volonté de dissimulation - unesco.org · 1 LA MISE EN PLACE DE LA SOLUTION FINALE : LA DESTRUCTION...

21
1 LA MISE EN PLACE DE LA SOLUTION FINALE : LA DESTRUCTION DES JUIFS D’EUROPE Réflexion sur « Solution finale » Appartient à la langue nazie (Viktor Klemperer, langue du IIIe Reich) Die « Endlösung » mot indique volonté de dissimulation comme beaucoup de termes utilisés par les nazis afin de cacher le sort réservé aux juifs aux juifs eux-mêmes et aux sociétés européennes. « Solution finale » n’a pas signifié la même chose pour les nazis tout au long de ces étapes : expulsion des territoires du Reich et de l’Europe, émigration forcée dans différents pays, et extermination physique. Frise chronologique L’intérêt de cette frise : est de replacer le génocide des juifs dans le cadre d’un processus de destruction où chaque étape peut ouvrir sur la suivante en aggravant systématiquement la situation initiale. L’intérêt de cette frise est aussi de montrer qu’il existe un modèle de destruction allemand mis en place dès 1933 et qui sera reproduit, avec des variantes chronologiques, dans la plupart des pays européens annexés, occupés ou satellites du Reich. Cependant cette frise ne doit pas laisser penser à un plan préconçu dès les origines. Variabilité, les tâtonnements empiriques des politiques antisémites menées par les nazis montre que les persécutions pouvaient suivre plusieurs voies possibles.

Transcript of volonté de dissimulation - unesco.org · 1 LA MISE EN PLACE DE LA SOLUTION FINALE : LA DESTRUCTION...

1

LA MISE EN PLACE DE LA SOLUTION FINALE : LA DESTRUCTION DES JUIFS

D’EUROPE

Réflexion sur « Solution finale »

Appartient à la langue nazie (Viktor Klemperer, langue du IIIe Reich)

Die « Endlösung » mot indique volonté de dissimulation comme beaucoup de termes

utilisés par les nazis afin de cacher le sort réservé aux juifs aux juifs eux-mêmes

et aux sociétés européennes.

« Solution finale » n’a pas signifié la même chose pour les nazis tout au long de

ces étapes : expulsion des territoires du Reich et de l’Europe, émigration forcée

dans différents pays, et extermination physique.

Frise chronologique

L’intérêt de cette frise :

est de replacer le génocide des juifs dans le cadre d’un processus de destruction

où chaque étape peut ouvrir sur la suivante en aggravant systématiquement la

situation initiale.

L’intérêt de cette frise est aussi de montrer qu’il existe un modèle de destruction

allemand mis en place dès 1933 et qui sera reproduit, avec des variantes

chronologiques, dans la plupart des pays européens annexés, occupés ou

satellites du Reich.

Cependant cette frise ne doit pas laisser penser à un plan préconçu dès les

origines. Variabilité, les tâtonnements empiriques des politiques antisémites

menées par les nazis montre que les persécutions pouvaient suivre plusieurs voies

possibles.

2

Plan du cours :

1. Le racisme et l’antisémitisme, au centre de la vision du monde et de l’histoire des

nazis

2. L’identification et l’exclusion des juifs des sociétés européennes

3. Ségrégation et concentration des populations juives en Europe

4. La guerre à l’Est contre l’URSS, franchissement d’un seuil de violence : une étape

décisive dans le processus de destruction

5. Déportation et extermination des juifs d’Europe

1. Le racisme et l’antisémitisme, au centre de la vision du monde et de l’histoire des

nazis

Indispensable pour comprendre les étapes de la Solution finale.

Affiche antisémite nazie 1943 = Vision du monde et la place des juifs dans celui-ci

a. Antisémitisme de nature raciale : stéréotypes physiques, sociaux. b. conséquence de l’assimilation des juifs à une race : persécutions pendant la guerre

s’exercent même contre juifs convertis ; définition se fera par l’ascendance (parents-grands parents).

c. « et derrière le juif » selon les nazis : complot juif pour prendre le pouvoir dans le monde entier et détruire race germanique.

d. Thématique incessante par la propagande nazie « la guerre contre l’internationale juive est une lutte à mort qui doit être menée sans pitié jusqu’au bout et à son terme » 1

e. Montre les objectifs de guerre des nazis : en guerre contre RU, URSS et EU , mais derrière ces puissances, ce sont des juifs qui manipulent, Churchill, Staline et Roosevelt. La 2GM est une guerre stratégique qui poursuit objectifs militaires mais pour les nazis aussi une guerre raciale contre les juifs

1. Volkischer Beobachter 12 novembre 1941, article « l’ennemi juif » appelant à mener un

combat impitoyable contre « le bolchevisme et le rooseveltisme » cité par Longerich

« Nous ne savions pas », p.261

Au XIXe siècle dans une Europe coloniale qui domine le monde le racisme se

développe ; idéologie consiste à diviser l’humanité en groupes distincts, appelés races

définis par des critères physiques et psychiques et à établir une hiérarchie entre ces

groupes.

Acquiert même statut d’une véritable science qui est acceptée en Europe jusqu’en 1945

Associé à un darwinisme social (Darwin = évolution des espèces animales répond à une

3

sélection naturelle). Cette « la lutte pour la vie » ne s’applique pas qu’aux animaux mais

aussi aux hommes.

Idéologie raciste va transformer l’antisémitisme de nature religieuse en un

antisémitisme racial qui se diffuse dans toute l’Europe à la fin du XIXe siècle : les juifs

ne plus différents par la religion mais par leur race.

Nazis vont puiser dans ce fond culturel qui est commun à toute l’Europe.

Racisme + darwinisme social donnent aux nazis leur sert d’explication de l’histoire et

leur donne leur vision du monde.

o La vision nazie du monde et de l’histoire est marquée par le combat

(autobiographie-programme de Hitler s’appelle « Mein Kampf »). L’histoire

universelle est marquée par une guerre des races : les hommes du Nord contre

ceux de l’Orient.

o Dans cette vision les juifs occupent une place particulière :

Pour les nazis la figure du juif condense tout ce qu’ils haïssent au monde : pas de

lien avec une terre des ancêtres, le cosmopolitisme, le capitalisme, la

révolution.

Mettent l’accent sur le caractère non-humain des juifs en utilisant vocabulaire

médico-biologique pour les désigner. Les juifs se confondent avec la maladie

(parasite) et menace de contamination race aryenne.

Cette histoire se double d’une eschatologie guerrière où il ne peut y avoir qu’un

perdant et qu’un gagnant : Germains contre les juifs = c’est eux ou nous.

Guerre contre URSS judéo-bolchevique n’est que la dernière étape de ce

combat.

L’antisémitisme n’est pas une ligne accessoire de la politique nationale-socialiste

mais un objectif majeur.

4

2. L’identification et l’exclusion des juifs des sociétés européennes

Extrait lois de Nuremberg

a. # Entre aryens et non aryens sur les bases de l’ascendance : les juifs intégraux 3-4 grands-parents ou deux si de confession

juive à la date du 15 septembre 1935. les demi-juifs, qui eux purent échapper en grande partie au

processus de destruction. b. Essentiel de remarquer que le seul critère distinctif pour l’identification des juifs

est la religion, non pas celle de l’individu concerné, mais celle de ses ascendants = conception raciale.

Carte d’identité de Siegbert Israël Einstein établie 24 mai 1939 à Bad Solgau (Allemagne)

a. Une loi de 1938 obligeait les juifs allemands à porter, sur leurs papiers d’identité, les prénoms Israël ou Sara à tous les Juifs portant des prénoms d’origine « non juive ». À partir d’octobre 1939, tous les Juifs devaient par ailleurs faire apposer la mention J sur leurs cartes d’identité et passeports.

Mesures qui posent le problème d’une nécessaire définition de l’appartenance à la

communauté juive.

2.1 Identification :

Identification des juifs par des lois. Ces lois imitent dans les grandes lignes le

modèle des « lois de Nuremberg » de 1935 ; elles ont rédigées par des juristes,

conseillers ministériels et différenciaient des juifs du reste de la population.

Rappel lois de Nuremberg : A l’occasion du Congrès annuel du Parti à Nüremberg en

septembre 1935 Hitler donne l’ordre de rédiger deux décrets :

1) « La loi pour la protection du sang et de l’honneur allemand » qui lance une série

d’interdits contre les juifs (interdiction de mariage mixte, d’employer des citoyennes

de sang allemand de – de 45 ans à travaux de ménage).

2) « Loi sur la citoyenneté dans le Reich » réservant l’ensemble des droits civils et

politiques à des citoyens de sang allemand.

o Rend nécessaire des règlements d’application pour définir qui est Juif et qui est

Allemand : Novembre 1935 règlement la loi différenciait les Allemands,

5

Définition restera base de la classification pendant tout le processus de

destruction et inspirera des lois dans les pays alliés ou occupés par l’Allemagne.

o Dans les territoires occupés ces lois furent le fait de l’occupant,

o mais dans les pays « satellites » et alliés ces lois furent élaborées par les

gouvernements nationaux.

En France, si les Allemands avaient dès le 27 septembre 1940 pris des

mesures antijuives en zone occupée, on sait aujourd’hui qu’ils n’exigèrent

rien de comparable en zone libre. Pourtant premier statut des juifs

promulgué le 3 octobre 1940.

Ces lois d’identification en isolant les juifs du reste de la population et en

délimitant la cible constituent la condition préalable à toute action ultérieure.

2.2 L’exclusion des juifs des sociétés européennes :

Aryanisation de magasins juifs à Paris

a. la deuxième ordonnance allemande du 19 octobre 1940 permet le recensement des entreprises juives et la nomination d’administrateurs provisoires. C’était la première fois que les Allemands devaient faire appel à un gouvernement étranger pour effectuer le travail administratif.

Dans toute l’Europe en Allemagne, en Europe occupée ou dans les pays alliés ou satellites,

les juifs sont peu exclus de vie sociale des pays où ils résidaient ;

Par leur caractère systématique et méthodique à l’échelle de toute l’Europe cette

spoliation des biens juifs et les interdits professionnels et sociaux fait partie du

processus de destruction de la communauté juive.

En Allemagne (+ Autriche)

Mesures antisémites entre 1933 et 1938

La loi sur la fonction publique datée du 6 avril 1933 et rédigée aussi par des

experts du ministère de l’Intérieur, puis le décret du 14 novembre 1935 chassa

tous juifs de la fonction publique.

Dans ce processus, l’appareil de destruction s’attaqua aussi aux biens de la

communauté juive préalablement recensés. Les entreprises juives furent vendues

à des entreprises aryennes (aryanisation) ou tout simplement liquidées ;

6

Dans ces transferts les banques allemandes (Dresdner Bank) et les

fonctionnaires du ministère de l’économie et des finances jouèrent un grand

rôle mettant en contact acheteurs et vendeurs, et percevant à ce titre des gains

lucratifs.

Ordonnances de 1938 interdisent toute activités aux juifs dans des activités

qui les mettent en contact avec la population aryenne : certaines activités de

service, interdiction d’exercer la médecine librement (auprès des patients

aryens) ; interdiction d’exercer le métier d’avocat ; interdiction des professions

dans le domaine des médias.

2000 mesures antisémites seront prises en Allemagne

Dans toute l’Europe occupée, états satellites ou alliés les mesures antisémites

allemandes sont imitées, toutes une série de décrets exclurent en totalité les juifs

de nombreuses professions ou introduisirent des quotas.

la fonction publique, les professions libérales comme l’exercice de la médecine ou

du droit pour les avocats. De plus de nombreuses restrictions isolaient les juifs du

reste de la population.

En France = Double législation s’applique en zone occupée : législation allemande +

législation de Vichy. > Projet statut des juifs du 03 octobre 1940 : interdits

professionnels dans la fonction publique.

a. Ce document est constitué du premier feuillet du projet de loi initial annoté

par la main même du maréchal Pétain. b. Ce document inédit a été remis au Mémorial de la Shoah à Paris par un

donateur anonyme Ce document et ces informations ont été publiés et

révélés au grand public par la presse le 3 octobre 2010. c. Annotation de Pétain durcissent les interdits professionnels. d. Remet cause double jeu de l’État français ou d’une possible volonté de

protéger les juifs sur le sol français et rappelle collaboration du régime de

Pétain aves les nazis : fond commun idéologique.

Dans ce processus les juifs vont perdre leurs métiers, leurs entreprises, leur épargne,

leurs salaires, leurs droits à la nourriture et au logement.

Processus de destruction en s’attaquant aux revenus de la population juive

laissera une communauté appauvrie ;

les organismes qui jouèrent les premiers rôles dans ce processus furent des

administrations économique et financières allemandes ou des gouvernements

satellites et dans le domaine économique (banques, entreprises allemandes IG

Farben…).

7

Ces mesures aboutirent à isoler les juifs du reste de la population ; ils ne restaient

plus qu’à les séparer physiquement en les concentrant dans des espaces sous

surveillance dans des espaces réservés.

3. Ségrégation et concentration des populations juives en Europe

Pont piétonnier enjambant une « rue aryenne » + plan du ghetto de Varsovie (atlas

de la Shoah G.Benssoussan)

a. Isolant ce quartier et ses habitants juifs du reste de la « ville polonaise », un mur fut élevé en quelques mois ; les Allemands imposèrent son financement à la communauté juive elle-même.

b. Sur cette photographie, le pont piétonnier permet de relier les deux parties du ghetto de Varsovie au-dessus d’une rue « aryenne », la rue Chlodna. (voir plan).

c. En octobre 1940, les Allemands ordonnent aux juifs de Varsovie de se concentrer dans un « quartier juif » : le ghetto était né. 30 % de la population de Varsovie s’entasse désormais sur 5 % seulement de la superficie de la ville, favorisant la diffusion des épidémies (typhus, tuberculose) ;

d. Les effectifs du ghetto allaient culminer à 445 000 en 1941 (plus que juifs de France et d’Italie réunis en 1939).

e. L’administration du ghetto fut confiée à un Conseil juif, qui compta 9 000 fonctionnaires, dont 2 500 hommes de la police juive. À partir du 22 juillet 1942, près de 300 000 personnes sont déportées à Treblinka pour y être gazées.

f. Dans une insurrection désespérée en avril-mai 1943, la résistance juive s’oppose à la liquidation complète du ghetto par les SS.

a. Dans le Reich et le protectorat :

La concentration des juifs dans le Reich et le Protectorat comporta deux aspects

complémentaires : le regroupement des juifs dans les grandes villes puis la restriction

de leurs déplacements et communications.

A partir de janvier 1939, les juifs allemands furent rassemblés dans « des maisons

juives », car il était interdit à des propriétaires aryens de louer des appartements à

des juifs.

Ministère des postes interdit aux juifs l’usage du téléphone le 28 juillet 1940.

Puis on réglemente leurs déplacements. Le 1er sept. 41 interdiction est faite aux

juifs de franchir les limites de leur commune de résidence sans autorisation de la

police, puis ils ne peuvent prendre aucun moyen de transports publics ;

8

b. Des camps d’internement à l’ouest :

En Europe occidentale occupée, les juifs sont rassemblés dans des camps d’internement

et de transit, à partir de rafles effectuées dans les grands centres urbains.

En France > Camp de transit de Drancy

a. Le camp de Drancy, situé à 4 kilomètres de Paris, occupe une place centrale dans

l’histoire de la persécution des juifs de France. 65 000 des 76 000 déportés

juifs de France transitent par ses murs avant d’être acheminés, entre le 22

juin 1942 et le 31 juillet 1944, en 62 convois vers les centres de mise à mort en

Pologne.

b. Conçu en 1932, cet ensemble d’habitations, dénommé Cité de la Muette, se

compose de cinq tours et d’un bâtiment en fer à cheval de 4 étages (dont on voit

deux côtés sur la photographie).

c. Les conditions d’existence sont précaires, provoque de nombreux décès. Sous

l’autorité du Service des affaires juives de la Gestapo, le camp est administré

jusqu’en juin 1943 par la préfecture de Police de Paris, avant de passer

entièrement sous contrôle allemand avec à sa tête Aloïs Brunner. La

gendarmerie française assure la surveillance générale durant toute la période.

c. Création de ghettos à l’Est :

Dans le gouvernement Général et les territoires incorporés au Reich la concentration et

l’enfermement de la population dans des ghettos procéda de circonstances différentes

d’une ville à l’autre en Pologne ;

Instauration de Conseils juifs précéda l’établissement de ghettos dés novembre 1939

toute communauté devait élire un Conseil juif, cad de représentants de la

communauté.

le processus s’échelonna d’octobre 1939 (Piotrkow Trybunalski) à mars 1941 (Lublin

et Cracovie) ; A la fin de l’année 1941, majeure partie des juifs des territoires

incorporés et du Gouvernement général se trouvaient dans des ghettos, dont

certains étaient clos par des murs pour renforcer l’isolement de la population.

En Europe de l’Est

Derniers ghettos sont créés en Hongrie au printemps 1944, juste avant début des

déportations sauf à Budapest.

9

Ces ghettos étaient administrés par des conseils juifs contrôlés par les Allemands.

o Ces conseils fonctionnaient comme de véritables administrations municipales, qui

assuraient la répartition de la nourriture, l’affectation des logements, la gestion

des écoles, l’organisation des soins médicaux du travail intérieur et du travail

forcé et dirigeaient même une police juive ;

o mais en participant au recensement, à l’affectation pour le travail forcé et aux

déportations sous la pression allemande, ces conseils participèrent à la

destruction de la communauté en espérant éviter l’étape suivante.

Dans ces ghettos la logique est déjà exterminatrice car les conditions de vie

déplorables (diffusion des maladies comme le typhus ou la tuberculose), le manque de

nourriture et le travail forcé augmentaient la mortalité:

A Varsovie, début 1942 on y enregistre 1 naissance pour 45 décès. A Lodz,

40 000 personnes sur 200 000 internés meurent des seuls effets de la faim.

Avec le basculement dans le génocide immédiat, les ghettos seront liquidés entre

1942 et 1944 pour envoyer les populations dans des centres d’extermination.

Ces ghettos furent d’emblée considérés par les autorités allemandes comme des

moyens temporaires d’isoler la population juive avant son expulsion ou sa

déportation vers les centres d’extermination

10

3. La guerre à l’Est contre l’URSS :

L’affiche de la Waffen SS ; a. Contexte la durée de la guerre contre l’URSS, plus longue que prévue, nécessite le

recrutement de volontaires en Belgique occupée pour s’engager dans la Waffen SS ; ce corps constitue la branche armée de la SS, groupe paramilitaire au service du parti nazi.

b. Description autour de définition d’un ennemi judéo-bolchevique ; insister sur déshumanisation de l’ennemi.

c. Guerre idéologique et raciale menée à l’Est

Dates repères d’une radicalisation de la répression (basculement selon Christopher

Browning)

Avant l’invasion soviétique, printemps 1941 accords entre le RSHA de Heydrich et

l’Armée prépare le terrain à l’extermination massive; deux projets signés par Keitel,

chef d’Etat-major des Armées le 13 mai et 6 juin 1941

1er projet : qui limite les poursuites des tribunaux militaires contre des soldats

commettant des actions criminelles contre des civils ;

2ème projet : Ordre des commissaires (Kommissarbefehl) : commissaires

politiques civils ou militaires soviétiques doivent capturés ne doivent être

considérés comme des prisonniers de guerre mais abattus immédiatement. ces

commissaires politiques sont étroitement associés aux juifs dans l’esprit des

dirigeants nazis, et notamment d’Hitler, qui évoque souvent dans ses propos l’ «

intelligentsia judéo-bolchevique ».

contribuent à créer un climat dans lequel tout est possible et qui laissent la

place aux initiatives des unités locales.

Mais il s’agit encore d’une élimination sélective, car aucun ordre d’extermination

de masse de la population ne paraît avoir été donné aux Einsatzgruppen avant l’attaque de l’URSS le 22 juin 1941

Ces projets sont conformes aux discours d’Hitler (30 mars 1941 devant des

officiers) : Hitler demande l’assassinat « des commissaires » soviétiques et

limitation des tribunaux militaires.

les opérations de tuerie mobile

L’invasion de l’Union soviétique le 22 juin 1941 constitue une étape essentielle dans

le processus de destruction: un franchissement dans le seuil de violence.

11

avec des opérations mobiles de tueries menées par des unités spéciales appelées

les Einsatzgruppen, avec une affectation géographique.

Les Einsatzgruppen se déplaçaient rapidement en commandos plus petits composés

de membres de la SS, de la police régulière, de la gestapo et aidés de bataillons de

police auxiliaires locales (Lituaniens, Ukrainiens) dans le sillage de l’armée et

allaient tuer les populations dans les villes importantes comme dans les petites

localités sur les territoires conquis par la Wehrmacht.

> rapport Karl Jäger Karl Jäger Nommé en juin 1941 commandant de

l’Einsatzkommando 3 de l’Einsatzgruppe A qui opère en Lituanie.

Il est surtout célèbre par son fameux rapport sur les tueries de

l’Einsatzkommando EK3 où il mentionne au 1er décembre 1941 : 137 346 exécutions

en grande majorité des Juifs exécutés. Basculement : de juillet à décembre : de

plus en plus de femmes et d’enfants juifs = extermination sélective à une

extermination de masse.

Basculement d’un meurtre sélectif à un meurtre de masse = génocide semble

arriver très tôt dans le conflit entre mi-juillet et mi-aôut 1941

à la suite des remarques d’Hitler sur les « possibilités » offertes par les

opérations « anti-partisanes » et des décisions prises par Himmler et

Heydrich qui dirigent la répression et qui se rendent sur le terrain.

et des initiatives des unités sur le terrain (avec le concours actif de la

Wehrmacht) , dont l’imprégnation idéologique antisémite ne fait aucun doute :

dernier tabou semble levé = interaction.

Himmler assiste directement vers le 15 août à une exécution massive de

partisans et de juifs aux environ de Minsk. Bach-Zelewski chef régional de

la police et de la SS témoignera de la nervosité de Himmler.

L’Einsatzkommando 4a dirigé par Paul Blobel fusilla 33 771 juifs les 29 et 30

septembre dans le ravin de Babi Yar à Kiev.

Ces opérations ont concerné un tiers des victimes de la shoah (deux millions de

personnes) ; elles se sont surtout déroulées sur le territoire de l’union soviétique.

Aucun ordre d’exécution massif ne semble avoir été donné pendant les préparatifs mais

caractère évolutif des instructions : au départ que les commissaires communistes juifs ,

puis finit par concerner tous les juifs (hommes adultes et familles entières).

Guerre idéologique, raciale contre constituent très clairement une étape essentielle

dans la radicalisation des persécutions antisémites des nazis.

12

4. Déportation et extermination des juifs d’Europe

Convoi du 28 septembre 1942 établie à Drancy :

a. à commenter éléments montrant : rafle ; professions exercées ; b. Ce convoi a quitté la gare Le Bourget/Drancy avec 904 juifs en direction d’Auschwitz

le 28 septembre 1942 à 8 h 55. On compte 468 hommes et 436 femmes. Le convoi comptait un peu moins de 100 enfants de moins de 17 ans. Les deux tiers des 904 déportés étaient d’origine étrangère. Le convoi est arrivé à Auschwitz dans la nuit du 29 au 30 septembre. 123 hommes et 48 femmes ont été sélectionnés pour le travail. Les autres ont immédiatement été gazés. En 1945, on comptait 20 survivants de ce convoi.

4.1 Déportation

Tableau des déportations + carte

Déportation à l’échelle de l’Europe toute entière : les juifs ont été déportés vers les

centres d’extermination de la Norvège aux plus petites îles grecques : 110 juifs en juin

1944 à Cos sont déportés.

Déportation de 440 000 juifs hongrois à partir du printemps 1944 ; spécificité de

la Hongrie : dans aucun pays la Solution finale de démarra si tardivement. La

Hongrie fut le seul Etat où les auteurs du crime savaient que la guerre était perdue

quand ils passèrent à l’action.

Dans toute l’Europe de l’Axe, l’imposition du port de l’étoile jaune, permettant une

identification immédiate, constituait un indicateur très sûr du stade atteint par le

processus de destruction : précédant souvent leur arrestation et leur déportation :

19 septembre 1941, tous les juifs du Grand Reich et du Protectorat âgés de 6 ans

ou plus portent une étoile jaune à 6 pointes le port de cet emblème

en mai-juin 1942 en aux Pays-bas, en Belgique et en France (7 juin 1942) ,

en mars 1944 en Hongrie juste avant les grandes vagues de déportation.

Une institution joua un rôle important dans le processus de déportation : le bureau IV

(gestapo)-B4 du RSHA sous la direction d’Adolf Eichmann, chargé des affaires juives.

C’est dans le Reich et le Protektorat que commencent les déportations (octobre

1941)

o Les déportations s’effectuèrent à partir de listes d’enregistrement des juifs

dressées par les polices locales ou les conseils juifs. Chargé dans des wagons à

bestiaux et gardés par la police.

13

L’organisation de cette déportation allait servir de modèle dans les pays occupés et

dans les pays alliés où elle sera l’œuvre d’une étroite coopération entre le RSHA, le

ministère allemand des affaires étrangères, les gouvernements locaux.

Dans toute l’Europe les juifs rassemblés dans des camps de transit ou des

ghettos, souvent avec l’aide des forces de police locales, sont chargés dans des

wagons à bestiaux et envoyés vers les camps de concentration et d’extermination

Pour les juifs de France, de Belgique et des Pays-Bas, les déportations

commencent en 1942 : 45 convois sur un total de 79 partent de la France pour la

seule année 42 : point culminant de la répression.

4.2 L’extermination immédiate dans des centres de mise à mort.

Les précédents d’une politique d’extermination : l’opération T4.

L’euthanasie des malades mentaux s’est effectuée dans le cadre du ProgrammeT4.

(Tiergartenstrasse 4).

Pendant la phase initiale des opérations, de 1939 à 1941, environ 70 000 personnes

furent tuées dans le cadre du Programme d’euthanasie.

Le Programme d’euthanasie inaugura l’utilisation des chambres à gaz et des fours

crématoires pour les exterminations systématiques. Les « experts » qui y prirent

part contribuèrent plus tard à la mise en place et au fonctionnement des centres

d’extermination de la «Solution finale».

Construction de centres de mise à mort destinés exclusivement à l’extermination des

juifs. > Carte

Après l’expérimentation de Chelmno en 1941, trois centres de mise à mort sont

ouverts en 1942 : Belzec, Sobibor et Treblinka dans le cadre de l’Aktion Reinhardt

, puis deux autres sont encore créés, Lublin-Maïdanek et Auschwitz-

Birkenau camps mixtes concentration mais aussi centres de mise à mort; ces sites

sont choisis par proximité de grands centres ferroviaires. L’année 1942 connaît le

pic de l’extermination avec 50% des victimes.

Chronologie de fonctionnement : des centres de mise à mort

Chelmno (nov-dec.41-mars 43 + juin-juillet 44)

Belzec (mars 42-juin 43)

Sobibor (avril 42-été 43)

Treblinka (été 42-août 43)

Birkenau (printemps 42-automne 44)

14

PP Treblinka

Treblinka est un des trois centres d’extermination construits dans le cadre de

l’Opération Reinhard (Aktion Reinhard1) avec Belzec et Sobibor.

Echappe à l’administration des camps (WVHA) et confié uniquement au RSHA

Cette opération constitue la première grande étape du processus de la « Solution

finale » de la question juive en Pologne.

La différence avec les camps mixtes comme Auschwitz, à la fois camp de concentration

et centre d’extermination, consiste dans le fait que ces centres d’extermination sont

destinés uniquement à l’assassinat immédiat en masse, sans séjour ni travail forcé, d’où

leur dimension relativement modeste.

Avec la mise en fonction de ces sites à partir de mars 1942, les nazis entrent dans

une phase industrielle du génocide. Treblinka fut le troisième centre

d’extermination à entrer en fonction en juin-juillet 1942.

800 000 juifs y sont exterminés ; entre juillet 1942 et septembre 1942 : essentiel

de la communauté juive de Varsovie est assassinée. (6 à 7000 par jour) = cœur du

foyer européen qui est touché.

Les responsables de cette opération choisirent le site, comme les deux autres, dans

une zone peu peuplée près des villages de Treblinka et de Malkinia, à proximité de la

voie ferrée principale Varsovie-Bialystok à 80 kilomètres environ au nord de

Varsovie.

Selon le schéma adopté dans les autres camps de l’Opération Reinhard, le camp

avait la forme d’un trapèze de 395 mètres sur 600 mètres environ. Des miradors de

8 mètres de hauteur environ étaient placés le long de la clôture et aux quatre coins

du camp ;

la structure du camp était composée de trois parties :

o la zone d’accueil (réception des déportés, confiscation et stockage des

effets personnels)

o la zone résidentielle (logement du personnel de surveillance), dite camp 1

o la zone d’extermination avec les chambres à gaz, dite camp 2, qui était

totalement entourée de fils barbelés recouverts de branchages et d’une

levée de terre, de manière à être invisible de l’extérieur. Ici le gazage se

faisait avec l’usage du moteur d’un véhicule militaire.

Dimension réduite du centre de mise à mort.

15

1. Cette dénomination est attribuée à l’hommage rendu par les SS à Reinhard Heydrich, chef du RSHA,

suite à l’attentat perpétré par les résistants tchèques le 27 mai 1942.

Documents Auschwitz

Occupe une place centrale dans l’histoire de la « Solution finale » mais aussi dans la

mémoire de la Shoah ; synonyme de l’extermination. Métonymie (Wieworka 2005).

Il fut le plus grand de tous les camps. Situé en Haute-Silésie orientale (région

annexée par l’Allemagne nazie en 1939, après l’invasion e la Pologne), le complexe

concentrationnaire d’Auschwitz s’étendait sur près de 42 km2.

Il se composait de trois camps principaux dont dépendait une quarantaine de camps

annexes. En novembre 1943, Auschwitz fut réorganisé par Oswald Pohl et divisé en

3 camps désignés par des chiffres romains : Auschwitz I, le camp d’origine ;

Auschwitz II ou Birkenau, représenté sur ce schéma, situé à 2 kilomètres du

précédent et qui comporte à la fois un centre d’extermination et un camp de

concentration dont la construction commence en octobre 1941 ; Auschwitz III,

complexe industriel géré par IG Farben, et qui exploita la main-d’oeuvre

concentrationnaire.

Ce fut aussi le lieu où le plus grand nombre de juifs fut assassiné au moyen de

chambres à gaz (près d’un million). C’est vers Auschwitz que convergea la majeure

partie des convois de la mort en provenance des pays européens, notamment de France

et d’Italie.

Les juifs ont constitué 85% des déportés et 90% des victimes ; 1 100 000

déportés sur 1 300 000

A Auschwitz,

l’intensification du conflit impose de conserver pour le travail forcé une partie des

juifs, débouchant sur une sélection à l’arrivée : camp de concentration

comportent des centres de mise à mort : L’extermination se pratiqua dans le

Crematorium I du camp principal (fin 1941), puis dans des fermes aménagées en

chambre à gaz Bunker I et II (printemps-été 1942) c’est dans ces bunkers que

furent gazés la majorité des juifs en provenance de France ; fonctionnèrent

jusqu’à la mise en service en mars 1943 des 4 grands crématoires ; crématoires

II, III, IV, V véritable usines à assassiner sont mises en service en 1943 ( mars à

juin 1943) vont prendre le relais des autres de mise à mort progressivement fermé

au cours de l’année 43. Capacités d’incinération entre 5 ou 6 000 corps par jour

Auschwitz et surtout Birkenau n’est pas le seul centre de mise à mort mais incarne à lui

trois spécificités de la Shoah :

16

En fonctionnant jusque fin 44 alors que les soviétiques sont à quelques dizaines de

km, et sont en train de remporter la guerre. Montre ainsi destruction des juifs

est une fin en soi dans une guerre raciale menée par nazis

Création d’ « usines à assassiner »,

Auschwitz plus grand centre de destruction des juifs de toute l’Europe montre

extension géographique de la Shoah.

17

Le bilan

Bilan chiffré et géographique de ce génocide : le bilan humain est effroyable : plus du

tiers de la population juive totale a été assassiné ; 5.7 millions de juifs ont été

assassinés, dont plus d’un million et demi d’enfants. Mais ces chiffres pourraient encore

augmenter du fait de l’ouverture des archives soviétiques et des recherches effectuées

sur les fosses communes des victimes des fusillades en Ukraine.

18

5. Les problèmes historiographiques

❏ Quel a été le rôle d’Hitler dans le génocide des juifs ?

Débat historiographique entre deux thèses, celle des intentionnalistes et celle des

structuralistes ;

la première thèse défend l’idée que le génocide des juifs d’Europe correspond à

l’accomplissement d’un programme d’Hitler, défini de longue date, bien avant la

guerre. Cette thèse repose sur l’antisémitisme dans Mein Kampf et notamment sur

le discours-prophétique du 30 janvier 1939 devant le parlement allemand, où

Hitler promet en cas de déclenchement d’une guerre mondiale « l’annihilation de la

race juive en Europe ». « vernichtung ».

La deuxième thèse défend l’idée que l’explication du génocide des juifs réside le

fonctionnement du IIIe Reich, où concurrence entre différents organismes (SS,

armée, police) aboutit à une radicalisation de la persécution.

Débat aujourd’hui largement dépassé :

Racisme et antisémitisme ont constitué un univers idéologique qui ont rendu

possible le meurtre. Hitler, par ces discours réguliers, ses entretiens avec son

entourage désignant l’ennemi juif a été l’inspirateur idéologique et politique de la

« Solution finale ».

La majorité des historiens (Ph. Burrin, Ian Kershaw) s’accordent aujourd’hui pour

dire qu’Hitler apparaît comme un personnage braqué sur une obsession antisémite.

Cette obsession antisémite laissait la place à plusieurs politiques possibles en

matière de persécution. Sinuosité des politiques montre bien qu’il n’y a

probablement pas eu de plan préconçu pour le génocide des juifs d’Europe chez

Hitler.

Cette affirmation trouve un écho dans l’existence d’un « circuit d’attente » comme

le définit Saul Friedländer, concernant les différentes étapes de la politique nazie

antisémite (identification, exclusion, concentration) à travers les territoires

occupés ; en effet, celle-ci n’initia pas de mesures radicalement nouvelles mais se

traduisit par l’extension à une échelle européenne du modèle de persécution

établi en Allemagne, comme si aucune décision définitive n’était prise.

Il faut rappeler aussi que les nazis avaient conçu des projets d’émigration forcée

(projet Nisko dans la région de Lublin, projet Madagascar ou déportation à l’est de

la Russie) pour éliminer l’influence des juifs de l’espace vital allemand, même si ces

projets comportent probablement une intention génocidaire.

Cependant, vu la place centrale qu’occupait Hitler, il est impossible de penser qu’il n’a

pas donné l’ordre d’une façon ou d’une autre de procéder à ces exterminations. Si

Hitler ne participa pas directement à la mise en place du génocide, son rôle majeur

consista à attiser la haine et à créer le climat dans lequel il a été rendu possible.

Les « intentions » d’Hitler jouèrent assurément un rôle fondamental dans la

19

radicalisation progressive de la politique antijuive qui devait conduire à

l’extermination à grande échelle.

o Ph. Burrin parle de prévisibilité idéologique.

o Saul Friedlander conclut sur ce sujet : « Sans le pyromane [Hitler], le feu ne se

serait pas déclaré ; sans la broussaille [l’antisémitisme diffus ou déclaré], il ne

se serait pas propagé aussi loin et n’aurait pas détruit tout un monde. »

❏ À quel moment la décision d’une extermination des juifs de toute l’Europe est-elle

prise ?

Un autre débat historiographique, qui recoupe en partie le débat précédent, est la

question de savoir à quelle date on bascule d’une politique antisémite de persécution à

une politique de génocide immédiat des juifs de toute l’Europe.

Deux dates semblent essentielles à retenir pour affiner la chronologie de la prise de

décision :

1ère date : 31 juillet 1941 Göring deuxième personnage de l’Etat nazi a donné

autorisation à Heydrich de préparer et de soumettre un plan pour une « solution

finale » de la question juive européenne

o (Heydrich déjà en charge de l’émigration et de l’expulsion des juifs depuis

janvier 1939 + déjà soumis début de l’année 41 à Göring un plan pour la

« réimplantation totale » des juifs d’Europe en Union soviétique après-

guerre. Browning indique une nouvelle autorisation de G. indique un autre plan,

qqchose de nouveau.

2ème date butoir : les historiens aujourd’hui s’accordent pour dire que la Conférence

de Wannsee qui se déroule le 20 janvier 1942, n’est pas le point départ de la

décision de « la Solution finale » mais l’entérine plutôt en mettant en place

l’organisation administrative avec les représentants des principaux ministères et

organismes nazis impliqués le génocide des juifs d’Europe Or elle est prévue

initialement pour le 09 décembre 1941.

Pour arriver à la Shoah il a fallu franchir un seuil de violence avec l’assassinat des

juifs de l’Est

Egalement selon Ph.Burrin l’échec de l’offensive sur le front russe, qui rend

impossible tout projet d’émigration plus à l’Est, que les nazis décident de passer à

l’extermination immédiate.

De plus, la guerre, en libérant la violence sur le terrain et en renforçant la

dimension mondiale du danger juif derrière l’ennemi soviétique et américain, fait

basculer l’obsession antisémite des dirigeants nazis dans une politique

d’extermination immédiate et de masse dans toute l’Europe.

20

Série d’indices permettent d’affiner cette chronologie

Septembre 1941 : Hitler donne l’autorisation de la déportation des juifs du Grand

Reich longtemps reportée après-guerre.

Octobre 1941 Interdiction prise par Heinrich Müller le 24 octobre 1941 de

l’émigration des juifs hors de l’Europe allemande. On ferme les portes de sortie.

Automne 41 : Planification des centres de mise à mort dans les territoires

incorporés (Wartegau), Gouvernement Général et commissariats des territoires

conquis sur URSS : des équipes SS sont envoyées pour reconnaître les lieux à

Chelmno, Sobibor alors que Belzec est déjà choisi ; d’autres centres de mise à mort

sont envisagés mais jamais réalisé à Riga et Moguilev.

Longerich montre aussi qu’au début de l’année 1942 Hitler revenant sur sa prophétie

de 1939 modifie son vocabulaire pour éliminer menace juive : avant

« anéantissement » « Vernichtung » (la prophétie d’Hitler de 1939, fixant

l’anéantissement des juifs comme horizon de cette guerre), évoque désormais

« éradication » = « ausrottung » = décision est prise.

L’obsession antisémite d’Hitler paraît atteindre pendant cette période un point

culminant ; en l’espace de 3 mois (octobre-décembre 1941), il évoque explicitement

à 7 reprises, dans plusieurs de ses discours, l’extermination des juifs ; Goebbels,

Rosenberg, Frank le citent tous trois indirectement à cet effet. Ce qui recentre le

débat sur le rôle central d’Hitler, qui apparaît comme l’aiguillon nécessaire dans

la dynamique de l’extermination.

Tous ces indices semblent montrer que la décision a été prise dans le dernier

trimestre de 1941 ; des mesures furent alors prises aux plus hauts échelons de

l’État pour coordonner cette entreprise d’extermination, sous l’impulsion de l’Office

central de Sécurité du Reich (RSHA)

21

Conclusion

Pour conclure sur l’enseignement du génocide des juifs, il faut insister sur la dimension

unique de la Shoah parmi les massacres de masse (dont furent victimes les soviétiques)

et les génocides du XXe siècle ; elle le doit :

A la volonté de définir sur le plan idéologique l’extermination des juifs comme un but

majeur de la guerre. Si les nazis perdent la guerre militaire, ils veulent gagner leur

guerre raciale, qui était une fin en soi.

A son extension géographique : assassiner systématiquement tous les juifs du

continent européen. (quelque soit l’évolution de la guerre)

A la construction de centres de mise à mort à caractère industriel

A chaque étape le processus de destruction mobilisa

En Allemagne : toutes les institutions de l’Allemagne nazie, les administrations

traditionnelles comme les nouveaux services créés par les nazis. On sait aujourd’hui

que 100 000 allemands participèrent directement à l’extermination des juifs.

Dans le reste de l’Europe : Si les nazis furent les instigateurs et les agents les plus

actifs de la politique de persécution et d’extermination, à chacune de ses étapes,

l’exécution des mesures allemandes dans le reste de l’Europe supposait la docilité des

autorités politiques, le concours de forces politiques locales ou d’autres auxiliaires,

la passivité ou le soutien des populations et surtout des élites politiques et

spirituelles.