Tuberculose abdominale

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Tuberculose abdominale R Dafiri F Imani Résumé. La tuberculose abdominale a connu une recrudescence liée en grande partie à l’avènement du syndrome de l’immunodéficience acquise. Le diagnostic de cette affection est souvent difficile à établir : les signes échographiques, scanographiques (TDM) et magnétiques nucléaires (IRM) ne sont pas spécifiques, mais certaines associations lésionnelles sont évocatrices de la tuberculose. La TDM constitue l’examen de choix pour l’évaluation précise de la maladie. Les opacifications digestives conventionnelles gardent encore leurs indications dans le diagnostic des atteintes intestinales. Elles restent supérieures aux autres techniques pour l’étude des anomalies de la muqueuse. L’apport de l’IRM reste encore limité, mais ses progrès incessants en font une technique d’avenir pour le diagnostic, l’évaluation de l’étendue lésionnelle et pour la détectabilité des complications. © 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : tuberculose, abdomen, imagerie, péritoine, ganglions, intestin, foie, rate, pancréas. Introduction La tuberculose abdominale reste un problème d’actualité en raison, d’une part, de sa fréquence encore élevée dans les pays en voie de développement et d’autre part, de sa recrudescence dans les pays industrialisés, en partie liée à l’avènement et à l’extension du syndrome de l’immunodéficience acquise (sida) [32] . Cette réémergence de la tuberculose a entraîné un regain d’intérêt pour cette pathologie qui se caractérise par son polymorphisme clinique et radiologique et par les difficultés diagnostiques, notamment chez les sujets atteints de sida. La reconnaissance des lésions tuberculeuses est primordiale pour éviter le recours à la chirurgie, car la plupart des atteintes peuvent régresser sous traitement médical. Les examens d’imagerie en coupe permettent parfois d’évoquer le diagnostic, parfois de le confirmer grâce à la ponction guidée à l’aiguille fine des lésions les plus accessibles. Ils permettent également d’établir un bilan lésionnel précis et d’apprécier l’évolution de la maladie sous thérapie antituberculeuse. La tomodensitométrie (TDM) constitue l’examen de choix pour l’étude de la cavité abdominopelvienne : organes pleins, mésentère, cavité péritonéale. Ses progrès technologiques ont également modifié l’approche radiologique du tube digestif mais n’ont pas supplanté les examens conventionnels avec opacification digestive qui gardent encore leurs indications pour l’établissement du diagnostic. Au stade actuel, les avantages de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) nucléaire semblent encore limités par rapport à la TDM. Rachida Dafiri : Professeur de radiologie. Farida Imani : Professeur des Universités, chef du service de radiologie. Centre hospitalier universitaire IBN SINA, Rabat, Maroc. Généralités. Physiopathologie La tuberculose abdominale occupe la troisième place parmi les localisations extrapulmonaires. Elle peut être primitive, correspondant à une forme de primo-infection, ou secondaire à une autre localisation, notamment pulmonaire. La coexistence d’une tuberculose pulmonaire et abdominale varie de 5 à 38 % [57] . Ce pourcentage dépend en fait du siège de l’atteinte tuberculeuse abdominale. Ainsi, il est de 5 à 8 % pour l’atteinte intestinale, de 25 à 30 % pour l’atteinte hépatique, et de 13 à 24 % pour l’atteinte péritonéale. Au cours des miliaires pulmonaires, l’atteinte hépatosplénique est presque toujours associée. Le maximum de fréquence de la tuberculose abdominale est rapporté dans les pays d’Amérique latine, du Moyen-Orient, d’Extrême-Orient et d’Afrique. Certains facteurs favorisent le développement de cette affection tels que l’alcoolisme, la toxicomanie, le diabète, la corticothérapie et le sida. Ce dernier est révélé par une tuberculose dans environ 15 % des cas. Il s’agit le plus souvent d’une tuberculose extrapulmonaire touchant plusieurs organes avec des localisations souvent inhabituelles. Elle est d’autant plus sévère qu’elle répond moins aux antibiothérapies spécifiques. La tuberculose abdominale s’observe chez l’homme comme chez la femme, chez le vieillard comme chez l’adulte jeune, mais avec cependant une prédominance entre la troisième et la quatrième décade. Les voies de cheminement des bacilles sont : hématogène : c’est le mode de contamination le plus fréquent ; cette voie explique la dissémination des foyers tuberculeux au niveau péritonéal, ganglionnaire, digestif, hépatique et splénique ; lymphatique : l’atteinte s’effectue à partir de ganglions mésentériques ou trachéobronchiques ; endogène : l’atteinte abdominale est secondaire à la déglutition de bacilles de Koch (BK) provenant de lésions tuberculeuses des voies aériennes supérieures ; Encyclopédie Médico-Chirurgicale 33-010-A-30 33-010-A-30 Toute référence à cet article doit porter la mention : Dafiri R et Imani F. Tuberculose abdominale. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Radiodiagnostic - Appareil digestif, 33-010-A-30, 2001, 12 p.

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Tuberculose abdominaleR DafiriF Imani

Résumé. – La tuberculose abdominale a connu une recrudescence liée en grande partie à l’avènement dusyndrome de l’immunodéficience acquise. Le diagnostic de cette affection est souvent difficile à établir : lessignes échographiques, scanographiques (TDM) et magnétiques nucléaires (IRM) ne sont pas spécifiques,mais certaines associations lésionnelles sont évocatrices de la tuberculose.La TDM constitue l’examen de choix pour l’évaluation précise de la maladie. Les opacifications digestivesconventionnelles gardent encore leurs indications dans le diagnostic des atteintes intestinales. Elles restentsupérieures aux autres techniques pour l’étude des anomalies de la muqueuse. L’apport de l’IRM reste encorelimité, mais ses progrès incessants en font une technique d’avenir pour le diagnostic, l’évaluation de l’étenduelésionnelle et pour la détectabilité des complications.© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : tuberculose, abdomen, imagerie, péritoine, ganglions, intestin, foie, rate, pancréas.

Introduction

La tuberculose abdominale reste un problème d’actualité en raison,d’une part, de sa fréquence encore élevée dans les pays en voie dedéveloppement et d’autre part, de sa recrudescence dans les paysindustrialisés, en partie liée à l’avènement et à l’extension dusyndrome de l’immunodéficience acquise (sida) [32]. Cetteréémergence de la tuberculose a entraîné un regain d’intérêt pourcette pathologie qui se caractérise par son polymorphisme cliniqueet radiologique et par les difficultés diagnostiques, notamment chezles sujets atteints de sida.

La reconnaissance des lésions tuberculeuses est primordiale pouréviter le recours à la chirurgie, car la plupart des atteintes peuventrégresser sous traitement médical.

Les examens d’imagerie en coupe permettent parfois d’évoquer lediagnostic, parfois de le confirmer grâce à la ponction guidée àl’aiguille fine des lésions les plus accessibles. Ils permettentégalement d’établir un bilan lésionnel précis et d’apprécierl’évolution de la maladie sous thérapie antituberculeuse.

La tomodensitométrie (TDM) constitue l’examen de choix pourl’étude de la cavité abdominopelvienne : organes pleins, mésentère,cavité péritonéale. Ses progrès technologiques ont également modifiél’approche radiologique du tube digestif mais n’ont pas supplantéles examens conventionnels avec opacification digestive qui gardentencore leurs indications pour l’établissement du diagnostic.

Au stade actuel, les avantages de l’imagerie par résonancemagnétique (IRM) nucléaire semblent encore limités par rapport àla TDM.

Rachida Dafiri : Professeur de radiologie.Farida Imani : Professeur des Universités, chef du service de radiologie.Centre hospitalier universitaire IBN SINA, Rabat, Maroc.

Généralités. PhysiopathologieLa tuberculose abdominale occupe la troisième place parmi leslocalisations extrapulmonaires. Elle peut être primitive,correspondant à une forme de primo-infection, ou secondaire à uneautre localisation, notamment pulmonaire.La coexistence d’une tuberculose pulmonaire et abdominale variede 5 à 38 % [57]. Ce pourcentage dépend en fait du siège de l’atteintetuberculeuse abdominale. Ainsi, il est de 5 à 8 % pour l’atteinteintestinale, de 25 à 30 % pour l’atteinte hépatique, et de 13 à 24 %pour l’atteinte péritonéale.Au cours des miliaires pulmonaires, l’atteinte hépatosplénique estpresque toujours associée.Le maximum de fréquence de la tuberculose abdominale estrapporté dans les pays d’Amérique latine, du Moyen-Orient,d’Extrême-Orient et d’Afrique. Certains facteurs favorisent ledéveloppement de cette affection tels que l’alcoolisme, latoxicomanie, le diabète, la corticothérapie et le sida. Ce dernier estrévélé par une tuberculose dans environ 15 % des cas. Il s’agit leplus souvent d’une tuberculose extrapulmonaire touchant plusieursorganes avec des localisations souvent inhabituelles. Elle est d’autantplus sévère qu’elle répond moins aux antibiothérapies spécifiques.La tuberculose abdominale s’observe chez l’homme comme chez lafemme, chez le vieillard comme chez l’adulte jeune, mais aveccependant une prédominance entre la troisième et la quatrièmedécade.Les voies de cheminement des bacilles sont :

– hématogène : c’est le mode de contamination le plus fréquent ; cettevoie explique la dissémination des foyers tuberculeux au niveaupéritonéal, ganglionnaire, digestif, hépatique et splénique ;– lymphatique : l’atteinte s’effectue à partir de ganglionsmésentériques ou trachéobronchiques ;– endogène : l’atteinte abdominale est secondaire à la déglutition debacilles de Koch (BK) provenant de lésions tuberculeuses des voiesaériennes supérieures ;

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Dafiri R et Imani F. Tuberculose abdominale. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Radiodiagnostic - Appareil digestif,33-010-A-30, 2001, 12 p.

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– exogène : la contamination abdominale s’effectue par l’absorptionde produits laitiers souillés ; ceci est fréquent dans les régions où lelait n’est pas pasteurisé ;

– atteinte par contiguïté : elle est surtout prédominante dansl’atteinte péritonéale à partir des ganglions ou à partir des organesgénitaux féminins.

Anatomopathologie

L’inflammation tuberculeuse correspond à l’ensemble desmodifications tissulaires en rapport avec la présence de Myco-bacterium tuberculosis dans l’organisme. Bien que les lésions de latuberculose puissent être imitées par d’autres agents pathogènesvivants ou chimiques, elles présentent des caractèresmorphologiques qui permettent le plus souvent leur identification.

MACROSCOPIE

¶ Tuberculose péritonéale [1, 25, 32, 60]

On décrit plusieurs formes.

– Les formes granuliques sont caractérisées par un semis degranulations jaunâtres ou blanchâtres de 0,5 à 2 mm de diamètre, detaille à peu près égale, uniformément réparties sur le péritoine ; cesgranulations peuvent siéger sur le foie, la rate, l’intestin grêle, lediaphragme et les annexes ; elles s’accompagnent de phénomènesinflammatoires péritonéaux, elles évoluent vers la sclérose etpeuvent se calcifier ; ces lésions peuvent devenir volumineuses,réalisant parfois de véritables tuberculomes, voire un aspectpseudotumoral.

– Les formes ascitiques : l’épanchement liquidien s’associe à uneéruption discrète de granulations miliaires.

– Les formes ulcérocaséeuses : elles sont caractérisées par la présencede tubercules de taille variable pouvant confluer et former desmasses caséeuses ; celles-ci sont entourées de bandes fibreuses quilimitent des logettes remplies d’un liquide séropurulent. L’intestingrêle est au centre de ces lésions caséeuses. L’épiploon est toujoursatteint, de même que les ganglions mésentériques généralementcaséeux.

– Les formes fibroadhésives : la fibrose envahit les granulations ; ainsise forment des brides et des lames de fibrose qui étranglentl’intestin.

¶ Tuberculose intestinale

Quatre formes macroscopiques sont décrites.

– La forme ulcéreuse : il s’agit de pertes de substances uniques oumultiples, perpendiculaires à l’axe de l’intestin et séparées par deszones de muqueuse saine ; ce sont de petites ulcérations peuprofondes, pénétrant peu la musculeuse, à contours irréguliers etdéchiquetés en « carte géographique », à bords décollés, et dont lefond présente un aspect purulent avec des grumeaux caséeux. Cesulcérations correspondent à des lésions assez récentes et évolutives.La confluence des petites ulcérations réalise un ulcère annulairetypique de la tuberculose.

– La forme hypertrophique : elle traduit une inflammation chroniqueobservée électivement au niveau de la région cæcale et iléocæcaleoù elle réalise un aspect pseudotumoral ; elle est secondaire àl’hyperplasie scléreuse ou sclérolipomateuse.

– La forme ulcérohypertrophique : elle associe les deux formes décritesprécédemment et s’observe surtout dans la région iléocaecale.

– La forme sténosante : rencontrée surtout sur le grêle, les sténosessont en général annulaires et peu étendues. Elles sont la conséquencede la sclérose réactionnelle tuberculeuse.

¶ Tuberculose gastroduodénale

On distingue trois formes :

– la forme ulcéreuse : l’ulcération tuberculeuse unique ou multiplesiège le plus souvent sur la petite courbure ;

– la forme hypertrophique : il s’agit d’une réaction hyperplasiquede la paroi gastroduodénale qui siège au niveau de la régionpylorique et qui s’accompagne d’une importante réactionpéritonéale et de volumineuses adénopathies ;

– la forme sténosante : caractérisée par une fibrose qui s’étend del’antre au duodénum, elle est responsable de la constitution defistules.

¶ Tuberculose hépatique [11, 37, 42, 55]

Trois formes lésionnelles macroscopiques sont décrites au niveau dufoie.

– La forme macronodulaire : très rare, rencontrée le plus souvent chezles patients immunodéprimés. Elle est caractérisée par la présencede tuberculomes qui résultent probablement de la coalescence demultiples granulomes tuberculeux [2]. Ils sont réguliers, de taillevariable, généralement supérieure à 2 cm, entourés d’une épaissecoque scléreuse parfois calcifiée, et truffant le parenchymehépatique.

– La forme micronodulaire ou miliaire : réunit la quasi-totalité descas de tuberculose hépatique. Elle est soit primitive, soit secondaireà une miliaire tuberculeuse avec insémination hématogène. Elle estcaractérisée par la présence de multiples nodules gris-blancdispersés à la surface et dans la profondeur du foie. Leur taille estcelle d’une tête d’épingle, les plus gros atteignant la taille d’un grainde millet, soit environ 2 mm de diamètre. Le foie garde le plussouvent une taille et une morphologie normales.

– La tuberculose canaliculaire est exceptionnelle : il s’agit d’uneangiocholite suppurée où les lésions tuberculeuses se limitent auxcanalicules biliaires.

¶ Tuberculose splénique [31]

Macroscopiquement, la tuberculose splénique revêt plusieursformes :

– miliaire, réalisant un semis de granulations ;

– macronodulaire, qui correspond à une poche remplie de caséumet entourée d’une coque ;

– fibrocaséeuse, où les tuberculomes confluent et forment des foyerscaséeux ;

– fibreuse, caractérisée par une rate fibreuse sans foyer caséeux ;

– nécroticohémorragique, qui constitue un véritable infarctus paratteinte spécifique des artérioles.

MICROSCOPIE [11, 19, 53]

Les lésions microscopiques sont de plusieurs types. Au stade initialde l’inflammation apparaissent des lésions exsudatives nonspécifiques, riches en lymphocytes et en cellules histiocytairesmacrophagiques. Cette phase est très fugace et ne s’observe quedans certaines tuberculoses très graves à évolution rapide.À un stade plus avancé se surajoute une nécrose caséeuseparticulière à la tuberculose, qui résulte d’une part du caractèreavasculaire du nodule inflammatoire, et d’autre part des réactionscomplexes entre le germe et les tissus. Cette nécrose peut êtreminime et passer inaperçue lors de l’étude histologique.La réaction de défense tissulaire contre ces atteintes destructives semanifeste par l’apparition de lésions folliculaires autour du caséum,formées par des cellules épithélioïdes, géantes et lymphocytaires.Quand tous les éléments d’une telle lésion caséofolliculaire sontréunis, leur nature tuberculeuse est pratiquement certaine. Maisselon l’incidence des coupes, un tel follicule peut avoir un aspectmoins spécifique, gigantoépithélioïde, épithélioïde oulymphocytaire, prêtant dans ce cas à confusion avec d’autresaffections, telles que la sarcoïdose et la brucellose [11].La résorption d’une inflammation tuberculeuse est possiblespontanément, mais elle est surtout le fait de l’antibiothérapie.

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Les lésions non caséifiées évoluent vers la fibrose, et les lésionscaséifiées s’entourent d’une coque fibreuse. Le caséum dans ce casne peut se résorber, mais il se modifie avec assèchement, calcificationou ramollissement.Les conséquences du ramollissement sont liées à la possibilitéd’évacuation de cette nécrose : des ulcérations se forment au niveaudes revêtements entre autres digestifs, des abcès froids au sein destissus pleins (rate, foie), et des cavernes au sein des parenchymespourvus de voies de drainage.Comme tous les foyers inflammatoires, les lésions tuberculeuses nesont pas disposées au hasard au sein des viscères. Leurconfiguration, leur taille et leur volume sont conditionnés par l’entitéanatomique où elles se développent et à partir de laquelle elless’accroissent avec une certaine systématisation. L’importance etl’étendue des lésions ne dépendent pas de la quantité et de lavirulence des bacilles, mais du terrain, de la réactivité de l’individuet des organes, et de la présence de conditions générales oulocorégionales favorisantes.

Clinique

Les manifestations cliniques de la tuberculose abdominale sontprotéiformes réalisant souvent des tableaux trompeurs,particulièrement parmi les sidéens chez qui la possibilité d’infectionpar plusieurs germes rend la clinique encore déroutante.Le début est généralement lent et progressif fait d’un syndromefébrile quasi constant. La fièvre est habituellement modérée etprolongée, revêtant divers aspects, notamment pseudopalustres etpseudotyphiques.L’altération de l’état général est plus ou moins importante, marquéepar l’amaigrissement, l’anorexie et l’asthénie.Ces manifestations générales s’accompagnent de signes inhérents àchaque localisation.Ainsi, l’atteinte intestinale est marquée par des douleursabdominales d’intensité variable allant de la simple pesanteurjusqu’à la douleur vive diffuse à l’ensemble de l’abdomen oulocalisée, siégeant le plus souvent au niveau des fosses iliaques, dansles régions périombilicales ou épigastrique.Les troubles du transit sont fréquemment rencontrés. Il s’agit le plussouvent de diarrhée qui peut prendre un caractère dysentériformeparfois mortel en cas de déficit immunitaire, notamment lorsque letaux des lymphocytes CD4 est très bas. Dans d’autres cas, la diarrhéealterne avec des périodes de constipation plus ou moins prolongées.L’examen peut révéler une sensibilité, un empâtement, voire unemasse abdominale.La tuberculose intestinale peut se manifester d’emblée par unecomplication telle qu’une occlusion, une perforation ou unehémorragie. Ces complications sont d’autant plus fréquentes quel’état immunitaire est déficient.L’atteinte péritonéale peut réaliser la triade fortement évocatrice :douleurs abdominales, ascite et fièvre. Dans environ 10 % des cas,elle peut se révéler par un tableau aigu pseudochirurgical avecdébut brutal, douleur vive et défense abdominale.L’atteinte hépatosplénique peut être responsable d’unehépatosplénomégalie généralement indolore et d’importancevariable.La tuberculose ganglionnaire, quant à elle, est souvent latente. Danscertains cas, elle peut se manifester par un syndrome decompression des structures de voisinage tel que l’ictère obstructifpar compression du pédicule hépatique.

Biologie

À l’instar des signes cliniques, la biologie n’est pas spécifique. Lesexamens biologiques montrent souvent un syndrome inflammatoired’intensité variable. Ce signe présente peu d’intérêt pour le

diagnostic mais garde une certaine importance pour la surveillancedes patients sous chimiothérapie antibacillaire.La vitesse de sédimentation constitue un excellent test d’activité. Elleest constamment élevée et baisse rapidement dès le début dutraitement.L’hémogramme révèle une anémie généralement modérée, unehyperleucocytose avec lymphocytose, parfois une leucopénie. En casd’atteinte hépatique, on peut noter un degré variable de cholestase.L’activité sérique des phosphatases alcalines est souvent élevée,entre 1,5 et 5 fois la normale, alors que celle des aminotransférasesest normale ou peu élevée. Un syndrome de malabsorption, bienque rare, peut être noté. Il peut être dû soit à une atteinte diffuse dela paroi intestinale, soit à une atteinte lymphatique obstructive àl’origine d’une entéropathie exsudative, soit à une pullulationmicrobienne en amont de sténoses du grêle ou, dans les séquellesde fistules, entre les différents segments intestinaux.L’intradermoréaction à la tuberculine n’apporte pas d’argumentsformels au diagnostic. Sa négativité ne permet pas d’exclure lediagnostic, car dans les formes évoluées ou lorsque l’état général esttrès altéré, il peut exister une anergie tuberculinique. Quand elle estpositive, elle ne constitue pas forcément une preuve de la naturetuberculeuse de l’affection abdominale.L’étude du liquide d’ascite montre un exsudat Rivalta positif richeen lymphocytes.Certains soulignent l’intérêt de l’abaissement du glucose dans leliquide d’ascite ainsi que l’élévation de l’adénosine désaminase pourle diagnostic de tuberculose [1].

Bactériologie

Le diagnostic de tuberculose repose dans tous les cas sur la mise enévidence du Mycobacterium tuberculosis. Cette recherche est trèsrarement positive à l’examen direct, car à la différence de latuberculose pulmonaire riche en bacilles, les lésionsextrapulmonaires sont plutôt paucibacillaires. L’isolement du BK estd’autant plus difficile que les patients sont exempts d’immuno-dépression [17].Le BK peut être recherché dans les selles, les crachats et le liquidede tubage gastrique. La culture sur milieu de Löwenstein a unemeilleure sensibilité pour apporter la preuve bactériologique de latuberculose mais le résultat est tardif (3 à 4 semaines) en raison dutemps de division prolongé du M. tuberculosis.Actuellement, les espoirs reposent sur l’emploi de nouvellesméthodes de culture en milieu liquide radiomarqué selon le systèmeBACTEC [10, 17] qui permettent une obtention nettement plus rapidedes résultats (48 heures).

Imagerie

La tuberculose abdominale est caractérisée par la diversité de sesatteintes. Ainsi, elle peut être péritonéale, ganglionnaire, intestinale,hépatosplénique et pancréatique.L’imagerie médicale peut aller de la simple radiographiepulmonaire, qui peut montrer une tuberculose pulmonaire évolutiveou séquellaire, à l’abdomen sans préparation qui peut mettre enévidence des calcifications ganglionnaires, hépatiques ou spléniques(fig 1), jusqu’à l’échographie, le scanner et l’IRM.L’apport de ces trois examens est détaillé en fonction de chaquelocalisation.

TUBERCULOSE PÉRITONÉALE [1, 22, 25, 26, 27, 32, 33, 39, 42, 47, 51]

Elle compte parmi les localisations les plus fréquentes de latuberculose abdominale et inclut l’atteinte de la cavité péritonéale,du mésentère et de l’épiploon.

¶ ÉchographieLes signes échographiques de la tuberculose péritonéale ne sont passpécifiques mais l’association de l’ascite, des adhérences, des

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granulations et de l’épaississement péritonéal est fortementévocatrice de l’origine tuberculeuse.

Ascite

C’est le signe le plus habituel au cours de l’atteinte péritonéale. Elleest retrouvée dans 38 % des cas. Elle est aisément détectée enéchographie, même quand elle est minime. Elle peut présenter unaspect échogène lorsque sa teneur protéique est augmentée et peutcomporter des cloisons qui réalisent des bandes linéaireshyperéchogènes et entrelacées [22, 31, 47] (fig 2).

Ces cloisons sont le témoin de la présence de fibrine et d’adhérences.Elles ne sont pas spécifiques de la tuberculose et peuvent s’observerau cours de la carcinose péritonéale, du pseudomyxome et dumésothéliome péritonéal.

Nodules péritonéaux

Ils sont l’équivalent des granulations observées à la laparoscopie.Les granulations ne sont visibles à l’échographie que si elles sontsuperficielles, de grande taille (supérieure à 1 cm) (fig 3) ou quandelles sont entourées d’ascite. L’utilisation de sondes de hautefréquence et la présence d’une ascite abondante peuvent permettrela visualisation de nodules infracentimétriques au contact dupéritoine pariétal.

Les granulations se présentent sous forme de nodules échogènes,réguliers, à limites nettes, isolés ou groupés au contact du péritoineviscéral et surtout péritonéal.

Épaississement péritonéal

L’épaississement du péritoine se traduit par une bande transsonoreantérieure étendue ou localisée mesurant 10 à 20 mm d’épaisseur.Cet aspect pourrait correspondre au péritoine inflammatoire décritau cours de la laparoscopie.

À côté de l’épaississement du péritoine, on peut noter celui dumésentère. L’étude échographique du mésentère est paradoxalementplus facile chez les obèses. L’épaisseur mésentérique normale variede 7 à 12 mm, indépendamment de l’âge ou de la corpulence dessujets [33]. Au cours de la tuberculose péritonéale, le mésentères’épaissit et dépasse 15 mm. Cet épaississement est fréquemmentrencontré. Il est lié à l’œdème, aux dépôts graisseux et auxadénopathies.

Un autre signe est également observé : c’est l’accentuation del’échogénicité mésentérique expliquée probablement parl’obstruction lymphatique [33].

La présence d’adénopathies confère parfois au mésentère un aspectmultinodulaire (fig 4).

L’épaississement mésentérique n’est pas spécifique de la tuberculose.Il peut s’observer au cours d’autres affections telles quel’hypertension portale et le lymphome. Dans le premier cas, lemésentère est épaissi par congestion et par dilatation veineuse. Dansle deuxième cas, c’est la présence d’adénopathies qui élargit lemésentère dont l’échogénicité n’est pas modifiée [33].

L’épaississement mésentérique au cours de la tuberculose doitégalement être différencié de celui dû à une carcinose péritonéaleou à un pseudomyxome et à un mésothéliome péritonéal. De même,la maladie de Crohn peut être responsable d’un épaississementnodulaire du mésentère. Le diagnostic différentiel est difficile àétablir sur les seules données de l’échographie.

1 Abdomen sans préparation. Séquelles calcifiées de tuberculose splénique et gan-glionnaire.

2 Échographie. Ascitecloisonnée traversée par desbandes linéaires hyperécho-gènes entrelacées.

3 Échographie. Granulation périto-néale : nodule échogène de grande taillesiégeant au niveau du péritoine pariétal,bien visualisé au sein de l’ascite.

4 Échographie. Accen-tuation de l’échogénicité dumésentère qui est épaissi,siège de trois nodules hy-poéchogènes.

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Anomalies digestives

L’échographie permet d’apprécier la mobilité des ansesgénéralement diminuée, voire absente, réalisant un aspect figé desanses qui peuvent être agglutinées, accolées entre elles ou à la paroiabdominale antérieure (fig 5).Dans certains cas, les anses agglutinées entourent le méso épais etsont englobées et entourées par une coque hypoéchogène épaisseatteignant le centimètre.L’échographie permet également de mettre en évidence unépaississement de la paroi digestive généralement modéré et quiprédomine au niveau de la jonction iléocæcale.L’épaississement pariétal associé à l’épanchement intrapéritonéal defaible abondance réalise un aspect caractéristique en « tranches depain » (slice bread des Anglo-Saxons).L’ascite, les adhérences, les granulations, l’épaississement péritonéalet les anomalies digestives sont diversement associées, permettantde décrire plusieurs formes :

– ascitique : caractérisée par une ascite libre ou cloisonnée, plus oumoins abondante, un péritoine modérément épaissi et desgranulations péritonéales de petite taille ;– fibroadhésive : se distinguant par la faible abondance de l’ascite,par un épaississement péritonéal plus important, par la grande tailledes granulations et par l’agglutination et l’accolement des ansesentre elles et à la paroi abdominale antérieure ;– fibrocaséeuse : elle se caractérise par l’importance del’épaississement péritonéal, la confluence des granulations dont lataille dépasse celle de la forme fibroadhésive et par une asciteminime ;– encapsulante : elle se distingue par un mésentère très épaissi,entouré d’anses agglutinées et accolées les unes aux autres,englobées elles-mêmes par une coque épaisse. L’ascite estgénéralement de faible abondance ;– pseudokystique : elle réalise un cloisonnement ascitique refoulantles anses à sa périphérie.

¶ TomodensitométrieLe scanner est considéré comme l’examen de choix pour l’étude dela pathologie péritonéale. Il est cependant peu spécifique. Sasensibilité dans le diagnostic de présomption de la tuberculosepéritonéale voisine 70 % [32].La technique d’examen doit être parfaite. Les coupes doivent êtreréalisées depuis les coupoles diaphragmatiques jusqu’au niveau dela symphyse pubienne. L’opacification digestive est de règle.L’injection de contraste veineux facilite l’identification des structuresvasculaires du mésentère et des anomalies péritonéales.L’épaisseur des coupes varie de 8 à 10 mm, complétées si nécessairepar des coupes plus fines (5 mm) sur les zones d’intérêt.Le diagnostic TDM de la tuberculose péritonéale repose sur unfaisceau d’arguments.

Ascite

La TDM est très sensible pour mettre en évidence les petitsépanchements péritonéaux qui se localisent au niveau des zonesdéclives (poche de Morison, cul-de-sac de Douglas). L’ascite peut

être libre ou cloisonnée par un péritoine épaissi, parfois d’aspectnodulaire, rehaussé après injection de produit de contraste [42] (fig 6) ;elle peut présenter parfois un aspect hyperdense si sa teneurprotéique est augmentée ou comporter des cloisons et des débris.Cet aspect est caractéristique mais non spécifique. L’ascite n’a aucuncaractère distinctif : en effet ni sa topographie ni sa densité n’ont devaleur prédictive, d’où la recherche des autres signes associés.

L’atteinte mésentérique est d’importance variable, pouvant prendrel’aspect d’une simple densification de la graisse mésentérique oud’une infiltration nodulaire [25, 26] (fig 7).

Ces nodules sont la traduction des tubercules. Ils peuvent siéger à lasurface du mésentère ou dans les ganglions. Ils peuvent être micro-ou macronodulaires. Leur visualisation scanographique dépend deleur taille, de la présence ou non d’ascite et de leur topographie. Ilsapparaissent sous forme de lésions focales noyées dans la graissemésentérique, de taille variable, de densité tissulaire homogène ouhétérogène, pouvant comporter une hypodensité centrale (fig 8) liéeà la nécrose caséeuse et parfois des calcifications.

La présence d’une atteinte mésentérique associant des macronodulesavec hypodensité centrale et des calcifications est très évocatrice detuberculose bien qu’elle puisse s’observer au cours d’autres

5 Échographie. Accole-ment des anses qui sont ad-hérentes à la paroi abdomi-nale antérieure.

6 Tomodensitométrie.Ascite cloisonnée par un pé-ritoine épaissi rehaussé parle contraste veineux.

7 Tomodensitométrie. Densification et infiltration micronodulaire de la graisse mé-sentérique, associée à une collection abcédée péridigestive au niveau de la fosse iliaquegauche.

8 Tomodensitométrie.Présence au sein du mésen-tère densifié de masseshypodenses nécrosées aucentre.

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pathologies telles que le lymphome de Burkitt, les lymphomestraités, les métastases et la maladie de Whipple [26].

Atteinte épiploïque

Leur détection est aisée en scanographie, surtout s’il existe uneascite. Elle traduit l’infiltration plus ou moins complète du tablierépiploïque situé entre la paroi abdominale antérieure, le côlontransverse et les anses grêles. L’aspect réalisé peut aller d’une simpledensification de la graisse jusqu’à l’épaississement nodulaireconduisant dans les atteintes massives à de véritables « gâteauxépiploïques » (fig 9) où toute structure graisseuse a disparu,entièrement remplacée par des éléments tissulaires. Cet aspect n’estpas spécifique de la tuberculose. Le diagnostic différentiel avec lacarcinomatose péritonéale peut se révéler délicat. Dans ce contexte,l’analyse des contours externes de l’infiltration est importante[26, 32, 51]. Ainsi, des contours externes épais et irréguliers plaidentdavantage en faveur d’une atteinte carcinomateuse. En revanche, laprésence d’une ligne fine entourant la région infiltrée et lui conférantun aspect bien limité est en faveur d’une atteinte tuberculeuse. Cetteligne correspond à une fibrose périlésionnelle témoin d’uneévolution lente et chronique.

¶ IRM

Les anomalies péritonéales observées en IRM sont superposables àcelles mises en évidence en TDM : épaississement des feuilletspéritonéaux, du tablier épiploïque et infiltration nodulaire (fig 10)ou stellaire du mésentère associé à l’ascite (fig 11).

Les séquences qui semblent le mieux adaptées à l’étude du péritoinesont les séquences rapides car elles diminuent les artefacts liés auxmouvements respiratoires, au péristaltisme intestinal et auxpulsations cardiaques.

Les séquences T1 avec saturation de graisse s’avèrent égalementintéressantes car, en supprimant l’hypersignal de la graissemésentérique, elles facilitent la détectabilité des lésions. L’injectionintraveineuse d’un agent de contraste paramagnétique améliore enrègle générale la sensibilité de l’IRM.

TUBERCULOSE GANGLIONNAIRE [4, 16, 17, 25, 26, 32, 39, 44, 55, 59]

Les localisations ganglionnaires sont parmi les plus fréquentes deslocalisations abdominales, mais elles sont souvent latentes. Elles sontfréquemment associées à un autre foyer pleuropulmonaire,péritonéal, digestif ou hépatosplénique. Il est à noter que chez lespatients positifs au virus de l’immunodéficience humaine (VIH), lacoexistence d’une atteinte ganglionnaire et d’une atteinte spléniqueest observée dans environ 70 % des cas.Les formes ganglionnaires pures sont rares et soulèvent desproblèmes de diagnostic différentiel.

¶ Échographie

Les adénopathies intéressent préférentiellement les ganglionsviscéraux : mésentériques, péripancréatiques, épiploïques etpédiculaires hépatiques. Cette distribution est en rapport avec ledrainage lymphatique à partir du foie ou du grêle.Les ganglions rétropéritonéaux sont relativement épargnés au moinsau début de l’affection. En fait, au cours de la tuberculose avancée,toutes les chaînes peuvent être intéressées.L’aspect échographique des adénopathies est variable. Il peut êtrehypoéchogène, échogène homogène, mixte ou calcifié. Seuls les deuxderniers aspects sont évocateurs de la tuberculose (fig 12).Les adénopathies sont généralement multiples, de taille variable,pouvant être groupées en amas confluants, réalisant parfois unemasse polycyclique.

¶ Tomodensitométrie

Le diagnostic TDM des adénopathies tuberculeuses repose surl’étude topographique et morphologique.La TDM confirme la distribution périvasculaire des adénopathiesqui apparaissent soit sous forme de structures nodulaires de petitetaille, soit sous forme de gros nodules généralement supérieurs à15 mm, disséminés, soit encore sous forme d’un magmad’adénopathies conglomérées.

9 Tomodensitométrie.Important épaississementdu tablier épiploïque : « gâ-teau épiploïque ».

10 Imagerie par résonancemagnétique en séquencepondérée T1 avec gadoli-nium. Multiples nodules etmicronodules en hyposignalà rehaussement annulairepar endroits, parsemant lemésentère.

11 Imagerie par résonancemagnétique en séquencepondérée T2. Coupe axiale.Ascite avec infiltration de lagraisse mésentérique.

12 Échographie. Adénopathies d’échostructure mixte au niveau du hile hépatique.

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La densité des adénopathies est variable. L’aspect typique associeune hypodensité centrale signant la présence de caséum ou denécrose, et une paroi inflammatoire se rehaussant après injection decontraste endoveineux (fig 13). Cet aspect est hautement évocateurde l’origine tuberculeuse. Cependant, il n’est pas pathognomonique.L’hypodensité peut être liée à une nécrose tumorale ou à uneinfiltration graisseuse ; ainsi, elle peut se rencontrer au cours desadénopathies métastatiques, des lymphomes abdominaux traités parchimiothérapie et au cours de la maladie de Whipple [4, 25, 32, 39].Par ailleurs, le rehaussement annulaire peut s’observer au cours desinfections à M. avium intracellulaire survenant chez les maladesatteints de sida.Certaines localisations peuvent rendre plus délicate l’interprétationTDM, c’est le cas des adénopathies confinées à la régionpéripancréatique qui peuvent simuler une tuméfaction pancréatiqueet soulever un problème de carcinome.

¶ IRMEn IRM, les adénopathies prennent volontiers un aspect nécrosé etapparaissent en hyposignal sur les séquences pondérées T1, enhypersignal sur les séquences pondérées T2 avec un rehaussementgénéralement en « couronne » après injection de contraste veineux,donnant une image en « cible » (fig 14). Un aspect lésionnelparticulier est retrouvé dans nos observations ; il réalise sur lesséquences pondérées T2 une image hyperintense en périphérie et demoindre intensité au centre (fig 15). Cet aspect, sans doute enrelation avec l’évolution du contenu caséeux, n’a pas été signalé ànotre connaissance dans d’autres atteintes ganglionnaires d’originenon tuberculeuse.Nous pensons que l’association d’un hyposignal central sur lesséquences pondérées T2 et d’un rehaussement en « cible » est trèsévocatrice de tuberculose.

TUBERCULOSE INTESTINALE [13, 14, 25, 31, 32, 43]

Elle peut intéresser tous les segments du tube digestif, mais ellesiège préférentiellement au niveau de la région iléocæcale (80 % descas). Cette prédominance est expliquée par la richesse de la région

en éléments lymphoïdes, le ralentissement du transit, la relativestase physiologique au niveau de l’iléon terminal, l’intensité del’absorption intestinale et le pH alcalin favorable au développementdu BK.Le diagnostic de tuberculose intestinale peut être établi par lesexplorations conventionnelles barytées qui restent indispensablespour l’étude endoluminale et muqueuse. La TDM, quant à elle,constitue l’examen de choix pour l’évaluation de l’atteinte pariétale,l’extension péridigestive et pour la mise en évidence descomplications.

¶ Opacifications barytéesElles apportent des arguments importants d’orientationdiagnostique.

Au niveau iléocæcal

Les aspects radiologiques sont variables et dépendent du stadeévolutif de la maladie. Ainsi, au début, on peut noter une iléitefolliculaire qui traduit l’hypertrophie des follicules lymphoïdes etqui réalise des images lacunaires uniques ou multiples arrondies ouovalaires donnant un aspect clouté à la muqueuse. Il s’y associesouvent des troubles fonctionnels à type d’hypertonie etd’hyperkinésie.Ces lésions de début sont rarement rencontrées ; en effet, latuberculose intestinale est en règle générale diagnostiquée à un stadeplus avancé, celui des ulcérations, des sténoses et des rétractions.De taille et d’aspect variables, le plus souvent à grand axelongitudinal, les lésions ulcéreuses sont plus fréquentes au niveaude l’iléon terminal (fig 16). Au niveau du cæcum, elles sontvolontiers peu profondes, irrégulières et transversales.

13 Tomodensitométrie.Nombreuses images arron-dies hypodenses à rehausse-ment annulaire, de siège pé-rivasculaire : périaortiques,pré- et rétrocaves.

14 Imagerie par résonancemagnétique en séquencepondérée T2 avec gadoli-nium. Coupe coronale. Re-haussement en « cible » desadénopathies abdominales.

15 Imagerie par résonancemagnétique en séquencepondérée T2. Coupe axiale.Plusieurs formations nodu-laires mésentériques, laté-roaortiques et rétrocaves, designal hétérogène, hypo-intense au centre et de si-gnal élevé en périphérie.

16 Transit du grêle : grosse ulcérationde l’iléon terminal qui est rétréci. Trajetsfistuleux borgnes sur le bord mésentéri-que. Défaut d’expansion cæcale.

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L’inflammation, la fibrose et l’épaississement pariétal peuventréduire la lumière intestinale de manière étendue ou localisée. Lessténoses peuvent être uniques ou multiples et sont le plus souventprogressives et centrées. Typiquement, la sténose intéresse lesegment prévalvulaire de l’iléon terminal. Elle est généralementcourte et rigide, responsable d’une dilatation d’amont.Les rétractions surviennent soit spontanément, soit sous l’effet dutraitement antituberculeux. Elles prédominent au niveau du cæcumet aboutissent à des raccourcissements et des déformationscaractéristiques (fig 17) en « entonnoir » ou en « bourse » quipeuvent, dans les cas extrêmes, disparaître complètement. L’iléon secontinue directement dans le côlon ascendant.La région iléocæcale est le siège électif des fistules qui peuvent êtreborgnes ou communiquer avec un organe de voisinage digestif ouextradigestif. Le trajet fistuleux est plus ou moins long, rectiligne,tortueux ou ramifié.Le principal diagnostic différentiel de la tuberculose iléocæcale sefait avec la maladie de Crohn. Il est impossible de séparer les deuxaffections sur les seules données du lavement baryté et/ou du transitdu grêle. Le scanner semble un bon moyen diagnostique dans cescas [40].

Au niveau des autres segments

L’atteinte colique isolée est rare. Elle ne représente que de 2 à 9 %des cas. Elle intéresse plus le côlon droit et transverse que le côlongauche. La forme sténosante est la plus fréquente. Devant cet aspectet compte tenu de la fréquence élevée de l’atteinte néoplasiquecolique, c’est cette dernière qui est généralement évoquée. Lediagnostic de tuberculose reste une surprise anatomopathologique.L’atteinte gastrique se fait généralement à partir des ganglionspérigastriques. Elle prédomine au niveau de la région antro-pylorique [25, 32]. Ceci s’explique par la richesse lymphatique à ceniveau.Les images d’ulcérations sont les plus fréquentes. Elles sont souventinterprétées comme malignes en raison de leur grande taille et deleur aspect. Certains signes peuvent aider dans l’orientationdiagnostique : la relative conservation du péristaltisme gastrique, lavariation des aspects et l’extension au duodénum.L’atteinte duodénale prédomine au niveau de D1. L’aspect peut êtrecelui d’un ulcère banal ou bien d’une sténose pyloroduodénale avecdilatation gastrique.

¶ ÉchographieElle peut apprécier :

– l’épaississement pariétal digestif qui est généralement modéré,inférieur à 2 cm, régulier, symétrique, hypoéchogène localisé ou

multifocal. Il prédomine au niveau de la région iléocæcale. Il réalise,selon le plan de coupe, la classique image en « cible » ou en« sandwich » ;

– la mobilité des anses qui est diminuée, voire absente ;l’agglutination des anses et leur accolement à la paroi abdominaleantérieure ;

– la dilatation des anses en amont d’une sténose : éventualité rare ;

– la présence d’éventuelles complications telle qu’une collectionabcédée ou une péritonite.

¶ TomodensitométrieCet examen permet d’établir un bilan d’extension de la maladie. Ilrenseigne sur les anomalies pariétales digestives, apprécie l’état del’environnement péridigestif et détecte d’éventuelles complications.

– L’atteinte de la paroi digestive réalise un épaississement mural etcirconférentiel symétrique et modéré rétrécissant la lumière enregard (fig 18). Il peut être étendu ou localisé, se rehaussant de façonhétérogène après injection de contraste endoveineux, réalisant unaspect en « cible » (fig 19) ou en « double halo » avec un anneaucentral hypodense entouré d’un anneau périphérique hyperdense.

– L’atteinte mésentérique : l’extension à la graisse mésentérique estfacilement reconnue en TDM par la perte de la transparence normalede la graisse qui devient dense. Il s’y associe souvent desadénopathies locorégionales.

– Les signes d’engorgement vasculaire : au cours de la tuberculosepéritonéale, il se produit des modifications vasculaires à type decongestion vasculaire bien démontrée par le scanner spiralé, et setraduisant par des dilatations vasculaires réalisant des bandesparallèles plus ou moins larges et rectilignes (fig 20).

– Les fistules : celles-ci sont faciles à mettre en évidence si ellescontiennent du produit de contraste ou de l’air (fig 21). Les fistulesentérocutanées sont très bien explorées par les coupes TDM réaliséesaprès fistulographie.

– Les collections abcédées : ce sont les fistules qui sont généralementà l’origine de ces abcès. Leur localisation est variable : mésentérique,rétropéritonéale, pelvienne, musculaire ou pariétale. Elles setraduisent par des masses de densité liquidienne se rehaussant en« couronne » (fig 22) pouvant comporter parfois des clartés aériques.Le scanner permet le drainage percutané des abcès et le contrôleprécis après traitement.

17 Lavement baryté. Importante rétrac-tion cæcale avec rétrécissement régulierde l’iléon terminal prévalvulaire.

18 Tomodensitométrie. Ré-trécissement pariétal modéréet régulier de la dernièreanse iléale.

19 Tomodensitométrie. Épaississementpariétal du cæcoascendant qui est rehausséen « cible », et associé à des adénopathieslocales.

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Ces signes TDM ne sont pas spécifiques de la tuberculose. Ilspeuvent également se rencontrer au cours de la maladie de Crohn.Certains éléments permettent cependant de pencher vers l’une oul’autre affection. En faveur de la tuberculose on retient :

– l’absence d’ulcérations profondes ; celles-ci témoignent ducaractère transmural de l’atteinte inflammatoire observéegénéralement au cours du Crohn ;

– le caractère modéré de l’infiltration de la graisse péricolique etmésentérique ; celle-ci est très importante au cours du Crohn,prenant parfois un aspect pseudotumoral refoulant les ansesdigestives à son contact ;

– la fréquence moins élevée des fistules par comparaison avec leCrohn ;

– le caractère nécrosé des adénopathies et leur taille généralementplus grande que celle observée au cours du Crohn.

¶ IRM

Elle a longtemps été d’un intérêt limité dans l’étude du tractusgastro-intestinal en raison notamment des artefacts de mouvement.L’apparition de séquences rapides permettant le raccourcissementdu temps d’examen et l’obtention de coupes en apnée ainsi quel’utilisation de contraste ont été évaluées. L’injection d’air rétrogradedans le tube digestif apparaît convenable [13, 14]. Elle permet dediminuer le péristaltisme intestinal.La tuberculose intestinale est bien imagée en IRM, notamment surles séquences pondérées en T2 avec saturation de graisse et injectionde gadolinium. On peut ainsi évaluer l’étendue des lésions,l’épaississement pariétal, et apprécier l’intensité du rehaussementdigestif qui dépend du degré inflammatoire [36].

L’IRM permet également d’analyser l’environnement péridigestif, devisualiser les fistules et de détecter les abcès.

TUBERCULOSE HÉPATIQUE [2, 11, 16, 34, 37, 38, 41, 42, 49, 55]

La tuberculose hépatique est la plus fréquente des granulomatoseshépatiques d’origine infectieuse. Elle peut être primitive, survenantde façon isolée en l’absence d’antécédents tuberculeux et sans autreatteinte associée décelable. Cette forme est rarissime même en paysd’endémie. Elle réalise souvent des aspects trompeurspseudotumoraux. L’imagerie ne permet pas d’établir le diagnostic,par ailleurs délicat. Elle permet toutefois de guider les biopsies dontl’étude anatomopathologique peut seule fournir un diagnostic decertitude.

La forme secondaire est plus fréquente. Elle accompagne unetuberculose généralisée ou localisée à un autre organe. Elle nesoulève que peu de problèmes de diagnostic.

¶ Échographie

La forme miliaire est généralement sans traduction échographique,tout au plus peut-on noter une accentuation de l’échogénicitéhépatique. Dans certains cas cependant, on peut mettre en évidencedes micronodules de taille inférieure à 2 mm, hypoéchogènes,parsemant le parenchyme hépatique et lui conférant un aspect« clouté » (fig 23).

La forme macronodulaire appelée tuberculome réalise des lésionsfocales uniques ou multiples, d’échogénicité variable, le plussouvent hypoéchogène homogène, dont la taille varie généralementde 1 à 3 cm, et pouvant comporter parfois des calcifications.

La forme abcédée ressemble à un abcès à pyogène ou parasitaire.Elle réalise une formation liquidienne contenant de faibles échosinternes, et entourée d’une épaisse coque hyperéchogène [55].

¶ Tomodensitométrie

La miliaire tuberculeuse peut se traduire parfois sous formed’hypodensités punctiformes ne se rehaussant pas après injectionde contraste endoveineux (fig 24).

L’aspect TDM du tuberculome hépatique est variable et nonspécifique. Il apparaît comme une lésion circonscrite isolée ou non,généralement hypodense, se rehaussant modérément en périphérie.

20 Tomodensitométrie.Épaississement pariétal del’iléon terminal associé àune dilatation vasculairesous forme de bandes paral-lèles et rectilignes : conges-tion vasculaire.

21 Tomodensitométrie.Collection abcédée au con-tact du cæcoascendant avectraînée dense au sein de lagraisse et des muscless’étendant à la peau et com-portant des images aéri-ques. Noter l’abcès des par-ties molles postérieuresdroites.

22 Tomodensitométrie.Épaississement pariétalde la jonction iléocæcale re-haussée par le contraste vei-neux, associé à une collec-tion abcédée péridigestivese rehaussant en périphérie.

23 Échographie. Foie hété-rogène siège de micronodu-les hypoéchogènes et d’unepetite calcification intrapa-renchymateuse.

24 Tomodensitométrie.Miliaire tuberculeuse : mi-cronodules hypodenses dufoie associés à des adénopa-thies en « cible » du hile hé-patique.

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Il peut être également hyperdense, homogène ou hétérogène, avecou sans rehaussement, pouvant comporter parfois des calcifi-cations [11, 55] (fig 25).La variabilité des aspects scanographiques reflète les différentesétapes de l’évolution du tuberculome, allant du tissu granulomateuxavec ou sans nécrose caséeuse à la calcification et à la fibrose dans laphase tardive [34].

¶ IRM

Cet examen est capable de montrer les différences histologiquesentre le centre des lésions et leur périphérie [35] ; ainsi, il a l’avantagepar rapport à la TDM de séparer la nécrose caséeuse centrale destissus granulomateux périphériques sans utilisation de contrasteveineux.L’aspect IRM des lésions hépatiques tuberculeuses est variable etchange au cours de l’évolution de la maladie [35] ; Ainsi, les lésionspeuvent être en hyposignal en T1 et T2 par rapport au parenchymehépatique sain, en hyposignal T1 et en isosignal T2 [43], en hyposignalT1 et hypersignal T2 [35], et enfin en hypersignal T1 et T2, avec ousans anneau périphérique. Celui-ci apparaît en hyposignal sur toutesles séquences, prenant parfois un aspect concentrique, se rehaussantou non après injection de contraste paramagnétique.Comme pour les adénopathies, l’atteinte tuberculeuse hépatique laplus évocatrice semble celle associant une lésion hyperintense enpériphérie, de moindre intensité au centre sur les séquencespondérées T2 (fig 26), et qui se rehausse en périphérie après injectionde contraste endoveineux (fig 27).Les données de l’échographie, de la TDM et de l’IRM ne sont passpécifiques et peuvent faire évoquer un abcès hépatique à pyogène

ou amibien, des métastases, un carcinome hépatocellulaire etd’autres tumeurs malignes ou bénignes nécrosées. Il existecependant certaines particularités en faveur du tuberculome, tellesque l’existence d’une nécrose au sein d’une masse de petit volume,fait relativement rare au cours des processus tumoraux, et laprésence d’adénopathies médiastinales ou abdominales avec lecaractéristique centre nécrosé.

En cas de persistance de doute diagnostique, la ponction-biopsiehépatique transpariétale à l’aiguille fine écho- ou scanoguidées’impose, évitant le recours à une laparotomie intempestive.

TUBERCULOSE VÉSICULAIRE [5, 25]

Quelques rares cas de tuberculose vésiculaire pseudotumorale ontété rapportés dans la littérature, se manifestant par unépaississement pariétal, des cloisons épaisses et des adénopathiesrégionales, et dont le diagnostic n’était réalisé qu’à l’étudeanatomopathologique.

TUBERCULOSE SPLÉNIQUE [18, 23, 31, 32, 58, 60]

L’atteinte splénique est fréquente et s’observe souvent au cours desmiliaires tuberculeuses multiviscérales, mais elle est en généralcliniquement latente.

L’atteinte primitive est rare et soulève de grandes difficultésdiagnostiques, notamment avec les processus tumoraux. En fait, leBK ne se localise jamais en premier lieu sur la rate ; la primo-infection est généralement ganglionnaire, thoracique ou abdominale,et c’est à partir de ces localisations initiales (complexe primaire) quele germe va regagner la voie sanguine ou lymphatique pouratteindre entre autres la rate. La tuberculose splénique est donc unemanifestation secondaire de la tuberculose, mais elle apparaîtprimitive en raison du silence clinique qui entoure le complexeprimaire et la primo-infection.

L’origine de la tuberculose splénique est hématogène. La voielymphatique reste peu probable, car pour concevoir cettepropagation lymphatique, il faudrait admettre l’envahissement àcontre-courant : on sait en fait que le cours de la lymphe va de larate aux ganglions spléniques et pancréatiques.

¶ Échographie

La forme miliaire est rarement diagnostiquée au stade précoce. Ellen’est découverte parfois qu’au stade séquellaire sous forme demicronodules calcifiés, volontiers associés à des calcificationshépatiques et ganglionnaires (fig 28). Le plus souvent, le seul signed’atteinte est une splénomégalie homogène.

La forme macronodulaire réalise un aspect pseudotumoral sousforme de lésions focales d’échogénicité variable, le plus souventhypoéchogènes sans renforcement postérieur (fig 29).

25 Tomodensitométrie.Tuberculome hépatique : leparenchyme hépatique estle siège d’une lésion focalehypodense comportant desmicrocalcifications.

26 Imagerie par résonancemagnétique en séquencepondérée T2. Coupe axiale.Présence de plusieurs lé-sions nodulaires infracenti-métriques hyperintenses enpériphérie et en hyposignalau centre : miliaire.

27 Imagerie par résonancemagnétique en séquencepondérée T1 après injectionde gadolinium. Rehausse-ment annulaire de plu-sieurs lésions hépatiquesinfracentimétriques prédo-minant au niveau du foiedroit.

28 Échographie. Le paren-chyme splénique est le siègede plusieurs images hyperé-chogènes correspondant àdes séquelles calcifiées detuberculose splénique.

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¶ Tomodensitométrie

Le rôle de la TDM dans l’orientation étiologique est modeste. Eneffet, les aspects lésionnels sont sans spécificité. C’est par laconfrontation avec les signes cliniques et biologiques et ladécouverte d’autres foyers tuberculeux que le diagnostic peut êtreévoqué.

La miliaire se traduit rarement par un aspect piqueté hypodense duparenchyme splénique (fig 30).

Les tuberculomes se présentent sous forme de lésions circonscritespouvant atteindre plusieurs centimètres, hypodenses par rapport auparenchyme splénique sain (fig 31) , faiblement rehaussés,comportant parfois une couronne périphérique hypercaptante [18].

À un stade avancé ou à l’état cicatriciel, les lésions se calcifient,réalisant des granulomes souvent multiples (fig 32).

En échographie comme en TDM, il faut rechercher systémati-quement d’autres sites pathologiques associés, notammenthépatiques, car l’atteinte hépatosplénique est quasi constante, mêmesi elle n’est pas toujours démontrée en imagerie.

¶ IRM

Les anomalies lésionnelles de la tuberculose splénique sont variablesen IRM ; il nous semble cependant que l’aspect le plus évocateur(fig 33) est celui déjà décrit au niveau du foie sur les séquencespondérées en T2.

TUBERCULOSE PANCRÉATIQUE [9, 15, 20, 21, 28, 32, 46, 57]

La tuberculose pancréatique est rare, avec moins de 5 % de casrapportés dans les séries autopsiques. Elle fait suite soit à uneinoculation hématogène, soit à une extension par contiguïté à partird’adénopathies avoisinantes. Elle est exceptionnellement primitive,de diagnostic dans ce cas purement histologique. Le plus souvent,elle est secondaire à une miliaire tuberculeuse, évoquée alors devantl’association d’autres anomalies digestives, péritonéales ethépatospléniques.Le tableau clinique n’est pas spécifique. Le bilan biologique peutrévéler une augmentation des concentrations sériques de l’insulineet du glucagon, une intolérance au glucose, une hyperamylasémieet une cholestase [9, 21].Le bilan échoscanographique montre un certain nombre de signesnon spécifiques plus ou moins associés :

– une tuméfaction du pancréas homogène ou hétérogène ;

– des lésions focales hypoatténuantes le plus souvent céphaliques ;

– une masse tissulaire parfois assez volumineuse pouvant infiltrerla graisse péripancréatique ;

– une masse kystique à contenu finement échogène.Ces anomalies pancréatiques peuvent s’associer à une thrombose dela veine splénique témoignant de la longue évolutivité et de lachronicité de l’affection [57], un engainement et/ou une compressiondu tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure, unecompression du bas cholédoque avec dilatation modérée d’amont,et des adénopathies péripancréatiques.Devant l’absence de contexte clinicoradiologique évocateur d’unetuberculose, les anomalies suscitées évoquent presque toujours unetumeur maligne pancréatique, entraînant dans ce cas unelaparotomie et parfois même une pancréatectomie dont seule l’étudehistobactériologique révèle le caractère tuberculeux. Ces difficultésdiagnostiques sont retrouvées dans la quasi-totalité des cas detuberculose pancréatique rapportés dans la littérature, ce quidémontre la nécessité d’y penser devant toute lésion pancréatiqueafin d’entreprendre les investigations adéquates qui évitent unechirurgie intempestive.Enfin, il ne faut pas méconnaître, chez un tuberculeux avéréprésentant des anomalies pancréatiques, la possibilité d’une

29 Échographie. Rate hé-térogène avec macronodulehypoéchogène de 18 mmde diamètre : tuberculome.

30 Tomodensitométrie.Miliaire splénique : la rateest parsemée de plusieurslésions micronodulaires hy-podenses.

31 Tomodensitométrie. Lésions macro-nodulaires « truffant » le parenchymesplénique : tuberculomes.

32 Tomodensitométrie.Séquelles calcifiées de tuber-culose splénique et gan-glionnaire.

33 Imagerie par résonancemagnétique en séquencepondérée en T2. Coupeaxiale. Lésions spléniquesmultiples de taille variable,en hypersignal périphériqueet en hyposignal central :aspect en « cible ».

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pancréatite concomitante ou d’une réaction allergique toxique dupancréas aux antituberculeux, comme déjà décrit dans certainscas [60].

Conclusion

Le diagnostic de tuberculose abdominale est toujours difficile àétablir car elle simule de nombreuses pathologies. Les données de

l’imagerie ne sont pas spécifiques mais leur corrélation aux donnéescliniques, biologiques et épidémiologiques oriente fortement lediagnostic.

Le scanner se révèle l’examen de choix pour une évaluation réelle del’extension de la maladie. Les opacifications digestives conventionnellesgardent leur indication dans les atteintes intestinales. Les remarquablesavancées de l’IRM en font une technique d’avenir tant pour lediagnostic que pour l’évaluation de l’acuité lésionnelle.

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33-010-A-30 Tuberculose abdominale Radiodiagnostic

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