Suara 46: Tout le monde en crise?

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sommaire © Wereldmediatheek, Johan Denis La crise économique, une opportunité pour l’Eglise? La spiritualité échappe-t-elle à la crise? Regagner la confiance des jeunes Eco-solidarité et éco-spiritualité. Une vision de la théologie de la libéra- tion face à la crise La crise à travers les continents Lu pour vous Moyens de transport pour la Mission Column Interview avec Mark Eyskens Quelle alternative à la crise actuelle? II est devenu banal d’entendre dire que la crise actuelle est multiforme. Elle évoque, bien sûr, le dysfonctionnement du système économique caractérisé par la diminution de la crois- sance, la montée du chômage et par d ‘importants mouve- ments de prix à la baisse ou à la hausse. Mais il y a lieu de parler également d’une crise énergé- tique, d’une crise alimentaire, d’une crise écologique due au réchauffement climatique, d’une crise de confiance, d’une crise spirituelle, d’une crise du sens. Cette crise multidimen- sionnelle invite à redécouvrir les capacités de l’homme à se prendre en charge, à rétablir la confiance et à s’engager avec optimisme dans la quête du sens. Sera-t-il possible de rele- ver un tel défi? A en croire cer- tains contributeurs du présent numéro de Suara, il convient de répondre par l’affirmative. A condition de féconder le spirituel, de penser et d’orga- niser un monde solidaire, et de promouvoir les choses de la foi que l’Eglise tente d’offrir à ses contemporains. A cela s’ajoute la nécessité de celle-ci et d’autres instances spirituelles et religieuses de réaliser elles- mêmes des profondes réformes internes. Il appartient au lecteur de se positionner par rapport à cette alternative. Le courrier des lecteurs en sera enrichi. Sylvain Kalamba Nsapo Tout le monde en crise? Comment sortir de la crise actuelle? Selon Emmanuel Babissagana, «aucun expert, aucune institution (…) ne détient aujourd’hui à elle seule la clé pour sortir de la crise profonde que nous vivons. Car le problème n’est pas à la marge mais bien au cœur même du système. C’est en effet le principe fondamental du système économique qui est aujourd’hui remis en question, celui de la libre concurrence (…). La solution à la crise se trouve (…) en dehors du système économique actuel. Ainsi est-il question de trouver un principe alternatif pour l’organisation et le fonctionnement de nos sociétés». Lire l’article d’Emmanuel Babissagana à la page 2. en dialogue avec Mark Eyskens Crise de la foi, crise politique, crise économique. Tout semble en crise. Mais, sou- ligne Mark Eyskens, les crises se veulent être un moment de critique et de réflexion. On assiste aujourd’hui aux douleurs d’enfantement d’une nouvelle société mondiale. L’Eglise a tout intérêt à participer à ce travail d’accouchement d’un monde nouveau. Suite à la page 8. Photo: Xavier Vankeirsbulck Photo: Shutterstock Suara 4 6 La voix des peuples Missio Belgique, Bd. du Souverain 199, 1160 Bruxelles Publication trimestrielle de Missio DéCEMBRE 2011-JANVIER - FéVRIER 2012 Afgiftekantoor: Antwerpen x P 508033

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Tout le monde en crise?

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pour l’Eglise?• La spiritualité échappe-t-elle à la crise?• Regagner la confiance des jeunes

• Eco-solidarité et éco-spiritualité. Une vision de la théologie de la libéra-tion face à la crise

• La crise à travers les continents

• Lu pour vous • Moyens de transport pour la Mission • Column • Interview avec Mark Eyskens

Quelle alternative à la crise actuelle?

II est devenu banal d’entendre dire que la crise actuelle est multiforme. Elle évoque, bien sûr, le dysfonctionnement du système économique caractérisé par la diminution de la crois-sance, la montée du chômage et par d ‘importants mouve-ments de prix à la baisse ou à la hausse. Mais il y a lieu de parler également d’une crise énergé-tique, d’une crise alimentaire, d’une crise écologique due au réchauffement climatique, d’une crise de confiance, d’une crise spirituelle, d’une crise du sens. Cette crise multidimen-sionnelle invite à redécouvrir les capacités de l’homme à se prendre en charge, à rétablir la confiance et à s’engager avec optimisme dans la quête du sens. Sera-t-il possible de rele-ver un tel défi? A en croire cer-tains contributeurs du présent numéro de Suara, il convient de répondre par l’affirmative. A condition de féconder le spirituel, de penser et d’orga-niser un monde solidaire, et de promouvoir les choses de la foi que l’Eglise tente d’offrir à ses contemporains. A cela s’ajoute la nécessité de celle-ci et d’autres instances spirituelles et religieuses de réaliser elles-mêmes des profondes réformes internes. Il appartient au lecteur de se positionner par rapport à cette alternative. Le courrier des lecteurs en sera enrichi.

Sylvain Kalamba Nsapo

Tout le monde en crise?

Comment sortir de la crise actuelle? Selon Emmanuel Babissagana, «aucun expert, aucune institution (…) ne détient aujourd’hui à elle seule la clé pour sortir de la crise profonde que nous vivons. Car le problème n’est pas à la marge mais bien au cœur même du système. C’est en effet le principe fondamental du système économique qui est aujourd’hui remis en question, celui de la libre concurrence (…). La solution à la crise se trouve (…) en dehors du système économique actuel. Ainsi est-il question de trouver un principe alternatif pour l’organisation et le fonctionnement de nos sociétés».

Lire l’article d’Emmanuel Babissagana à la page 2.

en dialogue avec Mark EyskensCrise de la foi, crise politique, crise économique. Tout semble en crise. Mais, sou-ligne Mark Eyskens, les crises se veulent être un moment de critique et de réflexion. On assiste aujourd’hui aux douleurs d’enfantement d’une nouvelle société mondiale. L’Eglise a tout intérêt à participer à ce travail d’accouchement d’un monde nouveau. Suite à la page 8.Ph

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Suara 46La voix des peuples • Missio Belgique, Bd. du Souverain 199, 1160 Bruxelles • Publication trimestrielle de Missio

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La crise économique, une opportunité pour l’Eglise?

Emmanuel Babissagana La fin de la guerre froide et l’échec du communisme avaient suscité l’espoir d’un monde de liberté et de prospérité pour tous, sous la conduite du capitalisme. Depuis lors, le capitalisme s’est généralisé, devenant toujours plus libéral et dominant, jusqu’à revêtir la forme d’une religion pla-nétaire. Chemin faisant, il s’est doté de lieux de culte (les marchés), de dogmes (libre concurrence, dérégulation, etc.) et de prêtres (les économistes libéraux). Puis comme toute religion qui se veut attractive, il a promis des récompenses à ses fidèles, notamment la prospérité et le bien-être collectifs.

Crise économique, crise de sens

Seulement, jusqu’à ce jour, cette prospérité et ce bien-être collectifs se font toujours attendre. Au contraire, le monde n’a jamais compté autant de pauvres qu’aujourd’hui. Les crises économiques et financières se succèdent avec des conséquences sociales toujours plus dramatiques. Et malgré l’intervention massive des Etats pour enrayer les conséquences de ces dysfonc-tionnements, l’horizon économique de nos sociétés demeure largement obscurci, et les perspectives sombres. Nos économies naviguent désormais à vue, sans prise sur le long terme. Or jadis, «le spécialiste du long terme», pour ainsi dire, c’était l’Eglise, qui

indiquait les canons à observer pour une vie meilleure et durable, sur la terre comme au ciel.

Mais avec la sécularisation galopante dans nos sociétés, ce privilège a depuis longtemps été retiré à l’Eglise et confié notamment à l’économie. C’est à elle que revient donc désormais de produire, aujourd’hui et demain, la prospérité et le bien-être de tous. Mais voilà, la barque économique sensée nous conduire à ce bonheur collectif est elle-même à la dérive, incapable de se projeter sur le long terme, de se donner à elle-même une orientation fiable et durable. C’est en cela que la crise économique que nous vivons est aussi et peut-être surtout une crise de sens. Car c’est le vecteur même du sens de nos vies (l’économie), qui est en panne de sens. Il

en résulte alors un vide de sens que cha-cun essaie de combler à sa manière, dans une quête généralisée de sens. Le christia-nisme peut-il alors sortir de sa marginalité et répondre efficacement à cette quête de sens? La crise lui en donne en tout cas l’opportunité. C’est un défi qu’il doit plus que jamais s’efforcer de relever, s’il veut remettre l’Eglise au milieu du village. Et ce défi est d’autant plus pressant que foi-

sonnent sans cesse de nouvelles spiritualités qui, ci et là, proposent des alternatives de plus en plus séduisantes.

Comment sortir de la crise actuelle?

La vérité est cependant qu’aucun expert, aucune institution ou religion ne détient aujourd’hui à elle seule la clé pour sor-tir de la crise profonde que nous vivons. Car le problème n’est pas à la marge mais bien au cœur même du système. C’est en effet le principe fondamental du système économique qui est aujourd’hui remis en question, celui de la libre concurrence. C’est pourquoi bon nombre d’analystes estiment que la solution à la crise se trouve incontestablement en dehors du système économique actuel. Ainsi est-il question de trouver un principe alternatif pour l’organisation et le fonctionnement de nos

sociétés. Etant l’une des rares instances à avoir résisté, en théorie tout au moins, à l’impérialisme des principes économiques, l’Eglise a donc plus que jamais l’opportu-nité de prendre aujourd’hui sa revanche; de se donner les moyens pour promouvoir un ou des principes alternatifs. Et pourquoi pas celui de la solidarité, éclairée par la charité chrétienne?

•Le système économique connaît une crise profonde

•La crise actuelle offre-t-elle une oppor-tunité à l’Église?

•Quelles alternatives peut-on envisager?

“La crise économique que nous vivons

est aussi et peut-être surtout une crise

de sens. Car c’est le vecteur même du

sens de nos vies (l’économie), qui est

en panne de sens.”

La spiritualité échappe-t-elle à la crise?Nous avons tous ce mot à la bouche: «la crise». Nous avons en vue divers aspects: la crise politique, la crise économique, la crise de la foi et de l’Eglise...Une question particulièrement interpellante se pose: la spiritualité est-elle aussi en crise ou échappe-t-elle à celle-ci?

Catherine De Ryck La période de fin d’année est le moment idéal pour se rendre compte de la façon dont se manifeste la spiritualité dans notre société. Par exemple dans les vitrines des librairies, où les idées cadeaux sont large-ment proposées. On découvre des livres sur «comment être heureux», sur «la médita-tion», sur «la manière de tirer le meilleur parti de la vie», sur «la façon de vivre en

harmonie avec soi-même et le monde”... Ce sont assurément là des thèmes ayant un accent de spiritualité. Pourtant vous ne ver-rez pas, dans les magasins ces livres réunis sous la mention «spiritualité». Mais on les rencontrera, par exemple, dans les rayons consacrés à la psychologie, au bien-être ou aux loisirs. La spiritualité, prise dans son acception la plus large, est donc très bien représentée, et ne semble pas être en crise.

On a juste besoin d’un peu plus d’atten-tion, afin peut-être de pouvoir la lire «entre les lignes».

Une spiritualité ne doit pas nécessairement être asujettie à une religion donnée, mais on ne peut imaginer la vie sans elle. Vivre en tant qu’homme met en face de «grandes questions»: le but de la vie, le bonheur, la joie et la souffrance. Nous pouvons, appeler cela «une quête de sens» et qua-lifier les hommes comme des personnes en recherche du sens de la vie, mais aussi comme des personnes qui donnent un sens à cette vie. Ces réponses au sens de la vie et ces cadres dans lesquels il faut situer notre vie, qui ne sont plus (toujours) à trouver

dans une religion, ne signifient nullement que la spiritualité, prise au sens large, ait disparu. Peut-être la religion institution-nelle ou la foi collective ont-elles été reléguées à l’arrière-plan. Les gens optent plutôt pour une «spiritualité sur mesure»: pour un cadre qui s’est recentré, avec des bribes et morceaux issus de différentes traditions, et même de domaines autres que le religieux ou le philosophique. Tous nous sommes plongés dans la crise certes, à l’exception cependant (entre autres) de la spiritualité! A condition de considérer la spiritualité comme un large éventail d’idées et de cadres donnés, et cela indépendam-ment du point de vue de la religion ou de la tradition.

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Regagner la confiance des jeunes dans l’Eglise

Bien que l’Eglise supporte difficilement la période actuelle, personne ne pense qu’il faille pour autant laisser la foi en plan. Gerlinde (18 ans) et Annelies (18 ans) sont allées à Madrid cet été, lors des Journées Mondiales de la Jeunesse. De même Daniel (18 ans), un libanais, qui réside en Belgique depuis quelques mois, pour ses études, y était aussi présent. Ces trois jeunes racontent leur expérience et parlent de leur foi et de l’Église.

Herlinde Hiele

Missio: Vous êtes allés aux Journées Mondiales de la Jeunesse et, après cette expérience, vous rentrez en Belgique. Comment ressentez-vous cela?

Annelies Suenens: «Avant d’aller à Madrid, j’avais le senti-ment d’être seule avec ma foi. En y allant, j’ai découvert qu’il y a beaucoup de jeunes qui sont croyants. Alors quand je suis revenue en Belgique, j’ai su que je ne devais plus douter et que je n’étais plus seule».

Gerlinde Hollevoet: «Pour moi, c’était une occasion de par-ler à d’autres de la religion. Beaucoup de gens voulaient savoir ce que j’allais faire à Madrid».

Missio: L’Eglise est-elle assez proche de la jeunesse?

Suenens: «Je pense que certaines personnes au sein de l’Eglise s’en préoccupent de façon certaine. Par exemple, notre évêque, Mgr Lemmens, avait demandé à certains jeunes ayant participé aux JMJ de témoigner de leur expérience. Quand il s’est rendu compte que cette expé-rience avait été très intense pour certains, il a commencé à organiser diverses activités en relation avec les Journées Mondiales de la Jeunesse, afin d’en garder l’esprit d’équipe. Je ne sais pas ce qu’il en est pour les autres évêques, mais à mon avis, je crois qu’eux aussi savent qu’ils ont à regagner la confiance de la jeunesse».

Daniel Kallassi: «Au Liban, l’Eglise a conscience du fait que les jeunes constituent un groupe important en son sein. Des efforts particuliers sont faits pour les satisfaire; par exemple, des célébrations eucharistiques spéciales pour eux sont organisées le dimanche soir. L’Eglise sait que les gens aiment sortir le samedi soir. Il est donc préférable

qu’ils aillent à l’église le dimanche soir. Il existe aussi des programmes spéciaux pour les jeunes, afin de les inciter à mettre leur foi en pratique».

Missio: Avez-vous le sentiment, qu’en tant que jeune croyant, vous devez lutter contre les préjugés?

Gerlinde: «Habituellement, lorsque je commence une conversation avec des gens sur la foi, ils adoptent d’abord un point de vue négatif. Si je leur parle de ce que la foi signifie pour moi, si j’en mets les points positifs en lumière, alors ils s’ouvrent à ces divers aspects. J’ai sou-vent entendu dire: «Je ne l’avais encore jamais envisagé sous cet angle».

Daniel: «Il est très facile, pour un Libanais, d’en arriver à la foi. Cela est effectivement tout à fait normal. Et je dis cela sans vouloir créer l’illusion que le Liban est le meilleur pays du monde (rires). Quand je dis que je suis chrétien, je ne suis presque jamais critiqué J’appartiens à la partie chrétienne du Liban. La communauté chré-tienne y dépend fortement de chacun, d’autant plus que les chrétiens au Liban ne sont qu’une minorité. Il y règne un large esprit d’entraide».

Missio: Daniel, tu n’es ici que depuis quelques mois, mais remarques-tu déjà des différences entre l’Eglise belge et l’Eglise libanaise?

Daniel: «Oui, absolument. Je n’ai encore jamais vu ici plus d’un ou deux jeunes pendant la célébration d’une messe. Depuis que je suis ici, j’ai commencé à pratiquer «l’évangélisation de rue». Nous partageons un café gratuit et invitons les gens à une conversation sur la foi. J’ai déjà pu parler avec de nombreuses personnes sur les raisons pour lesquelles ils ne vont plus à l’église. Et la seule expli-

cation qu’ils en donnent est que l’Eglise a fait quelque chose de mal».

Missio: Comment l’Eglise peut-elle sortir de la crise? Y a-t-il un moyen miraculeux?

Annelies: «Je pense qu’il est particulièrement important pour l’Eglise d’écouter les jeunes. Qu’ils soient croyants ou non. L’Eglise a besoin de savoir comment ces jeunes jugent les choses. Je connais quelqu’un qui, il y a quelque temps, dans notre école, a pu débattre de la question avec Monseigneur Léonard. Il a dû préalablement soumettre ses questions, lesquelles ont été filtrées afin de voir de quoi il pouvait ou non traiter. Ce garçon estimait cela fort gênant, car il voulait vraiment parler de tout. Je pense qu’un débat ouvert est le commencement de tout. Si cela ne peut être, c’est assurément dommage».

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kDes chrétiens parlent de la criseLa crise n’est que l’aboutissement du repli sur soi des hommes favorisés de la planète et de l’individualisme (égoïste) débouchant sur le chacun pour soi, élevé au rang de valeur ultime. Le boule-versement des valeurs porte en lui les germes de notre destruction.

L’Eglise, en ce qu’elle pousse à favoriser l’ouverture aux autres et au respect des dons de Dieu, a un rôle de premier plan à jouer dans «le vivre avec» la crise. La décroissance comme principe économique apprend à se satisfaire de ce qui est abordable et casse la spirale infernale du “toujours plus” produire et consommer, sans aucun sens éthique. Le respect de la planète qui est un don de Dieu, que nous avons reçu en prêt et que nous devons, comme dans la parabole des talents, faire fructifier en la respectant. Desmond Tutu vient de déclarer que “nous n’avons qu’une seule maison, la Terre, et que nous avons donc le devoir de la respecter”. (Marjanann, professeur de religion à Bruxelles) Témoignage d’un père de famille (48 ans) à Tournai. La crise touche toutes les couches de la population. Ce qu’il faudrait, c’est beaucoup plus de solidarité: que les plus nantis ouvrent les yeux et regardent mieux autour d’eux, car de plus en plus de person-nes tombent dans la précarité. Faire changer les habitudes, c’est difficile, mais à force de lancer des messages à travers les animateurs/animatrices en pastorale sur le terrain, on pourrait espérer une amélioration. L’Eglise peut se mobiliser à travers eux. Penser à soi devrait automatiquement signifier penser à l’autre. Comme la chanson de Coluche: “quand je pense à moi, je pense à toi”. Plus il y aura de la mobilisation de chacun, plus on en prendra conscience. Aller vers les autres résume ces différents points évoqués. (Chrétien de Tournai)

Dialoog

Ontmoeting

Solidariteit

Dialogue

Rencontre

Solidarité

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Marcelo Barros Eco-solidarité et eco-spiritualitéMarcelo Barros est moine bénédictin brésilien, prêtre et théologien de la libération. En 1969, il a été ordonné par Dom Helder Camara, dont il a été, pendant des années, le bras droit dans différents domaines. Dans le cadre d’une visite en Belgique, nous avons eu la chance de l’interviewer. Une entrevue pendant laquelle il fut question d’écologie, de société mondiale et d’Eglise

Catherine De Ryck & Herlinde Hiele

Missio: Votre vision du monde et votre travail semblent être caractérisés par l’Eco-justice ‘. Qu’entendez-vous par ce terme?

Marcelo Barros: «La justice de type éco-jus-tice ou éco-sociale est en effet une de mes principales préoccupations. Jusque dans les années 80, en Amérique du Sud, la théologie de la libération s’est fortement engagée auprès des pauvres et des oppri-més. Ce sont des personnes noires et des peuples autochtones. Suite à cela, on en est arrivé à la conclusion que notre Terre Mère fait aussi partie du groupe des opprimés. Dès lors, elle a également été l’objet de la théologie de la libération, de la justice. Depuis bien longtemps, les Indiens avaient compris qu’ils devaient avoir soin de cette terre où ils vivaient. Tout ce qu’ils font, tous les actes de justice, de justice sociale, de solidarité: toutes ces choses portent en elles-mêmes la dimension de l’éco-solida-rité et l’éco-justice. C’est une justice qui est à la fois sociale et écologique».

Missio: Vous plaidez donc pour que la théologie de la libération chrétienne puisse intégrer des éléments d’autres reli-

gions, même de la religion des peuples autochtones?

Barros: «La théologie de la libération est une théologie qui prend sa source dans la vie des pauvres gens, une vie qui est étroi-tement liée à leur nature et leur religion. Beaucoup de ces Indiens, de ces Noirs et de ces autochtones sont chrétiens. Mais

il existe aussi d’autres communautés qui adhèrent à d’autres religions tradition-nelles. La théologie de la libération a, comme toute la croyance chrétienne, la mission de respecter ces religions, de dialo-guer avec elles et d’en intégrer certains élé-

ments. Cela ne signifie pas que nous relativisons le christianisme. Nous promouvons la dimen-sion œcuménique de la foi et la culture».

Unité et diversité

Missio: Vous parlez de la dimension œcumé-nique de la foi. Dans votre pays, le Brésil, grande y est la pluralité religieuse. Comment les religions différentes vivent-elles en harmo-nie?

Barros: «Le terme «reli-gion» se réfère étymo-logiquement à celui d’«association». La reli-gion est aussi un moyen de former une commu-nauté et d’entrer en dia-logue. Malheureusement trop souvent les reli-gions se présentent sous un aspect dogmatique, voire fondamentaliste. De ce fait, elles se trans-forment en instrument

de violence, de division et d’intolérance. La théologie doit s’assurer que la religion soit à nouveau un instrument de commu-nautarisation. Cyprien de Carthage, Père de l’Eglise ayant vécu au troisième siècle, affirmait déjà que l’unité devait vaincre les différences. Certes les différences sont à respecter, mais ce qui divise doit être repoussé. Ainsi, pourrons-nous construire

une unité au travers de différences, une unité dans la diversité».

Missio: Pensez-vous que l’éco-solidarité puisse aider à résoudre les problèmes de notre société?

Barros: «Selon moi, l’éco-solidarité peut jouer un rôle primordial. Prenez par exemple un tremblement de terre. Si un tremblement de terre se produit, il y a tou-jours un épicentre qui se trouve, dès avant, à la surface de la terre. Mais il y a aussi des plaques tectoniques dans les profon-deurs de la terre. Ceci est comparable aux problèmes climatiques. Eux aussi ont un épicentre, à savoir le système économique et social qui débouche sur l’injustice et sur la destruction de la terre. Les plaques tec-toniques des problèmes climatiques - dont la réalité a donc des causes beaucoup plus profondes - sont la culture et la spirituali-té. L’image que nous avons de l’amour, des autres, de nous-mêmes et de la nature est très importante. Nous devons prêter atten-tion à cette profondeur. L’éco-solidarité repose donc aussi sur l’éco-spiritualité».

Missio: Les théologiens de la libération s’engagent dans la solidarité. Comment envisagez-vous cela dans l’Eglise?

Barros: «Malheureusement, parfois, l’Eglise peine à trouver un équilibre entre deux dimensions. D’une part, celle de l’ins-titution, de la structure et tout ce qui y appartient et, d’autre part, la dimension plus prophétique de la foi et de la spiri-tualité. Depuis le début du christianisme, il a toujours régné une tension entre les deux pôles, ce n’est là que chose très nor-male. Mais par-dessus tout, l’Eglise doit se montrer vraiment solidaire des autres».

Missio est une organisation religieuse. Comment voyez-vous l’implication des diverses organisations, religieuses ou autres, dans cette œuvre de solidarité?

Barros: «Aujourd’hui, l’heure est à un forum social mondial. Chacun peut et doit participer au débat, chacun a la même valeur. Tout le monde est au même niveau. La société civile aussi joue en cela un rôle important, ce n’est certainement pas uni-quement un rôle réservé aux Eglises».

•Mareclo Barros est théologien de la libération

•Eco-solidarité comme solution•Partenariat Entre Eglise et société

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Ne pas se tromper de diagnostic. Comme économiste, je pense que la nôtre est surtout celle de l’Etat providence qui ne peut plus se substituer à la responsabilité et l’effort de chacun, ni nourrir et loger la misère du monde attirée par les mirages de nos vitrines. L’erreur serait de penser que l’Eglise tient là une revanche historique et qu’elle peut, par ses œuvres, prendre le relais. Car le rôle socio-poli-tique de la religion catholique est derrière elle. De même, je pense qu’une condamnation morale de notre style de vie au nom d’un équilibre perdu qui n’a jamais existé, est une autre fausse piste. Jésus a passionnément aimé son temps ! Pour vivre, il faut changer. L’Eglise a un urgent besoin d’un nouveau Concile. Non pour s’adapter au monde, mais pour le féconder à nouveau.

Christian, Bruxelles

La crise actuelle nous montre la fragilité des économies et de la sécurité que nous cherchons à obtenir en leur consacrant nos efforts. L’Eglise peut nous apprendre à sortir de cette vie centrée sur la recherche d’une hypothétique sécu-rité pour demain et à vivre notre vie aujourd’hui.

Olivier, Louvain-la-Neuve

Je fais moi aussi partie de ces personnes qui sont indignées par le fonctionnement d’un capitalisme exacerbé qui, dans beaucoup d’endroits du monde, rend les riches plus riches et les pauvres plus pauvres. Des initiatives souvent peu connues, portées par des chrétiens engagés dans leur foi et désirant un meilleur équilibre social, sont cependant à encourager. Je voudrais souligner le projet « économie de communion » lancé au Brésil en 1991 au sein du mouvement des Focolari ; il s’est vite concrétisé sur tous les continents et entraîne désormais plus de 800 entreprises dans un partage d’une partie de leurs bénéfices en partenariats multiformes avec des travailleurs ou des petits entrepreneurs économiquement vulnérables.. Des projets comme celui de l’économie de communion nous encouragent à ne pas laisser tomber les bras et nous interpellent à contribuer comme nous le pouvons à con-struire un monde plus juste!

Marie, Wavre

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La voix des peuples

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La voix des peuples

La crise à travers les continents La rédaction de Suara a voulu savoir ce que les citoyens ordinaires, d’ici et d’ailleurs, pensent au sujet de la crise qui entame les fondements de notre société, et des alternatives qui s’imposent. Nous remercions les services diocésains de Missio et toutes les personnes qui ont accepté de rendre possible un partage d’idées et de témoignages sur la situation qui secoue le monde.

Charbel Rahméi, étudiant journaliste au Liban

La plupart des pays du Moyen Orient traversent une situation économique difficile. Les salaires sont insignif iants. Le taux du chômage augmente. Certa ines entreprises

tombent en faillite. Il règne une atmosphère insup-portable où le changement, l’innovation, la créativité, la pensée critique, la résolution des problèmes… sont tous découragés. À ce constat s’ajoutent la négation des droits humains, les discriminations fondées sur l’ethnie, la religion, le genre, l’inégalité des chances, l’application arbitraire de la loi et le manque de transparence. Inutile d’oublier la réalité de la corruption et des commissions illégales, les trafics d’influence et le favoritisme dans les sociétés arabes,

Cette crise multiforme provoque un sentiment de peur et d’insécurité. Tant de jeunes n’ont pas le courage de se marier et de fonder une famille. Aussi, faut-il ajouter que la crise économique mondiale qui n’épargne pas la région du Moyen Orient, peut provoquer des maladies psychiques si le nombre de chômeurs ne cesse d’augmenter.

Alvarez Atehortua, Colombie

La crise économique a un impact énorme sur mon pays, la Colombie. Surtout en termes de chômage. La situation a commencé à fortement se détériorer depuis environ quatre ans. Ma vie et celle de ma famille s’en trouve certainement aussi affectée. J’ai essayé pendant toute ma vie de donner à mes neveux et nièces un coup de pouce financier, afin qu’ils puissent faire des études. Avec la crise actuelle, ils ne parviennent pas à obtenir un emploi décent.

Je remarque que beaucoup de gens sont ordinairement frappés d’abattement Ils ne peuvent pas faire face à la crise, à cause d’une augmentation considérable du sous-emploi. En conséquence, il y a une recrudescence du com-merce de la drogue, souvent en pleine rue, comme aussi une augmentation de la criminalité et de la prostitution. Malheureusement ce sont en particulier les enfants et les jeunes qui sont les plus durement touchés.

Comme il règne beaucoup de désespoir, combiné aux medias de masse et à la mondialisation qui mettent prin-cipalement sous les projecteurs d’autres cultures, notre jeunesse n’est pas vraiment concernée par la spiritualité. Bien qu’en Colombie il existe aussi de nombreuses formes de religion, qui pourtant chacune à sa manière influence la vie des habitants du pays.

Je pense que les gens ont toujours eu peur de l’inconnu et d’un devenir incertain; et cela est d’autant plus d’actualité que nous vivons maintenant dans une période marquée d’incertitude.

Après une crise, on voit presque toujours un renouveau, j’espère qu’il n’en sera pas autrement cette fois-ci. De plus, une crise fait place à la créativité, à l’innovation et à la recherche.

Eleuthère Musima Mungie, étudiant Economie au R.D. Congo

La République Démo-cratique du Congo est en crise générale depuis

toujours et ce sur tous les plans et dans tous les domaines. Le politique a toujours échoué depuis l’indépendance. Les gens ne vivent pas mais survivent. Le Congo regorge de beaucoup de richesses mais sa population est pauvre, mendiante. C’est cela le paradoxe congolais. Les dirigeants politiques n’ont pas d’amour pour ce pays. Pourquoi le religieux, qui essaie tant bien que mal, de soutenir ce peuple ne tenterait-il pas d’apporter une alternative? Le message du Christ a toujours une pensée politique. D’ailleurs toute religion, quelle qu’elle soit, a nécessaire-ment un aspect et des conséquences politiques. L’homme étant à la fois matière et esprit, il est illusoire de prétendre s’occuper de l’esprit sans toucher au corps. Il y a une inte-raction fatale entre la religion et la politique. On verrait bien le religieux oser prendre la tête du pays, rétablir de l’ordre et se retirer après avoir mis le pays sur les rails.

Barnabas Tiburtius, entrepreneur et professeur en Inde

Personne n’échappe à la crise. C’est d’autant plus vrai que le prix du car-burant et des produits de première nécessité aug-

mente de manière considérable. Bien sûr, il y a des gens qui survivent en se nourrissant du fruit de leur culture. Mais la situation demeure difficile.

La crise pousse les Indiens à s’accrocher à des notions comme «destin» et «réincarnation». Malheureusement, ces termes ne sont pas mis en relief dans la tradition chrétienne. Les Eglises catholique et protestante perdent donc beaucoup de fidèles.

Nous nous acheminons vers notre propre destruction si nous ne tenons pas compte des avertissements que le monde nous lance. Il y a des signes prometteurs tels que les milliards de dollars consacrés à la recherche médicale et à l’enseignement gratuit. Inutile de sous-estimer cet aspect positif de la société actuelle. Néanmoins, la crise écono-mique actuelle tire effectivement une sonnette alarme. Grâce à sa base spirituelle, l’Inde dispose de beaucoup de potentialités. Ce dont beaucoup d’autres pays sont jaloux. Chaque Indien doit se nourrir de cette spiritualité. Alors nous profiterons de lacrise elle-même pour faire advenir un monde nouveau.

Mu-amba, R.D. Congo

La crise économique aggrave la situation très précaire de mon pays le Congo. Le nombre de chômeurs augmen-tent chaque jour. A la maison, ma famille et moi-même mangeons parfois une fois tous les deux jours. Les soins de santé coûtent cher. L’insécurité règne un peu partout. La faim et la misère se font sentir dans la vie de tous les jours. Entretemps, les images de la télévision et la musique congolaise poussent à adorer l’Europe. D’où le flux migratoire. Dans ce contexte, certaines gens comptent sur Dieu. On prie un peu partout. D’autres personnes se révoltent contre Dieu. Quelques membres de famille disent: pourquoi Dieu laisse-t-il les dictateurs agir impu-nément? Quand les pasteurs et les prêtres collaborent avec le pouvoir dictatorial, il n’est pas possible d’accorder son pardon. Face à tout cela, il ne reste plus qu’à compter sur la pression populaire pour faire bouger les choses même dans l’Eglise.

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Un bonjour du Grand Séminaire St Charles Borromée, Rwanda

En plus du soutien financier que Missio Belgique apporte pour la formation de mil-liers de séminaristes à travers le monde, nous entretenons des relations particuliè-res avec une trentaine de séminaires, en Afrique et en Asie notamment. Chaque année, des séminaristes issus de ces séminaires nous adressent des lettres de présentation dans lesquelles ils saluent et remercient tous ceux qui, en Belgique, sou-tiennent leur formation. Nous vous lais-sons découvrir ci-après l’une d’entre elles.

Chers frères et sœurs,

Je m’appelle Mutabazi Fidèle. Je suis né le 1er avril 1985 à Gihara. Je fais partie de la paroisse de Gihara dans le diocèse de Kabgayi situé au sud du Rwanda. Je suis le 3è enfant de la famille. Nous som-mes tous des catholiques.De 1992 à 1998, j’ai fait mon école pri-maire à Gihara. De 1998 à 2005, j’ai été au petit séminaire st Léon de Kabgayi, option latin bio-chimie. J’ai terminé avec succès et ai bénéficié d’une bourse d’Etat pour entamer les études universitaires. Mais au terme d’une réflexion person-nelle, j’ai plutôt choisi le chemin du sacerdoce ministériel. J’ai alors exprimé à mon évêque mon intention de devenir prêtre au service de Dieu et du monde. La réponse a été positive. Je suis entré au grand séminaire en 2006. Mon choix n’a pas été bien accueilli par certaines personnes de mon entourage. Mais les parents y étaient favorables. Je suis content de la manière dont j’évolue sur le plan de la formation aca-démique. Je me réjouis également d’avoir participé à la vie des communautés ecclé-siales de base et accompagné un groupe des jeunes de la paroisse de Gihara. Telle est l’expérience pastorale que je souhaite-rais approfondir dans l’avenir. Soucieux de développer une personnalité équilibrée, je tiens à ce que la détente occupe également une place non négli-geable dans ma vie de séminariste. C’est pourquoi je me consacre au football, au tennis de table, à la promenade et à la contemplation de la création. Avant de terminer cette lettre, j’aimerais vous remercier pour votre zèle évangélique et votre amour de l’Eglise Universelle.

Mutabazi Fidèle

Lu pour vous | Jürgen MettepenningenUne chambre sans livres est un corps sans âme, disait déjà Cicéron il y a deux millénaires. Dans cette rubrique Missio fouillera chaque fois dans la bibliothèque de quelqu’un et demandera d’avoir une critique et des explications sur un livre particulier. Jurgen Mettepenningen nous parle aujourd’hui du livre de Hans Küng intitulé ‘L’Eglise est-elle encore à sauver?’

Herlinde Hiele

Missio: Quel est le sujet de ce livre?

Mettepenningen: «Küng met sur table les problèmes et défis de l’Eglise. Il plaide pour une Eglise qui se reprenne de sorte qu’elle soit plus fidèle à sa propre nature et à sa mission. Toutefois le problème réside en ce que la direction de l’Eglise, selon Küng - et selon bien d’autres! – n’ose pas se mesurer à la question, ne se sentant en aucun cas concernée. Avec un désespoir frisant l’indignation Küng continue d’enfoncer le même clou, ce qui lui fait ouvrir le livre avec un regard tant soit peu comique. « Ma préférence serait que ce livre ne fut pas écrit».

Missio: Dans l’esprit de quel siècle le livre se passe-t-il?

Mettepenningen: «Küng écrit ce livre dans le contexte des pro-blèmes auxquels est confrontée l’Eglise catholique romaine. Après le Concile Vatican II (1962-65) que l’Eglise a voulu qu’il soit à nouveau pleinement de son temps - et à mon avis et de celui de beaucoup d’autres, elle y a parfaitement réussi – a suivi une accumulation de crises que les dirigeants de l’Église ont traités avec beaucoup de maladresse. Nous pensons d’abord la crise de la foi: non seulement beaucoup en ont décroché, mais en plus, dans les dernières décennies, de moins en moins de personnes ont pris le risque d’un passage à la foi. Deuxièmement, il y a la crise de la concordance manquée, par la direction de l’Eglise, face à l’homme moderne et à l’évolution de la société. Enfin il y a la crise au sein de l’institution elle-même, où les plus hautes autorités de l’Eglise maintiennent, avec rigueur, des structures rouillées au détriment de la primauté de l’Évangile, de celle de la foi et de celle de la commu-nauté des croyants».

Missio: Que trouvez-vous de spé-cial à ce livre?

Mettepenningen: «L’auteur donne le bon ton au juste clou. Il ose dire les choses comme elles sont. Cette facette est cause du succès de sa vision ainsi que de la vente de ses livres au cours du dernier demi-

siècle. Par ailleurs à parler franc, je reste, comme tout lecteur après lecture d’un livre, face à quelques questions. L’essentiel est bien qu’il s’agisse du titre de mon livre, qui est paru presqu’en même temps que celui de Küng et pour lequel il écrivit la préface: livre que j’ai intitulé: «Quelle Eglise? Aujourd’hui et demain». Trop souvent, Küng semble aller dans la tentation de réduire l’Eglise à l’institution de l’Eglise catholique romaine, à sa forme extérieure avec toute la lourdeur qu’implique une institution de cette taille.. L’aspect de l’espérance, je ne le trouve hélas que beaucoup trop peu souvent.»

Missio: quelle pensée en conserverez-vous?

Mettepenningen: «Küng critique le fait que la direction de l’église juge plus importante la structure de l’institution plutôt que la mission de celle-ci. Pour se résumer disons que: lorsque la com-munauté des croyants doit dans les faits, selon Rome, se mettre au service des structures de l’Eglise plutôt que l’inverse, il y a quelque chose de fondamentalement mauvais aussi bien dans ces structures et que dans Rome.»

Missio: A qui feriez-vous cadeau de ce livre?

Mettepenningen: «Je l’offrirais au pape, même si je sais que ce cadeau ne serait pas apprécié. En définitive, ce livre n’a pas Küng pour propos, mais il est le cri que beaucoup de croyants lancent à Rome: Redonnez-nous notre église, parce que comme il en va actuellement, ce n’est plus qu’une «fabrique d’église» - en particulier en Europe - qui ne fonctionne plus parce que la foi n’en est plus ni le moteur, ni la boussole.

H. Küng, Ist die Kerche noch zu retten?, München, Ed. Piper, 2011. Baarn: Ten Have, 2011, 254 p.

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Dialoog

Ontmoeting

Solidariteit

Dialogue

Rencontre

Solidarité

Veillée oecuménique à Bois-Seigneur-IsaacLa campagne annuelle de Missio sur le thème «Solidarité sans détours» a choisi le Moyen Orient comme région phare. Dans ce cadre précis, une veillée oecuménique a été à Bois-Seigneur-Isaac. Des paroles fortes ont été échangées au cours de dif-férentes interventions. Le Père Tannous, Supérieur Général de l’Ordre libanais maronite, a rappelé que Dieu se laissait découvrir dans le dialogue. Le pasteur

Guy Liagre, président de l’Eglise protes-tante unie de Belgique, a insisté dans ces propos sur la responsabilité des Eglises d’Europe pour celles du Moyen-Orient: «Nous devons nous exprimer contre toute forme de violence, toute forme d’atteinte à la liberté de conscience et à la liberté de pratiquer sa religion.». Mgr Léonard, archevêque de Malines-Bruxelles a rappe-lé non sans humour que nous pouvions

«espérer que l’unité entre les chrétiens se fasse avant la parousie (= le retour du Christ en gloire au jugement dernier) et que nous étions en très bonne voie pour cela». Il a aussi partagé comment chaque tradition enrichit la tradition catholique: la Parole de Dieu, le sens de la belle liturgie et la place de l’Esprit Saint.

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La voix des peuples

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La voix des peuples

Column Une réponse chrétienne à la crise financière Michel Coppin

Les médias parlent tous d’une nouvelle crise financière. Sous peu, nous en arriverons à penser qu’ils trouvent amusant de divertir les gens avec des nouvelles, à ce sujet. Les medias ont le devoir d’informer et ils le font généralement très bien. Notre tâche est cependant de bien réfléchir à la crise, de la replacer dans le cadre de l’Eglise universelle et de l’examiner dans le sens du message évangélique.

Crise financière?

Qu’entendons-nous par «crise financière»? Que notre argent a moins de valeur, que nos disponibilités sont moindres, et que nous sommes donc moins en mesure de dépenser? Mais à force de ne parler que d’argent et de produits financiers, nous rétrécissons notre manière d’envisager les choses. En fait, l’argent n’est rien d’autre qu’une série de billets et de pièces de monnaie que nous pouvons utiliser pour obtenir quelque chose en échange. Nous recevons cela en contrepartie d’un travail fourni. Nous l’obtenons en paiement d’un produit que nous voulons vendre. Les banques nous en donnent de l’intérêt si elles peuvent l’utiliser pour un investissement dans la durée. Nous pouvons encore acheter bon nombre de choses. Cependant, l’utilisation de l’argent doit toujours se référer à l’homme. L’argent permet à l’homme de survivre et de créer des emplois. Il contribue à l’entretien des relations entre les personnes. Il peut assurer la sécurité. C’est un facteur de développement de communautés.

Origine de la crise:l’homme?

Une crise peut survenir lorsque des gens conçoivent, grâce à l’argent, des processus pour encaisser plus vite des bénéfices accrus, sans se soucier du fait que cela repose ou non sur une base solide. Il n’est pas de ma compétence de rechercher ici les causes de la crise actuelle. Je veux juste poser la question de savoir si, finalement, une crise financière ne serait pas simple-ment provoquée par les hommes eux-memes.N’est-ce pas parce qu’il y a quelque chose de malsain dans les relations humaines ou dans les relations avec des personnes aux prises avec des billets et des pièces de monnaie, que ces derniers soient ou non virtuels? L’argent évoque l’avoir et le pouvoir. Ces derniers en réfèrent au désir humain de posséder toujours plus. Ce générateur d’action prend racine au fond de nous-mêmes. Il est assurément bon que nous l’ayons en nous, car sans lui nous n’aurions jamais pu survivre. Mais chaque générateur doit être ajusté. Parfois, il fonctionne trop fort et nécessite alors d’être refroidi. Intelligence et sagesse peuvent en cela nous aider. Il s’agit de réfléchir à ce dont j’ai vraiment besoin pour vivre et être heureux. Je dois me demander ce qui me rend vraiment heureux et si je suis capable d’inclure l’autre dans ce bonheur. Est-ce que je permets à l’autre de trouver la vie satisfaisante et de donner une orientation à cette dernière? Peut-il aussi vivre heureux? Cela nous amène à la question du sens même de notre vie. Qui donne un sens à ma vie et quelles sont les valeurs que j’estime précieuses en l’occurrence?

Christ et l’argent

Le Christ lui-même a été confronté à cette question essentielle. Il a également été soumis à cet attrait de l’avoir et du pouvoir. Il y a réfléchi. Il a prié son Père de lui donner «la lumiè-re». Il a fait des choix fondamentaux dans sa vie. L’attention s’était portée sur ceux qui dans la société ou dans le monde religieux n’étaient pas pris en compte. Le dialogue avec son Père, Lui a donné le sens de sa vie, parce que, par ces contacts, Il a appris qu’il n’était pas seul dans le monde et qu’il devait infléchir ses exigences vers des efforts en vue d’arriver à une vie soli-daire. Comme il savait confier à Dieu sa vie entière, ainsi savait-Il aussi partager ses talents avec les hommes. Il a même donné sa vie pour le salut de tous les peuples. En bref, je pré-sume que nous ne pourrons résoudre la crise financière que si nous la percevons nettement comme étant une crise entre les personnes, comme une question de sens et d’orientation de notre vie. Je vous souhaite déjà à tous un bon voyage dans la progression de votre réflexion personnelle.

OURS 12ième année

Suara est un mot indonésien qui signifie ‘voix’. Suara veut être la voix des sans-voix et de tous les peuples qui crient dans le ‘désert’. Au-delà d’être la voix des “sans-voix”, il nous revient de faire en sorte que les “sans-voix” en arrivent à avoir leur propre voix.

Directeur national de Missio: Michel CoppinRédaction en chef: Kenny FrederickxRédaction finale: Sylvain Kalamba Nsapo

Ont collaboré: Sylvain Kalamba, Michel Coppin, Anne Dupont, Michel Musimbi, Kenny Frederickx, Emmanuel Babissagana, Armelle Griffon, Catherine De Ryck, Herlinde Hiele, Caroline Medats, Michel Coppin, Jacques Henrard.Photos et illustrations: Missio, Shutterstock en Xavier Vankeirsbulck.Editeur Responsable: Michel Coppin, Bd du Souverain 199, 1160 Bruxelles.Mise en page et impression: Halewijn Printing & PublishingMissio est une organisation internati-onale de solidarité et d’échange entre communautés chrétiennes et de promo-

tion des rencontres interculturelles et interreligieuses. Près de 130 pays sont reliés à Missio qui soutient plus de 1000 communautés chrétiennes locales. Notre organisation prend soin de 112.053 institutions (les services de santé, la lutte contre la pauvreté, la formation pasto-rale et sociale, l’enseignement, etc).

Numéro de compte de l’ASBL Missio (Boulevard du Souverain 199, 1160 Bruxelles):IBAN: BE19 0000 0421 1012 BIC: BPOTBEB1

Il ne nous est pas permis de délivrer une attestation fiscale pour les versements effectués sur ce compte.

MissioSecrétariat NationalBd. du Souverain 199, 1160 BruxellesTél.: 02 679 06 30 - Fax: 02 672 55 69E-mail: [email protected] web: http://www.missio.be/

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Des moyens de transport pour la Mission

Missio élargit son champ d’action pour les moyens de transport. Outre nos projets pour l’Afrique et l’Asie, nous soutenons également des pro-grammes pour le Guatemala, la Bolivie et le nord-est du Brésil.

Caroline Medats Dans ces durs mois d’hiver chacun en a fait une fois ou l’autre l’expérience: une voiture qui ne démarre pas ou un pneu crevé. Ces inconvénients entraînent invariablement beaucoup de frustration et viennent dérégler nos plans de la journée. Heureusement, un bus s’arrête à notre porte ou nous avons la possibilité de prendre notre vélo. Dans les régions du Sud, les communautés chrétiennes n’ont hélas pas cette chance. Les transports publics sont souvent rares et irréguliers, les routes sont en mauvais état et l’achat d’un véhicule est un investissement lourd.

Depuis des années, Missio soutient donc des communautés d’Eglises locales en Afrique, en Asie et en Amérique latine, dans leur achat d’un moyen de transport. Par ce soutien financier des hommes d’Eglise remplis d’énergie peuvent aller de village en village visiter des familles ayant un immense appétit de la vie. Ils peuvent ainsi être proches des fidèles et organiser des réunions de prière, des célébrations liturgiques et des activi-tés spirituelles. Les ministres de l’Eglise et des

catéchistes qui, au nom de Jésus, sont au service de la paix, de la justice, de la création de commu-nautés et du développement des chances d’une vie meilleure, peuvent ainsi mieux répondre aux besoins des fidèles. Un tel moyen de transport est un petit mais très important maillon dans le fonctionnement d’une paroisse.

Depuis plus de quarante ans, Missio finance l’achat des moyens de transport de petite taille, comme des motos, des vélos, des ânes et des moteurs pour petits bateaux, en Asie, en Afrique et en Amérique latine. En Asie, notamment l’Inde, les Philippines et le Sri Lanka appartiennent à nos pays partenaires. En Afrique ce sont la RDCongo, le Rwanda et le Burundi. Récemment, Missio a décidé de ne plus limiter, en Amérique latine, son aide à Haïti, mais de l’étendre aussi aux communautés du Guatemala, de la Bolivie et du nord-est du Brésil, pour les aider à développer davantage leurs activités pastorales. Ce faisant, nous leur délivrons un message: votre œuvre missionnaire nous tient à cœur!

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Le monde entier en crise Notre société mondiale traverse une crise généralisée: crise de la foi, crise politique, crise économique, crise environnementale. Nous avons voulu savoir ce que Mark Eyskens en pense. Ancien premier ministre doublé de professeur émerite- écrivain, ce vieux routier de la vie et de la science a des choses à dire au sujet de l’avenir de notre civilisation en crise. L’interview qu’il a accordée à la rédaction de Suara en dit long.

Herlinde Hiele & Sylvain Kalamba Nsapo

Missio: Crise de la foi, crise politique, crise économique. Tout semble en crise. Quel est votre sentiment à ce sujet? Quelles sont, à vos yeux, les alternatives à la crise actuelle?

Mark Eyskens: «Crise ne veut pas nécessai-rement dire catastrophe. Ce mot qui vient du grec se veut être un moment de réflexi-on, de critique. On assiste à une transfor-mation, aux douleurs d’enfantement d’une nouvelle société mondiale. Nous sommes confrontés à de grands défis, notamment en termes de démographie et de migration. Au début du 20ième siècle, nous étions un «deux petits milliards». Aujourd’hui, nous sommes 7 milliards. Dans cent ans, nous serons peut-être dix milliards. Il faut le redire. Nous vivons aujourd’hui les douleurs d’enfantement d’une nouvelle société. Le «continent blanc» est numéri-quement sur le chemin du retour. Dans 30 ans, l’Europe ne représentera que 5% de la population mondiale. Elle connaî-tra donc logiquement l’affluence de gens venant d’ailleurs. Les jeunes européens doivent apprendre à vivre et à travailler avec des personnes dont les cultures sont différentes de la leur. Sinon, ils seront une génération perdue.

Du point de vue de la foi, la situation actuelle nous place devant d’énormes défis. Ces défis consistent notamment à trans-former les changements technologiques ou autres en véritable progrès humain. C’est une question éminemment éthique. La religion y a un rôle à jouer. Il convient de mettre à profit le message du Christ qui a changé l’évolution de l’homme. Ce mes-sage toujours actuel doit être ouvert à tous les hommes. Il faut une Eglise d’ouver-ture qui tente de reformuler l’Evangile en des mots pertinents pour l’homme d’au-jourd’hui. La crise actuelle a une dimen-sion économique. On le sait. Cela ne peut empêcher de reconnaître que l’Occident a accompli des progrès énormes.»

Missio: A-t-on af faire à une crise très grave. Est-ce que ça va très mal aujourd’hui?

Eyskens: «On doit certes serrer la ceinture. Mais les gens ne se réalisent pas la valeur de ce qu’on a en Europe. Depuis 60 ans, il y a la paix. C’est une évolution fort positive. Mais la crise économique risque de pousser les gens à fermer les yeux sur toutes les performances historiques du monde occidental. Face à cette crise, il faut insister sur l’alternative consistant à être moins matérialiste, plus attaché au

sens de l’humain.»

Missio: Est-ce que la crise généralisée de notre temps peut permettre à l’Eglise de retrouver les gens en quête de sens?

Eyskens: «Actuellement, la quête de sens est réelle dans la vie de nombreuses personnes. C’est le cas des jeunes qui veulent donner un sens à la vie. Mais ils ont l’impression que l’Eglise esquive les problèmes. A la télévision, on voit les images de la misère, de la violence, etc. Alors on se demande: où est Dieu en tout cela ? Est-il en grève?

Est-il un Dieu tout puissant s’il laisse le monde sombrer dans la souffrance? Voici les réponses de l’Eglise: c’est un mystère, il faut souffrir pour mériter le ciel ; les voies de Dieu sont insondables. A mon avis, il faut donner une autre réponse: Dieu est solidaire. Il lutte avec les gens de bonne volonté contre le mal. Dieu n’est pas le père tout-puissant, qui pèse sur ma tête pour décider de ce qui se passe. Dieu est pour moi un frère qui est à mes côtés. Dieu est partout. Si je vais à l’hôpital et je vois les efforts des bénévoles, des médecins et des infirmiers aux patients, je vois Dieu. De même que Dieu est présent quand les parents viennent visiter leurs malades.. Qu’on puisse arriver à un accord institu-tionnel dans une Belgique aux multiples couleurs et sensibilités, c’est un signe de sa présence à nos côtés».

Missio: Quelles sont les leçons que l’Eglise peut tirer de la crise actuelle?

Eyskens: «Tout d’abord, l’Église catholique a tout intérêt à s’ouvrir à d’autres cultures et religions. Elle doit adapter son discours à la langue du peuple. Par ailleurs, il y a certaines choses structurelles qui doivent être ajustées. Prenons le cas du célibat! Pour ma part, je suis favorable au mari-age des prêtres. Contrairement à ce qu’on pense dans certains milieux. Ca rappro-cherait le clergé du monde. On laisserait aux prêtres la liberté de choix. En outre, l’Eglise a besoin d’un nouveau souffle. Le prochain pape devra s’y atteler. Ce qu’il faut ajouter, c’est que l’Eglise doit, de toute urgence, promouvoir l’intégration des femmes dans sa hiérarchie. Il est temps de créer des femmes cardinales. Ce serait une révolution! Il faut que l’Eglise cesse de rejeter catégoriquement les femmes. C’est une discrimination pure et simple.

Je me répète et me résume. J’invite l’Eglise à s’ouvrir à d’autres religions et à leurs valeurs pertinentes. Que le célibat ne soit pas obligatoire. Le mariage des prêtres les rendrait plus proches des fidèles. Que les femmes soient intégrées dans la hié-rarchie de l’Eglise. Que le pape de demain convoque un grand Concile œcuménique. Lequel Concile intégrera notamment les questions telles que le sens de la vie, l’ap-port de la science moderne, etc.».

Missio: Est-ce que la société peut apprendre de l’Eglise?

Eyskens: «Bien sûr. Depuis 2000 ans, l’Eglise ne cesse d’offrir des réponses à la société. Je ne parle pas seulement du christianisme, mais de toutes les religions auxquelles je reconnais la capacité d’offrir de grandes valeurs. J’ai à la maison une copie du Coran. Il y a de belles choses là-dedans. Mais il y a aussi des passages moins beaux comme cela se perçoit dans chaque livre religieux. Il faut savoir que la Bible n’échappe pas à ce constat en s’exprimant parfois comme si Dieu allait venir jeter des bombes sur la terre. Dieu est pour moi transmanent, il est à la fois transcendance et immanence».

«Dieu est pour moi un frère qui est à mes côtés. Dieu est partout. Si je vais à l’hôpital et je vois les efforts des bénévoles, des médecins et des infirmiers aux patients, je vois Dieu. De même que Dieu est présent quand les parents viennent visiter leurs malades. Qu’on puisse arriver à un accord institutionnel dans une Belgique aux multiples couleurs et sensibilités, c’est un signe de sa présence à nos côtés.»

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