede JulianneMoore, quin’apas jugébondemonterdansun jetprivépour retraverser l’At-lantiqueet recevoir enmainpro-pre le Prixd’interprétationfémini-ne.Çamanquaitd’ailleursdevedettesaupremier rang, cettecérémoniede clôtureà l’at-mosphère funèbre…

Comparéà l’affectationdeWil-

son, lenaturelde laprésidentedujury, la réalisatricenéo-zélandaiseJaneCampion,en robe-sacet san-dales,n’enparaissaitqueplusdéca-lé et rafraîchissant: elle se trom-paitdans lesnomsou leurpronon-ciation,oubliait sonmicro sur sachaiseetmanifestaitunmanqued’aisancesympathiqueet tou-chant.

AprèsqueXavierDolaneutreçu, exaequoavec Jean-LucGodard, lePrixdu jury (prixdeconsolationouprixde la chèvreetduchou)pour son filmMommyetqu’il eutdit à JaneCampionquesaLeçondepiano (Palmed’or 1993)avait été l’élémentdéclencheurdesacarrièrede cinéaste, laprésiden-

te s’est sans façondirigéevers luipour l’étreindre. (Lorsde la confé-rencedepresseau coursde laquel-le le jury explicitait ses choix,Cam-piondit ensuitequ’elle trouvaitdugénieà ce très jeunecinéaste cana-dien.)

Après la cérémonie,Dolanaannoncévouloir faireunepause:tropde travail, tropdepression, etl’envied’«êtreavecdesgensde[son]âge…». Unemanièrededire,à travers l’amertumeperceptibledesespropos, que tout cemondeducinémaétait régipardes«vieux»?CettepetitephrasedeMarie-LauredeNoailles le console-rapeut-être:«La jeunesse, c’est cequi sera toujours làquandnousseronsmorts.»p

C’EST À VOIR | CHRONIQUEpar Renaud Machart

«Mommy»etmomies

T

1010

1005

A

A

A

D D

D

D1015

1015

1015

1015

1005

10101010

1010

1020

1020

1020102

0

1025

1025

1030

1035

1025

1030

Météorologue en directau 0899 700 713

1,34 € l’appel + 0,34 € laminute7 jours/7 de 6h30-18h

Nord-Ouest

Ile-de-France

Nord-Est

Sud-Ouest

Sud-Est

Jours suivants

www.meteonews.fr

Températures à l’aube l’après-midi

Front chaud Front froid

DépressionAnticyclone

Occlusion Thalweg

DA

Paris

Madrid

Séville

Rabat

AlgerTunis

RomeBarcelone

Tripoli

Le CaireJérusalem

Beyrouth

Athènes

Berne

Amsterdam

Bruxelles

BerlinLondres

Edimbourg

Dublin

OsloStockholm

Copenhague

Riga

Varsovie

Kiev

Ankara

Istanbul

Sofia

OdessaBudapest

Vienne

Prague

Munich

ZagrebMilanBelgrade

Bucarest

St-PétersbourgHelsinki

Minsk

Moscou

LisbonneLisbonne

TunisTunis

BarceloneBarcelone

TripoliTripoli

Lisbonne

ReykjavikReykjavik

En EuropeAmsterdamAthènesBarceloneBelgradeBerlinBerneBruxellesBudapestBucarestCopenhagueDublinEdimbourgHelsinkiIstanbulKievLa ValetteLisbonneLjubljanaLondresLuxembourgMadridMoscouNicosieOsloPragueReykjavik

RigaRomeSofiaStockholmTallinTiranaVarsovieVienneVilniusZagrebDans le mondeAlgerAmmanBangkokBeyrouthBrasiliaBuenos AiresDakarDjakartaDubaiHongkongJérusalemKinshasaLe CaireMexicoMontréalNairobi

New DelhiNew YorkPékinPretoriaRabatRio deJaneiroSéoulSingapourSydneyTéhéranTokyoTunisWashingtonWellingtonOutremerCayenneFort-de-Fr.NouméaPapeetePte-à-PitreSt-Denis

Paris

Madrid

Séville

Rabat

AlgerTunis

RomeBarcelone

Tripoli

Le CaireJérusalem

Beyrouth

Athènes

Berne

Amsterdam

Bruxelles

BerlinLondres

Edimbourg

Dublin

OsloStockholm

Copenhague

Riga

Varsovie

Kiev

Ankara

Istanbul

Sofia

OdessaBudapest

Vienne

Prague

Munich

ZagrebMilanBelgrade

Bucarest

St-PétersbourgHelsinki

Minsk

Moscou

35 à 40° > 40°30 à 35°25 à 30°20 à 25°15 à 20°10 à 15°5 à 10°0 à 5°-5 à 0°< -5°

Amiens

Metz

Strasbourg

Orléans

Caen

Cherbourg

Rennes

Brest

Nantes

Poitiers

Montpellier

Perpignan

Marseille

Ajaccio

Nice

Clermont-Ferrand

Lyon

Chamonix

Bordeaux

Biarritz

Limoges

Besançon

Rouen

PARIS

Châlons-en-champagne

Toulouse

Dijon

Lille

1 22

Grenoble

16142621

2518211417121713

2116

25172917171315714111172218311719182012221312918112411261629231782014108

2312311737302924261717723233128393229273018342241252516

14 172415

43302418332221822152422

332724163120251924182919

252718262621

pluiemodéréebienensoleillé

soleil,oragepossibleaversesorageusesaverseséparsesaverseséparses

assezensoleillé

pluiesorageusessoleil,oragepossiblebienensoleilléassezensoleilléaverseséparsesenpartieensoleillébienensoleillésoleil,oragepossiblebeautempsassezensoleillésoleil,oragepossiblepluiemodéréeaverseséparsesenpartieensoleillésoleil,oragepossiblebienensoleillébienensoleillépluiesorageusesaverseséparses

assezensoleillébeautempssoleil,oragepossiblebienensoleillépluiesorageusesbienensoleillébienensoleillésoleil,oragepossiblebeautempssoleil,oragepossiblebeautempsbeautempsbienensoleillépluiesorageusesaverseséparsespluiesorageuses

beautempspluiesorageusesbeautempsbeautempsbienensoleilléassezensoleillé

soleil,oragepossible2512beautemps

assezensoleillébienensoleilléaverseséparsesassezensoleillépluiesorageusesbienensoleillé 139

pluiesorageusespluiesorageusesassezensoleillésoleil,oragepossiblepluiesorageusesbienensoleillé

Mercredi

Mardi 27mai27.05.2014

50 km/h

30 km/h

50 km/h

30 km/h

60 km/h

13821162613117

257 918

28172515

132324

13

assezensoleillébeautempspluiesorageusesbienensoleilléenpartieensoleillébienensoleillésoleil,oragepossiblesoleil,oragepossibleaverseséparsessoleil,oragepossible

Jeudi Vendredi Samedi

20h1805h54 05h17

21h40

920

1121

919

1220

1221

1221

1219

1120

1122

1120

1221

1020

1426

1526

1526

9 16

10 19

11 20

11 18

9 19

8 18

9 209 19

9 19

10 21

8 17

12 15

9 18

8 18

12 17

11 18

7 17

9 19

11 18

12 19

13 20

12 16

11 17

13 16

10 16

11 18

9 18

12 17

6 12

14 18

9 19

9 18

12 19

12 22

14 2415 21

12 21

10 17

12 23

312826272825

Augustin82

UKRAINE FORTES CHALEURS SUR LE PAYS : 31 DEGRÉS À KIEV

En Europe12h TU

Un temps instable et souvent dominé par lesnuages l'emportera sur un bon quart Nord-Estavec quelques averses éparses, pouvantlocalement prendre un caractère orageuxl'après-midi. Ces averses seront plus rares enallant vers la la moitié Ouest où de belleséclaircies reviendront par le littoral en journée.Enfin, le soleil brillera plus facilement autourde la Méditerranée avec du vent fort sur lescôtes, jusqu'à 70 km/h. Températures oscillantde 15 à 25 degrés de la Manche au Gard.

Coeff. demaréeLeverCoucher

LeverCoucher

Persistance de l’instabilité

Aujourd’hui

Horizontalement Verticalement

I

II

III

IV

V

VI

VII

VIII

IX

X

Solution du n° 14 - 123HorizontalementI. Introduction. II.Mérite. Régna.III. Puisatier. An. IV.Ove.Sagement.V. Rang. RN. En.VI. Tinettes.VII. Anar. Réarma.VIII. Belote. Liège. IX. Emeutières.X. Enserrassent.

Verticalement1. Importable. 2.Neuvaine.3. Triennales. 4. Ris. Géromé.5.Otas. Ter. 6.Détartreur. 7. Ignée.Ta. 8. Crée. Salis. 9. Terme. Ries.10. Ig. Enumère. 11.Onan. Agen.12.Nantie. Est.

Philippe Dupuis

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

1. Auront dumal à lire Le Monde.2. Balcon clos. Colin à l’étal. 3.Metla France à l’échelle. Doivent êtresoutenues et défendues.4. Lourdement chargés. Ouverturesportive. 5. Brefs échangesd’aujourd’hui. Fis l’innocent.6. Article. Arrose Soissons. 7. Enrégion Centre. Surréaliste. 8.Dansles décors. Dans laMayenne.9. Enzyme. Anglais après lemariage d’Aliénor et d’Henri.10. La chevelue était libre. Points.11.Donné pour être suivi. Mesure.Compagnie en réduction.12. Fixerons solidement.

I. Vont certainement remporter lemarché. II.Développés pour fairepreuve. Accord de la France d’enbas. III. Vous attend pour fairedes tours en voiture. Protectionrapprochée. IV.Mises en vente.Instrument à corde.V. En Valachie.A passer au premier frisson.VI. Ferme lamaison. Région del’AsieMineure.VII. En Virginie ouen Egypte.VIII. Patrie deConstantin le Grand. Permet unebonne assise. Assure la réunion.IX. Bases de départs. Comme unvers où riment les hémistiches.X. La confiance ne règne pas chezelles.

Lundi26maiTF1

20.55 Résistance.Série. Episodes 3 et 4 (S1, ép. 3 et 4/6, inédit)U.23.00New York unité spéciale.Série. Sans identité (saison 14, 24/24, inédit)V ;Au secours d’Olivia (saison 15, 1/24, inédit)V ;Indélébile (saison 8, 7/22). Avec Danny PinoV.1.30 Au Field de la nuit.Avec Jean-Pierre Guéno, André Loez... (70min).

FRANCE2

20.47 Rizzoli & Isles.Série. La Mort au petit déjeuner (saison 3, 11/15,inédit) ; Alerte enlèvement (saison 2, 4/15)U ;Rancœur de consœur (saison 3, 2/15)U.23.00Mots croisés. Débat.0.30 Bouge pas, meurs, ressuscitepFilm Vitali Kanevsky. Avec Dinara Drukarova,Pavel Nazarov (Russie, 1989, N., 100min).

FRANCE3

20.45Histoire immédiate.Les Français du Jour J. Documentaire (2014).22.15Météo, Grand Soir3.23.20 La Case de l’oncle Doc.La Corse libérée. L’Epopée du « Casabianca ».1942 - 1943. Documentaire (Fr., 2014, 55min).

CANAL+

20.55 Vikings.Série. Les Liens du sang. L’Impossible Pardon(S2, 5 et 6/10, inédit)V. Avec Travis Fimmel.22.30 Spécial investigation.Manif pour tous : l’assaut du pouvoir. Magazine.23.25 L’Œil de Links. Magazine (25min).

FRANCE5

20.35 Chateaubriand.Téléfilm. Pierre Aknine. Avec Frédéric Diefenthal,Armelle Deutsch, Aurélia Petit (France, 2009).22.35 C dans l’air. Magazine.23.55 Entrée libre. Magazine (20min).

ARTE

20.50 Le Pigeonpp

FilmMario Monicelli. Avec Vittorio Gassman,Claudia Cardinale, Carla Gravina (It., 1958, N.).22.35Divorce à l’italiennepFilm Pietro Germi. Avec Marcello Mastroianni,Daniela Rocca (Italie, 1962, N., v.o.).0.15 La Lucarne - Le Ciel d’Andrea.Documentaire. Natacha Nisic (France, 60min).

M6

20.50 L’amour est dans le pré :que sont-ils devenus? Télé-réalité.0.50 Nouveau look pourune nouvelle vie. Virginie et Simon (70min).

météo& jeux écrans

Sudokun˚14-124 Solutiondun˚14-123Mardi27maiTF1

20.50 Football.Match de préparation à la Coupe du monde 2014 :France - Norvège. En direct du Stade de France,à La Plaine Saint-Denis.23.05 Unforgettable.Série. Retour de flammes. Les Traces du passé(saison 1, 4 et 7/22)U ; Jeu de mémoire.En toute diplomatie (S2, 4 et 6/13)U (190min).

FRANCE2

20.47Qui sera le prochaingrand pâtissier? Episode 2. Télé-réalité (S2).23.15 Infrarouge.Ils ont débarqué en Normandie. 0.15 25 août1944, Maillé : un crime sans assassin (80min).

FRANCE3

20.45 La Danse de l’albatros.Téléfilm. Nathan Miller. Avec Pierre Arditi,Stéphanie Crayencour (France, 2012).22.10Météo, Grand Soir3.23.15 Les Carnets de Julie.L’Ile de Noirmoutier, en Vendée. Magazine.0.10 Libre court. Spécial Georges Méliès,le premier magicien du cinéma (30min).

CANAL+

20.55QuartetpFilm Dustin Hoffman. Avec Maggie Smith, TomCourtenay, Billy Connolly (GB, 2012, audio.).22.30 The SquarepFilm Jehane Noujaim (Eg., 2013, v.o.)V.0.15David et Madame Hansenp

Film Alexandre Astier (France, 2012, 90min).

FRANCE5

20.35 LeMonde en face.Quand les entreprises jouent à cache cash.21.30 Débat. 21.45 La Guerre des graines.22.35 C dans l’air. Magazine.23.50 Entrée libre. Magazine (20min).

ARTE

20.50 Tous allergiques?Documentaire. Patrizia Marani (Coprod., 2014).22.10 Spécial électionseuropéennes. En direct de Bruxelles. Débat.23.05 Ouimais non !Le Compromis à la Belge. Documentaire.0.05 Les Enquêtes du commissaireWinter. Série (saison 1, 1 et 2/8, 120min).

M6

20.50 Cauchemar en cuisine.Télé-réalité. Chalèze. Chilly-Mazarin. Fontvieille.1.35Damages. Série. Paix sur la terre.L’Effet d’une bombe (S4, 4 et 5/10, 95min)U.

Lessoiréestélé

Résultats du tirage du samedi 24mai.17, 18, 24, 39, 40 ; numéro chance : 1.Rapports :5 bonsnuméros etnuméro chance : pas de gagnant;5 bonsnuméros : 103 501,40 ¤;4 bonsnuméros : 1 492,40 ¤;3 bonsnuméros : 12,20 ¤;2 bonsnuméros : 5,50 ¤.Numérochance : grilles à 2 ¤ remboursées.Joker : 2 220 763.

Çamanquaitdevedettes

aupremierrang

CHEZ VOTREMARCHANDDE JOURNAUX

Découvreznotre

nouvelleformule

“Connaître les religionspour comprendre le monde”

Motscroisés n˚14-124Lesjeux

Loto

La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritairedes publications et agences de presse n° 0717 C 81975 ISSN0395-2037

PRINTED IN FRANCE

Imprimerie du « Monde »12, rue Maurice-Gunsbourg,

94852 Ivry cedex

Toulouse(Occitane Imprimerie)

Montpellier (« Midi Libre »)

80, bd Auguste-Blanqui,75707 PARIS CEDEX 13Tél : 01-57-28-39-00Fax : 01-57-28-39-26

Président : Louis DreyfusDirectrice générale :Corinne Mrejen

250123Mardi 27mai 2014

Page 26: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

dossier

POUR LAPREMIÈRE FOIS

DEPUISDIXANS, TOUSLES ÉCONO-MISTES

DISTINGUÉSEXERCENT

LEUR ACTIVITÉEN FRANCE

Le Prix dumeilleur jeune écono-miste, décerné par le Cercle deséconomistes et Le Monde, enpartenariat avec le Sénat, vise àdistinguerl’excellenceacadémi-que, la capacité d’innovation et

la participationaudébat public. Concrète-ment,seslauréatsont,chaqueannée,béné-ficié d’un élargissement immédiatementsensible de leur notoriété auprès desmédias et des autorités publiques. Leursanalyses novatrices ont vu leur diffusions’élargir et des occasions nouvelles d’in-fluences’ouvrir.

Encetteannée2014,marquéepar lesuc-cès intellectuel international du livre LeCapital au XXIe siècle (éd. Seuil, 2013) deThomas Piketty (lauréat en 2002), le jury,présidé par Jean-Michel Charpin, a reçutrente-quatre candidatures émanant decollègues de moins de 40ans exerçantdans les meilleurs centres de recherche,tant en Francequ’à l’étranger. Il a organiséla sélection sur la base de deux rapportsparcandidat,rédigéspartouslesmembresduCercledes économistes.

Le lauréat du prix 2014, Augustin Lan-dier, professeur à l’Ecole d’économie deToulouse, concentre ses recherches sur lescontrats financiers des entreprises, avecun accent sur leurs propriétés incitatives.Il a enseigné auparavant à Princeton, àl’université de New York (NYU) et à Chica-go. Le Cercle des économistes et LeMondel’avaient déjà distingué par une nomina-tionilyadeuxans.Laqualitédesaproduc-

tionacadémique leplaceàunhautniveauinternational. Il occupe par ailleurs uneplace majeure dans le débat économiquefrançais, par ses articles, chroniques etouvrages, souvent écrits avec David Thes-mar (lauréat en 2007). Ses travaux sontsouvent dérangeants, voire controversés:au seinmême du Cercle des économistes,leursconclusionssontloindefairel’unani-mité, mais elles sont toujours documen-téeset rigoureuses.

Attachés à la diversité des approches, leCercledeséconomistesetLeMondeontdis-tingué par trois nominations des écono-mistes plus éloignés de l’analyse théori-que que le lauréat, mais en revanche pro-chesde la vie économique.

AntoineBoziodirigel’Institutdespoliti-ques publiques de l’Ecole d’économie deParis. C’est un spécialiste de l’évaluationdes politiquespubliques, qu’il a pratiquéeenFranceetauRoyaume-Uni,notammentsur des sujets sociaux. Il est un expertreconnu et très actif dans le débat publicsur la questiondes retraites.

MatthieuBussière travaille à la Banquede France, après avoir passé huit ans com-meéconomiste à la Banque centrale euro-péenne. Ses recherches portent sur les cri-ses financières et le rôle des taux de chan-ge.

Elise Huillery enseigne à Sciences Po etappartient au Abdul Latif Jameel PovertyAction Lab (J-PAL) duMassachusetts Insti-tute of Technology, fondé et dirigé parEsther Duflo (lauréate en 2005). Ses tra-

vauxportentsurl’économiedudéveloppe-ment.Ses recherchessur lesconséquencesà long termede la colonisation enAfriquedel’Ouestfontréférence,etelleamenédesévaluations empiriques dans plusieurspaysafricains (Cameroun,Congo,Niger…).

Pour la première fois depuis dix ans,tous les économistes distingués exercentactuellementleuractivitéenFrance.Pour-tant,rarementlepalmarèsaurarécompen-sé des économistes aux trajectoires aussiinternationales. C’est une preuve supplé-mentaire de la reconnaissance internatio-naledes jeunes économistes français et dela richessedes relations entre la recherchefrançaiseenéconomieetlesmeilleuresins-titutionsétrangères. p

Le Cercledes économistes

Unprix créé par « LeMonde »et le Cercle des économistesLePrixdumeilleur jeuneécono-miste, créé en 2000, est destiné àvaloriser les travaux– thèse ouarticlepublié – d’un(e) chercheur(euse) âgé(e) demoinsde40 ans.Les économistes représentant lemondeuniversitaire et les gran-des écoles peuvent concourir à ceprix, destinéà couronnerdes tra-vauxportant sur l’économieappli-quée enprise avec le réel et partici-pant auxdébatsd’actualité.ChaquemembreduCercle sélec-

tionne cinq candidats, sur dossiercomprenantune liste de travauxet deux textes représentatifs.Dixd’entre eux sont retenus, parmilesquels sont choisis les finalistes.Enfin, un jury composédemem-bresduCercle et de la rédactiondu«MondeEco&entreprise»désigne le lauréat et les nominés.Le lauréat 2013 était EmmanuelFarhi. Le Cercledes économistes,créé en 1992, est présidépar Jean-Hervé Lorenzi.

Augustin Landier,lauréat de l’édition2014.FRANCK FERVILLE/AGENCE VU

POUR «LE MONDE»

AugustinLandier,professeuràl’Ecoled’économiedeToulouse,aétédistinguépar«LeMonde»etleCercledeséconomistes,enpartenariatavecleSénat.Sestravauxsurl’entreprise,commeceuxdesautreséconomistesnominés,renvoientauxdébatsfrançaisactuels

Prixdumeilleurjeuneéconomiste2014

26 0123Mardi 27mai 2014

Page 27: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

dossier

Entretien

Augustin Landier, 39 ans, estprofesseur à l’Ecole d’écono-miede Toulouse.Vous avez fait de l’entrepri-se le principal objet de vosrecherches. Pourquoi?

Je chercheàcomprendrecommentsontprises les décisions, pourquoi tel projetd’investissement est choisi plutôt qu’unautre, comment les financements sontobtenus… Je fais ce que l’on appelle de la«financed’entreprise».Deplusenplus,ona accès à de grandes quantités de donnéessur le comportement des entreprises, grâ-ceàlanumérisationdesdocumentscomp-tables et grâce aux réglementations met-tant à la disposition des investisseurs desinformationsdétaillées, et nonplus seule-ment consolidées. Travailler sur ces don-nées permet d’ouvrir la «boîte noire» desentreprises et de dépasser les représenta-tionsquiprévalentdans cesdomaines.Par exemple?

Larémunérationdesdirigeantsd’entre-prise est, dans l’opinionpublique, réputéeobéir aux seules lois de la cupidité ou ducopinage. Nous avons pu constater, à par-tirdesdonnéesdisponibles,queleurhaus-se et leur dispersion s’expliquent bien parla taille de l’entreprise. L’augmentationdecettedernièreexpliquelahaussedesrému-nérations: lesenjeuxfinancierssontbeau-coup plus importants qu’autrefois, lesinvestisseurs sont donc prêts à payer pluspour avoir un dirigeant qu’ils jugent plus«compétent». Ilyadoncbiendesforcesdemarché qui s’expriment dans la fixationdusalairedes patrons.Mais n’y a-t-il pas aussi des facteurssociaux, psychologiques…?

Bien entendu, mais ce n’est pas contra-dictoire. L’ensemble de ces phénomènesparticipe à la fixation d’un «prix d’équili-bre» sur lemarchédesdirigeants.Onpeutaussi tirer d’autres leçons de l’étude desdonnéesd’entreprise,notammentsurl’im-pactde lagouvernance.Parexemple,nousavonspuvérifier, enétudiant les trajectoi-res professionnelles desmanagers, que laperformancedesentreprisesestmeilleurequand un dirigeant nouvellement nom-mé, au lieu de s’entourer des personnesqu’ilapuconnaîtredanssesfonctionsanté-rieures, accepte l’existencede contre-pou-voirs détenus par des personnes extérieu-res à son «cercle» personnel. Nous avonsaussi montré que l’idée, communémentadmise dans les entreprises, que l’on ad’autant plus de chances d’être victimed’unplandelicenciementsquel’onestgéo-

graphiquement éloigné du siège socialest…parfaitementexacte!Lerôled’unéco-nomisten’estpasdeprendrepartipourtel-le ou telle thèse,mais de révéler ce que lesdonnéesindiquent,mêmesic’est trèséloi-gnéde ceque l’ondit dans le débatpublic.Vous aviez aussi écrit, avecDavid Thesmar, en juillet2007,un article resté célèbre, car il était titré«Lemégakrach n’aura pas lieu»,un an avant le krachde 2008…

J’assumetotalementcetarticle,mêmesile titre estmal choisi. Nous y décrivions lamécaniqued’unespiralebaissièredueauxsubprimeset jugionspeuprobableque lesbanques soient fortement déstabilisées.Cela s’est révélé inexact, mais reflétait lesdonnéesdontnousdisposionsalors. Com-mebeaucoup, nous avions cru que la titri-sation avait limité l’exposition des ban-ques au risque immobilier. Depuis, on abeaucoupplusdedonnéessurcessujets,etnos recherches ont d’ailleurs porté sur lesvulnérabilités du système bancaire. Plusque de faire des prophéties, notre rôle estd’attirer l’attention sur certains mécanis-mesetd’analyseraumieuxlesdonnéesdis-ponibles, donc plus souvent sur le passéque sur le présent. Sans doute avons-nousaussi surestimé la rationalité des gestion-nairesdu risqueauseindesbanques…Mais n’est-ce pas ce type d’irrationalitédont la théorie économique ne sait pasrendre compte?

Les failles de rationalité sont nos sujetspréférés. Par exemple, à partir de donnéesde l’Insee sur les prévisions d’embauchedes créateurs d’entreprise, nous avons pumontrer que l’optimisme excessif desentrepreneurs influe sur leur choix d’unmodedefinancement.Demême,alorsquela rationalité économique exigeraitqu’une entreprise applique un taux d’ac-tualisation différent selon chaque projetd’investissement, elles appliquent sou-ventunetunseul taux,cequicrée inévita-blementdesdistorsionsde choix.Pourquoi avez-vous choisi la rechercheen économie?

Jeunematheux à l’Ecole normale supé-rieure, je voulais faire quelque chose deplusprochedelaréalitééconomique:allerenentrepriseoudans lahauteadministra-tion? Les cours de Daniel Cohen ont étédécisifs, tant il sait réconcilier lesmaths etl’histoire, la science et la réalité sociale. En1993-1994, il y avait des débats intensesentre étudiants sur le chômage, les 35heu-res… Ça me passionnait. J’ai donc choisil’économie.Puis je suispartiauMassachu-setts Institute of Technology. J’y ai vu quel’économieétait unediscipline très ouver-

te : on pouvait choisir ses outils, être à lafoisdescriptifetthéorique;touteslesques-tions étaient l’objet de confrontations. Jen’ai jamais été tentéde verserdans lapureabstractionmathématique: les maths, cen’est qu’un langage, une grammaire, quipermetdediscipliner sondiscours.Vousn’avez pas été tenté par le privé?

Après avoir enseigné à l’université deChicago,puis à laNewYorkUniversity, j’aifait un peu de gestion d’actifs à New York,en pleine crise financière : je ne me suisguèreenrichi,mais j’aiapprisbeaucoupdechoses sur les «anomaliesdemarché».Et vous êtes revenu en France…

Oui, ce retour était naturel : je me sensplus concerné par le débat public françaiset sesnévrosesquepar ledébataméricain.

Vousn’avez pas été dissuadé par la«grandemisère» de nos universités?

Paradoxalement, là où un prof améri-cain peut se comporter en fonctionnaireune fois sa «tenure» [poste permanent]obtenue, il faut, pour être chercheur enFrance, une mentalité d’entrepreneur.L’autonomie des universités, les boursesdel’EuropeanResearchCouncil (ERC)et lespartenariats avec le privé permettent ledéveloppement d’institutions commel’écoled’économiedeToulouse.Lagammedes partenariats possibles s’est élargie,mêmesi lemondeacadémiqueet le«busi-ness» se mélangent moins ici que sur lescampusaméricains. pProposrecueillis par Philippe Escande

etAntoineReverchon

LARÉMUNÉ-RATION DESDIRIGEANTSD’ENTREPRISEEST, DANSL’OPINIONPUBLIQUE,RÉPUTÉEOBÉIR AUXSEULES

LOIS DE LACUPIDITÉ OUDU COPINAGE

«JE N’AIJAMAIS ÉTÉTENTÉ

DE VERSERDANS LA PUREABSTRACTIONMATHÉMA-TIQUE »

¶Nominée36 ansProfesseurà Sciences Poet chercheuseaffiliée au AbdulLatif JameelPoverty ActionLab, le Laboratoired’action contrela pauvreté,créé en 2003au départementd’économieduMassachusettsInstituteof Technology

¶Nominé36 ans

Directeurde l’Institut

des politiquespubliquesde l’Ecole

d’économiede Paris

¶Nominé40 ansDirecteur adjointà la directiondes étudeset des relationsinternationaleset européennesde la Banquede France

AugustinLandier:«Ouvrirlaboîtenoiredel’entreprise»Pour le lauréat2014,«le rôled’unéconomisten’estpasdeprendrepartipourtelleoutelle thèse»,maisdes’appuyersur l’étudedesdonnées,«mêmesic’est trèséloignédeceque l’onditdans ledébatpublic»

AntoineBozio :«Lesréformesdesretraitesn’ontpasréduitlacomplexitédusystème»

MatthieuBussière:«Nulnepeutprévoirladatedujouroùlaconfiances’évanouit»

EliseHuillery:«LaFranceaétélefardeaudel’hommenoir,etnonl’inverse»

Qu’est-ce qui vous a guidéedans vos choix d’études?

J’ai grandi enprovincedansune familleengagéeetpréoccupéepar les inégalitéssociales. Lycéenne, j’aiparticipéàdespro-jetshumanitaires.AprèsunvoyageauCameroun, j’avais trouvémonmétier: tra-vaillerpour ledéveloppement.Laques-tiondes inégalités, sur laquelle j’effectuedes recherchesdansplusieurspays, estprincipaleenAfrique, le continentà la foislepluspauvreet le plus inégalitaire.Monidéeétaitd’agir auseindes institutionsinternationales,de concevoiret gérerdesprojetsdedéveloppement.C’estpourquoijemesuisd’abordorientéeversHEC.Comment en êtes-vousvenue à la recherche?

Pour intégrer les institutions internatio-nales, il fallaitundoctorat enéconomie.Encommençantmathèse, j’ai découvertque la recherchepouvait être ancréedansla réalité. La rencontreavecdes cher-cheurs telsqueThomasPiketty etEstherDuflo, dont le travail veutêtre sociale-mentutile et éclairer lesdécisionspubli-ques, a étédéterminante.Quel a été le sujet de votre thèse?

Vouéeaubilanéconomiquede la colo-nisationfrançaiseenAfriquede l’Ouest,ellebat enbrèche la thèsede JacquesMar-seille, publiéeen 1984, selon laquelle lacolonisationaétéunsacrificepour laFran-ce. Car l’examendesbudgets coloniauxetmétropolitainsmontre le contraire. Seule-ment0,29%des recettes fiscalesde la

métropoleont été affectéesà ces colonies,dont les quatrecinquièmessonten réalitéle coûtde la conquêtemilitaire. L’investis-sementdansdesbienspublicsnereprésen-tequ’uncoûtéquivalantà0,05%desdépenses fiscalesmétropolitainesetn’acouvertque2%ducoûtdes investisse-mentspublics locaux: les cheminsde fer,les routes, les écolesou leshôpitauxontété financésà98%par les taxes locales…Deplus, celles-ci ontentretenu, jusqu’à laréformedusystèmeen 1956, leshautscadrescoloniaux: les8gouverneurset 120administrateursdecercle [circonscriptioncoloniale]absorbaientà euxseuls 13%desbudgets locaux! LaFranceaété le fardeaude l’hommenoir, etnon l’inverse.Sur quoi travaillez-vous aujourd’hui?

AvecmacollègueNinaGuyon, j’ai ter-minéuneétude, auprèsde6000jeunesde3edesacadémiesd’Ile-de-France, sur l’in-fluencedumilieusocialdans leurs choixd’orientation.Aperformancesscolaireségales,unélèvedezoned’éducationpriori-taire (ZEP), dontaucunparentn’estbache-lier, auneprobabilitéde29%plus faibledepréférer lavoiegénéraleet technologi-quequ’unélèvehorsZEPdontaumoinsunparentestbachelier.Nousmontronsqueces inégalités sont liées à lapressiondugroupe, àune familiaritédifférenteavec lesdiversesoptions,maisaussi à ladévalorisationdes individus: leur«esti-mede soi scolaire» estmoinsaffirmée. p

Proposrecueillis parA. de T.

Spécialiste de l’évaluation des politi-ques publiques, vous analysez les réfor-mes des retraites depuis celle deBalla-dur,mise enplace en 1993.Que démon-trent vos travaux?

Ils ontmis en évidence les change-mentsde comportementdes salariés, pro-voquéspar lesmodificationsde la législa-tion. L’augmentationprogressivede laduréed’assurance introduite par la loi, en1993, a incité les salariés à reporter effecti-vement leur départ en retraite. Cetteréformen’avait touchéqu’uneminoritéde salariés,mais ceuxqui l’ont été ont réa-gi de façon significative, en restant enemploi tant qu’ils n’avaient pas atteintl’âgedu tauxplein. La décote était alorstrès forte, 10%par trimestremanquant,contre 5% avec la réformede 2003.Les réformes de 2010 et de 2013, quiavaient pour objet d’équilibrer les comp-tes, ont aussi reculé l’âge de départ enretraite. Ces réformes sont-elles àmêmede pérenniser le systèmeparrépartition?

Ouiet non.Oui, car retarder l’âge effec-tif dedépart estunebonnestratégiepouréquilibrer les comptesdes régimesderetraite. L’impactdu report d’âge légal dela retraite, avec la réformede 2010, a euuneffet immédiatpour tous les salariésqui auraient sinonpupartir dès l’âgede60ans,maisn’a pas touché les salariésqui auraientdûattendre62 anspourobte-nir le tauxplein. La réformede 2013, qui aaugmenté la duréed’assurance, vaprolon-

germodestement ces effets.En revanche, le systèmeest toujours

d’une complexité incroyable, qui cacheparfois des absurdités: par exemple,mêmeavec la surcote, unepartie nonnégligeabledes salariés voit sonmontantdepensionbaisser en repoussant sondépart en retraite!Ni les salariésni les res-ponsablespolitiquesn’arriventà y voirclair sur l’impactprécis d’un changementdeparamètre.Cen’estpas seulementunenjeudémocratique, c’est aussi le symptô-med’unmanquedepilotagedu système.Par quoi passe la pérennité du systèmepar répartition?

Paruneplus grande clarté sur lesdroits acquis, afin de garantir à chaquesalarié que chaque euro cotisé donnebiendroit à pension. Cela passe aussi parun systèmedont l’équilibre financier estmoinsdépendantd’une forte croissanceéconomiqueet par des règlesplus homo-gènes entre les régimes.

AvecThomasPiketty, nousavions pro-posé, en 2008, une réformeprofonde, unsystèmeplus transparent, établi en comp-tesnotionnels ou enpoints, qui exprimeles droits à pensionde tous les salariésdans lamêmeunité de compte. L’objectifest que les salariésprennent conscienceque les importantes cotisationsqu’ilspaient leur donnentdes droits qui pour-ront êtrehonorés, pourvuqu’ils soientdéfinis en cohérence avec l’augmenta-tionde l’espérancede vie. p

Proposrecueillis parAnneRodier

Quel est le fil conducteur de votreparcours?

Sansdoutemonengagement euro-péen, puisque j’ai effectuéunegrandepartie demonparcoursuniversitaire etprofessionnel à l’étranger. Par ailleurs, jesuis très attaché au servicepublic, pourlequel la coopération internationale estdevenue cruciale. J’ai donc toujours eu àcœurde liermes activités de rechercheauxquestionsdepolitiqueéconomiqueau seind’institutionspubliques.Comment vous êtes-vous intéresséà la recherche économique?

C’est unmélangede circonstances, derencontres et de choixpersonnels. Lors-que j’étais à Sciences Po, en 1993, la crisedu Systèmemonétaire européen s’estouverte et semblaitmystérieuse. Souhai-tant voyager etme spécialiser en écono-mie, je suis parti à Cambridge faire unmaster d’économie. J’ai prolongé cetteexpériencepassionnanteparun séjourenAllemagne, àHeidelberg, puispar unstage au Fondsmonétaire international, àWashington, à l’issueduquel onm’apro-poséde resterun an. Et là, j’ai travaillé surla crise asiatique, qui venait d’éclater. Jeme suis rendu compteque la rechercheétait indispensablepour répondre auxcri-ses, en s’intéressantà leurs causesprofon-des et en aidant à la prise de décision…Celam’a amené àpasserundoctorat(PhD) à l’Institutuniversitaire européendeFlorence. Par la suite, j’ai rejoint la Ban-que centrale européenne,de 2002 à

2009, avant de revenir à Paris travailler àla Banquede France.Quelles leçons tirez-vous de vos travauxsur les crises?

Onnepeutpas anticiper le chocqui vadéclencherune crise: personnenepeut,par exemple, donner la dateprécisedujour où la confianceva s’évanouir.Maisonpeut repérer les fissures, les fragilités.Dans le domainede lamacroéconomieinternationale,undéficit de la balancedespaiements courantspeut être parfai-tement justifié – par exemple si un paysest enphase d’investissement. Encorefaut-il savoir de quel type d’investisse-ment il s’agit et comment il est financé:s’agit-il d’investissementsdirects à longterme, ou biende capitaux flottants quipeuvent repartir aumoindre accident?Quel type de diagnostic a pu apportervotre recherche?

En2009, le commerce internationals’est effondréde façon inexpliquée, biendavantageque la productionmondiale.Beaucoupse sont inquiétés: était-ce l’ef-fet d’unemontéeduprotectionnisme,oud’unassèchementdupréfinancementdes exportations? En fait, cette chute s’ex-pliqueprincipalementpar le gel des inves-tissementsprivés provoquépar la crisefinancière: les biens et services investispar les entreprises contiennentbeaucoupd’importations, la chute de l’investisse-ment entraîne celle du commerce. p

Proposrecueillis parAdriende Tricornot

270123Mardi 27mai 2014

Page 28: W EGPJLIRW XC 2GJKE K]EPJK]N +-//%.# XgB]FEW NW · PDF file"ly j_wy zy o_ cry jkorfridy xh_lr_rgy g;ygf zkxrlrfrcy : mylf fkdhlkya zrm_l\ty 6( m_ra eo;k\\_grkl zyg koy\frklg ydhkjkyllygc

Société éditrice du«Monde»SAPrésident dudirectoire, directeur de la publication Louis DreyfusDirecteur du«Monde»,membredu directoire, directeur des rédactionsGilles van KoteDirecteur déléguédes rédactionsVincentGiretDirecteur adjoint des rédactionsMichel GuerrinDirecteurs éditoriauxGérardCourtois, Alain Frachon, Sylvie KauffmannRédacteurs en chefArnaudLeparmentier, Cécile Prieur, NabilWakimRédactrice en chef «MLemagazine duMonde»Marie-Pierre LannelongueRédactrice en chef «édition abonnés» duMonde.fr Françoise TovoRédacteurs en chef adjoints François Bougon, Vincent Fagot, Nathaniel Herzberg, Damien LeloupChefsde serviceChristopheChâtelot (International), LucBronner (France), VirginieMalingre(Economie), Auréliano Tonet (Culture)Rédacteurs en chef «développement éditorial» Julien Laroche-Joubert (InnovationsWeb),Didier Pourquery (Diversifications, Evénements, Partenariats)Chefd’éditionChristianMassolDirecteur artistiqueAris PapathéodorouPhotographieNicolas JimenezInfographieEric BéziatMédiateurPascal GalinierSecrétaire générale du groupeCatherine JolySecrétaire générale de la rédactionChristine LagetConseil de surveillancePierre Bergé, président.

E ndémocratie, il est des scrutinsquidésta-bilisentet des électionsqui consolident.L’Europe,dimanche25mai, a connules

deux:un tsunamipolitiquequi, venudeFran-ce, deGrande-Bretagne,duDanemark,d’Autri-che, déferle surBruxelles, et lemêmejour, àl’est, enUkraine,unpremier signede stabilitéavec l’électiond’unprésidentdès lepremiertour, après sixmoisd’insurrectionsetde chaos.Soudain,alorsqu’à l’ouest lesnuages s’accumu-laient, uneéclaircieest apparuesurKiev.

UnEuropéen, aumoins, avait le sourire,dimanchesoir, et celui-là se trouvait enUkrai-ne: Jan Tombinski, l’ambassadeurde l’UEàKiev, undiplomatepolonais qui a été auxpre-mières loges de la révolutionpro-européennedeMaïdan. Jan Tombinski a aussi été auxpre-mières loges des bévues, des hésitations, desinitiatives courageuses,parfois, des cafouilla-ges, aussi, des innombrables responsableseuropéensqui se sont succédé àKiev, le plussouvent enordredispersé. Dimanche soir, lediplomateavait le sourireparceque, pour lui,cette électionprésidentielle avait été un«suc-cès». Pas tant par son résultat quepar le sim-ple fait qu’elle ait puavoir lieu.

Parceque,malgré les combatsqui se dérou-

laient encoredans l’est dupays,malgré lesbureauxde vote fermés sous la contrainte etles rues désertes àDonetsk, les quatre cinquiè-mesdes électeursukrainiensont puexercerleur droit devote et que, au boutdu compte, lamasse critique était là, incontestable. Parceque, aussi,mêmesans la participationdeprèsde 5millionsd’électeurs (sur 36), l’undes thè-mes favoris de la propagande russe a étémis àbaspar les urnes: les fameux «fascistes» et«néonazis» supposés tenir l’Ukrainedepuis lesoulèvementdeMaïdan, ennovembre,n’ontguère réuniplus de 2,2%des voixdimanche.Dix foismoinsque l’extrêmedroite dans cer-tainspaysde l’Union…

LesUkrainiens et les Européens s’étaient arc-boutés sur ce scrutindu 25mai. Ils avaientcompris que la stratégiede la Russie visait àrendre cette électionnulle et non avenue, afindenier toute légitimité aupouvoir issude larévolutiondeMaïdan. Ils ont tenubonetvoient leur ténacité aujourd’hui récompensée.Il y a deux semaines, le présidentVladimirPoutine avait commencéà tourner casaque,promettantde «respecter» le résultat d’uneélectiondont, il y a unmois, il ne voulait pasentendreparler.

Il restemaintenant à transformer l’essai. Etc’est là que, pour le président élu Petro Poro-chenko, le résultat de l’autre élection, celle duParlement européendans les 28 Etats del’Union, est unemauvaisenouvelle. Car il vaavoir besoinde l’Europe,maintenantplus quejamais. Et il doit sérieusement se demander sil’Europe, de nouveauempêtrée dans ses dou-tes et ses divisions, sera au rendez-vous.

Revendiquant la victoire dimanche soir,avecprèsde 56%des voix,M.Porochenko s’estfixédeuxpriorités: «mettre fin à la guerre»,ramener la paix dans leDonbass etmettre sonpays sur le cheminde l’Europe. Ses deuxpre-miersdéplacements illustreront d’ailleurs cespriorités: à l’intérieur, il se rendradans leDon-bass et, à l’extérieur, ce devrait être la Pologne,paysvoisin et celui des Etats de l’UEqui s’est leplus engagé aux côtés desUkrainiens.

Unéquilibre entre Bruxelles etMoscouLemilliardairen’apas évoquédevoyage à

Moscou,mais il a reconnuque les relationsdeKievavec laRussie étaient «lespires de cesdeuxcents dernières années» : il faudrabienyremédier. LeKremlinn’avait pas réagi, diman-che soir, à l’électionenUkraine, contrairementauprésidentObama, qui y avuunpas«impor-tant»vers l’unitédupays, et au chefde ladiplo-matie allemande, Frank-Walter Steinmeier,pour lequel le vote du25maimontre«claire-mentque la grandemajoritédesUkrainiensveulent l’unité, la liberté et la démocratie».

C’est pourtant bien entre Bruxelles etMos-couque le futurprésident Porochenkovadevoir trouver un équilibre, et pour cela aussiil aura besoinde l’UE. D’une certainemanière,

ses défauts sont aussi ses qualités dans cettesituation: industriel de la confiserie à la têted’une fortunedeplus de 1milliardde dollars,plusieurs foisministre, originaired’Odessa etnonpas de l’Ouest, plus nationaliste,M.Poro-chenkoappartient à cette classe très spécifi-quedupostcommunismerégional, celle desoligarques.

Unoligarquequi a certes, sans ambiguïté,épousé la causedes révolutionnairesdeMaïdan,mais oligarquequandmême.Unhommed’affaires qui avait des usines enRus-sie avant que les autorités russesne les lui blo-quent.Unhomme,donc, susceptiblede trou-ver, comme il dit, des «formats»pournégo-cier avecMoscou. Et d’y être entendu.

L’Ukrainede 2014, cependant, n’est pas cellede 2005qui, au lendemainde la «révolutionorange», était gentiment rentrée chez elle,pensantque le changement était amorcé. Pluslong, plusprofond, plus sanglant, le soulève-mentde 2014n’est pas clos.

Unenouvellepage s’ouvre, pourKiev etpourMoscou,mais cette fois Petro Porochen-ko reste sous la surveillancedesmilitants deMaïdan,prêts à y retourner à toutmoment.Qu’il retombe, commeses prédécesseurs, dansles vieux travers des oligarques, qu’il cède auxmanœuvresdeMoscou, et ce sera, de nou-veau, le chaos auxportes de l’UE.

Tsunamipolitiqueoupas, l’Europen’échap-perapas àun rapprochement institutionnelavec l’Ukraineet, surtout à l’élaboration,enfin, d’une vraie politiqueà l’égardde la Rus-sie. p

[email protected]

L’AIR DU MONDE | CHRONIQUEpar Sylvie Kauffmann

Lesoleilselèveàl’estetsecoucheàl’ouest

Beaucoup estiment que si la paixrevenait entre Israéliens etPalestiniens, les difficultés, lestragédies de la région et peut-être dumonde disparaîtraient.Qu’en pensez-vous?

Il est évident que si la paix pro-gressaitentrePalestinienset Israé-liens, ce serait une contributionnotable à l’apaisement de larégion. Mais ce serait une illusionde croire, comme le disent un cer-tain nombre de gens, que tous lesproblèmes de guerre dans leMoyen-Orient sont liés au conflitisraélo-palestinien. Il y a aujour-d’hui des foyers de violence auMoyen-Orientquineviennentpasdu conflit israélo-palestinien.D’où viennent-ils?

Ils sont aussi le reflet desconflits entre les groupes de diffé-rentes tendances musulmanes, etenparticulierune traduction loca-le et microgéographique desconflits entre les grandes puissan-cesmusulmanes que sont l’Arabiesaoudite,l’Iran,etc.Direqu’ilsuffitde faire la paix entre Israël et laPalestinepourquel’Arabiesaoudi-te et l’Iran se réconcilient, ce seraitunpeu facile.Le pape se rend sur la tombe deHerzl, le fondateur du sionisme.Est-ce unemanière de reconnaî-tre l’Etat juif d’Israël?

L’Etat juif d’Israël a été reconnuil y a longtemps.N’y a-t-il pas une discrétion duvoyage du pape qui est peut-êtreun peu excessive?

C’est une discrétion délibérée

pourmarquerladimensionspécifi-quement religieusede sonvoyage.L’événement important, ce n’estpas qu’il aille sur la tombe d’Herzl,c’est qu’il aille sur l’esplanade duTemple rencontrer le grandmufti,c’est qu’il rencontre le patriarcheBartholomée, et c’est qu’il rencon-tre les grands rabbinsd’Israël.Des extrémistes juifs ont protes-té du fait que le pape allait auCénacle, là où le Christ est censéavoir pris son dernier repas, etqui est aussi le tombeau deDavid. Faut-il aller dans ces lieuxoù il y a les trois religions, puis-qu’il y a aussi une traditionmusulmane sur ce lieu?

C’est pour ça que le pape y va.C’est pour montrer qu’il peut yavoir une coexistence entre lestrois religions. S’il n’allait serecueillirquedansdes lieuxcatho-liquesfermésaupublic, il auraitpualler célébrer à l’église Sainte-Anne, qui appartient à la Républi-quefrançaise.Maiscen’estpasl’ob-jectifduvoyage.L’objectifduvoya-ge, c’est de montrer que les hom-mes de foi sont capables d’entreren dialogue sur les points mêmesoù ils sont en litige. p

Proposrecueillis parJean-PierreElkabbach

etArnaud Leparmentier

MgrAndré Vingt-Trois est cardinal,archevêque de Paris.Le Grand Rendez-Vous,avec «Le Monde», est diffusé chaquedimanche de 10heures à 11heuressur Europe 1 et i-Télé.

0123

FEST

IVAL

CANNES NOTRE AMOUR DU CINÉMAEST SANS FRONTIÈRES2014

BRAVO !PALME D’ORWINTER SLEEP

DE NURI BILGE CEYLAN

GRAND PRIXLE MERAVIGLIE

DE ALICE ROHRWACHER

PRIX UN CERTAIN REGARDFEHÉR ISTEN

DE KORNÉL MUNDRUCZÓ

PRIX DU JURY UN CERTAIN REGARDTURIST

DE RUBEN ÖSTLUND

PRIX DE LA CRITIQUE INTERNATIONALE(PRIX FIPRESCI)

JAUJADE LISANDRO ALONSO

PRIX DU JURY OECUMÉNIQUEET PRIX FRANÇOIS-CHALAIS

TIMBUKTUDE ABDERRAHMANE SISSAKO

POURLE NOUVEAUPRÉSIDENT

UKRAINIEN, LERÉSULTAT DEL’ÉLECTION

AUPARLEMENTEUROPÉENEST UNEMAUVAISENOUVELLE

LE GRAND RENDEZ-VOUS EUROPE 1,« LE MONDE», I-TÉLÉ

MgrVingt-Trois:«Lestroisreligionspeuventcoexisterà Jérusalem»

pTirage duMondedaté dimanche 25-lundi 26mai 2014 :358 473 exemplaires. 2

28 0123Mardi 27mai 2014