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ROBOTS Article écrit par Philippe COIFFET Prise de vue Les outils et les machines ont souvent été pensés depuis longtemps, mais leur réalisation physique ne pouvait alors aboutir en raison notamment de l'absence de techniques ou matériaux disponibles pour les fabriquer ou pour dépasser le stade de la maquette. Il en est ainsi de l'idée de robot qui n'a trouvé son nom que dans les années 1920 (comme conséquence du succès de la pièce de théâtre du tchèque Karel Chapek : R.U.R. ou Rossum's Universal Robots), pour désigner alors de petits êtres artificiels anthropomorphes répondant parfaitement aux ordres de leurs maîtres, et sa première réalisation industrielle vers 1960 (cf. automate). D'un point de vue scientifique, parmi les nombreuses définitions possibles du robot, on peut retenir qu'il s'agit d'une machine dont l'état de perfection future lui permettra de rendre tous les services qu'attend un homme d'un autre homme en matières d'actions matérielles. Et ce service pourra être rendu par la machine soit de manière complètement autonome (robot de substitution à l'homme), soit en collaboration avec un homme (robot de coopération). Le chemin est encore long avant d'atteindre la perfection souhaitée, car la machine doit associer des propriétés physiques complexes avec des propriétés intellectuelles non moins compliquées. Cependant, les verrous scientifiques et technologiques sautent les uns après les autres et on peut être très optimiste sur l'aboutissement de cette recherche. Ce qui crée une sorte de rupture entre les machines « classiques » (machine à coudre, moissonneuse-batteuse...) et le robot, c'est l'inspiration anthropomorphe qui préside à la conception de ce dernier, laquelle s'est d'abord manifestée par une volonté d'imiter le bras humain avec ses nombreuses articulations autorisant des gestes variés pour manipuler des objets. Cette recherche de performance manipulatoire correspondait essentiellement à un besoin pratique : d'une part, la manipulation de produits dangereux à distance, à la suite de la découverte de la radioactivité ; d'autre part, la 1

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Les outils et les machines ont souvent été pensés depuis longtemps, mais leur réalisation physique ne pouvait alors aboutir en raison notamment de l'absence de techniques ou matériaux disponibles pour les fabriquer ou pour dépasser le stade de la maquette. Il en est ainsi de l'idée de robot qui n'a trouvé son nom que dans les années 1920..

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ROBOTSArticle écrit par Philippe COIFFET

Prise de vue

Les outils et les machines ont souvent été pensés depuis longtemps, mais leur réalisation physique ne pouvait alors aboutir en raison notamment de l'absence de techniques ou matériaux disponibles pour les fabriquer ou pour dépasser le stade de la maquette. Il en est ainsi de l'idée de robot qui n'a trouvé son nom que dans les années 1920 (comme conséquence du succès de la pièce de théâtre du tchèque Karel Chapek : R.U.R. ou Rossum's Universal Robots), pour désigner alors de petits êtres artificiels anthropomorphes répondant parfaitement aux ordres de leurs maîtres, et sa première réalisation industrielle vers 1960 (cf. automate).

D'un point de vue scientifique, parmi les nombreuses définitions possibles du robot, on peut retenir qu'il s'agit d'une machine dont l'état de perfection future lui permettra de rendre tous les services qu'attend un homme d'un autre homme en matières d'actions matérielles. Et ce service pourra être rendu par la machine soit de manière complètement autonome (robot de substitution à l'homme), soit en collaboration avec un homme (robot de coopération). Le chemin est encore long avant d'atteindre la perfection souhaitée, car la machine doit associer des propriétés physiques complexes avec des propriétés intellectuelles non moins compliquées. Cependant, les verrous scientifiques et technologiques sautent les uns après les autres et on peut être très optimiste sur l'aboutissement de cette recherche.

Ce qui crée une sorte de rupture entre les machines « classiques » (machine à coudre, moissonneuse-batteuse...) et le robot, c'est l'inspiration anthropomorphe qui préside à la conception de ce dernier, laquelle s'est d'abord manifestée par une volonté d'imiter le bras humain avec ses nombreuses articulations autorisant des gestes variés pour manipuler des objets. Cette recherche de performance manipulatoire correspondait essentiellement à un besoin pratique : d'une part, la manipulation de produits dangereux à distance, à la suite de la découverte de la radioactivité ; d'autre part, la nécessité d'améliorer les transferts de pièces d'un poste à l'autre dans les industries de production.

La recherche sur ces nouvelles machines a engendré deux conséquences principales. D'un coté, elle est devenue une nécessité. En effet, ce dont on a besoin n'est pas une machine qui accomplit des gestes comparables à ceux du bras humain, c'est une machine qui fait œuvre utile en saisissant convenablement des pièces dans un lieu variable et en les reposant tout aussi correctement dans un autre endroit, lui aussi évolutif d'une saisie à l'autre. Un tel problème qui ne se posait pas avec les machines « classiques ». D'un autre coté, l'évocation d'un aspect anthropomorphique fait rapidement rêver d'aller plus loin dans cette imitation humaine, dans le contexte d'une technologie qui pourrait rapidement ne rien se refuser.

Depuis que le robot a donné lieu à une approche scientifique, après la Seconde Guerre mondiale, on peut résumer l'histoire de ses développements en deux périodes principales. Tout d'abord, l'époque de la robotique industrielle, qui s'étend jusqu'à la fin des années 1980. Le robot industriel, caractérisé par son implantation à poste fixe, devient alors un outil commun répondant correctement aux besoins de l'industrie et ses perfectionnements, continus depuis lors, peuvent être considérés comme des améliorations utiles mais mineures comparées aux progrès décisifs enregistrés antérieurement. La seconde période, depuis 1990, a vu la recherche se focaliser sur les robots mobiles que l'on peut répartir en deux grandes tendances :

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– ceux dont le système de locomotion est un véhicule (terrestre, aérien, sous-marin etc.)... L'objectif a trait à l'exécution de déplacements en mode automatique afin de reconnaître des cibles, inspecter des installations, déminer, forer... ou simplement se déplacer comme les voitures à guidage automatique. Ces véhicules peuvent être porteurs ou non de différents outils d'action : des robots « classiques », des machines spéciales, des armes... Si l'anthropomorphisme est présent, il concerne les propriétés de perception et d'intelligence ou de raisonnement de la machine et ne repose pas sur une évocation de l'homme dans son apparence physique.

– les robots humanoïdes et animaloïdes (ou zoomorphes) qui tentent de reproduire des comportements humains ou animaux en conservant une évocation de l'aspect physique de l'homme ou de l'animal en question.

Certes, la recherche sur les robots mobiles date de l'apparition de la robotique scientifique (par exemple le robot Shakey du Stanford Research Institute, vers 1970), mais elle restait handicapée dans ses résultats par la faiblesse des technologies disponibles et, par voie de conséquence, par l'absence d'applications pratiques pour lesquelles ce type de robot aurait pu donner satisfaction et trouver une promotion.

En ce début de xxie siècle, le tournant essentiel de la recherche en robotique se rapporte à la préoccupation d'une meilleure connaissance de l'homme, tant dans son psychisme que dans son corps, dans son comportement en société ou au travail, dans ses relations avec les machines, afin de transposer ces connaissances sur les robots pour trouver la stabilité et la convivialité avec les machines et préciser le rôle et la place adéquats de ces deux partenaires, sachant par ailleurs que la technologie disponible et toujours en progrès autorise de nouvelles ambitions. C'est ce qui explique que la biorobotique ait le vent en poupe et qu'une invasion de robots à l'image de celle, récente, de l'ordinateur portable ne soit plus à exclure dans quelques lustres.

I - Robotique

Dans les années 1970, quand les chercheurs ont commencé à réfléchir sur la conception de robots, on appelait « robotique » la science des robots et/ou l'art de concevoir et fabriquer des robots. Les succès des robots industriels, qui travaillaient initialement en poste isolé et qui ont été intégrés à des chaînes de production comme des machines parmi d'autres, ont conduit le public à élargir le sens du terme « robotique » et à le rendre désormais presque synonyme d'automatisation. Le correspondant de robotique devrait naturellement être « automatique » mais ce n'est pas le cas dans le langage courant. Pour compenser ce hiatus se sont créés le mot « robotisation » et le verbe « robotiser » pour désigner la plupart des automatisations et leur mise en œuvre, même en l'absence de véritables robots. Dans certains champs d'applications, des mots calqués sur robotique sont apparus. Il en est ainsi de « domotique » qui désigne tout ce qui concerne l'automatisation dans l'habitat ou « productique » pour tout ce qui a trait aux moyens de production.

Aujourd'hui, la robotique est donc l'art d'automatiser des systèmes plus ou moins complexes mais en s'appuyant sur le savoir-faire acquis par les études sur la conception de robots, savoir-faire issu des développements d'une branche de l'automatique générale. En effet, on constate a posteriori que la structure d'une machine ou d'un système n'a pas besoin d'adopter la forme physique de ce qu'on appelle généralement robot pour que son contrôle adopte les mêmes composants que ces machines, à savoir : des capteurs internes pour la régulation, des capteurs

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externes pour connaître l'environnement, des moyens d'action motorisés, ainsi qu'une informatique de commande pouvant faire appel à la programmation et aux techniques de l'intelligence artificielle par exemple (cf. 2. Le robot industriel). Tous ces composants et leurs actions peuvent être distribués dans l'espace au lieu d'être rassemblés ou de provenir d'une seule structure. Par ailleurs, une collaboration de divers ensembles est possible aboutissant donc à un système robotisé (on dit aussi système robotique) plus ou moins grand (les ateliers flexibles en sont un bon exemple).

Contrairement à l'évolution de la machine « robot », la robotique ne se dirige pas vers l'imitation du vivant ou vers son intégration (en dehors d'opérateurs surveillant le système ou intervenant sporadiquement sur ce dernier). Elle offre des solutions à des problèmes concrets par des moyens mécaniques ou informatiques sans inspiration anthropomorphique (pour le moment).

Quoique les applications de la robotique soient nombreuses, c'est surtout pour les opérations effectuées dans les usines qu'elle trouve son expression et son nom adapté à travers la productique. Celle-ci consiste à associer divers types de machines, dont des robots, afin d'améliorer la productivité. Cette association peut se faire de diverses manières en fonction des opérations. Par exemple, dans le montage d'un ensemble complexe comme celui qui conduit à la réalisation d'un véhicule, on fera les opérations successives en série (bien que plusieurs chaînes puissent travailler en parallèle) et chaque poste de travail sera doté de l'outil convenable, dont des robots qui travaillent soit automatiquement soit commandés par un opérateur. Pour la fabrication de pièces manufacturées (par usinage, pliage, formage, perçage etc.), on trouvera des cellules avec quelques robots pour les opérations de manutention et de positionnement de pièces et des machines à commande numérique pour l'usinage par exemple. La cellule robotisée est par essence flexible, c'est-à-dire qu'elle permet de fabriquer (par lots peu importants) des pièces différentes mais nécessitant le même type d'opérations avec des paramétrages adaptés suivant la pièce. Une cellule peut comporter des opérateurs pour des tâches manuelles ou bien être entièrement automatisée. Dans ce dernier cas (FMS, Flexible Manufacturing System), se pose le problème de la programmation du système. On peut aujourd'hui faire la conception d'une pièce et programmer sa fabrication sur un système adéquat en s'aidant de l'ordinateur (C.A.O., Conception assistée par ordinateur, et C.F.A.O., Conception et fabrication assistées par ordinateur, ou C.I.M., Computer Integrated Manufacturing). Le programme généré par C.F.A.O. est directement celui ou le même (émulateur) que celui qui va commander les machines du système de fabrication.

Naturellement, la conception d'un système de C.F.A.O. ne se limite pas à pouvoir réaliser un ensemble qui fonctionne en étant fiable et sûr. Les impératifs économiques sont les premiers qui s'appliquent pour, d'abord, faire le choix de ce mode de fabrication, puis pour déterminer sa structure et son organisation afin qu'il soit rentable. Cette évaluation se fait par des approches qu'on nomme « techniques de planning ».

De tels principes généraux ne se limitent pas aux industries mécaniques et à l'automobile. Ils sont utilisés, par exemple, dans la production d'appareils électroménagers, dans l'industrie des semiconducteurs, dans celle du meuble, de l'agro-alimentaire, de la chimie, des médicaments dans la construction de bateaux ou d'avions... En fait, dès qu'il y a production de biens, et que c'est possible et rentable, on trouve partout l'automatisation sous sa forme de robotisation parce qu'elle amène une flexibilité de la production (c'est-à-dire l'élaboration, avec le même système de production, de produits différents mais voisins) et l'adaptation en temps, volume et nature du produit à la demande.

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La robotique, depuis la fin du xxe siècle, a tenté de sortir des usines pour s'insérer dans les services : transport de matériels dans les hôpitaux, sécurité et surveillance, nettoyage des sols, assistance chirurgicale (cf. encadré Robotique appliquée et chirurgie), jeux et distractions... Les succès sont encore limités car une caractéristique du service est que la machine qui le rend doit être mobile, ce qui pose des problèmes de reconnaissance de l'environnement qu'on ne sait résoudre que dans des cas particuliers ou sous des contraintes qui permettent de se passer de cette fonction. C'est cependant ce secteur qui devrait fortement se développer dès que certains verrous scientifiques auront été levés (cf. 3. Le robot mobile, 4. Biorobotique).

Enfin, quant aux dimensions, on observe qu'à partir du robot « de base » transportant une dizaine de kilogrammes dans un volume d'1 mètre cube environ, on est allé vers « le haut » avec des robots transportant jusqu'à environ une tonne sur des distances de plusieurs mètres, et vers « le bas » en élaborant de tout petits robots pouvant contrôler des déplacements de l'ordre du micromètre dans quelques centimètres cubes, constituant ainsi ce qu'on nomme la microrobotique. On a encore tenté de réduire d'un facteur 10 à 100 ces paramètres pour arriver à la nanorobotique (cf. encadré La microrobotique) qui se fixe comme objectif la maîtrise du nanomètre (10—9 m, soit un millième de micromètre). À ce stade, on ne peut plus concevoir les robots à partir des principes de la mécanique classique. Ainsi, les forces prédominantes ne sont plus électromagnétiques mais font appel aux forces électrostatiques et aux forces de Van der Waals. En conséquence, la conception de ces machines relève de la microélectronique avec, par exemple, des actionneurs taillés dans la masse de silicium avec un rotor de quelques dizaines de micromètres (cf. microélectronique). Parmi les applications visées, on peut noter celle de l'envoi et du guidage de ces nanomachines dans le corps humain pour aller déposer des médicaments sur des zones très précises (cf. microsystèmes et nanotechnologies).

II - Le robot industrielLes différents composantsStructure mécanique

Le robot industriel est essentiellement un système mécanique articulé qui peut positionner et orienter un outil porté par son extrémité, de manière quelconque et désirée, dans un certain volume qu'on nomme espace atteignable du robot. Cet espace est celui qui est balayé par les articulations.

Les articulations peuvent être disposées en série (robot série, qui peut évoquer la structure d'un bras humain) ou en parallèle (robot parallèle). Le plus souvent, ce squelette possède six degrés de liberté : les trois premiers permettent le positionnement et constituent le « porteur » du robot ; les trois derniers forment l'organe terminal du robot et donnent la faculté d'orientation. Le porteur peut présenter plusieurs géométries en fonction du choix de la nature des articulations (translation ou rotation, fig. 1). L'organe terminal porte l'outil de travail qui dépend des tâches que l'on désire réaliser. Il s'agit souvent de pinces à deux ou trois doigts que l'on nomme préhenseurs. La plupart du temps, ces préhenseurs sont amovibles et peuvent être remplacés à la demande par d'autres outils (perceuse, ponceuse...).

Source d'énergie et motorisation

Pour animer ce squelette, il faut bien entendu le doter de moteurs, appelés actionneurs, qui doivent entraîner les articulations. Ils peuvent exploiter une énergie d'origine pneumatique,

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hydraulique ou électrique ; chaque type, associé à sa source d'énergie, a ses avantages et ses inconvénients vis-à-vis des critères d'utilisation prévus pour le robot.

L'énergie pneumatique présente quelques attraits : elle est disponible dans les ateliers, sa mise en œuvre est simple, le fluide n'est pas polluant, elle est bon marché et la maintenance des systèmes pneumatiques est aisée. Mais elle possède des défauts non négligeables : les actionneurs sont bruyants et le fluide est compressible, ce qui rend très délicate la réalisation d'asservissements dans leur commande. On rencontre des actionneurs pneumatiques sur les robots (ou manipulateurs) dits séquentiels, c'est-à-dire ceux dont les articulations se déplacent d'une position sur butée à une autre position sur butée sans possibilité d'arrêt intermédiaire. Les outils portés par les organes terminaux des robots sont souvent aussi à motorisation pneumatique (pince, perceuse...).

L'énergie hydraulique est celle qui développe la force ou la puissance la plus grande par unité de volume ou de poids d'actionneur. On la rencontre sur les robots devant déplacer des charges supérieures au millier de newtons (100 kg). Elle nécessite la présence d'une centrale onéreuse et a posé des problèmes d'étanchéité et de tuyauteries d'alimentation au niveau des articulations du robot, aujourd'hui bien résolus. En effet, compte tenu des pressions de fluide utilisées, les tuyaux deviennent rigides et introduisent des couples parasites s'opposant au déplacement des articulations.

L'énergie électrique rencontre en général la faveur des utilisateurs ainsi que celle des constructeurs de robots, surtout pour des charges inférieures à 1000 newtons, mais maintenant même bien au dessus. Il n'existe pas de pollution ou de fuite ; la commande peut être précise et fiable grâce à des asservissements robustes ; l'électricité, enfin, est présente partout.

Les actionneurs pneumatiques se présentent sous forme de vérins linéaires, ou même rotatifs, alimentés via des distributeurs à clapet ou à tiroir monovoie ou multivoie. Il en est de même pour les actionneurs hydrauliques où l'on rencontre des vérins linéaires à simple ou double effet ou à effet différentiel, ainsi que des moteurs rotatifs accompagnés de leurs servovalves. La plupart des types de moteur électrique ont été testés sur les robots. Les moteurs pas à pas, a priori attrayants parce que semblant à l'avance numérisés, sont très difficiles à maîtriser, car ils sont sujets à une influence considérable de la charge transportée, instables aux basses fréquences et nécessitant une commande onéreuse. On leur préfère les moteurs à courant continu à aimant permanent dont le couple de sortie, indépendant de la position et de la vitesse du rotor, permet une intégration aisée au sein de boucles classiques d'asservissement.

Les transmissions assurent le lien entre les sorties mobiles des actionneurs et les articulations à mouvoir. De nombreuses techniques sont utilisées : câbles, rubans métalliques, chaînes, courroies crantées ou non, engrenages... Les transmissions sont une source de difficultés car elles induisent des vibrations, des jeux et des frottements réduisant les performances des robots. C'est pourquoi on utilise fréquemment la technique de l'entraînement direct qui supprime les transmissions par insertion du moteur au sein de l'articulation, l'axe du moteur devenant l'axe de l'articulation. Mais ceci exige un accroissement des performances du contrôle.

Capteurs

Pour amener le robot dans une configuration articulaire désirée, c'est-à-dire à un endroit de l'espace atteignable avec la bonne orientation, il doit, d'une part, adopter une trajectoire parmi

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une infinité possible, en évitant les configurations interdites pour des raisons mécaniques ou de commande (singularités), choisir sa vitesse de déplacement et, d'autre part, « savoir » d'où il part et quand il est arrivé à la dite configuration pour s'y arrêter. Pour cela, il faut des capteurs qui renseignent à chaque instant sur la configuration du robot. On peut vouloir connaître l'état du robot (les valeurs des articulations et leur vitesse instantanée) soit par rapport à une configuration de référence, et les capteurs de position, vitesse ou même d'accélération mis en place sont appelés capteurs internes ou proprioceptifs, soit par rapport à l'environnement, ce qui est souvent nécessaire afin de saisir correctement des objets non positionnés de manière immuable par exemple. Les capteurs utilisés sont alors dits capteurs externes ou extéroceptifs.

Pour mesurer la position, tous les capteurs habituels peuvent être rencontrés sur les robots : potentiomètres résistifs linéaires ou rotatifs, transformateurs différentiels, résolveurs, capteurs capacitifs (pour des microdéplacements), capteurs optoélectroniques incrémentaux, codeurs absolus... L'information sur la vitesse est obtenue à l'aide de génératrices tachymétriques classiques ou bien par comptage d'impulsions ou bien par dérivation de la position. Les capteurs d'accélération sont parfois remplacés par une dérivation de la vitesse.

En ce qui concerne le choix des capteurs externes, il est évident qu'il dépend du travail que l'on souhaite confier au robot. Aussi bien, les constructeurs de robots ne peuvent avoir cette information sauf pour une fabrication spéciale à la demande. Ainsi, les capteurs utilisables comme capteurs externes sont réalisés par d'autres entreprises qui ne les conçoivent pas spécialement pour les robots.

Capteurs extéroceptifs et système perceptif

Lorsqu'on utilise un robot doté seulement de capteurs internes, on doit aménager l'environnement, programmer le robot et faire des essais afin de régler tous les paramètres qui lui permettent d'aller précisément au bon endroit et d'exécuter la tâche souhaitée. Le robot fonctionne alors en pur automate répétitif, sans différence de fond avec les automates anciens de Vaucanson. Le gros inconvénient est qu'à la moindre dérive de configuration ou de l'environnement, le travail ne s'exécute plus ; la pince par exemple ne saisit plus la pièce car elle n'est plus en position correcte. Or il y a toujours des dérives, surtout avec le temps. Pour remédier à cela il faut prélever de l'information sur l'environnement réel permettant de corriger « en ligne » la trajectoire du robot. C'est l'objet des capteurs externes.

La question est alors : quelle information pertinente doit-on prélever ? Il est impossible de répondre a priori puisqu'elle dépend de la tâche qu'on veut exécuter et de l'information déjà disponible et engrangée dans la mémoire de la commande. Tous les cas sont possibles et l'information pertinente peut être simple ou au contraire extrêmement complexe à extraire. Ce que l'on souhaite, c'est que le robot « comprenne son environnement », ce qui génère trois étapes : le prélèvement d'information, dans laquelle doit se trouver l'information pertinente, celle dont on a besoin ; l'extraction de cette information pertinente, étape qu'on peut nommer filtrage ; l'envoi de cette information au système de commande du robot qui va l'utiliser pour la correction nécessaire de la trajectoire. Cet ensemble matériel et algorithmique constituera le système perceptif du robot.

Un système perceptif faisant appel à des capteurs capables d'acquérir des informations à distance (comme le fait notre vision) ou au contact (comme le fait notre toucher) peut être d'un grand secours pour exécuter des tâches non complètement spécifiées à l'avance.

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Les capteurs au contact, nommés capteurs tactiles, sont utilisés pour la reconnaissance géométrique de l'environnement (par palpation). Lorsque l'information à acquérir concerne une force, un couple ou un moment, on parle de capteurs d'effort. Lorsque la mesure d'effort est intégrée au capteur tactile, on parle de capteurs haptiques (le sens haptique chez l'homme concerne le toucher et les forces qui s'y développent).

Les capteurs à faible distance, ou capteurs proximétriques, donnent des images de quelques points de l'environnement local en utilisant des rayonnements infra-rouges ou ultrasonores ou des variations de champ magnétique (pour les objets sensibles à ce champ). Les capteurs à distance fournissent des images détaillées de l'environnement plus global. Ce sont tous les types de caméras y compris celles qui enregistrent le relief. Les technologies de toutes ces caméras sont en amélioration constante. S'y ajoutent toutes les techniques à base de laser en faisceaux ou en nappes.

Système de commande

Tous les composants précédents (structure mécanique, moteurs et transmissions, capteurs internes et externes) étant en place, il reste à les utiliser correctement : c'est l'objet du système de commande du robot.

Il comporte nécessairement deux modules fonctionnels pouvant cependant s'appuyer sur la même structure physique. Le premier module sert à l'apprentissage du robot. Lorsque cette phase est terminée, le second module est mis en œuvre dans l'exécution de la tâche apprise.

Compte tenu des performances toujours plus élevées et des coûts toujours plus faibles de l'informatique, tous les robots industriels contemporains ont une commande assurée physiquement par des ordinateurs.

Le principe de fonctionnement

Un robot industriel peut posséder une, deux ou trois boucles de contrôle superposées, sans compter la boucle de supervision qui passe par l'opérateur le cas échéant.

La première est la boucle de régulation interne que l'on rencontre sur toutes les machines automatiques et qui met en jeu les asservissements des actionneurs. Lorsqu'une trajectoire à parcourir (définie par une suite de positions de chaque articulation) est connue à l'avance, le rôle des asservissements, en cours d'exécution, consiste à comparer à chaque instant la position réelle de chaque articulation (grâce aux capteurs internes) avec sa valeur calculée, et à agir sur le signal de commande des actionneurs afin d'annuler la différence. Les asservissements les plus utilisés sont de type linéaire. Ceci signifie que le comportement du système peut être représenté par des équations différentielles linéaires. Si cela est vrai pour la plupart des machines, ce n'est pas le cas pour les structures mécaniques articulées des robots dont les équations différentielles représentatives sont non linéaires. Mais, comme les asservissements non linéaires s'avèrent difficiles et onéreux à réaliser ainsi que peu fiables, on préfère conserver des asservissements linéaires en réglant très soigneusement leurs paramètres (par exemple en fonction de la charge transportée), ce qui semble donner satisfaction. Tous les robots possèdent cette boucle de régulation interne et le système de commande d'un pourcentage élevé de robots industriels se limite à cette seule boucle. La deuxième boucle, dite boucle réflexe, est une première boucle de prise en compte de l'environnement pour modifier la trajectoire du robot. En général, elle est traitée à partir de forces détectées entre le

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robot et l'environnement. Mais ces forces peuvent être réelles ou virtuelles. Un exemple d'utilisation de forces réelles est l'insertion dans un alésage situé dans l'environnement d'une tige localisée dans la pince du robot. Lorsque les erreurs d'orientation et de positionnement de la tige au bord de l'alésage ne dépassent pas un certain niveau, des capteurs d'efforts inclus dans un système mécanique légèrement déformable appelé poignet compliant permettent de calculer les corrections d'orientation et de position à effectuer sur la pince du robot pour que l'insertion s'effectue correctement. Un exemple d'utilisation de forces virtuelles est l'évitement d'obstacles à partir de capteurs proximétriques situés sur le robot. La distance détectée entre le capteur et l'obstacle est traduite en forces ou couples à appliquer sur les actionneurs pour s'éloigner de l'obstacle ou bien le suivre à distance. Ce système peut être utilisé « à l'envers » pour, au contraire, se rapprocher de manière contrôlée d'un objet d'intérêt, pièce à saisir par exemple. Un certain pourcentage de robots industriels est doté, souvent par l'utilisateur, de telles boucles réflexes qui peuvent aussi servir pour la sécurité des personnes.

Dans une troisième boucle, qu'on peut nommer boucle de réflexion ou de raisonnement, on part directement de la description de la tâche à accomplir (ce qui suppose un langage de description de tâches) pour engendrer automatiquement le programme permettant de l'exécuter. Un générateur de plan décompose la tâche en une succession de sous-tâches, chacune d'entre elles pouvant se traduire sous forme d'une trajectoire ou d'une suite de trajectoires exécutables. Mais cette analyse se fait hors ligne à partir d'une connaissance de l'environnement donnée a priori ou acquise par des capteurs extéroceptifs dans une phase d'apprentissage. Elle ne tient donc pas compte des perturbations immanquables qui se produiront lors de l'exécution réelle de la tâche. Ainsi, les capteurs qui vont détecter et permettre d'identifier ces dysfonctionnements en ligne doivent réagir sur le générateur de plan pour qu'il modifie sa stratégie d'action. En cas de succès, on a une véritable auto-adaptation du robot à son environnement. Ces procédures font appel aux techniques de l'intelligence artificielle (cf. encadré Intelligence artificielle et robotique).

Dans la pratique industrielle, rarissimes sont les robots qui font appel à des générateurs de plan. On préfère largement faire la programmation de la tâche par des moyens classiques ou en utilisant les techniques de C.A.O. et laisser à l'opérateur la possibilité d'intervenir sous des formes variées en cas de dysfonctionnement. La raison tient à la complexité, au peu de fiabilité de ces générateurs, et, enfin, à ce qu'ils sont plus prévus et utiles pour des robots mobiles que pour des robots à poste fixe (dont les tâches sont peu variées dans les applications pratiques). L'intervention de l'opérateur peut aussi être considérée comme prenant place au sein d'une boucle ultime, appelée boucle de supervision.

Apprentissage du robot

Un robot ne peut exécuter une tâche que si, dans une phase préliminaire, on lui a donné les éléments permettant cette exécution. Ces derniers comportent deux parties :

– L'operating system, c'est-à-dire les programmes et algorithmes permettant d'accomplir des actions de base ou primitives paramétrables et de les enchaîner. Cette partie est figée et l'opérateur n'intervient pas sur elle.

– Les éléments qui varient d'une tâche à l'autre, c'est-à-dire l'enchaînement ad hoc des primitives et les valeurs des paramètres de chaque primitive. Cette partie est à la charge de l'opérateur, et la manière dont ces éléments sont introduits constitue le mode d'apprentissage du robot.

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Le développement exponentiel de l'informatique a conduit à une expansion de l'usage de la C.A.O. pour programmer les robots. Cela offre l'avantage de ne pas immobiliser un robot pendant son apprentissage puisque la programmation se fait hors ligne, en utilisant un simulateur de comportement du robot en question et non le robot lui-même. Si le simulateur est fiable, c'est-à-dire fidèle par rapport au robot physique, le programme généré par l'opérateur avec le système de C.A.O. est identique au programme de commande du robot réel et peut être directement transféré dans la console de commande du robot. Il n'est cependant pas rare que de petits ajustements soient nécessaires a posteriori, le simulateur n'étant pas absolument parfait.

Avant l'apparition et la généralisation des systèmes de C.A.O. pour cette application, l'apprentissage se faisait avec le robot lui-même grâce à des commandes manuelles (lesquelles restent présentes sur les robots en cas de nécessité). Ces dernières pouvaient prendre des formes variées : « bras maître » de même morphologie que le robot (appelé en la circonstance « bras esclave ») ; manche à balai ou joystick possédant le même nombre de degrés de liberté que le robot ; pantin, structure légère ayant la même géométrie que le robot à commander. La méthode d'apprentissage la plus ancienne consistait à saisir manuellement l'organe terminal du robot et à lui faire décrire la trajectoire désirée. Un système mémorisait en permanence les valeurs des articulations, ce qui autorisait, postérieurement, une recopie des mouvements.

Performances, classifications, usages

Les performances d'une machine s'évaluent à l'utilisation mais on doit les prévoir dès la conception en n'oubliant aucun paramètre déterminant. Ceci n'est pas possible avec les robots de par leur structure mécanique articulée qui engendre une précision et un temps d'exécution dépendant de la partie de l'espace atteignable où l'on travaille, des trajectoires utilisées pour y arriver, et enfin de la charge transportée. Par ailleurs, deux robots réputés identiques n'ont en fait pas exactement les mêmes performances (comme les voitures...). Les constructeurs garantissent donc des performances moyennes ou minimales tout en vendant les robots à partir de leurs performances maximales (comme les voitures...).

Dans la phase de développement des robots industriels, approximativement entre 1975 et 1985, le problème de la normalisation s'est posé, et ceci de manière d'autant plus aiguë qu'à cette époque on comptait plus de 300 constructeurs de robots de par le monde. En 2006, il n'en restait qu'une dizaine, les trois quarts étant japonais. Ce problème s'est traduit, entre autres, par la nécessité de classer les robots puisqu'ils étaient largement différents dans leurs dimensions, dans leur nombre de degrés de liberté, dans les charges transportées, dans leurs moyens de commande, dans leur rapidité et précision... Les progrès technologiques et surtout ceux de la commande informatique ont rendu désuètes et inutiles ces classifications dont la plus connue était celle qui était proposée par la J.I.R.A. (Japan Industrial Robot Association).

En 2006, plus d'un million de robots industriels étaient en service de par le monde. Outil généralisé des constructeurs automobiles pour l'assemblage, la peinture, la soudure par points, etc., on les rencontre aujourd'hui dans de très nombreuses autres industries ou services. Ainsi, des camions sont souvent équipés de robots hydrauliques à commande manuelle pour le chargement et déchargement des marchandises.

III - Le robot mobile

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Même si l'industrie a besoin de mobilité, elle résout facilement ce problème avec les véhicules filoguidés ou sur rails etc., les conditions d'exploitation (atelier flexible par exemple) permettant un aménagement de l'espace. Aussi, on ne saurait y parler de véritables robots mobiles, lesquels sont caractérisés par la recherche de trajectoires variables et non définies à l'avance, posant ainsi des problèmes bien plus complexes que le robot à poste fixe. En effet, ce dernier se trouve dans un environnement a priori figé, avec de faibles variations correspondant soit à la succession des opérations d'exécution de la tâche soit à des perturbations limitées. On peut instrumenter cet environnement et/ou l'aménager pour limiter ou supprimer l'information qu'y doit prélever le robot pour exécuter sa tâche, d'où la relative simplicité de son système de commande. Par ailleurs ce robot est accessible à l'homme qui l'a « sous la main » pour le contrôler, le surveiller ou le réparer.

À l'opposé, le robot mobile, par nature, se caractérise par son éloignement de l'homme et par un environnement en permanence évolutif, ce qui engendre deux classes de problèmes dont les solutions efficaces en mode automatique n'existent encore que dans des cas particuliers fortement contraints (ou fortement simplifiés par rapport au cas général).

Distance homme-robot

La situation dans laquelle le robot est éloigné de l'homme se manifeste suivant deux type de cas :

– dans le premier, le robot est à poste fixe mais dans un lieu interdit d'accès à l'homme par les dangers que présente le milieu (eau, vide, radioactivité, risque d'explosion...). C'est typiquement le cas des milieux dits nucléaires où le problème de l'intervention se pose depuis longtemps (dans les centrales, par exemple) et a dû être résolu avec les moyens disponibles à chaque époque. Le mode d'intervention commun est connu sous le nom de téléopération ou télémanipulation.

– dans le second, le robot est véritablement mobile, ce qui soulève deux types de difficultés. Soit le véhicule a pour seule mission l'inspection de lieux à des fins de reconnaissance. Dans ce cas, deux questions se posent : celle de la reconnaissance du terrain ou de l'environnement pour être capable de progresser ; celle de la reconnaissance de « la bonne route » et des « cibles » imposées par la mission. Soit le véhicule est, de plus, doté d'outils afin d'exécuter des tâches physiques déterminées dans des lieux bien précis (prélèvement d'échantillons, d'objets, démontage, assemblage etc.). Ceci est aussi le cas des robots qui devraient se comporter correctement au milieu de la société humaine (robot « domestique »). Les problèmes de contrôle et de reconnaissance s'en trouvent considérablement complexifiés puisque c'est comme si on avait un robot pour agir sur l'environnement monté sur un robot de transport, les deux devant agir de manière coordonnée pour n'en plus faire qu'un.

Dans tous les cas, on doit considérer le système tripartite : robot-environnement-opérateur humain avec ses interactions. Le niveau d'automatisation de l'exécution des tâches par le robot dépend des informations pertinentes exploitables. Ces dernières peuvent pour partie être stockées à l'avance ou prélevées en ligne et réparties dans la mémoire de l'ordinateur de commande et/ou dans le cerveau de l'opérateur humain. Une partie peut aussi n'être accessible ni au robot ni à l'opérateur, ce qui oblige à tester des hypothèses (avec le risque qu'aucune ne soit valide). La répartition et le niveau de complétude des informations pertinentes accessibles limitent le niveau d'automatisation. En effet, pour réaliser une tâche, il est nécessaire de disposer d'un certain nombre d'informations. Toutes ces informations peuvent être acquises

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avec des capteurs ou engrangées à l'avance. Lorsque certaines d'entre elles ne peuvent être obtenues par ces moyens, il est impossible d'automatiser complètement le système et l'homme doit rester présent pour compenser ce déficit. La complétude de l'information pertinente est donc impérative pour une automatisation intégrale de l'exécution d'une tâche. Le niveau d'automatisation est donc éminemment variable et fonction de chaque cas particulier, non seulement d'un cas à l'autre mais tout au long de l'exécution d'une tâche. Ainsi cette exécution peut passer par les quatre stades : impossibilité d'exécuter l'opération prévue, commande de l'opération (à distance) totalement à la charge de l'opérateur (commande manuelle), commande de l'opération totalement automatique, commande de l'opération par coopération homme-robot.

Solutions classiques

Les systèmes de télémanipulation pour le nucléaire, qui furent développés dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, furent conçus comme deux bras de robots motorisés et symétriques, à six degrés de liberté, reliés par des transmissions à câbles (limitant de facto leur distance à deux ou trois mètres). L'un, appelé bras maître, était manipulé par un opérateur. L'autre, appelé bras esclave, reproduisait les mouvements appliqués au bras maître. Le retour d'information visuelle vers l'opérateur se faisait par vision au travers d'une fenêtre protectrice des rayonnements et par des jeux de miroirs. Le système étant mécaniquement réversible, le retour d'information des efforts était naturellement transmis par la mécanique à câbles. On arrivait ainsi à manipuler des objets à courte distance, mais péniblement et lentement.

Une importante amélioration se produisit, au milieu des années 1970, lorsque les transmissions devinrent électriques, permettant d'agir à plusieurs centaines de mètres, la limitation venant des longueurs limités des câbles, l'information visuelle de retour à l'opérateur bénéficiant de caméras embarquées et asservies sur la zone mobile de manipulation et l'information d'effort étant rétablie par des retours de couples artificiels adéquats. Toutefois, ces retours visuels sur écrans ne rétablissant que très mal la situation tridimensionnelle de la zone de travail, la manipulation restait délicate et exigeait un opérateur très entraîné. Dans les années 1980, l'informatique a permis de mettre en œuvre des systèmes de téléopération assistée par ordinateur (T.A.O.) ce qui, entre autres conséquences, a fait sortir la téléopération du seul champ étroit des applications nucléaires.

Nouvelles approches

Les nouvelles approches sont issues des développements très importants des technologies de l'information et de la communication, et d'une meilleure compréhension du couple « homme-machine » qui permettent de fusionner les deux problèmes évoqués plus haut de la distance à l'homme et de la compréhension en ligne de l'environnement. Elles font appel à la notion de simulation, aux techniques de réalité virtuelle et à la prise en compte de nouvelles dimensions de l'opérateur humain dans son interaction avec la machine.

Locomotion

Par définition, un robot mobile doit être doté d'un système locomoteur. Ce dernier comporte deux parties : la source d'énergie, qui permet la propulsion, et le système locomoteur proprement dit, qui utilise cette énergie pour progresser.

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Les robots aériens, marins, sous-marins, spatiaux utilisent les moyens classiques propres à leur milieu spécifique. On peut diviser les robots terrestres en trois catégories : ceux qui utilisent des parcours aménagés (route, rail...) et dont la locomotion est bien classique et connue ; ceux dits « tout-terrain » qui devraient en principe se mouvoir en environnement naturel et qui utilisent des équipements du type chenilles ou roues et chenilles etc. (en fait, ils se trouvent impuissants dans la plupart des reliefs) ; enfin ceux qui s'appuient sur des modes de locomotion inusuels avec l'ambition de se déplacer sur toute sorte de terrains, quelles que soient leurs difficultés. Ce sont surtout ces derniers qui sont étudiés en robotique car ils doivent concilier des déplacements à l'intérieur de bâtiments (monter des escaliers par exemple) avec des déplacements en extérieur sur des terrains non préparés et accidentés (fossés, boue, montagne...).

D'un point de vue conceptuel, si on cherche à fabriquer une machine pouvant se promener « n'importe où », il faut d'abord répertorier ou imaginer l'ensemble des cas de figure des terrains qu'elle pourra rencontrer et générer un système ad hoc, ce qui s'avère extrêmement difficile pour le déplacement terrestre en milieu non préparé (puisque même les véhicules militaires prévus pour cela se trouvent souvent en échec). Cependant, si le milieu d'évolution est très spécifique, il est possible de trouver une solution. C'est le cas des robots qui doivent inspecter ou réparer des tuyaux en progressant à l'intérieur par exemple. Bien entendu, sorties des tuyaux, ces machines ne sauraient se déplacer.

Une autre approche conceptuelle consiste à se demander s'il existe des êtres vivants qui arrivent à aller à peu près n'importe où et à savoir si on peut imiter leur système de locomotion, voire l'améliorer en s'inspirant d'eux. Or de nombreux types d'animaux ont cette propriété tels les serpents, les insectes non volants, les araignées, certains mammifères quadrupèdes, certains oiseaux marcheurs, et, bien sûr, l'homme (cf. 4. Biorobotique).

C'est pourquoi, en matière de locomotion, l'accent de la recherche est mis sur les systèmes à pattes (bipèdes, quadrupèdes, hexapodes, robots rampants), ainsi que sur des combinaisons du genre « multisystème de locomotion » permettant de mettre en œuvre le mode qui s'adapte le mieux au terrain traversé (par exemple, multisystème « roues et pattes » ou « chenilles et pattes »...).

Compréhension de l'environnement et de la tâche à réaliser

En supposant que le robot soit capable de se déplacer, il reste la question essentielle de son utilité, c'est-à-dire de sa capacité à remplir une mission. Si celle-ci ne relève que de la prise d'information, de l'inspection, il faut néanmoins que la machine se dirige correctement vers la zone à inspecter. Le robot doit donc savoir où il est par rapport à deux références : celle de l'opérateur et celle de sa destination. Si on suppose le robot totalement autonome, on commence par lui donner une sorte de carte a priori et l'endroit où il doit se rendre. L'élaboration du chemin suivi sera effectuée par le robot à partir d'un générateur de plan prenant en compte toutes les informations disponibles a priori. Elle sera mise à jour en ligne en fonction des obstacles qu'il va rencontrer et devoir contourner ou des repères l'aidant à se guider. Pour connaître, à chaque instant, la localisation du robot, on utilise des systèmes de GPS devenus très précis. Plusieurs approches algorithmiques de mise à jour du parcours ont été étudiées. Les plus récentes utilisent le but à atteindre comme un attracteur du robot. La notion d'attracteur est bien connue en mathématique. Dans le cas du robot, on peut prendre comme image celle de la boussole dont l'aiguille renseigne en permanence sur la direction du pôle nord qu'on peut considérer comme un attracteur si le robot adapte en permanence sa

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direction de progression suivant l'indication de la boussole. Le pôle nord est remplacé par la situation du but géographique à atteindre qui est donnée au robot. Ce dernier se dirigera toujours vers ce but tout en négociant les obstacles l'obligeant à des contournements.

Mais au-delà de cette vision théorique, le robot ne saurait progresser sans avoir et utiliser en permanence des informations sur son état d'équilibre cinématique et dynamique, sur la nature du terrain et sur les éventuels obstacles de son environnement (rocher, arbre, mur...). Son état lui est fourni par l'ensemble de son système proprioceptif. La nature du terrain nécessite un ensemble de capteurs extéroceptifs de contacts délicats à bien implanter. La détection des obstacles peut se faire également avec des capteurs de contacts, de force, des capteurs proximétriques et des systèmes de vision. Le point difficile réside dans le choix de ces capteurs, dans le choix de leur implantation et dans leur exploitation car la décision à prendre concernant le mouvement suivant va résulter d'une analyse de toutes les informations.

Lorsque le robot arrive dans la zone désirée, sa véritable mission d'inspection peut commencer. Le cas de figure le plus simple a trait à l'usage de caméras diverses qui renvoient des images à un opérateur. C'est alors, de fait, l'opérateur qui inspecte et peut orienter convenablement les caméras ou même commander manuellement le robot sur de très courtes distances. Dans certains cas, on souhaite que l'inspection soit automatique. C'est le cas, par exemple, pour un robot sous-marin devant suivre et inspecter la côte d'un lac ou d'une mer. Il faut alors passer par des traitements d'images, souvent tridimensionnelles, en provenance de capteurs à la technologie adaptée (caméras à ultra-sons ou optiques ou lasers...) dont la variété n'a d'égale que leur complexité d'exploitation.

Lorsque le robot doit ajouter à une fonction d'inspection une fonction d'action sur l'environnement, le problème à résoudre devient encore plus complexe, et, à l'exception de quelques cas de travail très simple en matière de robotique spatiale, il n'est pas encore convenablement résolu si on exclut l'opérateur humain de la boucle de commande/contrôle. Cela suggère d'ailleurs de nouvelles orientations en matière de coopération homme/robot.

Pour agir, il faut que le robot soit bien « positionné », ce qui implique que sa partie « véhicule » soit placée de telle sorte que le volume atteignable (en position et orientation) par l'outil qui va agir englobe l'objet d'intérêt (objet sur lequel il doit agir). Outre la reconnaissance de la nature de l'objet d'intérêt, il est nécessaire d'avoir une reconnaissance géométrique et dimensionnelle. On retrouve l'exigence de la présence d'un système extéroceptif multicapteurs et celle d'une exploitation des informations alliant traitement d'images, mesures de distance, mesures de couples et de forces etc. Ces systèmes restent encore à l'état d'études ou de prototypes. Dans les applications pratiques, l'opérateur humain joue le rôle principal et tout travail ainsi téléopéré demeure délicat et long.

La question de fond ou le problème décisionnel

Avec le système robot-homme-environnement, on est en présence de trois agents qui interagissent : l'environnement est généralement passif mais réactif ; le robot n'a d'initiative que celle qu'on sait lui donner ; l'homme possède la plus haute capacité d'analyse et d'adaptativité. On pourrait néanmoins désirer se diriger vers un système suffisamment habile et intelligent qui fonctionnerait sans la présence de l'homme (pour l'ensemble des tâches complexes et variées généralement exécutées par un homme). Or ceci n'est ni encore possible, ni peut-être souhaitable dans sa totalité. Dans l'état actuel des connaissances, la machine restera limitée tant physiquement que mentalement et restera sensible à des

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dysfonctionnements et des pannes pouvant entraîner des conséquences graves. Même supposée aussi performante que l'homme, elle restera limitée, comme l'homme qui fait des erreurs et est sujet à des accidents (il n'y a pas de risque « zéro »). Cependant, il est possible de transférer une partie déterminante des décisions de l'homme vers le robot. En conséquence, la question qui se pose est la suivante : quels rôles et « responsabilités » doit-on attribuer respectivement à la machine et à l'opérateur humain en matière de décisions d'actions dans la conduite du système robot-homme-environnement ?

Cette question n'a pas encore trouvé de réponse scientifiquement inattaquable. D'un coté, les tenants de l'intelligence artificielle posent comme principe que les propriétés du cerveau humain sont parfaitement imitables et remplaçables par l'informatique. De l'autre, on a l'expérience de catastrophes qui ont pour origine des erreurs humaines successives qui auraient pu être évitées par une automatisation plus poussée du système en cause, et des exemples opposés où l'automatisation a créé des situations dangereuses qu'on aurait pu éviter par des reprises manuelles. Cette question est d'autant plus d'actualité à l'heure où l'avion de ligne entièrement automatisé (sans pilote) est parfaitement réalisable d'un point de vue technologique et fait l'objet de vifs débats entre les tenants et les adversaires de cette solution.

En ce qui concerne le robot mobile, le problème apparaît de la manière suivante. Pour certaines missions, ou certaines parties non négligeables à l'intérieur d'une mission, on est capable de réaliser des systèmes au comportement totalement autonome. La question précédente se pose donc principalement pour des questions de sécurité ou de modification de mission au cours de son exécution. D'autres missions sont trop complexes pour élaborer leur automatisation totale. L'homme restera dans la boucle d'abord pour cette raison. De toute manière, ce que l'on désire ce sont des robots efficaces, sûrs et conviviaux avec l'homme, ce qui n'implique pas obligatoirement un comportement totalement autonome.

Interface homme-machine

L'informatique, dans son développement exponentiel en matière de capacité mémoire, de vitesse de fonctionnement, de réduction de volumes et de coûts, a rendu l'essentiel des machines multifonctionnelles, mais, en retour, a généré des difficultés nouvelles en matière de convivialité avec l'homme ou de facilité d'usage. Ce problème d'ergonomie des machines a pris de l'ampleur et est devenu une préoccupation importante des utilisateurs qui est renvoyée aux concepteurs.

Pour les robots, la difficulté de conception d'une interface avec l'homme est d'autant plus grande que s'y ajoute impérativement, par rapport aux machines « classiques », la prise en compte du problème décisionnel exposé plus haut (à chaque instant, à qui confier la commande de la machine ?) Par ailleurs, les conditions souhaitées d'utilisation du robot ont une grande influence sur la conception de l'interface. En effet, dans de nombreuses applications, le souhait peut être de minimiser le rôle de l'homme pour favoriser une exécution de tâche plutôt automatique. Mais si le robot est destiné à être un « partenaire » de l'homme et à exécuter des tâches au milieu des hommes, l'interaction avec ces derniers devient un objectif et la qualité de l'interface est alors primordiale.

Le rôle général d'une interface est d'informer l'opérateur sur l'état du système robot-environnement de telle manière que cet opérateur puisse réagir correctement sur la commande du robot (en s'appuyant aussi sur d'autres connaissances relatives au passé, au présent et au futur projeté du système robot-environnement). On peut aussi dire que l'interface informe

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l'opérateur sur l'état de la tâche en cours d'exécution (par le système robot-environnement) pour que, en retour, cet opérateur soit à même de faire progresser correctement l'exécution de cette tâche. L'interface a donc deux fonctionnalités : information dans le sens robot vers opérateur et commande en retour dans le sens opérateur vers robot.

La conception d'interface doit ainsi répondre aux questions suivantes : quelles informations sont-elles à prélever sur le système robot-environnement et comment les transmettre et les présenter à l'opérateur ? Sur quels actionneurs du système robot-environnement l'opérateur doit-il pouvoir agir en retour et au travers de quels moyens ? Il s'agit donc de résoudre le problème de la détermination des informations à prélever et à transmettre, et des possibilités technologiques de le faire, puis celui de la détermination des actionneurs et des possibilités technologiques d'agir via l'homme sur eux, en considérant comme critères l'efficacité de cette boucle de commande et, parmi les conditions de cette efficacité, la bonne adaptation à l'homme de l'interface, c'est-à-dire le respect de son ergonomie physique, sensorielle et mentale. Il tombe sous le sens que la nature du robot et de son usage particulier vont influencer grandement les choix de conception de l'interface.

Bien qu'il soit très difficile de concevoir une interface « universelle », la complexité des projets d'utilisation de robots mobiles amène à se pencher sur ce sujet et les travaux les plus récents s'appuient sur les techniques de réalité virtuelle.

Réalité virtuelle

Le principe de la technique dite de réalité virtuelle s'appuie sur la simulation interactive de scènes. Ce sont, là encore, les progrès en matière d'informatique qui ont permis son émergence après 1990, sa maîtrise n'étant pas encore totale aujourd'hui.

Si le principe de la simulation informatique d'une scène ou d'un processus et de sa visualisation pour un utilisateur est relativement ancien, l'interactivité scène-opérateur est une donnée nouvelle aux conséquences importantes.

La caractéristique de base de la réalité virtuelle est la possibilité d'immersion de l'opérateur dans un monde créé informatiquement, c'est-à-dire que l'opérateur va ressentir l'impression ou même croire qu'il se trouve au sein d'un monde nouveau, le monde artificiel, qu'il va y évoluer et interagir avec lui comme s'il s'agissait d'un monde réel.

La condition de l'apparition d'un tel phénomène est simple sur le plan des principes mais complexe à réaliser avec quelque perfection. En effet, on comprend que si le monde virtuel envoie à l'opérateur, dans leur totalité, les mêmes signaux sensoriels que ceux qui seraient émis par le même monde, mais réel, et si le monde virtuel réagit aux commandes de l'opérateur de la même manière que le ferait le même monde réel, cet opérateur ne peut plus distinguer le monde réel et le monde virtuel équivalent et peut se croire à l'intérieur d'un nouveau monde bien réel alors qu'il ne s'agit que d'une illusion.

L'homme appréhende le monde réel grâce à son système sensoriel complexe, dont tous les secrets ne sont pas encore connus (en particulier le lien entre une excitation sensorielle et son interprétation par le cerveau). Ce système naturel présente la particularité de faire coopérer les différents sens pour décrypter le monde, et cette coopération aussi n'est pas encore bien identifiée. Le monde virtuel peut cependant s'adresser à l'opérateur via sa vision – images tridimensionnelles rétablies au travers d'un casque de visualisation (H.M.D., Head Mounted

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Display) ou d'un C.A.V.E. (Cave Automatic Virtual Environnement), enceinte où des images sont projetées sur tous les murs (y compris plafond et plancher) et à l'intérieur de laquelle se tient l'opérateur, ou encore d'autres systèmes – via son sens du toucher et des efforts (sens haptique), au travers de gants de données à retour d'efforts (dataglove) ; via son audition (son tridimensionnel à distinguer du son stéréoscopique : la source de son doit rester fixe dans l'espace quand l'opérateur se déplace alors que la source de son stéréoscopique reste fixe par rapport à l'opérateur quand ce dernier se meut) ; via même son odorat (émissions adéquates d'odeurs)...

Quant à l'action que doit développer l'opérateur sur le monde virtuel, elle peut passer par bien des systèmes de commande et aussi par des ordres oraux. Le système le plus général est le dataglove (gant instrumenté porté par l'opérateur) qui permet de « toucher » les objets de la scène virtuelle, de les saisir et les déplacer, et de réaliser toutes les manœuvres ordinaires sur des objets en les ressentant comme s'ils étaient réels, avec leur propre élasticité.

La technologie sur tous ces points souffre encore d'imperfections. Les ordinateurs doivent être très puissants pour traiter des images très complexes en temps réel par exemple. Un autre handicap est la méconnaissance du fonctionnement de l'intégration des sens chez l'homme qui lui permet d'identifier naturellement le monde. Par ailleurs, un sens comme le toucher est distribué sur tout le corps de l'homme et pose des difficultés techniques de rétablissement adéquat. Enfin, plus on veut exciter de sens chez l'homme, plus il faut de capteurs et ceci se traduit par un harnachement de l'opérateur qui peut annuler l'effet recherché d'immersion dans le monde virtuel. On cherche aujourd'hui à n'équiper l'opérateur que de capteurs qui fonctionnent sans contact.

Quoi qu'il en soit, l'usage de la réalité virtuelle préfigure l'interface idéale homme-robot-environnement. Elle permet en particulier d'ouvrir une piste pour la commande/contrôle de robots situés à distance. En effet, dans ce cas, le monde virtuel va être une copie pertinente et en permanence remise à jour de la scène à distance concernant le robot et son environnement. L'opérateur est immergé dans cette scène et se trouve ainsi artificiellement près du robot et dans son environnement immédiat, grâce à l'interface. Il devient donc à même d'agir à bon escient sur la commande du robot par ce moyen. Les moyens de commande en eux-mêmes peuvent être très variés.

L'utilisation de la réalité virtuelle permettant l'accès virtuel à des lieux inaccessibles a ainsi engendré le concept de téléprésence et même, au-delà, celui de téléexistence, deux nouveaux domaines de recherche actifs. Avec la téléprésence l'opérateur est artificiellement transporté sur la scène d'intérêt pour les tâches ; avec la téléexistence, l'opérateur, est, de plus, virtuellement transporté « dans » le robot qui travaille à distance ; il devient le robot et ressent donc les limites de ce nouveau corps.

IV - La biorobotique

S'il est une chose claire en robotique scientifique, c'est la suivante : on cherche avec une machine, si possible automatique, à réaliser des tâches qui, jusqu'ici, étaient exécutées par des hommes, soit à mains nues, soit en s'aidant d'outils manuels simples et passifs. Cette substitution à l'homme ne saurait se faire sans rappel des fonctions et caractéristiques de l'homme. Le développement de la robotique se trouve donc entraîné, peut-être par manque d'imagination, sur un terrain qui croise des données de l'anthropomorphisme dont celles ayant trait au fait que l'homme est un être vivant.

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Un pas décisif dans cette direction est initié par l'évolution des tâches qu'on souhaite confier au robot. On est passé de tâches industrielles à poste fixe, relativement répétitives et programmables à l'avance, à des missions où l'adaptation permanente et immédiate du robot aux nouvelles données d'un environnement relativement inconnu à l'avance exige des capacités physiques, sensorielles et mentales de plus en plus proches de celles de l'homme.

Par ailleurs, une autre ambition récente de la robotique est l'intégration des robots dans un environnement humain. On constate alors qu'agir dans cet environnement est plus aisé si le mode de locomotion du robot offre les mêmes performances que celle de l'homme, en volume occupé, en agilité et en capacité de franchissement d'obstacles divers. Il n'y a certes pas que la locomotion bipède humaine (que l'on transforme parfois en locomotion quadrupède quand on est à quatre pattes ou en locomotion serpentiforme quand on rampe...) qui puisse satisfaire les contraintes environnementales de la société humaine. Mais on ne peut nier l'intérêt du mode de locomotion de l'homme si on peut l'imiter correctement. De même, les tâches matérielles demandées au robot étant celles habituellement exécutées par l'homme, le système de manipulation ne saurait trop s'éloigner de celui de l'homme pour répondre en toute occasion aux demandes de ce dernier. Enfin, agir en coopération ou en symbiose avec l'homme d'une manière similaire à celle d'un compagnon ou d'un collègue de travail suppose une communication homme-robot qui imite la communication homme-homme. Or celle-là est à la fois gestuelle et orale. Enfin, psychologiquement, l'homme trouvera plus de motivations d'échanges avec une machine humanoïde qu'avec une machine d'apparence vraiment différente.

Tout ceci incite à passer de la robotique à la biorobotique qui fait référence au vivant en général, au-delà de l'humanoïde ou de l'androïde que nous venons d'évoquer.

La biorobotique non anthropomorphe

La biosphère ne comporte pas que des humains mais une infinité d'espèces animales, de la bactérie au mammifère, et une infinité d'espèces végétales, du champignon au séquoia géant.

Comme le robot recherché doit être mobile, le règne végétal n'est pas pris en compte. Il n'en est pas de même pour les animaux qui présentent tous des fonctionnalités intéressantes et néanmoins quelques handicaps.

La première caractéristique d'intérêt des animaux concerne leur appareil locomoteur qui leur permet, pour un grand nombre d'espèces (les seuls déplacements terrestres étant ici pris en considération), de se mouvoir sur pratiquement toutes les terres émergées de la planète, quelle qu'en soit la nature, alors que les meilleurs véhicules fabriqués par l'homme n'ont pas accès à plus de la moitié de ces terres émergées (cf. 3. Le robot mobile). Ainsi, les invertébrés non volants multipodes, les animaux qui rampent, les mammifères quadrupèdes, les oiseaux bipèdes dans leur phase de marche ou de course offrent une immense variété de modèles performants pour se déplacer avec souplesse et dextérité, tant par la structure anatomique et physiologique du système locomoteur que par la gestion automatique de ce dernier par l'animal. Cela permet des stratégies et des tactiques de progression éminemment variées et efficaces (par exemple, un cheval a toute une série d'allures permettant d'obtenir le pas, l'amble, le trot, le galop).

Un second centre d'intérêt tient à l'intelligence des animaux que l'on cerne encore moins bien que celle de l'homme, soit par défaut d'intérêt pour le problème, soit parce que les animaux ne

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parlent pas et que l'on doit les comprendre par la seule observation de leurs mœurs et leurs comportements physiques.

Dans le domaine de l'intelligence, pour des applications robotiques, on divise les animaux en deux grandes catégories : ceux qui n'ont que quelques cellules nerveuses en guise de cerveau, comme l'essentiel des insectes, et qui ne peuvent donc agir que par automatismes d'origine majoritairement génétique ; ceux dont le cerveau se rapproche plus ou moins de celui de l'homme et qui seraient donc peu ou prou aptes à tenir des raisonnements.

La première catégorie est tout à fait intéressante car l'insecte grégaire, aussi bien que les insectes en essaim, survit et se reproduit sans problème dans un environnement favorable. De plus, pour les derniers, ils arrivent à construire des nids complexes et sophistiqués qui exigent une collaboration intra-essaim « intelligente ». Ces insectes nous offrent donc un autre moyen que le raisonnement cartésien pour réaliser des tâches où l'intelligence semble nécessaire (intelligence collective résultant de la double interaction individu-environnement et individu-individu). On essaie avec l'ordinateur d'imiter ces situations (vie artificielle). Ainsi, le biomimétisme, qui est très lié à la biorobotique, mais qui comporte aussi d'autres aspects, devient un domaine de recherche actif.

En ce qui concerne la seconde catégorie, c'est-à-dire les animaux possédant un cerveau d'un certain volume, elle laisse en suspens de nombreuses questions. Pourquoi un chimpanzé réputé avoir un cerveau qui fait 98 % de celui de l'homme est-il inapte à « jouer » le robot ? Pourquoi un chien est-il plus intelligent qu'un singe en ce qui concerne la compréhension du langage parlé ? Pourquoi la domestication ne peut-elle se faire que par le jeu de la récompense et de la punition ?, etc. Si on pouvait répondre à ces questions, la biorobotique en profiterait à coup sûr.

Dans la série des handicaps présentés par les animaux, eu égard aux objectifs de la biorobotique, on peut relever :

– le fait que les tâches qu'ils réalisent sont toutes orientées par le désir inné et inconscient de la survie. Ainsi, il est exceptionnel qu'une tâche naturelle, c'est-à-dire initiée par le comportement de survie d'un animal, devienne pour les hommes une tâche intéressante à imiter pour un objectif humain de transformation du monde ou de service. On peut mettre à part les tâches de déplacement ou de transport des animaux domestiqués qui restent toujours guidées par l'homme ;

– le fait que la demande de l'homme en matière de robot se porte principalement sur des tâches de manipulation. Les organes de saisie des animaux sont surtout la gueule, associée quelquefois aux pattes, et sont à l'évidence loin des performances manipulatoires du système humain bras-main (excepté pour les singes).

Les roboticiens s'intéressent beaucoup aux animaux, d'une part pour comprendre et éventuellement imiter les phénomènes de locomotion et d'intelligence collective (cf. encadré Intelligence artificielle collective et robotique), mais aussi parce que les robots animaloïdes ou zoomorphes peuvent rendre des services et trouver des marchés que ne pourraient satisfaire des humanoïdes. Ainsi, dans le domaine ludique, des robots-chien ou chat ou phoque ou autres ont vu le jour comme animaux de compagnie, malgré la faiblesse de leurs performances. Il y a même des robots-poisson. Ces types de robots ont aussi leur utilité dans l'enseignement de l'automatique et de la robotique ou de la conception des mécanismes.

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De même, certaines applications seront mieux satisfaites par exemple par un robot serpentiforme que par toute autre machine. Ainsi en est-il pour la détection de présence humaine sous des décombres suite à un tremblement de terre ou toute autre catastrophe. Un serpent peut s'introduire dans de petites anfractuosités et s'approcher des victimes.

La biorobotique des animaloïdes n'est donc pas à négliger. Cependant, il est clair que si tous les problèmes de l'humanoïde étaient résolus, ceux concernant l'imitation des animaux le seraient de facto. C'est pourquoi l'humanoïde a une si grande importance.

Problèmes de la conception de biorobots

La robotique souhaite faire des robots imitant les systèmes vivants. Se pose donc le problème de la place de ces derniers dans les moyens et principes généraux de conception d'un biorobot.

La question est très délicate car les réponses ne sont pas purement scientifiques et technologiques mais ont de grandes incidences éthiques.

L'allusion au vivant peut se décliner de quatre manières évidentes dans la création d'un robot :

– On peut penser transférer totalement la conception d'un robot des sciences mécaniques et automatiques, qui en ont eu jusqu'ici l'apanage, aux sciences biologiques et génétiques. On partirait alors d'une cellule vivante et on y introduirait le code génétique de ce qui devrait donner un robot ad hoc après le développement biologique. Si cette approche n'est pas encore techniquement réalisable, parce qu'on ne sait pas modifier à la demande un code génétique pour obtenir un effet complexe mais identifié et qu'il reste beaucoup d'autres verrous scientifiques à faire sauter, on ne peut nier que les progrès effectués en matière de clonage et de génétique permettent de penser que cette approche, sous son aspect purement objectif, pourrait réussir à long terme. La difficulté éthique relève de ce que le robot désiré, en cas de fabrication d'un humanoïde, devrait avoir certaines qualifications humaines. Pour l'instant, on ne saurait que condamner une telle tentative si elle était entreprise avant de maîtriser complètement l'ensemble de la phénoménologie qui y a trait. Mais la question pourrait se poser peut-être d'une manière moins lointaine en ce qui concerne des robots animaloïdes issus de cellules animales. Quoi qu'il en soit, l'éthique devra primer sur la technologie et on ne peut citer cette voie que pour mémoire.

– Ensuite, à l'opposé, et c'est ce qui est essentiellement recherché, il peut s'agir d'une machine utilisant des matériaux non vivants qui ferait allusion au vivant en imitant correctement certaines de ses fonctionnalités et comportements complexes.

– On peut, en troisième lieu, évoquer l'utilisation d'organes ou matériaux issus du vivant qu'on grefferait sur une structure mécatronique de robot afin de la doter de meilleures performances. Cette voie n'est pas à exclure comme le montrent les travaux sur les ordinateurs biologiques ou la greffe de cellules nerveuses sur des substrats de semiconducteurs. Cependant, il s'agit aussi de réussites potentielles à long terme.

– Enfin, à l'opposé de la précédente direction, on peut tenter de greffer des organes mécatroniques sur des structures vivantes. Cette approche est connue sous le nom de bionique. La robotique n'est qu'un de ses aspects. Elle existe déjà sous la forme d'implants artificiels comme les pacemakers, les implants cochléaires ou les prothèses de hanches etc. En

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robotique, elle concerne aujourd'hui les prothèses complexes, surtout de bras, mains et jambes et les orthèses, systèmes externes quelquefois motorisés et destinés à suppléer les capacités défaillantes en matière de marche. Un des aspects les plus difficiles à résoudre pour les prothèses est celui de l'interface homme-prothèse. Le but ultime de l'appareillage consiste à faire en sorte que l'homme ne pense plus à sa prothèse mais l'utilise comme si elle était un membre naturel. La caricature la plus forte de cette approche, que l'on rencontre dans les fictions est « l'homme bionique », homme greffé un peu partout et jusque dans le cerveau, de moyens artificiels d'action, de communication et d'aides à la réflexion.

En définitive, les voies suivies en ce début de xxie siècle pour créer de nouveaux robots restent essentiellement la deuxième et la quatrième pour des applications particulières. La première, pour le moment, est à exclure (sauf peut-être pour la fabrication d'organes vivants, à l'exclusion d'individus) et la troisième souffre encore d'un manque de collaboration entre biotechnologues ou médecins et roboticiens pour s'enclencher véritablement.

Le degré d'imitation de l'homme dans la conception d'humanoïdes

Contrairement à ce que l'on entend dire parfois, d'une part, on ne sait pas faire du vivant avec un matériau non vivant (matériau amorphe), et, d'autre part, le robot humanoïde ou androïde que l'on cherche à réaliser n'est pas la reproduction d'un homme véritable, n'est pas l'homme artificiel. Si on peut quelquefois ressentir l'impression contraire c'est uniquement parce que, par principe, la recherche veut toujours aller plus loin ; mais on reste et restera longtemps à des années lumière de ce point de fuite.

Par ailleurs, dans le domaine des usages des robots, toute analyse montre qu'on n'a pas besoin d'un véritable homme artificiel pour pleinement satisfaire les applications les plus exigeantes. C'est d'ailleurs une chance, car on imagine le casse-tête éthique et pratique que représenterait l'irruption d'un homme artificiel dans nos sociétés (sujet classique des romans de science-fiction). Le robot restera une machine qu'on pourra supprimer sans autre état d'âme que celui, éventuel, de la facture à payer.

Dans ces conditions, la question qui se pose est de déterminer quel est le niveau d'imitation de l'homme vivant recherché dans la conception du robot.

Pour le cerner, il suffit d'examiner ce qui est exigé pour « rendre un bon service » en général, ce service s'entendant comme un service physique, matériel (dont un sous-ensemble concerne des services ou facilités mentaux déjà fournis en partie par l'informatique).

Un « bon service » exige d'abord la capacité physique de le rendre dans le milieu ou l'environnement adéquat. Pour illustrer cette notion, considérons un ordinateur qui disposerait d'algorithmes produisant la même intelligence que celle d'un cerveau humain (pure hypothèse). Il ne pourra jamais disposer des assiettes sur votre table parce qu'il n'a pas les fonctionnalités correspondantes. Cette capacité physique qu'on nomme dextérité s'exprimera par une structure de machine qui pourra se déplacer dans l'environnement humain choisi, sans trop de problèmes, et qui pourra faire les gestes correspondant à l'exécution des tâches requises pour le service envisagé. On comprend alors qu'une structure anatomique et articulée comparable à celle de l'homme doit avoir la potentialité de dextérité adéquate. Le mot « comparable » pose le problème du choix pratique de la structure, par exemple en nombre de degrés de liberté. Doit-on aller pour un bras avec une main jusqu'aux 52 degrés de liberté du bras humain avec sa main ? Techniquement c'est très difficile (nécessité d'une présence de

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52 actionneurs qui engendrent des problèmes de poids, d'énergie, de volume, de contrôle, de coût etc.). Se pose donc le problème de l'optimisation entre la minimisation du nombre de degrés de liberté et la dextérité souhaitée. Dans les réalisations existantes, les robots humanoïdes complets (corps, bras et jambes) n'ont pas plus de 30 à 40 degrés de liberté au total. Et leur évaluation en termes de dextérité n'est pas vraiment effectuée.

La construction motorisée satisfaisant « sur le papier » la dextérité recherchée, celle-là doit maintenant être mise en œuvre. Ceci signifie établir un système de commande qui meut correctement la structure. Cette phase se fait d'abord en simulation, et l'on constate que, même pour une marche « en aveugle », il faut ajouter sur la structure des capteurs détectant les interactions sol-structure pour obtenir ne serait-ce que l'équilibre, par exemple. On constate aussi que la qualité de la marche sera limitée et que, par exemple, le robot ne pourra pas courir et devra se limiter à une marche cinématique, voire statique. Pourra-t-il, autre exemple, monter un escalier et sauter à pieds joints ? On va donc constater les limites de performances dans les déplacements et gestes nécessaires aux services visés, et vérifier que ces performances sont suffisantes. Autrement il faut recommencer la conception à partir de zéro. Cette phase correspond à la vérification de la dextérité du robot mais aussi à celle de son habileté. En effet, s'il lui faut dix minutes pour franchir dix mètres en ligne droite ou pour saisir un objet, il est clair que sa dextérité peut être suffisante mais que son manque d'habileté le fera rejeter.

Si le robot s'avère suffisamment habile dans ses essais de mise en œuvre « en aveugle » (c'est-à-dire piloté par un opérateur qui voit l'environnement d'évolution de la machine et lui évite les erreurs d'orientation), l'étape suivante consiste à tenter de lui donner la capacité d'agir seul, c'est-à-dire de lui donner une intelligence de base. L'atteinte de ce but passe par la réalisation de deux objectifs :

– tout d'abord, il faut doter la machine d'un système d'information sur l'environnement, un système sensoriel. Les sens qui permettent à l'homme de se situer et de progresser dans la bonne direction sont principalement la vision et le sens haptique, sans exclure l'audition.

– atteindre l'information pertinente est une chose, mais il faut la comprendre en relation avec ce que l'on a à faire. Il faut donc un système d'interprétation des informations en relation avec deux objectifs : l'exécution correcte du mouvement immédiat, et auparavant, la sélection du bon mouvement en relation avec la progression de la tâche impartie. C'est ici qu'interviennent les algorithmes dits intelligents dont il faut doter le robot.

Ce résumé de la genèse d'un humanoïde permet de mieux comprendre la philosophie de la biorobotique. On voit bien qu'un tel robot peut rendre des services aux humains, services habituellement exécutés par ceux-là. On voit aussi qu'on reste très loin d'un homme artificiel, au niveau des capacités tant physiques que mentales. Certes, du coté de l'intelligence, bien des progrès seront faits rapidement. Par exemple, dans la qualité de l'exécution du service, on sait échanger avec le robot par la simple parole et même par le geste, et il est capable de détection d'intention pour exécuter certains gestes ; on sait faire exprimer au robot des émotions par modifications des traits de ce qui lui sert de visage ; on sait le doter de raisonnements logiques pour adapter certains comportements ou décisions d'action ; on sait le faire collaborer avec l'homme ou avec d'autres robots pour exécuter ensemble certaines tâches... et beaucoup d'autres possibilités sont ou seront rapidement disponibles.

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Aussi, même si on reste très loin des performances espérées, on peut certainement avancer que le robot de service, principalement sous sa forme humanoïde, est sur le point d'envahir la société comme le font aujourd'hui les automobiles ou les ordinateurs portables.

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