Sclérose latérale amyotrophique

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Scl rose lat rale amyotrophique Physiopathologie et perspectives th( rapeutiques Jacques Hugon La sclErose latErale amyotrophique (SLA)est une affection neurodEgEnErative dEcrite par J.M. Charcot au XIXe siEcle et caractErisEe par I'association d'un deficit moteur progressif central et pEriphErique touchant la plupart des mus- cles du corps, de fasciculations, d'une amyotrophie et des troubles respiratoi- res. Le nora provient de la dEgEnErescence des faisceaux pyramidaux cortico- spinaux qui descendent latEralement darts la rnoeUe Epini~re. Le diagnostic de la maladie repose sur la presence de caract~res cliniques positifs et nEga- tifs qui ont EtE rEcemment passes en revue 15]. Les explorations neurophysio- Iogiques telles que I'Electromyogramme ou les potentiels moteurs EvoquEs permettent de confirmer I'atteinte neurogEne des muscles et de quantifier I'importance de I'atteinte rnotrice cortico-mEdullaire. L'~ge de debut se situe souvent autour des 55-65 arts bien que des formes a debut plus prEcoce ou plus tardif soient rencontrEes. L'Evolution de la maladie est en gEnEral de 3 ans et aucun traitement curatif n'a EtE dEcouvert depuis plus d'un siEcle. Sur le plan neuropathologique, la SLA est marquee par la presence d'une dEgE- nErescence des neurones du cortex moteur et des motoneurones pEriphEri- ques du tronc cErEbral et de la moelle responsable d'une amyotrophie neu- rog~ne darts les muscles innervEs par ces motoneurones. Aucune atteinte sensitive n'est notEe en gEnEral tant d'un point de vue clinique que neuropa- thologique. Sur le plan EpidEmiologique la majoritE des formes de SLA est sporadique alors que I'on dEcrit 5 a 10 % de formes famUiales. L'incidence de la maladie est environ de 1,5 pour 100 000 habitants, et est gEnEralement rEpartie de fat;on identique dans toutes les regions du monde E I'exception de certaines regions du Pacifique comme I~e de Guam ou la pEninsule de Kii au Japon oCi I'incidence peut atteindre 4 pour 100 000 habitants et parfois plus. Darts ces zones parUculi~res la SLA est souvent associEe E un syndrome parkinsonien et a une dEmence formant le complexe SLA-parkinson-dEmence de Guam. Dans ce bref chapitre, nous allons dEcrire les principales hypotheses physio- pathologiques de la SLA et les approches et perspectives thErapeutiques I'aube du X,XI e si~cle. La SLA comme beaucoup de maladies neurodEgEnEra- tires survient souvent chez des sujets aprEs plusieurs dEcennies. Le vieillisse- merit des cellules du systEme nerveux est doric un des co-facteurs important

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Scl rose lat rale amyotrophique

Physiopathologie et perspectives th( rapeutiques

Jacques Hugon

La sclErose latErale amyotrophique (SLA) est une affection neurodEgEnErative dEcrite par J.M. Charcot au XIX e siEcle et caractErisEe par I'association d'un deficit moteur progressif central et pEriphErique touchant la plupart des mus- cles du corps, de fasciculations, d'une amyotrophie et des troubles respiratoi- res. Le nora provient de la dEgEnErescence des faisceaux pyramidaux cortico- spinaux qui descendent latEralement darts la rnoeUe Epini~re. Le diagnostic de la maladie repose sur la presence de caract~res cliniques positifs et nEga- tifs qui ont EtE rEcemment passes en revue 15]. Les explorations neurophysio- Iogiques telles que I'Electromyogramme ou les potentiels moteurs EvoquEs permettent de confirmer I'atteinte neurogEne des muscles et de quantifier I'importance de I'atteinte rnotrice cortico-mEdullaire. L'~ge de debut se situe souvent autour des 55-65 arts bien que des formes a debut plus prEcoce ou plus tardif soient rencontrEes. L'Evolution de la maladie est en gEnEral de 3 ans et aucun traitement curatif n'a EtE dEcouvert depuis plus d'un siEcle. Sur le plan neuropathologique, la SLA est marquee par la presence d'une dEgE- nErescence des neurones du cortex moteur et des motoneurones pEriphEri- ques du tronc cErEbral et de la moelle responsable d'une amyotrophie neu- rog~ne darts les muscles innervEs par ces motoneurones. Aucune atteinte sensitive n'est notEe en gEnEral tant d'un point de vue clinique que neuropa- thologique.

Sur le plan EpidEmiologique la majoritE des formes de SLA est sporadique alors que I'on dEcrit 5 a 10 % de formes famUiales. L'incidence de la maladie est environ de 1,5 pour 100 000 habitants, et est gEnEralement rEpartie de fat;on identique dans toutes les regions du monde E I'exception de certaines regions du Pacifique comme I~e de Guam ou la pEninsule de Kii au Japon oCi I'incidence peut atteindre 4 pour 100 000 habitants et parfois plus. Darts ces zones parUculi~res la SLA est souvent associEe E un syndrome parkinsonien et a une dEmence formant le complexe SLA-parkinson-dEmence de Guam. Dans ce bref chapitre, nous allons dEcrire les principales hypotheses physio- pathologiques de la SLA et les approches et perspectives thErapeutiques I'aube du X,XI e si~cle. La SLA comme beaucoup de maladies neurodEgEnEra- tires survient souvent chez des sujets aprEs plusieurs dEcennies. Le vieillisse- merit des cellules du systEme nerveux est doric un des co-facteurs important

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dans les voles molEculaires et cellulaires conduisant E la dEgEnErescence neuronale.

1. Mort neuronale au cours de la SLA

La SLA est une maladie neurodEgEnErative marquee par la mort selective des neurones du cortex moteur et des moteurones du tronc cErEbral et de la moelle. La perte progressive de ces deux fonctions motrices centrale et pEri- phErique est responsable de la plupart des signes cliniques rencontres au cours de cette affection comme I'atteinte pyramidale, l'amyotrophie et les troubles respiratoires et bulbaires. La cause de cette mort neuronale selective est encore inconnue m~me si des progrEs rEcents ont EtE rEalisEs dans la comprehension des mEcanismes molEculaires et cellulaires responsables. La mort cellulaire en gEnEral (et neuronale en particuller) regroupe deux phEno- mEnes patrols intriquEs : la nEcrose et I'apoptose. Si la nEcrose neuronale sur- vient dans des conditions pathologiques plut0t aigu~s telles que I'ischEmie cErEbrale ou les traumatismes cr~niens, I'apoptose neuronale se rencontre au tours du dEveloppement du systeme nerveux, et, selon un grand nombre d'auteurs, au cours des maladies neurodEgEnEratives comme la maladie d'Alzheimer et la SLA. Des arguments rEcents suggErent que les motoneuro- nes entameraient un programme apoptotique conduisant E la perte neuro- nale observEe. Quels sont donc les mEcanismes pathologiques qui pourraient ~tre E l'origine de cette perte motoneuronale selective ?

Plusieurs theories sont proposEes, gEnEtiques, toxiques, dysimmunitaires et protEiques, qui toutes peuvent avoir des facteurs molEculaires pathologi- ques communs.

2. Facteurs g( n tiques

L'importance des facteurs gEnEtiques dans la SLA s'est trouvEe renforcEe par la dEcouverte de mutations portant sur le gEne de la superoxyde dismutase (SOD1) dans certaines formes familiales et par I'association E d'autres anoma- lies gEnEtiques.

2.1. G~ne SOD 1

Cinq E 10 % des formes cliniques de SLA sont autosomiques dominantes famiUales, et, en 1993, Rosen et al. ont mis en Evidence des mutations du g~ne codant pour la Cu/Zn SOD sur le chromosome 21 [27]. La SOD est une enzyme qui intervient dans le mEtabolisme des radicaux fibres cellulaires. Depuis cette date, plus de cinquante mutations diffErentes ont ~tE retrouvEes dans ces formes familiales, qui cependant ne reprEsentent, au total, que 20 %

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de toutes les formes familiales. Ces mutations ne semblent pas compromettre I'activitE de cette enzyme 13] mais pourraient entra|ner un gain de fonction IEtal pour les motoneurones. II existe aussi une hEtErogEnEitE liEe ~ ces muta- tions car des phEnotypes cliff, rents de SLA peuvent Etre assodEs & une m~me mutation de la SOD1 [12].

En 1994, Gurney et al. ont Etabli une lignEe de souris transgEniques surexprimant la SOD1 mutEe humaine [13]. Ces souris sont marquees par l'apparition d'une atteinte motrice avec dEgEnErescence des motoneurones mEdullaires. Des Etudes rEcentes ont montrE que plusieurs mutations de la SOD1 humaine Etaient responsables d'atteintes motrices chez les animaux transgEniques et plusieurs lignEes de souris transgEniques ont ainsi EtE Eta- blies (G93A, G37R, G85R, G86R, etc.) exprimant des phEnotypes varies. Pour la premiere fois, ces lignEes reprEsentent un modEle experimental de dEgE- nErescence motoneuronale basEe sur des mutations humaines, modEle qui s'avEre trEs utile pour Etudier ce phEnom~ne et tester de nouvelles voles thE- rapeutiques 137].

2.2. Autres g~nes

Une ~tude portant sur une famille tunisienne atteinte d'une forme recessive a identifiEe un locus sur le chromosome 2q33 mais le g~ne lui-mEme n'a pas encore EtE identifiE [15]. Des mutations ont EtE aussi mises en Evidence au niveau du g~ne codant pour la fraction Iourde des neurofilaments chez des patients atteints de formes sporadiques de SLA [11 ]. Ces mutations n'ont pas ErE dEcrites dans les formes familiales de la maladie ni chez les sujets sains mais elles ont ErE retrouvEes chez des individus non atteints appartenant aux families des cas sporadiques. Cela permet de penser que ces mutations sont des facteurs prEdisposants a la maladie et ne sont pas suffisantes ~ elles seu- les pour provoquer I'atteinte neurologique motrice.

3. Excitotoxicit6

La relation entre I'excitotoxicitE et I'atteinte des motoneurones a EtE initiEe sur la base d'Etudes faites apropos du lathyrisme. L'excitotoxidtE correspond

la destruction post-synaptique des neurones Iorsque les rEcepteurs du glu- tamate, neuromEdiateur excitateur du syst~me nerveux central, sont activEs de fa(;on trop importante ou trop prolongEe par le glutamate ou par des ago- nistes. Ce phEnom~ne est impliquE dans un certain nombre d'affections neu- rologiques allant de I'ischEmie cErEbrale ~ la maladie d'Alzheimer [7]. Le lathyrisme est caractErisE sur le plan clinique par I'apparition, en gEnEral rapide, d'une paraparEsie ou d'une paraplEgie chez des patients ayant con- sommE, pendant plusieurs semaines Lathyrussativus, une plante contenant de la BOAA (bEta-oxalylamino-L-alanine), une toxine qui est un agoniste des rEcepteurs 81utamatergiques [24l. La consommation de cette plante survient dans certains pays d'Asie ou d'Afrique en pEriode de sEcheresse. L'adminis-

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tration chronique de BOAA E des singes reproduit les aspects cliniques et pathologiques de I'affection humaine avec atteinte des cellules motrices du systEme nerveux central [16]. Une autre atteinte motrice, la SLA de I'le de Guam, a EtE associEe E I'absorption de BMAA (b~ta-mEthylamino-L-alanine), une substance qui est aussi un agoniste glutamatergique et qui est contenue darts les noix de cicades (Cicas circinalis) consommEes par les patients [33]. Mais, pour certains auteurs, la concentration de BMAA dans les noix de cica- des impliquEes n'est pas suffisante pour expliquer une Eventuelle toxicitE.

Plusieurs Etudes ont permis d'associer la SLA a des perturbations mEta- boliques pouvant gEnErer un mEcanisme excitotoxique. Des taux ElevEs de glutamate ont EtE retrouvEs dans le sang, dans le liquide cEphalorachidien et dans le cerveau de patients atteints de SLA [25]. Plus rEcemment, il a EtE mon- trE que la recapture du glutamate Etait perturbEe dans le cortex moteur et dans la moelle EpiniEre des patients par rapport E ce qui est observ~ chez les sujets tEmoins [28]. Ce deficit pourrait ~tre lie a un dEfaut du transporteur glial du glutamate (GLT1) dans les regions affectEes [29]. Des anomalies de la pro- duction des ARNm du transporteur GLT1 (encore appelE EAAT2) du gluta- mate ont EtE retrouvEes chez un certain nombre de patients [22]. Toutes ces perturbations pourraient entraTner une diminution de la recapture du gluta- mate conduisant a une mort prEmaturEe des motoneurones. Des facteurs neurotoxiques ont EtE dEcouverts dans le liquide cEphalorachidien (LCR) de patients atteints de SLA [9]. Leur nature est inconnue mais la toxicitE de ces facteurs est bloquEe in vitro par des antagonistes des rEcepteurs AMPA/kai" nate du glutamate, ce qui suggEre la presence d'un mEcanisme excitotoxique. Cette toxicitE est aussi bloquEe par des agents antioxydants [34].

Les premiers essais thErapeutiques ayant montrE une IEg~re prolonga- tion de la survie des patients ont utilisE une molecule anti-excitotoxique, le

riluzole ,, qui reste jusqu'E present le seul medicament approuvE par les autoritEs en Europe et aux I~tats-Unis [20].

4. Stress oxydatif

La dEcouverte de mutations du gene de la SOD1 dans certaines formes fami- liales de SLA et la mise au point de souris transgEniques mutantes pour le g~ne de la SOD1 humaine ont stimulE les rechercbes concemant les relations entre stress oxydatif et SLA en raison de la toxicitE cellulaire des radicaux libres. L'activitE enzymatique de la SOD semble normale chez les patients atteints de SLA [26]. Une augmentation de I'immunorEactivitE pour la nitro- tyrosine, tEmoin de I'agression des radicaux libres, a EtE retrouvEe au niveau des motoneurones mEdullaires de patients il], et des anomalies protEiques flees au stress oxydatif ont EtE raises en Evidence au niveau du cortex et de la moelle de patients [4, 30]. Tr~s rEcemment, une Etude portant sur le LCR de patients atteints de formes sporadiques de SLA a rEvEIE une augmenta- tion importante de la nitrotyrosine par rapport aux LCR de sujets tEmoins, ce qui sugg~re un rEle possible du peroxynitrite comme mEdiateur du stress oxydatif et de I'apport des nitrates au niveau des tyrosines dans le syst~me

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nerveux central des sujets atteints 135]. II est intEressant de noter que rexci- totoxicitE peut Etre aussi incriminEe dans la production de radicaux fibres 121].

5. Anomalies du cytosquelette

Les neurofilaments constituent un des supports essentiels permettant racqui- sition et le maintien de la forme des neurones ainsi que le transport axonal. Sur le plan neuropathologique, des accumulations de neurofilaments phos- phorylEs appelEs sphEro'fdes sont notes dans la moelle des patients atteints de SLA. Ces structures peuvent correspondre E des dilatations axonales des motoneurones. La signification de ces anomalies histopathologiques est mal connue mais rinjection intrathEcale expErimentale de ka'fnate, puissante toxine agoniste des rEcepteurs glutamatergiques reproduit ces lesions asso- ciEes E une dEgEnErescence des motoneurones [1 7]. Les souris transgEniques surexprimant certaines formes biochimiques de neurofilaments comme les fradions Iourdes et IEgEres ont des anomalies neuronales du cytosquelette voisines de celles observEes chez les patients ainsi que certains deficits neu- rologiques [1 9]. REcemment, il a ErE montrE que la surexpression de la chaine Iourde des neurofilaments chez les souris transgEniques SOD1 possEdait des propri~tEs protedrices envers la mutation SOD [81. Le r01e exad des neurofi- laments dans la SLA reste encore a dEcouvrir, mais ils pourraient agir comme co-facteurs aggravant le processus de dEgEnErescence des motoneurones.

6. M cardsmes auto-immuns

Toute une sErie d'Etudes diniques et fondamentales ont impliquE un mEca- nisme auto-immun dans la physiopathologie de la SLA. Des anticorps dirigEs contre des canaux calciques voltage-dEpendants ainsi que contre des gangliosides GM1 ont ~E retrouvEs dans le serum des patients [32]. De mEme des modules de dEgEnErescence motoneuronale aprEs auto-immuni- sation ont EtE dEcrits. Malheureusement, il n'est pas possible de dire aduelle- ment sices anomalies sont une cause ou une consequence de la maladie. De plus, toutes les tentatives thErapeutiques utilisant des immunosuppresseurs n'ont pas montrE d'efficacitE.

7. Facteurs neurotrophiques

La survie des motoneurones depend pour une bonne part de la biodisponibi- IRE des facteurs trophiques dans leur environnement. La suppression de

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l'apport en facteurs neurotrophiques entraTne I'induction de I'enzyme neuro- nale permettant la synth~se de I'oxyde nitrique (NO, nltricoxid). II a EtE montrE que le NO peut ~tre responsable d'une dEgEnErescence des motoneurones avec formation de I'ion peroxynitrite lui-m~me inducteur de lesions dues au stress oxydatif [10l. Les facteurs neurotrophiques pourraient ~tre neuropro- tecteurs dans des conditions optimales mais aussi toxiques en cas de stress cellulaire, ce qui peut aggraver celui-ci. Le traitement de la SLA par des fac- teurs trophiques se pose donc en termes d'efficacitE et de sEcuritE. Jusqu'E present aucun traitement utilisant ces facteurs n'a permis d'obtenir des rEsul- tats statistiquement significatifs dans cette maladie. Une Etude expErimentale rEcente a montrE que la thErapie gEnique utilisant le facteur NT3 (neurotro- phine 3) pouvait ~tre efficace clans un modEle de dEgEnErescence motrice chez la souris [14l. Le transfert de g~nes de facteurs trophiques avec un vec- teur adEnovirus pourrait ~tre utile ultErieurement dans le traitement de la SLA.

8. Vuln6r bflit6 neuronale s lective

La mort des cellules nerveuses est un phEnom~ne observE, aussi bien au cours du dEveloppement humain qu'au cours des maladies neurodEg~nEra- tives et des lesions aigu~s du cerveau, comme celles provoquEes par les trau- matismes craniens ou les infections cErEbrales. Comme pour les autres cellu- les, les caractEristiques morphologiques et molEculaires ont permis de diff~rencier la mort neuronale en processus nEcrotique ou apoptotique bien que la presence de formes intermEdiaires soit actuellement proposEe par cer- rains auteurs. Les atteintes cellulaires touchant les regions de I'encEphale sont souvent diffuses, mais dans certains cas, comme clans la SLA ou la maladie de Parkinson, seul un petit nombre de neurones sont touches, notamment au debut de la maladie. La Iocalisation selective de ces pertes neuronales est bien connue mais les raisons precises de cette vulnErabilitE spEcifique sont encore a dEcouvrir. Cette Iocalisation est aussi souvent la base des forrnes cli- niques de la maladie. Dans la SLA, les cellules nerveuses du cortex moteur et les motoneurones mEdullaires et de certains noyaux du tronc cErEbral sont sElectivement atteints. Plusieurs hypotheses sont proposEes pour expliquer cette vulnErabilitE particuli~re de certains neurones.

La possibilitE de limitation de certaines actions nEfastes du calcium intra- cellulaire reprEsente un des facteurs importants pouvant expliquer cette sElectivitE. Les cellules poss~dent des protEines tamponnant le calcium comme la parvalbumine et la calbindine D-28K. Les motoneurones mEdullai- res semblent dEpourvus d'un certain nombre de ces protEines (qui prot~gent contre I'excitotoxicitE et le stress oxydati0 a I'exception des motoneurones EpargnEs clans la SLA comme ceux des noyaux occulomoteurs et du noyau d'Onuf [18]. D'autres Etudes ont porte sur la composition cellulaire en rEcep- teurs du glutamate des motoneurones. Le rEcepteur AMPA/ka'fnate GluR2 qui est peu permeable au calcium ne serait pas present sur la membrane des motoneurones chez I'homme, ce qui rend ceux-ci beaucoup plus sensibles

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aux entrees du calcium dans la cellule [31]. De m~me, certains rEcepteurs mEtabotropiques du glutamate semblent possEder des propriEtEs neuropro- tectrices contre la toxicitE du glutamate. Une Etude rEcente a montrE que les motoneurones mEdullaires en gEnEral, sauf les neurones EpargnEs dans la SLA, Etaient dEpourvus des rEcepteurs mGluR5 Et avaient un nombre rEduit de mGluR1 [2]. Cette expression diffErente des rEcepteurs mGluR pourrait selon les auteurs fournir une explication E la vulnErabilitE selective des moto- neurones. Des Etudes ont montrE que les motoneurones Etaient particuli~re- ment sensibles aux flux intracellulaires de calcium [6]. Chez les souris transgEni- ques SOD1, il semble que la presence de la forme IEgEre des neurofilaments au sein des motoneurones puisse jouer un r61e aggravant en ce qui concerne la fois la vulnErabilitE des motoneurones et I'Evolution du deficit neurologi- que [36]. Dans I'avenir, de futures Etudes devront permettre de prEciser si la cause et la sElectivitE de la mort des motoneurones dans la SLA ont pour une part des fondements molEculaires communs.

9. Perspectives th rapeutiques

Le sujet a far I'objet d'une revue rEcente [23] et malheureusement aucun trai- tement curatif efficace n'existe actuellement. Depuis plusieurs annEes, des tentatives thErapeutiques utilisant les facteurs neurotrophiques ont ErE rEali- sees chez les patients atteints de SLA. Aucun rEsultat statistiquement signifi- catif n'a EtE obtenu jusqu'~ present, soit en raison du peu d'efficacitE des pro- duits utilisEs, soit en raison de leur toxicitE. D'autres essais thErapeutiques sont en cours qui utilisent de nouveaux facteurs trophiques ou de nouvelles voles d'administration.

Les molecules anti-excitotoxiques ont aussi ErE utilisEes. Ace jour seule une molecule, le riluzole, qui rEduit la liberation de glutamate a ErE approu- vEe par les autoritEs sanitaires europEennes et amEricaines. Un premier essai clinique a rEvEIE une augmentation mod&Ee de la survie des patients pre- nant le riluzole par rapport ~ celle observEe chez des patients sous placebo. Un deuxi~me essai, incluant un plus grand nombre de patients, a confirmE I'effEt sur la survie mais n'a pas dEmontrE d'action sur les paramEtres fonc- tionnels comme I'Evolution de la force motrice 1201.

,~ I'aube de ce nouveau millEnaire, un grand nombre d'EIEments man- quent encore pour comprendre la physiopathologie des formes sporadiques de la SLA. II est possible que ces atteintes soient d'origine multifactorielle incluant une susceptibilitE gEnEtique particuli~re, I'excitotoxidtE, le stress oxy- datif, une carence relative et locale en facteurs trophiques et bien-sfir certains facteurs molEculaires associEs au vieillissement cellulaire. L'approche thEra- peutique future devra peut-Etre combiner, comme pour le cancer, plusieurs molecules ou produits issus de la biotechnologie comme la thErapie gEnique. De m~me, des voles nouvelles d'administration plus efficaces et plus spEcifi- ques avec moins d'effets secondaires devront ~tre EtudiEes. II est possible d'espErer que ces thErapeutiques ralentiront I'Evolution de la maladie.

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