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36 492 - Mai - Juin 2003 Dossier Hôpital, acteur de santé publique L a maison de santé de Roubaix fonctionne bien et répond aux objectifs qui lui ont été fixés. Elle accueille chaque jour ouvrable, de 18 h à 23 h, entre douze et quinze personnes. Les pics d’activité culminent à vingt- cinq entrées ; 60 % sont des entrées réorientées par les urgences, 40 % sont spontanées. Le taux de retour est quasi nul. Deux tiers des entrées concernent des adultes, un tiers des enfants. Le nombre d’entrées en urgence se stabi- lise. Pendant ses heures d’ouverture, le taux de fréquentation des urgences baisse de 20 %. L’approche tridimen- sionnelle (médicale, paramédicale, sociale) est appréciée : l’intégration des acteurs sociaux, libéraux, hospitaliers s’exprime dans une expérience mutuel- lement satisfaisante d’accueil, d’orienta- tion, de soutien et de soins. La perspec- Les trois partenaires associés - médecins généralistes, centre communal d’action sociale et centre hospitalier de Roubaix - ont souhaité accueillir, hors des urgences, une population diverse en demande de consultations médicales non programmées. L’objectif, aujourd’hui atteint, était de proposer une prise en charge sanitaire et sociale immédiate, ainsi qu’une réorientation vers les structures de quartier du domicile des demandeurs. Roubaix Une maison de santé pour consultations non programmées François MAURY et Bernard POULAIN Directeur et directeur adjoint, centre hospitalier de Roubaix MOTS-CLÉS consultations non programmées éducation exclusion réorientation urgence sociale cœur de la ville, comme référent du bassin, bien que sa zone d’attraction présente la caractéristique d’être quasi- ment urbaine avec une très forte densité de population. La population desservie est fortement précarisée, souvent d’origine immigrée. Très attachée à sa ville et aux communes environnantes malgré les difficultés, cette population est, historiquement, fortement utilisatrice de la structure hospitalière. Sur le plan épidémiologique, la zone desservie est un archétype de la situation sanitaire régionale: surmorbidité pneumo- logique, cardiologique, digestive et hépa- tique, caractérisée par une surreprésentation des pathologies cancéreuses. Selon l’appréciation récurrente des soignants, les situations sévères consta- tées laissent supposer un recours aux soins trop tardif de certains patients. tive recherchée - des réponses pratiques à des problèmes sanitaires simples et des demandes sociales impératives - est globalement satisfaite. L’engagement, dans des actions d’éducation de popu- lations majoritairement en difficulté, est en bonne voie. Le centre hospitalier est un établissement à vocation sanitaire générale, structure de soins pivot de la partie nord-est de la métropole lilloise. Il offre pratiquement la totalité des compétences hospitalières à une population d’environ 300000 habi- tants résidant à proximité (100 000 à Roubaix intra-muros) et à 500000 habi- tants en recours. Sa structure de près de 900 lits actifs, la taille de la population desservie, la diversité des compétences présentes, les moyens mis à sa disposition identi- fient le centre hospitalier, implanté au

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L a maison de santé de Roubaixfonctionne bien et répond auxobjectifs qui lui ont été fixés. Elle

accueille chaque jour ouvrable, de 18 hà 23 h, entre douze et quinze personnes.Les pics d’activité culminent à vingt-cinq entrées ; 60 % sont des entréesréorientées par les urgences, 40% sontspontanées. Le taux de retour est quasinul. Deux tiers des entrées concernentdes adultes, un tiers des enfants.Le nombre d’entrées en urgence se stabi-lise. Pendant ses heures d’ouverture, letaux de fréquentation des urgencesbaisse de 20%. L’approche tridimen-sionnelle (médicale, paramédicale,sociale) est appréciée: l’intégration desacteurs sociaux, libéraux, hospitalierss’exprime dans une expérience mutuel-lement satisfaisante d’accueil, d’orienta-tion, de soutien et de soins. La perspec-

Les trois partenaires associés - médecins généralistes, centre

communal d’action sociale et centre hospitalier de Roubaix -

ont souhaité accueillir, hors des urgences, une population

diverse en demande de consultations médicales non

programmées. L’objectif, aujourd’hui atteint, était de

proposer une prise en charge sanitaire et sociale immédiate,

ainsi qu’une réorientation vers les structures

de quartier du domicile des demandeurs.

RoubaixUne maison de santé

pour consultationsnon programmées

François MAURY et Bernard POULAIN

Directeur et directeur adjoint, centre hospitalier de Roubaix

MOTS-CLÉSconsultations non programmées

éducationexclusion

réorientationurgence sociale

cœur de la ville, comme référent dubassin, bien que sa zone d’attractionprésente la caractéristique d’être quasi-ment urbaine avec une très forte densitéde population.La population desservie est fortementprécarisée, souvent d’origine immigrée.Très attachée à sa ville et aux communesenvironnantes malgré les difficultés, cettepopulation est, historiquement, fortementutilisatrice de la structure hospitalière.Sur le plan épidémiologique, la zonedesservie est un archétype de la situationsanitaire régionale: surmorbidité pneumo-logique, cardiologique, digestive et hépa-tique, caractérisée par une surreprésentationdes pathologies cancéreuses.Selon l’appréciation récurrente dessoignants, les situations sévères consta-tées laissent supposer un recours auxsoins trop tardif de certains patients.

tive recherchée - des réponses pratiquesà des problèmes sanitaires simples et desdemandes sociales impératives - estglobalement satisfaite. L’engagement,dans des actions d’éducation de popu-lations majoritairement en difficulté,est en bonne voie.Le centre hospitalier est un établissementà vocation sanitaire générale, structure desoins pivot de la partie nord-est de lamétropole lilloise. Il offre pratiquement latotalité des compétences hospitalières àune population d’environ 300000 habi-tants résidant à proximité (100000 àRoubaix intra-muros) et à 500000 habi-tants en recours.Sa structure de près de 900 lits actifs,la taille de la population desservie, ladiversité des compétences présentes,les moyens mis à sa disposition identi-fient le centre hospitalier, implanté au

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• 2000 : 59 257 entrées• 2001 : 58 749 entrées• 2002 : 59 823 entrées« Environ 30 % des personnes qui seprésentent aux urgences sont en situationde précarité. Sur ces 30% d’entrées, deuxtiers ressortent des urgences après unesimple consultation médicale ou psychia-trique. C’est ce qu’on peut appeler « lesurgences sociales 1».Si la santé relève de manière généraledu domaine de compétence de l’État, laville de Roubaix ne peut rester insensibleaux problèmes sanitaires auxquels setrouve confrontée la population. La défini-tion d’un «programme santé» s’inscrit dansune approche globale de la personne et nepeut être dissociée des autres probléma-tiques telles que le logement, l’emploi, lafamille, la jeunesse… La maison de santéapparaît donc comme un projet dans unprogramme d’ensemble.La direction de l’hôpital est consciente deslimites de son intervention, qui est paressence sanitaire. L’hôpital n’a pas voca-tion à assumer à lui seul l’accompagne-

ment lourd, mais pourtant nécessaire, liéaux situations individuelles ou familialescomplexes. Les urgences hospitalières, parleur caractère de prise en charge fugitive,se révèlent, par ailleurs, inadaptées à cetaccompagnement.Pour autant, l’organisation de la méde-cine de ville et des services sociaux estainsi faite que, certains jours et certainesheures, le seul recours aux soins restele service des urgences du centre hospi-talier de Roubaix. Enfin, dans certainsquartiers, la population ne consulte plusla médecine traditionnelle de ville et privi-légie le recours réflexe à «l’urgence hospi-talière», y compris dans le cadre d’unesimple consultation. De fait, la pérennitéde l’activité des médecins libéraux s’entrouve menacée.Un partenariat actif s’est établi entre lecentre hospitalier, les médecins libéraux etla ville de Roubaix. Ce partenariat s’envi-sageait à travers la création d’une maison

Les phénomènes d’exclusion ont prisune telle ampleur qu’ils sont deve-

nus un problème social majeur, au pointque le rapprochement santé/précarités’impose aujourd’hui comme une ques-tion essentielle posée aux politiques etaux acteurs de santé.En 1999, en prolongement d’une réflexionde la médecine libérale, la ville et le centrehospitalier de Roubaix ont souhaité créer unréseau qui associe professionnels de santéhospitaliers et libéraux, et se mobilise dansune réflexion de fond sur la difficulté à rendreun service de qualité au public.Le contexte de l’époque est saisissant :l’hôpital de Roubaix observait uneaugmentation importante des entrées auxurgences, notamment sur des probléma-tiques psycho-sociales.• 1997 : 41260 entrées• 1998 : 46 224 entrées, soit une

augmentation de 12%• 1999 : 55 828 entrées (pour les

cinq premiers mois de 1999, uneaugmentation moyenne de 26,5% étaitconstatée par rapport à 1998)

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1. Guitard Cécile, interne en santé publique,«Les urgences sociales», étude, DIM CHRoubaix, 1998.

Genèse et enjeux de la maison de santé

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>> Objectifs et missions de la maison de santé

Ouvrir une structure nouvelle appelée «maisonde santé» pour accueillir, dans un lieuconvivial, un public nécessitant une prise encharge médico-sociale.Donner aux personnesles plus fragilisées les moyens de se soigner en développant une politique de solidarité.Réorienter les personnes vers la médecine deville, après ouverture des droits sociaux.Accueillir à la maison de santé des personnesne relevant pas des urgences hospitalièresstricto sensu.Permettre, à travers une dynamique de réseau,une meilleure utilisation de l’offre de soinsmédico-sociale et une continuité du suivi de lapersonne.Travailler autour de la notion de santé globaleet de santé communautaire en introduisant unepédagogie de prévention et d’éducation dupatient, et en favorisant l’expression deshabitants et de leurs demandes de soins.

MissionsL’article 2 de l’arrêté ministériel du30 décembre 1999 précise :«La maison de santé assure la prise encharge ambulatoire médicale et sociale depersonnes en situation de précarité etd’urgence sociale nécessitant un accueil et unsuivi adaptés. Elles sont définies comme suit :• l’accueil médical et paramédical

(consultation médicale, prise en chargeinfirmière),

• l’accompagnement social (notammentl’aide à l’ouverture des droits),

• la réorientation vers le dispositif de soinsexistant (médecine de ville, hôpital).»

Les promoteurs du projet avaientd’abord pensé qu’installer la maison

de santé dans un quartier «défavorisé»permettrait l’accès d’une populationdémunie et répondrait ainsi aux dispo-sitions de la loi n° 98.657 du29 juillet1998, relative à la lutte contreles exclusions.Mais si le bilan de dix mois de fonc-tionnement (mars/décembre 2000) aété jugé positif au plan qualitatif, l’acti-vité de la maison de santé était insuf-fisante pour justifier sa pérennité.Les informations recueillies auprès desassociations de quartiers, confirméespar une étude sociologique 2, ont montréque l’éloignement de la maison desanté, par rapport à l’hôpital, était unfacteur discriminant, les urgences béné-ficiant d’une attraction importante etd’un fort indice de satisfaction desusagers. Par ailleurs, l’éloignement dela maison de santé posait un problèmemédico-légal et une réelle difficulté pourla réorientation des usagers par lesurgences du centre hospitalier.Le comité d’évaluation a donc décidéun changement de localisation de lamaison de santé vers un lieu clairementidentifié par les usagers et proche duservice des urgences de l’hôpital. C’estainsi que le centre hospitalier deRoubaix a mis à disposition des locaux,en face de l’hôpital.

FonctionnementLes prestations fournies sont gratuites

pour l’usager. La maison de santéaccueille les usagers chaque jour ouvrablede 18 à 23 h. Le personnel est composéd’un agent d’accueil et de convivialité,d’un médecin généraliste, d’un infirmieret d’un travailleur social. L’équipementest le même que pour un cabinet médi-cal de ville (plateau technique léger).

FinancementLes crédits expérimentaux (dotationglobale versée par la CPAM deRoubaix) permettent la rémunérationforfaitaire des médecins libéraux. Lacontribution de la ville de Roubaixassure la rémunération des travailleurssociaux (2/3) et des frais de fonction-nement (50%) et celle du centre hospi-talier de Roubaix la rémunération destravailleurs sociaux (1/3), des infir-miers, des agents d’accueil et de convi-vialité, des frais de fonctionnement(50%).

SuiviIl est assuré par un comité d’évaluation(comprenant l’ARH, la DDASS, les troispartenaires, les représentants descaisses de l’Assurance Maladie et despharmaciens) qui apprécie les résultatsaux plans social, sanitaire, organisa-tionnel et financier.

Organisation générale

de santé, lieu structuré, repéré et orga-nisé, susceptible d’accueillir un publicfragilisé nécessitant un accompagne-ment social, en sus d’une prise encharge médicale.L’une des originalités du projet fut,en conséquence, la volonté de réorien-ter les patients sur les structures habi-tuelles médicales de quartier (méde-cins généralistes) après une phase destabilisation de leur situation sociale etsanitaire. La maison de santé pouvait,

2. Pr Beaune D., Dr Babe M.-A., «Confortpsychologique des patients admis dans leservice des urgences de l’hôpital deRoubaix », rapport d’étude, CH Roubaix,2001.

en outre, réorienter vers le réseau localdes partenaires sociaux, les patientsnécessitant un accompagnement plussoutenu. Contrairement à un dispen-saire, la maison de santé s’assimile eneffet à un lieu de passage permettantl’interface avec les professionnelssociaux ou de santé de quartier(circonscription d’action sociale, méde-cins de quartier…).La mise en place de ce projet ne signi-fie en aucune manière une volonté de

la ville de se substituer aux compé-tences ou organismes existants. Le rôleessentiel de la municipalité est aucontraire de coordonner les différentesinstitutions concourant à la prise encharge de la santé et d’optimiser lesoutils existants, en associant notam-ment les partenaires locaux (habitants,organisés ou non, associations, centressociaux) qui concourent à desprogrammes de prévention, d’éducationdu patient, de santé communautaire.

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Bilan quantitatif, qualitatif et social

L es résultats sont bons. Depuis sacréation, la maison de santé enre-

gistre une fréquentation en constanteévolution (cf. encadré page suivante :Bilan quantitatif, qualitatif et social).Socialement, la maison de santé a pufaciliter la mise en relation depersonnes en situation de grande exclu-sion (qui ne pouvaient même pasprétendre à la CMU, parfois à l’AME).Il s’agit des personnes en situation irré-gulière sur le territoire français ; 21%des cas traités au niveau social ontabouti à l’instruction d’un dossier CMUet 6% sur un dossier AME.La maison de santé a facilité lesrapports professionnels non seulemententre médecins, infirmiers et travailleurssociaux, mais également entre profes-sionnels du secteur public et ceux dusecteur privé en général.En matière de coopération institutionnelle,une volonté réciproque de mieuxcomprendre les limites de chacune desinstitutions prouve l’intérêt porté à ce projetet la capacité de trouver des solutionsadaptées aux situations parfois complexes,exposées par certains patients.

Bilan médical• Le motif de la venue à la maison de

santé est médical à 81,6%, chirur-gical à 8,5 %, dentaire à 5,6 %,psychiatrique à 2,3%, gynécologiqueà 0,5 %, ce qui conforte le comitéd’évaluation dans le choix de départd’un plateau technique léger.

• L’ancienneté des symptômes est infé-rieure à 6 heures dans 26% des cas.Elle est de 6 à 12 heures dans 17,5%des cas, de 12 à 24 heures dans10,2 % des cas, mais supérieure à24 heures dans 45,9% des cas.

• Gravité des cas : ils sont bénins à62%, modérés à 32,2%, graves à1,9% des cas.

• Les mesures médicales mises enœuvre sont des prescriptions de

médicaments (78,5%), la rédactionde lettres aux confrères (37,1 %),la formulation de conseils simples(32,8%), des actes de petite chirur-gie (5%), l’hospitalisation immédiate(4 %). Il est à noter que 22 % despatients repartent sans ordonnance.

• La durée de la consultation médicaleest inférieure à 15 minutes dans68,5% des cas, de 15 et 30minutesdans 29,2 % des cas, supérieure à30 minutes dans 2,6% des cas.

Au regard de ces faits, il apparaîtévident que la maison de santé consti-tue une réponse plus adaptée que lerecours de première intention auservice des urgences.

Bilan infirmier• La durée de l’entretien infirmier est

inférieure à 30 minutes dans 89 %des cas, de 30 à 45 minutes dans9% des cas.

• Les domaines d’intervention sont lessuivants : relation d’aide (23,9 %),soins aux nourrissons (11,2 %),hygiène (9,3%), conduites à risque(8,5%), maladies chroniques (5%),conseils simples (3,1%), diététique(2,7 %), hygiène bucco-dentaire(1,9%), vaccinations (1,2%).

• Des actes techniques sont parfoiseffectués: pansements (20%), prisesde constantes (19 %), injection(12%), aide à suture (5%), prise detempérature (5%).

Alternative aux urgencesLa maison de santé de Roubaix répondaux objectifs initiaux qui lui ont été fixés: alternative aux urgences, prise encharge sociale, réorientation vers lamédecine de ville.Le constat de départ était un trop grandnombre de passages aux urgences pourdes consultations non programmées,mais aussi l’inadaptation de la struc-ture des urgences à un suivi médical

prolongé (grand nombre de maladeschroniques) et à une réponse sociale.Une stabilisation d’activité auxurgences est constatée. Effet numériqueréel, entre 18 h et 23 h, si les entréesà la maison de santé s’étaient présen-tées aux urgences, le nombre deconsultations non programmées auraitaugmenté de l’ordre de 20% dans cetteplage horaire.Les personnes reçues à la maison desanté ont un taux de retour très faible,sauf à la marge, concernant des problé-matiques sociales particulières. Enoutre, il ne semble pas que ces mêmespersonnes se représentent auxurgences pour consultations nonprogrammées, notamment aux heuresd’ouverture de la maison de santé.La prise en charge médico-socialepluridisciplinaire est assurée par desmédecins libéraux, des infirmières etdes travailleurs sociaux.Les entrées directes correspondent auxcritères médico-sociaux préétablis dansle projet initial (plus de recours autravailleur social, satisfactions émisespar la clientèle).Le confort de l’usager (pas de filed’attente), du travailleur social, del’infirmière et du médecin libéral estmeilleur, de même que la coordinationet la communication des urgences versla maison de santé. On constate uneforte interactivité médicale entre lesmédecins urgentistes, les médecinslibéraux et les pharmaciens de ville et,plus largement, l’appropriation duprojet par les médecins hospitaliers.Un modèle de complémentarité entremédecine de ville et médecined’urgence s’établit.

Prise en charge socialeDe nombreuses difficultés sociales indi-viduelles demeurent, qui ne peuventêtre résolues faute de réponse à desbesoins sanitaires.

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Les passerelles entre les structuressociales et la maison de santé s’amélio-rent grâce à la mise en place d’unefiche de liaison distribuée aux différentspartenaires. Le problème subsistecependant entre les urgences et lamédecine de ville (nuits et week-ends).Des actions d’éducation et de préven-tion avec l’équipe de la maison desanté dans les quartiers roubaisienssont mises en place progressivement.Les contacts téléphoniques à visée« médico-sociale » par les associationsde professionnels dans les quartiers sedéveloppent. La structure et les missionspar les travailleurs sociaux de l’agglo-mération roubaisienne sont identifiées.La plus-value que constituent lestrois partenaires associés (ville/hôpi-tal/médecine libérale) continue àentraîner dans le réseau social local(travailleurs sociaux) une prise en

compte plus importante des problèmesmédico-psychosociaux.Le besoin d’écoute psychosociale estparfaitement assuré, les personnes sontreçues par un travailleur social. Lademande est traitée en temps réel ouquasi réel. Ce temps d’écoute importantest assuré en parfaite complémentaritéimmédiate de la prise en charge médi-cale et paramédicale d’éducation etde prévention.Une plus grande prise en charge despersonnes bénéficiant de la CMU, del’AME et des personnes n’ayant pas ouplus accès à une mutuelle est assurée.Un travail de terrain important restecependant à conduire pour que chacunconnaisse ses droits afin d’accéder auxsoins.Il existe aussi des personnes qui nesouhaitent pas se soigner. Ces compor-tements pourront être modifiés si l’action

sociale continue à évoluer vers unedémarche globale qui prenne en compteles facteurs environnementaux (loge-ment, emploi, famille, culture…).

Réorientation vers la médecine de villeLe constat dressé initialement indiqueun risque d’assèchement de la fréquen-tation des cabinets médicaux danscertains quartiers et une prise en chargeaux urgences efficace, mais inadap-tée à un suivi médical prolongé.

Éléments de réponseLa prise en charge globale médico-sociale pluridisciplinaire (médecinslibéraux, infirmières, travailleurssociaux) est efficace. Le taux de retour,très faible, témoigne d’une bonneréorientation vers le dispositif de soinsexistants.

>> Bilan quantitatif, qualitatif et social

Bilan quantitatifDepuis l’ouverture le 1er janvier 2000 et jusqu’au 28 février2003, 7500 passages enregistrés :• du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2000

(ancienne localisation) : 777 passages comptabilisés (soit 3 passages en moyenne par jour) ;

• du 8 janvier 2001 (nouvelle localisation) au 31 décembre 2001: 2549 passages comptabilisés, soit 10 passages en moyenne par soirée ouvrable(moyenne mensuelle : 11), avec un pic d’activité à 20personnes ;

• du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2002:3646 passages, 12 passages en moyenne (moyennemensuelle : 15), avec un pic d’activité à 25 personnes ;

• du 1er janvier 2003 au 28 février 2003: 610 passages,moyennes identiques, pic d’activité à 27 personnes.

La fréquentation de la maison de santé pendant lesvacances est importante.• Le taux moyen de fréquentation des enfants est de 35%

(de 0 à 14 ans).• Le taux de fréquentation des personnes âgées de plus de

60 ans est faible (5%).• Le taux d’entrées directes (par rapport au taux de

réorientation des usagers par le service des urgences) est de 40%.

Bilan qualitatifLes problèmes médicaux sont ceux qui incitent le plussouvent la population à se rendre à la maison de santé.• Type d’intervention : médical 89,6%, médico-social

5,3%, social 5,1%.• Motif de la venue: administratif 35%, hébergement

30%, problèmes médico-psychologiques 14 %, écoute 8%, familial 4%, financier 2%, autre 6%.

Bilan socialLes problèmes médicaux révèlent souvent un problème socialsous-jacent. • Les mesures sociales mises en œuvre le plus souvent sont

les suivantes: conseils simples 27%, Assurance Maladie15%, réseau social local 13%, CCAS 7%, colisalimentaire 7%, orientation vers un foyer 5%, Samu social4%, hôpital 4%.

• La couverture sociale des usagers est la suivante: mutuelle 43,5%, CMU 39%, aucune couverture 15,1%,AME 2,2%, étudiant 0,2%.

• 11% des usagers déclarent ne pas avoir de médecintraitant.

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ueL’éducation du patient et la prévention

proposées par le personnel infirmier parti-cipent bien de la logique de réorientationvers le «médecin de famille».La communication entre les médecins dela maison de santé et les médecins hospi-taliers s’améliore, ils travaillent ensymbiose/complémentarité et apprécientde pouvoir travailler ensemble sur lemême projet.Les contacts entre professionnels de santése personnalisent et retentissent sur l’acti-vité générale du réseau, bien au-delà descréneaux horaires d’ouverture de lamaison de santé.La disponibilité, l’écoute et la meilleurecommunication médicale, paramédicaleet sociale avec le patient se vérifient égale-ment par une faible demande d’examensparacliniques (des explications sont systé-matiquement données aux patients parfoistrès demandeurs d’examens à l’arrivée).On note en outre un intérêt pédagogiquecertain sur le bon usage des soins.L’activité médicale répond bien aux objec-tifs de la maison de santé. Les patientsprésentent souvent des pathologiesbénignes avec ancienneté des symptômes.Les consultations sont assurées alternati-vement par plus de trente médecins libé-raux de Roubaix et de l’agglomérationroubaisienne. Dans 30% des cas, elles nedonnent pas lieu à une prescription demédicaments. On ne constate pas une«fidélisation» de la maison de santé.

Axes d’amélioration• Développement de la stratégie de

réorientation des urgences du centrehospitalier vers la maison de santé.

• Développement des entrées directes(« spontanées»).

• Développement du rôle d’éducationdu patient et de prévention assignéplus spécifiquement à l’infirmier.

• Développement de la petite chirurgie.• Fréquentation par un public en situa-

tion de précarité sanitaire et sociale,échappant totalement au système desoins à ce jour (constat CCAS/ville deRoubaix).

• Définition d’un statut juridique :association ou groupement decoopération sanitaire ?

• Extension des plages d’ouverture(ouverture chaque jour, y comprisdimanches et jours fériés, de 16 à23 h) : les objectifs sont de répondreà une demande des usagers et desassociations de professionnels desanté de quartiers, de cadrer avecles heures de fortes fréquentationsdes usagers et de coordonner avecle réseau social aux heures habi-tuelles d’ouverture.

• Extension des compétences : l’inté-gration aux équipes existantes(médecins libéraux, infirmiers,travailleurs sociaux, agents deconvivialité) d’un coordonnateur(0,5 ETP) et d’un secrétariat (0,5ETP) aura pour objectif de répondreà la nécessité absolue de mieuxcoordonner les actions multidisci-plinaires du réseau, d’assurer lapérennisation de la maison de santé

et d’améliorer le recueil des donnéesstatistiques.

• Extension du champ : la stabilisa-tion de l’action sociale permettral’activation du réseau social existantdans l’agglomération roubaisienneaux heures traditionnelles d’ouver-ture (c’est-à-dire en dehors desheures d’ouverture de la maison desanté) et la réorientation sociale,l’accompagnement social, l’inter-action avec les professionnels desanté des associations de quartiers,la prévention primaire, l’éducationdu patient, la présence médicale eninteraction avec les structuressociales et l’installation éventuelled’un fauteuil dentaire.

• Création d’une maison médicale degarde: création, dans cette structureparfaitement identifiée par lesusagers, d’une maison médicale degarde, au-delà des heures d’ouverturede la maison de santé. Organisationet prise en charge différenciées. ■

Développement/pérennisation

• Apport de moyens supplémentairesau travailleur social en matièred’hébergement d’urgence (30% desinterventions en 2002 se concluentpar une demande d’hébergement) :manque de place dans les foyers etau Samu social, personnes en «tran-sit » aux urgences, ayant déjà béné-ficié d’une nuit à l’hôpital suite àun problème d’hébergement,personnes ayant pris des produits illi-cites (drogues ou alcool) interdisantun placement en hôtel.

• Prise en compte de la charge detravail au titre du suivi de la problé-matique sociale le lendemain (diffi-culté de travailler en réseau en directavec d’autres partenaires sociaux,compte tenu des horaires actuelsd’ouverture de la maison de santé,

de 18 h à 23 h) et donc dévelop-pement du travail social dans la jour-née en articulation avec d’autrespartenaires : travail social auxurgences, partenaires extérieurs.

• Révision du recueil statistique afind’affiner les données nécessaires àl’élaboration du bilan et d’avoir unemeilleure lecture des donnéessociales.

• Développement de l’activité derenseignements médicaux et sociauxpar téléphone.

• Développement de la communicationavec les associations de quartiers.

• Mise à disposition des médecinsurgentistes et des travailleurs sociauxd’un annuaire téléphonique personneldes médecins libéraux ainsi que desplannings de consultations en ville.