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Analyse d’un conflit géopolitique : le conflit syrien (Docs 21 à 32) Coalition arabo-occidentale en Irak et en Syrie (…) Cette coalition rassemble les États-Unis, la France, les principales armées européennes, la France, l'Australie, le Canada, l'Arabie saoudite, la Jordanie, le Qatar, Bahreïn et les Émirats arabes unis. L'Iran intervient également pour soutenir les gouvernements irakiens et syriens mais indépendamment de la coalition. Les premières frappes contre des positions de l'État islamique débutent le 8 août 2014 en Irak et le 23 septembre en Syrie. Début octobre 2014, l'armée américaine estimait être à l’origine de 90 % des deux mille raids menés depuis le début du conflit. À noter que la Russie mène parallèlement sa propre intervention depuis septembre 2015. Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Coalition_arabo- occidentale_en_Irak_et_en_Syrie , consulté le 20 janvier 2016 Doc 22 Doc 21 1

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Analyse d’un conflit géopolitique : le conflit syrien (Docs 21 à 32)

Coalition arabo-occidentale en Irak et en Syrie

(…) Cette coalition rassemble les États-Unis, la France, les principales armées européennes, la France, l'Australie, le Canada, l'Arabie saoudite, la Jordanie, le Qatar, Bahreïn et les Émirats arabes unis. L'Iran intervient également pour soutenir les gouvernements irakiens et syriens mais indépendamment de la coalition.

Les premières frappes contre des positions de l'État islamique débutent le 8 août 2014 en Irak et le 23 septembre en Syrie. Début octobre 2014, l'armée américaine estimait être à l’origine de 90 % des deux mille raids menés depuis le début du conflit. À noter que la Russie mène parallèlement sa propre intervention depuis septembre 2015.

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Coalition_arabo-occidentale_en_Irak_et_en_Syrie, consulté le 20 janvier 2016

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Source : http://www.lavie.fr/medias/webreportages/3-minutes-pour-comprendre-les-enjeux-energetiques-de-la-guerre-en-syrie-05-09-2013-43762_455.php , article publié le 05/09/2013, site consulté le 31/12/2015.

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Le facteur gazier dans le conflit syrien

Entretien avec David Amsellem, spécialisé dans les questions énergétiques du Proche et du Moyen-Orient.

Quel est le volume estimé des réserves syriennes en hydrocarbures ?

Le potentiel énergétique de la Syrie n’est pas négligeable. Ses réserves de pétrole sont estimées à 2,5 milliards de barils, c’est-à-dire plus qu’aucun autre de ses voisins à l’exception de l’Irak. Quant à ses réserves de gaz naturel, elles sont estimées à plus de 240 milliards de mètres cubes ; l’équivalant du gisement Léviathan découvert au large des côtes israéliennes. Néanmoins, la Syrie fait figure de nain énergétique à l’échelle du monde puisque sa production journalière de pétrole ne représente que 0,002 % de la production mondiale.

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Avant que le conflit syrien n’éclate, quels étaient les débouchés des réserves ? Quelle part était réservée à la consommation interne ? Quelles proportions étaient destinées à l’export ?

Entre 2008 et 2010, la Syrie produisait en moyenne 400 000 barils de pétrole par jour. La grande majorité de cette production était réservée à la consommation locale, le reste (environ 140 000 barils/jour) était destiné à l’exportation. Plus de 90% des exportations pétrolières syriennes étaient à destination des pays de l’Union européenne, notamment l’Allemagne (32%), l’Italie (31%) et la France (11%). Ces exportations représentaient environ 30% du PIB de la Syrie.

Quelle place occupait la Syrie dans l’échiquier énergétique régional avant 2011 ? Quels projets ont été interrompus dans leur réalisation par le conflit en cours ?

La situation géographique du pays, frontalier à l’Irak, à la Turquie et disposant d’une large façade maritime, lui permettait d’être un couloir énergétique idéal pour le transit de gaz du Moyen-Orient vers l’Europe. En 2009, l’émir du Qatar proposait ainsi à Bachar El-Assad la construction d’un gazoduc reliant leurs deux pays en passant par l’Arabie saoudite et la Jordanie afin d’acheminer le gaz du gisement North Dome, situé dans le Golfe persique, vers l’Europe. Or, le Qatar partage une partie de ce gisement avec l’Iran, un allié privilégié de la Syrie. Pour cette raison, Damas a refusé le projet qatari et a signé en 2011 avec Téhéran un accord pour la construction d’un gazoduc reliant l’Iran à la Syrie en passant par l’Irak (Islamic gaz pipeline). Ces projets ont été gelés avec le début de la guerre civile.

Quels sont les enjeux énergétiques du conflit en cours ?

Les enjeux énergétiques de ce conflit se situent essentiellement à un niveau régional. Ils permettent d’expliquer, en partie, le comportement des États alliés ou opposés à l’actuel gouvernement syrien. En effet, le projet de gazoduc qatari pourrait être relancé si les rebelles faisaient chuter le régime en place, ce qui explique que le Qatar aie pu apporter un tel soutien à la rébellion syrienne. En outre, ce gazoduc serait aussi une aubaine énergétique pour l’Union européenne qui souhaite le raccorder au gazoduc Nabucco (en projet), et ainsi réduire sa dépendance vis-à-vis du gaz russe. Là encore, on pourrait y voir une des raisons pour lesquelles les pays de l’UE souhaitent la fin du régime de Bachar El-Assad. À l’inverse, l’Iran, qui a signé un accord pour la construction de l’Islamic gas pipeline, souhaite que le régime se maintienne au pouvoir, tout comme la Russie, qui envisage de relier l’Islamic gas pipeline au futur gazoduc, South Stream, construit par Gazprom. D’un point de vue énergétique, au-delà de l’Iran et du Qatar, ce sont finalement l’UE et la Russie qui s’opposent et l’on retrouve cet affrontement sur la scène politique.

Comment les ressources énergétiques sont-elles utilisées par les acteurs du conflit, notamment les entités non étatiques comme le PYD et les groupes rebelles ?

Depuis plusieurs mois déjà, les groupes rebelles et le PYD - le principal parti kurde - contrôlent le nord-est du pays, une région dans laquelle se trouvent de nombreux gisements pétroliers. Au début de l’année 2013, l’Union européenne a décidé de lever partiellement l’embargo pétrolier adopté à l’automne 2011 contre la Syrie, permettant ainsi à des entreprises européennes d’acheter du brut syrien issu des puits contrôlés par les rebelles. Il y a donc un enjeu, pour les groupes rebelles, à s’approprier des puits de pétrole pour les exploiter économiquement. Pour le régime syrien, l’instrumentalisation du pétrole à des fins politiques est impossible. Au contraire, l’UE l’utilise contre lui pour l’affaiblir par le biais de sanctions.

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Ces ressources sont-elles suffisamment abondantes pour permettre l’émergence d’éventuelles entités politiques locales fondées sur les emprises territoriales acquises par les acteurs non étatiques à la faveur du conflit en cours ?

Les revenus pétroliers des régions conquises sont certes considérables pour les groupes rebelles qui les contrôlent, mais les possibilités de les exploiter restent minces pour ces acteurs non étatiques. L’exportation par voie maritime passe par l’ouest du pays où se trouve l’ensemble du réseau de gazoduc. Or, toute cette région est contrôlée par le régime de Bachar El-Assad. La seule alternative consiste à exporter en quantité restreinte le pétrole par camions, via l’Irak et la Turquie. La consommation locale de ce pétrole s’avère elle aussi compliquée dans la mesure où le raffinage du pétrole brut n’est pas possible car les raffineries se situent dans les territoires contrôlés par le régime. Dans ces conditions, les ressources énergétiques de la Syrie ne peuvent pas constituer une base solide pour permettre l’émergence d’entités politiques nouvelles. Mais il ne faut pas surestimer le rôle des hydrocarbures dans la volonté politique des acteurs non étatiques locaux. En novembre 2013, les partis kurdes syriens ont déclaré de facto l’existence d’un gouvernement autonome dans la région nord-est qu’ils contrôlent, malgré les difficultés qu’ils ont à exploiter le pétrole de cette région.

Source : http://www.lesclesdumoyenorient.com/Le-facteur-gazier-dans-le-conflit.html, article publié le 10/03/2014, site consulté le 31/12/2015.

Au Proche-Orient, l’eau a remplacé le pétrole comme enjeu majeur

Au Proche-Orient et au Maghreb, les pénuries d’eau vont accentuer les tensions, prédisent les chercheurs du World Resources Institute (WRI). Ils ont croisé plusieurs variables climatiques, économiques et démographiques afin d’établir un classement des pays les plus vulnérables. «A l’horizon 2040, 33 pays dans le monde vont se retrouver en Stress hydrique.» Un concept défini par une disponibilité en eau inférieure à 1700 m3 par habitant et par an. En tête arrivent Bahrein, le Koweit, le Qatar, les Emirats arabes unis, la Palestine et Israël avec un stress hydrique maximal, suivis de l’Arabie Saoudite, du sultanat d’Oman, du Liban et du Yémen. La Libye et les pays du Maghreb ne sont pas loin derrière.

C’est au Moyen-Orient et au Maghreb que l’élévation des températures devrait avoir le plus d’impact sur les disponibilités en eau, et donc sur l’agriculture.L’eau c’est aussi le pain. «Le réchauffement climatique, et la montée de la mer dans les deltas (Nil) pourraient diminuer de 30 à 60% les rendements céréaliers», écrit Sébastien Abis dans son livre Géopolitique du blé .

Les pays de la région ne sont pas seulement déstabilisés par les conflits religieux et ethniques, ils le sont également par la sécheresse et le manque d’eau comme on a pu le voir en Syrie. Le Nord de la Syrie a connu une importante sécheresse entre 2007 et 2010, avec des conséquences désastreuses sur l’agriculture. La chute des récoltes et des revenus a poussé nombre de paysans vers les villes. Cette crise agricole, si elle n’est qu’un facteur marginal du chaos syrien, n’est pas totalement étrangère au conflit. «Elle a amplifié la déstabilisation générale de la Syrie», selon le rapport du WRI. «Le cas syrien montre comment peuvent s’imbriquer des crises climatiques, économiques et politiques», écrit Sébastien Abis Alors que le désert occupe 95% des terres, d’ores et déjà la sécurité alimentaire du Proche-

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Orient n’est pas assurée. C’est aujourd'hui l’une des régions les plus dépendantes de la planète pour ses besoins alimentaires. Au Yémen, 95% des besoins en blé sont couverts par les importations. L’Egypte en importe 10 millions de tonnes, l’Iran 6Mt, l’Arabie Saoudite 3Mt, le Yémen 3Mt, Israël 2Mt. La Syrie était avant la crise, le seul pays exportateur de blé de la région. (…)

(…) Les tendances, climatiques, démographiques et alimentaires, présagent une dépendance croissante envers les importations de céréales. Que le prix du pain augmente ou qu’il vienne à manquer, et la révolte n’est pas loin. les réfugiés climatiques succéderaient alors aux réfugiés politiques.

Source : http://geopolis.francetvinfo.fr/au-proche-orient-leau-a-remplace-le-petrole-comme-enjeu-majeur-77999, article publie le 7/09/2015 par Michel Lachkar, consulté en ligne le 1/01/2016.

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Syrie: les positions des différents acteurs du conflit

(…)RECIP TAYYIP ERDOGAN

Ce qu'il pense d'Assad :

Le président turc ne souhaite qu'une chose : le départ de Bachar al-Assad afin de permettre l'instauration d'un régime sunnite de l'autre côté de sa frontière. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a été accusé par les Occidentaux d'avoir laissé prospérer Daech dans le but d'affaiblir Damas. Sûr de lui, il expliquait au mois d'août que Poutine allait "lâcher Assad". C'est précisément le contraire qui s'est produit et la Turquie a dû changer de fusil d'épaule dans sa stratégie vis à vis de l'Etat islamique.

Les forces engagées :

La Turquie a procédé à ses premières frappes au cours de l'été, notamment à l'aide de ses chasseurs F-16. Pays frontalier de la Syrie, la Turquie a les moyens d'affaiblir considérablement l'Etat islamique, notamment en stoppant le commerce de pétrole de contrebande qui alimente la fortune de Daech (plus de 30% de son budget). Le gouvernement turc envisagerait d'ailleurs de déployer des dirigeables au-dessus des 900 km de sa frontière syrienne et de doubler celle-ci par un mur afin d'empêcher les mouvements des jihadistes.

Alliés dans la région

La Turquie s'inscrit dans le camp sunnite, surtout depuis l'accession des conservateurs islamistes à des postes clés du pouvoir turc. Difficile de déterminer quels sont les réels alliés de la Turquie dans ce conflit. Car si le pays est membre de l'OTAN et a ouvert récemment sa base aux appareils américains, le double jeu dangereux auquel s'est prêté Ankara incite à la vigilance quant aux réelles intentions du pouvoir turc s'attaquant autant à Daech qu'aux Kurdes qui, esseulés, essuient le feu des jihadistes.

Source : http://www.huffingtonpost.fr/2015/10/10/syrie-acteurs-conflit-russie-etats-unis-turquie_n_8258018.html , publié par R. Herreros, le 10/10/2015, consulté en ligne le 21/01/2016.

Des antagonismes anciens

(…) Ces dissensions (entre la Turquie et la Syrie) trouvent une expression concrète dans les conflits territoriaux autour de la définition des frontières. La Syrie revendique par exemple le sandjak (division administrative ottomane) d’Alexandrette, c’est-à-dire la région de Hatay, au sud de la Turquie, zone appartenant à la Syrie mandataire, mais cédée par la France à la Turquie en 1939. Entre les Irakiens et les Turcs, on trouve la même dynamique négative. La tutelle ottomane avait véhiculé des sentiments d’humiliation chez les Arabes, et inversement, le retrait des Ottomans a provoqué le même sentiment chez les Turcs.

(…) Car le problème kurde est aussi interétatique. Les pays riverains soutiennent les Kurdes turcs pour déstabiliser Ankara. En 1991, la Turquie bloque pratiquement l’écoulement de

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l’Euphrate pour remplir le barrage Atatürk nouvellement construit. Les Kurdes servent alors d’instrument à l’Irak et à la Syrie pour faire pression sur la Turquie : la Syrie aide le PKK à déstabiliser Ankara. (…)

Source : http://www.lesclesdumoyenorient.com/L-eau-cause-ou-pretexte-pour-les.html, publié par Hervé Amiot, le 16/12/2013, consulté en ligne le 01/01/2016.

Syrie et Irak : une migration sans précédent historique ?

(…) La situation en Mésopotamie est beaucoup moins claire et nettement plus complexe : depuis 2011, de nombreux groupes militaires participent au conflit. Ces groupes sont tantôt alliés, tantôt opposés. Par exemple, les chrétiens d’Irak subissent à la fois les violences perpétrées par des groupes djihadistes et les vexations du pouvoir politique.

En Syrie, en 2011, certains gouvernements occidentaux ont cru voir une « banale » guerre civile entre deux camps, selon un modèle binaire traditionnel : le régime du président Bachar el-Assad, au pouvoir depuis plusieurs décennies, et ses opposants. C’était une illusion, car, dès 2011, il y a une multitude de groupes en Syrie. Certes, ils déclarent tous s’opposer au régime mais leurs objectifs sont fort différents selon qu’il s’agit de laïcs partisans d’une évolution démocratique, de liberté politique et de justice sociale, ou de groupes islamistes radicaux voulant détruire des éléments du patrimoine historique de la Syrie et instaurer une république islamique fondée sur la charia. D’ailleurs, même si la plupart des opérations militaires de l’opposition à Bachar el-Assad et des groupes islamistes armés sont initialement dirigés contre le régime, les conflits entre les groupes militaires pour le contrôle de territoires, les armes, le partage du butin ou l’obtention du soutien de tel ou tel pays étranger émergent rapidement. Dans ce contexte, la supposée bataille principale initialement évoquée contre le régime n’est plus nécessairement la priorité. Or, cette complexité est souvent négligée à cause d’une vision dualiste du monde. Pourtant, dans le conflit syrien, il faut différencier de nombreux acteurs militarisés. Outre le régime et ses différentes forces ou milices, une « armée syrienne libre » (ASL, née en juillet 2011), considérée par des pays occidentaux comme une opposition « modérée », a été initialement et largement formée par des soldats déserteurs, puis affaiblie par des départs ou des « désertions » de ces troupes vers des groupes islamistes, comme le Front al-Nosra, affilié à Al Qaeda, ou le Front Islamique. Il convient notamment d’ajouter le YPG (Yekîneyên Parastina Gel, Unités de protection du peuple), bras armé du PYD (Parti de l’union démocratique), parti politique kurde syrien.

(…)Mais en Mésopotamie, le caractère multiple de la guerre est très accusé, d’autant plus qu’il se déploie à une échelle transnationale, couvrant à la fois des territoires irakiens et syriens.

Outre le fait que le conflit civil en Mésopotamie comprend de nombreux groupes et factions en guerre avec d’autres, en dépit des trêves et alliances temporaires qui changent périodiquement, une autre caractéristique tient à l’intrusion d’une composante militaire d’une nature nouvelle.

Comprendre les raisons de l’émergence de cette composante suppose de rappeler qu’en 2003, le protectorat qu’installent les États-Unis sur l’Irak se caractérise par la mise à bas de toute l’organisation de l’État irakien, sans trier entre ce qui mériterait d’être conservé et ce qui devrait être banni. En mai 2006, la situation s’aggrave lorsque Nouri al-Maliki est investi Premier ministre à la tête d’un gouvernement de coalition. Soutenu par l’Iran, il apparaît rapidement qu’il privilégie presque systématiquement la majorité chiite au détriment de la minorité sunnite . Les Irakiens sunnites, brimés par le nouveau gouvernement et écartés des postes administratifs ou militaires, s’opposent de plus en plus au pouvoir de Bagdad. Ils se trouvent dans le même combat qu’un Conseil consultatif réunissant différents groupes djihadistes qui, en octobre 2006,

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décide de se proclamer « État islamique d’Irak ». Ses dirigeants, soutenus au moins indirectement par des puissances sunnites du Moyen-Orient, se considèrent comme les vrais représentants politiques de l’Irak. Et l’ensemble parvient à contrôler une partie occidentale du territoire irakien. Puis les dirigeants de cet « État islamique d’Irak » font preuve d’opportunisme lorsque la Syrie se trouve à son tour déstabilisée en 2011. Recourant à une violence extrême, utilisant des kamikazes pour détruire les défenses de l’adversaire et du nettoyage ethnique, ils font passer sous leur contrôle des territoires syriens. Affirmant leur souveraineté de fait sur le cœur géographique de la Mésopotamie, le 9 avril 2013, ils prennent le nom d’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), soit, en arabe, Daech : « D » pour État, « a » pour islamique, « e » pour Irak et « ch » pour Levant.

Bénéficiant de « volontaires » venus de nombreux pays, Daech considère qu’il a en son sein des représentants de l’ensemble de l’oumma, la communauté des musulmans, indépendamment de leur nationalité. Puis il continue de progresser, notamment en s’emparant de gisements pétroliers ou des villes irakiennes de Falloujah (janvier 2014) et de Mossoul (juin 2014), face à une armée irakienne mal organisée, essentiellement chiite et dont beaucoup d’officiers sunnites sont passés à l’ennemi.

Daech devient immensément riche par suite du pillage des territoires conquis, et notamment des banques de Mossoul, mais aussi du pétrole qu’il vend aisément à un prix inférieur à celui des marchés, surtout à des clients turcs. Ses moyens militaires s’élargissent avec du matériel états-unien abandonné par l’armée irakienne. En outre, Daech sait user des moyens de communication pour faire la promotion du djihadisme, c’est-à-dire d’une conception religieuse selon laquelle les vrais musulmans doivent tuer les hérétiques (comme les chiites) ; quant aux infidèles chrétiens ou yézidis, ils doivent se convertir ou être tués. Le 29 juin 2014, L’organisation prend, dans ses communiqués, le nom d’« État islamique » et annonce le rétablissement du califat. Son chef, Abou Bakr al-Baghdadi, se proclame calife, successeur de Mahomet, sous le nom d’Ibrahim. Une des principales caractéristiques de Daech, dont l’idéologie est celle d’un totalitarisme islamiste, est son manque total de scrupules. Certes, les totalitarismes du XXe siècle, nazi ou communiste, n’étaient pas tendres. Toutefois, ils ne repoussaient pas totalement l’héritage du droit international humanitaire (Conventions de Genève). (…)

Source : Syrie et Irak : une migration sans précédent historique ?, Gérard-François DUMONT, http://www.diploweb.com/Syrie-et-Irak-une-migration-sans.html, publié le 12/12/2015, consulté le 01/01/2015

Daesh restaure le Califat

(…)

L’Iran, aspirant à la puissance régionale, se trouve largement impliqué aux côtés des forces pro-gouvernementales en Syrie comme en Irak. Au-delà de la solidarité religieuse avec les chiites au pouvoir à Bagdad et avec les alaouites qui tentent de garder le contrôle de la Syrie, l’Iran est engagé dans un bras de fer avec l’Arabie Saoudite. Or, l’Irak et la Syrie sont ses deux principaux appuis. Ajoutons que Téhéran aurait tout à craindre d’un éclatement de l’Irak : l’affirmation d’une entité sunnite extrémiste à ses frontières pourrait déstabiliser sa propre minorité arabe sunnite (province frontalière du Khouzistan) et l’indépendance du Kurdistan réveiller l’irrédentisme de ses propres Kurdes.

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Outre les financements privés qu’elle a autorisés par le passé (et dont rien ne garantit qu’ils ont réellement pris fin), l’Arabie Saoudite partage beaucoup avec Daesh : vision salafiste de l’islam, glorification du djihad et mêmes adversaires (les musulmans chiites, le clan al-Assad, le gouvernement chiite d’Irak, l’Iran et le Hezbollah libanais). L’inconvénient pour la dynastie des Saoud résulte du fait que la défense de l’islamisme fut instrumentalisée par le fondateur du royaume (puis par ses successeurs), d’abord pour imposer son pouvoir à l’intérieur, ensuite pour contrer le nationalisme arabe à l’extérieur. À la suite de Ben Laden, les salafistes djihadistes dénoncent l’hypocrisie de la monarchie, coupable de ne pas respecter les principes salafistes, et proclament leur volonté de chasser ceux qu‘ils qualifient d’“usurpateurs“ pour prendre le contrôle des lieux saints de Médine et de La Mecque. (…)

La Turquie se préoccupe d’abord de sa stabilité intérieure, laquelle dépend en partie de la question kurde. Sa priorité est donc d’empêcher l’émergence d’une entité kurde indépendante, sur son sol comme chez ses voisins.

Il est vrai que les actuels dirigeants élus du peuple turc puisent eux aussi aux sources du fondamentalisme musulman, même s’ils affirment en rejeter la variante extrémiste. Ankara aspire également à la puissance régionale. Elle estime, à tort ou à raison, que cela passe par le renversement de Bachar al-Assad en Syrie. Elle tente en vain d’en faire la priorité des États-Unis et de leurs alliés, ce qui contribue aussi à expliquer son refus de prêter la base d’Incirlik. Certains évoquent, enfin, un sentiment anti-Arabe assez répandu : pourquoi venir en aide à des gens qui se sont faits les complices des Occidentaux pour trahir l’Empire ottoman durant la Première Guerre mondiale ? Singulière conception pour un État membre de l’Alliance atlantique !

La Russie, bien que directement menacée par Daesh dans une vidéo en russe diffusée le 2 novembre 2014, minimise le danger, du moins dans l’immédiat. Obsédée par sa détestation de l’Occident et accaparée par les conséquences de son aventure ukrainienne, Moscou se borne à défendre ce qu’elle considère comme ses intérêts au Proche-Orient : l’alliance avec Bachar al-Assad en Syrie, avec l’Iran et avec le gouvernement irakien. Cela ne contribue en rien à la solution du conflit.

Une vaste coalition internationale tente d’épauler les forces irakiennes légalistes et les éléments de la résistance syrienne non contaminés par le salafisme djihadiste. Les États-Unis ont pris l’initiative de l’opération Inherent Resolve en septembre 2014. Plusieurs mois après le début des opérations, il semble bien que l’aveu de Barack Obama au début de l’été 2014 demeure d’actualité : Washington n’a pas vraiment de stratégie.(…) Outre un sentiment de culpabilité poussant à tenter de réparer la faute commise en Irak par son prédécesseur, qui fut incapable de réparer le chaos qu’il y avait semé, il semble que Barack Obama ait donné la priorité à deux impératifs : ne pas ajouter encore aux contentieux avec la Russie et ne pas mécontenter l’Iran, avec qui des négociations cruciales sur la prolifération nucléaire militaire sont en cours et dont l’intervention militaire au côté des forces irakiennes est indispensable. En effet, la coalition tire à hue et à dia car les pays qui la composent divergent sur les priorités et le rythme, mais tous se retrouvent sur un plus petit dénominateur commun : aucun ne veut engager de troupes au sol. (…)

Daesh diffuse de nombreuses vidéos montrant des militants de nationalités diverses afin de prouver qu’il n’y a pas d’exclusion vis-à-vis des musulmans non-Arabes, notamment ceux venus de l’Occident. Citadelle assiégée, Daesh tente également de porter le feu sur le territoire de l’ennemi. Ainsi a-t-il appelé à des actions de guerre sur le territoire de l’ensemble des États qui prennent part à la coalition qui le combat. Cela correspond à la stratégie préconisée par al-Souri, celle des petites cellules disséminées en territoire adverse, partageant la même idéologie, ayant reçu une formation pratique, agissant de manière autonome et au gré des opportunités.

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Source : http://www.diploweb.com/Daesh-restaure-le-Califat.html, texte de  Patrice GOURDIN, publié le 1er février 2015 

Voici une représentation que se fait Daesh de ce que doit être son territoire :

Son projet géopolitique est de réaliser un califat qu’il organise en préfectures. On retrouve les limites de l’empire ottoman sur l’Europe et aussi des appellations qui sont très intéressantes. On peut penser que les leaders sont délirants mais il faut bien comprendre qu’ils ont ce projet-là et que cette représentation peut être extrêmement mobilisatrice puisqu’il y a des individus qui partent au combat avec l’idée qu’ils vont participer à la construction de cette grande puissance, et qu’ils domineront un immense territoire qui les rendra puissants.

Daesh contrôle peu de territoires, comparé à ceux qui sont revendiqués en noir sur la carte précédente de leur représentation du monde.Source : Carte diffusée par Daesh et reprise sur de nombreux sites.

Source : AFP

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L’influence du Qatar et de l’Arabie Saoudite

(…) La fortune de l’Arabie saoudite a pour cause première l’addiction des économies occidentales aux hydrocarbures. Depuis 1945, les Etats-Unis ont fait du royaume saoudien leur allié principal dans la région. Les pays européens ont fait de même. Avec les réserves d’hydrocarbures les plus importantes de la planète, l’Arabie saoudite est un acteur primordial du marché pétrolier mondial.

Ayant accumulé, surtout depuis 1973, un immense pactole, l’Arabie saoudite, ainsi que de petits émirats comme le Qatar, sont devenus des acheteurs très importants de l’industrie des pays occidentaux et ont investi une partie de leurs fonds souverains dans de nombreuses sociétés occidentales stratégiques. Enfin, la France est devenue en 2015 le deuxième exportateur mondial d’armement grâce à ses ventes aux monarchies pétrolières. L’Arabie saoudite en 2015 a en outre financé l’achat par l’Egypte des 24 avions Rafale et des deux navires que Paris n’avait pas pu vendre à Moscou en raison de la guerre en Ukraine. (…)

L’Arabie saoudite et le Qatar présentent effectivement des différences non négligeables, de taille d’abord. La première est un pays vaste peuplé de 30 millions d’habitants dont environ 25 % d’étrangers. Le Qatar est une toute petite principauté essentiellement peuplée d’étrangers, le nombre de Qataris s’élevant à 300 000 personnes. Mais le Qatar est extrêmement riche du fait de ses réserves quasiment inépuisables de gaz. Il a par ailleurs construit un fonds souverain extrêmement puissant qui a investi dans de très nombreuses entreprises occidentales.

Le Qatar et l’Arabie saoudite ont en commun d’être les deux seuls pays musulmans à avoir comme religion officielle le wahhabisme. Pour autant, ils n’ont pas toujours les mêmes stratégies. Depuis 1995, le Qatar tente d’avoir une influence internationale bien plus importante que ses dimensions : diplomatie médiatique avec la chaîne de télévision Al-Jazira, diplomatie financière grâce à son fonds souverain. Le Qatar a essentiellement privilégié tous les mouvements appartenant à la galaxie des Frères musulmans.

L’Arabie saoudite a en revanche davantage soutenu les mouvements se réclamant de la mouvance salafiste. Quelles que soient leurs différences, ces deux pays ont été dans le monde arabe les principaux soutiens des mouvements fondamentalistes musulmans. On sait le rôle que l’un et l’autre ont joué dans le passage de la contestation syrienne en 2011 à la rébellion armée. (…)

Source : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/11/26/la-france-n-a-aucune-intention-de-revoir-ses-relations-avec-l-arabie-saoudite-et-le-qatar_4818445_3218.html, Propos de Sophie Bessis, historienne et journaliste franco-tunisienne, chercheuse à l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), recueillis par Enora Ollivier et Manon Rescan, 26.11.2015

Doc 32

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