Rôles et fonctions de la publicité institutionnelle dans...
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Université libre de Bruxelles Faculté de Philosophie et Lettres
Rôles et fonctions de la publicité institutionnelle dans les plans de lancement,
de relance et de soutien de marques : analyses de cas
Mémoire présenté sous la direction de M. Jacques François en vue de l’obtention du titre de licenciée en Information et Communication, section Communication des entreprises
Sladden Anne-Catherine
Je tiens d’abord à remercier Monsieur Jacques François, mon directeur de mémoire, pour sa disponibilité, son professionnalisme et ses précieux conseils. Ensuite, je tiens à marquer ma gratitude à l’égard de Madame Decelle et de Monsieur Van Eynde qui m’ont offert de leur temps pour la réalisation des interviews, ainsi que Laura Leone pour m’avoir fourni de nombreuses informations concernant son enseigne. Finalement, je remercie ma famille et mes amis qui, de près ou de loin, m’auront soutenue tout au long de ce travail.
2
Table des matières Résumé………………………………………………………………………….…6
Introduction………………………………………………………………………..7
1. Introduction thématique……………………………………………………………………...7
2. Introduction méthodologique………………………………………………………………...8
Première partie : Concepts et notions relatifs à la publicité institutionnelle et à la marque
Chapitre I : La publicité institutionnelle, de quoi s’agit-il ?
1. Clarification terminologique………………………………………………………………..12
1.1. Qu’est ce que la publicité institutionnelle ?.................................................... ………...12
1.1.1. Distinguer le corporate de l’institutionnel………………………………………14
1.1.2. Distinguer la publicité produit de la publicité institutionnelle …………………15
2. Genèse de la publicité institutionnelle ……………………………………………………...16
3. Objectifs et cibles de la publicité institutionnelle ………………………………………….18
3.1. A quels objectifs répond la publicité institutionnelle ? ………………………………..18
3.2. Quel public cibler ?.........................................................................................................20
4. Enjeux de la publicité institutionnelle dans le positionnement de l’entreprise, son image et sa notoriété……………………………………………………………………………………..22
4.1. Le positionnement de l’entreprise, un acte indispensable…………...…………………22
4.2. L’image de l’entreprise………………………………………………………………...23
4.3. La notoriété de l’entreprise…………………………………………………………….25
5. Les thèmes institutionnels…………………………………………………………………..27
Chapitre II : La marque, concept-clé de l’entreprise
1. La marque, plus qu’un nom, un concept……………………………………………………33
1.1. La marque et le produit………………………………………………………………...33
2. Rôles et fonctions de la marque…………………………………………………………….34
2.1. Rôles de la marque pour l’entreprise…………………………………………………..34
2.1.1. La fidélité à la marque, un enjeu considérable……………………………….…34
3
2.1.2. La marque, une assurance pour les financiers……………………………..……35
2.1.3. La marque, une garantie contre la concurrence…………………………………35
2.2. La marque crée de la valeur pour le consommateur…………………………………...36
2.2.1. Les facteurs créateurs de valeurs………………………………………………..36
Chapitre III : Interaction entre publicité institutionnelle et marque
1. La publicité institutionnelle de l’entreprise au service de la marque……………………….40
2. Intégration du registre institutionnel dans la communication de marque…………………..44
Deuxième partie : Analyse de cas
Chapitre I : La publicité institutionnelle dans le lancement de marque. Le cas de BBL/ING
1. Introduction…………………………………………………………………………………49
1.1. Généralités sur le lancement de marque………………………………………………..49
1.2. Emergence de la notion de marque dans le secteur bancaire…………………………..50
2. BBL/ING, le passage d’une marque à l’autre………………………………………………51
2.1. Historique du changement de nom……………………………………………….…….51
2.1.1. Intérêt du changement de nom………………………………………………….52
2.2. Campagne de publicité institutionnelle………………………………………………...53
2.2.1. Causes du recours à la publicité institutionnelle ……………………………….53
2.2.2. Les campagnes proprement dites……………………………………………….54
2.2.3. Cibles des campagnes…………………………………………………………...58
2.2.4. Médias utilisés…………………………………………………………………..58
3. Résultats des campagnes institutionnelles…………………………………………………..59
Chapitre II : La publicité institutionnelle dans la relance de marque. Le cas Benetton
1. Introduction…………………………………………………………………………………61
1.1. Généralités sur la relance de marque…………………………………………………..61
1.2. Le groupe Benetton…………………………………………………………………….62
2. Historique des campagnes de publicités de Benetton………………………………………63
3. Les campagnes de publicité institutionnelle du groupe…………………………………….70
3.1. Les causes du recours à la publicité institutionnelle …………………………………..70
4
3.2. Les campagnes proprement dites ……………………………………………………...73
Chapitre III : La publicité institutionnelle dans le soutien de marque. Le cas Douwe Egberts
1. Introduction…………………………………………………………………………………79
1.1. La publicité institutionnelle dans le soutien de marque……………………………….79
2. Douwe Egberts : un café, une marque………………………………………………………81
3. Les campagnes institutionnelles de la marque……………………………………………...82
3.1. Les causes du recours à la publicité institutionnelle …………………………………..82
3.2. Les campagnes proprement dites………………………………………………………82
3.3. Médias utilisés…………………………………………………………………….……83
4. Quels objectifs pour quels résultats ?.....................................................................................84
Chapitre IV : Sondage sur l’image des marques : la publicité institutionnelle set-elle efficace ?
1. Méthodologie………………………………………………………………………………..86
1.1. Construction du questionnaire………………………………………………………….86
1.2. Construction de l’échantillon…………………………………………………………..87
1.3. Modalités d’interview………………………………………………………………….88
2. Composition de l’échantillon et exemple de questionnaire…………………………………88
2.1. Composition de l’échantillon…………………………………………………………..88
2.2. Exemple de questionnaire……………………………………………………………...89
3. Exploitation des résultats……………………………………………………………………94
3.1. Résultats du sondage…………………………………………………………………...94
3.1.1. Les résultats d’ING……………………………………………………………..96
3.1.2. Les résultats de Benetton………………………………………………………..97
3.1.3. Les résultats de Douwe Egberts………………………………………………...98
4. Conclusion sur l’efficacité de la publicité institutionnelle………………………………….98
Conclusion générale………………………………………………………………………100
Bibliographie……………………………………………………………………………….102
Annexes……………………………………………………………………………………...106
5
Résumé
L’objectif de ce travail consiste à mettre en perspective publicité institutionnelle et marque.
En effet, ces campagnes publicitaires se justifient le plus souvent dans les démarches
d’amélioration de l’image de l’entreprise. Mais quel est l’impact de cette image sur les
marques ? A une époque où le mot d’ordre est à la différentiation des enseignes, la publicité
institutionnelle apporte-t-elle une réponse efficace à cet impératif ? En nous basant sur la
littérature spécialisée, sur l’analyse de cas concrets ainsi que sur l’opinion des consommateurs
via sondage, nous avons tenté de déterminer l’impact de la publicité institutionnelle sur l’image
des marques à trois périodes-clé de leur développement : le lancement, avec l’analyse du cas
d’ING ; la relance, avec l’enseigne Benetton et le soutien, avec l’étude du cas de Douwe
Egberts.
La publicité institutionnelle en tant qu’outil permet de s’adresser au consommateur avec
d’autres arguments que ceux purement commerciaux. Elle révèle alors les actions que la firme
entreprend, les causes qu’elle soutient, etc. en vue de démontrer son apport à la société. A une
époque où le consommateur souhaite être davantage considéré comme un citoyen que comme
acheteur potentiel, il responsabilise son acte d’achat en se concentrant sur des marques dont il
juge que le contrat avec la collectivité est respecté (respect de l’environnement, programme de
soutien aux démunis, lutte contre la faim, etc.). En fait, la publicité institutionnelle permet de
révéler l’entreprise citoyenne, la marque citoyenne qui fera la différence aux yeux des
consommateurs et qui, à terme, favorisera les ventes et donc la prospérité des marques de
l’entreprise.
Mots-clé : Publicité institutionnelle - marque - entreprise - image- efficacité
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Introduction
1. Introduction thématique
Publicité et marque constituent deux concepts allant de paire : indépendamment de la
publicité, la marque n’existe pas, ou peu. Exister, tel est le maître mot de tout discours sur la
marque dans une situation de concurrence effrénée où chaque enseigne tente d’être un peu plus
présente dans l’esprit du consommateur que sa concurrente.
Ce principe d’existence implique d’emblée l’obligation de se différencier. Toutefois, les
voies de la différentiation semblent de plus en plus réduites : trop de marques se ressemblent
pour justifier d’un choix. Ce constat est à l’origine d’un bouleversement dans le domaine de la
gestion de marques : il ne suffit plus de mettre en avant ses avantages fonctionnels puisqu’ils
seront rapidement imités et même souvent surpassés par la concurrence. Désormais, le discours
rationnel sur le choix d’une marque, de même que les arguments purement commerciaux
montrent leurs limites.
Pourtant, force est de constater que la différentiation des enseignes constitue un élément clé
pour la croissance des entreprises. Hier réduites à un signe sur le produit, les marques
constituent aujourd’hui le capital des entreprises, s’inscrivant dans une réelle stratégie.
L’apparition de la notion de brand equity pousse les firmes à soigner l’image de leur marque
afin d’acquérir une position privilégiée dans l’esprit des clients.
Quant au consommateur, ses motivations à l’égard du choix d’une marque ont aussi évolué :
il n’est plus à la recherche du meilleur rapport qualité-prix, les raisons de son choix vont au-
delà. En effet, il responsabilise davantage son acte d’achat en s’orientant vers des enseignes
susceptibles de répondre à ses attentes, non pas en tant que client mais en tant que citoyen. Dans
son esprit, il n’achète plus seulement l’enseigne mais également la firme dont elle émane.
Un tel changement trouve ses racines dans le manque de transparence des entreprises avec
comme corollaire une discréditation de nombreux marchés et une méfiance de la part des
consommateurs. De plus, le développement de mouvements consuméristes et écologistes ont
encore accéléré cette évolution. Aujourd’hui, les agents économiques réclament davantage
d’informations sur les entreprises, leurs engagements sociaux, environnementaux, etc. ce qui
leur donne alors une impression de maîtrise et donc de confiance favorisant ainsi l’acte d’achat.
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Sachant cela, il importe que l’entreprise s’exprime, non pas sur ses produits, mais sur la
manière dont elle envisage son propre rôle institutionnel au sein de la communauté et la manière
dont elle s’y intègre en satisfaisant les besoins de cette dernière, c’est-à-dire en se préoccupant
des questions sociales, morales, culturelles etc.
C’est ici que la publicité institutionnelle montre tout son intérêt. Servant à la construction
d’une image d’entreprise positive, l’impact de cette perception n’est pas sans conséquence sur
les marques. Générer une attitude favorable à l’égard des marques que l’entreprise met sur le
marché, tel est l’enjeu de la publicité institutionnelle. Cette stratégie n’est-elle qu’un miroir aux
alouettes ou constitue-t-elle un réel pouvoir d’influence sur l’image de la marque ? C’est ce que
nous tenterons de déterminer tout au long de ce travail.
2. Introduction méthodologique
Le principal objectif poursuivi par ce travail est de démontrer qu’il existe un lien entre la
publicité institutionnelle et la marque. Traditionnellement, les auteurs traitent de cette forme de
publicité en faisant référence aux rôles qu’elle joue à l’égard de l’entreprise.
Notre but était donc de démontrer que les entreprises peuvent également avoir recours à la
publicité institutionnelle dans les plans de gestion de marque. Cet aspect est rarement traité par
la littérature (et pour ainsi dire quasi jamais), nous avons dès lors tenté d’établir une théorie sur
le sujet à l’aide des ouvrages et des pistes qu’ils proposent.
Notre travail se scindant en deux parties, notre méthodologie s’est adaptée à chacune de
celles-ci
La première partie, traitant des concepts relatifs à la publicité institutionnelle et à la marque,
est essentiellement théorique. Elle cherche en effet à clarifier les différentes notions auxquelles
nous ferons appel tout au long de ce travail.
Compte tenu de la complexité du vocable publicitaire et marketing, il nous a fallu nous
familiariser avec toutes ces notions. Pour ce faire, nous avons eu recours à la littérature
spécialisée. La plupart des ouvrages abordent les thèmes publicitaires et marketing de manière
claire et détaillée. Nombre d’entre eux fournissent des définitions précises pour chaque notion
abordée. Toutefois, il était souvent utile de regrouper plusieurs définitions provenant d’auteurs
différents pour pouvoir comprendre les éléments théoriques dans leur globalité.
8
En ce qui concerne les ouvrages relatifs à la marque, la littérature regorge d’écrits. En effet,
de nombreux auteurs, comme Jean-Noël KAPFERER, se sont spécialisés dans ces domaines et
fournissent dès lors quantité de volumes sur le sujet. Il en va de même concernant le marketing.
Dans ce dernier domaine, on trouve des publications allant du plus simple au plus complexe.
Deux auteurs en particulier font le lien entre une littérature spécialisée et une littérature plus
généraliste, il s’agit de KOTLER et DUBOIS. Ils proposent un éventail de concepts tout en
recourant à un langage clair et précis et illustrant leurs discours d’un grand nombre d’exemples,
ce qui facilite la compréhension des propos.
Par contre, nos recherches concernant plus spécifiquement la publicité institutionnelle ont
été moins fructueuses. En effet, très peu d’ouvrages traitent de ce sujet de manière complète.
Lors de nos investigations sur ce sujet, nous nous sommes aperçus que la plupart des ouvrages
dataient des années septante ou quatre-vingts. Au-delà de cette date, aucun livre spécifique sur
ce thème n’a été publié. Il en va de même en ce qui concerne les articles de revues et les
recherches. YANKELOVICH, SKELLY et WHITE ou encore Marie-Reine DE JAHAM ont
réalisé des études sur ce type de publicité, mais elles remontent aux années soixante. Nous
avons dès lors basé nos propos sur la littérature disponible.
Le principal volume sur la publicité institutionnelle est celui de Nicole HERBERT. Il offre
un panorama intéressant des objectifs, des fonctions et des différentes implications de ces
campagnes. Abondamment illustré, il permet d’aborder cette matière facilement et d’en saisir
tous les aspects.
La compilation de tous ces volumes nous aura permis de nous construire une vision claire et
détaillée des notions théoriques qui interviennent dans l’élaboration de la première partie de ce
travail.
En ce qui concerne la seconde partie, à savoir l’analyse pratique, nous avons été contraints
de revoir plusieurs fois le choix de nos cas. En effet, lors des premiers contacts avec les
entreprises, la plupart étaient enthousiastes et consentaient tout à fait à nous aider dans nos
démarches de recherches d’informations à leur sujet.
Cependant, plusieurs retournements de situation nous ont contraints à revoir nos choix.
Quick, par exemple, était prêt à nous fournir les renseignements demandés pour ensuite nous
refuser leur communication. D’autres entreprises encore n’ont plus donné suite à nos demandes
malgré leur intention préalable de collaboration.
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Finalement, nous avons retenu les marques pour lesquelles l’entreprise nous a permis de
construire effectivement nos analyses. Il s’agit de ING, Benetton et enfin, Douwe Egberts.
L’entreprise ING est très ouverte à ce genre de collaboration. Très vite, nous avons pu
rencontrer un de leurs collaborateurs qui nous a fourni l’information nécessaire, s’intéressant de
très près à l’évolution de notre travail. Il en va de même avec Douwe Egberts. Cette dernière
firme était cependant moins enthousiaste puisque nous avons dû réitérer notre demande à de
nombreuses reprises avant de pouvoir rencontrer son porte-parole. L’entreprise Benetton, par
contre, est moins tournée vers l’extérieur que les deux précédentes marques. Certes, leurs
collaborateurs en Italie se sont montrés très ouverts à nos demandes d’informations et nous ont
procuré les renseignements utiles. En ce qui concerne la possibilité de rencontrer un de leurs
employés, toutes les portes se fermaient. Chaque personne contactée, que ce soit en Italie, en
France ou en Belgique, nous renvoyait systématiquement auprès d’une autre.
Pour ce dernier cas, nous nous sommes donc concentrés sur les informations procurées par
le groupe ainsi que sur un livre exhaustif traitant de la communication de Benetton depuis ses
débuts, il s’agit de celui de Lorella SALVEMINI : Toscani-Benetton. Cet ouvrage nous aura
permis de nuancer et de poser un regard critique sur les propos contenus dans les documents
provenant de Benetton même. De plus, de nombreux ouvrages recourent souvent à cette
enseigne dans l’illustration de cas pratiques. Ceux-ci nous ont également permis de prendre une
distance critique par rapport aux informations fournies par l’entreprise.
Enfin, compte tenu de l’impossibilité d’obtenir des chiffres de notoriété et d’image pour
deux des trois entreprises, nous ne pouvions conclure ce travail sur des considérations tangibles
et intéressantes. C’est pourquoi, nous avons opté pour la construction d’un sondage. En sondant
l’opinion des consommateurs nous pouvions rendre compte de l’impact de ces campagnes sur
l’image des marques.
10
Première partie Concepts et notions relatifs à la publicité
institutionnelle et à la marque
Chapitre I : La publicité institutionnelle, de quoi s’agit-il ?
Chapitre II : La marque, concept clé pour l’entreprise
Chapitre III : Interaction entre la publicité institutionnelle et la
marque
11
Première partie
Chapitre I La publicité institutionnelle, de quoi s’agit-il ?
Pour appréhender ce concept, nous commencerons par passer en revue les multiples façons
dont il est employé dans la littérature. En raison des innombrables définitions existantes, il
apparaît utile de donner une définition rigoureuse de ce terme dans le sens où nous l’entendrons
tout au long de ce travail.
En quoi la publicité institutionnelle se différencie-t-elle des autres formes de publicité ?
Comment s’inscrit-elle dans l’ensemble des techniques publicitaires ? Quels objectifs poursuit-
elle ? Sont autant de questions auxquelles nous tenterons de répondre au cours de ce chapitre.
1. Clarification terminologique
Force est de constater que la terminologie française reste assez vague quant à la définition
précise de ce qu’est la publicité institutionnelle. Ce concept est souvent usité dans la littérature
mais pas toujours de façon claire et précise. La plupart des auteurs parlent de communication
institutionnelle, regroupant ainsi sous le même vocable, les émissions de messages publics tels
que ceux provenant des institutions publiques, des ministères ou encore des partis politiques, la
communication d’entreprise telle que la communication financière, etc.
1.1. Qu’est ce que la publicité institutionnelle ?
Dans un premier temps, nous détaillerons ce concept et le délimiterons par rapport aux
autres formes de publicité.
Afin de saisir toute la portée de ce terme, partons d’une définition plus générale qu’est celle
de la publicité.
On appelle publicité toute forme de communication non interactive utilisant un support
payant, mise en place pour le compte d’un émetteur identifié en tant que tel1.
1 KOTLER ET DUBOIS, Marketing Management, 10ème éd., Publi-Union Editions, Paris, 2000, p.580
12
Cependant, cette définition est très lapidaire et ne différencie pas la publicité des autres
moyens de communication. En réalité, compte tenu des diverses formes qu’elle peut prendre et
des différents objectifs qu’elle poursuit, il est mal-aisé d’en fournir une définition satisfaisante
et rigoureuse à tous points de vue.
Nous pouvons toutefois catégoriser les différents types de publicité suivant leurs principales
fonctions2 :
- Lorsqu’elle sert la promotion d’une vente spéciale, on parlera de publicité de vente ;
- Si elle vise le développement de la notoriété ou de l’image d’une marque, il s’agira de
publicité de marque ;
- Enfin, servant à la construction à long terme d’une image d’entreprise, elle prendra la
forme de publicité institutionnelle.
Ainsi peut-on observer que la publicité institutionnelle constitue bien une composante de la
publicité poursuivant un but précis et distinct des autres fonctions publicitaires.
Une première ébauche de définition en est à présent donnée.
Toutefois, constatant la multitude de significations présentes dans la littérature, nous
pouvons déduire qu’il n’existe pas de définition unanimement reconnue, et dès lors, cette
ébauche est clairement insuffisante. D’autres tentatives de définitions existent :
Lendrevie et Brochand considèrent par exemple qu’il s’agit d’une forme de publicité qui a
pour but la communication des valeurs de l’entreprise3.
Jean-Noël Kapferer, quant à lui, reprend la notion de communication des valeurs en y
ajoutant l’idée que la publicité institutionnelle constitue le porte-parole de l’entreprise à travers
lequel elle signale son apport à la collectivité4.
Ces définitions ne pourraient suffire dans la mesure où elles omettent de préciser la finalité
de telles campagnes. Lacunaires mais néanmoins intéressantes, elles méritent d’être complétées
par celle qu’en donne Nicole Herbert.
2 Ibid, p. 569 3LENDREVIE ET BROCHAND, Le Publicitor, 5ème éd., Dalloz Editions, 2001, p. 157 4 KAPFERER (Jean-Noël), Les marques, capital de l’entreprise, 3ème éd., Editions d’Organisations, 2003, p. 480
13
La publicité institutionnelle est la publicité destinée à promouvoir l’entreprise en tant que
telle. Il s’agit de donner à l’entreprise une personnalité forte qui lui permettra de progresser
plus facilement sur le chemin de la réussite, de réduire les résistances dues à l’environnement,
en s’y intégrant quel qu’il soit (…). Son rôle consiste essentiellement à augmenter les profits et
la croissance à long terme de l’entreprise, en s’alliant la sympathie et le support de ses publics.
Cette publicité est donc la communication dont l’entreprise est maîtresse et grâce à laquelle
l’entreprise se rapproche de ses interlocuteurs, leur rend des projets concrets, ses hommes
vivants, ses ambitions légitimes5.
Et Nicole Herbert d’ajouter, si les fonctions de l’entreprise d’aujourd’hui consistent à
assurer son existence en rencontrant les attentes du marché, en respectant les exigences des
groupes de pression et en ménageant une rentabilité acceptable par tous, on comprendra que
chacune des ces fonctions d’entreprise (…) est à valoriser auprès de chacun des publics
directement ou indirectement concernés par cette fonction. C’est là le véritable rôle de la
publicité institutionnelle.
Suite à ces définitions, on comprendra que cette communication non-produit vise à créer, à
modifier ou à renforcer une attitude positive de la part des différents publics concernés par
l’entreprise. Les campagnes institutionnelles n’ont dès lors pas pour vocation de vendre
immédiatement un produit mais plutôt de diffuser une image positive, valorisante et gratifiante
de l’annonceur.
1.1.1. Distinguer le corporate de l’institutionnel
Avant toute chose, il convient de préciser que le terme publicité corporate est employé de
manière à regrouper à la fois les concepts de publicité d’entreprise et de publicité
institutionnelle. En effet, certains auteurs ne différencient pas ces deux notions. Il s’agit donc
d’une distinction importante pour la suite de notre travail dans la mesure où la littérature tend à
les confondre.
La publicité dite d’entreprise a pour but de rendre la firme plus transparente. Elle reflète le
physique de l’entreprise, ses moyens humains et financiers. Elle éclaire sur ses ambitions en tant
qu’agent économique. Son contenu est donc factuel et économique. Quant aux destinataires de
5 HERBERT (Nicole), L’entreprise et son image : la publicité institutionnelle, pourquoi, comment ? Editions Dunod, 1987, p. 2
14
cette communication, ce sont en priorité les actionnaires, les fournisseurs, les prestataires
extérieurs, les analystes économiques ou financiers6.
Tandis que la publicité institutionnelle révèle les valeurs de l’entreprise : elle porte la
vocation de l’entreprise. Via ce type de publicité, la firme signale son apport à la collectivité. Ce
dernier élément est essentiel ; il ne s’agit plus de s’adresser aux financiers, aux fournisseurs ou
aux consommateurs, mais bien aux citoyens logés en chacun d’eux. Son contenu est
essentiellement moral, politique ou philosophique7.
La distinction entre les deux s’opère donc principalement en terme de destinataire du
message.
1.1.2. Distinguer la publicité produit de la publicité institutionnelle
La frontière entre la publicité institutionnelle et la publicité produit est difficile à tracer. Où
commence l’argumentation produit, où se termine l’argumentation idéologique ? La
délimitation entre les deux est souvent floue.
Pourquoi ? Parce que la tendance actuelle est à la multiplication de campagnes hybrides
mêlant à la fois de l’argument institutionnel et de l’argument produit. En effet, la construction
de l’image n’est pas un objectif en soi, elle ne trouve son intérêt que si elle s’accompagne de la
commercialisation de marques et produits8. Quant à ces derniers, l’entreprise ne peut en aucun
cas les négliger puisque, pour être crédible, elle doit également s’appuyer sur des faits concrets
qui se traduisent en terme de performances de produits ou de services9. De sorte qu’une forte
image d’entreprise appuie considérablement l’attitude favorable des clients à l’égard de ses
marques et produits. On constate donc que la corrélation se fait dans les deux sens.
La publicité institutionnelle vise la construction d’une image à long terme tandis que la
publicité produit ambitionne la vente à court ou moyen terme. La distinction se fait
principalement en terme de délais de performance pour l’entreprise.
De manière générale, les campagnes institutionnelles s’appuient sur plusieurs types
d’actions :
6 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 479 7 Ibid, p. 480 8 LIBAERT (Thierry), La communication d’entreprise, Editions Economica, 1998, p.27 9 DE JAHAM (Marie-Reine), Le défi de la publicité institutionnelle, in : Revue française de Marketing, février 1979, p. 35
15
- Les relations publiques :
Il s’agit d’actions de type événementiel ayant pour but l’amélioration de l’image
d’entreprise10. Son objectif consiste à faire connaître l’action d’une entreprise afin de susciter
des réactions favorables dans le public11. Elle vise à développer une relation de confiance et
d’adhésion entre l’entreprise, ses marques et son public12.
- Le mécénat :
Sa motivation est sociale et permet de positionner la firme en tant qu’institution notamment
à travers le financement d’activités artistiques, culturelles ou humanitaires13.
- Le sponsoring :
Mû par un objectif commercial, le sponsoring cherche à créer un lien entre la marque,
l’entreprise et un événement médiatique tel que l’organisation d’événements sportifs ou
culturels. En contrepartie d’un appui matériel ou financier, l’entreprise exigera que son nom soit
signalé avant, pendant ou après l’événement14.
2. Genèse de la publicité institutionnelle
Pour saisir toute la portée des campagnes institutionnelles, il nous semble indispensable de
remonter à ses origines et d’en retracer brièvement sa genèse.
Quand ce type de publicité est-il apparu ? Suite à quel événement, à quelle constatation ? A
quelle nécessité répondait-elle ? Ce sont tant de questions auxquelles nous répondrons ici afin
de cerner tout l’intérêt que présentent les campagnes de publicité institutionnelle aujourd’hui.
Les premières campagnes de publicité institutionnelle remontent à 1928 aux Etats-Unis15. A
cette époque, à l’instar de l’Europe, les U.S.A. sont en pleine croissance économique. Jouissant
d’une excellente image, les grandes entreprises apparaissaient comme les institutions de la
modernité et du progrès. Elles bénéficiaient ainsi d’un consensus général reconnaissant le bien-
fondé de la course au profit et de l’innovation technologique. Comme la majorité des gens
profitaient du système, il n’y avait pas lieu de le reconsidérer.
10 KOTLER ET DUBOIS, op.cit., p. 551 11 LEDUC (Robert), La publicité, une force au service de l’entreprise, 9ème éd., Editions Dunod, 1984, p.245 12 LENDREVIE ET BROCHAND, op.cit., p. 77 13 WESTPHALEN (Marie-Hélène), Le Communicator, 3ème éd., Editions Dunod, 2000, p.327 14 Ibid, p. 328
16
Cependant, dans les années septante, on assiste à un net renversement des tendances qui se
caractérisera par un désajustement croissant entre les grandes firmes et le public.
En 1968, une enquête réalisée par Yankelovich, Skelly et White, indiquait que 70% des
personnes interrogées s’accordaient pour dire que les entreprises commerciales s’efforcent de
maintenir un juste équilibre entre leurs profits et les intérêts de la collectivité. En 1977, 15%
seulement partageaient encore ce sentiment16.
Les entreprises prirent conscience qu’il ne leur suffisait plus de valoriser leur propre
production mais qu’elles devaient se construire une image institutionnelle. Cette prise de
conscience fut bien entendu renforcée par le développement des mouvements écologiques et
consuméristes. Ceux-ci remirent en cause les fondements mêmes de l’idéologie de la
consommation et ses conséquences comme la détérioration de l’environnement, l’épuisement
accéléré des richesses naturelles, etc. Ces constatations faisaient suite, entre autre, au naufrage
du Torrey Canyon, au drame de l’explosion d’une usine de produits chimiques en Inde, à la
pollution du Rhin, etc. 17.
Face à ces accusations, les entreprises battirent en retraite. Un silence qui passait auprès de
la population comme un aveu de culpabilité. Devant cette défiance, certaines entreprises prirent
conscience du danger que représentait l’absence de dialogue avec le public18. C’est à cet effet
qu’elles eurent recours à un nouveau type de publicité, la publicité institutionnelle.
Cette mise en avant de la notion de responsabilité sociale des entreprises les ont conduites à
s’inquiéter de leur image et à la faire évoluer vers une identité plus noble, plus conforme aux
attentes de la communauté : celle de l’entreprise citoyenne.
C’est ainsi que paraissent les premières annonces institutionnelles sous la marque de Ford.
Il s’agissait de faire accepter au public l’idée de se déplacer en avion. Objectif ambitieux quand
on sait que le succès du trimoteur Ford dépendrait largement de la vision qu’en aurait
l’Américain moyen. Lift up your eyes titrait l’annonce. Le résultat dépassa les attentes, et la
campagne de Ford pourrait être rétrospectivement reconnue comme l’un des facteurs important
du succès de l’aviation commerciale19.
15 HERBERT (Nicole), op.cit., p.6 16 PASKOWSKI (Marianne), DONATH (Bob), Telling the corporate story, in Industrial Marketing, pp. 43 - 45 17 LENDREVIE ET BROCHAND, op.cit, p. 22 18 PASKOWSKI (Marianne), DONATH (Bob), op.cit., p. 31 19 HERBERT (Nicole), op. cit., p. 6
17
L’évolution allait en effet vers une publicité plus humaine, plus altruiste, insistant sur le rôle
que pouvait jouer l’entreprise dans la résolution de grands problèmes qui se posaient au niveau
national et même mondial : les grands thèmes de protection de l’environnement, de la
conservation des énergies, de solidarité et de dévouement, ne datent donc pas d’hier.
En France, c’est vers les années 20 qu’il faut situer les premières tentatives de publicité
institutionnelle. Ainsi retrouvera-t-on ces thèmes dans les premières annonces de la SNCF ou de
Michelin. A titre d’exemple, le célèbre Bibendum avait été créé pour exprimer la puissance
empreinte de bonhomie de la firme20.
L’intérêt de ces campagnes -qui ne présentent pas de rentabilité à court terme- se justifiait
par la volonté de créer un état d’esprit plus favorable aux entreprises et particulièrement aux
entreprises de dimension importante. Les firmes prirent peu à peu conscience du pouvoir
qu’elles avaient à parler en leur propre nom et de l’influence qu’elles exerçaient ainsi sur leurs
publics.
Dorénavant, l’entreprise prend les devants face aux diverses problématiques et accusations
auxquelles elle se trouve confrontée. Aujourd’hui, le public ne se satisfait plus d’une
appréhension globale de l’entreprise : il veut la comprendre de l’intérieur. Les citoyens
attendent d’une entreprise qu’elle adopte un comportement éthique et responsable, de manière à
devancer leurs interrogations et leurs inquiétudes. Pour y parvenir, la firme doit dépasser le
simple cadre commercial dans sa communication21.
3. Objectifs et cibles de la publicité institutionnelle
Si une entreprise ne construit pas elle-même son image, d’autres risquent de s’en charger
et pas forcément dans le sens souhaité22.
3.1. A quels objectifs répond la publicité institutionnelle ?
On ne pourrait mentionner tous les objectifs auxquels répond une campagne de publicité
institutionnelle tant ils sont nombreux et variés. Signalons d’abord que ce type de campagne est
lié à la nature des cibles auxquelles la firme s’adresse, les arguments utilisés doivent s’adapter
20 loc. cit. 21 LENDREVIE ET BROCHAND, op.cit., p. 161 22 HERBERT (Nicole), op.cit., p. 11
18
au segment de population visé. Ensuite, il existe autant d’objectifs particuliers qu’il existe de
problèmes spécifiques susceptibles d’émerger au sein d’une entreprise.
Quoi qu’il en soit, la mission de la publicité institutionnelle est de fournir au public une
image plus complète et plus favorable de la société afin de lui conférer une certaine crédibilité
et par extension, une certaine légitimité. Aujourd’hui, les consommateurs, et plus largement les
citoyens, attendent d’une entreprise qu’elle remplisse son rôle à l’égard de la société. Dès lors
que ces firmes n’assurent pas les obligations qui leur incombent, il peut se poser pour elles un
sérieux problème de légitimité.
Les principales cibles de la publicité institutionnelle sont en général l’opinion publique et le
consommateur. Il s’agit de leur envoyer des signes forts afin de les rassurer sur la détermination
de l’entreprise à servir les intérêts des uns tout en respectant la volonté des autres. Cela sans
perdre de vue les objectifs industriels et commerciaux de l’entreprise23.
Les campagnes institutionnelles permettent d’atteindre un ou plusieurs objectifs tactiques :
- Les campagnes de publicité institutionnelle peuvent servir à favoriser l’insertion de
l’entreprise dans son environnement.
Quand il s’agit de son environnement naturel, les campagnes seront généralement menées sur le
thème de l’écologie. Par contre, lorsqu’il est nécessaire pour l’entreprise de s’insérer dans son
environnement économique et/ou politique, le thème de l’identité nationale sera privilégié24.
- Elles permettent de défendre l’entreprise contre des attaques dont elle est l’objet.
C’est le cas des entreprises perçues comme gagnant trop d’argent ou exploitant des causes peu
nobles, comme La Loterie nationale. La publicité institutionnelle permet alors de réagir à des
attaques, et de faire face à des situations dans lesquelles l’utilité des sociétés elle-même est
controversée.
- Gagner la confiance du grand public25.
En fait, ce nouveau critère en vertu duquel les entreprises veulent être jugées, on pourrait
l’appeler la « bonne citoyenneté ». Il s’agit d’expliquer les actions et les buts de l’entreprise
afin de les rendre conformes et concrets aux yeux de l’opinion publique. Par extension, il s’agit
23 LENDREVIE ET BROCHAND, op. cit., p. 162 24 Ibid, p. 163 25HERBERT (Nicole), op. cit., p. 5
19
de créer un climat favorable à la firme de sorte que le public établisse une relation entre la firme
et les marques qu’elle fabrique ou commercialise ;
- Remédier à une crise d’identité de l’entreprise, revaloriser ou moderniser son image.
En effet, comme nous le verrons plus loin, l’image de l’entreprise change lentement et souvent
plus progressivement que la firme elle-même. Ce principe est donc de nature à nuire aux
entreprises qui évoluent dans un sens positif ;
- Susciter la sympathie du public pour les produits et les marques de l’entreprise.
Aujourd’hui, trop de marques sont semblables pour justifier d’un choix. Dans ce cas, tout le
revers de la marque (l’entreprise qui la commercialise, son apport à la collectivité, …) peut faire
la différence pour le consommateur ;
- Annoncer un changement de nom ou de structure.
Comme ce fut le cas pour la banque BBL/ING que nous analyserons plus loin.
Il serait fastidieux de citer tous les objectifs auxquels la publicité institutionnelle tend à
répondre. En réalité, dans toute la variété d’objectifs et de formes d’exécutions publicitaires, on
compte seulement trois fonctions que la publicité institutionnelle remplit de manière effective26.
Ce sont ces trois fonctions qui chapeautent toute la variété d’objectifs tactiques cités ci-dessus,
chacun de ceux-ci entrant dans une des catégories de fonctions suivantes :
- Augmenter la notoriété de l’entreprise ;
- Etendre la familiarité ou le taux de proximité psychologique ;
- Influencer les attitudes ou le taux de conviction.
3.2. Quel public cibler ?
Par définition, le public est l’ensemble des personnes situées à l’intérieur de la zone
d’action d’une organisation déterminée en mesure d’en influencer l’activité27. Ainsi défini, le
public d’une entreprise se scinde en plusieurs classes. Le contenu de l’information, de même
que la manière de communiquer, diffèreront naturellement d’une classe à l’autre.
26 X, 1982 corporate advertising, in Business Week , n° hors série, 1983 27 LEDUC (Robert), op. cit., p. 248
20
- Le grand public :
Cette catégorie est très large. Elle comprend aussi bien les clients que les non-clients de
l’entreprise. Il va de soi qu’il est extrêmement rare que le public en général soit pris comme
cible. En fait, l’action de communication doit se concentrer sur une partie de ce public, sur un
segment28.
- Les clients :
En général, la publicité adressée aux clients est essentiellement de nature commerciale ou
promotionnelle29. Toutefois, comme nous l’avons vu plus haut, pour faire la différence aux yeux
des prospects, l’entreprise a tout intérêt à jouer avec d’autres arguments, notamment
institutionnels.
- Le personnel :
Il constitue un public clé pour l’entreprise. Les employés sont les témoins les plus crédibles et
souvent les plus convaincants de la réalité d’une entreprise. A travers sa publicité
institutionnelle, l’entreprise peut tenter de promouvoir auprès de son personnel des valeurs
telles que la notion de sécurité dans le travail. Et ce, afin que chaque employé constitue une
sorte de relais contribuant ainsi à la publicité de la firme30.
- Les candidats à l’emploi :
Suivant le principe qu’il y va de l’intérêt de l’entreprise de recruter ce qu’il y a de mieux sur le
marché de l’emploi, elle doit donc se faire connaître et être estimée par ce public afin de lui
donner envie de travailler pour elle.
En fait, tout ce qui précède démontre l’intérêt de l’entreprise à soigner son image dans
l’esprit des consommateurs et plus largement, du public afin de s’assurer une certaine pérennité.
28 loc. cit. 29 loc. cit. 30 loc. cit.
21
4. Enjeu de la publicité institutionnelle dans le positionnement de
l’entreprise, son image et sa notoriété
En règle générale, ces trois concepts découlent naturellement l’un de l’autre. En effet, la
notoriété de l’entreprise est conditionnée par l’image qu’elle propose d’elle-même et cette
image résulte du positionnement qu’elle se sera défini préalablement. La publicité
institutionnelle agit sur chacun de ces concepts essentiels pour la pérennité d’une entreprise.
4.1. Le positionnement de l’entreprise, un acte indispensable
Toutes les entreprises ont une image, mais rarement celle qu’elles désirent donner d’elle-
même, constate Nicole Herbert31.
Pourquoi ? La réponse à cette question fait appel à ce que l’on appelle le positionnement de
l’entreprise. Encore aujourd’hui, trop d’entreprises ne savent pas précisément ce qu’elles
veulent être. Dans un monde de plus en plus concurrentiel, il est indispensable pour chaque
firme de marquer sa différence. Savoir se positionner permet à l’entreprise d’identifier les
éléments clés qui lui assureront une progression définitive. Voilà pourquoi le positionnement est
un exercice indispensable32.
Plus précisément, le positionnement définit la raison d’être d’une entreprise, ce qu’elle a
d’unique, de singulier et de spécifique33. En ce sens, le positionnement détermine la conception
de l’entreprise et de son image dans le but de lui donner une place déterminée dans l’esprit du
consommateur cible34.
Plusieurs caractéristiques peuvent encore définir ce concept35 :
- Le positionnement est fédérateur : il s’appuie sur le patrimoine des valeurs affirmées ou
latentes cultivées par l’entreprise ;
- Le positionnement est compétitif : il donne à l’entreprise une identité distincte qu’aucun
concurrent ne doit pouvoir s’attribuer ;
- Le positionnement est volontariste : il exprime la manière dont l’entreprise veut être
perçue par ses différents publics.
31 HERBERT (Nicole), op. cit., p. 42 32 loc.cit 33 loc. cit. 34 KOTLER ET DUBOIS, op. cit., p. 322
22
Construire un positionnement implique donc de réfléchir à l’envers : afin de définir son
positionnement de manière optimale, l’entreprise doit partir des attentes des consommateurs et
des préoccupations du citoyen pour que ce positionnement puisse refléter au mieux leurs
aspirations.
Il arrive encore fréquemment que certaines firmes oublient de définir précisément leur
mission avant de se lancer dans des campagnes institutionnelles. Paradoxe étonnant quand on
sait que ce type de campagne cherche à promouvoir et à développer la notoriété de l’entreprise.
C’est pour cette raison qu’avant de se lancer dans ce genre de campagne, il importe que
l’entreprise se soit forgée une image dans l’esprit des consommateurs. Il convient ensuite de
développer ces campagnes en accord avec cette image.
4.2. L’image de l’entreprise
On observe donc bien que la définition du positionnement de l’entreprise n’est pas sans
conséquence sur l’image de la firme.
En quoi consiste cette image que tant d’entreprises tentent de soigner au mieux ? Quelle
relation y a-t-il entre l’image et l’attitude du public ? Pour répondre à ces questions, un constat
s’impose : l’image d’entreprise existe de toute façon, qu’elle soit voulue ou non par l’entreprise.
D’une part, le public est informé par les médias, les associations de consommateurs, etc. et se
forge dès lors une opinion, juste ou injuste, bonne ou mauvaise36. D’autre part, l’idée que
l’entreprise propose d’elle-même à ses différents publics est conditionnée par son nom, son
logotype, ses actions et certains autres éléments qui sont des éléments constitutifs, porteurs de
l’image d’entreprise.
C’est à partir de ces deux points de vue que le public perçoit l’image totale de l’entreprise.
Tout l’intérêt d’une image d’entreprise valorisante réside dans ce constat : aujourd’hui, nous
vivons dans une société de consommation où les produits, les marques, et les services se
banalisent. Dès lors, l’image d’entreprise peut faire la différence.
En effet, en l’absence de caractéristiques distinctives entre les produits, marques ou
services, les consommateurs cherchent à différencier les entreprises qui les fabriquent ou les
35 HERBERT (Nicole), op. cit., p. 43 36 HERBERT (Nicole), op.cit., p. 10
23
commercialisent. Les seules différences qu’ils perçoivent s’expriment alors en terme d’image,
laquelle influencera l’acte d’achat.
En terme de moyens, la publicité institutionnelle constitue un outil incomparable puisqu’elle
permet à l’entreprise de renvoyer une image aussi proche que possible des préoccupations des
consommateurs. Cette démarche publicitaire offre effectivement l’avantage de s’adresser
directement aux citoyens, moins pour lui vendre ses produits que pour montrer qu’elle ne
néglige pas ses obligations envers la société et, qu’en tant que telle, elle mérite la confiance du
public. Cette image, à l’instar des attitudes qui la sous-tendent, présente plusieurs
caractéristiques :
- Elle peut être favorable/ positive ou défavorable/ négative ;
- Elle présente un certain degré d’intensité qui peut être fort ou faible ;
- Elle a aussi un certain degré de précision : elle peut être floue, dans ce cas, l’image
risque de se confondre avec celles des entreprises concurrentes. Au contraire, si l’image
est claire, elle se distinguera de la concurrence ;
- Elle est subjective et correspond à une façon d’appréhender l’entreprise ;
- Elle est stable et n’évolue que très lentement une fois qu’elle s’est imposée au public.
Toute l’élaboration d’un programme d’image institutionnelle crédible et efficace passe par
le respect de quelques impératifs fondamentaux :
- L’image doit être juste : la firme doit se faire connaître pour ce qu’elle est et doit être
crédible tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’entreprise37 ;
- L’image doit être positive : c’est là que réside tout l’intérêt d’un programme d’image ;
dévoiler l’entreprise sous ses meilleurs aspects. Surtout dans les secteurs à faible valeur
ajoutée comme le secteur bancaire où une mise en valeur est indispensable38 ;
- L’image doit être durable : puisqu’elle porte la vocation de l’entreprise, elle doit
théoriquement être immuable. Les changements d’image qui s’opèrent doivent
clairement s’inscrire dans une démarche stratégique ;
37 WESTPHALEN (Marie-Hélène), op. cit., p. 11 38 loc. cit
24
- L’image doit être originale : afin de se distinguer de ses compétiteurs, ce qui est
précisément l’un des buts de l’image d’entreprise. Ceci est particulièrement vrai dans les
secteurs où les produits et services sont banalisés : faute de pouvoir vendre des produits
différents, les entreprises sont obligées de se doter d’une vraie personnalité c’est-à-dire
d’une image de firme originale et spécifique39.
4.3. La notoriété de l’entreprise
Comme susmentionné, la publicité institutionnelle a également pour but d’accroître la
notoriété de l’entreprise. Toutefois, notoriété et image sont deux concepts bien distincts qui ne
doivent pas être confondus. En effet, la notoriété n’est qu’un aspect particulier de l’image.
Cette notoriété se définit comme le pourcentage de personnes dans un public donné qui :
- Connaît l’existence de la firme ;
- Sait en plus la catégorie de produit ou le secteur économique auxquels elle appartient.
Si l’on en croit les résultats du tableau suivant, on s’aperçoit que la publicité institutionnelle
constitue un outil non négligeable dans le développement de la notoriété d’une entreprise.
Tableau 1.1. : Attitude du public à l’égard des annonceurs eu égard au recours à la
publicité institutionnelle
Attitude du public à l’égard des annonceurs
Ne faisant pas de
publicité
institutionnelle
Faisant de la
publicité
institutionnelle
Connaissance de
l’existence de
l’entreprise
82% 93%
Familiarité avec
l’entreprise
63% 77%
Impression positive
globale de la firme
38% 51%
Source : De JAHAM (Marie-Reine), Le défi de la publicité institutionnelle, p. 38
39 Ibid., p. 13
25
Au regard du tableau, on constate une différence significative entre les entreprises faisant de
la publicité institutionnelle et celles qui n’en font pas. Compte tenu des résultats plus élevés des
premières, on peut déduire un meilleur taux de notoriété.
Une étude réalisée par Yankelovich en 1977 et portant sur l’attitude du public vis-à-vis des
entreprises qui font de la publicité institutionnelle et celles qui n’en font pas démontre
également qu’il existe un écart entre les deux. En effet, les firmes faisant de la publicité
institutionnelle créent une différence qui rejaillit sur toutes les actions de celles-ci.
Tableau 1.2. : Attribution de qualités aux entreprises eu égard au recours à la
publicité institutionnelle
Attribution de qualités aux entreprises
Ne faisant pas de publicité
institutionnelle
Faisant de la publicité
institutionnelle
Produits de qualité 53% 64%
Leader dans son domaine 52% 64%
Direction compétente 51% 60%
Produits sûrs 53% 58%
Concurrentielles 49% 55%
Recours à des technologies
de pointe
44% 55%
Actions intéressantes 42% 55%
Innovation 45% 52%
Apte à résoudre des
problèmes
39% 48%
Répond aux attentes des
consommateurs
42% 45%
Entreprise honnête 41% 45%
Vérité en publicité 37% 42%
Meilleure utilisation des
ressources naturelles
31% 42%
Se soucie de l’alimentation,
des déchets
30% 36%
Aide à contrôler l’inflation 22% 23%
Moyenne 41% 49%
Source : Etude Yankelovich in De JAHAM (Marie-Reine), Le défi de la publicité institutionnelle, p. 40
26
Ce tableau démontre dès lors tout l’intérêt de la publicité institutionnelle dans les démarches
d’accroissement du taux de notoriété, et plus largement d’amélioration de l’image d’entreprise.
Mais quel message faire passer dans la démarche de construction d’une image
institutionnelle? Quels sont les thèmes à aborder pour la valoriser au maximum ? C’est ce que
nous tenterons de cerner au point suivant.
5. Les thèmes de la publicité institutionnelle
Les thèmes développés dans les campagnes de publicité institutionnelle varient, d’une part,
selon que l’entreprise est résolument centrée sur elle-même ou au contraire orientée vers le
consommateur et, d’autre part, selon que sa démarche est plutôt rationnelle ou affective.
Figure 1.1. : Les thèmes institutionnels
Source : RALET (Pierre), La publicité institutionnelle. Quels résultats ? A quelles conditions ? , in Propos
de forum, , n° 3, février 1983, p. 11
Si l’on observe les intersections des axes Entreprise-Affectif et Entreprise-Rationnel, on
s’aperçoit que les thèmes développés dans cette perspective relèvent de la publicité corporate.
Les campagnes sont alors orientées vers la puissance, le dynamisme et les profits de
l’entreprise. Par contre, si l’on examine les croisements entre Consommateur-Affectif et
Consommateur-Rationnel, on constate que ces thèmes sont plus conformes aux principes de la
27
publicité institutionnelle tels que nous les avons définis précédemment. Les thèmes que nous
envisagerons ci-après relèveront donc d’une attitude de l’entreprise orientée vers le
consommateur dans une perspective rationnelle et affective.
De nombreuses études ont été menées afin de connaître les voies dans lesquelles les
consommateurs souhaiteraient voir l’entreprise s’engager en matière de causes à défendre.
Parmi celles-ci, relevons l’étude du CREDOC40 sur les Conditions de vie et aspirations des
Français41. Cette enquête a été menée en face-à-face, de décembre 2001 à janvier 2002, auprès
d’un échantillon représentatif de 2002 Français âgés de 18 ans et plus :
Tableaux 1.3. : Thèmes de la publicité institutionnelle et citoyens
Source : Régis BIGOT, La consommation engagée. Mode passagère ou nouvelles tendance de la
consommation ?, in : Le 4 pages des statistiques industrielles. 42
Au regard des résultats obtenus dans ce tableau, nous pouvons relever les principaux
thèmes auxquels les consommateurs accordent de l’importance dans leurs décisions d’achats :
40 Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie. 41 CREDOC, enquête « Conditions de vie et Aspirations des Français, début 2002 pour le compte du Sessi, Détails de l’enquête, voir annexe 1 42 Régis BIGOT, La consommation engagée. Mode passagère ou nouvelles tendance de la consommation ?, in : Le 4 pages des statistiques industrielles. Source : CREDOC, enquête « Conditions de vie et Aspirations des Français, début 2002 pour le compte du Sessi
28
- Regardez ce que nous faisons pour l’humanité.
L’attention accordée à la qualité de la vie apparaît comme l’un des thèmes les plus porteurs.
La lutte contre le travail des enfants, l’aide au tiers monde, etc. sont des causes que le
consommateur juge importantes de défendre ;
- Regardez ce que nous faisons pour l’environnement.
Le souci de l’environnement constitue également un leitmotiv pour le public. Fabrication
non polluante, meilleure utilisation des ressources naturelles, etc. sont également une plus-value
pour l’image de l’entreprise ;
- Regardez la qualité de nos produits.
La production, par l’entreprise de produits sûrs et de bonne qualité passe par la fabrication
nationale et européenne des produits ;
- Regardez les programmes que nous développons.
L’aide aux activités culturelles et sportives, la participation de l’entreprise à des
programmes éducatifs suscitent également sa part de sympathie aux yeux du public.
Il s’agit ici des principaux thèmes, il en existe bien d’autres. En fait, il pourrait y avoir
autant de thèmes à développer que d’intérêts particuliers propres aux consommateurs. Si nous
avons choisi de nous centrer sur l’étude du CREDOC, c’est parce que les thèmes institutionnels
répertoriés par la littérature étaient semblables à ceux que présentent les résultats de l’enquête.
En ne reprenant que ceux-ci, nous nous centrions bien sur les thèmes phares de la publicité
institutionnelle développés par les entreprises tout en démontrant qu’ils rencontrent
parfaitement les attentes des consommateurs.
Pour conclure ce chapitre, nous pouvons affirmer que, dans le contexte économique actuel, il
importe que l’entreprise précise la façon dont elle envisage son propre rôle institutionnel,
économique et social au sein de la communauté ainsi que la manière dont elle s’y intègre en
satisfaisant les besoins de la société.
En examinant la genèse de la publicité institutionnelle, nous observons que l’apparition de
cette forme de publicité répond à une réelle demande des consommateurs de comprendre
l’entreprise de l’intérieur. Les firmes ne peuvent plus être muettes, elles se doivent d’établir un
dialogue avec les consommateurs -et plus largement avec les citoyens- qui dépasse le cadre
29
commercial. Qu’il s’agisse de lutter contre la pollution, de participer à l’éradication du travail
des enfants ou de développer des programmes éducatifs, les prospects attendent des entreprises
qu’elles assument leur rôle social.
Parmi les nombreuses techniques publicitaires, la publicité institutionnelle tend à apporter
une réponse efficace à ce nouveau besoin de communication. Via ce type de campagne, la firme
mettra en lumière son apport à la collectivité et rencontrera ainsi les attentes des consommateurs
et des citoyens. De cette manière, l’entreprise s’alliera la sympathie et le support de ses publics
avec comme résultat un enrichissement de son image et une attractivité décuplée.
30
Chapitre II
La marque, concept-clé de l’entreprise
Comme l’indique l’intitulé du présent travail, nous nous intéressons au rôle que joue la
publicité institutionnelle à l’égard de la marque. Après avoir défini le concept de publicité
institutionnelle, nous allons à présent examiner le rôle qu’elle joue dans les plans de gestion de
marques.
Dans un premier temps, nous préciserons exactement ce qu’est une marque. Ensuite, nous
envisagerons l’intérêt qu’elle représente pour l’entreprise. En effet, si les firmes s’engagent dans
des campagnes de publicité institutionnelle pour soigner leur marque, on peut supposer que le
marquage des produits entre dans une stratégie de l’entreprise qui lui procure de nombreux
avantages. D’autre part, cet intérêt des entreprises pour les marques est également lié à la
demande des consommateurs. C’est pourquoi nous présenterons finalement les motivations des
consommateurs à préférer les produits à marque, cette préférence justifiant la nécessité pour les
entreprises de gérer l’image de leurs marques.
Depuis plusieurs années, l’intérêt pour les marques dans les entreprises n’a cessé de croître.
Elles sont désormais leur capital et à ce titre doivent être gérées avec précaution. C’est pourquoi
le principe de la publicité institutionnelle s’inscrit également dans les plans de gestion de
marques.
Et ce de deux manières :
- Nous avons vu que face à une offre pléthorique et peu empreinte de différences
fonctionnelles, l’image d’entreprise a nécessairement un impact sur la manière dont
le public considère les marques fabriquées ou commercialisées par les firmes. A ce
titre, l’image de l’entreprise peut faire la différence dans la décision d’achat. Ce
premier principe s’applique essentiellement aux marques qui portent le même nom
que leur entreprise. De cette manière, les consommateurs établissent un lien évident
entre les deux de sorte que les actions de la première se répercutent inévitablement
sur la deuxième, et vice-versa. C’est pourquoi ces entreprises se lancent de plus en
plus dans des campagnes institutionnelles afin que l’image entretenue par le public à
leur égard puisse rejaillir positivement sur l’image de leurs marques et, à terme,
31
avoir un impact sur les ventes. Afin d’illustrer ce propos, nous analyserons le cas
Benetton plus loin ;
- Dans le cas où le lien entre la marque et l’entreprise ne peut être établi de manière
spontanée, la marque doit alors adopter un discours laissant transparaître ses
qualités associatives (cf. infra) intégrant ainsi le registre institutionnel dans sa
communication. Nous envisagerons ce cas dans la seconde partie de ce travail
consacré à l’analyse des campagnes institutionnelles de Douwe Egberts.
1. La marque. Plus qu’un nom, un concept
Comme l’affirme la plupart des auteurs, la marque est un élément clé de la stratégie d’une
entreprise puisqu’elle contribue à augmenter la valeur de son offre.
Avant d’en examiner les rôles et fonctions, une définition s’impose. Ici encore, elles sont
nombreuses à se côtoyer dans la littérature spécialisée. Cependant, à la différence de la publicité
institutionnelle, toutes convergent. On retrouve dans de nombreuses définitions les notions de
valeur, de signature, de repère, en vue de l’identification et la différentiation des produits.
Plus concrètement, une marque est un nom, un terme, un symbole, un dessin, ou toute
combinaison de ces éléments servant à identifier les biens ou services d’un vendeur ou d’un
groupe de vendeurs et à les différencier des concurrents43.
Suite à cette définition, nous pouvons déduire que les rôles premiers d’une marque
consistent à identifier et différencier les marques de l’offre. Toutefois, au-delà de ces fonctions
primaires, une marque est également une promesse faite par le vendeur à l’acheteur.
La marque superpose ainsi différents niveaux de réalité sous un même nom. D’une part,
elle constitue un repère au sein du marché sur lequel elle agit en s’appuyant sur des valeurs
tangibles, c’est-à-dire ses qualités objectives et, intangibles, comme sa sensorialité, sa narration
et son implication dans l’écosystème44. D’autre part, elle représente également la valeur globale
évoquée avec des promesses de satisfaction matérielle et immatérielle.
Une marque est aussi un ensemble de composantes que l’on peut articuler autour de cinq
pôles45 :
43 KOTLER ET DUBOIS, op. cit., p. 424 44 LEWI (Gérard), La marque, Editions Vuibert , ???, p. 4 45 KOTLER ET DUBOIS, op. cit., p 424
32
- Un ensemble d’attributs. Une marque évoque des caractéristiques qui lui sont propres ;
- Un ensemble d’avantages. Une marque communique les avantages fonctionnels et
émotionnels qui y sont associés ;
- Un ensemble de valeurs. La marque exprime également la culture de l’entreprise dont
elle émane. Il est donc essentiel pour le gestionnaire de la marque de repérer les
segments de clientèle qui partagent et recherchent les mêmes valeurs ;
- Une personnalité. La marque projette également une personnalité en principe bien
définie afin de se différencier au maximum de la concurrence ;
- Un profil d’utilisateur. Enfin, la marque évoque un utilisateur type.
Cet ensemble de significations doit être géré de manière à définir les dimensions à exploiter
dans la construction de l’identité de la marque. Pour ce faire, le gestionnaire doit repérer les
dimensions que la marque doit développer pour qu’elle puisse se différencier réellement des
concurrents. Par exemple, se limiter aux attributs serait une erreur ; ils n’intéressent pas les
consommateurs : ils sont facilement imitables par la concurrence et risquent par conséquent de
se dévaluer avec le temps. Il en va de même pour les avantages qui semblent insuffisants
puisqu’un concurrent peut les dépasser. Toutefois, il est évident que, même si les attributs eux-
mêmes ne sont pas déterminants dans le choix des clients, leur traduction en terme de bénéfice
revêt par contre une importance cruciale aux yeux des prospects. Nous envisagerons cette
question au point consacré à la valeur de la marque pour le consommateur.
Quoi qu’il en soit, les valeurs, la culture et la personnalité de la marque sont ses véritables
actifs puisqu’ils permettent de différencier réellement la marque46.
1.1. La marque et le produit
Cette distinction ne s’opère pas aisément puisque la marque constitue un concept marketing
indissociable du produit. Il s’agit pourtant de deux notions spécifiques faisant appel à des
logiques bien différentes. C’est pourquoi nous jugions indispensable d’insister sur cette
distinction.
Dans l’optique marketing, le produit est conçu pour répondre aux attentes non satisfaites sur
le marché. Dans cette perspective, le rôle de la marque est de proposer un point de vue sur la
46 loc. cit.
33
catégorie de produits, lui permettant ainsi d’acquérir un capital confiance chez les
consommateurs47. Ces deux concepts sont indissociables puisque d’une part, on ne peut pas
travailler la marque indépendamment du produit sans risquer de la fragiliser et d’autre part, la
marque oriente indéniablement notre vision des produits.
2. Les rôles et fonctions de la marque
Comme nous l’avons évoqué plus haut, une marque forte crée de la valeur. Tout son intérêt
réside dans ce constat. Elle en crée à la fois pour le consommateur, mais aussi pour l’entreprise
qui la fabrique ou la commercialise dans la mesure où les marques importantes aux yeux des
clients présentent de nombreux avantages pour la firme elle-même.
2.1. Rôle de la marque pour l’entreprise
Il est vrai que, pour qui s’en tient à une lecture juridique de la marque, celle-ci n’est pas un
instrument de protection des consommateurs mais des entreprises. De par son caractère
facultatif, elle est un instrument dont les entreprises font ou non usage48.
Pour l’entreprise, le rôle essentiel de la marque consiste à différencier ses produits et
services de ceux de la concurrence. Cet aspect représente en effet un enjeu majeur sur tous les
marchés49. Et certains analystes d’affirmer que la marque constitue le capital suprême de
l’entreprise. A terme, c’est la fidélité de comportement qui constitue le véritable enjeu pour
l’entreprise, c’est donc le capital client qu’il faut privilégier, la marque n’étant qu’un moyen50.
2.1.1. La fidélité à la marque, un enjeu considérable
Toutes les marques fortes développent aujourd’hui des programmes de fidélisation. Et pour
cause, la caractéristique principale de ce type de marque est son taux élevé de gros clients
fidèles. A une époque où, abondance de l’offre oblige, les acheteurs passent de plus en plus
d’une marque à l’autre, les responsables marketing se doivent de viser bien plus que le zéro
défaut, mais le zéro défection, en particulier des 10% de clients représentant 50% des ventes.
Désormais, les entreprises ne cherchent plus à attirer un maximum de clients mais à conserver
les meilleurs d’entre eux51.
47 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 56 48 KAPFERER (Jean-Noël), Les marques à l’épreuve de la pratique, p. 37 49 LENDREVIE ET BROCHAND, op. cit., p. 191 50 KOTLER ET DUBOIS, op. cit., p. 426 51 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 192
34
Fidéliser le client consiste à créer une relation personnalisée avec lui, base d’un lien plus
intime et par conséquent plus impliquant, ce que les Américains appellent Customer bonding.
Sur le plan offensif, la marque doit devenir une marque d’attentions presque individualisées,
frôlant le sur-mesure, s’adressant non pas à un client mais à une personne. Le consommateur a
donc besoin de mieux percevoir la valeur ajoutée d’une marque pour lui rester fidèle. C’est ici
que la publicité purement commerciale montre aujourd’hui ses limites au profit des arguments
institutionnels52.
En dehors, de l’avantage concurrentiel que représente la fidélisation des clients, comment
les marques sont-elles pensées et vécues dans une entreprise ?
Toutes les entreprises, ou presque, ont des marques, cependant toutes ne leur attachent pas la
même importance. De nombreux dirigeants réduisent encore la marque à ses signes : nom
déposé, symbole visuel, logo, slogan,… Pour les autres, la marque s’inscrit au cœur d’une
stratégie de différenciation et de valorisation.
2.1.2. La marque, une assurance pour les financiers
Le marquage des produits confère une assurance aux financiers. En effet, eux aussi préfèrent
les entreprises à marques fortes. Pourquoi ? Parce que le risque qu’ils encourent est moindre. Il
s’agit ici d’une perspective essentiellement financière sur le capital-marque.
Ainsi la marque fonctionne-t-elle de la même manière pour le financier que pour le
consommateur : la marque forte supprime le risque (cf. infra). Le prix à payer, certes plus élevé,
rétribue la garantie et l’extinction du risque puisqu’une enseigne dominante constitue une
barrière à la concurrence de par son statut de référence. En achetant très cher des entreprises à
marque, le financier acquiert des cash flows futurs quasi certains53.
2.1.3. La marque, une garantie contre la concurrence
La marque crée donc de la valeur pour l’entreprise puisqu’elle différencie ses produits. En
effet, la marque donne du sens au produit en fonction de sa mission, c’est-à-dire par rapport au
niveau d’attente et au type de besoin auquel le produit est dédié et auquel il devra toujours
tenter de répondre au mieux. Cette ligne de conduite est le positionnement.
52 loc. cit. 53 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 28
35
On entend par positionnement la mise en avant des caractéristiques distinctives par rapport
à la concurrence et motivante vis-à-vis du public54. Le positionnement est un concept nécessaire
qui rappelle que pour le consommateur, tout choix est comparatif. Il s’agit d’une démarche
analytique visant à répondre à quatre questions essentielles55 :
- La marque, pourquoi ? C’est l’angle du bénéfice pour le consommateur
- La marque, pour qui ? C’est l’angle de la cible
- La marque, pour quand ? C’est l’angle des conditions d’utilisation
- La marque, contre qui ? C’est l’angle des concurrents immédiats, c’est-à-dire ceux
dont on pense capter une partie de la clientèle
Ces quatre questions permettent d’ancrer et de faire immédiatement percevoir l’apport de la
nouvelle marque en l’inscrivant dans une logique de différenciation.
2.2. La marque crée de la valeur pour le consommateur
Le succès de toute marque est conditionné par la valeur et la satisfaction qu’elle procure à
son acquéreur. Ainsi, un acheteur évaluera les différentes marques de l’offre en fonction de la
valeur qu’il perçoit en elle.
En fait, la valeur de la marque correspond au rapport entre ce que l’acquéreur obtient (la
satisfaction, par exemple) et ce qu’il donne (du temps, de l’argent, etc.)
2.2.1. Les facteurs créateurs de valeurs
Quels sont les facteurs qui font qu’une marque est plus ou moins valorisée dans l’esprit des
consommateurs ? Les réponses à cette question sont multiples puisque chaque individu a des
aspirations et des niveaux d’attentes différents à l’égard des marques.
Le tableau suivant présentera les huit principales fonctions créatrices de valeur pour la
marque.
54 Ibid., p. 104 55 loc. cit
36
Tableau 2.1. - Les fonctions de la marque pour le consommateur56
Fonction Bénéfice consommateur De repérage Voir clair, se repérer dans l’offre, identifier rapidement les
produits recherchés.
De praticité Permettre le gain de temps et d’énergie par le rachat à l’identique
et la fidélité.
De garantie Etre sûr de trouver une qualité stable quel que soit le lieu d’achat
et le moment.
D’optimisation Etre sûr d’acheter le meilleur produit de sa catégorie, la meilleure
performance pour un usage spécifique.
De
personnalisation
Se voir conforté dans son self-concept ou dans l’image que l’on
donne de soi aux autres.
De permanence Satisfaction née de la familiarité et de l’intimité des liens à une
marque que l’on a consommée depuis des années et qui dure.
D’hédonisme Satisfaction liée à l’esthétique de la marque, à son design, à ses
communications.
D’éthique Satisfaction liée au comportement responsable de la marque dans
son rapport à la société (écologie, emploi, citoyenneté,…).
- Le repérage et la praticité :
Ces deux premières fonctions sont d’ordre purement mécanique. Elles se réfèrent à l’essence
même de la marque : être un signe reconnu. Cette reconnaissance permet de simplifier le choix
des consommateurs en fournissant des repères bien identifiés du bénéfice final recherché.
D’autre part, la marque présente un gain de temps57. En effet, en ce qui concerne les achats
répétitifs, une marque forte est plus facile à repérer et par conséquent, favorise les choix
réguliers58.
- La garantie, l’optimisation et la personnalisation :
Ces trois fonctions réduisent le risque perçu puisque fondamentalement, il y a marque quand il y
a risque. Celui-ci est d’autant plus grand que le prix est élevé ou que les conséquences d’un
mauvais choix sont importantes. Dès lors qu’une situation d’achat comporte des risques, le
consommateur cherche à le réduire, c’est naturel59.
56 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 26 57 loc. cit. 58 LENDREVIE ET BROCHAND, op. cit., p. 190 59 KAPFERER (Jean-Noël), op.cit., p. 26
37
- La permanence, l’hédonisme et l’éthique :
Les trois dernières fonctions sont de nature plus hédoniste. En ce qui concerne l’éthique, elle
révèle que les acheteurs attendent de plus en plus un comportement responsable de la part de
leurs marques et par extension de l’entreprise dont elles sont à proviennent60.
Hormis ces huit fonctions, d’autres incombent encore aux marques, à savoir la fonction
informationnelle et d’assurance de qualité.
La fonction informationnelle de la marque recouvre donc un territoire très spécifique
variable suivant les catégories de produits, les situations d’achat et les individus. Il n’y a donc,
on le voit, pas de nécessité de la marque. A l’inverse, quand le consommateur perd ses repères
habituels, la marque devient une exigence, c’est elle qui le guidera à travers l’offre.
La marque est donc non seulement source d’information (révélant ses valeurs) mais elle
constitue également une assurance de qualité61. Plus généralement, elle rassure le client. Les
produits sous marques sont de qualité régulière quel que soit le lieu, le moment et le mode de
distribution. La marque rassure, conforte le choix du client62.
Enfin, et surtout, elle est une valeur subjective. On parle de la valeur imaginaire de la
marque. Elle gratifie le consommateur, le valorise à ses yeux (gratification psychologique) et
dans son groupe (gratification sociale) qu’il s’agisse du groupe d’appartenance ou du groupe de
référence auquel on veut accéder63.
Cette dernière fonction est celle qui, aujourd’hui, retient toute l’attention des gestionnaires
de marques. Du fait de l’évolution de plus en plus rapide du marché sous l’effet des progrès
technologiques, de la globalisation et de la dérégulation, les clients s’attendent à des produits et
services de plus en plus personnalisés. Ils voient de moins en moins de différence dans l’offre et
60 Ibid, p. 27 61 Nous jugions utile de faire une petite parenthèse afin de signaler qu’en dehors de la marque proprement dite, il
existe d’autres signes de qualité. Il s’agit des appellations d’origine et des labels. Les premiers ont pour but de
protéger les produits et donc leur qualité. Les seconds constituent des instruments de promotion s’inscrivant dans
une conception de qualité industrielle et scientifique. Or, à la différence du label, la marque fixe elle-même ses
propres standards auxquels elle doit se conformer. 62 loc. cit. 63 LENDREVIE ET BROCHAND, op. cit., p. 190
38
leur fidélité s’effrite64. Du point de vue des consommateurs, les arguments commerciaux
montrent encore leurs limites.
Une telle évolution est dès lors riche d’implications ; il faut repenser les marques, leur
conférer un nouveau sens qui dépasse leurs aspects purement fonctionnels.
On constate que le mot-clé de tous les discours sur la marque aujourd’hui est celui de
valeur. Chacun préconise de clamer et de défendre ses valeurs. L’engouement pour celles-ci
aboutit à rechercher plus haut, dans l’immatériel, la raison d’être d’une marque.
Les conséquences de cette emphase pour les valeurs se traduit par l’abandon de plus en plus
fréquent d’un discours sur les justifications rationnelles de la consommation de la marque65.
Pour conclure ce chapitre, nous dirons que la marque est un actif incontournable pour
l’entreprise puisqu’elle permet de la valoriser à de nombreux niveaux (financiers, fidélisation,
etc.). C’est pourquoi, afin de conserver le capital de leur marque, les entreprises ont tout intérêt à
répondre au mieux aux préoccupations et attentes de leurs clients. Aujourd’hui, le citoyen est à la recherche de sens dans sa manière de consommer. Le
consommateur s'implique de plus en plus fortement dans ses choix et fait référence à de
nouveaux systèmes de valeurs.
Face à cette tendance de consommation, les entreprises et les marques doivent répondre à ce
nouveau besoin de leurs clients : consommer des produits satisfaisant certes à des critères de
qualité ou de prix, mais aussi à des critères plus éthiques qu'économiques comme les qualités
écologiques du produit, les pratiques humaines et sociales de l'entreprise qui les fabrique, les
engagements stratégiques et politiques de cette entreprise, etc.
64 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 61 65 KAPFERER (Jean-Noël), La marque à l’épreuve de la pratique, 2ème éd., Editions d’Organisations, 2002, p. 92
39
Chapitre III
Interaction entre publicité institutionnelle et la marque
1. La publicité institutionnelle de l’entreprise au service des marques
A présent, nous avons démontré tout l’intérêt que présente la marque tant pour le
consommateur que pour l’entreprise. Nous avons également évoqué le fait que, sur plusieurs
plans, les arguments commerciaux ne suffisent plus pour s’attirer la sympathie du public, ni à la
défendre contre la concurrence compte tenu des nouvelles tendances de consommation, que l’on
appelle, la consommation responsable. Désormais ces arguments sont à chercher ailleurs, dans
l’immatériel et l’intangible qui lient la marque et l’entreprise aux véritables préoccupations des
consommateurs.
Aujourd’hui, l’entreprise ne peut plus être considérée comme un acteur isolé. Une étude
menée conjointement par l’agence de publicité Bates Belgium et le groupe Roularta66 réalisée
de juin à septembre 1997 et menée auprès d’un échantillon de 794 personnes représentatives de
la population belge des 18 à 65 ans, ainsi qu’auprès de 60 chefs d’entreprises rapporte que 71%
du public estiment que, sur le plan social, les entreprises sont des acteurs sociaux au même titre
que tout citoyen67. L’objectif de cette enquête était de mesurer l’impact de la citoyenneté sur le
business général de l’entreprise.
Le consommateur devient plus attentif à ses achats et dispose en outre de sérieux relais
d’opinion en la personne d’associations de consommateurs ou des médias. Or, le lien de
communication le plus évident qui réunit le consommateur et les entreprises est, sans conteste,
la marque. Cette dernière véhicule les valeurs de l’entreprise auprès de sa clientèle et, à chaque
opération d’achat, elle engage sa responsabilité.
La marque concrétise donc la signature de l’entreprise et apparaît comme sa principale
garantie. Elle doit satisfaire les attentes des clients, à la fois par la qualité du produit ou service
qu’elle est en mesure d’offrir, par une information claire et attrayante qui l’amène à considérer
le consommateur comme un partenaire. Ce qui démontre l’importance de l’image de l’entreprise
dans la perception de la marque.
66 Etude Corporate Citizenship menée de juin à septembre 1997. Détail de l’étude, voir Annexe 2 67 DE OLIVEIRA (Valérie), En quête de citoyenneté, in : Marketing Management – http://www.mm.be
40
Comme nous venons de l’évoquer, il y a un lien d’interdépendance qui unit marque et
entreprise. Dans la mesure où la première émane de la seconde, il est évident que la marque
n’existe pas indépendamment de l’entreprise. La plupart du temps, la firme est le prisme de
lecture de la marque qu’elle commercialise.
Cette référence constante à l’entreprise s’inscrit dans une volonté de donner plus de sens,
plus de profondeur à ses activités. Les faire émaner d’un corps, c’est rassurer le public en cette
période d’insécurité (alimentaire par exemple). Or, ne l’oublions pas, la marque hérite du
savoir-faire de l’entreprise.
Pourquoi les entreprises se lancent-elles dans des campagnes de publicité institutionnelle ?
Soigner l’image de leur marque ne suffit-il pas à leur procurer un avantage concurrentiel ? Nous
tenterons de répondre à cette question dans ce qui suit.
Selon une enquête menée par le CREDOC68 début 2002 et portant sur les conditions de vie
et les aspirations des Français, il apparaît que 38% des consommateurs disent tenir compte des
engagements de citoyenneté des entreprises lorsqu’ils achètent une marque. On constate dès lors
que, dans leurs actes d’achats, ils n’achètent plus seulement un produit mais également
l’entreprise qui le fabrique ou le commercialise69. Ils achètent donc ce que l’entreprise leur
inspire comme confiance, sincérité, promesses,… Il apparaît évident que l’entreprise doit
travailler son image institutionnelle car elle traduit sa personnalité.
D’autre part, selon la même enquête, on observe que 52% des personnes interrogées se
disent prêtes à accepter un supplément de prix de 5% pour obtenir certains engagements de
citoyenneté de la part des entreprises commercialisant ou fabriquant la marque. Toutefois,
l’engagement doit aller au-delà de la simple sympathie. Il s’agit bel et bien d’une nouvelle
tendance de la consommation qui s’oppose progressivement au principe qui consacre la
recherche du meilleur rapport qualité-prix. Néanmoins, on observe que 20% des consommateurs
se déclarent prêts à accepter un supplément de prix de 5% en échange d’un engagement de
citoyenneté de la part des entreprises commercialisant ou fabriquant la marque, tandis ce que
32% le seraient peut-être.
68 Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie. Détails de l’enquête, voir annexe 1. 69 BIGOT (Régis), La consommation engagée. Mode passagère ou nouvelles tendance de la consommation ?, in : Le 4 pages des statistiques industrielles. Source : CREDOC, enquête « Conditions de vie et Aspirations des Français, début 2002 pour le compte du Sessi
41
Il existe donc une véritable demande de la part des consommateurs à se voir considérés
davantage comme des citoyens responsables et pas uniquement comme des acheteurs potentiels.
On observe bien un réel un glissement du consommateur, qui recherche uniquement le profit,
vers le citoyen, qui repense sa manière de consommer.
Tableau 3.1 : Données relatives au supplément de prix
A ce stade de notre réflexion, il importe de distinguer clairement les différents niveaux de
communication de l’entreprise. On repère généralement quatre niveaux de communication :
- La communication d’entreprise :
Elle a pour but de rendre celle-ci plus transparente révélant son physique, ses moyens
humains, technologiques, financiers. Elle éclaire ensuite sur ses ambitions en tant qu’agent
économique et sur les moyens qu’elle met à leur service70.
- La communication institutionnelle :
Celle-ci constitue le porte-parole de l’entreprise à travers lequel elle signale son apport à la
collectivité71.
- La communication de marque
Cet aspect de la communication exprime le sens des produits. En effet, la marque transforme la
catégorie de produit en y injectant ses valeurs. Dès lors qu’un produit est marqué, il est doté
70 KAPFERER (Jean-Noël), Les marques, capital de l’entreprise, p. 479
42
d’aspérités fonctionnelles et inscrit dans une continuité, celle de la mission de marque. La
communication de marque a donc pour but d’exprimer le concept et l’identité de la marque72.
- La communication de produits ou services :
Elle s’adresse à un consommateur effectif. Son destinataire est un acheteur dans le marché,
c’est-à-dire engagé dans une problématique de choix et désireux de comparer les offres sur un
certain nombre de caractéristiques d’usage et de prix.
Discerner ces quatre registres permet de mettre au point les diagnostics appropriés en
repérant les circonstances sollicitant un registre plutôt qu’un autre. Cela ne signifie pas qu’ils
doivent être considérés de manière indépendante. L’erreur serait de les concevoir comme des
strates séparées. En effet, le consommateur n’est ni stratifié ni cloisonné : il n’a pas une partie
de lui-même qui entretiendrait un rapport uniquement avec l’institution, et une autre avec la
marque73.
Lors de l’achat, le consommateur ne limite pas sa préoccupation à la marque et aux produits
mais il intègre dans ce processus de décision les données relatives à l’efficacité de l’entreprise
et à sa responsabilité sociale. Cette tendance trouve son origine dans le rééquilibrage du rôle de
l’Etat qui, depuis plusieurs années, a conduit à revaloriser le rôle du secteur privé dans le
dynamisme de la nation. C’est la raison pour laquelle une partie croissante du public demande
aux entreprises d’être acteurs à part entière.
La publicité dite institutionnelle vise précisément à rendre ce type d’action plus visible et
éventuellement plus lisible. Ce décloisonnement du consommateur, qui intègre toutes ces
facettes de communication dans son choix, rappelle qu’il ne faut pas gérer ces quatre types de
discours de façon étanche -chacun visant une cible particulière- mais en synergie. Il faut gérer
ces quatre registres à la fois, ce qui n’exclut toutefois pas de distinguer leur finalité propre74.
Lorsque l’institution, l’entreprise, la marque et le produit portent le même nom, pour
l’acheteur les quatre représentations se mélangent et s’imbriquent dans la perception de la
marque, au point que l’on pourrait alternativement parler de facette institutionnelle de
l’entreprise ou de la marque75.
71 Ibid., p. 480 72 Ibid., p. 482 73 Ibid., p. 483 74 Ibid., p. 485 75 loc. cit.
43
Néanmoins, certaines entreprises ne portent pas le même nom que leurs marques. Cette
stratégie est-elle préjudiciable pour l’entreprise ou la marque ? Non, au contraire.
Le cas le plus éloquent est celui de Procter&Gamble. Cette entreprise développe des
marques fortes comme Pampers, Ariel, Bonux, etc., axant sa communication sur la publicité-
produit.
Etant donné que le consommateur n’établit aucun lien direct entre l’entreprise et les marques
qu’elle fabrique ou commercialise, cela permet à l’entreprise de prendre des risques sur de
nouveaux marchés. Ainsi, lorsque l’avenir du segment lessive liquide était encore incertain,
P&G lança une marque-produit : Vizir. Si la firme avait immédiatement lancé Ariel liquide, le
capital marque associé à Ariel aurait pu être menacé.
Derrière cette politique de marque-produit, on suppose donc que le nom de l’entreprise reste
inconnu du public. Cette stratégie confère dès lors une grande liberté à la firme puisqu’elle peut
s’orienter où et quand elle veut vers de nouveaux marchés, et ce, sans risquer de fragiliser les
autres marques de l’entreprise.
De plus, chaque marque étant indépendante des autres, l’insuccès de l’une ne porte pas à
conséquence, ni sur ses sœurs, ni sur l’entreprise. Par exemple, l’accident survenu à Rely qui
contraint P&G à retirer ce produit de la vente, n’eut aucun impact sur les autres marques76.
Néanmoins, lorsqu’une telle entreprise décide de se lancer dans des campagnes
institutionnelles, il lui faudra adopter une autre stratégie. En effet, comme son nom est inconnu
du public, la firme ne pourra pas faire rejaillir -de manière positive- son image sur ses marques.
Il lui faudra dès lors intégrer le registre institutionnel dans la communication de marque elle-
même. Nous détaillerons ces considérations au point suivant.
.
2. Intégration du registre institutionnel dans la communication de marque
Lorsqu’elle est bien gérée, la synergie -quand marque et entreprise portent le même nom-
présente de nombreux avantages. Néanmoins, quand le consommateur ne peut établir le lien
entre deux, la marque doit développer un discours quasi-institutionnel dans sa communication.
Encore aujourd’hui, beaucoup de marques refusent de reconnaître qu’elles sont bien plus
que des marques mais qu’elles font figure de véritables institutions aux yeux des
76 Ibid., p. 236
44
consommateurs. Elles sont perçues comme des acteurs sociaux dominants, et à ce titre, elles se
doivent d’adopter un comportement public responsable, et le porter à la connaissance du public.
Les marques font partie intégrante de notre existence et tiennent plusieurs rôles dans notre
société. Elles doivent nous rassurer et apporter des réponses à nos attentes, à nos espoirs et
même à nos peurs grâce à son offre qui se doit de satisfaire nos besoins.
Cependant, comment les marques font-elles entrer la publicité institutionnelle dans leur
communication ? La réponse à cette question renvoie à ce que l’on appelle les qualités
associatives. Ce sont elles qui rendent compte des fonctions sociétales de la marque77. En
développant ce type de qualités, la marque démontre sa capacité à s’interroger sur les problèmes
de notre existence quotidienne ainsi que son aptitude à y apporter des réponses. La marque, par
son omniprésence, peut donc bien jouer un rôle tutélaire dans la société.
A noter que les crises graves atteignant les marques sollicitent essentiellement l’institution,
la facette collective et la citoyenneté de la marque, celle qui rend compte à la nation et pas
uniquement aux actionnaires. Il faut donc savoir adopter le bon ton, quitte à s’éloigner du
territoire de la communication de marque pour entrer dans le registre de la publicité
institutionnelle78.
Paradoxalement, les crises peuvent être l’occasion pour bien des marques de gagner en
ampleur et en affectivité. Amenées à révéler leurs comportements responsables, soucieuses de
respecter la confiance que le public lui octroie, les marques se révèlent des acteurs
d’envergure79. Et de ne pas oublier que le consommateur reste fidèle aux marques dont on
considère que le contrat tacite, moral, passé avec lui, est toujours intact80.
Comme évoqué précédemment, les entreprises essaient de plus en plus de doter leurs
marques de valeurs distinctives. Ces personnalités sont transmises par l’image de marque
générale de l’entreprise d’une part, mais également par les messages publicitaires, d’autre part.
En règle générale, c’est la publicité qui inscrit l’histoire de la marque. Ceci est logique dans
le sens où la marque est un être de discours. Elle n’existe que par la publicité. Puisque la
marque énonce les produits ou services, il faut nécessairement qu’elle prenne la parole. Toute
marque acquiert au travers de ses communications une histoire, une culture, une
77 LEWI (Gérard), op. cit., p. 5 78 Ibid., p. 499 79 Ibid., p. 500 80 Ibid., p. 14
45
personnalité81.Quels que soient ses engagements sociaux, éthiques, environnementaux, elle doit
les faire connaître82.
La publicité institutionnelle constitue donc un moyen de communication de masse visant à
transmettre des messages aux consommateurs afin de modifier leurs niveaux d’information sur
le comportement responsable de la marque. Et ce, dans le dessein d’agir sur l’image de la
marque, et, à plus long terme, sur le comportement d’achat83.
81 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 136 82 Ibid., p. 58 83 LEWI (Gérard), op. cit., p. 6
46
Deuxième partie Analyse de cas
Chapitre I : La publicité institutionnelle dans le lancement de
marque. Le cas BBL/ING
Chapitre II : La publicité institutionnelle dans la relance de
marque. Le cas Benetton
Chapitre III : La publicité institutionnelle dans le soutien de
marque. Le cas Douwe Egberts
Chapitre IV : Sondage sur l’image des marques. La publicité
institutionnelle est-elle efficace ?
47
Deuxième partie
Dans la seconde partie de ce mémoire, nous allons analyser le cas de trois marques qui à un
moment donné de leur existence ont eu recours à la publicité institutionnelle. Il s’agit de ING,
qui a usé de cette démarche publicitaire dans le cadre de son lancement, de Benetton, qui,
contrainte de rehausser son image de marque, a développé ce type de campagne, et enfin,
Douwe Egberts qui, en tant que grande marque s’est, elle aussi, lancée dans la publicité
institutionnelle.
Nous envisagerons chacun de ces cas en quatre temps.
D’abord, un bref rappel des faits historiques importants de la marque permettra de se
familiariser avec celle-ci.
Ensuite, nous analyserons les raisons pour lesquelles ces marques ont résolu de se tourner
vers la publicité institutionnelle.
Dans un troisième temps, nous détaillerons le contenu de leur campagne de publicité. Afin
d’étayer notre information, nous avons interrogé des responsables concernés par les cas
analysés. Il s’agit de Sandrine Decelle, brand manager chez ING et de Jo Van Eynde, porte-
parole de Douwe Egberts. Quant à Benetton, il nous fut impossible d’obtenir un entretien, et ce
malgré nos démarches. Par contre, Laura Leone, responsable Presse et Communication pour le
groupe, a consenti à nous envoyer un grand nombre de dossiers concernant l’entreprise, ses
activités, ses campagnes publicitaires et sa communication.
Enfin, nous avons effectué une enquête par questionnaire auprès du public afin de connaître
l’image qu’il perçoit de ces marques. Les résultats de ce sondage nous permettront d’apprécier
de manière empirique l’efficacité de ces campagnes dont l’enjeu est, rappelons-le, l’image de la
marque. Ce recours à l’enquête s’imposait en raison de l’absence de chiffres de notoriété et
d’image, le sondage était la seule solution qui nous permettait de dégager des conclusions
intéressantes.
48
Chapitre I La publicité institutionnelle dans le lancement de marque : le cas de
BBL/ING
1. Introduction
Nous envisagions ce cas comme particulièrement intéressant à analyser et ce, pour deux
raisons. La première : le changement de nom récent de la BBL nous offrait la possibilité de
suivre in vivo le développement d’une campagne de publicité institutionnelle. La
seconde renvoie au récent intérêt pour les entreprises de services bancaires de se positionner
comme de vraies marques.
Il est important de rappeler ici que nous nous pencherons exclusivement sur la publicité
institutionnelle de la marque telle qu’elle a été définie au premier chapitre. Nous n’envisagerons
donc pas la publicité d’entreprise destinée aux milieux financiers.
1.1.Généralités sur le lancement de marque
Hier, décriées par les directeurs de marketing et les chefs produits, les campagnes de
publicité institutionnelle ne paraissent plus si budgétivores. Au contraire. Elles préparent le
terrain de futures ventes. Et parfois représentent une étape obligatoire, avant le lancement de
nouvelles marques par exemple84.
En terme de lancement de marque, une évidence s’impose : si la nouvelle marque n’est pas
porteuse de valeurs dès le départ, il est peu probable qu’elle s’établisse rapidement comme une
grande marque85.
Sur le plan opérationnel, la nouvelle marque doit être pensée dans sa totalité dès le
lancement86. En effet, l’identité de la marque forte nous rappelle que celle-ci ne se limite pas à
84 HERBERT (Nicole), op. cit., p. 76 85 KAPFERER (J-N.), op. cit., p. 142 86 Ibid., p. 143
49
des attributs fonctionnels, c’est pourquoi le choix de la référence à l’imaginaire -c’est-à-dire les
attributs non fonctionnels- est aussi important que le choix du produit de référence87.
1.2.Emergence de la notion de marque dans le secteur bancaire
Dans le secteur des services, peut-on réellement parler de marques ? Cette question
préliminaire semble indispensable dans la mesure où le concept de marque dans ce domaine est
relativement récent.
Selon Jean-Noël Kapferer, les marques de service existent bel et bien, identifiant chacune un
ensemble spécifique d’attributs concrétisés dans un service tangible : la location de voiture ou le
travail intérimaire par exemple. Certains services cependant semblent à l’aube de la marque. Ce
changement est particulièrement intéressant à observer car il révèle ce que passer à une logique
de marque signifie, et indique la spécificité d’une marque dans les prestations intangibles. A
noter que le secteur bancaire est exemplaire en cela.
D’ordinaire, les gens connaissent des noms de banques mais pas des marques bancaires. Ce
constat est révélateur : pour le public, ces noms ne sont pas des marques mais des raisons
sociales d’entreprises ou des enseignes attachées à un lieu déterminé. Jusqu’à présent, le nom de
banques identifiait soit le propriétaire de l’entreprise, comme dans le cas de la Banque Lambert,
soit un lieu donné88, la Banque de Bruxelles par exemple.
L’émergence d’une logique de marque se manifeste en général de l’extérieur, par la
contraction du nom. Ainsi, la Banque Bruxelles Lambert devient BBL. Certains ont vu en cela
une intention de simplification graphique ainsi qu’une facilité mémorielle et publicitaire. Plus
fondamentalement, en contractant leur nom, ces banques font un contrat ; certaines d’entre elles
étaient jusqu’alors la banque du lieu, leur nom désignait alors ce dernier sans davantage de
signification, renvoyant exclusivement à une aire de surface délimitée89.
La perception bancaire comme référence à un lieu ou à une personne faisait de ces noms des
noms propres, c’est-à-dire des représentants d’une réalité délimitée dans le temps et dans
l’espace. Or, la marque est atemporelle et aterritoriale : elle identifie un ensemble d’attributs et
s’engage à une différence à long terme dans la prestation bancaire elle-même. C’est en cela, on
peut parler de contrat de marque. En se contractant, le nom de banque ne désigne plus
87 Ibid., p. 147 88 KAPFERER (J-N.), op. cit., p. 82 89 KAPFERER (J-N.), op. cit., p.83
50
seulement une personne ou un lieu mais une certaine relation. Ce point-ci constitue toute
l’essence de leur différence : la relation. Celle-ci se déroule entre le client et le banquier sous
l’égide de la marque90.
Avec ou sans marques, les entreprises de service se plaignent de la difficulté à différencier
leur offre face à la concurrence. La tendance à la déréglementation qui souffle sur certains
marchés, en particulier celui des banques, renforce cette menace91. Cependant, comment
différencier son enseigne quand l’entreprise n’a rien à montrer ? En fait, la mise en images de la
marque de service est structurellement défavorisée. C’est pourquoi elle s’exprime
essentiellement en slogan. En effet, celui-ci passe par la voix, il est la vocatio c’est-à-dire la
vocation de la marque92. Elle ne peut donc que symboliser ses valeurs, son identité. D’autre
part, leur raison d’être s’exprime sous forme de slogan afin de trouver dans la mémoire un appui
que l’absence de produits visibles leur empêche93.
2. BBL/ING, le passage d’une marque à l’autre
De manière générale, l’ouverture des marchés européens accompagnée des progrès
technologiques a provoqué une série de fusions, de concentrations, d’acquisitions, etc. secouant
le marché belge de la finance ces dernières années. Afin de se fixer sur la scène internationale et
rester compétitives, les banques belges ont ainsi dû se doter d’une envergure suffisante pour
répondre à la nouvelle donne économique.
2.1.Historique du changement de nom
Pour comprendre le cas ING/BBL, un petit retour en arrière s'impose.
L'histoire prend forme en 1991, au moment où circulent des rumeurs selon lesquelles le
groupe hollandais ING (Internationale Nederlanden Group) serait intéressé par la BBL. Après
une première offre publique d'achat ratée de la part d'ING, Theo Peeters est remplacé à la
présidence de la BBL par Daniel Cardon. Partisan d'une solution 100% belge, ce dernier défend
alors l’idée de la créer la Grande Banque Belge -laquelle aurait consacré la fusion entre la BBL,
la Générale de Banque et/ou le Crédit Communal. Ce projet tombe à son tour à l'eau et Michel
Tilmant, désormais à la tête de la BBL, préfère se concentrer sur une seconde option, celle d'une
90 loc.cit. 91 KOTLER ET DUBOIS, op. cit., p. 450 92 KAPFERER (J-N.), op. cit., p. 83 93 Ibid., p. 150
51
alliance avec la Royale Belge en vue de former un groupe banque-assurances de portée
européenne. Nous sommes alors en octobre 1997. Entre temps, le dossier subit un nouveau coup
d’accélérateur qui, sans entrer dans les détails, débouche enfin sur l’offre d’ING. Celle-ci
propose de reprendre les actions de la BBL, offrant ainsi à la banque belge une valorisation de
190 milliards de FB94. Si elle accepte, elle formera alors le premier groupe bancaire du Benelux
et le douzième à l’échelle européenne. Faisant suite à l’accord de la Commission bancaire, le
groupe néerlandais sera en possession de 96% des parts de la BBL le 22 avril 200395.
A noter que le groupe ING est actif dans le monde entier et représenté dans pas moins de 60
pays. Avec ses 60 millions de clients et ses 100.000 collaborateurs, il s’agit d’une des plus
grandes institutions financières au monde.
2.1.1. Intérêt du changement de nom
ING bénéficie de la solidité d’une grande marque mondiale dans le domaine des services
financiers intégrés. Grâce aux synergies commerciales et opérationnelles au sein du groupe en
Belgique, ses clients bénéficieront d’une large gamme des produits et de services de qualité.
Cette marque va donc les aider à se différencier sur le marché national de concurrents comme
Fortis ou Dexia.
En fait, la décision de changer de noms repose sur trois piliers :
- Tout le groupe ING souhaite évoluer vers une marque unique, c’est l’orientation
stratégique du groupe ;
- Le résultat d’une vaste étude de marché réalisée en 2000 a confirmé l’ouverture des
clients à une évolution du nom si celle-ci était bien préparée ;
- L’entreprise souhaite se positionner comme un prestataire de services financiers
intégrés96.
Ce processus de changement s’est déroulé en deux étapes.
D’abord, une phase d’endossement -de septembre 2001 à avril 2003- devait
permettre :
- aux clients de s’habituer au changement
- d’assurer un suivi de la perception de la marque
- de rassembler le personnel
94 Soit un peu plus de 4 milliards et demi d’euros 95 DE OLIVEIRA (Valérie), ING-BBL : histoire d’un sans faute – http://www.mm.be
52
- d’augmenter la connaissance de la marque
Ensuite, on assiste au basculement définitif vers ING en 2003
2.2.Les campagnes de publicité institutionnelle
Le changement de nom de BBL vers ING est synonyme d’évolution, mais cela n’exclut pas
la continuité, déclare Sandrine Decelle, brand manager chez ING.
2.2.1. Causes du recours à la publicité institutionnelle
Bien qu’ING elle-même n’envisage pas de changement radical dans la manière de concevoir
sa mission, cette démarche n’est néanmoins pas sans risque.
L’abandon d’une marque signifie que le marché va perdre un de ses repères. En effet, toute
marque véhicule certaines valeurs, auxquelles le public choisit d’adhérer ou non. Nous
constatons donc que les risques en matière de part de marché sont élevés. Une erreur serait de
croire que le transfert de marque se résume au seul changement de nom. Il s’agit bien sûr la
facette la plus périlleuse du changement, car c’est le nom plus que tout autre chose qui, dans la
mémoire des clients, est porteur d’un capital de notoriété, d’associations mentales et de
préférence97.
Changer de nom revient donc potentiellement à modifier ses valeurs, ou, tout au moins, à
suspendre, même temporairement, celle de la marque disparue. Pour l’instant, le consommateur
sait seulement que la marque BBL a disparu au profit de ING, mais il ignore tout des valeurs de
ce groupe néerlandais. Il n’a encore aucune image spécifique. En revanche, la marque BBL
bénéficiait, elle, d’une grande popularité : elle figurait parmi les dix marques les plus connues
dans le pays. 98
D’une part, le point faible de ING en 2001 était son manque de notoriété. En effet, jusqu’à
cette date, la marque était inconnue du grand public belge. A partir de là, il est donc difficile de
bâtir une image de marque. Dans un premier temps, les objectifs principaux du groupe sont de
développer la valeur de la marque (brand equity) et d’asseoir sa réputation.
D’autre part, au fil des années la BBL a tenté de développer -avec succès- des valeurs de
proximité, de chaleur et d’écoute. Elle se positionnait donc comme une banque proche ayant le
96 Rebranding : De BBL à ING, p. 8 97 KAPFERER (J-N.), op. cit., p. 380 98 VAN RUYMBEKE (Laurence), La valse des marques, pp. 35-36 in : Vif l’Express n°2706, mai 2003
53
sens des relations humaines. Ce positionnement se synthétisait dans la signature La BBL pense
à vous, c’était entre 1985 et 1990.
Le risque qu’encourrait ING, qui rappelons-le est un groupe international, était d’être perçue
comme une institution financière impersonnelle et inaccessible. Il s’agit en effet du mal dont
souffrent les grandes entreprises en général et plus particulièrement les grandes banques,
victimes de l’a priori lié à l’aspect inhumain et distant qui caractérise ces géants.
Nous observons dès lors qu’en terme de campagnes institutionnelles, deux objectifs sont à
remplir :
- Dans un premier temps, développer la valeur de la marque (brand equity) et asseoir sa
réputation ;
- Ensuite, rassurer les clients sur sa volonté de s’inscrire dans la continuité de la qualité du
service tout en maintenant -et améliorant- des valeurs qui animaient la BBL. Et de leur
démontrer les avantages à faire partie d’un groupe international.
2.2.2. Les campagnes proprement dites
Comment faire accepter par la clientèle et le personnel, le remplacement d'une des marques
belges les plus fortes au profit d'une marque internationale en devenir ? Dans un premier temps,
avec de la publicité.
La BBL s’appuyait déjà sur une marque dynamique et innovante, comme en témoignait sa
publicité. ING est animé par la volonté de se positionner sur le marché comme créative et
originale. Les efforts de communication se poursuivront donc dans cette lignée. En même temps
qu’elle adopte le nom de ING, l’entreprise entend encore améliorer son efficacité pour que sa
marque inspire toujours davantage de confiance au client. ING veut être une marque proche du
client, à son écoute, qui propose des produits et services adaptés à ses besoins et qui répondent
de manière concrète et efficace à ses attentes tout en lui simplifiant la vie99.
Au niveau du briefing sur les objectifs publicitaires, ING insistait sur l’accompagnement du
changement de marque BBL vers ING en en faisant rapidement une marque forte connue de
tous avec comme Tone of Voice l’innovation, l’audace, la sympathie et l’humanité100.
99 X, La BBL devient ING naturellement, in : ING Magazine, p. 9 100 X, Rebranding, de BBL à ING, p. 18
54
Quant aux campagnes de publicités institutionnelles proprement dites, elles ont été
annoncées pendant la semaine de Pâques 2000 à l’aide une campagne de transition. Il s’agit
d’une affiche mystère déclinée à travers tous les médias (cf. infra).
Figure 4.2. : Publicité « A demain »
La nouvelle campagne ING donne le ton : une approche créative qui symbolise l’évolution
dans la continuité. Cette première étape vise essentiellement l’augmentation de la notoriété, elle
permet par la même occasion d’établir les premiers éléments de positionnement de l’institution.
Signée « A demain », elle annonce l’arrivée prochaine de manière chaleureuse et proche101.
La campagne proprement dite s’est déroulée en plusieurs étapes :
- L’œuf version ING.
Dans un premier temps, une précampagne s’affiche en grand dans les principaux centres
urbains. Elle dévoile un œuf qui se craquelle laissant apparaître une patte de lionceau. C’est un
nouveau départ qui s’annonce, celui de la marque ING en Belgique. Mais on sait que l’œuf ne
naît pas du néant : ING veut ainsi rappeler qu’elle hérite de l’histoire et de l’expérience que la
BBL a accumulés au fil du temps. Il s’agit bien d’évoluer, de rechercher encore et toujours des
améliorations, en assurant la continuité tout en s’appuyant sur les forces du passé102.
Figure 4.3. : Pré campagne ING
101 Ibid., p. 14 102 X, ING, quand le bébé rencontre le lionceau, in : ING Magazine, p. 10
55
- Le bébé et le lionceau.
Dans un second temps, la campagne démarre vraiment et montre deux acteurs pour le moins
inattendus : un bébé et un lionceau. Le bébé, c’est un clin d’œil aux célèbres bébés des
campagnes BBL des années 1990. Le lionceau, c’est ING, qui a entre les pattes les atouts pour
se développer et grandir sur le marché belge. Cette campagne officialise le changement de nom
de la BBL pour le grand public. C’est une annonce pour certains, une confirmation pour
d’autres. Elle témoigne dans tous les cas de la complémentarité qui est à la base de toutes les
relations entre le groupe ING et sa filiale en Belgique, depuis plusieurs années déjà. Chacun
apporte à l’autre sa force et son expertise, pour satisfaire les attentes et les ambitions du client.
Figure 4.4. : Publicité « Le bébé et le lionceau »
Cette campagne est révélatrice du style distinctif qu’ING veut adopter dans le futur.
L’humain est au centre de la communication avec la touche symbolique qui a toujours
caractérisé la publicité à la BBL. L’agence G&Co, qui travaillait avec la BBL depuis plusieurs
années, a développé le concept de cette campagne en s’appuyant sur la connaissance du style
existant et l’enrichissant de nouvelles dimensions liées à la marque ING103.
Nous tenions à ce que l’identité visuelle reflète les valeurs d’ING, explique Sandrine
Decelle. On constate que ce style visuel est centré sur la personne humaine, sans mise en scène
afin de faire transparaître le principe du real life, real people, real solutions104.
Quant à l’adoption par la marque de la couleur orange dans son enseigne, il s’agit d’une
couleur-clé qui a toujours été utilisée par le groupe afin de muscler sa notoriété. En effet, la
banque entendait se démarquer dans un univers financier dominé par la couleur bleue.
103 Ibid., p. 11 104 Conférence de presse du 17 avril 2003 : Bienvenue chez ING
56
Outre les campagnes de publicité stricto sensu, d’autres actions d’ordre institutionnel ont
également été menées afin d’opérer cette transition en douceur et d’installer la notoriété de la
nouvelle marque. Celles-ci se sont déroulées en quatre étapes105 :
Etape 1
- Endossement (2001-avril 2003) : durant cette période de 18 mois, les deux marques -
BBL et ING-, coexistent ;
- Campagne de transition « A demain » (04-05/02 et 10-11/02)
Etape 2
- Envoi de mailings aux 1.800.000 clients dont l’objectif était de les rassurer quant à la
continuité des valeurs et des services ;
- Création d’une brochure afin de répondre à des questions générales ;
- Mise en place d’une ligne info (ING ligne info) pour les questions plus spécifiques ;
- Parutions d’articles dans Banque Active
Etape 3 (avril /mai 2003)
- Campagne de lancement « Bienvenue chez ING »
o Teasing du 15 au 22 avril 2003;
o Démarrage de la campagne le 22 avril 2003 : TV, affichage, presse quotidienne,
communication événementielle ;
o Agence en fête : invitations à ses clients à passer dans leur agence entre le 22 et
le 30 avril 2003 afin de leur souhaiter la bienvenue dans leur nouvelle agence.
L’objectif de cette démarche consistait à accueillir les clients dans une ambiance
conviviale, de répondre aux questions sur le changement de marque, et enfin de
les rassurer sur la continuité du service.
Etape 4 (mi mai 2003)
- Campagne de positionnement
105 loc. cit.
57
Tableau 4.1. : Plan média de la campagne106
Affiche Teasing 36 m.² Du 14/04/03 au 21/04/03
Affiche 36 m² Du 22/04/04 au 11/05/03
Affiche 16 m² Du 22/04/03 au 04/05/03
Affiche 20 m² Du 22/04/03 au 06/05/03
Affiche 10 m² Du 23/04/03 au 06/05/03
Spots TV Du 22/04/03 au 06/05/03
Presse quotidienne Les 22, 26 et 30/04/03
Affichage grand format Anvers, Bruxelles Charleroi,
Knokke, Zaventem
On observe bien qu’un tel changement ne s’opère pas à la légère. Pour preuve : ING
dépensera au total 23 millions d’euros en deux ans pour gommer la BBL du territoire belge.
2.2.3. Cible des campagnes
Lors du lancement de la nouvelle marque, nous avons visé toutes les cibles puisqu'il était
important, dans un premier temps, d'installer la notoriété de la nouvelle marque. Le deuxième
volet de la campagne était plus spécifiquement dirigé vers les professionnels et entreprises,
explique Sandrine Decelle.
2.2.4. Médias utilisés
Ce changement de marque représente un réel bouleversement et implique donc des moyens
publicitaires en conséquence. Résultat: la BBL a augmenté son budget de 47,6%, passant de 8,9
millions à 13,2 millions d’euros en 2002. Elle occupe ainsi la dixième place dans le top 10 des
annonceurs. Parallèlement, ING a préparé le terrain lançant les campagnes « ING à demain »,
afin d’annoncer le changement. Cela s’est traduit par une augmentation importante de la
présence de la banque sur le petit écran et dans la rue. Les investissements TV et affichage ont
ainsi augmenté respectivement de 324,4% et de 233%.
En terme de mix médias, les investissements publicitaires se sont répartis à raison de 20%
pour l’affichage, 30% pour la TV et 40% pour la presse quotidienne. Cette dernière, outre le fait
106 X, Rebranding : de BBL à ING, p. 23
58
qu’elle favorise une certaine sélectivité, est surtout utilisée pour promouvoir des produits
financiers107.
Figure 4.5 : Mix médias des campagnes publicitaires de ING
0
5
10
15
20
25
30
35
40
AffichageTélévisionPresse quotidienne
3. Résultats des campagnes institutionnelles
A ce stade, les campagnes institutionnelles nous ont permis de gagner très rapidement en
termes de notoriété totale et spontanée. Il est cependant évident qu'une nouvelle image ne
s'installe pas en quelques mois et qu'il nous reste encore du chemin à parcourir en termes
d'image, pour être en ligne avec le positionnement désiré, explique Sandrine Decelle. La
dernière étude qualitative date du mois de juin 2003 et avait pour but de vérifier dans quelle
mesure le changement avait été bien accepté par les clients. Le bilan de cette étude montre que
ce changement s'est fait sans problème et a été bien vécu par les clients. L'image perçue à ce
stade était encore plus liée au logo, au passé de la BBL et à l'imaginaire généralement associé
à un grand groupe financier.
Tableau 4.2. : Evolution de la notoriété de ING 108
107 DE OLIVEIRA (Valérie), BBL/ING, c’est demain, in : Média Marketing, ???
59
Si l’on reprend l’évolution de la notoriété de la marque, on observe une très nette
progression : en avril 2002, ING obtenait 3% de notoriété spontanée et 31% de notoriété totale.
Quelques mois avant le rebranding d’avril 2003, soit un an plus tard, la marque atteint un
taux de 29% de notoriété spontanée et 67% de notoriété totale. Suite à la campagne de
rebranding, ces chiffres ont été revus à la hausse puisque ING atteint à présent une notoriété
spontanée de 47% et une notoriété totale de 90%. Ces dernières données datent de la dernière
mesure, en octobre 2003. Ces chiffres sont très encourageants après seulement 6 mois de
rebranding, déclare Sandrine Decelle.
Nous procèderons à une analyse plus approfondie de l’efficacité de la publicité
institutionnelle du groupe lors de l’examen des résultats de notre sondage.
108 X, Rebranding : de BBL à ING, p. 20
60
Chapitre II La publicité institutionnelle dans la relance de marques.
Le cas Benetton
1. Introduction
Le cas Benetton nous paraissait particulièrement intéressant à analyser compte tenu, d’une
part, des nombreuses polémiques provoquées autour de ses campagnes réalité et, d’autre part,
en raison de ses recours fréquents à la publicité institutionnelle.
Tout comme pour ING, nous sommes dans le cas d’une entreprise qui porte le même nom
que sa marque. Le public peut alors établir spontanément un lien entre la marque et l’entreprise,
de sorte que les actions de l’une portent immédiatement à conséquence sur l’autre.
C’est pour cette raison, et suite aux déboires publicitaires du groupe qui s’amorcent dès
1990, que Benetton s’est vu dans l’obligation de redresser son image. Il a donc développé,
depuis 1993, une série de campagnes institutionnelles afin de redorer sa marque ternie par les
excès en tout genre.
1.1. Généralité sur la relance de marque
La nécessité pour une entreprise de relancer sa marque peut intervenir dans de nombreux
cas. Citons toutefois deux cas plus spécifiques à la marque.
Le premier renvoie au phénomène du cycle de vie de la marque. En effet, si la pérennité
des produits rappelle que s’ils sont mortels et régis par un cycle de vie plus ou moins long mais
inéluctable, les marques, quant à elles, peuvent échapper à ce facteur. Cependant, le déclin,
suivi de la disparition des marques, existe bel et bien ; une marque mal gérée est inévitablement
mortelle109. D’où la nécessité de la repenser, de lui donner un nouveau souffle, une nouvelle
mission en accord avec les attentes des consommateurs et, plus largement, des citoyens.
109 KAPFERER (Jean-Noël), op. cit., p. 163
61
Le second fait référence à l’identité de marque. Comme nous l’avons vu, l’image est une
mémoire, ce qui explique la difficulté de la faire évoluer à court terme. Mais elle a aussi une
fonction : créer des repères durables pour s’orienter dans l’offre commerciale. Ce principe est
d’autant plus évident dans le prêt-à-porter puisque chaque marque est cataloguée et étiquetée.
Cette notion de repère implique le fait qu’il ne soit jamais souhaitable de tourner le dos à
son image. En effet, c’est souvent elle qui représente la source d’attraction des derniers
acheteurs mais également des nouveaux, c’est-à-dire des acheteurs les plus sûrs de demain. Leur
fidélisation implique le respect des facteurs qui les ont séduits. Pour s’attacher sa clientèle, la
marque doit donc rester fidèle à elle-même et aux valeurs qu’elle prône110.
C’est sur ce point que le groupe Benetton s’est mépris. D’une image de marque joyeuse et
colorée défendant l’égalité entre tous, elle s’est érigée en porte-parole de la société placardant
sur les murs des grands centres urbains des images crues de malades, de guerre etc.
Les campagnes Benetton jouent effectivement sur le double tableau de la publicité
commerciale et des campagnes institutionnelles. Les publicités ne sont pas faites pour vendre
mais pour illustrer des phénomènes de société et lier la marque à certaines valeurs, déclare
Luciano Benetton111.
1.2. Le groupe Benetton
Avant d’entamer l’analyse du cas Benetton, quelques remarques préalables sur le groupe
nous paraissaient utiles afin de mesurer la dimension qu’il accorde à l’ensemble de sa stratégie
publicitaire. Ceci nous permettra de comprendre l’importance que revêt pour lui la notoriété de
sa marque. Laquelle justifie en fin de compte ses démarches de campagnes institutionnelles.
Présent dans 120 pays, le groupe consacre aujourd’hui plus de 4% de son chiffre d’affaire
annuel à la publicité, avec une présence régulière dans 300 magazines et sur 70 000 panneaux
d’affichage, ainsi que la distribution de 40 000 posters et 5 millions de catalogues aux
détaillants, et ce, à travers le monde entier. Comme ces chiffres l’attestent, Benetton concentre
une grande partie de ses efforts sur la notoriété de sa marque. La création publicitaire représente
d’ailleurs une des seules étapes de la chaîne de valeur qui ne soit pas externalisée. Cette forte
réputation, qui constitue une ressource stratégique intangible, dissuade les membres du réseau
110 Ibid., p. 53 111 X, La Communication Benetton, p. 16
62
de le quitter, car ils savent que la valeur des vêtements Benetton réside uniquement dans leur
marque.
De la même manière, on peut observer que la plupart des réseaux d’entreprises qui
pratiquent ce mode d’intégration ne communiquent généralement pas sur leurs produits, mais
uniquement sur leur marque. Cette stratégie de communication se justifie tout à fait : si
Benetton faisait la promotion de ses produits -en l’occurrence de ses vêtements- il ferait de la
publicité pour ses sous-traitants, encourageant alors l’opportunisme de ces derniers, les poussant
ainsi à proposer les mêmes produits -ce sont eux qui les fabriquent- sous leur propre
enseigne112. En revanche, en ne médiatisant que la marque, par des campagnes extrêmement
coûteuses dont l’impact sur les clients est considérable, Benetton s’assure leur collaboration113.
2. Historique des campagnes publicitaires de Benetton
De renommée internationale, on peut bien dire que la publicité Benetton fait parler d’elle.
Ce sont ces fameuses campagnes qui sont à l’origine des nombreuses démarches
institutionnelles menées par le groupe depuis la fin des années nonante. Et pour cause, les
scandales provoqués autour de ces campagnes réalité ont bel et bien fini par desservir la
marque, lui permettant néanmoins d’acquérir le statut de troisième marque la plus connue à
l’échelle mondiale avec un taux de notoriété semblable à celui de Coca-Cola. Toutefois, aurait-
il fallu que cette notoriété serve la vente de la marque et non pas son boycott…
Ces publicités choc représentant le facteur de déclin de la marque, il semble indispensable
d’en retracer brièvement l’historique afin de saisir le moment où le renversement entre les deux
ordres de valeurs s’est opéré.
Dans ses premières campagnes de publicité, que l’on peut situer autour de 1966, Benetton
semble appliquer les règles standard de la communication publicitaire classique, tout en
adoptant déjà certains éléments en accord avec l’évolution des habitudes socioculturelles. De
façon classique, les affiches présentent le produit. Les photographies montrent des jeunes gens
revêtus des derniers modèles confectionnés par l’entreprise. Jusqu’ici, rien ne s’écarte des règles
du réalisme.
112 FRERY (F.), Benetton ou l’entreprise virtuelle, Editions Vuibert, 2002, p. 56 113 Ibid., p. 57
63
Figure 5.1. : Campagne Benetton 1966 - 1983
La fin des années soixante représente des années de rupture, de fortes contestations, que ce
soit en musique, en art, ou dans le cinéma. Les jeunes ont leurs idoles, des figures contestataires
auxquelles ils s’identifient.
Benetton s’empare immédiatement de cette tendance et, dans sa campagne de
communication de 1975-1976, propose les personnalités idolâtrées par toute la jeunesse portant
les vêtements de la marque. Ainsi peut-on voir Mick Jagger, Jimi Hendrix, et mieux encore, une
Laura Antonelli à demi nue, un Salvator Dali en militant engagé collant une affiche en faveur de
l’avortement. Autant de personnages qui deviennent ainsi les représentants d’une philosophie de
l’entreprise, sensible aux velléités anticonformistes et libertaires de sa clientèle114.
Figure 5.2. : Campagne automne-hiver 1975-1976
114 SLAVEMINI (Lorella Pagnucco), op. cit., p. 19
64
Développés et approfondis avec habileté, ces thèmes constitueront une sorte de leitmotiv,
que l’on retrouvera dans toutes les campagnes à venir115.
En 1982, Oliviero Toscani et Luciano Benetton se rencontrent. Leur collaboration donnera
lieu aux campagnes All the Colors dès le printemps 1984. Au départ, la publicité de la marque
est fondée sur la fraternité et l’antiracisme, présentant des photos d’adolescents de tous les
horizons.
L’année suivante, les photographies renvoient toujours à la joie, au groupe et à la couleur,
mais elles ne sont plus représentées dans un décor. Les paysages font place à des décors blancs
abstraits. Ainsi, l’absence de coordonnées géographiques et temporelles revient à affirmer
l’utilisation à tout moment et en tout lieu des vêtements, lesquels occupent désormais à eux
seuls, toute l’image. Cette absence de repères est une première allusion à la reconnaissance
internationale que vise Benetton et qui, parallèlement, va exprimer de manière explicite la
représentation des différentes races humaines et l’ajout de la phrase, justement en anglais, All
Colours of the world116.
L’année 1984 marque, quant à elle, le début de la globalisation commerciale. Pour soutenir
l'expansion, l'entreprise a besoin d'une véritable image de marque globale. Au début, il s'agissait
de faire passer dans le public l'idée des couleurs, dont le rôle consistait à identifier la marque.
C'est ainsi que naît la première campagne All the Colors of the World exhibant de jeunes
mannequins de toutes les races. Elle offre ainsi un concert de couleurs ethniques et
vestimentaires117.
Figure 5.3. : Campagne printemps-été 1984
115 loc. cit. 116 Ibid, p. 29 117 loc. cit.
65
Grâce à cette campagne, Benetton s'approprie le territoire de la multiracialité deux ans avant
que le thème ne soit à la mode.
A partir de la campagne de 1985, et pour toute la production de 1986 et 1987, l’absence de
contexte dans les photographies est contrebalancée par une très nette caractérisation nationale.
Drapeaux, traits distinctifs, accessoires folkloriques s’ajoutent à la tenue vestimentaire des
mannequins pour préciser l’appartenance ethnique de la personne. Toscani entend placer
l’hétérogénéité au centre de son objectif.
C’est en 1990 qu’apparaît pour la première fois le slogan United Colors of Benetton. Avec
cette campagne, la référence au produit disparaît définitivement pour faire place à des images
symboliquement fortes : deux mains, l’une noire et l’autre blanche, un enfant noir dormant sur
une couverture d’ours en peluche blancs, etc. La campagne, dont le nom devient la marque
officielle de la firme, remportera plusieurs récompenses internationales118.
Dorénavant, aucune communication de Benetton ne comportera de représentation du
produit. Ce principe va à l’encontre du bon sens en publicité et est d’autant plus étonnant que le
fabriquant crée des vêtements, objet qui présente toutes les caractéristiques de l’éphémère et du
plaisir superflu.
Jusqu’alors, une publicité s’avérait d’autant plus efficace qu’elle réussissait à activer le
processus d’identification consommateur-produit. Le publicitaire franchit maintenant un seuil
décisif par rapport à ce modus vivendi : il ne commercialise plus de produits mais propose des
valeurs. Le client n’est dès lors plus convié à s’identifier à des objets mais à des idées, on passe
ainsi du concret à l’abstrait119.
En fait, la disparition du produit laisse place au message suivant : toutes les couleurs se
valent parce que tous les hommes sont égaux. A partir de cette date, les campagnes Benetton
seront sous-tendues par ce même fil rouge. Oliviero Toscani entend communiquer au travers de
ces images, qu'il veut symboliques, l'attachement de Benetton à certaines valeurs : Benetton
contre le racisme, pour la fraternité, pour la communication des différences, pour la paix. Le
message est politique dans le sens où il est porteur de valeurs, comme celles de la démocratie,
de la fraternité et de l'égalité.
118 FRERY (F.), op.cit., p. 35 119 SLAVEMINI (Lorella Pagnucco), op. cit., p. 44
66
Il tente donc d’associer ces valeurs de l’entreprise à l’image de la marque. Cette association
est d’autant plus aisée pour le consommateur que la firme et la marque partagent le même
patronyme. Jusqu’ici, dans l’esprit du public, cette association se fait positivement puisque
Benetton défend des valeurs chères à la majorité des citoyens. La marque bénéficie dès lors du
soutien et de l’engouement du public de voir une entreprise défendre de tels principes.
En fait, ce discours militant fonctionne essentiellement sur le principe du cliché-vérité,
mettant en évidence une préoccupation éthique. Benetton recherche l'émotivité du
consommateur pour, en définitive, accroître la notoriété de la marque. Le logo Benetton opère
dès lors un déplacement du discours militant vers le discours publicitaire120.
Cependant, les campagnes du début sur la fraternité entre les peuples se changent bien vite
en campagnes beaucoup plus sulfureuses dans les années 90. C’est en 1991 que commence la
dérive provocatrice qui sera désormais la caractéristique essentielle de la communication
Benetton.
Les campagnes de 1991 généreront une controverse sans précédent. La première image
devait ouvrir la voie d’une série qui sera connue sous le nom de campagne réalité. Ainsi, la
société entendait présenter des images du monde réel, d’une importance sociale et universelle,
visant à briser le mur de l’indifférence qui entoure ces sujets en général.
La première photo représentait un cimetière de la Première Guerre Mondiale en France,
avec de longues rangées de croix alignées de manière symétrique comme pour dire qu’en temps
de guerre personne ne gagne.
Figure 5.4. : Cimetière, campagne printemps-été 1991
La seconde, c’est la photo de la petite Giusy avec son cordon ombilical encore attaché. Cette
photographie a généré un tollé sans précédent. Apparemment, les réactions négatives et les
67
critiques ont été suscitées davantage par les affiches que par les annonces presse, un peu comme
si les dimensions de la photo étaient ce qui choquait le plus121.
Figure 5.5. : Nouveau-né, campagne automne-hiver 1991
L’année 1992 apparaît comme la période la plus significative et la plus novatrice de la
communication de Benetton. Elle marque un tournant décisif dans la démarche de Toscani, déjà
amorcée l’année précédente avec la photographie du cimetière militaire. Le publicitaire
s’oriente résolument vers un réalisme exacerbé. Cette démarche est tellement radicale que, pour
répondre aux exigences de restitution fidèle des faits, il décide d’abandonner la prise vue en
studio, pour se servir uniquement de clichés d’actualité réalisés par d’autres photographes.
Dorénavant, le monde n’est plus assimilable aux utopies humanitaires, il est au contraire
empli d’injustices, d’assassinats, d’agonies et de drames effroyables122.
En observant cette évolution, on se rend compte que la règle d’or en publicité, qui veut que
soit évitée toute association entre le produit et un événement malheureux, est transgressée sans
répit durant l’année 1992. Cette juxtaposition du logo et d'images potentiellement négatives
conduit le récepteur à un réel effort d’interprétation, et par ce biais, à une prise de conscience du
problème illustré et ensuite à une prise de position plus ou moins marquée123.
En fait, les images appartenant au monde du signifiant, elles restent ouvertes à la libre
interprétation. Partant de ce principe, Toscani joue sur le registre de l'évocation d'une dualité :
guerre/paix, beauté/pollution... Ces affiches apportent une dimension éthique, mais n'imposent
pas la morale, nous sommes libres de répondre aux questions qu'elles soulèvent.
120 http://www.comanalysis.ch/ComAnalysis/Publication3.htm 121 X, La publicité Benetton, éloges et condamnations, p. 14 122 SLAVEMINI (Lorella Pagnucco), op. cit., p. 86 123 http://www.comanalysis.ch/ComAnalysis/Publication3.htm
68
Contrairement à la publicité classique qui s'adresse au consommateur, Benetton s'adresse bel
et bien au citoyen en vue de les sensibiliser sur des problèmes universels.
Au travers de ce bref aperçu de l’évolution de la publicité, on observe bien un glissement
d’un type de valeur à l’autre.
Dans un premier temps, Benetton propose une joyeuse affirmation de l’égalité dans la
diversité symbolisée par les valeurs de fraternité et de paix. Le message est simple et l’on
s’identifie volontiers à la marque parce qu’on en partage le mot d’ordre. Le client de Benetton
pouvait alors se réjouir de porter un vêtement qui lui procurait le sentiment d’être politiquement
correct.
Dans un second temps, le message se fait plus dur, passant de l’optimisme à un pessimisme
effréné. Les images colorées et gaies laissent place au sang et à la violence. Désormais, le client
s’empresse de préférer, à l’orthodoxie idéologique, l’affirmation de sa propre existence, sans
cesse menacée par la succession ininterrompue d’événements malheureux.
Conjuguant réalisme et pessimisme, Toscani a commencé à faire planer sur l’individu une
ombre angoissante et funèbre. Une fois le bénéfice du choc épuisé, force est de constater que
l’inquiétante association entre la marque et des événements tragiques a fini par briser net toute
possibilité de dialogue entre la société et l’acheteur potentiel.
D’aucun s’interrogeront sur la question de savoir si ces campagnes, qualifiées de
provocantes et choquantes, ne revêtent pas déjà un caractère institutionnel. Pour Benetton et
Toscani, oui. C’est d’ailleurs ainsi qu’ils justifient leur démarche : la pub n'est pas faite pour
vendre plus. Il s'agit de pub institutionnelle réalisée pour communiquer les valeurs de
l'entreprise. (...) Nous avons besoin d'une image unique qui puisse passer de la même façon
dans le monde entier, se justifie Luciano Benetton. Et Oliviero Toscani de renchérir : je ne suis
pas là pour vendre des pull-overs, mais pour promouvoir une image124.
Au sens où nous entendons le terme de publicité institutionnelle dans le présent travail, les
campagnes publicitaires d’Oliviero Toscani ne peuvent être assimilées à ce type de publicité.
La raison en est simple. Si l’on se rapporte aux définitions de la publicité institutionnelle
telles qu’exposées au premier chapitre, on se rend compte qu’il s’agit de communication sur les
124 http://www.museedelapub.org/virt/mp/benetton/pub_benetton.html
69
valeurs de l’entreprise, car au travers de cette publicité, l’entreprise dévoile son apport à la
collectivité au travers de ses divers engagements environnementaux, sociaux, etc.
Or, dans le cas que nous analysons ici, Benetton ne prend pas position, ses publicités ne
traduisent aucun engagement. La démarche benetonnienne consiste essentiellement à récupérer
des grands thèmes sensibles de la société contemporaine comme le droit à la différence, la
guerre, le sida, etc. afin de provoquer le débat autour de ceux-ci.
Prenons le cas de ces 26 portraits de condamnés, attendant leur exécution aux Etats-Unis
dans les couloirs de la mort. Que devons-nous comprendre ? Que l’on va tuer des gens de
manière légale et que nous sommes complices de cette violence d’Etat ? Que la peine de mort
doit être abolie ? Ou bien ces images nous informent-t-elles sur le fait que la société sera
débarrassée de ces meurtriers et qu’il existe bien une justice qui punit les coupables ? Qu’avons-
nous en face de nous, les visages d’hommes ou des têtes d’assassins ? Il en va de même
lorsqu’il dévoile les images de marée noire, que fait réellement l’entreprise pour
l’environnement ?
Dans son message, Benetton ne fait rien d’autre que de provoquer le débat. Mais ce débat,
est-il relayé par une action ou un soutien concret à ces causes au sein de l’entreprise elle-
même ? En fait, au sujet des thèmes qu’il prétend défendre, le fabriquant ne s’engage sur aucune
voie tangible. C’est pourquoi, Benetton ne peut prétendre mener des campagnes
institutionnelles par ce biais.
De plus, force est de constater que le débat ne se mène que rarement au profit de ces thèmes
mais plutôt autour la marque elle-même ressassant le plus souvent l’éternelle question de la
légitimité de cette démarche publicitaire.
3. Les campagnes de publicité institutionnelle du groupe
3.1. Les causes du recours à la publicité institutionnelle
Comme nous l’avons vu, c’est en 1991 que débute la dérive provocatrice qui sera la
caractéristique essentielle de la communication de Benetton pour plusieurs années.
C’est avec les campagnes de 1992 qui utilisent des photographies d’actualité faisant
référence à la marée noire, au boat people, à un mercenaire sud-africain brandissant un fémur
humain, et surtout à un homme mourant du sida entouré de sa famille, ensuite, avec les
70
campagnes de septembre 1993 qui présentent des parties de corps humains tatouées HIV
Positive avec l’encre violette utilisée dans les abattoirs et enfin, les campagnes de janvier 1994
qui dévoilent le vêtement ensanglanté d’un soldat bosniaque abattu, que les protestations
atteignent leur paroxysme.
Figure 5.6 : Campagnes printemps-été 1992, automne-hiver 1993, printemps-été 1993
A cette époque, Lucette Michaux-Chevry, déléguée à l’Action humanitaire, demande aux
Français d’arracher les pulls-overs Benetton sur ceux qui les portent et, parallèlement, des
associations de protestation, voire de boycott, comme United Boycott sont mises sur pied125.
Suite à l’image dévoilant cet homme mourant du sida, l’Association française de lutte
contre le sida intente un procès à Benetton. Certains propriétaires de boutique, inquiets de
l’impact négatif sur les ventes -150 d’entre eux en Allemagne et 30 en France- vont jusqu’à
refuser de payer des marchandises livrées par Benetton pour compenser un manque à gagner126.
Les campagnes publicitaires d'Oliviero Toscani seront ensuite boycottées par plusieurs
distributeurs européens, persuadés qu'elles sont partiellement responsables de la fuite des
clients. En France par exemple, le nombre de magasins a fortement diminué en l'espace de
quelques années, suite aux campagnes provocantes. En 1992, la marque y disposait de 650
125 FRERY (F.), op. cit. p. 36 126 loc. cit.
71
points de vente et réalisait un chiffre d'affaires de 2,2 milliards de francs français127. Trois ans
plus tard, il n'y a plus que 350 magasins pour un chiffre d'affaires de 1,2 milliards de francs
français128, soit une chute de près de la moitié du chiffre d’affaire. En 1999, il ne reste plus
"officiellement" que 300 boutiques. Et les fermetures se poursuivent à l'image de celle des
magasins des Halles et des Champs Elysées à Paris... Dans la plupart des villes moyennes, il
n'existe désormais plus de boutique Benetton. Les conséquences de cette polémique ne se firent
réellement ressentir que quelques années plus tard lorsque le rejet, venant cette fois du
consommateur, entraîna la fermeture de 200 points de vente rien qu’en Europe.
En dépit de certains éloges et de jugements cléments, la vague de protestation a poussé
Benetton à réfréner quelque peu les ardeurs provocatrices de Toscani. En effet, vers 1995, les
campagnes recouvrent une tonalité beaucoup moins violentes, et ont, pour la plupart renouées
avec la philosophie multiraciale et pacifiste des débuts.
Néanmoins, le naturel revenant souvent au galop, les publicités aux visuels choquants
réapparaissent vite au devant de la scène.
Année 2000, nouvelle alerte : sous la menace du boycott de l'Amérique profonde, choquée
par les visuels publicitaires de condamnés à mort, la chaîne de magasin US Sears rompt son
contrat avec le groupe italien. Benetton ne compte plus alors que 200 boutiques aux USA,
contre 700 auparavant.
Figure 5.7. : Campagne printemps-été 2000
127 Près de 350 millions d’euros 128 Près de 200 millions d’euros
72
En 2001, et malgré une croissance retrouvée, le chiffre d'affaire du groupe reste inférieur à
celui de 1992… Oliviero Toscani, le créateur de 18 années de campagnes publicitaires
benettoniennes a été remercié. Une nouvelle stratégie commerciale, et une communication
moins provocatrice sont désormais à l'ordre du jour129.
En attendant, les actes de boycottages se poursuivent, les manifestations devant les
boutiques de Benetton se multiplient et gagnent en ampleur. Au point que les financiers de la
chaîne de distribution s’en inquiètent et demandent à l’entreprise de soutenir sa marque et de ne
plus produire de publicités qui semblent de plus en plus s’acharner contre le vêtement130.
C’est ainsi que les images joyeuses et multicolores incarnant l’esprit original de la marque et
que résume son slogan United Colors of Benetton refirent leur apparition. Aujourd’hui s’ouvre
une nouvelle page pour la publicité Benetton. Fabrica, le centre de recherche pour la
communication Benetton, reprend la communication du groupe131.
Les excès de l’enseigne dans le domaine publicitaire avaient fini par irriter un peu tout le
monde, jusqu’aux franchisés qui en avaient assez de se voir boycotter par une partie des
consommateurs. Ajouté à cela, les nombreuses fermetures de magasins et les violentes réactions
de la part des citoyens, Benetton a été contraint de revoir l’ensemble de sa stratégie publicitaire.
C’est ainsi qu’il est revenu à un laïus moins séditieux dans ses thèmes publicitaires.
En fait, on ignore si la cause de cet abandon en est l’épuisement de son parcours, son
incapacité à sortir de l’impasse, ou l’effet de pressions extérieures.
La firme de Trévise n’abandonnera toutefois pas sa communication coup de poing.
Simplement, elle lui donna un nouveau visage pour, d’une part, la rendre plus crédible, et
d’autre part, la décliner sur un ton plus humble.
3.2. Les campagnes institutionnelles proprement dites
Dès que l’on accuse le fabricant d’utiliser le malheur des autres pour accroître les ventes de
sa marque, Benetton réplique par une action humanitaire concrète, dont il fait activement la
promotion.
129 http://www.econovateur.com/rubriques/communiquer/critcom151001.shtml 130 SLAVEMINI (Lorella Pagnucco), op. cit., p. 117 131 X, La communication Benetton, Toscani passe le relais, p. 12
73
C’est ainsi que depuis 1993, la communication internationale annuelle du fabricant se fait en
partenariat avec des organisations humanitaires. La FAO (Food and agricultural organisation),
l’ONU ou le HCR (Haut commissariat pour les réfugiés) par exemple associèrent leur nom à ces
campagnes thématiques. C’est aussi l’esprit de cette opération, avec World Food Programme,
financée entièrement par Benetton que nous détaillerons plus loin.
En fait, si nous analysons scrupuleusement ces campagnes institutionnelles, nous pouvons
constater que chacune d’entre elles a été menée suite aux coups d’éclat provoqués par l’une de
ses publicités choc.
Une des premières campagnes dévoilant le soutien de Benetton aux œuvres humanitaires est
cette fameuse collecte de 460 tonnes de vêtements usagés, promotion pour laquelle Luciano a
posé nu. C’était en 1993. A y regarder de plus près, on s’aperçoit que cette démarche
institutionnelle répond immédiatement au concert de polémiques que le fabricant a déclenché
l’année précédente. Rappelons que 1992 correspond à la date à partir de laquelle Toscani
s’engage dans la voie de la publicité provoc’ avec, notamment, la photographie des adieux
d’une famille à un fils malade du sida.
Figure 5.8. : Opération humanitaire de redistribution de vêtements, printemps-été 1993
Revendiquant la gratuité d’une entreprise menée en collaboration avec l’association suisse
Caritas et la Fédération Internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge de Genève, il
s’agit du premier projet global de redistribution de vêtements en faveur des populations
déshéritées et lancée sous le nom de Clothing redistribution project132.
132 SLAVEMINI (Lorella Pagnucco), op. cit., p. 110
74
Benetton fit de même suite au procès intenté à son encontre par l’Association française de
lutte contre le sida. Désormais, il soutient également la lutte contre cette maladie, en distribuant
des préservatifs, en finançant des manifestations et en aidant des associations à travers le
monde133.
Quant au premier meeting international de SOS Racisme à Trévise, l’entreprise Benetton se
charge de toute l’organisation. Parallèlement, et en collaboration avec l’association, elle lance
une campagne de sensibilisation dans les écoles. Intitulée Les Couleurs de la paix, la firme
entreprend de distribuer des coffrets explicatifs à pas moins de 80 000 enfants. Cette action
remonte à 1996, et une fois encore, on s’aperçoit que cette date correspond au retour au calme
qui fait suite aux débordements publicitaires dont l’affiche présentant la tenue maculée de sang
d’un soldat bosniaque tué au combat fait partie.
Finalement, la communication de United Colors of Benetton de l’automne 2001, réalisée en
collaboration avec les Volontaires des Nations Unies et destinée à promouvoir les différentes
formes de volontariat à l’occasion de l’Année Internationale du Volontariat intervient, elle
aussi, à des mouvements intenses de protestation comme la menace du boycott de la marque par
la marque américaine Sears. C’était en 2000.
Parmi ces nombreuses démarches institutionnelles, nous nous intéresserons plus
particulièrement à la campagne Food for Life. Dernière en date, elle représente le plus gros
budget de publicité institutionnelle dépensé par le groupe, et intervient au moment où Benetton
semble abandonner définitivement le registre de la provocation. Une manière peut-être de
redorer son blason.
Comme nous l’avons évoqué ci-avant, la campagne Food for Life a un prix : 15,7 millions
d’euros. A l’unique charge de Benetton, soit l’équivalent d’un semestre de communication pour
le groupe.
Cette campagne mondiale, lancée en février 2003, a été réalisée en collaboration avec le
World Food Programme, l’agence des Nations Unies en première ligne pour la lutte contre la
faim dans le monde134. Elle entend mettre l’accent sur ce fléau qui constitue aujourd’hui la plus
grande urgence humanitaire mondiale.
133 FRERY (F.), op. cit., p. 39 134 Campagne de communication, p. 2
75
La nourriture devient un véritable agent de changement social. Si nous avons choisi de
collaborer avec le WFP parce que nous partageons leur engagement et le caractère concret de
leurs initiatives. Comme cela s’est déjà produit avec d’autres associations humanitaires, nous
nous sommes rangés sous leur bannière dans une campagne à laquelle nous croyons
fermement135. C’est en ces termes que Luciano Benetton justifie sa collaboration avec le World
Food Programme.
Très visible, la campagne sera diffusée par affichage et dans la presse à travers le monde ;
de l’Europe à l’Amérique latine en passant par le Canada et même l’Orient. Elle est le fruit de
Fabrica, le centre de recherche et développement de Benetton sur la communication.
Food for life n’aborde pas le problème de la faim directement sous son aspect le plus
macabre. Toutefois, comme de tradition, elle met en scène des quidams qui, par leurs stigmates
ou simplement par leur regard, témoignent des vicissitudes qu’ils ont endurées.
Figure 5.9. : Campagne Food for life 2003
La campagne s’articule ainsi autour d’une série de portraits illustrant les différentes facettes
sociales de la malnutrition qui, pour rappel, fait toujours un mort toutes les 5 secondes dans le
135 Campagne Food for Life, p. 7
76
monde. Si certaines images frôlent encore la provocation, comme cet homme muni d’une
prothèse en forme de cuillère, ce n’est plus au détriment du message humanitaire136.
Au travers des photographies, prises par le jeune photographe de Fabrica James Mollison en
Afghanistan, au Cambodge, en Guinée et en Sierra Leone, Benetton entendait témoigner du lien
étroit entre les problèmes de malnutrition et les divers aspects sociaux de l’existence. Les
thèmes de la campagne n’envisagent pas directement le problème de la faim mais le lient à
différents thèmes tels que la protection, le travail, l’éducation ou la paix.
Six affiches déclineront les programmes particuliers de lutte contre la faim dans le monde :
- Food for peace, destiné aux guerriers en Sierra Leone.
Les ex-combattants des différentes factions reçoivent des aides sous forme de nourriture quand
ils rendent leurs armes. De plus, ils sont formés à un métier qui leur permet de subvenir à leurs
besoins en temps de paix.
- Food for education destiné aux enfants en Afghanistan.
Les enfants sont les premières victimes de la pauvreté de leur famille. Pour encourager les
parents à les envoyer à l’école, de la nourriture y est offerte en plus de l’instruction.
- Food for work, destiné aux femmes afghanes
Les personnes sont rétribuées avec des rations alimentaires pour effectuer des travaux d’utilité
publique tels que la reconstruction des bâtiments détruits par la guerre. Le programme
encourage donc les femmes à obtenir leur indépendance et à reconstruire leurs carrières.
- Food to go home destiné aux réfugiés afghans
Quand ils sont rapatriés dans des pays comme l’Afghanistan, les centres d’aide leur fournissent
de la nourriture pour garantir un soutien concret au cours des premiers mois -plus vulnérables-
durant lesquels ils tentent de reconstruire leur vie137.
- Food for protection destiné aux jeunes cambodgiennes et prostituées africaines.
Qu’il s’agisse de cambodgiennes qui vivent dans des refuges, ou de prostituées en Sierra Leone,
l’offre de nourriture les aide aussi à comprendre l’importance des rapports sexuels protégés.
136 X, Les bonnes intentions de Benetton, in : Pepper Plug, n°0, novembre 2003 137 X, United Colors of Benetton, Campagne Food for Life, p. 5
77
- Food for stability destinés aux Libériens réfugiés
Dans le cas des enfants libériens qui vivent dans des camps pour réfugiés, les aides alimentaires
sont importantes non seulement pour leur survie et leur stabilité138.
Il va de soi qu’avec un tel programme, Benetton vise non seulement les consommateurs,
mais également le grand public : les messages qu’il délivre s’adressent à chaque citoyen.
La question récurrente qui émerge dès que l’on évoque le nom de Benetton est la légitimité
de sa démarche institutionnelle. Est-elle sincère ou, est-ce une démarche intéressée ?
Poser la question de cette manière c’est déjà y répondre. On ne saurait prétendre qu’une
entreprise de cette taille investisse de tels montants dans des campagnes à vocation
exclusivement altruiste. Et ce principe est généralement vrai pour toutes les firmes qui mènent
des campagnes de publicité institutionnelle. En effet, puisque l’impact recherché est
l’amélioration de l’image de l’entreprise ou de la marque, l’intérêt commercial est toujours
présent, même si rares sont les firmes qui l’admettent. De plus, comme nous avons pu
l’observer, Benetton développe ce type de campagne à chaque fois que son intérêt risque, ou est,
menacé. Il capitalise donc bien sur l’impact moral de ses initiatives pour développer son image
de marque. D’autres réflexions peuvent encore appuyer cette argumentation.
Si l’on en croit Le Guide éthique du consommateur139, un livre recensant les engagements
des grandes entreprises au niveau écologique, social, etc. le groupe Benetton -et ses filiales
(Playlife, Prince, Sisley)- figure quasiment bon dernier, eu égard à sa taille.
Sa politique salariale et commerciale dévoile des conditions de travail peu contrôlées
notamment dans les pays émergents. Au niveau des actions écologiques, le groupe fait moins
d'efforts que ses concurrents, et certains comportements comme le déplacement de populations
locales lors d'achats de terres en Patagonie rendent à juste titre sceptique quant à la bonne
volonté citoyenne de Benetton140.
Nous procèderons à une analyse plus approfondie de l’efficacité de la publicité
institutionnelle du groupe lors de l’examen des résultats de notre sondage.
138 Ibid., p. 6 139 Observatoire de l’éthique, Le guide éthique du consommateur, Editions Albin Michel, 2001 140 http://www.econovateur.com/rubriques/communiquer/critcom151001.shtml
78
Chapitre III
La publicité institutionnelle dans le soutien de marque.
Le cas de Douwe Egberts
1. Introduction
Le choix de la marque Douwe Egberts pour illustrer le soutien de marque se justifie tout à
fait puisqu’il s’agit d’une grande enseigne qui, jusqu’à présent n’a connu aucune crise ou
bouleversement particulier, par opposition à ING qui s’est installé dans un marché où son nom
était inconnu des quidams, et Benetton qui a surmonté maintes crises liées à ses campagnes de
publicité.
Douwe Egberts illustre le cas d’une marque que les consommateurs n’associent pas
spontanément à l’entreprise qui la commercialise, en l’occurrence Sara Lee. C’est donc la
marque elle-même qui, dans sa communication intègre le registre institutionnel.
1.1. La publicité institutionnelle dans le soutien de marque
Si l’on en croit les résultats de l’enquête du CREDOC portant sur les conditions de vie et
aspirations des Français141, deux facteurs justifient cette démarche.
Le premier concerne les produits eux-mêmes. Les consommateurs se sont exprimés sur la
catégorie de produits qu’ils souhaiteraient voir soutenir un programme de citoyenneté. Dans
l’enquête, la question était formulée de la manière suivante : Pour quels types de produits
pensez-vous qu’il soit important aujourd’hui d’avoir des engagements de citoyenneté de la part
des entreprises ? La réponse des citoyens est claire : pour les produits alimentaires. En effet,
47% des citoyens les citent, et ce, très largement devant le textile (17%), tandis qu’une personne
sur neuf seulement désigne les produits pharmaceutiques.
141 Enquête « Conditions de vie et aspirations des Français » menée début 2002 par le CREDOC pour le compte du SESSI. Détails de l’étude voir, annexe 1
79
Tableau 6.1. : Données relatives aux engagements de citoyenneté par catégorie de produits142
Ensuite, si nous prenons l’étude Corporate Citizenship143 menée conjointement par l’agence
de publicité Bates et le groupe Roularta, on s’aperçoit qu’eu égard aux résultats obtenus à la
question : Une entreprise doit-elle adopter un comportement de corporate citizenship?, 79% du
public se dit favorable. Toutefois, ils considèrent que cette démarche ne doit pas se faire à
n’importe quel prix. Pour 21% des sondés, une entreprise ne doit pas éprouver de difficulté pour
ce faire. Ce qui signifie donc que plus une entreprise se porte bien, plus les consommateurs
attendront un comportement citoyen de sa part.144
Mais quelle forme doit prendre un tel engagement, l’entreprise doit-elle donner son argent,
son know-how, ou son temps ? Pour 39% des personnes interrogées, les compétences arrivent en
tête, suivies du temps (32%) et de l’argent. Quoi qu’il en soit, on préfère généralement que la
firme mette elle-même sur pied un programme de solidarité145.
Au regard de ces résultats, nous pouvons conclure que plus une entreprise est florissante,
plus on attendra d’elle qu’elle développe un programme de citoyenneté, lequel, rappelons-le ne
sera crédible aux yeux des consommateurs que s’il est en accord avec sa mission. En
l’occurrence, Douwe Egberts commercialise du café, symbole de chaleur, ses actions doivent
donc s’inscrire dans cette logique.
142 CREDOC, enquête « Conditions de vie et Aspirations des Français, début 2002 pour le compte du Sessi, Détails de l’enquête, voir annexe 1 143 Etude Corporate Citizenship, menée par Bates et Roularta de juin à septembre 1997. Détail de l’étude, voir Annexe 2. 144 DE OLIVEIRA (Valérie) En quête de citoyenneté, in : Marketing Managemement ??? 145 Etude Corporate Citizenship, menée par Bates et Roularta de juin à septembre 1997. Détail de l’étude, voir Annexe 2.
80
Pour soutenir une marque, le gestionnaire doit tenir compte des tendances de la
consommation. Comme ces chiffres en attestent, la consommation engagée, dont la promotion
passe par les campagnes institutionnelles, correspond à une de ces nouvelles tendances, et dès
lors, pour qu’une marque reste compétente -et compétitive- aux yeux des consommateurs, elle
doit nécessairement s’adapter à cette nouvelle donne.
2. Douwe Egberts : un café, une marque
Née en 1753, Fries Agbert Douwes jetait les bases de ce qui deviendra, 250 ans plus tard,
une marque mondialement connue. Une réputation que ladite marque s’est forgée non
seulement dans son pays, par le biais des grandes surfaces, mais également sur le marché
extérieur (bureaux, horeca, etc.).
Leader sur le marché belge depuis 1975, Douwe Egberts est réputé pour sa qualité, grâce
notamment aux nombreux contrôles effectués à chaque phase du processus de production. En
effet, au sein de l’usine Douwe Egberts, trois personnes sont chargées de goûter et d’évaluer
quelques quatre à cinq cents tasses de café par jour.
L’enquête menée sur le portail MSN par l’agence de publicité LDV/Bates du 27 janvier au 7
février 2003 inclus en Flandre et en Wallonie, s’intéressait aux marques préférées des Belges.
Ce sondage a été réalisé exclusivement via MSN. Une campagne média intensive sur le portail a
constitué la base du recrutement des 17.833 participants. 500 marques, réparties en 33
catégories, étaient concernées par le concours. Pour chacune des 33 catégories, deux questions
étaient récurrentes : « Quelle est la marque que vous aimez le plus? » et « Quelle est la marque
que vous détestez le plus? ». En terme de résultats, Douwe Egberts arrive en tête de la catégorie
du café avec 50, 9% des votes146.
Bien que cette enquête ne revête pas un caractère très scientifique, elle n’en demeure pas
moins instructive et peut alors servir de base de réflexion.
146 Etude Compétition nationale des Marques, menée en 2003 par LDV/Bates. Détails de l’étude, voir Annexe 3
81
3. Les campagnes de publicité institutionnelle de la marque
3.1. Les causes du recours à la publicité institutionnelle
La campagne de publicité institutionnelle de Douwe Egberts s’inscrit dans un plan de
soutien de marque.
D’une part, l’annonceur désirait non seulement renforcer sa présence dans le panier du
consommateur, et donc promouvoir ses ventes à court terme en agissant durant une période -les
mois de novembre et décembre- où les achats sont traditionnellement plus importants, mais
également défendre sa marque contre les attaques des private labels qui sont particulièrement
forts sur le segment café.
D’autre part, Douwe Egberts souhaitait également renforcer son mind space, c’est-à-dire sa
présence dans l’esprit du consommateur. Et ce, en entretenant des relations privilégiées entre le
consommateur et la marque tout en donnant un contenu à son positionnement Care &
Togetherness.
En dépit des nombreuses actions promotionnelles engagées par Douwe Egberts, aucune ne
relayait vraiment ce positionnement. En effet, la marque entendait marquer le coup en période
de fin d’année. C’est ainsi que pendant 5 ans, elle a proposé un CD gratuit à l’achat d’un paquet
de café de 250 grammes. Comme l’intérêt des consommateurs pour ce type de promotion
s’érodait, il fallait trouver une autre action à mener sur le marché. C’est ainsi qu’est né Un peu
de chaleur pour tous.
3.2.Les campagnes proprement dites
Les Banques Alimentaires peuvent en témoigner, la pauvreté est de nos jours encore une
réalité en Belgique. Pour cette raison, elles se sont données pour mission de collecter des vivres
pour les plus démunis. Lors de ces collectes, une denrée se fait rare : le café, tandis qu’il est
justement si précieux pour la chaleur qu’il procure.
C’est ainsi qu’en 1998, soit près de trente ans après son apparition sur le marché belge,
Douwe Egberts lance son action de don de café aux plus démunis, qui portait à l'époque le nom
de Un café pour tous.
Rebaptisée Un peu de chaleur pour tous, le principe de base, inchangé aujourd'hui, est
simple : pour chaque paquet de Douwe Egberts acheté durant le mois de décembre, deux tasses
82
de café sont offertes aux déshérités via les Banques Alimentaires. Cela fait cinq ans que la
marque offre du café aux plus démunis via la Fédération belge des banques alimentaires.
A l'origine, ce sont les Banques Alimentaires qui nous ont proposé de les soutenir. En effet,
une étude réalisée auprès des bénéficiaires finaux montrait que le café constituait l'un des
principaux besoins alimentaires, explique M. Van Eynde, porte-parole de la société.
Douwe Egberts a par conséquent mis sur pied cette opération en fournissant aux Banques
Alimentaires, fin novembre de chaque année, un stock de départ, complété selon les quantités
exactes vendues en magasin jusqu'à la fin du mois de décembre.
Un peu de chaleur pour tous s’inscrit clairement dans le Cause related marketing, en
instaurant tout d’abord un lien logique entre le produit, en l’occurrence, le café, symbole de
chaleur aussi bien physique qu’émotionnelle et l’objectif de solidarité qui se fait via les Banques
Alimentaires.
Figure 6.1. : Un peu de chaleur pour tous
3.3.Les médias utilisés
Aujourd’hui, « Un peu de chaleur pour tous » est suffisamment connu du public pour ne
plus faire de publicité dans les médias, justifie M. Van Eynde omettant de préciser que leur
action est relativement bien relayée par la presse nationale à raison de trois ou quatre articles
chaque année, ce qui contribue -et crédibilise- la publicité de leur opération.
Au lancement du projet, 7 à 8% du budget publicitaire annuel était consacré à sa
promotion. Depuis 2001, nous assurons cette publicité uniquement en magasin par la mise en
évidence de la marque via des affiches dans les rayons et sur les têtes de gondoles, indique M.
Van Eynde.
83
4. Quels objectifs, pour quels résultats ?
Notre objectif ne se traduit pas en terme de profit, explique M. Van Eynde, si tel était notre
but, nous offririons une tasse gratuite à l’achat d’un paquet de café. Ce type d’action nous
permet d’augmenter réellement nos bénéfices, « Un peu de chaleur pour tous » est une action a
vocation exclusivement sociale.
Affirmer cela, c’est faire semblant de méconnaître l’impact respectif de chacune de ces
actions. En effet, offrir une tasse n’a pas le même retentissement au sein de la population que la
participation à un programme de citoyenneté. En terme de bénéfice, le premier se traduit par un
accroissement des ventes à court terme, le second, par une amélioration de l’image de marque
jouant ainsi sur le long terme.
Quoi qu’il en soit, Douwe Egberts ne peut nier que Un peu de chaleur pour tous entraîne
une hausse des ventes, si faible soit-elle, puisque pour prendre part à un tel programme, les
consommateurs doivent acheter la marque. Ce principe s’inscrivant dans la logique des
nouvelles tendances de consommation, pour le prospect, collaborer à cette action, permet de
dépasser son individualité étant donné qu’il ne reçoit rien mais qu’au contraire il donne147.
La marque est donc parvenue à faire d’une pierre deux coups. Par cette action, Douwe
Egberts ne se contente pas de faire augmenter ses ventes –bien qu’elles n’atteignent pas un
niveau de profitabilité maximum- mais parvient également à valoriser sa marque et à la
crédibiliser dans l’esprit du consommateur.
De plus, par opposition à une campagne de promotion classique avec, par exemple, des bons
de réduction de 1 euro à l’achat d’un kilo de café, l’opération Un peu de chaleur pour tous situe
le return de l’entreprise à deux niveaux.
D’une part, le taux de notoriété de cette opération est élevé, ce qui positionne l’entreprise
dans l’esprit du consommateur comme citoyenne. D’autre part, depuis 2 ans, de 30 à 40 % du
personnel participe à des actions de volunteering, distribuant bénévolement des tasses de café à
la gare du midi. Le return communicationnel est donc tout aussi interne qu’externe.
Quant à l’impact de cette action sur le public, le taux de notoriété de la marque reste
inchangé puisque avant l’opération il était déjà de 99% en Top of Mind. Douwe Egberts
entendait simplement assurer un rôle social en tant que grande marque. Néanmoins, sa
147 http://213.193.164.200/dossiers/MM156sales.htm
84
participation à ce programme -relayée par la presse- permet une mise en lumière non
négligeable de la marque de laquelle découle naturellement une amélioration de son image.
Qu’en est-il pour les bénéficiaires finaux ? Alors que pour la première année (décembre
1998), les partenaires de l’opération s’étaient donnés pour mission de distribuer 5 millions de
tasses de café pour réchauffer 88.000 personnes dans le pays, cet objectif a largement été
dépassé puisque le chiffre de 10 millions a été atteint. Un succès qui s’est confirmé lors de la
deuxième édition, clôturée fin 1999 sur plus de 12 millions de tasses distribuées.
Pour fêter ses 250 ans, cette année, plus de 24 millions de tasses ont pu être offertes, soit une
contribution de quelques 550.000 euros.
Ces chiffres démontrent que les consommateurs prennent activement part à ce programme.
Ce qui témoigne de l’impact d’une telle opération sur l’image de la marque. A noter que chaque
année, Douwe Egberts reçoit des dizaines de réactions de leur part, toutes, affirme M. Van
Eynde, louant l’opération.
En conclusion, la marque a bien compris l’évolution des nouvelles tendances de la
consommation. Douwe Egberts est une grande enseigne et à ce titre, elle entend remplir son rôle
à l’égard de la société, tout en ne négligeant pas le return de cette publicité institutionnelle sur
son image.
Nous procèderons à une analyse plus approfondie de l’efficacité de la publicité
institutionnelle de la marque lors de l’examen des résultats de notre sondage.
85
Chapitre IV
Sondage sur l’image des marques.
La publicité institutionnelle est-elle efficace ?
1. Méthodologie
L’objectif de cette enquête est d’apprécier l’efficacité des campagnes institutionnelles
menées par ING, Benetton et Douwe Egberts. Il nous fallait effectivement déterminer l’image
que le public perçoit desdites marques afin de savoir si ces campagnes ont produit l’effet
escomptés dans le public.
1.1. Construction du questionnaire
Nous avons opté pour la méthode du positionnement d’Osgood. Cette technique consiste, à
partir d’une série d’items antonymes deux à deux, à déterminer comment le consommateur juge
une marque donnée. Osgood a établit des échelles bipolaires (ou échelles sémantiques) à cinq
points. Chaque échelle représentant un trait spécifique de l’image.
Exemple d’échelle :
1 2 3 4 5 Marque leader dans son domaine
Marque suiveuse dans son domaine
Les personnes interrogées devront choisir le chiffre qui reflète le mieux leur opinion de la
marque considérée quant au critère d’évaluation proposé. Ainsi, elle notera :
- 1, si elle juge la marque leader dans son domaine ;
- 2, si elle juge la maque plutôt leader dans son domaine ;
- 3, si elle juge la marque moyennement leader dans son domaine ;
- 4, si elle juge la marque plutôt suiveuse ;
- 5, si elle juge la marque suiveuse.
86
Afin d’étayer notre information, nous avons interrogé des responsables concernés par les cas
analysés. Il s’agit de Sandrine Decelle, brand manager chez ING et de Jo Van Eynde, porte-
parole de Douwe Egberts. Quant à Benetton, il nous fut impossible d’obtenir un entretien, et ce
malgré nos démarches. Par contre, Laura Leone, responsable Presse et Communication pour le
groupe, a consenti à nous envoyer un grand nombre de dossiers concernant l’entreprise, ses
activités, ses campagnes publicitaires et sa communication.
1.2. Construction de l’échantillon
La méthode d’échantillonnage choisie est l’échantillon aléatoire simple dans lequel chaque
individu à la même probabilité, connue et non nulle, de faire partie de l’échantillon148.
Nous avons interrogé 100 personnes au total.
Lorsque l’on procède par sondage aléatoire simple, il est nécessaire de définir un intervalle
de confiance, de même qu’une marge d’erreur. En général, on fixe le niveau de confiance à
95%, cela signifie que les réponses fournies peuvent être considérées comme sûres à 95%149.
Quant à la marge d’erreur, elle peut être calculée à l’aide de la formule suivante150 :
nppzpP )1(/
21
−−+=
−α
Où :
- P est la proportion que l’on estimer ;
- p correspond à cette proportion mesurée sur l’échantillon
- 21 α−
Z est le quantile d’ordre 1-α/2, dont la valeur dépend du niveau de confiance (1-α),
c’est-à-dire la probabilité que cet intervalle contienne la valeur de P. Dans le cas d’un
niveau de confiance de 95%, le quantile d’ordre correspondant est de 1,96
- n, l’effectif, c’est-à-dire le nombre d’individus composant l’échantillon.
En ce qui concerne la valeur de p, elle sera déterminée à 40%.
148 DROESBEKE (Jean-Jacques), Eléments de statistique, p. 276 149 HEINDERYCKX (François), Communication politique, p. 68 150 Ibid, p. 67
87
Dès lors :
- n = 100
- p = 40%
- 21 α−
Z = 1,96
D’où :
100
)4,01(4,096,1/4, −−+0=P
P = 0,4 +/ 0,05
P = +/- 5%
L’intervalle de confiance peut s’exprimer ainsi :
35% 40% 45%
1.3. Modalités d’interview
Les interviews se sont déroulées en face-à-face du 2 juillet 2004 au 12 juillet 2004 à
Bruxelles.
2. Composition de l’échantillon et exemple de questionnaire
2.1. Composition de l’échantillon
Notre échantillon se compose de 100 personnes âgées de 15 ans et plus réparties de la
manière suivante :
- Sexe :
Hommes : 48% ; Femmes : 52%
- Age :
15-24 ans : 39% ; 25-44 ans ; 26% ; 45-64 ans : 24% ; 65 ans et plus : 11%
88
- Profession :
Profession libérale : 2% ; Cadres : 6% ; Employés : 32% ; Ouvriers : 4% ; Indépendants :
8% ; Etudiants : 19% ; Sans emploi : 10% ; Retraités : 8% ; Autres : 11%
- Consommant ou non les marques considérées :
Benetton : Consommateurs : 28% - Non consommateurs : 72%
ING : Consommateurs : 46% - Non consommateurs : 54%
Douwe Egberts : Consommateurs : 59% - Non consommateurs : 41%
2.2. Exemple de questionnaire
Voir pages suivantes
89
Fiche d’identification 1) Sexe :
o Féminin
o Masculin
2) Age :
o 15-24 ans
o 25-44 ans
o 45- 64 ans
o 65 ans et plus
3) Profession :
o Agriculteur
o Artisan
o Profession libérale
o Cadre
o Employé
o Ouvrier
o Indépendant
o Etudiant
o Sans emploi
o Retraité
o Autres : ………………………………..
4) Code postal : …………………….
5) Etes-vous consommateurs (ou client)
de la marque Benetton ? 0 Oui 0 Non
de la marque ING ? 0 Oui 0 Non
de la marque Douwe Egberts ? 0 Oui 0 Non
90
Questionnaire relatif à l’image de la marque Benetton
1) Connaissez-vous la marque Benetton ? 0 Oui 0 Non
2) Selon vous : 1 2 3 4 5
La marque est suiveuse dans son domaine
La marque est leader dans son domaine
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
La marque se différencie de ses concurrents
Sa publicité est attractive
Les produits de la marque sont bon marché
La marque est en croissance
La marque est éthique
La marque est proche de ses consommateurs
Sa publicité est loyale et crédible
Il s’agit d’une marque de confiance
La marque inspire de la sympathie
La marque assume un rôle social
La marque est dynamique
Les produits de la marque sont de bonne qualité
La marque est soucieuse de l’environnement en général
La marque néglige l’environnement en général
La marque est statique
Les produits de la marque ne sont pas de bonne qualité
La marque n’assume pas un rôle social
La marque inspire de l’antipathie
Il ne s’agit pas d’une marque de confiance
Sa publicité est trompeuse et pas crédible
La marque est distante de ses consommateursLa marque n’est pas éthique
La marque est en déclin
Sa publicité n’est pas attractive
Les produits de la marque sont chers
La marque ne se différencie pas de ses concurrents
91
Questionnaire relatif à l’image de la marque ING
1) Connaissez-vous le groupe ING ? 0 Oui 0 Non
2) Selon vous : 1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
1 2 3 4 5
Sa publicité est loyale et crédible
L’entreprise se différencie de ses concurrents
L’entreprise est en croissance
L’entreprise est éthique
L’entreprise est proche de ses clients
Il s’agit d’une entreprise de confiance
L’entreprise inspire de la sympathie
L’entreprise assume un rôle social
L’entreprise est dynamique
Les produits de l’entreprise sont de bonne qualité
L’entreprise est soucieuse de l’environnement en général
L’entreprise est leader dans son domaine
L’entreprise néglige l’environnement en général
L’entreprise est suiveuse dans son domaine
Les produits de l’entreprise ne sont pas de bonne qualité
L’entreprise est statique
L’entreprise n’assume pas un rôle social
L’entreprise inspire de l’antipathie
Sa publicité est trompeuse et pas crédible
Il ne s’agit pas d’une entreprise de confiance
L’entreprise est distante de ses clients
L’entreprise n’est pas éthique
L’entreprise est en déclin
Les produits de l’entreprise sont chers
Les produits de l’entreprise sont bon marché
Sa publicité n’est pas attractive
Sa publicité est attractiveL’entreprise ne se différencie pas de ses concurrents
92
Questionnaire relatif à l’image de la marque Douwe Egberts.
1) Connaissez-vous la marque Douwe Egberts ? 0 Oui 0 Non
2) Selon vous : 1 2 3 4 5
La marque est suiveuse dans son domaine
La marque est leader dans son domaine
1 2 3 4 5
La marque néglige l’environnement en général
La marque est soucieuse de l’environnement en général
1 2 3 4 5
Les produits de la marque sont de bonne qualité
1 2 3 4 5 La marque statique
Les produits de la marque ne sont pas de bonne qualité
La marque est dynamique
1 2 3 4 5 La marque n’assume pas de
rôle social La marque assume un rôle social
1 2 3 4 5
La marque inspire de la sympathie
La marque inspire de l’antipathie
1 2 3 4 5
Il s’agit d’une marque de confiance
1 2 3 4 5 Sa publicité est loyale et crédible
1 2 3 4 5
La marque est proche de ses consommateurs
1 2 3 4 5 La marque est éthique
1 2 3 4 5
La marque est en croissance
1 2 3 4 5
Les produits de la marque sont bon marché
1 2 3 4 5 Sa publicité est attractive 1 2 3 4 5
La marque se différencie de ses concurrents
Il ne s’agit pas d’une marque de confiance
Sa publicité est trompeuse et pas crédible
La marque est distante de ses consommateursLa marque n’est pas éthique
La marque est en déclin
Sa publicité n’est pas attractive
Les produits de la marque sont chers
La marque ne se différencie pas de ses concurrents
93
3. Exploitation des résultats
Afin de tirer le meilleur enseignement de cette enquête, nous allons combiner l’ensemble
des questionnaire marque par marque. De cette manière, nous pourrons déterminer la perception
du public quant à l’enseigne considérée.
La formule utilisée sera celle de la moyenne arithmétique. Elle se définit comme étant égale
à la somme des observations divisée par l’effectif n de la série151 :
∑=
=n
iix
nX
1
1
Où :
X i représente la cote donnée par l’individu i au trait x ;
X représente la cote moyenne accordée par l’ensemble des personnes sondées au trait x.
A noter que ne seront pas repris dans le calcul de la moyenne, les individus déclarant ne pas
connaître la marque.
Grâce aux résultats ainsi obtenus, nous pourrons facilement repérer les points forts et les
points faibles attribués par les individus à la marque. De cette manière, nous déterminerons si
les objectifs de campagnes institutionnelles menées par chacune de ces marques ont été atteints.
3.1. Résultats du sondage
Nous allons à présent exposer les résultats obtenus pour chaque trait d’image eu égard à la
marque considérée.
Rappelons toutefois que les chiffres présentés dans le tableau correspondent à la note
moyenne attribuée par les individus interrogés. L’échelle comptant cinq pas, 1 représentant la
meilleure note, 5 la moins bonne. Dès lors, plus le chiffre se rapproche de 1, plus la note peut
être considérée comme favorable à la marque.
151 DROESKEKE (Jean-Jacques), op.cit., p. 85
94
Tableau 7.1. : Résultats du sondage
Taux de notoriété assistée 91% 95% 95% La marque est leader dans son domaine 2,8 2,9 2
La marque est
soucieuse de
l’environnement
3,2 2,8 2,7
Qualité des produits de
la marque 2,6 2,1 1,6
Dynamisme de la
marque 2,5 2,1 2,4
La marque assume un
rôle social 3 3 2,1
La marque inspire la
sympathie 2,8 2,6 2,3
Il s’agit d’une marque
de confiance 2,5 2,5 1,8
Sa publicité est loyale
et crédible 2,7 3 2,3
La marque est proche
de ses clients 2,8 3,1 2,3
La marque est éthique 2,8 3 2,3
Marque en croissance 2,3 3,1 2,6
Produits de la marque
bon marché 3,2 3,8 3,1
Publicité attractive 2,9 2,5 2,7
La marque se
différencie de ses
concurrents
2,8 2,2 2,5
95
Nous analyserons les résultats du tableau en deux temps. D’abord, une lecture verticale,
nous permettra de déterminer l’efficacité de la publicité institutionnelle de chaque enseigne eu
égard au diagnostic d’image que nous avions posé lors de leur analyse. Ensuite, une lecture
horizontale mettra les trois enseignes en perspective.
3.1.1. Les résultats d’ING
Comme exposé dans l’analyse de ce cas, les principales raisons du recours à la publicité
institutionnelle sont :
- Développer la notoriété de la marque ;
- Rassurer sur la continuité du service délivré par la BBL ;
- Démontrer aux clients et non clients les avantages à faire partie d’un groupe
international en dépassant les a priori liés aux multinationales.
L’examen des notes attribuées aux traits d’image relatifs à la confiance, à la sympathie et à
la proximité qu’inspire l’enseigne laissent transparaître le constat suivant : la marque bancaire,
en tant qu’entreprise internationale, n’a pas encore réussi à s’imposer dans la continuité des
valeurs qui animaient la BBL. L’a priori lié à l’aspect distant et froid des firmes de cette taille
persiste. On constate également une méfiance à l’égard de cette institution eu égard aux scores
relatifs à la crédibilité et à la loyauté de ses publicités.
Quant aux avantages à faire partie d’un grand groupe, le même constat s’impose puisque la
marque n’a pas convaincu le grand public de son leadership ni de sa capacité à se différencier
de ses concurrentes. Ce constat se confirme encore si l’on tient compte des résultats obtenus
pour l’attractivité de ses campagnes. Ceci laissant supposer que les citoyens ne perçoivent pas
de réelles valeurs ajoutées en la marque de ING.
Quant à l’objectif de notoriété, on s’aperçoit que, bien qu’en croissance, les chiffres
n’atteignent pas encore le taux de notoriété de la BBL.
Que cela signifie-t-il ? Plusieurs pistes d’interprétation sont envisageables. La première, et
la plus simple, serait de dire que leurs campagnes institutionnelles n’ont pas permis d’atteindre
les résultats escomptés. Cette interprétation est néanmoins à nuancer. En effet, passant d’une
notoriété totale de 31% en début de campagne à 90%, et ce en un an et demi, on ne peut pas nier
96
l’évolution considérable de ce taux. Quoi qu’il en soit, le taux de notoriété de ING est toujours
inférieur à celui de la BBL.
La seconde interprétation tendrait à reconnaître que le changement de nom d’une banque
nationale misant sur les valeurs de proximité à savoir la BBL vers une institution bancaire de
taille internationale, ne s’opère pas à la légère. L’acceptation de ce changement par les clients et
les non clients de la banque ne sera réellement mesurable qu’à plus long terme. En effet, la BBL
n’a pas construit sa notoriété du jour au lendemain. Et de ne pas oublier que dans le processus
de construction d’image, le facteur temps est un élément à ne pas négliger, le propre des
campagnes institutionnelles étant de travailler sur le long terme.
Finalement, nous pouvons dire qu’au regard de ces résultats, les campagnes institutionnelles
de ING n’ont pas eu l’efficacité escomptée. Toutefois, faudrait-il attendre encore un an ou deux,
pour pouvoir tirer de réelles conclusions, compte tenu des facteurs exposés dans notre seconde
interprétation.
3.1.2. Les résultats de Benetton
Dans ce cas-ci, la principale raison du recours à la publicité institutionnelle réside dans la
nécessité pour la marque de redorer son blason. Ce besoin faisait suite aux nombreuses
protestations et actions de boycott menées par les citoyens, les distributeurs et les franchisés,
concernant les campagnes provoc’ du groupe Benetton.
En changeant sa stratégie publicitaire, c’est-à-dire en abandonnant ses publicités coup de
poing au profit de campagnes institutionnelles plus humbles, Benetton entendait donner à sa
communication un nouveau visage pour la rendre plus crédible.
Toutefois, on observe que, suite à ces campagnes choc, l’enseigne s’est fortement
discréditée aux yeux du public. Cette perte de confiance va de paire avec un certain scepticisme
à l’égard de la loyauté de ses campagnes institutionnelles. En effet, peu de personne
reconnaissent encore un rôle citoyen à la marque : sa capacité à se préoccuper de l’éthique, de
l’environnement et de la société au sens large, est fortement mise en doute.
Malgré ses tentatives de se rapprocher des citoyens en développant des campagnes
institutionnelles proche de leurs préoccupations, la marque est toujours perçue comme distante
et n’inspirant que peu de sympathie.
97
On constate donc que l’image véhiculée par la marque est encore fort liée à son passé
provocateur. Si l’enseigne n’est plus crédible aux yeux du public, ses actions institutionnelles ne
pourraient l’être davantage. Dans ce cas-ci, le fait que le groupe Benetton tente de se
positionner comme une entreprise responsable afin que puisse rejaillir cette image sur sa
marque, n’aura pas eu l’effet escompté puisque les objectifs en terme d’amélioration de l’image
de marque ne sont pas atteints.
3.1.3. Résultats de Douwe Egberts
De manière générale, la marque Douwe Egberts a toujours été bien perçue par le public. La
raison du recours à la publicité institutionnelle réside dans sa volonté de s’adapter aux nouvelles
tendances de la consommation afin de satisfaire toujours mieux les attentes et préoccupations
des citoyens. Car rappelons-le, aujourd’hui la marque est perçue comme un acteur social et à ce
titre, elle doit remplir les devoirs qui lui incombent.
En tant que grande enseigne, l’effet des campagnes institutionnelles sur l’image de la
marque est difficile isoler. En effet, depuis de nombreuses années, Douwe Egberts jouit d’un
excellent taux de notoriété et d’une image favorable auprès du public.
Toutefois, le fait qu’on lui reconnaisse volontiers un rôle social peut révéler l’efficacité de la
campagne institutionnelle Un peu de chaleur pour tous. A noter que l’action menée par la
marque relaie particulièrement bien son positionnement Care & Togetherness, ce qui contribue
à améliorer l’efficacité des campagnes institutionnelles de manière générale. Indépendamment,
de la société qui la commercialise, la marque a donc bien réussi à prendre la parole afin de
démontrer qu’elle remplit son rôle de citoyen.
4. Conclusion sur l’efficacité de la publicité institutionnelle
Au regard des résultats exposés ci-avant, on constate qu’une campagne de publicité
institutionnelle ne se mène pas à la légère.
Dans un premier temps, le thème institutionnel doit refléter le positionnement de la marque.
Une action institutionnelle en total incohérence avec ce dernier mènerait à de sérieux problèmes
de légitimité pour la marque, comme ce fut le cas pour Benetton. Discréditée par ses reality
pub, ses actions institutionnelles n’ont pas encore permis à la marque de recouvrer la confiance
du consommateur.
98
En fait, on constate qu’une marque ne sera légitime dans son approche institutionnelle que si
elle est déjà bien installée, c’est-à-dire, jouissant au préalable d’un capital confiance dans
l’esprit des consommateurs. Faute de quoi, ses campagnes ne bénéficient d’aucun appui
crédible. C’est ainsi que, dans le cas de ING, le public n’est pas encore convaincu des avantages
à faire partie d’un groupe financier de taille internationale ni des valeurs de proximité, d’écoute
que défend la marque.
Par conséquent, il incombe à la marque de développer d’abord ses qualités objectives,
subjectives et narratives. Dès lors, on ne peut réellement parler d’efficacité que dans le cadre du
soutien de la marque, comme en témoigne le cas de Douwe Egberts. L’impact de son action
institutionnelle est renforcé par la relation que les consommateurs entretiennent préalablement
avec la marque : une relation de confiance, de proximité, etc. crédibilisera ce type de campagne
et contribuera à améliorer toujours davantage l’image de la marque aux yeux des prospects.
99
Conclusion générale
Les entreprises et les marques ont dû s’adapter aux nouvelles tendances de la
consommation. Nombre d’entre elles ont compris que, pour séduire la clientèle actuelle ou
potentielle -et s’assurer une certaine pérennité- il ne suffit plus de décliner uniquement des
arguments commerciaux. Face à un marché publicitaire saturé en campagnes produit, il importe
que l’entreprise se fasse connaître autrement. Un moyen d’y parvenir est de recourir à la
publicité institutionnelle.
Cet outil permet aux firmes de révéler leur apport à la collectivité. Via ce type de campagne,
les entreprises rassurent le public sur la manière dont elles remplissent leurs rôles à l’égard de la
société, la manière dont elles s’y intègrent en satisfaisant les besoins de celle-ci.
Comme le démontrent toutes les études sur le sujet, le grand public attend des firmes
qu’elles assument leurs responsabilités sociales, environnementales, etc. Partant de ce constat,
les entreprises sont obligées de démontrer leur capacité à s’interroger sur les questions sociales,
environnementales, culturelles, etc. Bref, elles se doivent de dévoiler les valeurs auxquelles
elles croient, les causes qu’elles défendent, les actions qu’elles entreprennent. Au-delà de
l’aspect purement commercial, les entreprises doivent devenir citoyenne. En fait, l’image de la
firme constitue tout l’enjeu de ces campagnes.
C’est ici que le lien entre l’entreprise et la marque prend tout son sens. Une image
d’entreprise valorisante et positive se répercutera indéniablement sur ses marques. Et cette
répercussion de procurer de nombreux avantages à la marque : une différenciation avérée, un
taux de fidélité plus important, etc. C’est ainsi que de discours purement commerciaux, on est
passé aux discours plus éthiques et plus responsables justifiant la consommation d’une marque
par les bonnes intentions des entreprises dont elle émane.
Lorsque le nom de l’entreprise qui commercialise la marque est inconnu du grand public, il
lui faut alors faire entrer le registre institutionnel dans sa communication, et ce dans le même
but : améliorer l’image de la marque pour la rendre toujours plus présente à l’esprit du
consommateur.
Le choix des thèmes institutionnels dépend largement des tendances de la consommation,
des mégatrends. Le marketing, au sens large, s’est toujours chargé de récupérer les grandes
100
tendances socioculturelles au profit des intérêts financiers des entreprises. Aujourd’hui, aux
nouvelles propensions éthiques de la consommation, les entreprises répondent par des actions
concrètes en luttant contre la pauvreté (cf. Douwe Egberts), contre la faim dans le monde (cf.
Benetton), en étant toujours plus proche des consommateurs (cf. ING), etc.
Si aujourd’hui, les marques soutiennent des causes sociales, environnementales ou
culturelles, c’est parce qu’elles s’alignent sur les attentes des consommateurs. Ces derniers ont
ainsi le sentiment d’être politiquement correct en achetant telle ou telle marque défendant telle
ou telle cause.
Toutefois, une campagne de publicité institutionnelle, pour être efficace, ne se mène pas
sans condition. En effet, il serait illusoire de penser que ce type de publicité résoudrait tous les
problèmes liés à l’image de la marque. Comme nous l’avons exposé précédemment, il est
indispensable que ce genre de campagne se mène en accord avec le positionnement de la
marque. De même qu’une campagne institutionnelle doit se décliner en dernier lieu, après avoir
acquis une position privilégiée dans l’esprit du consommateur, c’est-à-dire que pour être
réellement efficace, ces campagnes doivent s’inscrire dans le cadre du soutien de marque.
Quoi qu’il en soit, cette propension des entreprises et des marques à remplir leur devoir de
citoyenneté est une tendance profitable pour la société car, pour plaire à leurs clients, ces
dernières s’engagent, de manière philanthropique ou simplement intéressée, dans des actions
concrètes qui contribuent à l’amélioration de la qualité de la vie.
Toutefois, il peut paraître regrettable qu’avec cette nouvelle forme de tendance de la
consommation, les prospects aient bonne conscience en achetant une marque plutôt qu’en
effectuant une donation directe. Mais après tout, c’est sur ce sentiment politiquement correct,
très fort dans la société actuelle, que jouent les marques qui se lancent dans les campagnes de
publicité institutionnelle.
101
Bibliographie
1. Ouvrages :
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- DROESBEKE (Jean-Jacques), Eléments de statistique, Editions Ellipses, 1997, 550p
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- HEINDERYCKX (François), Communication politique, Editions des Presses Universitaires
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comment ? Editions Dunod, 1987, 205 p.
- HEUDE (Rémy-Pierre), L’image de marque, Editions Eyrolles, 1989, 186 p.
- KAPFERER (Jean-Noël), La marque à l’épreuve de la pratique, 2ème éd., Editions
d’Organisations, 2002, 216 p.
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2000, 790p.
- LAGNEAU (G.), La fin de la publicité : 3 essais sur la communication
institutionnelle, Presse Universitaire de France, 1993, 177 p.
- LAZZARATO (Maurizio), Des entreprises pas comme les autres : Benetton en
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- LEDUC (Robert), La publicité, une force au service de l’entreprise, 9ème éd., Editions
Dunod, 1984, 327 p.
- LENDREVIE ET BROCHAND, Le Publicitor, 5ème éd., Dalloz Editions, 2001, 651p.
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- LEWI (Gérard), La marque, Editions Vuibert, 1999, 127 p.
- LIBAERT (Thierry), La communication d’entreprise, Editions Economica, 1998, 112 p.
- LOGIE (B.), Leur nom est une marque, Editions d’Organisations, 2002, 143 p.
- RUSSEL (H.), La publicité se définit et se mesure, PUF, 1964, 140 p.
- SLAVEMINI (Lorella Pagnucco), Toscani Benetton, Editions de la Martinière, 157 p.
- WESTPHALEN (Marie-Hélène), Le Communicator, 3ème éd., Editions Dunod, 2000, 420p.
2. Articles
- BIGOT (Régis), La consommation engagée. Mode passagère ou nouvelles tendance de la
consommation ? in : Le 4 pages des statistiques industrielles, n°170, décembre 2002
- BURON (S.), Historique d’un changement de nom, in : Trends, mars 2003
- DE JAHAM (Marie-Reine), Le défi de la publicité institutionnelle, in : Revue française de
Marketing, février 1979
- DE OLIVEIRA (Valérie), En quête de citoyenneté - http://www.mm.be
- DE OLIVEIRA (Valérie), ING-BBL : histoire d’un sans faute - http://www.mm.be
- DE OLIVEIRA (Valérie), Quatre mariage et … - http://www.mm.be
- GANESHAN (S.), Unconventional Advertising, in: Advertising Express, mai 2003
- JOURDAN (François), La création de noms de marques – http://www.mm.be
- KRIEF (Yves), L’entreprise, l’institution, la marque, in : Revue française de marketing,
n°109, 1986
- LAURENT (Raphaël), La pub, mode d’emploi, in : La Libre Belgique, 24 janvier 2004
- PASKOWSKI (Marianne), DONATH (Bob), Telling the corporate story, in: Industrial
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française de gestion, septembre 1984
- VAN RUYMBEKE (Laurence), La valse des marques, in : Vif l’Express, n°2706, mai 2003
- VESSIERE (Géraldine), ING, c’est demani – http://www.mm.be
- X, Bienvenue chez ING, Conférence de presse du 17 avril 2003
- X, Rebranding, de BBL à ING, mai 2003
- X, Nouveau départ pour ING, in : ING Entreprise, n° 153, avril 2003
- X, InfoBox, ou l’entrée d’une banque dans les rayons de votre supermarché, in : ING
Magazine, n°1, avril 2003
- X La BBL devient ING naturellement, in : ING Magazine, n°1, avril 2003
- X ING, quand le bébé rencontre le lionceau, in : ING Magazine, n°1, avril 2003
- X 1982 corporate advertising, in Business Week, n° hors série, 1983
- X Les bonnes intentions de Benetton, in : Pepper Plug, n°0, novembre 2000
- Documentation fournie par Benetton
3. Ressources électroniques
- http://www.members.lycos.fr
- http://www. comanalysis.ch
- http://www.econovateur.com
- http://www. ucad.fr
- http://www. droitshuamins.org
- http://www. benetton.com
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- http://www. douwe-egberts.be
- http://www.ing.be
- http://www.mm.be
- http://www.prodimarques.com
- http://www.musée de la pub.org
4. Travaux
- DEBEHOGNE (Marie-France), La publicité institutionnelle : étude d’image d’entreprise,
Mémoire, ULB, 1989
- GOURDIN (A.), SACRE (J.), THILMANY (V.), Le C.R.M., évolution ou révolution? ,
Séminaire de marketing, IAG/UCL, juin 2003
5. Entretiens
- Sandrine DECELLE, Brand Manager, ING
- Jo VAN EYDNE, Porte-parole, Douwe Egberts
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Annexes
Annexe 1 : Détails de l’enquête « Conditions de vie et aspirations des Français »
L’enquête Conditions de vie et aspirations des Français a été réalisée par le CREDOC, pour
le compte du SESSI.
Celle-ci a été menée en face-à-face, en décembre 2001 et janvier 2002, auprès d’un
échantillon représentatif de 2002 personnes âgées de 18 ans et plus. Elles ont été sélectionnées
selon la méthode des quotas. Ces quotas (région, taille d’agglomération, âge, sexe, catégorie
socioprofessionnelle) ont été calculés d’après les résultats du dernier recensement disponible en
France.
Afin d’assurer la représentativité par rapport à la population nationale, un redressement a été
effectué à partir des variables suivantes : âge, sexe, catégorie socioprofessionnelle et taille
d’agglomération.
106
Annexe 2 : Détails de l’étude « Corporate Citizenship »
L’étude Corporate Citizenship, a été menée conjointement par l’agence de publicité Bates
Belgium et le groupe Roularta.
Elle a été réalisée de juin à septembre 1997 et portait sur un échantillon de 794 personnes
représentatives de la population des 18 à 65 ans, ainsi que 60 chefs d’entreprises.
L’objectif de cette enquête était de mesurer l’impact de la citoyenneté sur le business
général de l’entreprise.
La définition choisie par Philippe Davister (Bates) et Diminique Catry (Roularta), pour
mener l’enquête est la suivante : Les entreprises apportent leur soutien à des actions de
solidarité, à des actions humanitaires ou autres comme la lutte contre la pollution, la
sauvegarde de l’environnement en donnant soit de l’argent, soit leur compétences, soit leur
temps, soit encore un cocktail des trois. Les résultats ont été classé en fonction de six thèmes :
acceptation globale, contraintes, secteurs économiques, type d’actions, return pour les
entreprises et acceptation du corporate citizenship comme outil marketing.
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Annexe 3 : Détails de l’étude « Compétition nationale des marques »
Le sondage La Compétition Nationale des Marques a été mené conjointement par trois
organisations à savoir, LDV/Bates, These Days et MSN. Ce sondage a duré 10 jours - du 27
janvier au 7 février 2003 inclus - en Flandre et en Wallonie, et exclusivement via MSN. Une
campagne média intensive sur MSN a constitué la base du recrutement des 17.833 participants.
500 marques, réparties en 33 catégories, étaient concernées par le concours. Pour chacune
des 33 catégories, deux questions étaient récurrentes : "Quelle est la marque que vous aimez le
plus?" et "Quelle est la marque que vous détestez le plus?".
En ce qui concerne les personnes interrogées, les Flamands ont été les plus nombreux à
participer à l’enquête, ils représentent 78% du panel. Pour chaque territoire linguistique, la
répartition entre les provinces correspond aux données de l'INS.
Les hommes et les femmes ont participé respectivement à concurrence de 54% et 46%. Cet
échantillon se situe entre la population totale et la moyenne de la population en ligne.
En ce qui concerne l'âge, les jeunes sont surreprésentés.
En terme de niveau d'instruction, il est représentatif du profil de l'internaute belge moyen.
Autrement dit, l’échantillon possède un niveau d’éducation légèrement supérieur à la moyenne
belge.
D’un point de vue socio-démographique, les 17.883 participants sont très comparables à
l'internaute belge moyen, hormis le fait qu'il y ait relativement plus de jeunes et de Flamands.