TRIBUNE

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Journal de la FFE Avril-Mai-Juin 2010 En ce printemps 2010, Nicolas Sarkozy et l’UMP sont dans le dur. Déroute aux régionales, popularité en chute libre, déficits abyssaux et plan d’austérité budgétaire. La droite présente aux Français la facture de ses échecs économiques et politiques, mais se garde bien de toute remise en cau- se. Le bouclier fiscal est sauf. Privilégiés, réjouissez- vous ! Vous ne devrez accom- plir aucun ef- fort. Ce sera aux classes moyennes et populaires de s’y coller. Les premières mesures ont déjà été décidées, avec la disparition de la prime de 150 Euros à 3 millions de familles modestes, des bons d’achat de services à la personne et de la prime de solidarité active. Et bien pire est malheureusement à venir en termes d’action sociale et de pouvoir d’achat. La crise de l’Euro, profonde et durable, ne saurait dédouaner Nicolas Sarkozy de ses responsa- bilités. Il ruse, mêlant populisme et accents churchilliens. La sueur et les larmes, mais de qui ? Ce n’est pas la crise de l’Euro qui justifie la réforme des retraites préparée par François Fillon, mais bien un échec national. Celui des équipes UMP successives, de Jacques Chirac et des siennes, qui promet- taient l’équilibre financier des systèmes de retraites après la réforme de 2003. Résultat : 25 milliards de déficit ! La porte est désormais grande ouverte à une offensive contre la retraite à 60 ans. Travailler plus pour gagner moins, sans aucune attention à la pénibilité. La France de Nicolas Sarkozy est celle des inégalités revendiquées et suscitées. Des années difficiles nous atten- dent, aussi à l’étranger. Le service public français subit de plein fouet la politique de la droite. Le réseau consulaire est victime de coupes sombres, l’action sociale est sacri- fiée, les coûts de scolarité grim- pent, l’effort culturel extérieur se cherche des priorités! Le Prési- dent, prompt à bomber le torse, n’affiche aucune ambition sur le front de la citoyenneté européen- ne. Quelle action de l’Union en vue de la sécurité et de la représentation des communautés hors de l’Union ? Quel engagement consulaire avec les Etats de résidence dans l’Union ? Le projet comme le bilan sont inexis- tants. Deux ans. Deux ans avant d’aller devant les élec- teurs et gagner ! C’est long et court à la fois. Long par- ce qu’il faudra en- caisser le recul de l’action publique. Court parce que nous aurons tant à faire pour nous préparer. A l’étranger, il y aura plus d’un million d’électeurs à convaincre, à l’élection présiden- tielle et aux élections législatives. Notre projet fédéral sera présenté en fin d’année. Il s’inscrira dans le projet national du PS. Nos candi- dats aux législatives seront dési- gnés et pourront aller occuper le terrain dans les circonscriptions. C’est un effort de longue haleine, qui nous engage tous et que nous mènerons ensemble. Pierre-Yves Le Borgn’ Premier Secrétaire Fédéral Mai 2010 PLUS QUE DEUX ANS… Sommaire: P.1 Edito: Plus que deux ans… P.2 Elections, campagnes électorales: Suède P.3 Elections, campagnes électorales: Soudan P.4 Elections, commerce: Soudan (suite) Equilibre alimentaire mondial P.5 Commerce, Développement durable: Mozambique Le développement durable, un enjeu géopolitique de gauche P.6 FFE - Info, opinions Semestre chargé pour la FFE Egalité hommes-femmes P.7 Les sections, nouvelles du Monde : Section de Suède Europe P.8 Nouvelles du Monde : Les leçons de la crise de l’Euro P.9 Nouvelles du Monde : L’ indépendance de la justice en Suède Le réveil des Chines P.10 Nouvelles du Monde: Le réveil des Chines (suite) Le programme du PS Suisse P.11 Nouvelles du Monde : Sénégal : le monument de la renaissance africaine Kenya : projet de nouvelle constitution P.12 Nouvelles du Monde : Kenya (suite) Manifestation pour une réforme plus juste des retraites le 27 mai 2010 - photo PS

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Numéro printemps 2010

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Journal de la FFE Avril-Mai-Juin 2010

En ce printemps 2010, Nicolas Sarkozy et l’UMP sont dans le dur. Déroute aux régionales, popularité en chute libre, déficits abyssaux … et plan d’austérité budgétaire. La droite présente aux Français la facture de ses échecs économiques et politiques, mais se garde bien de toute remise en cau-se. Le bouclier fiscal est sauf. Privilégiés, réjouissez-vous ! Vous ne devrez accom-plir aucun ef-fort. Ce sera aux classes moyennes et populaires de s’y coller. Les premières mesures ont déjà été décidées, avec la disparition de la prime de 150 Euros à 3 millions de familles modestes, des bons d’achat de services à la personne et de la prime de solidarité active. Et bien pire est malheureusement à venir en termes d’action sociale et de pouvoir d’achat.

La crise de l’Euro, profonde et durable, ne saurait dédouaner Nicolas Sarkozy de ses responsa-bilités. Il ruse, mêlant populisme et accents churchilliens. La sueur et les larmes, mais de qui ? Ce n’est pas la crise de l’Euro qui justifie la réforme des retraites préparée par François Fillon, mais bien un

échec national. Celui des équipes UMP successives, de Jacques Chirac et des siennes, qui promet-taient l’équilibre financier des

systèmes de retraites après la réforme de 2003. Résultat : 25 milliards de déficit ! La porte est désormais grande ouverte à une offensive contre la retraite à 60 ans. Travailler plus pour gagner moins, sans aucune attention à la pénibilité. La France de Nicolas Sarkozy est celle des inégalités revendiquées et suscitées.

Des années difficiles nous atten-dent, aussi à l’étranger. Le service public français subit de plein fouet la politique de la droite. Le réseau consulaire est victime de coupes sombres, l’action sociale est sacri-fiée, les coûts de scolarité grim-pent, l’effort culturel extérieur se

cherche des priorités! Le Prési-dent, prompt à bomber le torse, n’affiche aucune ambition sur le front de la citoyenneté européen-

ne. Quelle action de l’Union en vue de la sécurité et de la représentation des communautés hors de l’Union ? Quel engagement consulaire avec les Etats de résidence dans l’Union ? Le projet comme le bilan sont inexis-tants.

Deux ans. Deux ans avant d’aller devant les élec-teurs et gagner ! C’est long et court à la fois. Long par-ce qu’il faudra en-caisser le recul de l’action publique. Court parce que nous aurons tant à faire pour nous

préparer. A l’étranger, il y aura plus d’un million d’électeurs à convaincre, à l’élection présiden-tielle et aux élections législatives. Notre projet fédéral sera présenté en fin d’année. Il s’inscrira dans le projet national du PS. Nos candi-dats aux législatives seront dési-gnés et pourront aller occuper le terrain dans les circonscriptions. C’est un effort de longue haleine, qui nous engage tous et que nous mènerons ensemble.

Pierre-Yves Le Borgn’

Premier Secrétaire Fédéral

Mai 2010

PLUS QUE DEUX ANS…

Sommaire:

P.1 Edito: Plus que deux ans…

P.2 Elections, campagnes

électorales: Suède

P.3 Elections, campagnes

électorales: Soudan

P.4 Elections, commerce: Soudan (suite)

Equilibre alimentaire

mondial

P.5 Commerce, Développement durable: Mozambique

Le développement durable,

un enjeu géopolitique de

gauche

P.6 FFE - Info, opinions

Semestre chargé pour la FFE

Egalité hommes-femmes

P.7 Les sections, nouvelles du Monde : Section de Suède

Europe

P.8 Nouvelles du Monde : Les leçons de la crise de l’Euro

P.9 Nouvelles du Monde : L’ indépendance de la justice en Suède

Le réveil des Chines

P.10 Nouvelles du Monde: Le réveil des Chines (suite)

Le programme du PS Suisse

P.11 Nouvelles du Monde : Sénégal : le monument de la renaissance africaine

Kenya : projet de nouvelle

constitution

P.12 Nouvelles du Monde : Kenya (suite)

Manifestation pour une réforme plus juste des retra ites le 27 mai 2010 - photo PS

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P A G E 2 E L E C T I O N S - C A M P A G N E S E L E C T O R A L E S

A quelques mois de l’élection législati-ve suédoise qui aura lieu le 19 septem-bre 2010, la candidate du parti social-démocrate suédois recueille des chif-fres désespérément bas dans les son-dages. Début avril, la chef des sociaux-démocrates n’engrangeait que 28% d’opinions positives quand son rival du parti conservateur, l’actuel Premier ministre Fredrik Reinfeldt, séduisait 56% des sondés. Même la nouvelle venue du parti écologiste, Maria Wet-terstrand, fait mieux que Mona Sahlin avec 51 % d’opinions positives (Sondages Sifo). Mona Sahlin est pour-tant une femme politique extrêmement rodée et l’on peut s’étonner d’une telle désaffection. Mona Sahlin a connu une carrière poli-tique imposante. En 1982, à seulement 25 ans, elle est devenue la plus jeune députée du Parlement. Elle a occupé par la suite plusieurs postes ministé-riels : ministre du travail (1990-1991 et 1998-2002), vice-premier ministre (1994-1995), ministre de l'égalité des sexes (1994-1995 et 2003-2004), mi-nistre de l'intégration (2000-2004) et ministre de l'environnement (2004-2006). Elle est depuis 2007 chef de file des sociaux-démocrates suédois. Son élection à la tête du parti social-démocrate n’a pas surpris les analys-tes, et notamment le politologue sué-dois Stig-Björn Ljunggren, qui estimait en 2007 que le choix de Mona Sahlin s’imposait logiquement après la défec-tion de Margot Wallström, alors com-missaire européenne populaire. Sahlin devenait la première femme à occuper ce poste. Sa nomination permettait d’opérer une rupture avec les années Persson, l’ancien Premier ministre criti-qué pour sa pratique individualiste du pouvoir. Grande amie d’Anna Lindh, personnalité dont le souvenir reste très vivace chez les Suédois (*), on pensait que la candidature de Sahlin permet-trait un regain d´adhésion populaire, alors que « l’affaire Toblerone », - qui l’avait poussée à la démission du gou-vernement en 1995 et obligée à une traversée du désert de trois ans -, était oubliée (Mona Sahlin avait alors acheté divers produits, loué des voitures et effectué des retraits par carte bancaire professionnelle pour son usage person-nel, avant de rembourser ses achats à

hauteur de 5300 euros). Cette désaffection des électeurs est difficile à comprendre. Au pouvoir de-puis quatre ans, les conservateurs pré-sentent un bilan critiquable et le souhait de l’alternance aurait pu profiter à la candidate de gauche. Mais bien que la socialiste ait engagé une politique d’u-nion avec le parti vert et les communis-tes, cela ne suffit pas à asseoir son autorité. Les qualités de son opposant politique Fredrik Reinfeldt expliquent en partie cette situation. Reinfeld est apprécié pour la manière dont il a répondu à la crise financière, qui a permis la sauve-garde des fondamentaux de l’économie tout en conservant la cohésion de son camp. Sous sa direction et pour la pre-mière fois dans l’histoire suédoise, un gouvernement conservateur a pu se maintenir au pouvoir durant toute une législature, ce qui renforce puissam-ment la crédibilité du Premier ministre. Récemment, Reinfeld a aussi bénéficié de l´effet de la présidence suédoise de l´Union européenne pour soigner son profil international. On reproche parfois à Mona Sahlin son exubérance. Quelques faux-pas média-tiques et une personnalité non confor-miste amplifient cette image. Son fa-meux « les sociaux-démocrates sont ceux qui trouvent que c’est génial de payer des impôts » (1994) a marqué les esprits. Les médias caricaturent facilement sa manière informelle de parler et de s’habiller et se plaisent à souligner sa « désinvolture ». Sahlin a par exemple essuyé les critiques lors-qu’en décembre 2007 elle choisit d’as-sister à un concert rock plutôt qu’au dîner des Nobelisés ou quand, en avril 2009, elle embrassa une femme sur la bouche pour célébrer la légalisation du mariage homosexuel. Son action au sein des gouvernements précédents est raillée par le pouvoir actuel. Récemment, Reinfeldt déclarait ne pas pouvoir se rappeler une réforme réussie de son adversaire en onze an-nées au gouvernement. Pourtant, c´est à Mona Sahlin que l´on doit notamment le renforcement des droits individuels des salariés dans les licenciements collectifs, la suppression des blocages syndicaux contre les PME, la promotion de l’énergie éolienne ou encore

l´amélioration des droits des locataires en cas de changement de propriétaire. Le principal défi de Sahlin consiste dé-sormais à savoir démontrer sa maîtrise globale de l’ensemble des thèmes poli-tiques. Avec un taux de chômage s’élevant à 9,1 % en février 2010, la question de l’emploi en Suède sera déterminante lors du scrutin de septembre. Mona Sahlin ne propose aujourd’hui qu’un retour aux solutions classiques prônées par son parti, avec une politique prag-matique en matière d´emploi qui ne varie guère de celle proposée par Gö-ran Persson aux élections législatives perdues de 2006. Celle-ci consiste à conjuguer des baisses d’impôts ciblées et des limitations d’allocations sociales avec une hausse des salaires lors des premières embauches. Selon plusieurs commentateurs politi-ques, les deux coalitions qui s’oppo-sent, - celle de Fredrik Reinfeldt (droite modérée + parti libéral + démocrates chrétiens + centristes) et celle de Mona Sahlin (sociaux-démocrates + verts + communistes) - ne proposent pas de politiques résolument nouvelles. Le résultat du vote pourrait dépendre des personnalités et de leur capacité à convaincre du potentiel d’innovation de leur programme politique. Pour recueil-lir la confiance des Suédois, Fredrik Reinfeldt dispose aujourd’hui d’une véritable longueur d’avance. Il reste quelques mois à Mona Sahlin pour rat-traper ce retard en élaborant une stra-tégie efficace. Si, dès sa nomination, Sahlin s’est heurtée à une certaine op-position au sein de son parti, elle est aujourd’hui créditée du fort soutien du mouvement syndical et du monde du travail. Pour peu que son parti la sou-tienne plus franchement, comme l’es-père le journal Aktuellt i politiken, elle pourra peut-être regagner la popularité qui lui fait défaut. (*) Anna Lindh fut l´ancienne ministre des affaires étrangères sous le gouver-nement Persson. Elle a été assassinée le 11 septembre 2003 par un détraqué. Yann LONG, FFE, Section de Suède

MONA SAHLIN, PREMIER MINISTRE SUÉDOIS EN SEPTEMBRE 2010 ?

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accordées pour dire que ces élections ne répondaient pas pleinement aux stan-dards internationaux mais que les vain-queurs de ces élections seraient recon-nus. Selon la mission de l’Union Euro-péenne, ces élections ont même ouvert un ‘espace de démocratie’. De fait, Omar al Beshir, confirmé et légitimé comme guide du peuple soudanais, a été reconnu sans difficulté par les gou-vernements occidentaux.

On peut s’interroger alors sur l’utilité ou l’intégrité des observateurs électoraux, et des Etats tiers en général. En effet, le gouvernement de Beshir verrouille le jeu démocratique au Soudan depuis son accession au pouvoir par coup d’Etat en 1989. Il a laissé une marge de manœu-vre mesurée à certains partis politiques, mais pose les limites à ne pas dépasser. Le jeu démocratique et la vie civique sont contrôlés depuis la base, et Omar al Beshir a eu le temps depuis 1989 de fourbir ses armes : un parti gouverne-mental -le National Congress Party (NCP)-, omniprésent ; une presse majo-ritairement acquise au NCP et régulière-ment muselée (emprisonnement de jour-nalistes et fermetures de journaux, com-me cela est le cas actuellement pour les journalistes et journaux ayant critiqué trop ouvertement le déroulement des élections) ; des assemblées de quartier, nommées comités populaires, théorique-ment élues et officiellement destinées à gérer l’interface entre le pouvoir central et local et les habitants. Ces comités populaires peuvent avoir un pouvoir tout à fait significatif puisqu’ils gèrent des questions telles que l’accès aux services publics et privatisés, leur gestion et leur entretien, l’accès à la propriété foncière, etc. Ces comités sont en fait la plupart du temps des émanations locales du parti gouvernemental et leur pouvoir dépend de leur connexion avec les déci-deurs politiques et les membres haut placés du parti. Parallèlement, la sécuri-té intérieure est particulièrement active et présente, et musèle efficacement l’ex-pression de l’opinion publique. Ce ver-rouillage structurel a été renforcé de façon conjoncturelle après que fut déli-vré par la Cour Pénale Internationale le mandat d’arrêt en mars 2009 accusant

Du 11 au 15 avril 2010 ont eu lieu toute une série d’élections au Soudan. La plus médiatisée fut l’élection présidentielle, mais dans son ombre se sont déroulées les élections parlementaires nationales ainsi que nombre d’élections fédérales (gouverneurs, parlements des états fé-dérés). L’élection du Général Omar al Beshir, au pouvoir depuis le coup d’état de 1989, faisait peu de doute et le vérita-ble enjeu, si enjeu il y a eu, est certaine-ment à chercher ailleurs.

Les commentateurs et observateurs se sont accordés sur un point : la complexi-té de ces élections. Ont eu lieu : des élections présidentielles nationales, rem-portées à 68% par Omar al Beshir et des élections présidentielles pour le Sud Soudan, région semi-autonome depuis l’accord de paix global signé en janvier 2005 mettant fin à la guerre civile entre Nord et Sud Soudan. Salva Kiir a lui aussi été confirmé (93%) à la fonction de président du Sud Soudan et donc de premier Vice Président du Gouverne-ment d’Unité Nationale. Des élections parlementaires nationales, des élections parlementaires dans chaque état fédéré et l’élection du gouverneur dans chaque état fédéré

Les élections ont confirmé l’assise (ou l’emprise) des deux partis signataires de l’accord global de paix en 2005, le Natio-nal Congress Party d’Omar al Beshir au Nord et le Sudan People’s Liberation Movement de Salva Kiir au Sud. Ces élections ont représenté un défi à plu-sieurs titres : premières élections natio-nales multipartites depuis plus de deux décennies ; multiplicité des niveaux d’é-lection et complexité du vote dans un pays où l’illettrisme est estimé à 40% chez les adultes au Nord Soudan (il n’existe pas d’estimations pour le Sud Soudan mais les chiffres sont sans au-cun doute bien plus élevés) ; régions difficilement accessibles en raison de contraintes physiques (manque d’infras-tructures dans les régions périphériques Sud et Ouest) et insécurité (Darfour et Sud Soudan). La communauté internationale a dépê-ché sa cohorte d’observateurs (Fondation Carter, Union Européenne, et Union Africaine) pour observer le dérou-lement du processus électoral, avec pour but de décourager et limiter les fraudes et mauvaises pratiques. Les missions d’observation de la Fondation Carter et de l’Union Européenne se sont

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le président Omar el-Béchir de crime contre l’humanité et de crime de guerre. Ainsi, à Khartoum, le contrôle du jeu politique s’est encore renforcé au cours de l’année passée (menace contre des opposants et des défenseurs des droits de l’homme, exil d’une partie d’entre eux). Enfin, à quelques jours des élec-tions, les principaux opposants à Omar el Beshir, dont Yasser Arman, candidat du SPLM, se sont retirés de la course à la présidence et ont boycotté les élec-tions. Ce boycott est semble-t-il le résul-tat de négociations entre les deux princi-paux partis, le SPLM laissant le Nord au NCP et le NCP laissant le Sud au SPLM… Le suspens n’était donc pas de mise à la veille des élections. A l’issue du vote et lors de l’annonce des résul-tats provisoires, les cadres du parti diri-geant ont renouvelé leur allégeance au président et déclaré que désormais, le président est le représentant légal du peuple dans son ensemble. Toute atta-que contre lui sera désormais une atta-que contre le peuple. Voilà comment Omar al Beshir a répondu à l’accusation portée contre lui par les procureurs de la Cour de La Haye. Dans ce contexte, au-delà de l’observation formelle des procé-dures électorales, on peut s’interroger sur le réel objectif poursuivi par la com-munauté internationale, si ce n’est cau-tionner la régénérescence politique d’O-mar el Beshir.

Ce qui préoccupe ici la communauté internationale n’est pas la démocratie, mais bien la stabilité régionale. Les gou-vernements étrangers et institutions in-ternationales ont salué la tenue des élections, le peu de débordements au-quel celles-ci ont donné lieu, et se sont félicités de cette étape supplémentaire franchie dans la mise en application de l’accord de paix global, l’ultime étape étant le référendum d’autodétermination du Sud Soudan en janvier 2011. Et c’est bien cet horizon que tout le monde re-garde.

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LES ÉLECTIONS AU SOUDAN : ET SI LE VÉRITABLE ENJEU ÉTAIT AILLEURS ?

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E L E C T I O N S - C O M M E R C E P A G E 4

L’angoisse de la réémergence des pénu-ries alimentaires a fait son apparition sur la scène internationale, accompagnant celle de la gestion de l’eau à l’échelle régionale. Le concept de « sécurité ali-mentaire » est devenu efficient ces der-nières années pour nombres de pays, au même titre que celui de « sécurité énergétique ».

Daewoo logistics, multinationale Sud-Coréenne, proposa à Madagascar de lui louer, selon les informations non confir-mées qui circulent, 1,300 millions d’hec-tares dans le Moyen Ouest de l’île, soit une surface équivalente à la moitié de la Belgique, pour y faire de la culture inten-sive. Daewoo proposait un troc : la terre contre la remise d’une partie des récol-tes (10%), la construction des infrastruc-tures sur toute la région concernée et la création de milliers d’emploi de journa-liers. Pour un pays « dans la difficulté », La proposition était tentante. Le prési-dent d’alors, Marc Ravalomanana, y céda, moyennant sans doute un intéres-sement personnel consistant. Ce sera une des causes de sa violente disgrâce populaire et de son éviction, entraînant la disparition du projet.

Les Saoudiens sont venus à Tananarive l’an passé pour proposer de capter l’eau douce du fleuve Faraony, dans une des grandes régions du Sud-Est de la gran-de île, région très humide, pour la trans-porter par bateaux citernes dans leur péninsule, ceci moyennant finance bien

entendu. Le gouvernement « actuel » a annoncé prudemment que le projet était à l’étude.

Voici quelques mois, lors d’une mission à l’île Maurice avec le Sénateur Richard Yung, nous avons rencontré le ministre des affaires étrangères. Celui-ci regret-tait la persistance de la crise politico-sociale à Madagascar et surtout l’instabi-lité chronique de la grande île qui l’em-pêchait d’être le grenier à riz et le jardin des îles sœurs, Maurice et la Réunion qui représentent deux marchés impor-tants à l’échelle régionale. Faute de pou-voir « s’installer » à Madagascar, les Mauriciens viennent de passer un ac-cord avec le Mozambique pour l’exploi-tation de plusieurs milliers d’hectares sur leur territoire, sur le « mode Daewoo ».

Ces trois exemples introduisent plu-sieurs questions d’ordres différents: Cel-le de la possession de la terre, au sens culturel et cosmogonique, celle de la souveraineté d’un pays sur son territoire et celle de la définition des biens com-merciaux à l’échelle planétaire.

Les Malgaches entretiennent une rela-tion fusionnelle et sacrée avec leur terre, terre des ancêtres que l’on se doit de conserver comme un patrimoine familial. Il est quasiment impossible à un étran-ger d’être propriétaire dans la grande île. La terre malgache appartient aux malga-ches. Pour des raisons culturelles, il sera difficile de « louer » des terres culti-

vables dans certains pays.

Mais sur le principe, plus largement, est-il concevable que se créent des situa-tions où un pays « exploiterait » une surface importante d’un autre pays, quand bien même il le dédommagerait. Ne risque-t-on pas de voir se mettre en place des rapports d’occupation écono-mique de certains pays (les pays peu développés possédant des terres culti-vables) par d’autres plus fortunés. No-tons encore que les populations repré-senteront une main d’œuvre bon marché exploitable à l’envie compte tenu de la très grande faiblesse de la législation du travail dans les pays du Sud.

Enfin peut-on considérer que tout est commercialisable ? Y compris nos dé-chets, dont on ne sait que faire et que l’on dépose de temps à autre sur le continent africain ? Y compris la surface terrestre cultivable des Etats, y compris l’eau des rivières d’un pays ? Après les avoir politiquement colonisés pour un temps, les pays riches vont-ils ainsi pro-gressivement recoloniser économique-ment les pays du Sud?

Sources : Courrier International n°1003 et expertise de l’auteur.

Jean-Daniel Chaoui

Tananarive-Madagascar

Equilibre alimentaire mondial : la terre et l’eau s ont-elles des matiè-res premières commercialisables ?

Les élections au Soudan : et si le véri-table enjeu était ailleurs suite

Le Sud Soudan, selon toute probabilité, devrait se prononcer pour l’indépendan-ce, alors que le gouvernement d’Unité Nationale réalise ‘soudainement’ le profit qu’il tire du Sud Soudan et de son pétro-le… « Il faut rendre l’unité attractive », voilà le nouveau slogan du gouverne-ment depuis les élections, martelant par

ailleurs que le référendum aura bien lieu en temps et en heure. Mais l’incertitude est totale concernant la réaction du gou-vernement du Nord Soudan en cas de majorité prononcée en faveur de l’indé-pendance. La nombreuse population Sud Soudanaise installée à Khartoum, déplacée par les combats, l’insécurité, les famines ou la misère, attend avec angoisse et impatience cette échéance, qui leur donnera une occasion de s’ex-primer face à un régime autoritaire et

discriminant mais qui rend également extrêmement incertaine et fragile leur présence dans la capitale du Nord. Le Sud Soudan, lui, trépigne… mais conti-nue à se déchirer… La stabilité et la consolidation de la paix méritent des compromis, et elles en sont d’ailleurs le fruit, mais était-il besoin pour la commu-nauté internationale de cautionner une nouvelle fois le carnaval démocratique ?

A. M. , FFE

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C O M M E R C E - D E V E L O P P E M E N T D U R A B L E P A G E 5

L’interruption générale du trafic aérien européen, en application du principe de précaution, est venu nous rappeler combien nos technologies et notre mo-de de vie sont vulnérables et sensibles aux phénomènes naturels, et combien les causes et les effets environnemen-taux sont mondialisés.

Aujourd’hui, la croissance verte et le développement durable sont devenus des enjeux géopolitiques, dans les-quels la France, ses grandes entrepri-ses et ses collectivités locales sont particulièrement impliquées, avec des objectifs économiques et diplomati-ques qui doivent nous interpeller, en tant que Français de l’étranger por-teurs de valeurs de gauche.

La conférence de Copenhague sur le climat n’a malheureusement pas per-mis d’aboutir à un véritable accord sur la répartition mondiale de la baisse des émission des gaz à effets de serre, de la consommation d’énergie et du déve-loppement des énergies renouvelables - solaire, géothermique, biomasse, éolien -, mais elle a souligné la mobili-sation de la société civile.

Les opinions publiques attendent des responsables politiques et des entre-prises des engagements forts pour limiter les gaspillages de ressources naturelles, proposer des produits éco-logiques et sobres, réduire les consommations et les factures énergé-tiques, lutter contre les crises alimen-taires et climatiques. Cette prise de conscience a fait émerger un verdisse-

ment de l’offre politique, une nouvelle démarche de consommation et de dé-placements et une exigence de solida-rité mondiale.

Face à ces mutations, les représen-tants de la France ont un double dis-cours, que je me refuse à cautionner : D’une part, lors du Grenelle de l’envi-ronnement pendant la Présidence fran-çaise de l’Europe ou avant Copenha-gue, un « sarkozysme verbal » qui fai-sait du changement climatique le nou-veau paradigme des relations interna-tionales : objectifs supérieurs aux en-gagements européens pour 2020, sou-tien annoncé aux objectifs du Millénai-re de l‘ONU ou affirmation du droit des populations à la gouvernance de leurs ressources naturelles.

D’autre part, une obstruction des tenta-tives de l’Europe pour proposer une normalisation des pesticides agricoles et des produits chimiques, un activis-me commercial pour vendre centrales nucléaires, marchés de traitement de l’eau et des déchets à tous les régimes y compris les moins démocratiques, une réduction des aides aux coopéra-tions décentralisées et aux ONG et un Grenelle de l’environnement vidé de sa substance au fur et à mesure des lois d’application.

Nous devons dénoncer ces contradic-tions entre les postures et les actions en faveur de l’environnement, et pro-poser des solutions alternatives pour un développement durable, qui équili-bre réduction de notre empreinte éco-

logique et accès de tous au progrès social.

Le projet de la FFE doit inclure un cha-pitre lié à l’écologie et au développe-ment durable. Ces propositions peu-vent être un levier pour nourrir le projet du PS et du PSE sur les grands enjeux mondiaux tels que le droit à l’eau et la gestion locale de la ressource, l’arrêt des exportations de déchets occiden-taux dans les pays pauvres, le déve-loppement d’énergies locales autono-mes, le refus de la confiscation des matières rares.

Nous ne souhaitons ni le retour en ar-rière vers des technologies archaïques et polluantes, ni le repli de chaque pays sur ses intérêts propres.

Nous attendons de la France qu’elle soutienne toutes ses entreprises et pas seulement les géants mondiaux de l’eau, de l’énergie et des déchets, et encourage les partenariats avec les pouvoirs publics locaux démocratiques et progressistes, qu’elle commence à respecter elle-même les pratiques agri-coles et industrielles propres et saines, et qu’elle retrouve ses valeurs d’inno-vation sociale au service d’un véritable développement durable de notre pla-nète.

Olivier Smadja

Membre du Bureau Fédéral,

en charge des Etudes et Projet

Le Développement Durable, un enjeu géopolitique de gauche

La culture du riz intéresse les Mauriciens. Elle sera mise en oeuvre sur une superficie de 18 000 hectares de terre mise à la disposition des Mauriciens par le gouvernement mozambicain. Le projet est à l’état du montage financier. Des

infrastructures devront être construites.

Le gouvernement mozambicain a aussi mis 5000 autres hectares de terre à la disposition des Mauriciens pour la production de pommes de terre, de maïs,

de cereals, d’oignons et de blé. Une “Compagnie Régionale de Développe-ment” a été créée par le gouvernement mauricien. Elle signera des contrats avec les sociétés qui vont exploiter ces terres.

Mozambique – Le Mozambique accorde 18 000 hectares à Maurice

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journée de manifestations, de rassemble-ments pour les droits des femmes. C’est le 8 mars 1977 que l’ONU officialise la journée internationale des droits de la femme et demande aux États membres d’en faire de même. Ce que la France fait, sous le gouvernement socialiste de François Mitterrand en 1982.

Aujourd’hui, qu’en est-il ? Les fem-mes ont acquis certains droits comme le droit de vote, le droit à l’éducation, à la contraception et à l’avortement (toujours menacé), loi sur la parité (loin d’être at-teinte). Cependant, les luttes pour les droits des femmes ont pris un autre visa-ge dans certains pays, celui de combats pour plus d’égalité hommes/femmes au travail, pour une répartition plus équitable des tâches domestiques. Dans ces diffé-rents domaines, le sexisme persiste. Il semble enraciné au cœur de nos socié-tés. Plus encore, les femmes sont les premières touchées par l’évolution du travail dans nos sociétés industrialisées : développement du temps partiel avec 1,5 millions de salariés en 1980 et 4 millions aujourd’hui dont 80 % de femmes ; 80 % des salariés qui touchent le Smic ou

Ce soir, dans les embouteillages qui me donnent tout le temps d’observer attenti-vement mon environnement une affiche a retenu mon attention. Les visages d’un homme et d’une femme me regardaient sans sourire, avec comme sous-titre « A travail égal, la seule différence entre eux est leur salaire ». Le 8 mars dernier nous célébrions le centenaire de la journée internationale de la femme. Loin d’être une simple « fête » de la femme, cette journée marquait les années de luttes de millions de femmes à travers le monde pour la conquête de leurs droits, et cela depuis plus d’un siècle.

N’oublions pas que cette journée a son origine dans les luttes ouvrières et les manifestations de femmes réclamant le droit de vote, de meilleures conditions de travail, une meilleure égalité hommes femmes au début du 20e siècle en Euro-pe et aux Etats-Unis. L’idée de cette jour-née est née d’une proposition de Clara Zetkin, représentante du Parti socialiste d’Allemagne en 1910, lors de la deuxiè-me conférence de l’Internationale socia-liste des femmes. Dès lors, elle a été reprise dans de nombreux pays comme

F F E I N F O - O P I N I O N S

L’élection sénatoriale de septembre 2011 sera cruciale pour la France. Elle est l’oc-casion historique de faire émerger une majorité de gauche au Sénat. 9 candidats sont en lice : Richard Alvarez (Dakar), Gérard Bénichou (Tel Aviv), François Boucher (Mexique), Théo Chino (New York), Hélène Conway (Dublin), Michel Cullin (Vienne), Jean-Yves Leconte (Varsovie), Annie Michel (New York), Rama Ramakichenane (Pondichéry).

Les militants devront ordonner les candi-dat(e)s en respectant l’alternance hom-me/femme ou femme/homme. Les têtes de liste désignées auront ensuite la res-ponsabilité, en coopération avec la Fédé-ration, de proposer la liste à l’ouverture à FdM-ADFE et à son groupe à l’AFE. Cer-tains candidats PS désignés par les mili-tants seront donc rétrogradés voire sortis de la liste pour parvenir à cette liste d’u-nion. Une fois réalisée l’ouverture de la liste aux partenaires de gauche, la liste sera adoptée par le Conseil fédéral et celui-ci la proposera au vote des militants à la fin du mois de septembre 2010.

Après la pause estivale et juste après l’Université d’été de La Rochelle, nous reprendrons nos activités fédérales par la

Le 24 juin prochain, deux votes auront lieu dans les sections de la FFE : celui sur la convention pour la rénovation et les désignations pour l’élection sénatoriale de 2011.

Le texte sur la rénovation fixera notam-ment l’organisation des primaires ouver-tes pour l’élection présidentielle, les mo-dalités d’application du non cumul des mandats, la manière de parvenir à une meilleure représentation de la diversité de la société parmi nos élus et au sein de nos instances et enfin, révisera nos pro-cédures internes, en particulier dans l’or-ganisation des congrès.

Concernant les primaires ouvertes pour l’élection présidentielle, la FFE devra participer pleinement à la réflexion sur la manière de les organiser à l’étranger en permettant au plus grand nombre possi-ble de Français de l’étranger sympathi-sants d’exprimer leur choix. Les primaires ont pour but de venir combattre les déri-ves présidentialistes de la Ve République sur son terrain, comme le propose Ar-naud Montebourg dans son premier rap-port, et de présenter en 2012 un ou une candidat(e) de gauche massivement sou-tenu(e) par le cœur de son électorat

moins sont des femmes ; différence sala-riale de 25 % en moyenne entre un hom-me et une femme au même poste et au même niveau de qualifications. Ces quel-ques chiffres montrent les nombreuses inégalités dont souffrent encore les fem-mes. Mais on peut penser également à la faible présence des femmes en politique ou à la tête de sociétés. La France à ce sujet est une très mauvaise élève. Elle se situe au 62e rang mondial quant au nom-bre de femmes élues à son assemblée législative au suffrage universel direct.

Toutes ces luttes sont malheureusement loin d’être terminées, à commencer par la lutte contre les violences faites aux fem-mes. Il est dommage que nous ayons besoin d’une journée de la femme pour nous rappeler l’état de fait des situations féminines dans le monde et le chemin qui nous reste à parcourir pour atteindre cet-te égalité.

Hélène Conway

www.helene-conway.com

Un second semestre chargé pour la FFE

Convention fédérale les 30 et 31 août.

Le calendrier des conventions se poursui-vra et les militants voteront le 30 septem-bre pour la convention « International » puis le 2 décembre sur « l’Egalité réelle ».

Le 2 décembre également aura lieu le vote de désignations pour les élections législatives afin de désigner les 11 « tickets » candidats-suppléants qui dé-fendront les couleurs du PS en juin 2012.

Un programme chargé donc avec beau-coup de travail pour tous les secrétaires de section mais surtout une vie démocra-tique intense pour tous les militants qui auront la grande responsabilité à la fois de se prononcer sur le projet du parti et de choisir celles et ceux qui iront combat-tre la droite et former, nous l’espérons ardemment, un parlement majoritaire-ment à gauche, pour le progrès de la France et des Français, où qu’ils résident.

Pascale Seux Membre du BF, chargée de la représentation, des élections et des statuts

Cent ans plus tard, et toujours pas d’égalité effec tive entre les hommes et les femmes

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L’Union européenne, avec en première ligne la France et l’Allemagne, a enfin déclaré soutenir la Grèce dans le comble-ment de son déficit. Celui-ci dépasse en effet très nettement ce que l’UE demande à ses Etats membres en application des traités de Maastricht et de Lisbonne, avec 12,9 % de déficit au lieu des 3 % deman-dés par Bruxelles. La dette publique re-présente 115 % du PIB grec. Le pays ne sera pas laissé à l’abandon. Il pourra recevoir l’aide du FMI s’il la demande ainsi que des aides bilatérales européen-nes, à condition qu’il persiste dans son plan de rigueur budgétaire, et ce malgré le fort grondement social s’élevant dans l’ensemble du pays. Mais faut-il vraiment être soulagé ? Outre les risques réels de contagion à d’autres pays de l’Union (le

Portugal, l’Espagne et l’Irlande en pre-mier lieu), la crise grecque pose deux questions : celle de la solidarité des pays dans la zone euro et celle de la régulation de la finance au niveau de l’Union euro-péenne

Dans quelle mesure les Etats membres de l’Union doivent-ils rester solidaires ? Le président de la Commission européen-ne, José Manuel Barroso, a déclaré : « Nous avons toujours fait preuve de soli-darité avec tous les Etats membres de l’UE, et nous montrerons qu’à l’avenir la Grèce peut compter sur notre solidarité ». Une démarche que n’approuvent pas l’ensemble des 27, sachant qu’ils devront augmenter leur propre dette et celle de l’UE au risque d’un certain mécontente-ment de leurs propres opinions. Il s’agira

là forcément de démarches volontaires puisque le traité de Maastricht prévoit qu’aucun Etat ne peut être forcé à en secourir un autre.

Or, le traité de Lisbonne prévoit dans ses articles la suppression des droits de vote pour les pays ne suivant pas les règles budgétaires communes, voire même leur expulsion en cas d’atteintes multiples aux principes démocratiques européens. L’Al-lemagne souhaiterait d’ailleurs élargir cette possibilité aux multiples dérapages économiques afin de sortir des Etats de la zone euro. Des mesures plus coerciti-ves aideraient peut-être plus les Etats à tenir une gestion plus stricte de leur éco-nomie ?

Suite page 7

L E S S E C T I O N S - N O U V E L L E S D U M O N D E P A G E 7

La présidence suédoise de l´Union européenne a été l´occasion de recevoir plusieurs personnalités en Suède. En octobre 2009, Jean-Louis Bianco et Jean-Pierre Bel nous ont accordé un entretien libre sur les défis du parti socialiste. Selon Jean-Louis Bianco, l´exercice de la rénovation est absolument nécessaire même s´il peut fragiliser t e m p o r a i r e m e n t l e s structures du parti. Il souhaite que le parti renforce son act ion internationale et s´appuie davantage sur les sections à l´étranger. La démarche d´une recherche de coalition avec d´autres courants (communistes, écologistes mais aussi une certaine frange des centristes) est la bonne méthode. Jean-Louis Bianco a déclaré sa fidélité à une démarche participative pour pouvoir lancer des politiques publiques ayant un impact sur le développement des territoires. Jean-Louis Bianco et Jean-Pierre Bel se rendaient au congrès des parlementaires européens sociaux-démocrates.

Le 18 novembre 2009, Hélène Conway nous a rendu visite pour évoquer la question de la représentation des

Français de l´étranger. Nous avons discuté des évolutions du réseau culturel français à l´étranger et du travail que réalisait la FFE en la matière.

Le 25 novembre 2009, Jean-Marc Ayrault a rendu une visite à la section, en marge d´un congrès des maires européens. Sa liberté de parole et son réalisme ont marqué les membres de la section. La nécessité pour les sections à l´étranger d´avoir des liens avec les sections françaises lui est apparue importante. Il s´est exprimé sur la situation du parti, celle des élus et les nouveaux défis à relever.

Le 15 avril 2010, une rencontre du PSE a permis à la section de rencontrer différents membres du PSE et du parti social-démocrate européen. La soirée du

15 avril a été animée par Philip Cordery (secrétaire général du P S E ) e t G ö r a n F ä r m (parlementaire européen issu des sociaux-démocrates suédois) qui étaient venus à Stockholm présenter la stratégie du PSE. Le PSE est notamment très engagé pour influencer les positions des parlementaires européens et aura une démarche plus offensive pour les élections européennes de 2014 et visera à harmoniser les positions des différents partis socialistes en Europe. Les positions du PSE sur la situation grecque (système de garantie des prêts pour éviter les spéculations) et sur les réponses à la crise financière ont

été évoquées. Göran Färm a évoqué les liens pouvant se faire entre le niveau local et le travail des parlementaires (initiatives citoyennes, organisation de débats et relais des campagnes). Les sections étrangères des partis socialistes doivent contribuer à la diffusion du débat d´idées dans ce cadre.

Christophe Premat,

Section de Suède

EUROPE

La solidarité européenne suffira-t-elle à la Grèce et à l’UE ?

VISITES RENDUES À LA SECTION DE SUÈDE, BILAN 2009-2 010

Christophe Premat avec Jean-Marc Ayrault

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EUROPE La solidarité européenne suffira-t-elle à la Grèce et à l’UE ? suite

Cette crise ne montre-t-elle un pan man-quant à l’UE ? Les gouvernements ont répugné jusqu’à présent à s’effacer de-vant un gouvernement économique com-mun. Les plus libéraux ont même bloqué toute évolution car ils espéraient faire jouer une concurrence fiscale entre les vingt-sept et organiser une baisse des impôts et de la protection sociale. As-phyxiée par plus de vingt ans de désinfla-tion compétitive l’Europe risque fort de ne pas résister aux marchés prêts à dégom-mer l’euro. On savait que l’euro ne ferait pas l’Europe. Il représente cependant

encore cette monnaie unique qui devait permettre à l’UE de se battre à armes égales avec l’Amérique et les puissances asiatiques. Après les échecs diplomati-ques successifs de Copenhague et de Doha l’UE frise l’humiliation en devant s’en remettre au FMI pour régler un pro-blème interne. L’aveu est fait qu’elle ne peut s’en sortir seule et que les pays qui la composent se préoccupent plus de leur destin personnel que du destin collectif. Le politique semble crispé entre une opi-nion publique fixée sur son pouvoir d’a-chat et les marchés obsédés par la renta-bilité.

Si l’UE veut survivre elle sera forcée de

se réinventer, plus politique et plus soli-daire, plus inscrite dans une logique fédé-rale. Portées par la déroute libérale, les gauches européennes ne doivent pas avoir peur de proposer l’accélération de l’harmonisation économique ainsi que des mesures fortes qui tordront le cou à la crise comme l’avait fait Roosevelt en encadrant la spéculation sur les marchés des produits dérivés et en décourageant les excès de la cupidité par des taux éle-vés d’imposition.

Hélène Conway

Avril 2010

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P A G E 8 N O U V E L L E S D U M O N D E

Le plan de sauvetage de l’Euro décidé aux premières heures du 10 mai 2010 marque l’effacement de tous les dogmes et certitudes qui ont cor-seté des mois durant la riposte de l’Union euro-péenne face aux attaques spéculatives répétées. La Banque Centrale Euro-péenne intervient désor-mais sur le marché obli-gataire de la zone Euro pour acheter des em-prunts d’Etat. Il était temps. Un fonds d’inter-vention européen de 750 milliards d’Euros a été créé, permettant aux Etats membres en but à la spéculation financière de trouver la protection nécessaire en retour de stricts engagements de discipline budgétaire. Outre son volume exceptionnel, cet ins-trument apporte une touche symbolique essentielle : l’affirmation de la solidarité des Etats membres entre eux. Reste que ce plan ne s’attaque pas aux causes profondes de la crise traversée. Les questions de gouvernance économi-que restent en effet posées. Il manque à l’Union une coordination budgétaire, des ressources fiscales propres et la possibili-té d’emprunter. Un fonds monétaire euro-péen et une agence européenne de nota-tion doivent être créés. Ce n’est que si ce cadre est posé que pourra être envisagée la définition de sanctions contre un Etat

membre s’écartant de la gouvernance économique. Parce qu’il n’existe aucun Etat qui n’ait pas pris des libertés vis-à-

vis des règles du pacte de stabilité ces dernières années, à commencer par l’Al-lemagne et la France, aucun gouverne-ment n’est fondé à faire la leçon à qui que ce soit, encore moins à souhaiter l’exclusion de la zone Euro d’un pays en difficulté. Les peuples ne peuvent être maintenus à la lisière de ce qui se joue et se traduit par des plans d’austérité d’une rudesse extrême, en témoigne le drame social grec, mais aussi espagnol et portugais. S’il est besoin d’Europe pour répondre à la crise financière, l’occasion est là aussi d’affirmer l’envie d’une Europe qui protè-

ge les citoyens. Ce doit être une cause de rassemblement pour tous les Euro-péens. Or, c’est précisément la volonté

politique qui a fait défaut ces derniers mois, donnant de la zone Euro l’image d’un ba-teau ivre. Les indécisions, les agendas nationaux et le man-que de courage ont conduit la crise à son paroxysme. Il est nécessaire d’apprendre de ce qui est un échec politique pour le projet européen. C’est dans un saut fédéraliste que se trouve la réponse à la crise. Le rapport récemment présenté par l’ancien Premier Ministre espagnol Felipe Gon-zalez appelle les européens à l’ambition. Ce rapport ne ca-che pas son pessimisme pour l’avenir du projet européen si le surplace des derniers mois devait se poursuivre. Ce re-

bond ne pourra intervenir sans révision institutionnelle, donc sans réouverture des Traités. Prétendre l’inverse serait en effet refuser de prendre la mesure des risques actuels. Confiner le débat, les propositions et les décisions sur la gou-vernance économique dans l’Union euro-péenne à quelques leaders nationaux et experts serait une erreur funeste pour l’avenir. Pierre-Yves Le Borgn’ Premier Secrétaire Fédéral

Mai 2010

Les leçons de la crise de l’Euro

weblogs.nrc.nl

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tout simplement. En cas de déviance, ex-iste par exemple le recours par les parties à l’institution indépendante du Médiateur (Ombudsman) de la Justice qui peut au pire recourir en justice contre le procureur pour manquement ou faute profession-nelle, sinon formuler un avis rendu public qui, par tradition, pèse lourd sur la carrière dudit procureur. On le voit donc, il existe face aux pouvoirs des procureurs des con-tre-pouvoirs et c’est sans doute ce qui permet à la justice suédoise une indépen-dance sans tâches face au pouvoir exécu-tif.

En Suède la formation juge-jury n’existe pas au pénal sauf pour une exception en ce qui concerne les infractions à la liberté de publication; c’est le choix suédois de la formation collégiale variable d’un ou trois juges accompagnés de 3 jurés non ré-munérés qui vaut. Il faut donc à cet aéropage une neutralité et compétence certaines permettant la confiance en la justice. Le fameux procès Pirate Bay de l’année dernière concernant les télé-chargements sur Internet illustre bien cela : un juré se vit reprocher son apparte-nance à une association de défense de la propriété industrielle mais sans finalement être exclu, sa partialité n’étant pas établie.

Il s’élève toujours en Suède des voix pour

Depuis sa mise en vigueur par le réforma-teur Olaus Petri (1493-1552) il est un prin-cipe qui est intangible dans la loi suédoise, c’est celui de l’indépendance du juge vis à vis du pouvoir politique. Cette notion d’indépendance est si ancrée dans la société suédoise qu’elle a été chantée par des poètes célèbres (par exemple par le poète suédo-finlandais Runeberg qui dans son Recueil Fänrik Stål sägner et le poème Landshövdingen dépeignait un juge qui en 1809 defiait l’autorité du con-quérant russe de la Finlande jusqu’alors soumise à la loi suèdoise) ou décrite par l’exemple quand, durant la seconde guerre mondiale, le ministre suédois des affaires étrangères Christian Gunter, vou-lant satisfaire le partenaire commercial allemand, pria sans succès le magistrat en chef Cervin à Göteborg de lever la saisie d’un navire cargo norvégien à destination de l’Allemagne.

L’institution française du juge d’instruction n’existe pas en Suède et lorsque l’on se pose la question de savoir où en est dans ce pays le débat qui a lieu en France sur l’indépendance des procureurs il est facile de répondre. Le débat de l’indépendance du parquet est inexistant. Le procureur suédois se doit du fait des principes d’ob-jectivité et d’impartialité d’instruire une affaire où il y a eu manquement à la loi,

l’assurance de l’indépendance de la jus-tice et l’institutionnalisation de contre-pouvoirs efficaces. Celles demandant in-stamment à l’Etat que la rémunération et l’avancement du personnel judiciaire soient décidés par l’autorité judiciaire et non le ministère de la justice font au-jourd’hui leur chemin dans le débat public. Celles, en majorité social-démocrates, relatives au tribunal spécial dédié au con-trôle et à l’autorisation des lectures des communications électroniques permises par la loi anti-terroriste FRA, se sont con-crétisées. Dans ce tribunal et pour mar-quer le coup, les téléphones portables sont interdits et le président du tribunal Runar Wiksten a été nommé justement parce qu’il était connu pour sa grande intégrité. Une personne telle que la prési-dente de l’association suédoise des avo-cats, Anne Ramberg, dénonçait cependant récemment dans une tribune du journal Advokaten sa crainte de certaines courtes vues politiques telles que celle de Scott Brown, sénateur républicain aux Etats Unis (qui déclarait que « lorsqu’il s’agit de terroristes, l’argent des contribuables doit aller aux armes qui les combattent et non aux avocats qui les défendent ») et l’obli-gation constante de vigilance. C’est un combat toujours constant.

Yann Long, Section de Suède

En Suède, on ne plaisante pas avec l’indépendance d e la justice

N O U V E L L E S D U M O N D E

pale, dangereux fanatiques convertis à la prose du petit livre rouge.

La Chine bouge en effet, la Chine se

développe, et on assiste à l'émergence de plusieurs Chines. La Chine des classes moyennes tout d’abord, estimées à 300 millions dans un pays qui compte plus de 1350 millions d’âmes, mais fer de lance de tous les combats politiques importants. Les avancées sociales ne se jouent pas aujourd’hui dans les dizaines de manifes-

A l’heure où les BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) dictent leurs lois et où l‘on ne jure plus que par le puissant G2 « Chinamérique », la Chine fascine, la Chine inquiète et il n’est qu’un pas avant de voir resurgir de vieux dé-mons invoquant le péril jaune.

Il est temps de revenir sur cette so-ciété chinoise que d’aucuns con-sidèrent comme figée dans le formol de la doctrine maoïste et qui se trouve aujourd’hui tiraillée entre tra-dition et modernité, attraction/répulsion de l’Occident et en quête d’une improbable « voie chinoise ».

Notre perception de la Chine doit être dédramatisée et s’émanciper de bon nombre de clichés qui continuent de lui coller à la peau avec le soutien de médias à l’unisson pour dénoncer un ré-gime autoritaire, jusqu’à totalitaire, où il ne ferait aujourd’hui pas bon vivre pour tout démocrate digne de ce nom. Nonobstant ces centaines de milliers d’étrangers qui ont décidé d’en faire leur résidence princi-

tations quotidiennes que connaît le pays, animées par les sans-grades, sans-terre et autres populations rurales, mais bien dans les bourgs douillets de villes comme

Pékin, Shanghai ou Canton. Le bobo chinois défend comme personne son statut de parvenu, et vous pouvez compter sur lui pour ne pas s’en lais-ser compter en matière de droits du consommateur, de propriétaire, de parent d’élève, salarié, entrepreneur ou patient. Les avancées majeures qui voient aujourd’hui le jour en Chine en matière d’avancées sociales sont es-sentiellement le fait de ces classes moyennes de la société et nouveaux cadres du parti.

Un pays comme la Chine, qui a lit-téralement inventé la méritocratie, peut aujourd’hui comme tout au long de sa longue histoire, s’appuyer sur des légions de cadres politiques progressistes, lucides et volontaires dont certaines démocraties occidentales pourraient s’inspirer pour assurer leur rénovation et leur renouvelle-ment. suite page 10

Le réveil des Chines

www.chine-informations.com

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A l’instar de ses partis-frères de l’Interna-tionale Socialiste, le PSS (Parti Socialiste Suisse) s’est fixé comme objectif pour le prochain Congrès de Lausanne (30 et 31 octobre 2010) d’adopter un nouveau pro-gramme, plus en phase avec les nou-veaux défis et dépoussiérer certains des objectifs du parti: le dernier programme du PSS datant de 1982. Le président du PSS Christian Levrat, note avec justesse que « dans un monde en proie à la réces-sion et soumis à de brusques change-ments sociaux, nous avons - plus que jamais - besoin d'un socialisme fort ». Quelle acceptions et autres réalités re-couvrent ce socialisme, telle est la ques-tion ?A l‘évidence, le PSS est un parti que l’on peut manifestement qualifier de gouvernement dans la mesure où il admi-nistre les principales villes du pays (Zurich, Genève, Berne, Bienne) et est impliqué directement aux affaires du pays du fait de sa participation au sein du Conseil Fédéral (gouvernement de la Suisse) depuis 1959 dans le cadre de la « formule magique » (coalition hétéroclite de partis de droite et de gauche associés au pouvoir et indépendamment ou pres-que du résultat des scrutins électoraux). Actuellement, ses représentants au sein de ce même Conseil sont la Ministre hel-vétique des Affaires étrangères, Micheli-ne Calmy-Rey et le Ministre chargé des Transports, Moritz Leuenberger.

C’est dans ce contexte que le PSS a pré-senté à Berne le mercredi 7 avril 2010 le projet de programme qu’il vient de sou-mettre à sa base pour en débattre et l’a-mender. Sur fond de crise, une moderni-sation complète des fondements pro-grammatiques du PS s’imposait sans renier ses idéaux et les valeurs de parta-ge auxquels il est attaché. En voici la trame qui comprend quatre parties et qu’il

convient d’en cerner brièvement le conte-nu (pour lire le Programme complet, voir le site du PSS à l’adresse suivante: http://www.sp-ps.ch/fi leadmin/downloads/M e d i e n k o n f e r e n -zen/2010/100407_mk_parteiprogramm/100407_Entwurf_SP_Parteiprogramm_f.pdf)

Réguler la globalisation: la globalisation de ces dernières décennies est d’abord synonyme d'ouverture des marchés. En règle générale, l’économie suisse profite de ce processus, mais la pression tou-jours plus forte à s’y adapter surcharge aussi nos concitoyen-ne-s et le nombre de perdant-e-s de la globalisation aug-mente également dans notre pays. Le PSS souhaite y répondre par une vérita-ble régulation de la globalisation, en affir-mer les aspects sociaux et écologiques.

Les valeurs fondamentales du socialisme: Liberté – Justice – Solidarité : la justice est la valeur centrale du socialisme qui est elle-même indissolublement liée à deux autres valeurs essentielles, à savoir la solidarité et la liberté. Le socialisme a pour constant objectif de se libérer des dépendances apparemment insurmonta-bles et de renforcer la capacité des être humains à mener la vie de leur choix en communauté avec leurs pairs.

Démocratisation de l’économie: En réac-tion au caractère inéquitable du système économique dont la récente a démontré les carences du capitalisme, le PSS ré-pond par la démocratisation de l’écono-mie qui se conçoit et s’applique comme un processus politique à mettre en œuvre immédiatement et à poursuivre de maniè-re évolutive. La démocratisation de l’éco-nomie se veut comme l’antithèse du cre-do néolibéral de la toute puissance du marché.

Compléter l’Etat social par une politique sociale préventive: l’Etat social du 21e siècle doit reposer sur deux piliers. En sus du pilier relatif au traitement social et à l’effort de redistribution, qui protège contre les risques, il faut parallèlement insister davantage sur le pilier de la pré-vention. Ainsi, l’Etat social préventif per-met aux citoyennes et aux citoyens d’a-méliorer leur situation sociale et de gravir les échelons de la société. A ce titre, l’E-tat n’est plus seulement un atelier de ré-paration, mais devient un Etat facilitateur et qualificateur, qui fait en sorte que cha-cune et chacun puisse mener une vie émancipée, choisie de manière autono-me et libre de toute tutelle.

Sur la base d’une première mouture sou-mise par le conseiller national Hans-Jürg Fehr, le programme a déjà fait l’objet de débats au sein de la direction du PSS. Eu égard à la structure particulièrement dé-centralisée du PPS, divisée sur une base cantonale, l’objectif est d’abord une très large consultation des partis cantonaux et des sections du PSS sur le projet de pro-gramme, avant d’en envisager son adop-tion dans le cadre du prochain congrès de Lausanne. Souhaitons à nos camara-des socialistes suisses d’adopter un pro-gramme apte à relever les défis économi-ques, sociaux, sociétaux et environne-mentaux leur permettant d’être en phase avec leur temps et d’en récolter les fruits auprès de la population car, à l’évidence, la Suisse a besoin, plus que jamais, d’u-ne gauche forte : le PSS est, et continue-ra d’en être la colonne vertébrale.

Badr Zerhdoud

Ex-secrétaire de la section PS de Ge-nève

La révision du programme socialiste du Parti Social iste Suisse

N O U V E L L E S D U M O N D E

Le réveil des Chines suite

Entendons-nous bien, le pays reste sous la coupe réglée de son pouvoir central, ce qui est tant mieux, tant la corruption et l’obscurantisme politique se terrent dans les provinces périphériques.

Le principal travail de rééducation ne se tourne actuellement plus en Chine vers les masses laborieuses comme en d’autres temps mais bien vers ces . potentats locaux d’un autre âge qui ad-ministrent leurs régions comme d’an-ciennes républiques soviétiques d’Asie

central Les dissidents continuent d’être surveillés, tout comme la presse et les médias, mais qui sait aujourd’hui que la blogosphère et la majorité des pages Internet sont rédigées en Chinois, et que n’importe quel étudiant jongle avec une aisance déconcertante d’un proxy à l’autre pour contourner cette muraille de Chine électronique dont nos médias nous rebattent les oreilles ?

Le chemin reste long, et la pente d’autant plus raide et incertaine que le peuple chinois est en fait constitué d’une mo-saïque de peuples, mais surtout de

catégories socio-professionnelles nou-velles qui cherchent leur place dans une société devenue schizophrène entre un modèle socialiste dépassé et un modèle capitaliste qui montre au monde entier ses limites. Cependant, ces Chines se réveillent en ce moment même et appren-nent à coexister dans une dynamique économique mais surtout sociale qui échappe largement aux observateurs que nous sommes.

Ludovic CHAKER Isolé, ex-trésorier Section de Shanghai

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P A G E 1 1 N O U V E L L E S D U M O N D E

de Pâques, quel clin d’œil de l’Histoire !). S’il n’a pas oublié, du moins il a pardonné

et veut regarder désormais vers l’avenir, le progrès, la paix entre les peuples, en passant par l’étape préalable indispensa-ble de l’unité du continent africain.

Il est difficile de rester insensible à

Dakar se situe sur le point le plus occi-dental du continent africain. A l’extrémité de ce « Finistère » il y a deux collines très proches l’une de l’autre, d’à peine 100 mètres d’altitude, appelées « les Ma-melles des Almadies ». Au som-met de la première se trouve le fameux « Phare des Mamelles » bientôt séculaire. Des entrailles de la seconde vient de surgir la plus haute statue du monde, ( 53 mètres ) : c’est le « Monument de la Renaissance Africaine » inauguré le 3 avril 2010 par le Président Abdoulaye Wade devant 22 chefs d’Etat : un homme athlétique portant son fils à bout de bras, avec sa femme à son côté. Tous trois pointent le doigt vers l’occident.

Dans son discours inaugural « urbi et orbi » le président sé-négalais a mis l’accent sur la symbolique de l’ouvrage : après six siècles de souffrances, (quatre d’es-clavage et deux de colonisation) , l’ « l’Homme Noir » est en train de renaître (cette résurrection après un long calvaire, sur un golgotha africain, la veille

la beauté du Monument, à la prouesse technique, œuvre des Nord-Coréens (des

milliers de tonnes de bronze dont 200 rien que pour les trois personnages et dont la durée de vie garantie est de 1 000 ans). Mais ce monument fait l’objet de polémiques et de nom-breuses controverses. Ses détrac-teurs lui reprochent la démesure et surtout son coût : 20 millions d’euros, alors que la moitié de la population du Sénégal vit au dessous du seuil de la pauvreté. « Œuvre pharaonique » édifice « néo sta-linien » ou copie tropicalisée de « l’Ouvrier et la Kolkhozienne », con-struits pour la gloire d’un homme, sont les critiques les plus entendues. A quoi les partisans répondent en invoquant Versailles, la Tour Eiffel , la Statue de la Liberté , les Cathédrales et autres chefs d’œuvre décriés par leurs contempo-rains avant d’être classés « merveilles du monde ». Le débat

reste ouvert. L’Histoire jugera ….

Hassan Bahsoun

Secrétaire

Section de Dakar

Sénégal

L’inauguration du « Monument de la renaissance afr icaine ».

Le projet de constitution a été rédigé par

Deux ans et demi après les élections de 2007, dont les résultats officiels avaient été vivement contestés, les députés Kenyans ont approuvé un projet de nou-velle constitution qui sera soumis à un référendum au plus tard au début du mois d’août de cette année. Ce projet est l’une des princi-pales réformes prévues par l’accord de partage du pou-voir signé en février 2008, au terme duquel Mwai Ki-baki gardait la présidence et Raila Odinga était nommé Premier ministre. Les violences post-électorales avaient entraîné la mort de près de 1500 personnes et le déplace-ment de centaines de milliers d’autres.

un comité d’experts, puis amendé après consultation publique avant d’être présenté au parlement. Aucun des très nombreux amendements déposés par les députés pour modifier le texte n’a atteint la majorité requise des 65% des votes.

Le texte qui sera soumis au vote des Kenyans conserve un régime présidentiel. Le président devra, comme dans la constitution de l’indépendance de 1963, être élu au suffrage uni-versel direct. Mais il lui

faudra obtenir plus de 50% des votes, ce qui n’a jamais été le cas aupara-vant puisque le candidat

arrivé en tête au premier tour était déclaré suite page 12

A gauche Luis Moreno-Ocampo,au centre Raila Odinga, à droite Mwai Kibaki

Kenya: Projet de nouvelle constitution

Photo: Nation Newspaper

Photo:avomn.com

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ganisa les premières élections démoc-ratiques en 1994, se mit très vite au travail. Ce qu’il découvrit ne lui permit de rendre qu’un seul verdict: les résul-tats des élections avaient tellement été truqués de toutes parts qu’il était impos-sible de savoir qui en était le vainqueur. Le juge Kriegler remit son rapport, on le remercia officiellement et on se concen-tra sur les activités de partage du pou-voir. Il est vrai que les détails du rap-port n’arrangeaient personne. Alors que la participation s’élevait à plus de neuf millions d’électeurs le nombre de morts ayant participé au vote était d’en-viron un million deux cent mille. Analy-sant les votes d’un tiers des circonscrip-tions acquises aux deux camps le juge Kriegler dut se résigner au constat qu’il y avait eu des tricheries dans toutes. Dans les circonscriptions favorables au président c’était surtout au niveau des comptes rendus que les résultats avaient été modifiés avant d’être en-voyés au centre national de comptage des votes à Nairobi. Dans celles favor-ables à son adversaire ,et surtout dans sa région natale, les observateurs agréés par le parti du président avaient souvent été violemment chassés des bureaux de votes, facilitant, sans super-vision objective, les doubles votes et les votes par des électeurs corrompus de personnes décédées mais toujours inscrites sur les registres électoraux. Ainsi, dans la circonscription du frère d’Odinga la participation était de plus de 100%.

Avant de retourner dans son pays le juge Kriegler résuma la situation dans une conférence de presse: il serait temps que les Kenyans organisent en-fin de vraies élections justes et équi-tables.

En attendant l’enquête de Moreno-Ocampo

Suite à l’accord de partage du pouvoir le gouvernement devait créer des tribunaux spéciaux chargés de juger les responsables de certaines violences et atrocités post-électorales. Deux com-missions locales ont été créées et ont rendu des rapports très intéressants mais aucun tribunal spécial n’a vu le jour avant la date limite prévue. Après cette date la Cour pénale internationale devait donc entrer en scène. Ce fut long mais Luis Moreno-Ocampo a enfin

Kenya Projet de nouvelle constitu-tion suite

élu quel que soit son score à condition d’avoir obtenu plus de 25% des votes dans au moins 5 des 8 grandes régions du pays (dans le nouveau projet il faudra remporter plus de 25% des votes dans plus de la moitié des 47 comtés qui seront créés pour remplacer les régions).

Le nouveau texte prévoit l’impossibilité de cumuler les fonctions de député et de ministre et soumet les nominations du président au vote du parlement. Il comprend la création d’un Sénat et d’une Cour suprême et prévoit une procédure de destitution du président par les deux chambres législatives.

Le gouvernement sera constitué d’un minimum de 14 personnes et d’un maximum de 24 personnes incluant le président et le président adjoint. Le poste de Premier ministre sera aboli.

Les Kenyans, qui doivent supporter une crise économique et sociale très dure, seront soulagés que le nombre m a x i m u m d e s m e m b r e s d u gouvernement soit limité à 24. En effet, avec l’accord de partage du pouvoir de 2008 le président et le premier ministre ont distribué les postes sans compter. Il fallait récompenser ceux qui les avaient aidés pendant la campagne. Ainsi le gouvernement est actuellement constitué de 96 ministres et ministres adjoints (alors que le nombre de dépu-tés est de 210). En revanche le nom-bre de députés passera de 210 à 290 et il faut espérer que certaines circonscrip-tions seront mieux découpées, un dé-puté pouvant actuellement représenter plus de 500 000 électeurs alors que certains de ses collègues peuvent représenter entre 3000 et 5000 person-nes seulement.

Retour sur un désastre électoral

Lorsque le juge sud-africain Johann Kriegler arriva au Kenya pour présider la commission d’enquête sur les élec-tions de fin 2007 il pensait que ses in-vestigations révèleraient des tricheries organisées pour que le président Kibaki reste au pouvoir.

Ce juge très respecté en Afrique du Sud, qui en avait présidé la commis-sion électorale indépendante qui or-

obtenu récemment le feu vert des juges de la Cour pour faire son enquête. De passage à Nairobi début mai Moreno-Ocampo a déclaré qu’il lancerait au moins deux dossiers d’accusation impli-quant six accusés d’ici la fin de l’année. Il est fort probable que l’incendie criminel de l’église où s’étaient réfugiés des femmes et des enfants de la tribu kikuyu (la tribu de Kibaki) dans la région d’Eldoret et celui de la maison où s’étaient réfugiés des membres de la tribu luo (celle d’Odinga) dans la région de Naivasha feront partie de l’enquête de la CPI. Mais le juge s’intéressera aussi sans doute aux atrocités com-mises par les forces de police dans certaines régions.

Certaines carrières politiques dans les deux camps pourraient bien être inter-rompues…

Jean-Luc Wasse

Section du Kenya

Journal de la Fédération des Français à l’Etranger

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