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U.F.R. de Sciences juridiques, administratives et politiques MASTER 1 DROIT Année universitaire 2009/2010 DROIT PRIVE COMPARE Cours de Mme Sophie ROBIN- OLIVIER Sommaire Fiche 1 Introduction au droit comparé Fiche 2 Accès au juge et fonction de juger (deux séances) Fiche 3 Le Code civil européen Fiche 4 L’imprévision (deux séances) - 1 -

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U.F.R. de Sciences juridiques, administratives et politiques MASTER 1 DROIT Année universitaire 2009/2010 DROIT PRIVE COMPARE

Cours de Mme Sophie ROBIN-OLIVIER Sommaire

Fiche 1 Introduction au droit comparé

Fiche 2 Accès au juge et fonction de juger (deux séances)

Fiche 3 Le Code civil européen

Fiche 4 L’imprévision (deux séances)

Fiche 5 La croyance légitime

Fiche 6 Droit européen et droit comparé

Fiche 7 Les conséquences de l’inexécution du contrat (deux séances)

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Fiche 8 La responsabilité pour faute délictuelle

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Eléments de bibliographie1. Ouvragesa. GénéralitésE. AGOSTINI, Droit comparé, PUF, 1988M. ANCEL, Utilités et méthodes du droit comparé, IDES ET CALENDES, Neuchâtel, 1971G. CANIVET, M. ANDENAS et D. FAIRGRIEVE (dir.), Comparative Law Before the Courts, BRITISH INSTITUTE OF INTERNATIONAL AND COMPARATIVE LAW, 2004J.-L. CONSTANTINESCO, Traité de droit comparé, LGDJ, T. 1 (1972), T. 2 (1974), T. 3 (1983)

G. CUNIBERTI, Grands systèmes de droit contemporains, L.G.D.J, 2007R. DAVID, C. JAUFFRET-SPINOSI, Les grands systèmes de droit contemporain, 11ème éd., DALLOZ, 2002M. FROMONT, Grands systèmes de droit comparé, 4ème éd., DALLOZ, 2002J.-F. GERKENS, Droit privé comparé, LARCIER, 2007M.-A. GLENDON, M. GORDON, P. CAROZZA, Comparative Legal Traditions, In a Nutshell, West Group, 1999 M. VAN HOECKE (dir.), Epistemology and Method of Comparative Law, HART PUBLISHING, 2004R. LEGEAIS, Grands systèmes de droit contemporain, LITEC, 2004P. LEGRAND, Le droit comparé, PUF, 1999B. MARKESINIS, Juges et universitaires face au droit comparé, DALLOZ, 2006A. RILES (dir.), Rethinking the Masters of Comparative Law, HART PUBLISHING, Oxford, 2001R. RODIERE, Introduction au droit comparé, DALLOZ, 1979R. SACCO, La comparaison juridique au service de la connaissance du droit, ECONOMICA, 1991

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F. R. van der MENSBRUGGHE (dir.), L’utilisation de la méthode comparative en droit européen, Presses Universitaires de Namur, 2003K. ZWEIGERT et H. KÖTZ, An Introduction to Comparative Law, 3ème édition, CLARENDON PRESS, Oxford, 1998

b. Droit anglais et américain- R. DAVID, Le droit anglais, PUF, 2001- J.-A. JOLOWICZ, Droit anglais, DALLOZ, 2ème éd.- A. LEVASSEUR, Le contrat en droit américain, Dalloz, 1997 et Droit des Etats-Unis, Dalloz, 2ème éd., 1994- O. MORETEAU, Droit anglais des affaires, DALLOZ, 2000- H. LEVY-ULLMANN, Le système juridique de l'Angleterre, PANTHEON ASSAS, 1999 (Rééd. 1928)- E. SERVIDIO-DELABRE, Common law, Introduction to the English et American legal systems, DALLOZ, Coll. Hypercours, 2004- E. ZOLLER, Grands arrêts de la Cour suprême des Etats-Unis, PUF, 2000 et Le droit des Etats-Unis, Que sais-je ?, 2001

c. Droit allemand- M. FROMONT, Droit allemand des affaires, Montchrestien, 2001- M. PEDAMON, Le contrat en droit allemand, PUF, 2004

d. Droit italien- P. RICHARD, Introduction au droit italien : institutions juridictionnelles et droit procédural, L’Harmattan, 2004- R. SACCO, op. cit., 1991

2. RevuesRevue internationale de droit comparéRevue de science criminelle et de droit pénal comparéRevue des contrats (rubrique « droit comparé des contrats »)

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Revue de droit du travail (rubrique « droits d’ici, droits d’ailleurs »)

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Fiche 1 : Introduction au droit comparé

I. Textes introductifs

- Sur les difficultés de la comparaison

« Le comparatiste appréhende une culture juridique d’un lieu qui n’est jamais cette culture juridique même et qui se trouve toujours, dès lors, à tout le moins, un peu « hors-elle ». Aussi reste-t-il en lutte contre la difficulté d’articuler une relation avec l’autre qui ne peut être qu’asymétrique et doit-il constater que son activité critique demeure assujettie à ce dilemme. Dès lors, il faut délibérément tenter un déracinement aussi achevé que possible, car ce n’est que lorsqu’il essaie activement de repousser l’influence de son droit national, de sa culture juridique et de sa culture, comme la subordination de l’esprit qui en résulte avec la rétrécissement intellectuel qu’entraîne l’adhésion, que son entreprise de comparaison peut véritablement revendiquer un caractère intellectuel ».P. LEGRAND, Le droit comparé, PUF, Collection « Que sais-je ? », Paris, 1999, p. 64

- Sur les méthodes du droit comparé

«  La méthode fonctionnelle : certains auteurs font valoir qu’une comparaison ne peut être obtenue que par la détermination du problème à résoudre. Il s’agit alors de comparer les différentes solutions apportées pas les systèmes étudiés. Le comparatiste devra étudier non seulement les institutions juridiques en tant que telles, mais aussi et surtout le rôle et les objectifs qu’elles poursuivent dans leur propre système juridique. Ainsi, H.-C. Gutteridge

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enseigne que « les lois doivent être étudiées à la lumière de leur finalité ; il faut s’attacher à considérer leur dynamique plutôt que leurs aspects statiques, il faut déceler leur signification réelle plutôt que de rester accroché au relief thématique de ces lois ». De cette idée, est née l’approche fonctionnelle du droit comparé ». B. JALUZOT, « Méthodologie du droit comparé, bilan et prospective », RIDC 2005, n°1, p. 29

II. Exemples

La comparaison formelle : l’impasse

« Le tribunal administratif » et « the administrative tribunals ».Le tribunal administratif est le premier degré de juridiction de droit commun en matière administrative. Les administrative tribunals ont une compétence d’exception en matière de « sécurité sociale ». Ils tranchent exclusivement les litiges qui surviennent entre les organes des services sociaux et les assurés sociaux. On les nomme administrative tribunals dans la mesure où ils participent de l’administration des services sociaux.

Le dépassement de la comparaison formelle : les perspectives

« La cause réelle et sérieuse du licenciement » en droit français et la « raisonnabilité » du licencieusement en droit de common law. A première vue, la comparaison des droits français et anglais paraît se réduire à confronter deux notions très voisines : la cause réelle et sérieuse d’un côté, le raisonnable de l’autre. Il faut cependant dépasser cette première analyse qui tend à laisser penser que le motif de licenciement est appréhendé de manière identique en droit

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français et en droit anglais. Les différences très sensibles, se repèrent notamment à l’étude du contrôle par les juges des motifs du licenciement. Il y a là un facteur parmi d’autres, qui fait que le droit comparé ne peut être cantonné à une étude formelle de la règle du droit. L’étude de la mise en œuvre de la règle de droit est tout aussi importante que celle de la règle elle-même.D’un point de vue méthodologique la comparaison entre les deux notions est pertinente dans la mesure où elles remplissent une fonction identique – contrôle des justifications du licenciement –, malgré leur différence de régime.

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Fiche 2 : Accès au juge et fonction de juger

L’absence de théorie du précédent en droit français constitue l’une des principales oppositions entre le droit français et les droits des pays de common law. Si cette question reste d’actualité, alors que la jurisprudence occupe une place grandissante en droit français, le droit comparé a récemment été mis en valeur dans les débats sur l’application dans le temps des revirements de jurisprudence.

Exercices

Exposé n° 1 sur le thème : « Les revirements de jurisprudence pour l’avenir ».

Exposé n° 2 sur le thème : « Les class actions ont leur place en droit français ».(Cf not L’introduction en droit français des class actions, Dir. D. Mainguy, Les Petites affiches, 22 décembre 2005.)

Commentaire de l’extrait de l’arrêt de la Cour suprême des Etats-Unis : Doc. 3 : Planned Parenthood of Southeastern Pennsylvania v. Casey, 505 U.S. 833 (1992), E. Zoller, Grands arrêts de la Cour suprême des Etats-Unis, PUF, 2000, p . 1129 s. (Extraits).

Documents

Lire : Frédérique Ferrand, " Action de groupe : l'outil du droit comparé", Revue Lamy Droit Civil, numéro 32, Novembre 2006, p. 65-78Et F. Laroche-Gisserot, LPA, 10 juin 2005 n° 115, p. 7

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Doc. 1 : P. Morvan, « Le revirement de jurisprudence pour l’avenir : humble adresse aux magistrats ayant franchi le rubicon », D. 2005, chron. p. 147 (Extrait).Doc. 2 : E. Zoller, « Le judiciaire américain, l’interprétation et le temps », Droits 1999, p. 97 (Extraits).Doc. 3 : Planned Parenthood of Southeastern Pennsylvania v. Casey, 505 U.S. 833 (1992), E. Zoller, Grands arrêts de la Cour suprême des Etats-Unis, PUF, 2000, p . 1129 s. (Extraits).

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1) Les revirements

Doc. 1 : P. Morvan, « Le revirement de jurisprudence pour l’avenir : humble adresse aux magistrats ayant franchi le rubicon », D. 2005, chron. p. 147 (Extrait)

« La Cour suprême des Etats-Unis fut la pionnière du prospective overruling, couramment dénommé sunbursting depuis l'arrêt fondateur Great Northern Railway Co. v/ Sunburst Oil & Refining Co. de 1932.

Sans doute le juge américain n'a-t-il pas converti le juge anglais (non plus que la Cour suprême du Canada) : au Royaume-Uni, la House of Lords et la Court of Appeal témoignent encore d'une fidélité à la fiction héritée de la doctrine de William Blackstone (Commentaries of the laws of England, 1765-1769)

selon laquelle la common law renferme un droit originel préexistant, immuable, complet et toujours juste (un droit naturel) que le juge se borne à révéler, à dévoiler, à déclarer de façon nécessairement rétroactive (declaratory theory of common law que, nonobstant, les Lords n'hésitent pas à qualifier de conte de fées [fairy tale] auquel nul ne croit plus...). Si les retrospective overrulings sont parfois atténués par un recours aux obiter dicta voire aux dissenting opinions dans lesquels les juges anglais avertissent le public de l'imminence d'un revirement (ce que Lord Devlin nomma avec humour en 1976 des rumblings from Olympus, grondements du haut de l'Olympe), le prospective overruling demeure banni en son principe (V. en sa faveur,

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les opinions minoritaires de Lord Browne-Wilkinson dans l'arrêt Kleinwort Benson du 29 octobre 1998 et, surtout, de Lord Slynn dans l'arrêt ex parte Evans du 27 juillet 2000 [www.parliament.the-stationery-office.co.uk]. Adde l'étude de R. H. S. Stur, Time and Law, Oxford Journal of Legal Studies, vol. 22, n° 3 (2002), p. 463-488).

En revanche, le juge communautaire a tôt recouru au revirement pour l'avenir, même si ce fut « à titre exceptionnel » et au nom de « considérations impérieuses de sécurité juridique » (CJCE 8 avr. 1976, Defrenne, aff. 43/75 ; 15 janv. 1986, Pinna I, aff. 41/84 ; 17 mai 1990, Barber, aff. C. 262/88 , décisions rendues en matière de protection sociale). De façon remarquable, l'article 231 du traité CE consacre cette faculté, de portée générale,

dans le cas particulier du recours en annulation d'un règlement communautaire (sur l'hypothèse des contentieux de la légalité, V. infra, n° 16).

Imitant son homologue, la Cour européenne des droits de l'homme a, à son tour, accueilli cette technique au nom du « principe de sécurité juridique, nécessairement inhérent au droit de la Convention comme au droit communautaire » (CEDH 13 juin 1979, Marckx, § 58 ; 29 nov. 1991, Vermeire, concernant la vocation successorale des enfants naturels), même si elle en fait un usage bien plus parcimonieux.

En France, la Cour de cassation avait esquissé une tentative timide en ce sens, afin de limiter le coût exorbitant pour les banques d'un revirement (Cass. 1re civ. 9 févr. 1988 et Cass. com. 12 avr. 1988, JCP

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1988, II, 21026, imposant la fixation du TEG par écrit). Mais le cas resta isolé et la motivation de pure circonstance (cf. P. Malaurie et P. Morvan, op. cit., n° 352).

Depuis lors, le juge judiciaire assumait sans fard la rétroactivité absolue de ses revirements, clamant même que « l'interprétation jurisprudentielle d'une même norme à un moment donné ne peut être différente selon l'époque des faits considérés et nul ne peut se prévaloir d'un droit acquis à une jurisprudence figée » (Cass. 1re civ. 21 mars 2000, D. 2000, Jur. p. 593 , note C. Atias ; RTD civ. 2000, p. 666, obs. N. Molfessis ; 9 oct. 2001, D. 2001, Jur. p. 3470 ).

Celui qui ne parvient pas à anticiper une interprétation ou un revirement jurisprudentiel ne peut davantage invoquer une

erreur de droit (V. en droit pénal, Cass. crim. 2 mars 1961, JCP 1961, II, 12095. Rappr. Cass. ass. plén. 2 avril 1993, D. 1993, Jur. p. 373  ; JCP 1993, II, 22051, concl. M. Jéol, admettant que le caractère indû d'un paiement puisse résulter d'une jurisprudence nouvelle postérieure à celui-ci ; mais ici, s'agissant d'un indu objectif, le solvens n'avait pas à prouver son erreur. Le thème du paiement effectué sous l'empire d'une mistake of law est précisément au coeur de l'arrêt Kleinwort Benson, précité, de la House of Lords). Cette règle temporelle a son équivalent spatial : une divergence de jurisprudences entre deux chambres de la Cour de cassation ne peut être à l'origine d'une erreur de droit (Cass. crim. 11 mai 2004, D. 2004, Jur. p. 2326

, sur le vol de documents par un salarié qui les produit ensuite dans une instance prud'homale).

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Ironie de l'histoire, l'article 6 § 1 Conv. EDH dont la Cour régulatrice refusait de déduire un « droit acquis à une jurisprudence figée » est devenu le socle textuel du revirement pour l'avenir, figeant bel et bien, pour le passé voire le présent (les instances en cours), une jurisprudence répudiée (sur les variantes, V. infra, n° 15).

Le sunbursting aura ainsi suivi de curieux méandres

depuis Washington jusqu'à l'île de la Cité : inventé aux Etats-Unis, contemplé avec hostilité dans la plupart des droits anglo-saxons, il a séduit la Cour de justice des Communautés européennes puis conquis « par ricochet » la Cour européenne des droits de l'homme, avant que de pénétrer la jurisprudence française par le truchement de l'article 6 § 1 de cette Convention européenne. »

2) Le précédent

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Doc. 2 : E. Zoller, « Le judiciaire américain, l’interprétation et le temps », Droits 1999, p. 97 (Extrait)

Aux Etats-Unis, les relations entre temps et droit sont déterminées d'abord par l'appartenance du système juridique américain à la common law. Rappelons que la common law se caractérise par trois traits: 1) recours au jury pour statuer sur les points de fait du litige, 2) règne du droit (rule of law), c'est-à-dire soumission de toutes les personnes (y compris les personnes publiques) à des règles juridiques communes pour tous, 3) respect du précédent judiciaire. C'est cette dernière caractéristique qui est essentielle pour comprendre le facteur de la temporalité dans le droit américain.

Dans un système où le droit est dit, non par le législateur, mais par le juge, le temps pèse sur la formulation de la règle. Dès le XVIIIe

siècle, Blackstone relevait que, dans un tel système, pour faire en sorte que "la balance de la justice soit fermement tenue et stable, [et] non pas sujette à variation avec l'opinion de chaque nouveau juge", il faut affirmer pour "règle établie" le devoir "de se conformer aux précédents quand des points déjà jugés reviennent devant les juges". Cette règle inhérente au système de la common law que les Anglais connaissent sous le nom de règle du précédent a été tout naturellement importée dans le système juridique américain. On la connaît sous le nom de stare decisis (ou stare

decisis et quieta non movere - s'en tenir à ce qui a été décidé et ne pas modifier ce qui existe).

Telle qu'elle est conçue en Angleterre, la doctrine du précédent signifie que "la règle de droit dans n'importe quel litige, donc l'ensemble des règles de droit dont consiste la common law, sont par hypothèse conformes à la totalité des décisions précédentes". La hiérarchie des juridictions joue un rôle capital dans la mise en oeuvre du système en obligeant toute juridiction à se considérer liée par les décisions précédemment rendues par une juridiction de niveau supérieur. Si, en 1898, la Chambre des Lords alla jusqu'à affirmer qu'elle-même était aussi liée par la règle de droit

précédemment dégagée , depuis 1966, la doctrine a changé et la Chambre des Lords s'estime libre de se départir de ses décisions; même si la pratique a montré qu'elle ne le faisait que de façon exceptionnelle .

Aux Etats-Unis, la règle stare decisis n'a jamais tenu le même rôle que la doctrine du précédent a tenu en Angleterre. Il existe à cela de multiples raisons qui, toutes, gravitent autour d'une seule et même constatation, faite maintes fois, selon laquelle, pour des raisons historiques et géographiques, constitutionnelles et politiques, la common law ne pouvait pas s'implanter aux Etats-Unis comme en Angleterre. Au niveau fédéral en particulier, la common law est moins une source de droit en

elle-même que la culture juridique dans laquelle baigne le système juridique américain. Mais cette culture est essentielle pour comprendre les rapports qui unissent le judiciaire américain, l'interprétation et le temps. Dans un système de droit judiciaire comme la common law, c'est-à-dire là où le droit est dit par le juge, la règle est par priorité énoncée dans la forme que le juge lui a donnée. Ce ne sont donc pas les textes, mais les arrêts qui sont le point de départ de la connaissance de la règle. La règle est toujours connue sous forme d'une affaire. L'interprétation ne part donc pas de l'article du texte de loi, mais de l'article du texte de loi telle qu'il a été déjà interprété par le juge. Autrement dit, là où en théorie le juge

français peut à chaque affaire lire la loi avec un oeil neuf, le juge de common law, lui, ne peut la lire que dans la forme que lui ont donné ses prédécesseurs. René David avait ainsi raison de dire que la culture juridique de common law est liée intimement à la "technique des distinctions", par opposition à la culture d'inspiration romano-germanique qui privilégie la "technique de l'interprétation". D'un certain point de vue, l'interprétation dans les systèmes de common law est une interprétation au deuxième degré, une sorte d'interprétation de (ou sur) l'interprétation déjà faite.

Doc. 3 : (Extraits) Planned Parenthood of Southeastern Pennsylvania v. Casey, 505 U.S. 833 (1992), E. Zoller, Grands arrêts de

la Cour suprême des Etats-Unis, PUF, 2000, p . 1129 s.

L’obligation de suivre la règle du précédent procède d’un impératif, et elle trouve ses limites dans un autre impératif, contraire du premier. Avec Cardozo, nous admettons qu’aucun système judiciaire ne pourrait assumer son rôle social s’il portait sur chaque question posée un regard nouveau, voir B. Cardozo, The Nature of the Judicial Process 149 (1921). En vérité, c’est le concept même de « rule of law » sous jacent à notre Constitution qui exige une telle continuité dans le temps et qui fait que le respect de la règle du précédent est, par définition, indispensable, voir Powell « Stare Decisis and judicial restraint, 1991, Journal of Supreme Court

History, 13, 16). A l’autre extrémité, un autre impératif d’une nature différente se fait sentir quand une décision judiciaire antérieure vient à être perçue comme une erreur évidente dont l’application serait, pour cette raison même, condamnée.

Même lorsque la décision d’un revirement de jurisprudence n’est pas pratiquement obligée, comme dans le dernier et rare cas d’espèce, le bon sens veut que la règle du précédent ne soit pas un « commandement inexorable », et sans aucun doute, ce n’est pas le cas dans tous les litiges constitutionnels.

En vérité quand la Cour réexamine une décision antérieure, la coutume veut que son jugement soit fondé sur un certain

nombre de considérations prudentes et pragmatiques qui permettent de mesurer la compatibilité du revirement de jurisprudence avec l’idéal du règne du droit et de calculer les coûts respectifs de la confirmation et du revirement de la jurisprudence. Ainsi, par exemple nous pouvons nous demander si la règle s’et avérée intolérable du simple fait qu’elle est inapplicable en pratique ; ou si d’autres principes juridiques qui lui sont connexes se sont tellement développés qu’ils ont relégué l’ancienne règle à ne plus être que le vestige d’une doctrine abandonnée ; ou si les faits ont tellement changé ou sont si différemment perçus qu’ils ont dépouillé l’ancienne règle de toute

justification ou de toute application sensée.

Ainsi, dans la présente espèce, nous pouvons nous demander si la règle au centre de l’affaire Roe a été jugée inapplicable ; si les limites qu’elle impose au pouvoir de l’Etat pourraient être levées sans frapper d’une grave injustice ceux qui s’y sont fiés ou sans porter sérieusement atteinte à la stabilité de la société gouvernée par la règle en question ; si le développement du droit, au cours des années subséquentes a fait du principe de base qui de l’affaire Roe une doctrine anachronique rejetée par la société ; et si les données de fait qui justifiaient Roe ont à ce point évolué au cours des deux décennies suivantes qu’elles ont rendu le principe juridique central dégagé

dans l’arrêt en quelque sorte inconvenant ou injustifiable au regard de la question de fait qu’il réglait.

Pour mesurer la confiance [que le public place dans telle jurisprudence], on tient compte du coût qu’engendrerait sa répudiation pour tous ceux qui ont pu se fier raisonnablement à son application continue. L’exemple classique pour mesurer cette confiance et pencher

fortement en faveur du respect de la règle du précédent se situe en matière commerciale. , voir Payne v Tennessee, là où le besoin de pouvoir planifier les choses avec la plus grande précision est, de toute évidence, une nécessité. Parce qu’elle intervient en matière commerciale, on ne s’étonnera point de ce que l’argument de la confiance puisse être jugé non pertinent lorsqu’il s’agit de plaider le maintien de Roe.

Fiche 3 : Le Code civil européen

Depuis une dizaine d’années, s’est engagé un débat sur l’harmonisation du droit des obligations au niveau européen. Les diverses initiatives dans ce domaine, qu’il s’agisse des Principes du droit européen du contrat, de l’avant-projet de code européen des contrats ou de l’instrument optionnel dans le droit des contrats européens envisagé par la Commission Européenne, divisent les auteurs et invitent à s’interroger notamment sur l’opportunité, la légitimité, la forme et le contenu d’un tel acte.

Exercices

Exposé sur le thème : « Faut-il un code civil européen ? »

Commenter l’affirmation suivante : « La théorie de la cause est nécessaire en droit des contrats ».

Lecture : - Communication de la Commission au Parlement européen

et au Conseil - Droit européen des contrats et révision de l'acquis : la voie à suivre (COM/2004/0651 final, disponible sur http://europa.eu.int)

- Olivier Tournafond, « Pourquoi il faut conserver la théorie de la cause en droit civil français », D. 2008, p. 2607.

Documents

Doc. 1 : Extraits de D. Mazeaud, « La cause » in 1804-2004 : Le Code civil, un passé, un présent, un avenir, éd .DALLOZ, 2004, p. 451.

Doc. 2 : Civ. 1ère, 12 juillet 1989, Bull. I n°293, p. 194.Doc. 3 : Com. 22 octobre 1996, Chronopost, Bull. IV n° 261 p. 223.Doc. 4 : Article 1131 du Code civil français.Doc. 5 : Articles 4.109 et 4.110 des Principes du droit européen des contrats.Doc. 6 : Article 30 de l’avant-projet de Code européen du contrat.

Doc. 1 : D. Mazeaud, La Cause (extraits)

«  Si on peut conclure, au regard des projets d’harmonisation européenne, à la disparition de la notion de cause de l’obligation, c’est tout simplement parce que leurs dispositions respectives la frappent de caducité.

Envisagée, en premier lieu, dans son rôle de protection de l’équilibre contractuel, plus ou moins largement entendu selon que l’on respecte les canons de la théorie classique ou que l’on succombe aux audaces de la jurisprudence récente, la cause de l’obligation se révèle dépourvue d’utilité. En effet, que ce soit dans les Principes du droit européen du contrat ou dans l’avant-projet du code européen des contrats, la protection des contractants contre les déséquilibres contractuels excessifs des prestations est assurée de

façon extrêmement énergique. Dans les deux textes, sont ainsi prévues, soit la rescision, soit la révision du contrat, lorsque le profit excessif ou l’avantage déloyal ou manifestement disproportionné, qui déséquilibre les relations contractuelles, est le produit de l’abus, commis par le cocontractant dominant, de la dépendance économique ou intellectuelle de son cocontractant. Autrement dit, dans une certaine mesure, au moins, ces deux projets admettent que la lésion peut provoquer l’anéantissement ou l’adaptation du contrat.

Dès lors, étant entendu que la théorie de la cause « fait beaucoup moins besoin là où fonctionnent des systèmes suffisamment larges de rescision pour lésion (…) », l’intérêt de la notion de cause de l’obligation, telle

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qu’appréhendée en droit français, s’estompe. D’une part, dans une très large mesure, l’admission de la lésion prive d’objet l’exigence d’une cause de l’obligation telle qu’elle est entendue dans sa théorie classique, c’est-à-dire en vue de protéger un contractant qui s’engage sans contrepartie. […] D’autre part, les audaces récentes de la jurisprudence, qui l’ont conduite à exploiter la cause comme instrument de contrôle de la proportionnalité des prestations contractuelles n’ont plus, pour les mêmes motifs, de raison d’être. Les nouveaux textes, comme on l’a constaté, pourvoient suffisamment à cet objectif sans qu’il soit besoin d’avoir recours à la cause.

Appréhendée dans son rôle de protection des contractants professionnels contre les clauses abusives, que lui avait « confié » la

jurisprudence dans quelques arrêts très remarqué, la cause n’est pas promise à un avenir plus brillant. Une fois de plus, les dispositions des deux projets étudiés rendent totalement superflue la cause de l’obligation ainsi entendue. En effet, dans les deux textes, la protection des contractants contre les clauses abusives se déploie indépendamment de la qualité du contractant victime d’une telle stipulation. Lorsqu’on se souvient que la cause a été exploitée par la Cour de cassation comme un instrument de contrôle de la cohérence du contrat, essentiellement pour pallier l’absence de protection des professionnels contre les clauses abusives, il n’est alors pas hasardeux de penser que, si les projets examinés devenaient réalité, la cause, dans ce rôle spécifique, n’aurait plus de raison d’être.

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Au fond, si on fait abstraction de la complexité de cette notion qui la rend « suspecte » hors de nos frontières, le déclin éventuel de la notion cause de l’obligation, dans un futur européen plus ou moins proche, n’est que la traduction de la divergence fondamentale qui oppose le droit français et les deux projets d’harmonisation européenne. En droit français, en dépit des avancées jurisprudentielles dont il ne faut sans doute pas exagérer la portée même si, comme l’auteur de ses lignes, on les approuve, l’idée maîtresse demeure que l’équilibre des relations contractuelles relève de la responsabilité des seuls contractants, présumés libres et égaux. Et dans cette perspective, le contrôle de l’équilibre contractuel, tel qu’il est dévolu à la notion de cause de l’obligation, est réduit à une peau de chagrin. Il en

va manifestement autrement dans les deux projets d’harmonisation européenne dans lesquels les rapports contractuels sont aussi envisagés comme des rapports de force, dans lesquels l’inégalité économique et intellectuelle des cocontractants est prise en considération dans la détermination du régime du contrat. Dans cette perspective, plus réaliste, des dispositions beaucoup plus exigeantes sont donc prévues pour imposer et restaurer l’équilibre contractuel que l’abus et l’exploitation de ces inégalités a pu fragiliser ou détruire. Par conséquent, si, l’harmonisation européenne du droit des contrat se solde par une disparition de la cause, ce sera, sans doute, au nom d’une conception fondamentalement différente des rapports contractuels que celle sur laquelle s’est édifiée, et se développe encore, du moins

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grâce à une doctrine majoritaire, le droit français. »

Doc. 2 : Civ. 1ère, 12 juillet 1989

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu qu'en 1981, M. Pirmamod, parapsychologue, a vendu à Mme Guichard, elle-même parapsychologue, divers ouvrages et matériels d'occultisme pour la somme de 52 875 francs ; que la facture du 29 décembre 1982 n'ayant pas été réglée, le vendeur a obtenu une ordonnance d'injonction de payer, à l'encontre de laquelle Mme Guichard a formé contredit ; que l'arrêt attaqué (Paris, 24 novembre 1987) a débouté M. Pirmamod de sa demande en paiement, au motif que le contrat de vente avait une cause illicite ;

Attendu que M. Pirmamod fait grief audit arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que la cause du contrat ne réside pas dans l'utilisation que compte faire l'acquéreur de la chose vendue, mais dans le transfert de propriété de cette chose, et qu'en prenant en compte, pour déterminer cette cause, le prétendu mobile de l'acquéreur, la cour d'appel aurait violé les articles 1131, 1133 et 1589 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'en déclarant nulle pour cause illicite la vente d'objets banals au prétexte que ceux-ci pourraient servir à escroquer des tiers, bien qu'il soit nécessaire que le mobile illicite déterminant soit commun aux deux parties sans qu'il y ait lieu de tenir compte de l'utilisation personnelle que l'acquéreur entend faire à l'égard des tiers de la chose vendue, l'arrêt attaqué aurait de nouveau violé les textes susvisés ;

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Mais attendu, d'abord, que si la cause de l'obligation de l'acheteur réside bien dans le transfert de propriété et dans la livraison de la chose vendue, en revanche la cause du contrat de vente consiste dans le mobile déterminant, c'est-à-dire celui en l'absence duquel l'acquéreur ne se serait pas engagé ; qu'ayant relevé qu'en l'espèce, la cause impulsive et déterminante de ce contrat était de permettre l'exercice du métier de deviner et de pronostiquer, activité constituant la contravention prévue et punie par l'article R. 34 du Code pénal, la cour d'appel en a exactement déduit qu'une telle cause, puisant sa source dans une infraction pénale, revêtait un caractère illicite ; Attendu, ensuite, que M. Pirmamod exerçait la même profession de parapsychologue que Mme Guichard, qu'il considérait comme sa disciple ; qu'il ne

pouvait donc ignorer que la vente de matériel d'occultisme à celle-ci était destinée à lui permettre d'exercer le métier de devin ; que la cour d'appel n'avait donc pas à rechercher si M. Pirmamod connaissait le mobile déterminant de l'engagement de Mme Guichard, une telle connaissance découlant des faits de la cause ;

Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être retenu en aucune de ses deux branches ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 3 : Com. 22 octobre 1996

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1131 du Code civil ;

Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué, que la société Banchereau a

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confié, à deux reprises, un pli contenant une soumission à une adjudication à la société Chronopost, venant aux droits de la société SFMI ; que ces plis n'ayant pas été livrés le lendemain de leur envoi avant midi, ainsi que la société Chronopost s'y était engagée, la société Banchereau a assigné en réparation de ses préjudices la société Chronopost ; que celle-ci a invoqué la clause du contrat limitant l'indemnisation du retard au prix du transport dont elle s'était acquittée ;

Attendu que, pour débouter la société Banchereau de sa demande, l'arrêt retient que, si la société Chronopost n'a pas respecté son obligation de livrer les plis le lendemain du jour de l'expédition avant midi, elle n'a cependant pas commis une faute lourde exclusive de la limitation de responsabilité du contrat ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors que, spécialiste du transport rapide garantissant la fiabilité et la célérité de son service, la société Chronopost s'était engagée à livrer les plis de la société Banchereau dans un délai déterminé, et qu'en raison du manquement à cette obligation essentielle la clause limitative de responsabilité du contrat, qui contredisait la portée de l'engagement pris, devait être réputée non écrite, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 juin 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour

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être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen.

Doc. 4 : Article 1131 du Code civil français

L’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

Doc. 5 : Articles 4.109 et 4.110 des Principes du droit européen des contrats

Article 4.109 : Profit excessif ou avantage déloyal

(1) Une partie peut provoquer la nullité du contrat si, lors de la conclusion du contrat,(a) elle était dans un état de dépendance à l’égard de l’autre partie ou une relation de confiance avec elle, en état de détresse économique ou de besoins urgents, ou était imprévoyante, ignorante, inexpérimentée ou inapte à la négociation.

(b) alors que l’autre partie en avait ou aurait dû en avoir connaissance et que, étant donné les circonstances et le but du contrat, elle a pris avantage de la situation de la première avec une déloyauté évidente ou en a retiré un profit excessif.

(2) A la requête de la partie lésée, le tribunal peut, s’il le juge approprié, adapter le contrat de façon à le mettre en accord avec ce qui aurait pu être convenu conformément aux exigences de la bonne foi.

(3) Le tribunal peut également, à la requête de la partie qui a reçu une notification d’annulation pour profit excessif ou avantage déloyal, adapter le contrat, pourvu que cette partie, dès qu’elle a reçu la notification, en informe l’expéditeur avant qu’il n’ait agi sur la foi de celle-ci.

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Article 4.110 : Clauses abusives qui n’ont pas été l’objet d’une négociation individuelle

(1) Une clause qui n’a pas été l’objet d’une négociation individuelle peut être annulée par une partie si, contrairement aux exigences de la bonne foi, elle crée à son détriment un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat, eu égard à la nature de la prestation à procurer, de toutes les autres clauses du contrat et des circonstances qui ont entouré sa conclusion.

(2) Le présent article ne s’applique pas(a) à une clause qui définit l’objet principal, pour autant que la clause est rédigée de façon claire et compréhensible,

(b) ni à l’adéquation entre la valeur respective des prestations à fournir par les parties.

Doc. 6 : Article 30 de l’avant-projet de Code européen du contrat

Article 30Contenu licite et non abusif 1. Le contenu du contrat est licite quand il n'est pas contraire aux règles obligatoires du présent Code ou aux dispositions communautaires ou nationales, à l'ordre public ou aux bonnes moeurs.2. Le contenu du contrat qui constitue un moyen pour éluder l'application d'une règle impérative est illicite.3. Est rescindable, comme il est prévu à l'article 156, tout contrat par lequel une des parties, abusant de la situation de danger, de nécessité, d'incapacité de comprendre et de vouloir, d'inexpérience,

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d'assujettissement économique ou moral de l'autre partie, fait promettre ou fournir à elle-même ou à des tiers une prestation ou d'autres avantages patrimoniaux manifestement disproportionnés par rapport à la contrepartie qu'elle a fournie ou promise.4. Dans les conditions générales du contrat, prévues à l'article 33, sont sans effet, si elles ne sont pas expressément approuvées par écrit, les clauses qui établissent en faveur de celui qui les a préparées des limitations de responsabilité, la faculté de se désister du contrat ou d'en suspendre l'exécution, ou qui prévoient à la charge de l'autre contractant des déchéances, des limitations

à la faculté d'opposer des exceptions, des restrictions à la liberté contractuelle dans les rapports avec les tiers, la prorogation ou le renouvellement tacite du contrat, des clauses compromissoires ou des dérogations à la compétence de l'autorité judiciaire.5. Dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur, hormis les règles communautaires, sont sans effet les clauses qui n'ont pas été objet d'une tractation, si elles créent au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat, même si le professionnel est de bonne foi.

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Fiche 4 : L’imprévision

Un important changement des circonstances peut être à l’origine d’un bouleversement de l’équilibre initial des contrats dont les effets se déroulent sur une certaine durée. L’incidence de ce bouleversement sur la force obligatoire du contrat est envisagée diversement par les différents systèmes juridiques. Le droit allemand, par exemple, autorise la révision du contrat pour imprévision, tandis que le droit français (malgré quelques infléchissements) rejette cette possibilité et que le droit anglais applique la théorie de la frustration.

I. Exercices- Exposé sur le thème : « La bonne foi comme fondement de la théorie de l’imprévision ». - Commenter l’affirmation suivante : « La frustration et la force majeure sont des concepts équivalents ». - Commentaire de la sentence CCI n°8873 de 1997 (Doc. 10).

II. DocumentsLire : P. Lokiec, Le droit des contrats et la protection des attentes, D. 2007, p. 321Doc. 1 : Articles 1134, 1147 et 1148 du Code civil français. Doc. 2 : Civ. 6 mars 1876, Canal de Craponne, D. 1876, I, 193.Doc. 3 : Com., 3 novembre 1992, Huard, Bull IV n°338, p. 241.Doc. 4 : Civ. 1ère, 16 mars 2004, Bull I n°86, p. 69.Doc. 5 : Fondements jurisprudentiels de la théorie de l’imprévision en Allemagne.

Doc. 6 : § 313 du BGB allemand.Doc. 7 : Davis Contractors v. Fareham Urban District Council [1956] AC 696, Arrêt de la Chambre des Lords (Extraits)Doc. 8 : Article 6-111 des Principes européens du droit des contrats.Doc. 9 : Articles 6.2.1 et suivants des Principes Unidroit.Doc. 10 : Sentence rendue par la Cour d’Arbitrage de la CCI dans l’affaire n°8873 en 1997.Doc. 11 : Clause-type CCI relative au hardship et à la force majeure.

Doc. 1 : Articles 1134, 1147, 1148 du Code civil français

Art 1134

Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Article 1147

Le débiteur est condamné, s’il y a lieu,

au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Article 1148

Il n’y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque, par suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a

été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit.

Doc. 2 : Civ. 6 mars 1876, Canal de Craponne

Mais sur le premier moyen du pourvoi :

Vu l’art. 1134 c. civ. ;

Attendu que la disposition de cet article n’étant que la reproduction des anciens principes constamment suivis en matière d’obligations conventionnelles, la circonstance que les contrats dont l’exécution donne lieu au litige sont antérieurs à la promulgation du code civil ne saurait être, dans l’espèce, un obstacle à l’application dudit article ;

Attendu que la règle qu’il consacre est générale, absolue, et régit les contrats dont l’exécution s’étend à des époques successives de même qu’à ceux de toute autre nature ;

Que, dans aucun cas, il n’appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse leur paraître leur décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants ;

Qu’en décidant le contraire et en élevant à 30 centimes de 1834 à 1874, puis à 60 centimes à partir de 1874, la redevance d’arrosage, fixée à 3 sols par les conventions de 1560 et 1567, sous prétexte que

cette redevance n’était plus en rapport avec les frais d’entretien du canal de Craponne, l’arrêt attaqué à formellement violé l’art. 1134 ci-dessus susvisé ;

Par ces motifs, casse, dans la disposition relative à l’augmentation du prix de a redevance d’arrosage, l’arrêt rendu entre les parties par la cour d’appel d’Aix le 31 décembre 1873.

Doc. 3 : Com., 3 novembre 1992, Huard

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 mai 1990), que, le 2 octobre 1970, la Société française des pétroles BP (société BP) a conclu avec M. Huard un contrat de distributeur agréé, pour une durée de

15 années, prenant effet le 25 mars 1971 ; que, par avenant du 14 octobre 1981, le contrat a été prorogé jusqu'au 31 décembre 1988 ; qu'en 1983, les prix de vente des produits pétroliers au détail ont été libérés ; que M. Huard, se plaignant de ce que, en dépit de l'engagement de la société BP de l'intégrer dans son réseau, cette dernière ne lui a pas donné les moyens de pratiquer des prix concurrentiels, l'a assignée en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que la société BP reproche à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande à concurrence de 150 000 francs, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, dans son préambule, l'accord de distributeur agréé du 2 octobre 1970 prévoyait que la société BP devrait

faire bénéficier M. Huard de diverses aides " dans les limites d'une rentabilité acceptable " ; qu'en jugeant dès lors que la société BP était contractuellement tenue d'intégrer M. Huard dans son réseau en lui assurant une rentabilité acceptable, la cour d'appel a dénaturé cette clause stipulée au profit de la société pétrolière et non à celui de son distributeur agréé, en violation de l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que nul ne peut se voir imputer une faute contractuelle de nature à engager sa responsabilité sans que soit établie l'existence d'une inexécution de ses obligations contenues dans le contrat ; qu'en ne retenant à l'encontre de la société BP que le seul grief de n'avoir pas recherché un accord de coopération commerciale

avec son distributeur agréé, M. Huard, la cour d'appel n'a relevé à son encontre aucune violation de ses obligations contractuelles et ne pouvait dès lors juger qu'elle avait commis une faute contractuelle dont elle devait réparer les conséquences dommageables, en violation de l'article 1147 du Code civil ; et alors, enfin, que nul ne peut être tenu pour responsable du préjudice subi par son cocontractant lorsque ce préjudice trouve sa source dans une cause étrangère qui ne peut lui être imputée ; qu'en jugeant dès lors que la société BP devait être tenue pour contractuellement responsable du préjudice invoqué par M. Huard, préjudice tenant aux difficultés consécutives à l'impossibilité pour ce

dernier de faire face à la concurrence, après avoir pourtant constaté qu'elle était néanmoins tenue, en raison de la politique des prix en matière de carburants, de lui vendre ceux-ci au prix qu'elle pratiquait effectivement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations de fait, en violation des articles 1147 et 1148 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt ne dit pas que la société BP était tenue d'intégrer M. Huard dans son réseau " en lui assurant une rentabilité acceptable " ;

Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que le contrat contenait une clause d'approvisionnement exclusif, que M. Huard avait effectué des

travaux d'aménagement dans la station-service, et que " le prix de vente appliqué par la société BP à ses distributeurs agréés était, pour le supercarburant et l'essence, supérieur à celui auquel elle vendait ces mêmes produits au consommateur final par l'intermédiaire de ses mandataires ", l'arrêt retient que la société BP, qui s'était engagée à maintenir dans son réseau M. Huard, lequel n'était pas obligé de renoncer à son statut de distributeur agréé résultant du contrat en cours d'exécution pour devenir mandataire comme elle le lui proposait, n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne pouvait, dans le cadre du contrat de distributeur agréé, approvisionner M. Huard à un prix inférieur au tarif " pompiste de marque ", sans

enfreindre la réglementation, puisqu'il lui appartenait d'établir un accord de coopération commerciale entrant " dans le cadre des exceptions d'alignement ou de pénétration protectrice d'un détaillant qui ont toujours été admises " ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, d'où il résultait l'absence de tout cas de force majeure, la cour d'appel a pu décider qu'en privant M. Huard des moyens de pratiquer des prix concurrentiels, la société BP n'avait pas exécuté le contrat de bonne foi ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait dans sa première branche, est mal fondé pour le surplus ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 4 : Civ. 1ère, 16 mars 2004

Attendu que la commune de Cluses a concédé, en 1974, à l'Association Foyer des jeunes travailleurs (AFJT) l'exploitation d'un restaurant à caractère social et d'entreprises ; qu'une convention tripartite a été signée le 15 octobre 1984 entre la commune, l'AFJT et la société Les Repas Parisiens (LRP) pour une durée de dix ans ; qu'aux termes de cet accord, l'AFJT, confirmée en qualité de concessionnaire a sous-concédé l'exploitation à la LRP, avec l'accord de la commune ; que la LRP, obtenant de ses cocontractantes d'importants travaux d'investissement, s'engageait à payer un loyer annuel à l'AFJT et une redevance à la commune ; que, par

lettre du 31 mars 1989, la LRP a résilié unilatéralement cette convention, au motif qu'elle se trouvait dans l'impossibilité économique de poursuivre l'exploitation ; que, par ordonnance de référé du 25 avril 1989, l'AFJT et la commune ont obtenu la condamnation de la LRP à poursuivre son exploitation ; que cette société a, néanmoins, cessé son activité le 31 juillet 1989 ; qu'invoquant un bouleversement de l'équilibre économique du contrat, elle a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande en résiliation de cette convention et, à défaut, en dommages-intérêts ; que, parallèlement, l'AFJT et la commune ont saisi le tribunal de grande instance de Bonneville aux fins d'obtention, du fait de la

résiliation unilatérale du contrat, de dommages-intérêts pour les dégradations causées aux installations ; qu'après saisine du Tribunal des conflits qui, par décision du 17 février 1997, a déclaré compétente la juridiction judiciaire, s'agissant d'un contrat de droit privé, l'arrêt attaqué (Chambéry, 5 juin 2001) a jugé que la LRP avait rompu unilatéralement le contrat et l'a condamnée à payer à l'AFJT les sommes de 273 655,37 francs et 911 729,92 francs, au titre, respectivement, des loyers et redevances dus au 31 juillet 1989 et de l'indemnité de résiliation, et à la commune de Cluses la somme de 116 470,17 francs au titre des travaux de remise en état des installations, et celle de 73 216,50 francs

au titre de la redevance restant due ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la LRP fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, que les parties sont tenues d'exécuter loyalement la convention en veillant à ce que son économie générale ne soit pas manifestement déséquilibrée ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans rechercher si, en raison des contraintes économiques particulières résultant du rôle joué par la collectivité publique dans la détermination des conditions d'exploitation de la concession, et notamment dans la fixation du prix des repas, les personnes morales concédantes n'avaient pas le devoir de mettre la société prestataire de service en

mesure d'exécuter son contrat dans des conditions qui ne soient pas manifestement excessives pour elle et d'accepter de reconsidérer les conditions de la convention dès lors que, dans son économie générale, un déséquilibre manifeste était apparu, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la LRP mettait en cause le déséquilibre financier existant dès la conclusion du contrat et non le refus injustifié de la commune et de l'AFJT de prendre en compte une modification imprévue des circonstances économiques et ainsi de renégocier les modalités

du sous-traité au mépris de leur obligation de loyauté et d'exécution de bonne foi ; qu'elle a ajouté que la LRP ne pouvait fonder son retrait brutal et unilatéral sur le déséquilibre structurel du contrat que, par sa négligence ou son imprudence, elle n'avait pas su apprécier ; qu'elle a, ainsi, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la demanderesse au pourvoi reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à l'AFJT une indemnité de résiliation de 911 729,92 francs alors, selon le moyen, que la garantie assumée par la société LRP rendait indispensable sa

participation au choix de son successeur ainsi qu'à la négociation des conditions de reprise de l'exploitation ; qu'en appréciant le montant du préjudice indemnisable à partir du manque à gagner mensuel subi par les concédantes sans préciser dans quelles conditions le choix du successeur et les conditions du nouveau contrat de concession d'exploitation du restaurant avaient été décidés, ni rechercher si ces conditions étaient à tout le moins meilleures que celles offertes par le successeur présenté par la LRP mais que la commune avait refusé d'agréer, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle de l'application des articles 1134 et 1147 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé, d'une part, que, selon le contrat litigieux, tout éventuel concessionnaire présenté par la LRP devait reprendre l'intégralité des engagements de cette société, laquelle demeurait solidairement tenue jusqu'à complet remboursement du prêt, d'autre part, que le successeur présenté par elle ne satisfaisait pas à cette condition ; que le moyen manque en fait ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi

Doc. 5 : Fondements successifs de la théorie de l’imprévision retenus par le Reichsgericht allemand

Clause rebus sic standibus : RG, 21 septembre 1920, RGZ 100, p. 129.

Impossibilité due aux circonstances économiques : RG, 15 octobre 1918, RGZ 94, 45. Théorie de la « disparition du fondement contractuel » . (Oertmann, 1921) : Tribunal de l’Empire RG, 3 février 1922, RGZ 103, 328.Concept de bonne foi.

Doc. 6 : § 313 du BGB allemand

§ 313 Troubles du fondement contractuel

1. Lorsque les circonstances qui ont été le fondement du contrat ont gravement changé après la conclusion du contrat, de sorte que les parties n'auraient pas conclu le contrat ou du moins ne l'auraient pas conclu dans les mêmes conditions si elles avaient agi en

connaissance de cause, une adaptation peut être demandée dans la mesure où l'exécution du contrat initial ne peut être exigée de l'une des parties, eu égard à toutes les circonstances de l'espèce et plus spécialement à la répartition contractuelle ou légale des risques. 2. Est assimilé à un changement de circonstances le fait que les conceptions essentielles des parties qui ont été le fondement du contrat se révèlent erronées. 3. Lorsque l'adaptation du contrat est impossible à réaliser ou qu'elle ne peut être exigée de l'une des parties, la partie défavorisée peut déclarer le contrat résolu. La résolution est remplacée par la résiliation lorsqu'il s'agit d'un contrat à durée indéterminée.

§ 313 Störung der Geschäftsgrundlage

(1) Haben sich Umstände, die zur Grundlage des Vertrags geworden sind, nach Vertragsschluss schwerwiegend verändert und hätten die Parteien den Vertrag nicht oder mit anderem Inhalt geschlossen, wenn sie diese Veränderung vorausgesehen hätten, so kann Anpassung des Vertrags verlangt werden, soweit einem Teil unter Berücksichtigung aller Umstände des Einzelfalls, insbesondere der vertraglichen oder gesetzlichen Risikoverteilung, das Festhalten am unveränderten Vertrag nicht zugemutet werden kann.

(2) Einer Veränderung der Umstände steht es gleich, wenn wesentliche Vorstellungen, die zur Grundlage des Vertrags geworden sind, sich als falsch herausstellen. (3) Ist eine Anpassung des Vertrags nicht möglich oder einem Teil nicht zumutbar, so kann der benachteiligte Teil vom Vertrag zurücktreten. An die Stelle des Rücktrittsrechts tritt für Dauerschuldverhältnisse das Recht zur Kündigung.

Doc. 7 : Davis Contractors v. Faheram Urban District Council (Extrait)

Per Lord Reid: "It appears to me that frustration depends, at least in most cases, not on adding any implied term but on the true construction of the terms which are in the

contract, read in the light of the nature of the contract and of the relevant surrounding circumstances when the contract was made.... On this view, there is no need to consider what the parties thought, or how they or reasonable men in their shoes would have dealt with the new situation if they had foreseen it. The question is whether the contract which they did make is, on its true construction, wide enough to apply to the new situation: if it is not, then it is at an end."

Per Lord Radcliffe: "... frustration occurs whenever the law recognises that, without default of either party, a contractual obligation has become incapable of being performed because the circumstances in which performance is called for would render it a thing

radically different from that which was undertaken by the contract. Non haec in foedera veni. It was not this that I promised to do."

In 1946 the plaintiffs agreed to build 78 houses for the defendants. The contract price was GBP 85,836. The work was to be completed within eight months. Before the contract was signed the plaintiffs had written to the defendants: "Our tender is subject to adequate supplies of material and labour being available as and when required to carry out the work within the time specified." Owing to bad weather, but more particularly to an unforeseen shortage of available labour, due to an unexpected lag in the demobilisation of troops after the war, the work

took 22 months to complete. The contractors received the contract price, but they claimed that by reason of the delay they were entitled to treat the contract as void and to be paid on a quantum meruit. Lord Goddard C.J. held that on the wording of the contract the contractors were entitled to throw over the contract and sue on a quantum meruit basis. The Court of Appeal had remitted the case to the arbitrator for further findings. The appeal was heard after the arbitrator had made a supplemental award, when it was allowed on the grounds that (1) the condition in the letter meant that, if adequate supplies of material and labour should not be available when wanted, the contractors would be

excused from completing the work within eight months but would be given a reasonable time; that the condition affected the time, but not the price; and that, so interpreted, the condition had been fully honoured; and that (2) when an owner employed a builder to do work for a fixed sum, his whole object was to secure himself against the unexpected difficulties which so often arose; and that the court could seriously damage the sanctity of contracts if it allowed a builder to charge more simply because, without anyone's fault, the work took him much longer than he thought.

Summary: Held, on appeal to the House of Lords, (1) the letter merely formed part of the negotiations which led up to the

contract and its terms were not incorporated into that contract; (2) in a contract of this kind the contractor undertook to do the work for a definite sum, and he took the risk of the cost being greater or less than he expected; if delay occurred through no one's fault, that might be in the contemplation of the contract and there might be provision for extra time being given; to that extent the other party took the risk of delay; but he did not take the risk of the cost being increased by such delay; it might be that delay could be of a character so different from anything contemplated that the contract would be at an end, but in this case the most that could be said was that the delay was greater in degree than was to be expected; it was not caused by any

new and unforeseeable factor or event; the job proved to be more onerous but it never became a job of a different kind from that contemplated in the contract; therefore the appeal must be dismissed.

Doc. 8 : Article 6-111 des Principes européens des contrats

(1) Une partie est tenue de remplir ses obligations, quand bien même l’exécution en serait devenue plus onéreuse, soit que le coût de l’exécution ait augmenté, soit que la valeur de la contre-prestation ait diminué.

(2) Cependant, les parties ont l’obligation d’engager des négociations en vue d’adapter leur contrat ou d’y mettre fin si cette exécution devient

onéreuse à l’excès pour l’une d’elles en raison d’un changement de circonstances(a) qui est survenu après la conclusion du contrat,(b) qui ne pouvait être raisonnablement pris en considération au moment de la conclusion du contrat,(c) et dont la partie lésée n’a pas à supporter le risque en vertu du contrat.

(3) Faute d’accord des parties dans un délai raisonnable, le tribunal peut(a) mettre fin au contrat à la date et aux conditions qu’il fixe,(b) ou l’adapter de façon à distribuer équitablement entre les parties les pertes et profits qui résultent du changement de circonstances.Dans l’un et l’autre cas, il peut ordonner la réparation du préjudice

que cause à l’une des parties le refus par l’autre de négocier ou sa rupture de mauvaise foi des négociations.

Doc. 9 : Principes Unidroit relatifs au hardship

Article 6.2.1(Respect du contrat)

Les parties sont tenues de remplir leurs obligations, quand bien même l’exécution en serait devenue plus onéreuse, sous réserve des dispositions suivantes relatives au hardship.

Article 6.2.2(Définition)

Il y a hardship lorsque surviennent des événements qui altèrent fondamentalement l’équilibre des prestations, soit que le coût de l’exécution des

obligations ait augmenté, soit que la valeur de la contre-prestation ait diminué, eta) que ces événements sont survenus ou ont été connus de la partie lésée après la conclusion du contrat ;b) que la partie lésée n’a pu, lors de la conclusion du contrat, raisonnablement prendre de tels événements en considération ;c) que ces événements échappent au contrôle de la partie lésée ; etd) que le risque de ces événements n’a pas été assumé par la partie lésée.

Article 6.2.3(Effets)

1) En cas de hardship, la partie lésée peut demander l’ouverture de négociations. La demande doit être faite sans retard indu et être motivée.

2) La demande ne donne pas elle-même à la partie lésée le droit de suspendre l’exécution de ses obligations.3) Faute d’accord entre les parties dans un délai raisonnable, l’une ou l’autre peut saisir le tribunal.4) Le tribunal qui conclut à l’existence d’un cas de hardship peut, s’il l’estime raisonnable :a) mettre fin au contrat à la date et aux conditions qu’il fixe ; oub) adapter le contrat en vue de rétablir l’équilibre des prestations.

Doc. 10 : Sentence CCI rendue dans l’affaire n°8873 en 1997

En ce qui concerne les « Principes des Contrats Commerciaux Internationaux » rédigés par Unidroit (« Principes Unidroit »), leur

Préambule prévoit expressément qu’ils s’appliquent « lorsque les parties acceptent que leur contrat soit régi par les « Principes généraux du droit », la lex mercatoria ou autre formule similaire ».

Etant donné que dans le contrat du [date] les parties n’ont fait aucune référence aux Principes en question et que la formulation de la clause sur la loi applicable permet d’exclure avec certitude que les parties aient voulu soumettre le contrat à la lex mercatoria ou aux principes généraux du droit, on ne voit pas comment les principes en question pourraient trouver application en tant que tels.

Le seul moyen pour justifier leur application serait de dire qu’il s’agit d’une « codification »

des usages existants et que les « principes Unidroit » devraient être appliqués dans cette qualité d’usages « codifiés » par Unidroit. Pour arriver à cette conclusion, il faudrait prouver que la demanderesse (et en particulier celles sur la hardship, contenues dans les articles 6.2.1 et suivants) correspondent à un usage international généralement établi, auquel les personnes engagées dans le commerce international se considèrent liées sans besoin d’une stipulation expresse dans ce sens.

Or, si l’on peut admettre l’existence d’une tendance, dans certaines branches, à stipuler avec une certaine continuité des clauses de hardship, il est certain que dans la pratique des affaires, l’obligation de rééquilibrer le contrat

(par la renégociation et, le cas échéant, par l’intervention d’un tiers, comme prévu dans l’article 6.2.3 paragraphe 4 des Principes Unidroit), qui caractérise la hardship, constitue un principe tout à fait exceptionnel, qui n’est accepté que dans le cadre des clauses contractuelles, qui devront déterminer en détail les situations justifiant la hardship ainsi que les conséquences de celles-ci. Il est donc exclu que l’on puisse considérer les dispositions en matière de hardship contenues dans les principes Unidroit comme des usages du commerce. Il s’agit, au contraire, de règles qui ne correspondent pas, au moins en l’état actuel, à la pratique courante des affaires dans le commerce international et qui ne seront par

conséquent applicables que lorsque les parties y ont fait une référence expresse, ce qui n’est pas le cas ici.

Dans ces conditions, le tribunal arbitral conclut à l’inapplicabilité, dans le cas d’espèce, des Principes Unidroit et en particulier des articles 6.2.1 et suivants en matière de hardship.

Un autre problème qui sera examiné est celui de savoir dans quelle mesure les principes de hardship ou rebus sic standibus sont reconnus dans la loi espagnole.

Doc. 11 : Publication de la CCI en août 2003 : Modèle relatif à la clause de force majeure et à la clause de hardship.

§1 – Pacta sunt servanda : « Toute partie est tenue d’exécuter ses obligations

contractuelles même si les circonstances rendent l’exécution plus onéreuse qu’on aurait raisonnablement pu le prévoir au moment de la conclusion du contrat. »

§2 – Cas dans lesquels la renégociation s’impose :«  Sans préjudice du paragraphe 1 de la présente clause, lorsqu’une partie contractante établit que :a) l’exécution des ses obligations contractuelles est devenue excessivement onéreuse en raison d’un événement hors de son contrôle et ne pouvant être raisonnablement prévu au moment de la conclusion du contrat, et que ;b) cette partie ne pouvait raisonnablement éviter ou surmonter cet événement ou ses effets,les parties s’obligent, dans un délai

raisonnable après que la présente clause a été invoquée, à négocier de nouvelles conditions contractuelles prenant raisonnablement en compte les conséquences de l’événement. »

§3 – En cas d’échec des négociations«  Lorsque le paragraphe 2 de la présente clause est applicable, mais que

des stipulations contractuelles alternatives prenant raisonnablement en compte les effets de l’événement invoqué n’ont pas été acceptées, comme prévu au paragraphe précédent, la partie ayant invoqué la présente clause est en droit de prononcer la résolution du contrat. »

Fiche 5 : La croyance légitime

La croyance légitime, en tant que fondement juridique de l’obligation, est diversement appréciée suivant le pays envisagé. Si les pays de common law considèrent cette croyance comme un fondement possible de l’obligation, grâce notamment au mécanisme de la promissory estoppel, d’autres comme l’Allemagne s’y refusent. D’autres encore, comme la France, reconnaissent la croyance légitime mais de manière marginale (par exemple dans le cas des quasi-contrats).

Exercices

Exposé sur le thème : « La promissory estoppel dans les pays de common law ».Envisager les différents fondements possibles de l’obligation à partir des documents suivants : Doc. 2 : Civ. 1ère, 28 mars

1995, Bull. Civ. I, n°150 ; Doc. 3 : Civ. 2ème, 26 octobre 2000, Bull. Civ. II, n°148 ; Doc. 4 : Ch. Mixte, 6 septembre 2002, Bull. Ch. Mixte, n°1 ; Doc. 7 : Central London Property Trust Ltd. v. High Trees House Ltd., [1947] K. B. 130.

Documents

Doc. 1 : Articles 1134 et 1371 du Code civil françaisDoc. 2 : Civ. 1ère, 28 mars 1995, Bull. Civ. I, n°150Doc. 3 : Civ. 2ème, 26 octobre 2000, Bull. Civ. II, n°148Doc. 4 : Ch. Mixte, 6 septembre 2002, Bull. Ch. Mixte, n°1Doc. 5 : Pinel’s case [1602] 5 Co. Rep. 117 aDoc. 6 : Williams v. Roffey Bros., [1991] 1 Q. B. 1Doc. 7 : Central London Property Trust Ltd. v. High Trees House Ltd., [1947] K. B. 130

Doc. 1   : Articles 1134 et 1371 du Code civil français

Article 1134Les conventions légalement

formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Article 1371Les quasi-contrats sont les

faits purement volontaires de l'homme, dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers, et quelquefois un engagement réciproque des deux parties.

Doc. 2   : Civ. 1 ère , 28 mars 1995

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu que M. Nahmad a reçu, en mai 1990, de la société Inter-Selection, entreprise de vente par correspondance, une lettre accompagnée d'une attestation lui certifiant que tel numéro parmi les douzes mentionnés, tous gagnants, lui était attribué ; qu'il a réclamé le paiement de la somme de 150 000 francs révélée après grattage et correspondant, selon lui, sans autre condition à ce numéro et assortie de la remise d'une automobile pour avoir répondu dans le délai fixé ; que la société Inter-Selection a prétendu que ce numéro avait seulement participé à un prétirage au

sort pour des prix en espèces encore en jeu ;

Attendu que la société Inter-Selection reproche à l'arrêt attaqué (Douai, 10 février 1993) d'avoir accueilli les demandes de M. Nahmad alors, selon le moyen et de première part, qu'en se bornant à relever que les documents reçus par M. Nahmad pouvaient légitimement laisser penser à celui-ci qu'il avait gagné sans rechercher si à l'origine du tirage au sort effectué par huissier, ce sont ces prix qui devaient revenir à l'attribution de son numéro, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1101 et 1382 du Code civil ; alors, de deuxième part, qu'en jugeant que l'attestation mentionnait le numéro de M. Nahmad comme " étant un numéro gagnant ayant participé au tirage au sort pour un prix en espèces " constituait un engagement unilatéral de volonté de cette dernière l'obligeant à reconnaître à M. Nahmad la qualité de gagnant des lots litigieux, la cour d'appel a également, violé les textes précités ; alors, de troisième part, que la cour d'appel s'est bornée à relever que l'interprétation donnée par M. Nahmad des documents reçus correspondait à la perception d'un consommateur moyen pour en déduire l'attribution des prix litigieux quand il lui appartenait de rechercher si ces documents excluaient que la volonté de l'organisateur du jeu pût s'interpréter différemment ; alors, enfin, que l'attestation que le numéro de M. Nahmad était de ceux qui " ont participé au

tirage au sort préalable pour un prix en espèces " ne pouvait s'entendre comme informant son destinataire que ce tirage l'avait désigné gagnant d'un prix en espèces et qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a dénaturé cette attestation ;

Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine et rendue nécessaire non seulement de l'attestation mais aussi de sa lettre d'accompagnement que la cour d'appel a retenu, de la part de la société Inter-Selection, l'engagement de payer à M. Nahmad le prix en espèces représenté par la somme de 150 000 francs révélée au grattage et correspondant au numéro certifié gagnant qui lui avait été attribué ; qu'ainsi, le moyen ne peut être accueilli en aucun de ses griefs ;

PAR CES MOTIFS :REJETTE le pourvoi.

Doc. 3   : Civ 2 ème , 26 octobre 2000

Sur le moyen unique : Vu l’article 1382 du Code

civil ; Attendu, selon l’arrêt

infirmatif attaqué et les productions, que la société Civad La Blanche Porte (la société) a envoyé à M. Cammage une lettre intitulée “ tirage exceptionnel du blanc “ dont le premier paragraphe l’informait que “ Maître Bué, huissier de justice à Roubaix, venait de désigner les numéros gagnants des 10 titres de propriété donnant droit aux 10 superbes lots mis

en jeu “, le second l’exhortait à regarder si le numéro personnel de son titre de propriété figurait dans la liste accolée et à quel lot il correspondait, et le troisième indiquait : “ Si ce numéro a été désigné gagnant par Maître Bué, vous êtes propriétaire ! “ ; que M. Cammage, comme il y était invité, a renvoyé le “ titre de propriété “ comportant son “ numéro personnel “ 18432904, dont il avait vérifié qu’il figurait sur la liste des 10 numéros de titres de propriété et qu’il correspondait au premier lot constitué par une maison ; que n’ayant pas obtenu ce lot qu’il pensait avoir gagné, il a fait assigner la société en paiement de la somme représentative ;

 Attendu que pour débouter

M. Cammage de sa demande, la cour d’appel énonce que l’analyse des documents rédigés par la société, qui ne présentent ni véritable personnalisation au nom du client, ni affirmation que le destinataire du titre de propriété était le gagnant du lot n° 1, ne permet pas d’établir l’existence d’une faute à l’encontre de la société de vente par correspondance, qu’un examen attentif de l’ensemble des documents reçus permettait à n’importe quel destinataire d’un titre de propriété d’échapper à la vaine croyance qu’il était devenu propriétaire d’une maison gagnée sans aucune démarche de sa part et que, si méprise de M. Cammage il y a eu, son erreur résulte non de la volonté de la société de le tromper, mais de son propre manque de sagacité ;

Qu’en statuant ainsi, après avoir indiqué que la lecture hâtive du document peut créer quelque équivoque en raison de la juxtaposition des deuxième et troisième paragraphes du texte de la lettre et qu’à des fins commerciales et publicitaires, la société a cherché à susciter chez ses correspondants l’espoir d’un gain, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ces constatations et n’a pas effectué de rapprochements avec le premier paragraphe de la lettre susvisée, ni recherché, comme elle y était invitée, l’incidence du numéro personnel attribué à M. Cammage et de sa correspondance à un lot de la liste, a violé le texte susvisé ;

 PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans

toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 14 mai 1998, entre les parties, par la cour d’appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens.

Doc. 4   : Ch. Mixte, 6 septembre 2002

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a reçu de la société de vente par correspondance Maison française de distribution (la société) deux documents le désignant, de façon nominative et répétitive, en gros caractères, comme ayant gagné 105 750 francs, avec

annonce d'un paiement immédiat, pourvu que fût renvoyé dans les délais un bon de validation joint ; que cette pièce fût aussitôt signée et expédiée ; que la société n'ayant jamais fait parvenir ni lot ni réponse, M. X... l'a assignée en délivrance du gain et, subsidiairement, en paiement de l'intégralité de la somme susmentionnée pour publicité trompeuse, née de la confusion entretenue entre gain irrévocable et pré-tirage au sort ; que l'Union fédérale des consommateurs Que Choisir (UFC) a demandé le paiement d'une somme de 100 000 francs de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif des consommateurs ; que l'arrêt leur a respectivement accordé les sommes de 5 000 francs et un franc ;

Mais sur le moyen de pur droit, relevé d'office après avertissement donné aux parties

Vu l’article 1371 du Code civil ;

Attendu que les quasi-contrats sont les faits purement volontaires de l'homme dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers ;

Attendu que pour condamner la société à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts à M. X..., l'arrêt retient qu'en annonçant de façon affirmative une simple éventualité, la société avait commis une faute délictuelle constituée par la création de l'illusion d’un gain important et que le préjudice

ne saurait correspondre au prix que M. X... avait cru gagner ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'organisateur d'une loterie qui annonce un gain à une personne dénommée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa s'oblige, par ce fait purement volontaire, à le délivrer, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE.

Doc. 5   : Pinnel’s case (1602)

Résumé :

A willingness to pay part of a debt promptly does not itself represent a consideration, and cannot found a contract

This case (Pinnel's Case (1602) 5 Co Rep 117 Court of Appeal) is probably the earliest to establish the principle that if one person owes money to another, then an agreement to take a lesser sum to settle the debt, if if well-attested, is not a binding obligation. The reason it is not rests on the fact that there is no new consideration to support the new agreement.

        Cole owed Pinnel £8 10s, but at Pinnel's request paid £5 2s 6d one month before the full sum was due. Cole claimed that there was an agreement that the part-payment would discharge the full debt. The

court found in favour of Pinnel, because part-payment of an original debt did not make for fresh consideration. Therefore the agreement was not a contract.

        Although influential, this case was actually decided on a technicality. If Cole had extracted from Pinnel an agreement that the early payment was in return for accepting part payment, then Cole would have won the case.

        It could be argued, and indeed has been argued, that part-payment of a debt may be more acceptable to a creditor than the ability to recover the full amount in damages; common sense would suggest that it's better to have £100 now, than £200 after a year in litigation. However, in Foakes v Beer (1884) the House of Lords supported the principle of Pinnel's case, and subsequent judgements have tended to follow this ruling.

Doc 6   : Williams v. Roffey Bros. , [1991]

Résumé :

Agreement to comply with a contract may be consideration for a new contract in circumstances where additional benefit is conferred by a particular mode of completion

This highly contentious case (Williams v Roffey Bros. and Nicholls (Contractors) Ltd [1991] 1 QB 1) is taken to demonstrate that, in some cases, the performance of an existing contractual obligation

can be taken as consideration in a new agreement. The traditional view has always been that it does represent a benefit to the party whose duties are already fulfulled to have the other party offer to do something he has to do anyway. This principle is similar in effect to that in Collins v Godefroy (1831), where a statutory duty could not be seen as consideration.

        Roffey at al. were a firm of builders contracted to rennovate a block of flats. Their own contract contained a penalty clause for late completion, so it was in their interests to finish the work on time. Part of this work they sub-contracted to Williams. As work progressed, Williams fell behind schedule because, they claimed, they had not set an adequate price for the work. They negotiated a new deal with Roffey, that an additional sum was to be payed on the completion of each building. When the next building was complete, Roffey refused to pay.

        In defence, Roffey claimed that the new agreement with Williams was void, as there was no sufficient consideration from Williams. The Court considered the case of Stilk v Myrick and decided that it was robust and should stand: an agreement cannot be enforced without consideration. However, the Court held that in this case there was consideration: the new agreement conferred additional `practical benefit' on Roffey, in particular an early completion would allow them to avoid the exercise of the penalty clause.

        Although this case could be seen as overturning the traditional narrow view of consideration, in practice it has not been widely followed in subsequent cases. For example, in the case of Re Selectmove (1994) the Court of Appeal decided that the House of Lords ruling in Foakes v Beer (1884) prevented the notion of `practical benefit' being used to support the idea of part-payment of debt being used as consideration.

Doc. 7 : Central London Property Trust Ltd. v. High Trees House Ltd. , [1947]

Résumé :

Promissory estoppel prevents lack of consideration being a bar to contract formation

This case (Central London Property Trust Ltd v High Trees Ltd [1947] KB 130) formed the basis of the modern interpretation of the doctrine of promissory estoppel, as applied to a contract. The judgement has attracted a fair amount of criticism and a number of attempts at exploitation; nevertheless, it attempts to right an obvious injustice, using a principle of equity that has been around for centuries.

        Central London Property Trust (CLPT) owned a block of flats which it leased -- for £2250 pa -- to High Trees Ltd (HT), and which became

known as `High Trees House'. HT's plan was to let the flats individually to tenants. However, the war meant that demand was slack and HT negotiated a reduction in the cost of the lease to £1250 pa for the period 1940-1945. After the war the demand increased and the flats were all let. CLPT attempted to recover the full cost of the lease, as per the original agreement, claiming that there was no consideration from HT to support the agreement for the reduced rates. The absence of consideration was not in dispute, and under a strict interpretation of the common law on contracts CLPT would have been able to enforce their rights to full lease value. However, Lord Justice Denning ruled that the agreement to reduce the rent was a promise, and HT had acted on that promise. If CLPT were allowed to enforce their rights then the fact that HT had acted on the promise would be to its detriment (because they would have to pay full price when most of the flats were unlet), and CLPT could be made subject to a promissory estoppel.         The ruling in this case was not without precedent (see Hughes v Metropolitan Railway Cpy (1877); however, in contrast to the earlier case the estoppel would have to be permanent, otherwise CLPT could attempt to enforce their rights again. It is this part of the judgement that cause most controversy.

Judgement :

“If I were to consider this matter without regard to

recent developments in the law, there is no doubt that had the plaintiffs claimed it, they would have been entitled to recover ground rent at the rate of 2,500l. a year from the beginning of the term, since the lease under which it was payable was a lease under seal which, according to the old common law, could not be varied by an agreement by parol (whether in writing or not), but only by deed. Equity, however stepped in, and said that if there has been a variation of a deed by a simple contract (which in the case of a lease required to be in writing would have to be evidenced by writing), the courts may give effect to it as is shown in Berry v. Berry [1929] 2 K. B. 316. That equitable doctrine, however, could hardly apply in the present case because the variation here might be said to have been made without consideration. With regard to estoppel, the representation made in relation to reducing the rent, was not a representation of an existing fact. It was a representation, in effect, as to the future, namely, that payment of the rent would not be enforced at the full rate but only at the reduced rate. Such a representation would not give rise to an estoppel, because, as was said in Jorden v. Money (1854) 5 H. L. C. 185, a representation as to the future must be embodied as a contract or be nothing. But what is the position in view of developments in the law in recent years? The law has not been standing still since Jorden v. Money (1854) 5 H. L. C. 185. There has been a series of decisions over the

last fifty years which, although they are said to be cases of estoppel are not really such. They are cases in which a promise was made which was intended to create legal relations and which, to the knowledge of the person making the promise, was going to be acted on by the person to whom it was made and which was in fact so acted on. In such cases the courts have said that the promise must be honoured. The cases to which I particularly desire to refer are: Fenner v. Blake [1900] 1 Q. B. 426, In re Wickham (1917) 34 T. L. R. 158, Re William Porter & Co., Ld. [1937] 2 All E. R. 361 and Buttery v. Pickard [1946] W. N. 25. As I have said they are not cases of estoppel in the strict sense. They are really promises - promises intended to be binding, intended to be acted on, and in fact acted on. Jorden v. Money (1854) 5 H. L. C. 185 can be distinguished, because there the promisor made it clear that she did not intend to be legally bound, whereas in the cases to which I refer the proper inference was that the promisor did intend to be bound. In each case the court held the promise to be binding on the party making it, even though under the old common law it might be difficult to find any consideration for it. The courts have not gone so far as to give

a cause of action in damages for the breach of such a promise, but they have refused to allow the party making it to act inconsistently with it. It is in that sense, and that sense only, that such a promise gives rise to an estoppel. The decisions are a natural result of the fusion of law and equity: for the cases of Hughes v. Metropolitan Ry. Co. (1877) 2 App. Cas. 439, 448, Birmingham and District Land Co. v. London & North Western Ry. Co. (1888) 40 Ch. D. 268, 286 and Salisbury (Marquess) v. Gilmore [1942] 2 K. B. 38, 51, afford a sufficient basis for saying that a party would not be allowed in equity to go back on such a promise. In my opinion, the time has now come for the validity of such a promise to be recognized. The logical consequence, no doubt is that a promise to accept a smaller sum in discharge of a larger sum, if acted upon, is binding notwithstanding the absence of consideration: and if the fusion of law and equity leads to this result, so much the better. That aspect was not considered in Foakes v. Beer (1884) 9 App. Cas. 605. At this time of day however, when law and equity have been joined together for over seventy years, principles must be reconsidered in the light of their combined effect.”

Fiche 6 : Droit européen et droit comparé

Droit comparé et droit européen ne sauraient être séparés par une frontière trop étanche, tant ils se nourrissent mutuellement. On ne saurait donc être surpris que le comparatiste trouve dans la transposition des directives communautaires un précieux terrain d’analyse des différences entre systèmes juridiques, voire des points qui les unissent (Voir en ce sens la transposition de la directive du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation).

I.Exercices

Préciser les arguments « pour » et « contre » une transposition large de la directive du 25 mai 1999. (Doc 2)

II. Documents

Doc. 1 : M. Schley, « La grande réforme du droit des obligations en Allemagne », D. 2002, chr. p. 1738 (Extraits).Doc. 2 : C. Witz, « La nouvelle jeunesse du BGB insufflée par la réforme du droit des obligations », D. 2002, chr. p. 3156 (Extraits).Doc. 3 : G. Paisant, «  La transposition de la directive du 25 mai 1999 sur les garanties dans la vente de biens de consommation », Contrats Concurrence Consommation n° 8, Août 2005, p. 8. (Extraits)

1) La réforme du droit des obligations en Allemagne

Doc. 1 : M. Schley, La grande réforme du droit des obligations en Allemagne, D. 2002, chr. p. 1738 (Extraits)

L'obligation pour l'Allemagne de transposer la directive 1999/ 44/CE en date du 25 mai 1999 sur la vente et les garanties des biens de consommation a incité le législateur allemand à procéder à ces modifications. Mais la réforme ne se limite pas à transposer ladite directive elle change de manière fondamentale notamment le système de la garantie des vices et de l'éviction.

Parmi les nombreuses modifications en la matière, les points suivants méritent plus spécialement d'être mentionnés.

Une première modification importante concerne le délai de prescription de la garantie des vices, qui était jusqu'alors de six mois pour les biens meubles et causait beaucoup de problèmes dans la pratique. Ce délai a été prolongé à deux ans à compter de la remise de la chose et ne vaut pas uniquement pour les ventes conclues avec les consommateurs (comme le demande la directive européenne qui est à l'origine de cette modification), mais en principe pour toutes les ventes. Le législateur allemand va donc, à cet égard, bien au-delà des exigences du droit européen.

Pour les ventes de biens de consommation, ce délai ne peut pas être réduit contractuellement avant l'indication du vice à

l'entrepreneur (sauf pour les biens d'occasion, auquel cas le minimum absolu est désormais un délai d'un an).

En dehors des ventes de biens de consommation, le délai peut être réduit par un accord individuel entre les parties. Dans les conditions générales, une réduction est également possible (contrairement à la situation avant le 1er janvier 2002) jusqu'à un minimum d'un an. La question de savoir si ce dernier principe vaut également pour les contrats entre entreprises est actuellement en suspens ; la majorité des auteurs y répondent par l'affirmative. Bien entendu, il faut attendre les premiers arrêts à cet égard.

Un autre point important pour la pratique est l'invention d'un droit légal à la réparation de la chose défectueuse, droit qui n'existait jusqu'alors qu'en

matière de contrat d'entreprise. L'acheteur peut, au choix, également demander la livraison d'une nouvelle chose, exempte de vices. Même si ces droits sont actuellement déjà souvent accordés à l'acheteur dans le cadre d'une garantie conventionnelle, il n'existait jusqu'alors pas de réglementation légale générale applicable à tous les contrats de vente.

L'acheteur dispose donc désormais des droits suivants en cas de vices de la chose fournie : le droit à la réparation de la chose ou à la livraison d'une nouvelle chose, le droit à la résiliation du contrat (« action rédhibitoire »), le droit à la réduction du prix de vente (« action estimatoire ») et le droit à des dommages et intérêts résultant des nouvelles dispositions générales en la matière (en ce qui concerne ce dernier droit, il convient

de préciser que, jusqu'alors, l'acheteur ne disposait en droit allemand d'un droit à des dommages et intérêts en raison des vices de la chose que dans des conditions assez limitées, de sorte que non seulement l'invention du nouveau droit à réparation ou au remplacement de la chose défectueuse, mais également l'octroi général d'un droit à des dommages et intérêts en cas de vices constitue un renforcement considérable des droits de l'acheteur).

Ce qui est également intéressant pour la pratique, c'est la nouvelle définition légale des vices. Sans pouvoir entrer dans les détails à cet égard, il est intéressant de noter que le vice peut désormais également résulter de l'absence de qualités indiquées dans la publicité du vendeur ou du producteur (!). En outre, la livraison d'une chose non

commandée ou d'une quantité inférieure à celle qui avait été convenue est désormais assimilée à la livraison d'une chose défectueuse. Non seulement en France, mais également en Allemagne, la délimitation entre la livraison d'une chose défectueuse et une livraison non conforme posait des problèmes de sorte que, à l'avenir, la situation juridique sera plus simple à cet égard.

Enfin, il convient de mentionner qu'il y a désormais plusieurs dispositions spécifiques s'appliquant aux ventes de biens de consommation (= ventes d'un bien meuble corporel conclues entre un consommateur et un entrepreneur), qui résultent en grande partie de ladite directive sur la vente et les garanties des biens de consommation. Ces dispositions ne prévoient pas seulement la nullité

d'une clause limitant les droits de l'acheteur-consommateur résultant de la garantie des vices et d'éviction, mais également un renversement de la charge de la preuve concernant l'antériorité du vice : si le vice apparaît dans les six mois après le transfert des risques, l'antériorité du vice est présumée. Ont également été ajoutées au Code civil allemand (pour la première fois) des dispositions concernant la garantie conventionnelle et l'action récursoire du vendeur contre son fournisseur (qui est, le cas échéant, le fabricant lui-même).

Doc. 2 : C. Witz, La nouvelle jeunesse du BGB insufflée par la réforme du droit des obligations, D. 2002, chr. p. 3156 (Extraits)

« Il a fallu attendre l'an 2000 pour que la réforme du droit des obligations soit réactivée. Tel un coup de

tonnerre, un avant-projet de loi en vue d'une modernisation du droit des obligations accompagné d'une longue motivation issue du rapport final de la Commission de réforme du droit des obligations - l'ensemble forme un document de 630 pages - fut publié par le ministère de la Justice le 4 août 2000 (Diskussionsentwurf). Le déclencheur de la réforme a été la directive du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation, texte dont les grandes lignes sont bien connues. Il faut assurer au consommateur européen, qui achète des biens mobiliers, un socle de protection comparable d'un pays à l'autre. Le vendeur est tenu de livrer au consommateur un bien conforme au contrat. La directive retient, comme la Convention de Vienne uniformisant la vente internationale de

marchandises, la notion unitaire de conformité. Il n'est plus question de garantie des vices. Cette directive, sans vouloir toucher aux régimes de responsabilité contractuelle et délictuelle, instaure au profit du consommateur le droit d'exiger la réparation du bien ou son remplacement. Le délai durant lequel le vendeur doit répondre du défaut de conformité est relativement long : il est de deux ans à compter de la délivrance du bien, ce délai étant complété par une importante présomption : les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de six mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance.

Cette directive a placé les pouvoirs publics allemands devant un redoutable dilemme: se contenter de transposer la directive ou en profiter pour réformer le

droit de la vente dans son ensemble et au-delà le droit des troubles dans l'exécution des obligations. Le choix devait ainsi se faire entre une petite solution (kleine Lösung) ou une grande solution (grosse Lösung). Assurément, une réformette aurait eu de gros inconvénients, puisqu'un droit particulier à la vente entre professionnels et consommateurs se serait rajouté aux différents droits de la vente existants, au nombre de trois : le droit de la vente du BGB, les règles complémentaires applicables aux ventes commerciales posées par le code de commerce et le droit applicable aux ventes internationales des marchandises issu de la Convention de Vienne. Ce droit particulier aux ventes entre professionnels et consommateurs aurait semblé, par maints aspects, un corps totalement étranger au droit existant.

D'où l'adoption d'une réforme d'ampleur.

C'est le droit de la vente du BGB et accessoirement celui du contrat d'entreprise qui a été fondamentalement réformé et, au-delà, le droit des troubles dans l'exécution des obligations ainsi que les règles régissant la prescription. Cette réforme a été également l'occasion de la transposition de la directive n° 2000-35 du 29 juin 2000 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, de celle n° 98-27 du 19 mai 1998 relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs ainsi que des articles 10, 11 et 18 de la directive n° 2000-31 du 8 juin 2000 sur le commerce électronique. Quant à la transposition de la directive du 13 décembre 1999 sur les signatures électroniques, elle a fait l'objet d'une loi distincte.

Il est frappant de constater qu'une telle réforme d'ampleur du BGB ait pu être adoptée aussi rapidement, l'Allemagne n'étant pas coutumière d'une pareille précipitation dans la préparation et l'entrée en vigueur de textes de lois. Tout a pu être mené aussi rondement car le ministère de la Justice a constamment brandi la date fatidique du 1er janvier 2002, date de transposition de la directive du 25 mai 1999.

Le projet de réforme a provoqué bien sûr beaucoup de remous, notamment chez les universitaires. Colloques et journées d'études se sont succédé à un rythme soutenu. Des articles de presse souvent incendiaires ont paru dans les grands journaux. Des sites « internet » ont été spécialement créés. Des pétitions ont circulé. Mais, surtout, des commissions se sont constituées

rassemblant des universitaires et des représentants des ministères en vue d'améliorer le texte. Ces efforts ont porté leurs fruits. On a pu s'en rendre compte lorsque a paru le 9 mai 2001 le projet de loi gouvernemental (Regierungsentwurf), modifié, sur des points sensibles, par rapport au projet d'août 2000.

Pour accélérer le processus législatif, les deux assemblées ont été saisies du texte en même temps : le Bundesrat a été saisi du projet gouvernemental alors qu'a été soumise au Bundestag une proposition de loi, au contenu identique, émanant de parlementaires SPD et Verts. Le Bundesrat a travaillé de manière approfondie et a pris position en émettant cent cinquante propositions dont la plus grande partie a été retenue. Le 11 octobre 2001, le texte a été voté par

le Bundestag ; les députés CDU, CSU et FDP se sont opposés au texte. Le Bundesrat l'a adopté le 9 novembre. La loi a paru au

Bundesgesetzblatt le 26 novembre. La réforme est entrée en vigueur le 1er janvier 2002. »

2) La transposition en France de la directive du 25 mai 1999

Doc. 3 : G. Paisant, La transposition de la directive du 25   mai 1999 sur les garanties dans la vente de biens de consommation, Contrats Concurrence Consommation n° 8, Août 2005, p. 8 (Extrait).

«  (…) Certes, la France est en retard pour ce faire puisque la date limite fixée par l'article 11 de la directive était celle du 1er janvier 2002. Une condamnation en manquement par la CJCE est même intervenue par un arrêt du 1er juillet 2004 (aff. C-311/03, Comm. CE c/ France). Mais il y eut d'autres « mauvais élèves », dont nos voisins immédiats, la Belgique et le Luxembourg et, en France même, nous avons connu des situations plus graves : qui ne se souvient de la problématique transposition, avec dix ans de retard, de la directive du 25 juillet 1985 sur la responsabilité du fait des produits défectueux par la loi du 19   mai 1998 . Dans les deux cas, il est symptomatique d'observer qu'un même débat a vu le jour sur la portée de la transposition à effectuer. En particulier, convenait-il de profiter du texte communautaire pour, au-delà des prévisions et des exigences de ce dernier, réformer notre Code civil, désormais bicentenaire, sur les questions des vices cachés et de la responsabilité pour défaut de conformité des produits livrés ? Dans chaque situation, un groupe de travail avait été nommé auprès du garde des Sceaux avec la mission d'élaborer un avant-projet de loi de transposition. Dans le premier cas, sous la direction de M. Jacques Ghestin et, dans le second, sous la présidence de Mme Geneviève Viney, la proposition allait dans le même sens : une transposition élargie réformant le droit civil de la vente. C'est ainsi que, dans le rapport général présenté par Mme Viney, il est exposé

que la transposition « donnait une occasion unique d'apporter au droit français les modifications qu'exigent sa modernisation et [...] de gommer certaines de ses imperfections » (Rapp. préc., p. 4). « Aussitôt » et « à l'unanimité », le groupe de travail a adopté le parti de « proposer la refonte des textes du Code civil (C. civ., art.   1641 à 1649 ) afin de substituer à l'action en garantie contre les défauts cachés de la chose vendue et à l'action en responsabilité pour délivrance d'une chose non conforme, une action nouvelle et unique en garantie de conformité » (Rapp. préc., p. 5) dérivée de la directive et, en amont, de la Convention de Vienne du 11 avril 1980. Il était en effet apparu opportun d'éviter, dans la mesure du possible, « des disparités injustifiées entre le droit applicable aux ventes internes et aux ventes internationales » (Rapp. préc., loc. cit.).Cette vision des choses devait toutefois rencontrer l'opposition d'une partie de la doctrine, des organisations représentatives des professionnels, le MEDEF, en particulier, et même des associations de consommateurs. En premier lieu, il était facile d'observer que la directive, limitée aux seuls rapports entre vendeurs professionnels et acheteurs consommateurs (Dir. n° 1999/44/CE, art. 1er), n'imposait en aucune manière une réforme du Code civil sur la vente dont les dispositions sont applicables à tous les rapports contractuels. Une telle réforme aurait eu vraisemblablement pour effet de limiter la liberté contractuelle dans les ventes entre professionnels ; une liberté que ces derniers ne voulaient pas abdiquer. D'ailleurs, d'un point de vue plus général de méthode législative, ne paraissait-il pas plus logique d'insérer le droit nouveau dans le Code de la consommation puisque la France présente la particularité de posséder cet instrument législatif correspondant précisément au domaine visé par la directive ? Une transposition dans ce code permettrait au surplus de mettre fin à l'anachronisme consistant à y reproduire à l'article L. 211-1, au titre de la « conformité », les dispositions des articles 1641 à 1648 du Code civil sur la garantie des vices cachés. Ainsi en la matière, le Code de la consommation aurait désormais ses règles propres dérivées du texte communautaire, applicables aux seuls rapports professionnels-consommateurs. Enfin, ces derniers pouvaient faire valoir que la transposition dans le Code civil des principes communautaires aurait entraîné, sur divers points, un recul de leurs droits par rapport à ce qu'ils étaient jusqu'alors. Pouvait-on admettre qu'une directive, affichée comme

étant de protection des consommateurs, et destinée à renforcer leur confiance (Dir. n° 1999/44/CE, 5e cons.), soit l'occasion de restreindre leurs droits ? C'est précisément pour éviter cet inconvénient que les partisans de la transposition dans le Code de la consommation souhaitaient que celle-ci soit assortie d'une option en faveur des consommateurs : ou bien agir contre le vendeur en vertu des nouvelles dispositions intégrées dans ledit code, ou bien invoquer les dispositions restées inchangées du Code civil, selon leur intérêt. La réaction des artisans de la transposition élargie dans le Code civil ne se fit pas attendre : les défenseurs de la solution consumériste sont présentés comme « inconditionnellement attachés à une législation vieillie »Note 8 et risquant « de faire de notre droit un maquis inextricable et un véritable repoussoir » en raison de la « complexité extrême » du système par eux proposé. Pendant plusieurs mois, la controverse fit rage, au delà même du raisonnable pour une question ne soulevant aucun enjeu de société. Finalement, dans un projet de loi déposé le 16 juin 2004 au Sénat, les pouvoirs publics ont préféré la voie de la transposition dans le Code de la consommation en laissant subsister les principes du Code civil. »

Fiche 7 : Les conséquences de l’inexécution du contrat

L’étude des sanctions de l’inexécution du contrat constitue un terrain idéal pour le droit comparé. Elle dévoile de profondes différences entre le droit français et les droits de common law, l’un privilégiant l’exécution en nature tandis que les autres lui préfèrent l’exécution par équivalent. L’attention portée par ces derniers aux dommages et intérêts contractuels explique sans doute la place occupée par l’analyse économique du droit, à travers notamment la théorie de l’ « efficient breach of contract ».

Exercices

Exposé sur le thème : le droit communautaire (en particulier, la directive du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente…) incite-t-il à repenser les remèdes à l’inexécution des contrats ?

Commenter l’affirmation suivante : « Il est préférable de ne pas exécuter un contrat lorsque cette inexécution s’avère avantageuse pour le contractant. »

Comparer les deux arrêts suivants : Cass. 2° civ, 19 juin 2003 (Doc. 3) et Darbishire v. Warran, Court of Appeal, 3, July, 1963 (Doc.4).

DocumentsLire : E. Chanounka Tolomè," L'inexécution précontractuelle et contractuelle en droits français et américain : une instructive comparaison", Gazette du Palais, 28 avril 2007 n° 118, p. 13Doc. 1 : Simon Whittaker, Un droit à la prestation plutôt qu’un droit à l’exécution ? Perspectives anglaises sur l’exécution en

nature et la réparation, Revue des contrats, 2005, n°1, p. 49 (Extrait).Doc. 2 : La sanction adéquate en matière contractuelle : une analyse économique, Les Petites Affiches, 19 mai 2005, p. 43 (Extrait).Doc. 3 : Cass. Civ. 2°, 19 juin 2003, Bull. civ. II, n°86.Doc. 4 : [1963] 1 W.L.R. 1067, Darbishire v. Warran, Court of Appeal3, July, 1963.Doc. 5 : Article 9:505 Principes du droit européen du contrat , version 1998

1) Exécution en nature et exécution par équivalent

Doc. 1 : Simon Whittaker, Un droit à la prestation plutôt qu’un droit à l’exécution ? Perspectives anglaises sur l’exécution en nature et la réparation, Revue des contrats, 2005, n°1, p. 49 (Extrait)

« La conséquence juridique immédiate d'une promesse obligatoire par laquelle le promettant s'oblige à ce qu'il pleuve demain est que ce dernier assume le risque propre à cet événement, dans certaines limites préétablies avec le stipulant. Le promettant ne fait rien de plus lorsqu'il s'engage à livrer une balle de coton... La common law définit les notions d'engagement et de contrat de la sorte, ne s'embarrassant

pas de la théorie superflue selon laquelle un contrat est l'assujettissement d'une volonté à une autre dans une sorte d'esclavage encadré... La seule conséquence universelle d'un contrat légalement formé est que le droit impose au promettant de payer des dommages et intérêts si l'événement ne se réalise pas. Dans toutes les hypothèses il reste à l'abri de toute forme d'ingérences jusqu'à ce que soit passée la date d'exécution ; il reste par conséquent libre de rompre le contrat... Dans la mesure où la relation entre les parties se créée par leurs volontés, les conséquences de cette relation doivent elles aussi rester dépendantes de ces volontés »2.

Ce célèbre passage de The Common Law par Oliver Wendell Holmes est une excellente illustration du fort courant de pensée chez les juristes de common law quant aux effets des contrats : les

contrats ne donnent nullement naissance à des obligations de faire ou de ne pas faire ce qui a été convenu, mais offrent plutôt aux parties un choix entre l'exécution ou le versement de dommages et intérêts. Certains auteurs ont été jusqu'à affirmer que les termes d'obligation ou de droit sont tout simplement étrangers à l'idée que la common law se fait des contrats. Puisque les contrats sont des ensembles de promesses dont le droit assurera l'exécution (en raison de l'existence d'une contrepartie défini par la notion de « consideration » ou grâce aux formalités du deed, anciennement un contrat scellé3) par les différentes sanctions qu'il apporte aux

ruptures de contrats, il n'existe pas plus de droit à l'exécution qu'il n'existe d'obligation d'exécuter ce à quoi l'on s'est engagé. Il existe plutôt des remedies for breach (« remèdes/réparation/dédommagement de l'inexécution contractuelle »), au premier rang desquels viennent les dommages et intérêts. À ce stade, il apparaît que les différences quant aux effets des contrats selon les règles du common law ou dans les systèmes juridiques de tradition civiliste ne sont pas seulement fondamentales, elles sont essentielles, touchant à la conception même de la nature des contrats ».

2) L’inexécution efficace des contrats

Doc. 2 : La sanction adéquate en matière contractuelle : une analyse économique, Les Petites Affiches, 19 mai 2005, p. 43 (Extrait)

L'inexécution efficace :

le principe

Pour aborder cette question, nous nous inspirons fortement de l'analyse qu'en propose Ejan Maackay (2005) à travers l'exemple de la surréservation aérienne. Imaginons une compagnie aérienne qui opère chaque jour 100 vols de 100 places à 500€ le siège ce qui représente un chiffre d'affaires potentiel de 5.000.000€. Cette compagnie est cependant confrontée à une moyenne de 10 % de no-show qui, si elle se traduisait en autant de sièges

inoccupés, ne lui permettrait de ne réaliser qu'un chiffre d'affaires journalier de 4.500.000€, alors même que ses coûts sont grosso modo liés au nombre de vols et non au nombre de passagers transportés. La compagnie a donc intérêt à améliorer son taux de remplissage en pratiquant de la surréservation et en vendant donc systématiquement 10 % de sièges en plus sur chaque vol. Pour faire le bilan d'une telle pratique, il faut prendre en considération le fait que le no-show sur chaque vol n'étant pas identique, il

demeurera des cas où des sièges resteront vides, et des cas où plus de 100 clients se présenteront à l'embarquement. Il faudra alors dédommager les victimes d'un défaut d'exécution du contrat de transport. Étudions donc le bilan d'une telle opération, dans le cas où le pourcentage de no-show par vol se répartirait comme indiqué dans le tableau suivant.

Nombre de vols

Nombre de sièges inoccupés en réservation classique

es inoccupés ou manque en cas de surréservation à 110

5 815 960 1015 115 12

Dans un tel cas de figure, la perte liée aux sièges inoccupés s'élève à 12.500€ pour la compagnie (25 × 500€) à comparer au demi-million précédent. Grâce à la surréservation, la compagnie réalise donc 487.500€ de recettes supplémentaires ce qui lui donne une marge du même montant pour dédommager les passagers s'étant vu refuser l'embarquement. Imaginons que la compagnie propose à ces 25 passagers un dédommagement de 500€ ainsi qu'une place sur le prochain vol (ce qui dans notre exemple est en réalité un peu difficile car cela

suppose que les passagers surreservés puissent se reporter sur les vols où il reste effectivement des sièges vides). Le coût d'une telle mesure est de 12.500€. Il en résulte un chiffre d'affaires de 4.975.000€ pour la compagnie. Le gain net de la surréservation est de 475.000€ de chiffre d'affaires alors même que l'ensemble des passagers désirant être transportés le sont, et que les 25 clients qui ont eu la malchance de ne pouvoir embarquer dans le vol de leur choix bénéficient de facto d'un vol gratuit.

D'un point de vue économique, le défaut d'exécution permet ainsi d'atteindre une situation largement préférable à celle qui résulte d'une stricte exécution de l'ensemble des contrats de transport (qui interdit de facto la surréservation) et ce, aussi bien pour le transporteur que pour les passagers. En dynamique, on peut même imaginer que ce meilleur taux de remplissage des avions permet au transporteur de répartir ses coûts (fixes) d'exploitation sur un plus grand nombre de passagers et donc de faire baisser le prix de ses billets (potentiellement de près de 10 %).

Cet exemple a un double mérite. Tout d'abord il montre bien comment dans certaines circonstances, la non-exécution d'une obligation contractuelle peut être socialement efficace, suggérant ainsi qu'elle ne doit pas nécessairement être sanctionnée. Ensuite, il souligne qu'en ce qui concerne les parties contractantes, tout

le problème est celui du régime d'indemnisation. En effet, la partie qui souhaite ne pas exécuter réalise un « surplus » par rapport à la situation où elle devrait exécuter. Si ce « surplus » est supérieur à la perte enregistrée par la victime de la rupture alors il y a accord possible. Les deux contractants sont alors gagnants et une meilleure utilisation des ressources est réalisée au plan collectif. La « compensation » due à la victime en cas de non-exécution peut varier entre le montant du préjudice qu'elle subit et le gain total dont bénéfice l'initiateur de la non-exécution. Il faut naturellement que ce gain soit supérieur au préjudice, mais dans ce cas, la « victime » de la non-exécution peut se retrouver dans une situation préférable à celle dans laquelle elle aurait été s'il y avait eu exécution suivant les termes envisagés

contractuellement, puisque le bénéficiaire est en mesure de verser à la victime une compensation supérieure au préjudice qu'elle subit.

On parle donc de rupture efficace, lorsque les gains collectifs à la non-exécution sont supérieurs aux dommages engendrés. Lorsqu'on est dans une telle situation, la partie qui désire ne pas exécuter est en mesure de négocier la non-exécution avec l'autre, puisque les gains qu'elle réalise lui permettent de dédommager la victime. L'acceptation et l'acceptabilité de la non-exécution vont donc dépendre du régime de compensation de la « victime » et l'analyse économique de la sanction en matière contractuelle va s'appuyer sur l'analyse des propriétés de différents régimes de compensation car il peut y avoir plusieurs acceptions de la notion de préjudice.

3) la mitigation des dommages

Doc. 3 : Cass. Civ. 2°, 19 juin 2003, Bull. civ. II, n°86

Sur les deux premières branches du premier moyen et la première branche du second moyen :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que l'auteur d'un accident doit en réparer toutes les conséquences dommageables ; que la victime n'est pas tenue de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., qui exploitait un fonds de boulangerie, et sa fille ont été blessées le 12 septembre 1984 dans un accident de la circulation dont M. Y... a été reconnu responsable ; que Mme et Mlle X... ont assigné ce dernier en réparation de leurs préjudices ;

Attendu que pour rejeter la demande de Mme X... en indemnisation de son préjudice résultant de la perte de son fonds de commerce et celle de Mlle X... relative à la perte de chance d'avoir pu reprendre un fonds de commerce prospère, l'arrêt retient que si Mme X... affirme que son fonds de commerce, resté inexploité jusqu'en mars 1990, avait perdu toute valeur puisque la clientèle avait disparu et le matériel était devenu obsolète, elle avait la possibilité de faire exploiter le fonds par un

tiers et que si elle a choisi de le laisser péricliter, elle ne saurait en imputer la responsabilité à l'auteur de l'accident ; que la perte de valeur du fonds n'étant pas une conséquence de l'accident, Mlle X... ne pouvait en demander réparation à l'auteur de l'accident ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort des constatations de l'arrêt que Mme X... avait subi, du fait de l'accident, pendant de nombreux mois une incapacité temporaire totale et partielle de travail, puis qu'elle avait conservé une incapacité permanente partielle l'empêchant de reprendre son activité de boulangerie, ce dont il résultait l'existence d'un lien de causalité directe entre l'accident et le préjudice allégué, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Que le rejet de la demande de Mlle X... relative à la réparation de la perte de chance alléguée doit être annulée par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 novembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.

Doc 4. [1963] 1 W.L.R. 1067, Darbishire v. Warran, Court of Appeal, 3, July, 1963

PEARSON L.J.

In August, 1958, the plaintiff bought a used motor car for about £330. It was a 1951 Lea Francis shooting brake. Being a mechanical engineer the plaintiff maintained it well and it was reliable. There was no special adaptation of it. On July 26, 1962, it was seriously damaged in a collision caused by the defendant's negligence. The plaintiff sued the defendant in the Haywards Heath County Court for damages for negligence, and the defendant admitted liability but denied the alleged loss and damage.

The issue in the appeal arises in this way. The judge included in his assessment of the damages a sum of £180, being the cost of repairing the damage to the vehicle, but he also made a finding that the market value was £80. It is contended by Mr. O'Connor for the defendant that the assessment should have been based on the market value and not on the cost of repair. The other

figures can be mentioned briefly. The plaintiff is admittedly entitled to a sum of £25 for the cost of temporary hiring of a substitute vehicle. The plaintiff gives credit for £80 received from his own insurance company. As between the plaintiff and his insurance company the market value was taken at £85, but the plaintiff under his policy bore the first £5 of the loss. This point is unimportant, but I think the judge's figure of £80 for the market value should be adjusted to £85, and Mr. O'Connor does not contest that.There is no complete definition of the expression "market value" in the evidence or the judgment, but I understand it as meaning standard replacement market value, that is to say, the retail price which a customer would have to pay in July, 1962, on a purchase of an average vehicle

of the same make, type and age or a comparable vehicle. It is not the price for a sale to a dealer or between dealers. It appears from a passage in the judgment that the "market value" does not include any allowance for the good maintenance and reliability of the plaintiff's vehicle.

What are the principles applicable? The first and main principle is that the plaintiff is entitled to receive as damages such a sum of money as will place him in as good a position as he would have been in if the accident had not occurred. In Liesbosch Dredger v.

Edison S.S. (Owners) [FN8] Lord Wright said:"It is not questioned that when a vessel is lost by collision due to the sole negligence of the wrongdoing vessel the owners of the former vessel are entitled to what is called restitution in integrum, which means that they should recover such a sum as will replace them, so far as can be done by

compensation in money, in the same position as if the loss had not been inflicted on them, subject to the rules of law as to remoteness of damage."

Now, but for the accident, the plaintiff would have continued to have the use of his existing motor car, the 1951 Lea Francis shooting brake, undamaged. The accident deprived him of it. To be restored to substantially the same position, he needed such sum of money as would enable him to provide himself with an equivalent vehicle either by having the existing damaged vehicle repaired or by finding and acquiring another vehicle equally good.

There is, however, a second principle which was stated by Viscount Haldane in British Westinghouse Electric and Manufacturing Co. Ltd. v. Underground Electric Railways Company of London

Ltd. [FN9]:

"The fundamental basis is thus compensation for pecuniary loss flowing from the breach; but this first principle is qualified by a second, which imposes on a plaintiff the duty of taking all reasonable steps to mitigate the loss consequent on the breach, and debars him from claiming any part of the damage which is due to his neglect to take such steps. In the words of James L.J. in Dunkirk Colliery Co. v. Lever, [FN10] 'The person who has broken the contract is not to be exposed to additional cost by reason of the plaintiffs not doing what they ought to have done as reasonable men, and the plaintiffs not being under any obligation to do anything otherwise than in the ordinary course of business."'

For the purposes of the present case it is important to appreciate the true nature of the so-called "duty to

mitigate the loss" or "duty to minimise the damage." The plaintiff is not under any actual obligation to adopt the cheaper method: if he wishes to adopt the more expensive method, he is at liberty to do so and by doing so he commits no wrong against the defendant or anyone else. The true meaning is that the plaintiff is not entitled to charge the defendant by way of damages with any greater sum than that which he reasonably needs to expend for the purpose of making good the loss. In short, he is fully entitled to be as extravagant as he pleases but not at the expense of the defendant.

Now did the plaintiff in this case take all reasonable steps to mitigate the loss consequent on the breach? He knew from his dealings with the insurance company that they assessed the replacement market value at £85, and he accepted payment from them on that basis. The insurance company advised against

repairs. He was told, at one time at any rate, by the repairers that it was uneconomic to have the vehicle repaired. He had estimates of the cost and there is no evidence of the estimates being inaccurate. After spending about £180, he would have a vehicle worth only about £85. And yet he made no attempt to find another car. It is true he said in his evidence in chief that he could not replace the car with one of similar type and quality for £85, nor for less than £192, but that evidence cannot carry conviction, as he admitted in cross-examination that he did not attempt to find another car. The witness Langley, the works manager of the repairers, said in evidence that he would not have expected to get anything reliable for £100 in September, 1962. He also said that the plaintiff discussed the repairs with their manager Redhouse and that Redhouse said it was not an economic

proposition. Barnes, the defendant's expert witness, gave the figures of prices from Glass's Guide, and said that in July to September, 1962, it would be difficult to find a Lea Francis but you could find other estate cars. Then in the notes of his evidence there is the word "uneconomic."

In my view it is impossible to find from the evidence that the plaintiff took all reasonable steps to mitigate the loss, or did all that he reasonably could do to keep down the cost. He was fully entitled to have his damaged vehicle repaired at whatever cost because he preferred it. But he was not justified in charging against the defendant the cost of repairing the damaged vehicle when that cost was more than twice the replacement market value and he had made no attempt to find a replacement vehicle.

The judge in his judgment stated his view very

cogently and at first I thought it was right; but after consideration of the arguments in this appeal I am unable to accept it, because he was not giving due effect to the principles of mitigation of loss or minimising of damage. He was not paying sufficient regard to the economic aspect of the matter. He said:

"Evidence has been given on behalf of the defence that it was uneconomical to repair, but I do not think that kind of phrase really helps. What was reasonable for the plaintiff to do?" Later he said: "What would a reasonable man do? I do not think I ought to look at it merely from the point of view of a lawyer or a hardheaded business man or of the precise mathematician. What would the ordinary man in the street do in a case like this?"

In my opinion there is an error of principle involved in these passages. It is vital,

for the purpose of assessing damages fairly between the plaintiff and the defendant, to consider whether the plaintiff's course of action was economic or uneconomic, and if it was uneconomic it cannot (at any rate in the absence of special circumstances, of which there is no evidence in this case) form a proper basis for assessment of damages. The question has to be considered from the point of view of a business man. It seems to me the practical business view is that if the cost of repairing your damaged vehicle is greatly in excess of the market price, you must look around for a replacement and you would expect to

find one at a cost not far removed from the market price, although unless you were lucky you might have to pay something more than the standard market price to obtain a true equivalent of a well-maintained and reliable vehicle.

Doc 5. Principes du droit européen du contrat, version 1998

Article 9:505: Réduction du préjudice

(1) Le débiteur n'est point tenu du préjudice souffert par le créancier pour autant que ce dernier aurait pu réduire son préjudice en prenant des mesures raisonnables.

(2) Le créancier a droit au remboursement de tous frais qu'il a raisonnablement engagés en tentant de réduire le préjudice.

Fiche 8 : La responsabilité pour faute délictuelle

Etre responsable, c’est être tenu de répondre de ses actes. Si la plupart des pays d’Europe reconnaissent l’existence d’un principe juridique de responsabilité pour faute, tous ne considèrent pas de la même manière la portée de ce principe. En effet, alors que le droit français est fondé sur un principe général de responsabilité pour faute, les systèmes juridiques anglais et allemand ne connaissent pas un tel principe.

ExercicesExposé sur le thème : « Le tort of negligence dans les pays de common law ».

Commenter l’affirmation suivante : « La responsabilité délictuelle française est fondée sur la protection d’un « droit à » l’indemnisation ».

Commentaire de l’arrêt suivant : Doc 4 : BGH, 25 mai 1954, BGHZ 13

Documents

Doc 1 : Donoghue v Stevenson [1932] A C 562, H. L.Doc 2 : Articles 1382 et 1383 du Code civil français

Doc 3 : § 823 et 836 du BGBDoc 4 : BGH, 25 mai 1954, BGHZ 13

Doc 1   : Donoghue v Stevenson [1932]

Résumé   :

action in negligence founded on the reasonable foresight of harm

If this is not the most famous case in British legal history, it must be one of the most famous. This case is often credited with establishing the modern law of negligence, despite that it was not even a full trial, and that Lord Atkins' celebrated remarks might strictly be considered obiter (arguably, the ratio of the case is limited to product liability). The case concerned whether the manufacturer of bottled soft drinks could be held liable for an injury caused to the consumer. There was little doubt that had the purchaser of the drink been harmed by it, she would have been able to recover from the retailer for breach of contract; the retailer in turn would probably have been able to recover from the supplier. The question at issue was whether it was possible to recover in tort, absent a contractual relationship, since it was not the purchaser that suffered the injury.

The defendants' argument was that suppliers' liability to consumers in tort for defective products was simply unknown to British law, and there was no case

to be tried. The case heard by the House concerned simply whether there was, in fact, a case to be tried; there was no actual trial of the facts. The House decided, by a bare majority, that there was a case to be tried. It held that a principle could be drawn from prior authorities, that any person could be liable for harm to any other person, given certain conditions were met. It is the speech of Lord Atkins that was most influential, in particular these lines, that every law student probably knows by heart:

``You must take reasonable care to avoid acts or omissions which you can reasonably foresee would be likely to injure your neighbour. Who, then, in law is my neighbour? The answer seems to be - persons who are so closely and directly affected by my act that I ought reasonably to have them in contemplation as being so affected when I am directing my mind to the acts or omissions which are called in question.''

This `neighbour principle' was, and to a certain extent still is, the foundation of the modern law of negligence.

Judgment :

(reproduction des deux ratio decidendi de l’arrêt)

Lord Atkin

“At present I content myself with pointing out that in English law there must be, and is, some general conception of relations giving rise to a duty of care, which particular cases found in the books are but instances (…). The rule that you are to love your neighbour becomes in law, you must not injure your neighbour ; and the lawyer’s question, who is my neighbour? receives a restrictive reply. You must take reasonable care to avoid acts and omissions which you can reasonably foresee would be likely to injure your neighbour. Who, then, in law is my neighbour? The answer seems to be – persons who are so closely and directly affected by my act that I ought reasonably to have them in contemplation as being so affected when I am directing my mind to the acts and omissions which are called in question.”

“[A] manufacturer of products, which he sells in such a from as to show that he intends them to reach the ultimate consumer in the form in which they left him with no reasonable possibility of intermediate examination, and with the knowledge that the absence of reasonable care in the preparation or putting up of the products will result in an injury to the consumer’s life or property, owes a duty to the consumer to take that reasonable care.”

Synthèse   :

Where the manufacturer of a product intended for human consumption sends it out in a form which shows that he means it to reach the ultimate consumer in the form in which it left his factory, with no reasonable possibility of intermediate examination by the retailer or consumer, and with the knowledge that want of reasonable care on his part in the preparation of the product may result in injury to the consumer, the manufacturer owes a duty to the consumer to take such care, and will be liable to the latter, in damages if he suffers injury through the failure to take such care.

Doc 2   : Articles 1382 et 1383 du Code civil français

Article 1382

   Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Article 1383

   Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

Doc 3 : § 823 et 836 du BGB

§ 823Schadensersatzpflicht

(1) Wer vorsätzlich oder fahrlässig das Leben, den Körper, die Gesundheit, die Freiheit, das Eigentum oder ein sonstiges Recht eines anderen widerrechtlich verletzt, ist dem anderen zum Ersatz des daraus entstehenden Schadens verpflichtet.

(2) Die gleiche Verpflichtung trifft denjenigen, welcher gegen ein den Schutz eines anderen bezweckendes Gesetz verstößt. Ist nach dem Inhalt des Gesetzes ein Verstoß gegen dieses auch ohne Verschulden möglich, so tritt die Ersatzpflicht nur im Falle des Verschuldens ein.

(1) Quiconque, agissant intentionnellement ou par négligence, porte atteinte illégalement à la vie, au corps, à la santé, à la liberté, à la propriété ou à tout autre droit d’autrui, est tenu à l’égard de celui-ci à la réparation du préjudice qui en résulte.

(2) La même obligation incombe à celui qui contrevient à une loi protectrice des intérêts d’autrui. Si, d’après le texte de loi, une contravention à celle-ci est possible en dehors de toute faute, l’obligation de réparer n’intervient que s’il y a faute.

§ 836

Sittenwidrige vorsätzliche Schädigung

Wer in einer gegen die guten Sitten verstoßenden Weise einem anderen vorsätzlich Schaden zufügt, ist dem anderen zum Ersatz des Schadens verpflichtet.

Celui qui agissant intentionnellement et contrairement aux bonnes mœurs cause un préjudice à autrui, est obligé envers celui-ci à la réparation du dommage.

Doc 4   : BGH, 25 mai 1954, BGHZ 13 (à partir d’une traduction de FROMONT M. et RIEG A. in Introduction au droit allemand 1, Les Fondements, éd. Cujas, Collection Institut de droit comparé de Dijon et Strasbourg, Paris, 1977, p. 223)

Résumé   :

Des lettres privées ne peuvent en principe être publiées sans l’autorisation de leur auteur encore en vie et uniquement de la manière permise par l’auteur. Cette règle résulte de la protection de la personnalité telle qu’elle découle des articles 1er et 2nd de la Loi fondamentale ; elle vaut par conséquent également dans l’hypothèse où les écrits ne présentent pas la forme individuelle requise pour la protection du droit d’auteur.

Faits   :

« La défenderesse a publié le 29 juin 1952 dans son hebdomadaire, un article sous le titre « Dr. S. et Cie », et sous le sous-titre « considérations politiques à propose de la création d’une nouvelle banque ». L’article contenait des informations au sujet de la nouvelle banque de commerce créée par le Dr. S., et à ce propos évoquait l’activité politique du Dr. S. sous le régime national-socialiste.

En vertu d’un mandat du Dr S., M. M., avocat, a envoyé une lettre le 4 juillet 1952 afin que soient rectifier les informations parues dans le journal relatives aux activités du Dr. S. pendant la guerre. Pour toute réponse, la défenderesse a publié le texte de la lettre envoyé par l’avocat, dans la rubrique du courrier des lecteurs, sans l’en informer au préalable et après avoir supprimé certains éléments du texte.

L’avocat (le demandeur) a dès lors formé une action afin de voir réparer le préjudice résultant de l’atteinte aux droits de sa personnalité. La publication, sous la rubrique « courriers des lecteurs », la lettre falsifiée dans son contenu à la fois par la suppression de certains éléments, et par le titre choisi, conduit selon lui à induire intentionnellement les lecteurs en erreur. Cette publication laissait en effet à penser que cette lettre ne

constituait que la simple prise de position d’un lecteur à propos de l’article sur le Dr. S..

Au contraire, la défenderesse estime qu’elle n’était pas obligée de donner suite à la demande de rectification du demandeur, parce que celle-ci n’était pas conforme aux exigences du paragraphe 11 de la Loi sur la presse. Elle était donc libre de décider si, et à quel endroit, la correspondance pouvait être publiée. »

Le tribunal régional a accueilli la demande en se fondant sur le paragraphe 823 a. 2 du Code civil (BGB), et des paragraphes 186 et 187 du Code pénal. Le tribunal régional supérieur a cependant rejeté la demande aux motifs que la publication n’avait causé aucun préjudice illicite au demandeur. En effet l’affirmation inexacte selon laquelle le demandeur avait envoyé une lettre de lecteur à la défenderesse, n’a nuit ni à son crédit personnel, ni à son image dans l’opinion.

Motifs du jugement   :

« La juridiction d’appel a, à tort, omis de vérifier si la demande est justifiée par une atteinte portée à un droit de la personnalité du demandeur, et a rejeté la demande uniquement parce qu’elle estime que les

conditions objectives de l’acte illicite au sens des paragraphes 823, 824 a. 2 du Code civil, et 186 et 187 du Code pénal, ne sont pas réunies en l’espèce.

Il est inutile de se prononcer sur le point de savoir si la lettre du demandeur doit être considérée comme une œuvre écrite au sens du paragraphe 1 de la Loi sur la propriété littéraire et sur les droits d’auteur. (…) La doctrine a insisté sur le fait de la nécessité de reconnaître une protection de la personnalité au sujet de l’utilisation d’écrits personnels existe de la même manière lorsque cette protection te peut être déduite du droit d’auteurs, parce que les écrites en question se présentent sous la forme d’écrit individuel. Le problème posé par cette reconnaissance était que l’ordre juridique allemand ne contenait pas de disposition de droit positif générale de la protection de la personnalité. Quelques décisions ont certes accordé protection à des droits de la personnalité par la biais du paragraphe 826 du Code civil, mais aucune n’a reconnu des droits de la personnalité à effet absolu.

A présent que la loi fondamentale reconnaît le droit de la personne humaine au respect de sa dignité (art. 1er de la Loi fondamentale) et le droit au libre épanouissement de sa

personnalité également en tant que droit privé à respecter par chacun, dans la mesure où ce droit ne lèse pas les droits d’autrui ou n’enfreint pas l’ordre constitutionnel (art. 2 de la Loi fondamentale), le droit de la personnalité doit être considéré comme un droit fondamental garanti par la constitution.

Il est inutile de débattre ici du point de savoir si et dans quelle mesure la protection de ce droit général de la personnalité, dont la délimitation exige un examen tout spécial des biens en présence, est restreinte dans un cas particulier par des intérêts privés ou publics justifiés, qui l’emportent sur l’intangibilité de la sphère personnelle ; dans le présent litige, on ne voit pas d’intérêts dignes de protection de la défenderesse, qui lui permettraient de justifier son comportement critiqué par le demandeur. Bien au contraire, la mode de publication de la lettre de rectification, ainsi que l’omission de parties essentielles de l’écrit ont porté atteinte à des intérêts du demandeur relativement à ses droits de la personnalité.

Toute fixation par la langue du contenu d’une pensée donne une émanation de la personnalité de l’auteur. Il en résulte qu’en principe seul l’auteur

a la qualité de décider si et sous quelle formes ses écrits sont portés à la connaissance du public. (…) Tandis qu’une publication non autorisée d’écrits privés représente – en règle générale – une atteinte inadmissible à la sphère d’intimité protégée de toute personne humaine, une reproduction altérée des écrits lèse la sphère de l’intimité privé de l’auteur parce que de telle altérations peuvent communiquer une fausse image de sa personnalité. Sont inadmissibles non seulement les suppressions non autorisées par l’auteur de parties essentielles, mais également les adjonctions qui confèrent aux écrites publiés dans un certain but, une coloration ou tendance autre que celle exprimée par l’auteur.

En l’espèce, le demandeur n’avait adressé à la défenderesse de manière non équivoque une demande de rectification, en sa qualité d’avocat du Dr. S.. Par là, le demandeur a autorisé la défenderesse à publier la lettre, soit intégralement, soit en la réduisant à la rectification des faits exigée, mais en précisant qu’il s’agissait d’un demande de rectification.

Il convient d’approuver le tribunal régional pour qui ce mode de publication – classement de la lettre de rectification parmi cinq lettres relatives à l’article

publié par la défenderesse – devait évoquer auprès du lecteur non averti l’impression que la lettre du demandeur constituait une prise de position personnelle dans la dispute qui était née à propos du Dr. S.

Aussi la juridiction d’appel n’a-t-elle pas méconnu que la publication de la lettre de rectification dans une forme abrégée sous la rubrique « courrier des lecteurs » contient l’affirmation d’un fait inexacte. Mais par là même, il est établi que ce mode de publication a donné à la lettre de rectification une tendance ne concordant pas avec sa rédaction originale, et que cette forme de publication ne correspond pas à ce pour quoi le demandeur avait accordé son autorisation, à savoir la présentation au public des déclarations visées, sans modification et dans la forme choisie d’une lettre de rectification.

Le tribunal régional a à bon droit considéré la publication critiquée – qui d’après ses constations a été connue d’un nombre de personnes extrêmement élevé – comme source d’un préjudice continu, et a par ces motifs estimé justifiée la demande de rétractation ».