Traduction de l’Encyclopédie des Connaissances de Jamgön ...

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RimayEncyclopaedia - 1 – Encyclopédie des connaissances Traduction de l’Encyclopédie des Connaissances de Jamgön Kongtrul Lodrö Thayé Extraits La venue du maître qui discipline (Livre 2) 2 Traduction : Marc Agate. (Extrait : les 8 ème , 9éme et 10 ème actes du Bouddha) L’enseignement du Bouddha (Livre 3) 5 Traduction : Marc Agate. La diffusion des enseignements du Vainqueur dans le continent du Jambu (Livre 4) 8 Traduction : Marc Agate. L’éthique (Livre 5) 11 Traduction : Samuel Lambert Perspectives philosophiques (Livre 6 - Chapitre 3 ) 14 Traduction : Cécile Ducher Tantras Bouddhiques (Livre 6 - Chapitre 4 ) 16 Traduction : Georges Driessens Eléments de pratique tantrique (Livre 8 - Chapitre 3 ) 18 Traduction : Sylvie Carteron Instructions ésotériques (Livre 8 - Chapitre 4 ) 21 Traduction : Collectif – Extrait : Les Instructions d’approche des trois vajras Les voies et les terres (Livre 9 ) 23 Traduction : Collectif Le parachèvement du fruit (Livre 10 ) 25 Traduction : Collectif Myriades de Mondes (Livre 1 ) 28 Traduction : Georges Driessens.

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RimayEncyclopaedia - 1 – Encyclopédie des connaissances

Traduction de l’Encyclopédie des Connaissances

de Jamgön Kongtrul Lodrö Thayé

Extraits

La venue du maître qui discipline (Livre 2) 2

Traduction : Marc Agate. (Extrait : les 8ème, 9éme et 10ème actes du Bouddha) L’enseignement du Bouddha (Livre 3) 5

Traduction : Marc Agate. La diffusion des enseignements du Vainqueur dans le continent du Jambu (Livre 4) 8

Traduction : Marc Agate. L’éthique (Livre 5) 11

Traduction : Samuel Lambert

Perspectives philosophiques (Livre 6 - Chapitre 3 ) 14

Traduction : Cécile Ducher Tantras Bouddhiques (Livre 6 - Chapitre 4 ) 16

Traduction : Georges Driessens

Eléments de pratique tantrique (Livre 8 - Chapitre 3 ) 18

Traduction : Sylvie Carteron Instructions ésotériques (Livre 8 - Chapitre 4 ) 21

Traduction : Collectif – Extrait : Les Instructions d’approche des trois vajras

Les voies et les terres (Livre 9 ) 23

Traduction : Collectif

Le parachèvement du fruit (Livre 10 ) 25

Traduction : Collectif

Myriades de Mondes (Livre 1 ) 28

Traduction : Georges Driessens.

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LIVRE 2 : La venue du maître qui discipline

Traduction : Marc Agate. (Extrait : les 8ème, 9éme et 10ème actes – parmi 12 – du Bouddha)

232.8 Acte huitième

Quand il but une soupe au lait, les marques et les signes devinrent éclatants ;

Prenant un coussin d’herbes, il partit pour le Cœur de l’éveil.

Puis il enfila la robe de religieux qu’il s’était confectionnée à partir de guenilles abandonnées. Alors, ainsi que l’avaient prédit les dieux, Sujata, fille du villageois Nandika, lui porta une soupe de lait et de miel, d’un lait tiré de milles vaches et affiné sept fois. A peine l’eût-il terminée que les marques et les signes, tels que la peau dorée et l’auréole lumineuse d’une brasse autour de son corps, étincelèrent et apparurent clairement. Puis il se procura de l’herbe sèche auprès de Svastika qui en faisait commerce, et l’emportant pour s’en faire un coussin, partit pour le Cœur de l’éveil [Bodh Gaya] en adoptant les cinquante-et-un modes [de déplacement] – « comme Akshobhya », «comme Indrayashti », etc.- tandis que la terre résonnait en tous lieux comme si elle était un récipient en bronze. Les dieux souverains du trichiliocosme, parmi lesquels le tout puissant Brahma, embellirent ce monde de vastes ornements, et les bodhisattvas des dix directions agencèrent les nombreux domaines purs des bouddhas des dix directions par d’infinis arrangements, à la mesure de la puissance de leur double accumulation. Des rais de lumières incommensurables s’élevèrent de tous les champs purs de bouddhas et soulagèrent les êtres des enfers et autres destinées. Kalika, un naga aveugle dont la longévité était d’un âge et qui ne pouvait acquérir la vue qu’à l’occasion de la venue d’un bouddha dans le monde, ouvrit les yeux et vit. Des nuées de geais tournoyèrent dans le ciel par la droite en pépiant joliment, et le Suprême Sage lui-même eut la vision dans chaque champ de bouddha des trois temps, des multiples compositions d’ornements qui décoraient le Cœur de l’éveil. Il disposa alors les herbes sèches afin qu’elles pointent vers l’intérieur, s’assit sur elles et se tint droit, les jambes croisées, le regard tourné vers l’est, dans la pleine présence.

232.9 Acte neuvième

Par le pouvoir de l’amour, il vainquit le perfide malin,

Les hordes de démons et les passions.

Ensuite, afin de triompher de Mara [le malin] et de mener à la maturité la descendance des dieux démoniaques dotée de racines de vertus, [le bodhisattva] émit depuis la zone située entre ses sourcils des rayons de lumière qui firent trembler le royaume des démons tout en les exhortant. Le malin lui-même en fit des rêves prémonitoires épouvantables qui frappèrent son esprit d’une terreur et d’un effroi insoutenables. Puis, une aire circulaire de quatre-vingts yojanas se forma autour du [boddhisattva], peuplée de hordes démoniaques effroyables dont la seule évocation provoquerait l’éclatement du cœur. Au même moment, de toutes les directions du trichiliocosme, surgirent des milliards de semblables, tout aussi perfides, qui, exhalant des fumées délétères, déversèrent sur le lieu

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des pluies d’armes de guerre. Mais tout cela ne devint qu’ornements de nuages d’offrandes qui embellirent le Cœur de l’éveil : leur pouvoir [de nuisance] s’était évanoui !

Lorsque [Mara lui] demanda : « Lève-toi ! Ces seuls bienfaits ne suffisent pas à l’obtention de la libération ! », ce furent la déesse de la terre et sa suite qui répondirent et témoignèrent qu’il avait pendant des âges incalculables pratiqué et mené à leur terme les deux accumulations. Puis ce fut le tour des filles de Mara – Envie, Plaisir et les autres – d’entreprendre de le séduire par d’aguichantes illusions, sans parvenir à troubler son esprit.

Ainsi triompha t-il des hordes de démons et de leurs entourages, de même qu’il vainquit les passions des innombrables descendants célestes – dont les racines de vertus avaient mûri –, les menant notamment à la maturité du plein éveil. En résumé, aux premières heures de la nuit qu’il passa au Cœur de l’éveil, il soumit par la seule force du recueillement sur l’amour une armée forte de dix milliards de milliards de démons.

232.10 Acte dixième

Il réalisa successivement les recueillements, les quatre vérités et l’interdépendance,

Et par [l’absorption] semblable au vajra, gagna le parfait éveil.

A minuit, il entra successivement dans l’équanimité des quatre recueillements. Ses connaissances extraordinaires, l’œil divin et les autres, l’amenèrent tour à tour à une vue parfaite des quatre vérités et des liens de l’interdépendance dans l’ordre de leur apparition et de leur résorption. Aux dernières heures de la nuit, quand résonnèrent les tambours de l’aube, le meilleur des hommes et guide insurpassable développa les forces de la sagesse première des nobles. Par la connaissance discriminante qui perçoit en un unique instant de l’esprit la totalité des choses à connaître et à réaliser, il obtint les trois connaissances1, triompha par l’absorption semblable au vajra des plus subtils objets d’abandon, et dans l’étendue de tous les phénomènes, se révéla dans la plénitude du Bouddha au sein de l’insurpassable et parfait éveil. Durant l’éclipse de lune qui se produisit cette nuit-là, Yasodhara mit au monde Rahula et Amritodana eut un fils, Ananda.

Puis l’Ainsi allé s’éleva dans le ciel à une hauteur équivalente à celle de sept palmiers et déclara, entre autres affirmations, que « la continuité de la voie [du cycle des existences] a été interrompue ». Le trichiliocosme trembla à six reprises et les guides des dix directions s’écrièrent : « c’est excellent ! », répandant de la sorte la joie du Dharma, tandis que les dieux du trichiliocosme le louaient et lui rendaient hommage.

Sept jours durant, il resta à se délecter du bonheur de la méditation, sans quitter la posture, jambes croisées, en regardant l’arbre de l’éveil. La deuxième semaine, il se rendit aux confins du trichiliocosme ; la troisième, il observa le Cœur de l’éveil sans jamais cligner des yeux ; la quatrième, il se déplaça jusqu’aux océans proches de l’est et de l’ouest. Pendant la cinquième semaine, il résida chez le naga Mucilinda ; La sixième, il partit et se rendit au pied d’un arbre banyan. La septième, tandis qu’il demeurait auprès de l’arbre de la libération, Trapusha et Bhallika, deux marchands exhortés par les dieux, lui offrirent ses premières aumônes. Il les accepta et les mangea dans un bol unique, issu de sa bénédiction

1 Ces connaissances sont acquises lorsqu’est atteinte la bouddhéité. Ce sont les trois dernières des six

connaissance extraordinaires. Il s’agit de la connaissance des vies passées, du processus de la naissance et de la mort, et de la cessation des imperfections.

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de quatre bols en pierre offerts par les Quatre Grands Rois. [Aux deux marchands] il récita des prières de bon augure : « [Vous qui] accomplissez les souhaits de bonne fortune des dieux », etc., et leur prédit qu’ils deviendraient bouddhas.

Concernant cette période, la tradition du grand véhicule comporte de nombreuses et inconcevables interprétations, comme le fait qu’il s’y soit produit des évènements inimaginables, ou que pendant ces sept semaines, le Bouddha ait commencé l’enseignement du Soutra de l’ornementation fleurie.

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LIVRE 3 : L’enseignement du Bouddha

Traduction : Marc Agate.

113. La compilation finale

…Après cela,

Le moine Mahadeva et ses disciples

Proclamèrent cinq fondements à partir desquels les quatre écoles principales

Et les dix-huit ordres qui en furent issus se constituèrent.

Après la compilation intermédiaire, suite à l’extinction, entre autres, de la lignée des sept patriarches, Mahadeva, le fils d’un grand marchand de la région de Maruta, commis trois actes à rétribution immédiate, qu’il dissimula, puis parti au Cachemire où il devint un renonçant. Versé dans les trois collections, il s’engagea avec détermination dans la pratique solitaire de l’absorption et fut connu comme le destructeur de l’ennemi Béni-des-démons. Ses richesses, son honneur et sa gloire se développèrent. Lorsqu’il se rendait au temple, accompagné d’une vaste assemblée, les moines récitaient tour à tour le Soutra de la

libération individuelle.2 Ces récitations terminées, Mahadeva chantait :

Les dieux ont été abusés par l’ignorance,

Le chemin apparaît de la continuité du son,

Les dubitatifs sont persuadés par d’autres,

Tel est l’enseignement du Bouddha !

Bien que les nobles, les moines, et les anciens lettrés s’écrièrent : « Ce ne sont pas les mots des soutras ! », la majorité des jeunes se rallia à Mahadeva et un débat fut lancé au cours duquel Mahadeva donna de nombreuses interprétations erronées de la parole.

Après sa mort, son disciple Bhadra eut également des analyses contraires au sens de la parole, et jeta le doute sur de très nombreux points. Il proclama alors cinq points [au sujet des destructeurs de l’ennemi] : qu’ils peuvent répondre à autrui, qu’ils sont encore dans l’ignorance, l’hésitation, le doute, sujets aux imaginations, capables de se maintenir par eux-mêmes, etc.. Dès lors, le doute et l’hésitation des membres ordinaires de la communauté se transforma en un désaccord chaotique au sujet de l’enseignement et la récitation du Soutra

[de la libération individuelle] s’effectua de diverses manières. Les destructeurs de l’ennemi eux-mêmes furent incapables d’apaiser les tensions et les moines ne comprirent [leurs erreurs] qu’une fois morts Bhadra et ses disciples.

Plus tard, un moine appelé Naga proclama cinq points à son tour et provoqua de nouveau une immense controverse au sein de la communauté qui se divisa en quatre écoles de base : Mahasamghika (grande assemblée), Sarvastivada (Tenants-de l’existence-de-tout), Sthavira (école des anciens) et Sammitiya (ceux qu’on respecte). Sthiramati, un disciple de

2 Prātimokṣa-sūtra // so sor thar pa'i mdo - Dergé (sde dge): (D 2) 'dul ba, ca 1b1-20b7 (vol. 5)

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Naga, énonça également cinq points qui donnèrent lieu à d’immenses disputes et les quatre écoles se scindèrent progressivement en dix-huit [divisions].

Le Compendium de l’enseignement des écoles, issu du cycle des lectures successives

des textes3 [de Vinitadeva] énumère ces dix-huit divisions :

1) Purvashaila ([montagnards] de l’est) ; 2) Aparashaila ([montagnards] de l’ouest) ; 3) Haimavata (himalayens) ; 4) Lokottaravada (tenants du supramondain) ; 5) Prajnaptivada (nominalistes) ; telles sont les cinq divisions de la grande assemblée ;

6) Mulasarvastivada (tenants de la base de l’existence de tout) ; 7) Kashyapiya (disciples de Kashyapa) ; 8) Mahishasaka (disciples de Mahishasa) ; 9) Dharmaguptaka (disciples de Dharmagupta) ; 10) Bahushrutiya (érudits) ; 11) Tamrashatiya (robes rouges) ; 12) Vibhajyavada (tenants-des-distinctions) ; telles sont les sept divisions de l’école des Tenants-de-l’existence-de-tout ;

13) Jetavaniya (résidents de Jetanana) ; 14) Abhayagirivada (résidents d’Abhayagiri) ; 15) Mahaviharavada (ceux-du-grand-temple) ; [telles sont les trois divisions de l’école des anciens].

16) Kaurukullika (ceux-de-la-montagne-Kurukulla) ; 17) Avantaka (ceux- d’Avanti –gardiens) ; 18) Vatsiputriya (disciples de Vatsiputra) ; telles sont les trois divisions de l’école de ceux-qu’on-respecte ;

Dix-huit divisions différentes ont été énoncées

Selon le lieu, le thème et l’enseignant.

Les positions varient selon les écoles, concernant le nombre d’écoles à l’origine ainsi que leur formation. Ce qui est rapporté ici est conforme à la tradition des tenants-de-l’existence-de-tout.

Quatre cents vénérables et cinq cents destructeurs de l’ennemi,

Parmi lesquels Parshva, furent invités par le roi Kanishka.

Les ordres séparés furent établis comme le canon et la triple collection mise par écrit :

Ce fut la troisième compilation de la parole.

A cette époque, cinq cents destructeurs de l’ennemi, emmenés par le noble érudit accompli Parshva, quatre cents moines, parmi lesquels Vasumitra, et cinq cents bodhisattvas furent invités par le roi Kanishka. Il les pria de s’installer dans le temple récemment érigé de Karnikavana, dans la région du Cachemire. Concernant l’ensemble des dix-huit divisions, ce qui est dit dans le Soutra des rêves prémonitoires de kriti est une indication :

3 Vinitadeva // Samayabhedoparacanacakre nikāyabhedopadeśanasaṃgraha-nāma // gzhung tha dad pa rim

par bklag pa'i 'khor lo las sde pa tha dad pa bstan pa bsdus pa zhes bya ba - Dergé (sde dge): (D 4140) 'dul ba, su 154b3-156b4 - Toh. 4140

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Grand roi, ce que vous avez vu en rêve - une seule pièce de coton, qui bien que tirée

par dix-huit hommes, n’était pas déchirée – enseigne la réalité. Quoiqu’il y ait dix-huit

divisions, il est impossible que soit déchirée l’etoffe de la libération.

Les autorités scripturaires établirent que [les dix-huit divisions] forment le canon. La phénoménologie fut enseignée dans sa totalité. Ceci est connu comme la troisième compilation de la parole. C’est à ce moment que la discipline au complet fut mise par écrit. On rédigea aussi toute partie des discours ou de la phénoménologie qui ne l’était déjà et l’ensemble fut soumis à révision. Les [lettrés] du Cachemire affirment qu’il en fut ainsi, tandis que pour ceux des régions centrales [de l’inde], la troisième compilation prit place au monastère de Jalandhara, dans le temple Kusana.

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LIVRE 4 : La diffusion des enseignements du Vainqueur dans le continent du Jambu

Traduction : Marc Agate.

412.112. La voie du milieu

L’ancêtre commun des accomplis, le vénérable Rahulabhadra,

Elucida en premier le système de la voie du milieu du véhicule suprême.

C’est vers cette époque que l’ancêtre de tous les accomplis, le brahmin Rahulabhadra, fut complètement ordonné par le vénérable Krishna. Il reçut un océan de soutras et tantras du grand véhicule auprès de nombreux maîtres - parmi lesquels Avitarka - et de nombreuses déités, y compris le Maître des secrets. Les enseignements qu’il donna [par la suite] à Nalanda élucidèrent complètement pour la première fois le système de la voie médiane du grand véhicule ; cette période vit naître huit grands maîtres de la tradition de la voie du milieu, dont Kamalagarbha. Parmi ceux-ci, le vénérable moine Kashadharmamani reçut directement les enseignements du [bodhisattva] Sarvanivarana Viskambin, obtint l’acceptation de la non-production des phénomènes, et retira des mondes souterrains le Soutra du grand compendium

4, en mille chapitres et cent mille stances.

Puis le second bouddha, le noble Nagarjuna,

Retira le Soutra de la perfection de sagesse en cent mille5, en trois collections

Commenta l’intention des trois roues,

Réfuta les objections des tenants-de-l’existence et établit la parole du grand véhicule.

Le grand maître Nagarjuna, dont l’activité éveillée fut celle d’un second bouddha, naquit au sud de la région de Vaidharbha. Le Soutra de l’entrée à Lanka

6 raconte :

Au sud de la région de Vaida,

Connu comme le grand moine Shriman,

Il portera le nom de « Naga »,

Et détruira les extrêmes d’existence et de non existence.

Ce véhicule qui est le mien, en ce monde

Il le révélera comme le véhicule insurpassable ;

Il atteindra « terre joyeuse »

4 Mahāsamaya-sūtra // 'dus pa chen po'i mdo - (D 34) shes rab sna tshogs, ka 259b4-263a4 (vol. 34)

5 śatasāhasrikā-prajñāpāramitā // shes rab kyi pha rol tu phyin pa stong phrag brgya pa - (D 8) 'bum, ka 1b1-

394a7; kha 1b1-402a7; ga 1b1-394a4; nga 1b1-381a7; ca 1b1-395a5; cha 1b1-382a7; ja 1b1-398a7; nya 1b1-399a7; ta 1b1-384a7; tha 1b1-387a7; da 1b1-411a7; a 1b1-395a6 (vols. 14-25) 6 ārya-laṅkāvatāra-mahāyāna-sūtra // 'phags pa lang kar gshegs pa'i theg pa chen po'i mdo - Dergé (sde dge): (D

107) mdo sde, ca 56a1-191b7 (vol. 49) OU Dergé (sde dge): (D 108) mdo sde, ca 192a1-284b7 (vol. 49)

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Puis migrera en Sukhavati.

Le Vainqueur avait prédit [Nagarjuna] dans de nombreux soutras et tantras : Soutra

du grand tambour7, Tantra racine de Manjushri

8, Tantra de Kalachakra9, etc.. Il passa deux

cents ans de sa vie à Madhyadesa, deux cents autres dans le sud de l’Inde, et cent vingt-neuf ans au mont Shiparvata. Il étudia, enseigna, médita, bâti dix millions de temples et de stoupas, subvint aux besoins de la communauté, fit le bien des non-humains, des nagas, etc., et réfuta les objections des non-bouddhistes. Par tous les moyens, il protégea la doctrine authentique ; en particulier, il fit preuve d’une bonté sans égale dans ses enseignements du grand véhicule.

Du domaine des nagas, il retira le Soutra de la perfection de sagesse en cent mille, et celui-ci venu, plus aucun autre soutra du grand véhicule ne se présenta. En trois collections, celles des conseils, des raisonnements et des louanges, il exposa sans erreur l’intention des trois roues, initiale, intermédiaire et finale, et fut l’instigateur de la tradition du grand chariot. Il réfuta les objections des auditeurs tenants-de-l’existence et fit gronder le rugissement de lion qui établit le grand véhicule. Finalement, lorsqu’il paracheva clairement les trente-deux marques majeures, Nagarjuna consacra l’indestructibilité de sa tête et de son corps, fit don de sa tête à Shaktiman, le fils d’un roi d’Oddiyana, parti pour Sukhavati et purifia les champs de bouddhas. Réintégrant son corps avant longtemps, il diffusera les enseignements et œuvrera sans limites pour le bien des vivants.

Pour la plupart des tibétains, l’identification des trois collections est la suivante :

La collection des conseils comprend deux [textes] :

1. La Lettre à un ami10, une lettre envoyée de très loin à un roi ;

2. La Précieuse Guirlande11, des conseils donnés directement.

La collection des raisonnements comprend cinq textes. Quatre d’entre-eux forment

un ensemble de raisonnements qui mettent un terme aux extrêmes de l’élaboration

concernant l’objet de la preuve :

1. Les Stances racines du milieu 12;

2. Les Soixante stances du raisonnement 13;

3. Les Soixante-dix stances sur la vacuité14 ;

7 ārya-mahābherīhāraka-parivarta-nāma-mahāyāna-sūtra // 'phags pa rnga bo che chen po'i le'u zhes bya ba

theg pa chen po'i mdo - (D 222) mdo sde, dza 84b5-126b7 (vol. 63) 8 ārya-mañjuśrī-mūla-tantra // 'phags pa 'jam dpal gyi rtsa ba'i rgyud - Dergé (sde dge): (D 543) rgyud, na

105a1-351a6 (vol. 88) 9 Paramādibuddhoddhrita-śrī-kālacakra-nāma-tantrarājā // mchog gi dang po'i sangs rgyas las phyung ba rgyud

kyi rgyal po dpal dus kyi 'khor lo zhes bya ba - Dergé (sde dge): (D 362) rgyud, ka 22a1-128b7 (vol. 77) 10

Nāgārjuna // Suhṛllekha // bshes pa'i spring yig - Dergé (sde dge): (D 4182) spring yig, nge 40b4-46b3 11

Nāgārjuna // Rājaparikathāratnāvali / ratnāvali // rgyal po la gtam bya ba rin po che'i phreng ba - (D 4158) skyes rab / spring yig, ge 107a1-126a4 12

Nāgārjuna // Prajñā-nāma-mūlamadhyamakakārikā // dbu ma rtsa ba'i tshig le'ur byas pa shes rab ces bya ba - Dergé (sde dge): (D 3824) dbu ma, tsa 1b1-19a6 13

Nāgārjuna // Yuktiṣaṣṭikākārikā-nāma // rigs pa drug cu pa'i tshig le'ur byas pa zhes bya ba - Dergé (sde dge): (D 3825) dbu ma, tsa 20b1-22b6

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4. La Réfutation des objections15 ;

[Un cinquième texte] de la collection des raisonnements réfute la logique

d’établissement des preuves des dialecticiens :

5. La Réduction à l’état de poussière16 ;

La collection des louanges [comporte neuf textes]. Deux d’entre-eux se rapportent à

la base :

1. Louange de la luminosité des phénomènes ;

2. Louange de l’étendue de la réalité 17;

Deux concernent le chemin :

3. Louange des méthodes, grande compassion ;

4. Louange de la connaissance transcendante, mère des quatre sublimes 18;

Un se rapporte au fruit :

5. Louange de chacun des trois corps 19;

Les quatre textes suivants, qui ne sont pas classées séparément, sont des louanges qui

concernent l’essence de la vue :

6. Louange du sens ultime 20;

7. Louange de l’incomparable 21;

8. Louange de l’inconcevable 22;

9. Louange du supramondain 23;

14

Nāgārjuna // śūnyatāsaptatikārikā-nāma // stong pa nyid bdun cu pa'i tshig le'ur byas pa zhes bya ba - Dergé (sde dge): (D 3827) dbu ma, tsa 24a6-27a1 15

Nāgārjuna // Vigrahavyāvartanīkārikā-nāma // rtsod pa bzlog pa'i tshig le'ur byas pa zhes bya ba - Dergé (sde dge): (D 3828) dbu ma, tsa 27a1-29a7 16

Nāgārjuna // Vigrahavyāvartanīkārikā-nāma // rtsod pa bzlog pa'i tshig le'ur byas pa zhes bya ba - Dergé (sde dge): (D 3828) dbu ma, tsa 27a1-29a7 17

Nāgārjuna // Dharmadhātu-stotra // chos kyi dbyings su bstod pa - Dergé (sde dge): (D 1118) bstod tshogs, ka 63b5-67b3 18

Nāgārjuna / Rāhulabhadra // Prajñāpāramitāstotra // shes rab kyi pha rol tu phyin ma'i bstod pa - Dergé (sde dge): (D 1127) bstod tshogs, ka 76a1-76b7 19

Nāgārjuna // Kāyatrayastotra-nāma // sku gsum la bstod pa zhes bya ba - Dergé (sde dge): (D 1123) bstod tshogs, ka 70b3-71a2 20

Nāgārjuna // Paramārthastava // don dam par bstod pa - Dergé (sde dge): (D 1122) bstod tshogs, ka 70a2-70b2 21

Nāgārjuna // Nirupamastava // dpe med par bstod pa - Dergé (sde dge): (D 1119) bstod tshogs, ka 67b3-68b4 22

Nāgārjuna // Acintyastava // bsam gyis mi khyab par bstod pa - Dergé (sde dge): (D 1128) bstod tshogs, ka 76b7-79a2 23

Nāgārjuna // Lokātītastava // 'jig rten las 'das par bstod pa - Dergé (sde dge): (D 1120) bstod tshogs, ka 68b4-69b4

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RimayEncyclopaedia - 11 – Encyclopédie des connaissances

LIVRE 5 : L’éthique

Traduction : Samuel Lambert

15. LES CARACTERISTIQUES DE L’ELEVE QUI SERT

Deux parties : la personne à accepter et celle à refuser, avec un appendice.

151. La personne à accepter

Trois parties : le candidat adapté pour les vœux de libération individuelle, de bodhisattva, ou du mantra.

151.1. Le candidat pour les vœux de libération individuelle

Le candidat approprié sera dégagé des obstacles aux vœux de libération individuelle.

D’une manière générale, celui qui est approprié pour les vœux de libération individuelle doit être libre des quatre types d’obstacles et de conditions défavorables qui leur sont contraires. En particulier, on lit dans les Trois Cent Stances [sur le Novice] :

Respectueux envers le précepteur, d’une éthique immaculée,

Toujours persévérant dans la méditation et l’étude,

Scrupuleux et contrôlé, patient,

Sachez que [celui-là] possède les qualités pour la vie religieuse.

Celui qui est capable de vivre selon les vœux de libération individuelle, aura les qualités suivantes : une dévotion constante envers le précepteur d’ordination, surtout à l’égard du tuteur et instructeur ; la capacité de suivre assidûment la discipline par l’abandon des quatre causes de chute ; l’application constante à l’absorption méditative, à la lecture à haute voix ou la récitation ; une pensée très concentrée et un caractère naturellement discipliné ; la patience face aux directives du maître et aux torts provoqués par les autres.

151.2 Le candidat pour les vœux de Bodhisattva

Le candidat pour les [vœux de] bodhisattva est confiant, bienveillant, intelligent,

Endurant dans la conduite, la paix individuelle ne l’intéresse pas ;

Énergique, il aime à entendre [ce qui touche à] la vacuité.

Le candidat pour les vœux de bodhisattva aura foi dans le canon du grand véhicule et l’ami de bien, il sera aimant et compatissant envers les êtres, il aura l’intelligence pour comprendre ce qui est profond et vaste, sera patient en s’engageant avec courage dans les

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amples activités, notamment les quatre moyens de rassemblement et les six perfections, il ne recherchera pas le seul rang de la félicité et de la paix pour soi-même et il [œuvrera] avec joie à la libération de tous les êtres, sa diligence sera constante et il prendra plaisir à entendre parler de la profonde vacuité. Ce sont là les signes d’éveil de la famille [du grand véhicule]. Il est dit dans le Soûtra des Dix Qualités :

C’est par des signes que l’on connaît La famille des sages bodhisattvas, Comme on sait par la fumée qu’il y a du feu, Ou de l’eau par les hérons.

Et dans le Traité en Quatre Cent Vers [d’Aryadeva] :

La personne intègre, intelligente et persévérante Est un candidat approprié.

Il est intègre parce qu’impartial, il n’a ni attachement pour sa propre tradition ni hostilité envers les autres ; il est intelligent parce qu’il sait distinguer les enseignements véritables des fallacieux ; et il ressent un fort intérêt pour la pratique du grand véhicule. La personne qui possède ces trois, verra comme telles les qualités de l’ami de bien. Celle qui ne les a pas verra des défauts même chez l’ami de bien qui a de grandes qualités.

151.3 Le candidat pour le mantra secret

Le candidat pour le mantra [possède], en outre, la dévotion pour le maître : Capable [de maintenir] le secret, de vaste intelligence, il s’efforce à la pratique des promesses.

Outre ce dont nous venons de parler, l’élève auquel conférer [les initiations] du mantra secret qui mûrissent et [les instructions] qui libèrent a une dévotion profonde pour le maître ; il est capable de garder secrètes la vue profonde et la conduite, etc. ; il ne nourrit pas de doutes concernant le mantra secret et il a une vaste intelligence pour comprendre l’ainsité ; il s’efforce [de maintenir] les promesses d’adoption et de rejet, et de pratiquer. Le Tantra Condensé de la Roue du Temps, le tantra explicatif Guirlande Indestructible et d’autres, expliquent ceci en détail.

Un tantra des traductions anciennes, le Déploiement Magique, décrit ainsi les qualités du candidat qui convient pour s’engager sur cette voie :

Vénérer le maître, être diligent, une comprendre clairement, Ne pas briser les promesses, connaître les mantras et les sceaux, Et disposer du nécessaire. Vénérer le maître permet d’obtenir graduellement les initiations, la dévotion et la

persévérance de ne pas négliger l’écoute et la réflexion, une intelligence claire et indéfectible pour examiner la vue à réaliser. Les promesses principales et secondaires ne se

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détérioreront pas, il a pénétré le sens des mantras, des sceaux, etc., et il est muni de l’instrument des conditions favorables.

152. La personne à refuser

Il a des défauts : on le refusera ; ceux-ci sont mêlés de foi : on l’acceptera.

Il faudra refuser la personne qui a des défauts contraires aux qualités d’un disciple. Le Samvara [Tantra] explique :

Toujours, le maître refusera Celui qui est dénué de compassion, colérique et malveillant, Arrogant, excessif, distrait, Cruel, stupide, paresseux, Qui est dénué de bienveillance pour la vie des autres, Convoite leurs biens.

Dans les Cinq Etapes [de Nagarjuna]:

A celui qui méprise le maître, est dissimulateur, sans foi, Que le mantra rend vaniteux, arrogant pour avoir vu des livres, Qui manque de confiance et a reçu des initiations inférieures, On n’enseignera pas les conseils graduels.

Quand défauts et qualités sont mêlés, mais qu’il aspire fortement à la foi, etc., il sera accepté même s’il ne possède pas toutes les caractéristiques. Il est dit dans le Tantra Secret

du Rituel Général de Tous les Mandalas :

Rares sont les élèves dont les promesses ne sont pas endommagées, Qui ont des qualités d’exception, Sont en bonne santé et de noble lignage, Ont foi et pratiquent. Acceptez les personnes remarquables Qui ont foi dans les trois joyaux, Aiment la tradition du grand véhicule Et sont porteuses de mérites. Les élèves qui montrent de l’intérêt et s’efforcent D’accomplir le mantra secret de l’Allé en la joie, Même disgraciés et sans éducation, Les personnes perspicaces les encouragent.

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LIVRE 6 : Chapitre 3 – Perspectives philosophiques

Traduction : Cécile Ducher

5. Le raisonnement de la production en dépendance

Pour les tenants-du-milieu, le roi des raisonnements prouvant l’absence d’existence réelle est le signe de la grande production en dépendance. Comme le déclare le Traité du

milieu :

Ce qui se produit en dépendance Est en essence paisible.

« La pousse n’existe pas vraiment, parce que c’est une production dépendante » : ceci élimine à la fois l’extrême de la permanence et de l’anéantissement.

Pour le premier : les entités extérieures et intérieures n’ont pas d’existence ultime parce qu’elles sont produites en dépendance.

Pour le second : ces entités ne sont pas conventionnellement inexistantes, parce qu’elles sont produites en dépendance.

Les conséquentialistes affirment que ces cinq sont reconnus par autrui, et les autonomes qu’il s’agit de raisonnements autonomes.

En bref, dans le système [conséquentialiste], il n’y a pas la moindre production à partir des quatre options – de soi, d’autres, etc. – mais comme elle est reconnue dans le monde, leurs explications s’y conforment. L’Entrée au milieu déclare :

Alors qu’il n’a fait que donner la semence Le monde dit : « J’ai engendré ce fils », Et pense : « [J’]ai planté un arbre ». Par conséquent, même d’après le monde la production à partir d’autres n’existe pas.

Raisonnement établissant le non-soi des personnes

Le septuple examen du char prouve le non-soi des personnes. L’Entrée au milieu déclare :

Nous n’acceptons pas que le char soit différent de ses membres ; Il n’en est pas non différent, ne les possède pas, Il n’est pas dans ses membres, ses membres ne sont pas en lui, Il n’est pas leur simple collection, ni leur figure. À la quintuple [analyse] – un char n’est pas différent des ses membres, clous et

autres – [Chandrakirti] ajoute celle de la collection et la figure. Si l’on recherche l’objet désigné au moyen du septuple examen, le char n’est trouvé ni comme ses parties elles-mêmes ni comme autres qu’elles. Si l’on considère de même le soi au moyen du septuple examen, on constate qu’il n’est ni différent des agrégats, ni identique. Ici, la figure et la

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collection sont réfutées de manière implicite, dans la mesure où on ne les trouve pas ailleurs que dans ce qui a forme et ce qui est une collection.

[L’ultime véritable]

L’ultime véritable est au-delà de la pensée ; les proliférations n’y opèrent pas.

Trancher les proliférations en écartant les huit extrêmes et autres est simple convention.

Ce qui est prouvé par ces raisonnements n’est pas, par exemple, l’établissement de l’ultime par exclusion du relatif. L’ultime véritable allant bien au-delà du domaine du mental et des mots, aucune prolifération mentale ne s’y applique. En effet, les techniques comme celles qui dissipent les proliférations des huit extrêmes – la production et la cessation, la permanence et l’annihilation, l’allée et la venue, l’identité et la différence – sont des proliférations. Elles sont utilisées en tant que simples conventions en accord avec ce qui est reconnu par autrui pour couper les proliférations du relatif.

Une thèse relève de l’intellect, et l’intellect est relatif.

Dès lors, affirmations et thèses autonomes n’existent pas.

La non-production et le reste ne sont pas non plus des thèses

Car elles renversent l’adhésion aux choses de toute éternité inexistantes.

Il est dit que par ce renversement est aussi abandonné l’appréhension des non-choses.

Toutes les thèses, quelles qu’elles soient, sont la création de l’intellect, et l’intellect est une connaissance confuse, il est relatif. C’est pourquoi les conséquentialistes n’ont pas de thèse ou d’affirmation autonome. Même l’absence de production et celle de prolifération ne sont pas présentées comme des thèses autonomes. Elles sont prononcées 1) pour renverser l’attachement à l’existence réelle des non-bouddhistes et des bouddhistes réalistes qui sont tombés dans les extrêmes de la surestimation et du rejet [et posent] des phénomènes et des personnes depuis toujours inexistants. 2) Pour éliminer, une fois que ces saisies réalistes ont été renversées, l’intellect qui saisit les non-choses. Ainsi est-il dit que [l’ultime] passe l’intellect et est insaisissable. Comme le déclare Shantideva :

Quand réel et irréel Ne se présentent plus à l’esprit, Et en l’absence d’autre possibilité, C’est l’apaisement libre de tout support.

Leur philosophie insiste sur l’entrée dans la paix non née, libre de proliférations,

En l’absence de tout mode de saisie.

Tous les Nobles pères et fils insistent sur le fait que la philosophie analysée rationnellement de cette tradition enseigne que [l’ultime] est l’entrée dans la paix non née et libre de proliférations, en l’absence de tout mode de saisie d’un point de référence.

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LIVRE 6 : Chapitre 4 – Tantras Bouddhiques

Traduction : Georges Driessens

122.131. Déterminer la nature du mantra

Sa nature est l'union de la compassion et de la vacuité.

La nature du mantra est l'union de la sagesse, la vacuité, et de la méthode, la grande compassion. Le tantra racine de Kalachakra dit :

« Mantra » parce qu'il protège Les éléments corporel, verbal et mental. Le terme « mantra » indique L'immuable sagesse originelle de la vacuité; Apparu du mérite et de la sagesse originelle, Le mantra a pour nature la vacuité et la compassion.

122.132. Etymologie

Il est défini comme ce qui protège l'esprit des conceptions de signes.

Quant à l'étymologie du terme mantra (sngags), man [signifie] esprit (yid) et traya

(skyob pa) protéger: ce qui protège l'esprit des conceptions de signes est mantra. Dans une traduction directe, il est « expression secrète », parce qu'accompli en secret, confidentiellement, ou, ne relevant pas du domaine d'expérience des personnes qui y sont inaptes, expliqué comme « mantra secret ». Dans la Continuation du Guhyasamaja :

Tout esprit qui s'élève en raison Des organes des sens et des objets, Cet esprit est man, Et tra a le sens de protégér. Tout voeu ou promesse que l'on considère Affranchi des conduites mondaines Et protégé par les vajras Est dit « conduite du mantra ». Et Maître Shraddhkaravarman, dans son Sommaire d’introduction au sens du tantra

insurpassable :

Il est secret parce qu'accompli en secret et confidentiellement, ou ne relève pas du domaine d'expérience des inaptes.

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122.133. Enseignement général sur les divisions du mantra et tantra

Deux parties: systèmes du mantra et divisions du tantra.

122.133.1. Systèmes du mantra

Deux parties: discussion principale et discussion accessoire sur la distinction entre mantra et tantra.

122.133.11. Discussion principale

Trois formes: supérieure, moindre, secondaire.

En essence, grande félicité, fierté divine, le mantra et son application;

Ou bien, complète, incomplète, spéciale,

Félicité [initiale], presque entière, partielle, faible félicité.

Le mantra a trois formes: supérieure, moindre et secondaire. Dans l'ordre, leur

essence est la grande félicité, la fierté de la déité, les simples mantras et applications. La phase de perfection illustre la première, la phase de génération [la seconde], les méthodes d'accomplissement d'activités subtiles [les troisièmes].

Les deux premières [supérieure et moindre] sont authentiques, étant associées aux voeux ou principes du véhicule du mantra et des détenteurs de connaissance; la dernière est purement nominale.

Ou encore, sept formes du mantra sont expliquées: voie complète, incomplète, spéciale, félicité initiale, grande félicité presque entière, grande félicité partielle, et grande félicité faible. Toutes sont dites « grande félicité », mais dans la mesure où celle-ci est en elle-même la voie complète, ces distinctions sont inutiles.

122.133.12. Discussion accessoire sur la distinction entre mantra et tantra

Le mantra secret et la sagesse originelle de grande félicité constituent le mantra;

Son application, ses activités et accomplissements, le tantra.

Ce thème et ses expressions sont aussi connus comme tantra.

Comment déterminer la distinction entre mantra et tantra? Les mantras secrets et la sagesse originelle de grande félicité sont appelés mantra. Ses applications, c'est-à-dire les collections d'activités et d'accomplissements sont connues comme tantra. Ou bien, le sujet, les tantras de la base, de la voie et du fruit ainsi que son expression, le canon qui les révèle, sont tous deux des tantras; dès lors, il existe des contextes dans lesquels la distinction mantra/tantra n'a pas cours.

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LIVRE 8 : Chapitre 3 – Eléments de pratique tantrique

Traduction : Sylvie Carteron

[221.311.1] Trois absorptions

Les branches des séquences de visualisation dans la structure en trois absorptions –

Union initiale, action de suprême victoire et mandala de suprême victoire –

Relèvent du système de la Guirlande adamantine et s’appliquent à l’ensemble du [tantra du] yoga.

En raison des approches des tantras individuels et des grands maîtres, il existe une grande diversité de branches formant les séquences de visualisation de la phase de création. La Guirlande adamantine, un tantra explicatif du grand yoga ou explicatif général, présente pour ces différentes branches une structure composée de trois absorptions, comme cet énoncéi :

L’union initiale comprend le yoga, Le yoga subséquent, le yoga supérieur Et le grand yoga. Le grand yoga consiste En le mandala de suprême victoire Et l’action de suprême victoire.

Les trois absorptions sont celles de l’union initiale, de l’action de suprême victoire et du mandala de suprême victoire. En tout, on dénombre six yogas quand ceux des deux suprêmes victoires sont ajoutés aux quatre [de la citation ci-dessus]. Cependant, ces quatre premiers yogas étant tous inclus dans l’union initiale, l’expression « trois absorptions » ou « trois yogas » est utilisée.

Toutes trois forment une grande structure du corps principal de la sadhana. Elles figurent donc à la fois dans le tantra du yoga et celui du grand yoga, de même que dans les deux [catégories de] tantras, pères et mères, du grand yoga.

Toutes les expositions concordent clairement sur cette explication générale : « l’union initiale et les deux absorptions de suprême victoire sont des processus de méditation qui accomplissent principalement, l’une, le propre bien du [pratiquant], et les deux autres, le bien d’autrui ». Ici, cela signifie simplement que l’éveil complet de soi-même précède le stade d’application au bien d’autrui.

Il existe de nombreux moyens de distinguer les trois absorptions, qui ne seront pas décrits ici. Mais la signification essentielle des trois est expliquée ainsi : [La première,] où le corps est le point de référence, consiste en l’absorption de [soi-même sous l’aspect des] divinités père-mère principales, dont émaneront les [autres] divinités du mandala. Effectuée avant les deux autres, elle est [dite] initiale et, unissant inséparablement la méthode et la sagesse, union. Pour mentionner ses principaux points, l’union initiale inclut toutes [les étapes de la visualisation] depuis la création [du mandala] de résidence jusqu’à celle des [figures principales] père-mère.

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[La seconde], le mandala de suprême victoire, consiste en [la visualisation de] la totalité des divinités du mandala émanées de la bodhichitta de ces deux [père-mère] et leur disposition à leurs places respectives. Le mandala avec son entière composition étant parachevé, [cette absorption est nommée] le mandala de suprême victoire.

[La troisième,] effectuée ensuite, consiste en actes tels que la purification des mondes [d’existence] par toutes les divinités. Ces actes étant similaires à ceux du Bouddha, [cette absorption est nommée] l’action de suprême victoire.

Comme expliqué ci-dessus, ceci représente le système de la Guirlande adamantine, une large structure qui englobe l’ensemble du [tantra du] yoga, intérieur et extérieur.

[221.311.2] Forme, mantra et réalité

Le Mahamaya enseigne les trois [yogas de] la forme, du mantra et de la réalité.

Dans le Mahamaya et d’autres tantras, une formulation en trois [yogas] – de la forme, du mantra et de la réalité – s’applique à la voie et au résultat et, pour la voie, aux deux phases de création et achèvement.

Dans le contexte de la phase de création, toutes les étapes depuis la complète manifestation des formes des divinités principales jusqu’à l’[absorption du] mandala de suprême victoire constituent le yoga de la forme. L’action de suprême victoire correspond au yoga du mantra. [Le yoga de] la sphère subtile, etc., constitue le yoga de la réalité. D’après une explication différente, la [phase de] création correspond au yoga de la forme ; la récitation, au yoga du mantra ; entrer dans la clarté lumineuse et en réapparaître, au yoga de la réalité.

[221.311.3] TROIS YOGAS

D’autres [tantras], la consécration, l’imagination et l’achèvement de la forme.

Un certain nombre d’autres [tantras] enseignent trois yogas différents. Dans sa Lampe éclatante, Chandrakirti cite le splendide Filet de manifestation prodigieuse, roi des

tantras :

Une triade de yogas doit être connue : Consécration, imagination, Et parachèvement de la forme même. De ces yogas, tous les bouddhas font l’éloge.

Engendrer la fierté par les bénédictions des mantras Constitue le yoga de la consécration, est-il dit. La pureté de l’esprit d’éveil produit abondance De graines du mantra secret. La forme complète achevée par étapes, Conçue comme un ensemble de symboles,

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Constitue le yoga rituel Appelé imagination, est-il dit. La manifestation instantanée de la sagesse originelle Dotée de l’aspect suprême entre tous, Accomplissant l’émanation et la résorption, Est appelée yoga de l’achèvement.

Les trois yogas sont ceux de l’imagination parfaite, de la consécration et du parachèvement.

Le premier, le yoga de l’imagination, consiste à engendrer – de l’état de vacuité et suivant les étapes de la syllabe-germe, l’attribut symbolique, etc. – la forme complète de la divinité avec ses visages et bras. Ceci est le yoga de la divinité de la phase de création proprement dit. De plus, sous l’angle du développement de la félicité, c’est le yoga de la divinité connu comme phase d’achèvement avec signes, qui a pour objet les syllabes, les sphères [de lumière], l’émanation et la résorption des rayons de lumière, etc.

Le second, le yoga de la consécration, consiste en la consécration par la félicité-vacuité – le mantra – d’où est instantanément créée la divinité avec visages et bras [au stade de] l’isolement du corps ; l’inséparabilité de souffle subtil et de mantra [au stade de] l’isolement de la parole] ; et la félicité, etc., manifestée juste en un instant, sans utiliser de méthodes imaginatives, ni [divinité avec] visages et bras, [au stade de] l’isolement de l’esprit.

Le troisième, le yoga du parachèvement, consiste en le corps illusoire avec visages et bras [au stade de] l’union et en la grande félicité [au stade de] la clarté lumineuse, sans [divinité avec] visages et bras. Il inclut les cinq stades [de la phase d’achèvement]. Son application à la phase de création seule se comprend facilement.

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LIVRE 8 : Chapitre 4 – Instructions ésotériques Traduction : Collectif – Extrait : Les Instructions d’approche des trois vajras

Trois parties : l’approche du corps adamantin, l’accomplissement de la parole adamantine et le grand accomplissement de l’esprit adamantin.

282.11. Approche du corps adamantin

L’approche du corps adamantin purifie les canaux du corps, Les trois postures lient les souffles hauts, intermédiaires et bas, Les dix souffles une fois entrés dans le canal central, les formes vides sont vues.

Les bases de purification sont les 72 000 canaux du corps doté des six constituants. Ils sont purifiés par la branche de l’approche dans le retrait et le recueillement, ou par l’approche du corps adamantin. Après avoir rassemblé les [conditions] nécessaires en écartant tout mode de vie perverti, on effectue les pratiques préliminaires communes. Puis les souffles hauts, intermédiaires et bas sont liés selon les instructions ésotériques des trois postures : la posture supérieure pour les souffles hauts, la posture inférieure pour les souffles bas et la posture du milieu pour les souffles intermédiaires. En s’efforçant jour et nuit à ce yoga, les dix souffles racines et rameaux, ainsi que toutes les pensées discursives, entreront dans l’avadhuti et s’arrêteront, liant l’esprit d’éveil relatif et ultime – ce qui fait naître l’absorption. On voit alors apparaître la fumée et autres innombrables signes de formes vides. Cet accomplissement se mesure par le don sublime des mots, l’accomplissement des paroles de vérité. Puis, quand les cinq branches du recueillement, comme le discernement, sont complètes, les cinq connaissances supérieures sont actualisées.

282.12. Accomplissement de la parole adamantine

L’accomplissement de la parole adamantine purifie les souffles de la parole. Avec la maîtrise des souffle vital, vidant par le bas, de jonction, et la répétition adamantine, La goutte est pénétrée et sont réalisés les hauts faits.

Les objets à purifier, ce sont les 21 600 souffles, l’essence de la parole. Ils sont purifiés par la branche de l’accomplissement de la maîtrise du souffle et de la rétention, ou l’accomplissement de la parole adamantine. Quand les visions des formes vides sont stables, on médite sur les instructions ésotériques concernant les souffles supérieurs d’énergie vitale, les souffles inférieurs vidant par le bas, et les souffles intermédiaires de jonction.

Au début, est cultivée la voie avec la répétition adamantine qui applique les pratiques d’entrée, de maintien et de conclusion à l’esprit, à la parole et au corps éveillés. Par l’absence de point de référence, les souffles deviennent voie – ce que l’on recherche dans la base fondamentale en appliquant les souffles des cinq éléments. On médite sur le siège et l’empilement progressif des éléments en appliquant le souffle vidant par le bas. Les syllabes germes sont créées en appliquant le contrôle du souffle vital du haut. Les attributs manuels

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sont créés à partir du souffle intermédiaire. Dès lors que l’on parvient à maîtriser mentalement ces souffles, dans la rétention [est pratiqué] le yoga qui fait s’élever la forme de la déité en appliquant le souffle de jonction ; la récitation adamantine du corps, de la parole et de l’esprit éveillés sans compter les grains [du chapelet] mais en ayant recours au contrôle du souffle vital ; et la récitation silencieuse pour les activités paisibles et autres en appliquant les quatre souffles de l’eau, [etc.].

« Souffle vital » (srog) désigne le souffle ascendant et « maîtrise » (litt. effort ; rtsol

ba), la pratique de guidance qui intègre les souffles à la voie. Ainsi, le yoga qui bloque le souffle lorsque l’allée et venue du soleil et de la lune ont cessé, rendra manifeste le souffle de sagesse primordiale omnisciente. On dit alors que « le souffle est entré dans la goutte ». Le maintien du souffle-esprit dans la syllabe ha˙ est appelé « rétention » – c’est le fruit de la maîtrise du souffle vital. Il permet d’accomplir les douze grandes activités par la simple pensée.

282.13. Grand accomplissement de l’esprit adamantin

Le grand accomplissement de l’esprit adamantin purifie l’esprit et la goutte, L’embrasement des trois feux dans la passion de méthode et sagesse Épure les résidus, la grande félicité immuable est réalisée.

Une fois purifiés, les objets à purifier – l’esprit et la « goutte des sept naissances » – deviennent immuables grâce au rappel et à l’absorption dans la branche du grand accomplissement, ou grand accomplissement de l’esprit adamantin. La purification extérieure, intérieure et secrète des deux séries de cinq nectars produit la force physique. La ligature des souffles supérieurs, inférieurs et intermédiaires embrase le feu de l’ardente de sagesse primordiale et consume les graines des six mondes qui se trouvent dans les six roues de canaux de l’espace, du vent, du feu, de l’eau, de la terre et de la sagesse primordiale. La force des quatre joies dans l’ordre progressif et inverse détruit alors les nœuds des roues de canaux. Libérée des voiles des quatre états, l’ignorance racine du cercle des existences se dissipe et le rappel est accompli.

Comme amplification de cette [pratique], l’échange mutuel dans l’union de la méthode et de la sagesse, où les partenaires spirituels s’unissent physiquement et mentalement en tant que méthode et sagesse, embrase les trois feux dans la passion supérieure. Il s’agit du feu du temps de la jeunesse, du feu de l’absorption et du feu qui naît de la pratique de l’union. Par ce moyen, Rahu avale le soleil et la lune et tous les résidus sont transmués en quintessence. Finalement, après l’arrêt progressif du souffle-esprit depuis le lieu secret, l’essence pure de bodhicitta et les souffles sont stabilisés à la roue de canaux du sommet du crâne et la grande félicité immuable est accomplie ; c’est l’apogée de la branche de l’absorption.

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LIVRE 9 : Les voies et les terres Traduction : Collectif

1.2.3.5.3 La pratique et les personnes

La pratique est surtout celle de l’une des six perfections, la générosité et le reste, propre à chaque terre.

Vue et éthique pures, égalité méditative, absence de préjugés,

Atteinte de l’intelligence, purification, maturation, perfection et transmission de pouvoir.

Le bodhisattva qui séjourne à la première terre pratique essentiellement la perfection de la générosité et son engagement dans les autres perfections est secondaire. Jusqu’à la dixième terre, où il pratique surtout la perfection de sagesse originelle et s’engage occasionnellement dans les autres perfections, chaque terre est associée à une perfection. Ces dix perfections sont décrites dans la Distinction du centre et des limites :

La générosité, la discipline, la patience, la diligence, La concentration, le discernement, la méthode, La prière, la force et la sagesse originelle Sont les dix perfections (…)

Et,

Sachez que ces dix terres Ont des particularités et sont [pourtant] indissociables.

Ainsi, le bodhisattva qui séjourne à la première terre est une « personne dotée d’une vue immaculée », car il a pénétré le domaine de la réalité vide des deux soi ; de même, à la deuxième terre, il est « pourvu d’une éthique immaculée », car il n’est plus souillé par les transgressions, même subtiles ; à la troisième, puisqu’il a atteint des recueillements et des absorptions illimités, il est « établi en égalité méditative » ; à la quatrième, comme il s'est dégagé de la saisie profonde, il est dit « sans arrogance au sujet de la distinction des phénomènes » ; à la cinquième, comme il a atteint l’équilibre de l'esprit, il est « sans arrogance au sujet de la distinction de sa continuité mentale" ; à la sixième, « sans arrogance au sujet de la distinction entre contamination et pureté, parce qu'il [voit] leur pureté naturelle ; à la septième, demeurant dans l'absence de signe, il a « atteint l’intelligence de méditer à chaque instant les facteurs qui concourent à l’éveil" ; à la huitième, parce que spontané, il est « équanime et pleinement purifié " ; à la neuvième, comme il a obtenu la maîtrise sur les quatre connaissances analytiques parfaites, il est « expert à mûrir les vivants » ; à la dixième, il a atteint les hautes connaissances supérieures et donc parachevé le corps qui donne accès au grand pouvoir, aux absorptions et souvenances ; il montrera assurément des manifestations dans des lieux comme Tushita. Il est une « personne qui a obtenu l'initiation de tous les éveillés ».

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RimayEncyclopaedia - 24 – Encyclopédie des connaissances

1.2.3.5.4 Les trois entraînements et les éléments [de la pratique]

Pour six [terres] on a trois entraînements, pour quatre leurs effets sont accomplis.

Après la réalisation de la nature des phénomènes, cinq éléments sont progressivement purifiés.

La première terre est la pratique des causes pour la pureté des trois entraînements ; la deuxième, celle de la discipline ; la troisième, de l’esprit ; les quatrième, cinquième et sixième, dans l'ordre, celles du discernement qui les facteurs orientés vers l’éveil, des vérités et de la production dépendante.

Les effets de ces [entraînements] sont les suivants : à la septième terre, est accompli l'absence de signe ; à la huitième, la sagesse originelle spontanée ; à la neuvième, le mûrissement des êtres ; et à la dixième, tous les fondements de l’absorption méditative et de la mémoire complète. Dès lors que l’on a réalisé directement la nature des phénomènes à la première terre, on cultivera successivement les composantes de la discipline à la deuxième, les composantes de la concentration à la troisième, celles du discernement aux quatrième, cinquième et sixième et, à partir de la septième, les composantes de la libération complète de ce qui empêche les quatre effets mentionnés. Sur la terre d’éveil, les composantes de la libération complète ont été purifiées de ce qui pourrait occulter le connaissable, tout comme celle de la vision – la sagesse originelle de libération.

1.2.3.5.5 Pureté, abandons et réalisations

Muni des trois causes, la purification des racines de bien s’intensifie.

Les voiles à la connaissance sont peu à peu éliminés, dix aspects de sagesse originelle sont parfaits.

En raison des trois causes (les offrandes adressées au trois joyaux, le plein mûrissement des êtres et l’affectation de ses racines de bien à l’éveil) mises en œuvre pendant de nombreuses ères cosmiques, de la première à la dixième terre, ces racines de bien sont purifiées. En se référant au Soutra des dix terres, on connaîtra les différentes analogies utilisées pour décrire les degrés de purification qui s’appliquent aux terres successives.

Quant aux abandons et réalisations spécifiques à ceux qui séjournent sur ces terres, les cent douze abandons qui doivent être éliminés sur le sentier de vision sont éliminés [à ce stade ] au même titre que ceux qui relèvent du sentier de méditation le sont sur ce sentier. Mais, s’agissant de la présentation en dix terres, à chacune des dix correspondent des aspects spécifiques de la sagesse originelle qui réalise le domaine des qualités par lesquels sont progressivement abandonnés les voiles à la connaissance – parties de l’ignorance et facteurs contraires propres à chaque [terre].

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LIVRE 10 : Le parachèvement du fruit Traduction : Collectif

412.2. Activité altruiste

Il y a vision selon trois modes de vision non conceptuelle et naturellement lumineuse.

Flot continuel, force naturelle, [par] la prière,

De la rencontre avec ses objets naît la compassion.

Telle une gemme, sans discursivité, elle œuvre spontanément au bien des migrants.

Après avoir accompli son bien propre, ainsi que nous l’avons décrit, vient le bien d’autrui. Quant à la façon de percevoir les disciples avec compassion, dans cette tradition, il n’y a ni sous-estimation (« la sagesse originelle peut s’interrompre »), ni surestimation (« elle est ininterrompue ») : c’est le mode de l’essence même affranchie de ces deux extrêmes qui permet une vision non conceptuelle et naturellement lumineuse. On lit dans le tantra :

La vacuité, dépourvue d’un soi, est connaissance originelle, c’est l’esprit éveillé qui se connaît lui-même, La maîtrise de l’attention sans observation ni objet à observer.

La pensée du seigneur Dropukpa distingue trois modes de vision : (1) le mode de vision qui n’est autre que le domaine [de la réalité], ou« sagesse originelle qui connaît la telléité » ; (2) le mode de vision qui n’est autre que la sagesse originelle, ou « sagesse originelle qui connaît la diversité » ; (3) le mode de vision où le domaine [de la réalité] et la sagesse originelle sont indissociables, ou « sagesse originelle qui connaît l’indivisibilité de la telléité et de la diversité. »

À propos des façons dont la compassion naît de cette vision, les Trois Stades en décrivent quatre :

Elle se manifeste en naissant comme un flot continuel, une force naturelle, [par] la prière et la rencontre avec ses objets.

La compassion flot continuel est comparable au cours d’une rivière, la compassion force naturelle au soleil et à ses rayons, la compassion [par] la prière et l’exhortation ressemble à celle d’une personne charitable à l’égard d’un mendiant, et la compassion [par] la rencontre aves ses objets, à la mansuétude qu’une personne avisée à la vue de quelqu’un qui se comporte mal.

Dès lors que la compassion est née de ces quatre façons, la manière d’agir pour le bien des êtres est analogue à un joyau qui exauce les souhaits. Par exemple, celui qui l’a poli et l’honore voit ses désirs et besoins satisfaits en fonction de ses propres mérites, et pourtant le joyau ne pense pas, est sans effort ou parti pris. Pareillement, l’intention éveillée d’un vainqueur, affranchie des limites de l’existence et de l’inexistence, est le corps de nature lui-même ; libre de dénégation et de surimposition, elle se manifeste de multiples façons en accord avec l’esprit des disciples, sans discursivité et avec spontanéité, elle effectue le bien des êtres.

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412.3. Supplément sur les distinctions relatives à la bouddhéité dans les soutras et les

tantras

Trois parties : le corps de vérité, le corps d’expérience parfaite et le corps d’émanation.

412.31. Le corps de vérité

Trois [thèmes pour] le corps de vérité : l’essence, les caractéristiques, l’influence spirituelle.

Pour discerner nettement les particularités des véhicules de la cause et du fruit, nous examinerons les points suivants sur les distinctions relatives à la bouddhéité dans les soutras et le mantra. En ce qui concerne le corps de vérité, ces distinctions sont triples : l’essence, les caractéristiques et l’influence spirituelle.

1) Dans le véhicule des caractéristiques, le corps de vérité est la vacuité dégagée des proliférations discursives ; il comparé à l’espace. Selon l’Entrée au Milieu :

Parce qu’elle brûle en son entier le combustible sec des connaissables, Cette paix est le corps de vérité des vainqueurs. Alors, sans production ni cessation, L’esprit étant arrêté, elle se manifeste par des corps.

Le corps de vérité du mantra a pour nature le domaine [de la réalité] et la sagesse originelle, c’est l’union de la vacuité et de la manifestation. Le tantra développé du Filet de

manifestation prodigieuse nous apprend :

Même apparaissant, les choses du monde animé et inanimé Ne sont pas des entités substantielles.

2) Dans le véhicule des caractéristiques, le corps de vérité tend vers l’extrême de la vacuité, alors que dans le mantra [secret], il ne tombe dans l’extrême de la permanence non plus que dans celui de l’annihilation, car c’est la non-dualité de la manifestation et de la vacuité.

3) Dans le véhicule des caractéristiques, l’influence spirituelle n’apparaît pas du corps de vérité, mais des deux corps de forme, alors que dans le mantra, les cinq corps etc., apparaissent de l’influence spirituelle du domaine [de la réalité] et de la sagesse originelle, union de la manifestation et de la vacuité.

412.32. Le corps d’expérience parfaite

[Pour] le corps d’expérience parfaite, on a les objets d’expérience et les moyens de l’expérience.

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Pour ce corps, deux distinctions. À propos des objets d’expérience, le corps d’expérience parfaite du véhicule des caractéristiques éprouve ce qui est positif, non ce qui est négatif, alors que dans le mantra, il connaît les deux.

À propos des moyens d’expérience, dans le véhicule des caractéristiques, on n’a aucune méthode pour faire l’expérience de ce qui est négatif, alors que dans le mantra, on a les méthodes pour connaître le positif et le négatif.

412.33. Le corps d’émanation

[Pour] le corps d’émanation, ceux qui sont à discipliner et ce qui discipline.

Gyalwa Yung a analysé les différences entre la dialectique et le mantra.

Les distinctions du corps d’émanation sont également doubles. Concernant les sujets, ceux qui sont à discipliner, le corps d’émanation du véhicule des caractéristiques ne peut guider que ceux dont le caractère est bon, non ceux dont il est mauvais, alors que le corps d’émanation du mantra est impartial envers les disciples.

Concernant la méthode, ce qui discipline, le corps d’émanation du [véhicule] causal des caractéristiques ne dispose d’aucun moyen pour guider ceux dont le caractère est mauvais, alors que le corps d’émanation du mantra est doté de moyens qui lui permettent de discipliner bons et mauvais.

L’analyse des différences par le grand Gyalwa Yungtön entre les bouddhas des véhicules des caractéristiques et du mantra lui valut les éloges des érudits de son temps.

De plus, le corps de vérité se caractérise par la félicité suprême et immuable. Le corps d’expérience parfaite, doté des cinq certitudes, est tel que ses terres pures, maîtres et entourages n’appartiennent pas à des domaines extérieurs, mais sont tous des manifestations naturelles, spontanément présents dans la grande claire lumière fondamentale. Par sa maîtrise, grâce aux quatre façons de guider les disciples, de toutes les formes d’activité éveillée, le corps d’émanation est souverain au regard des actes susceptibles d’aider les disciples. La distinction suivante s’applique également aux corps d’expérience parfaite et d’émanation : le véhicule des caractéristiques considère que les deux corps de forme naissent de causes et de conditions, alors que les corps de forme du mantra ne sont pas soumis à des causes et des conditions. Selon le tantra développé :

[…] parce qu’ils ne dépendent pas de causes et de conditions, […]

Les grands érudits et accomplis de la première période de traduction font également état d’autres différences.

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LIVRE 1 : Myriades de Mondes Traduction : Georges Driessens.

221.221.114. Les trois mauvaises destinées et les dieux jaloux

Sous terre, les enfers et les demeures des esprits avides,

Les animaux, dans les profondeurs des océans,

Les dieux jaloux, dans les crevasses au pied de Meru, sous le niveau des eaux.

Parmi les six destinées, nous avons décrit les humains ; d’entre les trois destinées misérables, souterraines sont les demeures principales des êtres des enfers et des esprits avides.

Les enfers : vingt mille yojanas au-dessous de Jambu, le grand enfer Avichi (Tourments incessants) : au-dessus de lui, dans l’ordre, Pratapana (Chaleur extrême), Tapana (Chaleur), Maharaurava (Grands Hurlements), Raurava (Hurlements), Samghata (Destruction en masse), Kalasutra (Lignes noires), Samjita (Reviviscence), les huit enfers chauds.

Sur chacun des quatre côtés de ces huit se situent les enfers périphériques : Fosse de feu, Marécage de corps putrides, Chemin de rasoirs, Forêt aux feuilles-épées, Forêt aux épines de fer [ces trois formant un seul enfer], et Rivière sans gué.

Les huit enfers froids sont placés au-delà des limites des [enfers périphériques], ce sont : Arbuda (Engelures), Nirarbuda (Engelures éclatées), Atata (Claquements de dents), Hahava (Gémissements de froid), Huhuva (Hurlements de froid), Utpala (Crevasses tel le lotus bleu), Padma (Crevasses tel le lotus), Mahapadma (Crevasses tel le grand lotus).

Puisque les continents ressemblent à des tas de grains, plus larges à leurs bases, il n’y a pas de contradiction [à placer les enfers en dessous de Jambu]. Selon le grand véhicule, il n’est nul besoin de définir uniformément leur taille puisqu’il est nécessaire d’affirmer que les enfers sont des apparences pour soi-même.

Les enfers occasionnels: il est dit qu’ils sont isolés ou groupés, n’ont pas de localisation fixe. Leur variété d’aspects résulte des actions individuelles.

Enfer, en sanskrit naraka, est formé en ajoutant la particule privative na à raka, « agréable », d’où : absence du moindre plaisir. Ou bien, raka se lit « prendre », car les actions déméritoires mènent à l’enfer.

Les esprits avides : cinq cents yojanas sous le Pays de jambu [se trouve] la résidence de Yama, roi des esprits avides. Selon l’Etablissement étroit de l’attention son entourage [comprend] trente-six [catégories], notamment les esprits avides au ventre démesuré, ceux dont la bouche est étroite comme le chas d’une aiguille. [La demeure de Yama est] leur habitat principal, leur surplus vivant dans de nombreux autres endroits indéterminés. Du [même texte] on apprend qu’il existe des esprits avides dotés de pouvoirs de manifestation -comme les dieux jaloux inclus dans la catégorie des esprits avides- qui connaissent une magnificence semblable à celle des dieux.

Esprit avide, en sanskrit preta, [signifie] « parti définitivement », sans retour ; ou bien preta parce que dominé par la faim et la soif.

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Les animaux évoluent sur de vastes étendues de terre, dans l’eau, dans le ciel. Le grand océan est leur habitat principal, dans les profondeurs duquel il est dit que les nagas et autres vivent comme des grains en fermentation pour la bière.

Quoique le Trésor de phénoménologie ne le mentionne pas clairement, selon l’Etablissement étroit de l’attention les dieux jaloux [demeurent] dans les crevasses au pied du Mont Meru, sous le niveau des eaux, tandis qu’une classe particulière de dieux jaloux faisant partie des animaux vit au fond de l’océan et que Rahu, Kanthabharana et d’autres chefs se trouvent au-dessus [des eaux].

Le vocable pour animal veut dire « avancer courbé », en sanskrit tiras (duquel dérive tiryañe, animal) semble renvoyer à leur postures prédominantes pour le déplacement : courbé, tordu, ou à l’horizontale.

Dieu jaloux, en sanskrit asura, veut dire « privé de l’essence » ; ils sont connus pour être privés du nectar [des dieux] ; ou bien sura, dieu, auquel est ajoutée la particule privative a qui indique l’infériorité.