Ulcère veineux : la compression, un traitement incontournable
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■ Les cahiers quaTrième TrimesTre 2012
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225 000 ulcères veineux en France.En 2008 la prévalence de l’ulcère veineux de jambechez l’adulte était estimée à 3 % de la population présentantune maladie veineuse chronique.
Ulcère veineux :la compression,un traitementincontournable
L’ulcère veineux est souvent négligé
ou mal pris en charge alors qu’il existe
un large consensus sur la nécessité
d’une compression adéquate pour le
traiter. Les soins locaux certes utiles ne peuvent
remplacer la compression.
Lors du traitement d’un ulcère veineux ouvert
(figure 1), il existe deux phases thérapeutiques
distinctes :
• une phase initiale de décongestion des
troubles trophiques et de désinfiltration de
l’œdème péri-ulcéreux qui correspond à la
phase exsudative et de détersion de l’ulcère.
C’est théoriquement le rôle du bandage
durant cette phase ;
• et une phase dite de cicatrisation qui cor-
respond cliniquement à la phase de bour-
geonnement et d’épidermisation de l’ulcère.
Le bas de compression est ici un choix.
Il existe un adage qui prétend qu’un bandage
compressif obtient le résultat et que les bas
de compression le maintiennent. La pratique
quotidienne doit faire nuancer cette notion
peut-être trop simple. C’est le but de cet
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dr maximeChahim
J. Fournier
Phlébo-gériatre, Praticien-attaché consultant. aPhP.hôpital corentin – issy-les-moulineaux
orthopédiste, Paris
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■ Les cahiers quaTrième TrimesTre 2012
La Haute Autorité de Santéa statué…
La Haute Autorité de Santé [1] a rappelé les
règles d’utilisation de la compression dans
le traitement de l’ulcère de jambe veineux et
mixte (artériel et veineux). Les bandages
multi-types et les bas de compression doivent
être utilisés. La pression à atteindre est de
30 à 40 mmHg à la cheville (et inférieure
à 30 mmHg en cas d’ulcère mixte).
En pratique quotidienne au-delà de ces
recommandations, le choix d’un type de
compression doit également tenir compte
de la taille de l’ulcère, de l’état de la plaie, de
l’existence d’une dysmorphie de la jambe, de
l’importance de l’œdème et aussi de l’état
général du patient.
Compressionde l’ulcère veineux ouvert
Les données cliniques disponibles permettent
d’affirmer l’intérêt de la compression dans
le traitement des ulcères ouverts. Le niveau
de pression recommandé est « le plus haut
toléré par le patient », idéalement 30 à
40 mmHg. La compression à recommander
en première intention (tableau I) est le
bandage multi-type (appelé de manière
inappropriée multi-couche. En effet, quelle
que soit la méthode, pour appliquer une
bande sur la jambe, il y a toujours plusieurs
couches en un point donné) ou le bas de
compression.
La supériorité des bandages (figure 2) multi-
types (comportant au moins 2 bandes
compressives différentes, Profore®, Urgo K2®,
Coban 2® par exemple) par rapport aux ban-
dages « monotypes » réalisés avec un seul
type de bande a été prouvée.
Point important, la Haute Autorité de Santé
retient également la compression par bas mais
uniquement par des bas de plus de 36 mmHg
(classe IV). En effet, elle considère que la
pression minimale efficace est de 30 mmHg
et que les bas dont la pression est comprise
entre 20 et 36 mmHg (classe III), exercent
en pratique une pression souvent inférieure
à 30 mmHg. L’utilisation d’un enfile-bas s’avère
souvent indispensable en particulier chez les
personnes âgées.
Figure 1. ulcère veineux ouvert
Figure 2. Bandage multi-types
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Les experts de la Haute Autorité de Santé
ont également proposé que les bas soient
également considérés comme un traitement
de première intention. En effet, Amsler et coll.
comparant l’efficacité des bas et des bandages
dans une méta-analyse [2] ont prouvé que le
taux de cicatrisation était significativement
meilleur avec les bas.
Compressionde l’ulcère mixte
80 % des ulcères ont une origine veineuse.
Mais il convient d’avoir à l’esprit que certains
ulcères ont une origine mixte avec une
composante artérielle. Dans ce cas, la pression
de la compression appliquée devra être infé-
rieure à 30 mmHg.
Il conviendra de penser à une artériopathie
oblitérante des membres inférieurs devant
l’absence de pouls distaux palpables, l’exis-
tence de signes cliniques ou de symptômes
évocateurs d’une artériopathie oblitérante
des membres inférieurs (douleurs à la marche,
décoloration d’un pied, pied froid). Un
échodoppler artériel des membres inférieurs
devra alors être réalisé en même temps qu’un
échodoppler veineux (figure 3).
Chez le sujet âgé, l’artériopathie oblitérante
des membres inférieurs est silencieuse du
fait de l’absence de mobilité et de la séden-
tarité. Dans une étude prospective [4] réalisée
sur un échantillon de 138 patients hospitalisés
d’âge moyen 82,2 ans, une artériopathie sévère
asymptomatique a été retrouvée chez 35 d’entre
eux (28 %) contre-indiquant le port d’une
compression élastique.
Tableau I. Recommandations de la Haute Autorité de Santé
Situation clinique DiSpoSitifS MoDalitéS
Ulcère ouvert
Bandages multi-typesen première intention
Bandes sèches inélastiquesou à allongement court
Bandes enduites de zinc
Bas (chaussettes, bas-cuisse, collants)> 36 mmHg
Jusqu’à cicatrisationcomplète
Figure 3. Échodoppler veineuxou artériel
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■ Les cahiers quaTrième TrimesTre 2012
>>> Traductionen pratique quotidienne
En pratique quotidienne, on s’aperçoit qu’il
n’y a pas de faute à utiliser des bas de
compression ou des bandages. Les preuves
manquent pour orienter vers tel type ou tel
type de compression. Le bon sens doit alors
guider le choix.
La compression par bas pour traiter un
ulcère ouvert doit apporter, comme nous
l’avons vu, une pression comprise entre 30
et 40 mmHg à la cheville. Les bas de classe III
ne délivrent pas une pression supérieure à
30 mmHg. Les bas de classe IV (> 36 mmHg)
sont difficilement enfilables.
La superposition de 2 bas devient donc
obligatoire pour atteindre les pressions
recommandées par la Haute Autorité de Santé.
Des kits « anti-ulcère » malheureusement non
remboursés, sont disponibles sur le marché
français [3] : (pour information : Mediven
Ulcer Kit [figure 4]) . Ils sont composés d’un
sous-bas pied fermé et d’un sur-bas pied ouvert.
La pression réellement délivrée en position
allongée est comprise entre 35 et 40 mmHg
à la base du mollet [3]. Le sous-bas (< 20 mmHg)
doit être conservé la nuit en position allongée
étant donné la faible pression délivrée. Il ne
risque pas de provoquer une ischémie. Un
point important : un enfile-bas est presque
toujours indispensable en particulier chez le
sujet âgé ou en cas de lésions rhumatologique
ou neurologique.
Avec des bas remboursés, il est possible
d’obtenir des pressions supérieures à 30 mmHg.
Une chaussette de classe I (10-15 mmHg)
pied fermé et une chaussette de classe III
(20-36 mmHg) pied ouvert vont permettre
d’atteindre une pression réelle de l’ordre
de 35-40 mmHg en regard de la plaie
ulcéreuse.
En cas d’ulcère mixte, la superposition de
2 chaussettes de classe I ou de I + II permet
de ne jamais dépasser 30 mmHg la journée.
Bas ou bandages ?
De manière pragmatique, plusieurs éléments
doivent guider le choix :
• la taille de l’ulcère,
• le pansement appliqué en fonction du stade
de la plaie,
• l’existence ou non de déformations ostéo-
articulaires des genoux, des pieds ou autre
dysmorphie,
• et l’importance de l’œdème.
Figure 4. exemple d’un kit anti-ulcère
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L’ancienneté de l’ulcère n’apparaît pas comme
un critère de choix.
La taille de l’ulcère est importante dans le
choix. Un ulcère de grande taille va nécessiter
un pansement qui risque de glisser ou de se
décoller lors de l’enfilage d’un bas. Il est alors
préférable d’utiliser un bandage multi-type
ou à allongement court plus simple à poser.
Si l’ulcère est de petite taille, on peut maintenir
plus facilement le pansement avec la main
lors de l’enfilage.
À la phase exsudative, le risque ou l’existence
de fuites et d’odeurs nécessitent l’emploi d’un
pansement secondaire absorbant. L’épaisseur
des 2 pansements rend difficile l’application
d’un ou deux bas en superposition. À l’opposé
lors de la phase de bourgeonnement/
épidermisation, la plaie ne coule plus, le
pansement primaire est généralement mince
et changé de manière moins fréquente. L’emploi
d’un bas se justifie alors pleinement.
La remarque est semblable en cas de jambe
dysmorphique. Un bandage est plus adapté.
Si le choix se porte sur le bas, on va devoir
dans ce cas utiliser des bas sur-mesure, coû-
teux, plus longs à obtenir et pas toujours bien
supportés.
Un œdème important pose un problème
d’une autre nature.
À la phase initiale de réduction de l’œdème,
l’usage d’un bandage rigide (multi-types ou
bande à allongement court) permet une réduc-
tion rapide de l’œdème mais le bandage risque
de glisser et de perdre toute efficacité
compressive voire en glissant de provoquer
des troubles cutanés. Il conviendra de reposer
quotidiennement ou tous les deux ou trois
jours le bandage pour l’adapter au volume
de la jambe. L’utilisation d’un bas oblige à
appliquer un bas moins grand dès que la cir-
conférence de cheville diminue de 2-3 cm si
on veut que la pression reste efficace. En
revanche, si l’œdème est peu important ou
lors de la phase de maintien des résultats,
le bas de compression trouve sa place
naturelle.
Cas particuliers
Chez le sujet âgé présentant des troubles
cognitifs et des ulcères multiples de jambe,
la botte de Unna, une bande à l’oxyde zinc,
(par exemple Varolast® figure 5) appliquée
directement sur les plaies ulcéreuses reste
finalement une solution simple, peu coûteuse
et peu chronophage pour l’infirmière. Le
patient ne peut pas ôter son bandage.
Tableau II. Critères de choix de la compression
taille
De l’ulcère
panSeMent
type De la plaie
DySMorphie
De la jaMbe
préSence
D’un œDèMe
iMportant
Bas Petite taille Bourgeonnement /Epidermisation
– –
Bandages Grande taille Exsudative /Détersion
+ +
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Réagissez en ligne !Pour participer à la discussion autour
de cet article, il suffit de vous rendreà l’adresse indiquée en bord de page.›
Ce bandage peut être conservé une semaine.
Ce fait est intéressant en cas de difficultés
d’accès à du personnel soignant (zone rurale).
L’ulcère cicatrisé (C5)
Pour l’ulcère veineux cicatrisé (figure 6), la
Haute Autorité de Santé considère que
la compression prévient la récidive et
recommande la compression par bas (idéa-
lement de plus de 30 mmHg) ou les bandes
sèches à allongement court. Les experts sou-
lignent la faible observance constatée en
pratique et recommandent d’utiliser la pression
Figure 5. Bande à l’oxyde zinc
caS particulierSpreSSion conStante
De 30-40 MMhg
• Bandage multi-type• Bande à allongement court• Bande inélastique
Bandes enduites de zinc(Botte de Unna)
Bas de compressionen superposition
• Ulcère grande taille• Exsudatif/phase de détersion• Jambe dysmorphique• Œdème important
• Peau fragile• Plaies multiples• Sujets âgés• Accès difficile aux soins
(manque de soignantsen zone rurale, …)
• Ulcère de petite taille• Épidermisation/
bourgeonnement• Jambe non dysmorphique• Œdème peu important
Figure 6. ulcère veineux cicatrisé
© Hartmann©
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la plus haute tolérée par le patient (avec un
minimum de 20 mmHg), en utilisant tous
les moyens pouvant améliorer l’adhésion du
patient au traitement.
Le traitement compressif doit idéalement être
maintenu au long cours avec une réévaluation
régulière du rapport bénéfices/risques.
Conclusion
L’importance de la compression dans le trai-
tement des ulcères veineux vient d’être rap-
pelée par la HAS. La taille de l’ulcère, le
pansement appliqué en fonction du stade de
la plaie, l’existence d’une dysmorphie de la
jambe ou du pied, l’importance de l’œdème,
l’état du patient sont des éléments à prendre
en compte pour appliquer en pratique ces
recommandations.
D’une manière générale, il apparaît que lors
de la phase de détersion d’un ulcère de grande
taille, très exsudatif, avec un œdème péri-
ulcéreux, le bandage multi-type est à préco-
niser. Dès la phase de bourgeonnement, la
superposition de deux bas de compression
constitue le bon compromis. ■
Par Maxime Chahim
Références
1. Rapport d’évaluation : dispositifs decompression médicale à usage indivi-duel : utilisation en pathologie vasculaire.Septembre 2010. www.has-sante.fr. HauteAutorité de santé.
2. Amsler F, Blattler W. Compression therapyfor occupational leg symptoms and chro-nic venous disorders- a meta-analysis ofrandomized controlled trials. Eur J VascEndovasc Surg 2008;35(3):366-72.
3. Benigni JP, Echegut P, Mourmaren M,Uhl JF, Cornu-Thenard A. CompressionStockings for Treating Venous Leg Ulcers.Journal of Wound Technology. 2010;8:20-5.
4. Chahim M, Schadeck M, Benigni JP, et coll.Pathologie veineuse du sujet âgé : intérêtde la mesure systématique de l’index depression systolique (IPS), pose d’unecompression veineuse. Phlébologie 2008;59(2):157-63.
Situation clinique DiSpoSitifS MoDalitéS
Ulcère cicatrisé • Bas (chaussettes, bas-cuisse, collants)de 20 à 36 ou > 36 mmHg
• Bandes sèches à allongement court
Traitement au long cours,avec réévaluation régulièredu rapport bénéfices/risques
on ne panse bien qu’avec le cœur !
©J .
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