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Move with Africa Raconte-moi qui tu es Claire et Odette font des emplettes. Ça rime et ça se passe au marché de Comé juste avant l’arrivée de la pluie. OLIVIER PAPEGNIES/ COLLECTIF HUMA Supplément gratuit de la Libre Belgique du 11 mai 2018

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Move with AfricaRaconte-moi qui tu es

Claire et Odette font des emplettes. Ça rime et ça se passe au marché de Comé juste avant l’arrivée de la pluie.OLIVIER PAPEGNIES/ COLLECTIF HUMA

Supplément gratuit de la Libre Belgique du 11 mai 2018

La 7ème édition de Move With Africa déjà en route...MOVEWITH AFRICALa 7 ème édition

Move with Africa. Supplément gratuit à La Libre Belgique. Coordination rédactionnelle: Constance Frère Réalisation: IPM Press Print. Administrateur délégué - éditeur responsable: François le Hodey. Directeur Général: Denis Pierrard.Rédacteur en chef: Dorian de Meeûs. Rédacteurs en chef adjoints: Xavier Ducarme et Nicolas Ghislain.

MOVEWITH AFRICA 2018

Move With Africa à été initiée par LaLibre Belgique en 2011, désireusede sensibiliser les jeunes à la ci­toyenneté mondiale et à l’intercul­turalité. En lançant ce projet, La Li­bre souhaitait donc avant tout sensi­biliser un maximum de jeunes detous horizons et de toutes origines àla problématique des relationsNord­Sud. En collaboration avec desONG d’expérience et de renom,l’objectif que poursuit la Libre Belgi­que est de faire prendre davantageconscience aux jeunes Belges de leurresponsabilité d’acteurs citoyens dumonde et de leurs capacités à “con­tribuer au développement d’une so­

ciété démocratique, solidaire, plura­liste et ouverte aux autres cultures”,comme le stipule le Décret Mission.

Concrètement, comment cela se passe-t-il ?

Cette action est destinée aux pro­fesseurs et aux élèves du 3e degré del’enseignement secondaire (5e, 6e et7e), quelle que soit la forme d’ensei­gnement et de réseau dont ils sontissus. Elle est soutenue par le minis­tère de l’Enseignement de la Fédéra­tion Wallonie­Bruxelles et de laCoopération au Développement(SPF Affaires étrangères). C’est doncplus de 200 jeunes et leurs profes­seurs qui s’engagent dans un projetqui leur est attribué, selon les préfé­rences émises et qu’ils vont déve­lopper en partenariat avec l’une desONG impliquées. Avant de s’envolerpour un des pays d’Afrique concer­

nés pendant les congés de détenteou de printemps. Les projets que lesorganisations non gouvernementa­les proposent répondent à des critè­res stricts et garantissant la sécuritédes participants. Ils abordent desthématiques centrales du dévelop­pement et placent la rencontre etl’échange interculturels au centredes actions entreprises dans le cadrede Move with Africa.

Une réflexion commune et l’implicationdes élèves

Il est important de considérer l’ac­tion comme un cheminement dontle séjour en Afrique est une étape etnon pas une fin en soi. Le projet en­trepris ponctue une réflexion plusgénérale, menée de concert avec lesONG lors de journées de prépara­tion ainsi qu’avec différents organis­mes d’éducation. Inscrits dans cette

démarche globale, les jeunes sontappelés à animer un blog relatant demanière assidue, originale et dyna­mique, les avancées de leur projet.Photos, témoignages, activités de ré­colte des fonds, vidéos, etc. tous lessupports et les initiatives sont lesbienvenus pour alimenter ce lieu departage virtuel qui permet àd’autres élèves, moins chanceux, desuivre les avancées du projet. La Li­bre Belgique est en effet convaincueque le recours aux technologies del’information constitue un outil sti­mulant la créativité et la prised’autonomie des élèves dans un par­cours d’apprentissage multidiscipli­naire.

Move with Africa c’est avant toutune expérience unique qui favorisela rencontre, le partage et la citoyen­neté mondiale.

Ensemble, bougeonsavec l’Afrique !

Move with Africa 2018-2019Move with Africa est une action destinée aux professeurs et aux élèves

du 3e degré de l'enseignement secondaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Inscrivez-vous à la 7e édition à partir du 2 avril 2018 !Rendez-vous sur notre site web: http://dossiers.lalibre.be/mwa/inscription.php

pour en découvrir plus sur ce beau projet !Move With Africa est un projet de La Libre soutenu par le Ministère de l’Enseignement

Pour plus d'informations

[email protected]

www.forrestgroup.com

NOUS CONTACTER: [email protected] | +32.10.23.96.80

En Afrique, la Fondation George Arthur Forrest développe des initiatives positives en faveur du développement socio-économique et des populations les plus fragiles.

La Fondation soutient depuis plusieurs années l’introduction des techniques de laparoscopie à l’Hôpital Panzi du Docteur Mukwege, une collaboration avec le Professeur Guy-Bernard Cadière et le CHU Saint-Pierre de Bruxelles. À Bukavu, en République Démocratique du Congo, le Docteur Mukwege soigne les femmes victimes de violences sexuelles.

Dans ce même esprit, les Fondations Forrest soutiennent des centres de santé, des dispensaires et des maternités, des écoles et des universités, des orphelinats et des centres d’accueil, des clubs de sport professionnels et amateurs... Les fondations financent également la construction d’infrastructures de base, par exemple d’accès à l’eau potable et à l’électricité, de même que des initiatives de sensibilisation au respect de la faune et de la flore congolaises.

Plus d’informations sur notre site internet

George A. ForrestPrésident

www.forrestgroup.com

Des investissements stables et durables, en particulier en Afrique, exigent des engagements positifs, au-delà de critères économiques et

financiers traditionnels

Une immersion dans le quotidiendes RwandaisTravail, nourriture, enseignement,…les jeunes Belges ont eu l’occasionde vivre comme des locaux.

D es ampoules plein les mains. Il faut direque le travail était dur. Les élèves de l’Ecoleeuropéenne d’Ixelles voulaient une im­

mersion dans le quotidien des Rwandais, et ilsl’ont eue ! Les 16 jeunes ont été invités à voir letravail de Caritas dans un village de la région deNyagatare, au nord est du pays. Active auRwanda depuis 1960, l’ONG ymène notamment des projetspour lutter contre le phénomènede malnutrition, très importantdans ce pays de près de 12 mil­lions d’habitants (voir aussi l’ar­ticle page suivante).

Très motivés, les jeunes – et lesprofesseurs et représentants del’ONG en Belgique – ont participéà la création d’un jardin potageret d’un compost chez des bénéfi­ciaires. Le tout dans les règles del’art. Pour le compost, par exem­ple, chaque couche a son impor­tance. Celle du fumier comme lesautres…. Un travail physique que les élèves ontaccompli avec entrain avec l’aide des villageois.“Un moment une femme m’a pris ma pelle pour memontrer comme être plus efficace. Et effectivement,elle travaillait bien mieux que moi,” raconte unedes élèves qui, comme d’autres jeunes, s’est sen­tie parfois un peu frustrée d’être moins compé­tente que les villageois. Mais l’idée du pro­gramme n’était pas d’apporter notre aide à lapopulation, a rappelé un professeur. Le but du

voyage est de faire comprendre aux jeunes laréalité du quotidien de ces gens et de favoriserles échanges entre nos deux cultures.

La journée de travail s’est poursuivie avecl’égrainage du maïs et le décorticage d’arachi­des. Un travail fatiguant – surtout pour lesdoigts – et très répétitif. Où il a fallu à nouveaus’incliner devant la dextérité des villageois. “Re­gardez ce que cette femme a fait : autant que nous4 dans le même temps.”

Les jeunes qui souhaitaient une immersiondans la vie quotidienne des Rwandais ont étéservis avec une journée passée à l’école SaintAloys à Rwamagana, à l’est de Kigali. Les pré­sentations faites, chacun s’est vu emmené au ré­

fectoire pour partager le repas desquelque 1100 pensionnaires decet établissement. Au menu : rizet haricots rouges. Le quotidiende ces jeunes. Ce fut un momentd’échange privilégié. “On a beau­coup parlé foot…” “Certains m’ontdit que les élèves noirs aiment beau­coup les blancs. Et m’ont demandési l’inverse était vrai. Je leur ai ré­pondu que je ne jugeais pas quel­qu’un à la couleur de sa peau….”

L’immersion s’est poursuiviepar la participation aux cours : ki­nyarwanda pour les uns, biologiepour d’autres, ou encore religion,

géographie, histoire,… Au programme du coursd’histoire de ce jour­là : le génocide. Une ma­tière qu’ils étudient de la 1ère à la 6e humanité.Par petits groupes, les élèves ont été amenés àréfléchir aux causes de cette tragédie. “Il faut enparler en classe. Cela touche tout le monde. Cer­tains ont de la famille en prison”, nous explique leprofesseur.

La question du génocide avait été abordée parles élèves participants au programme avant leur

voyage. Mais entre la théorie – surtout pour cesjeunes qui n’étaient pas nés en 1994 – et la réa­lité marquée notamment par une visite au Mé­morial du Génocide et au Mémorial belge estbien différente. Une visite émouvante pourtous. “Quand le guide nous a raconté comment ilavait dû fuir et se cacher, je me suis rendu compteque cela c’était vraiment passé”, raconte cet élève.“J’ai mis mes lunettes de soleil pour qu’on ne mevoit pas pleurer”, avoue un autre. La salle avec lesphotos de victimes, des crânes et ossements ouencore la partie réservée aux enfants furent lesplus émouvants. Comment ne pas craquer de­vant ces photos d’enfants accompagnées d’unpetit descriptif reprenant l’âge de chacun, cequ’il aimait – “elle adorait les frites”, “il chantaittout le temps,…” – et la manière dont ils ont ététués. “Nous nous sommes rendu compte à quelpoint l’imagination des hommes est importantequand il s’agit de faire souffrir ses semblables”.Une visite clôturée par le dépôt, sur une tombecommune, de roses et d’une gerbe de fleurs por­tant la mention “Genocide never again”. Pourque cela ne se reproduise plus jamais.

Solange Berger

Egréner le maïs, une tâche répétitive et douloureuse pour les pouces….

SOLANG

EBE

RGER

Les mains dans le fumier ? Même pas peur !

SOLANG

EBE

RGER

“Les bénéficiairesde nos

programmesdoivent êtrevolontaires.

Nous ne voulonspas les forcer”

Cyprien RukemanganiziCoordinateur

pour Caritas Rwanda

MOVEWITH AFRICA 2018

Construction d’une maison au Rwandahttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qsp/showtitle/1/viewnc/1

Ecole pour malvoyants et non voyantsà Rwamaganahttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qll/showtitle/1/viewnc/1

Une population correctement nourrie au Rwandahttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qu8/showtitle/1/viewnc/1

Vidéos

ECOLE EUROPÉENNE D’IXELLES AVEC CARITAS INTERNATIONAL

Une éducation à la nutritionLes enfants rwandais souffrentde malnutrition, non aiguëmais chronique. Avec desimpacts sur le long terme.

Des associations luttent contrece phénomène.

Maman de 3 enfants dont un petit demoins de 5 ans, Niyitegata vient aucentre de santé tous les mois. Si cettemère de famille consommait déjà deslégumes avant, elle ne savait pas vrai­ment quels étaient les meilleurs ali­ments pour ses enfants. Ni commentles préparer. “Les légumes, j’en faispousser moi­même. Les enfants aimentbeaucoup. Ils grandissent bien”, nousrassure­t­elle. “De la viande nous enmangeons deux fois par mois.” Plus de300 enfants de moins de 5 ans sontsuivis dans ce centre du nord duRwanda. Ils y viennent notammentpour être pesés, un examen auquelles élèves de l’Ecole européenned’Ixelles ont pu participer. Les ma­

mans y reçoivent également des for­mations, des conseils.

Le problème de la malnutrition nese voit pas vraiment au Rwanda. Lepays est vert, les avocats, mangues etbananes poussent partout, leschamps sont cultivés et les enfantsont l’air bien nourris. “Dans certainesrégions cependant, les gens ne mangentpas toujours à leur faim. Le nombre derepas et la qualité de ceux­ci ne sont passuffisants à certaines périodes. En avrilet en octobre notamment, juste avantles récoltes quand les stocks sont vides”,note Cyprien Rukemanganizi, coor­dinateur des projets de Caritas dansla région de Nyagatare. Mais le plussouvent il ne s’agit pas de problèmede malnutrition aiguë. Plutôt de mal­nutrition chronique, dont les effetsse voient à plus long terme. Cettemalnutrition s’installe avec des ré­percussions importantes, notam­ment sur le développement du cer­veau des enfants.

“C’est l’alimentation elle­même quiest en cause. Pas assez de légumes no­tamment. Les gens n’ont pas pris l’habi­tude d’en manger. Ils considéraient quec’était pour les plus pauvres qu’eux enpériode de disette… Concernant les plus

jeunes enfants, on note que les mèrespassent trop vite d’une alimentation ausein à une alimentation pour adulte. Ilspréparent le même repas pour tous, orchacun a des besoins spécifiques selonson âge”, poursuit Cyprien Ruke­manganizi. La base de l’alimentationc’est la pâte de maïs et le riz avec desharicots rouges. “Ils mangent du ma­nioc. C’est un tubercule source d’éner­gie mais pas de nutriment ou de vita­mine. Ils ont l’impression de bien man­ger car ils ont le ventre plein. La viandeest rarement au menu. Le poisson en­core moins.”

Pour lutter contre ce phénomène,l’un des grands principes est l’éduca­tion. Apprendre aux Rwandais à cul­tiver leurs propres légumes et à lescuisiner. “Il faut bien utiliser la nourri­ture. Si l’on consomme mal, tous les ef­forts faits sur la partie agriculture peu­vent être réduits à néant”, souligneCyprien Rukemanganizi. “L’idée estaussi de développer de nouvelles sour­ces de revenus pour prendre en chargeles dépenses du ménage. Il s’agira parexemple de transformer les aliments, enfaisant des jus, des beignets,… pour lesvendre à un meilleur prix.”

Choux, carottes, amarantes – un lé­

gume qui ressemble à nos épinards –,papayes,… font la fierté du jardin deClaudine, bénéficiaire de l’Aproju­map, le partenaire local d’Entraide etFraternité. Pour cultiver ces légumes,qui bénéficient aussi aux voisins, ellea suivi une formation auprès del’ONG qui peut fournir également lessemences, le matériel, un crédit,…Cette formation lui a permis égale­ment de lancer avec d’auters unecoopérative, qui cultive du maïs dansla région de Huye au sud du pays. “Audépart, Claudine n’avait rien. Mainte­nant, elle se débrouille toute seule”, ex­plique Eugène Niyigena, responsablelocal d’Aprojumap, qui évoque aussile principe crédits rotatifs. Un exem­ple avec la “vache qui marche ou quivoyage”. Le principe : les villageois seprêtent la vache. Elle est insiminéeartificiellement et quand elle a unveau celui qui a la vache à ce mo­ment­là garde le veau et passe la va­che à quelqu’un d’autre. Parmi lesautres crédits : les lapins. “C’est unpeu leur porte­monnaie”, expliqueEugène Niyigena. “Les lapins se repro­duisent facilement. Quand les villageoisont besoin d’argent, ils en vendent un.”

Solange Berger

Les élèves de l’Ecole européenne d’Ixelles ont eu l’occasion de donner à manger aux plus petits. Avec plus ou moins de succès.

SOLANG

EBE

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Tousles mêmes...Rencontre Pendant douzejours, Belges et Togolais ontappris une notion essentielle:le vivre-ensemble.

I l y a des moments dans la viequi marquent à jamais et nuldoute que les jeunes élèves du

Collège Don Bosco de Woluwe­Saint­Lambert n’oublieront pas desitôt leur arrivée et l’accueil ré­servé par les habitants d’Alowo­nou. Entre musiques, danses tradi­tionnelles et larges sourires. “Celam’a marqué. C’était très touchant. Ilsnous ont tous souhaité la bienvenue.A Bruxelles, c’est moins ça”, témoi­gne Chayut Romjabok, 16 ans en3e transition informatique, assissur une marche à la fin d’une jour­née ensoleillée.

“Ca fait réfléchir”Pendant une semaine, les Bruxel­

lois ont participé à la vie de ce villagesitué dans la région des plateaux duTogo. L’occasion de s’immerger dansla culture rurale africaine et d’êtreconfrontés aux facettes positives

comme aux difficultés auxquellesfont face les locaux. Un moment pourprendre aussi du recul sur leur vie enBelgique. “Je me plains pour un rien. Jeprends des douches de vingt minutesalors qu’ici je me lave avec un seau et jeme sens propre. Ca fait réfléchir”, as­sure Antoine Veri, 18 ans après quel­ques jours dans le village.

Faire comprendre la réalité des re­lations Nord­Sud et notamment lesraisons de ces inégalités, c’est l’undes objectifs de l’asbl belge Asmae.“Le but, c’est qu’ils se demandent com­ment en tant que jeune, ils peuvents’engager, qu’est­ce qu‘ils peuvent fairepour créer un monde plus juste, plussolidaire”, argumente Jean­ThomasParidaens, formateur en éducation àla citoyenneté mondiale et solidaireau sein d’Asmae. Et ça a semble­t­ilmarché chez Guillaume Pierson, 17ans, très à l’aise durant le séjour.“C’est sûr et certain, je vais refairequelque chose dans ce genre, m’impli­quer dans le milieu associatif. C’étaitdéjà mon objectif, mais là ça me donneencore plus envie d’aider les milieuxdéfavorisés à Bruxelles ou ailleurs.”

Casser les clichésAsmae a aussi la volonté casser les

clichés des Belges sur la vie en Afri­

que. L’inverse est vrai. Durant tout leséjour, les Bruxellois ont été accom­pagnés par l’asbl togolaise Alafia jeu­nes qui encourage ces derniers àmonter des projets. Un bon moyenpour les ados des deux pays de serencontrer et de se rendre comptequ’au­delà de leur origine, de leurcouleur de peau ou de leur niveau devie, ils étaient quelque part un peutous les mêmes. “Ils sont eux aussi con­nectés sur les réseaux sociaux, ils vontboire un verre, ils sont cools, ils écoutentles mêmes tubes. Stromae, je savais qu’ilavait une renommée mondiale mais jene pensais pas que les Togolais le con­naissait”, explique Antoine.

“Se découvrir”Après ces douze jours loin de chez

eux, Rémi, Gilles, Magalie, Anas,Thomas, Mickael, Brian, Lancelot et

tous les autres repartent avec uneexpérience atypique et des souve­nirs gravés à vie. Impossible poureux d’oublier les battles de danseendiablés de leurs potes Agbessi etJean­Paul, les sourires d’Emile etd’Alphonse, la voix de Maureenmaîtresse du jeu des “Loups­garous”et des bouteilles d’eau, le but magi­que de la tête de Moctar, la détermi­nation de “Madame”, d’Elsa, de Ra­chel et d’Anissa ou encore la bonnehumeur du seul et unique : “CherryCoco”. Un voyage que résume par­faitement Jessica Flohimont, leurprofesseure. “Ils ont appris à se dé­couvrir eux, sous un nouveau jour, àvoir d’autres choses, se confronter àd’autres cultures. La plus belle école,c’est la vie et on ne peut pas leur ap­porter ça en classe.”

Jacques Besnard

JEAN

-MAR

CBR

ASSEUR

MOVEWITH AFRICA 2018

INSTITUT DON BOSCOWOLUWE-SAINT-PIERRE AVEC ASMAE

Quand Don Bosco fait le “show” au TogoTogo L’école de Woluwe-Saint-Lambertétait invitée de la matinale de la TVT.

Avant de monter dans les minibus pour prendre ladirection de la Télévision Togolaise (TVT), en pleincœur du quartier administratif de Lomé, les élèvesde Don Bosco sont plutôt calmes. Normal, il est4 heures 45. Sur le plateau, Lady Aysha Jemima,l’animatrice star du Six­8, “L’émission qui endom­mage votre ignorance”, trouve lesmots adaptéspour les motiver. Les20 minutes de gym matinale dis­pensées par un Américain body­buildé font le reste. À 6 heures 30,après la pub, Chayut entame un“Triplé” enbiablé en direct à la télé:le cri de guerre du voyage appris auvillage. “Je savais que le réveil allaitse faire tout doucement et là ça com­mence à aller mieux”, ne peutqu’admettre l’animatrice.

La bière belge sauve les profsSur le plateau, deux chroni­

queurs font leur entrée. Sir Johnson et Lady Judith.Le premier dispense un premier bulletin d’infor­mation consacré au secteur agricole, à la surexploi­tation des ressources et aux migrations. La secondepropose un jeu autour des pléonasmes. “Doit­ondire un ciel constellé d’étoiles ou un ciel constellé ?”.C’est un professeur qui tire son épingle du jeugrâce à une spécialité belge : la bière. “Je me souviensque Stella qui est une bière en Belgique, ça veut dire

étoile en latin. Je pense que constellé contient déjà lemot étoile”, affirme Jean­Marc… Brasseur. Cela nes’invente pas.

Violences conjugualesUne autre chroniqueuse, Lady Gaga, commence

son intervention en tapant du poing sur la table àpropos d’un débat tenu durant l’émission de laveille. Elle conseille ainsi aux femmes de ne pasécouter leurs ami(e) s. qui leur conseillent parfoisde quitter le foyer. Elsa qui travaille pour l’ONGAlafia est très concernée par le sujet et tient d’em­

blée à exprimer son désaccord.“Quand il s’agit des violences faitesaux femmes, c’est quasiment une obli­gation de quitter ce foyer”, tient­elle àrappeler avant d’embrayer. “Dieu adit d’aimer sa femme donc quand tuaimes quelqu’un, tout ce qui lui faitmal, tu ne lui fais pas.”

“Trop la pression ”Le jeu de Lady Gaga “Guess my

age” qui consiste à deviner l’âged’un jeune homme présent sur leplateau, tombe à pic pour détendreun peu l’atmosphère et surtout per­

mettre aux jeunes Belges et Togolais de passer pourla première fois de leur vie à la télé. Impression­nant. C’est le cas notamment pour Yassine qui neconnaît plus son propre âge (“J’ai 18, euh non 17ans”) ou de Moctar un peu tendu qui fait rire l’ani­matrice en donnant son âge au lieu de deviner ce­lui de l’invité. “J’avais trop la pression avec les camé­ras”, avouera­t­il mort de rire en aparté. D’ordi­naire très calme, Bruno au contraire se sent

pousser des ailes, chaudement acclamé il est vraipar tous ses collègues.

“Merci pour tout ça”Après un résumé du match Juventus­Real Ma­

drid et la retournée incroyable de Cristiano Ro­naldo, suivi d’un reportage quasiment sans transi­tion de France 2 sur la mort d’Hitler, il est tempspour Prisca, étudiante togolaise et Guillaume,élève de Don Bosco, de présenter Asmae et Alafiajeunes. Un super coup de projecteur sur les activi­tés de l’ONG locale qui reçoit déjà des appels avantla fin du show. Un bon moyen aussi pour le Bruxel­lois de remercier l’ensemble des Togolais pour leuraccueil. “Vous êtes ouverts, vous êtes chaleureux etvous savez vraiment accueillir les étrangers. Mercipour tout ça.” What else ?

Jacques Besnard

Les profs et élèves de Don Bosco ainsi que les jeunes d’Alafia ont pu témoigner de leur rencontre interculturelle à la télé togolaise.

JEAN

-MAR

CBR

ASSEUR

“Vous êtes ouverts,vous êtes

chaleureux et voussavez vraiment

accueillirles étrangers.”

Guillaume remercie toutle Togo au nom de tousles élèves de Don Bosco

https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5msl/showtitle/1/viewnc/1

https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5msm/showtitle/1/viewnc/1

https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5m5k/showtitle/1/viewnc/1

https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5mlu/showtitle/1/viewnc/1

https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5mlv/showtitle/1/viewnc/1

Vidéos

48h chrono avecune Famille en or

I ls se sont enlacés comme de vieux amis qui se re­trouvent. Ce 29 mars, ce n’était pourtant que lapremière fois qu’ils se découvraient en chair en

os. Après six mois d’échanges virtuels, les quatorzeélèves de 5e humanité de l’Institut Saint­Famille deSchaerbeek rencontraient enfin leurs correspon­dants à Natitingou, petite bourgade située au norddu Bénin.

Professeurs et membres de l’ONG en sont restéspantois et émus, comme dépassés par cette osmosenaissant sous leurs yeux.

Malgré la grève qui frappait les écoles béninoisesdepuis le mois de novembre dernier, les élèves del’établissement s’étaient investis pour réserver unchaleureux accueil à leurs hôtes. Des messagesd’amour distillés à la craie sur les murs de la classe,

des discours empreints de remerciements et mêmequelques victuailles arrosées d’un breuvage local.Une fois passée cette séquence “émotion”, les kets del’ISF ont lancé leur première mission du séjour :concocter un menu à la belge, à savoir un stoempaux carottes suivi de crêpes agrémentées de pâte auspéculoos ou de sirop de Liège. Les hôtes se révélè­rent conquis par le projet de nos jeunes ”Top Chefs”en herbe. “Ils ont trop kiffé”, souriait Imane dans lebus les ramenant à l’auberge.

Immersion de la tête...Au lendemain de ces moments de fraternité, les

trois membres de l’ONG Îles de Paix encadrant lesadolescents bruxellois et les quatre professeurs, ontinitié les jeunes aux principes fondateurs de la philo­sophie de l’organisme : self­help, essaimage ou encorerésilience. Avant de leur faire découvrir concrète­ment ces concepts sur des zones agricoles où les mé­thodes et techniques d’IDP sont développées. Direc­tion le village de Matéri et plongée dans le maraî­chage. Sur place, un conseiller locale guidait la troupeet vantait l’apport de l’ONG et son programme.

“Notre objectif, c’est de donner aux populations lesplus vulnérables les outils pour qu’elles puissent à accé­

der à une sécurité alimentaire”, soulignait MagaliVerstraeten, responsable chez IDP. C’est par la di­versification des cultures, la mise en place de pépi­nières, l’utilisation de composte (liquide et solide)ou d’une pompe à eau notamment que les paysanslocaux sont parvenus à favoriser le rendement decette parcelle.

... aux pieds !Pour certains élèves schaerbeekois, ce voyage s’as­

similait à un véritable baptême en dehors de l’Eu­rope qu’ils n’avaient jamais quittée jusqu’alors. Misà part le choc thermique à digérer, il leur a fallu s’ac­climater également à des mœurs inconnues. D’oùquelques malaises par moments. “Lors de cette visite,j’avais l’impression qu’une délégation de blancs venaitsuperviser ce qu’ils avaient mis en place avec l’argentqu’on a récolté, ça m’a laissé un goût amer et désagréa­ble”, se confiait l’un d’eux. Un instant de doute rapi­dement balayé par les explications posées de la res­ponsable d’IDP et rapidement oublié au momentd’arriver dans un village de femmes cultivatrices deriz.

Rassemblées sous un vieil arbre, une vingtaine dedames accueille l’approche des minibus au rythme

Les élèves schaerbeekois ont reçu un accueil émouvant de la part de leurs correspondants béninois.

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Plongée dans le quotidien d’un village où sont regroupées des femmes cultivatrices de riz paddy.

MOVEWITH AFRICA 2018

Le voyage a débuté par des rencontresfortes en émotions pour les élèves del’Institut Sainte-Famille de Schaerbeek auBénin. Récit.

INSTITUT DE LA SAINTE-FAMILLE AVEC ILES DE PAIX

Plongée dans le quotidien d’un village où sont regroupées des femmes cultivatrices de riz paddy.

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Sur la route des esclavesEntre la fin du 15e siècle et la fin de l’esclavage au Brésil en 1888, plus d’un millionde personnes ont subi la traite négrière directement à partir du port d’Ouidah, l’undes centaines de lieux de départ forcé vers l’Amérique.

A Ouidah, le tourisme mémoriel se développedoucement au fil des années. “Tout est réglementépar l’Etat désormais”, expliquait Nadal, notreguide ce jour­là. “Cette initiative était nécessaireafin de procéder aux visites dans le respect etd’offrir un éclairage correct et vérifié”. Il est ainsipossible de parcourir les quatre derniers kilomè­tres de l’une de ces terrifiantes routes emprun­tées par les esclaves jusqu’aux bateaux qui lesemmenaient au­delà de l’Océan Atlantique. Plu­sieurs étapes marquent ce trajet où une partie dela dizaine de millions d’Africains déportés surl’ensemble du continent ont transité.

Les six étapes de la route des esclaves d’Ouidah1) La Place Chacha également connue sous le

nom de la place de la « Vente aux enchères » où

les esclaves étaient notamment testés, marquésau fer et ensuite vendus.

2) L’arbre de l’oubli que les esclaves devaientcontourner plusieurs fois afin d’oublier leur viepassée.

3) La case Zomaï où 600 esclaves étaient enfer­més parfois jusqu’à six mois dans des conditionsinfernales.

4) Le mémorial où se situait à l’époque unefosse dans laquelle étaient jetés les esclaves con­sidérés comme trop faibles.

5) L’arbre du retour qui symbolise le retourspirituel des esclaves exportés.

6) La Porte du Non­Retour où les esclaves em­barquaient à bord des bateaux les convoyant jus­qu’en Amérique.

Pierre Vangrootloon

Les élèves face à la “Porte de Non Retour”, ultime étape de la route des esclaves d’Ouidah.

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L’action d’Îles de Paix au Bénin50 villages soutenus

2000 familles bénéficiaires

30 membres de l’ONG actifs au Bénin

En chiffres

L’aventure continue pour l’ISFLe 6 mai dernier, c’était le vernissage d’uneexposition retraçant l’aventure de ces 14 élèves et 4professeurs de deux semaines de Cotonou à Ouidahen passant par Natitingou. Elèves et professeurs ontmis sur pieds une rétrospective émaillée de panneauxdidactiques explicitant les missions d’Îles de Paix auBénin. Après deux années de partenariat avec MoveWith Africa, l’Institut Sainte-Famille de Schaerbeekentend perpétuer ce projet d’ECMS (Éducation à laCitoyenneté Mondiale et Solidaire) en Afrique ens’appuyant sur de nouveaux financements.

d’un chant a cappella secondé de quelques fameuxpas de danse. D’ailleurs, les élèves se déhanchent ra­pidement avant que l’un d’entre­eux ne se retrou­vent carrément au centre du cercle, sous les applau­dissements. Après cette réception agitée, ces fem­mes se sont livrées sur leur quotidien, entre récoltede riz paddy (Ndlr ; il s’agit de riz non transforméqui conserve son enveloppe), vannage et tamisageet ont emmené leurs invités au cœur de leur foyer.Etonnés par les conditions de vie de ces femmes, lesados auront surtout été marqués par ces sourires,cette amabilité et ce respect inconditionnel.

Deux premiers jours intenses d’un voyage boule­versant les menant jusqu’à Ouidah…

Pierre Vangrootloon

L’autre regardÂgée de 17 ans,Lyne Girimana a été profondémentsecouée par la route des esclavesd’Ouidah. Elle livre son ressenti surce moment déchirant et singulier dece périple avec Move With Africa.

Du rire aux larmesAprès nos formidables aventures aunord du Bénin, principalement àNatitingou, notre périple s’estponctué par un passage à Ouidah,une ville reconnue pour son lourdpassé. Nous avons parcouru unepartie du chemin qu’empruntaient lesesclaves africains il y a plusieurssiècles.Ce fut une visite très marquante. Ilsuffisait d’observer chacun de nosvisages, aussi bien les professeurs

que les élèves, pour se rendre compteà quel point cela nous touchait.A la fin de ce trajet, un immensemonument nommé « Porte Du NonRetour » nous a fait face. Tout estdans son nom. Quand on l’a franchi,une plage splendide, fracassée pard’énormes vagues, s’est dessinéesous nos yeux. Et l’on s’y estaventuré.S’en sont suivis des cris de joie, desrires, bref, un torrent d’euphorie.C’était assez déroutant de constater àquel point la joie avait pu nousgagner en sachant que sur ce mêmelieu, il y a tant d’années, descentaines de personnes se donnaientla mort pour ne pas rejoindre lecontinent américain.Ce moment restera comme l’un desplus inoubliables, et certainementcomme le plus poignant de monvoyage au Bénin.

La lumièreau bout des doigtsEn passant une semaine dans une écolepour malvoyants, les élèves de laProvidence ont découvert une autreréalité du Rwanda. Beaucoup de courage,de la volonté et de l’espoir.

C’ est incroyable. Les gens sourient tout le tempsdans ce pays. Quand on connaît les conditionsdans lesquelles ils vivent et le traumatisme du

génocide, c’est incroyable.” Cette joie de vivre queles jeunes Belges de l’Institut de la Providence ontconstatée est encore plus frappante au sein del’école pour malvoyants de Rwamagana, à l’est deKigali, où ils ont passé une semaine avec l’ONG Lu­mière du Monde. “Ils sont vraiment touchants car ilsvivent des choses pas faciles”, nous confie un desélèves. “Quand l’un deux nous a remerciés pour notreamour, cela m’a tellement émue”, ajoute une autre.

Dans cette école qui accueille 170 élèves, mal­voyants et non­voyants, les jeunes belges ont pupartager leur quotidien et nouer des contacts pri­vilégiés. Et également découvrir leur volonté d’ap­prendre. Les matières enseignées sont les matièrestraditionnelles – les élèves réussissent bien auxexamens nationaux, nous assure­t­on – dans deuxoptions : la littérature et les sciences humaines(histoire et géographie), avec les cours en anglaisdès le milieu des primaires.

“Je veux être journaliste plus tard”, déclare ce jeuneRwandais quand on lui demande les études qu’il aenvie de faire. “De nombreux élèves sont tentés par lejournalisme ou l’éducation”, explique Placide Kabe­ruka Uwiriyimana, préfet des études. “Les maths etles sciences sont beaucoup plus difficiles à enseigner

pour les non­voyants. Il faut dessiner, or nous n’avonspas de machine spécifique pour cela. Ils ne peuventpas étudier certains chapitres, comme les vecteurs parexemple”, poursuit le préfet qui souligne l’entraideentre les élèves. “Les malvoyants peuvent aider lesnon­voyants à comprendre certains concepts. Depuistrois ans, nous avons aussi décidé de faire des classesinclusives. C’est­à­dire que nous accueillons des en­fants voyants mais avec un handicap physique.Comme les autres, ils peuvent aussi apprendre lebraille.”

L’apprentissage du braille a lieu dès le plus jeuneâge. Les malvoyants bénéficient de lettres grandformat. Durant toute leur scolarité si leur vue leleur permet. Pour les plus petits non­voyants, l’ini­tiation au braille se fait sur des tablettes avec desclous. Chez les plus grands, c’est sur une machineque se poursuit la lecture braille. Une machine a àlaquelle ont été initiés les élèves belges. Avec beau­coup d’application d’ailleurs, ils ont passé en revueles différentes lettres de l’alphabet avant de pou­voir chacun écrire son prénom et des petits messa­ges de son choix. : “Je vous aime papa et maman” “Jet’aime”, “Merci pour le cours de braille…”. Tous ontdécouvert avec plaisir les subtilités mis aussi lesdifficultés de cette écriture nouvelle pour eux…

Au programme des échanges avec l’école éga­lement : un atelier de peinture. Une activitéproposée à la demande du directeur le Père Ju­les Maurice. Une première pour la majorité desélèves, seuls certains ayant déjà fait un peu depeinture ou de dessin chez eux. Une activitépour le moins étonnante quand on connaît lehandicap de ces enfants.

Parmi les malvoyants, certains se sont révélésparticulièrement doués. Pour les non­voyants,la découverte s’est révélée plus difficile. En ef­fet comment faire dessiner à un enfant quelquechose qu’il ne voit pas et qu’il n’a peut­êtremême jamais vu ? Certains jeunes belges ontdécidé de les guider dans leurs dessins en trem­pant leur doigt dans la peinture et en les gui­dant pour effectuer le dessin. Avec Egide, non­voyant de naissance, ils ont opté pour uneautre technique : le laisser dessiner ce qu’ilconnaît et qu’il a envie de représenter – commeune croix, la porte de la classe ou encore larampe qui les guide le long des allées dans lejardin de l’établissement – ou lui faire sentiravec les doigts des objets du quotidien et qu’iltente de reproduire. Une belle découverte.

Solange Berger

Le braille est appris dès le plus jeune âge.

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“L’entraide estimportante entreles malvoyants etles non­voyants”Placide KaberukaUwiriyimana

préfet des études de Gatagara

Atelier peinture : une première pour ces enfants malvoyants ou aveugles.

SOLANG

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MOVEWITH AFRICA 2018

INSTITUT DE LA PROVIDENCE AVEC LUMIÈRE POUR LE MONDE

Une brique après l’autreLa construction de maisons enadobe n’a – presque – plus desecret pour les élèves deSaint-Quirin.

D es chants, des danses. Les villa­geois rwandais ne semblent ja­mais fatigués. Même en plein

travail – sans doute pour s’encoura­ger – ils entament des chants tradi­tionnels, parfois même composéspar la communauté locale. Sur cechantier de construction d’unemaison en adobe dans la région deHuye (ancien Butare) au sud dupays, les élèves de l’Institut Saint­Quirin de Huy n’ont pas manqué derépondant. En entonnant : “LesChamps Elysées”, “Frère Jacques” etmême “Saint­Nicolas, patron des éco­liers”, et “Douce nuit, sainte nuit” !Leur répertoire était large !

Et après avoir travaillé toute lamatinée, même en plein soleil, lesvillageois trouvent encore l’énergie.Toujours pour chanter, danser. Ac­

compagnés par les jeunes Belges lesplus courageux… Et pour discouriraussi. Le discours est en effet unmoment important pour la vie de lacommunauté. “C’est un événementinoubliable pour nous ce qui s’estpassé aujourd’hui sur cette colline”, adéclaré le chef du village en évo­quant la participation des jeunes auchantier de l’Aprojumap, le parte­naire local de l’ONG Entraide et Fra­ternité. “Grâce à vous, je ne suis plusseul”, a remercié l’un des bénéficiai­res. “Avant les gens cuisinaient et dor­maient dans l’étable. Ce qui étaitmauvais à cause du charbon. Nous es­sayons qu’ils aient une maison etl’étable à côté”, explique EugèneNiyigena, responsable de l’Aproju­map. Présentations, remercie­ments,… les professeurs de Saint­Qurin et les responsables belgesd’Entraide et Fraternité n’ont pasdérogé à la tradition en insistant surle courage des Rwandais, leur ac­cueil et leur admiration pourl’image d’entraide qu’ils offraient.

En effet, dans ce pays, le travail encommunauté est essentiel. Toutes

les personnes bénéficiaires aidentau projet. “Certaines personnesétaient isolées. L’idée est de regrouperces personnes pour leur permettred’être plus forts de retrouver de la di­gnité”, note Eugène Niyigena. “L’ac­tion a un impact autant matériel quepsychologique.”

L’Aprojumap choisir ses bénéfi­ciaires parmi les plus pauvres. “Cer­tains nous disent : “ne me prenez pas.Choisissez plutôt celui­là : il est encoreplus pauvre que moi””, raconte le res­ponsable de l’ONG. Celle­ci donneaussi des formations, fournit lespremières semences et du bétailpour aller vers plus d’autonomie. “Al’époque, je n’avais pas de vache, ni dechèvre ou de lapin”, raconteClaudine, l’une des bénéficiaires,dont les élèves ont pu visiter la mai­son. “Aujourd’hui, je suis peine d’es­poir pour ma famille”, précise cellequi est présidente de la coopérativelocale, propriétaire de terres où ellecultive du maïs et qui regroupe 21familles.

“Cette solidarité, je ne pense pasqu’on verrait cela chez nous”, cons­

tate cet élève, content de participerà ce chantier, “preuve qu’il y a moyende construire sans polluer.” Les jeu­nes ont aussi pu se rendre comptedu travail physique que représen­taient ces chantiers. “Quand noussommes allés chercher du bois pour leslinteaux, nous étions trois pour porterun tronc alors que le villageois étaitseul”, note un autre élève.

Encore très motivés pour unenouvelle activité, les élèves de Saint­Quirin ont aussi demandé à tra­vailler dans les rizières. “Le riz estune culture assez récente au Rwanda.Il a été apporté par les Chinois quisont nombreux sur les chantiers deconstruction, de routes notamment”,raconte Eugène Niyigena.“Aujourd’hui ce ne sont plus les Chi­nois qui cultivent le riz mais lesRwandais. C’est d’ailleurs l’un desproduits à la base de notre alimenta­tion.”

C’est ainsi pliés en deux que lesjeunes se sont attelés à cette nou­velle tâche, de la boue jusqu’aux ge­noux. Toujours en se motivant avecdes chants.

Solange Berger

Pour la construction d’une maison, tout le village est solidaire.

SOLANG

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LE COLLÈGE SAINT-QUIRIN HUY AVEC ENTRAIDE ET FRATERNITÉ

Dansersous le manguierSénégal A Ndoumboudj, les élèves deJean Absil ont aidé à construire une fermepédagogique. Une rencontre intense.

Reportage Laurence Bertels

envoyée spéciale au Sénégal

E ntre les coups de truelle, l’arrosage des plan­tations, la baignade dans la mangrove, la dé­couverte, en pirogue, de l’île aux oiseaux, les

danses sous le manguier, les amours naissantes oules adieux déchirants, quel souvenir choisir ?

La tête pleine d’images, le cœur lourd, l’envie,cependant, de rentrer au bercail et de retrouverun minimum de confort après quinze jours passésdans la communauté rurale de Toubacouta, au Sé­négal, les jeunes élèves de l’Athénée royal JeanAbsil d’Etterbeek, arpentent, sous les bougainvil­lées, les rues de l’île de Gorée avec ses façades jau­nes, ocres ou rose pâle et ses galeries d’arts enplein air. Avec une pensée aussi pour les esclavesdont ils viennent de visiter la maison, une autrepour leur jumeau sénégalais, laissé là­bas, au vil­lage perdu de Ndoumboudj, dans la région de Fa­tick.

Ce soir, ils reprendront l’avion pour Bruxelles etécriront la dernière page de l’incroyable aventure

qu’ils viennent de vivre, de partager surtout, puis­que le partage est l’un des maîtres mots de l’asso­ciation belge Asmaé qui travaille avec un corres­pondant sur place, l’AJE (Action jeunesse, envi­ronnement).

Sur le chantierChaque matin, les jeunes travaillaient donc au

chantier sous des températures avoisinant les 35degrés en vue de construire une ferme pédagogi­que en plusieurs étapes. La ferme, une pièce deonze mètres sur huit, existe déjà, ainsi que le po­tager biologique et le puits. Les jeunes réunis s’at­taquaient, pour leur part, à la construction d’undes deux dortoirs prévus . Une tel projet, avec seslégumes, son élevage de poulets, sa permacultureet sa vocation pédagogique devrait changer la viedu village, lui donner plus d’autonomie, lui per­mettre de rayonner aux alentours et encourager lanouvelle génération à rester au pays.

PartageLe but du voyage n’était cependant pas de prêter

main forte au chantier mais de rencontrer l’autrecommunauté, de vivre vingt­quatre heures survingt­quatre ensemble au point de partager lacouche puisque chaque élève belge dormait sousla même moustiquaire que son binôme sénéga­lais. D’où l’intensité des liens qui se sont créés.

Bien sûr, il y eut des coups de mou. Comme lors­qu’il fallut attendre qu’il soit vingt­trois heures

pour se rendre à un mariage du peuple sérèremais l’expérience, une réelle immersion dans laculture du pays, valait l’attente.

L’invitation improvisée se devant d’être honoréeen tenue de circonstance, les jeunes filles sénéga­laises, qui avaient plus d’une tenue dans leur sac,habillèrent leur nouvelle amie de pied en cap, endeux temps trois mouvements. Idem du côté desgarçons. Au Sénégal non plus, la sape n’est pas unvain mot.

Explosion de joieInoubliables également, les débats sous le man­

guier où des sujets aussi délicats que la polygamie,l’homosexualité, les transgenres ou les menstrua­tions furent abordés. Ou pas…

Ces moments d’échange se révélèrent d’unegrande richesse, une réelle ouverture vers la cul­ture de l’autre où l’on ne cherchait pas à imposerson point de vue mais à apprivoiser la diversité.

On n’oubliera pas non plus l’explosion de joielorsque Arfan, le géant, remporta le combat delutte auquel il participa contre toute attente. Niles chants entonnés du matin au soir, dans le car,en pirogue, autour du feu pendant qu’impertur­bables, d’aucuns s’essayaient à la belote… Ni sur­tout les millions d’étoiles qui brillèrent duranttout le séjour, dans les cieux comme dans les yeuxde cette jeunesse pleine de promesses.

UVoir aussi nos vidéos sur le site

Le voyage de Dakar à l’école de Ndoumboudj en transport en commun, déjà toute une aventure.

L.B

“Le Sénégal a changé ma visionde notre société. Ce qui m’a

frappé, c’est la bonne humeur,la facilité d’échanges qu’on ne

connaît pas en Belgique.”Hugo Schaelbroeck,

élève de l’Athénée royal Jean Absil, à Etterbeek.

MOVEWITH AFRICA 2018

L’ATHÉNÉE ROYAL JEAN ABSIL AVEC ASMAE

Interview de Anna Jacobs:Elève de l’Athénée Royal Jean Absilhttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qsp/showtitle/1/viewnc/1

Interview de Julian Vanderbeeck:Elève de l’Athénée Royal Jean Absilhttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qll/showtitle/1/viewnc/1

Interview de Aïssatou Diayté: correspondantesénégalaise du projet d’Asmaehttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qu8/showtitle/1/viewnc/1

Vidéos

Rien de tel qu’une baignade dans la mangrove pour se détendre et resserrer le liens.

L.B

Momo, le DJ de la radio communautairede SoucoutaVéritable vedette du canton, le jeunehomme ne vit que pour l’antenne. Dans larégion de Kaolack, tout le monde l’écoute.

Momo, ou plutôt DJ Momo, tout le canton le con­naît. Journaliste, reporter, animateur, techniciende la radio communautaire de Soucouta, c’est lavedette de la région. Sur tous les fronts, plombier,volontaire, DJ, footballeur, basketteur, il avait par­ticipé en 2017 au chantier d’Asmaé et de l’AJE. Ilaurait aimé être du projet de Ndoumboudj cetteannée mais il y avait trop de bénévoles déjà. Alors,pour le revoir, il faut piquer une pointe dans sonfief, la radio communautaire de Soucouta. Norma­lement, les émissions reprennent à 18 heures maispour l’instant, et bien que le ventilateur tournetoute la journée, il fait tellement chaud qu’il fautattendre 19 heures pour que l’antenne soit opéra­tionnelle. Rendez­vous donc en fin d’après­midi,au fond de la cour de sable, de coquillages et de pa­létuviers pour rejoindre l’imposante bâtisse.

Momo se fait attendre. Souleimane tient la bouti­que. Également journaliste, reporter, animateur, il

attend le maire de Toubakouta et ses acolytes pourl’enregistrement de l’émission santé. Les voici,ponctuels, en costume traditionnel, conscients del’importance des messages qu’ils vont transmettre.Quatre chaises en plastique sont disposées en cer­cle, Souleimane leur tend le micro . L’émission, enwolof, dialecte traditionnel, peut commencer.Momo, jean et débardeur, arrive, tout sourire.

Fondée en 2007 par son père, Moussa Mane,grâce à l’aide de l’Unesco, de la Suisse et des Pays­Bas, la radio communautaire vient de fêter sesonze ans. Onze années durant lesquelles elle a faitdu chemin, accru son audience, créé des émulesjusqu’en Gambie et réussi à toucher 162 800auditeurs. Elle émet dans un rayon de 75 kilomè­tres, sept jours sur sept à raison de six à sept heu­res par jour mais ne peut parler de politique. Lasanté, l’éducation, les religions, la pêche, la chasse,l’agriculture, le tourisme, l’artisanat, le sport, lereggae, et la lutte, bien sûr, sont autant de sujetsabordés. Interactive et essentielle pour resserrerles liens entre la communauté, elle diffuse aussi denombreuses annonces lorsqu’une chèvre s’estperdue, par exemple. Qu’un ancien vient de fer­mer les yeux. Ou que des jeunes Belges viennenttravailler au village…

L.B, au SénégalMomo, le DJ de la radio communautaire de Soucoutaet la vedette de toute la région de Kaolack.

L.B

Les Vidomégons du Bénin,une enfance bafouéeNul ne peut découvrir la ville de Cotonousans passer par un des plus grandmarchés à ciel ouvert de l’Afrique del’Ouest, le célèbre marché internationalDantokpa.

Vu du haut du pont sur le boulevard Saint­Mi­chel, le marché Dantokpa s’étend dans la villecomme une mer de taules grises luisant au

soleil. Supposé ne s’établir que dans un bâtimentdésigné à cet effet, le marché a pris ses quartierstout autour de celui­ci et s’étale aujourd’hui surune superficie d’environ 180 000 m2. Un véritablelabyrinthe pour ceux qui n’en connaissent pas lesrecoins, dans lequel on peut trouver, pêle­mêle,fruits, légumes, viandes, poissons, bijoux, sacs,chaussures, animaux séchés pour les rituels vau­dous, farines, vêtements etc. Parmi les personnesaffairées sur le marché, en train de préparer leurétal de poissons, ou de cirer des chaussures pourleurs futurs clients, se faufilent, entre les sacsd’osier remplis d’oignons, de petites silhouettesagiles et discrètes que l’on peine à remarquer. Cesont des enfants. Car plus de 400 enfants de tousâges vivent, travaillent et dorment dans l’immen­sité de ce marché.

Les Vidomégons et le marché de Dantokpa“Vidomégon” en langue Fon signifie littéralement

“Enfant placé”. Il est en effet très commun au Béninque des parents vivant à la campagne dans un vil­lage placent leurs enfants chez un oncle, une tante

ou un proche qui vit dans une grande ville afin deleur procurer une éducation adéquate. Depuis plu­sieurs années, cette pratique ancienne connaît degraves dérives. En effet, malheureusement, que lesparents les placent en ville pour favoriser leurs étu­des ou qu’ils vendent en toute conscience leurforce de travail, ces enfants placés se retrouventbien souvent dans des familles qui finissent par lesutiliser comme main­d’œuvre dans leur maison ouailleurs. Ils deviennent de véritables petits esclavesdociles et totalement démunis qui finissent trèssouvent par fuir cette famille d’accueil et par vivredans la rue. Dans le marché de Dantokpa, notam­ment, bien connu depuis quelques années commelieu de refuge pour bon nombre d’enfants car il re­présente un des plus grands demandeurs demain­d’œuvre peu qualifiée. Les enfants y sont ef­fectivement partout présents : comme colporteursd’immenses sacs d’oignons, équarisseurs de têtesde vaches ou, couverts de farine, comme employésdans les ateliers pour moudre le manioc. Mal vuspar les adultes du marché car réputés pour voler,ces jeunes vivent dans une pauvreté extrême etsont prêts à tout pour gagner quelques centimespour pouvoir tout simplement manger. Proposerleur aide pour porter des sacs, brûler des chaussu­res pour récupérer le fer qui est à l’intérieur (150CFA par kilo), récupérer des écouteurs pour le cui­vre (250 CFA par kilo), recycler des cannettes oudes bouteilles, tout est bon pour ces jeunes enquête désespérée de quelques pièces.

Esclavage moderneFacilement exploitable par les trafiquants d’en­

fants, la tradition d’envoyer ses enfants dans lesvilles pour étudier a créé cette situation sur les

marchés de Cotonou mais a également nourri letrafic d’enfants au­delà des frontières. En effet, cer­tains ont utilisé la force de travail des enfantscomme un capital personnel en les vendant ou leslouant pour une période donnée au Gabon, au Ca­meroun ou encore en Côte d’Ivoire. Dans ces pays,les Vidomégons étaient employés comme petitemain­d’œuvre dans le commerce ou pour des tra­vaux domestiques. Et comme si cela ne suffisaitpas, pendant longtemps le Nigéria a même traitéces enfants comme de vrais forçats, les obligeant àcasser des pierres dans des carrières pour obtenirleur repas quotidien. Grâce à la collaboration entreles polices béninoises et nigériennes, plusieurs ré­seaux ont pu être démantelés et beaucoup d’en­fants ont pu être ramenés au Bénin. Mais les fron­tières restent relativement étanches et il est encoredifficile pour le gouvernement béninois de contrô­ler ces violations des droits de l’enfance.

La baraque Don Bosco et le Centre Maman MargueriteC’est justement pour protéger ces enfants que

Don Bosco a ouvert une baraque en taules elle aussisur le marché. Une petite baraque verte, décorée debanderoles de couleurs, dont les murs sont cou­verts de dessins d’enfants et de slogans contre l’es­clavage. Depuis dix ans, Blaise travaille ici pour ve­nir en aide aux jeunes du marché. Assistant socialde formation, il en fait le tour, tous les jours, pourrepérer les jeunes en situation de précarité. “Il fautd’abord créer un sentiment de confiance. Ces jeunesn’ont plus confiance en les adultes. Et c’est compréhen­sible”, nous dit­il. Dix ans de travail qui portentleurs fruits car il est en effet impossible de parcou­rir cinq mètres dans le marché sans que deux outrois jeunes ne nous accostent sourire aux lèvres

Une femme portant son panier sur la têtedans le plus grand marché de l’Afrique del’Ouest. Un véritable labyrinthe pour lesnon initiés!OL

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“Il faut d’abord créerun sentiment de

confiance. Ces jeunesn’ont plus confianceen les adultes. Et c’est

compréhensible”Blaise

Educateur social pour Don Bosco

pour faire un bout de chemin avec nous et discuteravec Blaise. L’objectif est bel et bien de créer du lien,de créer de la confiance et de permettre à ces jeu­nes d’avoir un point de relais, un endroit où l’en­fance a sa place et où une oreille est toujours prête àles écouter. “Ici ils peuvent venir le soir, quand ça de­vient vraiment dangereux”, nous explique Blaise.Cette baraque parmi les taules du marché est enréalité un centre de relais : les jeunes viennent dis­cuter et découvrir les activités proposées par l’asso­ciation. On y joue, on y danse et les jeunes, apeuréset souvent en refus total de l’autorité, font leurspremiers pas dans l’association. D’autres centres,tels que le foyer Maman Marguerite situé un peuplus loin du marché, proposent une réelle alterna­tive pour éviter aux jeunes les dangers des nuitspassées sur le marché. Au foyer Maman Margueritetous les soirs, de 19h à 2h30 du matin, entre 80 et100 jeunes viennent y trouver refuge. Ici, les jeunesdisposent de douches, de sanitaires, de chambresavec nattes pour dormir mais aussi de deux fourspour se préparer à manger. Dans la nuit noire, lebrouhaha des jeunes s’intensifie tandis que desjeux de société sont mis à leur disposition jusqu’à22h et que l’éducateur social note les présences dechacun. Les outils technologiques sont parfois bienutiles pour aider ces éducateurs sociaux : ainsi ceuxqui font le tour du marché la nuit et ceux qui res­tent au foyer s’envoient des photos d’enfant parWhatsapp pour s’informer des présences ou desabsences. Les regards durs de la journée peu à peus’adoucissent, les dents serrées pendant le dur la­beur se détendent et finalement, pour quelquesinstants au milieu de ces rires, de ces cris et de ceschants, les enfants reprennent leur allure d’enfant.

Constance Frère

En pleine discussion avec un jeune garçon dans une des baraques de Don Bosco du marché de Dantokpa.C’est un centre de premier accueil et d’enseignement pour les jeunes de ce marché.

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Plus de 400 enfants de tous âges vivent, travaillent et dorment dans l’immensité du marché de Dantokpa.

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A près trois jours passés dans le centre Magonede l’ONG VIA Don Bosco, le team D­Clik s’enva en minibus sous la chaleur humide du Bé­

nin découvrir le foyer Cachi à Porto­Novo. Ballot­tés sur les routes en terre rouge de la ville, les bos­ses les plus grosses n’empêchent néanmoins pasles jeunes de continuer à jouer au Loup Garou aufond du bus. Rapidement, nous voila arrivés aucentre Cachi, accueillis par Hugues et son grandsourire. “Aujourd’hui c’est vous les patrons du cen­tre”, nous dit Sénadé, l’assistant social de VIA DonBosco, qui est aussi notre guide, notre ami et notresource intarissable d’informations sur le Bénin.

Rencontres au Centre CachiPassée la porte du centre, nous arrivons dans une

petite cour en béton avec, sur la droite, un premierédifice vert où l’on aperçoit déjà le fameux portraitde Don Bosco, protecteur de la jeunesse nous ex­pliquent les Salésiens, membres de la congréga­tion de Don Bosco, entourés d’enfants béninois.Plus loin, une dizaine de jeunes garçons nous at­tendent patiemment avec leur éducateur, debouten demi­cercle. À peine arrivés auprès d’eux, lesvoici qui entonnent une chanson de bienvenue enfrappant dans leurs mains, encore légèrement in­timidés par nos minois luisant de chaleur et intri­gués. On commence par un tour des prénoms, quise fait lui aussi en musique. Entre Wijdane etDieudonné, les différences culturelles émergent etla bonne prononciation n’est pas toujours au ren­dez­vous ! Mais peu importe, nous voilà déjà tousmélangés, assis sur des bancs pour écouter Huguesnous raconter l’histoire du lieu.

Jeux d’enfantsMove With Africa La team D-clik

Abandons ou départs précipités des mineursLe centre Cachi a été créé en 1995 et Hugues lui­

même était déjà présent pour s’en occuper. La plu­part des enfants présents dans ce centre viennentdes commissariats de Cotonou ou de Porto­Novo.Recueillis par la brigade jeunesse de la police, cesjeunes sont ensuite placés dans les centres DonBosco par le CPS (Centre de promotion sociale)béninois. Les trois agents – commissariats, CPAS etcentres Don Bosco – agissent donc à l’unissonpour venir en aide à ces jeunes, pour comprendreleur histoire et pour essayer à tout prix de renouerles liens avec leurs familles. En effet, pour chaqueenfant une enquête sociale est menée, parfois enpartenariat avec le CPS, quand peu d’informationssont connues, pour tenter de retrouver sa famille.Sénadé, notre guide personnel, travaille lui aussien tant qu’éducateur social. Il parcourt souvent lespetites routes béninoises sur sa moto à la recher­che des familles des enfants. Multiples sont les rai­sons des départs de ces enfants : vu l’extrême pau­vreté au Bénin, parfois certaines familles ne saventmême pas assurer les repas pour leurs enfants. Cepeut être aussi suite à la séparation des parents,lorsque les mères se retrouvent seules et sans res­sources à éduquer leurs enfants. Parfois l’enfantpart rejoindre un culte vaudou, critiqué par la so­ciété béninoise, pour, finalement, se retrouver seulet exclu. Sans oublier le phénomène bien connuau Bénin qui est l’envoi des jeunes par leurs pa­rents dans les grandes villes pour rejoindre un on­cle ou une tante (voir article Vidomégon). Biensouvent ces pratiques mènent à l’exploitation del’enfant par ces familles ou, pire encore, la ventede ses services comme véritable petit esclave. Lesenfants n’ont pas d’autre choix que de fuir et seretrouvent à la rue. C’est donc tout un travail so­cial en profondeur qui est mené par le centre et sesdifférentes composantes pour leur venir en aide :

assistants sociaux, psychologues, éducateurs, etc.pour rétablir les liens familiaux dissouts. Les re­tours à la maison ne se font pas toujours sans résis­tances. Il faut parfois des mois de médiation pa­rentale ainsi qu’un suivi approfondi et régulierpour que ces enfants reprennent leur place dansleur famille. Ce suivi est ponctué de coups de fil dela part des éducateurs ou de relais via différentesantennes du CPAS dans les villages. L’idée est bienévidemment de sensibiliser les parents et la com­munauté à ces nombreux cas de départ ou d’aban­don des enfants.

Apprendre l’insoucianceAprès ce discours lourd en émotions, Tristan

prend les choses en main et nous propose un jeupour apprendre les prénoms. Scout dans l’âme, ilne lui faut pas longtemps pour capter l’attentionde tout le monde et les faire former un grand cer­cle main dans la main. Ce matin, on jouera à PAN.“Quand je dis un nom, cette personne s’abaisse et lesdeux personnes à ses côtés doivent se tirer dessus. Leplus rapide gagne et l’autre doit sortir du cercle”.S’ensuivent fous rires, exclamations et souriresentre les jeunes de plus en plus excités malgré lachaleur qui ne fait qu’augmenter au fil des heures.Et les jeux s’enchaînent : entre le jeu du mouchoir,Jacadit et 1,2,3 Piano, on ne sait plus où donner dela tête. Les éducateurs béninois nous observent in­terloqués ou totalement écroulés de rire, surtoutlorsqu’il s’agit d’observer les enfants jouer à 1,2,3piano. “Tu as bougé, tu retournes sur la ligne du dé­part”, hurle Chaimaa. Tout est mis en place pourdéconcentrer ces statues humaines figées mais lé­gèrement tremblotantes. Marie­Jo, Pedro etChaimaa sont rapidement rejoints par les éduca­teurs béninois qui eux aussi s’amusent à défilerparmi ces petits corps rigides pour réussir à enfaire bouger un. Entre reniflements de sangliers,regards perçant et grimaces en tous genres, diver­ses sont les techniques pour faire pouffer de rireles enfants qui finissent dans les bras de jeunesBelges en direction de la case départ. En observantces scènes, on ne peut que constater le rôle fonda­mental du jeu dans la prise en charge d’enfantsdes rues. Le jeu crée de la solidarité et de la con­fiance et il suscite un sentiment d’intimité entreles êtres. Il permet à des jeunes, qui n’ont pas puvivre pleinement leur enfance, de retrouver desmoments d’innocence et de joie.

Constance Frère

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Les élèves de l’InstitutSaint-Vincent de Paul enplein milieu d’un 1,2,3 Pianoavec les jeunes du centreCachi. Gare à celui quibougera !

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L’INSTITUT SAINT-VINCENT DE PA UL AVEC VIA DON BOSCO

Move With Africa L’Athénéede Ganshoren à Bopa

Après trois jours passés avec l’Ins­titut Saint­Vincent de Paul, lesélèves de l’athénée Royal de

Ganshoren retournent chez “eux”,dans une des petites bâtisses du jolivillage de Bopa. Après le bruit de laville de Porto­Novo ou l’agitation deCotonou, à Bopa, au bord du fleuveAhamé, la vie coule doucement et pai­siblement dans les petites ruelles enterre rouge où les coqs et les poules sebaladent en toute tranquillité.

Retour à la maison“Bienvenue chez nous Constance”, me

dit Mehdi en passant le portail quidonne sur une petite cour en terre oùse dressent un beau manguier et quel­ques grands palmiers. Les retrou­vailles avec Desnos, l’éducateur d’Afri­capsud qui accompagne les élèvestous les jours sur place, sont chaleu­reuses et pleines de tendresse. “Tunous as manqué Desnos” lui disent lesélèves tour à tour. À peine rentrés, lesjeunes réclament leurs correspon­dants béninois. “On ne leur donneraitpas rendez­vous ce soir pour un verre ?”,

propose leur professeure, Marie. Bienévidemment ! En quelques minutes lerendez­vous est conclu et Desnos pré­vient chaque correspondant qu’il estle bienvenu ce soir au bord du fleuvepour des retrouvailles arrosées. Lesélèves n’ont pas tardé à retrouver leursmarques. Ils semblent déjà en totaleharmonie avec le lieu qu’ils qualifientde “maison”, et entament en riant unbadminton improvisé et sans filet avecDesnos.

Bopa, village de rencontresUn des principaux axes de travail du

projet d’Africapsud, en collaborationavec le centre Carrefour Jeunesse àComé, est la rencontre interculturelle.Pour favoriser les échanges culturels,des jeunes Belges, et,réciproquement,des jeunes Béninois, sont envoyés enBénin ou en Belgique. Pendant envi­ron deux semaines, ces jeunes Belgeset Béninois du même âge partagent etvivent ensemble plusieurs activités. Lesystème, assez fluide, leur permet dese retrouver quand bon leur semble,en dehors des activités organiséespour discuter avec leurs correspon­dants ou, tout simplement, se baladerà deux. Le programme est coconstruitentre jeunes et professeurs. “C’est vousqui construisez le programme, si vous

avez envie de quelque chose, vous n’hési­tez pas à nous le dire” explique Pierre,responsable éducation d’Africapsud.C’est depuis peu que le village de Bopaaccueille ces rencontres interculturel­les qui n’auraient pu y avoir lieu sansl’aide du fameux Ambroise, unhomme d’une finesse et d’une gen­tillesse rares, qui met à dispositionune de ses propriétés pour hébergerles jeunes Belges. Bientôt les élèvespasseront une première journée avecune personne exerçant un métier spé­cifique qu’ils accompagneront dansses tâches quotidiennes. Ainsi, en har­monie avec les désirs de chacun, lesjeunes passent des moments privilé­giés les uns avec les autres. Ils décou­vrent petit à petit une autre culture,d’autres mœurs, d’autres pratiques etélargissent tout simplement leur uni­vers de pensées.

La pêche traditionnelleAprès un petit verre pris la veille au

soir sur le fleuve Ahémé, dans un lieumagique, en compagnie de Prince, leplus jeune de la bande qui rappe plusvite que son ombre, Desnos et tous lesautres correspondants béninois se re­trouvent à nouveau au bord du fleuvemais, cette fois, pour s’activer ! En ef­fet, aujourd’hui Ambroise ainsi que

plusieurs pêcheurs veulent nous mon­trer une technique de pêche tradition­nelle. La pêche dans le fleuve Ahéméétait très importante autrefois, maisaujourd’hui, à cause des barrages et dela pêche intensive, il reste bien troppeu de poissons dans le fleuve pourgagner suffisamment sa vie ou s’auto­suffire. Les Belges comme leurs corres­pondants béninois, en contemplationdevant les filets blancs, n’ont pas vrai­ment l’air de comprendre commentprocéder. Pourtant la technique esttrès simple à comprendre. Les filetspossèdent tous une corde blanchequ’il faut enrouler méticuleusementautour de son poignet. Il suffit ensuitede lancer les filets dans l’eau en les dé­ployant le plus largement possible. Aubout de ces filets sont accrochés de pe­tits poids en plomb qui les aident àcouler et à se refermer sur leurs proies.Simple à comprendre ? Oui. Facile àappliquer ? Non. Il faut non seulementavoir un bon lancer et bien compren­dre le geste, mais aussi et surtout l’en­voyer sur des poissons. S’ensuiventmultiples essais pour les élèves et leurscorrespondants, pieds nus dans lefleuve au milieu d’enfants qui accou­rent peu à peu pour se baigner en cettechaleur de fin de journée.

Constance Frère

Fiona et Manon de l’athénée Royal de Ganshoren main dans la main avec leurs correspondantes béninoises à Bopa. Beaucoup de complicité et de tendresse au rendez-vous!

CONS

TANC

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L’ATHÉNÉE ROYAL DE GANSHOREN AVEC AFRICAPSUD

Alter-ego béninois et belges

Comé, lieu d’introspectionet d’échanges

Carrefour Jeunesse, dont le siège se situedans la ville de Comé dans le Sud-Ouestdu Bénin, est un centre parascolaire crééen 2011 et devenu ONG agréée par legouvernement béninois en novembre2013.

R encontre avec Sylvestre Dossa, CoordinateurBéninois du projet Cap Solidarité mené encollaboration avec l’ASBL belge Amarrage

ainsi que le Directeur exécutif du projet CarrefourJeunesse, en collaboration avec l’ASBL belge Afri­capsud. Il nous parle de ces projets tisseurs de lienset des actions développées sur le terrain, au Béninet en Belgique.

Africapsud et Carrefour JeunesseCarrefour Jeunesse, c’est le projet qui concerne

directement Move With Africa. Après avoir mis enplace Cap Solidarité,un programme qui envoie des

jeunes Belges en perte de repères au Bénin pourleur permettre de prendre du recul, Sylvestre a euenvie de créer une structure dédiée aux Béninoiseux­mêmes. Carrefour jeunesse est ainsi né, encollaboration avec Africapsud, avec l’intention dedévelopper la notion d’échange sous toutes ses for­mes. Un échange supposant une réciprocité, laquestion a été de savoir ce qu’il fallait faire pourque chacun y trouve son propre épanouissement.La réponse, ce fut la création du centre autour detrois axes d’attaque principaux : la mise en placed’activités parascolaires, le soutien aux initiativesdes jeunes et l’organisation de rencontres intercul­turelles. L’ASBL propose des cours de théâtre, dedanse, de couture, de sport ou autres. Mais aussidu soutien technique (matériel et conseils) pourdes jeunes qui viennent avec un projet précis etdes rencontres interculturelles avec plus de 9groupes par an qui viennent loger 15 jours surplace.

De la nouveauté pour 2018Aujourd’hui et de tous temps, les demandes et

les besoins des jeunes évoluent. Sylvestre a voulus’accorder à ceux­ci. En 2016, il constate que, de

Le soir, entre les balançoires et les petits buissons, les jeunes jouent tranquillement avec des ballons dans la cour de Carrefour Jeunesse.

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MOVEWITH AFRICA 2018

Sylvestre DossaDirecteur exécutif du projetCarrefour Jeunesse, en

collaboration avec l’ASBL belgeAfricapsud.

D.R.

Lieu d’échanges, d’apprentissage et de jeux, à Carrefour Jeunesse, le soir sur les balançoires, il fait bon vivre.OL

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manière répétitive, les jeunes lui font part d’unréel problème d’écoute de la part de leurs aînés.Ces jeunes Béninois se retrouvent souvent face àune autorité qui ne les comprend pas et leur im­pose un mode de vie désuet. « Ils sont venus me direque ce qui les préoccupait, les adultes, eux, ils s’en fou­taient » me dit Sylvestre. À l’écoute de cette de­mande, Sylvestre vient de mettre en place au seinde son ASBL un véritable service d’aide socio­édu­cative à la jeunesse. Le centre possède notammentune section d’écoute de premier plan qui prêtel’oreille aux problèmes ou questionnements vécuspar les jeunes et leur propose si besoin une orien­tation vers d’autres instances lorsque le cas esttrop grave. Cette section procure aussi des infor­mations sur les droits et les devoirs de chacun. Uneaide scolaire est également proposée qui com­prend des cours d’alphabétisation mais aussi desformations ou des renforcements de cours avec devéritables professeurs mis à la disposition des jeu­nes.

La citoyenneté Mondiale et SolidaireDans l’esprit de MWA, l’ASBL travaille aussi sur la

citoyenneté mondiale et solidaire en proposant

des rencontres interculturelles, des projets spor­tifs, artistiques ou autres. À titre d’exemple, l’ASBLa mis en place des petites capsules sonores avec desjeunes de 10 à 12 ans au Bénin. Le concept ? Desjeunes choisissent un thème de société et analy­sent les débats et les problèmes que ce thème sou­lève. Puis se pose la question de savoir qui peut lesaider à avoir un impact sur ces problèmes ? Com­ment chacun peut y apporter des solutions ? Etquelles sont les instances en mesure d’y répondreplus largement ? Une capsule est alors réalisée quirelate tout le processus. L’initiative est reproduitedans 4 autres pays entre lesquels les capsules cir­culent : le Togo, le Bénin, la Belgique et Haïti. Unefaçon intelligente et réfléchie, selon Sylvestre, dedonner la place à la parole des jeunes. Les échan­ges interculturels, quant à eux, sont réguliers etsont toujours longuement préparés à l’avance parles jeunes Belges qui doivent monter un projetconcret qui sous­tend leur voyage. Cette année,c’est un groupe de rappeurs belges qui sont venusécrire des textes avec des rappeurs béninois et quiont produit un disque et des clip­vidéos. Un beléchange créatif qui devrait en surprendre plusd’un !

Un échangesupposant

une réciprocité,la question a étéde savoir ce qu’ilfallait faire pourque chacuny trouveson propre

épanouissement.

Un Rwandais sur 4 toujourstraumatisé par le génocideLes adultes sont les plus concernés.Mais même ceux qui ne l’ont pas vécupeuvent être touchés.

C et événement tragique s’est déroulé il y aplus de 20 ans. En avril 1994. Une grandepartie de la population rwandaise ne l’a

pas vécu. Et pourtant… Selon une étude réaliséeen 2009, 26,1 % de la population adulte rwan­daise souffrent de troubles de stress post­trau­matique (TSPT, plus connus sous le nom dePTSD en anglais), contre 10 % en moyenne dansle monde. Ce sont des situations qu’on constatesouvent après un conflit armé, un attentat, unaccident grave,… “C’est un challenge importantpour le système de santé mentale. Il faut prendreun nombre important de patients en charge”, sou­ligne Achour Ait Mohand, psychiatre et spécia­liste de la santé mentale qui travaille depuis dixans au Rwanda pour la coopération belge (Ena­bel depuis 2018). Son champ d’action : la for­mation du personnel (infirmiers et médecins)et le soutien à la politique de décentralisationdes soins vers le milieu rural.

Après le génocide, tout le système de santéétait anéanti. Depuis le pays a repris les chosesen main. Il y a dix ans, il y avait un seul psychia­tre pour tout le pays. Aujourd’hui ils sont 10; et10 autres sont en formation. Outre deux cen­tres à Kigali – Ndera et le département de santé

mentale du CHU –, il existe des centres de santémentale dans tous les hôpitaux de district. Desanimateurs de santé sont aussi présents, quifont de la sensibilisation, aident les familles às’orienter et à lutter contre le regard des autres.“En Afrique, la maladie mentale est stigmatisée.Avant 1972 et l’inauguration du premier hôpitaldédié à la psychiatrie Ndera, les malades les plusdangereux étaient en prison”, raconte Achour AitMohand.

Les cas de TSPT concernent des personnes quiont été confrontées à sa mort imminente ou àcelle d’un être cher. “La souffrance ressentie, sur­tout quand il y a une agression physique, commeun viol, est immense. Le fait de vivre près de sonboureau ou de sa famille, comme c’est le cas auRwanda – même si certains génocidaires sont en­core en prison –, rend les choses encore plus diffici­les. Les troubles liés au génocide peuvent apparaî­tre dans les semaines qui suivent celui­ci, ou mêmeles mois ou les années. Les événements reviennentsous forme de flash­back qui font revivre la souf­france. Et celle­ci peut être toujours aussi intense”,souligne le psychiatre d’Enabel. “Certains arri­vent à en parler. Cela les soulage mais il restequand même des traces. D’autres n’arrivent pas.La violence n’est pas simple surtout quand elle estaussi massive. Ce qui est terrible dans le génocide,c’est le désir d’anéantir l’autre, de le déshumaniser.Le traumatisme touche aussi les enfants qui sontdevenus orphelins. Trop tôt, ils sont passés à l’âgeadulte, responsable de leurs frères et sœurs par­fois.”

“Il n’est pas rare de voir des enfants dont la mèrea été confrontée au génocide pendant sa grossesseavoir aussi des troubles”, note Paul Kanyadekwe,psychiatre responsable du service psychiatri­que au sein du CHU de Kigali. “Il s’agit d’un phé­nomène épigénétique. Tout ce qui entoure la per­sonne confrontée au traumatisme peut entraînerune modification de gênes. C’est influencé par l’en­vironnement. C’est un phénomène qui n’est ex­ploré que depuis récemment. On voit cela avec lesJuifs aussi. Il y a une transmission transgénéra­tionnelle.”

Les commémorations sont toujours un mo­ment fort. “Il est difficile d’ignorer le génocide.Partout des stèles ont été érigées. Personnellementje pense que ce devoir de mémoire est important.Sinon, on risque un déni de ce qui s’est passé. Etcela c’est le plus dur qui puisse arriver aux victi­mes. Il est important que les choses soient dites etde les enseigner aux plus jeunes”, estime AchourAit Mohand, qui reconnaît que la période descommémorations est aussi un moment difficile.“Les victimes sont souvent plus affectées en avril. Ilfaut aider les gens à se reconstruire, à se projeterdans l’avenir.”

L’évolution est positive. “Nous n’avons plusautant de crises traumatiques qu’il y a vingt ans”,souligne Paul Kanyadekwe. “Il existe de nom­breux facteurs protecteurs : on a facilité les soins,le logement et l’intégration de la population. Lesgens ont confiance en l’avenir car ils se sententprotégés.”

Solange Berger

Un mémorial avec 10 stèles représentant les 10 parasbelges assassinés le 7 avril 1994 a été érigé à côté dulieu où ils ont péri.

SOLANG

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“Ce qui est terrible dansle génocide, c’est le désir

d’anéantir l’autre,de le déshumaniser.”

Achour Ait MohandPsychiatre, Enabel

Les élèves de l’Ecole européenne d’Ixelles ont déposé une corbeille de fleurs et puis chacun une rose sur unetombe commune au Mémorial du Génocide à Kigali.

SOLANG

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MOVEWITH AFRICA 2018

De Theux à Abomey, on a la main verteMove With Africa Pendant plusieurs jours,les élèves du Collège Saint-Roch de Theuxont donné de leur personne du côtéd’Abomey au Bénin.

Doux euphémisme que d’affirmer que la quin­zaine de jeunes élèves de 5e humanité de la bour­gade liégeoise ont mis la main à la pâte durant

cette aventure Move With Africa à travers le Bénin.Après avoir pris leurs quartiers du côté d’Abomey,

la capitale historique du pays, les adolescents sesont livrés à divers travaux manuels et ateliers auxquatre coins de la ville, le tout à un rythme soutenu.Au programme : des activités de maraîchage maisaussi de l’animation auprès de jeunes béninois.

Sur les potagers en friche, les petites phalanges sesont affolées pendant plusieurs jours sous un soleilmordant et des températures flirtant parfois avecles 40 degrés. “C’est vrai qu’entre 12 et 15h, il faitvraiment trop chaud pour travailler, d’autant qu’ils’agit de tâches très physiques que nous ne sommespas habitués à réaliser”, expliquait Camille.

Du côté des professeurs, on s’est égalementfrotté à l’exercice avec enthousiasme et dans labonne humeur. “A travers des activités concrètes, lesliens entre Belges et Béninois se tissent plus intensé­ment. Le fait de participer ensemble à un projet com­mun accélère l’immersion et balaye les appréhen­sions”, analysait de son côté MarieStassen, professeure à Saint­Roch.

Encadré par l’ONG DBA (DéfiBelgique Afrique), le groupe sco­laire a profité d’un programme axésur des initiatives locales et des ac­tions concrètes développées parl’association.”Ce qui nous animedans ce projet, c’est la véritable prisede conscience de ces jeunes généra­tions du royaume du quotidien de lasociété civile béninois Et pour renfor­cer leur expérience, il nous apparaîtessentiel de les plonger dans la réalitélocale pour en appréhender les com­plexités. Cela permet aussi d’acérer leur regard criti­que sur notre monde en transition et de renforcerleur capacité à s’engager de façon responsable et ac­tive”, analysait Bénédicte Raskin, détachée péda­gogique DBA.

Parallèlement à ce programme de labeurs, lesadolescents ont également été initiés aux techni­ques agricoles comme celle du riz. Grâce au parte­naire locaux de l’ONG Aldipe avec laquelle colla­bore DBA, la sympathique bande de Theux accom­pagnée de leurs correspondants ont pu découvrir

le processus de la culture rizicolemis en place à Allahé, en plein cœurde la campagne béninoise.

“C’était vraiment intéressant decomprendre de manière détaillée lesdifférents étapes du séchage au triageen passant par le triage. D’autant quenotre école a participé au finance­ment de ce projet Carême (SahelVert)”, souriait Louise.

A l’issue de ces journées copieuse­ment garnies, de nombreux invitésvenaient rendre visite aux jeunes àleur logement, comme ce prêtrevaudou avec lequel un passionnant

échange de questions­réponses fut dispensé. Jus­qu’au dernier jour, cette expérience se révéla in­tense et drôlement chargée. Et ils ne sont pas prèsde l’oublier...

Pierre Vangrootloon

“il nous apparaîtessentiel de les

plonger dans laréalité locale pouren appréhender les

complexités”Bénédicte Raskin,

détachée pédagogiqueDBA.

Avec enthousiasme et en chantant pour se donner du courage, les jeunes se sont attelés à cultiver des parcelles maraîchères.

P.VG

L.

L’INSTITUT SAINT-ROCH THEUX AVEC DBA

Du théâtre sur le sablepour les enfants des ruesSénégal Trop d’enfants sont exploités etbattus par les marabouts. D’autres n’ontpas accès à l’école. Avec son associationDjarama, la comédienne Patricia Gomisveut les aider. Par l’art, l’éducation, laconviction et l’engagement. Une élégancede coeur et d’esprit.

T rop d’enfants sont exploités et battus par lesmarabouts. D’autres n’ont pas accès à l’école.Avec son association Djarama, la comédienne

Patricia Gomis veut les aider. Par l’art, l’éducation,la conviction et l’engagement. Une élégance decoeur et d’esprit.

D’un côté la mer, les pirogues colorées du Sénégal,celles qui arrivent en Espagne. De l’autre, près del’école délabrée des arts et métiers, une scène im­provisée sur le sable. Entre les deux, environ deuxcent cinquante enfants assis sur des chaises en plas­tique. Quelle direction vont­ils choisir ? Prendront­ils le large? Avec au bout du voyage, au mieux, d’im­menses désillusions, au pire, une fin presque cer­taine? Ou sèmeront ils de nouvelles graines au pays,comme ose l’espérer Patricia Gomis. Comédienne,cette femme engagée est surtout la fondatrice deDjarama, cette association humaniste qui œuvre auprofit des enfants défavorisés par des actions cultu­relles et éducatives, à Dakar et sur la côte Ouest duSénégal, au petit village côtier de Ndayane, entreautres, à cinquante kilomètres de la capitale. Dja­rama, comme «bonjour et merci», c’est à la fois, uneécole, un théâtre jeune public unique au Sénégal,un festival du théâtre pour les enfants des rues etun pole culturel. «On fait de l’éducation populaire.On a une école communautaire. Pour l’instant, iln’y a que deux classes. On avance petit à petit. L’anprochain, on créera une troisième classe. Il y a seu­lement quinze élèves. On veut leur donner à réflé­chir, à entreprendre. On cherche à les intéresser àl’agriculture. Et aujourd’hui, il y a des gamins quifont pousser de l’ail chez eux et cela, c’est formida­ble. Car plus personne ne cultive de nos jours » nousdit P.Gomis. Bonjour et merci, donc, avec tout cequi s’est passé entre temps.. Engagée, convaincueet révoltée par la situation de tous ces petits, obligésde mendier pour les marabouts, Patricia Gomismène tambour battant son festival. Et l’affaireprend de plus en plus d’ampleur.

Des brosses à dents dans les valises d’artistesCréé en 2013, l’événement, soutenu par l’Institut

français, le festival international, dure une semaineentière, entre spectacles, soins bucco­dentaires,ateliers et course d’ânes. Les festivités ont com­mencé par une déambulation dans la rue d’artistes,de marionnettes géantes, de percussions brésilien­nes, de jongleurs, d’acrobates, histoire d’attirer l’at­tention de la population. Il se déroule à Dakar etsur la plage de Ndayane. A l’heure ou nous l’appe­lons pour fixer un rendez­vous, Patricia Gomis estoccupée au dispensaire de santé où deux cent dixenfants se sont fait soigner, ou arracher, des dents,

gratuitement, grâce à l’association “Présence médi­cale”. Car le thème du festival qui se tenait en avrilcette année, est le “droit à la santé pour tous”. Tousles artistes ont d’ailleurs apporté des brosses àdents et de la pâte dentaire dans leurs valises. Uneaction ciblée, efficace et pertinente accompagnechaque édition de Djaram’Art. En 2016, elle senommait “Xalé xalé la” (”Un enfant est un enfant”)et voulait défendre les enfants des rues.

Un sujet tabouUn combat qui tient à cœur à la comédienne, ef­

frayée par la situation, de plus en plus grave, selonelle, au Sénégal. “C’est scandaleux, ce qui se passeici et personne n’en parle. Le sujet est complète­ment tabou mais ces enfants, confiés à l’école cora­nique par leurs parents, sont exploités par les ma­rabouts qui les envoient mendier et qui les battentau retour s’ils ne ramènent pas assez d’argent. Ilssont là tout le temps. Il y en a tellement qu’on ne lesvoit même plus. On en recense 150 000 dans tout lepays. Certains sont violés aussi et l’autre jour, on ena retrouvés brûlés. Le marabout avait quitté la mai­son et les avait enfermés. Ils se sont endormis enlaissant la bougie allumée. Il y a de plus en plus derapts d’enfants également. Il suffit de lire la pressesénégalaise.Personne n’en parle, c’est une mafia quirapporte des millions. Chaque gamin remporte500 francs par jour. Les rapts d’enfants, c’est pourdes sacrifices humains, carrément. L’enfant est untrésor.” nous dit­elle la rage au ventre. «La multipli­cation récente d’enlèvements et de disparitionsmystérieuses d’enfants au Sénégal ont suscitébeaucoup de tollé au sein de la population et ontfait régner la terreur et l’émoi dans les foyers. Cephénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur a

Une des “Femmes de Ndayane” en costume pour le spectacle de danses et chants traditionnels lébous.

Un jongleur et acrobate du spectacle “Wontanara”de la compagnie Notre Monde de Guinée Conakry

L.B

L.B

MOVEWITH AFRICA 2018

fini par installer un climat de psychose dans la so­ciété sénégalaise dans sa globalité. » écrit notam­ment, dans Dakaractu, le pédopsychologue BilalSougou évoquant aussi le trafic d’organes.

Jonglages et acrobatiesQuel badaud, quel touriste pourrait y songer en

voyant ces têtes brunes et dents blanches rire auxéclats à la vision des acroportés des comédiens deGuinée Conakry de la Cie Notre Monde et deSuisse, de la Cie Digestif, qui viennent de créer en­semble un spectacle, “Wontanara” après s’être ren­contrés ici à Djamara, voici deux ans. Ils sont cinqsur scène, trois hommes guinéens et deux femmessuisses, allient le jeu clownesque, les acrobaties, lejonglage et les ensembles chorégraphiés avec, enprime, un petit tour des standards de la danse clas­sique, hip hop, rock and roll ou autre. Les artistescréent une tour humaine, miment l’ oiseau, créentl’enchantement et prennent un certain nombre derisques. Une fillette d’une dizaine d’années, boudi­née dans sa robe turquoise ajourée fait des grandsgestes à son petit frère qui fait le clown de l’autrecôté de la piste. Elle l’appelle et le tient sagementsur ses genoux avant d’éclater de rire à nouveau. Vi­suel, corporel et sans parole, ce spectacle raconte larencontre, l’humour, le jeu et les rangs grossissentdans l’assemblée, les rires fusent de plus en plus. Onentend le vent souffler, le ressac de plus en pluspuissant de l’Atlantique et les notes de clarinettedont joue le musicien en live. Une belle tranche desourire communicatif. Le pari est gagné et lors­qu’on demande à la Suissesse Vanessa ce que repré­sente pour elle le fait de jouer en plein air, ici, enAfrique, elle nous dit toute sa réjouissance. “Nousn’avons jamais joué devant autant de personnes.

Comme c’est la deuxième fois que nous venons, jesuis moins surprise, c’est vrai. Je me souviens, il y adeux ans, on travaillait sur le clown avec des costu­mes à paillettes et je me demandais ce que cela al­lait donner ici. Finalement, cela a bien fonctionné.Normalement, à la fin du spectacle, on brandit unetapette à mouches mais les enfants n’ont pas com­pris que c’était le final et nous suivaient tous ennous imitant. Contrairement aux Européens, sage­ment assis, en silence, dans la salle, les petits afri­cains ne connaissent pas les codes du théâtre et réa­gissent de manière très spontanée. C’est vraimenttrès enrichissant pour nous d’être là.” nous dit lacomédienne qui s’apprête à partir pour Dakar, oùse tient également une partie du festival. Elle yjouera une version en salle de son spectacle , à l’Ins­titut français, cette oasis de paix au cœur de la villetonitruante.

Les Belges à l’honneurJuste avant, c’est une comédienne française de la

compagnie “Juste après” qui réalisa un très beausolo de danse, «Hybrides» avec une poupée manne­quin, une marionnette à taille humaine, son dou­ble, son ombre, son sosie, sa sœur. Une belle com­plicité et une grande solitude émanaient de ce mo­ment d’art sur une scène improvisée, quelquestapis poussiéreux sur lesquels roulent la comé­dienne et sa poupée. En 2019, le théâtre jeune pu­blic belge sera à l’honneur au Sénégal. Le nom dePatricia Gomis n’est d’ailleurs pas inconnu cheznous. Elle était en effet présente aux Rencontresthéâtre jeune public de Huy en 2003 lors d’une réu­nion internationale de l’Assitej, (Association inter­nationale du théâtre pour l’enfance et la jeunesse),organisée par l’éditeur Émile Lansman, en vue de

créer des liens entre les artistes des différents pays.Ils étaient une dizaine en tout, de France, d’Afrique,du Canada, d’Italie et chacun se souvient des lar­mes de crocodile que versa Patricia lorsqu’elle dutquitter la petite ville mosane. Esclave en FranceCette rencontre a mené à deux créations, “Avanti”(2005), avec Orange Sanguine et La Casquette, etquelques années plus tard, “Moi, monsieur Moi”(2012), un spectacle autobiographique racontant leparcours difficile de Patricia que le théâtre a sauvé,après s’être enfouie de la France où elle dit avoir étéesclave. L’histoire d’une enfant née au Sénégal qui,comme beaucoup d’autres, a été donnée à la tante,à la cousine, à l’oncle... L’histoire, parfois cocasse, detoutes celles qui, maltraitées et malmenées, relè­vent la tête pour trouver une place dans la société.“Je veux mettre le théâtre jeune public belge àl’honneur car il est d’une incroyable créativité. LaCasquette est bien sûr déjà venue ici. L’ASBL Cu­rieuzeneuz, qui nous soutient, également. Ainsique La Guimbarde avec sa création avec le Burkinaet la compagnie de cirque contemporain Carré Cu­rieux. J’ai envie de créer le même système que lethéâtre jeune public belge avec une diffusion dansles centres culturels et les écoles pour aller à la ren­contre des enfants ». Légende : Patricia Gomis, sur leplage de Ndayane, à cinquante kilomètres de Da­kar, pendant le festival Djaram’Art 2018.

Laurence Bertels

L.B

Patricia Gomis, au milieu des enfants des rues, sur le plage de Ndayane, à cinquante kilomètres de Dakar, pendant le festival Djaram’Art 2018.

Interview de Germaine Acognyhttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qsp/showtitle/1/viewnc/1

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