Techniques électrochimiques d’analyse
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CHAPITRE 12
Techniques électrochimiques d’analyse
Dans le précédent chapitre, nous avons abordé des techniques de dosage dans lequel l’intensité du courant ne jouait
aucun rôle : il était fixé à 0 (potentiométrie à courant nul). Nous allons à présent considérer des techniques
électroanalytiques (en un mot : de l’analyse avec des électrodes …) dans lesquelles l’intensité du courant joue un
rôle essentiel. Les techniques abordées dans ce chapitre sont toutes des cas particuliers d’électrolyse.
1. Courbes intensité-potentiel
1.1. Cinétique vs. thermodynamique
Dans le cours précédent, nous avons vu que la notion de potentiel standard permet de prévoir la possibilité des
processus redox : autrement dit, quelles réactions sont spontanées ?
Pour autant ce n’est pas parce qu’une réaction est spontanée qu’on va pouvoir l’observer : il faut qu’elle soit
suffisamment rapide pour qu’on puisse constater un changement durant la durée de l’expérience.
EXEMPLE : LES DIAMANTS NE SONT PAS (VRAIMENTS) ETERNELS
Le carbone existe à l’état pur sous plusieurs formes de variétés cristallines. Parmi elles on trouve le graphite et le diamant.
Le diamant présente la particularité de ne pas être stable dans les conditions normales de pression et de température. En effet, il se transforme spontanément en graphite !
Or, heureusement, les diamants ne se transforment pas soudainement en morceaux de charbon ! Cela est dû au fait que la transformation est infiniment lente, tant et si bien que la mutation du diamant en graphite n'est pas visible même à l'échelle de plusieurs millénaires. On parle alors de blocage cinétique.
A RETENIR
La thermodynamique est la science qui permet de prévoir la spontanéité d’un processus, autrement dit sa possibilité.
La cinétique chimique est la science qui s’intéresse à la vitesse des réactions spontanées.
La cinétique d’une réaction électrochimique (à la surface d’une électrode) dépend de plusieurs facteurs :
Nature de l’électrode
Solvant
Electrolyte support
pH
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1.2. Un exemple : la courbe i-E de l’eau
La cinétique des processus électrochimiques est décrite par les courbes intensité-potentiel (i-E). Nous nous
intéresserons ici au cas où les réactions redox se font par l’intermédiaire d’électrodes (cellule en configuration
électrolyseur).
Le potentiel E est imposé par l’électrode via un générateur. Si E est faible, le milieu est réducteur (l’électrode
aura tendance à céder des électrons), si E est élevé le milieu est oxydant (l’électrode aura tendance à
arracher les électrons).
L’intensité traduit la vitesse du processus électrochimique qui se déroule au niveau de l’électrode. En effet,
l’intensité d’un courant électrique est définie par le nombre d’électrons circulant par unité de temps.
Par convention :
o Si I > 0 : il se produit une oxydation. On parle alors de courant anodique.
o Si I < 0 : il se produit une réduction. On parle alors de courant cathodique.
Prenons un cas très simple : plongeons des électrodes de platine dans l’eau. En réalité le montage pour tracer des
courbes i-E est assez complexe, on utilise trois électrodes. Mais pour simplifier faisons comme si on n’utilisait que
deux électrodes (électrode de travail et électrode de référence). On impose le potentiel E de l’électrode de travail
(par rapport à l’électrode de référence) à l’aide d’un générateur et on mesure l’intensité du courant qui en résulte.
DEFINITIONS
L’oxydation et la réduction du solvant ou de l’électrolyte-support constituent deux barrières au-delà desquelles aucune étude n’est possible. La plage de potentiel entre ces deux bornes constitue le domaine d’électroactivité du milieu.
Compte tenu du domaine thermodynamique de stabilité de l’eau, la largeur du domaine d’électroactivité de ce
solvant devrait être égale à 1,23 V quel que soit le pH. Mais en réalité, la plage de potentiel utilisable dépend de la
cinétique du dégagement d’oxygène et d’hydrogène, et par conséquent du matériau de l’électrode ; le domaine
d’électroactivité de l’eau est donc toujours plus large que 1,23 V (environ 1,7 V sur électrode de platine). En jouant
sur les facteurs qui déterminent le domaine d’électroactivité (solvant, électrolyte-support, matériau de l’électrode),
on peut choisir les conditions opératoires adaptées à l’étude d’un couple rédox particulier.
Ce décalage entre le potentiel standard du couple redox et le potentiel effectif pour lequel la réaction a lieu est
appelé surtension.
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1.3. Des systèmes rapides et lents
Courant d’oxydation
En plongeant des électrodes de platine dans une solution de fer (II) il est possible d’imposer une réaction
d’oxydation à partir d’un certain potentiel : Fe2+ = Fe3+ + e- E° (Fe3+/Fe2+) = 0,77 V
La courbe I / E que l’on obtient est la suivante :
L’électrode peut être parcourue par un courant (anodique) important, même pour un potentiel proche du
potentiel d’équilibre du couple Fe3+ / Fe2+. Ceci traduit la rapidité des échanges électroniques du couple sur
l’électrode, d’où le nom de système rapide.
La vitesse des échanges est rapidement limitée par la diffusion des ions vers l’électrode, ce qui se traduit par un
palier. Plus la concentration est importante, plus la diffusion est rapide. Le palier de diffusion est donc
directement proportionnel à la concentration en ions fer (II) dans la solution.
Courant de réduction
Plongeons maintenant des électrodes de platine dans une solution de fer (III). On observe alors une réduction
pour un potentiel identique au potentiel d’équilibre, comme précédemment, avec une intensité notable.
Il s’agit cette fois d’un courant cathodique, associé à une réduction. Comme précédemment, on observe un
palier de diffusion.
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Système rapide
Si la solution contient à la fois des ions Fe2+ et Fe3+, on observe la courbe I/E suivante :
Cette courbe est typique d’un système rapide : elle passe par le potentiel d’équilibre avec une pente
importante, et par conséquent les surtensions sont nulles, tant pour l’oxydation que pour la réduction.
Système lent
Certains couples présentent des surtensions (cathodiques et /ou anodiques) importantes, selon l’électrode
employée (d’où l’importance du choix de l’électrode). C’est par exemple le cas pour l’arsenic :
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2. Titrages à courant ou à tension imposé(e)
2.1. Application des courbes I / E à l’électrolyse
Plusieurs méthodes d’analyse par potentiométrie sont basées sur des réactions d’électrolyse. Rappelons en deux
mots le principe d’un électrolyseur : on utilise un courant électrique pour provoquer un processus redox (conversion
d’énergie électrique en énergie chimique). L’exemple vu dans le cours précédent était basé sur les couples du cuivre
et du zinc :
Maintenant, allons un peu plus loin. Quelle tension U faut-il imposer entre les deux bornes pour obtenir un courant
d’électrolyse I ? Pour cela il faut examiner les courbes I/E des deux couples en présence.
Lors de l’électrolyse, l’intensité du courant anodique vaut exactement l’opposé de celle du courant cathodique en
raison de la conservation de la charge. On a donc :
𝐼𝑎 = −𝐼𝑐 = 𝐼
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Il suffit donc de reporter les valeurs sur le graphique pour obtenir la valeur de la tension U :
2.2. Potentiométrie à courant imposé
La potentiométrie à courant imposé consiste à électrolyser l’analyte à mesure que l’on introduit le titrant. On utilise
en général deux électrodes identiques (le plus souvent en platine) entre lesquelles on mesure la différence de
potentiel.
ATTENTION
Il est important de comprendre qu’ici il n’y a pas d’électrode de référence ! Ce n’est pas la valeur du potentiel qui nous intéresse mais la différence de potentiel entre les deux électrodes.
On se ramène donc au cas précédent avec la complication suivante : les courbes I/E évoluent au cours du dosage, et
donc la valeur de U ! On peut donc repérer l’équivalence grâce à une singularité dans cette évolution, comme nous
le voyons ci-dessous avec le dosage du fer (II) par le cérium (IV). Dans ce cas, l’équivalence est repérée par un
maximum de la différence de potentiel :
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2.3. Méthodes ampérométriques
La démarche est l’inverse de la précédente : on impose une différence de potentiel et on mesure l’intensité du
courant. Le principe est également de repérer une singularité lors du titrage, comme dans cet exemple du dosage du
fer (II) par le cérium (IV) :