These Ahmed Rahmouni

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  UNIVERSITE DU SUD TOULON – VAR Ecole Doctorale de Toulon Institut d’Administration des Entreprises de Toulon Laboratoire ERMMES THESE POUR L’OBTENTION DU DOCTORAT EN SCIENCES DE GESTION Conforme au nouveau régime défini par l’arrêté du 30 mars 1992 LA MISE EN ŒUVRE DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES DANS LES ENTREPRISES FRANÇAISES : CARACTERISTIQUES ET FACTEURS D’ADOPTION ET DE SUCCES Présentée et soutenue publiquement le 22 septembre 2008 par Ahmed Fath-Allah RAHMOUNI JURY Directeurs de recherche M. Pierre-Laurent BESCOS, Professeur à l’EDHEC campus de Nice M. Houdaifa AMEZIANE, Professeur à l’ENCG de Tanger Président du jury M. Pierre GENSSE, Professeur à l’IAE de Toulon Rapporteurs M. Robert TELLER, Professeur à l’IAE de Nice M. Yvon PESQUEUX, Professeur au CNAM Paris     t   e    l      0    0    3    4    8    0    3    6  ,   v   e   r   s    i   o   n    1      1    7    D   e   c    2    0    0    8

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UNIVERSITE DU SUD TOULON VAR

Ecole Doctorale de Toulon Institut dAdministration des Entreprises de Toulon Laboratoire ERMMES

THESE POUR LOBTENTION DU DOCTORAT EN SCIENCES DE GESTION Conforme au nouveau rgime dfini par larrt du 30 mars 1992

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LA MISE EN UVRE DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES DANS LES ENTREPRISES FRANAISES : CARACTERISTIQUES ET FACTEURS DADOPTION ET DE SUCCES Prsente et soutenue publiquement le 22 septembre 2008 par Ahmed Fath-Allah RAHMOUNI JURYDirecteurs de rechercheM. Pierre-Laurent BESCOS, Professeur lEDHEC campus de Nice M. Houdaifa AMEZIANE, Professeur lENCG de Tanger

Prsident du juryM. Pierre GENSSE, Professeur lIAE de Toulon

RapporteursM. Robert TELLER, Professeur lIAE de Nice M. Yvon PESQUEUX, Professeur au CNAM Paris

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Luniversit nentend donner aucune approbation ni improbation aux opinions mises dans les thses. Ces opinions doivent tre considres comme propres leurs auteurs.

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A mes parents A mes surs et frres A mes amistel-00348036, version 1 - 17 Dec 2008

RemerciementsJe tiens exprimer ma profonde reconnaissance toutes les personnes qui mont apport leur soutien et leur confiance tout au long de la ralisation de ce travail de recherche.

Mes remerciements sadressent en premier lieu mes deux directeurs de recherche. Dabord, le Professeur Pierre-Laurent BESCOS pour son encadrement et sa confiance bienveillante, ainsi que pour ses prcieux conseils dont jai bnfici pendant ces trois annes de thse. Et le Professeur Houdaifa AMEZIANE, pour ses encouragements, ses remarques et ses conseils qui mont t dune grande valeur dans la ralisation de ce travail.

Mes remerciements les plus vifs sadressent galement aux membres du jury, les

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Professeurs, Pierre GENSSE, Robert TELLER et Yvon PESQUEUX qui mont fait lhonneur de se consacrer lvaluation de ce travail.

Cette recherche doctorale naurait pu tre mene sans une investigation sur le terrain. Que soit remercie la DFCG pour mavoir fourni les informations et laide ncessaires pour la ralisation de lenqute terrain.

Je souhaite galement remercier lIUP Banque - Assurance de Caen, institution qui ma accueilli en fin de thse et qui ma laiss le temps de la terminer dans de bonnes conditions matrielles et morales. Je remercie notamment les Professeurs Christophe ALLEAUME, Ludovic MOISSON, Robert FERRANDIER et Jean-Marc MOULIN pour leur accueil et leurs encouragements. Je remercie galement lquipe administrative pour son accueil chaleureux et sa collaboration.

Je tiens remercier aussi les personnes qui ont port un regard critique sur mon travail et avec qui les discussions mtaient fructueuses : Karim CHARAF et Moncef RHARMILI.

Mes sincres et profonds remerciements vont aussi mes parents qui mont toujours soutenu et ont eu foi en mon travail. Merci ma mre pour sa relecture attentive. Enfin, ma gratitude sadresse mes surs et frres pour leur indfectible confiance et leur encouragement constant.

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Rsum :Depuis lapparition de la CA il y a maintenant vingt ans environ, plusieurs constats ont mis en vidence la trop lente diffusion de cet outil malgr ses avantages par rapport aux mthodes traditionnelles de comptabilit de gestion. Ceci donne naissance au paradoxe de la CA qui demeure sans explication complte. Dans ce travail de recherche, nous avons tent dapporter de nouveaux lments de rponse ce paradoxe, en examinant deux volets de la diffusion de la CA. Il sagit du choix dadoption de la CA et du succs dans son implantation. Sappuyant sur un cadre de rfrence riche et vari, notamment les approches sur la diffusion des innovations et les travaux sur la diffusion de la CA, nous avons donc construit deux modles thoriques : le premier sur le choix dadoption de la CA qui examine les

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facteurs explicatifs de la dcision dadoption de cette mthode. Le deuxime concerne le succs global dimplantation de la CA dans lequel nous avons investigu les dterminants du succs dans la mise en uvre de cet outil de gestion. A travers une enqute sur les pratiques actuelles des entreprises franaises en matire de comptabilit de gestion, nous avons pu tester empiriquement nos deux modles de recherche. Lanalyse des rsultats de lenqute a dmontr que les objectifs du systme de calcul des cots et le potentiel de distorsion des cots sont des facteurs dterminants dans le choix dadoption de la CA. Ainsi, aprs une dcision favorable ladoption de la CA, la formation demeure un facteur indispensable pour une mise en uvre russie et une utilisation adquate par le personnel de lentreprise.

Mots cls : comptabilit par activits, CA, adoption de la CA, succs dimplantation de la CA, comptabilit de gestion.

Abstract:

Since the advent of ABC there is now approximately twenty years, several findings have highlighted the slow diffusion of this tool despite its advantages over traditional methods of management accounting. This gives rise to the paradox of ABC which remains without explanation. In this research work, we tried to bring new elements of response to this paradox, looking at two aspects of the spread of ABC. It is the choice of adoption of ABC and success in its implementation.

Based on a rich theoretical background, including approaches on the diffusion of innovations and research works on ABC diffusion, we built two models: the first on the choice of adoption of ABC which examines factors explaining the decision to adopt this method. The second relates to the overall success of ABC implementation in which we investigated the determinants of success in the implementation of this management tool. Through a survey of current practices of French companies in terms of management accounting, we were able to empirically test our two research models. The analysis of survey results demonstrated that the objectives of the management accounting system and the potential for cost distortions are determining factors in choosing adoption of ABC. Thus, after a favourable decision to the adoption of ABC, training remains an indispensable factor for a successful implementation and correct use by staff of the company.

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Key words: Activity Based Costing, ABC, ABC adoption, ABC success implementation, management accounting.

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Sommaire

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Sommaire

SOMMAIRE ....................................................................................................................................................... 1 INTRODUCTION GENERALE ......................................................................................................................... 3 PARTIE I LES LOGIQUES EXPLICATIVES DE LA DIFFUSION DE LA CA : LINFLUENCE

DES FACTEURS CONTEXTUELS ................................................................................................................. 15 CHAPITRE 1 - LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES : FONDEMENTS DE BASE ET IMPLANTATION............................ 18 Section 1 - La comptabilit par activits, une nouvelle approche de modlisation des flux ...................... 21 Section 2 - Limplantation de la CA ........................................................................................................... 38 CHAPITRE 2 - LE CADRE DE REFERENCE DE BASE DES TRAVAUX SUR LA DIFFUSION DE LA CA ......................... 48 Section 1 - Linnovation, dfinition et typologie......................................................................................... 51 Section 2 - La contribution des approches sur la diffusion des innovations ltude de diffusion de la CA . .................................................................................................................................................. 65 CHAPITRE 3 - LADOPTION ET LE SUCCES DIMPLANTATION DE LA COMPTABILITE PAR ACTIVITES ................... 86 Section 1 - La diffusion de la CA, vers lexplication du paradoxe de la CA .............................................. 89

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Section 2 - Une synthse des travaux sur la diffusion de la CA ............................................................... 116 Section 3 - Llaboration des hypothses et modles de recherche.......................................................... 134 PARTIE II - EVALUATION EMPIRIQUE DES MODELES DE DIFFUSION DE LA CA.................. 151 CHAPITRE 4 - DESCRIPTION DE LA METHODOLOGIE DE RECHERCHE ................................................................ 153 Section 1 - Les choix pistmologiques et mthodologiques .................................................................... 155 Section 2 - La collecte des donnes .......................................................................................................... 170 Section 3 - Les mthodes de traitement et danalyse des donnes............................................................ 200 CHAPITRE 5 - LES DETERMINANTS DE LADOPTION ET DE SUCCES DIMPLANTATION DE LA COMPTABILITE PARACTIVITES ....................................................................................................................................................... 206

Section 1 - Lvaluation des retours des questionnaires .......................................................................... 208 Section 2 - Les variables expliques et explicatives ................................................................................. 214 Section 3 - La vrification des hypothses et modles de recherche ........................................................ 250 CONCLUSION GENERALE .......................................................................................................................... 288 BIBLIOGRAPHIE............................................................................................................................................ 300 ANNEXES ................................................................................................................................................... 314

TABLE DES FIGURES.................................................................................................................................... 335 LISTE DES TABLEAUX ................................................................................................................................. 339 TABLE DES MATIERES ................................................................................................................................ 344

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Introduction gnrale

Introduction gnrale

Lorigine de la comptabilit par activits remonte principalement aux travaux de Cooper et Kaplan au cours des annes 80 (Jones et Dugdale, 2002 ; Major et Hopper, 2005 ; Vercio et Williams, 2005). Ces deux auteurs ont effectu un ensemble de travaux sur les systmes de calcul des cots dun groupe dentreprises amricaines. Ils ont mis en vidence un dcalage saillant entre les outils traditionnels de comptabilit de gestion et les nouveaux besoins dinformation des entreprises pour la prise de dcision : ces outils sont devenus obsoltes dans un environnement de plus en plus complexe et volutif. Outre cela, ces auteurs ont constat une absence dadaptation de ces approches aux nouvelles mthodes dployes dans les autres

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domaines de la gestion, tels que le marketing et la qualit. Selon Kaplan (1986), un systme de comptabilit de gestion efficace doit reflter la valeur cre par les activits de lentreprise dans les oprations de marketing, de vente et de la fabrication des produits. En rsum, il doit tre rnov et adapt aux processus de production de lentreprise afin de permettre une prise de dcision et un contrle efficaces.

Les expriences de Cooper et Kaplan ont dbouch sur la proposition dune nouvelle mthode de calcul des cots, savoir, lActivity Based Costing ou la comptabilit par activits1 (CA). Depuis ce temps, la CA a suscit beaucoup de dbats sur sa pertinence, son utilit, ses avantages et les conditions de son adoption.

Se fondant sur les notions dactivit et de processus, la CA est une mthode de calcul des cots et des marges tenant compte des consommations diffrentes dactivits selon les produits, clients et processus mis en uvre. Elle se base sur la prmisse suivante : les produits consomment les activits et les activits consomment les ressources. Dans un systme de CA, les cots sont imputs dabord aux activits, qui sont par la suite alloues aux diffrents produits ou prestations vendues.

La CA est cense rsoudre les problmes dinefficience des systmes traditionnels de calcul des cots. Cest une mthode qui a donc pour objectifs dobtenir des cots plus1

Nous adoptons dans cette thse la traduction franaise comptabilit par activits . Traduction retenue notamment par Lorino (1991), Gosselin et Pinet (2002), et Alcouffe (2002 et 2004).

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Introduction gnrale pertinents par une meilleure allocation des charges indirectes. Mais ct de son volet calcul des cots , la CA permet aussi damliorer les performances grce lActivity Based Management (ABM). Avec ces deux aspects, la CA peut avoir des utilisations diverses dans l'entreprise, comme lanalyse de la rentabilit des clients et des produits/services, le choix des designs des produits, la tarification, le choix du mix produit/march, la modlisation des cots, la ralisation des budgets par activit (ABB : Activity Based Management), les dcisions de sous-traitance, lanalyse de la chane de valeur, la restructuration de lentreprise, la ringnierie des processus et le pilotage de la performance. Enfin, la CA est considre aussi comme une mthode en adquation avec les outils de management, base sur les activits et les processus telle que la dmarche de la qualit totale.

Depuis son apparition il y a maintenant vingt ans environ, plusieurs chercheurs ont tent

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de dmontrer, travers des tudes empiriques, ses apports et ses avantages pour les entreprises qui ladoptent. Dautres travaux se sont intresss sa mise en uvre et sa diffusion. Les recherches du deuxime groupe ont t menes notamment en Amrique du Nord et en Europe. Par des enqutes, elles ont essay dvaluer quel degr la CA tait adopte et mise en uvre (Gosselin et Ouelet, 1999). Nanmoins, ces recherches ont constat que la diffusion de la CA restait lente, malgr ses avantages par rapport aux mthodes traditionnelles de comptabilit de gestion (Gosselin, 1997) et quelle est loin de supplanter les systmes de cots directs et complets traditionnels. En plus, certaines tudes ont montr que des entreprises peuvent abandonner cet outil en cours dimplantation, et dautres lutiliser pendant un bout de temps et labandonner par la suite. Ces constats ont donn naissance ce que lon appelle le paradoxe de la CA (Gosselin, 1997) : mme sil savre que la CA est plus efficace que les mthodes traditionnelles de calcul des cots, on constate que la diffusion de cette approche est loin datteindre les niveaux esprs par ses promoteurs.

1. Objet de la rechercheLobjet de notre recherche sinscrit dans le courant des travaux sur la diffusion de la CA, en particulier dans le contexte franais. Depuis une quinzaine dannes, de nombreux chercheurs ont men des tudes sur ce sujet dans plusieurs pays du monde. Les principales questions traites dans ces recherches sont de deux types :

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Introduction gnrale De type descriptif : Quel est le taux dadoption de la CA ? Quel est le statut des entreprises par rapport la CA ? Quelles sont les caractristiques des entreprises qui adoptent la CA ? Quelles sont les difficults rencontres par ces entreprises ? Quelles en sont les principales utilisations ? (Innes et Mitchell, 1995 ; Krumwiede, 1998b ; Innes et al., 2000 ; Bescos et al., 2002, Pierce et Brown, 2004).

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De type explicatif : Quel est le processus de diffusion de la CA dans le temps ? Quels sont les facteurs dadoption et dimplantation de la CA ? Quels sont les facteurs de succs de mise en uvre de la CA ? (Shields, 1995 ; Foster et Swenson, 1997 ; Bjrnenak, 1997 ; Krumwiede, 1998a ; Malmi, 1999 ; Alcouffe, 2002 et 20042 ; Brown et al., 2004 ; Baird et al, 2004 et 2007).

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Parmi lensemble de ces tudes, trs peu sont ralises en France. Nous pouvons en dnombrer quatre principalement : il sagit des tudes de De La Villarmois et Tondeur (1996), Nikitin (2000), Bescos et al. (2002) et Alcouffe (2002 et 2004). Ces tudes se sont focalises sur la description des systmes de CA implants, la recherche des facteurs dadoption et dimplantation, le calcul du taux dadoption et la dtermination de la courbe de diffusion en France. Par exemple, elles ont dmontr quen France, la CA tait utilise notamment pour ltablissement des prix, la rduction des cots et lanalyse de la rentabilit des clients (Bescos et al., 2002). Concernant les facteurs dadoption et dimplantation de la CA, les auteurs franais ont cit le type de la stratgie (De La Villarmois et Tondeur,1996), lavantage relatif, la compatibilit et la complexit perue de la CA (Alcouffe, 2002 et 2004).

Pourtant, malgr limportance et lampleur de ces tudes, peu de choses sont dites sur le paradoxe de la diffusion de la CA voqu plus haut. Ce sujet mrite en consquence des recherches supplmentaires afin denrichir et de complter ce qui a t dj fait, notamment en testant de nouvelles pistes pouvant expliquer ce paradoxe. Aussi notre recherche tente-telle de contribuer au dveloppement de ces travaux sur la mise en uvre de la CA. En particulier, nous allons essayer de rpondre la question suivante : quels sont les facteurs qui influencent ladoption et le succs dans limplantation de la CA ? .

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Il sagit de la mme enqute dont une partie des rsultats a t publie en 2002.

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Introduction gnrale

2. Problmatique de la rechercheNotre problmatique de recherche a merg des travaux sur la diffusion de la comptabilit par activits. Comme nous lavons cit ci-dessus, ces tudes mettent en vidence la trop lente diffusion de la CA malgr ses bnfices affichs pour les entreprises (Gosselin, 1997 et 2007 ; Kennedy et Affleck-Graves, 2001 ; Alcouffe, 2004). Ce phnomne, appel par Gosselin (1997) le paradoxe de la CA , demeure une problmatique complexe qui reste sans rponse et mrite ainsi plusieurs recherches conscutives dans des contextes diffrents.

Le paradoxe de la CA reflte lcart mis jour entre la faon dont la mthode est traite dans la littrature, qui laisserait supposer une diffusion leve, et les taux dadoption obtenus qui sont souvent trop faibles par rapport aux esprances (Alcouffe, 2004, p. 391).

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Les taux dadoption voqus dans les diffrentes recherches atteignent dans les meilleurs des cas les 49% (Krumwiede, 1998b), dans dautres travaux ils varient entre 15% et 32%. En France, deux tudes ont calcul le taux dadoption de la CA, savoir, ltude de Bescos et al. (2002) qui donne un taux dadoption de lordre de 23 % et celle dAlcouffe (2002 et 2004) avec un taux de 16%. De par le monde, nous constatons donc que, malgr lapparition de la CA il y plus de vingt ans et en dpit de ses avantages, le nombre dentreprises qui ladoptent reste assez faible.

Le paradoxe de la CA se rsume par les termes suivants : si la CA a dmontr son utilit et son grand intrt pour les entreprises, pourquoi alors ne trouve-t-on pas beaucoup plus dentreprises qui lutilisent ? Beaucoup de chercheurs ont tent de participer lexplication de ce paradoxe. Mais lune des explications les plus pertinentes est celle donne par Kennedy et Affleck-Graves (2001). Ces auteurs proposent trois rponses possibles :

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La CA peut ne pas convenir toutes les entreprises. Plusieurs recherches ont montr que limplantation russie de la CA dpend de plusieurs facteurs contextuels.

-

La contribution de la CA lamlioration de la performance nest pas directe. La CA peut tre corrle avec dautres variables qui interviennent sur la performance en mme temps. En plus, cette contribution nest pas bien tablie (Kennedy et AffleckGraves, 2001). Ainsi, il nest pas correct de lier le succs dune entreprise un seul facteur qui serait la mise en uvre de la CA. En dautres termes, dans les entreprises 6

Introduction gnrale qui utilisent la CA, il peut y avoir des facteurs qui conditionnent galement la performance. En dfinitif, Kennedy et Affleck-Graves (2001) concluent que les arguments donns par les partisans de la CA sont insuffisants pour pousser les entreprises rviser leurs systmes de cots en faveur de la mise en uvre de la CA.

-

Il y a trs peu de preuves sur le lien entre lutilisation de la CA et lamlioration de la valeur pour les actionnaires (Kennedy et Affleck-Graves, 2001). Par consquent, beaucoup dentreprises hsitent changer leur systme de cot en faveur de la CA.

A partir de ce qui prcde, nous formulons notre problmatique de recherche comme suit :

Si la CA a dmontr ses avantages par rapport aux mthodes traditionnellestel-00348036, version 1 - 17 Dec 2008

de calcul des cots, pourquoi constate-t-on encore que trs peu dentreprises ladoptent ?

3. Objectifs de la recherchePlusieurs questions jalonnent notre problmatique : Pourquoi certaines entreprises mettent en uvre la CA et dautres non ? Quelles sont les caractristiques des entreprises qui ont mis en place une comptabilit par activits ? Quels sont les facteurs qui dterminent ladoption de la CA ? Pourquoi certaines entreprises russissent la mise en uvre de la CA tandis que dautres chouent ?

Pour rpondre ces diffrentes questions et tenter dexpliquer le paradoxe voqu, nous avons fix quatre objectifs notre recherche :

-

Identifier les principales raisons de ladoption de la CA par les entreprises : avec cet objectif, nous chercherons examiner les diffrents facteurs susceptibles dinfluencer le choix dadoption de la CA, afin de proposer un modle explicatif de son adoption par les entreprises franaises.

-

Rechercher les facteurs qui influencent le succs de mise en uvre de la CA : par la ralisation de cet objectif, nous tenterons didentifier les principaux facteurs 7

Introduction gnrale influenant le succs de mise en uvre de la CA, afin de proposer un modle explicatif de son dimplantation en France.

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Expliquer le paradoxe de la CA la base de notre problmatique : latteinte des deux objectifs prcdents nous permettra dapporter de nouveaux lments de rponse au paradoxe de la CA. En dautres termes, nous allons rechercher lexplication de ce paradoxe dans le contexte de mise en uvre de la CA. Les causes de son implantation et les facteurs qui influencent sa mise en uvre sont peut-tre dterminants dans son adoption dfinitive.

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Et apporter aux entreprises une aide lamlioration de leurs performances grce la CA : travers des donnes empiriques, nous tenterons dans ce travail didentifier

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lapport de la CA aux entreprises qui ladoptent. En analysant des donnes recueillies auprs dentreprises, nous nous proposons dexaminer comment la CA peut contribuer lamlioration des performances.

4. Dmarche gnrale de la rechercheDans ce travail, nous aspirons expliquer le paradoxe de la CA. Pour y arriver, nous nous sommes fixs comme objectif dtudier les facteurs dadoption et de succs dans la mise en uvre de la CA. Dans ce cadre, nous avons choisi une dmarche de recherche de type heuristique consistant des allers-retours entre la thorie et le terrain. Notre approche peut tre dcrite par la figure 1 suivante qui sera dtaille par la suite :

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Introduction gnrale Figure 1 - Dmarche gnrale de la recherche Etude et analyse de la littrature Terrain : Etude exploratoire

Modles dadoption et de succs de mise en uvre de la CA

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Etude empirique (Enqute terrain)

Analyse des rsultats et conclusions

Modles dadoption et de succs de mise en uvre de la CA : dans ce travail, nous allons construire deux modles de recherche : le premier est relatif aux facteurs qui influencent ladoption de la CA et le deuxime concerne les dterminants du succs de son implantation. Pour laborer ces deux modles, nous avons combin deux modes dinvestigation, savoir lanalyse de la littrature et ltude exploratoire sur le terrain : Analyse de la littrature : cette tape consiste ltude de deux sries de travaux sur la diffusion des innovations et sur la diffusion de la CA.

Travaux sur la diffusion des innovations : ce groupe dtudes est compos des travaux sur la thorie de diffusion des innovations et ceux sur la diffusion des innovations en systmes dinformation. Ces recherches se focalisent en particulier sur ltude des facteurs dterminants dans la diffusion des innovations, savoir les facteurs dadoption, dimplantation et de succs. Il

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Introduction gnrale sagit du cadre de rfrence de base pour les travaux sur la diffusion de la CA, et nous lavons retenu galement.

Travaux sur la diffusion de la CA : ces travaux nous ont permis dabord de prendre connaissance de ce qui a t dj fait sur la diffusion de la CA et de dterminer un premier ensemble de facteurs susceptibles dtre retenus dans nos deux modles thoriques. Ensuite, ces recherches ont constitu une base pour construire les chelles de mesure de nos variables explicatives et expliques. Lenqute exploratoire : afin denrichir, de complter et de valider nos deux modles thoriques issus de la revue de la littrature, nous avons lanc une srie de runions tlphoniques avec un groupe de travail constitu de professionnels. Durant ces runions, nous avons pu discuter en dtail lensemble des facteurs retenus suite lanalyse de la littrature afin de les valider. Ainsi, de nouveaux facteurs ont t proposs par les membres du groupe, dautres ont t supprims. Aprs la validation des deux modles thoriques et la construction dune premire version du questionnaire de lenqute, nous avons eu recours ce mme groupe de travail afin de le valider. Ce groupe a examin en dtail lensemble des questions ainsi que les chelles de mesure relatives nos variables explicatives et expliques. Ce travail nous a permis donc de complter et dadapter lensemble de nos items au contexte de nos rpondants, savoir les entreprises franaises.

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Lenqute : afin de mettre lpreuve de la ralit nos deux modles thoriques, nous avons eu recours une enqute. Notre objectif a t dvaluer limpact dun certain nombre de facteurs sur ladoption et le succs dimplantation de la CA. Lenqute a t ralise sur un chantillon dentreprises franaises et elle sest droule en deux grandes tapes : la constitution de lchantillon et lenvoi des questionnaires par voie postale dune part, et les relances de lenqute dautre part. A ce dernier stade, nous avons ralis trois relances, deux par courriel et une par tlphone. Ces deux tapes nous ont permis de collecter les donnes empiriques ncessaires au test et la validation ventuelle de nos modles et de nos hypothses de recherche.

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Introduction gnrale Analyse des rsultats : lanalyse des rsultats est la dernire tape de la dmarche gnrale. Elle vise tudier mthodiquement, suivant une dmarche scientifique, les donnes empiriques collectes via lenqute terrain. Elle nous a permis dabord de tester nos deux modles thoriques, et ensuite de tirer des conclusions sur ladoption et la mise en uvre de la CA en France. Enfin, nous en avons dduit des rponses notre problmatique de recherche relative au paradoxe de la CA.

5. Intrt de la rechercheNotre recherche revt un intrt thorique, pratique et mthodologique :

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Intrt thorique : travers cette recherche, nous visons prendre part au courant de recherche sur ladoption et limplantation de la CA. Ce courant a vu le jour au dbut des annes 90 et se fonde en majorit sur la thorie de la diffusion des innovations. En adoptant la mme approche thorique que les travaux prcdents, nous tenterons denrichir les connaissances sur la diffusion de la CA en apportant des rponses complmentaires lexplication du paradoxe de la CA : en particulier, en examinant de nouveaux dterminants de ladoption et de succs de mise en uvre de la CA.

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Intrt pratique : au-del de lintrt thorique, cette recherche revt un intrt pratique pour les entreprises. En effet, dans un contexte conomique instable et une concurrence acharne, la matrise des cots devient un enjeu stratgique. Les entreprises recherchent de plus en plus la comptitivit par les prix, les dlais, la matrise de la production et la qualit. Or, les outils de comptabilit de gestion utiliss jusqu prsent ne permettent pas souvent dy contribuer. En outre, il savre difficile pour les entreprises de savoir quel moment il faut changer leur systme de calcul des cots. Ainsi, dans cette recherche, nous visons proposer aux entreprises un ensemble de pistes possibles pour savoir si elles sont concernes ou non par la CA.

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Intrt mthodologique : lintrt mthodologique de cette recherche se matrialise dans ladaptation dchelles de mesure originales et le choix de facteurs dadoption et de succs de mise en uvre de la CA au contexte de la France. En fait, travers ltude exploratoire ralise avant le dclenchement de lenqute, nous tenterons 11

Introduction gnrale dadapter des chelles de mesures anglo-saxonnes aux spcificits des entreprises franaises.

6. Plan de la thseDans le but de rpondre notre problmatique gnrale et nos diffrents objectifs de recherche, nous avons structur ce travail en deux parties :

Partie 1 : Les logiques explicatives de la diffusion de la CA

Cette premire partie sera consacre aux fondements thoriques qui sous-tendent la

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diffusion de la CA. Nous prsenterons en particulier les approches et thories utilises dans llaboration de nos deux modles de recherche. Cette partie se divise en trois chapitres :

Le chapitre 1 sera consacr aux fondements de la comptabilit par activits et aux principales questions qui concernent sa mise en uvre. Nous y prsenterons en particulier les principes thoriques de la CA ainsi que son apport pour le management. Nous discuterons ensuite quelques points relatifs son adoption et sa mise en uvre.

Le chapitre 2 prsentera les deux approches qui constituent le fondement thorique de base du courant de recherche sur la diffusion de la CA : il sagit de la thorie de diffusion des innovations et du courant de recherche sur la diffusion des systmes dinformation. Nous expliquerons dans ce chapitre en quoi la CA peut tre considre comme une innovation. Nous dmontrerons aussi que les deux approches en question sont utiles pour ltude de la diffusion de la CA et quelles peuvent apporter des rponses pertinentes aux diffrentes questions en la matire.

Enfin, le chapitre 3 examinera la littrature internationale et franaise sur la diffusion de la CA. Notre objectif travers cette partie est de prsenter deux modles : le premier est susceptible dexpliquer et de prdire ladoption de la CA en France, le deuxime cherche expliquer le succs dans sa mise en uvre.

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Introduction gnrale Partie 2 : Evaluation empirique des modles de diffusion

La deuxime partie de la thse a pour ambition de prsenter la mthodologie de recherche et les rsultats obtenus. Elle est compose de deux chapitres :

Le chapitre 4 prsentera notre positionnement pistmologique et posera les jalons de notre dmarche mthodologique utilise pour tester empiriquement nos deux modles thoriques. En effet, le choix dun positionnement pistmologique et dune mthodologie sont deux tapes importantes dans la construction dune recherche. Cela fonde et justifie la production de la connaissance. A cet effet, nous nous intresserons dans ce quatrime chapitre dvoiler larchitecture de ce travail, c'est--dire le processus de vrification empirique des deux modles conceptuels. En particulier, nous prsenterons la dmarche que nous avons

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mise en uvre pour la collecte des informations et le test des hypothses. Nous exposerons la mthode denqute, le design de la recherche, loutil utilis pour assurer la qualit de nos rsultats et les instruments statistiques retenus pour prsenter et analyser les donnes.

Enfin, le chapitre 5 sera consacr la prsentation des rsultats de lenqute empirique et la vrification de nos hypothses de recherche. Dans un premier temps, il mettra en vidence, les donnes descriptives sur les rpondants lenqute. Ensuite, les principales statistiques sur nos variables explicatives et expliques seront exposes. Enfin, nous entamerons la validation de nos hypothses de recherche et de nos deux modles. Pour cela nous verrons dabord les corrlations entre les variables explicatives afin den retirer des conclusions qui permettent damliorer lanalyse, et ensuite nous prsenterons les rsultats des tests raliss ainsi que les conclusions et les enseignements issus de notre tude.

Conclusion gnrale

Enfin un dernier dveloppement synthtisera les principaux rsultats obtenus dans ce travail doctoral. Il tentera dune part, de donner des rponses notre question de recherche. Dautre part, il abordera nos principales contributions thoriques et pratiques, leurs limites et les perspectives de recherches futures. Larticulation entre les chapitres de la thse est rsume dans la figure 2 ci-aprs :

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Introduction gnrale Figure 2 - Plan gnral de la thse Introduction gnrale

Partie 1 - Les logiques explicatives de la diffusion de la CA : linfluence des facteurs contextuelsChapitre 1 - La comptabilit par activits : fondements de base et implantation1- La CA, une nouvelle approche de modlisation des flux 2- Limplantation de la CA

Chapitre 2 - Le cadre de rfrence de base des travaux sur la diffusion de la CA

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1- Linnovation : dfinition et typologie

2- La contribution des approches sur la diffusion des innovations ltude de la diffusion de la CA

Chapitre 3 - Ladoption et le succs dimplantation de la CA1- La diffusion de la CA, vers lexplication du paradoxe de la CA 2- Une synthse des travaux sur la diffusion de la CA 3- Llaboration des hypothses et modles de recherche

Partie 2 - Evaluation empirique des modles de diffusionChapitre 4 - Description de la mthodologie de recherche1- Les choix pistmologiques et mthodologiques 2- La collecte des donnes 3- Les mthodes de traitement et analyse des donnes

Chapitre 5 - Les dterminants de ladoption et de succs dimplantation de la CA1- Lvaluation des retours des questionnaires 2- Les variables expliques et explicatives 3- La vrification des hypothses et modles de recherche

Conclusion gnrale

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Partie I - Les logiques explicatives de la diffusion de la CA : linfluence des facteurs contextuels

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Partie 1 Introduction : Les logiques explicatives de la diffusion de la CA : linfluence des facteurs contextuels

Introduction de la premire partie

La comptabilit par activits a la particularit de partir du terrain et a fait par la suite lobjet dune thorisation (Godowski, 2001). Durant les annes 80, elle a t exprimente dans quelques usines aux Etats-Unis, puis partir des annes 90, elle sest rpandue dans les autres pays du monde. La premire publication sur la CA date de 1988 (Staubus, 1988). Aprs cette date, plusieurs autres chercheurs se sont intresss cet outil de gestion, notamment son architecture, au processus de son implantation et de sa diffusion ainsi qu son impact sur la performance. Dans la prsente recherche, nous nous situons au niveau des recherches sur le

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processus dimplantation de la CA.

La mthode de la comptabilit par activits est conue pour solutionner le problme dinadquation des outils traditionnels de calcul des cots. Elle vise notamment amliorer la pertinence des cots complets par un meilleur traitement des charges indirectes. Mais au-del de lobtention des cots de revient, la mthode semble aussi tre un outil efficace de pilotage des entreprises. Elle permet en particulier de raliser un diagnostic de lorigine des cots, de personnaliser le suivi de la clientle, damliorer la prise de dcision stratgique, didentifier les activits cls de succs et damliorer la comptitivit des entreprises. Bref, la CA ne se contente pas de proposer une mthodologie diffrente des cots (Bescos et Mendoza, 1996), mais elle offre en plus une dmarche permettant dintgrer lanalyse des cots dans la rflexion stratgique (Bouquin, 2006).

Cependant, la question qui se pose ce niveau, cest de savoir si toute entreprise qui implante la CA pourrait en tirer profit, quelle que soit sa situation. En dautres termes, est-ce que limplantation de la CA convient toutes les entreprises quelles que soient leurs caractristiques et leurs contextes ? Ou encore quels sont les signes ou les facteurs dune implantation russie de la CA afin den tirer profit ? A notre sens, la rponse ces questions pourrait expliquer pour une part, la faible adoption de cette mthode dans les entreprises franaises dun ct, de lautre, elle pourrait aussi donner des lments de rponse sur lchec dimplantation dont peuvent tre victimes certaines entreprises.

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Partie 1 Introduction : Les logiques explicatives de la diffusion de la CA : linfluence des facteurs contextuels Pour parvenir cerner notre problmatique, nous consacrerons cette partie la recherche de rponses issues de la littrature existante sur le sujet. A cet effet, nous mettrons laccent sur les principaux lments susceptibles de nous orienter dans llaboration de nos deux modles explicatifs sur la diffusion de la CA. Ainsi, nous mettrons en valeur dans le premier chapitre les principes fondateurs de la comptabilit par activits. Lenchanement de cet expos nous mnera au bout de ce chapitre plusieurs questionnements sur limplantation de cette mthode. Par la suite, pour appuyer nos choix thoriques, nous mettrons en lumire dans le 2me chapitre les deux approches constituant un cadre de rfrence pour la majorit des travaux sur la diffusion de la CA, savoir la thorie de diffusion des innovations et le courant de recherche sur la diffusion des innovations en systmes dinformation. Ces approches

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prsentent un ensemble de rponses susceptibles de nous orienter dans la construction de nos modles de diffusion. Les adopter dans cette recherche nous permettra de suivre aussi la ligne du courant de base sur la diffusion de la CA.

Enfin, afin dapprofondir la comprhension de notre question de recherche, nous creuserons, au niveau du troisime chapitre dans les travaux thoriques et empiriques raliss sur la diffusion de la CA. Au terme de ce chapitre, nous prsenterons un bilan des travaux raliss en France sur ce thme. Lobjectif est daboutir au choix des facteurs explicatifs de ladoption et du succs dans limplantation de la CA et la formulation de nos hypothses de recherche. La figure 3 ci-aprs prsente lenchanement de la premire partie. Figure 3 - Plan de la premire partie Partie 1 - Les logiques explicatives de la diffusion de la CA : linfluence des facteurs contextuels Chapitre 1 - La comptabilit par activits : fondements de base et implantation

Chapitre 2 - Le cadre de rfrence de base des travaux sur la diffusion de la CA Chapitre 3 : Ladoption et le succs dimplantation de la CA

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Chapitre 1 - La

comptabilit

par

activits

:

fondements de base et implantation

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Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation

Introduction

Lhistoire de la comptabilit de gestion marque lexistence de plusieurs volutions complexes. Ces volutions peuvent se rsumer en quatre strates fondamentales (Bouquin, 2006). Au dbut, depuis la rvolution industrielle, il fallait constater. Pour cela il fallait organiser linformation, grce la partie double, afin de connatre ce que lon consomme. Ensuite, progressivement, au long du 19me sicle, on assiste laccroissement de la part des cots indirects et fixes dans le cot total. Le dbat soriente alors vers la recherche de la manire la plus optimale pour allouer ces cots aux produits et aux services. Cependant, le

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cot de revient tabli jusqu prsent est un cot de revient pass et ne permet pas dinformer sur le futur. Cest partir de l, quon remarque lavnement dune nouvelle tape qui concerne la recherche de la modlisation des comportements des cots. Les managers cherchent prvoir les prix futurs. Il faut connatre les formules des cots et leurs lois conomiques. Pendant cette tape, on assiste lapparition de plusieurs concepts, notamment la distinction entre cots fixes et cots variables, le point mort et les cots standard. Nanmoins, au fur et mesure de lvolution du march, de nouveaux besoins apparaissent. Les dirigeants cherchent de plus en plus agir, non seulement ragir. Ils cherchent dcider des cots. Ainsi, il faut les identifier avant quils nexistent, au moment de prendre la dcision qui va les provoquer (Bouquin, 2006, p. 78). On assiste lapparition dune nouvelle tape dans laquelle les dbats sorientent de plus en plus vers la comprhension des causes des cots : pourquoi ces cots existent-ils ? A cet effet, les diffrents dbats qua connus la comptabilit de gestion au cours du 20me sicle, ont abouti dimportants rsultats. Notamment ceux de Johnson et Kaplan (1987), Cooper et Kaplan (1987 et 1988) et Cooper (1988a, 1988b, 1989a, 1989b). Leurs travaux dmontrent lexistence dun dcalage des systmes de cots pratiqus par rapport aux besoins de lindustrie. Ils dbouchent ainsi sur une nouvelle mthode de calcul et de contrle des cots dnommes lActivity Based Costing (ABC) ou la comptabilit par activits (CA).

La comptabilit par activits a fait lobjet, durant les deux dernires dcades, dun processus daller-retour entre le monde des chercheurs et celui des praticiens (Godowski, 19

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation 2001, p. 14). Ces investigations ont montr dune part, laptitude de la CA modliser efficacement les relations entre les ressources, leurs modes de consommation et les objectifs de lentreprise (Bouquin, 2006). Dautre part, ils ont mis en vidence un intrt croissant de beaucoup de dirigeants la mthode de CA, mais aussi ils ont prsent plusieurs lments importants dans sa mise en uvre. Dans ce sens, certains travaux se sont focaliss sur les problmes qui surviennent lors du processus de mise en uvre, ces problmes sont des lments sensibles dans ce processus, les ignorer aboutit srement lchec. Dautres ont tudi les prcautions prises avant toute adoption (la validit de la CA). Enfin, malgr son grand apport au management des entreprises, la ralit nous montre que trs peu dentreprises ladoptent.

La figure 4 ci-dessous rsume lenchanement de ce chapitre.

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Figure 4 - Plan du premier chapitre La comptabilit par activits : fondements de base et implantation

Section 1 - La comptabilit par activits, une nouvelle approche de modlisation des flux . Section 2 - Limplantation de la CA

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Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation

Section 1 - La comptabilit par activits, une nouvelle approche de modlisation des fluxNotre objectif travers cette section est triple, nous visons dabord prsenter les concepts de base de la CA, savoir les notions dactivit/processus, dinducteurs et de causalit. Ensuite, nous y discuterons les trois niveaux donns par la littrature la CA, savoir, lanalyse des activits , lanalyse des cots des activits et le calcul des cots par activits . Enfin, nous exposerons les diffrentes utilisations possibles de cette mthode dans lentreprise.

I. La comptabilit par activits, les concepts fondateurstel-00348036, version 1 - 17 Dec 2008La comptabilit par activits se base sur quatre concepts cls, ces concepts ont permis dune part de renouveler la dmarche gnrale de calcul des cots et dadapter, dautre part, le systme de contrle de gestion aux besoins de lentreprise. Nous exposerons successivement les notions suivantes : activit/processus, inducteur et causalit. Nous terminerons ce paragraphe par une discussion sur le sens de la responsabilit dans les systmes de CA.

1. Les notions dactivit et de processusLide de base sur laquelle sappuie la comptabilit par activits est que tout rsultat est la consquence dun processus, c'est--dire dun enchanement dactions ou dactivits (Bouquin, 2003). Un rsultat est une performance, il est obtenu par ce que lon fait et par la manire dont on le fait, c'est--dire par la matrise et le pilotage des activits et de leur agencement en processus (Lorino, 1991). Dune autre manire, ce sont les interdpendances entre les activits - organises sous forme de processus - qui aboutissent en fonction dune stratgie, lobtention des rsultats souhaits. Le processus est un ensemble dactivits complmentaires et interdpendants ayant une finalit commune, il concourt directement ou indirectement la ralisation de loffre de lentreprise (Bouquin, 2006). Il est considr comme le trait dunion entre les objectifs de lentreprise et le droulement concret des activits (Lorino, 1991, p. 41).

Ainsi, la notion centrale de la CA est lactivit . Elle constitue le point de renouvellement du mode de fonctionnement de lentreprise. Cest partir de ce mode 21

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation dorganisation en activits que sera dfinie toute la dmarche de la CA (Pesqueux, 2002). Nanmoins, la littrature sur la CA ne propose pas de dfinition positive de cette notion mais plutt une description de son contenu (Pesqueux, 2002, p. 62).

Lorino (1991) considre comme activit tout ce que lon peut dcrire par des verbes dans lentreprise. Lactivit est une opration ncessaire au fonctionnement de lentreprise. En dautres termes, cest un ensemble de tches de mme nature, accomplies afin de permettre un ajout de valeur llaboration dun produit (Gervais, 2005). Elle est dcrite par plusieurs lments qui dterminent son fonctionnement (cf. figure 5, ci-dessous) :

Figure 5 - La description de lactivit (Adapt de Lorino, 1991, p. 66)

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Pilotage

-

Contraintes Objectifs Indicateurs priorits

Intrants

ACTIVITE A

Extrant

CARACTERISTIQUES DE PERFORMANCES

- cots - qualit - dlai

Les principaux lments qui dcrivent une activit sont les suivants : Lextrant : lactivit ralise permet de fournir un extrant une activit destinataire - ventuellement au client final - (Ex. : Pices fraises, factures mises, marchandises livres). Lorino (1991) distingue lextrant principal, qui constitue le rle prpondrant de lactivit, des extrants secondaires qui peuvent tre physiques ou informationnelles.

-

Le client : cest le destinataire de lactivit de lextrant, il peut tre interne ou externe.

22

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation Lunit choisie pour mesurer le niveau de lactivit : il est ncessaire de dterminer une unit de mesure quantifiable de lactivit ralise. Cet indicateur doit pouvoir mesurer pertinemment le niveau de lextrant principal.

-

Lensemble des intrants : il sagit dintrants physiques ou informationnelles.

-

La liste des caractristiques de performances : cest lensemble dindicateurs qui permettent dvaluer les performances de lactivit ralise. Il sagit des indicateurs de cots, de dlai et de qualit.

-

Le fait gnrateur : cest le phnomne qui dclenche lactivit.

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Dans ce sens, une entreprise organise en activits fait que chacune de ses sections - fonction ou service - soit divise en plusieurs activits. Par exemple, la fonction exploitation dune entreprise de remorquage portuaire peut contenir deux activits principales, la prparation et le remorquage. A cet gard, la CA cherche dterminer les causes de la consommation des ressources par ces deux activits, dfinies comme un ensemble de tches complmentaires et coordonnes dont lobjectif est de fournir une prestation identifie (Bouquin, 2006). Ces causes sont nommes inducteurs dactivits qui sont les facteurs qui dclenchent les activits, ils sont responsables de leurs cots. La CA relie par consquent tous les lments qui contribuent aux rsultats de lentreprise, savoir, les ressources, les activits et les produits/services. Cest une reprsentation dont lentreprise lie ses ressources et les rsultats - les performances - quelle tente de faire payer aux clients (Bouquin, 2003, p. 64).

2. La notion dinducteurEn comptabilit par activits, le concept dinducteur prend une place importante et mrite un claircissement afin dviter toute confusion avec lunit duvre . Le mot inducteur est un adjectif qui vient du mot induction . Selon le petit Robert, le vocable induction est lopration mentale qui consiste remonter des faits la loi, de cas donns (propositions inductrices) le plus souvent singuliers ou spciaux, une proposition plus gnrale . En dautres mots, cest une manire de raisonner qui consiste infrer une chose 23

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation une autre, gnraliser partir de cas singuliers ou encore aller des effets aux causes. On cherche ce qui cause un effet quelconque. Linducteur est en consquence ce qui cause leffet. Do les deux concepts couramment utiliss en CA, inducteur dactivit et inducteur de cot.

La fonction de linducteur dans la modlisation de la consommation des ressources se joue sur deux niveaux : court terme et long terme (Bouquin, 2003). Dans le court terme, linducteur est lvnement qui dclenche - ou qui cause - lactivit consommatrice des ressources, cest ce quon appelle inducteur dactivit. Par exemple, lactivit remorquage dans lexemple prcdent (cf. p. 23), est dclenche par les commandes clients - entre et sorties des bateaux - qui est un inducteur dactivit. Dans le long terme, linducteur est la loi qui dtermine le niveau des cots travers lorganisation de lactivit, cest ce que lon appelle inducteur de cot. Le cot pour lactivit remorquage peut tre influenc par plusieurs

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lments tels que la dure du remorquage, la taille du btiment remorqu, la qualification des marins, la puissance des remorqueurs et le climat. Cependant, pour permettre dallouer le cot de lactivit lobjet de cot, en CA on choisit un seul inducteur - qui peut tre compos considr comme le plus significatif, dans lexemple, cest la dure du remorquage et la taille du btiment remorqu. Ainsi, lidentification des inducteurs de cots permet de regrouper les activits ayant les mmes causes dans des centres de regroupement. Ceci permet didentifier les processus et de runir les cots sensibles aux mmes lois (Bouquin, 2003).

A la diffrence avec lunit duvre qui est limite au fait quelle est un instrument de modlisation des cots, linducteur dactivit a une prtention de causalit, lui donnant une grande validit pour le management de la performance. Lunit duvre se rfre gnralement lune des ressources consommes par une activit, elle nest quune variable en corrlation avec les cots (Bouquin, 2006 et 2003). Par exemple, on a lhabitude de choisir lheure de main duvre ou de machine comme units duvre, on considre dans ces cas que les temps de consommation de ces ressources sont corrls au cot de consommation des autres ressources de lactivit, dune autre faon, on considre que le cot de main duvre ou de machine est le plus dominant dans le cot total (Bouquin, 2006). De ce fait, lunit duvre est vue comme un outil de modlisation des cots homognes afin de les rpartir sur les produits ou tout autre objet de cot (Bouquin, 2006). Nanmoins, elle ne dclenche pas lactivit, elle peut tre soit un vnement induit lui mme par lvnement dclencheur et donc corrle lui, soit la mesure en units montaires ou en volume de lun des cots dclenchs par cet vnement (Bouquin, 2006). Dans lexemple, si on choisit la main duvre 24

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation directe pour allouer le cot de lactivit remorquage, on ne peut la considrer comme inducteur de cot car elle nexplique pas le niveau de consommation des ressources par lactivit. Elle est dclenche elle-mme par lactivit remorquage. Or, la dure du remorquage et la taille du btiment remorqu expliquent bien la consommation des ressources par cette mme activit.

En rsum, lintroduction du vocable inducteur en comptabilit de gestion permet un management des cots et des performances. Un inducteur tel que les commandes clients reflte un signe positif, alors que le non paiement des clients traduit un vnement ngatif et ncessite une intervention. Il en rsulte que la disposition de lentreprise dune liste exhaustive des inducteurs dactivits peut tre considre comme une description critique des faits auxquels elle consacre ses ressources, une piste vers un diagnostic et un programme

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damlioration, ce qui nest pas, en fait le propos de lunit duvre (Bouquin, 2006, p. 128).

3. La place de la causalit dans les systmes de CAEn sappuyant sur le dveloppement prcdent, nous constatons que la causalit est la grande affaire de la CA et pour le calcul des cots et pour la gestion de la performance (Mvellec, 2003). Au sens de la CA, la performance ne se limite pas aux chiffres, mais elle concerne dune manire plus globale la cration de la valeur pour lensemble des partenaires de lentreprise.

Dans la structuration des systmes de CA, le fonctionnement des ressources et des activits est soumis des relations de causalit, ces relations se concrtisent dans des inducteurs dactivits et de cots. Ainsi, la relation directe entre lobjet de cot et la consommation des ressources est abandonne (Mvellec, 2003), car les ressources sont consommes dabord par les activits selon une relation de causalit entre les deux. Ceci ouvre bien videmment une tude trs fine des causes de consommation des ressources par les activits (Mvellec, 2003) afin de raliser lobjectif de la CA quest la modlisation de la consommation des ressources.

De ce fait, ltude de causalit renvoie relier chaque travail sa finalit, chaque niveau un niveau suprieur qui lui donne un sens, afin de tracer la relation entre consommation et 25

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation finalit poursuivie (Bouquin, 2006). Se faisant, les causes senchanent en crant un rseau danalyse dans lequel les diffrentes causes sarticulent. Ceci est vital en comptabilit par activits, il permet dune part de concevoir les logiques court terme dclencheurs des activits et de lautre de comprendre les lois, qui, long terme dterminent leurs cots.

Sous le premier angle de vue - le court terme -, on remonte jusquaux vraies causes des activits (Bouquin, 2003), jusquau fait davoir un arbre exhaustive des causes qui permet lentreprise de dcider et dagir sur les causes profondes de consommation des ressources. Ces causes peuvent aller au-del du fonctionnement normal de lentreprise (exigences des clients internes et externes et la production) et toucher des lments relatifs aux dysfonctionnements internes. Nous citons titre dexemple, labsentisme, les pannes, un mauvais climat social, le manque de qualification des salaris, une mauvaise ergonomie

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interne, etc. Tous ces lments sont dclencheurs dun ensemble dactivits inhrentes la gestion de la qualit, les ressources humaines, etc.

Sous le deuxime volet, on cherche la ou les lois qui crent long terme des avantages ou des handicaps de cots pour lactivit considre (Bouquin, 2003). Ce sont les inducteurs de cots. En jouant sur ces inducteurs, lentreprise peut, sur le long terme, matriser le cot de lactivit et amliorer en consquence sa performance.

Enfin, le fait de mettre en uvre larchitecture des causes dans une entreprise, permet de mettre en valeur limportance de la notion de la transversalit des processus. Cette notion est vitale dans le management des cots, dfini comme tant lensemble des dcisions et actions qui visent agir sur les processus (Bouquin, 2006). Ainsi, lvolution des cots dune activit dun processus peut avoir des rpercussions positives ou ngatives sur les cots dune autre activit du mme processus. Tous les lments du processus sont lis et dfinissent une prsentation des responsabilits en transversale.

4. Une nouvelle vocation pour la notion de responsabilitAvec la mthode de CA, la notion de responsabilit se trouve modifie (Mvellec, 2003). Les individus sont mens combiner deux types de responsabilit : la responsabilit hirarchique (verticale) et la responsabilit des processus (horizontale). Le deuxime volet de 26

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation la responsabilit constitue lune des nouveauts apportes en CA par rapport aux mthodes dites traditionnelles, en particulier la mthode des sections homognes. La responsabilit horizontale se matrialise travers lutilisation performante des ressources dans une mise en uvre coordonne en vue de la satisfaction des clients (Mvellec, 2003, p. 37). En dautres mots, elle consiste la gestion de la performance au sein des processus transversaux.

Il rsulte de cela que la notion de la valeur prend une place importante en CA. Lobjectif de la CA va au-del du simple calcul pertinent des cots. Elle cherche en plus - ce qui nous parait le plus important - dfinir la dmarche la plus convenable lanalyse concomitante des cots et de la valeur cre. Or, la valeur cre est le rsultat de la coopration des responsables organiss en transversal, c'est--dire lis par un processus. Ce qui importe, ce nest pas seulement dagir sur les inducteurs pour matriser la consommation des diffrentes

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ressources, mais galement de chercher ce que chaque processus soit porteur dune valeur pour le client (Mvellec, 2003). Ainsi, ce niveau danalyse, le cot de linducteur pourra tre rapproch dun prix et par consquent il pourra contribuer amliorer la consommation des ressources, qui demeure lobjectif ultime de tout systme de cots (Mvellec, 2003).

II. Les trois niveaux de la comptabilit par activitsGosselin (1997) distinguent trois niveaux dans la CA : lanalyse des activits, lanalyse des cots des activits et le calcul des cots par activits. La figure 6 suivante illustre ces 3 niveaux possibles de mise en uvre.

Figure 6 - Les trois niveaux de mise en uvre de la comptabilit par activits (Adapt de Gosselin, 1997, p. 106) Analyse des activits

Analyse des cots des activits

Calcul des cots par activits

27

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation Ces trois niveaux peuvent tre dcrits de la manire suivante :

-

Lanalyse des activits (AA) : le centre CAM-I (2000) dfinit lanalyse des activits comme le processus didentification et de classification des activits dans le but davoir une comprhension et une documentation dtaille sur leurs caractristiques. Cest le premier niveau dans la comptabilit par activits, il est pr-requis pour implanter le systme de CA. Il est le plus simple et consiste identifier les activits et les processus ncessaires pour transformer le matriel, le travail des hommes et dautres ressources en outputs (Brimson 1991, cit par Gosselin, 1997). Lanalyse des activits est une tape primordiale dans le processus dimplantation de la CA, elle ne ncessite pas une analyse des cots et ne permet pas davoir une nouvelle faon dallocation des charges indirectes (Gosselin 1997).

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-

Lanalyse des cots des activits (ACA) : cest la deuxime tape de la CA. Elle englobe lanalyse des activits, mais comprend en plus le processus expliquant les dterminants structurels des cots des activits (Gosselin 1997). Cette tape permet lentreprise de dterminer les cots de chaque activit et les facteurs qui les influencent, mais sans aller jusquaux cots des produits (Gosselin 1997). Lanalyse des cots des activits permet aux entreprises de tirer plusieurs bnfices, notamment la rduction de leffet des inducteurs de cots. Ceci peut conduire en consquence plusieurs entreprises se contenter de ce niveau de la CA sans aller au troisime niveau (Nanni et al., 1992, cit par Gosselin, 1997).

-

Calcul des cots par activits (CPA) : cest la troisime tape de la CA. Elle permet de calculer les cots pour les diffrents produits et services (Cooper, 1988a). Les cots des produits sont dtermins grce lidentification des charges indirectes, des inducteurs de cots et des objets de cots.

Les niveaux analyse des activits (niveau 1) et analyse des cots des activits (niveau 2) sont des tapes importantes pour lentreprise qui les met en uvre. Ils permettent danalyser les activits et de dterminer les inducteurs de cots avec lobjectif damliorer les processus et de rduire les cots (Reeve 1996 ; Baird et al., 2004). Le niveau calcul des cots par activits (niveau 3) est important pour les entreprises qui cherchent mesurer les

28

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation cots des produits et services avec lobjectif de prendre des dcisions les concernant (Baird et al., 2004 et 2007).

III.

La CA, une multitude dapplications au service de la dcision

Lobjectif de tout systme de comptabilit par activits nest pas de trouver des cots plus pertinents des diffrents produits/services. Le calcul des cots est un moyen, non pas une finalit. Lobjectif de la CA doit tre laide la prise de dcisions stratgiques, afin damliorer le profit de lentreprise. Selon Argyris et Kaplan (1994), la comptabilit par activits est une approche technique qui permet de fournir des informations plus prcises aux managers sur les cots, les processus, les produits/services et les clients. Les cots obtenus

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travers la CA vont au-del des cots des produits/services, ils touchent tout ce qui entre directement ou indirectement dans le processus de leur obtention. Ainsi, grce ces informations, les managers seront plus en mesure dadopter les dcisions les plus optimales sur la manire dobtenir les produits/services et dintervenir l o il y a une dfaillance. Ils peuvent aussi les utiliser dans les dcisions stratgiques tels que le lancement de nouveaux produits/services, la pntration dans de nouveaux marchs, le choix des processus de production les plus optimaux et le choix des mix produits/march.

De ce point de vue, la CA peut tre utile dans la prise de dcisions oprationnelles et stratgiques. Or, lutilisation de la CA dans ces deux types de dcisions est fortement lie aux niveaux de la CA implants par les entreprises, savoir lanalyse des activits, lanalyse des cots des activits et le calcul des cots par activits (Gosselin, 1997, cf. II, p. 27). En sappuyant sur cette classification, la CA peut tre vue comme un outil scind en deux grands niveaux que nous adopterons dans ce paragraphe afin dtudier le lien entre elle et la prise de dcision : il sagit du niveau activit et du niveau objet de cots . A linstar de Partridge et Perren (1998)3, cette manire dtudier le rle de la CA dans la prise de dcision permet de mettre en valeur le lien entre les niveaux considrs de la CA et les dcisions stratgiques et oprationnelles prises par les entreprises. En dautres mots, elle montre que certaines dcisions ne peuvent tre prises ou amliores que sur la base desPartridge et Perren (1998) proposent un modle intgr qui tablit les liens entre la CA et ses diffrentes utilisations possibles. Dans notre travail, nous nous sommes inspirs de ce modle pour tudier le rle de la CA dans la prise de dcision.3

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Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation informations fournies par lun des deux niveaux. La figure 7 ci-dessous rsume les principales utilisations de la CA. Figure 7 - Les diffrentes utilisations de la CA (Adapt de Partridge et Perren, 1998, p. 582) Ressources Budget par activits

Inducteurs dactivitsActivits avec valeur ajoute/activits sans valeur ajoute

Activits

Restructuration organisationnelle

Ringnierie des processus

Mesure de la performance

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Benchmarking

Cots de la qualit

Inducteurs de cots Analyse de la chane de valeur Modlisation des cots

Objets de cots

Produits et services

Canaux de distribution

Clients

Tarification

Design des produits

Prix de cession

Rentabilit des clients

Choix produits/marchs 30

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation

1. Niveau objets de cots Un objet de cot correspond souvent un produit ou un service dont on dtermine le cot de revient. Cependant, avec la CA un objet de cot peut staler dautres lments intgrs dans les processus de cration de la valeur : les processus, les clients, les lignes de produits, les projets, les canaux de distribution, etc. Dans ce paragraphe, nous traiterons trois types dobjets de cots, nous mettrons en exergue en particulier les diffrentes utilisations et les dcisions qui peuvent tre amliores par linformation CA : il sagit des produits / services , des canaux de distribution et des clients . (cf. figure 7 ci-dessus)

a) Lanalyse de la rentabilit des clientstel-00348036, version 1 - 17 Dec 2008Grce au calcul des cots par client, les entreprises auront une vision plus claire sur la rentabilit de leur clientle. Dailleurs, lanalyse de la rentabilit des clients est lune des applications les plus importantes permises par la CA. Grce aux informations fournies par le systme, les entreprises peuvent distinguer avec prcision les clients les plus rentables des clients qui participent faiblement la rentabilit. Ceci permet damliorer la prise de dcision sur les clients et de personnaliser leur gestion.

b) Le design des produitsLanalyse des cots en CA permet didentifier les activits qui crent de la valeur au produit/service final de celles qui nen crent pas. Elle permet aussi de connatre la part de chaque activit dans la cration de cette valeur. Par rapport aux mthodes traditionnelles de calcul de cots, la CA offre deux avantages importants : dabord elle met clairement en vidence les processus de ralisation des produits/services, dans ces processus on connat trs bien les activits ncessaires ainsi que leur cot (Partridge et Perren, 1998). Ensuite, les informations fournies permettent aux entreprises de revoir le processus de design de leurs produits/services en utilisant celui qui consomme le moins dactivits sans nuire la qualit finale (Ittner et al., 2002).

Dans le mme sens, dans certains secteurs, lanalyse des cots des processus de ralisation des produits / services joue aussi un rle important dans la communication avec les clients sur le choix des designs. La CA constitue ce sujet lun des outils pertinents et flexibles dans la 31

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation modlisation de ces cots. Par voie de consquence, les clients auront la possibilit de choisir le design dun nouveau produit/service entre plusieurs alternatives tenant compte du cot de fabrication (Swenson, 1995).

c) La tarification et lanalyse de la rentabilit des produits/servicesLa dtermination des prix de vente est fortement lie aux cots de ralisation des produits/services. Or, plus les cots calculs sont prcis, plus les prix fixs et les profits raliss sont exacts et permettent des prises de dcisions pertinentes. Dans ce sens, lexactitude des cots obtenus partir de la CA permet damliorer la politique de fixation des prix par les entreprises et par consquent une meilleure analyse de la rentabilit des

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produits/services vendus. Cette analyse oriente normment les entreprises dans les choix des mtiers les plus rentables. Notamment, elles peuvent dcider plus clairement sur la rpartition des ressources entre les diffrents produits/services raliser.

d) Le choix des produits/marchsParmi les dcisions les plus importantes que les entreprises doivent prendre, est la dtermination du mix produits/marchs qui maximise le profit. C'est--dire, quels produits/services vendre ? Sur quels marchs ? Pour quels clients ? quels prix de vente ? Et quelles quantits ? Or, pour prendre la bonne dcision, les dcideurs ont besoin dinformations de cots prcises et dtailles sur les diffrentes combinaisons

produits/marchs possibles, afin de choisir le mix le plus optimal. A cet effet, la CA est reconnue comme une mthode capable de fournir des informations compltes de cots, se basant sur les simulations des diffrentes combinaisons produits/marchs (Partridge et Perren, 1998).

e) Le budget par activitsDurant le cycle de vie de lentreprise, les dcideurs sont amens ajuster leur mix produits/marchs, introduire de nouveaux produits/services, amliorer les processus oprationnels et adopter de nouvelles technologies. Cependant, ces diffrents changements entranent une modification des ressources demandes pour la ralisation des activits 32

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation requises (Cooper et Kaplan, 1992). La rvision des quantits de ressources exiges par les activits de lentreprise savre ncessaire.

Or, dans les systmes de CA, la nouvelle consommation des ressources peut tre estime. En effet, lune des applications les plus importantes de la CA, est la ralisation des budgets par activits (Cooper et Kaplan, 1992). Avec la CA, le budget pour chaque ressource est dtermin en se basant sur les activits requises pour la ralisation des produits/services, selon les nouvelles donnes de lentreprise. Cet outil de pilotage peut tre efficace pour matriser la consommation des ressources, il permet de justifier les demandes supplmentaires en ressources pour certaines activits, de rduire, voire dliminer les gaspillages et de redfinir lutilisation des capacits internes afin de la rendre plus optimale. Lobjectif ultime de la budgtisation base dactivits, est de permettre lentreprise de gnrer le mme rendement

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avec moins de ressources et damliorer en consquence la rentabilit (Cooper et Kaplan, 1992).

f) La sous-traitanceLes entreprises industrielles et de services ont le choix dintgrer lensemble des activits de leur chane de valeur ou den externaliser certaines. On trouve gnralement cela lorsque les produits/services fournis sont complexes et la ralisation de certaines composantes savre chre4. Dans une dcision de sous-traitance, les informations fournies par la CA peuvent jouer un rle dcisif du fait de leur pertinence. Ces entreprises peuvent comparer grce au systme de CA entre les cots des produits/services5 dans les deux cas : ralisation interne et soustraitance (Swenson, 1995). Dans le cas o lentreprise dcide de raliser la composante du produit/service linterne et si elle dispose de plusieurs sites, elle peut ventuellement utiliser linformation CA afin de choisir le site le plus optimal pour la ralisation de la composante (Swenson, 1995).

Par exemple, dans le secteur bancaire, Le transport des billets est sous-trait des entreprises spcialises. La ralisation de cette composante de ce service par la banque elle-mme est coteuse et demande dautres comptences. Dans les entreprises dautomobiles, la fabrication de certaines composantes tel que le moteur, peut tre soustraite. 5 Il sagit gnralement des composantes dun produit ou une partie dun service rendu.

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Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation

2. Niveau des activits a) Lanalyse de la chane de valeurLanalyse de la chane de valeur est une forme particulire de lanalyse des activits, elle est issue des travaux de Porter (1985, 1999). En effet, lentreprise est considre comme un ensemble dactivits en interaction qui crent de la valeur pour le client final (Partridge et Perren, 1998). A cet effet, la CA facilite lanalyse de lentreprise sous cet angle et aide normment les responsables dans la comprhension des activits, de leurs cots et des interactions entre elles, afin de former une chane dactivits qui crent de la valeur au client final (Partridge et Perren, 1998).

La matrise de la chane de valeur globale de lentreprise est essentielle. Car la valeur

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ajoute se cre au long des phases de cette dernire. En effet, la chane de valeur globale comprend deux niveaux interdpendants (Bouquin, 2006). Le premier, cest laval, c'est--dire lensemble des processus de transformation et dutilisation du produit de lentreprise jusquau consommateur final. Le deuxime, lamont, il contient les processus de transformation conduisant aux ressources que lentreprise gre elle-mme dune faon directe ou dans le cadre dun partenariat.

Lutilit de la CA dans lanalyse de la chane de valeur globale est multiple. Par exemple, grce la CA, lentreprise peut analyser les cots au niveau de chaque stade de sa chane de valeur globale. Ainsi, elle peut comparer ses cots avec ceux des clients et des fournisseurs, et par consquent, prendre des dcisions sur lintgration de certains stades dans sa chane interne. Dans le mme sens, lentreprise pourra distinguer les activits cratrices de la valeur de celles non cratrices de la valeur et agir en consquence sur elles.

b) Lidentification des activits valeur ajoute/activits sans valeur ajouteLe classement des activits en activits valeur ajoute et activits sans valeur ajoute, parat un lment essentiel de la dmarche de CA. En effet, ce classement se base sur une ide simple : toutes les activits ralises au sein de lentreprise ont vocation tre productives (Mvellec, 1991). Selon cet auteur, le mot activit productive est utilis dans le sens de la capacit de lentreprise produire de la valeur pour ses clients, partir de ses activits et en 34

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation consommant le moindre de ressources. Ainsi, lanalyse des activits de lentreprise sous langle de la cration de la valeur est considre actuellement comme un outil danalyse et damlioration de sa comptitivit.

Dans ce sens, la CA permet didentifier deux types dactivits, il sagit des activits cratrices de la valeur et des activits non cratrices de la valeur :

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Les activits cratrices de la valeur : se sont les activits essentielles au fonctionnement de lentreprise. Elles participent en consquence la cration et laugmentation de la valeur perue par le client. Ces activits seront donc maintenues et dveloppes car ce sont elles qui permettront lentreprise de dominer ses concurrents.

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Les activits non cratrices de la valeur : ce sont les activits qui ne sont pas essentielles au fonctionnement de lentreprise et qui peuvent tre en

revanche limines sans dtrioration des attributs du produit/service final (Berliner et Brimson, 1988 ; Hixon, 1995).

c) La restructuration de lentrepriseLa mise en uvre de la CA ncessite une rvision de la structure de lentreprise. En effet, une entreprise structure verticale cre des barrires de communication, ce qui augmente en consquence les cots et le temps de ralisation des activits et influence ngativement la qualit (Partridge et Perren, 1998). Lanalyse des activits constitue un outil efficace pour redessiner le design de lentreprise afin de le rendre plus cohrent avec la ralit.

d) La ringnierie des processusChaque processus de lentreprise regroupe un ensemble dactivits en interaction. Ces processus reprsentent le mode dorganisation de lentreprise, plus ils sont efficaces, plus la comptitivit sera forte. Or, lentreprise change : les modes dorganisation, de communication et de production voluent. Ainsi, les processus doivent tre adapts en permanence au fur et mesure des volutions de lentreprise. Lanalyse des activits et lanalyse des cots des

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Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation activits constituent cet effet un tremplin efficace pour ladaptation et la ringnierie des processus.

e) La mesure et le pilotage de la performanceA ct des autres applications, la CA peut aussi constituer un cadre cohrent et efficace pour la mesure et le pilotage de la performance. En effet, la mthode de CA repose sur lide que la performance dune entreprise est le rsultat de la coopration entre des activits homognes ayant un mme but et qui sont elles-mmes organises dans des processus. Grce cette homognit, la CA, en sadjoignant de son complment la gestion par les processus6 (ABM) concourt la mesure et au pilotage de la performance.

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Le pilotage sillustre donc travers la mthode Activity Based Management (ABM) qui est une reprsentation de lentreprise en processus. Elle est considre comme un cadre conceptuel idal pour servir de rfrentiel de pilotage et orienter les dcisions sur le long terme (Godowski, 2001, p. 359). Dans ce sens, lABM se caractrise par six lments qui lui donnent le rle dun outil de pilotage de la performance (Godowski, 2001) :

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Elle se focalise sur les modes opratoires et les comptences : LABM est un outil qui privilgie lorganisation en activits et processus. Cette organisation est un moyen efficace qui permet de connatre en dtail les diffrents besoins de lentreprise en matire de liaison et de coordination. Ceci permet en consquence de slectionner les savoirs et les comptences pour satisfaire les diffrents besoins internes.

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Elle repose sur un modle de diagnostic : le dploiement de lABM met laccent sur lanalyse causale des facteurs de performance. Or, cette tude causale est au cur de la construction des systmes de pilotage de lentreprise.

-

Elle vise laction et sa matrise : lABM propose un outil de pilotage accs sur la mise en uvre de laction. En plus de lamlioration de la prise de dcision, elle propose des plans damlioration et des indicateurs de pilotage afin de matriser laction.

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Ce concept est utilis par Godowski (2001) pour signifier lABM.

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Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation Elle propose une vision dynamique du temps : la gestion en processus (ABM) permet un traitement dynamique des problmes dans le temps. Elle ne spare pas entre moment de dcision et moment dexcution. Cette dmarche est la suivante (cf. figure 8, ci-dessous) :

Figure 8 - Le mode de traitement des problmes par lABM : expression dune vision dynamique du temps (Adapt de Godowski, 2003, p. 262)

1) Confrontation des processus aux objectifs

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4) Indicateurs et plans daction

2) Enjeux stratgiques

3) Leviers daction

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Cest une dmarche de changements continus : la manire de traitement des problmes propose par lABM, sappuie par nature sur un mode de dveloppement continu. Elle met en question de faon automatique les indicateurs, les plans daction et les enjeux stratgiques et permet de mettre en uvre de nouvelles actions damlioration. Cest un moyen de pilotage de la performance sur le long terme.

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Elle prconise laction collective : la fonction transversale de lABM propose une coopration et une performance collective. Lintgration, la coordination, le partage des informations et des expriences sont les mots cls. Ainsi, le pilotage de la performance est imprgn par chaque responsable. La performance prend la dimension collective. Elle insiste sur le rle de chacun dans lenchanement des activits et dans la proposition de solutions viables mme en dehors de son domaine daction.

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Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation

Section 2 - Limplantation de la CALa concrtisation du projet de mise en uvre de la CA nest pas une chose aise. Il faut tout un travail rigoureux danalyse, de prparation, de suivi et de mise jour. Gnralement, les entreprises qui ont entam limplantation de cet outil se confrontent un ensemble de problmes, les supplanter est une ncessit et cela demande plusieurs actions. Par ailleurs, la mise en uvre de la CA demande au pralable une tude de faisabilit qui met laccent sur deux points : la validit interne et la validit externe. Enfin, ladoption de la CA nest pas une dcision facile prendre, une entreprise nen dcide ladoption que si cette dernire lui procure un avantage apparent.

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I. Les problmes dans limplantation de la CAParmi les problmes qui surviennent lors de limplantation de la CA, il est question souvent des rsistances aux changements, de labsence dun planning formalis pour lintgration progressive de la mthode, le manque de clart dans les rapports dits et le cot lev de la mise en uvre.

1. La rsistance au changementLa rsistance au changement est lie aux lments suivants :

La rsistance des individus au changement La rsistance des individus de lentreprise au changement est considre comme le premier facteur qui entrave la mise en uvre de la CA. En effet, cette rsistance est lie au manque de confiance et de sret dans le nouveau mode de travail. Les individus de lentreprise vont chercher ainsi dfendre le statu quo, car ils pensent quil est plus confortable et que leurs intrts sont plus en scurit. Pour eux, tout changement dans le mode de fonctionnement de lentreprise reprsente un risque.

Certes, la rsistance la mise en uvre de la CA peut tre justifie si lentreprise est leader sur son march, ralise une rentabilit importante ou encore ne subit pas de forte 38

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation concurrence (Player et Keys, 1995). Pareillement, dans le cas o lentreprise enregistre des problmes de performance, le refus de mise en uvre peut se prsenter aussi tant que ces problmes ne reprsentent pas une menace directe et reconnue aux employs (Player et Keys, 1995).

Dans ce cadre, afin dviter ces comportements dfensifs, plusieurs outils peuvent tre mises en uvre par le groupe du projet CA (Player et Keys, 1995), nous citons notamment :

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La communication claire et prcise des objectifs et des avantages du projet : afin de rduire, voire dliminer la crainte de linconnu et de rassurer les futurs utilisateurs sur leurs nouveaux rles dans lentreprise.

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La formation des employs sur lutilisation de la CA : le plan de formation doit expliquer aussi le rle de chaque employ dans le nouveau systme de calcul des cots.

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Expliquer aux employs les avantages et les inconvnients de la CA et du systme actuel de calcul des cots.

La rsistance fonctionnelle Le second obstacle la mise en uvre de la CA est li aux relations fonctionnelles existantes lintrieur de lentreprise (Player et Keys, 1995). En effet, la CA tend ignorer lorganisation fonctionnelle de lentreprise dans la dfinition des activits ncessaires la ralisation des diffrents produits et services : on met davantage laccent sur linformation fournie par une activit et on prte en revanche, peu dattention lappartenance fonctionnelle de ladite activit.

Assurment, la mise en uvre de la CA implique le passage dune vision verticale hirarchise, une vision horizontale cloisonne de lentreprise (Mvellec, 1995) en rendant lentreprise plus souple et plus flexible dans son fonctionnement. Or, la mise en uvre de ce nouveau mode de fonctionnement peut se buter contre la rsistance invitable des responsables fonctionnelles de lentreprise du fait de la redistribution du pouvoir (Mvellec, 1995). Ainsi, ces responsables vont considrer la CA comme une menace, car ils auront moins de pouvoir, de prestige et dimportance dans lentreprise (Player et Keys, 1995). 39

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation De ce fait, il serait prudent de prendre en considration limportance des responsables des fonctions dans la mise en uvre de la CA. Implanter la CA, ne doit pas tre vu comme une diminution de limportance des responsables hirarchiques, mais plutt comme une redfinition des normes afin dassurer davantage la lgitimit de leurs actions. En ralit, limplantation de tel systme ne remet absolument pas en cause la structure hirarchique qui demeure prsente, ce qui change cest laddition dune autre dimension la structure, savoir lactivit ou encore le processus (Mvellec, 2003). Le rle du responsable fonctionnel dans la structure du pouvoir de lentreprise, peut se rsumer entre autres, lallocation des ressources aux diffrentes activits (Mvellec, 1995).

Les barrires culturelles

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Lune des conditions de la russite de mise en uvre de la CA, est lacceptation des utilisateurs de changer leurs valeurs et croyances acquises pendant longtemps avec lancien systme de calcul des cots. En effet, la longue adoption et lutilisation rptitive des systmes de cots traditionnels par le personnel des entreprises crent chez eux des modles mentaux sur le comportement des cots dans leurs entreprises (Player et Keys, 1995). Ces modles deviennent ancrs dans leurs inconscients, mme sil est reconnu quils ne refltent plus la ralit du fonctionnement de leurs entreprises.

Ce sont donc ces modles qui fondent, une partie des valeurs et croyances du personnel de lentreprise et peuvent en consquence, constituer lun des obstacles majeurs dans limplantation de la CA (Player et Keys, 1995). De ce fait, pour une mise en uvre russie, le changement de la culture dentreprise savre primordial. Il peut tre facilit dans les cas durgence, c'est--dire en cas dune crise interne (Player et Keys, 1995), qui menace la survie de lentreprise. Dans le cas o ladoption de la CA est la solution la plus favorable, sa mise en uvre peut tre facile et rapide car tout le personnel se sent concern.

Dans lautre cas, o il ny a pas de crises apparentes, la meilleure solution est dimpliquer les utilisateurs dans la cration du nouveau systme (Player et Keys, 1995), car lindividu peut accepter facilement ce quil cre lui-mme. A cet effet, le groupe du projet doit donner lopportunit aux futurs utilisateurs de dfinir la liste des activits et des inducteurs. Il est recommand aussi didentifier les diffrents changements ncessaires et de raliser ensuite, une analyse des lments positifs et ngatifs pour la mise en uvre. A partir de cette analyse, 40

Partie 1 Chapitre 1 : La comptabilit par activits : fondements de base et implantation un plan de changement culturel peut tre conu et adopt tout au long du processus dimplantation de la CA (Player et Keys, 1995).

2. Labsence dun plan formel pour agir sur linformation CALimplantation russie de la CA requiert ncessairement llaboration et la mise en pratique dun plan daction CA. Ce plan daction a pour objectif dintroduire les changements ncessaires dans lentreprise auprs des managers et des diffrents utilisateurs de la CA. Parmi les changements requis, cest lutilisation de linformation CA. Dune autre manire, les diffrents utilisateurs doivent apprendre lire linformation CA, prendre les dcisions ncessaires et les appliquer. Faute de cela, aucun profit ne pourrait tre tir de ce nouveau

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systme.

En effet, lors de la mise en uvre de la CA, la surestimation de linformation comptable obtenue par la mthode est une erreur. Ce qui est plus important, cest lutilit de cette information dans la vie quotidienne de lentreprise (Player et Keys, 1995). Ce manque de bon sens dans limplantation peut conduire des consquences dfavorables, tels que le refus de changement des prix par le service commercial, le refus dagir sur les activits sans valeur ajoute ou encore la ngligence de linformation CA dans la prise de dcision.

Cependant, pour viter ce problme, il est bien recommand de prciser dans un plan daction formel, les questions que le systme de CA doit aborder, les dcisions auxquelles il doit sintresser, les utilisateurs et lorigine des informations CA (Player et Keys, 1995). Lentreprise pourra ainsi viter un grand risque dchec de mise en uvre.

3. Le manque de rapports clairs et prcisLes rapports publis par les services finance/contrle de gestion influencent aussi lutilisation de linformation CA dans la prise de dcision. Certes, un r