SUPLLB 20180511 SUPLLB1 -...
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Move with AfricaRaconte-moi qui tu es
Claire et Odette font des emplettes. Ça rime et ça se passe au marché de Comé juste avant l’arrivée de la pluie.OLIVIER PAPEGNIES/ COLLECTIF HUMA
Supplément gratuit de la Libre Belgique du 11 mai 2018
La 7ème édition de Move With Africa déjà en route...MOVEWITH AFRICALa 7 ème édition
Move with Africa. Supplément gratuit à La Libre Belgique. Coordination rédactionnelle: Constance Frère Réalisation: IPM Press Print. Administrateur délégué - éditeur responsable: François le Hodey. Directeur Général: Denis Pierrard.Rédacteur en chef: Dorian de Meeûs. Rédacteurs en chef adjoints: Xavier Ducarme et Nicolas Ghislain.
MOVEWITH AFRICA 2018
Move With Africa à été initiée par LaLibre Belgique en 2011, désireusede sensibiliser les jeunes à la citoyenneté mondiale et à l’interculturalité. En lançant ce projet, La Libre souhaitait donc avant tout sensibiliser un maximum de jeunes detous horizons et de toutes origines àla problématique des relationsNordSud. En collaboration avec desONG d’expérience et de renom,l’objectif que poursuit la Libre Belgique est de faire prendre davantageconscience aux jeunes Belges de leurresponsabilité d’acteurs citoyens dumonde et de leurs capacités à “contribuer au développement d’une so
ciété démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures”,comme le stipule le Décret Mission.
Concrètement, comment cela se passe-t-il ?
Cette action est destinée aux professeurs et aux élèves du 3e degré del’enseignement secondaire (5e, 6e et7e), quelle que soit la forme d’enseignement et de réseau dont ils sontissus. Elle est soutenue par le ministère de l’Enseignement de la Fédération WallonieBruxelles et de laCoopération au Développement(SPF Affaires étrangères). C’est doncplus de 200 jeunes et leurs professeurs qui s’engagent dans un projetqui leur est attribué, selon les préférences émises et qu’ils vont développer en partenariat avec l’une desONG impliquées. Avant de s’envolerpour un des pays d’Afrique concer
nés pendant les congés de détenteou de printemps. Les projets que lesorganisations non gouvernementales proposent répondent à des critères stricts et garantissant la sécuritédes participants. Ils abordent desthématiques centrales du développement et placent la rencontre etl’échange interculturels au centredes actions entreprises dans le cadrede Move with Africa.
Une réflexion commune et l’implicationdes élèves
Il est important de considérer l’action comme un cheminement dontle séjour en Afrique est une étape etnon pas une fin en soi. Le projet entrepris ponctue une réflexion plusgénérale, menée de concert avec lesONG lors de journées de préparation ainsi qu’avec différents organismes d’éducation. Inscrits dans cette
démarche globale, les jeunes sontappelés à animer un blog relatant demanière assidue, originale et dynamique, les avancées de leur projet.Photos, témoignages, activités de récolte des fonds, vidéos, etc. tous lessupports et les initiatives sont lesbienvenus pour alimenter ce lieu departage virtuel qui permet àd’autres élèves, moins chanceux, desuivre les avancées du projet. La Libre Belgique est en effet convaincueque le recours aux technologies del’information constitue un outil stimulant la créativité et la prised’autonomie des élèves dans un parcours d’apprentissage multidisciplinaire.
Move with Africa c’est avant toutune expérience unique qui favorisela rencontre, le partage et la citoyenneté mondiale.
Ensemble, bougeonsavec l’Afrique !
Move with Africa 2018-2019Move with Africa est une action destinée aux professeurs et aux élèves
du 3e degré de l'enseignement secondaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Inscrivez-vous à la 7e édition à partir du 2 avril 2018 !Rendez-vous sur notre site web: http://dossiers.lalibre.be/mwa/inscription.php
pour en découvrir plus sur ce beau projet !Move With Africa est un projet de La Libre soutenu par le Ministère de l’Enseignement
Pour plus d'informations
www.forrestgroup.com
NOUS CONTACTER: [email protected] | +32.10.23.96.80
En Afrique, la Fondation George Arthur Forrest développe des initiatives positives en faveur du développement socio-économique et des populations les plus fragiles.
La Fondation soutient depuis plusieurs années l’introduction des techniques de laparoscopie à l’Hôpital Panzi du Docteur Mukwege, une collaboration avec le Professeur Guy-Bernard Cadière et le CHU Saint-Pierre de Bruxelles. À Bukavu, en République Démocratique du Congo, le Docteur Mukwege soigne les femmes victimes de violences sexuelles.
Dans ce même esprit, les Fondations Forrest soutiennent des centres de santé, des dispensaires et des maternités, des écoles et des universités, des orphelinats et des centres d’accueil, des clubs de sport professionnels et amateurs... Les fondations financent également la construction d’infrastructures de base, par exemple d’accès à l’eau potable et à l’électricité, de même que des initiatives de sensibilisation au respect de la faune et de la flore congolaises.
Plus d’informations sur notre site internet
“
”
George A. ForrestPrésident
www.forrestgroup.com
Des investissements stables et durables, en particulier en Afrique, exigent des engagements positifs, au-delà de critères économiques et
financiers traditionnels
Une immersion dans le quotidiendes RwandaisTravail, nourriture, enseignement,…les jeunes Belges ont eu l’occasionde vivre comme des locaux.
D es ampoules plein les mains. Il faut direque le travail était dur. Les élèves de l’Ecoleeuropéenne d’Ixelles voulaient une im
mersion dans le quotidien des Rwandais, et ilsl’ont eue ! Les 16 jeunes ont été invités à voir letravail de Caritas dans un village de la région deNyagatare, au nord est du pays. Active auRwanda depuis 1960, l’ONG ymène notamment des projetspour lutter contre le phénomènede malnutrition, très importantdans ce pays de près de 12 millions d’habitants (voir aussi l’article page suivante).
Très motivés, les jeunes – et lesprofesseurs et représentants del’ONG en Belgique – ont participéà la création d’un jardin potageret d’un compost chez des bénéficiaires. Le tout dans les règles del’art. Pour le compost, par exemple, chaque couche a son importance. Celle du fumier comme lesautres…. Un travail physique que les élèves ontaccompli avec entrain avec l’aide des villageois.“Un moment une femme m’a pris ma pelle pour memontrer comme être plus efficace. Et effectivement,elle travaillait bien mieux que moi,” raconte unedes élèves qui, comme d’autres jeunes, s’est sentie parfois un peu frustrée d’être moins compétente que les villageois. Mais l’idée du programme n’était pas d’apporter notre aide à lapopulation, a rappelé un professeur. Le but du
voyage est de faire comprendre aux jeunes laréalité du quotidien de ces gens et de favoriserles échanges entre nos deux cultures.
La journée de travail s’est poursuivie avecl’égrainage du maïs et le décorticage d’arachides. Un travail fatiguant – surtout pour lesdoigts – et très répétitif. Où il a fallu à nouveaus’incliner devant la dextérité des villageois. “Regardez ce que cette femme a fait : autant que nous4 dans le même temps.”
Les jeunes qui souhaitaient une immersiondans la vie quotidienne des Rwandais ont étéservis avec une journée passée à l’école SaintAloys à Rwamagana, à l’est de Kigali. Les présentations faites, chacun s’est vu emmené au ré
fectoire pour partager le repas desquelque 1100 pensionnaires decet établissement. Au menu : rizet haricots rouges. Le quotidiende ces jeunes. Ce fut un momentd’échange privilégié. “On a beaucoup parlé foot…” “Certains m’ontdit que les élèves noirs aiment beaucoup les blancs. Et m’ont demandési l’inverse était vrai. Je leur ai répondu que je ne jugeais pas quelqu’un à la couleur de sa peau….”
L’immersion s’est poursuiviepar la participation aux cours : kinyarwanda pour les uns, biologiepour d’autres, ou encore religion,
géographie, histoire,… Au programme du coursd’histoire de ce jourlà : le génocide. Une matière qu’ils étudient de la 1ère à la 6e humanité.Par petits groupes, les élèves ont été amenés àréfléchir aux causes de cette tragédie. “Il faut enparler en classe. Cela touche tout le monde. Certains ont de la famille en prison”, nous explique leprofesseur.
La question du génocide avait été abordée parles élèves participants au programme avant leur
voyage. Mais entre la théorie – surtout pour cesjeunes qui n’étaient pas nés en 1994 – et la réalité marquée notamment par une visite au Mémorial du Génocide et au Mémorial belge estbien différente. Une visite émouvante pourtous. “Quand le guide nous a raconté comment ilavait dû fuir et se cacher, je me suis rendu compteque cela c’était vraiment passé”, raconte cet élève.“J’ai mis mes lunettes de soleil pour qu’on ne mevoit pas pleurer”, avoue un autre. La salle avec lesphotos de victimes, des crânes et ossements ouencore la partie réservée aux enfants furent lesplus émouvants. Comment ne pas craquer devant ces photos d’enfants accompagnées d’unpetit descriptif reprenant l’âge de chacun, cequ’il aimait – “elle adorait les frites”, “il chantaittout le temps,…” – et la manière dont ils ont ététués. “Nous nous sommes rendu compte à quelpoint l’imagination des hommes est importantequand il s’agit de faire souffrir ses semblables”.Une visite clôturée par le dépôt, sur une tombecommune, de roses et d’une gerbe de fleurs portant la mention “Genocide never again”. Pourque cela ne se reproduise plus jamais.
Solange Berger
Egréner le maïs, une tâche répétitive et douloureuse pour les pouces….
SOLANG
EBE
RGER
Les mains dans le fumier ? Même pas peur !
SOLANG
EBE
RGER
“Les bénéficiairesde nos
programmesdoivent êtrevolontaires.
Nous ne voulonspas les forcer”
Cyprien RukemanganiziCoordinateur
pour Caritas Rwanda
MOVEWITH AFRICA 2018
Construction d’une maison au Rwandahttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qsp/showtitle/1/viewnc/1
Ecole pour malvoyants et non voyantsà Rwamaganahttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qll/showtitle/1/viewnc/1
Une population correctement nourrie au Rwandahttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qu8/showtitle/1/viewnc/1
Vidéos
ECOLE EUROPÉENNE D’IXELLES AVEC CARITAS INTERNATIONAL
Une éducation à la nutritionLes enfants rwandais souffrentde malnutrition, non aiguëmais chronique. Avec desimpacts sur le long terme.
Des associations luttent contrece phénomène.
Maman de 3 enfants dont un petit demoins de 5 ans, Niyitegata vient aucentre de santé tous les mois. Si cettemère de famille consommait déjà deslégumes avant, elle ne savait pas vraiment quels étaient les meilleurs aliments pour ses enfants. Ni commentles préparer. “Les légumes, j’en faispousser moimême. Les enfants aimentbeaucoup. Ils grandissent bien”, nousrassuretelle. “De la viande nous enmangeons deux fois par mois.” Plus de300 enfants de moins de 5 ans sontsuivis dans ce centre du nord duRwanda. Ils y viennent notammentpour être pesés, un examen auquelles élèves de l’Ecole européenned’Ixelles ont pu participer. Les ma
mans y reçoivent également des formations, des conseils.
Le problème de la malnutrition nese voit pas vraiment au Rwanda. Lepays est vert, les avocats, mangues etbananes poussent partout, leschamps sont cultivés et les enfantsont l’air bien nourris. “Dans certainesrégions cependant, les gens ne mangentpas toujours à leur faim. Le nombre derepas et la qualité de ceuxci ne sont passuffisants à certaines périodes. En avrilet en octobre notamment, juste avantles récoltes quand les stocks sont vides”,note Cyprien Rukemanganizi, coordinateur des projets de Caritas dansla région de Nyagatare. Mais le plussouvent il ne s’agit pas de problèmede malnutrition aiguë. Plutôt de malnutrition chronique, dont les effetsse voient à plus long terme. Cettemalnutrition s’installe avec des répercussions importantes, notamment sur le développement du cerveau des enfants.
“C’est l’alimentation ellemême quiest en cause. Pas assez de légumes notamment. Les gens n’ont pas pris l’habitude d’en manger. Ils considéraient quec’était pour les plus pauvres qu’eux enpériode de disette… Concernant les plus
jeunes enfants, on note que les mèrespassent trop vite d’une alimentation ausein à une alimentation pour adulte. Ilspréparent le même repas pour tous, orchacun a des besoins spécifiques selonson âge”, poursuit Cyprien Rukemanganizi. La base de l’alimentationc’est la pâte de maïs et le riz avec desharicots rouges. “Ils mangent du manioc. C’est un tubercule source d’énergie mais pas de nutriment ou de vitamine. Ils ont l’impression de bien manger car ils ont le ventre plein. La viandeest rarement au menu. Le poisson encore moins.”
Pour lutter contre ce phénomène,l’un des grands principes est l’éducation. Apprendre aux Rwandais à cultiver leurs propres légumes et à lescuisiner. “Il faut bien utiliser la nourriture. Si l’on consomme mal, tous les efforts faits sur la partie agriculture peuvent être réduits à néant”, souligneCyprien Rukemanganizi. “L’idée estaussi de développer de nouvelles sources de revenus pour prendre en chargeles dépenses du ménage. Il s’agira parexemple de transformer les aliments, enfaisant des jus, des beignets,… pour lesvendre à un meilleur prix.”
Choux, carottes, amarantes – un lé
gume qui ressemble à nos épinards –,papayes,… font la fierté du jardin deClaudine, bénéficiaire de l’Aprojumap, le partenaire local d’Entraide etFraternité. Pour cultiver ces légumes,qui bénéficient aussi aux voisins, ellea suivi une formation auprès del’ONG qui peut fournir également lessemences, le matériel, un crédit,…Cette formation lui a permis également de lancer avec d’auters unecoopérative, qui cultive du maïs dansla région de Huye au sud du pays. “Audépart, Claudine n’avait rien. Maintenant, elle se débrouille toute seule”, explique Eugène Niyigena, responsablelocal d’Aprojumap, qui évoque aussile principe crédits rotatifs. Un exemple avec la “vache qui marche ou quivoyage”. Le principe : les villageois seprêtent la vache. Elle est insiminéeartificiellement et quand elle a unveau celui qui a la vache à ce momentlà garde le veau et passe la vache à quelqu’un d’autre. Parmi lesautres crédits : les lapins. “C’est unpeu leur portemonnaie”, expliqueEugène Niyigena. “Les lapins se reproduisent facilement. Quand les villageoisont besoin d’argent, ils en vendent un.”
Solange Berger
Les élèves de l’Ecole européenne d’Ixelles ont eu l’occasion de donner à manger aux plus petits. Avec plus ou moins de succès.
SOLANG
EBE
RGER
Tousles mêmes...Rencontre Pendant douzejours, Belges et Togolais ontappris une notion essentielle:le vivre-ensemble.
I l y a des moments dans la viequi marquent à jamais et nuldoute que les jeunes élèves du
Collège Don Bosco de WoluweSaintLambert n’oublieront pas desitôt leur arrivée et l’accueil réservé par les habitants d’Alowonou. Entre musiques, danses traditionnelles et larges sourires. “Celam’a marqué. C’était très touchant. Ilsnous ont tous souhaité la bienvenue.A Bruxelles, c’est moins ça”, témoigne Chayut Romjabok, 16 ans en3e transition informatique, assissur une marche à la fin d’une journée ensoleillée.
“Ca fait réfléchir”Pendant une semaine, les Bruxel
lois ont participé à la vie de ce villagesitué dans la région des plateaux duTogo. L’occasion de s’immerger dansla culture rurale africaine et d’êtreconfrontés aux facettes positives
comme aux difficultés auxquellesfont face les locaux. Un moment pourprendre aussi du recul sur leur vie enBelgique. “Je me plains pour un rien. Jeprends des douches de vingt minutesalors qu’ici je me lave avec un seau et jeme sens propre. Ca fait réfléchir”, assure Antoine Veri, 18 ans après quelques jours dans le village.
Faire comprendre la réalité des relations NordSud et notamment lesraisons de ces inégalités, c’est l’undes objectifs de l’asbl belge Asmae.“Le but, c’est qu’ils se demandent comment en tant que jeune, ils peuvents’engager, qu’estce qu‘ils peuvent fairepour créer un monde plus juste, plussolidaire”, argumente JeanThomasParidaens, formateur en éducation àla citoyenneté mondiale et solidaireau sein d’Asmae. Et ça a sembletilmarché chez Guillaume Pierson, 17ans, très à l’aise durant le séjour.“C’est sûr et certain, je vais refairequelque chose dans ce genre, m’impliquer dans le milieu associatif. C’étaitdéjà mon objectif, mais là ça me donneencore plus envie d’aider les milieuxdéfavorisés à Bruxelles ou ailleurs.”
Casser les clichésAsmae a aussi la volonté casser les
clichés des Belges sur la vie en Afri
que. L’inverse est vrai. Durant tout leséjour, les Bruxellois ont été accompagnés par l’asbl togolaise Alafia jeunes qui encourage ces derniers àmonter des projets. Un bon moyenpour les ados des deux pays de serencontrer et de se rendre comptequ’audelà de leur origine, de leurcouleur de peau ou de leur niveau devie, ils étaient quelque part un peutous les mêmes. “Ils sont eux aussi connectés sur les réseaux sociaux, ils vontboire un verre, ils sont cools, ils écoutentles mêmes tubes. Stromae, je savais qu’ilavait une renommée mondiale mais jene pensais pas que les Togolais le connaissait”, explique Antoine.
“Se découvrir”Après ces douze jours loin de chez
eux, Rémi, Gilles, Magalie, Anas,Thomas, Mickael, Brian, Lancelot et
tous les autres repartent avec uneexpérience atypique et des souvenirs gravés à vie. Impossible poureux d’oublier les battles de danseendiablés de leurs potes Agbessi etJeanPaul, les sourires d’Emile etd’Alphonse, la voix de Maureenmaîtresse du jeu des “Loupsgarous”et des bouteilles d’eau, le but magique de la tête de Moctar, la détermination de “Madame”, d’Elsa, de Rachel et d’Anissa ou encore la bonnehumeur du seul et unique : “CherryCoco”. Un voyage que résume parfaitement Jessica Flohimont, leurprofesseure. “Ils ont appris à se découvrir eux, sous un nouveau jour, àvoir d’autres choses, se confronter àd’autres cultures. La plus belle école,c’est la vie et on ne peut pas leur apporter ça en classe.”
Jacques Besnard
JEAN
-MAR
CBR
ASSEUR
MOVEWITH AFRICA 2018
INSTITUT DON BOSCOWOLUWE-SAINT-PIERRE AVEC ASMAE
Quand Don Bosco fait le “show” au TogoTogo L’école de Woluwe-Saint-Lambertétait invitée de la matinale de la TVT.
Avant de monter dans les minibus pour prendre ladirection de la Télévision Togolaise (TVT), en pleincœur du quartier administratif de Lomé, les élèvesde Don Bosco sont plutôt calmes. Normal, il est4 heures 45. Sur le plateau, Lady Aysha Jemima,l’animatrice star du Six8, “L’émission qui endommage votre ignorance”, trouve lesmots adaptéspour les motiver. Les20 minutes de gym matinale dispensées par un Américain bodybuildé font le reste. À 6 heures 30,après la pub, Chayut entame un“Triplé” enbiablé en direct à la télé:le cri de guerre du voyage appris auvillage. “Je savais que le réveil allaitse faire tout doucement et là ça commence à aller mieux”, ne peutqu’admettre l’animatrice.
La bière belge sauve les profsSur le plateau, deux chroni
queurs font leur entrée. Sir Johnson et Lady Judith.Le premier dispense un premier bulletin d’information consacré au secteur agricole, à la surexploitation des ressources et aux migrations. La secondepropose un jeu autour des pléonasmes. “Doitondire un ciel constellé d’étoiles ou un ciel constellé ?”.C’est un professeur qui tire son épingle du jeugrâce à une spécialité belge : la bière. “Je me souviensque Stella qui est une bière en Belgique, ça veut dire
étoile en latin. Je pense que constellé contient déjà lemot étoile”, affirme JeanMarc… Brasseur. Cela nes’invente pas.
Violences conjugualesUne autre chroniqueuse, Lady Gaga, commence
son intervention en tapant du poing sur la table àpropos d’un débat tenu durant l’émission de laveille. Elle conseille ainsi aux femmes de ne pasécouter leurs ami(e) s. qui leur conseillent parfoisde quitter le foyer. Elsa qui travaille pour l’ONGAlafia est très concernée par le sujet et tient d’em
blée à exprimer son désaccord.“Quand il s’agit des violences faitesaux femmes, c’est quasiment une obligation de quitter ce foyer”, tientelle àrappeler avant d’embrayer. “Dieu adit d’aimer sa femme donc quand tuaimes quelqu’un, tout ce qui lui faitmal, tu ne lui fais pas.”
“Trop la pression ”Le jeu de Lady Gaga “Guess my
age” qui consiste à deviner l’âged’un jeune homme présent sur leplateau, tombe à pic pour détendreun peu l’atmosphère et surtout per
mettre aux jeunes Belges et Togolais de passer pourla première fois de leur vie à la télé. Impressionnant. C’est le cas notamment pour Yassine qui neconnaît plus son propre âge (“J’ai 18, euh non 17ans”) ou de Moctar un peu tendu qui fait rire l’animatrice en donnant son âge au lieu de deviner celui de l’invité. “J’avais trop la pression avec les caméras”, avoueratil mort de rire en aparté. D’ordinaire très calme, Bruno au contraire se sent
pousser des ailes, chaudement acclamé il est vraipar tous ses collègues.
“Merci pour tout ça”Après un résumé du match JuventusReal Ma
drid et la retournée incroyable de Cristiano Ronaldo, suivi d’un reportage quasiment sans transition de France 2 sur la mort d’Hitler, il est tempspour Prisca, étudiante togolaise et Guillaume,élève de Don Bosco, de présenter Asmae et Alafiajeunes. Un super coup de projecteur sur les activités de l’ONG locale qui reçoit déjà des appels avantla fin du show. Un bon moyen aussi pour le Bruxellois de remercier l’ensemble des Togolais pour leuraccueil. “Vous êtes ouverts, vous êtes chaleureux etvous savez vraiment accueillir les étrangers. Mercipour tout ça.” What else ?
Jacques Besnard
Les profs et élèves de Don Bosco ainsi que les jeunes d’Alafia ont pu témoigner de leur rencontre interculturelle à la télé togolaise.
JEAN
-MAR
CBR
ASSEUR
“Vous êtes ouverts,vous êtes
chaleureux et voussavez vraiment
accueillirles étrangers.”
Guillaume remercie toutle Togo au nom de tousles élèves de Don Bosco
https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5msl/showtitle/1/viewnc/1
https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5msm/showtitle/1/viewnc/1
https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5m5k/showtitle/1/viewnc/1
https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5mlu/showtitle/1/viewnc/1
https://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/kq5mlv/showtitle/1/viewnc/1
Vidéos
48h chrono avecune Famille en or
I ls se sont enlacés comme de vieux amis qui se retrouvent. Ce 29 mars, ce n’était pourtant que lapremière fois qu’ils se découvraient en chair en
os. Après six mois d’échanges virtuels, les quatorzeélèves de 5e humanité de l’Institut SaintFamille deSchaerbeek rencontraient enfin leurs correspondants à Natitingou, petite bourgade située au norddu Bénin.
Professeurs et membres de l’ONG en sont restéspantois et émus, comme dépassés par cette osmosenaissant sous leurs yeux.
Malgré la grève qui frappait les écoles béninoisesdepuis le mois de novembre dernier, les élèves del’établissement s’étaient investis pour réserver unchaleureux accueil à leurs hôtes. Des messagesd’amour distillés à la craie sur les murs de la classe,
des discours empreints de remerciements et mêmequelques victuailles arrosées d’un breuvage local.Une fois passée cette séquence “émotion”, les kets del’ISF ont lancé leur première mission du séjour :concocter un menu à la belge, à savoir un stoempaux carottes suivi de crêpes agrémentées de pâte auspéculoos ou de sirop de Liège. Les hôtes se révélèrent conquis par le projet de nos jeunes ”Top Chefs”en herbe. “Ils ont trop kiffé”, souriait Imane dans lebus les ramenant à l’auberge.
Immersion de la tête...Au lendemain de ces moments de fraternité, les
trois membres de l’ONG Îles de Paix encadrant lesadolescents bruxellois et les quatre professeurs, ontinitié les jeunes aux principes fondateurs de la philosophie de l’organisme : selfhelp, essaimage ou encorerésilience. Avant de leur faire découvrir concrètement ces concepts sur des zones agricoles où les méthodes et techniques d’IDP sont développées. Direction le village de Matéri et plongée dans le maraîchage. Sur place, un conseiller locale guidait la troupeet vantait l’apport de l’ONG et son programme.
“Notre objectif, c’est de donner aux populations lesplus vulnérables les outils pour qu’elles puissent à accé
der à une sécurité alimentaire”, soulignait MagaliVerstraeten, responsable chez IDP. C’est par la diversification des cultures, la mise en place de pépinières, l’utilisation de composte (liquide et solide)ou d’une pompe à eau notamment que les paysanslocaux sont parvenus à favoriser le rendement decette parcelle.
... aux pieds !Pour certains élèves schaerbeekois, ce voyage s’as
similait à un véritable baptême en dehors de l’Europe qu’ils n’avaient jamais quittée jusqu’alors. Misà part le choc thermique à digérer, il leur a fallu s’acclimater également à des mœurs inconnues. D’oùquelques malaises par moments. “Lors de cette visite,j’avais l’impression qu’une délégation de blancs venaitsuperviser ce qu’ils avaient mis en place avec l’argentqu’on a récolté, ça m’a laissé un goût amer et désagréable”, se confiait l’un d’eux. Un instant de doute rapidement balayé par les explications posées de la responsable d’IDP et rapidement oublié au momentd’arriver dans un village de femmes cultivatrices deriz.
Rassemblées sous un vieil arbre, une vingtaine dedames accueille l’approche des minibus au rythme
Les élèves schaerbeekois ont reçu un accueil émouvant de la part de leurs correspondants béninois.
ISFBÉ
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Plongée dans le quotidien d’un village où sont regroupées des femmes cultivatrices de riz paddy.
MOVEWITH AFRICA 2018
Le voyage a débuté par des rencontresfortes en émotions pour les élèves del’Institut Sainte-Famille de Schaerbeek auBénin. Récit.
INSTITUT DE LA SAINTE-FAMILLE AVEC ILES DE PAIX
Plongée dans le quotidien d’un village où sont regroupées des femmes cultivatrices de riz paddy.
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Sur la route des esclavesEntre la fin du 15e siècle et la fin de l’esclavage au Brésil en 1888, plus d’un millionde personnes ont subi la traite négrière directement à partir du port d’Ouidah, l’undes centaines de lieux de départ forcé vers l’Amérique.
A Ouidah, le tourisme mémoriel se développedoucement au fil des années. “Tout est réglementépar l’Etat désormais”, expliquait Nadal, notreguide ce jourlà. “Cette initiative était nécessaireafin de procéder aux visites dans le respect etd’offrir un éclairage correct et vérifié”. Il est ainsipossible de parcourir les quatre derniers kilomètres de l’une de ces terrifiantes routes empruntées par les esclaves jusqu’aux bateaux qui lesemmenaient audelà de l’Océan Atlantique. Plusieurs étapes marquent ce trajet où une partie dela dizaine de millions d’Africains déportés surl’ensemble du continent ont transité.
Les six étapes de la route des esclaves d’Ouidah1) La Place Chacha également connue sous le
nom de la place de la « Vente aux enchères » où
les esclaves étaient notamment testés, marquésau fer et ensuite vendus.
2) L’arbre de l’oubli que les esclaves devaientcontourner plusieurs fois afin d’oublier leur viepassée.
3) La case Zomaï où 600 esclaves étaient enfermés parfois jusqu’à six mois dans des conditionsinfernales.
4) Le mémorial où se situait à l’époque unefosse dans laquelle étaient jetés les esclaves considérés comme trop faibles.
5) L’arbre du retour qui symbolise le retourspirituel des esclaves exportés.
6) La Porte du NonRetour où les esclaves embarquaient à bord des bateaux les convoyant jusqu’en Amérique.
Pierre Vangrootloon
Les élèves face à la “Porte de Non Retour”, ultime étape de la route des esclaves d’Ouidah.
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L’action d’Îles de Paix au Bénin50 villages soutenus
2000 familles bénéficiaires
30 membres de l’ONG actifs au Bénin
En chiffres
L’aventure continue pour l’ISFLe 6 mai dernier, c’était le vernissage d’uneexposition retraçant l’aventure de ces 14 élèves et 4professeurs de deux semaines de Cotonou à Ouidahen passant par Natitingou. Elèves et professeurs ontmis sur pieds une rétrospective émaillée de panneauxdidactiques explicitant les missions d’Îles de Paix auBénin. Après deux années de partenariat avec MoveWith Africa, l’Institut Sainte-Famille de Schaerbeekentend perpétuer ce projet d’ECMS (Éducation à laCitoyenneté Mondiale et Solidaire) en Afrique ens’appuyant sur de nouveaux financements.
d’un chant a cappella secondé de quelques fameuxpas de danse. D’ailleurs, les élèves se déhanchent rapidement avant que l’un d’entreeux ne se retrouvent carrément au centre du cercle, sous les applaudissements. Après cette réception agitée, ces femmes se sont livrées sur leur quotidien, entre récoltede riz paddy (Ndlr ; il s’agit de riz non transforméqui conserve son enveloppe), vannage et tamisageet ont emmené leurs invités au cœur de leur foyer.Etonnés par les conditions de vie de ces femmes, lesados auront surtout été marqués par ces sourires,cette amabilité et ce respect inconditionnel.
Deux premiers jours intenses d’un voyage bouleversant les menant jusqu’à Ouidah…
Pierre Vangrootloon
L’autre regardÂgée de 17 ans,Lyne Girimana a été profondémentsecouée par la route des esclavesd’Ouidah. Elle livre son ressenti surce moment déchirant et singulier dece périple avec Move With Africa.
Du rire aux larmesAprès nos formidables aventures aunord du Bénin, principalement àNatitingou, notre périple s’estponctué par un passage à Ouidah,une ville reconnue pour son lourdpassé. Nous avons parcouru unepartie du chemin qu’empruntaient lesesclaves africains il y a plusieurssiècles.Ce fut une visite très marquante. Ilsuffisait d’observer chacun de nosvisages, aussi bien les professeurs
que les élèves, pour se rendre compteà quel point cela nous touchait.A la fin de ce trajet, un immensemonument nommé « Porte Du NonRetour » nous a fait face. Tout estdans son nom. Quand on l’a franchi,une plage splendide, fracassée pard’énormes vagues, s’est dessinéesous nos yeux. Et l’on s’y estaventuré.S’en sont suivis des cris de joie, desrires, bref, un torrent d’euphorie.C’était assez déroutant de constater àquel point la joie avait pu nousgagner en sachant que sur ce mêmelieu, il y a tant d’années, descentaines de personnes se donnaientla mort pour ne pas rejoindre lecontinent américain.Ce moment restera comme l’un desplus inoubliables, et certainementcomme le plus poignant de monvoyage au Bénin.
La lumièreau bout des doigtsEn passant une semaine dans une écolepour malvoyants, les élèves de laProvidence ont découvert une autreréalité du Rwanda. Beaucoup de courage,de la volonté et de l’espoir.
C’ est incroyable. Les gens sourient tout le tempsdans ce pays. Quand on connaît les conditionsdans lesquelles ils vivent et le traumatisme du
génocide, c’est incroyable.” Cette joie de vivre queles jeunes Belges de l’Institut de la Providence ontconstatée est encore plus frappante au sein del’école pour malvoyants de Rwamagana, à l’est deKigali, où ils ont passé une semaine avec l’ONG Lumière du Monde. “Ils sont vraiment touchants car ilsvivent des choses pas faciles”, nous confie un desélèves. “Quand l’un deux nous a remerciés pour notreamour, cela m’a tellement émue”, ajoute une autre.
Dans cette école qui accueille 170 élèves, malvoyants et nonvoyants, les jeunes belges ont pupartager leur quotidien et nouer des contacts privilégiés. Et également découvrir leur volonté d’apprendre. Les matières enseignées sont les matièrestraditionnelles – les élèves réussissent bien auxexamens nationaux, nous assureton – dans deuxoptions : la littérature et les sciences humaines(histoire et géographie), avec les cours en anglaisdès le milieu des primaires.
“Je veux être journaliste plus tard”, déclare ce jeuneRwandais quand on lui demande les études qu’il aenvie de faire. “De nombreux élèves sont tentés par lejournalisme ou l’éducation”, explique Placide Kaberuka Uwiriyimana, préfet des études. “Les maths etles sciences sont beaucoup plus difficiles à enseigner
pour les nonvoyants. Il faut dessiner, or nous n’avonspas de machine spécifique pour cela. Ils ne peuventpas étudier certains chapitres, comme les vecteurs parexemple”, poursuit le préfet qui souligne l’entraideentre les élèves. “Les malvoyants peuvent aider lesnonvoyants à comprendre certains concepts. Depuistrois ans, nous avons aussi décidé de faire des classesinclusives. C’estàdire que nous accueillons des enfants voyants mais avec un handicap physique.Comme les autres, ils peuvent aussi apprendre lebraille.”
L’apprentissage du braille a lieu dès le plus jeuneâge. Les malvoyants bénéficient de lettres grandformat. Durant toute leur scolarité si leur vue leleur permet. Pour les plus petits nonvoyants, l’initiation au braille se fait sur des tablettes avec desclous. Chez les plus grands, c’est sur une machineque se poursuit la lecture braille. Une machine a àlaquelle ont été initiés les élèves belges. Avec beaucoup d’application d’ailleurs, ils ont passé en revueles différentes lettres de l’alphabet avant de pouvoir chacun écrire son prénom et des petits messages de son choix. : “Je vous aime papa et maman” “Jet’aime”, “Merci pour le cours de braille…”. Tous ontdécouvert avec plaisir les subtilités mis aussi lesdifficultés de cette écriture nouvelle pour eux…
Au programme des échanges avec l’école également : un atelier de peinture. Une activitéproposée à la demande du directeur le Père Jules Maurice. Une première pour la majorité desélèves, seuls certains ayant déjà fait un peu depeinture ou de dessin chez eux. Une activitépour le moins étonnante quand on connaît lehandicap de ces enfants.
Parmi les malvoyants, certains se sont révélésparticulièrement doués. Pour les nonvoyants,la découverte s’est révélée plus difficile. En effet comment faire dessiner à un enfant quelquechose qu’il ne voit pas et qu’il n’a peutêtremême jamais vu ? Certains jeunes belges ontdécidé de les guider dans leurs dessins en trempant leur doigt dans la peinture et en les guidant pour effectuer le dessin. Avec Egide, nonvoyant de naissance, ils ont opté pour uneautre technique : le laisser dessiner ce qu’ilconnaît et qu’il a envie de représenter – commeune croix, la porte de la classe ou encore larampe qui les guide le long des allées dans lejardin de l’établissement – ou lui faire sentiravec les doigts des objets du quotidien et qu’iltente de reproduire. Une belle découverte.
Solange Berger
Le braille est appris dès le plus jeune âge.
SOLANG
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“L’entraide estimportante entreles malvoyants etles nonvoyants”Placide KaberukaUwiriyimana
préfet des études de Gatagara
Atelier peinture : une première pour ces enfants malvoyants ou aveugles.
SOLANG
EBE
RGER
MOVEWITH AFRICA 2018
INSTITUT DE LA PROVIDENCE AVEC LUMIÈRE POUR LE MONDE
Une brique après l’autreLa construction de maisons enadobe n’a – presque – plus desecret pour les élèves deSaint-Quirin.
D es chants, des danses. Les villageois rwandais ne semblent jamais fatigués. Même en plein
travail – sans doute pour s’encourager – ils entament des chants traditionnels, parfois même composéspar la communauté locale. Sur cechantier de construction d’unemaison en adobe dans la région deHuye (ancien Butare) au sud dupays, les élèves de l’Institut SaintQuirin de Huy n’ont pas manqué derépondant. En entonnant : “LesChamps Elysées”, “Frère Jacques” etmême “SaintNicolas, patron des écoliers”, et “Douce nuit, sainte nuit” !Leur répertoire était large !
Et après avoir travaillé toute lamatinée, même en plein soleil, lesvillageois trouvent encore l’énergie.Toujours pour chanter, danser. Ac
compagnés par les jeunes Belges lesplus courageux… Et pour discouriraussi. Le discours est en effet unmoment important pour la vie de lacommunauté. “C’est un événementinoubliable pour nous ce qui s’estpassé aujourd’hui sur cette colline”, adéclaré le chef du village en évoquant la participation des jeunes auchantier de l’Aprojumap, le partenaire local de l’ONG Entraide et Fraternité. “Grâce à vous, je ne suis plusseul”, a remercié l’un des bénéficiaires. “Avant les gens cuisinaient et dormaient dans l’étable. Ce qui étaitmauvais à cause du charbon. Nous essayons qu’ils aient une maison etl’étable à côté”, explique EugèneNiyigena, responsable de l’Aprojumap. Présentations, remerciements,… les professeurs de SaintQurin et les responsables belgesd’Entraide et Fraternité n’ont pasdérogé à la tradition en insistant surle courage des Rwandais, leur accueil et leur admiration pourl’image d’entraide qu’ils offraient.
En effet, dans ce pays, le travail encommunauté est essentiel. Toutes
les personnes bénéficiaires aidentau projet. “Certaines personnesétaient isolées. L’idée est de regrouperces personnes pour leur permettred’être plus forts de retrouver de la dignité”, note Eugène Niyigena. “L’action a un impact autant matériel quepsychologique.”
L’Aprojumap choisir ses bénéficiaires parmi les plus pauvres. “Certains nous disent : “ne me prenez pas.Choisissez plutôt celuilà : il est encoreplus pauvre que moi””, raconte le responsable de l’ONG. Celleci donneaussi des formations, fournit lespremières semences et du bétailpour aller vers plus d’autonomie. “Al’époque, je n’avais pas de vache, ni dechèvre ou de lapin”, raconteClaudine, l’une des bénéficiaires,dont les élèves ont pu visiter la maison. “Aujourd’hui, je suis peine d’espoir pour ma famille”, précise cellequi est présidente de la coopérativelocale, propriétaire de terres où ellecultive du maïs et qui regroupe 21familles.
“Cette solidarité, je ne pense pasqu’on verrait cela chez nous”, cons
tate cet élève, content de participerà ce chantier, “preuve qu’il y a moyende construire sans polluer.” Les jeunes ont aussi pu se rendre comptedu travail physique que représentaient ces chantiers. “Quand noussommes allés chercher du bois pour leslinteaux, nous étions trois pour porterun tronc alors que le villageois étaitseul”, note un autre élève.
Encore très motivés pour unenouvelle activité, les élèves de SaintQuirin ont aussi demandé à travailler dans les rizières. “Le riz estune culture assez récente au Rwanda.Il a été apporté par les Chinois quisont nombreux sur les chantiers deconstruction, de routes notamment”,raconte Eugène Niyigena.“Aujourd’hui ce ne sont plus les Chinois qui cultivent le riz mais lesRwandais. C’est d’ailleurs l’un desproduits à la base de notre alimentation.”
C’est ainsi pliés en deux que lesjeunes se sont attelés à cette nouvelle tâche, de la boue jusqu’aux genoux. Toujours en se motivant avecdes chants.
Solange Berger
Pour la construction d’une maison, tout le village est solidaire.
SOLANG
EBE
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LE COLLÈGE SAINT-QUIRIN HUY AVEC ENTRAIDE ET FRATERNITÉ
Dansersous le manguierSénégal A Ndoumboudj, les élèves deJean Absil ont aidé à construire une fermepédagogique. Une rencontre intense.
Reportage Laurence Bertels
envoyée spéciale au Sénégal
E ntre les coups de truelle, l’arrosage des plantations, la baignade dans la mangrove, la découverte, en pirogue, de l’île aux oiseaux, les
danses sous le manguier, les amours naissantes oules adieux déchirants, quel souvenir choisir ?
La tête pleine d’images, le cœur lourd, l’envie,cependant, de rentrer au bercail et de retrouverun minimum de confort après quinze jours passésdans la communauté rurale de Toubacouta, au Sénégal, les jeunes élèves de l’Athénée royal JeanAbsil d’Etterbeek, arpentent, sous les bougainvillées, les rues de l’île de Gorée avec ses façades jaunes, ocres ou rose pâle et ses galeries d’arts enplein air. Avec une pensée aussi pour les esclavesdont ils viennent de visiter la maison, une autrepour leur jumeau sénégalais, laissé làbas, au village perdu de Ndoumboudj, dans la région de Fatick.
Ce soir, ils reprendront l’avion pour Bruxelles etécriront la dernière page de l’incroyable aventure
qu’ils viennent de vivre, de partager surtout, puisque le partage est l’un des maîtres mots de l’association belge Asmaé qui travaille avec un correspondant sur place, l’AJE (Action jeunesse, environnement).
Sur le chantierChaque matin, les jeunes travaillaient donc au
chantier sous des températures avoisinant les 35degrés en vue de construire une ferme pédagogique en plusieurs étapes. La ferme, une pièce deonze mètres sur huit, existe déjà, ainsi que le potager biologique et le puits. Les jeunes réunis s’attaquaient, pour leur part, à la construction d’undes deux dortoirs prévus . Une tel projet, avec seslégumes, son élevage de poulets, sa permacultureet sa vocation pédagogique devrait changer la viedu village, lui donner plus d’autonomie, lui permettre de rayonner aux alentours et encourager lanouvelle génération à rester au pays.
PartageLe but du voyage n’était cependant pas de prêter
main forte au chantier mais de rencontrer l’autrecommunauté, de vivre vingtquatre heures survingtquatre ensemble au point de partager lacouche puisque chaque élève belge dormait sousla même moustiquaire que son binôme sénégalais. D’où l’intensité des liens qui se sont créés.
Bien sûr, il y eut des coups de mou. Comme lorsqu’il fallut attendre qu’il soit vingttrois heures
pour se rendre à un mariage du peuple sérèremais l’expérience, une réelle immersion dans laculture du pays, valait l’attente.
L’invitation improvisée se devant d’être honoréeen tenue de circonstance, les jeunes filles sénégalaises, qui avaient plus d’une tenue dans leur sac,habillèrent leur nouvelle amie de pied en cap, endeux temps trois mouvements. Idem du côté desgarçons. Au Sénégal non plus, la sape n’est pas unvain mot.
Explosion de joieInoubliables également, les débats sous le man
guier où des sujets aussi délicats que la polygamie,l’homosexualité, les transgenres ou les menstruations furent abordés. Ou pas…
Ces moments d’échange se révélèrent d’unegrande richesse, une réelle ouverture vers la culture de l’autre où l’on ne cherchait pas à imposerson point de vue mais à apprivoiser la diversité.
On n’oubliera pas non plus l’explosion de joielorsque Arfan, le géant, remporta le combat delutte auquel il participa contre toute attente. Niles chants entonnés du matin au soir, dans le car,en pirogue, autour du feu pendant qu’imperturbables, d’aucuns s’essayaient à la belote… Ni surtout les millions d’étoiles qui brillèrent duranttout le séjour, dans les cieux comme dans les yeuxde cette jeunesse pleine de promesses.
UVoir aussi nos vidéos sur le site
Le voyage de Dakar à l’école de Ndoumboudj en transport en commun, déjà toute une aventure.
L.B
“Le Sénégal a changé ma visionde notre société. Ce qui m’a
frappé, c’est la bonne humeur,la facilité d’échanges qu’on ne
connaît pas en Belgique.”Hugo Schaelbroeck,
élève de l’Athénée royal Jean Absil, à Etterbeek.
MOVEWITH AFRICA 2018
L’ATHÉNÉE ROYAL JEAN ABSIL AVEC ASMAE
Interview de Anna Jacobs:Elève de l’Athénée Royal Jean Absilhttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qsp/showtitle/1/viewnc/1
Interview de Julian Vanderbeeck:Elève de l’Athénée Royal Jean Absilhttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qll/showtitle/1/viewnc/1
Interview de Aïssatou Diayté: correspondantesénégalaise du projet d’Asmaehttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qu8/showtitle/1/viewnc/1
Vidéos
Rien de tel qu’une baignade dans la mangrove pour se détendre et resserrer le liens.
L.B
Momo, le DJ de la radio communautairede SoucoutaVéritable vedette du canton, le jeunehomme ne vit que pour l’antenne. Dans larégion de Kaolack, tout le monde l’écoute.
Momo, ou plutôt DJ Momo, tout le canton le connaît. Journaliste, reporter, animateur, techniciende la radio communautaire de Soucouta, c’est lavedette de la région. Sur tous les fronts, plombier,volontaire, DJ, footballeur, basketteur, il avait participé en 2017 au chantier d’Asmaé et de l’AJE. Ilaurait aimé être du projet de Ndoumboudj cetteannée mais il y avait trop de bénévoles déjà. Alors,pour le revoir, il faut piquer une pointe dans sonfief, la radio communautaire de Soucouta. Normalement, les émissions reprennent à 18 heures maispour l’instant, et bien que le ventilateur tournetoute la journée, il fait tellement chaud qu’il fautattendre 19 heures pour que l’antenne soit opérationnelle. Rendezvous donc en fin d’aprèsmidi,au fond de la cour de sable, de coquillages et de palétuviers pour rejoindre l’imposante bâtisse.
Momo se fait attendre. Souleimane tient la boutique. Également journaliste, reporter, animateur, il
attend le maire de Toubakouta et ses acolytes pourl’enregistrement de l’émission santé. Les voici,ponctuels, en costume traditionnel, conscients del’importance des messages qu’ils vont transmettre.Quatre chaises en plastique sont disposées en cercle, Souleimane leur tend le micro . L’émission, enwolof, dialecte traditionnel, peut commencer.Momo, jean et débardeur, arrive, tout sourire.
Fondée en 2007 par son père, Moussa Mane,grâce à l’aide de l’Unesco, de la Suisse et des PaysBas, la radio communautaire vient de fêter sesonze ans. Onze années durant lesquelles elle a faitdu chemin, accru son audience, créé des émulesjusqu’en Gambie et réussi à toucher 162 800auditeurs. Elle émet dans un rayon de 75 kilomètres, sept jours sur sept à raison de six à sept heures par jour mais ne peut parler de politique. Lasanté, l’éducation, les religions, la pêche, la chasse,l’agriculture, le tourisme, l’artisanat, le sport, lereggae, et la lutte, bien sûr, sont autant de sujetsabordés. Interactive et essentielle pour resserrerles liens entre la communauté, elle diffuse aussi denombreuses annonces lorsqu’une chèvre s’estperdue, par exemple. Qu’un ancien vient de fermer les yeux. Ou que des jeunes Belges viennenttravailler au village…
L.B, au SénégalMomo, le DJ de la radio communautaire de Soucoutaet la vedette de toute la région de Kaolack.
L.B
Les Vidomégons du Bénin,une enfance bafouéeNul ne peut découvrir la ville de Cotonousans passer par un des plus grandmarchés à ciel ouvert de l’Afrique del’Ouest, le célèbre marché internationalDantokpa.
Vu du haut du pont sur le boulevard SaintMichel, le marché Dantokpa s’étend dans la villecomme une mer de taules grises luisant au
soleil. Supposé ne s’établir que dans un bâtimentdésigné à cet effet, le marché a pris ses quartierstout autour de celuici et s’étale aujourd’hui surune superficie d’environ 180 000 m2. Un véritablelabyrinthe pour ceux qui n’en connaissent pas lesrecoins, dans lequel on peut trouver, pêlemêle,fruits, légumes, viandes, poissons, bijoux, sacs,chaussures, animaux séchés pour les rituels vaudous, farines, vêtements etc. Parmi les personnesaffairées sur le marché, en train de préparer leurétal de poissons, ou de cirer des chaussures pourleurs futurs clients, se faufilent, entre les sacsd’osier remplis d’oignons, de petites silhouettesagiles et discrètes que l’on peine à remarquer. Cesont des enfants. Car plus de 400 enfants de tousâges vivent, travaillent et dorment dans l’immensité de ce marché.
Les Vidomégons et le marché de Dantokpa“Vidomégon” en langue Fon signifie littéralement
“Enfant placé”. Il est en effet très commun au Béninque des parents vivant à la campagne dans un village placent leurs enfants chez un oncle, une tante
ou un proche qui vit dans une grande ville afin deleur procurer une éducation adéquate. Depuis plusieurs années, cette pratique ancienne connaît degraves dérives. En effet, malheureusement, que lesparents les placent en ville pour favoriser leurs études ou qu’ils vendent en toute conscience leurforce de travail, ces enfants placés se retrouventbien souvent dans des familles qui finissent par lesutiliser comme maind’œuvre dans leur maison ouailleurs. Ils deviennent de véritables petits esclavesdociles et totalement démunis qui finissent trèssouvent par fuir cette famille d’accueil et par vivredans la rue. Dans le marché de Dantokpa, notamment, bien connu depuis quelques années commelieu de refuge pour bon nombre d’enfants car il représente un des plus grands demandeurs demaind’œuvre peu qualifiée. Les enfants y sont effectivement partout présents : comme colporteursd’immenses sacs d’oignons, équarisseurs de têtesde vaches ou, couverts de farine, comme employésdans les ateliers pour moudre le manioc. Mal vuspar les adultes du marché car réputés pour voler,ces jeunes vivent dans une pauvreté extrême etsont prêts à tout pour gagner quelques centimespour pouvoir tout simplement manger. Proposerleur aide pour porter des sacs, brûler des chaussures pour récupérer le fer qui est à l’intérieur (150CFA par kilo), récupérer des écouteurs pour le cuivre (250 CFA par kilo), recycler des cannettes oudes bouteilles, tout est bon pour ces jeunes enquête désespérée de quelques pièces.
Esclavage moderneFacilement exploitable par les trafiquants d’en
fants, la tradition d’envoyer ses enfants dans lesvilles pour étudier a créé cette situation sur les
marchés de Cotonou mais a également nourri letrafic d’enfants audelà des frontières. En effet, certains ont utilisé la force de travail des enfantscomme un capital personnel en les vendant ou leslouant pour une période donnée au Gabon, au Cameroun ou encore en Côte d’Ivoire. Dans ces pays,les Vidomégons étaient employés comme petitemaind’œuvre dans le commerce ou pour des travaux domestiques. Et comme si cela ne suffisaitpas, pendant longtemps le Nigéria a même traitéces enfants comme de vrais forçats, les obligeant àcasser des pierres dans des carrières pour obtenirleur repas quotidien. Grâce à la collaboration entreles polices béninoises et nigériennes, plusieurs réseaux ont pu être démantelés et beaucoup d’enfants ont pu être ramenés au Bénin. Mais les frontières restent relativement étanches et il est encoredifficile pour le gouvernement béninois de contrôler ces violations des droits de l’enfance.
La baraque Don Bosco et le Centre Maman MargueriteC’est justement pour protéger ces enfants que
Don Bosco a ouvert une baraque en taules elle aussisur le marché. Une petite baraque verte, décorée debanderoles de couleurs, dont les murs sont couverts de dessins d’enfants et de slogans contre l’esclavage. Depuis dix ans, Blaise travaille ici pour venir en aide aux jeunes du marché. Assistant socialde formation, il en fait le tour, tous les jours, pourrepérer les jeunes en situation de précarité. “Il fautd’abord créer un sentiment de confiance. Ces jeunesn’ont plus confiance en les adultes. Et c’est compréhensible”, nous ditil. Dix ans de travail qui portentleurs fruits car il est en effet impossible de parcourir cinq mètres dans le marché sans que deux outrois jeunes ne nous accostent sourire aux lèvres
Une femme portant son panier sur la têtedans le plus grand marché de l’Afrique del’Ouest. Un véritable labyrinthe pour lesnon initiés!OL
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MOVEWITH AFRICA 2018
“Il faut d’abord créerun sentiment de
confiance. Ces jeunesn’ont plus confianceen les adultes. Et c’est
compréhensible”Blaise
Educateur social pour Don Bosco
pour faire un bout de chemin avec nous et discuteravec Blaise. L’objectif est bel et bien de créer du lien,de créer de la confiance et de permettre à ces jeunes d’avoir un point de relais, un endroit où l’enfance a sa place et où une oreille est toujours prête àles écouter. “Ici ils peuvent venir le soir, quand ça devient vraiment dangereux”, nous explique Blaise.Cette baraque parmi les taules du marché est enréalité un centre de relais : les jeunes viennent discuter et découvrir les activités proposées par l’association. On y joue, on y danse et les jeunes, apeuréset souvent en refus total de l’autorité, font leurspremiers pas dans l’association. D’autres centres,tels que le foyer Maman Marguerite situé un peuplus loin du marché, proposent une réelle alternative pour éviter aux jeunes les dangers des nuitspassées sur le marché. Au foyer Maman Margueritetous les soirs, de 19h à 2h30 du matin, entre 80 et100 jeunes viennent y trouver refuge. Ici, les jeunesdisposent de douches, de sanitaires, de chambresavec nattes pour dormir mais aussi de deux fourspour se préparer à manger. Dans la nuit noire, lebrouhaha des jeunes s’intensifie tandis que desjeux de société sont mis à leur disposition jusqu’à22h et que l’éducateur social note les présences dechacun. Les outils technologiques sont parfois bienutiles pour aider ces éducateurs sociaux : ainsi ceuxqui font le tour du marché la nuit et ceux qui restent au foyer s’envoient des photos d’enfant parWhatsapp pour s’informer des présences ou desabsences. Les regards durs de la journée peu à peus’adoucissent, les dents serrées pendant le dur labeur se détendent et finalement, pour quelquesinstants au milieu de ces rires, de ces cris et de ceschants, les enfants reprennent leur allure d’enfant.
Constance Frère
En pleine discussion avec un jeune garçon dans une des baraques de Don Bosco du marché de Dantokpa.C’est un centre de premier accueil et d’enseignement pour les jeunes de ce marché.
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Plus de 400 enfants de tous âges vivent, travaillent et dorment dans l’immensité du marché de Dantokpa.
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A près trois jours passés dans le centre Magonede l’ONG VIA Don Bosco, le team DClik s’enva en minibus sous la chaleur humide du Bé
nin découvrir le foyer Cachi à PortoNovo. Ballottés sur les routes en terre rouge de la ville, les bosses les plus grosses n’empêchent néanmoins pasles jeunes de continuer à jouer au Loup Garou aufond du bus. Rapidement, nous voila arrivés aucentre Cachi, accueillis par Hugues et son grandsourire. “Aujourd’hui c’est vous les patrons du centre”, nous dit Sénadé, l’assistant social de VIA DonBosco, qui est aussi notre guide, notre ami et notresource intarissable d’informations sur le Bénin.
Rencontres au Centre CachiPassée la porte du centre, nous arrivons dans une
petite cour en béton avec, sur la droite, un premierédifice vert où l’on aperçoit déjà le fameux portraitde Don Bosco, protecteur de la jeunesse nous expliquent les Salésiens, membres de la congrégation de Don Bosco, entourés d’enfants béninois.Plus loin, une dizaine de jeunes garçons nous attendent patiemment avec leur éducateur, debouten demicercle. À peine arrivés auprès d’eux, lesvoici qui entonnent une chanson de bienvenue enfrappant dans leurs mains, encore légèrement intimidés par nos minois luisant de chaleur et intrigués. On commence par un tour des prénoms, quise fait lui aussi en musique. Entre Wijdane etDieudonné, les différences culturelles émergent etla bonne prononciation n’est pas toujours au rendezvous ! Mais peu importe, nous voilà déjà tousmélangés, assis sur des bancs pour écouter Huguesnous raconter l’histoire du lieu.
Jeux d’enfantsMove With Africa La team D-clik
Abandons ou départs précipités des mineursLe centre Cachi a été créé en 1995 et Hugues lui
même était déjà présent pour s’en occuper. La plupart des enfants présents dans ce centre viennentdes commissariats de Cotonou ou de PortoNovo.Recueillis par la brigade jeunesse de la police, cesjeunes sont ensuite placés dans les centres DonBosco par le CPS (Centre de promotion sociale)béninois. Les trois agents – commissariats, CPAS etcentres Don Bosco – agissent donc à l’unissonpour venir en aide à ces jeunes, pour comprendreleur histoire et pour essayer à tout prix de renouerles liens avec leurs familles. En effet, pour chaqueenfant une enquête sociale est menée, parfois enpartenariat avec le CPS, quand peu d’informationssont connues, pour tenter de retrouver sa famille.Sénadé, notre guide personnel, travaille lui aussien tant qu’éducateur social. Il parcourt souvent lespetites routes béninoises sur sa moto à la recherche des familles des enfants. Multiples sont les raisons des départs de ces enfants : vu l’extrême pauvreté au Bénin, parfois certaines familles ne saventmême pas assurer les repas pour leurs enfants. Cepeut être aussi suite à la séparation des parents,lorsque les mères se retrouvent seules et sans ressources à éduquer leurs enfants. Parfois l’enfantpart rejoindre un culte vaudou, critiqué par la société béninoise, pour, finalement, se retrouver seulet exclu. Sans oublier le phénomène bien connuau Bénin qui est l’envoi des jeunes par leurs parents dans les grandes villes pour rejoindre un oncle ou une tante (voir article Vidomégon). Biensouvent ces pratiques mènent à l’exploitation del’enfant par ces familles ou, pire encore, la ventede ses services comme véritable petit esclave. Lesenfants n’ont pas d’autre choix que de fuir et seretrouvent à la rue. C’est donc tout un travail social en profondeur qui est mené par le centre et sesdifférentes composantes pour leur venir en aide :
assistants sociaux, psychologues, éducateurs, etc.pour rétablir les liens familiaux dissouts. Les retours à la maison ne se font pas toujours sans résistances. Il faut parfois des mois de médiation parentale ainsi qu’un suivi approfondi et régulierpour que ces enfants reprennent leur place dansleur famille. Ce suivi est ponctué de coups de fil dela part des éducateurs ou de relais via différentesantennes du CPAS dans les villages. L’idée est bienévidemment de sensibiliser les parents et la communauté à ces nombreux cas de départ ou d’abandon des enfants.
Apprendre l’insoucianceAprès ce discours lourd en émotions, Tristan
prend les choses en main et nous propose un jeupour apprendre les prénoms. Scout dans l’âme, ilne lui faut pas longtemps pour capter l’attentionde tout le monde et les faire former un grand cercle main dans la main. Ce matin, on jouera à PAN.“Quand je dis un nom, cette personne s’abaisse et lesdeux personnes à ses côtés doivent se tirer dessus. Leplus rapide gagne et l’autre doit sortir du cercle”.S’ensuivent fous rires, exclamations et souriresentre les jeunes de plus en plus excités malgré lachaleur qui ne fait qu’augmenter au fil des heures.Et les jeux s’enchaînent : entre le jeu du mouchoir,Jacadit et 1,2,3 Piano, on ne sait plus où donner dela tête. Les éducateurs béninois nous observent interloqués ou totalement écroulés de rire, surtoutlorsqu’il s’agit d’observer les enfants jouer à 1,2,3piano. “Tu as bougé, tu retournes sur la ligne du départ”, hurle Chaimaa. Tout est mis en place pourdéconcentrer ces statues humaines figées mais légèrement tremblotantes. MarieJo, Pedro etChaimaa sont rapidement rejoints par les éducateurs béninois qui eux aussi s’amusent à défilerparmi ces petits corps rigides pour réussir à enfaire bouger un. Entre reniflements de sangliers,regards perçant et grimaces en tous genres, diverses sont les techniques pour faire pouffer de rireles enfants qui finissent dans les bras de jeunesBelges en direction de la case départ. En observantces scènes, on ne peut que constater le rôle fondamental du jeu dans la prise en charge d’enfantsdes rues. Le jeu crée de la solidarité et de la confiance et il suscite un sentiment d’intimité entreles êtres. Il permet à des jeunes, qui n’ont pas puvivre pleinement leur enfance, de retrouver desmoments d’innocence et de joie.
Constance Frère
CONS
TANC
EFR
ÈRE
Les élèves de l’InstitutSaint-Vincent de Paul enplein milieu d’un 1,2,3 Pianoavec les jeunes du centreCachi. Gare à celui quibougera !
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L’INSTITUT SAINT-VINCENT DE PA UL AVEC VIA DON BOSCO
Move With Africa L’Athénéede Ganshoren à Bopa
Après trois jours passés avec l’Institut SaintVincent de Paul, lesélèves de l’athénée Royal de
Ganshoren retournent chez “eux”,dans une des petites bâtisses du jolivillage de Bopa. Après le bruit de laville de PortoNovo ou l’agitation deCotonou, à Bopa, au bord du fleuveAhamé, la vie coule doucement et paisiblement dans les petites ruelles enterre rouge où les coqs et les poules sebaladent en toute tranquillité.
Retour à la maison“Bienvenue chez nous Constance”, me
dit Mehdi en passant le portail quidonne sur une petite cour en terre oùse dressent un beau manguier et quelques grands palmiers. Les retrouvailles avec Desnos, l’éducateur d’Africapsud qui accompagne les élèvestous les jours sur place, sont chaleureuses et pleines de tendresse. “Tunous as manqué Desnos” lui disent lesélèves tour à tour. À peine rentrés, lesjeunes réclament leurs correspondants béninois. “On ne leur donneraitpas rendezvous ce soir pour un verre ?”,
propose leur professeure, Marie. Bienévidemment ! En quelques minutes lerendezvous est conclu et Desnos prévient chaque correspondant qu’il estle bienvenu ce soir au bord du fleuvepour des retrouvailles arrosées. Lesélèves n’ont pas tardé à retrouver leursmarques. Ils semblent déjà en totaleharmonie avec le lieu qu’ils qualifientde “maison”, et entament en riant unbadminton improvisé et sans filet avecDesnos.
Bopa, village de rencontresUn des principaux axes de travail du
projet d’Africapsud, en collaborationavec le centre Carrefour Jeunesse àComé, est la rencontre interculturelle.Pour favoriser les échanges culturels,des jeunes Belges, et,réciproquement,des jeunes Béninois, sont envoyés enBénin ou en Belgique. Pendant environ deux semaines, ces jeunes Belgeset Béninois du même âge partagent etvivent ensemble plusieurs activités. Lesystème, assez fluide, leur permet dese retrouver quand bon leur semble,en dehors des activités organiséespour discuter avec leurs correspondants ou, tout simplement, se baladerà deux. Le programme est coconstruitentre jeunes et professeurs. “C’est vousqui construisez le programme, si vous
avez envie de quelque chose, vous n’hésitez pas à nous le dire” explique Pierre,responsable éducation d’Africapsud.C’est depuis peu que le village de Bopaaccueille ces rencontres interculturelles qui n’auraient pu y avoir lieu sansl’aide du fameux Ambroise, unhomme d’une finesse et d’une gentillesse rares, qui met à dispositionune de ses propriétés pour hébergerles jeunes Belges. Bientôt les élèvespasseront une première journée avecune personne exerçant un métier spécifique qu’ils accompagneront dansses tâches quotidiennes. Ainsi, en harmonie avec les désirs de chacun, lesjeunes passent des moments privilégiés les uns avec les autres. Ils découvrent petit à petit une autre culture,d’autres mœurs, d’autres pratiques etélargissent tout simplement leur univers de pensées.
La pêche traditionnelleAprès un petit verre pris la veille au
soir sur le fleuve Ahémé, dans un lieumagique, en compagnie de Prince, leplus jeune de la bande qui rappe plusvite que son ombre, Desnos et tous lesautres correspondants béninois se retrouvent à nouveau au bord du fleuvemais, cette fois, pour s’activer ! En effet, aujourd’hui Ambroise ainsi que
plusieurs pêcheurs veulent nous montrer une technique de pêche traditionnelle. La pêche dans le fleuve Ahéméétait très importante autrefois, maisaujourd’hui, à cause des barrages et dela pêche intensive, il reste bien troppeu de poissons dans le fleuve pourgagner suffisamment sa vie ou s’autosuffire. Les Belges comme leurs correspondants béninois, en contemplationdevant les filets blancs, n’ont pas vraiment l’air de comprendre commentprocéder. Pourtant la technique esttrès simple à comprendre. Les filetspossèdent tous une corde blanchequ’il faut enrouler méticuleusementautour de son poignet. Il suffit ensuitede lancer les filets dans l’eau en les déployant le plus largement possible. Aubout de ces filets sont accrochés de petits poids en plomb qui les aident àcouler et à se refermer sur leurs proies.Simple à comprendre ? Oui. Facile àappliquer ? Non. Il faut non seulementavoir un bon lancer et bien comprendre le geste, mais aussi et surtout l’envoyer sur des poissons. S’ensuiventmultiples essais pour les élèves et leurscorrespondants, pieds nus dans lefleuve au milieu d’enfants qui accourent peu à peu pour se baigner en cettechaleur de fin de journée.
Constance Frère
Fiona et Manon de l’athénée Royal de Ganshoren main dans la main avec leurs correspondantes béninoises à Bopa. Beaucoup de complicité et de tendresse au rendez-vous!
CONS
TANC
EFR
ÈRE
L’ATHÉNÉE ROYAL DE GANSHOREN AVEC AFRICAPSUD
Alter-ego béninois et belges
Comé, lieu d’introspectionet d’échanges
Carrefour Jeunesse, dont le siège se situedans la ville de Comé dans le Sud-Ouestdu Bénin, est un centre parascolaire crééen 2011 et devenu ONG agréée par legouvernement béninois en novembre2013.
R encontre avec Sylvestre Dossa, CoordinateurBéninois du projet Cap Solidarité mené encollaboration avec l’ASBL belge Amarrage
ainsi que le Directeur exécutif du projet CarrefourJeunesse, en collaboration avec l’ASBL belge Africapsud. Il nous parle de ces projets tisseurs de lienset des actions développées sur le terrain, au Béninet en Belgique.
Africapsud et Carrefour JeunesseCarrefour Jeunesse, c’est le projet qui concerne
directement Move With Africa. Après avoir mis enplace Cap Solidarité,un programme qui envoie des
jeunes Belges en perte de repères au Bénin pourleur permettre de prendre du recul, Sylvestre a euenvie de créer une structure dédiée aux Béninoiseuxmêmes. Carrefour jeunesse est ainsi né, encollaboration avec Africapsud, avec l’intention dedévelopper la notion d’échange sous toutes ses formes. Un échange supposant une réciprocité, laquestion a été de savoir ce qu’il fallait faire pourque chacun y trouve son propre épanouissement.La réponse, ce fut la création du centre autour detrois axes d’attaque principaux : la mise en placed’activités parascolaires, le soutien aux initiativesdes jeunes et l’organisation de rencontres interculturelles. L’ASBL propose des cours de théâtre, dedanse, de couture, de sport ou autres. Mais aussidu soutien technique (matériel et conseils) pourdes jeunes qui viennent avec un projet précis etdes rencontres interculturelles avec plus de 9groupes par an qui viennent loger 15 jours surplace.
De la nouveauté pour 2018Aujourd’hui et de tous temps, les demandes et
les besoins des jeunes évoluent. Sylvestre a voulus’accorder à ceuxci. En 2016, il constate que, de
Le soir, entre les balançoires et les petits buissons, les jeunes jouent tranquillement avec des ballons dans la cour de Carrefour Jeunesse.
OLIVIERPA
PEGN
IES/CO
LLEC
TIFHU
MA
MOVEWITH AFRICA 2018
Sylvestre DossaDirecteur exécutif du projetCarrefour Jeunesse, en
collaboration avec l’ASBL belgeAfricapsud.
D.R.
Lieu d’échanges, d’apprentissage et de jeux, à Carrefour Jeunesse, le soir sur les balançoires, il fait bon vivre.OL
IVIERPA
PEGN
IES/CO
LLEC
TIFHU
MA
manière répétitive, les jeunes lui font part d’unréel problème d’écoute de la part de leurs aînés.Ces jeunes Béninois se retrouvent souvent face àune autorité qui ne les comprend pas et leur impose un mode de vie désuet. « Ils sont venus me direque ce qui les préoccupait, les adultes, eux, ils s’en foutaient » me dit Sylvestre. À l’écoute de cette demande, Sylvestre vient de mettre en place au seinde son ASBL un véritable service d’aide socioéducative à la jeunesse. Le centre possède notammentune section d’écoute de premier plan qui prêtel’oreille aux problèmes ou questionnements vécuspar les jeunes et leur propose si besoin une orientation vers d’autres instances lorsque le cas esttrop grave. Cette section procure aussi des informations sur les droits et les devoirs de chacun. Uneaide scolaire est également proposée qui comprend des cours d’alphabétisation mais aussi desformations ou des renforcements de cours avec devéritables professeurs mis à la disposition des jeunes.
La citoyenneté Mondiale et SolidaireDans l’esprit de MWA, l’ASBL travaille aussi sur la
citoyenneté mondiale et solidaire en proposant
des rencontres interculturelles, des projets sportifs, artistiques ou autres. À titre d’exemple, l’ASBLa mis en place des petites capsules sonores avec desjeunes de 10 à 12 ans au Bénin. Le concept ? Desjeunes choisissent un thème de société et analysent les débats et les problèmes que ce thème soulève. Puis se pose la question de savoir qui peut lesaider à avoir un impact sur ces problèmes ? Comment chacun peut y apporter des solutions ? Etquelles sont les instances en mesure d’y répondreplus largement ? Une capsule est alors réalisée quirelate tout le processus. L’initiative est reproduitedans 4 autres pays entre lesquels les capsules circulent : le Togo, le Bénin, la Belgique et Haïti. Unefaçon intelligente et réfléchie, selon Sylvestre, dedonner la place à la parole des jeunes. Les échanges interculturels, quant à eux, sont réguliers etsont toujours longuement préparés à l’avance parles jeunes Belges qui doivent monter un projetconcret qui soustend leur voyage. Cette année,c’est un groupe de rappeurs belges qui sont venusécrire des textes avec des rappeurs béninois et quiont produit un disque et des clipvidéos. Un beléchange créatif qui devrait en surprendre plusd’un !
Un échangesupposant
une réciprocité,la question a étéde savoir ce qu’ilfallait faire pourque chacuny trouveson propre
épanouissement.
Un Rwandais sur 4 toujourstraumatisé par le génocideLes adultes sont les plus concernés.Mais même ceux qui ne l’ont pas vécupeuvent être touchés.
C et événement tragique s’est déroulé il y aplus de 20 ans. En avril 1994. Une grandepartie de la population rwandaise ne l’a
pas vécu. Et pourtant… Selon une étude réaliséeen 2009, 26,1 % de la population adulte rwandaise souffrent de troubles de stress posttraumatique (TSPT, plus connus sous le nom dePTSD en anglais), contre 10 % en moyenne dansle monde. Ce sont des situations qu’on constatesouvent après un conflit armé, un attentat, unaccident grave,… “C’est un challenge importantpour le système de santé mentale. Il faut prendreun nombre important de patients en charge”, souligne Achour Ait Mohand, psychiatre et spécialiste de la santé mentale qui travaille depuis dixans au Rwanda pour la coopération belge (Enabel depuis 2018). Son champ d’action : la formation du personnel (infirmiers et médecins)et le soutien à la politique de décentralisationdes soins vers le milieu rural.
Après le génocide, tout le système de santéétait anéanti. Depuis le pays a repris les chosesen main. Il y a dix ans, il y avait un seul psychiatre pour tout le pays. Aujourd’hui ils sont 10; et10 autres sont en formation. Outre deux centres à Kigali – Ndera et le département de santé
mentale du CHU –, il existe des centres de santémentale dans tous les hôpitaux de district. Desanimateurs de santé sont aussi présents, quifont de la sensibilisation, aident les familles às’orienter et à lutter contre le regard des autres.“En Afrique, la maladie mentale est stigmatisée.Avant 1972 et l’inauguration du premier hôpitaldédié à la psychiatrie Ndera, les malades les plusdangereux étaient en prison”, raconte Achour AitMohand.
Les cas de TSPT concernent des personnes quiont été confrontées à sa mort imminente ou àcelle d’un être cher. “La souffrance ressentie, surtout quand il y a une agression physique, commeun viol, est immense. Le fait de vivre près de sonboureau ou de sa famille, comme c’est le cas auRwanda – même si certains génocidaires sont encore en prison –, rend les choses encore plus difficiles. Les troubles liés au génocide peuvent apparaître dans les semaines qui suivent celuici, ou mêmeles mois ou les années. Les événements reviennentsous forme de flashback qui font revivre la souffrance. Et celleci peut être toujours aussi intense”,souligne le psychiatre d’Enabel. “Certains arrivent à en parler. Cela les soulage mais il restequand même des traces. D’autres n’arrivent pas.La violence n’est pas simple surtout quand elle estaussi massive. Ce qui est terrible dans le génocide,c’est le désir d’anéantir l’autre, de le déshumaniser.Le traumatisme touche aussi les enfants qui sontdevenus orphelins. Trop tôt, ils sont passés à l’âgeadulte, responsable de leurs frères et sœurs parfois.”
“Il n’est pas rare de voir des enfants dont la mèrea été confrontée au génocide pendant sa grossesseavoir aussi des troubles”, note Paul Kanyadekwe,psychiatre responsable du service psychiatrique au sein du CHU de Kigali. “Il s’agit d’un phénomène épigénétique. Tout ce qui entoure la personne confrontée au traumatisme peut entraînerune modification de gênes. C’est influencé par l’environnement. C’est un phénomène qui n’est exploré que depuis récemment. On voit cela avec lesJuifs aussi. Il y a une transmission transgénérationnelle.”
Les commémorations sont toujours un moment fort. “Il est difficile d’ignorer le génocide.Partout des stèles ont été érigées. Personnellementje pense que ce devoir de mémoire est important.Sinon, on risque un déni de ce qui s’est passé. Etcela c’est le plus dur qui puisse arriver aux victimes. Il est important que les choses soient dites etde les enseigner aux plus jeunes”, estime AchourAit Mohand, qui reconnaît que la période descommémorations est aussi un moment difficile.“Les victimes sont souvent plus affectées en avril. Ilfaut aider les gens à se reconstruire, à se projeterdans l’avenir.”
L’évolution est positive. “Nous n’avons plusautant de crises traumatiques qu’il y a vingt ans”,souligne Paul Kanyadekwe. “Il existe de nombreux facteurs protecteurs : on a facilité les soins,le logement et l’intégration de la population. Lesgens ont confiance en l’avenir car ils se sententprotégés.”
Solange Berger
Un mémorial avec 10 stèles représentant les 10 parasbelges assassinés le 7 avril 1994 a été érigé à côté dulieu où ils ont péri.
SOLANG
EBE
RGER
“Ce qui est terrible dansle génocide, c’est le désir
d’anéantir l’autre,de le déshumaniser.”
Achour Ait MohandPsychiatre, Enabel
Les élèves de l’Ecole européenne d’Ixelles ont déposé une corbeille de fleurs et puis chacun une rose sur unetombe commune au Mémorial du Génocide à Kigali.
SOLANG
EBE
RGER
MOVEWITH AFRICA 2018
De Theux à Abomey, on a la main verteMove With Africa Pendant plusieurs jours,les élèves du Collège Saint-Roch de Theuxont donné de leur personne du côtéd’Abomey au Bénin.
Doux euphémisme que d’affirmer que la quinzaine de jeunes élèves de 5e humanité de la bourgade liégeoise ont mis la main à la pâte durant
cette aventure Move With Africa à travers le Bénin.Après avoir pris leurs quartiers du côté d’Abomey,
la capitale historique du pays, les adolescents sesont livrés à divers travaux manuels et ateliers auxquatre coins de la ville, le tout à un rythme soutenu.Au programme : des activités de maraîchage maisaussi de l’animation auprès de jeunes béninois.
Sur les potagers en friche, les petites phalanges sesont affolées pendant plusieurs jours sous un soleilmordant et des températures flirtant parfois avecles 40 degrés. “C’est vrai qu’entre 12 et 15h, il faitvraiment trop chaud pour travailler, d’autant qu’ils’agit de tâches très physiques que nous ne sommespas habitués à réaliser”, expliquait Camille.
Du côté des professeurs, on s’est égalementfrotté à l’exercice avec enthousiasme et dans labonne humeur. “A travers des activités concrètes, lesliens entre Belges et Béninois se tissent plus intensément. Le fait de participer ensemble à un projet commun accélère l’immersion et balaye les appréhensions”, analysait de son côté MarieStassen, professeure à SaintRoch.
Encadré par l’ONG DBA (DéfiBelgique Afrique), le groupe scolaire a profité d’un programme axésur des initiatives locales et des actions concrètes développées parl’association.”Ce qui nous animedans ce projet, c’est la véritable prisede conscience de ces jeunes générations du royaume du quotidien de lasociété civile béninois Et pour renforcer leur expérience, il nous apparaîtessentiel de les plonger dans la réalitélocale pour en appréhender les complexités. Cela permet aussi d’acérer leur regard critique sur notre monde en transition et de renforcerleur capacité à s’engager de façon responsable et active”, analysait Bénédicte Raskin, détachée pédagogique DBA.
Parallèlement à ce programme de labeurs, lesadolescents ont également été initiés aux techniques agricoles comme celle du riz. Grâce au partenaire locaux de l’ONG Aldipe avec laquelle collabore DBA, la sympathique bande de Theux accompagnée de leurs correspondants ont pu découvrir
le processus de la culture rizicolemis en place à Allahé, en plein cœurde la campagne béninoise.
“C’était vraiment intéressant decomprendre de manière détaillée lesdifférents étapes du séchage au triageen passant par le triage. D’autant quenotre école a participé au financement de ce projet Carême (SahelVert)”, souriait Louise.
A l’issue de ces journées copieusement garnies, de nombreux invitésvenaient rendre visite aux jeunes àleur logement, comme ce prêtrevaudou avec lequel un passionnant
échange de questionsréponses fut dispensé. Jusqu’au dernier jour, cette expérience se révéla intense et drôlement chargée. Et ils ne sont pas prèsde l’oublier...
Pierre Vangrootloon
“il nous apparaîtessentiel de les
plonger dans laréalité locale pouren appréhender les
complexités”Bénédicte Raskin,
détachée pédagogiqueDBA.
Avec enthousiasme et en chantant pour se donner du courage, les jeunes se sont attelés à cultiver des parcelles maraîchères.
P.VG
L.
L’INSTITUT SAINT-ROCH THEUX AVEC DBA
Du théâtre sur le sablepour les enfants des ruesSénégal Trop d’enfants sont exploités etbattus par les marabouts. D’autres n’ontpas accès à l’école. Avec son associationDjarama, la comédienne Patricia Gomisveut les aider. Par l’art, l’éducation, laconviction et l’engagement. Une élégancede coeur et d’esprit.
T rop d’enfants sont exploités et battus par lesmarabouts. D’autres n’ont pas accès à l’école.Avec son association Djarama, la comédienne
Patricia Gomis veut les aider. Par l’art, l’éducation,la conviction et l’engagement. Une élégance decoeur et d’esprit.
D’un côté la mer, les pirogues colorées du Sénégal,celles qui arrivent en Espagne. De l’autre, près del’école délabrée des arts et métiers, une scène improvisée sur le sable. Entre les deux, environ deuxcent cinquante enfants assis sur des chaises en plastique. Quelle direction vontils choisir ? Prendrontils le large? Avec au bout du voyage, au mieux, d’immenses désillusions, au pire, une fin presque certaine? Ou sèmeront ils de nouvelles graines au pays,comme ose l’espérer Patricia Gomis. Comédienne,cette femme engagée est surtout la fondatrice deDjarama, cette association humaniste qui œuvre auprofit des enfants défavorisés par des actions culturelles et éducatives, à Dakar et sur la côte Ouest duSénégal, au petit village côtier de Ndayane, entreautres, à cinquante kilomètres de la capitale. Djarama, comme «bonjour et merci», c’est à la fois, uneécole, un théâtre jeune public unique au Sénégal,un festival du théâtre pour les enfants des rues etun pole culturel. «On fait de l’éducation populaire.On a une école communautaire. Pour l’instant, iln’y a que deux classes. On avance petit à petit. L’anprochain, on créera une troisième classe. Il y a seulement quinze élèves. On veut leur donner à réfléchir, à entreprendre. On cherche à les intéresser àl’agriculture. Et aujourd’hui, il y a des gamins quifont pousser de l’ail chez eux et cela, c’est formidable. Car plus personne ne cultive de nos jours » nousdit P.Gomis. Bonjour et merci, donc, avec tout cequi s’est passé entre temps.. Engagée, convaincueet révoltée par la situation de tous ces petits, obligésde mendier pour les marabouts, Patricia Gomismène tambour battant son festival. Et l’affaireprend de plus en plus d’ampleur.
Des brosses à dents dans les valises d’artistesCréé en 2013, l’événement, soutenu par l’Institut
français, le festival international, dure une semaineentière, entre spectacles, soins buccodentaires,ateliers et course d’ânes. Les festivités ont commencé par une déambulation dans la rue d’artistes,de marionnettes géantes, de percussions brésiliennes, de jongleurs, d’acrobates, histoire d’attirer l’attention de la population. Il se déroule à Dakar etsur la plage de Ndayane. A l’heure ou nous l’appelons pour fixer un rendezvous, Patricia Gomis estoccupée au dispensaire de santé où deux cent dixenfants se sont fait soigner, ou arracher, des dents,
gratuitement, grâce à l’association “Présence médicale”. Car le thème du festival qui se tenait en avrilcette année, est le “droit à la santé pour tous”. Tousles artistes ont d’ailleurs apporté des brosses àdents et de la pâte dentaire dans leurs valises. Uneaction ciblée, efficace et pertinente accompagnechaque édition de Djaram’Art. En 2016, elle senommait “Xalé xalé la” (”Un enfant est un enfant”)et voulait défendre les enfants des rues.
Un sujet tabouUn combat qui tient à cœur à la comédienne, ef
frayée par la situation, de plus en plus grave, selonelle, au Sénégal. “C’est scandaleux, ce qui se passeici et personne n’en parle. Le sujet est complètement tabou mais ces enfants, confiés à l’école coranique par leurs parents, sont exploités par les marabouts qui les envoient mendier et qui les battentau retour s’ils ne ramènent pas assez d’argent. Ilssont là tout le temps. Il y en a tellement qu’on ne lesvoit même plus. On en recense 150 000 dans tout lepays. Certains sont violés aussi et l’autre jour, on ena retrouvés brûlés. Le marabout avait quitté la maison et les avait enfermés. Ils se sont endormis enlaissant la bougie allumée. Il y a de plus en plus derapts d’enfants également. Il suffit de lire la pressesénégalaise.Personne n’en parle, c’est une mafia quirapporte des millions. Chaque gamin remporte500 francs par jour. Les rapts d’enfants, c’est pourdes sacrifices humains, carrément. L’enfant est untrésor.” nous ditelle la rage au ventre. «La multiplication récente d’enlèvements et de disparitionsmystérieuses d’enfants au Sénégal ont suscitébeaucoup de tollé au sein de la population et ontfait régner la terreur et l’émoi dans les foyers. Cephénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur a
Une des “Femmes de Ndayane” en costume pour le spectacle de danses et chants traditionnels lébous.
Un jongleur et acrobate du spectacle “Wontanara”de la compagnie Notre Monde de Guinée Conakry
L.B
L.B
MOVEWITH AFRICA 2018
fini par installer un climat de psychose dans la société sénégalaise dans sa globalité. » écrit notamment, dans Dakaractu, le pédopsychologue BilalSougou évoquant aussi le trafic d’organes.
Jonglages et acrobatiesQuel badaud, quel touriste pourrait y songer en
voyant ces têtes brunes et dents blanches rire auxéclats à la vision des acroportés des comédiens deGuinée Conakry de la Cie Notre Monde et deSuisse, de la Cie Digestif, qui viennent de créer ensemble un spectacle, “Wontanara” après s’être rencontrés ici à Djamara, voici deux ans. Ils sont cinqsur scène, trois hommes guinéens et deux femmessuisses, allient le jeu clownesque, les acrobaties, lejonglage et les ensembles chorégraphiés avec, enprime, un petit tour des standards de la danse classique, hip hop, rock and roll ou autre. Les artistescréent une tour humaine, miment l’ oiseau, créentl’enchantement et prennent un certain nombre derisques. Une fillette d’une dizaine d’années, boudinée dans sa robe turquoise ajourée fait des grandsgestes à son petit frère qui fait le clown de l’autrecôté de la piste. Elle l’appelle et le tient sagementsur ses genoux avant d’éclater de rire à nouveau. Visuel, corporel et sans parole, ce spectacle raconte larencontre, l’humour, le jeu et les rangs grossissentdans l’assemblée, les rires fusent de plus en plus. Onentend le vent souffler, le ressac de plus en pluspuissant de l’Atlantique et les notes de clarinettedont joue le musicien en live. Une belle tranche desourire communicatif. Le pari est gagné et lorsqu’on demande à la Suissesse Vanessa ce que représente pour elle le fait de jouer en plein air, ici, enAfrique, elle nous dit toute sa réjouissance. “Nousn’avons jamais joué devant autant de personnes.
Comme c’est la deuxième fois que nous venons, jesuis moins surprise, c’est vrai. Je me souviens, il y adeux ans, on travaillait sur le clown avec des costumes à paillettes et je me demandais ce que cela allait donner ici. Finalement, cela a bien fonctionné.Normalement, à la fin du spectacle, on brandit unetapette à mouches mais les enfants n’ont pas compris que c’était le final et nous suivaient tous ennous imitant. Contrairement aux Européens, sagement assis, en silence, dans la salle, les petits africains ne connaissent pas les codes du théâtre et réagissent de manière très spontanée. C’est vraimenttrès enrichissant pour nous d’être là.” nous dit lacomédienne qui s’apprête à partir pour Dakar, oùse tient également une partie du festival. Elle yjouera une version en salle de son spectacle , à l’Institut français, cette oasis de paix au cœur de la villetonitruante.
Les Belges à l’honneurJuste avant, c’est une comédienne française de la
compagnie “Juste après” qui réalisa un très beausolo de danse, «Hybrides» avec une poupée mannequin, une marionnette à taille humaine, son double, son ombre, son sosie, sa sœur. Une belle complicité et une grande solitude émanaient de ce moment d’art sur une scène improvisée, quelquestapis poussiéreux sur lesquels roulent la comédienne et sa poupée. En 2019, le théâtre jeune public belge sera à l’honneur au Sénégal. Le nom dePatricia Gomis n’est d’ailleurs pas inconnu cheznous. Elle était en effet présente aux Rencontresthéâtre jeune public de Huy en 2003 lors d’une réunion internationale de l’Assitej, (Association internationale du théâtre pour l’enfance et la jeunesse),organisée par l’éditeur Émile Lansman, en vue de
créer des liens entre les artistes des différents pays.Ils étaient une dizaine en tout, de France, d’Afrique,du Canada, d’Italie et chacun se souvient des larmes de crocodile que versa Patricia lorsqu’elle dutquitter la petite ville mosane. Esclave en FranceCette rencontre a mené à deux créations, “Avanti”(2005), avec Orange Sanguine et La Casquette, etquelques années plus tard, “Moi, monsieur Moi”(2012), un spectacle autobiographique racontant leparcours difficile de Patricia que le théâtre a sauvé,après s’être enfouie de la France où elle dit avoir étéesclave. L’histoire d’une enfant née au Sénégal qui,comme beaucoup d’autres, a été donnée à la tante,à la cousine, à l’oncle... L’histoire, parfois cocasse, detoutes celles qui, maltraitées et malmenées, relèvent la tête pour trouver une place dans la société.“Je veux mettre le théâtre jeune public belge àl’honneur car il est d’une incroyable créativité. LaCasquette est bien sûr déjà venue ici. L’ASBL Curieuzeneuz, qui nous soutient, également. Ainsique La Guimbarde avec sa création avec le Burkinaet la compagnie de cirque contemporain Carré Curieux. J’ai envie de créer le même système que lethéâtre jeune public belge avec une diffusion dansles centres culturels et les écoles pour aller à la rencontre des enfants ». Légende : Patricia Gomis, sur leplage de Ndayane, à cinquante kilomètres de Dakar, pendant le festival Djaram’Art 2018.
Laurence Bertels
L.B
Patricia Gomis, au milieu des enfants des rues, sur le plage de Ndayane, à cinquante kilomètres de Dakar, pendant le festival Djaram’Art 2018.
Interview de Germaine Acognyhttps://www.ultimedia.com/default/index/videogeneric/id/vk8qsp/showtitle/1/viewnc/1
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